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Chapitre 18

PROBABILITÉS

I Espaces probabilisés
1 Univers
Définition 1 Une expérience aléatoire est une expérience qui, renouvelée dans des conditions identiques, ne donne
pas le même résultat à chaque fois. L’univers associé à une expérience aléatoire est l’ensemble des résultats
possibles (ou issues ou réalisations) de cette expérience.

Par exemple, soit l’expérience consistant à lancer un dé à six faces. Les résultats possibles de cette expérience sont 1,
2, 3, 4, 5 et 6 et l’univers associé est Ω = {1, 2, 3, 4, 5, 6}. Si on lance deux dés l’un après l’autre et que l’on considère
le couple de chiffres obtenus, l’univers associé est Ω = {1, 2, 3, 4, 5, 6}2 .

En première année, on supposera toujours que l’univers est fini.

2 Événements
Définition 2 Soit Ω un univers fini.
Un événement est une partie de Ω, c’est-à-dire un élément de P(Ω).
Un événement élémentaire est un singleton de Ω, c’est-à-dire un événement de cardinal 1.
L’événement impossible est l’ensemble vide. L’événement certain est Ω.
Si A est un événement, l’événement contraire à A est A.
Si A et B sont deux événements, l’événement A et B est A ∩ B et l’événement A ou B est A ∪ B. On dit que A et
B sont incompatibles si A ∩ B = ∅. On dit que A implique B si A ⊂ B.
Un système complet
[ d’événements est une famille (Ai )i∈I d’événements de Ω deux à deux disjoints et dont la
réunion est Ω : Ai = Ω et Ai ∩ Aj = ∅ si i 6= j.
i∈I

Reprenons l’expérience consistant à lancer un dé à six faces. Les événements “Obtenir 1”, . . ., “Obtenir 6” sont les
singletons {1}, . . . , {6} : ce sont les événements élémentaires de l’expérience. L’événement P : “Obtenir un nombre
pair” est l’ensemble {2, 4, 6}, l’événement I: “Obtenir un nombre impair” est l’ensemble {1, 3, 5}, c’est l’événement
contraire à P . La famille (P, I) est un système complet d’événements de Ω.

3 Probabilité
Définition 3 Une probabilité sur un univers fini Ω est une application P de P(Ω) dans [0, 1] telle que P (Ω) = 1
et, pour toutes parties disjointes A et B de Ω, P (A ∪ B) = P (A) + P (B).
Un espace probabilisé fini est un couple (Ω, P ) où Ω est un univers fini et P une probabilité sur Ω.

Proposition 1
(i) Pour tout couple (A, B) d’événements, P (A ∪ B) = P (A) + P (B) − P (A ∩ B).
(ii) Pour tout événement A, P (A) = 1 − P (A).
(iii) P (∅) = 0.
(iv) P est croissante : si A et B sont deux événements tels que A ⊂ B, alors P (A) 6 P (B).
!
[ X
(v) Si (Ai )i∈I est une famille d’événements deux à deux disjoints, alors P Ai = P (Ai ).
i∈I i∈I
X
(vi) Si (Ai )i∈I est un système complet d’événements, alors P (Ai ) = 1.
i∈I

1
X
(vii) Pour tout événement A, P (A) = P ({ω}).
ω∈A

Démonstration :
(i) On a A ∪ B = A ∪ (B \ A) (union disjointe) donc P (A ∪ B) = P (A) + P (B \ A), et B = (B \ A) ∪ (A ∩ B) (union disjointe) donc
P (B) = P (B \ A) + P (A ∩ B), et le résultat s’ensuit.
(ii) A ∪ A = Ω (union disjointe), donc P (A) + P (A) = P (Ω) = 1.
(iii) P (∅) = P (Ω) = 1 − 1 = 0.
(iv) B = A ∪ (B \ A) (union disjointe) donc P (B) = P (A) + P (B \ A) > P (A).
(v) Récurrence immédiate si I est fini. Sinon, seul un nombre fini des Ai est non vide.
(vi) Conséquence immédiate de (v).
[
(vii) A = {ω} et (v). 
ω∈A

Ainsi l’application P est entièrement déterminée par les images des singletons : si on connaı̂t la probabilité des
événements élémentaires, on peut calculer la probabilité de tous les événements.
Définition 4 Une distribution de probabilité sur un ensemble E est une famille de réels positifs indexée par E
et de somme 1.
Si P est une probabilité sur Ω, alors la famille (P ({ω})ω∈Ω est une distribution de probabilité sur Ω.

4 Équiprobabilité
Définition 5 Soit (Ω, P ) un espace probabilisé fini. On dit que P est une probabilité uniforme si les événements
élémentaires sont équiprobables, c’est-à-dire s’ils ont tous la même probabilité :
1
∀ ω ∈ Ω, P ({ω}) = .
card Ω
Dans ce cas, la probabilité d’un événement A est
card A nombre de résultats favorables
P (A) = = .
card Ω nombre de résultats possibles
Les calculs de probabilités se ramènent alors à des problèmes de dénombrement.

Exercice 1 On tire sans remise cinq cartes d’un jeu de 32. Quelle est la probabilité d’obtenir quatre as ? D’obtenir
au moins un as ?

Exercice 2 Dans une classe de n élèves, quelle est la probabilité que deux élèves aient leur anniversaire le même jour
? On ne tiendra pas compte des années bisssextiles.

II Conditionnement et indépendance
1 Probabilités conditionnelles
Définition 6 Soient A et B deux événements tels que P (A) > 0. La probabilité conditionnelle de B sachant A
est le réel noté P (B|A) ou PA (B) défini par :
P (A ∩ B)
P (B|A) = PA (B) = .
P (A)
Proposition 2 L’application PA : B 7→ PA (B) est une probabilité sur Ω.
Démonstration :
P (A ∩ Ω) P (A)
Pour tout B ∈ P(Ω) on a 0 6 P (A ∩ B) 6 P (A), donc 0 6 PA (B) 6 1. De plus, PA (Ω) = = = 1. Enfin, si B1 et B2 sont
P (A) P (A)
P (A ∩ (B1 ∪ B2 )) P ((A ∩ B1 ) ∪ (A ∩ B2 )) P (A ∩ B1 ) + P (A ∩ B2 )
disjoints, alors B1 ∩ A et B2 ∩ A aussi, donc PA (B1 ∪ B2 ) = = = =
P (A) P (A) P (A)
P (A ∩ B1 ) P (A ∩ B2 )
+ = PA (B1 ) + PA (B2 ). 
P (A) P (A)

Exercice 3 Une famille a deux enfants.


1) Quelle est la probabilité que les deux enfants soient des garçons ?
2) Quelle est la probabilité que les deux enfants soient des garçons sachant que l’aı̂né est un garçon ?
3) Quelle est la probabilité que les deux enfants soient des garçons sachant qu’il y a au moins un garçon ?

2
2 Formule des probabilités composées
Proposition 3 Soit (Ai )16i6n une famille d’événements. Si P (A1 ∩ . . . ∩ An−1 ) 6= 0, alors :

P (A1 ∩ . . . ∩ An ) = P (A1 ) × P (A2 |A1 ) × P (A3 |A1 ∩ A2 ) × . . . × P (An |A1 ∩ . . . ∩ An−1 ).


Démonstration :
Notons d’abord que toutes les probabilités conditionnelles qui interviennent dans la formule sont bien définies car, puisque A1 ∩. . .∩An−1 ⊂
A1 ∩ . . . ∩ An−2 ⊂ . . . ⊂ A1 , on a P (A1 ) > . . . > P (A1 ∩ . . . ∩ An−2 ) > P (A1 ∩ . . . ∩ An−1 ) > 0.
On démontre maintenant la formule par récurrence. Pour n = 2, elle s’écrit P (A1 ∩ A2 ) = P (A1 ) × P (A2 |A1 ) qui est une conséquence
immédiate de la définition de P (A2 |A1 ).
Soit n > 2. Supposons la formule vraie au rang n. Soit (Ai )16i6n+1 une famille d’événements telle que P (A1 ∩ . . . ∩ An ) 6= 0. Alors
P (A1 ∩ . . . ∩ An+1 ) = P (A1 ∩ . . . ∩ An ) × P (An+1 |A1 ∩ . . . ∩ An ) = P (A1 ) × P (A2 |A1 ) × P (A3 |A1 ∩ A2 ) × . . . × P (An |A1 ∩ . . . ∩ An−1 ) ×
P (An+1 |A1 ∩ . . . ∩ An ) par hypothèse de récurrence. La formule est donc vraie au rang n + 1, et la récurrence est établie. 

Exercice 4 Une urne contient quatre boules blanches et trois boules noires. On y tire une à une et sans remise trois
boules. Quelle est la probabilité que les deux premières soient blanches et la troisième noire ?

3 Formule des probabilités totales


Proposition 4 Soit (A1 , . . . , An ) un système complet d’événements de probabilités non nulles. Alors, pour tout
événement B :
Xn
P (B) = P (B|Ai )P (Ai ).
i=1

n n n n
!
[ [ X X
Démonstration : B = B ∩ Ω = B ∩ Ai = (B ∩ Ai ) (union disjointe), donc P (B) = P (B ∩ Ai ) = P (B|Ai )P (Ai ). 
i=1 i=1 i=1 i=1

Remarques :
1) En pratique, on pourra écrire la formule même si certains Ai ont une probabilité nulle en posant dans ce cas, par
convention, P (B|Ai )P (Ai ) = 0.
2) En particulier, si A est un événement, alors la famille (A, A) est un système complet d’événements, donc pour tout
événement B on a :
P (B) = P (B|A)P (A) + P (B|A)P (A).

Exercice 5 On dispose de trois dés non pipés ayant respectivement 6, 10 et 20 faces. On choisit un dé au hasard et
on le lance. Calculer la probabilité d’obtenir un 6.

4 Formules de Bayes
Proposition 5 Si A et B sont deux événements tels que P (A) > 0 et P (B) > 0, alors :

P (B|A)P (A)
P (A|B) = .
P (B)
Démonstration : P (A|B)P (B) = P (A ∩ B) = P (B|A)P (A). 

Corollaire 6 Si (Ai )16i6n est un système complet d’événements de probabilités non nulles et que B est un événement
de probabilité non nulle, alors, pour tout j ∈ {1, . . . , n} :

P (B|Aj )P (Aj )
P (Aj |B) = n .
X
P (B|Ai )P (Ai )
i=1

Démonstration : Conséquence immédiate de la proposition précédente et de la formule des probabilités totales. 

Exercice 6 On dispose de trois dés non pipés ayant respectivement 6, 10 et 20 faces. On choisit un dé au hasard et
on le lance. On obtient un 6. Quelle est la probabilité d’avoir lancé le premier dé ?

Exercice 7 On considère un test de dépistage d’une maladie présente dans la population dans la proportion d’une
personne malade sur 10000. Si la personne testée est malade, le test est positif dans 99% des cas. Si elle n’est pas
malade, il est positif dans 0,1% des cas. Que penser de ce test ?

3
5 Indépendance
Définition 7 Deux événements A et B sont indépendants si P (A ∩ B) = P (A) × P (B).

Par exemple, si on tire une carte d’un jeu de 32 cartes, les événements A : “La carte tirée est un as” et B : “La carte
tirée est un pique” sont indépendants puisque P (A) = 1/8, P (B) = 1/4 et P (A ∩ B) = 1/32.

Proposition 7 Si P (B) > 0, alors A et B sont indépendants si et seulement si P (A|B) = P (A).


P (A ∩ B)
Démonstration : P (A ∩ B) = P (A) × P (B) ⇔ = P (A) ⇔ P (A|B) = P (A). 
P (B)

Ainsi, dire que deux événements sont indépendants revient à dire que la réalisation de l’un d’eux ne dépend pas de la
réalisation de l’autre.

Proposition 8 Si deux événements A et B sont indépendants, alors A et B le sont aussi.


Démonstration :
L’idée est d’écrire que A = (A ∩ B) ∪ (A ∩ B). Puisque c’est une union disjointe on a
P (A) = P (A ∩ B) + P (A ∩ B) = P (A)P (B) + P (A ∩ B),
donc
P (A ∩ B) = P (A) − P (A)P (B) = P (A)(1 − P (B)) = P (A)P (B)
et donc A et B sont indépendants. 

Définition 8 Soit (Ai )16i6n une famille d’événements. On dit que A1 , . . . , An sont :

(i) indépendants deux à deux si, pour tout i 6= j, P (Ai ∩ Aj ) = P (Ai ) × P (Aj ).
!
\ Y
(ii) (mutuellement) indépendants si, pour toute partie I de {1, . . . , n}, P Ai = P (Ai ).
i∈I i∈I

Par exemple, trois événements A1 , A2 et A3 sont indépendants si :

P (A1 ∩ A2 ) = P (A1 ) × P (A2 )


P (A1 ∩ A3 ) = P (A1 ) × P (A3 )
P (A2 ∩ A3 ) = P (A2 ) × P (A3 )
P (A1 ∩ A2 ∩ A3 ) = P (A1 ) × P (A2 ) × P (A3 ).

L’indépendance implique l’indépendance deux à deux (il suffit de considérer les parties de {1, . . . , n} à deux éléments),
mais la réciproque est fausse.
Par exemple, considérons le lancer successif de deux dés équilibrés et les événements A : “Le premier dé est pair”, B :
1
“Le second dé est pair”, et C : “La somme des deux dés est paire”. Alors on a facilement P (A) = P (B) = P (C) = ,
2
1 1 1
P (A ∩ B) = = P (A)P (B), P (A ∩ C) = = P (A)P (C) et P (B ∩ C) = = P (B)P (C) : les événements A, B et
4 4 4
1
C sont indépendants deux à deux. En revanche, on a A ∩ B ⊂ C donc P (A ∩ B ∩ C) = P (A ∩ B) = alors que
4
1
P (A)P (B)P (C) = : A, B et C ne sont pas indépendants.
8
Proposition 9 Si A1 , . . . , An sont indépendants, alors B1 , . . . , Bn , où Bi = Ai ou Ai , le sont aussi.

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