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Ti661 - Robotique
Conception, modélisation
et commande en robotique
III
Cet ouvrage fait par tie de
Robotique
(Réf. Internet ti661)
composé de :
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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Robotique
(Réf. Internet ti661)
Étienne DOMBRE
Directeur de Recherche Émérite du CNRS au LIRMM, UMR 5506 Université
Montpellier-CNRS
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VI
Conception, modélisation et commande en robotique
(Réf. Internet 42398)
SOMMAIRE
Conception, modélisation et commande des robots à tubes concentriques : vers des S7767 71
applications médicales
Robots parallèles S7768 77
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VII
Les voiliers robotisés S7815 119
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Conception, modélisation et commande en robotique
(Réf. Internet 42398)
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1– Conception Réf. Internet page
Conception, modélisation et commande des robots à tubes concentriques : vers des S7767 71
applications médicales
Robots parallèles S7768 77
2– Modélisation et commande
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Référence Internet
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Les exosquelettes
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Enfin, une réflexion sur les challenges et perspectives du domaine est pré-
sentée, abordant les nombreux aspects qui demeurent à considérer pour
améliorer ces dispositifs : adaptation au corps et maîtrise de l’interaction et de
l’interfaçage physique, transparence des systèmes, partage du contrôle avec
l’opérateur et respect des intentions motrices (en lien avec leurs détections et
avec une meilleure compréhension du système sensorimoteur humain),
gestion de la sécurité et simplicité d’utilisation. En effet, bien qu’un certain
nombre de verrous technologiques aient été levés au cours des dernières
années, la révolution dans la mise au point et dans l’adoption massive des
exosquelettes passera nécessairement par la résolution de ces challenges
scientifiques multidisciplinaires et complexes.
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capacités de déplacement de leurs porteurs. Vient ensuite loppés par l’équipe du professeur Vukobratovic et testés par la
l’exosquelette « pedomotor » de l’américain Leslie C. Kelley décrit suite [12], et les compétences technologiques acquises permirent
dans un brevet de 1917 [4] qui exploitait une architecture de à cette même équipe de développer l’un des premiers exosque-
« ligaments » externes (s’apparentant à des câbles) courants le lettes actifs de bras à motorisation électrique, le « Active Arm
long des membres inférieurs afin de pouvoir minimiser la fatigue Orthosis » pour l’assistance à la dystrophie (contrôlée par joystick)
du porteur et augmenter sa vitesse de déplacement, ce à l’aide en 1982. Au début des années 1970, une orthèse de bras élec-
d’une machine à vapeur actionnant ces ligaments, et placée dans trique à 7 degrés de libertés actifs, le « Rancho arm » (aussi
le dos de l’utilisateur. appelé « Golden arm »), est développée au Rancho Los Amigos
Figure 1 – De gauche à droite : illustration du brevet de N. Yagin (1890) ; GE Hardiman (1967) ; exosquelette du Mihailo Pupin Institut
de Belgrade (1969) ; exosquelette de l’université du Wisconsin (1971) ; systèmes d’exosquelettes maître-esclave pour la rééducation
de la marche de P. Rabischong (1976)
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Les années 1990 vont voir se développer un certain nombre de témoignent d’une évolution de ce domaine de recherche par rapport
plates-formes d’exosquelettes « membre complet » et « corps à ce qu’il a pu être au XXe siècle.
complet » se mettre en place, avec une focalisation de la Dans la suite de cet article, nous allons donc d’abord proposer
recherche sur les problématiques de conception mécatronique une taxonomie permettant d’organiser et de distinguer plus fine-
(rapport poids/puissance, mobilité et optimisation des capacités ment ce domaine des exosquelettes, puis dresser un état de l’art
de force et de mouvement), ainsi que les problématiques d’action- des dispositifs existants pour les quatre différents types d’applica-
nement et de transmission. Cet effort collectif sur le développe- tion, pour finalement s’attacher à décrire les challenges et pers-
ment matériel va ainsi permettre de passer de machines pectives du domaine.
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donc en majorité constitués de segments rigides reliés entre eux par humaines et robotiques et de prévenir l’apparition de contraintes
une ou plusieurs liaisons rotoïdes, permettant de reproduire de incontrôlées (voir la section 4.2) mais peuvent être complexes à
façon approchée la cinématique du corps humain. Bien que ces arti- mettre en œuvre (complexification de la structure, risque de perte
culations rotoïdes à 1 degré de liberté (DDL) ne soient que des de contrôle à cause du sous-actionnement, etc.). La plupart des
approximations grossières des liaisons articulaires humaines (voir la structures exosquelettiques « fixes » (c’est-à-dire non portées ou
section 4.2 pour une introduction aux conséquences de ces approxi- revêtues, voir figure 2) utilisées pour la rééducation (ou dans de
mations cinématiques), elles suffisent à concevoir des structures plus rares cas pour l’assistance en industrie sur des postes fixes),
compatibles avec la biomécanique humaine. Plus rarement, cer- exploitent aussi des mécanismes supplémentaires externes verrouil-
taines structures s’affranchissent de la contrainte d’anthropomor- lables, motorisés ou non, possédant plusieurs DDL linéaires (simi-
phisme et emploient des liaisons linéaires « non naturelles » laires à des tables de positionnement cartésien à 3 DDL) placés au
(glissières) pour simplifier la conception d’articulations compatibles niveau de la structure de soutien posée au sol, afin de permettre un
avec les mobilités de groupes articulaires complexes du corps ajustement de la structure à la personne et un alignement des pre-
humain. C’est ainsi que plusieurs exosquelettes qui cherchent à maî- mières articulations de l’exosquelette avec le corps de l’opérateur.
triser finement les mouvements de l’épaule (liaison rotule à 3 DDL Parallèlement à ces structures rigides polyarticulées, se développent
pour la liaison gléno-humérale, elle-même articulée par les 2 DDL de depuis quelques années des structures alternatives souples (soft
l’omoplate par rapport à la cage thoracique et au tronc) utilisent des exoskeletons ou wearable suits) offrant plus de souplesse et d’apta-
liaisons linéaires annulaires (motorisées ou non) pour compenser bilité au corps humain. Un certain nombre de ces exosquelettes
les déplacements du centre de la liaison rotule de l’épaule et intera- souples sont conçus comme des vêtements moulants équipés de
gir ainsi avec les mobilités de l’omoplate. différents systèmes de capteurs et d’actionneurs intégrés (systèmes
de cellules pneumatiques gonflables, actionneurs filaires à base
En plus des articulations principales de ces structures, un certain d’alliages à mémoire de forme ou de film électropolymère rigidi-
nombre de DDL (généralement passifs, parfois verrouillables) fiable, actionnement déporté par des câbles cousus dans la combi-
peuvent être ajoutés en série ou en parallèle de la structure (au naison, etc.). Ces structures offrent l’avantage de la légereté et d’un
niveau des mécanismes de fixation de l’exosquelette au corps faible encombrement, mais offrent des capacités d’interaction phy-
humain), afin de maximiser l’alignement des articulations du robot sique et de contrôle réduites par rapport aux structures rigides
avec celles de l’opérateur, ou de permettre un ajustement des conventionelles (difficulté de modélisation de la cinématique,
dimensions des segments rigides du robot à celles de l’opérateur absence de centre de rotation défini, etc.).
(adaptation morphologique). L’ajout de ces DDL supplémentaires à
ces structures « non anthropomorphes » (figure 2) permet de limiter D’autres exosquelettes conservent, eux, une structure rigide
les conséquences des disparités cinématiques entre les structures mais utilisent des structures polyarticulées multiples et sous-
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ciblé au travers d’un ou de plusieurs points d’interaction :
Cible corporelle Membre(s) inférieur(s)
de l’interaction Membre(s) supérieur(s) • les exosquelettes à contacts multiples sont principalement
Corps complet utilisés pour interagir finement avec le corps de l’opérateur
dans son espace articulaire ;
Type de structure Fixe • les exosquelettes à contact unique (type « manipulandum
Embarquée/revêtue embarqué ») sont destinés à interagir principalement avec
Autoportée l’environnement, sous le contrôle du sujet et dans l’espace de
la tâche.
Cinématique Anthropomorhe
Non anthropomorphe Ce dernier type englobe notamment les différentes structures
destinées à améliorer l’ergonomie au travail d’opérateurs, en
Interfaçage avec le corps Multicontacts empêchant l’adoption de mauvaises postures ou en limitant la
Point de contact unique fatigue musculaire et articulaire par la reprise de tout ou partie du
poids d’outils ou d’objets lourds, voire de segments du corps,
Technologie Structure passive comme les bras (cas d’opérateurs devant maintenir les bras en
d’actionnement Électrique l’air pendant une durée prolongée). De plus en plus de structures
Hydraulique exosquelettiques passives (sans motorisation) dérivées des sys-
Pneumatique tèmes de steady-cam (dispositif de compensation du poids de la
caméra à l’aide d’un bras articulé à ressort monté sur un plastron
Condition de l’opérateur Sujet sain/asymptomatique et utilisé par les opérateurs caméras pour stabiliser la prise de vue
Sujet avec handicap partiel/ et limiter la fatigue des bras de l’opérateur en reprojetant le poids
chronique de la caméra sur le dos de ce dernier) sont proposées aux opéra-
Sujet avec handicap récupérable teurs manipulant des outils ou charges lourdes à bout de bras.
Sujet avec handicap non Ces structures (comparables à des versions embarquées des équi-
récupérable libreurs de gravité ou des cobots industriels de compensation du
poids), de par leur cahier des charges, se contentent ainsi d’être
Partage de la commande Passif fixées au poignet de l’opérateur et à son tronc ou à sa taille (ce
Actif qui leur permet de ne pas avoir à reproduire finement la cinéma-
Passif partiel/actif aidé tique humaine).
De passif vers actif L’interfaçage avec le corps humain ajoute une complexité sup-
plémentaire à la cinématique de l’exosquelette : la nécessité pour
Niveau de contrôle Contrôle de tâches la structure d’être « ajustable » aux variations morphologiques
Contrôle de mouvements/d’actions interindividuelles. En effet, la variabilité humaine est très impor-
motrices tante et les valeurs anthropométriques (taille de l’individu, lon-
gueur de segments interarticulaires, diamètre des membres)
Détection de l’intention Directe peuvent beaucoup varier entre différents types de populations.
Indirecte Au-delà des mécanismes de fixation plus ou moins sophistiqués
(par l’utilisation de DDL ou de pièces déformables dans les méca-
Captation des intentions Actions corps opérateur hors nismes d’attaches par exemple), plusieurs structures exosqueletti-
motrices exosquelette ques utilisent des DDL supplémentaires verrouillables (glissières
Signaux physiologiques bloquables) afin de permettre d’ajuster les longueurs des seg-
Précurseurs comportementaux ments de l’exosquelette à la morphologie de son utilisateur. Cette
du mouvement contrainte peut toutefois complexifier rapidement la structure en
Décodage des forces d’interaction impactant la répartition de l’actionnement : l’actionneur d’une arti-
culation montée à l’extrémité d’un segment réglable devra en
effet être placé entre ce mécanisme d’ajustement et la fixation au
actionnées (similaires aux « robot serpents » constitués de multi- corps, ou bien un système de transmission tolérant le déport
ples articulations rotoïdes empilées et sous-actionnées par un devra être employé. Ces contraintes d’ajustement morphologique
ensemble de câbles traversants) afin de mieux épouser la cinéma- ne concernent toutefois que les exosquelettes possédant une
tique et morphologie humaine et de contourner le problème du structure « anthropomorphe » et à contacts multiples qui
centre de rotation fixe des liaisons rotoïdes standard qui n’est pas cherchent à reproduire la cinématique humaine et à interagir avec
adapté aux mobilités de certaines articulations humaines (cas du tous les segments intermédiaires du membre.
groupe épaule/omoplate). Enfin, comme il sera détaillé plus précisément dans la sec-
Enfin, quelques structures exploitent aussi des mécanismes tion 4.2, bien que des solutions cinématiques aient été proposées
parallèles traversants (dans lesquels s’insèrent les segments de par plusieurs équipes de recherche, l’interfaçage soulève encore
membre) afin de s’interfacer avec certaines articulations de type un grand nombre de problèmes concernant la maîtrise des
« rotulées » comme la cheville ou le poignet. échanges physiques entre le corps humain et la structure méca-
nique, notamment en raison des inévitables disparités cinéma-
tiques entre ces chaînes qui genèrent des phénomènes
2.1.1.4 Interfaçage avec le corps
d’hyperstatisme, eux-mêmes responsables de l’apparition de
Les exosquelettes reprennent généralement la cinématique du forces et de couples non contrôlés sur le corps – souvent fragile –
(ou des) membre(s) humain(s) avec le(s)quel(s) il sont destinés à des utilisateurs.
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■ Actionnement électrique
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l’humain, naturellement rapides. Plusieurs technologies d’action- Il s’agit de la technologie d’actionnement la plus couramment
nement sont actuellement employées. utilisée (72 % des exosquelettes de membres inférieurs
l’emploient [32]) et ce pour plusieurs raisons : les actionneurs
2.1.2.1 Technologies d’actionnement électriques, bien que possédant une densité énergétique moyenne
(100-200 W/kg [33]), offrent des vitesses de déplacement élevées,
Le choix de la technologie d’actionnement d’un exosquelette se sont faciles à contrôler de façon précise (vitesse, position) avec
fait généralement en considérant différents facteurs critiques : les des algorithmes de commande linéaire (contrairement aux action-
ratios poids/puissance et encombrement/puissance, la robustesse, neurs hydrauliques et pneumatiques notamment) et sont faciles à
la consommation électrique, la bande passante, les chaînes de mettre en place (simplicité de la mise en œuvre de leur alimenta-
transmission et d’alimentation, ainsi que les approches de com- tion par câble électrique). Les avancées récentes dans le domaine
mandes associées à ces différentes technologies qui peuvent limi- des batteries (technologie lithium ion avec très haute densité de
ter les performances de l’ensemble. Une contrainte majeure est puissance) jouent aussi en faveur du choix de l’actionnement élec-
liée à la bande passante que le système devra exhiber, qui devra trique dans le développement de solutions embarquées. Parmi les
être compatible avec celle du corps humain, généralement définie différentes technologies disponibles, les moteurs à balais sont les
entre 2 et 5 Hz [27]. plus populaires en raison de leur ratio couple/poids élevé, d’une
robustesse importante et d’un niveau de bruit généré faible. La
■ Systèmes passifs technologie sans balais (qui offre une densité énergétique plus
forte, une consommation électrique plus faible, une plus grande
Il existe des exosquelettes simples dits « passifs » car n’exploi- longévité mais nécessite une électronique de commande plus
tant que des ressorts (parfois couplés à des amortisseurs) pour complexe) est toutefois de plus en plus utilisée. Cet actionnement
founir un couple d’assistance autour d’une position d’équilibre électrique est de plus en plus couplé à des systèmes mécaniques
prédéfinie, voire ajustable. On retrouve ces structures notamment élastiques (systèmes des actionneurs sériels élastiques (ASE) ou
dans le domaine de l’assistance au geste pour compenser le poids series elastic actuators (SEA)) afin d’offir une faible impédance de
de membres chez des patients atteints de faiblesses musculaires sortie, une grande réversibilité, une haute fidélité dans le contrôle
(objectif de l’exosquelette T-WREX [28]), et de l’augmentation des couples, mais aussi et surtout la capacité de stocker de l’éner-
(dans le sens de la limitation de la fatigue musculaire) dans le gie dans la structure élastique, ce qui permet de minimiser la
domaine industriel dans le but d’équilibrer le poids d’une charge consommation énergétique [34].
manipulée. Ces dispositifs s’apparentent à des « équilibreurs de
gravité » (comme utilisés sur les systèmes de steady-cam pour les ■ Actionnement pneumatique
opérateurs caméras) et exploitent des systèmes de bandes élas-
tiques ou de ressorts de traction avec différents mécanismes (par L’actionnement pneumatique offre un ratio poids/puissance très
exemple des mécanismes à quatre barres de type « parallélo- avantageux grâce à la grande légèreté de ses composants. L’autre
grammes » avec réglage du déport des points d’attaches) permet- avantage de cette technologie, en dehors d’un coût réduit, est
tant de régler la raideur apparente générée par le mécanisme au d’offrir une compliance naturelle, ce qui rend ce type d’actionneur
niveau de certaines articulations de l’exosquelette et d’adapter plus sûr et adapté à l’interaction avec un opérateur humain. Toute-
ainsi l’équilibrage au poids du bras du patient. Dans le cas de fois, leur mise en œuvre nécessite de stocker des gaz sous pression
l’augmentation, ces mêmes systèmes sont utilisés pour reprojeter et/ou de les produire à l’aide d’un système de compresseur, ce qui
(à l’aide de structures non anthropomorphes à contact unique) le limite les possibilités d’utilisation dans des systèmes embarqués.
poids d’un outil ou d’une charge manipulée à bout de bras, sur le Ces actionneurs se retrouvent principalement sous deux formes dif-
corps de l’opérateur ou sur le sol, en étant montés sur un férentes : vérins pneumatiques (qui offrent la possibilité d’un action-
exosquelette passif de jambes. Bien que certains dispositifs nement double effet) et actionneurs du type muscles pneumatiques
offrent la possibilité de débrayer le mécanisme à ressort, ces sys- (pneumatic muscles actuators ou PMA) qui, se comportant comme
tèmes peuvent se révéler difficile à installer et à mettre en œuvre des vérins simple effet, nécessitent un système de deux actionneurs
en raison de l’impossibilité de moduler l’assistance fournie et ne par articulation (montés comme des muscles agonistes-antago-
sont donc pas adaptés à des opérations de prise/dépôt de charges nistes). De par ses caractéristiques instrinsèques, ce type d’action-
mais plus à la manipulation d’une charge constante pour laquelle neur est régulièrement utilisé dans des structures destinées à la
les réglages de compensation ont été faits au préalable. Un cer- rééducation (comme le Rupert [35]) ou à l’assistance à patients (c’est
tain nombre d’exosquelettes actionnés exploitent ces mêmes sys- d’ailleurs la technologie employée initialement sur l’exosquelette du
tèmes élastiques afin de compenser mécaniquement le poids de Mihailo Pupin Institute [12]). Toutefois, en plus des problèmes liés à
certains segments mobiles du robot et soulager ainsi l’actionne- l’embarquement de l’énergie, la mise en œuvre complexe de la
ment principal (compensation mécanique de la gravité). Enfin, commande de ces actionneurs limitent leur utilisation. En effet, les
plusieurs exosquelettes de membres inférieurs possèdent des arti- limitations des performances des valves pneumatiques, les pro-
culations passives non motorisées utilisant des systèmes verrouil- blèmes de gestion des non-linéarités (notamment pour les PMA), de
lables de ressort ou ressort-amortisseur variables, utilisés afin l’élasticité et de l’actionnement antagoniste dans la commande,
d’emmagasiner l’énergie à certains moments et de la relâcher à rendent difficile le contrôle précis des déplacements et limitent gran-
d’autres moments afin de fournir une aide durant certaines dement la bande passante de ces systèmes.
phases du cycle de la marche (exosquelette quasi-passif du MIT
■ Actionnement hydraulique
[29] ou exosquelette de cheville à ressort verrouillable [30]) ce qui
peut permettre de minimiser le coût métabolique de certaines Il s’agit de la technologie d’actionnement la plus puissante
actions. capable de fournir simultanément des couples et des vitesses éle-
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Référence Internet
IN28
INNOVATION
Dispositif de caractérisation
mécanique pour la microrobotique 1
par Mehdi BOUKALLEL Emmanuel PIAT et Joël ABADIE
que les contraintes cinématique et mécanique, font micro-objets n’est plus gouverné par leur masse,
que les lois de comportements à l’échelle macrosco- mais par les effets de surface qui correspondent aux
pique ne sont qu’en partie applicables lors de la forces d’adhésion (tension de surface, forces élec-
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Référence Internet
IN28
INNOVATION
trostatiques...). La dynamique d’un tel environne- riaux diamagnétiques font partie de cette classe, la
ment micrométrique diffère donc totalement de celle lévitation passive d’aimants permanents dans
du monde métrique habituel. Qui plus est, ces forces un champ magnétostatique devient possible. Les
1
d’adhésion sont, dans le cas général, dépendantes du propriétés des matériaux diamagnétiques font que
type de milieu (milieu sec ou milieu liquide), varia- lorsque ces derniers sont soumis à un champ magné-
bles dans le temps (modification des conditions tique extérieur, ils réagissent en créant un champ
Dans les Techniques d’environnement, d’humidité, de température, etc.) magnétique contraire. Par conséquent, une force
de l’Ingénieur : et dans l’espace (types de matériaux en contact, répulsive est produite et ce quelle que soit la direc-
Aimants permanents. géométrie et rugosité locales). Dans ces conditions, tion du champ extérieur appliqué [5].
Matériaux et applica-
tions [D 2 100] de la compréhension et la prédiction du comportement
F. Leprince-Ringuet. dynamique des micro-objets nécessitent, au mini- Il existe communément trois configurations per-
mum, d’une part la connaissance de leurs positions mettant de réaliser la lévitation d’aimants perma-
dans le micromonde et d’autre part la connaissance nents à l’aide de matériaux diamagnétiques
de l’amplitude et du gradient des forces qui s’exer- (figure 1). Dans chacune des configurations possi-
cent sur eux. Ce n’est que grâce à ce type d’informa- bles, le matériau diamagnétique joue le rôle d’un
tion que l’on pourra à terme garantir le succès d’une agent répulsif dans le champ magnétique généré par
tâche en microrobotique. Dans cette optique, nous l’aimant en lévitation M2. Le matériau diamagnéti-
avons développé un nouveau type de capteur de que, étant fixe, exerce alors une force contraire au
micro- et nanoforces. Ce capteur repose sur le prin- sens de déplacement de l’aimant M2. Le module de
cipe de la lévitation passive diamagnétique à tempé- cette force augmente à mesure que M2 se rapproche
rature ambiante. Il permet de sustenter uniquement du matériau diamagnétique.
des objets de très faible masse (typiquement quel- L’intensité de la force de répulsion exercée varie en
ques dizaines de milligrammes), ce qui le rend fonction de deux paramètres :
« compatible » avec l’univers des micro-objets. La
lévitation diamagnétique possède un atout — l’intensité du champ magnétique appliqué ;
supplémentaire : elle est naturellement stable. On
parle alors de lévitation passive. Ce point est fonda- — la nature du matériau diamagnétique utilisé.
mental en microrobotique, car il signifie qu’on pourra
Le second paramètre est quantifié à l’aide de la
faire l’économie de capteurs habituellement
valeur de la susceptibilité diamagnétique χm du
nécessaires pour asservir en position l’objet qui
matériau :
lévite. Ce point se traduira par une simplification en
terme de complexité d’intégration et une diminution µr = 1 + χm
en terme de coût. Ces caractéristiques constituent
l’un des enjeux actuels en microrobotique. Le tableau 1 présente la valeur de χm pour certains
Dans un contexte plus large que la mesure de for- matériaux diamagnétiques. Plus la valeur de χm est
ces, la lévitation est un phénomène physique qui sem- proche de − 1 plus le phénomène diamagnétique est
ble avoir beaucoup de potentialités en microrobotique. accentué.
Le principal atout de la lévitation réside dans la sup-
pression des frottements secs. Comme ces derniers Par conséquent, la force de répulsion induite aug-
sont difficilement prédictibles, ils font partie des phé- mente, lorsqu’un champ magnétique extérieur est
nomènes physiques qui réduisent les performances de appliqué, si χm approche de − 1.
certains types de microrobots tels que par exemple le
micropousseur de cellules biologiques développé au
Laboratoire d’Automatique de Besançon (LAB) [3]. 3. Description du dispositif
Dans les Techniques Ainsi, la conséquence première des frottements secs de mesure de forces
de l’Ingénieur : Bio- est la diminution de la répétabilité et de la résolution
micromanipulation par de positionnement des microrobots. Le dispositif de mesure de forces, appelé capteur
poussée [IN 17] de
M. Gauthier et E. Piat. de micro- et nanoforces, se présente sous la forme
d’une tige qui est mise en lévitation par les procédés
2. Lévitation passive d’aimants décrits au paragraphe 2. Cela est rendu possible par
permanents : lévitation le biais de deux modules de sustentation identiques
diamagnétique (appelés L1 et L2). Chaque module de sustentation
est constitué de deux aimants porteurs (appelés M1),
Sur un plan pratique, si on considère l’expérience de deux plaques d’un matériau diamagnétique (gra-
qui consiste à suspendre un aimant permanent dans phite) et d’un aimant permanent appelé M2
un champ magnétique créé par un second aimant, on (figure 2). Les aimants porteurs, sont disposés de
s’apercevra très vite que cela est impossible. Sur un manière à ce que leurs pôles nord et sud soient
plan théorique, Earnshaw [4] en 1842 a démontré inversés (figure 2). L’aimant M2, aimanté suivant
qu’il n’est pas possible d’obtenir un point d’équilibre son épaisseur, est placé à mi-distance entre les
stable avec une configuration constituée d’éléments aimants porteurs dans le champ d’induction magné-
qui interagissent avec des forces proportionnelle- tique produit par ces derniers (figure 3). Le matériau
ment inverses au carré de la distance. Les forces diamagnétique, disposé de part et d’autre de M1,
magnétiques produites par les aimants ont juste- sert à contrer l’instabilité produite suivant la
ment cette propriété. Il démontra également que le direction x par les forces d’interaction magnétique
seul cas de figure permettant d’obtenir un point dues entre les aimants M1 et M2. Enfin, les deux
d’équilibre stable en gardant la même configuration aimants M2 de chaque module de sustentation sont
est d’utiliser des matériaux avec une perméabilité solidarisés par l’intermédiaire d’une tige tubulaire en
relative µr inférieure à l’unité. Dès lors que les maté- verre de faible section (figure 4).
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Référence Internet
S7712
Conception, modélisation
et commande des systèmes
microrobotiques
1
par Arnaud HUBERT
Sorbonne Universités, Université de technologie de Compiègne, Laboratoire d’électro-
mécanique, Compiègne, France
Institut FEMTO-ST, Département AS2M, Université de Franche-Comté-ENSMM-UTBM-
CNRS, Besançon, France
par Yassine HADDAB
Institut FEMTO-ST, Département AS2M, Université de Franche-Comté-ENSMM-UTBM-
CNRS, Besançon, France
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Référence Internet
S7712
1. Problématiques
de la microrobotique
La citation de W.S.N. Trimmer reproduite dans l’introduction, et
extraite de [1], montre bien que manipuler, assembler et même
fabriquer des objets à ces dimensions imposent le plus souvent
d’utiliser les lois de la physique d’une manière différente de celle
dont nous les utilisons à l’échelle macroscopique. En particulier,
les effets d’échelle font que, bien souvent, certains phénomènes
négligeables à notre échelle ne le sont plus dans des dimensions
plus réduites. L’exemple type des effets de ce changement Sphère de 1 cm de rayon Sphère de 1 mm de rayon
d’échelle est l’influence prépondérante des forces d’adhésion en
micromanipulation. À l’inverse, d’autres forces, notamment celles
liées à la gravité, deviennent très souvent négligeables dans le Pour un rapport de rayons de 10, le rapport des surfaces est de
« micromonde » [2] [3]. De ce fait, l’étude de la microrobotique ne 100 tandis que le rapport des volumes est de 1 000. La réduction
peut être abordée sans la prise en compte des effets d’interaction des tailles favorise donc les forces surfaciques par rapport aux
à l’échelle micrométrique. Les lois de la physique qui régissent les forces volumiques.
interactions entre objets sont toujours applicables à ces échelles ;
cependant, la miniaturisation favorise certains phénomènes physi-
ques par rapport à d’autres, ce qui produit des différences notables Figure 1 – Effet de la réduction des dimensions sur les forces
dans le comportement des systèmes de petite taille. Alors que volumiques et surfaciques
dans le « macro-monde », la physique est dominée par les forces
volumiques (poids des objets, effets inertiels, etc.), dans le micro-
monde, les forces surfaciques sont prépondérantes par rapport d’une poussière à l’aide d’un doigt humide. Outre un comportement
aux effets de volume. Cette inversion de rapport de forces, appelée dynamique inhabituel, la prépondérance des forces surfaciques
« effet d’échelle », est illustrée sur la figure 1. pose de nouvelles problématiques propres à la microrobotique dont
Les principales forces surfaciques apparaissant à ces échelles la plus flagrante est celle du lâcher des objets par une micropince,
sont : comme l’illustre la figure 2. Alors que cette problématique est
inexistante en robotique conventionnelle, il convient, dans le micro-
– les forces électrostatiques (générées par tribo-électrification ou monde, de définir et de mettre en œuvre des stratégies spécifiques
transfert de charges au moment des contacts entre objets) ; pour permettre le dépôt d’un micro-objet en un lieu précis.
– les forces de Van Der Waals (forces atomiques) ;
– les tensions de surface entre les éléments en contact (liées au En raison de toutes ces nouvelles problématiques, les solutions
taux d’humidité à l’interface des micro-objets). technologiques que présentera cet article sont le plus souvent très
Lorsque les dimensions des objets sont suffisamment petites, les différentes des solutions technologiques qui seraient adoptées
forces surfaciques produisent un effet d’adhésion (ou collage) entre pour la conception des dispositifs robotiques classiques tels que
les objets. Ce phénomène est par exemple à l’origine de la saisie ceux présentés dans [S 7 730].
22
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1
taines, les plus utilisées, seront présentées plus en détail.
1 2 3
2.1 Structures microrobotiques
Manipulation d’objets microscopiques 2.1.1 Particularités et architectures
Comme indiqué précédemment, un microrobot est principale-
ment constitué d’un organe terminal et d’une structure mécanique
robotique. La cinématique inhérente à cette structure doit pouvoir
permettre de positionner et d’orienter cet organe terminal selon
une précision, une répétabilité et une dynamique spécifiées par un
cahier des charges très exigeant, spécifique à l’application, à
1 2 3 l’environnement et à l’encombrement disponible. Dans la majorité
des cas, la structure de ce manipulateur doit être suffisamment
Manipulation d’objets microscopiques compacte pour garantir une rigidité et donc une précision
suffisante. La compacité est en effet un des éléments clés qui
Figure 2 – Problématique du lâcher en microrobotique
permet de réduire l’encombrement du dispositif et de limiter
l’influence des variations paramétriques de l’environnement (tem-
pérature, hygrométrie, vibrations). Si l’on souhaite satisfaire les
contraintes de précision, la cinématique de la structure robotique
2. Composants doit être sans jeu ou à jeu compensé, pour l’essentiel des applica-
tions. Pour disposer des degrés de liberté (DDL) requis, ces
microrobotiques contraintes de performance conduisent à privilégier la mise en
œuvre de structures compliantes à la place des mécanismes articu-
et leur conception lés classiques présentant des frottements secs et des jeux suscep-
tibles de détériorer d’emblée et drastiquement la résolution. De
plus, les contraintes du cahier des charges requièrent souvent l’uti-
La réalisation de microrobots se heurte à la problématique de la lisation de matériaux actifs pour les fonctions d’actionnement ou
miniaturisation. Si, durant les balbutiements de la microrobotique, de mesure. Ainsi, dans certaines configurations particulièrement
les chercheurs ont tenté de miniaturiser des architectures robo- intégrées, le même matériau actif peut servir à la fois de support
tiques ayant fait leurs preuves à l’échelle macroscopique, cette mécanique, d’actionneurs et de capteurs. Dans ce cas, le terme de
approche, fondée sur la réduction homothétique des dimensions « système adaptronique » est parfois adopté.
des robots, doit cependant être abandonnée dans la plupart des
cas. En effet, de nombreuses difficultés liées à la réalisation de
moteurs et de mécanismes miniaturisés se posent au concepteur. 2.1.2 Organes terminaux pour la microrobotique
Par ailleurs, les jeux dans les mécanismes et les engrenages limi-
Bien que les interactions entre le préhenseur et l’objet saisi
tent fortement la précision de positionnement du microrobot.
soient plus complexes dans le micromonde, les pinces, appelées
Ainsi, dans les conceptions modernes, des microactionneurs sont
désormais « micropinces », sont encore très utilisées. Ces derniè-
souvent employés en remplacement des moteurs traditionnels et
res doivent cependant être adaptées aux contraintes liées à la
des structures déformables se substituent aux mécanismes.
manipulation de très petits objets. Aujourd’hui, les micropinces les
De manière générale, la conception d’un microrobot comporte plus efficaces exploitent les effets électrostatique ou piézoélectri-
deux parties distinctes tant les problématiques correspondantes que et sont parfois équipées de capteurs permettant la mesure des
sont différentes : efforts exercés sur les objets saisis. La connaissance de ces efforts
– l’organe terminal (également appelé « préhenseur ») qui est la est très utile afin d’éviter d’endommager ou de détruire le
partie extrême du microrobot, en contact avec l’objet à manipuler ; micro-objet manipulé. À titre d’exemple, la figure 3 présente l’une
des micropinces les plus abouties. Elle est commercialisée par la
– la structure mécanique robotique (également appelée
société FemtoTools. Cette pince possède un doigt actionné à l’aide
« porteur ») dont le rôle est d’assurer le positionnement précis de
d’un peigne interdigité (comb-drive ) à actionnement électrostati-
l’organe terminal dans l’espace.
que et un doigt servant de capteur de force. La mesure de force ne
La tâche microrobotique complète est assurée par le travail peut être effectuée que si un micro-objet est enserré entre les
conjoint de ces deux parties. Une particularité remarquable des doigts de la micropince. Leur écartement initial est de quelques
microrobots doit cependant être soulignée : alors que pour un dizaines à quelques centaines de microns selon le modèle
robot macroscopique la précision de positionnement est exclusive- considéré. L’actionnement de la pince permet sa fermeture
ment déterminée par le porteur, pour un microrobot, la précision jusqu’au contact entre les deux doigts. Cette micropince est réa-
est définie conjointement par le porteur et le préhenseur et ce, en lisée sur un substrat de silicium par des technologies de microfa-
raison de la complexité des interactions entre le préhenseur et brication en salle blanche. Son caractère monolithique lui confère
l’objet manipulé. Puisque les interventions des dispositifs microro- des propriétés de compacité et de répétabilité remarquables.
botiques peuvent se conduire dans des milieux ambiants, dans des FemtoTools fournit ses micropinces prêtes à l’emploi et équipées
milieux liquides (systèmes biologiques par exemple) ou dans des d’un conditionneur de signal pour la mesure d’efforts, d’un sys-
milieux de vide poussé (chambre de microscopes électroniques, tème de fixation mécanique, ainsi que d’un connecteur facilitant
par exemple), les différents constituants d’un dispositif microrobo- son exploitation.
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1 mm
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Les microrobots mobiles ont été massivement développés au Les applications les moins exigeantes en termes de performan-
début des années 2000 pour des applications de micromanipula- ces ou celles qui nécessitent des coûts assez réduits utilisent le
tion. La figure 6 montre un micromanipulateur mobile moderne plus souvent des structures sérielles. Les technologies associées
exploitant un principe stick-slip (ce principe est détaillé dans la sont bien maîtrisées et de nombreux industriels proposent désor-
figure 20). Réalisé par la société Imina Technologies, il est capable mais des solutions génériques fiables, clés en main.
de se déplacer sur une surface avec une résolution nanométrique
et de réaliser des tâches de test ou de micromanipulation. Sa La figure 8 représente par exemple un dispositif de microposi-
compatibilité avec le vide en fait un microrobot bien adapté aux tionnement sériel utilisant des actionneurs conventionnels minia-
1
interventions en environnement MEB. turisés et un actionneur piézoélectrique.
Actuellement, en dehors de quelques applications très spécifi- Nous verrons dans les sections suivantes que l’actionnement de
ques ou de prototypes de laboratoire, les microrobots mobiles structures microrobotiques à l’aide de microactionneurs de type
sont essentiellement utilisés dans des environnements très piézoélectrique se heurte à la limite de leurs courses. De ce fait et
contraints en espace et peu accessibles tels que les milieux sous afin de s’affranchir de ces limites, les concepteurs de microrobots
vide, les milieux biologiques et biomédicaux intracorporels (capsu- ont appris à exploiter des principes cumulatifs, notamment le prin-
les endoscopiques, robots sanguins, etc.). L’actionnement est alors cipe stick-slip décrit dans la figure 20. Ces principes sont mis à
souvent réalisé à distance, en utilisant par exemple des phénomè- profit pour générer de larges déplacements à l’aide de micro-
nes électromagnétiques (diélectrophorèse, actionnement magnéti- actionneurs piézoélectriques, mais au prix d’une certaine lenteur.
que). La figure 7 représente un dispositif permettant le
déplacement par voie magnétique d’un microrobot dédié à la La figure 9 présente un microrobot sériel à trois DDL (deux rota-
chirurgie ophtalmologique [7]. tions et une translation) réalisé par la société Kliendiek Nanotech-
nik utilisant un principe stick-slip. Comme ce microrobot ne
possède pas de capteur intégré, il est généralement utilisé dans
des tâches microrobotiques téléopérées par un opérateur humain.
La société Kliendiek Nanotechnik propose également plusieurs
organes terminaux adaptables à l’extrémité du microrobot (pince,
capteur de force, injecteur de gaz ou de liquides, etc.), ce qui en
fait un outil polyvalent.
25
1
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Conception et optimisation
des interfaces à retour d’effort
par Florian GOSSELIN
1
Responsable scientifique - Département Intelligence Ambiante et Systèmes Interactifs
Université Paris-Saclay, CEA, List, F-91120, Palaiseau, France
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1. Interfaces à retour d’effort Comme le montre la figure 1, un tel système, qui permet
d’associer les capacités d’analyse, de décision et d’adaptation de
pour la téléopération l’opérateur, et les capacités de projection dans l’environnement
distant et de travail du robot, est constitué dans sa configuration
et la réalité virtuelle la plus simple d’un bras maître équipé d’un organe de saisie (qui
prend généralement la forme d’une poignée ou d’un stylo) et d’un
robot esclave muni d’un préhenseur. Des capteurs de position dis-
posés au niveau des moteurs et/ou des articulations sont utilisés
1.1 Téléopération à retour d’effort pour mesurer leur position et leur orientation dans l’espace. Les
deux robots sont le plus souvent commandés pour que le bras
esclave reproduise les mouvements du bras maître, et vice-versa.
L’être humain ne peut pas intervenir directement dans des On parle de couplage bilatéral en position.
milieux hostiles (industrie nucléaire, espace, off-shore profond,
etc.). L’usage d’équipements de protection dédiés (e.g. scaphandres) Avec ce type de couplage, le robot esclave suit les mouvements
peut être une solution partielle, mais elle ne résout pas tous les du bras maître lorsqu’il n’est soumis à aucun effort externe. On dit
problèmes. Pour réaliser certaines interventions, on doit utiliser des qu’il est en espace libre. En revanche, s’il est bloqué au contact de
robots. C’est également le cas quand l’humain souhaite réaliser son environnement, le bras maître, qui suit ses mouvements, sera
des tâches dans des environnements inaccessibles à son échelle arrêté et l’opérateur ressentira un effort de blocage. On parle de
(chirurgie mini-invasive, microchirurgie, manipulation de micro et mode au contact. Le principe est le même pour la restitution des
de nano-objets, etc.). Or, ces robots n’ont pas, à l’heure actuelle et autres efforts qui peuvent s’appliquer sur le bras esclave. Toute
malgré les progrès récents de l’intelligence artificielle, les capacités modification de la position ou de la trajectoire du robot sera
suffisantes pour s’adapter de façon autonome à la diversité des reproduite par le bras maître, ce qui permettra à l’utilisateur de
situations rencontrées et à la variété des tâches à réaliser. Il est ressentir les effets induits par ces efforts. Ce type de couplage
donc nécessaire de disposer de solutions permettant de les piloter présente l’avantage d’être très stable si les gains sont bien réglés.
à distance de façon interactive, en laissant l’humain dans la
boucle. La solution la plus efficace pour cela est d’utiliser des bras On notera que le couplage entre le maître et l’esclave peut avoir
maîtres à retour d’effort. Ces périphériques sont en général équi- lieu dans l’espace articulaire, chacun des corps d’un des robots
pés d’une poignée dont les mouvements sont utilisés pour com- étant couplé au corps équivalent de l’autre bras, ou dans l’espace
mander la position et l’orientation du préhenseur du robot cartésien, le couplage ayant lieu directement entre la poignée du bras
esclave. Ils sont également pourvus de moteurs utilisés pour maître et la pince du bras esclave, indépendamment de leur configu-
reproduire sur la poignée du bras maître les efforts appliqués sur le ration. Dans le second cas, il peut être avantageux d’utiliser des bras
robot esclave. On parle de téléopération à retour d’effort. différents, le maître et l’esclave n’ayant pas nécessairement la même
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Robot
esclave
1
Commande
esclave
Configuration
Bras Couplage esclave
maître bilatéral
Configuration
maître
Commande
maître
architecture, les mêmes dimensions ou les mêmes capacités. les phénomènes kinesthésiques, c’est-à-dire la perception
L’esclave peut ainsi être dimensionné en fonction des tâches à réa- consciente de la position et des mouvements des différentes par-
liser, tandis que le maître sera optimisé pour autoriser une prise en ties du corps dans son environnement.
main intuitive et une manipulation ergonomique. Comme le montre la figure 2, avec une interface haptique, le
On peut bien entendu introduire des facteurs d’amplification en couplage bilatéral en position est effectué entre la poignée du bras
position et en effort entre les deux robots, en particulier s’ils sont maître et un avatar qui est l’objet de la scène virtuelle dont on
différents. On peut aussi introduire un décalage entre les deux cherche à contrôler la configuration. Ainsi, lorsque l’utilisateur
bras. Le principe est, comme avec une souris d’ordinateur, de déplace la poignée de l’interface haptique, l’avatar suit ses mouve-
commander le bras esclave en déplaçant le bras maître et, une fois ments tant qu’il se déplace en espace libre. Il est en revanche blo-
arrivé à la limite de son espace de travail, de débrayer le couplage qué quand il entre en contact avec son environnement, de même
maître-esclave pour pouvoir ramener le bras maître en arrière sans que l’interface haptique qui suit ses mouvements. L’opérateur peut
déplacer l’esclave, avant de réactiver le couplage entre les deux ainsi ressentir les contraintes auxquelles est soumis l’avatar.
robots pour continuer à déplacer l’esclave. Parmi les autres assis- Ces dispositifs peuvent être utilisés pour interagir avec les
tances proposées sur les systèmes de téléopération, on trouve la maquettes numériques qui remplacent de plus en plus les proto-
compensation du poids du robot et des objets portés, ou encore types physiques lors de la conception de nouveaux produits et
des fonctions de guidage de l’opérateur le long de trajectoires pré- systèmes. Ils ont de nombreuses applications. Ils permettent par
définies appelées guides virtuels. Ces guides peuvent aider l’opé- exemple de simuler en temps réel, de façon immersive et avec
rateur à suivre une trajectoire déterminée, ou au contraire à éviter retour d’effort, le montage d’un système complexe, comme un
d’atteindre des zones sensibles à protéger [1] [S 7 811]. moteur de voiture ou d’avion, pour vérifier si les différentes
On notera qu’il existe d’autres modes de commande des sys- pièces qui le composent s’assemblent comme prévu lors de la
tèmes de téléopération à retour d’effort [2]. Par exemple, le mode conception du système. On peut ainsi détecter et corriger les
position/force diffère du couplage bilatéral en position en ce que erreurs très en amont du cycle de conception. On peut également
le bras maître n’est plus commandé pour suivre les mouvements simuler l’usage d’un nouveau dispositif pour optimiser son fonc-
du robot esclave, mais pour reproduire directement les efforts qui tionnement et son ergonomie avant même qu’un prototype ne
s’appliquent sur son préhenseur et qui sont mesurés à l’aide d’un soit fabriqué. On peut encore, en intégrant dans la simulation un
capteur d’effort. Ce type de couplage permet une reproduction avatar numérique de l’opérateur et des outils utilisés pour le mon-
plus fine des efforts, mais n’est pas aussi stable. tage, concevoir une véritable usine virtuelle servant à optimiser
l’ergonomie et la productivité des postes de travail. On peut enfin
De tels systèmes maître-esclave sont utilisés dans l’industrie
utiliser ces technologies pour la formation au geste technique en
nucléaire [3] [4] [S 7 812], dans le domaine spatial [5] [6] ou encore
environnement virtuel. Le lecteur est invité à se reporter à [10]
en téléchirurgie [7] [8] [9].
pour d’autres exemples d’application.
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Avatar
Environnement
virtuel
1 Commande
avatar
Configuration
Couplage avatar
Interface
haptique Configuration bilatéral
interface
Commande
interface haptique
du toucher, les sujets ont beaucoup de difficultés à saisir l’allumette, à ■ Transfert thermique
la maintenir entre leurs doigts et à la frotter contre la boîte. Le
nombre d’erreurs et le temps d’exécution sont nettement plus élevés Tout contact avec un matériau entraîne un transfert thermique
(http://www.youtube.com/watch?v=0LfJ3M3Kn80&feature=player_em- entre le doigt et celui-ci. Ce phénomène dépend du matériau, ce qui
bedded). Il est donc primordial, si l’on veut pouvoir interagir efficace- permet de distinguer des matériaux aux caractéristiques dimension-
ment dans un environnement distant ou virtuel, de restituer à nelles proches, comme une plaque de verre ou de plastique.
l’opérateur le sens du toucher. Tous ces phénomènes sont importants, et différents systèmes
Sa mise en œuvre est cependant difficile, car on voit apparaître, ont été développés pour les simuler et les reproduire. On trouve
quand on interagit avec notre environnement, différents phénomènes ainsi dans la littérature des dispositifs à contacts intermittents. Ces
qui se combinent et contribuent aux sensations ressenties [11] [12] : interfaces sont équipées de capteurs de proximité disposés en
général au niveau de leur extrémité. Ces capteurs permettent de
■ Transition espace libre-contact mesurer, en temps réel, l’écart entre la position et l’orientation
de leur organe terminal et celles d’un segment corporel d’intérêt de
Cette étape correspond à l’arrivée de la main ou de l’outil l’opérateur, en général la paume de la main ou le bout des doigts.
qu’elle porte au contact des objets. Elle précède l’ensemble des Elles peuvent ainsi suivre ses mouvements à distance et ne venir à
autres interactions. son contact que lorsque l’on cherche à appliquer un retour d’effort
(en général au niveau de la main ou des doigts) [13] [14]. On
■ Application d’une force normale ou tangentielle trouve aussi dans la littérature des interfaces à retour d’effort
capables d’appliquer un effort sur la main [15] [16] [17], des dispo-
Dès que l’on touche un objet (par exemple, pour détecter sa sitifs dont la surface de contact varie suivant l’effort appliqué [18]
présence ou pour déterminer sa dureté en poussant sa surface), ou venant déformer la pulpe des doigts [19] [20] [21], des inter-
un effort est généré sur la main. faces tactiles [22] [23] ou encore des interfaces thermiques [24].
Ces dispositifs sont cependant relativement encombrants et ne
■ Déformation de la pulpe des doigts reproduisent chacun qu’une partie des phénomènes mis en jeu
La peau et les tissus sous-jacents sont souples et s’adaptent à la lors des interactions haptiques. Il n’est en effet pas possible, dans
forme des objets que l’on touche. Cette adaptation est à la fois l’état actuel de la technique, de développer un dispositif intégrant
globale quand les objets manipulés sont de grandes dimensions, toutes ces fonctionnalités, et il est nécessaire, dans la pratique, de
et locale quand ils comprennent de petites aspérités ou irrégulari- se concentrer sur les phénomènes qui ont l’influence la plus
tés. On notera en particulier que la surface de contact entre le importante pour le succès de la tâche réalisée. Pour l’identification
doigt et l’objet augmente avec la force d’appui. de la granularité d’un objet, par exemple, on se focalisera sur le
rendu de textures. Ici, pour la manipulation d’objets en environ-
■ Mouvement de la pulpe des doigts nement distant ou virtuel, on se concentrera sur le retour d’effort.
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1
2.1 Sécurité des opérateurs tique des limites aux gains en position et en vitesse assurant la
stabilité des robots, du fait notamment de la quantification spa-
Que ce soit pour des applications de téléopération ou de réalité tiale et temporelle des signaux capteurs. Ces limites peuvent être
virtuelle, les interfaces à retour d’effort doivent présenter un haut déterminées de façon théorique [27], mais cela requiert un modèle
niveau de sûreté et de sécurité, car elles sont manipulées par un précis de l’ensemble du système. On préférera souvent les identi-
utilisateur humain. fier de façon empirique en testant le comportement des robots
D’un point de vue mécanique, cela nécessite, si possible, que de pour différentes valeurs des gains Kcont et Bcont de façon à déter-
telles interfaces ne puissent pas atteindre les zones vitales du miner les gains les plus élevés possible pour obtenir le meilleur
corps (tête, buste), qu’elles ne puissent pas appliquer des efforts couplage possible, tout en garantissant la stabilité du système.
trop importants, notamment quand l’opérateur peut se retrouver
coincé entre l’interface et l’environnement, et que leur énergie
cinétique reste faible, ce qui implique de limiter leur inertie et leur 2.2 Critères de performances
vitesse [25] [26]. On veillera aussi à concevoir des formes exté-
rieures douces et à éviter les zones où l’utilisateur peut se pincer. Les interfaces à retour d’effort doivent également respecter des
critères de performances. Elles doivent ainsi avoir une grande
Du point de vue des asservissements, cela requiert l’utilisation sensibilité en effort et une grande dynamique pour être capables
de lois de commande qui restent stables quelles que soient les de suivre tous les gestes de l’opérateur et de restituer le moindre
actions de l’utilisateur, et que les gains du contrôleur soient cor- effort appliqué sur le robot distant ou l’avatar. On souhaiterait,
rectement réglés. Dans la pratique, on utilise souvent sur ces dis- dans le cas idéal, que l’interface maître (de même que le bras
positifs un couplage bilatéral en position exprimé dans l’espace esclave) se fasse « oublier » et que l’utilisateur ait l’impression de
cartésien (c’est-à-dire que le couplage a lieu entre la poignée du manipuler directement l’outil porté par la pince du robot esclave
bras maître et la pince du bras esclave ou l’avatar). ou l’avatar. Cela requiert que son impédance soit la plus faible
Comme le montre la figure 3, le modèle géométrique des robots possible (idéalement nulle) en espace libre, et qu’elle puisse
maître et esclave est utilisé pour calculer leur configuration carté- prendre toutes les valeurs nécessaires à la reproduction des
sienne dans l’espace XM et XE (c’est-à-dire la position et l’orienta- efforts vus par le robot distant ou l’avatar. On parle de transpa-
tion de leur organe terminal) à partir des données capteurs rence en espace libre et au contact. Il est nécessaire pour cela de
fournissant leur configuration articulaire qM et qE (dans le cas d’une respecter un certain nombre de critères sur lesquels s’accordent
application de réalité virtuelle, la configuration de l’avatar est direc- les experts du domaine [15] [16] [17] :
tement fournie par la simulation). Le couplage bilatéral génère des
consignes d’efforts FM et FE sur le maître et l’esclave qui sont fonc- ■ Espace de travail suffisant
tion de la différence en position et en vitesse entre ces deux élé- Il faut en premier lieu que le bras maître ou l’interface haptique
ments (dans l’équation (1), on ne tient pas compte des possibilités ait un espace de travail suffisant pour qu’il ne limite pas les mou-
d’introduire un coefficient d’homothétie en position et/ou en effort vements de l’utilisateur, et sans singularité pour que ce dernier ne
ni des décalages). se retrouve jamais bloqué dans certaines directions, ou au contraire
incapable de contrôler certains mouvements du robot.
■ Frottements secs limités
(1)
Il faut aussi que les frottements secs (souvent assimilés à une
résolution en effort, même si le terme est impropre) soient suffi-
Ces efforts sont ensuite projetés dans l’espace articulaire en uti- samment faibles pour que l’utilisateur n’ait pas de difficultés à
lisant les matrices jacobiennes JM et JE, ce qui permet de calculer mettre le dispositif en mouvement, notamment en espace libre. Ils
Couplage
bilatéral
τM FM FE τE
JMT JET
qM XM XE qE
MGD MGD
Espace
cartésien
Figure 3 – Couplage bilatéral en position dans l’espace cartésien (qM et qE désignent les positions articulaires du maître et de l’esclave, MGD
est le modèle géométrique direct de ces robots, XM et XE leur configuration cartésienne, FM et FE sont les consignes d’efforts côté maître et
côté esclave, JM et JE sont les matrices jacobiennes permettant de calculer les couples articulaires τM et τE)
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doivent aussi être isotropes, pour que la poignée se déplace dans sont en première approximation, d’après les catalogues construc-
la direction souhaitée par l’utilisateur, et non dans une direction teurs, proportionnels au couple qu’ils peuvent générer. Dans ces
où les frottements sont minimums. Ils doivent enfin être les plus conditions, la résolution en effort (assimilée à ces frottements) est
homogènes possible dans tout l’espace de travail, afin que l’utili- définie comme un pourcentage de la capacité en effort, et ces
sateur ne ressente pas de gêne locale. deux paramètres ne peuvent pas être optimisés indépendamment
l’un de l’autre. Il faudra trouver un compromis favorisant soit la
■ Masse et inertie apparentes limitées sensibilité, soit la capacité en effort, qui est le paramètre le plus
La masse et l’inertie apparentes (c’est-à-dire la masse et l’inertie souvent pris en compte.
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une souris. Il est alors préconisé un espace de travail correspon- l’ordre de 2,4 à 4,5 N.m autour de l’axe d’une poignée de 30 à
dant à des débattements de l’ordre de 50 à 100 mm et ± 20 à ± 40° 40 mm de diamètre (prise de puissance) et 12,5 à 17,9 N.m per-
environ dans et autour de toutes les directions. En téléchirurgie, le pendiculairement à celle-ci, et de l’ordre de 0,37 à 0,45 N.m
praticien sera assis à sa console de travail et aura des appuis au autour de l’axe d’un stylo de 20 mm de diamètre (prise de précision)
niveau du coude pour pouvoir effectuer des gestes d’amplitude suf- et 2,21 à 4,23 N.m perpendiculairement à celui-ci.
fisante, notamment en orientation (un travail poignet posé limiterait
On notera que, pour les prises associées à des objets allongés,
trop l’amplitude des mouvements de rotation) avec un haut niveau
l’axe de la poignée peut généralement être défini de façon unique.
de précision. Dans une telle situation où l’utilisateur travaille coude
1
Les autres axes sont arbitraires. Leur seule contrainte est qu’ils
posé, il est préconisé un espace de travail de 150 à 250 mm et ± 45
soient perpendiculaires à l’axe de la poignée. Sur la figure 4, ils
à ± 75° environ. Pour des tâches de téléopération de puissance (par
sont choisis de sorte à correspondre à certains mouvements phy-
exemple, pour des applications de démantèlement dans l’industrie
siologiques canoniques (on notera que ces mouvements peuvent
nucléaire ou pour la téléopération off-shore), l’utilisateur sera en
être générés de différentes manières ; à titre d’exemple, avec la
général assis à un poste maître équipé de moniteurs vidéo assurant
prise « tip pinch », le mouvement autour de l’axe de la poignée
le retour visuel [3] [4] [S 7 812]. Il n’aura en revanche pas d’appuis
peut être généré par un mouvement relatif des doigts ou par un
pour les bras qu’il pourra bouger librement pour déplacer son bras
mouvement du poignet ou même du bras, ou encore une combi-
maître. Il est préconisé pour ce type de posture assise des débatte-
naison de ces différents mouvements).
ments de l’ordre de 300 à 400 mm et ± 60 à ± 80°. Enfin, pour cer-
taines applications de formation en environnement virtuel, Ces efforts ne peuvent cependant pas être appliqués très long-
l’opérateur restera debout. Dans ce cas, l’espace de travail pourra temps, car l’opérateur se fatigue rapidement [43]. L’endurance de
atteindre des débattements de l’ordre de 400 à 600 mm et ± 70 à l’utilisateur (durée pendant laquelle il peut exercer un effort
± 90°, davantage si l’opérateur peut se déplacer. donné) dépend essentiellement du niveau d’effort et peu du
groupe musculaire. Elle est donc similaire pour les forces et les
couples et pour les prises de précision et de puissance. Elle est
2.3.2 Résolution en position comprise entre 5 et 20 minutes environ pour des efforts de l’ordre
de 15 % des efforts maximaux exerçables. On doit également tenir
La main permet à la fois de déplacer des objets et de mesurer
compte du confort d’utilisation de l’interface à retour d’effort.
leurs déplacements. Il convient par conséquent de distinguer la
Dans la pratique, un effort statique supérieur à 43 à 46 % de
résolution motrice de la résolution sensitive en position.
l’effort maximal en translation et 41 à 71 % en rotation est jugé
La résolution motrice en position correspond au plus petit dépla- inconfortable. Si l’effort est maintenu, il devient rapidement incon-
cement qu’un opérateur peut effectuer de façon contrôlée. Elle est fortable dès 15 % de l’effort maximal. En outre, le fait d’appliquer
limitée par ses tremblements. En faisant l’hypothèse que ces trem- des efforts importants peut modifier leur perception, conduisant
blements naissent d’une mauvaise coordination des muscles ago- l’opérateur à exercer une force trop importante lors de travaux
nistes et antagonistes au niveau articulaire, on peut calculer la délicats, ou trop faible lors de travaux lourds [45] [46]. Ce phéno-
résolution motrice comme la résultante au niveau du centre de mène, qui apparaît dès que le niveau d’effort est supérieur à 15 %
la paume (pour une prise de puissance) ou au niveau des doigts de l’effort maximal, peut conduire à des problèmes de sécurité.
(pour une prise de précision) des tremblements générés au niveau
de l’épaule, du coude et du poignet. Sur la base des données dispo- Pour toutes ces raisons, il est préconisé de limiter la capacité en
nibles dans la littérature [36] [37] [38] [39] et de la longueur des effort continu de l’interface haptique à environ 10 % de l’effort
segments corporels mis en jeu (cf. norme X35-002), elle peut être maximal exerçable, soit environ 40 N et 2 N.m pour une prise de
estimée au repos à 12 μm environ poignet posé, 58 μm coude posé puissance, et de l’ordre de 10 N et 0,25 N.m pour une prise de pré-
et 109 μm coude non posé pour une prise de puissance, et 23 μm cision. On notera que dans la pratique, on utilise rarement des
environ poignet posé, 69 μm coude posé et 119 μm coude non posé prises de précision ne faisant intervenir que le bout des doigts. On
pour une prise de précision. On notera que les tremblements, et préfère en général utiliser des prises intermédiaires de type stylo.
donc la résolution motrice, dépendent aussi de l’état de fatigue de Dans ces conditions, les efforts pourront être légèrement supé-
l’opérateur. Ils peuvent aller jusqu’à plusieurs millimètres quand il rieurs, de l’ordre de 10 à 20 N et 0,5 à 1 N.m. Ces efforts per-
est fatigué. mettent de travailler confortablement pendant une quinzaine de
minutes au moins, ce qui est suffisant pour réaliser la plupart des
La résolution sensitive en position correspond quant à elle au tâches. On retrouve des valeurs du même ordre de grandeur dans
plus petit déplacement qu’un opérateur peut détecter. Elle est limitée la littérature [40] [47].
par la sensibilité des capteurs tactiles cutanés et dépend de la fré-
quence et du lieu d’application du signal d’excitation. Elle varie de
0,1 à 11,2 μm au bout des doigts, de 10 à 14 μm au milieu des 2.3.4 Résolution en effort
doigts et de 15 à 24 μm dans la paume de la main [40] [41] [42].
Comme pour les positions, on distingue la résolution motrice et
la résolution sensitive en effort.
2.3.3 Capacité en effort
La résolution motrice en effort (amplitude de l’écart minimal en
Un opérateur peut appliquer des efforts relativement importants. force par rapport à un effort de consigne que l’on peut réguler) est
Il est cependant difficile de définir une valeur maximale puisque proportionnelle à l’effort appliqué. Elle est d’environ 1 % de l’effort
notre capacité en effort varie d’un individu à l’autre en fonction de appliqué si l’on dispose d’un retour visuel permettant de connaître
l’âge, du sexe, de la forme physique ou de l’entraînement. Elle cet effort [48].
dépend également fortement de la posture, du type de prise et de la La résolution sensitive, qui est le plus petit effort que l’on peut
direction dans laquelle l’effort est appliqué [40] [43] [44]. En tenant percevoir, est comme en position limitée par la sensibilité des
compte de valeurs moyennes, on estime les efforts maximaux exer- capteurs tactiles cutanés. Elle est comprise entre 25 et 63 mg soit
çables à environ 104 à 127 N suivant la direction avec une prise de 0,25 à 0,62 N environ au bout des doigts [41].
précision de type stylo, et 137 à 489 N avec une prise de puissance
de type poignée. Les couples dépendent également du type de prise
et de la direction. Ils sont nettement plus élevés perpendiculaire- 2.3.5 Raideur apparente
ment à la poignée qu’autour de celle-ci (voir la représentation des
axes sur la figure 4), et ils sont d’autant plus élevés autour de l’axe Il est théoriquement nécessaire d’avoir une raideur apparente
de la poignée que son diamètre est important. En tenant compte de 24 200 N/m pour qu’un utilisateur perçoive en aveugle une sur-
encore une fois de valeurs moyennes, on arrive à des valeurs de face comme totalement rigide [48].
33
1
34
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Écoconception en robotique
35
Référence Internet
S7714
1
tons pouvoir continuer à développer nos activités robotiques de manière
soutenable, de réfléchir le plus en amont à leur écoconception.
Cet article s’intéresse donc aux impacts environnementaux des robots et aux
moyens existants ou en cours de développement permettant de potentielle-
ment les diminuer. Il est divisé en trois grandes sections :
1/ la première fait quelques rappels sommaires sur l’écoconception en
général et les outils associés, puis s’intéresse aux facteurs d’impact envi-
ronnemental d’un robot. Deux grandes classes de techniques permettant
de réduire certains impacts environnementaux des robots sont mises en
avant :
• les techniques de réduction de la consommation énergétique,
• le remplacement des corps du robot par des pièces en matériaux à faible
impact environnemental.
2/ La deuxième section détaille les différentes approches les plus couram-
ment rencontrées afin de réduire la consommation énergétique des
robots, et qui sont :
• les techniques d’équilibrage des effets gravitationnels ;
• les approches permettant de minimiser les effets inertiels ;
• la mise en place de systèmes d’économie d’énergie dans les baies électro-
niques ;
• la réalisation de robots capables de générer leur propre énergie.
3/ La troisième section s’intéresse à la conception de robots en utilisant des
matériaux biosourcés, avec :
• un focus particulier sur la réalisation de robots en bois ;
• un récapitulatif des travaux existants sur la réalisation de robots en maté-
riaux biosourcés autres que le bois.
36
Référence Internet
S7714
1
Interface
3/ traduction des résultats de l’étude en termes d’impacts poten- (composants)
tiels sur l’environnement ; Baie de puissance
4/ interprétation : c’est une étape de décision au cours de laquelle
les capacités de simulation sont utilisées (analyse de sensibilité,
variantes dans les scénarios).
Si l’ACV est utilisée pour la conception de produits tangibles, la
réalisation de l’architecture logicielle nécessaire au contrôle du
robot peut s’avérer très impactante pour l’environnement et il est
nécessaire d’utiliser une approche appelée « génie logiciel
durable » [G 8 385] afin de minimiser les impacts en termes de
consommation énergétique [1]. Ces points peuvent être améliorés
en optimisant les phases de l’activité du logiciel, grâce à une pro- (pertes énergétiques,
grammation d’algorithmes efficaces. matériaux polluants, etc.) Chassis
Avant d’aller plus loin, il faut noter que la culture de l’éco- (matériaux, peintures, etc.)
conception n’imprègne pas fortement la communauté des roboti-
ciens, ce qui conduit au fait que la très large majorité des travaux Figure 1 – Principaux composants impactant l’environnement pour
en robotique n’utilisent pas l’ACV ou le génie logiciel durable. un robot
Aussi, ces approches ne seront pas davantage détaillées dans cet
article.
corps en alliages métalliques, tandis qu’un quart de l’impact pro-
Afin de pouvoir aborder les techniques mises en place pour
vient de l’utilisation de moteurs contenant des aimants perma-
réduire l’impact environnemental des robots, il faut tout d’abord
nents réalisés en terres rares,
analyser leurs principaux facteurs d’impact, ce qui est réalisé dans
la section suivante. – de sa phase d’utilisation : dans cette phase, l’impact est lié à la
consommation énergétique, qui pour deux tiers provient de la
nécessité de fournir de l’énergie pour les moteurs du robot seule-
1.2 Facteurs d’impact environnemental ment, et pour un tiers de la nécessité d’alimenter tous les compo-
sants de la baie électronique.
pour un robot
La fin de vie du robot est très peu impactante par rapport aux
Pour un robot, les facteurs d’impact environnemental sont mul- autres phases d’impact.
tiples et sont liés à la réalisation de la machine dans son entièreté.
On peut ainsi noter les principaux facteurs d’impact environne- Ainsi, on se rend compte qu’il existe deux grandes voies d’amé-
mental au niveau des composants du robot (figure 1) : lioration de l’impact environnemental du robot, hors process :
– pour la réalisation des corps en mouvement et du châssis : – durant son utilisation, il est nécessaire de chercher à minimiser
l’énergie consommée par le robot : non seulement minimiser
• utilisation de matières premières dont le cycle de vie entier
l’énergie consommée a un aspect bénéfique sur la réduction de
est impactant (de l’extraction au recyclage, quand c’est pos-
l’impact environnemental de la phase d’utilisation, mais un robot
sible, en passant par la mise en forme et le transport) :
consommant moins d’énergie peut se réaliser avec des moteurs de
alliages d’aciers, d’aluminium, voire utilisation de composites
plus faible puissance (donc utilisant moins de terres rares), néces-
de carbone, de polymères plastiques, etc.,
sitant des variateurs moins puissants (moins de composants pol-
• recouvrement des corps par des peintures ou autres subs- luants dans l’électronique de puissance), et a donc un aspect
tances ; positif sur l’impact lié à la phase de réalisation ;
– pour les articulations : – durant sa réalisation, hors aspects motorisation, il est néces-
• utilisation de moteurs électriques à aimants permanents : saire de minimiser l’utilisation de matériaux impactant :
usage de terres rares dont l’extraction est très polluante, • pour la baie électronique : en utilisant des composants élec-
• pertes énergétiques dans les moteurs, pertes mécaniques par troniques idéalement écoconçus et moins énergivores, en
frottements dans les boîtiers de réduction des articulations ; programmant efficacement la mise en veille/réveil des com-
posants, ou plus globalement en gérant mieux l’allocation
– pour les capteurs, la baie électronique et l’interface de com-
d’énergie entre les composants, etc. (section 2.3),
mande :
• pertes énergétiques dans les composants, mais aussi liées à • pour l’architecture mécanique : en créant des structures
l’utilisation de la partie logicielle, légères mais rigides, idéalement en utilisant des matériaux à
faibles impacts environnementaux, tels que les matériaux
• matériaux rares et polluants dans les capteurs ou les cartes biosourcés.
électroniques utilisées.
Une récente étude réalisée par le cabinet Fizians Environnement À ce jour, et à notre connaissance, les travaux pouvant se
[3] a montré que sur le cycle de vie d’un robot Kuka KR270 (hors revendiquer de l’écoconception en robotique, et qui seront détail-
process – ACV faite sur un cycle de douze ans), son impact envi- lés dans la suite de cet article, se concentrent essentiellement
ronnemental provenait essentiellement (figure 2) : autour de :
– de sa phase de réalisation (hors baie électronique) : dans cette • la définition de techniques permettant de réduire la consom-
phase, les deux tiers de l’impact proviennent de la conception de mation énergétique des robots ;
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Référence Internet
S7714
MWh
due
8 000
60 au cabinet
1
Autres
électronique
En utilisation (en France) Système 0,6 %
50
Conception/réalisation
6 000 d’équilibrage
Moteurs due
kgeCO2
3,4 %
23,1 % 40 aux mouvements
4 000 du robot
66,7 % 30
Fin de vie
Réducteurs 20
2 000 Châssis +
5,2 %
10 corps du robot
(en alliages d’aciers)
Câbles
1,0 % 0
Les rejets de CO2 durant l’utilisation dans d’autres pays seraient plus importants puisque
la production d’énergie en France est due aux centrales nucléaires (rejettant moins de CO2
que d’autres types de centrales)
Figure 2 – Impact environnemental d’un robot Kuka KR270 lors de son cycle de vie [3]
• la conception d’architectures mécaniques de robots à l’aide baisse significative de la facture énergétique. Pour la robotique
de matériaux à faibles impacts environnementaux. autonome, le challenge est autre puisque tout robot consommant
moins est capable d’être autonome plus longuement.
Quoiqu’il en soit, les techniques mises en jeu restent les mêmes
Il est extrêmement important de mentionner que, dans la pour tous types de robots. Il existe quatre grandes classes de
phrase précédente, nous utilisons les termes « pouvant se techniques permettant la réduction de la consommation énergé-
revendiquer de l’écoconception » puisqu’à notre connais- tique qui vont être détaillées ci-dessous :
sance, l’écoconception est une approche balbutiante dans la
communauté des roboticiens. Aucune ACV n’a jamais été pra- • techniques pour l’équilibrage des effets gravitationnels ;
tiquée afin d’analyser l’impact des techniques qui vont être • techniques pour la minimisation des effets inertiels ;
présentées (sauf pour le projet RobEcolo, section 3.1). Il peut
• mise en place de systèmes d’économie d’énergie dans les
donc arriver que l’impact de la solution proposée soit pire sur
baies électroniques ;
certains critères non regardés : par exemple, les techniques
d’économie d’énergie peuvent être très bonnes vis-à-vis de la • robots pouvant générer leur propre énergie.
baisse de la consommation énergétique et du rejet de gaz à
effet de serre, mais très mauvaise sur les aspects pollution des
sols (utilisation de moteurs additionnels réalisés avec des 2.1 Équilibrage des effets gravitationnels
terres rares extrêmement polluantes). Il faut donc prendre les
techniques mentionnées pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire des
techniques de réduction de l’énergie et de conception à l’aide L’équilibrage des effets gravitationnels pour un mécanisme
de matériaux biosourcés, sans préjuger de l’impact environne- (robotisé ou pas) sert à annuler de manière totale ou partielle
mental global de ces solutions. les efforts que doivent fournir les moteurs dudit mécanisme
afin de compenser les effets de la gravité appliqués sur ses
corps [7], [8].
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Référence Internet
S7714
On se rend donc compte que si l’énergie potentielle U est inva- Il est évident que mettre en place des masses additionnelles
riante en fonction de la configuration q du mécanisme, alors les telles que les contrepoids n’est pas désirable du point de vue de
efforts moteurs s’annulent, i.e. τ = 0. De l’équation (1), on en l’augmentation de la masse totale du robot, de son encombre-
déduit aussi que minimiser les variations de l’énergie potentielle ment, des efforts transmis dans ses articulations et de l’augmen-
U vis-à-vis des changements de configurations q revient à minimi- tation des effets inertiels. C’est pourquoi dans de nombreux
ser les efforts moteur τ. robots industriels, les masses des moteurs sont directement utili-
sées à des fins de compensation de la gravité (figure 4) [B1], [B2].
La minimisation des efforts à fournir par les moteurs afin de
mettre en mouvement le mécanisme robotisé a un effet positif sur Il faut noter que les contrepoids peuvent être placés sur les
la réduction de sa consommation énergétique et peut aussi tendre
à améliorer son impact environnemental global. En effet, la réduc-
tion de l’effort à fournir par les moteurs afin de mettre en mouve-
corps du robot, mais aussi sur des mécanismes auxiliaires qui
suivent passivement le mouvement du robot et qui viennent com-
penser les efforts de gravité. De nombreux concepts existent, tels
1
ment le robot peut conduire à la conception de robots utilisant que ceux présentés dans les brevets [B3], [B4], [B5], [B6], [B7],
des moteurs de plus faible puissance, et donc intrinsèquement [B8], [B9] et dans [12], [13], [14].
moins impactants pour l’environnement. On notera cependant que, même si de nombreuses solutions
Il existe trois grandes classes de techniques d’équilibrage des d’équilibrage par contrepoids et systèmes auxiliaires existent, les
effets de la gravité : applications industrielles de telles approches sont souvent limi-
tées à cause d’un accroissement de l’encombrement total du
• équilibrage avec des contrepoids ; robot et des possibilités de collision entre ses corps et celles des
• équilibrage avec des ressorts ; mécanismes auxiliaires portant les contrepoids.
• équilibrage avec des vérins pneumatiques ou hydrauliques.
Elles vont être détaillées dans ce qui suit, et des techniques plus 2.1.2 Équilibrage par ressorts
exotiques seront aussi abordées.
L’équilibrage par ressorts sert à ajouter un stock d’énergie
potentielle de déformation au mécanisme qui servira à compenser
2.1.1 Équilibrage par contrepoids les variations de son énergie potentielle de pesanteur [15], [16].
Deux types de ressorts sont classiquement utilisés pour com-
L’équilibrage par contrepoids sert à redistribuer les masses en penser les effets de la gravité dans les mécanismes : les ressorts à
mouvement du mécanisme afin de fixer l’altitude de son centre longueur à vide nulle (figure 5(a)) et les ressorts à longueur à vide
des masses global [9], [10], [11]. non nulle (figure 5(b)).
Par exemple, pour le robot plan actionné par deux liaisons
pivots motorisées montré sur la figure 3(a), l’altitude du centre
des masses peut facilement être fixée (et donc le robot être équili- Un « ressort à longueur à vide nulle » désigne un ressort
bré) en ajoutant deux contrepoids dont les caractéristiques sont hélicoïdal qui exercerait une force nulle si sa longueur était
les suivantes : nulle. Cela se traduit par le fait que sa courbe caractéristique
force/élongation passe par l’origine (figure 5(a)) [B10], [B11].
(2)
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Référence Internet
S7714
Moteurs électriques
utilisés comme contrepoids
1
Système
d’équilibrage
actif
a schéma de principe : sur cette image le b implémentation sur un KUKA R360 c implémentation sur un PUMA 200
système d’équilibrage actif consiste en
un vérin pneumatique ou hydraulique
dont la pression est contrôlée afin de
compenser une partie de la gravité du
deuxième axe
Fs Fs
ℓ0
F0
ℓ0
F0 = kℓ0
F0 = 0
O x O x
tion, souvent constant pour une charge donnée, permettant de dans [51] par l’ajout d’un mécanisme auxiliaire totalement passif
diminuer les efforts à fournir par les moteurs électriques. de type pantographe permettant de relier l’effecteur au châssis.
Un vérin relié à la partie haute du pantographe permet l’applica-
Il existe aussi des approches basées sur l’utilisation de contre-
tion d’une force purement verticale sur l’effecteur visant à
poids spéciaux, qui sont en fait des réservoirs de fluide. L’avan-
compenser la masse du microscope. Il a été montré expérimenta-
tage est que la masse de ces contrepoids peut être modifiée afin
lement dans [51] que les couples moteurs pouvaient être réduits
de s’adapter à des variations de charges sur l’effecteur, par
de 83 % en statique.
exemple [B15] (figure 8).
La compensation de la gravité peut aussi se faire par l’intermé-
diaire de contrepoids distants (posés sur le châssis) mais connec- 2.1.4 Techniques diverses
tés aux corps du robot via des transmissions hydrauliques [48],
Il existe de nombreuses autres techniques d’équilibrage,
[49], [50]. Un prototype de robot à sept axes a été construit dans
comme l’utilisation de systèmes électromagnétiques [B16] ou la
[49] et il a été montré qu’il était capable de s’adapter à des
conception de robots découplés : des travaux ont été réalisés sur
charges variant de 0 à 10 kg au niveau de l’effecteur.
la compensation de la gravité des robots générant des mouve-
Le vérin peut aussi être monté sur un mécanisme auxiliaire ments avec trois translations de l’effecteur et une rotation autour
comme c’est le cas pour le mécanisme illustré à la figure 9. Le d’un axe fixe qui sont fortement utilisés dans des opérations de
robot représenté est un robot parallèle de type Delta de grande prise et dépose de pièces. L’idée a été de concevoir des robots
dimension, nommé SurgiScope® qui sert en contexte médical afin dont les mouvements de translation verticale de l’effecteur sont
de porter un microscope de 70 kg. Son équilibrage a été réalisé découplés (indépendants) des autres types de mouvements
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Référence Internet
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β1 β1
1
β3
β2
β2
β3
a b
Figure 6 – Exemples de conception de ressorts à longueur à vide nulle présentés dans [17] : le schéma (a) diffère du (b) par le nombre de poulies
utilisées et la position du point d’accroche du câble sur le bâti
2
7
5
4
Région Région 1
des spires des spires 9
actives inactives
6
10
11
41
Référence Internet
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Robot Delta
1 Barre reliée
au vérin
Mécanisme
de compensation
de la gravité
Mv
M2 M3
M1
• par ricochet, utilisation de moteurs de plus faible puissance, réduction de rapports élevés. En effet, à cause de l’étage de réduc-
et donc intrinsèquement moins impactant pour l’environne- tion, les effets gravitationnels vus par les moteurs sont divisés par
ment. n, n étant le rapport de réduction. De plus, ces boîtiers de réduc-
Cependant, elles présentent également des inconvénients : tion ont des moments d’inertie élevés et les frottements y sont
importants. C’est le cas par exemple du robot Staübli TX40, pour
• ces techniques sont difficilement robustes aux variations de lequel les rapports de réduction sont compris entre 32 et 48. À la
charge ; en effet, si la charge varie, l’équilibrage est à refaire ; figure 11, les couples des moteurs des axes 2 et 3 (supportant la
• les techniques proposées conduisent généralement à une majeure partie des effets gravitationnels) sont montrés le long
augmentation de la complexité de réalisation du robot ; d’une trajectoire quelconque et comparés avec les couples simu-
• elles ne sont applicables que si les efforts liés à la gravité lés pour le robot lorsque l’on supprime les effets de gravité (la
sont prépondérants. simulation utilise un modèle dynamique dont les paramètres ont
été identifiés grâce à la procédure [55] et dont les termes de gra-
Ce dernier point est malheureusement rarement le cas, surtout vité sont virtuellement annulés). On se rend compte que l’écart
à cause de l’utilisation de motoréducteurs avec des boîtiers de
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Référence Internet
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40
20
20
1
Couple moteur 2 (Nm)
10
– 60 – 20
– 80 – 30
0 2 4 6 0 2 4 6
Temps (s) Temps (s)
a moteur 2 b moteur 3
Figure 11 – Couples moteurs (côté articulaire) et effets dynamiques pour les axes 2 et 3 du robot Staübli TX40 (pour les autres axes, les effets
de la gravité sont négligeables)
entre les couples mesurés et les effets purement inertiels est 1/ soit on déporte des actionneurs au plus près du châssis afin de
faible. Dans le meilleur des cas, ces effets inertiels ne représentent réduire l’inertie liée à leur présence sur les corps : dans ce cas,
pas plus de 50 % des couples moteurs. En moyenne, ils repré- l’actionnement est réalisé soit :
sentent plutôt 75 % des couples moteurs. Sur un tel type de robot,
annuler les effets de la gravité conduit donc à un faible gain de – par l’utilisation d’une chaîne cinématique fermée composée
consommation énergétique. d’articulations passives ; on rencontre ici deux grands types de
systèmes :
Afin de compenser non plus les effets de la gravité mais les
effets inertiels, des techniques peuvent être utilisées. Elles seront • les robots de type série dont l’un ou plusieurs axes motorisés
présentées dans la section 2.2. sont déportés (figure 12(a)) ; cette approche ne s’applique
généralement que pour l’axe 3,
2.2 Minimisation des effets inertiels • les robots parallèles (figure 12(b)) ; Le problème majeur de
ces robots réside essentiellement dans la taille restreinte de
Comme cela vient d’être vu, pour les mouvements lents, des leur espace de travail et la présence de singularités dedans ;
techniques d’équilibrage par gravité ont été proposées afin de
compenser les efforts moteur nécessaires pour déplacer les élé- – par l’utilisation de renvois par poulies, câbles ou tendons : ici
ments d’un robot et éviter ainsi de consommer de l’énergie. encore, on rencontre deux grands types de systèmes :
Même si ces méthodes ont montré leur efficacité à basse vitesse,
elles ne sont pas efficaces pour les opérations à grande vitesse où • les robots, souvent de type série, dont les axes sont modifiés,
les effets inertiels sont prépondérants. tel que cela a été fait pour certaines parties de robots huma-
noïdes [56] (figure 13(a)) ou pour des robots de télémanipu-
Dans cette section, des techniques permettant de minimiser les lation [s 7 810] ; cette première approche tend cependant à
effets inertiels générés lors du mouvement des corps du robot faire chuter la raideur globale du mécanisme,
vont être introduites.
• les robots parallèles à câbles (figure 13(b)) ; ces robots sont
surtout utilisés pour la manipulation dans les très grands
2.2.1 Allègement de la structure en mouvement espaces ;
L’allègement de la structure en mouvement est longtemps res-
2/ soit par la minimisation de la masse et de l’inertie du système
tée l’approche la plus classique permettant de minimiser la
d’actionnement qui passe par l’utilisation de systèmes de motori-
consommation d’énergie liée aux effets inertiels. L’allègement de
sation efficaces en contexte robotique, c’est-à-dire qui sont
la structure se fait soit par l’allègement :
capables de délivrer des couples importants à vitesse faible tout en
• du système de motorisation en mouvement sur le robot ; ayant une inertie apparente en rotation faible (figure 14(a)). C’est
• de la masse et de l’inertie des corps en mouvement. ce second type d’approche qui a été utilisé dans le cadre de la
conception du Kuka IIWA (figure 14(b)) pour lequel le rapport
charge sur l’effecteur/masse totale du robot est de l’ordre de 0,5
2.2.1.1 Allègement du système de motorisation contrairement à la plupart des robots sériels classiques pour les-
en mouvement sur le robot
quels ce rapport est plutôt de l’ordre de 0,1. Le souci principal de
Afin de minimiser les masses en mouvement, deux techniques cette technique est la tendance du robot à surchauffer à cause de
appliquées pour le système de motorisation sont utilisées de problèmes de ventilation intrinsèquement liés aux besoins de com-
manière classique : pacité de la motorisation.
43
1
44
Référence Internet
S7765
Préhension robotique
et manipulation dextre
par Jean-Pierre GAZEAU
1
Ingénieur de recherche CNRS habilité à diriger des recherches
Institut PPRIME UPR 3346 CNRS – Université de Poitiers – ENSMA
1. Généralités S 7 765v2 - 2
1.1 Système de préhension : pour quoi faire ? — 2
1.2 Effet d’échelle — 4
2. Préhenseurs industriels et technologies associées — 6
2.1 Prise des objets — 6
2.2 Préhenseurs par adhésion — 6
2.2.1 Préhenseurs par aspiration — 6
2.2.2 Préhenseurs magnétiques — 8
2.3 Préhenseurs industriels multidigitaux — 11
2.4 Synthèse comparative des technologies de préhenseurs industriels — 14
3. Main humaine comme référence : taxonomie de prises
et prothèses de main — 16
4. Du préhenseur industriel à la main dextre : modélisation,
qualité de prise et manipulation coordonnée — 20
4.1 Pourquoi une main dextre ? — 20
4.2 Notion de dextérité — 21
4.3 Transmission du mouvement par câbles et modélisation — 22
4.4 Qualité de prise et synthèse de prise — 27
4.4.1 Modélisation et géométrie du contact : matrice de prise G — 27
4.4.2 Configuration de la main robotique :
matrices jacobiennes JM et H — 29
4.4.3 Exemples de critères de qualité exploitant
les propriétés de G et H — 29
4.5 Planification d’un mouvement de manipulation coordonnée — 31
5. Importance du cahier des charges dans le processus de choix
d’un préhenseur — 35
6. Conclusion — 37
7. Remerciements — 37
8. Sigles, notations et symboles — 37
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. S 7 765v2
45
Référence Internet
S7765
1
triel dédié à la main robotique à haut niveau de dextérité. La complexité du
préhenseur augmentera ainsi en fonction du niveau de flexibilité désiré, depuis
la saisie d’objets de formes variées jusqu’à leur manipulation à l’intérieur du
préhenseur. Pour assurer l’exploitation du préhenseur, l’intégration de cap-
teurs est nécessaire pour plusieurs raisons : la localisation des surfaces de
saisie des objets, la détermination de la configuration de la prise, le contrôle
de l’effort de saisie et, plus largement, le contrôle des actions réalisées par le
préhenseur.
La commande de ces systèmes doit permettre, à bas niveau, d’assurer, par le
pilotage des mouvements du préhenseur et par le pilotage de l’effort d’interac-
tion, la saisie des objets et le maintien d’une configuration donnée.
Pour assurer des fonctions plus complexes, telles que la manipulation d’un
objet en bout de doigt, des commandes plus sophistiquées sont mises en œuvre
permettant de planifier et contrôler le mouvement coordonné des doigts en inte-
raction avec l’objet. Cette commande coordonnée des doigts constitue déjà en
soit un exercice de collaboration entre les robots élémentaires que sont les
doigts d’un préhenseur robotisé avec un degré d’actionnement élevé.
L’interaction dynamique du cobot équipé d’un préhenseur avec l’environne-
ment et en particulier avec l’homme vient accroître cette complexité. Des
capacités d’adaptation et de perception de l’environnement doivent alors être
intégrées dans une commande de plus haut niveau apte à répondre en temps
réel ; cette commande s’appuiera en particulier sur l’apprentissage et la mise
en œuvre de stratégies de planification réactive.
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Référence Internet
S7765
Figure 1 – Préhenseurs industriels spécifiques à la tâche : a) préhenseur multilot pour la saisie de moules – b) saisie de colis pour la palettisation
– c) manipulation de morceaux de viande
d e
Figure 2 – Robotique de service : a) robot médical DaVinci (Intuitive Surgical) d’assistance à l’intervention chirurgicale – b) robot aspirateur
domestique Romba – c) robot militaire d’assistance et de surveillance Packbot d’iRobot – d) robot humanoïde Asimo de Honda (3e version) –
e) robot compagnon chien Sony Aibo
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Référence Internet
S7765
Le préhenseur, en tant qu’effecteur ou organe terminal du Différentes échelles relatives à la taille de l’objet peuvent ainsi
robot, est non seulement un élément essentiel d’interfaçage dans être considérées :
le macromonde, c’est-à-dire le monde physique visible qui nous • l’échelle macroscopique ou « macromonde » : le poids de
entoure, mais également dans le micromonde, où les besoins de l’objet, sa géométrie et l’espace de travail imposent des condi-
saisie et de manipulation d’objets de dimension microscopique tions pour la manipulation avec un préhenseur multidigital ;
sont tout aussi importants.
• les échelles microscopique et nanoscopique ou « micro-
monde » : la prépondérance des effets surfaciques par rap-
port aux forces volumiques, les incertitudes liées aux limites
1.2 Effet d’échelle de la perception, ainsi que les rapports signal sur bruit très
Le développement de préhenseurs efficaces requiert la prise en défavorables engendrent des complexités nouvelles. Pour ces
compte des caractéristiques physiques des objets manipulés et, échelles, il existe de nombreuses applications industrielles
en particulier, leurs dimensions. Les interactions préhenseur-objet destinées à assembler des éléments submillimétriques, dont
dépendent fortement de la taille des objets considérés. À l’échelle les dimensions peuvent varier couramment entre 5 et
macroscopique, ces interactions dépendent principalement des 500 μm, comme illustré sur la figure 5 [5]. La manipulation de
forces volumiques et des effets inertiels. ces composants devient alors éminemment complexe, dans
la mesure où la gravité devenant négligeable en regard des
Pour des objets de dimensions submillimétriques [S 7 712] forces d’adhésion, la dépose d’un objet ne se fait plus de
[S 7 777], la prédominance des forces surfaciques (forces d’adhé- manière automatique. La manipulation par adhésion n’étant
sion) sur les effets volumiques induit des problématiques très dif- pas réversible, il est nécessaire de développer des stratégies
férentes. Ces différences, illustrées sur la figure 4, sont connues afin de pouvoir rompre le contact avec le préhenseur et dépo-
sous le nom d’« effet d’échelle ». ser le composant.
48
Référence Internet
S7765
Pour un rapport de rayons de 10, le rapport des surfaces est de 100 tandis que le rapport des volumes est de 1 000. À l’échelle
macroscopique, les interactions volumiques sont prépondérantes par rapport aux forces surfaciques. Cette situation s’inverse
aux échelles microscopique et nanoscopique.
Figure 5 – Exemples de microcomposants : a) grains de pollen, b) bille d’un palpeur de mesure (Ø 120 μm), c) composants micromécaniques :
pignons en polymère (source : Mimotec), d) composants horlogers (calibre 160 Ulysse Nardin)
49
Référence Internet
S7765
2. Préhenseurs industriels La force de saisie est ainsi produite par un élément de succion
assurant un contact étanche avec l’objet, en créant une pression
et technologies associées négative à l’intérieur d’une cavité de préhension comme celle
montrée sur la figure 7a. Le préhenseur peut être composé, en
fonction de la dimension du produit, de sa nature et de sa forme,
2.1 Prise des objets de plusieurs ventouses pour répartir la charge et éviter d’abîmer
le produit manipulé.
La prise d’un objet définit la configuration des éléments maté- Pour un élément de succion, la force initiale de saisie F (expri-
50
Référence Internet
S7765
Ventouse
Vers le silencieux
1
débouchant
Air comprimé
a b
Figure 7 – a) Préhenseur par aspiration (source : Schmalz) – b) Générateur de vide pneumatique – Éjecteur standard (source : Festo)
100 60
90 55
Suction rate qns [l/min]
80 50
70 45
Vacuum [%]
60 40
50 35 8
40 30
25
30
20
20 600 –125–3/8
15
10 Theoretical suction force [N]
0
0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 500
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Operating pressure p1 [bar]
Operating pressure p1 [bar] 400 –105–1/4
300
Air consumption in relation to operating pressure
200 –75–1/4
50
Air consumption qn [l/min]
45 –55–1/4
100
40 8 –40–1/4
35 –30–1/8
0
30
2 0 –0,1 –0,3 –0,5 –0,7
25
20 Vacuum Pu [bar]
15
10
5
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Operating pressure p1 [bar]
b
a
Figure 8 – a) Choix d’un générateur de vide – b) Choix d’une ventouse (source : Festo – Générateur type VN-07)
mètre de passage du Venturi de 0,7 mm. Pour ce générateur, on l’on souhaite maintenir une masse de 4 kg à l’aide d’une
note qu’une pression d’alimentation de 4 bars (0,4 MPa), soit 40 % ventouse, on a théoriquement besoin pour cela d’une force d’aspi-
de vide, sera développée. Le débit d’aspiration sous 4 bars (0,4 MPa) ration d’environ 40 N. La ventouse avec un diamètre de 40 mm
est de 35 l/min et la consommation est d’environ 20 l/min. (40-1/4) répond à cette contrainte en développant une force d’aspi-
ration théorique de 50 N.
Ensuite pour déterminer la force d’aspiration d’une ventouse,
on s’appuiera sur l’utilisation de graphiques donnant cette force Un autre effet intéressant est exploité en préhension robotique :
théorique en fonction du diamètre de la ventouse et de la dépres- il s’agit de l’effet Bernoulli. Cet effet permet de générer une aspira-
sion (figure 8b). À titre d’exemple, en exploitant ce graphique, si tion de l’objet et une saisie par surpression. L’effet considéré
51
Référence Internet
S7765
Alimentation
air comprimé
1 Flux d’air
Echappement
Vide Flux d’air
Echappement
a b
Figure 10 – a) Préhenseur universel (source : Empire Robotics) – b) Préhenseur souple (source : Soft Robotics)
repose sur le fait qu’un écoulement rapide d’un fluide le long d’un (figure 11a) par levier ou manette et utilisent un dispositif méca-
corps produit une dépression localement ; l’objet est alors non pas nique permettant d’inverser le flux magnétique afin de saisir ou
repoussé, mais aspiré en dépit du fait que l’air soit soufflé en direc- relâcher l’objet ferreux. Deux aimants diamétralement polarisés
tion de la pièce à saisir (figure 9). Il en résulte un infime interstice sont mis en œuvre : le premier sur la partie supérieure est en rota-
entre la ventouse et la pièce ; la saisie est donc une saisie sans tion par rapport au second qui est fixe. L’aimant supérieur effectue
contact. Une ventouse à effet Bernoulli est ainsi particulièrement une rotation de 180° pour aligner les pôles des deux aimants et
adaptée à la saisie d’objets fragiles (plaquettes de silicium, par générer ainsi un champ magnétique extérieur puissant. En effec-
exemple) ou à la saisie d’objets à surface poreuse ou irrégulière, tuant la rotation de 180° en sens inverse, les pôles sont en opposi-
ce que ne peuvent pas réaliser les ventouses à dépression. tion et le champ recircule entre les deux aimants en interne, ce qui
annule le champ magnétique extérieur.
On peut également citer deux préhenseurs originaux dotés de
capacités de saisie adaptative exploitant l’aspiration. Le premier – Les préhenseurs à aimants permanents à commutation élec-
préhenseur de cette catégorie est un préhenseur qui s’adapte à la trique : lorsque la commutation est électrique, on obtient un
forme de l’objet en compressant par aspiration une poche souple aimant permanent piloté. Dans ce cas, deux configurations existent
en élastomère remplie de matériaux granulaires (figure 10a). Le pour piloter la saisie électriquement (figure 11b). Pour la première
point fort de cette technologie réside dans sa conception simple à configuration dite monostable, le levage est réalisé par un aimant
bas coût ; pour autant, la technologie ne permet pas de contrôler permanent et la libération se fait par un électro-aimant qui neutra-
avec précision la dépose, et n’offre pas de détection de prise inté- lise le champ magnétique permanent. Pour la seconde configura-
grée. Le second préhenseur est un préhenseur souple dont les tion dite bistable, un signal électrique détourne deux aimants
tentacules qui le constituent peuvent être contractées par aspira- permanents l’un de l’autre, ce qui engendre un champ magné-
tion (figure 10b). tique, ou au contraire, une annulation mutuelle.
– Les préhenseurs à aimants permanents à commutation pneu-
2.2.2 Préhenseurs magnétiques matique : dans ce cas, l’aimant (figure 11c) est déplacé dans un
logement interne au moyen d’air comprimé, de sorte qu’en posi-
Les préhenseurs magnétiques générant une force de préhen- tion d’arrêt, aucun magnétisme n’est présent à l’extérieur et en
sion pour objets ferreux uniquement se déclinent en deux catégo- position de marche, le champ magnétique de l’aimant est présent
ries distinctes : à l’extérieur.
1/ Les préhenseurs à aimants permanents qui se déclinent en trois Ces trois catégories de préhenseurs offrent l’avantage de
sous-catégories : conserver leurs propriétés magnétiques indéfiniment. Une dété-
– Les préhenseurs à aimants permanents à commutation rioration du champ magnétique est possible en situation de haute
manuelle : ces préhenseurs sont actionnés manuellement température si le point de Curie du matériau magnétique consi-
52
Référence Internet
D5341
Actionneurs électromécaniques
pour la robotique et le positionnement
Fondamentaux et structures de base 1
53
Référence Internet
D5341
1 sont tour à tour considérés. L’analyse proposée permet ainsi de dégager les
propriétés intrinsèques caractérisant les différentes technologies en présence.
54
Référence Internet
D5341
Système hydromécanique
a b
a actionneur hydraulique
b actionneur électrohydraulique
Capteur Calculateur Servocommande
Puissance hydraulique
Système FBW
Le système FMW (Fly by wire) est le système de commande de vol hydraulique/électrique équipant l’airbus A 380
(source Airbus département Commandes de vol)
Figure 2 – Des premières expérimentations aux concepts avancés de l’électromécanique : plus de 150 ans d’histoire
correspondent notamment aux forces de Laplace subies par un cir- celui d’un conducteur mobile se déplaçant dans un champ fixe
cuit de courants plongé dans un champ magnétique fixe. En (effet exploité dans les générateurs électrodynamiques).
régime dynamique, l’effet réciproque conduit à la création d’un Donnant lieu à des applications relativement spécifiques telles
courant induit au sein d’un conducteur soumis à un champ varia- que les générateurs à très haute tension (plusieurs GV), il est
ble. Ce phénomène d’induction électromagnétique concerne ainsi également possible d’exploiter un couplage utilisant la compo-
indifféremment le cas d’une bobine fixe plongée dans un champ sante électrique du champ (effets électrostatiques) grâce aux
d’intensité variable (effet exploité dans les transformateurs) ou actions réciproques subies par des corps électriquement chargés
55
Référence Internet
D5341
x
Couplage électrique
Effet direct : actions mécaniques
subies par des diélectriques
polarisés et/ou des qc2
conducteurs chargés
Effet inverse : variation de charge qc1
1
ou de potentiel résultant
du déplacement des sources
de champ
qc charge électrique
Couplage « magnétique »
Effet direct : actions mécaniques
subies par des corps aimantés
et/ou des conducteurs
parcourus par des courants
Effet inverse : force électromotrice
induite par le mouvement
relatif des sources de champ
i1
i2
Couplage électro-élastique
Effet direct : déformation d’un diélectrique
soumis à un champ électrique qc
(effet piézoélectrique inverse) x
Couplage « magnéto-élastique »
Effet direct : déformation d’un corps aimanté
x
soumis à un champ magnétique
(effet piézomagnétique inverse)
56
Référence Internet
D5341
1
ordre dans les alliages magnétostrictifs à base de terres rares
tels que le Terfenol-D. En revanche, les contraintes dévelop-
pées par effets piézoélectriques ou magnétostrictifs atteignent
couramment plusieurs dizaines de MPa, dépassant ainsi de plu-
sieurs ordres de grandeur les pressions exploitées dans les
convertisseurs à effets électromagnétiques.
Figure 5 – Microactionneur électrostatique, microturbine à gaz
(société Silmach)
1.2.4 Couplages électro-thermo-élastiques :
alliages à mémoire de forme
ou polarisés. Si ces effets se révèlent généralement peu perfor-
mants comparés au couplage magnétique, ils trouvent néanmoins Certains alliages métalliques tels que les composés de type NiTi,
à l’échelle micrométrique des applications très prometteuses dans CuZnAl ou CuAlNi présentent des propriétés thermoélastiques
le domaine des microsystèmes (figure 5). remarquables qui permettent de contrôler leur état de défor-
mation, dans des proportions relativement importantes (plus de
50 000 ppm pour certains composés) par simple variation de la
température. La déformation obtenue résulte d’une transition de
À noter que l’intensité des forces d’origine magnétique phase solide de type martensitique-austénitique. Le corps est alors
engendrées à l’interface (entrefer) séparant les parties fixes et capable de recouvrer à chaud sa forme initiale préalablement
mobiles d’un convertisseur électromagnétique varie en raison modifiée à froid, d’où le nom d’alliage à mémoire de forme. Si les
du carré de l’intensité du champ produit. Ainsi sous 1 T, la contraintes développées durant la phase de chauffage peuvent
force surfacique disponible est au maximum de 0,4 MPa. atteindre des valeurs très élevées (de l’ordre de 100 MPa), les
Cette force, qui peut paraître relativement faible comparée temps de réponse (constante de temps thermique) sont par
aux pressions couramment exploitées en hydraulique (de principe relativement faibles (de l’ordre de 0,1 à 1 s pour des
10 à 35 MPa), est en revanche près de 105 fois plus élevée dispositifs de dimensions millimétriques). Le contrôle électrique de
que la force d’origine électrostatique générée sous un champ la température (par effet Joule) au moyen d’un courant circulant
électrique de 1 MV · m–1. directement dans le matériau permet de disposer d’un actionneur
relativement compact. L’effet peut être exploité selon diverses
géométries, donnant lieu à des actionneurs linéaires ou rotatifs
1.2.3 Couplages électro-magnéto-élastiques : utilisés notamment en robotique (préhenseur, robot d’inspection).
piézoélectricité, magnétostriction
1.2.5 Interaction électromécanique
Sous l’effet d’un couplage des propriétés diélectriques, magné- dans les fluides
tiques et élastiques de la matière, la déformation d’un corps et son
état de polarisation électromagnétique peuvent se trouver en Outre les processus exploitant les actions dynamiques engendrées
étroite dépendance. Rattachés à la classe des processus d’inter- par le champ électromagnétique sur des corps solides, déformables
action divalente (§ 1.2.1), les effets de ce couplage électro- ou ou indéformables, il est également possible de tirer profit des forces
magnéto-élastique sont directement exploitables en conversion électrodynamiques s’exerçant au sein de certains fluides.
d’énergie. Une première classe de processus concerne ainsi les couplages
magnétohydrodynamiques prenant naissance dans des fluides
Étudié dès la fin du XIXe siècle par les frères Curie, le phéno- conducteurs soumis à la variation d’un champ magnétique. Les
mène de couplage électroélastique linéaire connu sous le nom de courants induits qui en résultent sont à même de modifier les
piézoélectricité est observé dans certains cristaux naturels tel que caractéristiques de l’écoulement [3].
le quartz (SiO2) ou dans des composés synthétiques comme les
céramiques ferroélectriques de type PZT (Pb(Zr-Ti)O3). Il se mani- Une application directe de tels effets concerne le brassage des
feste au travers de deux effets réciproques conduisant à (figure 4) : coulées dans le domaine de la métallurgie. Appliqués au domaine
– la polarisation électrique du corps sous l’action d’une naval, ce procédé peut être utilisé pour propulser un navire sans tur-
contrainte mécanique d’origine extérieure (effet piézoélectrique bine grâce aux forces générées dans l’eau de mer sous l’action
direct) ; combinée d’un courant électrique et d’un champ magnétique.
– la déformation mécanique de ce même corps lorsqu’il est Remarquons qu’une difficulté majeure repose sur la production
soumis à un champ électrique (effet piézoélectrique inverse). de champs et de courants d’intensité significative, au sein de
Constituant le pendant magnétique des effets de couplage milieux dont les propriétés de perméabilité et de conductivité
précédemment décrits, le phénomène non linéaire de magné- restent souvent limitées. Pour cette raison, la mise en jeu
tostriction conduit à l’allongement d’un barreau de fer soumis à d’aimants supraconducteurs s’avère le plus souvent nécessaire.
un champ magnétique longitudinal (figure 4). Un effet de striction Une autre famille de processus utilise la possibilité de moduler
est conjointement obtenu dans les directions transversales (effet la viscosité d’un fluide elle-même à l’aide du champ électro-
Joule transversal). Réciproquement, le barreau s’aimante sous magnétique dans lequel il est plongé. Tel est le cas des liquides
l’effet d’une déformation longitudinale (effet Villari). Ce phéno- électro- ou magnétorhéologiques. Ce type de comportement est
mène peut également se manifester, suivant la géométrie obtenu à l’aide de suspensions non colloïdales à base de poudres
considérée, au travers d’autres modes de couplage donnant lieu à grains micrométriques dotées de propriétés diélectriques (fluides
notamment à des effets de flexion (effet Guillemin) ou de torsion électrorhéologiques) ou ferromagnétiques (fluides magnéto-rhéo-
(effet Wiedemann). logiques). Dans ce deuxième cas, la viscosité apparente du fluide
57
1
58
Référence Internet
D5342
lieu aux solutions les plus classiquement employées pour produire un effort ou
un mouvement à partir d’une source d’énergie électrique, l’idée d’utiliser les
déformations produites au sein de certains types de matériaux, dits électroac-
tifs, constitue une alternative de plus en plus crédible, notamment dans le cas
d’actions électromécaniques distribuées (structure intelligente).
Sur la base de la classification des procédés et structures exposée dans le
dossier précédent [D 5 341], le présent dossier précise les conditions de mise
en œuvre des solutions techniques correspondantes.
Les éléments de conception et de dimensionnement de l’actionneur font
l’objet de la première partie. Les techniques d’alimentation électronique
employées pour le pilotage des différentes structures à armature inductive ou
capacitive sont ensuite examinées. Enfin, les lois de commande permettant le
contrôle de l’actionneur selon différentes stratégies (commande en position
vitesse ou en effort) font l’objet de la dernière partie (cf. dossiers sur les
machines asynchrones [D 3 620] [D 3 622] et [D 3 623]).
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D5342
1. Éléments de conception Conformément à la classification qui veut que l’on sépare les
structures résonantes des structures quasistatiques, les éléments
de conception associés aux moteurs piézoélectriques suivent logi-
1.1 Principes du dimensionnement quement cette différenciation.
électromécanique
1.2 Prise en compte des contraintes
De manière générale, le déroulement du processus de mécaniques et thermiques
1
conception d’un actionneur électromécanique s’articule autour
des trois préoccupations incontournables que constituent : 1.2.1 Cas des machines électromagnétiques
– la formulation du cahier des charges traduisant le besoin sur le
plan électromécanique ; Dans la conception des machines électromagnétiques, la prise
– la définition d’un concept répondant à ce besoin ; en compte des contraintes mécaniques et thermiques reste une
– enfin, la détermination des caractéristiques physiques de étape primordiale car elle conditionne non seulement la
l’objet recherché. configuration de la structure envisagée mais aussi son cycle de
fonctionnement et sa durée de vie.
Quoique bien souvent négligée, l’étape de définition du cahier
des charges constitue une clé décisive dans la recherche d’une solu- Ainsi si l’on considère les aspects thermiques, le dimensionne-
tion optimisée vis-à-vis d’un besoin fonctionnel donné. Cette tâche ment de la machine qui passe par le choix combiné d’une charge
est d’autant plus délicate que les conditions de service des disposi- linéique et d’une densité de courant volumique reste majoritaire-
tifs considérés sont de plus en plus complexes (fonctionnement en ment tributaire du système de dissipation des pertes et de l’envi-
régime fortement variable, prise en compte de contraintes sécuri- ronnement dans lequel la machine doit fonctionner
taires...). Il s’agit à ce stade de définir précisément un ensemble de (environnement confiné ou ventilé). En effet, en première approxi-
contraintes et de critères dimensionnants tels que la caractéristique mation, le produit de ces deux variables donne une image de
effort-vitesse, les conditions d’environnement thermiques... l’échauffement moyen généré au sein de la machine par les pertes
Une fois le besoin formulé, il s’agit de définir le concept Joule. Le tableau 1 résume à ce titre de façon non exhaustive, les
d’actionneur servant de base à la synthèse de la solution soit par valeurs de charge linéique et de densité de courant usuellement
sélection au sein d’un panel de solutions traditionnelles, soit au exploitées en fonction du mode de refroidissement envisageable.
travers d’une démarche innovante. Compte tenu de l’éventail des Exemple
concepts potentiellement pertinents, une phase comparative,
généralement fondée sur un prédimensionnement par voie analy- À titre d’illustration, on peut citer l’exemple suivant des moteurs
tique des structures préselectionnées, est souvent nécessaire. industriels asynchrone à cage d’écureuil de petite et moyenne
puissances distribués par la société Intradeq et dont la puissance utile
À l’aide des modèles disponibles pour caractériser finement la P u dépend de la température ambiante.
structure retenue, il s’agit enfin de procéder à la détermination
précise des caractéristiques physiques définissant la solution au Ainsi, à puissance nominale P n donnée pour une température
problème posé (dimensions, choix des matériaux, forme d’onde ambiante de 40 oC, la puissance utile est paramétrée en fonction de
d’alimentation...) et les spécifications visées (efforts nominaux, la température comme suit :
contraintes géométriques). Pu = k t Pn
À l’issue de l’étape de dimensionnement, la solution obtenue avec k t = 1 pour T = 40 oC et k t = 0,76 pour T = 60 oC.
doit enfin être validée et affinée en prenant en compte des aspects
avancés négligés lors des étapes précédentes (phénomènes vibra-
toires, etc.). Faisant généralement appel à la réalisation d’un proto- Les matériaux constitutifs constituent naturellement une limita-
type, cette étape s’appuie de plus en plus sur les ressources tion thermique avec leur température de fonctionnement maxi-
qu’offrent la simulation numérique (prototypage virtuel). male intrinsèque. Si les matériaux de bobinage ainsi que les
matériaux constituant le circuit de guidage de flux (tôles ferroma-
gnétiques, ferrite) offrent par classe distinctive (délimitée par les
Soulignons qu’une des difficultés majeures du problème températures de fonctionnement) une large marge de manœuvre,
méthodologique associé à la conception d’un convertisseur des matériaux plus spécifiques tels que les aimants permanents ou
électromécanique repose sur la mise en jeu de compétences les matériaux composites imposent des températures de fonction-
pluridisciplinaires étroitement couplées au sein d’une nement relativement basses pour certains type d’application (sys-
démarche éminemment itérative. tèmes embarqués, environnement confiné).
Convection forcée : refroidissement par air ventilé 4,5 · 105 10 à 15 4,5 · 105 à 6,8 · 105
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1
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61
1
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1.2.2 Actionneurs
L’actionneur le plus simple imaginable est un barreau de maté-
riau PZT, à section rectangulaire ou cylindrique, pour lequel un
couplage électromécanique en mode longitudinal est exploité. Le
a mode longitudinal déplacement atteignable dépend alors directement de la tension
appliquée aux bornes du barreau. On peut facilement montrer (le
lecteur pourra se référer à [S 7712] pour le modèle fin de couplage
tension-déplacement) que le déplacement U pouvant être généré
est lié à la tension appliquée V aux extrémités du barreau :
U = d33.V avec d33 (m/V) la constante piézoélectrique. Pour un
matériau conventionnel comme le PIC 151 produit par Physik Ins-
trumente GmbH & Co, le déplacement générable est de l’ordre de
+ 0,3 micron pour une tension de 1 000 V. Un déplacement aussi
faible conduit à largement préférer des structures multicouches,
i.e. avec un empilement de couches de matériaux PZT. Cette stra-
tégie de conception d’actionneurs a été développée dans les
b mode transversal
années 1980. La tension employée peut alors être divisée par 100
pour un même déplacement. Le stack, en reprenant le terme
anglo-saxon souvent utilisé également en langue française, est
alors conçu avec deux réseaux d’électrodes entre les couches for-
mant des peignes croisés. Chaque peigne est relié à une électrode
externe pour alimenter le composant (figure 3).
Nota : l’ensemble des notations introduites est repris en fin d’article.
Pour fixer les idées, on peut voir dans le tableau 1 les caracté-
+ ristiques d’un stack alors exploitable. Le déplacement maximal est
de quelques dizaines de microns pour des composants commer-
ciaux.
Il faut souligner en complément de ce tableau les dynamiques
c mode de cisaillement de réponse pouvant être obtenues avec de tels actionneurs : il est
alors possible de disposer de temps de réponse de l’ordre de la
Figure 2 – Représentation des trois modes de couplage électroméca- microseconde. Dans le domaine de la robotique, cette propriété
niques possibles avec un barreau parallélépipédique PZT : le bar- est bien sûr d’intérêt comme nous le verrons dans la suite.
reau connaît un allongement (forme finale en pointillés) sous
l’action de la tension appliquée. Les flèches représentent les direc- Le déplacement maximal est atteignable en l’absence de charge
tions de déformation sur l’actionneur : il s’agit de la course libre de l’actionneur. De
manière complémentaire, un actionneur piézoélectrique est défini
par l’effort maximal (tableau 1), désigné également comme
Cedrat Technologies en 2008 par exemple. Dans la suite, et l’effort de blocage, qui rend nul le déplacement par rapport à sa
comme c’est généralement l’usage, nous allons distinguer deux longueur initiale. Dans des conditions de fonctionnement quasi-
composants pouvant être exploités en robotique : statiques, qui sont valides dans nombre d’applications robotiques,
– l’actionneur piézoélectrique, qui va permettre d’accéder à les deux grandeurs que sont le déplacement maximal à vide et
des déplacements d’amplitude finie, généralement en deçà du l’effort de blocage définissent le domaine de fonctionnement de
millimètre ; l’actionneur. La figure 4 donne la forme de la caractéristique
65
Référence Internet
S7769
Déplacement
Umax V = Vmax
1
Figure 3 – Principe de construction d’un actionneur piézoélectrique
multicouches : chaque couche est soumise à une tension électrique
provoquant son allongement Tension
croissante
Effort
effort-déplacement pouvant être obtenue pour différentes ten- Fmax
sions.
L’emploi de structures multicouches est possible avec les diffé- Figure 4 – Diagramme effort-déplacement représentant le domaine
rentes géométries introduites précédemment. Par exemple, Noliac d’exploitation d’un actionneur piézoélectrique
propose des structures pleines ou tubulaires (figure 1), des élé-
ments de type bilame permettant de générer un moment de
flexion ou des éléments annulaires qui vont permettre par
l’emploi d’un mode de cisaillement de générer un déplacement
selon la perpendiculaire à l’élément. Les variations de formes
associées aux variations de géométrie et à l’exploitation des trois
modes possibles de couplage électromécanique permettent de
disposer de domaines de travail effort-déplacement assez dis-
tincts, pour s’adapter au besoin. Malgré tout, les amplitudes de
déplacement restent en deçà du millimètre. Il existe donc des
actionneurs piézoélectriques proposés avec un dispositif d’ampli-
fication mécanique intégré. Cedrat Technologies propose par
exemple une gamme d’actionneurs où une structure déformable
est intégrée autour du composant actif (figure 5) pour un gain en
déplacement d’un ordre de grandeur par rapport à une céramique
multicouches seule.
1.2.3 Moteurs
La section 1.5 montrera l’usage d’actionneurs piézoélectriques
dans des dispositifs robotiques. Bien entendu, nombre de
contextes applicatifs requièrent des déplacements d’amplitude Figure 5 – Vue d’un actionneur piézoélectrique avec structure méca-
nique amplificatrice intégrée (Cedrat Technologies APA®60S)
centimétrique, sinon potentiellement infinie en translation ou en
rotation. Deux familles de moteurs permettent d’obtenir de telles
caractéristiques.
GmbH & Co, avec la technologie Piezowalk®. À tout instant, les
■ Moteurs à fonctionnement quasi-statique parties fixes et mobiles du moteur sont en contact. La transmis-
sion du mouvement est permise par le frottement entre l’élément
Dans la première famille, le mouvement est obtenu en réalisant mobile et les actionneurs élémentaires.
pas à pas la translation ou la rotation souhaitée. Deux principes
sont essentiellement exploités. Le premier principe consiste à Le deuxième principe est celui de l’exploitation du phénomène
effectuer le mouvement d’avance, qu’il soit de rotation ou de de stick-slip pour pouvoir réaliser un mouvement d’avance sans
translation, en combinant plusieurs jeux d’éléments actifs. La interruption de contact entre l’élément piézoélectrique et l’élément
figure 6 représente à titre d’exemple le cycle élémentaire dans le mobile. Un profil de vitesse asymétrique est en effet utilisé pour
cas d’un actionneur Nexline proposé par Physik Instrumente avancer à vitesse « lente » l’élément mobile, en ayant alors adhé-
Tableau 1 – Caractéristiques principales de stacks piézoélectriques, pour une tension d’alimentation de 120 V
(Physik Instrumente GmbH & Co)
Dimensions
Déplacement maximal
Désignation (largeur × longueur × Effort maximal (N) Raideur (N/micron)
(microns)
hauteur, mm)
P-885.51 5 × 5 × 18 18 900 50
66
Référence Internet
S7769
Élément fixe
Éléments PZT
Élément mobile
1
Figure 6 – Principe de fonctionnement du moteur piézoélectrique à technologie Piezo Walk® (Physik Instrumente GmbH & Co)
Déplacement
de l’actionneur
Élément mobile
Zone de contact
Temps Actionneur
PZT
Figure 7 – Profil de commande de l’actionneur piézoélectrique et structure d’un moteur exploitant l’effet de stick-slip (cinématique simplifiée à
partir du principe du moteur PI Inertia Drive, Physik Instrumente GmbH & Co)
67
Référence Internet
S7769
1
Élément PZT
100
(A)
(B)
50
mobile (USR [Shinsei Corporation]). Comme pour les moteurs dits puissants, ne développent par exemple qu’une puissance maxi-
quasi-statiques, ces moteurs reposent sur la friction pour accumu- male de 10 W. L’actionnement piézoélectrique ne se justifie donc
ler les déplacements élémentaires obtenus par effet piézoélec- pas par la puissance disponible. Il est en revanche très intéressant
trique. Cette friction conduit à l’existence d’un effort maximal en termes de puissance volumique, avec des moteurs piézoélec-
transmissible. L’application d’une charge tendant à diminuer le triques dont la taille est particulièrement intéressante pour l’inté-
mouvement élémentaire pouvant être réalisé, un couplage effort- gration en robotique.
vitesse existe par ailleurs (figure 10).
L’actionnement piézoélectrique se distingue également par la
Dans leur ensemble, les moteurs piézoélectriques permettent de précision de positionnement accessible et la sécurité intrinsèque
réaliser des mouvements de rotation continue ou de translation des actionneurs. Ces deux points seront précisés dans la suite,
de grande amplitude sur plusieurs dizaines de millimètres. Le tout comme son intérêt dans des milieux où les contraintes
tableau 2 montre les gammes de vitesses et d’effort accessibles
d’usage sont fortes. En effet, l’effet piézoélectrique inverse
pour des moteurs linéaires : les variations sont significatives du
exploité et la nature des matériaux utilisés donnent des avantages
fait des technologies différentes, mais l’on peut constater des
vitesses maximales de l’ordre de la centaine de mm par seconde, évidents à l’actionnement piézoélectrique pour un fonctionnement
et des efforts de l’ordre de la centaine de N. dans des ambiances sévères, dans le vide (pour des applications
spatiales par exemple) ou dans un champ magnétique intense
(pour des applications médicales par exemple).
1.3 Caractéristiques spécifiques
1.3.2 Actionneurs piézoélectriques
1.3.1 Caractéristiques communes La course des actionneurs piézoélectriques, en deçà du milli-
Avant de distinguer le cas des actionneurs et des moteurs, deux mètre, peut être vue bien entendu comme une limite forte à leur
remarques d’ordre général peuvent être faites. En termes de puis- usage. Elle peut dans le même temps être un avantage, en offrant
sance tout d’abord, les actionneurs et moteurs piézoélectriques la possibilité de limiter les mouvements d’un système robotique,
existants sont plus limités que les actionneurs électromagnétiques par exemple en contexte médical où un système robotique doit
ou hydrauliques. Les moteurs USR (Shinsei Corp.), parmi les plus offrir un haut niveau de sécurité.
68
Référence Internet
S7769
1
est leur dynamique. Des temps de réponse de quelques dizaines dans un plan force-vitesse. Il est donc difficile d’exploiter un
de microsecondes peuvent être obtenus avec des stacks PZT. même modèle pour le dimensionnement à la fois des actionneurs
et des moteurs piézoélectriques.
Le pilotage en déplacement d’un actionneur piézoélectrique
nécessite de gérer la présence d’une hystérésis importante, de Les actionneurs piézoélectriques peuvent être vus comme des
ressorts dont on pilote la caractéristique par la tension qui leur est
l’ordre de 10 à 15 %. Un simple pilotage en tension en boucle
appliquée. En deçà de leur fréquence de résonance, on écrit donc
ouverte ne conduit qu’à un comportement assez imprécis, qui en
usuellement que le déplacement U est lié à la tension V et à
limite l’usage. l’effort généré F par :
En termes d’intégration, il faut souligner la possibilité de dépo-
(1)
ser le matériau piézoélectrique en surface d’un substrat. Cela peut
permettre de réaliser une intégration à l’échelle microscopique, avec N la caractéristique de l’actionneur et K sa raideur. Le produit
par exemple pour combiner des mouvements comme cela a pu est homogène à une force et pour la tension maximale Vmax,
être démontré dans le domaine de la microrobotique [3]. ce produit est égal à l’effort bloqué Fmax qui caractérise le compo-
sant. Le déplacement maximal, en l’absence d’effort, est lui égal à
Umax = Fmax /K à partir de cette même relation.
1.3.3 Moteurs piézoélectriques
L’application d’une charge sur l’actionneur va provoquer une
Quelle que soit la technologie utilisée, les moteurs piézoélec- variation des déplacements atteignables. Si la charge est
triques offrent des résolutions très importantes, typiquement en constante et égale à Fc, son application peut être modélisée
deçà du micron en génération de translation. Il s’agit là d’un comme décalant la caractéristique effort-déplacement d’un dépla-
avantage pour toutes les applications de précision. S’y ajoute cement ΔU (figure 11).
l’avantage de disposer d’un couple de maintien en l’absence Dans le cas où le chargement peut être décrit comme variant
d’alimentation. Tous les moteurs piézoélectriques utilisent en linéairement avec le déplacement, donc modélisable par un res-
effet la friction d’un élément actif pour la transmission de mou- sort mis en face de l’actionneur, la caractéristique de fonctionne-
vement. En l’absence de courant, le contact avec frottement qui ment va dépendre du rapport entre raideur de l’actionneur et de la
a lieu peut alors éviter de recourir à l’usage d’un frein en paral- charge. La course accessible sera alors égale à U1 = Umax. K/
lèle. À titre d’exemple, un moteur USR-60 (Shinsei Corp.) a un (K + Kc) avec Kc la raideur de la charge. Cette situation est très fré-
quemment rencontrée, car les actionneurs piézoélectriques sont
couple de maintien de 1 N.m, pour un couple nominal de
souvent couplés à des mécanismes flexibles, donc exploitant
0,5 N.m.
l’élasticité de la matière pour l’obtention de mouvements, avec un
Les caractéristiques cinématiques sont par ailleurs souvent effet ressort qui est alors significatif.
naturellement proches des vitesses de translation ou rotation Ces modèles sont des outils efficaces pour dimensionner un
requises par les tâches robotiques : un moteur piézoélectrique actionneur dans nombre d’applications robotiques. Il s’agit alors
peut être envisagé plus facilement que des actionneurs conven- de bien évaluer la nature du chargement qui, comme on vient de
tionnels en prise directe, sans intégration de réducteur, ce qui le souligner, peut largement influer sur le domaine de travail de
est alors bénéfique en termes d’inertie vue par le moteur, de jeu l’actionneur. On considère usuellement que cette approche est
de fonctionnement néfaste à la précision, et finalement de com- valable jusqu’à des fréquences de pilotage égales à un tiers de la
pacité. résonance de l’ensemble actionneur et charge liée. Ce domaine de
Déplacement Déplacement
Umax
Fc = Kc.U
Caractéristique à vide
U1
ΔU Caractéristique à vide
Fc Fmax
Effort F1 Effort
Caractéristique sous charge Point de fonctionnement
Figure 11 – Évolution de la caractéristique effort-déplacement en fonction de la charge appliquée à un actionneur piézoélectrique. À gauche,
cas d’une charge constante et à droite cas d’un chargement variant avec le déplacement
69
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S7769
travail est assez souvent celui visé pour éviter par ailleurs des dif- dynamique, sa compacité, sa résolution ont été exploités aussi
ficultés de commande liées à une mise en résonance du système. bien en robotique de production, de précision, qu’en robotique
Les actionneurs piézoélectriques peuvent tout de même aussi médicale ou mobile.
parfois être utilisés via leur mise en résonance comme nous le
verrons sur certains exemples. Le dimensionnement est alors 1.5.1 Robotique de production
beaucoup plus délicat. Le comportement en résonance est celui
d’un système masse-ressort, avec un déplacement atteignable qui La capacité dynamique de l’actionnement piézoélectrique a été
1
est lié au facteur de qualité mécanique de l’actionneur, générale- exploitée dans le domaine des structures actives, hors du champ
ment supérieur à 100. Le dimensionnement doit alors tenir de la robotique : la compensation de vibration de structures est
compte des limitations en contrainte du matériau, en température alors réalisée de manière efficace avec des actionneurs piézoélec-
du fait de l’échauffement du matériau à haute fréquence, et de la triques. On retrouve ce type d’exploitation par exemple dans [6],
tension de pilotage. qui montre l’exploitation de transducteurs piézoélectriques pour la
Pour les moteurs piézoélectriques, on dispose d’informations de compensation de manière active des vibrations liées au premier
niveau variable sur les caractéristiques de fonctionnement et fina- mode propre d’un robot parallèle.
lement sur un modèle de fonctionnement. Dans tous les cas, le Dans [7], les capacités dynamiques des actionneurs PZT sont
comportement au contact entre la céramique PZT et l’élément exploitées par le Fraunhofer IPA à Stuttgart pour concevoir une
mobile va varier en fonction de la charge d’une manière assez cellule d’usinage robotisée (figure 12). Un robot industriel porte la
semblable à ce qui a été décrit pour un actionneur. L’augmenta- pièce à usiner, et un dispositif actif porte la broche. Les action-
tion de la charge sur un moteur piézoélectrique tend donc à dimi- neurs intégrés au porte-broche ont une course de 150 microns,
nuer le pas élémentaire d’avance, et à fréquence constante, qui après amplification mécanique permet de disposer de capaci-
finalement la vitesse atteignable. Les diagrammes du type repré-
tés de correction de 0,5 mm dans les trois directions de l’espace.
senté en figure 10 peuvent donc être utilisés pour rechercher un
Les déplacements sont obtenus en présence d’efforts significatifs,
point de fonctionnement adéquat pour l’actionnement d’un sys-
de l’ordre de 1 000 N, dus à l’usinage. Avec ce schéma où un
tème.
robot accomplit les mouvements macroscopiques et le porte-bro-
che accomplit les mouvements microscopiques, une amélioration
1.4.2 Mise en œuvre d’un facteur 8 de la précision est démontrée grâce à l’apport de
l’actionnement PZT.
Sur le plan matériel, la mise en œuvre suppose essentiellement
de gérer l’exploitation de matériaux céramiques. Il s’agit en effet
de matériaux présentant un comportement élastique fragile sup- 1.5.2 Robotique de précision
portant peu la mise en traction et le cisaillement. Pour les stacks
PZT, des composants déjà protégés existent, avec une intégration La capacité à maîtriser des déplacements avec une résolution
de la céramique dans une structure qui va précharger la céra- micro, voire nanométrique, a rendu l’usage des actionneurs pié-
mique d’une part et empêcher d’autre part l’application de zoélectriques très fréquent dans le domaine de la robotique de
moments parasites. Il faut sinon veiller à empêcher une telle situa- précision. Des produits comme les plates-formes PI Piezo Scanner
tion, en créant des liaisons rotules au niveau des extrémités de permettent ainsi de contrôler des mouvements dans le plan sur
l’actionneur, et en empêchant le chargement en traction de une amplitude de 20 microns × 20 microns, avec une répétabilité
l’actionneur. inférieure à 4 nanomètres, et une résolution de l’ordre du nano-
mètre. L’exploitation de moteurs piézoélectriques permet d’accé-
Pour les moteurs, les éléments actifs sont généralement proté-
der à des déplacements plus conséquents, pour des tâches
gés et intégrés pour assurer un fonctionnement correct. Ces
toujours de positionnement de précision. Le même constructeur
moteurs exploitent cependant souvent un élément en céramique
propose désormais par exemple l’intégration de moteurs piézoé-
comme élément mobile, pour ses propriétés en termes de frotte-
lectriques de technologie pas à pas dans une plate-forme
ment et d’usure. L’accouplement du moteur avec sa charge doit
alors être réalisé avec soin pour éviter un endommagement de cet hexapode. Ce type de structure robotique parallèle (figure 13) per-
élément, les critères étant les mêmes que pour un actionneur met de disposer des six mouvements possibles de translation et
dans la section précédente. de rotation, avec une amplitude des déplacements de 1,5 mm, des
rotations de 2°, pour une résolution de 0,1 micron, avec une
Sur le plan de la commande, plusieurs stratégies peuvent être charge utile de 15 N, le dispositif occupant un volume de
considérées. La problématique essentielle est la compensation de 100 mm × 100 mm × 90 mm. L’existence d’efforts de maintien
l’hystérésis inhérente à l’effet piézoélectrique. Une commande en importants est ici un avantage, car il permet de maintenir une
boucle ouverte avec un asservissement de la charge permet déjà position sans alimenter en permanence les moteurs. Aucun mou-
de limiter l’hystérésis à 2 à 3 % [4]. Pour des applications de préci- vement parasite généré par l’enclenchement de freins n’est pos-
sion, l’utilisation d’une jauge de déformation pour évaluer de sible, et aucun problème d’échauffement des actionneurs en
manière externe l’état de la céramique permet d’aller beaucoup position fixe ne peut se produire comme cela peut être le cas avec
plus loin dans l’asservissement en position, en mettant en place
des actionneurs conventionnels.
une boucle locale d’asservissement. De telles solutions sont pro-
posées par les constructeurs, avec des cartes d’asservissement La microrobotique exploite par ailleurs les solutions d’actionne-
optimisées par rapport à l’actionneur exploité. ment piézoélectrique, pour les mêmes raisons de puissance volu-
mique, et également les possibilités d’intégrer en surface le
matériau pour créer des structures actives. La micropince déve-
1.5 Applications loppée par le laboratoire FEMTO-ST à Besançon, et aujourd’hui
commercialisée par Percipio Robotics, est à ce titre un bon
L’actionnement piézoélectrique a été exploité dans des champs exemple. La pince (figure 14) est composée de deux doigts de
assez variés de la robotique. Son usage a été envisagé dès la fin préhension. Les doigts exploitent des éléments PZT qui per-
des années 1980, initialement pour sa puissance volumique. Tzou mettent de fournir quatre mouvements indépendants : chaque
propose ainsi en 1989 [5] la conception d’un effecteur pour la doigt peut à la fois se rapprocher de l’autre, et fléchir pour se rap-
manipulation robotique basée sur un actionnement piézoélec- procher de l’objet à manipuler. La résolution en déplacement est à
trique, en exploitant deux poutres mises en flexion par l’emploi de nouveau très fine, à savoir 10 nm, avec une répétabilité de
matériau PVDF. Depuis lors, ses avantages principaux que sont sa 5 microns.
70
Référence Internet
S7767
Conception, modélisation
et commande des robots à tubes
concentriques : 1
vers des applications médicales
par Mohamed Nassim BOUSHAKI
LIRMM, UMR 5506 Université de Montpellier / CNRS
Mohamed Taha CHIKHAOUI
Institut FEMTO-ST – UBFC/UFC/CNRS/ENSMM/UTBM – UMR 6174
Kanty RABENOROSOA
Institut FEMTO-ST – UBFC/UFC/CNRS/ENSMM/UTBM – UMR 6174
Chao LIU
LIRMM, UMR 5506 Université de Montpellier / CNRS
Nicolas ANDREFF
Institut FEMTO-ST – UBFC/UFC/CNRS /ENSMM/UTBM – UMR 6174
Philippe POIGNET
LIRMM, UMR 5506 Université de Montpellier / CNRS
71
Référence Internet
S7767
CONCEPTION, MODÉLISATION ET COMMANDE DES ROBOTS À TUBES CONCENTRIQUES : VERS DES APPLICATIONS MÉDICALES _________________________
1
médicaux, gestes médico-chirurgicaux assistés par ordinateur (GMCAO), etc. De
toutes ces avancées, notre intérêt se porte sur les technologies d’intervention
minimalement invasive. L’une d’entre elles est l’endoscopie, qui peut être uti-
lisée soit pour le diagnostic (imagerie médicale, prélèvement), soit pour traiter
une maladie (endoscopie opératoire). Les besoins en endoscopie ont été suivis
par un développement sans précédent de la robotique, et plus particulièrement
une miniaturisation des systèmes robotiques. L’intérêt se porte alors sur les
robots de petites dimensions (moins de 10 mm de diamètre). En effet, les outils
pédiatriques peuvent atteindre 6 mm de diamètre [1]. Ces robots sont prévus
pour avoir un très haut niveau d’intégration, ce qui pourrait faciliter les GMCAO.
Nota : Fujifilm : http://www.fujifilmusa.com/products/medical/endoscopy/endoscopes/, Olympus http://medical.olympusame-
rica.com/specialty/gastroenterology et Stortz https://www.karlstorz.com/cps/rde/xbcr/karlstorz_assets/ASSETS/3291428.pdf.
72
Référence Internet
S7767
_________________________ CONCEPTION, MODÉLISATION ET COMMANDE DES ROBOTS À TUBES CONCENTRIQUES : VERS DES APPLICATIONS MÉDICALES
1
gueur. Ce dernier est constitué d’une partie droite (L2) et d’une
niques, géométriques et cinématiques propres aux RTC.
partie courbée (C2). L’ensemble constitue alors deux segments : le
premier pour L2 à l’intérieur de C1 et le second pour C2 à l’inté-
1.1 Présentation des RTC rieur de C1. Similairement, pour n = 3 tubes constitués chacun
d’une partie proximale droite Li et d’une partie distale courbée Ci,
Un robot à tubes concentriques (RTC) est une architecture robo- m = 6 segments sont définis tels que décrits sur la figure 2.
tique de type continu possédant une unité d’actionnement (UA) à
Dans le cas où trois tubes (n = 3) totalement courbés (C1, C2 et
la base du robot (dite « déportée ») et une structure mécanique
C3) sont en interaction, trois segments sont définis également
constituée de tubes flexibles pouvant avoir chacun une partie
(m = 3). Cette configuration est décrite schématiquement sur la
droite (Li, i est le ième tube, i ∈ {1..n}) et une partie courbée (Ci) et figure 3.
qui sont assemblés de manière télescopique (figure 1).
Selon l’hypothèse de courbures constantes, chaque segment j
Pour un RTC à n tubes, l’UA est généralement composée de n peut être représenté par un arc de cercle, et paramétré en 3D.
translations et n rotations assurant le déplacement relatif entre Ainsi, les paramètres d’arc sont : sa courbure κj, l’angle d’équi-
chaque tube. La conception de l’UA nécessite une attention parti- libre « hors-plan » dans lequel il se trouve ϕj et sa longueur ℓj.
culière et sera détaillée dans la section 3. Les parties courbées des L’angle de courbure θj peut aussi être défini tel que θj = κj ℓj. Ces
tubes constituent la clé de voûte du mouvement de l’extrémité du
robot. Elles sont obtenues par traitement thermomécanique des paramètres d’arc sont décrits schématiquement sur la figure 4.
tubes, généralement faits en Nitinol. Ainsi, les courbures ne Afin de déterminer les paramètres d’arcs mentionnés ci-dessus,
l’approche se base essentiellement sur la théorie des poutres
doivent pas excéder , avec D le diamètre du tube et ε la (Euler-Bernoulli). Plusieurs tubes de courbures et de rigidités dif-
déformation limite du matériau (8 à 11 % pour le Nitinol [16]). férentes s’équilibrent à l’instar de plusieurs ressorts attachés à
leurs deux extrémités. Un segment j peut ainsi être décrit par sa
Nota : parmi les fabricants de tubes en Nitinol, on peut citer Minitubes (http://www.mini- courbure et son angle d’équilibre respectivement :
tubes.com), Euroflex GmbH (http://www.euroflex.de), Memry (http://memry.com), etc.
(1)
1.2 Modèle géométrique à flexion en tenant compte des deux composantes des courbures suivant
les directions x et y respectivement :
L’approche standard de modélisation des RTC repose sur
quelques hypothèses essentielles. L’hypothèse structurelle
consiste en un déploiement télescopique des tubes. Ainsi, outre
l’évidence d’avoir des tubes de diamètres Di croissants, l’insertion (2)
linéaire de ces tubes ρi est considérée strictement décroissante.
Ainsi, le nombre de tubes en interaction dans chaque portion du
robot reste constant, comme schématisé sur la figure 2. D’autre
part, l’hypothèse géométrique est celle de courbures constantes. où Ei désigne le module d’élasticité du tube i, Ii son moment
En effet, cette approche permet d’approximer la forme d’un robot d’inertie, κi, j la courbure initiale de sa portion se trouvant à l’inté-
Moteurs de translation
Tube 2
Tube 1
Tube 3
Laser
Moteurs de rotation
Figure 1 – Structure d’un robot à tubes concentriques avec une vue agrandie à droite qui met en exergue la partie effective du robot. Les
diamètres des tubes présentés sont croissants et l’organe terminal est capable de porter un outil (ici un laser)
73
Référence Internet
S7767
CONCEPTION, MODÉLISATION ET COMMANDE DES ROBOTS À TUBES CONCENTRIQUES : VERS DES APPLICATIONS MÉDICALES _________________________
Partie droite L
Base du robot
Partie courbée C
ρ1
ρ2
ρ3
1
D1
D2
D3
α3
α2
α1
S1 S2 S3 S4 S5 S6
Figure 2 – Distribution des m = 6 segments pour n = 3 tubes de diamètres Di constitués chacun d’une partie droite Li et d’une partie courbée Ci
et ayant une translation ρi et une rotation αi. Les tubes ont été redressés pour la clarté de l’explication
z3
x3 y3 ℓj
Segment 3
κ3
y2 z2
{ ϕ3
ℓ3
zj
zj–1
yj–1
yj
θj
rj = 1/κj
x2
Segment 2 xj–1
xj (rj, 0, 0)
ϕj
κ2
z1
y1
{ ϕ2
ℓ2
Figure 4 – Description schématique des paramètres d’arc. L’axe zj est
l’axe principal du segment j et ϕj est l’angle d’équilibre du plan xj – zj
dans lequel se trouve cet arc par rapport à celui précédent xj – 1 – zj – 1.
x1 rj désigne le rayon de l’arc (où κj = 1/rj) et θj est l’angle de courbure
défini à partir de la longueur d’arc ℓj
Segment 1
κ1
z0
{ ϕ1
ℓ1
gueurs des segments peuvent être retrouvées par la suite (dès
que t > 0) par la simple soustraction des longueurs des tubes en
interaction en tenant compte de leur forme (courbée ou droite). En
y0 revenant à l’exemple de la figure 3, les longueurs des trois seg-
ments peuvent être définis comme suit :
x0
(3)
Figure 3 – Distribution des trois segments pour trois tubes totale- avec ρi (i∈{1..n} la translation linéaire du tube i par rapport à la
ment courbés. Le repère de référence {x0, y0, z0} est fixé à la base base du robot.
du premier segment et donc du robot
Jusqu’à présent, seul l’espace des actionneurs
et celui des paramètres d’arc χ ∈⺢2m
rieur dudit segment j, et αi son angle initial d’insertion autour de
l’axe zj. Finalement, la longueur ℓj du segment j peut être définie ont été définis, sachant que tel que
comme suit. La pose initiale du robot est définie comme celle où
, . L’espace de travail (ou espace carté-
tous les tubes sont rétractés ℓjt=0 = 0 pour . Les lon- sien), qui contient la pose du robot, est défini par X.
74
Référence Internet
S7767
_________________________ CONCEPTION, MODÉLISATION ET COMMANDE DES ROBOTS À TUBES CONCENTRIQUES : VERS DES APPLICATIONS MÉDICALES
Fonction Fonction
spécifique indépendante
Coordonnées
articulaires
Paramètres
d’arc
Coordonnées
opérationnelles
1
q χ X
κ1
α1
ϕ1
…
αn ℓ1 0R 0t
m m
ρ1 …
κm 0 1
…
ϕm
ρn
ℓm
Figure 5 – Définition des fonctions de passage entre les espaces des actionneurs, de configuration et des tâches
Deux fonctions, telles que schématisées sur la figure 5, sont 1.3 Modèle cinématique
définies pour décrire le passage entre les trois espaces précédem-
ment présentés :
1.3.1 Cinématique indépendante
– une fonction spécifique (à l’actionnement) qui dépend unique-
ment des actionneurs utilisés (moteurs de translation et de rotation
de l’actionnement
dans le cas exposé ici). Cette fonction permet le passage des para- La cinématique indépendante de l’actionnement est obtenue
mètres actionneurs q aux paramètres d’arc χ. Les équations (1), (2) par dérivation temporelle de la fonction indépendante et décrit la
et (3) sont suffisantes pour définir cette fonction ; vitesse spatiale d’un segment. Cette dernière est définie comme
– une fonction indépendante (de l’actionnement) qui est tribu- étant la vitesse de l’extrémité distale dudit segment par rapport à
taire de la géométrie du robot et peut être développée de manière sa base (et donc par rapport à l’extrémité du segment précédent).
générique tant que l’hypothèse de courbure constante est satis- Ainsi, nous obtenons :
faite. Elle permet alors le passage des paramètres d’arc χ à la pose
du robot X. (6)
Afin de définir la fonction indépendante, une matrice de trans- où l’opérateur ∧ convertit de ⺢3 vers so (3) (l’algèbre de Lie de
formation est détaillée dans ce qui suit. Cette transformation,
SO(3)) et également de ⺢6 vers se(3) (l’algèbre de Lie de SE(3)) tel
notée j – 1Tj, permet le passage de la base du segment j – 1
que défini dans [17], j – 1gj est la notation exponentielle de j – 1Tj
vers celle du segment j. Elle contient la translation
(cf. équation (4)), telle que définie dans l’équation 31 de [3]. Ainsi,
(exprimée dans le repère {Xj , Yj ,
. Par ailleurs, l’opérateur signifie la dérivée par
Zj }), la rotation de centre (exprimé dans ce même rapport au temps dg/dt de la fonction g.
repère) et d’angle θj = κjℓj (angle de courbure) autour de l’axe yj En convertissant l’équation (6) de se(3) vers ⺢6 (en utilisant
et celle hors-plan d’angle ϕj autour de l’axe zj (figure 4). Ainsi, la l’inverse de l’opérateur ∧ précédemment défini), la vitesse du seg-
matrice de passage est obtenue par l’équation (4). ment j devient :
(4)
(7)
Dans le cas général, le passage de la base d’un robot à m seg-
ments vers son organe terminal se met sous la forme :
(5)
75
Référence Internet
S7767
CONCEPTION, MODÉLISATION ET COMMANDE DES ROBOTS À TUBES CONCENTRIQUES : VERS DES APPLICATIONS MÉDICALES _________________________
permet la description de la vitesse moyennant l’utilisation des Par conséquent, les dérivées de la courbure et de l’angle d’équi-
vitesses des paramètres d’arc équivalents (cf. fonction indépen- libre du segment j par rapport au temps s’expriment en fonction
dante). Afin d’exprimer cette vitesse de segment dans le repère du des variations des actionneurs comme suit :
robot, la transformation adjointe, introduite notamment dans [17] et
1
j
Ainsi, l’expression de la vitesse des paramètres d’arc en fonc-
matrice 0Tj respectivement, et [0pj]x est la matrice du préproduit vec-
tion de celle des actionneurs, pour la configuration de la figure 3,
toriel par 0pj. Ainsi, on obtient . s’écrit :
La vitesse 0Vm de l’organe terminal, exprimée dans le repère de
base du robot, est la somme des vitesses 0Vj de chaque segment :
(8) (15)
L’équation (8) peut s’écrire matriciellement :
(9)
avec et
la matrice où ,
spec
cinématique indépendante complète telle que Jindep ∈ ⺢6×2m . et ∈ ⺢9×6 est la matrice jaco-
bienne cinématique spécifique.
Ainsi, dans le cas présenté sur la figure 3, la matrice cinéma-
tique indépendante complète s’écrit : Finalement, le modèle cinématique total peut être établi par :
(10)
(16)
avec ∈ ⺢9×6 car m = 3. avec J la matrice jacobienne cinématique totale du robot.
(13) (17)
avec .
76
Référence Internet
S7768
1
(LIRMM), UMR CNRS 5506, Montpellier, France
et Sébastien BRIOT
Chargé de Recherche au CNRS
Institut de Recherche en Communications et Cybernétique de Nantes (IRCCyN), UMR
CNRS 6597, Nantes, France
77
Référence Internet
S7768
Cet article se termine par une partie technologique destinée à passer en revue
les dispositions constructives utilisées pour ces robots et à faire part de l’expé-
rience des auteurs quant à leur conception.
Plate-forme
x
O
78
Référence Internet
S7768
z0
x0
Base Proximal loop
Parallelogram
1
y0
1 Elbow
Distal loop
Leg II
Platform Leg I
La deuxième option qui permet de gagner en rigidité hors plan est Comme il s’agit de restreindre les mouvements de la plate-forme
de construire des mécanismes spatiaux comme ceux des robots mobile à 3 translations, les jambes de ces mécanismes comportent
PAR2 [3] et IRSBOT2 [4] (figure 3). C’est leur cinématique qui contraint souvent des paires de barres de longueur identique. L’architecture
leur organe terminal à se déplacer en translation dans un plan. du robot Delta [6] et ses variantes sont particulièrement adaptées
pour fournir ces 3 ddl.
1.1.2 Trois ddl On notera que certaines tâches demandent, en plus, une rotation
autour d’un axe de direction constante. Dans ce cas, les architectu-
Il peut être nécessaire de contrôler la position et l’orientation de
res à 3 ddl peuvent être complétées avec une rotation « portée »
l’organe terminal pour des tâches fines de positionnement ou de
par la plate-forme mobile. L’actionnement de cette rotation peut se
déplacement dans un plan. La figure 4 présente les mécanismes per-
faire directement à l’aide d’un moteur embarqué ou bien fixé sur le
mettant de réaliser ces tâches [5]. Quand le volume de travail est de
châssis du robot (la rotation est alors transmise jusqu’à la plate-
petite taille et qu’une haute précision est demandée, on peut utiliser forme par une chaı̂ne cinématique de type UPU) ; l’actionnement
des articulations flexibles (dans ce cas, il est plus aisé de réaliser des de cette famille de cinématiques se fait au niveau de la base et
articulations rotoı̈des que des articulations prismatiques). peut être de type prismatique ou rotoı̈de (figure 5).
79
Référence Internet
S7768
80
Référence Internet
S7768
mécanismes sont donc les mêmes et sont typiquement le pick-and- positionneurs précis (objets, échantillons, antennes…), machines-
place à haute cadence si le robot est dit « léger ». On peut aussi outils, simulateurs de vol ou de conduite, etc.
réaliser des machines d’usinage 4 axes basées sur ces architectu- Les hexapodes ne sont pas les seuls mécanismes à 6 ddl. On
res. Une des principales difficultés de ces mécanismes est que peut, par exemple, citer l’architecture Hexa [14], mais il en existe
l’amplitude de la rotation est limitée. Mentionnons ici la machine
bien d’autres dans la littérature car un grand nombre de combinai-
HitaSTT et le robot Adept Quattro (dont la rotation est amplifiée)
sons de liaisons permet de réaliser une jambe à 6 ddl.
qui possèdent tous deux une plate-forme articulée (figure 8).
Nota : au sens des auteurs, le terme « léger » est utilisé pour un robot dont les masses
et inerties en mouvement sont réduites au maximum par construction. Il s’agit de ciné-
1.3 Robots redondants
1
matiques dont les actionneurs sont sur la première articulation (au plus proche de la
base). Ainsi, le couple fourni par les moteurs est en grande partie converti en accélération
de la plate-forme (et de la charge). Un robot parallèle redondant est un robot dont le nombre d’action-
neurs est strictement supérieur au nombre de ddls de la plate-forme.
1.2.5 Six ddl On distingue deux types de redondance : d’actionnement et cinéma-
tique. Bien utilisée, elle améliore les performances (dynamique, raideur)
L’hexapode [13] (plate-forme de Gough-Stewart) est le robot à et/ou permet d’augmenter la taille de l’espace de travail opérationnel.
6 ddl le plus connu et historiquement l’un des premiers. Il est com-
posé de 6 jambes UPS. Les liaisons prismatiques sont actionnées. 1.3.1 Redondance d’actionnement
De nombreux travaux ont été consacrés à l’étude de ces robots
(modélisation, singularités, etc.) car leurs performances sont forte- La redondance d’actionnement se définit par le fait d’avoir, une fois
ment dépendantes de la position des liaisons sur la base et sur la la position des actionneurs fixée, au moins une contrainte géomé-
plate-forme mobile. Les rotations sont, en principe, d’amplitude trique en trop sur la position de la plate-forme mobile. Elle peut se
limitée. Le champ des applications est très vaste (figure 9) : matérialiser soit par l’ajout d’une jambe actionnée supplémentaire
Figure 9 – Hexapodes
81
Référence Internet
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(figure 10a), soit par l’ajout d’un actionneur sur une liaison passive une homogénéisation des performances sur le volume de tra-
(figure 10b). La redondance d’actionnement a pour conséquences : vail. À puissance installée égale, on ne produit pas d’amélio-
de ne pas pouvoir choisir indépendamment les variables arti- ration des performances (dynamique, raideur) maximales,
culaires car elles sont contraintes par la cinématique du mais ces performances sont homogénéisées dans l’espace
mécanisme ; de travail.
si les efforts articulaires sont choisis de manière arbitraire, des On notera également, que le degré de redondance doit rester
efforts internes qui ne produisent pas d’effort opérationnel limité (1 ou 2) car au-delà, ces apports sont nuls ou négatifs. La
sont générés. On doit donc utiliser des algorithmes de com- figure 10d présente le robot plan DualV qui possède 4 jambes et
1
mande différents (la simple commande dans l’espace articu- 4 actionneurs pour générer les 3 ddl du plan.
laire est dangereuse car elle ne gère pas les efforts internes) ;
de ne pouvoir établir de manière unique que les modèles géo- 1.3.2 Redondance cinématique
métriques et cinématiques inverses, ainsi que les modèles Pour les robots parallèles cinématiquement redondants, on a une
dynamiques directs. infinité de choix pour les variables articulaires, sans que la position
Malgré cela, on peut retirer des bénéfices de la redondance de la plate-forme ne soit changée.
d’actionnement tels : Les principaux intérêts de ce type de redondance sont :
une augmentation du volume de travail, en particulier en rota- de rendre plus facilement commandable un robot redondant
tion, car on peut alors s’affranchir de certaines singularités de d’actionnement en ajoutant un ou plusieurs corps et autant de
type 2 (figure 10c) ; liaisons. Dans ce cas, si le choix des liaisons est judicieux, le
82
Conception, modélisation et commande en robotique
(Réf. Internet 42398)
1– Conception 2
2– Modélisation et commande Réf. Internet page
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2
84
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S7730
Modélisation et commande
des robots manipulateurs
2
Professeur de l’université Montpellier-II, Institut des sciences de l’ingénieur
Enseignant-chercheur au Laboratoire d’informatique, de robotique
et de microélectronique de Montpellier (LIRMM )
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Informatique industrielle S 7 730 − 1
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S7730
Le lecteur est invité à se reporter à l’article [R 7 734] traitant de l’application de la réalité vir-
tuelle à la robotique, et plus généralement aux articles [R 7 700] et suivants du présent traité
consacrés à la robotique.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
S 7 730 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Informatique industrielle
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S7730
1. Morphologie
Un robot manipulateur est constitué par l’assemblage de corps
(segments) rigides en première approximation, et articulés entre
eux. Les articulations peuvent être motorisées (actives) ou non
(articulations passives).
Poignet
Avant-bras
Dispositif
d'accouplement
Bras
Avant-bras
Bras Épaule
Base Base
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© Techniques de l’Ingénieur, traité Informatique industrielle S 7 730 − 3
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a 5 b 4 c 4
2
d 4 e 3 f 3
g 3 h 2 i 2
j 1 k 1 l 1
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S 7 730 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Informatique industrielle
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Modélisationdesrobots
humanoïdes
par GabrielABBA
Professeur des universités à l’ENI de Metz et au Laboratoire de conception fabrication
et
commande(LCFC,EA4495)
YannickAOUSTIN
Maîtredeconférencesàl’universitédeNantes,Institutderechercheencommunicationet
2
cybernétiquedeNantes
(IRCCyN,UMRCNRS6597)
a notion de robot humanoïde a été introduite au début des années 1970
L pour qualifier des robots mobiles ayant des caractéristiques anthropo-
morphiques par opposition aux robots industriels solidaires d’une base fixe.
Le but de la recherche en robotique humanoïde est d’approcher le plus pos-
siblelesperformancesdelocomotiondel’humain.Depuislespremierstravaux
deIchirôKatôetsescollèguesdel’universitéWasedadeTokyo,deremarqua-
Parution : décembre 2014
bles progrès ont été effectués, notamment en ce qui concerne l’étude de la
stabilitéd’unrobothumanoïde,sesalluresdemarches,voiredecourse.Néan-
moins,lesperformancesd’unrobothumanoïdedoiventencoreêtrenettement
89
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S7753
amélioréesavantqu’ilpuisserivaliseraveccellesd’unêtrehumain.Lesfrotte-
ments au niveau des articulations et des transmissions mécaniques ne sont
pas négligeables alors qu’ils sont quasiment nuls chez l’humain. L’autonomie
durobothumanoïde,sapuissancemassique,sarésistanceauxchocs,larépar-
tition optimale de sa masse, sa locomotion sur terrain accidenté, l’accomplis-
sement de tâches sécurisées en collaboration avec un humain, son évolution
dansunenvironnementencombréd’obstaclessontautantdedéfisquirestent
actuels. La modélisation de ces robots représente un aspect essentiel des
recherchesdanscedomaine,enparticuliergrâceàdesmodèlesphysiquestrès
précistenantcomptedesphénomènesdecontactetdeladynamiquedurobot.
2
1. Robothumanoïde nécessite 6 + n variables. Les six premières décrivent la position et
l’orientation par rapport à un repère fixe galiléen Fg d’un de ses m
corps, qui est choisi comme corps de référence. Les autres n varia-
Un robot humanoïde, formé de son système locomoteur et de bles permettent de décrire la configuration de ses articulations. Si
ses membres supérieurs, est un mécanisme multicorps. Sa struc- le nombre 6 + n est minimal, les variables utilisées pour la descrip-
ture géométrique est arborescente et anthropomorphe. Sa taille, tion du robot humanoïde sont appelées « coordonnées géné-
sa masse sont proches ou homothétiques à celles de l’humain. Ses ralisées ». Le repère lié à l’articulation j est noté Fj . Contrairement
actionneurs peuvent être de type électrique, pneumatique ou au robot manipulateur à base fixe, le repère de référence F0 est
hydraulique. Il est commandé de sorte à assurer une sécurité mobile (figure 1). Il peut être placé sur n’importe lequel des m
maximale en cas de contact avec un humain. Le robot humanoïde corps. L’avantage de le placer sur la semelle d’un des deux pieds
est ainsi bien adapté à évoluer dans l’environnement conçu pour est de prendre en compte directement le torseur des efforts du sol
l’homme et y effectuer différentes tâches d’assistance ou de tra- sur ce pied. Soit gp0 le vecteur qui exprime la position cartésienne
vail. Il possède des capteurs proprioceptifs pour mesurer ses posi- de F0 dans Fg . La matrice de rotation qui exprime l’orientation F0
tions et vitesses articulaires et des capteurs extéroceptifs pour dans Fg est notée gR0 . Elle est fonction des angles de roulis,
recueillir des informations sur son environnement (force de réac- tangage et lacet, notés respectivement φ, θ et ψ. La matrice de
tion du sol, obstacles, etc.). Un système informatique commande transformation homogène qui définit F0 dans Fg est :
sa locomotion, contrôle sa stabilité et coordonne son interaction
avec l’humain. C’est un robot mobile qui doit gérer durant ses
déplacements la prise en compte des informations de ses capteurs g R 0 (σ ) gp
0
g T (σ ) = (1)
0 0 1
et des contraintes unilatérales avec son environnement lors de 1×3
contacts intermittents, synchronisés ou non. La détermination de
la trajectoire de chacun des corps du robot lors de sa locomotion avec σ l’ensemble des angles d’orientation, σ ≜ {φ , θ , ψ } . La
est un problème complexe qui est fonction de ses paramètres phy- transformation qui amène le repère F0 sur le repère Fj est définie
siques. La dimension de ses pieds par rapport à sa taille et la puis- par la matrice de transformation homogène :
sance maximale de ses actionneurs au niveau des chevilles sont
telles que le robot humanoïde est un système mécanique relati-
vement instable en position verticale ou lors de ses déplacements. 0T
j = (0 s j 0n
j
0 a 0p )
j j (2)
Il peut ainsi perdre le contact unilatéral avec le sol et chuter. Le
nombre de ses degrés de liberté indépendants change selon que le où 0sj , 0nj et 0aj désignent respectivement les vecteurs unitaires
robot humanoïde a un ou deux pieds d’appui sur le sol, qu’il soit suivant les axes xj ,yj et zj de Fj exprimés dans le repère F0 et 0pj et
assis, en appui sur un mur ou en phase de saut. Pour pallier ces désigne l’origine du repère Fj exprimée dans le repère F0 . La
difficultés, une commande du robot doit être mise en œuvre et méthode de Denavit-Hartenberg modifiée [11] est bien adaptée
tenir compte de son équilibre et de ses contacts avec l’environ- pour représenter chacun des repères Fj , associé à une articulation
nement. Habituellement la stratégie dépend de la géométrie, de la du robot humanoïde, par rapport à son antécédent grâce à des
vitesse et de l’accélération du robot humanoïde. Une modélisation paramètres géométriques. Le paragraphe 2.3 présente un exemple
du robot humanoïde est donc nécessaire. d’utilisation de ces paramètres géométriques.
90
Référence Internet
S7753
2.3 Modèlegéométriqueinverse
Ce modèle permet de calculer les variables articulaires du
système locomoteur à partir de coordonnées cartésiennes. Par
exemple, considérons la définition des repères articulaires pour le
système locomoteur d’un robot humanoïde (figure 3). Ce système
zj locomoteur a douze articulations. Les membres supérieurs du
Oj robot humanoïde sont assimilés à un corps rigide fixé au bassin.
Fj Les paramètres géométriques du formalisme Denavit-Hartenberg
modifié sont donnés sur le tableau 1 :
xj yj
– a (j ) désigne le repère antécédent au repèreFj ;
0T
j’ – les paramètres géométriques (αj ,θj ,rj ,dj ) déterminent la loca-
2
E3 lisation du repère Fj par rapport à son repère antécédent a (j ).
gT
0 Supposons le cas où le pied affecté du repère de référence F0 est
en appui sur le sol et que nous souhaitons définir la position et
0 E2 l’orientation de la hanche par :
y0 E1
z0
O0 Fg
0 sx 0n
x
0a
x
0p
x
F0 0s 0n 0a 0p
U0 =
x0 y y y y
(4)
0s 0n 0a 0p
z z z z
0 0 0 1
z4
q3
0p z5 x5 x6
e3
x7
x3 z9
0p
e2 d4
z8
x8 x9
ᐍx z3
z0 d10
q2
q1 d3
x1 x2
0p
e4 z10
0p
F0 y0 e1
x0 x10
z1
x0 z2
y0 d11
ᐍy r1
d1
Lp
z0
Figure2–Modèleetrepèred’unpied z11
lp
z12
avec les coordonnées des sommets dans le repère F0 définies par x11 x12
d13
ℓy ℓy ℓy z13
0p
e1 = 0, , 0 , 0 p e2 = − ℓ x , − , 0 , 0 p e3 = − ℓ x , , 0 ,
2 2 2 y13 r13
. x13
ℓy
0p
e4 = 0, − , 0
2
Figure3–Systèmelocomoteuretrepèresassociés
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Référence Internet
S7753
Tableau1–Paramètresgéométriquesdurobothumanoïde
j a (j ) ␣j j rj dj
1 0 0 q1 ℓ1 d1
2 1 π q2 0 0
2
3 2 0 q3 0 d3
4 3 0 q4 ℓ4 d4
2
5 4 π π 0 0
− q5 −
2 2
6 5 π q6 0 0
−
2
7 6 0 q7 0 d7
8 7 π π 0 0
q8 −
2 2
9 8 π q9 0 0
−
2
10 9 0 q10 ℓ 10 = ℓ 4 d10 = d4
11 10 0 q11 0 d11 = d3
12 11 π q12 0 0
2
13 12 0 q13 ℓ 13 = − ℓ 1 d13 = d1
Nous devons résoudre le système : tion du modèle d’impact. Le vecteur des vitesses généralisées peut
s’écrire :
U0 = 0 T1 (q1) 1T2 (q 2 ) 2 T3 (q 3 ) 3 T4 (q 4 ) 4 T5 (q5 ) 5 T6 (q6 ) (5)
0 v 0(3×1)
Paul [13] a proposé une méthode heuristique qui consiste à pré- v = 0 ω 0(3×1) (7)
multiplier successivement les deux membres de l’équation (5) par qɺ
la matrice j Tj–1 , j = 1 à n – 1. Pour la jambe en appui, la succession (n ×1)
des équations qui permet le calcul des six variables articulaires q1 ,
q2 , q3 , q4 , q5 et q6 est :
où 0 v 0 ≜ 0 R g g v 0 et 0 ω 0 ≜ 0 R g g ω 0 . Les variables 0v0 et 0ω 0 sont
1T U = 1T 2 T 3 T 4 T 5 T respectivement les vitesses linéaires et angulaires, exprimées dans
0 0 2 3 4 5 6
le repère F0 , du corps zéro par rapport au repère galiléen. La
2 T U = 2T 3T 4T 5T
1 1 3 4 5 6
matrice 0Rg est la transposée de gR0 . Le vecteur des vitesses
3 T U = 3T 4T 5T (6)
2 2 4 5 6
linéaires gv0 est la dérivée par rapport au temps de gp0 . Le vecteur
3 T U = 4T 5T
des vitesses angulaires gω 0 , en tenant compte de l’orientation de
3 3 5 6
5 T U = 5T
4 4 6 F0 par rapport à Fg , est :
avec Uj+1 = j+1Tj Uj pour j = 0, ..., 4. Les types d’équations obtenus
avec la méthode de Paul sont au nombre de huit et conduisent à 0 − sin φ cos φ cos θ
des résolutions connues [10].
gω = 0 φɺ + cos φ θɺ + sin φ cos θ ψɺ (8)
0
1 0 − sin θ
gv
ei = g v0 + g Rɺ 0 0 pei (9)
3.1 Cinématiquedirectedupremierordre
La dérivée d’une matrice de rotation est donnée par [16] :
Le modèle cinématique direct du premier ordre permet de calcu-
ler la vitesse absolue des sommets d’un pied en fonction du vecteur ɺ
des vitesses généralisées. Ce calcul est primordial pour la formula-
gR
0 = g ω̂
ω0 gR 0 (10)
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S7754
2
(LCFC, EA 4495)
et Yannick AOUSTIN
Professeur des universités à l’Université de Nantes
Institut de recherche en communication et cybernétique de Nantes
(IRCCyN, UMR CNRS 6597)
1. Introduction................................................................................................. S 7 754 - 2
2. État de l’art et spécificités de la commande des robots humanoïdes...... — 2
2.1 Historique des commandes ....................................................................... — 2
2.2 Notions d’actionnement des robots humanoïdes .................................... — 2
2.3 Capteurs nécessaires pour les commandes ............................................. — 3
3. Commandes fondées sur les modèles de simple et double pendules
inversés........................................................................................................ — 4
3.1 Commande fondée sur la méthode du pendule linéaire inversé............ — 4
3.2 Définition du point de capture ................................................................... — 5
3.3 Stabilisateur................................................................................................. — 6
3.4 Double pendule : suivi de CdM et de ZMP................................................ — 6
4. Robots planaires sous-actionnés et complètement actionnés .............. — 7
4.1 Commande d’un robot cinq corps planaire sous-actionné ..................... — 7
4.2 Commande d’un robot sept corps entièrement actionné........................ — 10
4.3 Commande non linéaire avec stabilisation d’un système du second
ordre (régime glissant, H∞)........................................................................ — 12
5. Robots humanoïdes (3D) : stabilité et analyse de Poincaré ................... — 12
5.1 Présentation de la problématique de commande .................................... — 12
5.2 Commande d’un robot 3D par HZD et correction PD............................... — 12
5.3 Consigne paramétrée et optimisation de la marche................................ — 13
5.4 Stabilité orbitale .......................................................................................... — 15
5.5 Autostabilisation et autosynchronisation entre les plans sagittal
et frontal....................................................................................................... — 16
6. Conclusion ................................................................................................... — 17
7. Glossaire ...................................................................................................... — 17
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. S 7 754
93
Référence Internet
S7754
1. Introduction appui, la deuxième est un simple appui pied à plat sur le sol, et la
troisième est un simple appui avec rotation du pied d’appui
autour des orteils [53]. Dans le plan sagittal, en double appui et en
La commande d’un système a pour objectif de le faire évoluer simple appui pied à plat sur le sol, le couple de la cheville est cal-
d’un état initial donné à un état final ou une évolution de référence culé pour agir comme une correction proportionnelle du moment
donnés. Si elle est définie par un écart entre une variable de sortie cinétique du robot. Dans le plan frontal le robot est assimilé à un
mesurée ou estimée et une consigne ou une trajectoire de réfé- pendule asservi par un retour d’état. Une commande fondée sur
rence, elle est dite commande en boucle fermée. Elle peut égale- le modèle du pendule linéaire inversé (LIP) et la conservation
ment être conçue pour rejeter les perturbations, les erreurs de d’une énergie orbitale est proposée [28]. Cette commande a été
modèles, ainsi que des actions extérieures de l’environnement sur appliquée avec succès sur de nombreux robots humanoïdes dont
le système. La complexité de la commande est croissante selon le fameux robot HRP2 [27]. Dans les années 2000, pour un robot
que le système est monoentrée/monosortie ou multientrées/multi- bipède sans pied nommé Rabbit, des trajectoires de marche ont
sorties, ou lorsqu’il est représenté par un système d’équations dif- été définies pour lesquelles les variables articulaires sont expri-
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Référence Internet
S7754
x, y x, y
q5h q5h
q4h q4h
q3h
q6h
q7h
q3h
q6h
q7h
2
q2h
q1h q2h
q1h
a b
x, y x, y
q5h
q4h q4h q5h
q6h q6h
q3h q3h
q7h
q7h
q2h q2h
c d
Figure 1 – Robot bipède planaire sous actionné (a) et (b), complètement actionné (c), ou suractionné (d), en fonction de ses contraintes unilaté-
rales avec le sol
Dans ce cas, le robot humanoïde est complètement actionné. ■ Capteurs de mesure de positions angulaires
Enfin, supposons que l’un des pieds d’appui a un contact complet En général, chaque articulation motorisée est équipée d’un cap-
entre sa semelle et le sol et que l’autre pied a un appui ponctuel teur de position de type codeur optique à incréments ou
entre ses orteils et le sol (figure 1d). Seules quatre variables géné- « résolveur ». Il se trouve généralement sur l’axe moteur, et donc
ralisées indépendantes sont nécessaires pour définir la configura- en amont du réducteur. De cette mesure de position angulaire, il
tion du robot humanoïde. Les cinq autres variables généralisées est possible d’obtenir par dérivation numérique la vitesse angu-
peuvent se déterminer géométriquement à partir de la connais- laire. Cette méthode a le désavantage d’être sensible au bruit de
sance des équations de contrainte de contact et des quatre quantification qui est lié à la résolution du convertisseur analo-
variables généralisées indépendantes. Dans ce cas, le robot huma- gique numérique. Si ce bruit de quantification est trop important,
noïde est sur-actionné. Un processus d’optimisation peut être mis il est possible de recourir à un observateur de vitesse [10].
en place pour choisir au mieux la combinaison des couples durant
■ Centrale inertielle
la phase de double appui [37].
Une centrale inertielle (IMU : inertial measurement unit) est
l’association de gyroscopes qui permettent de mesurer des angles
de rotation d’un corps mobile sur lequel ils sont fixés, et de cap-
2.3 Capteurs nécessaires teurs d’accélération et de vitesse angulaires. Son but est de four-
pour les commandes nir en temps réel l’évolution des vecteurs vitesse et position, ainsi
que l’attitude (roulis, tangage et lacet) d’un robot marcheur [21].
Les capteurs les plus utilisés actuellement pour la commande
des robots humanoïdes [40] [46] sont les capteurs de mesure des ■ Capteur d’effort
positions angulaires (capteurs proprioceptifs), les centrales iner- Lors de la locomotion d’un robot humanoïde, il est important
tielles et les capteurs d’efforts pour recueillir des informations sur d’avoir une information sur la nature des efforts de contact avec
le contact avec l’environnement (capteurs extéroceptifs). l’environnement. La mesure des courants moteurs est parfois uti-
95
Référence Internet
S7754
lisée si elle est accessible. Cette méthode est peu coûteuse mais
reste un problème ouvert quant à la précision des différentes
composantes du torseur d’effort. L’utilisation de capteurs d’effort M
..
est une autre possibilité pour obtenir cette information. Un cap- x
teur d’effort est un dispositif mécanique que l’on insère au sein du
robot humanoïde afin de mesurer l’effort extérieur qui s’exerce
sur lui (par exemple à la cheville, le plus proche possible de la
semelle d’appui pour mesurer le torseur des efforts de réaction du
sol). La conception de ce dispositif est telle qu’elle présente des
déformations élastiques, mesurées à l’aide de jauges de
contraintes, suivant des directions privilégiées en fonction des zc
efforts en force et moment que l’on souhaite déterminer. Pour
2
plus de détails, le lecteur peut se référer aux articles [S7780] et
[S7753]. FR
z
mpy
3. Commandes fondées y O x P
x
Les robots humanoïdes sont des systèmes mécaniques polyarti-
culés. Pour éviter des algorithmes très gourmands en temps de
calcul, des lois de commande, fondées sur des modèles de Figure 2 – Cart-Table dans le plan (x, z)
simples pendules inversés, ont été proposées. Quelques unes de
ces lois de commande sont présentées ici.
est définie en utilisant des informations futures de la trajectoire de
référence telle que :
3.1 Commande fondée sur la méthode
du pendule linéaire inversé
Kajita a introduit le modèle « Cart-Table » [27] pour définir la
relation suivante entre la position du ZMP et le CdM d’un robot (4)
humanoïde.
Dans le plan (x, z) (figure 2) si P est le ZMP, alors le moment du
à la force résultante de réaction du sol FR est nul (mpy = 0) en P
par rapport à l’axe y. Le principe fondamental de la statique appli- La matrice de gain K et les termes f1, f2,…, fN peuvent être trou-
qué au système mécanique conduit alors à l’expression de px sui- vés par un algorithme de résolution d’une équation de Riccati ou
vante [1] : de type « Linear-quadratic regulator » (lqry) de Matlab®. Le para-
mètre N est le résultat d’un compromis entre rapidité et précision
(1) des calculs. Pour effectuer un mouvement de marche nous avons
besoin de calculer les variables articulaires q en fonction de la tra-
jectoire Xc(t) du CdM à chaque instant. Toutefois, pour tenir
On observe alors que l’accélération de la balle influe directe- compte que généralement pour un robot humanoïde le nombre
ment sur la position du ZMP. Pour décrire le comportement dyna- de composantes du vecteur articulaire est plus grand que celui
mique d’un bipède, Kajita et al [27] ont introduit le modèle du des composantes de Xc, la trajectoire du pied libre Pl (t) et celle du
« Linear Inverted Pendulum » (LIP). Il repose sur l’hypothèse que tronc Pt (t) sont prédéfinies, la position du pied d’appui Pa étant
la masse concentrée évolue dans un plan horizontal tel que z = zc. connue elle aussi. Il est possible de résoudre alors un modèle
À partir de (1) cette hypothèse conduit à l’équation différentielle géométrique :
linéaire suivante :
(2)
Cette résolution peut se faire formellement ou numériquement.
Dans l’article [S7753] il est rappelé comment, à partir du modèle Une trajectoire de marche cyclique a été définie dans le plan
Cart-Table, la trajectoire du CdM est déduite de celle du ZMP à sagittal pour illustrer la méthode exposée dans cette section. Le
l’aide d’une commande prédictive. Cette commande prédictive est pas est composé d’un double appui et d’un simple appui. Il n’y a
fondée sur la minimisation du critère : pas d’impact : la vitesse de la jambe libre qui arrive en contact
avec le sol est nulle. Cette trajectoire a été utilisée comme trajec-
(3) toire désirée lors d’une simulation pour la commande articulaire
d’un robot humanoïde avec pied dont le schéma est représenté
figure 12. La figure 3 présente sur deux pas l’évolution dans le
où représente la position de référence (cible) du ZMP ; pj la plan sagittal (x, z) des deux pieds en fonction du temps lors de la
marche cyclique. L’évolution de la semelle du pied en transfert se
position réelle du ZMP. Le terme de commande uj minimise le fait quasiment parallèlement au sol avec un impact pied à plat. En
critère (3) en fonction des matrices de pondération Q et R. À effet, pour chacun des pieds, les courbes d’évolution des deux
chaque pas de temps, l’expression cherchée de la commande uk extrémités des pieds sont confondues.
96
Référence Internet
S7755
97
Référence Internet
S7755
CdG
C2
υi
Ci
σi
C1 ZMP
Ci +1
98
Référence Internet
S7755
2
Figure 3 – Principaux modes de locomotion des serpents dans les forces de frottement lors des glissements. Cette hypo-
thèse de non-glissement donne lieu à des contraintes dites non
holonomes, c’est-à-dire qui dépendent des vitesses et ne sont pas
intégrables, et donc ne peuvent être décrites par une équation
La locomotion serpentine est une autre forme de locomotion
algébrique reliant les paramètres géométriques.
articulée dite apode. Cette locomotion prend plusieurs formes
dans la nature. La reptation serpentine est la plus répandue et est
caractérisée par une unique trace de contact, i.e. tous les points
de la fibre moyenne suivent la même trace (figure 3a). En réalité, 2.1 Modélisation cinématique
les propriétés tribologiques du contact avec le sol sont extrême-
ment déterminantes pour ce mode de locomotion, car il nécessite Un modèle cinématique en robotique représente la relation
un très faible coefficient de frottement sous la partie ventrale et entre les vitesses articulaires actives et les vitesses opération-
un bon coefficient de frottement sur les parties latérales qui per- nelles. Ces dernières représentent en général les vitesses linéaire
et angulaire du corps de référence, dit plate-forme. Qu’il s’agisse
mettent de créer des forces de propulsion par appui sur les irrégu-
d’un robot à pattes ou d’un robot à roues, les équations cinéma-
larités de surface. Afin d’approcher cette faculté que les serpents
tiques s’obtiennent à partir des conditions sur la vitesse de glisse-
possèdent grâce à leurs écailles, un nombre important de robots
apodes ont été conçus avec des roues passives [4]. Dans des ment où Ci est le point de contact de la i ème
situations très particulières, certains serpents optent pour d’autres chaîne cinématique qui relie la plate-forme au sol, et R0 sont
allures, tels que le péristaltisme en ligne droite ou le zigzag latéral
deux repères respectivement liés à l’organe de locomotion Si et
en prenant la forme d’un S (figure 3b, c).
au sol (figure 4). En introduisant le solide de référence du robot et
Bien que chacun des modes de locomotion terrestre cités dans son repère RP, on peut écrire grâce à la composition des vitesses :
ce paragraphe soit adapté à une utilisation et un environnement
donnés, il est intéressant de comparer ces différents modes de
déplacement entre eux, notamment en termes de mobilité ou de
consommation énergétique. Ainsi, le nombre adimensionnel de
Froude défini par où u est la vitesse, g la gravité et l une lon-
gueur caractéristique donne une indication sur la mobilité du sys-
tème par rapport à sa taille [5]. Il permet aussi de définir les
similarités dynamiques entre les différentes échelles, par exemple
le passage de la marche au trot ou du trot au galop se passe au RP
même nombre de Froude pour tous les quadrupèdes quelles que
soient leurs tailles et leurs masses. Pour pouvoir comparer les dif-
férents modes de locomotion indépendamment de leur échelle, C
les biologistes utilisent en général le coût métabolique ou la
Ch
φj
rmation
trée pa
RSi
2. Forme générale
Transfo
paramé
b
La modélisation est un élément important en robotique. Outre t
l’optimisation de la conception, il permet surtout d’élaborer un R0
modèle de commande du robot. La modélisation physique reste
dominante en ingénierie mécanique et électronique, mais d’autres
approches encore au stade de la recherche comme l’apprentis-
sage par des réseaux de neurones sont des alternatives émer-
gentes [8]. Figure 4 – Chaîne cinématique de locomotion
99
2
100
Référence Internet
S7857
Robots cuspidaux :
théorie et applications
Philippe WENGER
2
par
Directeur de recherche CNRS
Laboratoire des sciences du numérique de Nantes, UMR CNRS 6004, Nantes, France
et Damien CHABLAT
Directeur de recherche CNRS
Laboratoire des sciences du numérique de Nantes, UMR CNRS 6004, Nantes, France
1. Préliminaires............................................................................................. S 7 857 - 2
2. Robot cuspidal : définition, identification et propriétés ............. — 4
3. Faisabilité de trajectoires ..................................................................... — 7
4. Énumération et classification des robots cuspidaux
et non cuspidaux ..................................................................................... — 10
5. Étude de quelques robots parallèles cuspidaux ............................. — 14
6. Conclusion................................................................................................. — 23
7. Glossaire .................................................................................................... — 23
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. S 7 857
101
Référence Internet
S7857
trois articulations pivot d’axes orthogonaux deux à deux. Ces robots peuvent
constituer des alternatives intéressantes aux robot usuels. Il est donc impor-
tant de pouvoir les classifier en robots cuspidaux et non cuspidaux. Les
robots à six articulations sont plus difficiles à analyser et font encore l’objet
de travaux de recherche au moment de la rédaction de cet article. Ils sont
principalement abordés au travers de quelques exemples de robots 6R cuspi-
daux, dont certains sont utilisés dans l’industrie comme robots de peinture.
Le cas des robots d’architecture parallèle, plus délicat, est également abordé.
On analyse des exemples de robots parallèles plans, sphériques et à 6 degrés
de liberté, capables de changer de mode d’assemblage sans franchir une sin-
gularité. L’article propose enfin une discussion sur l’intérêt des robots
2
cuspidaux.
102
Référence Internet
S7857
1.2 Postures et modes d’assemblage Mode d’assemblage : pour un robot parallèle, le terme
« mode d’assemblage » définit une solution au modèle géomé-
Posture : pour un robot sériel, le terme « posture » définit trique direct, c’est-à-dire une position et/ou orientation de la
une configuration articulaire permettant à l’organe terminal du plate-forme mobile du robot correspondant aux variables arti-
robot d’atteindre une cible donnée dans son espace de travail. culaires motorisées.
Une posture est donc associée à une solution au modèle géo-
métrique inverse. La figure 3 montre les six modes d’assemblage d’un robot paral-
lèle plan à trois jambes télescopiques. Pour un jeu de longueurs
données des jambes (Ai, Bi), la plateforme triangulaire (B1, B2, B3)
Pour les robots industriels courants, une posture peut être facile- peut prendre six positions et orientations différentes dans le plan.
ment identifiée. Pour un robot anthropomorphe tel que celui de la
figure 2, par exemple, ces postures peuvent être identifiées par la
position du coude (haut ou bas), de l’épaule (droite ou gauche) et du
poignet (pronation ou supination). Le nombre total de combinaisons
s’élève à 23 = 8 postures distinctes. La figure 2 montre les quatre
1.3 Singularités
On rappelle brièvement ici le concept de singularité, leur rôle
2
postures qui peuvent être identifiées par la position du coude et de étant essentiel pour les robots cuspidaux. Une singularité d’un
l’épaule. robot sériel définit une configuration articulaire à partir de laquelle
le robot ne peut plus produire certains déplacements. De plus, au
moins deux solutions géométriques inverses coïncident lorsque le
robot est sur une singularité. La figure 4 en haut montre un robot
anthropomorphe (représenté sans son poignet) en singularité de
type « bras tendu » : localement, un déplacement le long de la
direction du bras n’est alors pas possible. Sur cette singularité, les
deux solutions inverses associées aux postures « coude haut » et
« coude bas » montrées en bas de la figure 4 coïncident. Les sin-
gularités génèrent des frontières dans l’espace de travail qui ne
peuvent généralement pas être franchies, car situées au bord de
l’espace de travail. La singularité « bras tendu », par exemple, défi-
Z Z Z Z nit la limite d’accessibilité du robot.
On voit que pour le robot de la figure 4, la transition entre les
deux solutions coude haut et coude bas se fait nécessairement en
X X X X traversant la singularité bras tendu.
Les robots parallèles peuvent avoir plusieurs types de singula-
Y Y Y Y rité. Dans cet article, on ne considérera que des robots parallèles
avec des singularités de « type 2 », également appelées « singula-
rités parallèles » [S 7 768]. Sur ces singularités, le robot parallèle a
Figure 2 – Quatre postures d’un robot anthropomorphe identifiables certains mouvements qui ne peuvent plus être contrôlés. De plus,
par la position du coude et de l’épaule au moins deux de ses modes d’assemblage coïncident.
A3 A3 A3 B2
B3
B3
B2
B1 B3
A1 A2 B1 A1 B2 A2 A1 B1 A2
A3 A3 A3
B3 B3
A1 B3 B1
A1 A2 A2 A1 A2
B1
B1
B2 B2
B2
Figure 3 – Les six modes d’assemblage d’un robot parallèle plan à trois jambes télescopiques
103
Référence Internet
S7857
2 (2)
Les aspects sont délimités par les singularités et les limites arti- Robot cuspidal : un robot est dit cuspidal s’il peut changer de
culaires lorsqu’elles existent. Pour les robots sériels non redon- posture sans passer par une singularité. Il y a donc plusieurs
dants, les aspects ainsi définis sont les plus grands domaines de solutions dans un seul aspect. Autrement dit, cet aspect n’est
exempts de toute singularité. Pour la plupart des robots indus- plus un domaine d’unicité de l’opérateur géométrique f.
triels (et plus précisément comme on le verra plus tard, pour tous
les robots non cuspidaux), les aspects constituent les domaines
d’unicité de l’opérateur géométrique f, c’est-à-dire qu’il n’y a Le nom « robot cuspidal » a été introduit en lien avec la condi-
qu’une seule solution inverse dans chaque aspect. Les aspects ont tion d’existence d’un point singulier particulier de l’espace de tra-
été généralisés par la suite aux robots parallèles [11]. vail appelé « point cusp ». On montre que si un point cusp existe,
104
Référence Internet
S7857
2 postures
2 dans cette
région
3
1
q2
2 Z X
0
4 postures
1
−1 Figure 6 – Les quatre postures du robot 3R au point x = 2,5, y = 0,
2
θ3
0 z = 0,5
q3
−2
−1
−2 −3
−3 −4
−3 −2 −1 0 1 2 3 0 1 2 3 4 5
θ2 ρ
105
Référence Internet
S7857
z [m]
ciées aux différentes solutions géométriques inverses en traçant la
section génératrice de l’espace de travail comme une surface dans −1
l’espace (ρ, z, cos(θ2). La coordonnée supplémentaire cos(θ2) per-
2
met de distinguer les différentes solutions inverses qui appa- −2
raissent alors sur des couches différentes. Le motif de pliage du
domaine articulaire étant plus complexe que celui schématisé en −3
figure 7, il est nécessaire de séparer la représentation selon les
deux aspects (figure 8). Il faut imaginer le schéma de pliage global Figure 9 – Changements de posture singulier et non singulier d’un
en considérant que les deux surfaces correspondant aux deux robot 3R cuspidal (dans l’espace articulaire à gauche, dans l’espace
aspects font en réalité partie d’une même surface pliée au niveau de travail à droite)
des bords extérieurs et d’une partie des bords intérieurs. La repré-
sentation séparée montre comment on peut passer d’une solution
à l’autre dans un même aspect en contournant un point cusp. intérieure à gauche et vers la frontière extérieure à droite) et une
trajectoire de changement de posture non singulier (au centre,
Un robot cuspidal peut aussi effectuer un changement de posture
contournant le point cusp supérieur droit).
singulier. C’est le cas lorsque le robot de la figure 5 doit changer de
posture alors qu’il se situe dans la zone périphérique de son espace
de travail. Le robot n’y admet que deux postures : une par aspect. Le
changement de posture produira alors une trajectoire d’aller-retour 2.3 Identification des robots cuspidaux
vers la frontière extérieure de l’espace de travail, comme pour un
robot non cuspidal. Lorsque le robot est dans la zone centrale, il y a On sait que s’il existe un point cusp dans l’espace de travail d’un
quatre postures : deux dans chaque aspect. Si les postures initiale et robot, alors celui-ci est cuspidal. On sait aussi que lorsque le robot
finale sont dans deux aspects différents, le changement de posture est de type 3R orthogonal, l’existence d’un point cusp est aussi
sera singulier. Le robot effectuera alors une trajectoire d’aller-retour, une condition nécessaire. Autrement dit, s’il n’existe aucun point
soit vers la frontière intérieure qui sépare la région centrale de la cusp dans l’espace de travail d’un robot 3R orthogonal, alors ce
région périphérique, soit vers la frontière extérieure. La figure 9 robot n’est pas cuspidal. Des méthodes numériques, graphiques
montre, à partir de la zone centrale, deux trajectoires de change- ou algébriques peuvent être utilisées pour vérifier les conditions
ment de posture singulier (trajectoires d’aller-retour vers la frontière d’existence de points cusp. Elles constituent une aide intéressante
pour le concepteur dans le choix d’un robot.
Étant donné que l’existence d’un point cusp prouve que le robot
est cuspidal, ceci peut être utilisé comme critère de classification.
On sait qu’un point cusp est associé à une racine triple du poly-
Aspect 1 nôme caractéristique du modèle géométrique inverse. On peut
donc rechercher ces racines triples. S’il en existe au moins une,
on peut affirmer que le robot est cuspidal. Les racines triples
5 peuvent être calculées par le système suivant :
cos(θ2)
1
0 4
−1
4
3
3
2 (3)
1 2 ρ
0
z −1 1
−2
−3
−4 0
où P(t) est le polynôme caractéristique. Le système (3) conduit à
Aspect 2 des équations de degré très élevé, difficiles à résoudre de façon
1 symbolique avec les outils mathématiques courants [20].
cos(θ2)
0
−1 Exemple 3 – Robot 3R orthogonal
4 Considérons un robot 3R orthogonal tel que r3 = 0. En posant
3 5
4,5 d2 = 1 sans perte de généralité (normalisation), il ne reste que trois
2 4
1 3,5 paramètres à considérer : d3, d4 et r2. Le modèle géométrique direct
0 3 s’écrit alors :
2,5
−1 2 ρ
z
−2 1,5
1
−3 0,5
−4 0
(4)
Figure 8 – Pliage des deux aspects dans l’espace de travail pour le
robot 3R orthogonal et trajectoire de changement de posture non
singulier autour d’un point cusp
106
Référence Internet
S7780
Intégration robot-capteur
107
Référence Internet
S7780
2
Les aspects théoriques concernant les différentes architectures de commande
sont abordés de façon très synthétique, en donnant au lecteur la possibilité
d’approfondir le sujet à travers la citation de références.
La technologie des capteurs, des exemples et des études de cas réels,
constituent le volet pratique de l’article.
108
Référence Internet
S7780
En technologie CMOS, un pixel contient, non seulement une zone — CamLink : transmission série. Débit maximum : 7,14 Gbits/s
sensible, mais également un circuit d’amplification. L’accès à un dans sa version full. C’est une norme dédiée aux caméras numéri-
pixel se fait à la manière d’une mémoire, c’est-à-dire par un système ques. Transmission point à point. Inconvénient : carte d’interface
d’adressage : on peut ainsi accéder directement au niveau de ten- dédiée onéreuse ;
sion d’un pixel, sans avoir à dépiler les pixels précédents comme — FireWire : transmission série. Débit maximum : 800 Mbits/s.
pour un CCD. Possibilité de connecter plusieurs caméras sur le même bus. Moins
cher que le CamLink. Inconvénient : faible débit ;
■ Le tableau 1 suivant dresse un bilan des principaux avantages/ — USB 2 : transmission série. Débit maximum : 480 Mbits/s.
inconvénients des deux technologies. Caractéristiques similaires au FireWire ;
— Ethernet Gigabit : transmission série. Débit maximum :
(0)
Points principaux
Sensibilité
CCD
Bonne
CMOS
Moyenne
Pour résumer, le standard le plus performant actuellement est
le CamLink. Il offre la bande passante la plus élevée tout en
2
Accès aux pixels Lent Rapide ayant une connectique légère qui peut atteindre 10 mètres.
C’est aussi la solution la plus onéreuse.
Rapport S/B Bon Moyen
Consommation Élevée Faible Les solutions USB 2 et FireWire correspondent plutôt à des appli-
Prix de revient Moyen Faible cations bas de gamme car leur débit maximum est assez limité.
Fonctions avancées Rares Courantes La solution Ethernet Gigabit est un bon compromis : elle offre un
débit correct mais sans plus, elle est relativement peu onéreuse et,
surtout, elle autorise une transmission sur une longue distance.
Pour résumer, la technologie CCD reste à privilégier par rapport à
Pour finir, il faut également mentionner une nouvelle approche
la CMOS lorsque la qualité de l’image est primordiale (sensibilité
qui consiste à embarquer, dans le boîtier de la caméra, un calcula-
meilleure, rapport S/B meilleur).
teur destiné à traiter l’image : il s’agit des caméras « intelligentes ».
Si c’est la rapidité d’accès aux pixels qui est recherchée (ce qui est Il est ainsi possible, grâce à un kit de développement, de program-
souvent le cas en vision active), alors on préférera la technologie mer des routines de traitement d’image et de les télécharger direc-
CMOS. tement sur la caméra. Ainsi le transfert caméra vers ordinateur ne
D’autre part, cette dernière technologie permet d’intégrer sur le concerne plus l’image entière mais un résultat de traitement dont le
capteur des fonctions avancées telles que des pré-traitements basi- débit est nettement inférieur. L’inconvénient de cette approche est
ques (filtrages, détection de motifs) ce qui est impossible en techno- une puissance de traitement limitée.
logie CCD.
Enfin, la technologie CMOS étant plutôt récente, on assiste à un 1.2.3 Traitement
rattrapage rapide du CMOS sur le CCD en ce qui concerne ses prin-
cipaux défauts.
On suppose que l’image a été numérisée et qu’elle est stockée
dans la mémoire locale de la carte d’acquisition qui, elle-même, est
1.2.2 Transmission enfichée dans un connecteur de l’ordinateur devant traiter l’image.
La première étape consiste donc à transférer l’image de la
La commande par vision est une commande numérique qui fait mémoire locale à la mémoire centrale de l’ordinateur.
intervenir un calculateur. L’information du capteur doit donc être Pour une application où le temps n’est pas critique, la durée de ce
numérisée avant d’être traitée. transfert est négligeable. Mais, dans le cas de la vision active qui
doit être synchrone avec l’acquisition d’image, tout délai pénalise la
Historiquement, les caméras étaient toutes analogiques : le signal
performance de l’asservissement.
codant l’image est une tension analogique transitant dans un câble
coaxial. Dans ce cas, la numérisation de l’image s’effectue par le biais Le débit maximum théorique d’un bus PCI est de 133 Mo/s, ce qui est
d’une carte d’acquisition dans l’ordinateur qui fait le traitement. largement inférieur au débit maximum du CamLink (830 Mo/s). Aussi,
afin de tirer pleinement parti des performances du transfert caméra
L’utilisation d’une transmission analogique de l’image pose un cer-
vers carte d’acquisition, encore faut-il que le transfert carte d’acquisi-
tain nombre de problèmes, surtout dans un environnement
tion vers mémoire centrale ne soit pas un goulet d’étranglement.
industriel : la distance entre la caméra et la carte d’acquisition est limi-
tée à quelques mètres et, de plus, l’information est sujette aux pertur- Le PCI express, successeur du PCI, permet d’éliminer ce goulet
bations électromagnétiques et peut donc être facilement dégradée. grâce à un débit théorique maximal de 8 Go/s. On privilégiera donc
ce format lorsqu’un temps de réponse rapide est demandé (images
Plus récemment sont apparues des caméras numériques. Dans ce de très haute résolution en fonctionnement « look then move » ou
cas, l’information est numérisée directement au niveau de la de résolution moyenne en vision active).
caméra, puis transmise numériquement.
Nous ne détaillons pas ici les algorithmes de traitements d’image.
Pour cela, le lecteur peut se référer aux ouvrages [1] à [5].
L’avantage est clair : le signal étant numérisé au plus près de
la source, on minimise le bruit de transmission. D’autre part, il Il existe des outils de vision industrielle de haut niveau offrant à
est possible de transmettre sans perte et sur une longue l’utilisateur une bibliothèque de fonctions avancées de traitement
distance. d’image et une interface de développement simplifiée basée sur un
langage descriptif par diagrammes fonctionnels.
Il existe plusieurs standards concurrents pour la transmission Cette approche évite toute programmation de bas niveau et offre
numérique d’image : un degré de flexibilité important avec une légère pénalité sur la
— LVDS : transmission parallèle. 1 paire de fils par bit, 32 bits au rapidité.
total. Débit maximum : 400 Mo/s. Inconvénient : connectique La robustesse du traitement d’image est souvent le point faible
encombrante ; d’une application de commande par vision. Néanmoins, on peut
109
Référence Internet
S7780
Image
d’assemblage (insertion d’un piston dans un cylindre).
mesure de
position
^
p
■ Caméra déportée
Dans cette configuration (figure 2), la caméra est fixe et observe la Extraction
Reconstruction
scène constituée de l’organe terminal du robot et de l’objet d’intérêt. de
3D
primitives
Ici, la tâche asservie par vision doit être réalisée dans le champ de
vision de la caméra qui est fixe. Elle est donc plus adaptée à des
tâches locales exécutées dans un petit sous-espace de l’espace de Figure 3 – Commande 3D
travail du robot.
Elle suppose que le modèle de la scène est connu par le système
1.3.2 Types de mesure de vision. La figure 3 donne le schéma-bloc d’un asservissement
visuel 3D (aussi appelé position-based).
On appelle primitive visuelle un objet géométrique élémentaire
La consigne p* est comparée à la mesure p̂ estimée à partir de
(point, segment, ellipse, ...) qui a été identifié dans l’image. Les pri-
l’image.
mitives correspondent souvent aux arêtes ou aux contours des
objets de l’image. Exemple : Dans le cas d’une tâche de positionnement, p* est la
Il y a principalement deux approches pour l’exploitation de ces position à atteindre et p̂ est la position courante mesurée grâce à la
primitives pour la commande : l’approche 3D et l’approche 2D. caméra. Le correcteur génère la commande qui permet de faire conver-
ger p̂ vers p*.
Cette distinction concerne essentiellement le type de mesure, ou
de consigne, utilisé pour l’asservissement visuel.
Dans la figure 3 on voit qu’il y a un bloc « reconstruction 3D » qui
En 3D, ces grandeurs définissent une attitude (6 coordonnées, représente la phase d’estimation de p̂ , à partir des primitives extrai-
3 coordonnées de translation et 3 coordonnées de rotation). Les tes de l’image et du modèle de l’objet.
6 coordonnées d’attitude sont calculées à partir des primitives et
d’un modèle de la scène.
L’avantage du 3D est une parfaite maîtrise des trajectoires du
En 2D, la mesure et la consigne de l’asservissement visuel sont
robot dans l’espace opérationnel.
directement exprimées en terme de coordonnées de primitives.
Son principal inconvénient est la nécessité d’avoir à recourir à
Par exemple, dans le cas de primitives ponctuelles, la mesure et la un modèle de la scène.
consigne sont les coordonnées en pixels des points d’intérêt dans
l’image.
■ Approche 2D
■ Approche 3D
L’approche 3D est la plus intuitive. Ce fut aussi, historiquement, la La figure 4 donne le schéma-bloc d’un asservissement visuel 2D
première. (image-based).
110
Référence Internet
S7810
Téléopération –
Principes et technologies
par Philippe GARREC
Ingénieur de l’École Nationale Supérieure des Arts Métiers
Ingénieur senior au CEA
Expert CEA Technologie Conseil et ANVAR
Expert AFNOR et ISO/WG 5 – Remote Handling
2
Expert AFNOR – ISO – Remote Handling
Alain RIWAN
Ingénieur de l’École Nationale Supérieure des Arts Métiers
Advanced Master of Innovative Design (INSA Strasbourg)
Ingénieur senior au CEA
Expert CEA
Olivier DAVID
Ingénieur de l’École Nationale Supérieure des Arts Métiers
et Yvan MEASSON
Ingénieur de l’École Centrale de Nantes
Responsable du laboratoire de téléopération et cobotique
Chargé d’affaire robotique et réalité virtuelle
111
Référence Internet
S7810
2 1. Définitions – Architectures
et principes fonctionnels Manipulateur
(ou bras) esclave
Manipulateur
(ou bras) maître
Équilibrage :
ressort,
1.1 Définition et classification Palier contrepoids
3 2
1
des télémanipulateurs maı̂tre-esclave
à retour d’effort Segment
112
Référence Internet
S7810
Transmissions Transmissions
Planétaire
Satellite
2
113
Référence Internet
S7810
Remarque : notons que si l’on cherche toujours à étendre les On peut résumer en généralisant ces constations comme suit.
performances du retour d’effort on ne cherche pas toujours à Le retour d’effort sera cohérent, a minima, si :
transmettre symétriquement les défauts (force ou position) de – le télémanipulateur maı̂tre-esclave est équilibré ;
l’opérateur vers l’esclave (filtrage). – le télémanipulateur maı̂tre-esclave se comporte comme un sys-
tème réversible (on dit parfois bilatéral) ;
La figure 4 reprend le principe élémentaire de la bascule en y – les résistances sont suffisamment faibles par rapport aux
ajoutant une transmission mécanique symbolisée ici par des efforts à percevoir (notion de frottement relatif).
engrenages avec frottement. Celle-ci permet au passage de redres-
ser le sens de l’effort pour être conforme aux lois de la manipula- Un système réel comporte des flexibilités et des jeux qui condui-
tion directe. De plus, les bras sont de longueurs inégales afin de sent à des écarts de position entre maı̂tre et esclave. L’évaluation de
pouvoir, le cas échéant, multiplier le déplacement côté esclave (rap- ces défauts entre dans les critères de qualité normalisés.
port LE/LM) et ils ont une masse. Un dispositif d’équilibrage est
prévu (ici schématiquement des contrepoids) afin que leurs poids Remarques :
2
ne soit pas perçu. Le comportement réversible (ou bilatéral) ne suppose pas
nécessairement la réversibilité mécanique. Cette nuance est
L’altération du retour d’effort par le frottement est expliquée sur importante car en téléopération on peut obtenir le comporte-
les schémas vectoriels. ment bilatéral avec des transmissions irréversibles (exemple :
Examinons le cas du mécanisme réversible. On constate que le roue et vis tangente) grâce à l’utilisation d’un asservissement
retour d’effort est bien toujours opposé à P, mais qu’il est altéré sur capteur d’effort placé en sortie (ou couplemètre). On dit
par le frottement f : l’opérateur surévalue la charge en montant et parfois qu’on a « réversibilisé » la transmission, ce terme
la sous-évalue en descendant. étant bien entendu pratique mais inexact en toute rigueur.
Nous renvoyons au chapitre de la commande consacré spécia-
Remarques : en fait le frottement sec f a une valeur différente lement à ce sujet (2.6.2.1).
dans les deux sens car il dépend du bilan des efforts de contact Les télémanipulateurs maı̂tre/esclave mécaniques et électri-
dans l’engrenage. En général, le frottement ne peut être correc- ques ont des transmissions réversibles où, de plus, les frotte-
tement calculé que dans le cadre d’une théorie de la transmis- ments sont minimisés par conception. Notons que cette
sion de l’effort dans les chaı̂nes cinématiques. contrainte conduit toujours à une rigidité inférieure à celle d’un
manipulateur industriel (robot). On peut parler de source d’effort
On constate qu’un mécanisme irréversible (ou arc-boutant) dans le premier cas et de source de position dans le second.
donne un retour d’effort incohérent : en descente, l’opérateur ne
perçoit que le frottement (f ′), correspondant au décoincement du
système. Régime transitoire
Les masses se traduisent par une perturbation du retour d’ef-
Frottement fort, liés aux efforts d’inertie. Ce type ne fait pas encore l’objet
Contrepoids Charge d’une caractérisation normalisée.
Masse ESCLAVE Masse
LEVIER MAÎTRE LEVIER ESCLAVE
P
La figure 5 décrit le principe d’une transmission électroméca-
FOP nique entre le levier maı̂tre et le levier esclave.
Contrepoids
MAÎTRE Le système fonctionne suivant le même principe que précédem-
LM LE ment, mais cette fois grâce à un asservissement qui tend à aligner
Opérateur
les deux leviers (couple de rappel élastique). La liaison électrique
autorise l’éloignement des manipulateurs maı̂tre et esclave et l’éner-
P P
FOP FOP gie du réseau permet de démultiplier (multiplier) les forces et les
vitesses indépendamment. Une autre distinction importante est que
f V>0 f V>0
l’équilibrage peut être réalisé si nécessaire par l’action des moteurs
RÉVERSIBLE IRRÉVERSIBLE (§ 2.5). L’échange de données ne concerne ici que les coordonnées
articulaires. Il s’effectue de manière analogique ou numérique.
V<0 V<0
FOP
De ce point de vue, la différence principale entre un servo-mani-
P P
pulateur et un système TAO réside dans la possibilité de contrôler
f les deux manipulateurs dans un référentiel géométrique commun,
FOP exprimé en coordonnées cartésiennes. Pour plus de détails, se
f’
reporter au chapitre contrôle commande (§ 2.6.2.1). Ce principe a
permis de travailler avec des manipulateurs maı̂tre et esclave tota-
Figure 4 – Télémanipulateur maı̂tre-esclave élémentaire lement hétérogènes (cinématique et technologie), comme l’illustre
à transmission mécanique avec frottement la figure 6.
Contrepoids Contrepoids
MAÎTRE Frottement ESCLAVE
Frottement Charge
(optionnel) (optionnel) Masse
Masse
LEVIER MAÎTRE LEVIER ESCLAVE
P
LM Intercom- LE
munication
Servo-amplificateur Servo-amplificateur
Opérateur MAÎTRE ESCLAVE
Énergie
114
Référence Internet
S7811
François-Xavier RUSSOTTO
Ingénieur de Recherche CEA LIST
Yvan MEASSON
et
Chargé d’affaire robotique et réalité virtuelle CEA LIST
Claude ANDRIOT
2
Expert senior CEA LIST
115
Référence Internet
S7811
2
ment) dans la boucle de commande. Cette particularité a bien simuler le principe physique de la liaison par câble du télémanipu-
entendu énormément d’impact sur l’architecture informatique, lateur mécanique, intrinsèquement passive, tout d’abord électroni-
ainsi que sur les lois de commande. La sûreté de fonctionnement quement, puis informatiquement en émulant une liaison ressort
du système et donc la sécurité de l’opérateur et de l’environnement amortisseur virtuelle (figure 2). Cette technique de couplage est
(qui peut également être, dans le cas de la téléchirurgie, un être appelée position/position. Bien que la technologie de couplage ait
humain) est la contrainte de base de la conception et du réglage évolué, l’objectif de transparence reste identique, et la réversibilité
d’un système de téléopération. Le célèbre compromis de l’automa- naturelle (mécanique) ou active (par capteur) des robots maı̂tre et
ticien « performance/robustesse » reste bien entendu pertinent esclave est une condition nécessaire pour s’en approcher.
dans le cas de la commande des systèmes de télémanipulation.
Néanmoins, pour répondre à la problématique particulière de la Une fois l’informatique intégré dans les systèmes de téléopéra-
téléopération des techniques spécifiques d’analyse et de concep- tion, de nombreuses évolutions ont vu le jour telles que l’asservis-
tion des lois de commande sont employées (§ 1.4). sement cartésien permettant de coupler des bras non homothéti-
ques (figure 3) quelconques, le décalage, les assistances au geste,
Différentes architectures de commande ont été proposées (§ 1.5), ainsi qu’une multitude d’autres assistances.
mais par soucis pédagogique et de complétude, uniquement
l’approche passive modulaire de la figure 1 sera détaillée (§ 1.2.2).
De part sa modularité et sa robustesse, cette architecture de com- 1.2.2 Un couplage bilatéral en TAO
mande a pu être intégrée dans un contrôleur de téléopération uti- & Principe de la TAO : cas mono-axe
lisé actuellement en contexte industriel.
L’émulation informatique d’un système ressort amortisseur, tel
qu’il est présenté sur la figure 2, est réalisée simplement en asser-
1.2 Principe de commande d’un vissant le robot esclave sur la position du robot maı̂tre, et récipro-
télémanipulateur à retour d’effort quement le robot maı̂tre sur la position du robot esclave, avec un
correcteur de type proportionnel-dérivé. Ce type de couplage est
1.2.1 Du télémanipulateur mécanique à la TAO : appelé couplage position/position, et nécessite un maı̂tre et un
concepts de base esclave réversibles.
Paroi épaisse
(verre transparent)
Milieu sain Milieu hostile Axe maître Axe éclave
top -tmaî tesc tenv
Organe Organe
maître esclave
1 PD 1 Environnement
Liaison Mm s 2+Bm s Ms s 2+Bs s
bilatérale Opérateur -
qmaî qmaî qesc qesc
116
Référence Internet
S7811
Dans le cas mono-axe (couplage d’une seule articulation maı̂tre à et d’une partie rotation notée Rtm . Si la représentation des trans-
une seule articulation esclave), la loi de commande bilatérale s’écrit :
lations est unique, la partie rotation quant à elle, peut être repré-
sentée de différentes façons [22] [34]. Du fait de ses propriétés inté-
τesc = −τmaî = k (qmaî − qesc ) + b (qɺmaî − qesc ) (2)
ressantes, la représentation sous la forme de quaternions [11] est
très répandue, et sera utilisée dans cet article pour le calcul des
où ti effort articulaire (force ou couple), lois de commande. Ainsi, la partie rotation sera souvent et notam-
qi position articulaire, ment pour ce qui nous concerne ici
T T
qɺi vitesse articulaire, °Rtm = °Qtm = ⎡°εTt °ηtm ⎤ = ⎡°utT sin (θ / 2) cos (θ / 2)⎤ (5)
⎣ m ⎦ ⎣ m ⎦
i = maı̂ ou esc
(respectivement pour maı̂tre ou esclave). où q est l’angle autour du vecteur utT , permettant de passer du
m
repère d’observation au repère terminal.
Selon que l’équation (2) est vue comme l’équation mécanique
2
d’un système ressort amortisseur, ou comme une équation de com- Nota : pour toutes les variables, les exposants à gauche indiquent le repère de projec-
tion. Les déplacements ci-dessus sont donc exprimés/projetés dans le repère d’observa-
mande en position d’un moteur électrique, la variable k représen- tion.
tera respectivement une raideur ou un gain proportionnel, et la
La position cartésienne du mécanisme dans le repère d’observa-
variable b un frottement visqueux ou un gain dérivé (figure 9).
tion est obtenue par application du modèle géométrique direct
La loi de commande (2) permet d’obtenir des positions et surtout (MGD) [22] :
des efforts de consigne identiques sur le maı̂tre et sur l’esclave. Le
couplage bilatéral (à retour d’effort) obtenu est comparable à celui
bm X
t = MGD qî
m
( )
m
(6)
d’un télémanipulateur mécanique.
suivie d’une projection dans le repère d’observation :
Néanmoins, un des intérêts de la TAO est de pouvoir appliquer
des facteurs d’échelle quelconques sur les mouvements et les
efforts entre le maı̂tre et l’esclave. Aussi, la loi de commande (2)
°X tm = °X bm bm X tm = °X bm MGD qîm ( ) (7)
– Rtesc : repère de l’organe terminal de l’esclave, dans lequel les trois premières composantes sont des forces
selon les axes x, y et z du repère d’observation, et les trois derniè-
– Ro : repère d’observation ; c’est le repère qui coordonne les uni- res des moments autour de ces mêmes axes.
vers maı̂tre et esclave.
& Couplage cartésien
Pour le mécanisme m (m = maı̂ ou esc), les positions cartésien-
Comme pour le cas mono-axe, le principe du couplage cartésien
nes X , également appelées déplacements, sont composées
tm position/position, permettant d’émuler le ressort amortisseur de la
d’une partie translation notée figure 2, est d’asservir la position de l’esclave sur la position du
maı̂tre, et la position du maı̂tre sur la position de l’esclave. Les
Τ
(4) positions du maı̂tre et de l’esclave sont alors comparées dans
°Ptm = ⎡⎣px py p z ⎤⎦ l’espace cartésien [6] [8] [4], et l’erreur est interprétée comme pro-
portionnelle à un effort cartésien. Les valeurs échangées entre les
117
Référence Internet
S7811
bras sont alors les positions et les vitesses cartésiennes de l’organe le cas pour la commande cartésienne), certaines règles doivent
terminal de l’esclave et du maı̂tre, projetées dans le repère d’obser- être respectées de façon à ne pas créer d’énergie par l’intermé-
vation Ro de la scène (figure 2). Comme pour le cas mono-axe ce diaire des couplages. Ainsi, pour assurer la passivité du système
type de couplage nécessite un maı̂tre et un esclave réversibles. de télémanipulation, les coefficients d’homothétie peuvent être
La loi de commande peut s’écrire de la façon suivante : quelconques à condition qu’ils respectent la condition suivante [3] :
où °∆X tmaî ,esc est le delta de translation et de rotation entre la posi- où avf est un scalaire et Jvf un jacobien.
tion cartésienne °X t = °Pt , °Rt
maî maî (
maî ) de l’organe terminal du maı̂tre Une représentation globale de la commande bilatérale carté-
sienne peut alors être celle du schéma bloc de la figure 4.
projetée dans le repère d’observation, et la position cartésienne
2 ( )
& Les mécanismes virtuels
°X tesc = °Ptesc , °Rtesc de l’organe terminal de l’esclave également
Partant du fait qu’il est plus facile de percer avec une perceuse à
projetée dans le repère d’observation. Si le delta en translation est colonne (fixée sur un bâti) plutôt qu’avec une perceuse à main, les
simplement une différence des composantes de translation chercheurs ont eu l’idée de contraindre les mouvements de l’opéra-
°ΔPt maî ,esc = °Ptmaî − °Pt esc, la relation liant l’effort cartésien aux rotations teur au moyen de guides virtuels. Le principe de ces guides est de
n’est pas linéaire. En utilisant les quaternions, un couple de rappel séparer l’espace cartésien en deux : une partie des degrés de liberté
dérivant d’une énergie potentielle peut néanmoins être obtenu via le étant contrôlés en position, et l’autre partie en effort. Les degrés de
delta de rotation liberté pilotés en effort correspondent aux déplacements autorisés
pour l’opérateur, alors que les degrés de liberté contrôlés en posi-
tesc tion correspondent aux directions bloquées. En robotique, ce type
°ΔQtmaî,esc = 2°Rtesc ⎛ tesc ηtmaî ,esc I3 × 3 − εtmaî ,esc ⎞
tesc
ɵ εtmaî ,esc (13)
⎝ ⎠ de commande est appelée commande hybride position/
force [33] [35].
où le ^ indique l’utilisation de la matrice de pré produit vectoriel. Basée sur le principe de la liaison virtuelle ressort/amortisseur
des systèmes de télémanipulation et la possibilité de coupler en
Dans le repère d’observation, les torseurs d’effort °Ft ,esc
cartésien un robot à six degrés de liberté à un robot possédant
appliqué sur l’esclave et °Ft ,mai appliqué sur le maı̂tre sont égaux moins de degrés de liberté, l’idée des mécanismes virtuels [17] est
apparue comme un moyen simple, efficace, robuste et passif de
et opposés, ce qui correspond exactement au comportement sou-
contraindre les mouvements d’un opérateur : le principe étant sim-
haité pour un système à retour d’effort.
plement de rajouter un robot simulé entre le maı̂tre et l’esclave et
⎡°K °K PR ⎤ de coupler les extrémités des robots réels et virtuels en cartésien
La matrice °K = ⎢ PP ⎥ est une matrice 6 x 6 représentant (figure 5).
⎣°K PR °K RR ⎦
Τ
une raideur cartésienne exprimée dans le repère d’observation. Comme tout mécanisme, le mécanisme virtuel (MV) est défini à
Dans le cas d’un robot utilisé en mode automatique, cette matrice partir de son modèle géométrique direct MGDmv et son jacobien
peut-être choisie en fonction de la tâche à réaliser. Des valeurs Jmv, tels que °X t = °Rb MGD (qmv ) et °Vt = °Jmv qɺmv .
mv mv mv
numériques avec validations expérimentales peuvent être trouvées
dans [9]. Dans le cas de la téléopération, aucune direction n’est pri-
vilégiée, aussi une solution de couplage simple et néanmoins fonc- Espace articulaire
tionnelle consiste à poser °K PR = 03x 3 , °K PP = k Ι 3 × 3 et °K RR = µΙ 3 × 3 . qmaî Vitesse
Bras
Opérateur
Finalement, l’effort articulaire sur chacun des mécanismes per- maître
mettant d’appliquer les efforts calculés en (12) est obtenu en utili- qmaî Effort
sant la relation (9). L’effort articulaire est ensuite multiplié par la τdmaî
matrice des coefficients de réduction pour obtenir le couple réelle-
ment appliqué aux moteurs. MGDmaî Jmaî JmaîT
& Les facteurs d’homothétie en cartésien
Xmaî Vmaî
Les déplacements, les efforts, la sensibilité et la précision de
-1
l’opérateur étant limités, l’ajout de facteur d’échelle en vitesse et Hv Hv-1 -Hf
en effort permet d’adapter le système de télémanipulation à l’envi-
ronnement et à la tâche à effectuer par l’esclave. Typiquement, en
K Espace cartésien
microchirurgie les mouvements de l’opérateur seront divisés par
-
un coefficient d’homothétie en vitesse avant d’être transmis à Fd
l’esclave afin d’obtenir un travail plus précis, et les efforts mesura-
bles par l’esclave seront amplifiés. À l’inverse, dans le démantèle- B
ment nucléaire, le sous-marin, le BTP, les efforts et les mouvements Xesc Vesc
fournis par l’opérateur seront amplifiés pour augmenter les capaci-
tés humaines en effort et diminuer la fatigue. MGDesc Jesc JescT
Sur le même principe qu’en articulaire, les coefficients d’homo- τdesc
thétie en effort (Hf) et en vitesse (Hn) peuvent être appliqués en
cartésien : qesc Effort
Manipulateur
Environnement
Vmaî = Hv Vesc qesc
esclave
(14) Vitesse
Fmaî = Hf Fesc Espace articulaire
118
Référence Internet
S7815
2
Paris, France
Yves BRIERE
Enseignant-chercheur à l’Institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace (ISAE-SUPAE-
RO), Toulouse, France
Fabrice LE BARS
Enseignant-chercheur à l’ENSTA Bretagne, département STIC/groupe thématique
robotique, Lab-STICC/CID/PRASYS, Brest, France
119
Référence Internet
S7815
120
Référence Internet
S7815
121
Référence Internet
S7815
Figure 5 – FASt (2,5 m), voilier autonome océanographique de l’uni- Figure 8 – Saildrone (6 m, 550 kg), développé par Saildrone Inc.
versité de Porto [8] testé en mer de Bering en 2015 et sur plusieurs missions de longue
durée [14]
122
Référence Internet
S7815
Direction du vent
FL
FD Fa
a décomposition de la force aérodynamique Fa en une composante
de traînée (drag en anglais) F D et une composante
de portance (lift en anglais) F L
Direction du vent 2
Flong
123
2
124
Référence Internet
S7817
Mécanismes de tenségrité
pour la robotique de manipulation
par Quentin BOEHLER
Chercheur postdoctoral
et
Multi-Scale Robotics Lab, ETH Zurich, Zurich, Suisse
Marc VEDRINES
2
Maître de conférences
Laboratoire ICube, INSA de Strasbourg, Strasbourg, France
et Salih ABDELAZIZ
Maître de conférences
Laboratoire LIRMM, Université de Montpellier, CNRS, Montpellier, France
et Philippe POIGNET
Professeur des universités
Laboratoire LIRMM, Université de Montpellier, CNRS, Montpellier, France
et Pierre RENAUD
Professeur des universités
Laboratoire ICube, INSA de Strasbourg, Strasbourg, France
125
Référence Internet
S7817
2
homme et robot travaillent côte à côte, voire en partageant la tâche de mani-
pulation dans le cas de la comanipulation. Dans ce cas, il est nécessaire de
considérer des architectures robotiques alternatives afin de concevoir des
robots à la fois légers et robustes, permettant de réaliser une tâche de manipu-
lation efficacement tout en assurant la sûreté de l’interaction avec le travailleur
humain.
L’utilisation de mécanismes de tenségrité dans ce contexte est l’objet de cet
article. Ces mécanismes sont issus des tenségrités [C 2 471], une classe de
structures composées de barres maintenues en compression par un réseau de
câbles en tension. Les mécanismes de tenségrité sont obtenus en actionnant
l’un ou plusieurs des éléments de la structure. Ces mécanismes peuvent sup-
porter des charges importantes tout en restant légers, compliants et capables
de s’adapter à leur environnement. Leur application présente ainsi de nom-
breux intérêts dans le domaine de la robotique d’interaction. Cet article fournit
des éléments spécifiques à leur exploitation dans ce contexte, et également les
défis technologiques et fondamentaux associés à leur utilisation.
La première section introduit les principes de base des mécanismes de ten-
ségrité et leurs conséquences sur leur comportement et leur modélisation,
alors réalisée dans un cas statique. La deuxième section est focalisée sur les
méthodes de modélisation et les outils de simulation spécifiques à ces sys-
tèmes. Les outils d’analyse permettant l’évaluation de leurs performances sont
présentés dans la troisième section. La quatrième section met en avant les pro-
blématiques de conception propres à l’exploitation des mécanismes de
tenségrité dans le contexte de la robotique de manipulation. La cinquième
section introduit les stratégies de commande disponibles afin de contrôler la
pose du mécanisme, mais également sa caractéristique intrinsèque qu’est la
raideur. Les applications des mécanismes de tenségrité en robotique de mani-
pulation sont finalement présentées dans la sixième et dernière section.
Nota : le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire des termes et expressions importants de l’article, ainsi qu’un tableau
des sigles, notations et symboles utilisés tout au long de l’article.
126
Référence Internet
S7817
Traction
on
2
ssi
mpre
Co
a c
Figure 1 – Tenségrité prismatique T3 : vue d’ensemble (a), équilibre des efforts internes des éléments au niveau d’un nœud de la structure (b),
et vue du dessus (c). Les barres sont représentées en bleu et les câbles en rouge
donne par ailleurs sujet à controverse quant à la paternité du Les brevets suggèrent par ailleurs que les éléments en tension
concept de tenségrité [1]. Kenneth Snelson est le premier à propo- ne présentent pas de rigidité en compression, d’où l’appellation
ser des sculptures composées de tenségrités, dont sa célèbre Nee- de câbles. Cela suggère également que ces éléments sont très
dle Tower. Il propose par la suite de nombreuses autres œuvres légers, car très fins et sans rigidité en flexion.
d’art inspirées par le concept de tenségrité.
Skelton [2] élargit ces définitions aux tenségrités dites « de
classe K » définies comme une structure stable composée d’un
Nota : voir également http://kennethsnelson.net/category/sculptures/towers/ pour les
différentes créations de K. Snelson.
maximum de K éléments en compression connectés à chaque
nœud de la structure. Il étend ainsi la définition de tenségrité à
d’autres cas de systèmes précontraints. Bien que le développe-
1.1.3 Définition des tenségrités ment initial des tenségrités se soit basé sur des définitions restric-
tives, les avantages intrinsèques aux tenségrités sont bel et bien
conservés en utilisant la définition étendue proposée par Skelton.
De nombreuses définitions ont été proposées, principalement
afin de déterminer si un assemblage mécanique est ou n’est pas
une tenségrité. On adopte ici la définition proposée dans [1] et
basée sur les brevets initiaux. 1.2 Un principe fondamental :
l’autocontrainte
Un système de tenségrité est un système dans un état Par définition, une tenségrité est un système précontraint qui
d’équilibre stable comprenant un ensemble discontinu d’élé- satisfait à deux conditions [3] :
ments en compression au sein d’un ensemble continu d’élé-
– une condition portant sur sa stabilité : la structure revient dans
ments en tension.
sa position initiale suite à une perturbation extérieure ;
127
Référence Internet
S7817
2
trainte assure la robustesse et l’intégrité de la structure, ce qui a
mené à l’utilisation originelle des structures de tenségrité dans le
domaine du génie civil afin de concevoir des structures à la fois
légères et robustes [C 2 471].
128
Référence Internet
S7817
Nota : Certaines notions complémentaires ainsi que des applications aux tenségrités
1.3.2 Intérêts pourront être trouvées par le lecteur dans l’article [C 2 471].
129
Référence Internet
S7817
2
comportement [14]. On parle alors de modélisation statique [5], et
unique, (b) un assemblage autocontraint et (c) un assemblage non
l’analyse de ces mécanismes passe par la formulation de leur autocontraint
modèle statique direct (MSD) ou inverse (MSI).
La détermination des modèles statiques passe par l’utilisation pour t ≠ 0 ce qui traduit que le système est à l’équilibre en
de méthodes dites de form-finding dont l’objectif est de recher- l’absence de sollicitations extérieures, uniquement sous l’action
cher la configuration du système tel qu’il soit équilibré et en état de ses efforts internes.
d’autocontrainte. Pour plus de détails sur les différentes
méthodes, le lecteur pourra se référer aux revues de la littérature La difficulté de la méthode est de choisir un jeu de densités de
[15], [16]. De nombreuses méthodes plus spécifiques font égale- forces qui permette d’obtenir au moins une configuration d’équi-
ment l’objet des publications [17] à [22]. Il existe deux principales libre [24], [25]. Par ailleurs, plusieurs configurations d’équilibre
familles de méthodes : les méthodes cinématiques et les peuvent exister pour une même topologie, mais pour différents
méthodes statiques [15]. jeux de densité de forces.
Le respect de la condition d’autocontrainte, et donc la possibi-
2.1.1 Méthodes cinématiques lité de modifier le niveau de précontrainte dans les éléments,
implique des conditions sur la matrice d’équilibre A du système
Les méthodes cinématiques partent du constat que les configu-
qui dépend de sa géométrie. On peut ainsi dériver des règles sur
rations de tenségrité correspondent à des limites d’assemblage.
le nombre et l’agencement des éléments qui assurent l’auto-
Cette limite d’assemblage peut être déterminée par programma-
contrainte du système. Ces règles sont notamment présentées
tion non linéaire, en maximisant une fonction dépendant des lon-
dans [3], [26].
gueurs des éléments et contrainte par la possibilité d’assemblage
de la structure, ou encore par relaxation dynamique [23].
Cette famille de méthodes ne prend cependant pas explicite- Assemblage autocontraint
ment en compte la statique du système, et se base uniquement Afin d’illustrer ce dernier point, des exemples d’assemblage plan sont
sur une interprétation géométrique de l’état d’autocontrainte en représentés sur la figure 4. Dans les cas (a) et (c), les systèmes ne sont
tant que limite d’assemblage. Si cette approche est pertinente pas autocontraints. En effet, leur configuration ne peut pas être stabilisée
pour des systèmes à câbles rigides, elle s’avère néanmoins peu en présence d’efforts internes sans introduire d’efforts extérieurs au
adaptée pour des mécanismes de tenségrité composés d’élé- niveau de leurs nœuds. Cette conclusion est triviale pour un élément
ments élastiques. seul (a) ; un effort axial non nul t ne peut être obtenu qu’en présence des
efforts égaux et opposés fA et fB au niveau des extrémités A et B.
2.1.2 Méthodes statiques On voit ici que pour un assemblage comme (c), il est nécessaire
d’ajouter des éléments afin d’obtenir un système autocontraint tel
Les méthodes statiques utilisent la relation qui existe entre la que celui illustré en (b).
configuration d’équilibre et les efforts dans les éléments du méca-
nisme. Ces méthodes sont plus intéressantes dans le cas présent
2.1.2.2 Approche énergétique
car les caractéristiques élastiques des éléments sont a priori
connues et il existe alors une relation entre leurs déformations et L’approche par les densités de forces consiste finalement à effec-
leurs efforts internes. Deux approches sont ainsi considérées dans tuer un raisonnement énergétique sur la condition d’équilibre du
la littérature : l’approche par les densités de forces, et l’approche système, d’où la désignation d’une deuxième approche plus géné-
énergétique. rale appelée « approche énergétique » et usuellement employée
[27]. En effet, la configuration d’équilibre correspond à un extre-
2.1.2.1 Approche par les densités de forces mum local de l’énergie potentielle du système, ce qui constitue l’une
L’approche par les densités de forces consiste à considérer le des manières de définir l’équilibre de la configuration du méca-
rapport effort/longueur dans chaque composant, rapport qui est nisme.
appelé « densité de force ». La position des nœuds de la tensé-
grité qui assure l’équilibre avec un jeu de densités de forces Un mécanisme de tenségrité est en équilibre lorsque son
imposé a priori est alors recherchée, ce qui revient à déterminer la énergie potentielle est dans un extremum local.
matrice d’équilibre A du système tel que :
(1)
La recherche de la configuration d’équilibre avec cette approche
avec t le vecteur (n × 1) des efforts axiaux dans les n éléments, consiste donc en une optimisation d’une fonction d’énergie afin
donc des efforts internes, et f le vecteur des efforts nodaux, i.e. le de trouver cet extremum local.
vecteur (3b × 1) des efforts appliqués aux b nœuds. Dans le cas
d’un système précontraint, la condition d’autocontrainte Cette approche est particulièrement intéressante lorsque l’on
s’exprime alors par : considère des systèmes composés d’éléments de caractéristiques
élastiques connues. Dans ce cas en effet, la fonction d’énergie
(2) peut être formulée en considérant l’énergie élastique stockée dans
130
Référence Internet
S7818
2
Robex, Lab-STICC, ENSTA-Bretagne
131
Référence Internet
S7818
n’est pas forcément volant. Il s’agit d’un robot mobile qui peut être aérien,
terrestre ou sous-marin, naviguant ou roulant. Un drone peut donc être consi-
déré en première approche comme un véhicule sans personne à bord, de toute
taille, avec un degré d’autonomie élevé. Il est capable de naviguer d’un point à
un autre, en évitant les obstacles et avec souvent une mission à effectuer.
Différents types de missions peuvent être données à un drone, comme la
cartographie d’une zone, le transport d’un colis, la recherche d’une épave sous-
marine. Les drones sont de plus en plus utilisés pour des missions longues et
pénibles, comme certains travaux agricoles, le nettoyage (comme le passage de
l’aspirateur) ou pour des missions dangereuses pour l’être humain (intervention
dans des zones irradiées, recherche de personnes suite à une avalanche ou un
1. Qu’est-ce qu’un drone ? de mines, de la recherche des boîtes noires d’un avion qui s’est
abîmé en mer et de l’exploration de planètes. La robotique mobile
est une discipline qui cherche à concevoir des robots capables
Un drone sera vu ici comme un solide capable de se mouvoir d’aider dans ce type de tâches de façon plus ou moins autonome.
dans un environnement fluide (air ou eau) de façon autonome. Elle utilise des outils des mathématiques appliquées comme l’auto-
Ainsi, ne seront pas considérés comme des drones : matique, le traitement du signal, l’informatique ou l’électronique.
• un robot manipulateur qui est articulé et qui n’est donc pas L’un des objectifs de cet article est de donner quelques outils
un corps solide ; géométriques qui permettent de modéliser et de contrôler des
• les voitures autonomes car elles n’évoluent pas dans un fluide ; drones. Ces drones seront modélisés par des équations d’état à
temps continus, c’est-à-dire une équation différentielle vectorielle
• les bateaux autonomes car ils évoluent à l’interface entre du premier ordre de la forme :
deux fluides ;
• les satellites qui ne s’appuient pas sur un fluide. (1)
Un drone fait donc partie de la classe des robots mobiles auto-
nomes. Il comprend : où x est le vecteur d’état et u est le vecteur d’entrée. Ces équations
d’état sont obtenues en combinant les équations de la mécanique
• des capteurs qui vont collecter des informations sur son envi-
avec des équations cinématiques. Cette étape de modélisation est
ronnement et son état, comme son orientation et sa position ;
fondamentale, à la fois pour simuler et comprendre les drones,
• des actionneurs qui vont permettre le déplacement ; mais également pour la conception des régulateurs. Nous allons
• une intelligence (ou régulateur), qui va chercher à calculer explorer le volet tridimensionnel car les drones, qu’ils soient
comment agir sur les actionneurs à partir des informations avions, quadrirotors ou sous-marins, évoluent dans un monde à
collectées afin de se déplacer suivant la direction souhaitée. trois dimensions.
Les drones sont en constante évolution, principalement depuis Souvent, une modélisation par des équations d’état fait appa-
les années 2000, dans le domaine militaire ou maritime, médical, raître des paramètres constants comme des masses, des matrices
agricole, spatial, etc. C’est le cas par exemple de la chasse aux d’inertie, des longueurs, des coefficients de viscosité, etc. Une étape
mines où des drones ratissent une zone pour détecter la présence d’identification doit alors être faite pour l’obtention d’un modèle
132
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complet. Dans cet article, nous supposerons que cette étape a déjà Ainsi, au vecteur ω = (ωx, ωy, ωz), on peut associer la matrice
été réalisée et que tous ces paramètres sont connus. antisymétrique ω∧ qui sera également dénotée ∧(ω) pour faire appa-
raître l’opérateur ∧.
Pour la régulation qui va nous intéresser, nous allons supposer
que l’état est connu exactement, ce qui n’est en général pas le
cas. Les étapes de localisation ou même de cartographie, pourtant
souvent nécessaires pour atteindre une autonomie complète, ne 2.2 Matrices de rotation
seront donc pas considérées ici.
Pour l’orientation tridimensionnelle des robots, il est essentiel
Il n’existe pas de méthodologie systématique pour modéliser ou d’avoir une bonne compréhension sur les matrices de rotation.
bien commander un drone. Pourtant, un certain nombre de concepts
Rappelons qu’une rotation est une application linéaire qui est
et d’outils venant de la géométrie non euclidienne, comme les
une isométrie (c’est-à-dire qu’elle préserve le produit scalaire) et
groupes de Lie, les algèbres de Lie ou les géodésiques, reviennent
qui est directe (elle ne change pas l’orientation de l’espace). Il en
souvent. Dans la section 2, nous allons rappeler certains de ces
2
découle qu’une matrice de rotation R satisfait les deux propriétés
concepts, ceux qui nous semblent les plus fondamentaux. La sec-
suivantes :
tion 3 applique ces outils pour modéliser un drone générique en le
considérant comme un corps rigide capable de se mouvoir dans (3)
l’espace. La section 4 explique comment il est possible de contrôler
un drone en orientation et en vitesse. Le juste niveau d’abstraction a Si R est une matrice de rotation qui dépend du temps t, en diffé-
été choisi de façon à ne pas avoir à spécifier le type de drone consi- rentiant la relation RRT = I, nous obtenons :
déré. Les sections suivantes montrent comment s’appliquent les
méthodes développées pour ce drone générique afin de traiter diffé- (4)
rentes catégories de drones. La section 5 propose un régulateur Ainsi, est une matrice antisymétrique. On peut démontrer
capable de stabiliser un quadrirotor et de lui faire suivre une trajec- que dans le cas où R est de dimensions 3 × 3,
toire décrite par un champ de vecteur. La section 6 s’intéresse au
contrôle d’une torpille sous-marine comprenant un propulseur et (5)
trois gouvernes. La section 7 propose un régulateur capable de com-
mander un hélicoptère en orientation dans le but de lui faire décrire et
un looping à l’altitude désirée. La section 8 s’attaque au problème de
l’atterrissage précis d’un hexarotor sur une plateforme mobile. La (6)
section 9 introduit dans le contexte de la commande des drones
où le vecteur ω = (ωx, ωy, ωz) est le vecteur de rotation associé.
l’intérêt des géodésiques dans les espaces non euclidiens. Il s’agit de
courbes minimisant la longueur du chemin à parcourir. Cet article se
termine par une conclusion qui récapitule les notions de géométrie
introduites et leur intérêt pour le développement de drones fiables. 2.3 Exponentielles et logarithmes
des matrices
À retenir Le vecteur de rotation et la matrice de rotation sont des objets
de nature différente. En effet, on peut additionner des vecteurs de
• Un drone est un véhicule sans personne à bord. rotation, alors que l’on peut multiplier des matrices de rotation.
• Il peut être téléopéré, mais possède souvent différents degrés Ces deux objets sont liés par l’exponentielle et réciproquement le
d’autonomie. logarithme. Nous allons ici rappeler ces opérateurs dans le cas
• Le drone intervient pour des opérations périlleuses, difficiles matriciel qui va nous intéresser.
ou pénibles pour l’être humain.
■ Exponentielle
• La fiabilité est une propriété nécessaire au développement
des drones. Soit une matrice carrée M de dimension n. Son exponentielle
est définie par :
(8)
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2.4 Formules de Rodrigues même que Exp sera souvent confondu avec exp. Ainsi, par exemple,
si i, j, k sont les vecteurs de la base canonique de , on aura :
En dimension 3, une matrice de rotation R est associée à un axe
de rotation représenté par un vecteur unitaire u et un angle α rela-
tivement à cet axe. Le lien peut être formalisé par les
formules de Rodrigues :
(9)
(11)
avec
2 (10)
Dans ces formules, (ii) est la réciproque de (i). La version capita- ■ Expressions analytiques
lisée Exp, Log de exp, log sont des raccourcis utilisés pour éviter
l’utilisation de l’opérateur ∧. Cela est illustré par la figure 1. Soit une matrice de rotation R de SO(3), son logarithme (qui est
L’ensemble des matrices de rotation dans forme le groupe un vecteur de so(3)) est donné par :
de Lie SO(3) et les matrices antisymétriques de constituent
l’algèbre de Lie associée. L’exponentielle et le logarithme forment
un lien entre ces deux structures algébriques. (12)
Le vecteur ω et sa matrice associée ∧(ω) représentent les mêmes
objets écrits différemment. On aura tendance à les confondre, de
so(3) so(3)
exp
Ι
log
3 Exp
Log
ω
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où tr(R) désigne la trace de la matrice R. Soit , son expo- 2.7 Évolution d’une matrice de rotation
nentielle (qui est une matrice de rotation) est donnée par :
Soit R(t) une matrice de rotation d’un corps mobile. On a :
(13) (15)
où ωr = RTωest le vecteur de rotation exprimé dans le référentiel
du mobile. C’est ce schéma d’intégration, dit exponentiel, qu’il
nous faudra utiliser pour intégrer l’orientation du drone, plutôt
qu’une méthode de Runge Kutta.
2.5 Angles d’Euler
Pour montrer cette relation d’évolution, il faut partir de l’équa-
tion (6). Nous avons :
Pour représenter l’orientation d’un mobile dans l’espace, nous uti-
liserons principalement les matrices de rotation. Toutefois, il est sou-
vent confortable d’utiliser les angles d’Euler, bien que ces derniers
engendrent des singularités. La relation qui relie une matrice de rota- et donc si dt est infiniment petit,
(16)
2
tion à ses angles d’Euler est donnée par :
avec i = (1, 0, 0)T, j = (0, 1, 0)T et k = (0, 0, 1)T. Les angles d’Euler φ, (17)
θ, ψ sont appelés respectivement gîte, assiette et cap. Les termes
roulis, tangage, lacet, souvent employés pour les désigner, sont à
utiliser pour leur dérivée temporelle . Nous éviterons d’uti-
liser les angles d’Euler, du fait des singularités qu’ils produisent et
que l’on appelle souvent le gimbal lock. Cependant, pour la
conception de régulateur, les angles d’Euler sont intuitifs, concrets Pour des raisons numériques, lorsque nous l’intégrons pendant
et confortables à utiliser. Nous aurons tendance à les considérer une longue période, la matrice R(t) peut perdre la propriété
lorsque l’orientation du drone est à mettre en lien avec le terrain. RRT = I. Pour éviter cela, nous pouvons procéder à une étape de
Par exemple, indiquer que le drone va vers l’ouest avec un angle renormalisation, ce qui signifie que la matrice courante R doit être
d’assiette de 45 % se traduit immédiatement en termes d’angles projetée sur SO(3) qu’elle n’aurait jamais dû quitter. Pour cela,
d’Euler. En revanche, les manipulations mathématiques de plus une factorisation QR peut être effectuée. Rappelons que pour une
bas niveau se feront avec les matrices de rotation. matrice carrée M, une telle décomposition produit deux matrices
Q, R telles que M = QR où Q est une matrice de rotation et R est
triangulaire. Lorsque M est proche de SO(3), R est presque diago-
nale et presqu’une matrice de rotation, ce qui signifie que sur sa
2.6 Groupes de Lie diagonale, les valeurs sont proches de ±1. Le programme Python
génère une matrice de rotation N correspondant à la projection de
M sur SO(3).
L’ensemble des matrices de rotation de forme un groupe
relativement à la multiplication, appelé groupe orthogonal spécial Q, R = numpy.linalg.qr(M)
(spécial car det R = 1, orthogonal car RTR = I). Il est noté (SO(n), ·)
et l’identité I est son élément neutre. De plus, les opérations de v=diag(sign(R))
multiplication et d’inversion sont dérivables, ce qui fait de SO(n) N=Q@diag(v)
un groupe de Lie qui est une variété différentielle dans l’ensemble
des matrices de . L’équation matricielle RTR = I peut se
2.8 Évolution d’une transformation rigide
décomposer en équations scalaires indépendantes. Par
Le calcul de l’évolution évoqué dans la section précédente pour
exemple, pour n = 2, nous avons équations scalaires. l’orientation s’applique également pour d’autres types de transfor-
mations, pourvu que la structure de groupe de Lie soit respectée.
En effet, : Par exemple, les transformations rigides qui combinent transla-
tions et rotations forment un groupe de Lie, puisque l’on peut les
composer et les inverser. Le groupe des transformations rigides
du plan est noté SE(2). Pour des raisons pratiques de calcul sur
(14)
ordinateur, il est préférable d’utiliser une représentation matri-
cielle. Ainsi, la matrice :
• Pour n = 1, nous avons d = 0. L’ensemble SO(1) est un single- correspond à une transformation rigide avec t = (p1, p2) étant la
ton qui contient une unique rotation : R = 1. translation et p3 l’angle de la rotation R.
La structure de groupe de SE (2) se vérifie facilement. Prenons
• Pour n = 2, d = 1. Un seul paramètre ou angle est nécessaire
P1, P2 dans SE(2). La composition est interne car :
pour représenter SO(2).
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L’inversion l’est également puisque : et intégrons la trajectoire en prenant trois approches : l’approche
exacte, la méthode d’Euler et l’intégration exponentielle. Nous
prendrons et une période d’échantillonnage dt = 0,5.
(20) Dans ce cas, la trajectoire exacte se calcule facilement. Elle est
donnée par :
De plus, ces deux opérations sont différentiables, ce qui fait de
SE(2) un groupe de Lie. Notons que la matrice identité de cor-
respond à l’élément neutre de ce groupe. Le calcul de l’algèbre de
Lie associée se fait en linéarisant : (28)
(21)
2
Une intégration par Euler nous amène au schéma d’intégration
suivant :
autour de la matrice identité, c’est-à-dire, autour de p = 0. Nous
obtenons à l’ordre 1 :
(29)
Les matrices E1, E2, E3, appelées générateurs, forment la base Afin d’illustrer dans un tel contexte l’intérêt du logarithme, nous
de l’algèbre de Lie so(3) associée à SO(3). Notons que pour un jeu allons chercher une trajectoire qui relie deux poses. Cela signifie
de paramètres p = (p1, p2, p3), la transformation correspondante que nous voulons trouver un chemin, dans SE(2) tel
est : que P(0) = P0, P(1) = P1, où P0 et P1 sont les deux matrices poses
associées aux vecteurs x(0) = (–1, –1, –1)T et x(1) = (1, 1, 1)T. Nous
(23) appliquons la formule d’interpolation donnée par :
Or :
(24) Le résultat est donné par la figure 2 (d). Nous remarquons que
la trajectoire n’a aucune raison d’étre compatible avec un chemin
possible pour la voiture de Dubins, qui elle ne dérappe pas latéra-
Ainsi, dans la représentation exponentielle (23), la rotation et la lement. On peut montrer que la trajectoire correspondant à cette
translation se font de façon simulatée et non pas l’une après interpolation est une géodésique. C’est la plus courte des trajec-
l’autre, comme c’est le cas dans la seconde expression (24). Bien toires dans l’espace SE (2) mais par forcément la plus courte dans
sûr, le comportement de l’expression (23) est préférable car il tra- le monde réel euclidien.
duit plus la réalité du mouvement du corps rigide qui tourne et se
déplace en même temps. Mais surtout, cette représentation expo-
nentielle nous amènera à une plus grande précision lors du calcul
de la trajectoire. 2.9 Quelques exemples
Pour illustrer ce gain en précision, prenons une voiture de Dubins :
Avant de passer à des robots tridimensionnels, nous allons ici consi-
dérer des exemples illustrant les notions définies précédemment.
(25)
2.9.1 Voiture sur la sphère
Le vecteur d’état x = (x1, x2, x3), appelé pose, peut être repré- Un modèle classique de voiture évoluant sur un plan est celui
de Dubins décrit par :
senté par un élément . Pour l’intégration, nous pouvons
donc utiliser une formule proche de celle que nous avons utilisée
pour la rotation dans SO(3). Ici, elle s’écrit :
(30)
(26)
, , ,
(27) (31)
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