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ÉNERGIES

Ti301 - Conversion de l'énergie électrique

Composants actifs
en électronique de puissance

Réf. Internet : 42245

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Conversion de l'énergie électrique
(Réf. Internet ti301)
composé de  :

Électrotechnique générale Réf. Internet : 42333

Réseaux électriques linéaires Réf. Internet : 42258

Mesures et essais en électrotechnique Réf. Internet : 42247

Matériaux magnétiques en électrotechnique Réf. Internet : 42259

Matériaux isolants en électrotechnique Réf. Internet : 42255

Matériaux conducteurs et plasmas Réf. Internet : 42251

Composants passifs et transformateurs statiques Réf. Internet : 42246

Outils d'analyse en électronique de puissance et métrologie Réf. Internet : 42278

Compatibilité électromagnétique Réf. Internet : 42705

Composants actifs en électronique de puissance Réf. Internet : 42245

Convertisseurs électriques et applications Réf. Internet : 42253

Accumulateurs d'énergie Réf. Internet : 42243

Généralités sur les machines électriques tournantes Réf. Internet : 42250

Différents types de machines électriques tournantes Réf. Internet : 42249

Machines électriques tournantes : conception, construction Réf. Internet : 42252


et commande

Systèmes électriques pour énergies renouvelables Réf. Internet : 42248

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Conversion de l'énergie électrique
(Réf. Internet ti301)

dont les exper ts scientifiques sont  :

Bruno ALLARD
Professeur des universités, département de Génie électrique de l'INSA de Lyon,
chercheur au laboratoire Ampère (CNRS UMR 5005)

François COSTA
Agrégé en Génie électrique, Docteur ès Sciences Physiques, Professeur des
universités à l'IUFM de Créteil, Chercheur au SATIE/ENS-Cachan

Éric LABOURÉ
Professeur des Universités (Université Paris Sud - IUT de Cachan)

Thierry LUBIN
Maître de conférences - HDR à l'Université de Lorraine. Chercheur au
laboratoire GREEN de Nancy

Frédéric MAZALEYRAT
Professeur à l'ENS de Cachan, chercheur au SATIE-ENS Cachan (Systèmes et
applications des technologies de l'information et de l'énergie-École normale
supérieure de Cachan)

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Bruno ALLARD Nicolas GINOT Raphaël RIVA


Pour l’article : D3060 Pour l’article : D3234 Pour l’article : E3385

Yvan AVENAS Philippe LAHAYE Jean-François ROCHE


Pour l’article : D3114 Pour l’article : D3234 Pour l’article : D3117

Christophe BATARD Stéphane LEFEBVRE Nicolas ROUGER


Pour l’article : D3234 Pour les articles : D3230 – Pour les articles : D3230 –
D3231 – D3232 – D3233 D3231 – D3232
Mounira
BOUARROUDJ- Philippe LETURCQ Jean-Louis SANCHEZ
BERKANI Pour les articles : D3100 – Pour l’article : D3110
Pour l’article : D3126 D3102 – D3104 – D3106 –
D3107 – D3108 – D3109 Dominique TOURNIER
Cyril BUTTAY Pour les articles : D3120 –
Pour l’article : D3116 Frédéric MORANCHO D3122
Pour l’article : D3110
Jean-Marie DORKEL Paul Étienne VIDAL
Pour les articles : D3112 – Bernard MULTON Pour l’article : D3114
D3113 Pour les articles : D3230 –
D3231 – D3232 – D3233
Laurent DUPONT
Pour les articles : D3114 – Christophe RAYNAUD
D3126 Pour l’article : D3119

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VI
Composants actifs en électronique de puissance
(Réf. Internet 42245)

SOMMAIRE

1– Composants actifs Réf. Internet page

Électronique de puissance - Bases, perspectives, guide de lecture D3060 11

Composants semi-conducteurs de puissance  : caractères propres D3100 15

Physique des semi-conducteurs de puissance D3102 19

Tenue en tension des semi-conducteurs de puissance D3104 27

Composants semi-conducteurs de puissance bipolaires. Partie 1 D3106 31

Composants semi-conducteurs de puissance bipolaires. Partie 2 D3107 35

Semi-conducteurs de puissance unipolaires et mixtes (partie 1) D3108 41

Semi-conducteurs de puissance unipolaires et mixtes (partie 2) D3109 45

Composants semi-conducteurs. Intégration de puissance monolithique D3110 51

Semi-conducteurs de puissance. Problèmes thermiques (partie 1) D3112 55

Évaluation de la température des composants actifs de puissance D3114 59

Semi-conducteurs de puissance. Problèmes thermiques (partie 2) D3113 67

Modules et boîtiers de puissance (packaging) D3116 69

Conditionnement des modules de puissance E3385 73

Définition d'un dissipateur thermique en milieu industriel D3117 79

Propriétés physiques et électroniques du carbure de silicium (SiC) D3119 83

Composants de puissance en SiC. Technologie D3120 87

Composants de puissance en SiC. Applications D3122 91

Fatigue des composants d'électroniques de puissance. Physique de défaillance D3126 95

2– Étages de pilotage rapproché Réf. Internet page

Commande des composants à semi-conducteurs de puissance : contexte D3230 103

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VII
Caractéristiques des composants à semi-conducteur de puissance en vue de leur D3231 109
commande
Composants bipolaires thyristors,triacs, GTO, GCT et BJT) : circuits de commande D3232 117

MOSFET et IGBT : circuits de commande D3233 121

MOSFET et IGB : circuits de commande, sécurisation et protection du composant à D3234 125


semi-conducteur

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Composants actifs en électronique de puissance
(Réf. Internet 42245)

1
1– Composants actifs Réf. Internet page

Électronique de puissance - Bases, perspectives, guide de lecture D3060 11

Composants semi-conducteurs de puissance  : caractères propres D3100 15

Physique des semi-conducteurs de puissance D3102 19

Tenue en tension des semi-conducteurs de puissance D3104 27

Composants semi-conducteurs de puissance bipolaires. Partie 1 D3106 31

Composants semi-conducteurs de puissance bipolaires. Partie 2 D3107 35

Semi-conducteurs de puissance unipolaires et mixtes (partie 1) D3108 41

Semi-conducteurs de puissance unipolaires et mixtes (partie 2) D3109 45

Composants semi-conducteurs. Intégration de puissance monolithique D3110 51

Semi-conducteurs de puissance. Problèmes thermiques (partie 1) D3112 55

Évaluation de la température des composants actifs de puissance D3114 59

Semi-conducteurs de puissance. Problèmes thermiques (partie 2) D3113 67

Modules et boîtiers de puissance (packaging) D3116 69

Conditionnement des modules de puissance E3385 73

Définition d'un dissipateur thermique en milieu industriel D3117 79

Propriétés physiques et électroniques du carbure de silicium (SiC) D3119 83

Composants de puissance en SiC. Technologie D3120 87

Composants de puissance en SiC. Applications D3122 91

Fatigue des composants d'électroniques de puissance. Physique de défaillance D3126 95

2– Étages de pilotage rapproché

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9
1

10
Référence Internet
D3060

Électronique de puissance – Bases,


perspectives, guide de lecture
1
par Bruno ALLARD
Professeur des Universités
Département de Génie Électrique de l’INSA de Lyon,
Directeur et chercheur au laboratoire Ampère, UMR CNRS 5005,
Campus LyonTech-La Doua, Villeurbanne

Cet article est la réédition actualisée de l’article [D 3 060] intitulé « L’électronique de puis-
sance – Bases, perspectives, guide de lecture » paru en 2006, rédigé par Bruno Allard.

1. Découpage de l’énergie électrique .................................................. D 3 060v2 - 3


2. Électronique de puissance depuis son origine ............................. — 4
3. Électronique de puissance demain .................................................. — 6
4. Une discipline scientifique et technique très vaste ................... — 7
5. Rubrique vivante ................................................................................... — 8
5.1 Outils d’analyse et métrologie ................................................................ — 8
5.2 Composants passifs ................................................................................. — 8
5.3 Composants actifs à semi-conducteur ................................................... — 8
5.4 Commande et régulation des convertisseurs ........................................ — 8
5.5 Architecture des convertisseurs.............................................................. — 9
5.6 Applications .............................................................................................. — 9
6. Conclusion .............................................................................................. — 10
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. D 3 060v2

’électronique de puissance est une discipline scientifique et technique –


L statut acquis depuis les années 1980, discipline vaste de connaissances et
de technologies.
La réussite d’un convertisseur de puissance, en tant que produit industriel,
repose sur la maîtrise de nombreux phénomènes physiques, dans plusieurs
domaines. Pour autant, il serait délicat d’avancer une définition précise des
concepts, technologies et techniques que recouvre l’acronyme « électronique
de puissance ». Cette discipline soutient la réalisation de fonctions essentielles
au sein de systèmes, dont le grand public ne voit en fin de compte que la fina-
lité. Que ce soit dans un train ou un téléphone portable, la place de
l’électronique de puissance dans ces « produits » est rarement soulignée.
L’électronique de puissance alimente en énergie les fonctions d’un système
« électronique », quel qu’il soit. L’image de la discipline « électronique de
puissance » est sans doute à l’égale de l’importance de cette discipline dans un
système : tout en discrétion.
À l’heure où les matières fossiles se raréfient et que la conscience écologique
promeut des énergies propres et renouvelables, l’électronique de puissance est
de nouveau propulsée au premier plan. En effet, en aval des systèmes qui
transforment les énergies alternatives à l’énergie fossile (soleil, vent, eau,
thermie, vibration, biomasse), l’électronique de puissance est présente dès la
transformation en énergie électrique et dès l’adaptation de cette électricité aux
Parution : février 2016

besoins. L’industrie de l’électronique de puissance est contrainte de produire

Copyright © –Techniques de l’Ingénieur –Tous droits réservés D 3 060v2 – 1

11
Référence Internet
D3060

ÉLECTRONIQUE DE PUISSANCE – BASES, PERSPECTIVES, GUIDE DE LECTURE __________________________________________________________________

plus de convertisseurs, avec des performances accrues et pour un coût de plus


en plus réduit. Ces performances vont dans le sens d’un meilleur rendement et
d’une puissance massique augmentée. Des applications exigent des fonction-
nements des environnements considérés comme sévères en température
ambiante, vibration et agression chimique. Mais toujours en discrétion...
L’électronique de puissance s’apparente à l’électrotechnique, et renvoie à de

1
grosses installations. Ces installations électriques n’évoquent pas de prime
abord de hautes technologies et pourtant la transition énergétique fait émerger
un renouveau technique et scientifique fort des solutions dites de réseaux
intelligents (smart grids). Le déploiement dans un futur proche d’un réseau
maillé en régime continu mais à haute tension (HVDC) implique la mise au
point de composants et de convertisseurs adaptés. Sans électronique de puis-
sance en termes de techniques et de concepts, les produits nomades
(ordinateurs, lecteurs...) ne connaîtraient pas le développement que l’on sait. À
toute petite échelle, l’électronique de puissance s’appelle la « gestion de
l’énergie » ou « power management ». C’est finalement le but premier de tout
convertisseur. C’est l’électronique basse tension qui s’est emparée des
concepts de découpage de l’énergie électrique, ou bien l’électronique de puis-
sance, en tant que discipline, qui s’intéresse à des produits de toute petite
puissance (moins du watt) comme à ceux mettant en jeu des puissances colos-
sales (plusieurs mégawatts). Mise à part la technologie, l’alimentation d’un
processeur (~ 100 W) ou le convertisseur connecté à une génératrice
d’éolienne (400 kW) partage un très grand nombre d’aspects, et les ingénieurs
qui les ont respectivement conçus se sont battus avec les mêmes phénomènes
physiques et ont tenté de trouver la meilleure réponse aux mêmes compromis
(masse, rendement, stabilité, qualité de service, refroidissement, fiabilité,
susceptibilité électromagnétique...).
La rubrique Électronique de puissance présente une discipline, dédiée à la
conversion de l’énergie électrique, c’est-à-dire le moyen de fournir précisé-
ment à une charge l’énergie électrique dont elle a besoin, – en courant, en
tension et en contenu spectrale et cela de manière dynamique – quand elle en
a besoin, et ce à partir d’une ou plusieurs sources primaires d’énergie élec-
trique. La rubrique a l’ambition de consigner les connaissances nécessaires à
la compréhension des phénomènes mis en jeux. La conversion d’énergie pri-
maire non électrique en électricité couvre des aspects de plus en plus abordés
en terme de « récupération d’énergie » (energy harvesting). Les principes phy-
siques de la transformation de l’énergie primaire en électricité ne sont pas
traités dans la présente rubrique. Par contre la gestion de cette transformation,
notamment pour la rendre la plus efficace possible, – notamment le fameux
point de puissance maximale (MPP, maximal power point) – incombe à un
convertisseur électrique, objets couverts dans la présente rubrique.
L’électronique de puissance évolue très vite, et par sauts technologiques.
Aussi, le rôle de la rubrique est également d’offrir un exposé concis des appli-
cations technologiques les plus pertinentes pour tous les aspects d’un
système de puissance. Enfin, les Techniques de l’Ingénieur ont la mission de
faire évoluer l’édition de la rubrique pour refléter l’électronique de puissance
de demain : des structures nouvelles de conversion sont mises au point, la
course à l’intégration pour les petites ou moyennes puissances, ou bien le pré-
lèvement direct de l’énergie sur un réseau, pour les sources de très haute
tension, par exemple.

Le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire des termes et expressions importants de


l’article, ainsi qu’un tableau des sigles, notations et symboles utilisés tout au long de l’article.

D 3 060v2 − 2 Copyright © –Techniques de l’Ingénieur –Tous droits réservés

12
Référence Internet
D3060

___________________________________________________________________ ÉLECTRONIQUE DE PUISSANCE – BASES, PERSPECTIVES, GUIDE DE LECTURE

1. Découpage de l’énergie
électrique Ie
Is
10 A

Ve R Vs
La rubrique Électronique de puissance est construite autour d’un Convertisseur 5Ω
100 V 50 V
périmètre réduit de notions techniques et scientifiques, autour de la
conversion électrique proprement dite. Il est entendu qu’une éner-
gie électrique amont est déjà disponible et que la conversion a pour
but de fournir une énergie électrique aval. La conversion est mise en
œuvre par des convertisseurs dits de puissance, même dans le cas Figure 1 – Synoptique d’un convertisseur de tension continue 1
où cette puissance est très petite. Il est expliqué ici que pour des
questions de rendement, ces convertisseurs utilisent un principe de
découpage de l’énergie. Le lecteur ne trouvera pas dans la rubrique
les notions relatives à la conversion d’une énergie primaire en éner- Is
gie électrique, comme par exemple les principes photovoltaïques. Ie 10 A
Pour autant ces principes sont intimement liés très souvent à un
convertisseur tel que traité dans la présente rubrique. Ve Rpot 5 Ω R Vs
Un convertisseur de tension ou de courant ne peut plus utiliser 100 V 5Ω 50 V
une structure linéaire pour une question de rendement. Consi-
Vpot 50 V
dérons le cas simple de la production d’énergie sous une tension
continue de 50 V à partir d’une source de tension continue de
100 V, pour alimenter une charge résistive de 5 Ω (figure 1). a diviseur potentiométrique

En électronique analogique dite bas niveau (traité E de la pré-


Is
sente collection), l’abaissement de tension se résout simplement Ie 10 A
par division potentiométrique ou l’insertion d’un ballast série
(figure 2). Cette structure série, linéaire, est appelée « régulateur Ve R Vs
linéaire » en électronique analogique. Malheureusement le rende- 100 V Interface 5Ω 50 V
ment est directement fonction du rapport des deux tensions,
entrée et sortie (dans notre cas, il est de 50 %), ce qui est inaccep- Vref
Vce 50 V
table, dès lors que des grandes puissances sont mises en jeu.
C’est du découpage temporel de l’énergie que vient la solution. b régulateur à ballast série
Un interrupteur à deux pôles (figure 3) connecte cycliquement la
source primaire au reste du circuit pour prélever juste l’énergie
nécessaire pour alimenter la charge. Seul, cet interrupteur produit Figure 2 – Diviseur potentiométrique ou régulateur à ballast série
une source d’énergie dont la tension n’est pas constante (figure 4)
mais dont la valeur moyenne approche le niveau de tension dési-
rée pour la charge en sortie. En allongeant ou diminuant le temps
pendant lequel la source primaire est connectée au convertisseur,
ie (t ) is (t )
au cours du fonctionnement cyclique, il apparaît que la valeur
moyenne peut être ajustée à une valeur comprise entre 0 et 100 V. 1
Ve R
Le rapport de cette durée d’absorption d’énergie côté primaire du 2 vs (t )
100 V 5Ω
convertisseur (αTcycle) à la durée totale du cycle (Tcycle) s’appelle le
rapport cyclique α. Ce sera donc la « grandeur » par laquelle la ten-
sion en sortie du convertisseur pourra être réglée.
Pour lisser la tension en sortie du convertisseur, un filtre Figure 3 – Utilisation d’un interrupteur à deux pôles, commuté
passe-bas LC atténuera tous les harmoniques indésirables dès lors cycliquement entre ses deux positions limites
que la fréquence de coupure du filtre (1 / 2 π LC ) est très inférieure
à la fréquence de découpage (fcycle = 1/Tcycle). La figure 5 illustre
un schéma d’une structure typique d’un convertisseur abaisseur
de tension continue. Des perturbations sur la tension d’entrée ou vs (t )
des évolutions instantanées des caractéristiques des composants α Tcycle (1 – α) Tcycle
de ce convertisseur font que la tension de sortie va fluctuer autour
de la valeur idéale désirée. Il faut mettre en œuvre un mécanisme Ve
de correction. La tension de sortie est donc mesurée et un correc-
teur fournit la valeur idéale du rapport cyclique à partir d’une Pôle 1 Pôle 2 Pôle 1 Pôle 2
consigne de tension. Celui-ci est mis en œuvre par un générateur à
modulation de largeur d’impulsion (MLI ou PWM, en anglais) qui
fournit l’ordre « logique » de commande de l’interrupteur. Vs

Le principe qui vient d’être exposé – le découpage – paraît simple,


mais sa mise en œuvre exige plusieurs autres principes, comme
celui d’une boucle de correction. Les composants actifs et passifs
exigent d’être dimensionnés de manière adéquate et eux-mêmes
mis en œuvre selon certains autres principes. La conversion Tcycle t
s’accompagne d’une dissipation d’énergie thermique car les chan-
gements d’état des différents composants au cours du temps ne se
font pas de manière idéale. Enfin, le courant qui est prélevé sur la Figure 4 – Forme temporelle de la tension aux bornes de la charge,
source d’entrée de tension prend une forme impulsionnelle, dont la dans le cas de l’interrupteur bipolaire

Copyright © –Techniques de l’Ingénieur –Tous droits réservés D 3 060v2 – 3

13
1

14
Référence Internet
D3100

Composants semi-conducteurs
de puissance : caractères propres
1
par Philippe LETURCQ
Professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS (LAAS)

1. Rôle des semi-conducteurs en électronique de puissance .......... D 3 100 - 2


1.1 Fonction « interrupteur » ............................................................................ — 2
1.2 Réalisation des interrupteurs par des éléments semi-conducteurs ........ — 3
2. Caractères comportementaux.............................................................. — 4
2.1 Généralités ................................................................................................... — 4
2.2 Diode, thyristor, triac et GTO ...................................................................... — 4
2.3 Transistor bipolaire, transistor MOS et IGBT ............................................ — 5
3. Caractères physiques.............................................................................. — 6
3.1 Objectifs de performances.......................................................................... — 6
3.2 Tension blocable .......................................................................................... — 6
3.3 Courant passant........................................................................................... — 6
3.3.1 Chute de tension à l’état passant ...................................................... — 7
3.3.2 Surface de cristal ................................................................................ — 8
3.3.3 Limitations thermiques ...................................................................... — 9
3.4 Commutation et limites de sécurité ........................................................... — 9
3.4.1 Temps de commutation ..................................................................... — 9
3.4.2 Pertes d’énergie de commutation ..................................................... — 10
3.4.3 Limites de sécurité.............................................................................. — 11
4. Éléments de comparaison des semi-conducteurs de puissance — 12
4.1 Compromis de performances..................................................................... — 12
4.2 Capacité en courant des diodes et thyristors ............................................ — 12
4.3 Capacité en courant des transistors et GTO.............................................. — 13
4.4 Autres éléments de comparaison .............................................................. — 15
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. D 3 115

L es composants semi-conducteurs de puissance, par leurs principes physi-


ques de fonctionnement, ne diffèrent pas fondamentalement de leurs homo-
logues du traitement du signal analogique ou numérique. Ce qui les distingue,
c’est leur fonction en électronique de puissance, qui est celle d’interrupteurs,
mieux encore que les ordres de grandeur de tension et courant commutables,
qu’on souligne parfois pour leur caractère spectaculaire (8kV/3kA par exemple
pour tel thyristor Gate-Turn-Off). Quel que soit le niveau de puissance, en effet,
l’accent est mis sur des caractéristiques telles que tension bloquée, courant pas-
sant, temps de fermeture et d’ouverture, pertes de puissance statiques et de
commutation… avec des spécifications qui nécessitent une toute autre organisa-
tion des structures semi-conductrices que celle des composants microélectroni-
ques.
Trop longtemps, le monde des semi-conducteurs, physiciens, technologues,
concepteurs et fabricants de composants, et le monde du génie électrique,
auquel appartient la communauté de l’électronique de puissance, ont peu com-
Parution : août 1999

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique D 3 100 − 1

15
Référence Internet
D3100

COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE : CARACTÈRES PROPRES _____________________________________________________________________

muniqué à propos des composants de puissance sinon à travers les études de


marché et les données des catalogues. Paradoxalement aussi, l’électrotechni-
que, discipline généraliste s’il en est, s’est toujours intéressée, jusqu’au niveau
fondamental, aux matériaux magnétiques et diélectriques, mais a longtemps
délaissé les semi-conducteurs.
Aujourd’hui, le raffinement des applications de l’électronique de puissance ne

1
permet plus au concepteur de composants d’ignorer les spécificités et les con-
traintes de leur mise en œuvre, de même que l’électronicien de puissance ne
peut mettre pleinement à profit les possibilités des composants de puissance
modernes sans comprendre leur fonctionnement interne.
Ce fascicule constitue donc l’introduction générale à une série d’articles trai-
tant successivement des propriétés électroniques du silicium, principal matériau
semi-conducteur utilisé, des structures semi-conductrices élémentaires et des
effets fondamentaux que celles-ci font naître, de la tenue en tension des compo-
sants de puissance, sujet générique, avant d’aborder de manière plus spécifique
les principes de fonctionnement et l’étude des caractéristiques statiques et
dynamiques des principaux composants de puissance actuellement utilisés. Un
article complémentaire donne un aperçu des développements dans le domaine
de l’intégration de puissance.
Dans ce chapitre introductif même, dont la conception doit beaucoup aux
échanges de vues entre l’auteur et le Professeur Henri Foch, on présente les
semi-conducteurs de puissance sous les différents aspects de leurs fonction, de
leurs spécificités vis-à-vis des autres composants semi-conducteurs, et de leurs
performances actuelles.

1. Rôle des semi-conducteurs Bref historique


en électronique Par rapport aux composants de traitement numérique du
de puissance signal, les composants semi-conducteurs de puissance ont
connu une évolution décalée dans le temps mais tout aussi
spectaculaire. Depuis les premiers redresseurs, d’abord au ger-
Les composants semi-conducteurs de puissance sont les compo- manium (1952) puis au silicium (1955), et les premiers thyristors
sants actifs du contrôle et de la conversion de l’énergie électrique. (1957), les progrès dans les technologies et les structures ont
permis d’enrichir considérablement la panoplie de l’électroni-
À l’origine, ils sont sous-produits du gigantesque effort technolo- cien de puissance.
gique qui a conduit à l’émergence de l’électronique à l’état solide On doit citer les transistors bipolaires de puissance, apparus
puis de la microélectronique. Mais leur développement est rapide- au début des années 1960, ainsi que de nombreux composants
ment devenu autonome, associé à celui de l’électronique de puis- dérivés du thyristor primitif : triac (1964), thyristor asymétrique,
sance. Les semi-conducteurs de puissance sont principalement à conduction inverse, à déclenchement optique, dont l’évolu-
destinés à des fonctions d’interrupteur, et, si les principes physi- tion se poursuit.
ques mis en jeu sont les mêmes que pour les autres composants Les thyristors Gate-Turn-Off (GTO) ne sont parvenus que plus
semi-conducteurs, les structures et les technologies − et les problè- tard, dans les années 1980, à la maturité industrielle.
mes posés par leur mise en œuvre − sont très différents. Le champ Les apparitions successives des transistors MOS de puis-
de connaissances qui les concerne se situe à l’intersection de la phy- sance et de toute une gamme de composants plus complexes
sique électronique des solides, de la technologie microélectronique, associant l’effet de champ à l’effet bipolaire − le transistor
de l’électronique de puissance, de l’analyse des systèmes, pour ne « IGBT » en est l’exemple le plus représentatif − ont enfin
citer que les principales disciplines. jalonné les deux dernières décennies, préfigurant un change-
ment qualitatif d’importance : commande « isolée » et compati-
bilité de technologies avec les circuits de la microélectronique
permettent aujourd’hui, sous diverses formes, l’intégration de
1.1 Fonction « interrupteur » puissance.

■ Dans les systèmes de contrôle ou de conversion de l’énergie élec- exigences fonctionnelles de connexion de sources ou d’aiguillage
trique, les composants actifs fonctionnent généralement en com- du courant au sein des cellules de conversion, mais aussi à la néces-
mutation entre deux états, ouvert (ou bloqué) et fermé (ou sité de minimiser les pertes d’énergie, pour d’évidentes raisons de
conducteur, ou encore passant), à la manière d’interrupteurs. rendement et de dissipation.
La fermeture ou mise en conduction désigne le basculement de
l’état bloqué à l’état passant, et l’ouverture ou blocage, le bascule- ■ Les règles d’interconnexion des sources (générateur ou récep-
ment inverse. Ce mode d’utilisation en commutation répond à des teur de tension ou de courant, unidirectionnel ou bidirectionnel) et

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D3100

____________________________________________________________________ COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE : CARACTÈRES PROPRES

la nécessaire coordination des basculements d’interrupteurs dans


les cellules de commutation, permettent d’identifier, pour ces inter- I I
rupteurs, onze « fonctionnalités » souhaitables, selon les applica-
tions. Ces fonctionnalités sont indiquées dans la figure 1 sous forme I
de caractéristiques statiques idéalisées pour les deux états, qui doi- Diode Transistor
vent être aussi proches que possible du circuit ouvert et du court-cir- V
V V
cuit. Le caractère forcément dissipatif des interrupteurs réels
implique que ces caractéristiques statiques et les trajectoires de

1
a b
commutation entre états se situent, avec les conventions de signe
habituelles, dans le premier et le troisième quadrants du plan cou-
I I I
rant-tension I,V.
Les basculements « commandés » sont indiqués par des flèches,
les autres modes de commutation étant implicitement GTO Thyristor
« spontanés » ou « naturels », par passage d’un quadrant à l’autre V V V
du point de fonctionnement instantané. Le lecteur pourra se repor-
ter utilement, pour les détails, aux articles exposant les principes c d e
fondamentaux de l’électronique de puissance.

I I I

1.2 Réalisation des interrupteurs par


des éléments semi-conducteurs
V V V

f g h
La réalisation de ces fonctions d’interrupteur par des éléments
semi-conducteurs est plus ou moins complexe ; si les propriétés
physiques qu’on peut mettre en jeu sont fondamentalement les I I I
mêmes que celles qui sont exploitées dans les composants de trai-
tement du signal analogique ou numérique, celles-ci ne permettent
pas toujours de manière directe l’obtention des états et modes de Triac
basculement souhaités. Ces propriétés sont essentiellement la V V V
conduction unidirectionnelle des jonctions PN et des contacts
« Schottky » métal/semi-conducteur, et les trois effets permettant le i j k
contrôle et l’interruption du passage d’un courant dans un semi-
conducteur :
Figure 1 – Différents types d’interrupteurs et exemples
— effet transistor bipolaire ;
de réalisation par des éléments semi-conducteurs [d’après H. Foch]
— effet de champ MOS métal/oxyde/semi-conducteur ;
— effet de champ de jonction.
■ Les composants semi-conducteurs de puissance proprement élé- — nécessité ou non de maintenir la commande dans chacun des
mentaires se réduisent ainsi aux deux catégories suivantes : états après basculement (commande continue ou impulsionnelle) ;
— les diodes, diode à jonction de structure PIN et diode Schottky, — commande « isolée » (puissance de commande nulle dans un
qui remplissent la fonction a schématisée dans la figure 1 : état état statique) ou non.
passant sous polarisation directe (I > 0), état bloqué sous polarisa- Ainsi le thyristor, dont la commande d’amorçage est impulsion-
tion inverse (V < 0), fermeture et ouverture spontanées ; nelle, peut aussi, dans une version technologique particulière dite
— les transistors, mettant en jeu l’un ou l’autre des effets men- Gate-Turn-Off (GTO), s’ouvrir sans changement de polarité et rem-
tionnés ci-dessus, qui remplissent la fonction b : ouverture et fer- plir donc, aussi bien ou mieux que l’association série transistor/
meture commandées entre états passant et bloqué de même diode, la fonction c . Par abandon, ou non-utilisation, de la réversi-
polarité ; dans la figure 1, le symbole utilisé est celui du transistor bilité en tension, on peut aussi faire jouer au GTO le rôle de transis-
bipolaire (NPN), sans préjudice de généralité vis-à-vis du transistor tor à commande impulsionnelle (fonction b ).
MOS et du transistor à effet de champ de jonction.
● Le thyristor peut, à son tour, être associé à d’autres compo-
■ La synthèse des autres fonctions d’interrupteurs nécessite de sants. Par exemple, muni d’une diode antiparallèle, il remplit la
recourir à des associations des composants précédents, associa- fonction g bidirectionnelle en courant; les réalisations monolithi-
tions qui peuvent être discrètes ou, préférablement, intégrées de ques sont désignées comme thyristors à conduction inverse.
manière hybride ou monolithique. La mise en parallèle tête-bêche de deux GTO réversibles en ten-
● Ainsi la connexion en série ou en parallèle d’une diode et d’un sion permet d’obtenir la fonction bidirectionnelle commandée à
transistor, avec les polarités convenables, réalise les fonctions c et l’ouverture et à la fermeture i . De même, la mise en parallèle de
f bidirectionnelles respectivement en tension et en courant. De deux thyristors permet de remplir la fonction j ; l’intégration
même, la fonction d de la figure 1 (réversible en tension, à ferme- monolithique de cette disposition, avec le raffinement d’une élec-
ture commandée sous polarisation directe, à ouverture spontanée trode de commande commune conduit au triac (triode-ac-switch).
par inversion de polarité) peut être remplie par l’arrangement con-
venable de deux transistors bipolaires complémentaires ou, mieux, ■ Thyristor et triac sont historiquement les premiers exemples
par un dispositif monolithique, le thyristor, qui représente la version d’intégration « fonctionnelle » dans le domaine des composants de
intégrée de cet agencement. puissance. Dans ce mode d’intégration, on tire parti de la conjugai-
son dans un même cristal des effets semi-conducteurs fondamen-
● Plusieurs solutions peuvent être définies pour chaque cas, en taux, sans qu’il y ait nécessairement individualisation des
réponse notamment à des spécifications portant sur la commande : composants correspondants. On peut ainsi réaliser, par des disposi-
— état normalement passant ou normalement bloqué en tifs monolithiques, aussi bien ou mieux que par des associations de
l’absence de commande ; composants discrets, les interrupteurs manquants dans le rapide

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Physique des semi-conducteurs


de puissance
1
par Philippe LETURCQ
Professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS (LAAS)

1. Propriétés électroniques du silicium .................................................. D 3 102 - 2


1.1 Notions élémentaires ................................................................................... — 2
1.2 Transport de charges.................................................................................... — 5
1.3 Génération, recombinaison de porteurs .................................................... — 7
1.4 Mécanismes de génération excédentaire................................................... — 8
1.5 Équations de continuité ............................................................................... — 9
1.6 Contacts et conditions aux limites .............................................................. — 10
1.7 Principales simplifications ........................................................................... — 11
2. Structures élémentaires. Effets fondamentaux ............................... — 12
2.1 Jonction PN................................................................................................... — 12
2.2 Contact redresseur Schottky........................................................................ — 20
2.3 Effet transistor bipolaire .............................................................................. — 22
2.4 Effet transistor MOS ..................................................................................... — 26
2.5 Effet de champ de jonction .......................................................................... — 29
Notations ............................................................................................................. — 32

Pour en savoir plus............................................................................................ Doc. D 3115

et article doit permettre aux électroniciens de puissance et plus générale-


C ment à tout spécialiste du génie électrique, de s’initier à l’électronique du
silicium, ou d’approfondir des connaissances à ce sujet, sans nécessairement
avoir une formation préalable en physique du solide. Les concepts de base, issus
de la mécanique quantique et de la thermodynamique statistique sont acceptés
comme des postulats et l’auteur a pris le parti d’employer un langage d’électri-
cien pour l’exposé des notions fondamentales sur lesquelles s’appuie l’étude du
comportement électrique des composants semi-conducteurs. Après avoir inven-
torié les propriétés électroniques intéressant principalement, mais non exclusi-
vement, le fonctionnement des composants de puissance, on passe en revue :
— les structures élémentaires : PN, Schottky, PNP ou NPN, MOS, dont les
composants sont assemblés ;
— les effets fondamentaux qu’elles font jouer : conduction unidirectionnelle
des jonctions PN et des contacts métal/semi-conducteur, effet transistor bipo-
laire, effet de champ MOS, effet de champ de jonction.
Parution : novembre 1999

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PHYSIQUE DES SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE _________________________________________________________________________________________

1. Propriétés électroniques
du silicium (–)
a

g – d (–)
1.1 Notions élémentaires
(+)

1
(+)
b =
1.1.1 Porteurs mobiles et charges fixes
– h
■ Les propriétés électroniques des matériaux semi-conducteurs
résultent de la mobilité, dans le réseau cristallin, de deux types de
porteurs de charge électrique :
+ f
(+)
(–) e

— les électrons libres (charge négative − e) ; c


— les trous (charge positive + e).
Le symbole e représente la charge élémentaire 1,602 · 10−19 C. (+)
Ces porteurs interagissent de différentes manières avec le réseau
cristallin lui-même et aussi avec des impuretés et autres défauts qui
peuvent fixer des charges, positives ou négatives, et se trouver ioni-
sés. Illustration des notions principales :
La figure 1 propose, pour le silicium, une illustration schémati- a : électron libre e : recombinaison
que. Le silicium, tétravalent comme le carbone, cristallise dans le b et c : trou f : donneur ionisé
système cubique à faces centrées, chaque atome établissant des d : génération g et h : accepteur ionisé
liens de covalence avec quatre de ses voisins. Les électrons ne peu-
vent être que libres ou liés aux atomes du cristal, la transition entre Figure 1 – Représentation schématique d’un cristal de silicium
l’un et l’autre des deux états s’accompagnant nécessairement de
sauts d’énergie potentielle d’amplitude au moins égale à l’énergie
d’ionisation de ces atomes dans le cristal. On peut se représenter un
trou comme la charge positive d’un atome ayant perdu l’un de ses Énergie
électrons de valence ; la migration de cette charge positive, par le
jeu du déplacement de proche en proche d’autres électrons de
valence, lui donne le caractère dual de l’électron libre. Bande de conduction

On en déduit le modèle simplifié de la figure 2, également appli- EC


cable aux autres matériaux semi-conducteurs : la bande de valence, ED
comme son nom l’indique, regroupe les niveaux d’énergie des élec- + + +
trons de liaison et la bande de conduction regroupe ceux des élec-
trons libres : les deux bandes sont séparées par une bande interdite
de largeur Eg représentant l’énergie d’ionisation (à 300 K : ≈ 1,12 eV
pour le silicium ; ≈ 1,43 eV pour l’arséniure de gallium) ; les trous Eg
correspondent aux lacunes de la bande de valence. A B
Bande
Les porteurs mobiles, électrons libres et trous, peuvent avoir des
interdite
origines diverses :
— génération par paires lors de l’ionisation spontanée (généra-
tion thermique) ou provoquée (génération optique, par exemple) du
semi-conducteur; à l’inverse, des porteurs peuvent disparaître par – – – –
EA
recombinaison, en rétablissant des liens de covalence entre atomes
du cristal ; EV

■ injection par l’intermédiaire de jonctions émettrices; à l’inverse, Bande de valence


des porteurs peuvent être extraits par des jonctions collectrices.
■ Parmi les atomes d’impuretés et autres défauts qu’on peut ren-
contrer dans le cristal, ceux qui se trouvent ionisés aux températu- EC : limite de la bande de conduction
res normales d’utilisation des composants jouent un rôle EV : limite de la bande de valence
particulièrement important (charges fixes). On distingue les ED : niveau donneur
centres donneurs ionisés positivement et les centres accepteurs EA : niveau accepteur
ionisés négativement (figure 1). Le dopage du cristal est l’introduc-
A : génération d'une paire électron-trou
tion contrôlée de tels centres. Pour le silicium, il s’agit essentielle-
ment d’atomes pentavalents, phosphore ou arsenic (donneurs) et B : recombinaison d'une paire électron-trou
trivalents, bore ou aluminium (accepteurs). Ces impuretés sont
Figure 2 – Diagramme d’énergie simplifié
introduites dans le matériau semi-conducteur, lors même de son
élaboration, et par des procédés tels que l’implantation ionique et la
diffusion à haute température, à différentes étapes du processus de
fabrication des composants. Dans le réseau cristallin, ces atomes figure 1), sauf aux très basses températures. À ces impuretés
dopants se substituent de place en place aux atomes de silicium et dopantes se trouvent donc associés, dans la bande d’énergie dite
leur énergie d’ionisation est assez faible dans ces conditions pour « interdite », des niveaux d’énergie proches de la bande de conduc-
qu’on puisse les considérer comme effectivement tous ionisés (cf. tion pour les donneurs, de la bande de valence pour les accepteurs

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_________________________________________________________________________________________ PHYSIQUE DES SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE

(cf. figure 2). Les niveaux donneurs sont « vides » (ionisation posi-
tive de l’atome d’impureté par perte d’un électron) et les niveaux ni (cm– 3) T (K)
accepteurs sont occupés (ionisation négative par gain d’un élec- 800 600 500 400 350 300 250
1018
tron).
Bien d’autres impuretés et défauts de cristal, moins faciles à ioni-
ser que les impuretés dopantes, peuvent néanmoins interagir avec 1016
les populations d’électrons et de trous. Leur état de charge est alors

1
essentiellement variable selon les densités de porteurs présents et
1014
la température du cristal. On préfère parler à leur propos de
« centres profonds ».
1012
■ Du point de vue des propriétés électriques macroscopiques,
on considère le cristal comme un milieu continu ; porteurs mobiles
et charges fixes interviennent par leurs densités (ou concentra- 1010
tions). Celles-ci seront désignées, dans ce qui suit, par n, p, ND, NA
respectivement pour les électrons libres, les trous, les centres don-
neurs, les centres accepteurs. L’unité d’usage pour ces concentra- 108
tions est le cm−3.
Les ordres de grandeur pour les concentrations de dopants vont 106
de 1013 à 1020 cm−3, à comparer à une densité d’atomes de 0,001 0,0015 0,002 0,0025 0,003 0,0035 0,004
5 · 1022 cm−3 pour le silicium, par exemple. Cependant, dans les 1/T (K–1)
zones réellement actives des composants de puissance, les densités
de porteurs et d’impuretés ionisées ne dépassent pas ordinairement Figure 3 – Variation de la concentration intrinsèque du silicium avec
1018 cm−3 et restent donc faibles devant la densité d’atomes. la température
Dans ces conditions, il n’y a pas « dégénérescence » du semi-
conducteur et on peut décrire son comportement électrique avec un
formalisme allégé et un vocabulaire simple. Dans tout ce qui suit, 1,2·1010 cm−3 à 300 K ;
sauf indication contraire, on se placera dans cette hypothèse.
6,3·1012 cm−3 à 400 K
et 2,9·1014 cm−3 à 500 K.
1.1.2 Concentration intrinsèque D’une manière générale, la concentration intrinsèque est
d’autant plus faible, à température donnée, et sa variation avec
Dans les conditions d’équilibre thermodynamique, c’est-à-dire la température d’autant plus raide, que l’énergie d’ionisation
dans un état statique du cristal sans échange d’énergie avec l’envi- est plus élevée. Pour l’arséniure de gallium, par exemple,
ronnement, les densités de porteurs mobiles sont fixes. En corol- avec Eg = 1,43 eV, la concentration intrinsèque n’est que
laire, on peut affirmer que les taux de génération et de 1,8 · 106 cm−3 à 300 K ; elle se trouve augmentée dans un
recombinaison des paires électron-trou sont strictement égaux. rapport supérieur à 105 à 500 K (≈ 8 · 1011 cm−3).
De simples considérations cinétiques sur ce principe de balance
montrent alors que la loi d’action de masse s’applique à l’équili-
bre génération-recombinaison tout comme à un équilibre chimique. 1.1.3 Cristaux N et P
En d’autres termes, le produit des densités d’équilibre p de trous et
n d’électrons libres est une constante, à température de cristal don- D’un point de vue macroscopique, la neutralité électrique d’un
née. L’usage est de noter n i2 cette constante, par référence à la cristal se traduit par l’égalité des densités de charges élémentaires
valeur commune intrinsèque n i que présenteraient nécessairement positives ou négatives, qu’elles soient mobiles ou fixes :
les concentrations de porteurs dans un cristal idéalement pur et
strictement neutre électriquement : p + ND = n + NA (3)

pn = n i2 (1) On voit donc que, sous cette condition de neutralité électrique, la


concentration des électrons est supérieure à celle des trous en pré-
La concentration intrinsèque varie avec la température abso- sence de centres donneurs, inférieure au contraire en présence de
lue T suivant une loi du type : centres accepteurs, la différence ND − NA fixant l’écart de concentra-
tion des deux types de porteurs lorsque donneurs et accepteurs sont
Eg * simultanément présents. Le cristal est dit de type N lorsque les élec-
n i = AT 3 ⁄ 2 exp  Ð
---------- (2)
 2 kT trons sont les porteurs majoritaires, de type P dans le cas contraire
où les trous sont majoritaires et les électrons par conséquent mino-
où A est une constante caractéristique du matériau semi-conducteur ritaires.
et k la constante de Boltzmann (1,38 · 10−23 J/K ou 8,62 · 10−5 eV/K).
■ Si le cristal est non seulement neutre mais en équilibre ther-
Dans cette formule d’usage pratique, E g* n’est pas exactement modynamique, on peut être plus précis. La loi d’action de
l’énergie d’ionisation, mais une valeur ajustée pour minimiser masse (1) jointe à l’égalité (3) conduit sans difficulté aux valeurs des
l’erreur dans l’évaluation de n i, par rapport à ce qu’indique l’expres- concentrations d’équilibre.
sion théorique, beaucoup plus complexe. Pour le silicium : En posant N = ND − NA pour alléger les écritures, on a :

A = 3,1 · 1016 cm−3 · K−3/2 et E g* = 1,206 eV 


N + N 2 + 4 n i2 
n = --------------------------------------- 
2  (4)
La figure 3 indique la variation n i(T ) dans la plage de température Ð N + N + 4n  2 2
intéressant le fonctionnement des composants. De manière précise, p = -------------------------------------------i- 
la concentration intrinsèque du silicium est : 2 

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Aux températures usuelles de fonctionnement des composants, De cette densité de charge résultent des répartitions de potentiel
la concentration intrinsèque est généralement très faible devant la
concentration nette de dopant (ni <<N). On peut alors utiliser les macroscopique Ψ et de champ électrique E suivant les lois de
approximations suivantes, dans un cristal, respectivement de type l’électrostatique :
N (N ≈ ND) et de type P (N ≈ − NA) :
ρ
n i2  ∇ 2 Ψ = Ð ---

ε (8)
n ≈ ND p ≈ -------- 

1
ND  
 (5) E = Ð grad Ψ 
n i2 
p ≈ NA n ≈ -------- 
NA  où ε désigne la permittivité du matériau (ε = 1,04 · 10−12 F/cm pour le
silicium).
À température croissante cependant, lorsque la concentration Dans les problèmes « unidimensionnels » où ne joue qu’une
intrinsèque devient nettement supérieure à la concentration du
dopant, on finit par pouvoir poser : variable de position x le gradient grad et le Laplacien ∇ 2 se ramè-
nent respectivement aux dérivées première ∂/∂x et seconde ∂2/∂x2.
n ≈ p ≈ ni
■ L’action de la répartition de champ sur les porteurs mobiles ten-
comme dans un cristal intrinsèque. drait, en l’absence de toute contrainte, à restaurer la neutralité. C’est
Pour le silicium, les températures pour lesquelles s’effectue pourquoi, en valeur relative, c’est-à-dire par rapport aux densités de
ce changement de relation sont de l’ordre de charge positive e(p + ND) et négative e (n + NA) constituant le bilan
(7), la densité nette de charge ne représente souvent qu’un faible
500 K pour N = 1014 cm−3 et 700 K pour N = 1016 cm−3. écart, et ce, dans des régions étendues du cristal. On parle alors de
quasi-neutralité et on peut toujours écrire en ce cas :
■ Il convient toutefois de remarquer que les perturbations de la
structure de bande du semi-conducteur pur liées à l’introduction n + NA ≈ p + ND (9)
des dopants, négligeables jusqu’à des niveaux de concentration NA
ou ND de l’ordre de 1018 cm−3, deviennent notables au-delà, lorsque expression qui se réduit en pratique à n ≈ ND + p pour un cristal de
l’état du cristal tend vers celui d’alliage. Globalement, on peut inter- type N et à p ≈ NA + n pour un cristal de type P.
préter ces modifications comme un rétrécissement de la largeur de On voit que, dans cet état de quasi-neutralité, tant que les
bande interdite avec augmentation corrélative de la concentration concentrations de porteurs minoritaires restent petites devant les
intrinsèque et de son coefficient de variation avec la température. concentrations de dopant (p < < ND ou n < < NA selon le cas), les
La réduction ∆ E g* de l’énergie d’ionisation effective E g* à appli- concentrations de porteurs majoritaires conservent approximative-
ment leurs valeurs d’équilibre dans le cristal neutre (respectivement
quer dans l’expression (2) pour le calcul de ni dans le silicium peut n ≈ ND ou p ≈ NA) : on parle, dans ce cas, de faible niveau d’injection.
être reliée à la concentration de dopant suivant une loi approxima-
tive du type : Au contraire, si les concentrations de porteurs minoritaires
deviennent grandes devant les concentrations d’impuretés, on a
N A ou N D αi p ≈ n dans les deux cas, situation qu’on décrit comme étant celle de
∆ E g* ≈ 2 kT In 1 +  -------------------------------------- (6) forte injection.
 N ( T ⁄ 300 ) 3
ref
Que le niveau d’injection soit faible ou fort, la quasi-neutralité
avec αi ≈ 0,6 n’implique aucunement que le potentiel soit constant et le champ
électrique nul, ce qu’on n’observerait jamais qu’en cas de stricte
Nref ≈ 4 · 1018 cm−3 pour un cristal de type P neutralité.
Nref ≈ 7 · 1018 cm−3 pour un cristal de type N.
■ Par contre, au voisinage de perturbations majeures de l’homogé-
Ces valeurs sont données à titre indicatif, la littérature restant con- néité du cristal, telles que la surface limitante ou une jonction entre
tradictoire à ce sujet. Le paramètre Nref représente la concentration régions très différemment dopées ou encore un contact métal/semi-
de dopant impliquant, à 300 K, un doublement de ni. conducteur, des charges d’espace peuvent se développer, suffi-
samment accentuées dans de nombreux cas pour que l’un des ter-
mes entre crochets dans l’expression (7) domine les autres. On peut
1.1.4 Neutralité, quasi-neutralité, alors distinguer :
charges d’espace
— des régions dépeuplées, où les concentrations de porteurs
libres sont négligeables devant celle des impuretés fixes ; on a
■ Les expressions (4) des concentrations de porteurs ne s’appli- alors :
quent strictement qu’à un cristal homogène, électriquement neutre
et en équilibre thermodynamique avec son environnement. La neu- ρ ≈ eND (cristal N) ou ρ ≈ − eNA (cristal P) ;
tralité électrique, même si elle est maintenue globalement pour
l’ensemble du cristal, n’est généralement pas assurée localement. Il — des régions accumulées, où dominent les porteurs
en est ainsi, par exemple, lorsque la distribution des impuretés majoritaires :
dopantes n’est pas uniforme, même dans les conditions d’équilibre
thermodynamique. Hors équilibre, par ailleurs, la loi (1) n’est plus ρ ≈ − en (cristal N) ou ρ ≈ ep (cristal P) ;
valable et les concentrations d’électrons libres et de trous devien-
nent indépendantes. — des régions inversées, où dominent les porteurs normalement
minoritaires :
Aussi observe-t-on dans le cristal une densité de charge ρ non
nulle, fonction, dans le cas général, des coordonnées de position et ρ ≈ ep (cristal N) ou ρ ≈ − en (cristal P).
du temps :
Une analyse plus approfondie de ces charges d’espace montre
ρ = e [p − n + (ND − NA)] (7) que la transition entre une région quasi neutre et une région de

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charge d’espace accumulée ou dépeuplée s’effectue sur une dis-


tance dont l’ordre de grandeur est donné par la quantité : vn , vp (cm/s)

1⁄2 108
L D =  --------------
kTε
(10) 5
e2 N
T = 300 K
avec N= ND ou NA selon le cas. 2

107

1
Cette quantité, dite longueur de Debye extrinsèque, est, dans le
silicium à 300 K : 5 Électrons
Trous
— de 0,4 µm pour N= 1014 cm−3 ; 2
— de 4 nm seulement pour N= 1018 cm−3. 106
5

1.2 Transport de charges 2

105
5
Tout gradient d’une grandeur intensive engendre dans le cristal
des flux de porteurs mobiles, c’est-à-dire un courant électrique. Il en 2
est ainsi pour le potentiel électrique, les concentrations de porteurs, 104
la température. On se limitera ici au cas le plus important en 102 2 5 103 2 5 104 2 5 105 2 5 106
pratique où on considère les seuls effets des gradients de potentiel E (V/cm)
(conduction) et de concentration (diffusion).
Figure 4 – Variations des vitesses moyennes de dérive des porteurs
en fonction du champ électrique, dans le cas du silicium
1.2.1 Conduction

En présence d’un champ électrique, au mouvement désordonné selon le cas. C’est dans ces conditions que les fabricants de maté-
d’agitation thermique des porteurs mobiles se superpose un mou- riaux semi-conducteurs spécifient la résistivité 1/σ de leurs produits.
vement de dérive dans le sens du champ pour les trous, dans le sens
contraire pour les électrons. À cette dérive des porteurs correspon- ■ La figure 4 indique, pour le cas du silicium, les variations de la
dent des courants de conduction dont les densités s’expriment vitesse de dérive en fonction de l’intensité du champ électrique, à
simplement par : 300 K, dans un cristal peu dopé (< 1014 cm−3). Cette vitesse de
dérive, qui n’est pas la même pour les deux types de porteurs, est
 proportionnelle au champ jusqu’à des valeurs de l’ordre de 104 V/cm
J p = epv p  et les mobilités sont, dans ces conditions, indépendantes du champ
 électrique. À fort champ, la vitesse de dérive tend vers une valeur
J n = Ð env n  limite de l’ordre de 107 cm/s pour les électrons, un peu inférieure
pour les trous, et la notion de mobilité perd alors de son intérêt.
On appelle mobilité (µn pour les électrons, µp pour les trous) la
valeur absolue du rapport de la vitesse de dérive (respectivement ■ Dans les matériaux faiblement dopés, la mobilité des porteurs est
vn et vp) à l’intensité E du champ électrique, ce qui permet d’écrire essentiellement limitée par leurs interactions avec le réseau cristal-
encore : lin et varie avec la température suivant une loi simple du type :

 T Ðαµ
J p = epµ p E  µ = µ 0  ------- (12)
 (11) T 0
J n = enµ n E 
µ0 représentant la valeur de mobilité à la température de référence
T0. Dans le cas du silicium, avec T0 = 300 K, on a :
(le signe est le même pour les deux équations : la charge de l’élec-
tron est négative, mais sa vitesse de dérive est de sens opposé à — pour les électrons : µn0 = 1 430 cm2/(V · s) ;
celui du champ électrique).
— pour les trous : µp0 = 495 cm2/(V · s) ;
La densité totale de courant de conduction des porteurs est donc :
et αµ = 2,2 dans les deux cas.
J cond = σE Les interactions avec les impuretés ionisées impliquent une
réduction de mobilité d’autant plus importante que le matériau est
où σ représente la conductivité électrique du cristal : plus dopé et une modification de la loi de variation avec la tempéra-
σ = e (µpp + µnn) ture, comme l’indique la figure 5 pour les électrons d’une part, les
trous d’autre part, toujours dans le cas du silicium. La formule (12)
Les concentrations de porteurs étant essentiellement variables, la n’est alors plus représentative que sur des plages limitées de varia-
conductivité électrique n’est pas, en principe, une caractéristique du tion de température, avec des valeurs de paramètres µ0 et αµ adap-
cristal. Toutefois, dans un matériau neutre ou quasi neutre, au repos tées.
ou en situation de faible injection, on a :
Les interactions avec les impuretés neutres ne jouent de manière
p <<ND et n ≈ ND dans un cristal N, significative qu’aux basses températures (< 100 K) et peuvent donc
être ignorées dans l’étude des composants de puissance. Par contre,
n <<NA et p ≈ NA dans un cristal P, lorsque les électrons et les trous ont des densités comparables, les
interactions des porteurs influencent la mobilité dans le même sens
et donc : σ ≈ eµnND ou σ ≈ eµpNA que les concentrations d’impuretés ionisées (figure 6).

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D3102

PHYSIQUE DES SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE _________________________________________________________________________________________

µ n(cm2.V –1.s –1) µ n , µ p(cm2.V –1.s –1)


5 1 500
N = 1014 cm–3 T = 300 K
2 Électrons
1016 cm–3 Électrons
103

1
1 000
5 1017 cm–3

1018 cm–3
2

500
102
1019 cm–3
Trous
5

2
0
2 5 2 5 2 5 2 5
1014 1015 1016 1017 1018
10 p ou n (cm–3)
200 250 300 350 400 450 500 550 600
T (K) Figure 6 – Réduction de mobilité par interactions porteurs-porteurs
µ p(cm2.V –1.s –1) dans l’hypothèse de concentrations de trous et d’électrons égales
(p ≈ n), dans le cas du silicium
5

2 Trous
Dans la mesure où le semi-conducteur n’est pas dégénéré et tant
que la vitesse de dérive reste proportionnelle au champ électrique,
103 N = 1014 cm–3 la constante de diffusion et la mobilité, pour chaque type de por-
5
teurs, sont liées (relation d’Einstein) :
1016 cm–3
Dn D kT
2
1017 cm–3 ------- = ------p- = ------- = U T (14)
µn µp e
102
1018 cm–3
La quantité UT = kT/e, proportionnelle à la température absolue T,
5
est souvent appelée « unité thermodynamique » ; elle vaut 25,9 mV
1019 cm–3 à 300 K.
2
Dans du silicium faiblement dopé, à cette température de 300 K,
10 les constantes de diffusion sont ainsi 37 cm2/s et 12,8 cm2/s, respec-
200 250 300 350 400 450 500 550 600 tivement pour les électrons et les trous.
T (K)

Figure 5 – Variations des mobilités des électrons (µn) et des trous (µp) 1.2.3 Densités de courant
en fonction de la concentration d’impuretés dopantes (N )
et de la température (T ), dans le cas du silicium
Les gradients de potentiel et de concentration ajoutent leurs effets
dans le cristal et on a, plus généralement, pour expressions des den-
1.2.2 Diffusion sités de courant de porteurs [relations (11) et (13)] :

Lorsque les porteurs libres ne sont pas uniformément distribués 


dans le cristal, ils subissent le processus très général de la diffusion. J p = epµ p E Ð eD p grad p 
 (15)
J n = enµ n E + eD n grad n 
Les flux d’électrons et de trous sont proportionnels aux gradients de
concentration respectifs et il en résulte des densités de courant :

 Le courant total est la somme des courants de porteurs et du


J p = Ð e D p grad p  courant de déplacement, et sa densité s’exprime par :
 (13)
J n = eD n grad n 
∂E
J = J p + J n + ε --------- (16)
où Dp et Dn sont les constantes de diffusion. ∂t

La différence de signe entre les deux équations (13) est liée à celle
des charges véhiculées : à un gradient de concentration négatif cor- La divergence du courant total est bien entendue nulle ( ∇ J = 0 ) .
respond un flux de porteurs positif, soit un courant positif pour les Il n’en est pas forcément de même pour les différentes composan-
trous, négatif pour les électrons. tes, courants de porteurs et courant de déplacement.

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1.3 Génération, recombinaison Énergie


de porteurs

Lorsque des courants de porteurs circulent dans le cristal, la Bande de conduction


balance génération-recombinaison, qui est corollaire de l’équilibre
thermodynamique, se trouve rompue : les concentrations de por- EC

1
teurs dévient de leurs valeurs d’équilibre et l’un des deux processus, a
génération ou recombinaison, l’emporte sur l’autre. De nombreux c
mécanismes physiques peuvent intervenir dans ces processus, Eg /2
selon la nature du cristal, ses imperfections, la température… On se Et
limitera au cas du silicium, dans la plage de température intéressant ∆E
le fonctionnement des composants.

d
b
1.3.1 Taux de génération et de recombinaison

Les taux de génération g et de recombinaison r représentent les


nombres de porteurs de chaque type créés ou éliminés par unité de EV
volume et unité de temps (cm−3 · s−1). Dans la mesure où les proces-
sus de génération et de recombinaison s’effectuent par paires, ces Bande de valence
taux sont communs aux électrons et aux trous.
À l’équilibre thermodynamique, on a :
a : capture d'un électron libre
g = r b : émission d'un trou
c : émission d'un électron
Hors équilibre, on s’intéresse tout naturellement au taux net de
génération-recombinaison : d : capture d'un trou

U=r−g (17) Figure 7 – Transitions élémentaires de génération-recombinaison


Shockley-Hall-Read
Dans toutes les situations pour lesquelles le processus de généra-
tion reste inchangé par rapport aux conditions d ‘équilibre (généra-
tion intrinsèque, d’origine purement thermique), on peut poser :
Le rôle de ces centres est illustré par la figure 7 dans le cadre du
g = g modèle des bandes d’énergie introduit au paragraphe 1.1.1. Des
niveaux d’énergie possibles sont offerts aux électrons dans la bande
et de simples considérations cinétiques sur le modèle de la loi dite « interdite » et, par leur intermédiaire, la génération et la recom-
d’action de masse permettent alors d’établir l’expression générale : binaison des porteurs peuvent s’effectuer en plusieurs temps.

U = B ( pn Ð n i2 ) (18)
■ Dans le cas le plus simple :
où B est une fonction plus ou moins complexe des concentrations — la génération d’une paire électron-trou est le résultat de la cap-
de porteurs, selon les mécanismes physiques mis en jeu dans les ture d’un électron de valence par le centre (émission d’un trou), pré-
processus de génération et de recombinaison. cédée ou suivie par l’émission d’un électron libre (b + c, figure 7) ;
L’expression (18) montre, comme on pouvait s’y attendre, que à
— la recombinaison correspond aux transitions inverses de cap-
un excès de concentration de porteurs ( pn > n i2 ), correspond une ture d’un électron libre suivie ou précédée de la réinsertion d’un
situation de recombinaison nette (U > 0) et que, en cas de défaut de électron de valence (capture d’un trou) (a + d, figure 7).
concentration par rapport à l’équilibre ( pn < n i2 ) , le taux net U est
L’énergie mise en jeu dans ces transitions (de l’ordre de Eg au total
négatif et représente donc en fait un taux net de génération. pour une paire électron-trou) est échangée avec le réseau cristallin
Le facteur B dans l’expression (18) de U serait une constante sous forme de chaleur.
caractéristique du matériau semi-conducteur si le seul mécanisme
de génération-recombinaison en jeu était celui que suggère l’image On voit que les centres de recombinaison sont temporairement
trop idéalisée de la figure 2, c’est-à-dire le passage direct d’électrons chargés au cours d’une transition et peuvent donc jouer, s’ils sont en
de l’état lié à l’état libre ou inversement. Ce processus direct bande concentration suffisante, un rôle « donneur » ou « accepteur » simi-
à bande, qui se déroule effectivement dans tous les matériaux semi- laire à celui des atomes dopants. Entre autres conséquences, si, en
conducteurs, est en réalité presque complètement masqué, dans le régime statique, les taux nets de génération-recombinaison pour
silicium, par d’autres processus plus intenses et plus complexes : les trous et les électrons restent nécessairement égaux, il peut ne
processus Shockley-Hall-Read, recombinaison Auger. pas en être de même en régime dynamique lorsque les constantes
de temps de « piégeage » et de « dépiégeage » des porteurs par les
centres ne sont pas négligeables. Sous réserve de cette éventualité,
1.3.2 Recombinaison Shockley-Hall-Read une expression type du taux net de recombinaison peut facilement
être établie en supposant les centres présents tous identiques et le
Dans un cristal réel, de nombreux types de défauts et d’impuretés niveau d’énergie associé unique :
vraies (autres que les dopants), dont la présence, souvent non maî-
trisée, peut aussi être voulue par la technologie des composants, pn Ð n i2
constituent des centres actifs de génération et recombinaison indi- U SHR = ------------------------------------------------------------------
- (19)
rectes. τ p0 ( n + n * ) + τ n0 ( p + p * )

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1

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D3104

Tenue en tension
des semi-conducteurs de puissance
1
par Philippe LETURCQ
Professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS (LAAS)

1. Généralités................................................................................................. D 3 104 – 2
2. Tenue en tension des dispositifs plans.............................................. — 2
2.1 Zone de transition de la jonction bloquante ............................................. — 2
2.2 Multiplication par avalanche ...................................................................... — 4
2.3 Claquage par avalanche.............................................................................. — 5
2.4 Tension de maintien de structures bipolaires NPN ou PNP..................... — 6
2.5 Effet de la charge d’espace des porteurs en transit.................................. — 8
2.6 Effet de la température. Courant inverse................................................... — 8
3. Terminaisons de jonction ...................................................................... — 9
3.1 Effets de bord............................................................................................... — 9
3.1.1 Contournement, claquage superficiel............................................... — 9
3.1.2 Courbures de jonction........................................................................ — 10
3.1.3 Limitation des effets de bord............................................................. — 12
3.2 Terminaisons de type « mésa » .................................................................. — 12
3.2.1 Terminaisons en biseau ..................................................................... — 12
3.2.2 Sillons creusés chimiquement .......................................................... — 13
3.3 Terminaisons de type « planar » ................................................................ — 13
3.3.1 Plaque de champ ................................................................................ — 14
3.3.2 Plaque de champ résistive ................................................................. — 14
3.3.3 Autoprotection des dispositifs multicellulaires................................ — 14
3.3.4 Anneau de garde diffusé.................................................................... — 15
3.3.5 « Extension de jonction » implantée................................................. — 15
3.3.6 Terminaison « Resurf »....................................................................... — 16
3.3.7 Anneaux diviseurs de champ ............................................................ — 16
4. Conclusions ............................................................................................... — 17

a tenue en tension d'un composant semi-conducteur de puissance, c'est-à-


L dire son aptitude à jouer entre contacts principaux le rôle d'interrupteur
ouvert, est assurée, dans tous les cas, par une jonction bloquante sous polarisa-
tion inverse. Cette jonction, qui charpente le dispositif, est, en règle générale,
fortement dissymétrique : pour supporter des tensions élevées, l'une des deux
régions, souvent désignée par le terme générique de « base », doit permettre à
la charge d'espace de s'étendre suffisamment. Les divers effets physiques qui
limitent la tension blocable jouent sensiblement de la même manière dans tous
les composants semi-conducteurs de puissance et les problèmes de conception
ou de technologie relatifs à la tenue en tension peuvent ainsi être traités de
manière quasi générique. C'est l'objet de cet article.
Le lecteur pourra se reporter, pour les notions préalables, à l’article [D 3 102]
Parution : novembre 2000

Physique des semi-conducteurs de puissance, dont, plus particulièrement, les


paragraphes 1.4.2 et 2.1.4.

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TENUE EN TENSION DES SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE __________________________________________________________________________________

1. Généralités Sens de polarisation


P N

Pour supporter des tensions élevées, une région relativement – – – – – – + + + + +


large et peu dopée doit jouxter la jonction bloquante du dispositif
semi-conducteur, pour permettre à la zone de charge d'espace de – – – – – – + + + + +
s'étendre suffisamment. Cette région, dont la désignation générique

1
est la « base », constitue le cœur des dispositifs de puissance. La – – – – – – + + + + +
« base » est souvent homogène, de type N de préférence au type P
pour des raisons qui tiennent à la plus forte mobilité des électrons – – – – – – + + + + +
ou aux impératifs de la technologie. Elle constitue la région centrale
– – – – – – + + + + +
des diodes et redresseurs, la base N des thyristors et des transistors
IGBT, la région de collecteur des transistors bipolaires (mais, à l'ori- – – – – – – + + + + +
gine, elle correspondait bien à la base des transistors « alliés »), la
région de drain des transistors MOS de puissance. Selon les struc-
tures propres à chacun de ces dispositifs, la base est limitée, à Jonction
l'opposé de la jonction bloquante, par une région plus fortement métallurgique
dopée de même type ou de type opposé. Les profils types à consi-
dérer dans l'étude de la tenue en tension des composants de puis- électrons + donneurs
sance sont donc des successions P+NN+ et P+NP+ (ou les – accepteurs
trous
successions complémentaires N+PP+ et N+PN+).
La tension blocable théorique est limitée essentiellement par le
Figure 1 – Zone de transition dépeuplée d’une jonction PN sous
mécanisme d'avalanche , éventuellement couplé à d'autres mécanis-
polarisation inverse
mes comme l'injection bipolaire. Les paramètres principaux per-
mettant de définir cette tension sont le dopage et l'épaisseur de la
base et, en cas d'injection bipolaire, le gain en courant correspon- Pour une répartition donnée N (x) de la concentration des impure-
dant. Le gradient de concentration d'impuretés à la jonction métal- tés dopantes, les répartitions du champ électrique E et du potentiel V
lurgique est également un paramètre déterminant dans le cas de dans la zone de transition ainsi constituée, sont déterminées par
jonctions très « graduelles ». intégration des équations de l'électrostatique (cf. article [D 3 102],
§ 1.1.4 et § 2.1.4.2) :
L'obtention d'une capacité de blocage effective proche de la
valeur théorique dépend par ailleurs de la maîtrise d'un certain dE eN ( x )
------- = ----------------
ε - (1)
nombre d'autres facteurs : courant inverse , dont l'origine principale dx
est la génération thermique dans la charge d'espace, contourne- dV
ment de la jonction par claquage prématuré intervenant sur les -------- = – E (2)
bords, courants de fuite superficiels… Le contrôle de la nature et de dx
la concentration des centres de génération-recombinaison, la con- avec x abscisse de position par rapport à la jonction métallurgique,
ception de terminaisons de jonction adaptées, la passivation de la e charge électronique (e = 1,602.10–19 C),
surface du cristal, sont ainsi des compléments indispensables à la
ε permittivité du matériau semi-conducteur (ε = 1,04.10–12 F/cm
réalisation de la tenue en tension. Enfin, il faut prévoir que la tenue
pour le silicium).
en tension définie en régime statique peut être altérée en régime
transitoire par l'effet de la charge d'espace des porteurs en transit, Pour conditions aux limites, on postule simplement que le champ
avec, en certains cas, des conséquences destructives. électrique est négligeable en dehors de la zone de transition et que
la variation de potentiel à la traversée de cette dernière égale la dif-
férence de potentiel imposée, soit Φ + V R où VR est la tension exté-
rieure appliquée en inverse (VR > 0). La tension de diffusion Φ peut
être négligée le plus souvent. Les principaux exemples de référence
2. Tenue en tension intéressant les composants semi-conducteurs de puissance sont
des dispositifs plans donnés ci-après.
■ Jonction PN abrupte. C’est le cas le plus simple : les concentra-
tions d’impuretés sont constantes des deux côtés de la jonction.
Dans l'étude des structures de puissance, il est commode de défi- Avec N = – NA du côté P et N = ND du côté N (NA et ND étant respec-
nir la tenue en tension de manière unidimensionnelle, en faisant, tivement les concentrations des atomes accepteurs et donneurs),
dans un premier temps, abstraction des effets de bord qu'on s'atta- les résultats sont immédiats : le champ électrique est maximal (en
che ensuite à préciser. En d'autres termes, nous abordons le sujet en valeur absolue) à la jonction métallurgique et varie linéairement
supposant que la jonction bloquante des dispositifs analysés est avec la distance, de part et d’autre ; la répartition du potentiel est
idéalement plane. parabolique par morceaux (cf. [D 3 102], figure 14).
Pour une jonction fortement dissymétrique, la zone de charge
d'espace s'étend essentiellement du côté le moins dopé, et les résul-
tats généraux concernant l'épaisseur WT de la zone de transition et
2.1 Zone de transition la valeur maximale |EM| du champ (cf. [D 3 102], expressions (71) et
de la jonction bloquante (72) respectivement) s'appliquent alors sous la forme (cas d'une
jonction P+N) :

2 ε ( Φ + VR )
Lorsqu'une jonction PN est polarisée en inverse, seuls les por- WT = ----------------------------- (3)
teurs minoritaires de chacune des régions P et N peuvent franchir la eN D
jonction métallurgique. Les porteurs majoritaires, au contraire, en
désertent le voisinage et une charge d'espace essentiellement 2 eN D ( Φ + V R )
EM = ---------------------------------------
- (4)
dépeuplée s'établit donc de part et d'autre (figure 1). ε

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_________________________________________________________________________________ TENUE EN TENSION DES SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE

■ Jonction P+N exponentiellement graduée. Le profil d’impure-


tés de jonctions diffusées dans un substrat initialement dopé de 10
manière homogène peut être représenté, de manière moins caricatu-

Densité de charge eN (en 10– 5 C/cm3)


rale que la répartition abrupte, par une distribution exponentielle
(figure 2). Pour un substrat de type N, par exemple, on peut poser : 0
x
N ( x ) = ND 1 – exp  – --- (5)
 L

1
– 10
avec ND concentration d’impuretés du substrat,
L décrément logarithmique de la répartition des atomes
accepteurs.
– 20
Pour une telle jonction, la répartition du champ électrique est don-
née par l’expression : charge des atomes dopants
charge découverte
eN D L x  x – 30
E ( x ) = E M + --------------
ε - --L- + exp – --L-  – 1
avec, pour valeur maximale du champ, en module :
– 40
WT  WT  – 20 0 20 40 60
eN D L --------  -------- 
L L Abscisse de position x (µm)
EM = --------------- 1 – -------------------------------------- – ln  -------------------------------------- (6)
ε W   W 
1 – exp  – -------- T T
 L   1 – exp  – -------- L  150 500

où WT représente l’épaisseur totale de la zone de transition.


En fonction de WT, la tension supportée est donnée explicitement 120 400

Répartition de potentiel V (V)


Champ électrique E (kV/cm)

par la relation :

eN D LW T WT W
-------- coth  --------T – 1 – Φ
90 300
V R = -------------------------  2L 
(7)
ε 2L champ
potentiel
mais, à l’inverse, la détermination de WT en fonction de VR est impli- 60 200
cite.
La profondeur de pénétration de la charge d’espace dans la
région faiblement dopée est par ailleurs : 30 100

 exp  W --------T – 1
+   L  
W = L ln  ----------------------------------- 0 0
 WT  – 20 0 20 40 60
 -------- 
L Abscisse de position x (µm)
Il est facile de voir que, pour des tensions appliquées en inverse
assez élevées pour que WT >> L, on retrouve les résultats relatifs à Figure 2 – Exemple de répartitions de charge, de champ électrique
une jonction P+N abrupte. (en module) et de potentiel dans la zone de transition d’une jonction
P+N graduelle polarisée en inverse
Exemple : la figure 2 présente une application numérique de ces
résultats avec les valeurs suivantes des paramètres : ND = 3 x1014 cm–3 ;
L = 6,6 µm ; VR = 400 V ; la tension de diffusion est négligée.
eN
L'analyse des zones de transition de jonctions pour des profils
d'impuretés gradués plus complexes – ou plus réalistes – nécessite
le recours au calcul numérique ; on retrouve généralement assez
bien les tendances qu'expriment les relations (6) et (7). a x
WN
■ Structure P+NN+. Lorsque la charge d'espace d'une jonction
dissymétrique, abrupte ou graduelle, envahit totalement la région
faiblement dopée et vient « buter » sur une région fortement dopée,
les résultats précédemment obtenus doivent être modifiés. Le cas
type est celui d'une structure P+NN+, qui correspond, dans de nom-
breux composants de puissance, à la région de base et aux régions E (x )
limitantes (figure 3). b x
Dans l'hypothèse d'une répartition d'impuretés abrupte, et en
négligeant les profondeurs de pénétration de la charge d'espace
dans les régions fortement dopées, la tension de « perçage » VP,
pour laquelle la charge d'espace de la jonction P+N atteint la région
N opposée, est donnée, à partir du résultat (3), par la relation :
2 EM
eN D W N
V P = ---------------------
- (8)
2ε Figure 3 – Répartitions approximatives de la densité de charge (a) et
où ND et WN représentent respectivement le dopage et la profondeur du champ électrique (b) dans une structure P+NN+ abrupte, pour une
de la région centrale ; on a négligé la tension de diffusion Φ. tension supportée supérieure à la tension de perçage

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TENUE EN TENSION DES SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE __________________________________________________________________________________

Pour une tension appliquée en inverse supérieure à la tension de En prenant pour conditions aux limites les valeurs des densités de
perçage, la répartition de champ n'est plus de forme triangulaire courant d’électrons Jn (x1) et de trous Jp(x2) abordant la charge
mais devient trapézoïdale, comme indiqué sur la figure 3 b : l'exten- d’espace, l’intégration des équations (10) et (11) conduit à la relation :
sion de charge d'espace est pratiquement bloquée à la valeur WN de
la profondeur de base et le champ maximal est alors donné, avec les J = M n J n ( x 1 ) + M p J p (x 2 ) + M g J g (12)
mêmes conditions d'approximation, par la relation : où Mn, Mp, Mg représentent les facteurs de multiplication par ava-
VR + VP lanche, respectivement pour les courants incidents d’électrons, de
EM = -------------------
- (9)

1
WN trous, et pour le courant de génération thermique dans la charge
d’espace, de densité Jg en l’absence d’ionisation par choc.
En posant, pour alléger les écritures :
2.2 Multiplication par avalanche x
 
Lorsque le champ électrique dans la zone de transition est suffi-
samment élevé, l'avalanche (ionisation par choc) doit être prise en
z ( x ) = exp  –
 ∫ x1
( α n – α p ) dx ′ 

compte dans la formation de paires électron-trou, comme cause de et :


génération excédentaire. La figure 4 illustre schématiquement le
x2


processus.
J = α n z ( x ) dx (13)
À partir des équations de continuité (cf. [D 3 102], § 1.5) et de x1
l'expression du taux de génération par collisions ionisantes
(cf. [D 3 102], § 1.4.2, relation (22)), on peut écrire, en régime statique : les expressions des facteurs de multiplication sont les suivantes :
d Jn 1
---------- = α n J n + α p J p – eg (10) M n = ------------- (14)
dx 1–J
Jn + J p = J (11) z ( x2 )
avec J densité totale de courant de porteurs, M p = -------------
- (15)
1–J
g taux de génération thermique (cf. [D 3 102], § 2.1.4.3),
et, dans l’hypothèse où le taux de génération thermique est cons-
αn et αp coefficients d’ionisation pour les électrons et les tant, indépendant de l’abscisse de position :
trous ; ce sont, à travers le champ électronique, des
fonctions de l’abscisse de position (cf. [D 3 102], z moy
§ 1.4.2, expressions (23)). M g = ------------
- (16)
1–J
Les densités de courant d’électrons Jn, de trous Jp et la densité de
courant totale J sont comptées négativement ; en valeur absolue, |Jn|
zmoy désignant la valeur moyenne de z (x) dans la zone de transition.
est fonction croissante de l’abscisse x de position et |Jp| est, corréla- Le calcul de ces facteurs de multiplication ne peut être poursuivi
tivement, fonction décroissante. que numériquement. Il demande en effet la connaissance de la
répartition du champ électrique dans la zone de transition, réparti-
tion qui n'est connue analytiquement que dans les cas simples pré-
cédemment répertoriés (cf. (§ 2.1)), et, même dans ces cas simples,
Sens de polarisation
on ne peut expliciter les résultats en termes de fonctions élémentai-
P N
res, sauf fortes approximations.
Il est cependant possible d'observer que l'intégrale J [relation
(13)] dite « intégrale d'ionisation » est une fonction croissante du
champ électrique (à travers les coefficients d'ionisation) et de
l'épaisseur de la zone de transition (à travers l'intervalle d'intégra-
tion), donc de la tension supportée. Lorsque l'intégrale d'ionisation
approche la valeur unité, les facteurs de multiplication tendent tous
Jp(x1) Jp(x2) vers l'infini. Cela signifie que le mécanisme d'ionisation par choc est
devenu autonome : c'est le claquage de la jonction par avalanche ,
qui marque une limite absolue VB à la tension que peut supporter
une jonction.
Jn(x1) Jn(x2) Par ailleurs, avec αn > αp pour le silicium, on a toujours :
z (x2) < zmoy < 1.
Les facteurs de multiplication, tous égaux à l'unité pour de faibles
tensions, sont donc tels que :
Mn > Mg > Mp
lorsque l'avalanche se manifeste.
x1 x2 x
Exemple : les variations des facteurs de multiplication avec la ten-
sion supportée sont indiquées pour des jonctions PN+ (figure 5 a) et
électrons collision ionisante P+N (figure 5 b) abruptes de même concentration d'impuretés du côté
le moins dopé : la dissymétrie dans ces variations (particulièrement
marquée pour Mg) vient de ce que les électrons ont un pouvoir ionisant
trous génération thermique très supérieur à celui des trous. On peut aussi expliquer une petite dif-
férence dans les tensions de claquage, à l'avantage de la jonction PN+,
par le fait que le taux de croissance avec le champ électrique du coef-
Figure 4 – Multiplication des porteurs par avalanche ficient d'ionisation pour les trous est supérieur à celui des électrons
dans la zone de transition d’une jonction PN (cf. [D 3 102] § 1.4.2, figure 8).

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D3106

Composants semi-conducteurs
de puissance bipolaires. Partie 1
1
par Philippe LETURCQ
Professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS (LAAS)

1. Principes généraux .................................................................................. D 3 106 - 2


1.1 Schématisation des structures bipolaires.................................................. — 2
1.2 Équation de diffusion ambipolaire............................................................. — 3
1.3 Équation de contrôle de charge.................................................................. — 3
1.4 Répartition des porteurs dans la zone de stockage, en régime statique — 4
1.5 Dynamique des charges en commutation................................................. — 5
1.6 Tension entre contacts terminaux .............................................................. — 6
1.7 Influence des principales non linéarités .................................................... — 7
2. Diodes bipolaires ..................................................................................... — 8
2.1 Structure type .............................................................................................. — 8
2.2 État passant. Chute de tension directe ...................................................... — 9
2.2.1 Éléments de modélisation pour l’état passant................................. — 9
2.2.2 Comportements asymptotiques........................................................ — 10
2.2.3 Exemples de caractéristiques statiques............................................ — 11
2.2.4 Influence des paramètres................................................................... — 11
2.3 Comportement dynamique......................................................................... — 13
2.3.1 Recouvrement inverse ....................................................................... — 13
2.3.2 Recouvrement direct .......................................................................... — 17
2.4 Limites de sécurité....................................................................................... — 18
Notations et indices ......................................................................................... — 19
Transistors bipolaires ...................................................................................... D 3 107
Thyristors et composants dérivés................................................................ D 3 107

our remplir leur fonction de conduction, les composants semi-conducteurs


P bipolaires mettent en jeu électrons et trous. Ils s’opposent en cela aux com-
posants unipolaires dans lesquels le transport du courant est assuré par un seul
des deux types de porteurs. La distinction est classique mais s’applique mal à
nombre de composants modernes qui conjuguent dans le même cristal des
mécanismes unipolaires et bipolaires. Aussi la répartition en plusieurs articles
des analyses du fonctionnement des divers composants de puissance bipolaires
est-elle motivée davantage par des raisons de commodité d’exposé et des con-
traintes de volume que par le respect strict des principes. Les deux premiers arti-
cles [D 3 106] et [D 3 107] sont consacrés à l’étude des semi-conducteurs de
puissance bipolaires « purs » : diode, transistor, thyristor et composants déri-
vés, cependant que les composants « mixtes », tels l’IGBT (Insulated-Gate-Bipo-
lar-Transistor), sont alliés aux composants unipolaires, transistor MOS
principalement, dans l’article [D 3 108]. Le lecteur considérera qu’il s’agit en réa-
lité d’un ensemble.
La qualification de bipolaire, pour les composants de puissance, sous-entend
en outre la mise en jeu d’effets de modulation de conductivité pour réduire
autant que possible la tension de déchet à l’état passant. Cette modulation de
Parution : février 2001

conductivité s’exerce essentiellement dans la région de base large et peu dopée

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D3106

COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE BIPOLAIRES. PARTIE 1 _______________________________________________________________________

qui confère au dispositif sa capacité de blocage de la tension. Elle a pour corol-


laire un stockage de porteurs qui pèse sur les performances dynamiques, à
l’ouverture comme à la fermeture. Ces effets essentiels sont analysés dans cette
première partie, illustrés par le cas très important de la diode qui, du double
point de vue théorique et pratique, est l’archétype des composants de puissance
bipolaires.

1
Nota : le lecteur se reportera, pour les notions préalables, à l’article [D 3 102] « Physique des semi-conducteurs de
puissance », particulièrement au paragraphe 2.1 (jonction PN), ainsi qu’à l’article [D 3 104] qui traite, de manière générique, de
la « Tenue en tension des semi-conducteurs de puissance ».

1. Principes généraux Émetteur Base Émetteur


P+ p (x,t ) N N+

Répartition
1.1 Schématisation des structures I Ip1 statique In2
bipolaires In1 Ip2
A p1 K

La compréhension du fonctionnement des composants semi-con- p2


ducteurs de puissance bipolaires est largement facilitée si on admet Id QS
l’unidimensionnalité des phénomènes principaux et la possibilité de
partition de la structure en régions physiquement et électriquement x1 x2 x
« typées » (approche « régionale », cf. article [D 3 102], § 1.7). La Zone
figure 1 propose, dans ce cadre d’analyse simplifié, les schémas de Charge de stockage Zone
A : anode d'espace de «drift»
principe des principaux dispositifs de puissance purement
K : cathode a diode
bipolaires : diode, transistor, thyristor.
■ La « base », c’est-à-dire la région large et peu dopée qui jouxte p (x,t )
la jonction bloquante, constitue le « cœur » du dispositif. De type N Collecteur Collecteur Base Émetteur
le plus souvent, cette base correspond à la région centrale des dio- N+ N– P N+
des, à la base large des thyristors, à la région de collecteur des tran-
sistors bipolaires (mais, à l’origine, elle correspondait bien à la base IC Ip1 ≈ 0 Répartition In2
statique
des transistors « alliés »). Elle joue le rôle principal dans le compor- In1 Ip2
tement statique et dynamique du composant, car c’est là que p2
C E
s’étend la charge d’espace de la jonction bloquante et que se trouve
distribuée, à l’état passant, la plus grande part de la population des
porteurs en transit. QS Id
Les régions encadrant la base ont pour rôle d’injecter dans cette
x1 x2 x
dernière les porteurs de charge nécessaires à la conduction, élec-
B IB
trons et trous, ou de les extraire. Ces régions, émettrices ou collec- E : émetteur Zone
trices, sont généralement beaucoup plus minces et plus fortement B : base Zone de stockage Charge
C : collecteur de «drift» d'espace
dopées que la région de base. Pour ces deux raisons, on peut, en
première analyse, y négliger la charge des porteurs en excès. Dans b transistor bipolaire
les diodes, il s’agit d’émetteurs P et N, le plus souvent fortement
dopés ; la structure type est donc P+NN+. Dans les thyristors et les Émetteur p (x,t ) Base Base Émetteur
transistors, l’une des régions est composite, associant à un émet- P+ N– P N+
p1
teur N+ une couche de commande P (également appelée « base »
par abus de langage). Les structures types sont ainsi N+PN−P+ pour
le thyristor et N+PN−N+ pour le transistor (cet ordre de succession IA Ip1 In2
des couches est inversé sur la figure 1, pour une présentation In1 Ip2
Répartition
homogène des trois schémas en ce qui touche les sens de référence A statique K
des courants).
■ La région de base, d’épaisseur W, peut, à son tour, être subdivi- p2
QS Id
sée en zones qui, selon les régimes de fonctionnement, peuvent être
qualifiées de quasi neutres, en état de faible ou de fort niveau x2 x
G
d’injection, ou correspondent à des charges d’espace plus ou moins A : anode IG
Zone
dépeuplées. Ces zones sont en nombre variable, de une à trois selon K : cathode de stockage
Charge
les conditions. Leurs frontières, évidemment fixes en régime de G : gâchette d'espace
fonctionnement statique, sont mobiles en régime dynamique, sauf,
c thyristor (GTO)
bien entendu, lorsque ces frontières correspondent aux limites
mêmes de la région de base. Ces zones sont mises en évidence, sur L'évolution de la répartition des porteurs p (x,t ), à l'ouverture, est indiquée,
la figure 1, par la surimpression d’évolutions des répartitions de en surimpression, dans la région N large et peu dopée
porteurs dans des cas d’exemple d’ouverture à partir d’un état de
conduction statique (recouvrement inverse pour la diode, blocage Figure 1 – Schémas de principe unidimensionnels des principaux
direct pour le transistor et le thyristor). composants bipolaires

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______________________________________________________________________ COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE BIPOLAIRES. PARTIE 1

● On appelle zone de stockage la région à fort niveau d’injection ■ La même hypothèse p ≈ n appliquée aux équations de continuité
qui, lorsqu’elle est présente, contient de fait la quasi totalité de la (cf. [D 3 102], § 1.5) permet par ailleurs d’écrire, toujours pour une
population des porteurs en transit dans la base. Cette zone de stoc- dimension :
kage, qui est modulée en conductivité par la présence même des
porteurs, peut occuper tout ou partie de la région de base. Elle appa- ∂ Jn ∂ Jp ∂p p
raît, s’étend ou régresse et disparaît dans les commutations entre --------- ≈ Ð --------- ≈ e  ------- + --- (2)
les états bloqué et passant, dictant, dans une large mesure, le com- ∂x ∂x ∂t τ
portement électrique du dispositif, vu de ses contacts terminaux.
● Adjacentes à la zone de stockage, une ou deux zones, relative-
ment désertes, peuvent apparaître. Selon le type de la base et le
sens de polarisation, il peut s’agir d’une zone de charge d’espace
où τ représente la durée de vie des porteurs.

■ Enfin, l’élimination des densités de courant entre les équa-


1
« dépeuplée » ou d’une zone de « drift », dans lesquelles les por- tions (1) et (2) conduit à l’équation de diffusion :
teurs se déplacent essentiellement par conduction.
La zone de charge d’espace « dépeuplée » est ainsi qualifiée pour ∂2 p p ∂p
D --------- = --- + ------- (3)
des raisons d’usage. Elle est établie en réalité non seulement par les ∂ x2 τ ∂t
atomes dopants, mais également par les porteurs qui la traversent.
En règle générale, le champ électrique qui y règne est presque par- avec :
tout suffisamment intense pour que l’on puisse considérer que les
porteurs s’y déplacent à leur vitesse limite (cf. [D 3 102], § 1.2.1). La
plus grande partie de la tension établie, au blocage, entre contacts
Dn Dp
D = 2 --------------------- (4)
terminaux du dispositif, est supportée par une zone de ce type. Dn + Dp
La zone de « drift », à la différence de la zone de charge d’espace,
n’est appauvrie qu’en porteurs minoritaires. Pour de faibles densités ce dernier coefficient portant le nom de constante de diffusion ambi-
de courant, elle reste pratiquement quasi neutre, avec une concen- polaire.
tration de porteurs majoritaires peu différente de la concentration
du dopant. Cependant, lorsque la densité de courant imposée Les conditions aux limites qui s’appliquent à l’équation de diffu-
approche la valeur critique correspondant à la vitesse limite des por- sion ambipolaire sont diverses, selon les structures étudiées et les
teurs, leur concentration augmente nécessairement et une zone de conditions de fonctionnement envisagées. Elles portent générale-
charge d’espace s’établit par excès de porteurs majoritaires. ment soit directement sur les densités de porteurs aux frontières,
● Dans la mesure où la zone de stockage contient la presque tota-
soit, plus souvent, sur les « gradients de concentration », c’est-à-
lité des porteurs en transit, il est permis d’admettre la continuité, à dire les dérivées de ces densités par rapport à l’abscisse x de posi-
travers les autres régions, des courants de trous Ip et d’électrons In tion. Ces gradients de concentration sont directement liés, comme
qui y parviennent ou en sont issus, même en régime dynamique. l’indique l’équation (1), aux densités de courant de porteurs aux
Cependant le courant total, s’il correspond bien, dans les régions limites de la zone de stockage.
quasi neutres, à la somme des courants de trous et d’électrons,
comprend en outre, dans les zones de charge d’espace en régime
variable, une composante de déplacement Id, comme indiqué sur la
figure 1. 1.3 Équation de contrôle de charge
Cette schématisation unidimensionnelle et régionale, si elle peut
paraître quelque peu réductrice, préserve l’essence des phénomè-
nes et permet de dégager les principes généraux régissant le com- L’équation (2) a un important corollaire. Par intégration étendue à
portement statique et dynamique des dispositifs bipolaires sans l’épaisseur de la région de stockage, c’est-à-dire entre les limites x1
recours excessif et aveugle à la simulation numérique pure. et x2 indiquées sur la figure 1, on obtient l’équation dite « de con-
trôle de charge » :

d QS QS
1.2 Équation de diffusion ambipolaire J p1 Ð J p2 = J n2 Ð J n1 = ------------ + ------- (5)
dt τ

La répartition des porteurs dans la zone de stockage est régie par où QS représente la charge stockée par la population de trous (ou
une équation simple, dite de diffusion ambipolaire. Introduite dans d’électrons) par unité de surface de jonction :
l’article [D 3 102], § 2.1.3.2, à propos des jonctions P+NN+ ou P+PN+
« longues », cette équation dérive des équations fondamentales du x2

∫p
transport de charges dans les semi-conducteurs par les opérations
et approximations suivantes. QS = e dx (6)
x1
■ Avec des concentrations de trous et d’électrons sensiblement
égales p ≈ n (quasi neutralité, haute injection), l’élimination du
champ électrique entre les expressions des densités de courant Jp et et Jp1, Jn1, Jp2, Jn2 les densités de courant aux frontières x1 et x2 de
Jn de ces porteurs (cf. [D 3 102], § 1.2.3) conduit, en une dimension, la zone de stockage.
à la relation :
Cette équation est différentielle, linéaire du premier ordre. Son
Jn Jp écriture suppose que la durée de vie τ est indépendante de l’abs-
∂p cisse x de position, mais, si tel n’est pas le cas, elle reste valable en
------- Ð ------- ≈ 2 e ------- (1)
Dn Dp ∂x donnant à τ le sens de durée de vie « globale », effective.

dans laquelle les différents symboles conservent leur signification En tenant compte de la continuité du courant total de porteurs :
habituelle : e désigne la charge élémentaire, Dn et Dp les constantes
de diffusion pour les électrons et les trous respectivement. J = Jp1 + Jn1 = Jp2 + Jn2 (7)

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COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE BIPOLAIRES. PARTIE 1 _______________________________________________________________________

et en faisant intervenir les « rapports d’injection » aux frontières x1 l’équation (1), les relations de continuité (7) et les définitions (8), on
et x2 de la zone de stockage : a:

J p1 dp(x) 1 J n1 J p1 1 1 Ð α1 α1
f = ---------------- = ------- --------- Ð --------- = ------- --------------- Ð ------- J (15)
α 1 = --------- dx x1 2 e Dn Dp 2e Dn Dp
J (8)
J n2
α 2 = --------- , dp(x) 1 J n2 J p2 1 α2 1 Ð α2

1
J g = ---------------- = ------- --------- Ð --------- = ------- ------- Ð --------------- J (16)
dx x2 2 e Dn Dp 2 e Dn Dp
on peut réécrire l’équation (5) sous la forme :
Les concentrations p1 et p2 sont alors données, à partir de
l’expression (13), par les relations :
d QS QS
------------ + ------- = ( α 1 + α 2 Ð 1 ) J (9)
dt τ Dτ  x 2 Ð x 1
p 1 = ------------------------------------------------------- g Ð f ch  ------------------ (17)
ce qui met en évidence les paramètres fondamentaux dont dépen- sh [ ( x 2 Ð x 1 ) ⁄ Dτ ] Dτ
dent, pour un courant donné, la statique et la dynamique de la
et :
charge stockée : rapports d’injection et durée de vie des porteurs.
Dτ  x 2 Ð x 1
p 2 = ------------------------------------------------------- g ch  ------------------ Ð f (18)
sh [ ( x 2 Ð x 1 ) ⁄ Dτ ] Dτ
1.4 Répartition des porteurs dans la zone
de stockage, en régime statique où l’on a désigné les gradients en x1 et x2 par f et g respectivement,
pour alléger les écritures.
■ Il convient toutefois de remarquer que l’obtention, par les
■ En régime statique (d/dt = 0), l’équation (9) se réduit à : expressions (17) et (18), de concentrations négatives n’a pas de
sens. Pour avoir :
QS = τ (α1 + α2 − 1)J (10)
p 1 > 0 et p 2 > 0
Si les rapports d’injection sont fixés, la charge stockée est propor-
tionnelle au courant passant. Dans le cas limite où α1 = α2 = 1 (cou- les gradients de concentration f et g aux frontières et l’épaisseur
rant de trous en x1, courant d’électrons en x2), on a : (x2 − x1) de la zone de stockage doivent respecter les conditions :

QS = τ J (11)  x 2 Ð x 1  x 2 Ð x 1
g > f ch  ------------------ et g ch  ------------------ > f (19)
ce qui met alors l’accent sur l’importance du paramètre « durée de Dτ Dτ
vie ». Suivant les signes et valeurs relatives des gradients f et g, on est
L’équation de diffusion ambipolaire (3) devient, de son côté ainsi conduit à envisager, pour le régime statique, les situations
(∂/∂t = 0) : dépeintes par la figure 2.
● Pour des gradients f négatif et g positif, on a toujours p1 > 0 et
d2 p p p2 > 0, sans restriction sur l’épaisseur de la zone de stockage. Celle-
---------- = ------- (12) ci envahit donc la totalité de la base du dispositif, c’est-à-dire :
d x2 Dτ
x2 − x1 = W (répartition de la figure 2 a).
La solution est immédiate, sous réserve d’admettre que la durée C’est typiquement le cas des diodes (cf. la répartition initiale stati-
de vie des porteurs et la constante de diffusion ambipolaire sont que rapportée sur la figure 1 a) et souvent aussi des thyristors à
indépendantes de l’abscisse x de position : l’état passant.
● Pour des gradients f et g tous deux négatifs avec f > g , on
p 1 sh [ ( x 2 Ð x ) ⁄ Dτ ] + p 2 sh [ ( x Ð x 1 ) ⁄ Dτ ] a bien toujours p1 > 0, mais deux sous-cas peuvent être distingués.
p ( x ) = ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (13)
sh [ ( x 2 Ð x 1 ) ⁄ Dτ ] f
Si la condition W < Dτ Argch ----- est remplie, la zone de
g
Cette expression décrit explicitement la répartition des porteurs stockage occupe effectivement toute la base, comme dans le cas
pour des concentrations p1 et p2 connues aux frontières x1 et x2 de précédent, mais la concentration des porteurs est continûment
la zone de stockage. décroissante (répartition de la figure 2 b). Ce peut être encore le cas
En fonction de p1 et p2, la charge stockée QS est ainsi donnée, du thyristor (cf. la répartition initiale statique rapportée sur la
selon sa définition (6), par l’expression : figure 1 c), mais aussi du transistor bipolaire en saturation vraie.
Sinon, la zone de stockage a une extension limitée :
ch [ ( x 2 Ð x 1 ) ⁄ Dτ ] Ð 1
QS = e Dτ ( p 1 + p 2 ) ---------------------------------------------------------------- (14) f
sh [ ( x 2 Ð x 1 ) ⁄ Dτ ] x2 Ð x1 = Dτ Argch ----- (20)
g

ce qui permet de faire le lien, par l’intermédiaire de la relation (10) et, appuyée en x1 sur la frontière de la région de base, fait place, au-
avec la densité de courant J. delà de x2 à une zone relativement déserte (répartition de la
figure 2 c) ; c’est le cas, notamment, pour les transistors bipolaires
Le facteur Dτ est la « longueur de diffusion ambipolaire ». en quasi saturation.
Dans la plupart des cas, ce sont les gradients de concentration qui ● Le cas où les gradients aux frontières de la zone de stockage
sont imposés aux limites par les courants de porteurs. D’après sont tous deux positifs avec f < g est simplement dual du précédent

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Composants semi-conducteurs
de puissance bipolaires. Partie 2
1
par Philippe LETURCQ
Professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS (LAAS)

Principes généraux ........................................................................................... D 3 106


Diodes bipolaires .............................................................................................. —
1. Transistors bipolaires de puissance ................................................... D 3 107 – 2
1.1 Structure type .............................................................................................. — 2
1.2 État passant.................................................................................................. — 3
1.2.1 Mécanisme de quasi-saturation ........................................................ — 3
1.2.2 Éléments de modélisation ................................................................. — 4
1.2.3 Caractéristiques statiques.................................................................. — 5
1.3 Comportement dynamique......................................................................... — 7
1.3.1 Description simplifiée......................................................................... — 7
1.3.2 Commutation sur charge inductive................................................... — 8
1.4 Limites de sécurité....................................................................................... — 12
1.4.1 Limitations en tension........................................................................ — 12
1.4.2 Aires de sécurité, second claquage................................................... — 12
1.5 Darlington monolithique............................................................................. — 14
2. Thyristors et composants dérivés....................................................... — 14
2.1 Principe......................................................................................................... — 14
2.2 Structure longitudinale, géométrie et effets bidimensionnels ................ — 16
2.2.1 Profil d’impuretés ............................................................................... — 16
2.2.2 Courts-circuits d’émetteur ................................................................. — 17
2.2.3 Effets de géométrie à la fermeture par la gâchette ......................... — 17
2.2.4 Effets de géométrie à l’ouverture par la gâchette............................ — 17
2.2.5 Schématisation unidimensionnelle................................................... — 18
2.3 Chute de tension à l’état passant ............................................................... — 18
2.4 Dynamique des charges à la fermeture..................................................... — 19
2.5 Ouverture par inversion de polarité........................................................... — 20
2.6 Ouverture par la gâchette ........................................................................... — 21
2.7 Différents types de thyristors et composants dérivés .............................. — 23
Notations et symboles .................................................................................... — 25

ette deuxième partie de l’étude des composants de puissance bipolaires est


C principalement consacrée au transistor et aux dispositifs de la famille du
thyristor. En continuité avec l’article [D 3 106], elle se fonde sur les mêmes prin-
cipes généraux que ceux qui ont été mis en relief dans le cas des diodes et le for-
malisme utilisé est identique. On retrouvera donc ici, mis en jeu dans des
composants commandés, les mécanismes de modulation de conductivité
et de stockage de porteurs précédemment décrits, le cadre d’analyse, unidi-
mensionnel et régional, étant intégralement conservé par souci de simplification
didactique.
Parution : mai 2001

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COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE BIPOLAIRES. PARTIE 2 ______________________________________________________________________

1. Transistors bipolaires tion bloquante et que se trouve stockée, dans l’état passant, la plus
grande part de la charge des porteurs en transit. La région de base
de puissance au sens habituel du terme, ici de type P, est beaucoup plus dopée et
étroite. L’émetteur est toujours très fortement dopé. La durée de vie
des porteurs dans la base et le collecteur est, en règle générale,
Les transistors ont été pendant longtemps les seuls éléments maintenue assez élevée vis-à-vis des temps de transit des porteurs
semi-conducteurs permettant la commutation de puissance entre dans ces régions pour que l’on puisse considérer l’effet des recom-
états passant et bloqué sans changement préalable de polarité. En binaisons comme secondaire.

1 raison de la complexité de leur commande et de leur relative fragi-


lité, on leur préfère aujourd’hui, selon les domaines de courant et de
tension, les transistors MOS, les IGBT ou les thyristors GTO. Ils
Dans tous les cas, la région d’émetteur est ramifiée, comme l’indi-
que la coupe de la figure 2, les métallisations des contacts d’émet-
teur et de base, alternées, dessinant une géométrie interdigitée plus
restent toutefois utilisés, pour leur faible coût, dans nombre d’appli- ou moins complexe. L’objectif est de réduire l’effet de « focalisation
cations de grande diffusion (ballasts électroniques, par exemple). Si périphérique » dans l’état passant, c’est-à-dire la concentration du
l’importance industrielle du transistor bipolaire de puissance courant injecté sur les bords de l’émetteur. Cet effet, illustré sur la
décline, l’étude de ce composant est incontournable : par la physi- figure 3, résulte de la polarisation non uniforme de la jonction
que de son fonctionnement, il représente un archétype, les mécanis- émetteur – base qu’impliquent les chutes de tension latérales (+ → –)
mes qu’il met en jeu intervenant aussi dans les comportements développées, sous l’émetteur, par les lignes (centripètes) de courant
normaux ou défaillants de la plupart des autres composants. base. En donnant à la région d’émetteur une forme géométrique
privilégiant le rapport périmètre/surface, telle que la mise en paral-
lèle de « doigts » de faible largeur, on diminue la résistance appa-
1.1 Structure type rente de la couche de base sous-jacente, ce qui permet une plus
grande homogénéité d’injection et une meilleure utilisation de la
La structure d’un transistor bipolaire de puissance est, en règle surface de cristal. Pour une pleine efficacité, il peut être nécessaire
générale, du type N+PN–N+ qui permet les meilleurs compromis de de réduire la largeur des doigts d’émetteur et leur espacement à des
performances entre tension bloquée, courant passant et temps de valeurs de l’ordre de quelques dizaines de micromètres seulement.
commutation. Deux exemples représentatifs de profils d’impuretés, C’est donc sous réserve d’une forte interdigitation de l’émetteur
parmi de nombreuses variantes possibles, sont indiqués sur la (ce qui est le cas pour les transistors actuels), et dans la mesure où
figure 1 pour des composants de même tenue en tension (tension le flux des porteurs injectés se réoriente normalement au plan des
de maintien de l’ordre de 500 V). Par rapport au profil a « triple jonctions et redevient uniforme dans la région de collecteur (hypo-
diffusion », le plus classique, le profil b « multiépitaxie » peut thèse d’autant mieux justifiée que ce collecteur est plus épais, donc
présenter des avantages de performances et de robustesse. la tension blocable plus élevée), que la schématisation « unidimen-
La région faiblement dopée de collecteur, délimitée sur les profils sionnelle » des composants bipolaires peut être appliquée (cf.
de la figure 1, constitue la vraie « base » du dispositif, malgré la [D 3 106], § 1.1). C’est la surface de la jonction collecteur-base,
terminologie en usage (cf. [D 3 106], § 1.1). C’est dans cette région plutôt que celle de la jonction émetteur-base, qui sera retenue, dans
en effet que s’étend principalement la charge d’espace de la jonc- cette optique, comme surface active.

Concentration d'impuretés (cm–3) Concentration d'impuretés (cm–3)

1020 1020

1018 1018
Région de collecteur Région de collecteur
peu dopée peu dopée

1016 1016

1014 1014
N+ P N– N+ N+ P N– N+

1012 1012
0 20 40 60 80 100 120 140 160 0 20 40 60 80 100 120 140 160
Abscisse de position (µm) Abscisse de position (µm)

a triple diffusion b multiépitaxie

Composants de tension de maintien VCEO 500 V

Figure 1 – Exemples de profils d’impuretés pour les transistors bipolaires de puissance

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Contacts Contacts Contact Contact Contact


de base d'émetteur de base d'émetteur de base

+ N+ +
P

N+ N+
P P P

1
N–

N
N+
N+
Contact de collecteur
Contact de collecteur
trous électrons
métal (aluminium)
oxyde (silice) métal (aluminium)
oxyde (silice)
Figure 2 – Structure de transistor bipolaire : vue en coupe
Figure 3 – Focalisation périphérique : orientation générale des lignes
de flux de porteurs (courant base de sens normal)
1.2 État passant
Les caractéristiques de sortie, tracées à courant base IB constant, de courant IC contrôlé, la tension de déchet (tension collecteur-
ont typiquement l’allure en « double cassure » indiquée sur la figure émetteur VCE) et l’intensité IB de la commande, et, d’autre part, les
4a dans un cas d’exemple idéalisé. Par rapport aux caractéristiques performances dynamiques, à l’ouverture et à la fermeture.
qui résulteraient d’un pur « effet transistor » (cf. [D 3 102], § 2.3.3), la
différence provient principalement de la chute de tension établie par
le courant collecteur IC dans la résistance RC de la région faiblement 1.2.1 Mécanisme de quasi-saturation
dopée de collecteur. Cette résistance n’est pas fixe : selon le niveau
de concentration et la répartition des porteurs injectés dans le L’exemple choisi pour fixer les idées est celui d’une structure
collecteur, elle est modulée et, lorsque diminue le gain « forcé » N+PN–N+ à collecteur homogène (épaisseur WC = 70 µm, dopage
IC /IB, varie de la valeur RC0 qu’elle présente en régime de fonction- ND = 1,5.1014 cm –3, surface SC = 0,2 cm2, soit une résistance
nement normal jusqu’à devenir presque négligeable. On doit donc RC0 ≈ 1 Ω à 300 K). Pour simplifier, on suppose la base P étroite
distinguer ici, entre le régime normal (non saturé) et le régime (charge stockée négligeable dans cette région), la durée de vie des
saturé vrai, un régime intermédiaire, dit quasi saturé. C’est dans ce porteurs très élevée (recombinaisons négligeables). Les caractéristi-
régime que l’on situe le point de fonctionnement passant, pour ques de sortie théoriques, dont on donne au paragraphe 1.2.2 les
mettre à profit des compromis possibles entre, d’une part, le niveau éléments de justification, sont déployées sur la figure 4a.

Région faiblement dopée de collecteur

IC (A) 20 N+ P N– N+
Saturation IC = VCE /RC0

1,6 1,4 1,2 1 0,8 0,6 0,4 Concentrations de porteurs (en 1016 cm–3)
5
15

4
Quasi-saturation Régime normal IC = 15 A
10
3
IB = 0,2 A

2
5

1
1,6
IB = 0,4 A 0,6 0,8 1 1,2 1,4
0
0 5 10 15 20 0
0 10 20 30 40 50 60 70
VCE (V)
Abscisse x (µm)

a caractéristiques de sortie b répartition des porteurs dans le collecteur

Figure 4 – Caractéristiques de sortie idéalisées et évolution des répartitions de porteurs dans le collecteur en quasi-saturation

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COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE BIPOLAIRES. PARTIE 2 ______________________________________________________________________

La résistance du collecteur est modulée lorsque la jonction collec-


teur-base du transistor est polarisée en direct, et que, au voisinage e c
de cette jonction, les concentrations de porteurs en excès devien- Émetteur Base p (x ) Collecteur N– N+
nent supérieures à la concentration du dopant (situation de forte N+ P
Jn1 Jn(x ) Jn2 – JC
injection). Cela se produit lorsque la chute de tension dans le collec- JE JC
teur approche la valeur de la tension collecteur-émetteur VCE, p1
forçant par conséquent la polarisation interne de la jonction base- E
C
collecteur à s’opposer à celle de la jonction base-émetteur. Cet argu- QSB Jp(x ) Jp2 0

1 ment suffit pour indiquer, comme critères d’entrée en quasi-


saturation : JpE JpB Jp1

x1
p (x ) n (x )
x2 x
V CE  WI
I C > ----------  JB
R C0 
ou, réciproquement :  (1)
 B
V CE < R C0 I C 
 Figure 5 – Schématisation d’un transistor N+PN–N+ : notations et
La figure 4b représente les répartitions de porteurs dans le collec- sens de référence
teur, pour des états de saturation de plus en plus accusée, à niveau
de courant imposé (IC = 15 A) et courant base IB croissant. Il est
important de remarquer que, pour les conditions de fonctionnement peuvent être précisées toutes les grandeurs utiles (cf. expression
envisagées, les concentrations de porteurs dans la zone de stockage (14) de [D 3 106] pour la charge stockée QS, par exemple) :
adjacente à la jonction collecteur-base, sont très supérieures à la
concentration du dopant (ND = 1,5.1014 cm –3), ce qui justifie  2 eDn p 1
l’approximation p ≈ n (quasi-neutralité, haute injection). Par ailleurs, WI = D τ Argsh  --------------------- (2)
en régime statique, et dans la mesure où les recombinaisons sont  JC D τ 
négligeables, le courant collecteur est véhiculé essentiellement par
des électrons (|In | ≈ IC , Ip ≈ 0) ; dans ces conditions, le gradient de Si, comme dans le cas décrit par la figure 4b, la durée de vie τ est
concentration commun aux électrons et aux trous est constant très élevée, on a simplement :
(cf. [D 3 106], équation 1), ce qui explique la linéarité des réparti- 2 eDn p 1
tions figurées. W I = --------------------
- (3)
JC
On voit que, lorsque croît le degré de saturation de la jonction
collecteur-base (c’est-à-dire la concentration des porteurs à la jonc- En régime saturé, la zone de stockage envahit tout le collecteur
tion), à courant collecteur fixé (c’est-à-dire à pente de répartition des (WI = WC) et les relations (16), (17) et (18) de [D 3 106] conduisent
porteurs maintenue constante), la zone de stockage s’étend dans le cette fois à la concentration p2. Les expressions des différentes
collecteur. La chute de tension dans ce collecteur décroît donc en grandeurs s’en déduisent de manière également explicite.
raison, à la fois, de son envahissement par la zone de stockage et de En régime normal, la zone de stockage est évidemment absente
la modulation de conductivité de cette zone. La saturation vraie (WI = 0).
intervient quand la zone de stockage, parfois appelée « base
induite » dans ce contexte, occupe toute la région faiblement dopée ■ Stockage de porteurs dans la base et effet transistor
de collecteur. À l’opposé, quand le gain forcé IC /IB tend vers le gain En fonction des produits de concentrations de porteurs (pn)e et
normal, la jonction collecteur-base se polarise en inverse, avec (pn)c aux jonctions encadrant la base, le courant d’électrons collecté
développement d’une charge d’espace dépeuplée : le fonctionne- Jn1 s’exprime sous la forme (effet transistor, cf. [D 3 102], § 2.3.2,
ment redevient alors conforme au schéma classique (cf. [D 3 102], résultats transcrits ici pour un transistor NPN) :
§ 2.3.3 « régime normal »).
eD nB
J n1 = ---------------------- [ ( pn ) e – ( pn ) c ] (4)
1.2.2 Éléments de modélisation
Base
∫ p dx

Une description plus précise nécessite de prendre en considéra-


tion l’impact, sur l’effet transistor même, du stockage de porteurs En raison du dopage élevé de la base, la constante de diffusion des
dans le collecteur et aussi dans la base, ainsi que l’effet des recom- électrons (DnB) peut être sensiblement plus faible que dans le collec-
binaisons. teur (Dn). En régime normal de fonctionnement, on a (pn)c ≈ 0 (jonc-
La figure 5, qui se réfère à l’unité de surface active, précise, en tion collecteur-base polarisée en inverse). En quasi-saturation ou
termes de densités, les notations et sens de référence choisis pour saturation établie, on peut en pratique poser (pn)c ≈ p 1 par raison de
2
l’analyse. On a indiqué, en surimpression, une répartition type des
porteurs dans la région faiblement dopée de collecteur, en quasi- continuité, à la jonction collecteur-base, avec la zone de stockage en
saturation. haute injection.
L’intégrale figurant en dénominateur de l’expression (4) porte sur
■ Stockage de porteurs dans le collecteur la concentration des porteurs majoritaires ; compte tenu de la quasi-
En ce qui concerne la région faiblement dopée de collecteur, et neutralité de la région de base, il est commode de poser :
particulièrement la région de stockage, les résultats généraux du

∫p ∫N ∫n
paragraphe 1.4 de [D 3 106] s’appliquent sans restriction.
e dx ≈ e A dx + e dx = Q B + Q SB (5)
En quasi-saturation, on a simplement p2 ≈ 0 et Jp2 ≈ 0 en x2 (conti-
nuité avec la zone de drift dépeuplée en porteurs minoritaires) ; en Base Base Base
x1, la concentration p1 dépend, à niveau de courant JC donné, de ce qui conduit à réécrire l’expression (4) sous la forme :
l’effet transistor qui joue au niveau de la base P. En supposant
connue cette concentration, il est facile de déterminer, par les rela- e D nB
2
2
tions (16), (17) et (18) de [D 3 106]) l’épaisseur WI = x2 – x1 de la base J n1 ≈ ------------------------- ( pn ) e – p 1 (6)
induite (c’est-à-dire de la zone de stockage), à partir de laquelle Q B + Q SB

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La charge QB des impuretés de base, par unité de surface, est d’un collecteur uniformément dopé, pour lequel une solution analy-
souvent désignée comme le « nombre de Gummel » du transistor. tique peut être établie, l’intégrale doit être calculée numériquement.
La charge QSB est celle des porteurs injectés, en transit dans la Les tensions VBE et VBC* sont liées par l’approximation de Boltz-
région de base. On peut estimer QSB, à fort niveau d’injection, en mann respectivement aux produits (pn)e et (pn)c :
admettant que la répartition des porteurs minoritaires dans la base
est linéaire, prolongeant celle du collecteur, comme indiqué sur la
figure 5 ; on peut alors écrire : ( pn ) e 
V BE = U T ln --------------
- 

1
2
QSB ≈ τB|Jn1| + eWBp1 (7) ni 
 (13)
où WB est l’épaisseur de base P et τB le temps de transit à fort niveau ( pn ) c 
d’injection, défini pour le régime normal de fonctionnement par V BC∗ = U T ln --------------
2
- 
l’expression (cf. [D 3 102], § 2.3.3, relation (99) retranscrite ici pour ni 

une base P) :
2 La tension VBC puis la tension collecteur-émetteur VCE = VBE – VBC
WB peuvent être ainsi précisées.
τ B = -------------
- (8)
4 D nB

L’expression (7) représente une bonne approximation lorsque la 1.2.3 Caractéristiques statiques
charge QSB est plus grande que QB. Dans le cas contraire, l’erreur
commise s’estompe dans la somme QSB + QB et n’a plus aucune
conséquence à faible niveau d’injection où QSB << QB. ■ Récapitulation
Les caractéristiques statiques d’un transistor peuvent être décri-
■ Courant base
tes de diverses façons à partir des formulations précédentes. En
La densité de courant base JB est la somme de trois composantes. quasi-saturation par exemple, pour un niveau de courant JC fixé, on
La première est la densité de courant de trous JpE à la jonction peut prendre la concentration p1 comme variable intermédiaire, ce
émettrice et a pour expression : qui conduit explicitement à l’épaisseur de base induite WI (expres-
sion (2)), à la répartition p(x) des porteurs et à la charge stockée QSC
JpE = ehE (pn)e (9) dans le collecteur (expressions (13) et (14) en [D 3 106]), à la densité
de courant de recombinaison Jp1 (expression (11)) et, par suite, à
où le paramètre hE qui caractérise l’émetteur N+ en tant que puits de Jn1 ; par la relation (1) de [D 3 106] avec :
recombinaison a généralement une valeur de l’ordre de 1.10 –14 à
2.10 –14 cm4.s –1 à 300 K. J p (x ) = – J C – J n (x )
La deuxième correspond aux recombinaisons dans la région de
base même (cf. [D 3 102], § 2.3.4) : (cf. sens de référence sur la figure 5), on détermine aussi la réparti-
tion Jn(x) pour le calcul de l’intégrale figurant dans l’expression (12).
Q SB Avec p1 et |Jn1| connus, on peut par ailleurs préciser la charge stoc-
J pB = ----------
- (10) kée QSB dans la base (expression (7)), le produit de concentrations
τ
(pn)e (expression (6)), par suite les densités de courant JpB et JpE
la durée de vie τ pouvant éventuellement différer de celle qui [relations (9) et (10)] et la densité de courant base :
s’applique à la région de collecteur.
JB = JpE + JpB + Jp1.
La troisième, qui n’existe qu’en régime quasi saturé ou saturé,
alimente les recombinaisons dans la région de collecteur : Les valeurs de tensions se déduisent des grandeurs précédentes
(expressions (12) et (13)).
Q SC
J p1 = ----------
- (11) Des cheminements similaires sont faciles à établir pour les condi-
τ tions de régime normal ou de régime saturé.
où la charge stockée QSC dans le collecteur est donnée par l’expres- Exemples :
sion (14) de [D 3 106].
La figure 6a déploie les caractéristiques de « sortie » IC(VCE) à cou-
On doit remarquer que le flux de trous à la jonction collecteur- rant base IB constant calculées pour le transistor « triple diffusé » de
base est de même sens que le flux d’électrons collectés (c’est-à-dire profil d’impuretés représenté sur la figure 1a. Les valeurs de paramè-
que les densités de courant correspondantes se retranchent). tres sont :
■ Tensions aux bornes WC = 70 µm ; ND = 1,5.1014 cm –3 ; QB = 5.10 –6 C/cm2 ;
Les tensions entre contacts s’obtiennent en ajoutant aux tensions hE = 1,6.10 –14 cm4.s –1 ; WB = 13 µm ; τ = 20 µs.
de jonction les chutes de tension dans les régions d’accès. C’est
bien sûr de la résistance du collecteur dont il faut tenir compte en Avec une surface de collecteur SC = 0,2 cm2, ces valeurs définissent
tout premier lieu, et on peut simplement poser, pour la tension une structure qui, à titre indicatif, pourrait être classée 15 A, 500/
base-collecteur « externe » (cf. § 1.6 en [D 3 106]) : 1 000 V dans les feuilles de spécification d’un fabricant. La tempéra-
ture de cristal supposée est 300 K :
Jn
V BC = V BC∗ –

Collecteur
- dx
-------------
e µn n
(12) ni ≈ 1,2.1010 cm –3 ; Dn ≈ 36,5 cm2/s ; Dp ≈ 12,6 cm2/s ;
on a pris DnB ≈ 21,2 cm2/s.
Dans cette expression, VBC* désigne la tension de jonction. L’inté- Les interactions porteurs-porteurs (cf. [D 3 106], § 1.7) ne pouvant être
grale, qui représente la chute de tension dans le collecteur, peut être ignorées à fort niveau de courant, les constantes de diffusion ont été
restreinte, en pratique, à la région faiblement dopée. L’intervalle ajustées, par une procédure simplement itérative, en fonction des con-
d’intégration peut être divisé en deux segments, zone de stockage et centrations moyennes de porteurs dans chacune des régions. Les
zone de « drift » où on peut respectivement poser, pour les concen- caractéristiques ainsi obtenues ne diffèrent pas sensiblement de celles
trations d’électrons : n ≈ p + ND et n ≈ ND. Sauf dans le cas simple que l’on observe expérimentalement.

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IC (A) 20 IC (A) 20
4A
4A 3 2 1,4 1 3 2 1,4
0,8
0,6 1
15 15 0,8

1
0,6
0,4
0,4
10 10

IB = 0,2 A IB = 0,2 A

5 5

0 0
0 5 10 15 20 0 5 10 15 20

VCE (V) VCE (V)


a transistor triple diffusé b transistor multiépitaxié

T = 300 K

Figure 6 – Caractéristiques statiques de transistors différant principalement par le profil d’impuretés dans la région de collecteur (cf. figure 1)

La figure 6b montre, selon les mêmes formulations, les caracté- stockage (modulée en résistivité) étant comparativement faible. On
ristiques du transistor multiépitaxié dont le profil d’impuretés est a ainsi, pour un collecteur homogène :
représentés sur la figure 1b. Les paramètres sont les mêmes que
V CE
dans le cas précédent, à l’exception des paramètres de profil, de la W I ≈ W C – eµ n N D ---------- (15)
profondeur de base (WB = 9 µm) et de la constante de diffusion JC
DnB (≈ 18,7 cm2/s pour une base plus dopée). On voit que le profil
À très fort niveau de courant collecteur, quelle que soit la tension
d’impuretés multiépitaxié offre la possibilité de modeler différem-
VCE imposée, WI tend vers WC, c’est-à-dire que la zone de stockage
ment les caractéristiques et de contrôler en quasi-saturation, au
envahit la presque totalité de la région de collecteur. Aussi, avec
moins dans un certain domaine (approximativement : VCE < 5 V ;
τCJC >> QB dans ces conditions, le comportement asymptotique du
IB > 1 A), des niveaux de courant collecteur plus élevés (IC de 10 à
gain en fonction du niveau de courant est du type :
plus de 20 A).
2
4 eD n
■ « Compromis » courant-tension h FE ≈ ----------------------
- (16)
2
Lorsque l’on ignore les recombinaisons (τ → ∞, répartition p (x) h E W C JC
linéaire, WI donné par l’expression (3) et |Jn1| = JC, Jp1 = 0,
JB = JpE) et le stockage de charges dans la base P (base étroite, Cette expression, encore que très approximative, éclaire le
QSB << QB), et que l’on considère le collecteur comme homogène, la « compromis » entre la tension blocable par le transistor et le
description des caractéristiques est beaucoup plus simple, analyti- courant admissible dans l’état passant. Elle indique en effet que,
que de bout en bout. Les caractéristiques de la figure 4a ont été pour un gain fixé hFEF (gain « forcé »), le courant maximal ICmax qu’il
ainsi « idéalisées » en conservant les valeurs des paramètres princi- est possible de faire transiter est de l’ordre de :
paux (WC , ND , QB , hE , SC) du transistor « triple diffusé » que
2
l’on vient d’examiner. Par comparaison avec la figure 6a, on voit 4 eD n S C
que ces simplifications ne nuisent pas à l’essentiel. I Cmax ≈ ----------------------------
2
- (17)
h E W C h FEF
On peut établir, dans ces conditions simplifiées, que le gain en
courant hFE = JC /JB a pour expression :
Or, il existe une relation du type WC ∝ V 7/6 entre l’épaisseur de la
région faiblement dopée de collecteur et la tension blocable (cf.
eD n
h FE = ----------------------------------------------------
- (14) [D 3 104], § 2.3). Par ailleurs, le paramètre hE est peu dépendant de
Dn
h E  ---------- Q B + τ C J C
 la structure et des conditions de réalisation des émetteurs fortement
D nB dopés (valeur minimale de l’ordre de 10 –14 cm4.s –1 à 300 K). La
capacité en courant des transistors bipolaires est donc limitée par
2 une loi asymptotique du type :
WI
où τ C = ----------
- représente le temps de transit des porteurs dans la
4 Dn – 7⁄ 3
V
zone de stockage du collecteur. Ce gain, déterminé par le produit I C max ∝ S C -------------
hEQB en régime normal (WI = 0), décroît donc lorsque le point de h FEF
fonctionnement entre dans la région de quasi-saturation. et ce, indépendamment des considérations de dissipation thermi-
L’épaisseur WI peut être évaluée en considérant que la tension que. Cette loi restreint l’emploi des transistors bipolaires en haute
collecteur-émetteur VCE, en quasi-saturation, est principalement tension (> 1 000 V), imposant, pour des conditions de commande
supportée par la zone de drift, la chute de tension dans la zone de acceptables (hFEF de quelques unités), un accroissement de surface

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Semi-conducteurs de puissance
unipolaires et mixtes (partie 1)
1
par Philippe LETURCQ
Professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées deToulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS (LAAS)

1. Principes généraux .................................................................................. D 3 108 - 2


1.1 Composants unipolaires ............................................................................. — 2
1.2 Composants mixtes unipolaires-bipolaires............................................... — 7
2. Diodes Schottky ....................................................................................... — 8
2.1 Structure type .............................................................................................. — 8
2.2 Caractéristique statique directe.................................................................. — 9
2.3 Caractéristique statique inverse ................................................................. — 10
2.4 Comportement dynamique......................................................................... — 11
2.5 Diode « Schottky-bipolaire »....................................................................... — 12
3. Transistors à effet de champ de jonction et composants dérivés — 13
3.1 Généralités ................................................................................................... — 13
3.2 Caractéristiques statiques des transistors à effet de champ.................... — 13
3.3 Comportement dynamique......................................................................... — 17
3.4 Composants bipolaires dérivés............................................................ — 18
Indices et accents ............................................................................................. — 19
Notations et symboles .................................................................................... — 20
Transistors MOS (Métal-Oxyde-Semiconducteur) .................................... D 3109
IGBT (Insulated Gate - Bipolar - Transistor) et autres
associations MOS - bipolaires .............................................................. D 3109

ans les composants semi-conducteurs unipolaires, le transport du courant


D est assuré par les seuls porteurs majoritaires de la région de « base » large
et peu dopée qui confère aux dispositifs leur tenue en tension. Cette région de
base n’est donc pas modulée en conductivité ; aussi le « compromis » de perfor-
mances offert entre tension bloquée et courant passant est-il a priori moins favo-
rable, pour une même surface de cristal, que pour les composants bipolaires.
Par contre, en l’absence de phénomènes de stockage de porteurs minoritaires,
les composants unipolaires sont intrinsèquement plus rapides. Deux avantages
connexes doivent être soulignés :
— une très forte résistance d’entrée des dispositifs commandés (transistors),
grâce à la possibilité de contrôler le flux de porteurs majoritaires par effet
de champ (effet de champ de jonction, effet de champ Métal-Oxyde-
Semiconducteur) ;
— une grande stabilité thermique latérale sous polarisation directe, en raison
du coefficient de température négatif de la mobilité des porteurs ; cette stabilité
autorise la réalisation de composants de fort calibre en courant, avec une grande
surface active, par intégration parallèle de cellules élémentaires.
Parution : novembre 2001

Les possibilités des effets unipolaires et bipolaires apparaissent complé-


mentaires. Leur association dans des structures de composants hybrides offre

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41
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SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE UNIPOLAIRES ET MIXTES (PARTIE 1) ________________________________________________________________________

des degrés de liberté supplémentaires dans l’arbitrage des compromis de per-


formances entre tenue en tension, capacité en courant, temps et pertes de com-
mutation. L’exemple le plus important industriellement est l’IGBT (Insulated-
Gate-Bipolar -Transistor) mais bien d’autres dispositifs « mixtes », aux potentia-
lités variées, apparus au cours des deux dernières décennies, procèdent de cette
démarche.

1 La répartition en deux articles des analyses relatives aux composants unipolai-


res et mixtes est motivée uniquement par des contraintes de place. Il s’agit en
réalité d’un ensemble.
Nota : le lecteur se reportera, pour les notions préalables, à l’article [D 3 102] « Physique des semi-conducteurs de
puissance » ainsi qu’à l’article [D 3 104] qui traite de la « Tenue en tension des semi-conducteurs de puissance » ; le lecteur aura
également intérêt, pour ce qui touche aux composants « mixtes » à consulter les articles [D 3 106] et [D 3 107] relatifs aux
« Composants semi-conducteurs de puissance bipolaires », notamment les paragraphes 1.1 à 1.6 de [D 3 106].

1. Principes généraux l’indispensable « base », surtout lorsqu’on recherche de fortes ten-


sions blocables, la structure de ces composants est généralement
« verticale », les régions de contact terminales (fortement dopées
par rapport à la base) étant formées sur les faces opposées de la pla-
quette. Il existe cependant des structures MOS « latérales », mises
1.1 Composants unipolaires en œuvre dans des circuits intégrés de petite puissance (cf.
[D 3 109], § 1.1).
La qualification d’unipolaire indique que le transport du courant ■ Les diodes Schottky (figure 1 a) mettent en jeu les propriétés
est assuré par un seul des deux types de porteurs. Il s’agit des por- de redressement des contacts métal-semiconducteur du même nom
teurs majoritaires de la région large et peu dopée qui, dans tous les (cf. [D 3 102], § 2.2). Ces composants sont utilisés, avec profit, dans
cas, constitue le « cœur » d’un composant de puissance. Cette les applications de basse tension exclusivement (typiquement quel-
région, que nous désignons comme « base », dans un sens géné- ques dizaines de volts). À l’état passant, en effet, la chute de tension
rique (cf. article D 3 104, § 1), mais qui peut recevoir, cas par cas, des dans un contact Schottky est nettement inférieure à la tension de
appellations plus spécifiques, joue un rôle essentiel : elle offre à la jonction d’une diode bipolaire, à paramètres de base et densité de
charge d’espace de la jonction bloquante la place de se développer courant comparables. Cet avantage disparaît lorsque l’épaisseur et
et détermine donc la performance de tenue en tension ; elle consti- la résistivité de la couche N− exigées par la tenue en tension rendent
tue, à l’état passant, une part importante de la résistance apparente sensible, dans la chute de tension totale, la contribution ohmique de
du dispositif, d’autant que, en absence d’injection de porteurs mino- la région de base (non modulée en conductivité). Par ailleurs, en rai-
ritaires, il n’y a pas d’effet modérateur de modulation de conducti- son des valeurs élevées du courant inverse, la tenue en tension des
vité. Le type N s’impose donc pour le matériau de base, afin de diodes Schottky peut se trouver limitée par des problèmes thermi-
mettre à profit la plus grande mobilité des électrons, et les paramè- ques, en deçà même des possibilités théoriques de blocage du
tres d’épaisseur et de dopage dont dépendent directement, mais matériau de base ou de la terminaison de jonction.
dans des sens contraires, la tension blocable et le courant admis-
sible doivent être déterminés de manière assez stricte (cf. § 1.1.2). ■ Les transistors à effet de champ Métal-Oxyde-Semiconduc-
En corollaire de l’absence de modulation de conductivité dans la teur (MOS, cf. [D 3 102], § 2.4) et de jonction (JFET, cf. [D 3 102],
région de base, on n’observe pas d’effet de stockage lié au transit § 2.5), comparés à leurs homologues bipolaires, présentent, un cer-
des porteurs injectés, contrairement aux composants bipolaires. Les tain nombre d’avantages, outre leur rapidité. D’une part, la puis-
charges mobilisées en régime dynamique se réduisent à celles qui sance de commande est négligeable dans les états statiques bloqué
sont emmagasinées dans des capacités vraies, capacités de transi- et conducteur (grande résistance d’entrée). D’autre part, ces compo-
tion des jonctions et capacités des empilements métal-isolant-métal sants ont une très bonne stabilité thermique latérale, le coefficient
ou métal-isolant-semiconducteur. Les composants unipolaires sont de température du courant de drain, à tensions de grille et drain
donc intrinsèquement « rapides », avec des pertes de commutation imposés, étant négatif, comme celui de la mobilité des porteurs. Des
réduites, ce qui compense, dans les applications de commutation de composants de forte capacité en courant peuvent ainsi être réalisés
haute fréquence, le handicap d’une performance de conduction par mise en parallèle dans un cristal de surface suffisante du nom-
relativement médiocre (cf. § 1.1.3). bre voulu de « cellules » élémentaires, toujours de petites dimen-
sions, comme celles représentées schématiquement sur les
figures 1 b (JFET) et 1 c (MOS). Par contre, la résistance apparente
1.1.1 Principales structures à l’état passant, qui, rapportée à l’unité de surface de cristal, peut
être sensiblement inférieure à celle des transistors bipolaires tant
que le calibre en tension est réduit (jusqu’à 200 V approximative-
La figure 1 montre les structures de principe des composants de ment), augmente dans tous les cas très vite avec la tension blocable
puissance unipolaires les plus importants : diode Schottky à contact (~V 2,5), ce qui constitue un lourd handicap. Ce handicap peut être
redresseur métal-semiconducteur, transistor à effet de champ de surmonté par une réalisation particulière de la région de base incor-
jonction ou JFET (Junction-Field-Effect-Transistor), aussi désigné porant une « superjonction » (cf. [D 3 104], § 4), mais cette technolo-
comme SIT (Static-Induction-Transistor), transistor à effet de champ gie est délicate et coûteuse.
Métal-Oxyde-Semiconducteur (TMOS). Les mécanismes de fonc-
tionnement fondamentaux sont analysés dans l’article « Physique L’importance industrielle des transistors MOS va croissante,
des semi-conducteurs de puissance » [D 3 102]. Pour une pleine uti- même pour des domaines d’application où les transistors bipolai-
lisation de l’aire de conduction offerte par le cristal et pour ménager res conservent une supériorité de performances : la relative simpli-

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________________________________________________________________________ SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE UNIPOLAIRES ET MIXTES (PARTIE 1)

Cathode Grille Source Source Grille

Contact ohmique P+ N+ P+ N+ N+
P+ P P P+
N+ (substrat)

N–
N– N–
1
N+ N+
Contact Schottky

Anode Drain Drain

a diode Schottky b transistor JFET (SIT) c transistor MOS

orientation générale du flux d'électrons (état passant)


métal (contact Schottky)
métal (contact ohmique)
oxyde (silice)
silicium polycristallin

Figure 1 – Schémas de structure des principaux composants unipolaires

cité de leur commande qui facilite la conception et la mise au point des


circuits, et permet de réduire globalement les coûts, est souvent consi- P+ N N+
dérée par les électroniciens de puissance comme un avantage décisif.
Par contre les transistors JFET, malgré l’intérêt de leur principe, n’ont
jusqu’à présent connu que des développements marginaux. Zone de drift
Région P+
ou Substrat
1.1.2 « Compromis » entre tension bloquée contact W Contact
et résistance de la zone de drift Schottky de drain
(ou de
cathode)
Quel que soit le dispositif unipolaire, la résistance de la région de
base apparaît d’emblée, en l’absence de tout effet de modulation de
conductivité, comme une contribution critique à la résistance appa-
rente à l’état passant, d’autant plus que la tension blocable est plus Figure 2 – Schéma unidimensionnel pour l’analyse du « compromis »
élevée. tension bloquée/résistance de la zone de drift
Pour la diode Schottky, l’exact parallélisme des interfaces, termi-
naisons de jonction mises à part, autorise un cadre d’analyse
unidimensionnel : la région de « base » est identifiable sans ambi- d’épaisseur qui minimisent la résistance de drift, pour une tension
guïté à la couche N− comprise entre le contact Schottky proprement bloquée donnée.
dit et le « substrat » N+. Cette région se divise en deux zones : une
zone de charge d’espace, dépeuplée, et une zone de « drift », quasi
■ En se restreignant, pour simplifier, au cas d’une base homogène,
neutre dans les conditions de fonctionnement habituelles, dans
la résistance Rd de la zone de drift, relative à l’unité de surface
laquelle les porteurs se déplacent essentiellement par conduction ;
active, a pour expression :
sous polarisation directe, la zone de charge d’espace régressant, la
zone de drift occupe la quasi-totalité de la région de base.
W
Pour les transistors, où le courant de porteurs majoritaires est R d ≈ ---------------------- (1)
contrôlé par effet de champ dans des « cellules » MOS ou JFET dis- eµ n N D
posées en surface du cristal selon des motifs répétés à haute den-
sité, il convient de réserver l’appellation de zone de drift à la tranche où W est l’épaisseur de la couche et ND son dopage ; e représente la
de la région de base quasi neutre située au-delà du plan limitant les charge élémentaire (= 1,602 · 10−19 C) et µn la mobilité des porteurs
caissons ou grilles P+, en mettant à part les zones d’accès (MOS) ou majoritaires.
de canal (JFET). L’approximation unidimensionnelle des lignes de
courant est encore admissible dans la zone de drift sous réserve que ■ En l’absence d’injection de porteurs minoritaires, c’est la tension
le pas de répétition des cellules soit nettement inférieur à l’épais- de claquage VB qui limite la tension blocable. Celle-ci ne dépend
seur de cette zone : c’est généralement le cas pour les dispositifs de que de ND lorsque l’épaisseur de la région N est suffisante pour que
haute tension. la charge d’espace de la jonction bloquante puisse s’étendre libre-
On peut alors raisonner, en première analyse, sur le schéma géné- ment. Elle dépend à la fois de ND et de l’épaisseur W dans le cas
ral de la figure 2 : la zone de drift se confond, dans l’état passant, contraire où, au claquage, on a « punch-through » (perçage), c’est-à-
avec la région faiblement dopée de la jonction bloquante. Le pro- dire que la zone de charge d’espace occupe toute la région faible-
blème est de déterminer les valeurs des paramètres de dopage et ment dopée et vient « buter » sur la région limitante N+.

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SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE UNIPOLAIRES ET MIXTES (PARTIE 1) ________________________________________________________________________

P+ N P+ N N+ -1 -1 -2
R (Ω · cm )
E (x ) E (x) 5 d
10
uEMu
uEMu
4
10

1
3
10
0 WT x 0 W x
a dans le cas d'extension libre b situation de perçage 2
10
de la charge d'espace

Figure 3 – Répartitions de champ électrique au claquage,


pour une base homogène 10

● Dans l’hypothèse d’un étalement libre de la charge d’espace, la 1


tension de claquage VB est donnée, en fonction du dopage, par la 2 3 4
relation approximative (cf. [D 3 104], § 2.3) : 10 10 10 10
Tension blocable (V)
14 3 ⁄ 4
 10 
V B ≈ 1850  -------------- (2) Figure 4 – Compromis entre résistance de drift et tension blocable
ND (configuration « non punch-through »)
avec ND exprimé en cm−3 pour VB en volts.
Le champ électrique EM à la jonction métallurgique et l’étendue
WT de la charge d’espace, au claquage, sont alors donnés par les électrique, de la jonction métallurgique à l’interface NN+, est alors
expressions classiques (cf. [D 3 104], § 2.1) : assez ample pour que l’essentiel de la multiplication par avalanche
s’effectue dans un voisinage étroit de la jonction métallurgique et
2 eN D V B 2ε V B qu’en conséquence le champ EM au claquage soit indépendant de W.
EM ≈ ---------------------------- et W T ≈ ---------------- Des considérations géométriques simples sur la forme trapézoï-
ε eN D
dale de la répartition de champ dans ces conditions (figure 3 b)
où ε représente la permittivité du silicium (= 1,04 · 10−12 F/cm) ; on a conduisent à l’expression :
négligé la tension de diffusion. On peut réécrire, en fonction de VB = W EM – VP
ND seul :
où VP représente la tension de perçage (cf. [D 3 104], expression (8)) :
3 ,7 ⋅ 10 17 e  N D  1 ⁄ 8
EM ≈ ----------------------------------  -------------- (3) eN D W 2
ε 10 14 V P = ------------------------- (6)

3 ,7 ⋅ 10 –11 ε  1014 7 ⁄ 8  En exprimant E M en fonction de ND, par la relation (3), on
WT ≈ ------------------------------------  --------------
e (4) obtient :
ND
La répartition de champ, dans ces conditions, a la forme triangu- 3 ,7 ⋅ 10 17 e  N D  1 ⁄ 8 eN D W
2
laire indiquée par la figure 3 a. V B = W -----------------------------  ----------- – --------------------- (7)
ε 10 14 2ε
Il serait évidemment pénalisant de faire choix d’une épaisseur de
base supérieure à ce qui est nécessaire ; aussi, l’option dite « non À tension de claquage VB imposée, il existe donc une relation
punch-through » dans la définition des paramètres de base des dis- obligée entre l’épaisseur W et le dopage ND et, parmi l’infinité de
positifs unipolaires consiste-t-elle à faire choix d’une épaisseur de la couples de valeurs (W, ND) possibles, c’est évidemment celui qui
région N peu dopée égale à l’extension « libre » WT de la charge minimise la valeur de la résistance de drift Rd qui doit être retenu.
d’espace au claquage. Il est alors facile d’établir, à partir des expres-
sions (1), (2) et (4), la relation nécessaire entre la résistance Rd de la ■ Pour poursuivre l’analyse, il est commode de réécrire la relation
zone de drift et la tension de claquage VB ; en prenant (7) en rapportant le dopage ND d’une part, l’épaisseur W d’autre
µn ≈ 1 300 cm2/(V · s) comme ordre de grandeur (la mobilité µn part, à la concentration d’impuretés N D* et à l’étendue W T* de la
dépend sensiblement, en réalité, du dopage et de la température), charge d’espace que nécessiterait l’obtention de la même tension de
on a approximativement : claquage VB dans l’hypothèse d’un développement libre (non
punch-through) ; on a alors l’équation :
R d ≈ 5 ⋅ 10 –9 V B 2 ,5 (5)
ND 1⁄8
 W 2  N D W
avec Rd en Ω · cm2 pour VB en volts. Cette relation traduit de manière ---------
-  ----------*- – 2  ---------
- ----------- + 1 = 0
synthétique le « compromis » fondamental entre résistance de drift et N D* WT N D* W T*
tension blocable pour les composants unipolaires, représenté graphi- Ainsi, entre valeurs relatives, la relation entre épaisseur et dopage
quement sur la figure 4 en terme de conductance R –d1 . des configurations « punch-through » apparaît unique, quelle que
● Si l’épaisseur W de la région de base est inférieure à celle de soit la tension de claquage imposée :
l’extension libre de la charge d’espace (situation de perçage ou
punch-through) la tension de claquage peut être facilement évaluée
en admettant que le champ de claquage à la jonction métallurgique W  N D
–7 ⁄ 8   N D
3⁄4 
conserve, pour ND donné, la même valeur que dans le cas précédent ----------- =  ----------
W T* N D*
1 – 1 –  ----------
N D*
 (8)
(non punch-through). C’est effectivement le cas pour des valeurs du
produit WND d’au moins quelques 1011 cm−2 ; la variation du champ
 

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Semi-conducteurs de puissance
unipolaires et mixtes (partie 2)
1
par Philippe LETURCQ
Professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS (LAAS)

Principes généraux ........................................................................................... D 3 108


Diodes Schottky et composants dérivés.................................................... D 3 108
Transistors à effet de champ de jonction et composants dérivés ...... D 3 108
1. Transistors MOS (Métal-Oxyde-Semiconducteur) ........................... — 2
1.1 Principales structures MOS de puissance ................................................. — 2
1.2 Caractéristiques d’état passant .................................................................. — 3
1.3 Caractéristiques dynamiques ..................................................................... — 8
1.4 Limitations.................................................................................................... — 14
2. IGBT (Insulated-Gate-Bipolar-Transistor) ........................................... — 15
2.1 Structure et principe de fonctionnement des IGBT .................................. — 15
2.2 Caractéristiques d’état passant .................................................................. — 17
2.3 Comportement dynamique......................................................................... — 20
2.4 Limitations.................................................................................................... — 22
2.5 Autres associations MOS-bipolaires.......................................................... — 22
Notations et symboles ................................................................................... — 24

ette deuxième partie de l’étude des composants de puissance unipolaires


C et mixtes est principalement consacrée au transistor Métal-Oxyde-Semi-
conducteur et aux dispositifs qui en dérivent. En continuité avec l’article
[D 3 108] pour ce qui touche aux composants unipolaires, elle se fonde par
ailleurs, pour les composants mixtes, sur les principes généraux des compo-
sants bipolaires, tels qu’ils sont présentés dans l’article [D 3 106].
L’apparition des transistors Métal-Oxyde-Semiconducteur de puissance, puis
de toute une gamme de composants plus complexes où sont combinés l’effet de
champ MOS et des mécanismes d’injection bipolaires, a accompagné, pendant
la décennie 1980, un changement radical de conception dans le domaine des
composants de l’électronique de puissance : la commande MOS « isolée » et
l’association en parallèle, dans le même cristal, d’un nombre élevé de compo-
sants ou « cellules » élémentaires (jusqu’à plusieurs millions d’unités) résout
l’apparente incompatibilité des technologies de puissance classiques et des
technologies purement microélectroniques. Les dispositifs étudiés ici sont donc
déjà des composants de puissance intégrés, les formes les plus abouties étant
décrites dans l’article [D 3 110] « Intégration de puissance ».
Parution : février 2002

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1. Transistors MOS (Métal- comparables à celles des dispositifs microélectroniques : de l’ordre


de quelques micromètres à la dizaine de micromètres pour le pas de
Oxyde-Semiconducteur) répétition, de l’ordre du micromètre pour la longueur L du canal ;
par contre, la « largeur » cumulée des canaux MOS se compte en
mètres ou dizaines de mètres pour un centimètre carré de surface
de cristal, avec une densité de cellules qui peut être de l’ordre de
Les transistors de puissance à effet de champ Métal-Oxyde-Semi-
quelques 104 à 107 par centimètre carré. Les épaisseurs de couche,
conducteur mettent en jeu les mêmes principes physiques que les
d’une fraction de micromètre à quelques micromètres pour les dif-

1
composants MOS de la microélectronique (cf. article [D 3 102],
fusions qui définissent les régions de source et les caissons P, sont
§ 2.4). La structure est toutefois différente, pour répondre aux exi-
imposées, pour la région N− de drain (couche généralement épi-
gences de capacité en courant et de tenue en tension propres aux
taxiée), par les exigences de tenue en tension (cf. [D 3 104], § 2.3 et
applications de puissance, avec pour aménagements principaux :
[D 3 108], § 1.1.2).
— l’intégration en parallèle, dans un cristal unique, d’un nombre
suffisant de cellules élémentaires toutes identiques, connectées aux ■ Par rapport aux transistors bipolaires, les transistors MOS pré-
mêmes contacts terminaux de source, de grille et de drain (capacité sentent, pour les applications de puissance, un certain nombre
en courant) ; d’avantages.
— l’incorporation dans la jonction de drain d’une région large et
● Le courant de commande est quasi nul dans les régimes de
peu dopée dans laquelle peut se développer la charge d’espace en
fonctionnement statiques ou lentement variables (la commande est
situation de blocage (tenue en tension).
« isolée », mais cet attribut n’est plus justifié en haute fréquence ou
commutation rapide).
● En l’absence d’effets de stockage de porteurs, propres aux
1.1 Principales structures MOS composants bipolaires, les performances dynamiques des transis-
de puissance tors MOS sont généralement bien supérieures.
● Les composants MOS sont thermiquement stables, car le coef-
ficient de température du courant drain, à tensions grille et drain
■ La disposition générale est verticale (V-MOS : Vertical MOS) ou imposées, est négatif, lié à celui de la mobilité des porteurs ; cette
horizontale (L-MOS : Lateral MOS) ; les variantes sont nombreuses. propriété est précisément celle qui permet de réaliser des compo-
La figure 1 schématise les principales : « VDMOS » (D pour sants de fort calibre en courant par intégration parallèle du nombre
« diffused »), la plus classique, et « Trench V-MOS » (structure « à suffisant de cellules MOS élémentaires dans un même cristal, sans
tranchées ») ; la structure latérale « LDMOS » est plutôt réservée à préjudice pour l’homogénéité de la répartition de courant et sans
des composants de faible capacité en courant dans un contexte risque d’instabilité thermique latérale ; mais les transistors MOS ne
d’intégration de puissance (cf. [D 3 110]). Si la structure LDMOS con- sont pas à l’abri, pour les mêmes raisons, d’un emballement ther-
serve l’organisation de principe des dispositifs MOS microélec- mique global, à courant total imposé.
troniques (cf. [D 3 102], § 2.4.1), les structures « verticales » V-MOS
confient à la région N+ de drain le rôle mécanique du substrat et à un Par contre, la région de drain faiblement dopée, qui détermine la
« caisson » PP+ son rôle électrique. La grille est généralement réa- tenue en tension, n’est pas modulée en conductivité dans l’état pas-
lisée en silicium polycristallin de type N, fortement dopé. sant, contrairement à la région de collecteur des transistors bipolai-
res. Le compromis de performances entre tension blocable et
■ Les formes géométriques des cellules sont diverses. Pour les courant admissible est donc moins favorable que dans le cas des
structures verticales, la figure 2 représente les agencements les dispositifs bipolaires, pour une même surface de cristal, sauf pour
plus courants avec, pour paramètres principaux, le pas de répétition les composants de basse tension (< 300 V) où la contribution de la
d + ᐉ des caissons et leur espacement d. Les dimensions sont région de drain à la résistance apparente totale est plus réduite.

Contact
Oxyde Grille de source
épais Oxyde Grille
Contact Contact Grille Contact
Oxyde épais Oxyde Grille
de source Contact de drain de drain
mince mince
de source
N+ N+ N+ N+ N+ N+ N+ N+ N+ N+ P+ N+ N+
P P N– P P P P P P P P
P+ P+ P+ P+
N– Canaux
Canaux Canaux N– N– N–
Canaux Canaux Oxyde Oxyde +
N– N–
épais mince N
N+
N+ Contact de drain

Contact de drain

a transistor VDMOS b transistor MOS à tranchées c transistor LDMOS

métal de contact oxyde (silice) silicium polycristallin orientation générale du flux d'électrons

Figure 1 – Principales structures MOS de puissance

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correspond qu’à un volume restreint, approximativement délimité,


sous la grille, par l’affleurement, à l’interface silice/silicium, des
jonctions de source et de drain, et s’étendant à quelque profondeur
dans le caisson P pour englober la zone de charge d’espace superfi-
ᐉ cielle. Les caractéristiques courant-tension de la structure complète
se déduisent donc des caractéristiques « intrinsèques » en ajoutant,
d aux tensions supportées par le canal, les chutes de tension dans les
résistances d’accès. C’est, en tout premier lieu, de la résistance de

a bandes parallèles b carrés alignés


drain RD dont il faut tenir compte et on peut simplement poser, pour
la tension drain-source « externe » :
* +R I
1
V DS = V DS D D (1)
*
où V DS désigne la tension drain-source « interne » et ID le courant
drain.

1.2.1 Caractéristiques « intrinsèques »

■ Pour une tension grille-source VGS supérieure à la tension de


seuil VT, et une tension V DS * inférieure à la tension de saturation
c hexagones d triangles (ou de pincement) V D* sat , c’est-à-dire en régime de fonctionnement
dit « non pincé » ou encore « ohmique », le courant drain a pour
Figure 2 – Exemples de géométries de cellules VDMOS expression approchée (cf. [D 3 102], relations (114) et (113)) :

V DS * 2
I D = K P ( V GS – V T ) V DS
* – --------------- (2)
Contact Grille 2
de source
KP étant le facteur de pente donné par :

N+ N+ N+ N+ µ nc ZC ox
P P P K P = ----------------------- (3)
L
P– N– P– N– P– où Z et L désignent la largeur développée et la longueur de canal
respectivement, et Cox = εox /Wox représente la capacité de l’oxyde
de grille par unité de surface, εox étant la permittivité de l’oxyde
(εox = 3,41 · 10−13 F/cm pour la silice) et Wox son épaisseur.
N+
■ Une complication provient de ce que la mobilité µnc des électrons
Contact de drain dans le canal n’est pas déterminée de manière aussi simple que
dans le volume semi-conducteur (cf. [D 3 102], § 1.2.1). Il s’agit en
métal de contact effet d’une mobilité « moyenne » dans une couche d’inversion où
oxyde (silice) les concentrations de porteurs varient fortement sur de courtes dis-
tances et où la topographie du champ électrique est complexe, avec
silicium polycristallin
une composante normale à la surface qui dépend étroitement de la
Figure 3 – Structure de principe d’un transistor MOS à superjonction tension grille et une composante longitudinale liée à la tension sup-
portée par le canal. En outre, la rugosité de l’interface (« surface
roughness ») est à l’origine d’une réduction de µnc, en relation avec
les imperfections de la technologie. Aussi, pour limiter la complexité
Cet inconvénient peut cependant être minimisé dans les disposi-
de l’analyse, est-on amené à poser :
tifs à « superjonction » dont la figure 3 donne un aperçu de la struc-
ture. Avec un dopage symétrique, même largeur et un pas de µ nc 0
répétition suffisamment petit, les zones verticales P et N alternées se µ nc = ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (4)
trouvent dépeuplées dans l’état bloqué, permettant d’approcher la [ 1 + ( V DS ⁄ Ψ X ref ) ] [ 1 + ( V GS – V T ) ⁄ Ψ Y ref ]
*
tension blocable théorique d’une jonction PIN (cf. [D 3 104], § 4). La
conduction à l’état passant est assurée par les régions N verticales, où les tensions de référence ΨX ref et ΨY ref, qui permettent de ren-
dont le dopage peut être plus élevé que ce qui est normalement dre compte au premier ordre de l’influence des composantes res-
requis dans les structures classiques. La résistance de drain est ainsi pectivement longitudinale et transversale du champ électrique, et la
sensiblement réduite, pour une tenue en tension fixée, malgré la mobilité µnc0 doivent être considérées comme paramètres caracté-
perte de 50 % de la surface de conduction qu’impose la présence ristiques des composants d’un même type.
des zones P, alors passives. La faisabilité de tels dispositifs est La valeur de µnc0 est habituellement comprise entre 300 et
démontrée, et leur production industrielle débute (1999-2000). 600 cm2/(V · s) à T0 = 300 K. L’influence de la température T est assez
bien traduite par une loi du type :

T – αµ
1.2 Caractéristiques d’état passant µ nc 0 ( T ) = µ nc 0 ( T 0 )  ------ (5)
T 
0

où αµ est un exposant dont la valeur est généralement proche de 1,5.


L’effet de champ métal-oxyde-semiconducteur, tel qu’analysé
dans l’article [D 3 102] (§ 2.4.1 à 2.4.5), joue au niveau de la structure Les paramètres ΨX ref et ΨY ref sont liés à des caractéristiques
MOS « intrinsèque » c’est-à-dire de la région de « canal ». Celle-ci ne dimensionnelles (longueur de canal L et épaisseur d’oxyde Wox res-

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47
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D3109

SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE UNIPOLAIRES ET MIXTES (PARTIE 2) ________________________________________________________________________

pectivement) et aux valeurs « critiques » du champ électrique pour


lesquelles se manifeste le phénomène de saturation de vitesse de Canal d'inversion Couche accumulée
dérive des porteurs. Pour la composante longitudinale du champ
dans le canal, cette valeur critique est indiquée par le rapport
v ᐉn ⁄ µ nc 0 où v ᐉn représente la vitesse limite des électrons Contact de source Grille
(≈ 107 cm/s) ; en conséquence, ΨX ref est de l’ordre de Lv ᐉn ⁄ µ nc 0 ,
Source N+

1
soit quelques volts par micromètre de longueur de canal. La valeur P Racc
Caisson P+ Ri
critique du champ transversal est plus élevée que celle du champ
longitudinal, et le coefficient de proportionnalité approximative de
ΨY ref à l’épaisseur d’oxyde est typiquement de 250 V/µm. R'i
Rd
■ La tension de seuil VT dépend, outre de paramètres de structure Région de drain N–
(épaisseur d’oxyde, dopage en surface des caissons P, nature du
matériau de grille...), de nombreux facteurs plus ou moins bien maî-
trisés, tels que les densités de charges piégées à l’interface silice/sili- Substrat N+
cium et dans l’oxyde même. Aussi doit-on la considérer comme un
paramètre caractéristique de chaque composant, même si les
Contact de drain
valeurs sont, pour un même lot de fabrication, habituellement bien
centrées. En général comprise entre 1,5 et 4 V à 300 K, la tension de Figure 4 – Contributions principales à la résistance de drain
seuil décroît lorsque la température augmente, dépendance bien d’un transistor VDMOS
représentée par une loi du type :
VT = VT (T0) [1 − γ (T − T0)] (6)

où VT (T0) est la tension de seuil à la température de référence T0 et Couche accumulée


γ un coefficient de l’ordre de 2 · 10−3 K−1.
Grille Grille Grille
■ En raison de la dépendance de la mobilité effective µnc vis-à-vis
de la tension drain « interne » V DS* [expression (4)], la tension de xP Caisson P Caisson P
saturation V D* sat , pour laquelle la dérivée partielle ∂ID /∂VDS
s’annule, n’est pas égale à la différence VGS − VT, ce qui serait le cas
pour KP constant (cf. [D 3 102], expression (109)), mais est donnée dd ᐉ
par la relation : W
Zone de drift N–
2 ( V GS – V T )
V D* sat = Ψ X ref 1 + -------------------------------- – 1 (7) Substrat N+
Ψ X ref
* > V*
Pour V DS D sat , c’est-à-dire en régime « saturé », le courant Figure 5 – Caricature des lignes de courant pour le calcul
drain conserve approximativement la valeur ID sat qu’il atteint à la de la résistance de drain d’un transistor VDMOS
*
frontière ( V DS = V D* sat ), tant que les effets de réduction de lon-
gueur de canal (cf. [D 3 102], § 2.4.5) et de multiplication par avalan-
che demeurent négligeables. trées par la figure 5 pour le cas de la structure VDMOS, à titre
d’exemple.
1.2.2 Résistance de drain ● La couche accumulée, lorsqu’elle existe en continuité avec le
canal d’inversion, distribue le courant de canal dans l’espace entre
caissons. L’établissement de cette couche d’accumulation résulte
La résistance de drain RD détermine la chute de tension d’actions électrostatiques de même nature que celles qui contrôlent
*
V DS – V DS entre le contact terminal de drain et le débouché du canal l’apparition de la couche d’inversion. L’évaluation de Racc procède
dans la région N−. Les lignes de courant esquissées sur la figure 1 des considérations suivantes.
soulignent le caractère distribué, pluridimensionnel, de cette résis-
tance. Pour des estimations d’ordre de grandeur, on peut toutefois — La charge Qacc des porteurs mobiles (électrons) par unité de
localiser des contributions principales à RD, diversement combinées surface est proportionnelle à la tension supportée par la couche
selon les types de structure et leurs particularités géométriques. La d’oxyde de grille :
figure 4 indique ces contributions pour une structure VDMOS, sous Qacc ≈ − Cox[VGS − ΨS]
forme d’un schéma de résistances, le canal étant pour sa part repré-
senté par une source de courant contrôlée : Le potentiel de surface ΨS, avec la source pour référence, dépend,
— résistance apparente Racc de la couche accumulée en surface, en principe, des coordonnées de position, mais on peut l’assimiler,
*
sous la grille, pour V GS > V DS ; pour des calculs d’ordre de grandeur, à la tension drain-source
*
« intrinsèque » V DS
— résistances Ri et R i′ associées à l’espace intercellulaire, l’une
placée en série, l’autre en parallèle vis-à-vis de la résistance Racc ; — Dans un modèle simplement bidimensionnel, la résistance dR
— résistance de « drift » Rd c’est-à-dire de la résistance de la d’un élément de « longueur » de couche accumulée, dont la
région N−, large et peu dopée, non modulée en conductivité, qui, « largeur » correspond à celle du canal, serait ainsi donnée par la
entre les caissons P et le substrat N+, définit la tenue en tension. relation :
Des schémas similaires peuvent être établis pour les transistors dx dx
en tranchées et les structures LDMOS. d R = ----------------------------- = ---------------------------------------------------------
-
µ naZ Q acc µ na ZC ox [ V GS – V DS * ]
■ Il est assez facile d’estimer ces différentes résistances dans l’état
« passant » (soit pour V DS * << V
GS – V T ), en consentant les où µna représente la mobilité effective des porteurs dans la couche
approximations nécessaires à un développement analytique, illus- accumulée. La résistance apparente Racc est définie comme le rap-

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D3109

________________________________________________________________________ SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE UNIPOLAIRES ET MIXTES (PARTIE 2)

port de la tension supportée par la couche d’accumulation au cou-


Canal Couche
rant drainé ID, soit : d'inversion d'accumulation
d⁄2
Contact
1 i ( x )d x

de source Grille
R acc = ----- ----------------------------------------------------------
ID µ na ZC ox [ V GS – V DS * ]
Source N+ Source N+
0 P P
où i(x) représente le courant collecté par la couche d’accumulation à Charge d'espace dépeuplée Charge d'espace dépeuplée
partir du milieu x = 0 de l’espace intercellulaire ; i(x) est fonction
croissante de zéro en x = 0 à la valeur ID du courant total drainé en
x = d/2.
Région de drain N–

a effet de quasi-saturation ou effet « JFET »


1
La détermination de la résistance Racc nécessite la connaissance
Canal
de la répartition i(x) du courant collecté. En supposant uniforme d'inversion
cette répartition i ( x ) = 2I D x ⁄d , on parvient à l’estimation : Contact
de source Grille
d
R acc ≈ ------------------------------------------------------------
- (8) Source N+ Source N+
4µ na ZC ox [ V GS – V DS * ] P P

● Dans une approximation unidimensionnelle, et en supposant Charge d'espace dépeuplée WCE


uniforme, comme précédemment la distribution du courant, la
résistance Ri de l’espace intercaissons, entre la couche d’accumula- Région de drain N–
tion et la région de drift, est donnée simplement par l’expression :
b disparition de la couche d'accumulation et extension de la charge
2 xP d'espace dépeuplée pour de fortes tensions de drain
R i ≈ --------------------------- (9)
e µ n N D dZ Figure 6 – Représentations schématiques des limites de charge
d’espace et orientations générales du flux de porteurs
où xP représente la profondeur des caissons, ND le dopage de base
pour différents cas de polarisation
et e la charge élémentaire : µn est ici la mobilité des électrons en
volume.
La résistance R i′ , dans le cas des structures VDMOS, est celle qui −
● Dans les dispositifs à région N peu dopée et/ou distance d
serait « vue » entre le plan limitant de la région intercellulaire et le
réduite, les charges d’espace dépeuplées qui se développent à partir
débouché des canaux, en l’absence de couche accumulée. On peut
des caissons P dans la région N− tendent à « fermer » l’espace inter-
l’ignorer dans les conditions de l’état passant, où elle est shuntée
cellulaire, comme dans un transistor JFET (Junction – Field – Effect
par la résistance Racc + Ri.
– Transistor, cf. [D 3 108], § 3). La concentration des lignes de courant
● Un modèle unidimensionnel n’est par contre pas applicable à la drain vers le milieu de l’intervalle entre caissons, illustrée sur la
résistance de « drift » en raison de l’épanouissement des lignes de figure 6 a, a pour conséquence l’augmentation des trois résistances
courant. En faisant l’hypothèse simplificatrice d’un étalement uni- Racc, Ri, et Rd. Cet effet de « quasi-saturation », surtout sensible dans
forme à 45˚ du flux de porteurs issu du plan limitant de la région les composants de haute tension, peut nécessiter, à distance d don-
intercellulaire (cf. figure 5), on est conduit à la formulation née, un surdopage de la région intercellulaire, afin de reporter la
suivante : tension de pincement JFET au-delà du domaine de tension drain
1 correspondant normalement à l’état passant.
R d ≈ ---------------------- f ( W, d, ᐉ ) (10) ● L’expression (8) de Racc indique une croissance d’allure hyper-
e µn ND Z
bolique en fonction de la tension drain. Cependant, lorsque la ten-
avec, pour W < ᐉ ⁄ 2 , c’est-à-dire sans recouvrement des flux à 45˚ sion drain n’est pas faible devant VGS, les variations du potentiel de
issus de cellules voisines : surface ΨS selon la distance aux caissons P ne peuvent être
ignorées, ce qui est une autre cause de non-linéarité de Racc. En
2W
f ( W, d, ᐉ ) = ln  1 + --------- (11) outre, la continuité du canal d’inversion et de la couche d’accumula-
 d  tion se trouve rompue au pincement du canal, c’est-à-dire pour
* ⭓ V*
et, pour W > ᐉ ⁄ 2 , le flux devenant quasi unidimensionnel au-delà V DS D sat , ce qui limite le rôle de la couche d’accumulation dans
de la jonction des flux à 45˚ : la répartition du courant drain. Enfin, la couche d’accumulation elle-
même disparaît pour V DS * ⭓ V * , remplacée par une charge
GS
ᐉ 2W – ᐉ d’espace dépeuplée, qui s’étend en profondeur et se raccorde à la
f ( W, d, ᐉ ) = ln  1 + --- + ------------------ (12) zone de transition des jonctions PN− de caissons. Les électrons issus
 d d+ᐉ
de l’extrémité du canal d’inversion sont alors directement balayés
Dans ces formules, W représente l’épaisseur de la couche N− de la par le champ électrique vers la zone de drift (figure 6 b). Dans ces
région de drain sous les caissons P, ᐉ la largeur des caissons et d conditions, le canal d’inversion joue, à VGS fixé, le rôle de source de
leur espacement. courant constant ID sat, la charge d’espace, entre l’extrémité du canal
● La résistance totale de drain est donnée, à partir des éléments et la limite de la région neutre N−, supporte la différence de potentiel
* – V*
précédents, par : V DS D sat , et, pour des tensions drain élevées, la résistance de
drain se réduit à la seule résistance de drift dont la valeur décroît
RD = Rd + Ri + Racc (13) avec l’extension WCE de la charge d’espace.
Des formulations approximatives similaires s’appliquent aux dif-
férents types de structures (LDMOS, transistors à tranchées) et à 1.2.3 Caractéristiques de sortie ID(VDS) à VGS = Cte
leurs variantes géométriques (cellules triangulaires, carrées ou
hexagonales...). Les tendances générales exprimées par les Même approximatives, les formulations des paragraphes 1.2.1 et
expressions (8) à (13) sont conservées. 1.2.2 rendent bien compte des performances des transistors MOS
■ À tension drain-source croissante, l’évolution de la résistance de puissance à l’état passant et de l’influence des paramètres de
de drain est compliquée par l’intervention de divers mécanismes. structure.

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1

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D3110

Composants semi-conducteurs
Intégration de puissance monolithique
par Jean-Louis SANCHEZ
1
Directeur de Recherche au CNRS
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS
et Frédéric MORANCHO
Maître de Conférences à l’Université Paul Sabatier deToulouse
Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes du CNRS

1. Circuits intégrés de puissance............................................................. D 3 110 - 3


1.1 Composants de puissance intégrables ...................................................... — 4
1.1.1 Structures MOS de puissance conventionnelles ............................. — 4
1.1.2 Limites du silicium.............................................................................. — 6
1.1.3 Nécessité de nouvelles approches : superjonction.......................... — 6
1.2 Architectures d’isolation ............................................................................. — 8
1.2.1 Auto-isolation...................................................................................... — 9
1.2.2 Technologies d’isolation par jonction ............................................... — 9
1.2.3 Technologies à isolation diélectrique ou SOI ................................... — 9
1.3 Conception et application des circuits intégrés de puissance ................. — 9
1.3.1 Quelles fonctions intégrer ?............................................................... — 9
1.3.2 Applications automobiles .................................................................. — 9
1.3.3 Applications industrielles................................................................... — 10
1.3.4 Applications électroniques portables................................................ — 10
2. Intégration fonctionnelle ....................................................................... — 10
2.1 Spécificité ..................................................................................................... — 10
2.1.1 Associations bipolaires/bipolaires .................................................... — 10
2.1.2 Associations MOS/bipolaires............................................................. — 10
2.1.3 Intégration de fonctions spécifiques................................................. — 12
2.2 Évolution de l’intégration fonctionnelle .................................................... — 15
2.2.1 Intégration de composants magnétiques......................................... — 15
2.2.2 Intégration de condensateurs............................................................ — 15
2.2.3 Refroidissement intégré ..................................................................... — 15
2.2.4 Vers une intégration 3D hétérogène ................................................. — 15
Références bibliographiques ......................................................................... — 16

n électronique de puissance, les fonctions sont principalement liées aux


E opérations de contrôle et de conversion de l’énergie électrique. Ainsi, les
semi-conducteurs de puissance sont principalement destinés à des fonctions
d’interrupteur dans la mise en œuvre des convertisseurs d’énergie (redresseur,
hacheur, onduleur, etc.). Toutefois, des fonctions spécifiques de protection des
équipements électriques mettent également en jeu des semi-conducteurs de puis-
sance. Les premiers composants de puissance (diodes, transistors bipolaires, thy-
ristors) permettant de contrôler des tensions et des courants élevés furent
commercialisés dans les années 1950 et, depuis, les composants semi-conduc-
teurs se sont progressivement substitués aux solutions électromécaniques pour la
réalisation des convertisseurs d’énergie. Dans les années 1970, les structures de
type MOS (Métal/Oxyde/ Semi-conducteur), caractérisées par une impédance
d’entrée élevée, ont permis de s’affranchir des commandes en courant des dis-
positifs de puissance purement bipolaires. Les premiers transistors MOS de
Parution : février 2007

puissance ont donc vu le jour, préfigurant les nombreux composants de

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COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS ______________________________________________________________________________________________________

puissance basés sur l’association des technologies MOS et bipolaires. Ainsi, au


cours des années 1980, un pas technologique fut franchi avec l’IGBT (Insulated
Gate Bipolar Transistor) qui est devenu le composant de puissance le plus uti-
lisé pour les applications de moyenne puissance. Depuis une vingtaine
d’années, l’intégration en électronique de puissance s’est développée, tirée par
des marchés spécifiques comme l’automobile, l’éclairage ou l’électroménager.
Suivant les niveaux de puissance et les contraintes à supporter, les solutions
1 d’intégration sont monolithiques ou hybrides. Dans ce dossier, nous évoque-
rons l’intégration monolithique et ses deux grandes familles que sont l’intégra-
tion de puissance de type « Smart Power » et l’intégration fonctionnelle.
L’intégration hybride est traitée dans le dossier suivant [D 3 111].
Bien que les performances à optimiser pour les composants de puissance
soient différentes de celles des circuits intégrés, l’évolution des composants de
puissance au cours des vingt dernières années est étroitement liée aux progrès
des technologies microélectroniques réalisés dans le domaine des circuits inté-
grés. En effet, l’essor important des circuits intégrés du traitement du signal et
de l’information s’est accompagné d’un important effort de recherche qui a
conduit au développement de nouveaux procédés technologiques et à la réduc-
tion des dimensions.
La synergie entre les domaines de la puissance et du traitement du signal a
été déclenchée par l’introduction des technologies MOS dans les dispositifs de
puissance. Les performances en termes de résistance à l’état passant des struc-
tures MOS verticales de puissance (VDMOS) ont été nettement améliorées par
la réduction des dimensions qui a permis d’augmenter le nombre de cellules
par unité de surface. L’IGBT, qui est actuellement l’un des dispositifs les plus
utilisés en électronique de puissance, est une retombée directe de ces travaux.
Les dispositifs « Smart Power » mixant des dispositifs de puissance à
commande MOS et des circuits de traitement du signal illustrent parfaitement
cette tendance.
La réalisation technologique de ces nouvelles fonctions de puissance inté-
grées peut se traiter de deux façons soit en favorisant l’optimisation de la
partie puissance, soit en privilégiant la fonctionnalité aux dépens des éléments
de puissance. Les dispositifs « Smart Power » et HVIC (« High Voltage Integra-
ted Circuits ») correspondent davantage à la première approche et sont réalisés
à partir de filières technologiques de type circuits intégrés (CMOS ou BiCMOS).
Les dispositifs de puissance discrets intelligents et l’intégration fonctionnelle
procèdent de la deuxième approche et sont basés sur des technologies de
composants de puissance. (0)

Tableau de symboles Tableau de symboles (suite)


ABS Antiblockiersystem (système anti-blocage) Cs Condensateur de stockage
AC Switch Interrupteur en alternatif (AC) DB Diode de blocage
ASD Application Specific Discrete (composants dis- DMOS Double-diffused MOS transistor
crets pour applications spécifiques) (transistor MOS double-diffusé)
BiCMOS Bipolar Complementary Metal Oxide DSP Digital Signal Processor
Semi-conductor (processeur de signal numérique)
BRT Base resistance controlled thyristor EEPROM Electrically Erasable Programmable Read Only
Memory
BVdss Tenue en tension/tension de claquage (en volts
dans les formules) EC Champ électrique critique
CAN Controller Area Network EPROM Erasable Programmable Read Only Memory
CEM Compatibilité Électro-Magnétique EST Emitter switched thyristor
CMOS Complementary Metal Oxide Semi-conductor H Épaisseur des couches N et P des transistors
et diodes à Superjonction
CVD Chemical Vapor Deposition (dépôt chimique
en phase vapeur haute pression) h Épaisseur de la couche de conduction

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D3110

______________________________________________________________________________________________________ COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS

Tableau de symboles (suite) 1. Circuits intégrés


HVIC High Voltage Integrated Circuits (circuits intégrés de puissance
haute tension)
IGBT Insulated Gate Bipolar Transistor Les progrès technologiques ont permis d’intégrer sur une même
(transistor bipolaire à grille isolée) puce les composants de puissance et les circuits analogiques
comportant une logique complexe et même parfois des mémoires.

1
JFET Junction Field Effect Transistor
(transistor à effet de champ à jonction) Ainsi, les premiers circuits intégrés de puissance pour des applica-
tions faible tension sont apparus dès 1985, quinze ans après les
Ld Longueur de la région de drift débuts de l’intégration des composants de signal, sous deux formes,
LDMOS Lateral Double-diffused MOS transistor les circuits Smart Power et les circuits HVIC. La différence entre les
(transistor latéral MOS double-diffusé) technologies utilisées pour la conception de ces deux types de circuit
vient essentiellement de l’agencement de l’élément de puissance et
LOCOS LOCal Oxidation in Silicon des gammes en courant et en tension traitées : en Smart Power, le
(oxydation locale du silicium)
composant de puissance, généralement seul, peut être horizontal ou
LPCVD Low-Pressure Chemical Vapor Deposition vertical (DMOS), alors que pour les HVIC, le composant de puissance
(dépôt chimique en phase vapeur basse pression) est latéral et optimisé pour supporter des tensions importantes à
Mc l’état bloqué (LDMOS). Les HVIC sont des circuits multisorties
Transistor MOS de coupure
pouvant supporter des tensions jusqu’à quelques centaines de volts
Md Transistor MOS de délai mais présentant des densités de courant très faibles inhérentes aux
composants latéraux utilisés. Au contraire, les composants Smart
MCT MOS Controlled Thyristor (thyristor commandé
par MOS) Power, plus performants en termes de densités de courant, peuvent
transiter des courants de plusieurs ampères avec néanmoins des
MOS Métal Oxyde Semi-conducteur tensions blocables inférieures à celles des HVIC. Dans ce type de
NA Densité de dopage de la région P fonctions, la partie logique et analogique du circuit, réalisée en tech-
nologie NMOS, CMOS ou bipolaire, doit être parfaitement isolée du
ND Densité de dopage de la région N composant de puissance subissant des contraintes importantes en
NMOS Transistor MOS à canal N terme de courant, tension, di /dt et dv /dt.
Les premières générations de dispositifs intégrés de puissance
PHV Région P soutenant la haute tension
(High Voltage) furent réalisées avec une technologie utilisée pour la conception
des composants de puissance, ne permettant pas, par conséquent,
PZT Céramiques ferroélectriques possédant d’atteindre des densités d’intégration très grandes. Les nouvelles
de bonnes caractéristiques piézoélectriques générations de composants Smart Power sont conçues à partir de
q Charge électrique élémentaire technologies VLSI qui permettent la conception de composants de
puissance capables de supporter des tenues en tension de l’ordre
RAM Random Access Memory (mémoire vive) de 100 V en utilisant des techniques d’isolation (isolation entre les
R CC Résistance de court-circuit éléments de puissance et l’électronique de commande) dévelop-
pées ces dernières années comme l’auto-isolation, l’isolation par
R délai Résistance de délai jonction et l’isolation par diélectrique. Ces différentes techniques
RESURF REduced SURFace electric field (champ ne permettent pas d’assurer des isolations supérieures à quelques
électrique réduit en surface) centaines de volts : ainsi, bien que la technologie Smart Power ait
apporté au composant de puissance une « autonomie intelligente »
RIE Reactive lon Etching (gravure ionique réactive) qu’il ne possédait pas jusqu’alors, elle trouve ces limites dans les
ROM Read Only Memory (mémoire morte) méthodes d’isolation électrique. À l’heure actuelle, les composants
Smart Power ne peuvent donc être utilisés que dans le domaine
RON Résistance à l’état passant des faibles puissances, comme dans l’automobile et les télé-
Sense FET Miroir de courant communications. Les technologies Smart Power permettent d’inté-
grer des circuits digitaux complexes (DSP) et des
S Surface active d’un transistor microcontrôleurs.
SOI Silicon On Insulator (silicium sur isolant) Alors que, dans les premiers circuits Smart Power, la surface du
VAN Vehicle Area Network composant de puissance était souvent supérieure à celle de la par-
tie « circuit intégré », la tendance est inversée dans les nouveaux
Vds Tension drain-source circuits intégrés de puissance qui se caractérisent par une inté-
Vgs Tension grille-source gration poussée de nouvelles fonctionnalités. Cette tendance est
accompagnée par une réduction des règles de dessin et des filières
VDMOS Vertical Double-diffused MOS transistor technologiques évoluées. La figure 1 présente un schéma bloc de
(transistor vertical MOS double-diffusé) ce type de circuit que l’on peut qualifier de « nouveau Smart
VLSI Very Large Scale Integration Power ».
(intégration à très grande échelle) On peut distinguer trois parties : les circuits d’interface, les cir-
WN Épaisseur de la région N cuits de contrôle et de traitement du signal et l’élément de puis-
(ou de la région de drift N–) sance. Au niveau des circuits d’interface, la tendance consiste à
remplacer les circuits bipolaires par des circuits BiCMOS présen-
WP Épaisseur de la région P tant des performances plus intéressantes. Les circuits de traite-
εs Permittivité absolue du silicium ment du signal correspondent à des fonctions CMOS présentant
une faible puissance de consommation et une forte densité d’inté-
µn Mobilité des électrons gration. Dans la perspective d’augmenter la fonctionnalité, des
µp Mobilité des trous mémoires peuvent également être intégrées. L’élément de puis-
sance, en général un ou plusieurs transistors MOS, fait l’objet de
ρ Résistivité ce paragraphe.

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53
Référence Internet
D3110

COMPOSANTS SEMI-CONDUCTEURS ______________________________________________________________________________________________________

Mémoires
Traitement RAM, EPROM,
Interface
du signal ROM, EEPROM
d'entrée
analogique,
analogique Interface
numérique,
Alimentation bipolaire de sortie Actionneurs
CMOS
de puissance Capteur de puissance

1 Composants de puissance
(souvent des DMOS)

Figure 1 – Schéma bloc d’un circuit DSP

SiO2 Grille Grille


Source
Drain Id Id
SiO2
SiO2 Drain SiO2 Source

N+ P+ Ra N+ P
+
N+ P+ N+ N+ P+
P Rch P
P
Rch P
Région de drift N–
Ra
RN+ (couche épitaxiée Rd WN RN+ Région de drift N–
dopée N D) (couche épitaxiée Rd
dopée N D)

Substrat P Couche enterrée N+ Substrat P Couche enterrée N+


a VDMOS up-drain b VDMOS à tranchées up-drain

Id Id

Grille SiO2 Grille SiO2


Source Drain Source Drain
P+ N+ N+ h P+ N+ N+
Rch Ra Rd
P
Ld P Couche épitaxiée N–

Région de drift N–
(couche épitaxiée dopée N D)
Substrat P–

Substrat P Couche enterrée N+

c LDMOS d LDMOS RESURF

Figure 2 – Coupes schématiques d’une cellule élémentaire d’un transistor de puissance : paramètres géométriques et localisation des principales
composantes de leur résistance à l’état passant

1.1 Composants de puissance intégrables miques (cf. [D 3 109, § 1.3]) déjà exposées dans ce dossier. Nous
présenterons ici les versions intégrables des transistors VDMOS et
Les dispositifs de puissance sont généralement basés sur des LDMOS.
technologies DMOS, permettant de réaliser des structures verticales
(VDMOS) ou latérales (LDMOS). 1.1.1.1 Transistor VDMOS
La structure VDMOS – Vertical Double diffusé MOS –, stabilisée
1.1.1 Structures MOS de puissance depuis plus de vingt ans et utilisée universellement à quelques
conventionnelles détails près, est représentée sur la figure 2a : il s’agit ici non pas
d’un composant discret mais d’un composant intégrable avec
Les transistors à effet de champ métal/oxyde/semi-conducteur d’autres composants de « signal » analogiques ou logiques. Par
(MOS) de puissance conventionnels ont fait déjà l’objet d’un rapport à la structure VDMOS discrète, le courant de drain est ici
dossier (cf. [D 3 109]). Nous ne reviendrons donc pas ici dans le ramené en surface par des caissons N+ profonds ; c’est une tech-
détail sur les caractéristiques statiques (cf. [D 3 109, § 1.2]) et dyna- nique communément appelée up-drain. Les multiples avantages et

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54
Référence Internet
D3112

Semi-conducteurs de puissance
Problèmes thermiques (partie 1)
par Jean-Marie DORKEL
1
Docteur ès sciences
Professeur à l’Institut national des sciences appliquées de Toulouse
Chercheur au LAAS/CNRS de Toulouse

1. Origine de la limitation en température de fonctionnement ...... D 3 112 - 2


1.1 Pertes à l’état passant.................................................................................. — 2
1.2 Pertes à l’état bloqué ................................................................................... — 2
1.3 Pertes de commutation ............................................................................... — 3
1.4 Cas général................................................................................................... — 3
2. Environnement thermique des composants de puissance ........... — 3
2.1 Substrats, boîtiers et radiateur ................................................................... — 3
2.2 Principaux mécanismes de transfert de chaleur ....................................... — 4
2.3 Refroidissement des composants ou circuit intégré de puissance ......... — 5
3. Évaluation de la température de jonction ........................................ — 5
3.1 Définition pratique de la température de jonction.................................... — 5
3.2 Notion de résistance thermique ................................................................. — 6
3.3 Notion de réponse thermique transitoire .................................................. — 8
3.4 Recours au calcul tridimensionnel ............................................................. — 14
Références bibliographiques ......................................................................... — 19

es articles D 3 100 à D 3 109 font une introduction à la physique des compo-


L sants de puissance et décrivent les principes électriques et physiques mis à
profit pour réaliser des composants discrets ou intégrés de puissance. Le rôle
premier de ces composants de puissance est de servir d’interrupteur dans les
circuits de conversion de l’énergie électrique, bloquant des tensions importantes
et véhiculant des courants forts. Dans ces conditions, qu’il s’agisse de compo-
sants de puissance discrets, ou de composants de puissance intégrés sous une
forme hybride ou monolithique, le propre de ces dispositifs est de dissiper sous
forme de chaleur une certaine puissance électrique. Cette puissance électrique
dissipée sous forme de chaleur, qui dans la plupart des cas est négligeable par
rapport à la puissance électrique convertie, peut cependant être importante
même lorsque les composants opèrent dans des conditions de fonctionnement
parfaitement normales. Pour maintenir alors leur température de fonctionne-
ment à une valeur suffisamment basse, permettant encore au composant de tra-
vailler de manière opérationnelle, il est nécessaire de procéder à une analyse
appropriée du mécanisme d’évacuation de la chaleur dans le cristal, le boîtier et
le dispositif de refroidissement qui lui est associé. Alors que le problème de la
conception thermique de l’ensemble puce-boîtier-refroidisseur était déjà impor-
tant pour les composants de puissance discrets, il gagne encore en importance
lorsque l’on considère les circuits de puissance intégrés sous une forme hybride
ou monolithique. En effet, pour ces derniers, la concentration de la puissance
électrique dissipée sur une surface très restreinte fait que l’on atteint assez faci-
lement la limite de 100 W/cm2 au-delà de laquelle seuls des systèmes de refroi-
dissement performants peuvent être envisagés. Le but du présent article est
avant tout de faire le point sur les méthodes analytiques ou autres permettant
d’aboutir à l’évaluation de la température de la zone active d’un composant
Parution : mai 2003

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SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE ______________________________________________________________________________________________________

électronique en fonctionnement. Dans un deuxième article [D 3 113], nous abor-


derons le problème de l’interactivité entre la puissance dissipée et la tempéra-
ture en vue de discuter de la validité du concept de température de jonction et
nous terminerons notre exposé par quelques considérations sur les problèmes
induits de fatigue thermique et de fiabilité.

1. Origine de la limitation Exemple : pour s’en convaincre, il suffit de se reporter à l’analyse


faite dans [1] qui montre, que pour une diode à jonction ordinaire de
en température type moyenne tension (1 000 V), la dissipation à l’état passant peut
être voisine de 200 W/cm2 pour un courant passant admissible de
de fonctionnement 260 A/cm2. Il va sans dire qu’il s’agit là d’une densité de puissance très
importante. On peut par exemple prendre comme base de comparai-
son la densité de puissance dissipée par une plaque de cuisson électri-
que (environ 10 W/cm2 soit 1 500 W pour un disque de 7 cm de rayon).
Les semi-conducteurs de puissance ont avant tout vocation à Dans ces conditions, la surface de la plaque seule, c’est-à-dire sans
servir d’interrupteur dans les circuits de conversion statique de charge thermique et simplement refroidie par convection, s’échauffera
l’énergie électrique. Comme cela est déjà suggéré dans ce traité, de plusieurs centaines de degrés Celsius (600 à 800 ˚C) et opérera
dans l’article [D 3 100] réf. [1], on peut classer ces composants dans une gamme de température qui est totalement incompatible avec
semi-conducteurs de puissance en : le bon fonctionnement d’un composant semi-conducteur de puissance
au silicium.
— diodes à jonction ou Schottky ;
— transistors bipolaires ou à effet de champ et composants Ce simple exemple montre d’emblée que la densité de la dissipa-
dérivés ; tion de puissance atteinte dans un composant semi-conducteur de
puissance nécessite que l’on considère avec une attention toute
— thyristors et composants dérivés. particulière le problème de son refroidissement.
On peut rajouter à ces composants de base des montages plus
sophistiqués mettant en œuvre des techniques d’intégration de
puissance hybride ou monolithique. Pour ces montages, le but
recherché est de réaliser un circuit convertisseur ou actionneur 1.2 Pertes à l’état bloqué
complet et de la manière la plus compacte possible, incluant la com-
mande dans sa totalité (circuits de puissance dits intelligents exclu-
sivement conçus pour des applications très basse tension  100 V) Le second trait commun à tous les composants semi-conducteurs
ou en partie seulement (intégration fonctionnelle conçus pour des de puissance est que dans leur état bloqué (de haute impédance), ils
applications industrielles basse tension de 500 à 1 000 V). présentent un courant de fuite IR qui augmente progressivement
avec la tension VR appliquée à la jonction bloquante. En pratique, ce
Actuellement bien que l’emploi du carbure de silicium soit à courant de fuite IR est souvent négligeable à la température
l’étude pour la réalisation de certains composants semi-conduc- ambiante (27 ˚C ou 300 K) et le produit VRIR qui détermine la densité
teurs de puissance, dans leur très grande majorité, ces composants de puissance dissipée en régime bloqué reste négligeable par rap-
ne sont réalisés qu’en silicium. Les caractéristiques physiques géné-
port à la densité de la puissance dissipée à l’état passant. Il ne faut
rales du silicium contribuent donc largement à fixer le domaine des
cependant pas toujours mésestimer l’augmentation possible de la
températures qui permettent le fonctionnement normal de ces com-
puissance VRIR dissipée par le composant en régime bloqué sous
posants ou des circuits intégrés qui en dérivent. En général, la dissi-
l’effet d’un accroissement de la température de la jonction blo-
pation de puissance d’un composant opérant en mode interrupteur
quante. En effet, pour tous les composants « moyenne ou haute
a trois composantes : les pertes à l’état passant, les pertes à l’état
tension », le courant de fuite IR est directement lié à la concentration
bloqué et les pertes de commutation.
des porteurs intrinsèques du silicium. Doublant environ tous les
11 K entre 300 et 400 K, l’augmentation du courant de fuite en fonc-
tion de la température de la jonction bloquante devient rapidement
substantielle et peut, dans certains cas, provoquer un emballement
1.1 Pertes à l’état passant thermique lorsque le dispositif est insuffisamment refroidi. C’est
notamment le cas des diodes Schottky qui restent encore caractéri-
sées par des courants de fuite importants en régime bloqué (de 60 à
Le premier trait commun à tous les composants semi-conduc- 100 mA sous 150 V à TJ = 175 ˚C pour des diodes 30 A). Enfin, bien
teurs de puissance est qu’ils ne remplissement qu’imparfaitement que la majorité des composants de puissance soient capables
leur rôle d’interrupteur dans la mesure où dans leur état passant (de d’assurer leur fonction d’interrupteur jusqu’à des températures de
basse impédance) la chute de tension résiduelle à leurs bornes n’est jonction dépassant les 327 ˚C (600 K), le choix par les fabricants
pas nulle alors que la densité de courant qui traverse le dispositif d’une température maximale de fonctionnement, comprise entre
peut être importante. Leur dissipation de puissance électrique sous 125 ˚C et 175 ˚C selon le dispositif considéré, s’explique beaucoup
forme de chaleur à l’état passant est souvent loin d’être négligeable. par le souci de limiter le courant de fuite en régime bloqué.

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_____________________________________________________________________________________________________ SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE

1.3 Pertes de commutation 2. Environnement thermique


des composants
Il ne faut enfin pas oublier que les composants de puissance opè-
rent dans des circuits qui fonctionnent en régime de commutation.
de puissance
Le passage répété d’un état passant à l’état bloqué ou vice-versa
n’est pas instantané et s’accompagne de régimes transitoires sur le Qu’il s’agisse d’un composant discret, d’un module ou d’un circuit
courant établi dans le composant et sur la tension extérieure qui lui
est appliquée. Ces régimes transitoires du courant et de la tension
sont fonction de la dynamique des charges internes aux compo-
intégré de puissance, le cœur du composant semi-conducteur de
puissance est constitué par la puce de silicium qui a été élaborée
dans le but de remplir une fonction interrupteur bien définie. Toute-
1
sants et sont de ce fait affectés par la température interne du com- fois, un composant ne peut être opérationnel sans que la (ou les)
posant. On peut noter que d’une manière générale une puce(s) ne soi(en)t montée(s) de façon adéquate sur un substrat lui-
augmentation de la température interne du composant tend à même encapsulé dans un boîtier. Ce boîtier est ensuite monté dans
accroître la charge interne de ce dernier et par là à ralentir la dyna- un système qui va déterminer les conditions d’environnement ther-
mique de ses commutations. Ce ralentissement de la dynamique de mique du composant. Pour la suite, nous désignerons cet environ-
commutation se traduit par une augmentation souvent sensible de nement thermique par le terme de « radiateur ». C’est le
comportement thermique de l’ensemble puce-boîtier-radiateur qu’il
la puissance électrique dissipée pendant les commutations. La puis-
convient d’étudier lorsque l’on s’intéresse aux composants de
sance dissipée pendant les commutations vient s’ajouter aux autres puissance.
pertes déjà inventoriées. C’est la raison pour laquelle dans des
conditions de refroidissement bien spécifiées pour le composant, il
faut accepter une baisse de performance sur le pouvoir de commu-
tation (produit de la tension bloquée par le courant passant) du 2.1 Substrats, boîtiers et radiateur
composant lorsque l’on envisage de le faire travailler à fréquence
croissante cf. [D 3 100 figures 7 et 9], réf. [1]).
Depuis le milieu des années 1980, avec le développement des
techniques d’intégration hybride, il est de plus en plus fréquent de
rencontrer des composants de puissance montés sur des substrats
isolants métallisés dont le rôle est multiple :
1.4 Cas général
— ils permettent de fournir un support mécanique rigide présen-
tant une bonne isolation électrique par rapport à l’environnement
externe du composant de puissance ;
On peut inventorier la puissance dissipée par un composant en — ils permettent de réaliser facilement l’interconnexion élec-
classant les pertes comme indiqué plus haut chaque fois que l’appli- trique de composants multiples à la manière d’un circuit imprimé et
cation s’y prête. Pour ce faire, il faut que les composants du circuit en utilisant les techniques de gravure relatives à ces derniers ;
soient bien individualisés et que la fréquence des commutations ne — ils ont aussi pour rôle d’assurer un transfert thermique conve-
soit pas trop élevée. Avec le développement des circuits intégrés de nable entre la puce qui engendre le flux de chaleur et le milieu envi-
puissance, on est cependant de plus en plus souvent confronté à ronnant qui doit évacuer cette chaleur.
des situations plus complexes. Par exemple deux composants peu-
■ Les substrats les plus couramment utilisés relèvent essentielle-
vent partager une surface active commune, l’un fonctionnant en ment des techniques suivantes.
régime de courant direct, l’autre en régime de courant inverse et
pour des applications de type basse tension, la fréquence de fonc- La technique du DCB (Direct Copper Bonding) qui consiste à faire
tionnement peut être telle que les états de régime permanent ne adhérer à haute température une feuille de cuivre de 0,3 mm
d’épaisseur sur chacune des faces d’une plaquette d’alumine ou de
soient jamais atteints pour les composants actifs. Dans ces condi-
nitrure d’aluminium dont l’épaisseur peut elle-même être comprise
tions, seule la modélisation complexe à l’aide d’un simulateur de entre 0,4 et 0,7 mm. De tels substrats sont principalement utilisés
circuit général permet d’accéder aux formes d’onde de la tension pour réaliser des modules de puissance (modules de transistors
v (t) appliquée au composant et du courant i(t) qui le traverse. On MOS ou modules IGBT de puissance). Du fait de la forte différence
peut alors tout de même accéder soit à la puissance instantanée existant entre les coefficients de dilatation thermique du cuivre
p (t) = v (t)i (t) dissipée dans le composant soit à la puissance (17 ppm/˚C) et du silicium (4 ppm/˚C), le report direct d’une puce de
moyenne P dissipée par le composant pendant un cycle complet de silicium sur un support en cuivre est d’autant plus déconseillé que
fonctionnement donnée par la relation suivante : l’épaisseur de ce support est importante. Le choix d’une épaisseur
de cuivre de 0,3 mm pour le DCB permet cependant de garantir un
T T report de puce suffisamment fiable en cas de cylage thermique

∫ ∫
1 1 répété.
P = --- p ( t ) d t = --- v(t)i(t) dt (1)
T 0
T 0 Le substrat métallique isolé (SMI ou IMS Insulated Metallic Subs-
trate) formé d’une embase en aluminium de 1,5 à 3 mm d’épaisseur
avec T durée ou période d’un cycle complet de recouvert d’une fine couche isolante de 50 à 100 µm d’épaisseur
(époxyde, polyamide ou polyimide) elle-même recouverte d’une
commutation.
fine couche de cuivre (de 35 à 100 µm d’épaisseur). Le SMI est géné-
ralement utilisé pour les applications de l’électronique automobile
Nous verrons au paragraphe 3.3.3 qu’il peut être intéressant de
et s’emploie à la manière d’un circuit imprimé monocouche pour
disposer de la puissance instantanée lorsqu’il s’agit d’analyser les
des applications qui dissipent de la puissance.
variations précises que subit la température de jonction lors d’un
cycle de commutation, mais que la détermination de la puissance ■ Pour la plupart des applications, le composant de puissance, qu’il
moyenne P dissipée par le composant est une grandeur fondamen- soit monté sur un substrat ou non, nécessite d’être encapsulé dans
tale pour la prévision de la valeur moyenne autour de laquelle se un boîtier qui a des rôles multiples dont les principaux sont :
stabilisera la température de jonction après un laps de temps qui est — de conférer au composant la rigidité mécanique nécessaire à
caractéris-tique pour un environnement thermique donné. son montage dans un système plus étendu ;

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SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE ______________________________________________________________________________________________________

— de permettre d’assurer de manière fiable les connexions élec- lateur de circuits électriques pour résoudre des problèmes de
triques de la puce avec l’environnement extérieur ; conduction de la chaleur.
— de permettre d’assurer une protection efficace de la puce vis-à-
vis de la poussière et d’éventuels agents de corrosion extérieurs qui ■ La convection est un mécanisme qui intervient couramment
pourraient compromettre le bon fonctionnement du composant ; dans les échanges de chaleur entre une surface chaude et un milieu
— il doit permettre d’assurer le meilleur transfert de chaleur pos- fluide (liquide ou gazeux). Il met en jeu un transfert de matière au
sible entre la puce et le radiateur. sein du milieu fluide [5], [6]. Du fluide froid se réchauffe au contact
de la surface chaude puis est évacué par le courant massique qui

1
■ Lorsque l’on s’intéresse aux problèmes thermiques des compo- remplace le fluide chaud par du fluide froid. La convection est dite
sants de puissance, on ne doit enfin pas mésestimer l’importance naturelle si le mouvement massique qui s’établit dans le fluide n’est
du radiateur dont l’efficacité à évacuer la chaleur dissipée par les dû qu’au transfert de chaleur de la surface chaude vers le fluide et
puces détermine très directement la qualité du refroidissement de aux forces de gravité. La convection est dite forcée lorsque le mou-
ces composants. Les radiateurs des composants de puissance peu- vement massique du fluide est imposé par une cause externe (ven-
vent être de technologies très diverses allant du simple refroidisse- tilateur ou pompe). Bien que l’étude précise des échanges de
ment par air à des refroidissements par circulation de liquide ou par chaleur par convection soit difficile, mettant en jeu des phénomènes
immersion mettant ou non en jeu un changement de phase liquide/ physiques régis par les lois de la mécanique des fluides, on peut
vapeur. pour les besoins du calcul d’ingénieur aborder le problème d’une
Nota : pour plus détails le lecteur pourra se reporter à l’article [D 3 220] réf. [2] qui fait manière plus empirique en définissant un coefficient de convection
une présentation synthétique des substrats, boîtiers et radiateurs pour les composants thermique moyen h (en W · m−2 · K−1) qui lie la densité de flux de
semi-conducteurs de puissance.
chaleur φ (en W · m−2) à l’écart de température ∆T (en K) entre la sur-
face chaude et le fluide par la relation :
φ = h ∆T (4)
2.2 Principaux mécanismes de transfert
de chaleur Le coefficient h dépend beaucoup du mécanisme convectif mis en
jeu, s’échelonnant de 5 W · m−2 · K−1 pour la convection naturelle à
50 kW · m−2 · K−1 pour un refroidissement par circulation d’eau en
Il est bien connu en physique que le transfert de chaleur peut se régime forcé turbulent et des valeurs encore bien supérieures si l’on
faire par conduction (ou diffusion), par convection ou par rayonne- utilise des échangeurs de chaleur à changement de phase.
ment. ■ Le rayonnement direct d’ondes électromagnétiques caractérise
■ La conduction ([3], [4]) est un mécanisme de transfert direct de tout corps porté à une température absolue non nulle. L’étude pré-
la chaleur régi par la loi de Fourier : cise des transferts de chaleur par rayonnement entre deux ou plu-
sieurs surfaces de forme quelconque est en général une tâche assez
φ = − λ∇T (2) complexe, pour un maximum de détails on pourra se reporter à [7].
En pratique, il est rare que la répartition de température des surfa-
avec φ (W · m−2) densité de flux de chaleur,
ces externes du boîtier d’un composant de puissance ou de son
λ (W · m−1 · K−1) conductivité thermique du milieu, radiateur puisse excéder en valeur maximale la température abso-
∇T (K · m−1) gradient de température. lue de 400 K (127 ˚C). Dans ces conditions, le rayonnement de cette
surface extérieure se situe presque tout entier dans l’infrarouge
Ce mécanisme est d’une importance primordiale dans les corps lointain avec une luminance monochromatique maximale qui se
solides qui sont généralement caractérisés par une conductivité situe autour de la longueur d’onde de 7,25 µm (Loi de Planck pour
thermique importante ( 10  λ  400 W ⋅ m – 1 ⋅ K – 1 ) mais son effica- T = 400 K). En supposant que le boîtier à la température uniforme T
cité se réduit dans les corps liquides ( 0 ,1  λ  1 W ⋅ m – 1 ⋅ K – 1 ) et rayonne de la chaleur vers un milieu infini totalement enveloppant
devient pratiquement nulle dans les gaz qui sont caractérisés par et se comportant vis-à-vis du boîtier comme un corps noir à la tem-
des conductivités thermiques très faibles (λ ≈ 0,03 W · m−1 · K−1 pérature T0, la densité du flux de chaleur rayonnée p peut s’écrire :
pour l’air) (cf. [2] page 9 ou [3] page 2).
On peut étendre l’analyse du transfert de chaleur par conduction φ = σ [ ε ( T ) T 4 – ε ( T 0 )T 04 ] (5)
aux régimes non stationnaires en faisant pour un volume élémen-
taire un bilan de puissance portant sur les flux de chaleur entrant et avec σ constante de Stefan-Boltzmann
sortant, la puissance dissipée dans le volume et la puissance absor- (σ = 5,67 × 10−8 W · m−2 · K−4),
bée localement pour l’échauffement de ce volume. On obtient ainsi ε(T) et ε(T0) émissivité hémisphérique totale d’un
l’équation de diffusion de la chaleur dans les milieux solides qui élément de surface du radiateur aux
sous sa forme la plus générale s’écrit : températures absolues T et T0 respec-
tivement.
∂T
∇( λ ∇T ) + p v = ρ C p ------ (3) Cette émissivité est comprise entre 0 (surface parfaitement
∂t
réfléchissante) et 1 (surface parfaitement absorbante).
avec pv (W · m−3) densité volumique de la puissance qui est
Afin d’établir une comparaison entre la densité du flux de chaleur
dissipée localement sous forme de
rayonnée et la densité du flux de chaleur qui peut être évacuée par
chaleur,
convection, nous allons admettre que l’émissivité d’un élément de
ρ (kg · m−3) masse volumique du matériau, surface du radiateur ne varie pas notablement entre les valeurs T et
Cp (J · kg−1 · K−1) capacité thermique massique (à pression T 0 de la température (ε( T ) ≈ ε( T 0) = ε). Le maximum de flux de
constante) du matériau, chaleur rayonné est obtenu pour une surface parfaitement absor-
bante (corps noir, ε = 1) et peut être écrit sous la forme :
t temps.
On notera que les loi de conduction de la chaleur en thermique et φ = σ ( T 3 + T 2T 0 + TT 02 + T 03 ) ( T – T 0 ) = h R ( T, T 0 ) ( T – T 0 ) (6)
les lois de conduction des charges électriques ont la même structure
bien que portant sur des grandeurs différentes. On peut donc, sur la La figure 1 montre l’évolution du coefficient d’échange radiatif hR
base de ces considérations, établir une analogie formelle entre les en fonction de T pour une valeur de T0 égale à 300 K. On voit que ce
grandeurs thermiques et les grandeurs électriques (cf. [2] page 9). dernier est comparable aux valeurs couramment admises pour le
Cette analogie peut, entre autres, permettre de se servir d’un simu- coefficient de convection thermique h qui caractérise la convection

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D3114

Évaluation de la température
des composants actifs de puissance
par Laurent DUPONT
1
Chargé de recherche
SATIE (UMR 8029), IFSTTAR, CNRS, ENS Cachan, CNAM, Université Cergy-Pontoise,
Université Paris-Sud, ENS Rennes, Versailles, France
et Yvan AVENAS
Maître de Conférences
Laboratoire de Génie Électrique de Grenoble (UMR 5269), Institut Polytechnique
de Grenoble, Université Grenoble-Alpes, CNRS, Grenoble, France
et Paul Étienne VIDAL
Maître de Conférences
Laboratoire Génie de Production, École Nationale d’Ingénieurs de Tarbes,
Université Fédérale Toulouse Midi Pyrénées – Institut National Polytechnique de Toulouse,
Toulouse, France

1. Problématique de la mesure de température des composants


semi-conducteurs de puissance ................................................................ D 3 114 - 2
1.1 Notion de température de jonction ........................................................... — 3
1.2 Applications de la mesure de température de jonction........................... — 4
1.3 Méthodes de mesure de la température des composants
à semi-conducteurs..................................................................................... — 6
2. Caractérisation thermique des modules de puissance
avec des paramètres thermosensibles ..................................................... — 6
2.1 Utilisation des paramètres électriques thermosensibles (PETS) ............ — 6
2.2 Les principaux paramètres électriques thermosensibles (PETS)............ — 8
2.3 Comparaison des paramètres thermosensibles dans le cas des IGBT .. — 12
3. Mesure de la température dans des conditions opératives ................... — 17
3.1 Intégration de capteurs............................................................................... — 19
3.2 Paramètres électriques thermosensibles.................................................. — 22
4. Conclusion ................................................................................................... — 26
4.1 PETS conventionnels .................................................................................. — 26
4.2 Intégration de capteurs............................................................................... — 26
4.3 Vers des PETS adaptés aux conditions opératives .................................. — 26
5. Sigles, notations et symboles ................................................................... — 27
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. D 3 114

a température des composants à semi-conducteurs de puissance est une


L grandeur physique qui affecte la fiabilité et le bon fonctionnement des
convertisseurs statiques d’énergie électrique. Sa prise en compte est néces-
saire pour satisfaire les attentes en termes de performances, de fiabilité et de
durée de vie. En effet, le calibre opérationnel en courant d’un composant de
puissance dans son environnement est lié à la température atteinte par la
partie active en relation avec les conditions d’usage et les performances de son
système de refroidissement. Ainsi, si ce dernier n’est pas suffisamment perfor-
mant, le calibre en courant communiqué par le constructeur ne peut pas être
atteint car, dans ce cas, la température du composant dépasse sa valeur maxi-
Parution : août 2017

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D 3 114 – 1

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D3114

ÉVALUATION DE LA TEMPÉRATURE DES COMPOSANTS ACTIFS DE PUISSANCE _________________________________________________________________

male admissible. Par ailleurs, les composants voient leur température varier au
cours de leur fonctionnement. En dehors des effets induits par les mécanismes
d’endommagement dus au vieillissement, ces variations sont dues à plusieurs
phénomènes d’origines environnementales ou opérationnelles ayant des
échelles de temps distinctes :
– variation de la température ambiante (cycles jour/nuit, été/hiver, altitude

1
basse et haute…) ;
– variation de la puissance dissipée liée au profil de mission (phases d’accé-
lération de décélération par exemple dans le cas du transport) ;
– variation de la puissance dissipée au cours d’une période de fonctionne-
ment électrique. C’est par exemple le cas dans les onduleurs où les
composants intégrés subissent des variations périodiques de leur température
dont l’amplitude dépend du point de fonctionnement du système ;
– variation de la puissance dissipée et de sa distribution dans la structure
interne du composant sur une période de commutation.
Chacune de ces variations génère des contraintes électrothermiques et ther-
momécaniques pouvant se traduire par un vieillissement prématuré de
l’assemblage des matériaux hétérogènes qui composent un module de puis-
sance. La connaissance ou l’estimation des variations de température liées à
une application et aux choix technologiques permet par exemple d’estimer des
indicateurs qui rendent compte de l’intégrité du module à semi-conducteur de
puissance, mais aussi de quantifier ses performances.
Dans cet article, nous définirons dans un premier temps la notion de tempé-
rature de jonction de la partie active puis nous expliquerons pourquoi il est
nécessaire de mettre au point des méthodes expérimentales pour la mesurer.
Dans un deuxième temps, nous présenterons les principales méthodes de
mesure de la température de jonction pour caractériser notamment les perfor-
mances thermiques des modules de puissance. Enfin, nous présenterons les
solutions existantes et en cours de développement pour effectuer des mesures
de température de jonction dans les conditions d’usage d’un convertisseur.

1. Problématique de la Cycles thermiques fonctionnels


mesure de température
des composants semi-
Température [°C]

conducteurs de puissance
Cet article propose de discuter des moyens d’accéder à la tem-
pérature des composants de puissance. La notion de composant
de puissance est utilisée ici afin de les distinguer des composants
électroniques tels que les microprocesseurs et autres circuits Cycle thermique environnemental
dédiés à la gestion et au stockage de l’information. Même si cer- (journalier, calendaire…)
tains principes exposés ici pourraient être appliqués à des compo-
sants électroniques, leur usage est bien différent de celui des Temps [s]
composants de puissance qui permettent d’optimiser les trans-
ferts de l’énergie électrique sous des niveaux de tension pouvant Figure 1 – Variations de la température d’un composant imposées
atteindre plusieurs milliers de volts. L’autre spécificité permettant par les conditions environnementales et fonctionnelles
de distinguer les composants de puissance est le niveau des
pertes dissipées qui peut se chiffrer en kilowatt pour un compo-
sant IGBT silicium 3300 V-1200 A et est combiné à une densité de La superposition complexe des conditions environnementales
puissance de l’ordre de la centaine de watts par centimètre carré à et opératives influence l’évolution de la température d’un compo-
l’échelle des parties actives. Par ailleurs, les températures maxi- sant de puissance à des échelles de temps variées comme le sché-
males d’usage définies par les fabricants peuvent atteindre des matise la figure 1. Ces variations de la température induisent
niveaux supérieurs à 175 °C pour les composants de puissance là notamment des contraintes d’origine thermomécanique qui
où un composant électronique sera généralement limité à une dégradent l’intégrité d’un module de puissance et affectent ses
température maximale de service comprise entre 70 °C et 125 °C. performances et sa fiabilité [1] [2] [D3126].

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D 3 114 – 2

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D3114

_________________________________________________________________ ÉVALUATION DE LA TEMPÉRATURE DES COMPOSANTS ACTIFS DE PUISSANCE

1.1 Notion de température de jonction généralement représentée par la notion de température virtuelle
de jonction Tjv provenant d’une mesure d’un paramètre élec-
Lorsqu’une puce semi-conductrice de puissance fonctionne, sa trique dépendant de la température. Dans la suite du texte, cette
température n’est pas uniforme. En effet, sa partie active est le grandeur sera appelée Tj pour température de jonction. Selon la
siège de dissipations de puissance plus ou moins localisées dans définition proposée par la norme IEC 60747-15, cet indicateur
son volume. Cette distribution de la puissance dissipée dans la est décrit comme la tension relevée aux bornes d’une jonction
puce semi-conductrice induit des variations de température de PN lors de l’injection d’un très faible courant IM afin de limiter
plusieurs dizaines de degrés dans son volume relativement réduit

1
les phénomènes d’auto-échauffement et la contribution de la
(surface généralement comprise entre quelques millimètres carrés composante ohmique. La tension mesurée, dépendante des
et 2 centimètres carrés, épaisseur variant de quelques dizaines à niveaux de concentration des dopants et de la température, cor-
quelques centaines de micromètres). La figure 2 détaille les gra- respond à la tension de diffusion d’une jonction PN au sein du
dients de température estimés par spectroscopie μ-Raman dans semi-conducteur dans des conditions de forte injection de por-
l’épaisseur d’une diode PiN de puissance fonctionnant en régime teurs [5].
de conduction [3] [RE5]. La distribution des zones de dissipation
dans l’épaisseur de la puce semi-conductrice est principalement
liée au type de technologie du composant (diode PiN, MOSFET,
IGBT…) et au régime de fonctionnement. Plus généralement, l’indicateur image de la température de
De plus, cette puce est reportée sur un substrat par un pro- jonction d’un composant de puissance est un concept permet-
cédé de brasage ou de frittage. Ce substrat constitue un support tant de définir un scalaire représentatif de la distribution tridi-
mécanique et permet généralement d’isoler électriquement les mensionnelle de la température. Cette valeur représente ainsi
parties actives et d’évacuer la chaleur vers le système de refroi- une température « globale » de la puce.
dissement. Cet assemblage conduit à une distribution de la tem-
pérature sur la surface de la puce en forme de « cloche » en
raison des conditions limites imposées à la diffusion du flux de
chaleur vers le système de refroidissement. Pour illustrer cela, Un indicateur de la température d’un composant est généra-
la figure 3 présente un résultat de mesure de la température par lement soit le résultat d’une mesure d’une grandeur physique,
thermographie infrarouge effectuée à la surface d’un composant image de cette température, soit une évaluation calculatoire
IGBT en fonctionnement. Comme illustré sur la figure 3c, le gra- issue d’un modèle numérique ou la combinaison de ces deux
dient de température à la surface d’une puce de puissance peut résultats. Ainsi, suivant la méthodologie employée, la tempé-
rapidement atteindre plusieurs dizaines de degrés Celsius, et la rature de jonction obtenue peut prendre différentes valeurs
présence de défauts dans la liaison entre celle-ci et le substrat pour un champ de température identique dans la puce. Elle
peut notamment provoquer l’apparition d’élévations locales de sera néanmoins utilisée en tant que telle par les électroniciens
la température d’amplitudes plus ou moins importantes [4]. Ces de puissance.
excursions de la température sont ici liées à une brasure impar-
faite contenant des volumes sans alliage appelés cavités ou
« solder voids ». Nous verrons dans les paragraphes suivants quelles sont les
Ainsi, la notion de température d’une puce semi-conductrice principales applications de cette mesure de température des com-
est une grandeur difficile à expliciter à cause de sa non-unifor- posants de puissance puis quelles sont les méthodes envisagées
mité dans le volume du semi-conducteur. De ce fait, elle est pour la réaliser.

20
–20 25
30
Fil aluminium 00 35
40
20 45
50
Y [μm]

40
A 55
60
60
65
70
80
75
Diode PiN Si
80
100
85
Brasure 20 μm 90
– 250 – 200 – 150 – 100 – 50 0 50 100 150 200 250
X [μm]

Figure 2 – Distribution de la température en °C relevée dans l’épaisseur d’une diode PiN de puissance par spectroscopie µ-Raman en régime de
conduction (d’après [3])

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D 3 114 – 3

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D3114

ÉVALUATION DE LA TEMPÉRATURE DES COMPOSANTS ACTIFS DE PUISSANCE _________________________________________________________________

Température [°C]
170
Défaut brasure Ligne de mesure

160

1 150

140

Ligne de mesure

130

a analyse rayons X de la brasure b carte de température de surface

Profil A-A
170

165

160
Température [°C]

155

150

Défaut brasure
145
IFSTTAR-LTN
LD-10/15
140
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180
Position x [pixels]

c tracé de la température le long de la ligne de mesure

Figure 3 – Mesure infrarouge de la température en surface d’une puce IGBT corrélée à la présence d’un défaut dans la brasure localisé entre la
puce et le substrat

1.2 Applications de la mesure 1.2.1 Évaluation des performances thermiques


de température de jonction d’un module ou d’un assemblage
de puissance
Au-delà de l’utilisation de la température d’une puce de puis- Les performances thermiques d’un module de puissance,
sance comme un référentiel permettant de quantifier ses perfor- constitué par un assemblage parfois complexe de matériaux hété-
mances électriques au sein d’un assemblage, la mesure de cette rogènes, sont généralement évaluées par l’estimation de sa résis-
température est essentielle pour : tance thermique Rth j,c et l’évolution en fonction du temps t de son
impédance thermique Zth j,c(t).
– réaliser une évaluation des performances thermiques des solu-
tions technologiques utilisées ; Ces deux grandeurs sont définies comme suit :
– quantifier les contraintes reportées au module de puissance au
(1)
cours des campagnes de vieillissement accéléré ce qui offre la
perspective de la définition de lois de durée de vie et de leurs utili-
sations ; (2)
– permettre la surveillance de l’intégrité des parties actives en
conditions d’usage. avec Tj la température de jonction,

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D 3 114 – 4

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_________________________________________________________________ ÉVALUATION DE LA TEMPÉRATURE DES COMPOSANTS ACTIFS DE PUISSANCE

Tc la température du boîtier, La figure 4, appliquée au régime stationnaire, montre que la


P la puissance dissipée. résistance thermique Rth j,a prend en compte l’ensemble des
échanges thermiques entre la jonction à la température Tj et le
Cette résistance et cette impédance thermiques permettent de fluide environnant à température Ta. Ainsi, dans le cas classique
quantifier l’augmentation de l’écart de température entre la jonc- d’un composant de puissance monté sur un dissipateur de cha-
tion du semi-conducteur et l’interface du boitier induit par les leur, cette résistance thermique peut être décomposée par la mise
matériaux de l’assemblage. en série de trois résistances thermiques Rth j,c, Rth c,s et Rth s,a. Ces
La résistance thermique est utilisée dans des conditions station- dernières permettent respectivement d’estimer les élévations de
naires (puissance et températures constantes). Plus elle est impor-
tante, plus le flux de chaleur dissipé par les semi-conducteurs
induit une forte élévation de température ce qui limite notamment
température au niveau du boîtier du composant, de l’interface
thermique et du dissipateur. Pour mettre en place ce type de
modèle, il est nécessaire de faire l’hypothèse que la majorité du
1
le courant admissible. flux de chaleur passe par le dissipateur de chaleur.
De son côté, l’impédance thermique traduit la variation tempo- Enfin, il est intéressant de noter que l’utilisation de Rth j,c ou
relle de la température de jonction suite à un échelon de puis- Zth j,c associée à celle de leurs équivalents modélisant l’interface
sance. Pour des temps très grands, elle est donc égale à la thermique et le dissipateur (respectivement, Rth c,s, Zth c,s, Rth s,a
résistance thermique. À partir de cette notion, il est possible et Zth s,a) conduit à mettre en place des hypothèses simplificatrices
d’obtenir un modèle électrique équivalent de l’assemblage réalisé limitant la précision du calcul. Parmi celles-ci, notons par exemple le
à partir de cellules résistances thermiques – capacités thermiques fait que Rth j,c (et donc Zth j,c) dépend des performances du système
(RC) [6] [7] [8]. Une fois ces grandeurs obtenues, elles peuvent de refroidissement. De même, Rth s,a dépend fortement de la géo-
être utilisées pour construire un schéma électrique équivalent aux métrie du module de puissance. Les phénomènes de couplage ther-
transferts de chaleur dans le module de puissance associé à son
mique à l’intérieur d’un module sont également difficiles à
refroidisseur. Ce modèle servira ensuite à dimensionner les diffé-
appréhender en utilisant directement la documentation du construc-
rents éléments pour maintenir la température de jonction en des-
teur. Notons que l’utilisation de modèles thermiques compacts plus
sous d’une valeur maximale imposée.
évolués permet de limiter ces défauts [9] mais ces considérations
La résistance et l’impédance thermiques Rth j,c et Zth j,c sont sortent toutefois du cadre de la discussion de cet article.
fournies par les fabricants de modules de puissance afin de
dimensionner le système de refroidissement à leur associer. Afin
de caractériser ou modéliser plus finement un système thermique 1.2.2 Estimation de l’état d’endommagement
complet (module(s) de puissance, interface(s) thermique(s) et dis- d’un module de puissance
sipateur(s)), on utilise généralement les notions de résistance
thermique Rth j,a et d’impédance thermique Zth j,a définies par : Lors de son vieillissement, un module de puissance est le siège
de contraintes qui entraînent des dégradations. Ces contraintes
(3) sont notamment d’origine thermomécanique et sont induites par
les variations de température des éléments qui le composent
[D3126] [10] [11].
(4) Des indicateurs d’endommagement ont été identifiés en laboratoire
afin d’évaluer l’état de santé des modules de puissance à IGBT au
où Ta est la température ambiante. cours de leur vieillissement [12] [13]. Il a ainsi été démontré que la

P Tj

Tj Résine
P Rth j,c Puce
Semelle

Interface

Rth j,a Rth c,s

Dissipateur

Ta Rth s,a

Ta

Figure 4 – Décomposition de la résistance thermique Rth j,a dans le cas où un composant de puissance est monté sur un dissipateur de chaleur

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ÉVALUATION DE LA TEMPÉRATURE DES COMPOSANTS ACTIFS DE PUISSANCE _________________________________________________________________

– les méthodes optiques ;


Puissance – les méthodes utilisant un contact physique avec le composant ;
Cycle 1 Cycle N–1 Cycle N
injectée – les méthodes utilisant des grandeurs électriques thermosen-
Pin
sibles.
De nombreux indicateurs optiques de température ont été utili-
sés dans la littérature. Il s’agit de la luminescence, de l’effet
ΔTj
Raman, de l’index de réfraction ou de la déflection de faisceaux

1
laser. Dans le cas de l’électronique de puissance, on utilise le plus
ΔTj cycle N souvent des méthodes basées sur la variation du rayonnement
ΔTj cycle 1
électromagnétique dans l’infrarouge (IR) de la puce en fonction de
la température : capteur IR, microscope IR, caméra thermique [16]
[17] [R412][R413] [R6412]. Cette méthode nécessite généralement
l’élimination par voie mécano-chimique d’une partie du boîtier et
du gel de protection pour avoir un accès à la surface du compo-
Nombre cycles sant. Cependant, l’intérêt de la caméra thermique est la possibilité
d’obtenir de manière relativement simple des cartes de tempéra-
ture de la surface des composants. Ainsi, il est possible d’obser-
Figure 5 – Illustration de l’évolution de la variation de la tempéra-
ture de jonction au cours d’un vieillissement accéléré par cyclage ver le gradient de température dû à la structure même du module
actif ou encore aux défauts présents dans l’assemblage (bulles d’air,
dénommées voids, dans les brasures par exemple, figure 3).
résistance thermique Rth j,c augmentait lorsque les éléments de La mesure de la température de la puce peut également être
l’assemblage qui composent le chemin thermique vers le système de réalisée en mettant un matériau thermosensible directement en
refroidissement (brasure, substrat…) se dégradaient. Un suivi de cette contact avec celle-ci. Même si des solutions non conventionnelles
résistance thermique, et donc une mesure de la température de jonc- existent, comme l’usage des cristaux liquides ou encore du phos-
tion, sont donc nécessaires pour évaluer ce mode d’endommage- phore thermographique, les principales solutions de la littérature
ment. Ainsi, comme illustré sur la figure 5, pour une même puissance sont basées sur le report de thermocouples ou de thermistances.
injectée à chaque cycle Pin, une évolution de la résistance thermique La majorité des méthodes présentées ci-dessus nécessite l’ouver-
de l’assemblage entraîne une évolution de la variation de tempéra- ture ou tout au moins la modification de l’intégrité physique du
ture de jonction ΔTj au cours des N cycles appliqués. module. Pour éviter cela, il est possible de recourir à l’utilisation de
De même, il a été montré expérimentalement que la tension méthodes électriques. Dans ce cas, les variations des propriétés
directe à l’état passant et la tension de seuil à une température don- électriques du composant lui-même sont utilisées pour estimer sa
née permettaient de rendre compte respectivement de l’état température. Ces propriétés électriques sont appelées paramètres
d’endommagement de certains éléments en face avant des puces électriques thermosensibles. Ces paramètres permettent ainsi d’esti-
(fils d’interconnexion et métallisation) et de l’intégrité de l’oxyde de mer une température « globale » des composants.
grille [D3126][14] [15]. Ces grandeurs dépendent fortement de la
température. Leur mesure doit donc être corrigée avec l’estimation Le principal défaut de cette méthode est qu’elle ne permet pas
de la température de jonction afin d’assurer le suivi efficace des dif- d’obtenir une carte de température des composants à l’intérieur
férents modes d’endommagement des modules de puissance. du module. C’est par exemple le cas des modules comportant plu-
sieurs puces en parallèle pour lesquelles il n’est ainsi pas possible
d’observer un éventuel déséquilibre en température. Toutefois,
1.2.3 Contrôle actif de la température de jonction cette méthode est aujourd’hui largement utilisée, en particulier
par les fabricants de modules de puissance et, plus généralement,
L’estimation de la température de jonction en temps réel
par tous les spécialistes du domaine pour caractériser les
lorsque le convertisseur fonctionne peut apporter de réels avan-
modules de puissance. La deuxième partie de l’article sera donc
tages en termes d’exploitation des convertisseurs. Ainsi, le dispo-
consacrée à l’utilisation des paramètres électriques thermosen-
sitif de contrôle du convertisseur peut modifier le mode de
fonctionnement afin de limiter la température. En effet, si cette sibles dans ce contexte.
dernière atteint des valeurs trop élevées, elle peut dégrader signi-
ficativement la durée de vie du module de puissance ou entraîner
une défaillance immédiate avec des dommages irréversibles.
Les types d’actions attendues sont : 2. Caractérisation thermique
– un arrêt du fonctionnement du convertisseur ;
– une modification de la loi de commande (par exemple réduc-
des modules de puissance
tion de la fréquence de commutation) ; avec des paramètres
– une reconfiguration du convertisseur dans le cas de structures
redondantes (parallèles, entrelacées ou multicellulaires). thermosensibles
Maintenant que nous avons présenté les principales applications
de la mesure de température des composants semi-conducteurs de
puissance, nous allons voir comment elle peut être réalisée. 2.1 Utilisation des paramètres
électriques thermosensibles (PETS)
1.3 Méthodes de mesure Aujourd’hui, la mesure de température des puces semi-conduc-
de la température des composants trices de puissance par paramètres électriques thermosensibles
à semi-conducteurs (PETS) est principalement utilisée pour mesurer les propriétés
thermiques des modules de puissance et pour évaluer leur taux
Trois principales familles de méthodes sont aujourd’hui de dégradation au cours de leur vieillissement. Ils font donc partie
employées pour évaluer la température des composants semi- des principaux outils permettant d’évaluer expérimentalement les
conducteurs : résistances et impédances thermiques de ces assemblages.

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_________________________________________________________________ ÉVALUATION DE LA TEMPÉRATURE DES COMPOSANTS ACTIFS DE PUISSANCE

vrai à l’état initial du refroidissement obtenu à la fin de la


La mesure d’un paramètre électrique thermosensible (PETS) séquence d’injection de puissance (cf. figure 3). Toujours est-il
consiste à soumettre certaines électrodes d’un composant de que la différence entre une impédance thermique mesurée lors
puissance à une excitation (courant ou tension) et à mesurer un
de l’échauffement et une autre mesurée lors du refroidissement
paramètre électrique résultant qui dépend de la température.
reste en général très faible ce qui permet d’utiliser cette
méthode avec de très bons résultats.
Ainsi, la mesure du paramètre thermosensible s’accompagne La seconde difficulté de cette méthode réside en l’estimation

1
normalement d’une puissance dissipée dans le semi-conducteur de la température Tm en fin d’injection de puissance. En effet, la
impliquant son auto-échauffement qui modifie sa température. À
coupure de la source de puissance s’accompagne en général
partir de cette constatation, il est possible de distinguer deux
d’un transitoire électrique qui empêche une mesure du PETS
familles de paramètres thermosensibles qui conditionnent les
méthodes permettant d’extraire les résistances et impédances pendant quelques dizaines voire quelques centaines de microse-
thermiques : condes [18]. Cela est illustré par la figure 6b qui présente la
mesure de la température d’un IGBT estimée par la tension col-
– les PETS avec un faible auto-échauffement (typiquement une
lecteur-émetteur sous faible courant. L’obtention de la tempéra-
élévation de température inférieure au °C) ;
ture Tm est alors généralement obtenue en effectuant une
– les PETS avec un fort auto-échauffement.
extrapolation linéaire de la température en fonction de la racine
Dans les deux cas, l’utilisation d’un PETS pour caractériser la carrée du temps à partir des résultats mesurés après le transi-
température des composants d’un module de puissance sera toire électrique.
effectuée en deux étapes :
Une autre méthode, plus rarement utilisée, consiste à tracer la
– la caractérisation ou calibration du PETS en fonction de la tem- courbe d’échauffement par injections successives d’impulsions de
pérature ;
puissance dont la durée augmente avec le temps. L’utilisation de
– l’utilisation du PETS pour mesurer la température afin notam-
la courbe de refroidissement après ces injections permet alors de
ment d’évaluer la résistance ou l’impédance thermique.
tracer point par point la courbe d’échauffement (figure 6c). Cette
méthode nécessite la prise en compte de nombreuses hypothèses
2.1.1 Cas des PETS avec faible auto-échauffement qui ne seront pas détaillée dans ce document mais qui sont large-
ment présentée dans [19] [20].
Dans le cas d’un PETS caractérisé par un faible auto-échauffe-
ment, l’étape de calibration est relativement aisée. Elle nécessite
de faire varier la température par un dispositif extérieur et de dis- 2.1.2 Cas des PETS avec fort auto-échauffement
poser un capteur de température à proximité de la partie active.
On peut en effet estimer que, dans ce cas, la température du semi- Lorsque l’auto-échauffement du composant est significatif lors
conducteur est très proche de celle de son environnement. Cela de la mesure du PETS, cela rend la phase de calibration délicate
n’est bien évidemment vrai que si la température du module de car la température du semi-conducteur est rapidement différente
puissance est homogène (utilisation par exemple d’une enceinte de celle de son substrat. Ainsi, la solution la plus utilisée est de
thermostatée). mesurer le PETS en stimulant le composant avec des impulsions
Dans un second temps, pour mesurer les performances ther- de courte durée (typiquement de l’ordre de quelques dizaines à
miques d’un module de puissance, il est nécessaire que les par- quelques centaines de microsecondes). Ces impulsions ne doivent
ties actives dissipent de la puissance (cf. équations (1) et (2)). pas être trop courtes pour ne pas se trouver dans les conditions
Toutefois, si l’auto-échauffement induit par la mesure du PETS est d’un transitoire électrique et ne pas être trop longues pour ne pas
faible, ce dernier ne peut pas être utilisé directement pour pro- trop élever la température du composant lors de la mesure. Il faut
duire une élévation de température suffisante permettant d’effec- toutefois noter que l’élévation de température peut être rapide-
tuer la mesure de Rth ou Zth. Il faut donc disposer d’un circuit ment de quelques degrés pour une impulsion de quelques
auxiliaire d’injection de puissance pour créer une élévation signifi- dizaines de microseconde quand le courant injecté est proche de
cative de la température du composant. Le principal problème son calibre nominal [21].
réside dans le fait que l’injection de puissance modifie la polarisa-
Pour autant, l’utilisation d’un PETS caractérisé par un auto-
tion du composant ne permettant pas la mesure de la température
par le PETS pendant que le composant dissipe. Il n’est ainsi pas échauffement important peut permettre une mesure plus aisée de
possible d’obtenir directement Tj(t). Tj(t) dans les conditions proches de l’usage et donc, dans un
nombre de cas plus réduit, de l’impédance thermique. En effet, la
Pour répondre à ce problème, la méthode la plus utilisée est la figure 7 montre que, si la puissance injectée pour faire chauffer le
mesure du PETS pendant le refroidissement du semi-conducteur. composant est la même que la puissance dissipée pendant la
Son principe est exposé à la figure 6a. Sur cette figure, Pc repré-
mesure du PETS, ce dernier peut être utilisé directement pour
sente la puissance injectée par le circuit annexe dans le compo-
mesurer l’élévation de température pendant la phase d’échauffe-
sant et Pm représente la puissance dissipée par le composant
lorsque la mesure du PETS est effectuée. Ainsi, dans un premier ment.
temps, le circuit annexe injecte de la puissance jusqu’à ce que le La mesure directe de Zth(t) telle qu’elle a été définie dans
composant se retrouve dans des conditions stationnaires de tem- l’équation (2) nécessite, quant à elle, que la puissance dissipée
pérature. Une fois cet état atteint, l’apport de puissance annexe lors de la mesure du PETS soit constante (donc ne dépende pas
est interrompu et le PETS est mesuré pendant que le composant de la température). Dans le cas contraire, des techniques mathé-
refroidit. matiques basées sur le principe de la déconvolution pourront per-
Cette mesure est donc basée sur l’hypothèse que l’évolution mettre de prendre en compte l’éventuelle variation de la
de la température pendant l’échauffement est la fonction conju- puissance dissipée au cours de la caractérisation [20].
guée de celle obtenue pendant le refroidissement. Cette hypo-
thèse suppose donc que les propriétés thermiques des
matériaux et du système de refroidissement varient peu avec la
température. Elle suppose également le fait que la répartition de Le choix de la méthode de mesure de la température d’un
température proche de la partie active a un faible impact sur le composant par un paramètre thermosensible est lié à l’ampli-
régime transitoire. En effet, à l’état initial de l’échauffement, la tude de l’auto-échauffement qu’il induit au cours de la
température du semi-conducteur est homogène ce qui n’est pas mesure.

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1

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Référence Internet
D3113

Semi-conducteurs de puissance
Problèmes thermiques (partie 2)
par Jean-Marie DORKEL
1
Docteur ès sciences
Professeur à l’Institut national des sciences appliquées de Toulouse
Chercheur au LAAS/CNRS de Toulouse

1. Couplages électrothermiques dans les composants


de puissance.............................................................................................. D 3 113 - 2
1.1 Définition électrothermique de la température de jonction..................... — 2
1.2 Notion d’équilibre électrothermique interne............................................. — 2
1.3 Conditions pratiques de l’existence d’un équilibre électrothermique .... — 4
2. Fatigue thermique et fiabilité ............................................................... — 7
2.1 Effets thermomécaniques et fatigue thermique ....................................... — 7
2.2 Fiabilité et tests accélérés ........................................................................... — 9
Références bibliographiques ......................................................................... — 10

es méthodes analytiques ou autres permettant d’aboutir à l’évaluation de la


L température de la zone active, ou température de jonction, d’un composant
semi-conducteur de puissance ont fait l’objet d’un premier article [D 3 112].
Dans cet article, nous aborderons le problème de l’interactivité entre la puis-
sance dissipée par le composant et sa température en vue de discuter de la vali-
dité du concept de température de jonction et nous terminerons notre exposé
par quelques considérations sur les problèmes induits de fatigue thermique et
de fiabilité.
Parution : août 2003

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique D 3 113 − 1

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Référence Internet
D3113

SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE ______________________________________________________________________________________________________

1. Couplages valeur particulière TJ que nous appelerons la température de jonc-


tion, ce qui permet de réécrire l’équation précédente sous la forme :
électrothermiques
∂J
dans les composants I(V) =
∫∫JVT SA
( , J) d x d y + -------
∂T V, T J ∫∫ [ T ( x, y ) – T J ] d x d y
SA
de puissance ∞
1 ∂k J
∑ ∫ ∫ [ T ( x, y ) – T J ] k d x d y

1
+ ----- --------- (2)
k=2
k! ∂ T k V, T J SA
Il est très important, lorsque l’on s’intéresse à l’échauffement des
composants électroniques et plus particulièrement à leur auto-
échauffement, de ne pas perdre de vue que la puissance électrique Cette équation montre de manière évidente que si l’on définit la
qu’ils dissipent peut être fortement influencée par la répartition de la température de jonction TJ comme étant la température moyenne
température dans leur zone active. En effet, de nombreux paramè- de la zone active, le terme de premier ordre est nul et le terme
tres électriques fondamentaux de dispositifs à semi-conducteur d’ordre zéro permet de définir le courant en l’assimilant au produit
dépendent plus ou moins fortement de la température. Mention- SAJ (V, TJ) à condition que la somme des termes de rang plus élevé
nons, pour ne citer que les plus prépondérants, la concentration des reste négligeable :
porteurs intrinsèques qui conditionne fortement la densité du cou-
rant passant dans une jonction PN et la mobilité des porteurs qui I(V, TJ) ≈ SAJ (V, TJ)
conditionne la chute de tension ohmique dans les régions ou le cou- ∞
1 ∂k J
rant électrique s’établit sous l’effet de champs électriques de faible
valeur. Les comportements électrique et thermique du composant
si ∑
k =2
----- ---------
k! ∂ T k V, T J ∫∫ SA
[ T ( x, y ) – T J ] k d x d y ⭐ ε E I ( V, T J ) (3)

sont donc étroitement couplés et dépendent de l’équilibre électro-


thermique interne qui s’établit dans le composant lorsque ce der- avec εE coefficient de précision.
nier est soumis à une polarisation électrique. Nous n’aborderons
pas ici le cas du fonctionnement des composants en situation Basée sur des considérations électriques, l’expression ci-dessus
extrême (comme celle qu’impose par exemple la mise en court-cir- [équation (3)] fournit un critère qui permet de déterminer dans
cuit de la charge d’un IGBT ou d’un transistor MOS sous sa pleine quelle mesure le concept de température de jonction reste valable
tension de service). Dans ces derniers cas, en effet, le comportement en présence d’une interaction électrothermique. On notera aussi
physique du dispositif soumis à un échauffement particulièrement que cette définition de la température de jonction est générale et
rapide du composant ne peut être appréhendé qu’à travers une qu’elle a le mérite de fournir une définition de la température de
résolution numérique simultanée des équations des composants à jonction pour tout composant dont la surface active n’est pas iso-
semi-conducteurs et de l’équation tridimensionnelle de la chaleur therme même si ce composant dissipe une puissance électrique suf-
dans le composant en tenant compte des paramètres dépendant de fisamment faible pour que l’on puisse a priori négliger les
la température. Nous nous limiterons ici d’une façon pragmatique à interactions électriques et thermiques.
une étude de l’équilibre électrothermique d’un composant soumis à
une dissipation de puissance en régime statique ou quasi-statique Exemple : la température d’un composant qui est déterminée par
et nous en tirerons quelques conclusions concernant la validité du la mesure d’un paramètre thermosensible (chute de tension directe
concept de « température de jonction » qui est couramment utilisé d’une diode, tension de seuil d’un transistor MOS) correspond avec
pour la spécification des composants de puissance. une bonne approximation à la température de jonction telle qu’elle est
définie par l’équation (3).

1.1 Définition électrothermique


de la température de jonction 1.2 Notion d’équilibre électrothermique
interne
Du fait des effets tridimensionnels de l’écoulement de la chaleur
dans l’ensemble puce-boîtier-radiateur, la température de la zone
active d’un composant électronique n’est jamais uniforme. Il en Dans tous les composants à semi-conducteurs, la densité de cou-
résulte que même si la surface active est soumise à une polarisation rant dans la zone active dépend de la température locale. Lorsqu’un
électrique uniforme, la densité de courant y variera localement du composant opère dans un circuit qui lui impose le courant passant I,
fait que les paramètres électriques sont localement dépendants de le problème de la recherche de l’équilibre électrothermique interne
la température. Si on suppose en première approximation que le du composant peut en première approximation être formulé comme
volume de la zone active est suffisamment faible pour que l’on le montre la figure 1. Du point de vue électrique, la zone active se
puisse faire l’hypothèse d’une dissipation de puissance quasi-surfa- présente comme un ensemble de composants élémentaires soumis
cique, le courant total qui traverse la zone active pourra être écrit à une grandeur de commande Gc (tension ou courant) commune,
sous la forme d’une intégrale de surface : polarisés sous la même tension extérieure V et se partageant le cou-
rant extérieur I au prorata de la température locale qui caractérise

∫∫JVT
chacun de ces composants. Malgré une apparente simplicité, la
I(V) = ( , ) dxdy (1)
résolution du problème est ardue car la détermination des tempéra-
SA
tures locales Ti ne peut se faire qu’en résolvant l’équation de la cha-
avec I courant traversant la zone active, leur tridimensionnelle en tenant compte du fait que la dissipation de
puissance Pi correspondante est justement conditionnée par la tem-
J densité de courant locale, pérature locale Ti. En régime statique, la recherche de la distribution
V tension appliquée aux bornes de la zone active, de la puissance dissipée et la répartition de la température qui lui
T température locale, correspond peut être faite de manière itérative. Pour illustrer cela,
nous donnons en suivant quelques résultats de calcul réalisés pour
SA surface totale de la zone active. des expressions différentes de la densité de courant dans la zone
La densité de courant J qui est une fonction de la température active en prenant pour modèle d’environnement thermique com-
locale T peut être développée en série de Mac-Laurin autour d’une mun celui de la figure 2.

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D 3 113 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique

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D3116

Modules et boîtiers de puissance


(packaging)
par Cyril BUTTAY
1
Docteur en génie électrique, ingénieur INSA de Lyon
Chargé de recherche au CNRS

1. Rôle du packaging .................................................................................... D 3 116 - 2


1.1 Tenue mécanique......................................................................................... — 2
1.2 Gestion thermique ....................................................................................... — 2
1.3 Connexions électriques ............................................................................... — 3
1.4 Isolation électrique interne et externe........................................................ — 3
2. Critères de choix d’un boîtier ............................................................... — 3
2.1 Fiabilité.......................................................................................................... — 3
2.2 Performances électriques ............................................................................ — 4
2.3 Performances thermiques ........................................................................... — 6
3. Types de boîtiers ...................................................................................... — 6
3.1 Composants discrets ................................................................................... — 7
3.2 Modules ........................................................................................................ — 8
4. Matériaux et fabrication......................................................................... — 8
4.1 Puce............................................................................................................... — 9
4.2 Brasures ........................................................................................................ — 9
4.3 Fils de bonding ............................................................................................. — 10
4.4 Substrat......................................................................................................... — 11
4.5 Semelle ......................................................................................................... — 13
4.6 Connectique.................................................................................................. — 14
4.7 Encapsulation ............................................................................................... — 15
5. Conception ................................................................................................. — 15
5.1 Dimensionnement électrique ...................................................................... — 15
5.2 Dimensionnement thermique ..................................................................... — 15
5.3 Effets couplés ............................................................................................... — 17
6. Évolutions futures .................................................................................... — 17
6.1 Nouvelles applications ................................................................................ — 17
6.2 Nouveaux matériaux ................................................................................... — 17
6.3 Nouveaux procédés ..................................................................................... — 17
6.4 Nouvelles structures .................................................................................... — 18
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. D 3 116

es composants de puissance à semi-conducteurs ont fait leur apparition il y


L a maintenant plus de 50 ans. Durant cette période, leur technologie a extra-
ordinairement progressé, pour arriver à des niveaux proches dans certains cas
des limites théoriques du matériau : les densités de puissance manipulées
peuvent largement dépasser la centaine de watts par centimètre carré, et une
puce d’à peine plus d’un centimètre de côté peut supporter des tensions de
plusieurs kilovolts ou des courants de plus d’une centaine d’ampères.
Dans ces conditions, il apparaît que l’environnement rapproché de la puce de
puissance (son boîtier, ou dans un sens plus générique, son packaging) joue
un rôle primordial dans son fonctionnement. C’est en effet lui qui assure les
connexions électriques de la puce et l’évacuation de la chaleur qu’elle dissipe.
Parution : mai 2010

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69
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D3116

MODULES ET BOÎTIERS DE PUISSANCE (PACKAGING) ______________________________________________________________________________________

Avec les excellentes performances des semi-conducteurs de puissance actuels,


il est courant que le boîtier constitue le principal facteur limitant du composant
dans son ensemble.
Cela peut sembler surprenant au premier abord : pourquoi un élément totale-
ment passif comme le boîtier, qui fait appel à des technologies a priori moins
avancées que la microélectronique, n’a-t-il pas fait autant de progrès que les

1
puces ? La réponse réside dans la multiplicité des fonctions du packaging. Ici,
peut-être plus qu’ailleurs, le travail de conception consiste à trouver un
compromis entre des impératifs souvent antinomiques : s’il est relativement
aisé de concevoir un boîtier efficace d’un point de vue thermique ou électrique,
ou encore de trouver une solution peu coûteuse, atteindre les trois objectifs à
la fois relève de la quadrature du cercle !
Pour assurer ses différents rôles, un boîtier doit ainsi faire appel à une multi-
tude d’éléments, de matériaux et de techniques divers. C’est ce que nous vous
présentons dans ce dossier.

1.2 Gestion Thermique


Tableau de sigles
La prise en compte de la gestion thermique d’un composant de
AMB Active Metal Brazes
puissance est primordiale puisque, dans la majorité des cas, c’est la
température de jonction des puces (et le calibre en tension) qui en
CMS composants montés en surface
délimite le domaine de fonctionnement (Safe Operating Area, SOA).
DBC Direct Bonded Copper La température maximale admissible par une puce en silicium
dépend de son calibre en tension (figure 1), et elle est habituel-
IGBT Insulated Gate Bipolar Transistor lement comprise entre 125 oC et 175 oC. Au-delà de cette limite, le
composant risque de devenir incontrôlable, entraînant sa
MOSFET Metal Oxide Semiconductor Field Effect défaillance en court-circuit. Pour les composants de plus faible ten-
Transistor sion nominale (en théorie inférieure à 1 kV), la température maxi-
male est limitée par le boîtier, dont les matériaux et les procédés
SOA Safe Operating Area d’assemblage standard (notamment les brasures) ne supportent
que rarement des températures supérieures à 200 oC (figure 2).
SMI substrat métallique isolé

TLPB Transient Liquid Phase Bonding


Température de jonction (oC)

1. Rôle du packaging
1 000
Si la puce semi-conductrice constitue le « cœur » d’un
composant actif de puissance, celle-ci ne peut fonctionner indé-
pendamment de son boîtier ou, dans un sens plus large, de son
packaging. C’est ce packaging qui la protège et l’isole de son envi-
ronnement, évacue la chaleur qu’elle dissipe et fournit des termi-
naux de connexion avec le reste du circuit.
SOI 80 V
IGBT 1 200 V
1.1 Tenue mécanique IGBT 6 500 V
100
Le rôle premier du boîtier d’un composant de puissance est la 10 100 103 104
protection : les puces semi-conductrices sont en effet très Tenue en tension maximale (V)
sensibles à l’humidité, la poussière, et l’électricité statique Silicium
(notamment dans le cas de composants de type MOSFET et IGBT, Carbure de silicium 4H
à grille isolée). Cette protection est assurée mécaniquement par
une enceinte close (en matière plastique, céramique, ou métal) Les carrés correspondent à des composants existants
empêchant l’entrée de corps étrangers.
Le boîtier fournit également les moyens (vissage, clipsage) de Figure 1 – Évolution théorique de la température de jonction
que peut supporter un composant en fonction de son calibre
solidariser le composant au reste du système, le plus souvent à un en tension, pour les composants en silicium et en carbure
système de refroidissement. de silicium (doc. Laboratoire Ampère)

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______________________________________________________________________________________ MODULES ET BOÎTIERS DE PUISSANCE (PACKAGING)

300
2. Critères de choix
d’un boîtier
250
Température de jonction ( oC)

Toutes les solutions de packaging assurent les fonctions élé-


Limite du boîtier
200 mentaires listées dans le paragraphe 1. En revanche, toutes

1
Lim n’offrent pas des performances identiques. Le choix de son packa-
ite d
u si ging va donc avoir une influence primordiale sur le comportement
150 liciu
m final du composant.

100 Zone de fonctionnement nominal


2.1 Fiabilité
50
2.1.1 Mécanismes de défaillance
0
100 103 104 Sortir de la zone de sécurité du composant (figure 2) entraîne à
plus ou moins brève échéance sa destruction. Cependant, l’inverse
Tenue en tension maximale (V)
n’est pas vrai : demeurer à l’intérieur de cette Safe Operating Area
(SOA) n’assure pas une durée de vie infinie à notre composant. En
Figure 2 – Domaine d’utilisation des composants de puissance
en silicium suivant leur tenue en tension nominale effet, son fonctionnement normal active des mécanismes de
vieillissement et de fatigue thermomécanique qui, à long terme
(habituellement plusieurs milliers ou dizaines de milliers d’heures
Il faut en outre noter que les puces sont le siège d’une forte dis- de fonctionnement), entraînent eux aussi la défaillance du
sipation de chaleur, causée par les pertes en commutation et en composant.
conduction du composant [cf. [D 3 112] Semi-conducteurs de puis-
sance. Problèmes thermiques (partie 1)]. Des niveaux de pertes Le mécanisme élémentaire à l’origine de la fatigue thermoméca-
supérieurs à 100 W/cm2 de silicium sont courants. nique est décrit (figure 3). Lorsque deux matériaux ayant des coef-
ficients de dilatation différents sont associés, l’assemblage réagit
Le refroidissement d’un composant de puissance fait donc aux variations de température en se déformant (principe du
l’objet de toutes les attentions. Le boîtier doit fournir un chemin de bilame). L’interface entre les deux matériaux (l’un soumis à des
faible résistance thermique pour l’évacuation de la chaleur dissi- contraintes en compression, l’autre en traction) subit une
pée par la ou les puces qu’il contient. contrainte de cisaillement. C’est cette contrainte, répétée de nom-
breuses fois au cours de la vie de l’assemblage, qui cause la
fatigue puis la délamination de l’interface ou la fissuration d’une
1.3 Connexions électriques des couches.
Lorsque l’on observe la coupe d’un composant discret
Il s’agit là de la troisième fonction réalisée par le boîtier, qui (figure 4b ) ou d’un module (figure 5b ), on peut retrouver la struc-
consiste tout simplement à fournir un moyen (via des pattes, des ture de bilame à de nombreux endroits. Par exemple, dans le cas
cosses ou des terminaux avec ou sans vis) d’accéder aux élec- du module, on peut citer les interfaces :
trodes des puces. Ces connexions doivent être dimensionnées
pour avoir une influence aussi réduite que possible sur le – fil de bonding-puce ;
comportement électrique du composant : leur résistance doit être – puce-brasure ;
faible, de même que leur inductance et capacité parasites. Elles
– brasure-métallisation supérieure ;
doivent en outre offrir une tenue en tension suffisante, au moins
identique à celle des puces qu’elles alimentent. – métallisation supérieure-couche diélectrique ;
– couche diélectrique-métallisation inférieure ;
– métallisation inférieure-brasure ;
1.4 Isolation électrique interne – brasure-semelle.
et externe
Cette fonctionnalité prend des formes différentes suivant les
cas : Température de repos T1
– pour les composants discrets (une puce par boîtier), elle α1
consiste à isoler les terminaux et certaines parties du boîtier seule-
α1 > α2
ment. Les autres surfaces, notamment celles destinées au refroi-
dissement, sont reliées directement à l’un des potentiels de la α2
puce ; à charge pour l’utilisateur d’assurer l’isolation électrique
avec l’environnement. Il existe également des boîtiers offrant une Température T2 > T1
isolation complète (hormis les terminaux de sortie), mais ce n’est
pas le cas le plus fréquent car il se traduit par des performances Compression
thermiques dégradées ;
– pour la quasi-totalité des modules (plusieurs puces par boî-
tier), l’isolation complète (hors terminaux électriques) est par Traction Traction
contre la règle. La face arrière du module, destinée à recevoir un
dissipateur thermique, n’est reliée à aucun potentiel électrique Figure 3 – Assemblage de deux matériaux ayant des coefficients
interne. de dilatation ␣ différents

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71
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MODULES ET BOÎTIERS DE PUISSANCE (PACKAGING) ______________________________________________________________________________________

1
a vue écorchée

Puce Fil de bonding Terminal électrique


(patte extérieure)
Encapsulant

Patte centrale

100 µm
Semelle Brasure
b vue en coupe
Figure 6 – Fissuration de la brasure entre la puce (couche supérieure)
Figure 4 – Boîtier discret TO220 montrant les connexions par fils et la métallisation du substrat (en bas) (doc. Université Nottingham)
de bondings pour les pattes extérieures, et la connexion directe
entre la patte centrale et la semelle

2.1.2 Augmentation de la durée de vie


Estimer la durée de vie d’un composant est un exercice
périlleux : nous avons vu que le cyclage thermique entraîne la
fatigue du packaging, mais ce cyclage dépend de l’environnement,
et n’est que très grossièrement prévisible. La température
ambiante (et donc la météo !), la puissance consommée, la qualité
du refroidissement, etc. vont avoir un effet sur le profil de tempé-
rature vu par le composant.
La solution courante pour faire face à ces incertitudes est de
considérer un « pire cas », dans lequel le cyclage de température
est maximal tout au long de la vie du composant. Une telle simplifi-
cation, qui mène probablement au surdimensionnement des struc-
tures, permet cependant de faire des comparaisons qualitatives lors
de la conception d’un boîtier pour faire les meilleurs choix.
Le concepteur d’un boîtier peut en effet jouer sur de nombreux
a vue écorchée paramètres pour en augmenter la robustesse vis-à-vis du cyclage.

Terminal électrique Exemple


Couvercle Puce Brasure supérieure
Métallisation Citons (cf. § 3 et 4 pour plus de détails) l’utilisation de matériaux
supérieure dont le coefficient de dilatation est proche des autres éléments du
Fil boîtier (semelle en composite aluminium-carbure de silicium plutôt
de bonding Couche Substrat
diélectrique qu’en cuivre) ou la modification des structures (substrat céramique
Gel plus épais, avec des métallisations plus fines, gravure de motifs spé-
Métallisation
diélectrique cifiques).
inférieure
Semelle Il est intéressant de noter que, bien souvent, les choix de
Brasure inférieure conception qui améliorent la fiabilité sont en complète opposition
b vue en coupe avec ceux offrant les meilleures performances électriques et ther-
miques. Il y a donc là une recherche de compromis global qui ne
se limite pas au choix performance/prix : même en y mettant les
Figure 5 – Module de puissance montrant les substrats DBC équipés
de leurs puces moyens financiers, il n’existe pas à l’heure actuelle de solution
offrant de bonnes performances dans tous les domaines
(électrique, thermique et fiabilité pour citer les principaux, aux-
quels on peut ajouter l’encombrement et le poids).
Notez que les interactions sont nombreuses, et que l’on ne peut
bien évidemment pas considérer que le comportement de chacune
de ces interfaces est indépendant des autres couches. 2.2 Performances électriques
Puisqu’il fournit le circuit de connexion entre ses terminaux
Exemple externes et la ou les puces, le boîtier a une influence sur les perfor-
On peut voir figure 6, une fissure se propageant au cœur de la bra- mances électriques : un circuit long va avoir une inductance et une
sure (et non pas à l’interface), causée par le cyclage thermique de résistance parasites importantes, et si les métallisations ont une
l’assemblage puce/brasure/substrat métallisé. surface importante, leur capacité parasite ne sera pas négligeable.

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D 3 116 – 4 est strictement interdite. – © Editions T.I.

72
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E3385

Conditionnement des modules


de puissance
1
par Raphaël RIVA
Ingénieur de recherche
IRT Saint Exupéry, Toulouse, France

Cet article est la version actualisée de l’article « Conditionnement des modules de


puissance » rédigé par Ludovic MÉNAGER, Bruno ALLARD et Vincent BLEY, paru en 2010.

1. Module de puissance 2D.................................................................. E 3 385v2 - 2


2. Puces semi-conductrices................................................................. — 3
2.1 Constitution............................................................................................ — 3
2.2 Exemples de composants de puissance à grand gap ........................ — 4
3. Substrats .............................................................................................. — 4
3.1 Circuit imprimé ...................................................................................... — 4
3.2 Substrat métallique isolé ...................................................................... — 4
3.3 Substrat céramique métallisé............................................................... — 5
4. Semelles ............................................................................................... — 6
5. Techniques d’interconnexion ......................................................... — 8
5.1 Brasure ................................................................................................... — 8
5.2 Solution de report « haute température »........................................... — 8
6. Fil de câblage ...................................................................................... — 12
7. Terminal électrique ........................................................................... — 14
8. Encapsulation ..................................................................................... — 14
9. Technologies d’interconnexion 3D............................................... — 15
9.1 Contacts brasés ..................................................................................... — 16
9.2 Contact pressé et par ressort................................................................ — 17
9.3 Contact par dépôt métallique ............................................................... — 18
9.4 Contact collé .......................................................................................... — 19
10. Gestion thermique............................................................................. — 19
10.1 Origine de la chaleur et mécanismes de transfert de chaleur ........... — 19
10.2 Systèmes de refroidissement............................................................... — 20
11. Conclusion ........................................................................................... — 22
12. Glossaire............................................................................................... — 22
13. Sigles, notations et symboles ........................................................ — 22
Pour en savoir plus ...................................................................................... Doc. E 3 385v2

n électronique de puissance, les composants sont intégrés dans des boî-


E tiers adaptés à chaque besoin. Un boîtier avec une seule puce
électronique à l’intérieur est dénommé « composant discret » et un boîtier avec
plusieurs puces, un « module ».
Ces modules de puissance sont une des parties élémentaires d’un convertis-
seur de puissance. Selon leur fabrication et leurs associations, ils remplissent
Parution : décembre 2020

de nombreuses fonctions électriques, telles qu’une cellule de commutation, un


interrupteur bidirectionnel en courant, un onduleur ou un pont redresseur.

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés E 3 385v2 – 1

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E3385

CONDITIONNEMENT DES MODULES DE PUISSANCE _______________________________________________________________________________________

Un module de puissance est constitué de sept constituants élémentaires :


des puces électroniques appelées « puces semi-conductrices », un substrat
céramique métallisé, une semelle, des brasures, des éléments de connexion
internes, des terminaux électriques et un encapsulant.
Dans de nombreux domaines tels que l’automobile et l’aéronautique, de
nouveaux besoins nécessitent de développer des modules de puissance avec
une densité de puissance plus élevée et capables de fonctionner au long court
1 à haute température (supérieure à 200 °C).
En automobile, il faut réduire les coûts des systèmes électriques, ce qui
oblige à les rapprocher des dispositifs mécaniques qu’ils contrôlent. Ainsi, cer-
tains systèmes doivent fonctionner à des températures ambiantes comprises
entre – 40 et 160 °C.
En aéronautique, l’objectif est de réduire la complexité des câblages (hydrau-
liques) des avions commerciaux, ce qui nécessite de rapprocher les
convertisseurs au plus près des actionneurs qu’ils commandent. De ce fait, cer-
tains dispositifs devront fonctionner avec une température ambiante variant
entre – 55 et 225 °C.
Pour répondre à ces besoins, l’intégration planaire 2D des modules de puis-
sance basée sur des reports de composants par brasure et des interconnexions
via des fils de câblage est à revoir. Des améliorations sur le conditionnement
(packaging) du module de puissance sont à apporter notamment grâce à l’utili-
sation de nouvelles technologies d’interconnexion 3D alternatives aux fils de
câblage et de nouveaux matériaux pouvant supporter des contraintes ther-
miques élevées.
Dans cet article, les différents composants du module de puissance sont pré-
sentés en détail, avec leurs procédés de mise en œuvre, leurs performances et
leurs limites. Des solutions technologiques pour l’augmentation de la densité
de puissance dans les modules de puissance et la haute température sont
notamment exposées.

1. Module de puissance 2D – l’isolation électrique interne et externe : le packaging doit


protéger ses composants de tout risque de court-circuit.
Chaque composant élémentaire doit donc être défini correcte-
Le conditionnement (packaging) du module de puissance est ment pour lui permettre de remplir ces quatre fonctions, notam-
l’environnement rapproché des puces semi-conductrices. Il doit ment vis-à-vis des contraintes imposées par chaque domaine
remplir certaines conditions pour assurer le bon fonctionnement (aéronautique, automobile...). Dans la suite de cet article, chaque
des puces : composant élémentaire d’un module 2D (ou planaire) est détaillé
(figure 1).
– la tenue mécanique : le packaging doit protéger la puce de
l’humidité, de la poussière et de l’électricité statique [1]. Il la pro-
tège mécaniquement par un couvercle, conçue généralement en
matière plastique ; À retenir
– la gestion thermique : le packaging doit fournir un chemin
– Le packaging est l’environnement rapproché des puces
de faible résistance thermique pour pouvoir évacuer au maximum
semi-conductrices.
la chaleur dissipée par la ou les puces qu’il contient [1]. Pour ne
pas détériorer une puce de puissance, il faut l’utiliser dans son – Il doit remplir quatre conditions pour assurer le bon fonc-
domaine de fonctionnement sécurisé (Safe Operating Area, SOA). tionnement des puces : la tenue mécanique, la gestion ther-
Il est délimité par la température dite « de jonction » et la tenue en mique, les connexions électriques et l’isolation électrique
tension des puces ; interne et externe.
– les connexions électriques : le packaging doit assurer, par – Le module de puissance a plusieurs composants
l’intermédiaire de terminaux, un moyen d’accéder aux électrodes élémentaires : des puces semi-conductrices, un substrat céra-
des puces. Leur résistance, leur inductance et leur capacité para- mique métallisé, une semelle, des brasures, des éléments de
sites doivent être faibles pour ne pas dégrader le comportement connexion internes (fil de câblage), des terminaux électriques
électrique du composant ; et un encapsulant.

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_______________________________________________________________________________________ CONDITIONNEMENT DES MODULES DE PUISSANCE

Fil de câblage Puce Terminal


Gel diélectrique électrique

⎧ Métallisation Couvercle

⎪ supérieure
Brasure
Substrat ⎪ Couche supérieure
céramique
métallisé
⎨ diélectrique

⎪⎩ Métallisation
inférieure
Brasure
inférieure 1
Pâte Semelle
thermique
Dissipateur
thermique

Figure 1 – Structure schématique d’un module de puissance classique [2]

Métallisation supérieure Tableau 1 – Propriétés physiques des matériaux


Anode
Passivation semi-conducteurs à 25 °C [4] [5]
Conductivité Tenue Énergie
Matériau thermique diélectrique de gap
P+ (W · m–1 · K–1) (kV/cm) (eV)

N– Semi-conducteur
Si 150 200 1,1
SiC-3C 450 1 200 2,2
N+
SiC-4H 450 2 000 3,26
Cathode
SiC-6H 450 2 400 3
Métallisation inférieure
GaN-3C 130 1 000 3,27
Figure 2 – Coupe transversale schématique d’une puce de puissance
(diode) [6] GaN-2H 130 3 300 3,29
Diamant 2 000 à 2 200 5 600 5,45

2. Puces semi-conductrices
Température (K)

2.1 Constitution 1 600


SiC-4H
SiC-6H
Les puces semi-conductrices sont les éléments actifs d’un
module de puissance (figure 1). Elles ont généralement une struc- 1 400 GaN
SiC-3C
ture verticale, c’est-à-dire que les faces inférieures et supérieures
jouent un rôle électrique. Cela nécessite une solution de report de 1 200
puce (de la brasure par exemple) qui assure, en plus du refroidis-
sement et de la tenue mécanique, la connexion électrique. 1 000
Elles sont constituées de trois parties principales (figure 2) :
– un matériau semi-conducteur dont l’épaisseur est de 800
Si
quelques centaines de micromètres ; JFET 1,8 KV - 350 °C
– deux métallisations de quelques micromètres d’épaisseur : 600 SOI 80 V COOLMOS
220 °C IGBT 1,2 KV - 175 °C
une sur la face arrière pour le report de la puce sur le substrat VDMOS
céramique métallisé, et une sur la face supérieure où sont réali- 400 600 V - 200 °C
sées les connexions électriques (fils de câblage, rubans, solder 10 102 103 104
bumps...). Le matériau semi-conducteur généralement utilisé est le Tension de claquage (V)
silicium (Si). Le carbure de silicium (SiC) émerge et les considéra-
tions présentées dans cet article restent en grande partie valables ; Figure 3 – Tenue en tension de matériaux semi-conducteurs
– une couche de passivation recouvrant la face supérieure de en fonction de la température d’emballement thermique (données
internes du laboratoire AMPERE)
la puce et qui permet de réduire les risques de rupture diélectrique
et de limiter les courants de fuite de surface de la puce.
La limite théorique en température du silicium est de l’ordre de au-delà de 200 °C, l’utilisation de matériaux semi-conducteurs à
150 °C pour des composants haute tension (tension de claquage large bande interdite (grand gap), à savoir le carbure de silicium
d’environ 1 000 V), contre 250 °C environ pour des composants (SiC), le nitrure de gallium (GaN) ou le diamant, est donc néces-
basse tension (tension de claquage inférieure à 100 V) (figure 3) saire (figure 3). Le tableau 1 [4] [5] montre les propriétés phy-
[3]. Pour des tensions supérieures à 200 V et des températures siques des matériaux semi-conducteurs.

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CONDITIONNEMENT DES MODULES DE PUISSANCE _______________________________________________________________________________________

2.2 Exemples de composants – le substrat métallique isolé (SMI) ;


de puissance à grand gap – le substrat céramique métallisé.

Concernant les composants de puissance en carbure de sili-


cium, de plus en plus de variantes, telles que des diodes Schottky 3.1 Circuit imprimé
haute température (600 et 1 200 V), des transistors JFET (Junction
Field Effect Transistor) et des MOSFET (Metal Oxide Semiconduc- Le circuit imprimé est constitué d’un composite de fibre de verre-

1
tor Field Effect Transistor) haute température, sont disponibles époxy (l’isolant allant de 0,2 à 3 mm d’épaisseur) et d’une ou plu-
dans le commerce. Les problèmes rencontrés pour la mise en sieurs couches de cuivre assemblées par laminage (35 à 400 µm). Il
œuvre de wafers en carbure de silicium présentant un taux de est très utilisé en électronique du signal notamment pour les cartes
défauts encore trop important, ainsi que les difficultés de passiva- de commande. En électronique de puissance, ce n’est pas une solu-
tion et de tenue des oxydes, limitent toujours le développement de tion satisfaisante pour des applications de forte puissance. Il a une
composants en carbure de silicium pour le domaine de la forte mauvaise conductivité thermique (< 1 W · m–1 · °C–1), un fort coeffi-
puissance. Toutefois, de nombreux prototypes avec des grands cient de dilatation (≈ 60 ppm/°C), et une température de fonctionne-
calibres en tension et en courant, tels que des diodes PIN (Positive ment limitée (< 200 °C). Néanmoins, pour des raisons de gain de
Intrinsic Negative) haute tension de 4 à 8 kV, sont encore en cours volume et de protection des composants, de nombreux travaux de
de développement dans les laboratoires. De nombreux fournis- recherches portent aujourd’hui sur l’enfouissement de composants
seurs tels que STMicroelectronics commercialisent des modules dans le PCB.
de puissance tout carbure de silicium. Néanmoins, des recherches
sont toujours menées sur ce thème afin de tirer tout le potentiel de
cette solution notamment pour les applications de puissance à 3.2 Substrat métallique isolé
haute température [7].
Du fait des difficultés technologiques (fabrication) qu’il Le substrat métallisé isolé (SMI ou IMS en anglais, figure 4a) est
engendre, le nitrure de gallium, pourtant répandu dans le sec- constitué d’un circuit imprimé simple face collé sur une semelle
teur de la photonique, est encore utilisé marginalement dans les métallique (généralement en aluminium et de 0,5 à 3 mm d’épais-
composants de puissance mais en forte émergence. Sa principale seur). Concernant l’isolant, il a une épaisseur plus faible qu’un cir-
limite est qu’il n’existe pas pour l’instant sous forme de substrat cuit imprimé (≈ 100 µm contre 1,6 mm en moyenne), ce qui
massif permettant de faire des composants verticaux directement. améliore la conductivité thermique, et peut être une résine verre
Quelques composants tels que des diodes Schottky verticales et époxy pour des raisons économiques, une résine époxy chargée
des transistors MOSFET latéraux commencent à arriver sur le mar- ou un polyimide permettant d’atteindre des températures proches
ché des composants de puissance. de 200 °C.
Malgré leurs bonnes propriétés thermiques et électriques, les Malgré un procédé de mise œuvre simple et un coût acceptable,
composants de puissance en diamant actuels [diodes Schottky le SMI est difficilement utilisable dans les environnements où les
2 500 V, transistors MISFET (Metal Insulator Semiconductor FET)...] contraintes thermiques sont importantes. En effet, dans le cas de
sont seulement des prototypes réalisés en laboratoire. la résine époxy, une étude montre que ses propriétés sont dégra-
dées au-delà de 160 °C [9]. Par ailleurs, les solutions polyimides,
dont les températures d’utilisation sont proches de 200 °C, ont des
À retenir propriétés thermiques, électriques et mécaniques qui ne per-
mettent pas de les utiliser dans des environnements sévères.
– Les puces semi-conductrices sont les éléments actifs d’un
module de puissance.
– Elles sont constituées de trois parties principales : un
matériau semi-conducteur, deux métallisations, une couche de Métallisation
passivation.
– Le matériau semi-conducteur généralement utilisé est le Isolant époxy
silicium (Si), mais il est limité pour des applications en haute
température.
– L’utilisation de carbure de silicium (SiC), de nitrure de gal-
lium (GaN) ou de diamant, est nécessaire pour des tensions
supérieures à 200 V et des températures au-delà de 200 °C.
Semelle

a substrat SMI
3. Substrats
Le substrat se situe entre les puces semi-conductrices et la
Isolant céramique
semelle (figure 1). Il intègre des pistes conductrices et assure l’inter-
connexion des composants électroniques du module de puissance,
leur assemblage mécanique, leur isolation électrique et doit favo-
riser l’extraction des calories qu’ils dissipent vers le dissipateur
thermique. Enfin, son rôle d’un point de vue thermomécanique est
d’homogénéiser les coefficients de dilatation thermique
Métallisations
(CTE) entre la semelle et les puces. L’isolation électrique est assurée
par des diélectriques organiques ou des céramiques.
Les différents types de substrats utilisés en électronique de puis- b substrat céramique DBC
sance peuvent être regroupés en trois catégories et sont chacun
décrits ci-après :
Figure 4 – Structure (a) d’un substrat SMI et (b) d’un substrat
– le circuit imprimé (PCB en anglais) ; céramique DBC [8]

E 3 385v2 – 4 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

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E3385

_______________________________________________________________________________________ CONDITIONNEMENT DES MODULES DE PUISSANCE

Tableau 2 – Propriétés physiques des céramiques diélectriques à 25 °C ([4] et [10])


Matériau
Propriété
Al2O3 (96 %) AlN BeO Si3N4
CTE (ppm/°C) 7,5 à 8,1 4,2 à 5,2 6,8 à 7,5 2,7 à 3,4
Conductivité thermique (W · m–1 · K–1) 20 à 30 170 à 260 250 60
Tension de claquage (kV/mm)
Module de Young (GPa)
11 à 16
300 à 400
14 à 17
300 à 310
10 à 14
300 à 350
15
300
1
Contrainte maximale à la flexion (MPa) 250 à 300 300 à 500 170 à 250 > 700
Coût (base Al2O3 96 %) 1x 4x 5x 2,5x

3.3 Substrat céramique métallisé


Cuivre
Pour répondre aux exigences thermiques des modules de puis-
sance, il faut avoir recours à des substrats isolants à base de maté- Céramique
riaux céramiques (figure 4b). Le tableau 2 répertorie quatre
céramiques utilisables :
– d’après les données qu’il présente, on constate que l’alumine
(Al2O3) a une faible conductivité thermique, ce qui limite son utili-
sation à des applications de faible densité de puissance. Cepen- Cuivre
Oxyde de cuivre
dant, l’alumine par rapport aux autres céramiques est la moins
onéreuse, ce qui la rend intéressante pour des applications où le O2 Céramique
facteur économique est important ;
– concernant le nitrure d’aluminium (AlN), il a d’une part une
bonne conductivité thermique par rapport à l’alumine. D’autre part, Chauffage
son CTE proche de celui du silicium (4,2 à 5,2 versus 2,6 ppm/°C)
permet de réduire les contraintes thermomécaniques au niveau de Cuivre
État eutectique
la brasure utilisée pour la fixation de la puce sur le substrat céra- du cuivre
mique métallisé. Les performances électriques, thermiques et Céramique
mécaniques du nitrure d’aluminium compensent le coût important
des substrats DBC AlN par rapport à celui des substrats DBC Al2O3,
Diffusion de O2
et permettent une utilisation de celui-ci dans les applications haute et refroidissement
température (supérieure à 400 °C) ;
– malgré une conductivité thermique comparable à celle du Cuivre
nitrure d’aluminium, le béryllium (BeO) est très rarement utilisé
pour des raisons de toxicité lors de son usinage et d’un coût non Céramique
négligeable (cinq fois supérieur à celui de l’alumine) ;
– le nitrure de silicium (Si3N4) est une céramique prometteuse.
Elle a une contrainte à la flexion élevée (> 700 MPa) lui permettant Figure 5 – Procédé de fabrication d’un substrat DBC Al2O3 [11]
d’être utilisée sans le renfort d’une semelle et un coefficient de dila-
tation proche de celui des puces (2,7 à 3,4 versus 2,6 ppm/ °C).
Une des méthodes utilisées pour métalliser des substrats iso- atmosphère pressurisée de dioxygène, à une température proche
lants à base de matériau céramique est le report de feuilles métal- de la fusion des films de cuivre (entre 1 065 et 1 080 °C), qui sont
liques. Une feuille métallique épaisse (plusieurs centaines de en contact avec la céramique. Une liaison mécanique très forte
microns) est reportée de part et d’autre du substrat. Trois tech- entre la céramique et les métallisations en cuivre est garantie en
niques différentes industrielles permettent d’obtenir un joint entre mettant l’ensemble céramique-cuivre à une température proche de
les feuilles métalliques et le substrat : la fusion du cuivre. Concernant la réalisation d’un substrat DBC
AlN, le procédé est identique à celui utilisé pour l’alumine, mais
– la technique DBC (Direct Bonded Copper) ;
auparavant une étape d’oxydation du nitrure d’aluminium est
– la technique DAB (Direct Aluminium Bonded) ; nécessaire pour créer la couche d’alumine permettant l’adhésion.
– la technique AMB (Active Metal Brazing).
Durant des cyclages thermiques de grande amplitude, le subs-
trat DBC subit des contraintes thermomécaniques liées aux dif-
3.3.1 Technique DBC férences de CTE entre les métallisations cuivre et la céramique. Au
cours du temps, la fatigue et le durcissement de la métallisation
Le substrat DBC (Direct Bonded Copper), très répandu dans
cuivre entraînent le décollement du cuivre du substrat DBC. Ce
les modules de puissance, est constitué d’une céramique [alumine
décollement engendre des contraintes dans la céramique se tradui-
polycristalline (Al2O3) à 96 ou 99 %, nitrure d’aluminium (AlN) ou
sant par une fissuration de cette dernière (figure 6) [4].
oxyde de béryllium (BeO)] sur laquelle est déposée sur les deux
faces une métallisation en cuivre. L’épaisseur standard est de Afin de réduire les contraintes dans la céramique, différentes
635 µm pour la céramique et 300 µm pour la métallisation en solutions sont possibles [11] [12] :
cuivre. Le tableau 2 [4] [8] présente les propriétés physiques des – utilisation d’une céramique plus rigide telle que le nitrure de
céramiques isolantes. silicium ;
Le procédé de fabrication d’un substrat DBC Al2O3 est présenté – diminution de l’épaisseur des métallisations en cuivre et plus
sur la figure 5 [11]. La céramique Al2O3 est portée sous une particulièrement celle de la face supérieure du substrat DBC ;

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1

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D3117

Définition d’un dissipateur


thermique en milieu industriel
1
par Jean-François ROCHE
Directeur technique, ARCEL

avec la collaboration de Bruno ALLARD

1. Situation ..................................................................................................... D 3 117 - 3


1.1 Cahier des charges ...................................................................................... — 3
1.2 Mode de refroidissement ou transmission de chaleur............................. — 3
1.3 Simulation .................................................................................................... — 5
1.4 Calcul académique et réalité industrielle................................................... — 5
2. Étapes principales de conception d’un convertisseur................... — 5
2.1 Modélisation des composants.................................................................... — 5
2.2 Utilisation des fiches techniques et modèles de pertes ........................... — 6
2.3 Boîtiers ......................................................................................................... — 7
2.4 Choix des composants ................................................................................ — 9
2.5 Dimensionnement d’un onduleur .............................................................. — 9
2.6 Résistance thermique minimale................................................................. — 10
2.7 Choix du dissipateur.................................................................................... — 10
2.8 Dissipateurs particuliers ............................................................................. — 12
2.9 Ventilateurs .................................................................................................. — 12
2.10 Chambres à eau ........................................................................................... — 13
2.11 Systèmes autonomes.................................................................................. — 13
3. Cas particuliers ........................................................................................ — 14
3.1 Notion d’impédance thermique ................................................................. — 14
3.2 Notion de constante de temps thermique................................................. — 14
4. Conclusion ................................................................................................. — 16
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. D 3 117

’une des étapes, lors de la détermination des différents éléments


L constituant un convertisseur de puissance, est le choix du dissipateur, afin
de préserver l’intégrité thermique des semi-conducteurs de puissance. Celle-ci
est réalisée en maintenant la température de jonction du composant en
dessous de sa valeur critique pendant le cycle de fonctionnement.
Le coût du dissipateur, ou plus globalement de la fonction refroidissement,
est étroitement lié au couple dissipateur-composant.
Par exemple, pour maintenir à température un ou deux boîtiers TO3, le coût
du couple « dissipateur + ventilateur » est souvent plus important que la
somme des coûts des composants à refroidir. En règle générale, plus l’applica-
tion est de forte puissance, plus le couple « semi-conducteur + étages de
commande » est prépondérant, face au poste dissipateur. Cela est dû en partie
au coût des semi-conducteurs de puissance.
Le choix du dissipateur ne peut être effectué qu’en connaissance des
éléments suivants :
— nombre et type des composants à refroidir, donc connaissance du boîtier
utilisé pour chaque composant (composant discret, module, presspack...) ;
Parution : août 2007

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D3117

DÉFINITION D’UN DISSIPATEUR THERMIQUE EN MILIEU INDUSTRIEL _____________________________________________________________________________

— pertes générées par chaque composant (dépendent du cycle de fonction-


nement et de la topologie du montage), surcharges éventuelles ;
— mode de refroidissement souhaité (convection naturelle, ventilation forcée,
chambres à eau...) ;
— contraintes mécaniques et intégration du système dans son environnement
final (contraintes diélectriques, fixation du montage, mise en coffret).

1 L’objet de ce dossier est de développer la démarche industrielle de choix d’un


dissipateur, compromis entre le calcul académique et la simulation parfois
laborieuse.

Notations et symboles Notations et symboles

Symbole Unité Définition Symbole Unité Définition

B W· m–2 intensité du rayonnement t s temps


c J ·kg–1 · K–1 capacité thermique massique T K température
C th J · K–1 capacité thermique Tj K température de jonction
D indice de modulation u m/s vitesse de l’air
e m épaisseur v V tension électrique
E off J énergie dissipée à la fermeture du V0 V tension
composant V ak V tension entre l’anode et la cathode
E on J énergie dissipée à l’ouverture du d’un thyristor
composant V bus V tension du bus d’alimentation
E rec J énergie de recouvrement continu d’un onduleur
F Hz fréquence du courant de sortie V cc V tension continue aux bornes du
thyristor lors de l’ouverture
F sw Hz fréquence de commutation
V ce V tension entre le collecteur et
i A intensité électrique l’émetteur d’un IGBT
Iak A intensité traversant un thyristor V ces V tension
Iav , Imoy A intensité moyenne Vd V tension de diode
Ic A intensité traversant un transistor V dc V tension de bus
IGBT
V ds V tension entre le drain et la source
Id A intensité traversant une diode d’un MOSFET
Ieff A intensité du courant de sortie V GE V tension entre la grille et l’émetteur
efficace de l’IGBT
In A intensité du courant nominal Vn V tension nominale
Ioff A intensité du courant coupé V t0 , V t V tension de diode ou thyristor
Ion A intensité du courant à la mise en W J énergie
conduction
α W · m–2 · K–1 coefficient de convection thermique
I peak A intensité de courant crête
β W · m–2 · K–1 coefficient de rayonnement
l m largeur
ε émissivité
L m longueur
φ W flux thermique de conduction
m kg masse
Φ rad angle de déphasage
P W pertes dans un composant
λ W · m–1 · K–1 conductivité thermique
Pcom W pertes en commutation
σ W · m–2 · K–4 constante de Stefan
P cond W pertes en conduction σ = 5,669 · 10–8 W · m–2 · K–4
P rec W pertes par recouvrement τ s constante de temps thermique
Q W flux thermique de convection θ K température
Q rr C charge électrique stockée dans une
diode
R0 Ω résistance Indices
Rd Ω résistance de diode
Rt Ω résistance de diode ou thyristor a ambiante
R thj–c K/W résistance thermique c case, boîtier
jonction-boîtier h heatsink, dissipateur
R thj–h K/W résistance thermique j junction, jonction
jonction-dissipateur
D diode
S m2 surface
Q IGBT

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____________________________________________________________________________ DÉFINITION D’UN DISSIPATEUR THERMIQUE EN MILIEU INDUSTRIEL

1. Situation
Bounding Puce Boîtier
plastique

Aperçu historique
Gel isolant
L’évolution constante des semi-conducteurs permet la Connexion
conception de systèmes dont les performances ne cessent de

1
métallique
croître. Il est loin le temps où le tube électronique utilisé en Connexion
diode ou bien le transistor régnaient en maîtres. métallique
À cette époque, presque révolue (certaines applications uti- Isolant
lisent encore des tubes, comme des ballasts haute tension ou Brasures
les amplificateurs audiophiles par exemple), les joules dissipées Semelle
par le tube rayonnaient à travers le verre, dans l’air ambiant. La Graisse
seule solution pour ne pas détériorer les composants était de thermique
contrôler la température ambiante du local industriel. Compte
tenu du nombre de composants employés, des températures
mises en jeu, et du volume des montages, des systèmes réfri- Dissipateur
gérants étaient communément utilisés. Le volume occupé par
l’ensemble montage – refroidissement était conséquent, et une Figure 1 – Vue en coupe d’un module IGBT
mise en défaut du système de ventilation entraînait une dégra-
dation rapide de l’installation.
— contraintes normatives : fonction du domaine d’application du
Les composants de puissance de type semi-conducteur présen- convertisseur (médical, ferroviaire...), fige souvent les diélectriques,
tent l’avantage de ne pas utiliser l’air comme vecteur thermique, les lignes de fuites, le cheminement, l’indice de pollution... ;
mais un substrat qui est lui-même plaqué sur une semelle — contraintes spécifiques liées à l’utilisation : taux de charge,
composée d’un matériau présentant une bonne conduction thermi- enveloppe de courant, surcharges ponctuelles, tenue aux courts-
que. La figure 1 montre en coupe un module IGBT (insulated gate circuits ;
bipolar transistor ). Cette structure permet l’utilisation de dissipa- — contraintes financières : l’estimation du coût de la fonction
teurs, dont le rôle est d’évacuer les joules produites par la puce. De peut être un critère de choix entre deux solutions.
plus, l’évolution des semi-conducteurs autorise la réalisation de
montages de plus en plus performants, donc l’augmentation des
pertes à évacuer par les jonctions. Une grande diversité de dissi- 1.2 Mode de refroidissement
pateurs permet d’obtenir dans chaque cas le compromis optimal. ou transmission de chaleur
Il existe plusieurs manières pour la chaleur d’échanger avec le
1.1 Cahier des charges milieu ambiant : conduction, convection et rayonnement. La
chaleur se déplace du corps le plus chaud vers le corps le plus
Le choix du refroidisseur dépend des éléments fournis dans le
froid, par ces trois modes simultanément.
cahier des charges du convertisseur. Les éléments de base que l’on
doit connaître sont la nature du convertisseur et son environnement. L’énergie W nécessaire pour élever la température d’un corps est
proportionnelle à sa masse m, à la différence de température entre
l’état initial (T 1) et final (T 2) et à une constante c, nommée chaleur
1.1.1 Nature du convertisseur
massique (ou capacité thermique massique, en J · kg–1 · K–1), qui
C’est la fonction électrique que doit assurer le convertisseur. indique la quantité d’énergie utile pour élever la température
Onduleur, redresseur ou hacheur, ces fonctions sont décrites par de 1 kg du composant considéré de 1 K :
un vocable approprié issu de la norme CEI/TR 60971. Le tableau 1
W = mc (T 2 – T 1) (1)
(0)
résume les fonctions simples issues ou adaptées de cette norme.
À la nature du convertisseur sont associées les grandeurs dW dθ
électriques suivantes : P = ---------- = mc -------- (2)
dt dt
— courant d’entrée et de sortie ;
— surcharges en courant en fonction du temps ; C’est cette énergie, issue de la jonction du semi-conducteur, que
— tension d’alimentation, tension de bus ; le refroidisseur doit évacuer.
— surcharges en tension et répétition dans le temps ;
— fréquence de découpage pour les hacheurs ou onduleurs ; 1.2.1 Conduction
— fréquence de sortie pour les onduleurs ;
— valeurs des éléments qui influencent le comportement du La chaleur se transmet par contact direct entre deux pièces ou
montage, tels que les inductances, transformateurs, condensateurs ; bien par propagation à l’intérieur d’un même matériau [BE 8 200].
— éventuellement une indication sur le type de composant à La variation de température est linéaire à l’intérieur d’un matériau
utiliser est fournie ; homogène. La conductibilité d’un matériau est caractérisée par une
— isolation électrique requise. conductivité thermique notée λ (W · K–1 · m–1) (tableau 2).
Le flux thermique (en watts), qui traverse une paroi constituée
(0)
1.1.2 Environnement du convertisseur d’un seul matériau de conductivité thermique λ, d’épaisseur e (en
mètres) et de surface S (en mètres carrés), est donné par la for-
L’environnement est constitué des contraintes suivantes : mule suivante :
— contraintes thermiques : température ambiante, type de S
refroidissement imposé, température du fluide ; φ = λ ⋅ ----- ⋅ ( θ 2 – θ 1 ) (3)
e
— contraintes mécaniques : volume et masse imposés pour le
montage, orientation et intégration du convertisseur dans son θ 2 – θ 1 représente la différence de température entre les deux
environnement ; faces du matériau.

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D3117

DÉFINITION D’UN DISSIPATEUR THERMIQUE EN MILIEU INDUSTRIEL _____________________________________________________________________________

Tableau 1 – Codification des principaux convertisseurs


Type de montage Désignation Représentation
Deux diodes en série L1U

1 Deux thyristors en série L1C

Pont redresseur monophasé à diodes B2U

Pont redresseur triphasé à diodes B6U

Gradateur triphasé W3C

Bras interrupteur L1CT

Onduleur monophasé B2CT


à interrupteurs
U V

Onduleur triphasé B6CT


à interrupteurs
U V W

1.2.2 Convection
Tableau 2 – Conductivité thermique et capacité thermique
massique de matériaux usuels (1) Cet échange de chaleur se produit entre un solide et un gaz ou
un liquide par déplacement de particules [BE 8 205].
Conductivité Capacité thermique
Le cas le plus simple est celui d’une résistance électrique qui
Matériau thermique massique
échange avec l’air ambiant. La convection est dans ce cas naturelle.
(W · K–1 · m–1) (J · K–1 · kg–1) L’air s’échauffe au contact des parois de la résistance et s’élève. Il
est possible d’améliorer l’échange thermique en accélérant la
Aluminium 238 917 vitesse de passage de l’air au contact de la résistance. Dans ce cas,
on dit que la convection est forcée.
Cuivre 397 386
Soit un flux thermique transmis par convection Q (W), à travers
Acier 78,2 456 une paroi de surface S, qui présente une différence de température
de (θ 2 – θ 1). (0)
Argent 425 234 α est le coefficient de convection (W · K–1 · m–2). Il représente le
flux thermique reçu par une surface de 1 m2 pour une différence de
Or 315,5 130 température entre la surface et l’air de 1 K. α varie avec la nature
de la surface et la vitesse du fluide :
AlSiC 150 à 200
Q = ( θ 2 – θ 1 )S α (4)
Silicium 148 700

Eau 0,585 4 185 1.2.3 Rayonnement


Air 0,023 1 000 C’est la transmission directe de la chaleur par radiation d’un
corps chaud sur un corps froid [BE 8 210]. Cet échange thermique
(1) Entre 0 et 100 oC.
est réalisé par l’émission d’ondes électromagnétiques et ne

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D 3 117 − 4 est strictement interdite. − © Editions T.I.

82
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D3119

Propriétés physiques et électroniques


du carbure de silicium (SiC)
1
par Christophe RAYNAUD
Maître de conférences à l’INSA de LYON

1. Propriétés du carbure de silicium (SiC) ............................................. D 3 119 - 2


1.1 Diagramme binaire Si–C ............................................................................. — 2
1.2 Aspect cristallographique ........................................................................... — 2
1.3 Propriétés physiques du SiC....................................................................... — 2
1.4 Structure de bande du SiC.......................................................................... — 3
1.5 Propriétés électroniques du SiC intrinsèque............................................. — 4
1.6 Propriétés électroniques du SiC extrinsèque ............................................ — 5
1.6.1 Énergies d’activation des principaux dopants ................................. — 5
1.6.2 Ionisation incomplète des dopants ................................................... — 5
1.6.3 Conséquences de l’ionisation incomplète
sur les mesures électriques ............................................................... — 8
1.6.4 Mobilité des porteurs libres et résistivité volumique ...................... — 8
1.6.5 Résistivité volumique du SiC............................................................. — 10
1.6.6 Vitesse de saturation des porteurs libres ......................................... — 10
1.6.7 Champ critique.................................................................................... — 11
1.6.8 Coefficients d’ionisation..................................................................... — 12
2. Modélisation des diodes Schottky en régime direct ..................... — 13
2.1 Description du modèle développé numériquement................................. — 13
2.2 Quelques exemples de résultats ................................................................ — 14
3. Conclusion ................................................................................................. — 14
Références bibliographiques ......................................................................... — 14

rès d’un siècle après la découverte de ses propriétés semi-conductrices en


P 1907, le carbure de silicium apparaît sur la scène économique avec la mise
sur le marché des premiers composants commerciaux : les diodes Schottky en
2002 et les transistors JFET peu après, ainsi que les MESFET dans le domaine
des hyperfréquences. Le prix très élevé des substrats et couches épitaxiées rend
impératif d’avoir des simulations numériques très précises des comportements
en régime statique et dynamique des composants. En effet, plus les simulations
sont précises, plus on peut espérer réduire le nombre d’essais avant de réussir
les composants.
Parution : mai 2007

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83
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D3119

PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET ÉLECTRONIQUES DU CARBURE DE SILICIUM (SIC) _____________________________________________________________________

1. Propriétés du carbure 4 000

Température (°C)
de silicium (SiC) Pression 1 atm

3 500 V
C’est en 1907 que les propriétés semi-conductrices du SiC se V + graphite
V+L
sont manifestées, alors qu’un cristal de SiC soumis à une tension 3 000
de 10 V par H.J. Round, se met à produire de la lumière jaune,

1 orange et verte. Les principales propriétés du SiC qui intéressent


l’électronique sont résumées dans ce paragraphe.
2 500

2 000
V + SiC

L + SiC
1.1 Diagramme binaire Si–C Graphite
1 500 +
La figure 1 montre le diagramme de phase entre silicium et SiC
carbone. Le SiC correspond évidemment à un mélange en égale 1 000
quantité numérique des deux sortes d’atomes. Il ressort alors qu’il Si + SiC
n’existe pas de phase liquide de SiC. En effet, vers 2 700 oC, on
500 SiC
assiste à une décomposition du SiC en graphite et en une phase
vapeur riche en Si. Ainsi, toutes les techniques de croissance de
monocristaux en phase liquide habituellement utilisées pour le sili-
cium (tirage Czochralski, méthode Bridgeman...) sont impossibles. 0 20 40 60 80 100
Malgré tout, la présence d’un domaine biphasé liquide + SiC va Si C (% at) C
permettre de réaliser des croissances de monocristaux en phase
liquide, en partant de silicium liquide (ou d’une solution riche en Figure 1 – Diagramme de phase binaire du Si–C
Si), dans laquelle on amène du carbone [1].

1.2 Aspect cristallographique Atome Si

Le carbure de silicium est un matériau cristallin formé par


l’empilement alterné de plans compacts de « paires » C–Si
(figure 2). Les différentes séquences d’empilement de ces plans
donnent des cristaux différents appelés polytypes. On dénombre
plus de 200 polytypes pour le SiC. En électronique, les plus utilisés
sont les polytypes 6H, 4H, et 3C. Des recherches sont également
effectuées dans une moindre mesure sur les polytypes 15R et 2H.
Les lettres H, C et R se réfèrent au type cristallographique hexago- Atome C
nal, cubique ou rhomboédrique, et le nombre précédant la lettre à
la période d’empilement, selon la notation de Ramsdell.
Chaque atome de Si est lié à 4 atomes de C
Exemple : dans le cas du 6H,il faut empiler 6 plans pour retrouver et réciproquement, ce qui forme des tétraèdes
la même structure (figure 3).
Les paramètres de maille sont a et c. a est la distance entre deux Figure 2 – « Paire » SiC
atomes de Si dans le plan ( 1120 ) , c est la longueur de la maille
hexagonale ou encore la période d’empilement. Le tableau 1
résume les caractéristiques cristallographiques du SiC.
Bien sûr, les propriétés physiques et électriques sont plus ou C
moins dépendantes du polytype. Par la suite, nous nous limitons Si B
aux polytypes 6 H,4Het 3C.
C
A
1.3 Propriétés physiques du SiC k2 C
La longueur de la liaison Si–C est de 0,189 nm, contre 0,154 nm k1 B
pour la liaison C–C et 0,235 nm pour la liaison Si–Si. La liaison
Si–C, contrairement aux deux autres, n’est pas purement covalente h A
(elle est ionique à 12 % du fait de la différence d’électronégativité). k2 B
Des caractéristiques de cette liaison Si–C découlent les propriétés
k1 C
physico-chimiques telles que la dureté du matériau, très élevée,
mais aussi son inertie chimique (résistance à la corrosion), sa résis- h A
tance aux irradiations, etc. La rigidité de la liaison Si–C, et plus 6
C
k2
encore celle de C–C, ainsi que la masse importante du C et du Si,
fait que la conductivité thermique λ du SiC, et plus encore celle du k1 B
diamant, est élevée. A
h
Enfin, notons que le carbure de silicium, tout comme le diamant
n’existe pas en phase liquide, comme le montre le diagramme
binaire Si–C (figure 1). Dans le tableau 2 sont données la tempéra-
ture de fusion T f pour le silicium et la température de sublimation Figure 3 – Représentation du polytype 6H dans le plan ( 1120 )
T s pour SiC et le diamant. (0) par empilement des « paires » Si–C

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D3119

____________________________________________________________________ PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET ÉLECTRONIQUES DU CARBURE DE SILICIUM (SIC)

Tableau 1 – Propriétés structurales du SiC, du silicium et du diamant


Polytypes 4H–SiC 6H–SiC 3C–SiC Si Diamant
a (nm) 0,307 3 0,308 1 0,434 8 0,543 03 567
c (nm) 1,005 1,512

1
Groupe d’espace P63mc P63mc F43m Fd3m Fd3m
Longueur de liaison (nm) 0,189 0,189 0,189 0,235 0,154

(0)

Tableau 2 – Propriétés physico-chimiques du SiC, du silicium et du diamant


Polytypes 4H–SiC 6H–SiC 3C–SiC Si Diamant
Dureté (kg/mm2) 2 130 3 980 1 000 10 000
λ (W · m–1 · K–1) 450 à 490 450 à 490 450 à 490 150 2 200
T f ou T s (K) 3 100 3 100 3 100 1 693 > 3 300

La conductivité thermique du SiC monocristallin vaut environ


4,5 W · cm–1 · K –1 à 300 K, soit environ 3 fois celle du silicium, et (–π/a,–π/a,π/a) z (–π/a,π/a,π/a)
décroît lorsque la température augmente. Des mesures expérimen-
tales effectuées entre 300 et 2 300 K, ont données, sur du 6H–SiC
obtenu par la méthode de Lely modifiée :
4 570
λ ( T ) = ---------------- (1)
T 1,29
L
avec T température en Kelvin.
La capacité calorifique spécifique obéit à la loi de Debye avec U Γ
une température de Debye de 1 200 K. K y
X

1.4 Structure de bande du SiC W x

Les trois polytypes 6H, 4H et 3C sont des semi-conducteurs à


bande interdite (ou gap) indirecte, comme le silicium. Ainsi, bien
qu’il soit possible de réaliser des diodes électroluminescentes
bleues en SiC, celles réalisées en GaN, qui a un gap direct, ont une
bien meilleure luminosité.
(π/a,–π/a,–π/a) (π/a,π/a,–π/a)
L’un des principaux atouts du SiC pour l’électronique est la lar-
geur de sa bande interdite (E g), de l’ordre de 3 eV, c’est-à-dire envi-
Figure 4 – Zone de Brillouin pour une structure cfc (par exemple, 3C)
ron trois fois celle du silicium. Par suite, la densité de porteurs
intrinsèques n i va être extrêmement faible (plusieurs décades
au-dessous de celle du Si), ce qui permet d’espérer des courants
de fuite faibles des composants en régime bloqué, ainsi qu’une uti-
lisation en régime extrinsèque jusqu’à plus haute température que z
le silicium (dans le Si, le régime d’exhaustion des impuretés appa-
raît vers 150 oC).
Le polytype 3C a une structure cristallographique cfc (cubique A
face centrée) de type diamant. La zone de Brillouin est alors un L
polyèdre à 14 faces dont 8 hexagonales et 6 carrées (figure 4). On
définit les points :
Γ
— Γ, centre de la zone de Brillouin ; y
— X, centre de la face carrée sur l’axe x ; K
M
— L, centre de la face hexagonale sur l’axe ( 111 ) ; x
— U, milieu du côté commun au carré et à l’hexagone ;
— W, sommet commun au carré et à l’hexagone ;
— K, milieu du côté de l’hexagone.
Les polytypes à structure hexagonale (de type würtzite) ont une Figure 5 – Zone de Brillouin pour une structure ? tzite (par
zone de Brillouin hexagonale (figure 5). On définit les points : exemple, 6H, 4H, 2H)
— Γ, centre de la zone de Brillouin ;
— M, centre de la face rectangulaire sur l’axe x ;
— L, milieu du côté supérieur de la face rectangulaire ortho- — K, milieu du côté de la face rectangulaire ;
gonale à l’axe (100) ; — A, milieu de la face hexagonale.

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D3120

Composants de puissance en SiC


Technologie
par Dominique TOURNIER
1
Docteur en génie électrique
Maître de Conférences à l’INSA Lyon

1. Contexte ..................................................................................................... D 3 120 - 2


2. Aspects généraux de SiC....................................................................... — 2
2.1 Évolution du matériau................................................................................. — 2
2.2 Cristallographie............................................................................................ — 3
2.3 Techniques de synthèse de wafers............................................................. — 5
3. Technologies de fabrication des composants.................................. — 7
3.1 Dopage par implantation ionique .............................................................. — 7
3.2 Métallisation et formation des contacts .................................................... — 8
3.3 Oxyde de champ et passivation ................................................................. — 8
3.4 Encapsulation haute température .............................................................. — 8
4. Interrupteurs de puissance en SiC...................................................... — 9
4.1 Redresseurs.................................................................................................. — 9
4.2 Interrupteurs ................................................................................................ — 10
4.3 Conclusion.................................................................................................... — 11
5. Conclusions .............................................................................................. — 12
Références bibliographiques ......................................................................... — 12

’amélioration de la qualité du matériau de base et de la technologie de


L fabrication a permis le développement de nombreux composants de puis-
sance en carbure de silicium, reflétant l’évolution de la maturité de cette nou-
velle filière technologique au cours de ces dernières années. Cette évolution se
traduit par les débouchés commerciaux actuels et futurs, tout comme le déve-
loppement d’interrupteurs spécifiques pour la protection série des installations
électriques.
Ce dossier présente les récents progrès et réalisations des composants de
puissance en carbure de silicium, les points clés relatifs au matériau et à la
technologie de fabrication, les potentialités et réalisations de ce matériau
semi-conducteur dont l’utilisation permet d’ores et déjà de repousser les
limites de la filière silicium.
Le dossier suivant [D 3 122] décrit des applications telles que la conversion
d’énergie et la limitation de courant.
Parution : février 2007

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D3120

COMPOSANTS DE PUISSANCE EN SIC ______________________________________________________________________________________________________

1. Introduction générale Aujourd’hui, plusieurs industriels proposent des diodes Schottky


en SiC (600 V 1,2 kV ; 5 A-20 A). De même, des composants de type
MESFET sont disponibles commercialement. Enfin, des JFET et
Depuis les années 1950 (la fabrication du premier transistor date JFET cascode sont d’ores et déjà disponibles en échantillonnage. Ce
de 1947) l’électronique de puissance s’est développée autour du sont les performances dynamiques remarquables de ces compo-
silicium. En ce début de XXIe siècle, l’industrie de l’électronique en sants de puissance en SiC qui sont le catalyseur pour leur utilisation
général et de l’électronique de puissance en particulier reste domi- industrielle, désormais devenue une préoccupation croissante. À
née par le silicium et il est réaliste de penser que cela pourrait res- l’apparition de nouveaux composants a succédé l’apparition de

1 ter valable pour les deux prochaines décennies. En effet, aucun


autre matériau semi-conducteur n’est actuellement compétitif en
terme de qualité de matériau, maturité de la technologie de fabri-
démonstrateurs, illustrant de façon expérimentale les avantages de
cette nouvelle famille de composants, avec pour objectif final une
phase d’industrialisation.
cation des composants et coût de production en ce qui concerne Sur le plan industriel, trois pôles moteurs se distinguent.
les composants de puissance. Certains matériaux semi-conduc- Le premier se situe sur le continent américain, avec comme acteur
teurs tels le GaAs et SiGe (faisant partie de la famille des hétéro- principal la société CREE Research et le soutien de la DARPA, poussé
jonctions) possèdent des propriétés physiques particulières par par les applications militaires pour le développement d’interrupteurs
rapport au silicium. Toutefois, leur utilisation concerne principale- 10 kV et 15 kV-200 A.
ment les domaines spécifiques de l’optoélectronique et de
l’hyperfréquence [1]. Le second pôle moteur se situe sur le continent asiatique au Japon
et concerne les applications de distribution de l’énergie et le trans-
port, avec l’exemple de Toyota qui prévoit l’intégration de composants
Référence historique : trois scientifiques (John Bardeen, Wal- SiC dans les véhicules hybrides [2].
ter Brattain et William Shockley) travaillant au laboratoire Bell Et enfin, différents acteurs en Europe avec l’industrialisation de
ont fabriqué le premier transistor à semi- conducteur le diodes Schottky et de JFET 1,2 kV par la société SiCED et ST
23 décembre 1947 (le brevet d’un tel dispositif a été déposé en Microelectronics [3].
1928 par Julius Edgar Lilienfeld en Allemagne).
Les gains en termes de réduction des pertes en commutation et
L’avantage du silicium pourrait être remis en cause en ce qui d’effort de refroidissement font de ces composants des alternatives
concerne les composants haute tension et fonctionnant à des prometteuses dans des applications à forte valeur ajoutée, ouvrant
fréquences élevées par l’utilisation de nouveaux matériaux semi- des horizons nouveaux dans le domaine de l’électronique de puis-
conducteurs dits à « large bande interdite » comme l’est le carbure sance intégrée à haute température. De nouveaux axes de recherche
de silicium (SiC). La « filière technologique » du carbure de silicium sont désormais ouverts pour répondre au développement d’une
n’est pas aussi mature que celle du silicium et le coût de produc- électronique fonctionnant à haute tension et à haute température,
tion de composants est actuellement plus élevé que pour le sili- tirant avantageusement profit des propriétés du carbure de silicium.
cium. Pour autant, les propriétés intrinsèques, telles que le champ
de claquage et conductivité thermique élevés, ont favorisé le déve-
loppement de cette technologie alternative. En effet, s’il y a seule-
ment quelques années le carbure de silicium était considéré 2. Aspects généraux du SiC
comme un candidat potentiel pour la réalisation de dispositifs élec-
troniques de puissance ; la situation a maintenant changé.
2.1 Évolution du matériau
Donnée économique : prix d’un wafer de 6′′ de silicium : 2 $
contre 2 000 $ pour un wafer 2′′ de SiC-4H.
Un peu d’histoire
Les inconvénients ayant jusqu’alors freiné le développement de
la filière SiC sont en passe d’être résolus : Le carbure de silicium a été découvert en 1824 par accident,
lors d’une expérience de Berzellius [4], qui essayait de produire
— réduction de la densité de défauts dans le matériau de base,
du diamant. En effet, le carbure de silicium n’existe pas à l’état
permettant désormais de réaliser des puces de plusieurs mm2 avec
naturel sur terre, Moissan [5] en a découvert des cristaux dans
un rendement de fabrication satisfaisant (> 60 %) ;
une météorite (cristaux appelés moissanite). Le premier pro-
— stabilisation des processus de fabrication (processus de
cédé de fabrication industrielle du SiC date de 1891 et a été mis
traitements thermiques, d’implantations) grâce aux nombreux
au point par Acheson [6] et les premières exploitations se sont
efforts des centres de recherche et industriels.
limitées à ses propriétés mécaniques exceptionnelles :
Les améliorations significatives dans les techniques d’obtention — dureté, pour la réalisation de poudres abrasives, d’outils
du matériau de base (substrat), dans la conception des composants de coupe ;
(modélisation) et dans la technologie de fabrication des composants — résistances aux agents chimiques corrosifs, pour la réali-
ouvrent pour ce nouveau matériau des perspectives intéressantes sation de céramiques de revêtement.
pour les composants de puissance. Le SiC se révèle de plus en plus Au début du siècle, en 1907, H. J. Round [7] découvre des pro-
comme un candidat sérieux pour le remplacement du silicium dans priétés électroluminescentes du SiC, ce qui en fait l’un des pre-
de nombreuses applications électroniques, ouvrant des perspec- miers semi-conducteurs connus, mais son utilisation en tant
tives d’avenir pour : que tel ne s’est pas développée, la raison principale étant la
— les diodes Schottky (V < 2 kV) ; qualité médiocre des matériaux de base obtenus (obstacle tech-
— tous les composants à porteurs majoritaires MOS pour des nologique).
tensions inférieures à 3 kV ; Il faut attendre les années 1950 pour retrouver une nouvelle
— certains composants bipolaires, diodes rapides, nouveaux période d’investigations. Ce sont les secteurs du militaire et de
interrupteurs pour des tensions allant jusqu’à plusieurs dizaines de l’aérospatiale qui ont à nouveau porté un intérêt sur le SiC.
kilovolts ; L’objectif était de développer des composants fonctionnant :
— un fonctionnement à des fréquences et des températures plus — à hautes températures ;
élevées que celle du silicium ; — à hautes fréquences ;
— les capteurs devant fonctionner dans des conditions sévères — à fortes puissances en milieu hostile (températures
de température ou de rayonnement. élevées, sources de radiations...).

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_____________________________________________________________________________________________________ COMPOSANTS DE PUISSANCE EN SIC

composants d’autre part. La faisabilité de composants haute ten-


Un peu d’histoire (suite) sion, diodes, transistors et thyristors a été démontrée expérimen-
talement [13]. De plus, des diodes Schottky en SiC 1 200 V-10 A et
Ces intérêts ont été amplifiés par des développements 600 V-20 A sont désormais disponibles commercialement [14] [15],
majeurs dans l’élaboration des substrats, points clé de la viabi- tout comme des MESFET pour les applications hautes fréquences.
lité de la filière SiC. En 1955, tout d’abord, Lely [8] a mis au point Pour autant, et afin de disposer d’une véritable filière SiC compé-
une méthode de fabrication de substrats relativement purs et titive et rentable, il est crucial :
présentant une faible densité de défauts. De nombreuses

1
— de développer le matériau de base (les plaquettes de SiC)
équipes de recherche aux États-Unis, en Russie, en Allemagne ayant les propriétés nécessaires pour répondre aux besoins des
et au Japon se lancent alors sur l’étude du SiC. La diminution de applications à venir ;
l’espoir d’accroître la taille des substrats conduit, lors des
— de continuer l’effort porté sur le développement du processus
années suivantes, à une baisse de l’intérêt porté au SiC et à
de fabrication des composants.
l’abandon de l’activité, sauf en Russie. La mise au point de la
technique de Lely modifiée [9] ainsi que de la méthode Sand- Concernant les plaquettes de SiC, des substrats de 2′′ et 3′′ sont
wich, au début des années 1980 permettant d’obtenir des sub- disponibles commercialement [16] et la faisabilité de plaquettes de
strats plus grands, ont relancé les études sur le SiC dans de 100 mm a été démontrée [17] [18]. L’obtention de plaquettes de 3′′
nombreux pays : aux États-Unis, au Japon et en Europe. ayant de très faibles valeurs de densité de défauts (0,75 cm–2) reflète
En 1997, les seuls produits disponibles commercialement était les efforts portés sur l’amélioration de la qualité du matériau de
des plaquettes de SiC-6H de 1′′3/8 ainsi que des diodes électro- base. Cette amélioration se traduit par un rendement de fabrication
luminescentes LED bleues. Ces dernières furent remplacées par élevé et la possibilité de fabrication de composants de puissance
des diodes à base de GaN plus performantes sans que cela ne de large surface (c’est-à-dire de fort calibre en courant). De nom-
conduise à l’arrêt de la technologie du SiC. En effet, l’explosion breuses études ont démontré la corrélation entre le bon fonction-
du marché des diodes à base de GaN eut un impact direct et nement des composants et la présence de micropores. Aussi, un des
bénéfique sur le développement de la technologie de croissance challenges a consisté en la réduction de la densité de défauts du
du SiC. Les propriétés physiques du SiC (l’accord de maille cris- substrat. L’étude des mécanismes d’apparition de ces défauts a
talline entre GaN et SiC ainsi que la conductivité thermique éle- conduit à des améliorations significatives dans les techniques de
vée) font des plaquettes de SiC un support idéal pour la croissance des substrats et à la réduction notable des défauts.
croissance d’épitaxie de GaN et la fabrication de diodes émettri-
ces à base de GaN, ce qui a favorisé le développement d’une
industrie spécifique (matériaux, machines) aux États-Unis (Cree 2.2 Cristallographie
Inc., Epigress [10], en Europe (Norstel [11] et au Japon
(Criepi [12]).
Le terme carbure de silicium (ou carborundum) est un terme
générique qui recouvre toutes les formes stœchiométriques de
Les dimensions d’usage pour les plaquettes de SiC sont les carbone et silicium existant en phase solide. La cellule de base
inches (′′). Rappelons que 1″82,5 cm, 2″85 cm, 3″ = 7,5 cm et est tétraédrique, composée de 4 atomes de silicium pour un
4′′ = 10 cm. atome de carbone (figure 1).

Le développement des composants de puissance à base de car- En pratique, il existe plusieurs dizaines de polytypes que l’on
bure de silicium a changé de façon significative depuis quelques peut décrire en partant d’un empilement de N bicouches élémen-
années, suscitant un intérêt croissant des industriels. Cela s’illustre taires de SiC constituant chacune un plan hexagonal compact. Un
à travers les nombreux projets de recherche sur trois continents. polytype déterminé comprend N bicouches (plans) (figure 2), et ne
États-Unis : projets financés par des organismes tels que la NASA, diffère des autres polytypes que par le détail de la séquence
DARPA, DOD d’empilement des N plans successifs [19].
Japon : Japanese National Program on Hard Electronics, Tous les polytypes connus de SiC présentent des propriétés
comportant de nombreux partenaires industriels (Fuji Electric Co., physiques communes. Elles proviennent de la spécificité de la
Toyota Central R&D Labs., Sanyo Electric Co., Mitsubishi Electric Corp., liaison chimique Si-C qui, à l’échelle microscopique, régit la plupart
Hitachi, Ltd., Kansai Electric Power Co., Denso Corp.) des propriétés mécaniques et thermiques ainsi que la forte résis-
Europe : Alternative SiC, projet JESICA (1999-2002), ESCAPEE tance aux agents corrosifs.
(0)

Par exemple, la dureté bien connue du carborundum provient direc-


JESICA : Joint European silicon carbide activity (BRPR980815) tement de la faible valeur des distances interatomiques dans la liaison
Projet impliquant : Si-C (= 0,189 nm), à comparer avec 0,234 nm pour le silicium Si-Si et
— Saint-Gobain ; 0,154 nm pour le diamant C-C. Pour la même raison (distance inter-
— le CEA-LETI, INPG (Grenoble) experts en croissance ; atomique), la conductivité thermique de SiC est très largement supé-
— des partenaires suédois : Okmetic et l’université de Linkö- rieure à celle du silicium ou de l’arséniure de gallium (tableau 1).
ping (LiU) qui ont développé une technique de croissance alter-
native (HTCVD) ; Des facteurs de mérite ont été définis pour pouvoir comparer plus
— une start-up française Novasic qui offre son expertise en facilement les matériaux semi-conducteurs entre eux, comme les
polissage de matériaux tel le SiC ; facteurs de Johnson [20] ou de Keyes [21]. Ces différents facteurs
— un institut irlandais Irish National Microelectronics ne tiennent pas compte de l’état de la technologie, mais seulement
Research Centre (NMRC) ; des propriétés des matériaux. Ils permettent de comparer les per-
— Thales. formances de composants de type unipolaire ou bipolaire [22], ou
ESCAPEE : partenaires industriels : AREVA, ALSTOM, DYNEX, de déterminer des « zones privilégiées » d’utilisation entre
IBS′′, http://siliconcarbide.org. composants unipolaires et bipolaires en terme de courant, tension
et fréquence et température de fonctionnement [23]. Le facteur de
mérite de Baliga [24] traduit le compromis entre la chute de tension
Cet attrait des industriels est directement lié aux améliorations à l’état passant et la tension de blocage maximale. Pour une valeur
récentes dans la technique de synthèse des lingots de SiC Bulk de tenue en tension donnée (1 500 V), le SiC permet d’avoir une cou-
material growth d’une part, et dans la technologie de fabrication des che de type N– d’épaisseur réduite (facteur 9) et plus fortement

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Composants de puissance en SiC


Applications

par Dominique TOURNIER


1
Maître de conférences
INSA de Lyon

1. Contexte ..................................................................................................... D 3 122 – 2


2. Applications phares................................................................................. – 2
2.1 Contexte........................................................................................................ – 2
2.2 Traction électrique et véhicules hybrides .................................................. – 2
2.3 Traction électrique : train, bateau... ........................................................... – 3
2.4 Correction de facteur de puissance PFC .................................................... – 4
2.5 Applications haute température ................................................................. – 4
2.6 Conclusion sur les applications pour l’électronique de puissance.......... – 5
3. Application spécifique : limitation de courant................................ – 6
3.1 Contexte........................................................................................................ – 6
3.2 Structures proposées .................................................................................. – 6
3.3 Validation expérimentale : comportement dynamique
des limiteurs de courant.............................................................................. – 7
3.4 Limitation de courant de démarrage : machines à courant continu ....... – 7
3.5 Conclusion.................................................................................................... – 8
4. Conclusions et perspectives ................................................................. – 9
4.1 Composants et applications........................................................................ – 9
4.2 Applications et économie : bilan et perspectives...................................... – 9
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. D3122

a maturité d’une filière technologique se traduit par l’émergence de nou-


L velles solutions techniques dans de nombreuses applications. Il en fut ainsi
pour la filière silicium avec les composants de type GTO, bipolaires, MOSFET,
IGBT...
Le développement de ces derniers a eu un impact certain dans le domaine
de l’électronique de puissance, permettant la conception de nouvelles architec-
tures de conversion d’énergie plus performantes et apportant des solutions
techniques novatrices dans de nombreux domaines du génie électrique.
Le SiC (carbure de silicium) n’est pas arrivé à un stade de maturité aussi
avancé que le silicium. Pour autant, la disponibilité de composants ayant des
performances supérieures à leurs homologues en Si permet d’envisager leur
utilisation dans de nombreuses applications. Ces nouveaux composants
devraient permettre de repousser les limites des performances d’ores et déjà
atteintes de la filière silicium pour les domaines de la haute tension et de la
haute température, par exemple.
Dans le dossier [D 3 120] sont présentées les technologies de fabrication des
composants de puissance en SiC. Ce dossier [D 3 122] présente un état de l’art
de quelques « applications phares », en s’attachant à mettre en évidence les
gains apportés par la technologie SiC pour l’électronique de puissance, sans la
Parution : novembre 2007

prétention d’être exhaustif dans le contenu, mais avec l’objectif d’illustrer les
potentialités de cette nouvelle filière technologique.

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COMPOSANTS DE PUISSANCE EN SIC __________________________________________________________________________________________________

tion des pertes dans les système de conversion d’énergie, dans les
Rappel de quelques abréviations installations électriques et les réseaux de distribution. Nous allons
ACCUNOSFET présenter quelques-unes de ces applications afin d’illustrer les dif-
férents débouchés possibles des composants de puissance en SiC :
CRD Current Regulative Diode – la traction électrique ;
GTO Gate Turn Off Thyristor – la correction de facteur de puissance ;
– les applications haute température.

1
IGBT Insulated Gate Bipolar Transistor
Notons que cette liste n’est aucunement restrictive.
JFET Junction Field Effect Transistor
MESFET Metal Semiconductor Field Effect Transistor
2.2 Traction électrique et véhicules
MOSFET Metal Oxide Semiconductor Field Effect hybrides
(ou MOS) Transistor
Dans l’optique de compacité et de meilleur rendement, Toyota et
PFC Power Factor Corrector
Ford ont été précurseurs dans le développement de technologies
SOI Silicon On Insulator de véhicules (figure 1) associant en parallèle des moteurs thermi-
que et électrique « véhicule hybride, ... ». L’utilisation de compo-
VJFET Lateral Vertical JFET sants en SiC dans le système électrique permet une réduction de
masse, de volume ainsi qu’un meilleur rendement pour une plus
WBG Wide Band Gap
grande densité de puissance et une meilleure fiabilité dans des
conditions de fonctionnement sévères.

1. Contexte Dans ce type d’application, l’utilisation de composants SiC per-


met d’assurer la conversion d’énergie :
La technologie SiC, considérée comme une perspective à long – « DC-AC » entre les batteries et le moteur électrique ;
terme de la technologie silicium dans les années 1990, est en – « DC-DC » entre les batteries et les organes de motorisation
passe de proposer une alternative non concurrentielle à court électrique tels que les lève-vitres ;
terme pour la technologie silicium. En effet, cette nouvelle techno- – réversible (AC-DC) du moteur électrique vers les batteries
logie s’adresse plus particulièrement aux applications spécifiques (récupération d’énergie).
fonctionnant à haute tension et/ou à des températures élevées. L’architecture typique (figure 2) est un convertisseur de tension
Les composants électroniques en SiC sont actuellement princi- d’une gamme de puissance comprise entre 2 et 5 kW, assurant la
palement développés pour une utilisation dans des applications : conversion (DC-DC) de 300 – 450 V en 43 V. Les interrupteurs I1, I2,
– devant fonctionner dans des conditions environnementales I3, I4 peuvent être des MOSFET, JFET ou MESFET en Si ou SiC, les
sévères (températures élevées > 600 ˚C) ; diodes D1 et D2 sont en SiC.
– devant fournir de fortes puissances pour des tensions élevées
(quelques 10 kA, quelques 10 kV) ;
– devant supporter des radiations intenses (par exemple, pour
les applications spatiales).
Les gains potentiels liés à l’utilisation de composants en SiC
dans des systèmes de conversion d’énergie ont été démontrés
dans le passé, tant sur le plan théorique que par l’intermédiaire de
démonstrateurs. Les améliorations des techniques de synthèse de
matériau et des étapes technologiques de fabrication des compo-
sants permettent désormais la réalisation de prototypes indus-
triels. Même si certains points limitent les performances des
composants SiC (notamment la température maximale de fonc-
tionnement), les bénéfices de la filière SiC par rapport à la filière
silicium sont d’ores et déjà non négligeables [1].
Diverses « applications phares » sont présentées avec pour
objectif d’illustrer les gains obtenus par l’utilisation de composants
de puissance en carbure de silicium et les « marges de
progression » espérées par cette nouvelle technologie pour l’élec-
tronique de puissance.

2. Applications phares Figure 1 – Exemple d’architecture de véhicule hybride (Toyota Prius)

de l’électronique
de puissance I1 I3 D1
E/2
U
E/2
2.1 Contexte
I2 I4 D2
Plusieurs applications sont des éléments moteurs du développe-
ment de la filière SiC dans sa globalité. Elles s’inscrivent dans les
préoccupations de gestion et de maîtrise de l’énergie par la réduc- Figure 2 – Schéma électrique d’un convertisseur de tension

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D 3 122 – 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.

92
Référence Internet
D3122

___________________________________________________________________________________________________ COMPOSANTS DE PUISSANCE EN SIC

Tableau 1 – Densité de puissance de convertisseurs


pour différentes gammes de fréquences
de fonctionnement
Accessoires électriques
Fréquence Système de distribution Systèmes de contrôle
< 30 kHz 30 à 70 kHz > 70 kHz
de fonctionnement électrique

Interrupteur

Diode
Si IGBT

Si Diode
Si IGBT

SiC Diode
Si MOSFET

SiC Diode
Dégivrage électrique
1
Freins à commande
électrique
Densité de puissance Convertisseurs
< 10 15 30
(W/cm3) statiques
Moteurs électriques
de puissance
internes
Démarreur/
Les modélisations (cycles de fonctionnement) permettent Générateur
d’estimer :
– la puissance volumique nécessaire en fonction des fréquences
de fonctionnement ;
Périphériques de
– les réductions possible de l’effort de refroidissement ; conversion distants
Vérins électriques
– les domaines d’utilisation pour les composants en SiC. et commande de vol
Générateurs de
Ainsi, l’utilisation du SiC et l’augmentation des fréquences de puissance auxilliaires
commutation des interrupteurs permettent d’augmenter la densité
de puissance de 10 W/cm3 à plus de 30 W/cm3 (tableau 1) [2].
Figure 3 – Concept d’un avion « plus » électrique
Au niveau système, cela se traduit par :
– un gain en compacité et une réduction de masse ;
– une plus grande densité de puissance ;
– une meilleure fiabilité dans des conditions de fonctionnement
sévères ;
– un meilleur rendement.
Se basant sur ce type d’architecture pour leur gamme de nou-
velle génération de véhicules hybrides, Toyota estime un volume
de vente de plus de 300 000 véhicules hybrides par an.

2.3 Traction électrique : train, bateau...


Tout comme pour les véhicules hybrides, les futurs concepts de a Transformateur conventionnel b Convertisseur statique "SiC"
véhicules « tout électrique » (bateau et avion électrique) sont nom- 2,7 MVA 2,7 MVA
breux. L’augmentation de la densité de puissance embarquée pour 13,8 kV/450V 60Hz 13,8 kV/465V 20 kHz
6t 1,7 t
les avions et les bateaux est un challenge majeur dans le contexte
10 m3 2,7 m3
économique actuel. L’objectif est de remplacer les sources de puis- tensions de sortie fixées multiples tensions de sortie
sance hydrauliques par des sources électriques réparties afin de
réduire la consommation en carburant et les rejets de CO2. La con-
ception de ces sources réparties nécessite l’utilisation de nouveaux Figure 4 – Comparaison entre deux technologies de conversion
d’énergie
composants, l’étude de nouvelles architectures et la prise en
compte de contraintes de fiabilité.
SiC fonctionnant à très hautes fréquences doit permettre une
Dans le cas de l’aéronautique, le SiC est une solution pour pro- réduction de 55 % de la masse et de 10 % du volume embarqué
mouvoir de nouveaux concepts [3]. Dans les nouvelles configura- (figure 4).
tions, les convertisseurs et les capteurs sont distribués dans la
L’utilisation de composants SiC doit également permettre une
structure même de l’avion, au plus près des réacteurs et des trains
réduction significative du volume et de la masse des éléments
d’atterrissage (figure 3). Ces contraintes de fonctionnement dans
passifs et notamment des systèmes de refroidissement. Des
des environnements sévères impliquent des conditions de refroi-
études [7] ont porté sur la conception de convertisseurs (onduleur
dissement des convertisseurs aux alentours de 400 ˚C avec des
triphasé) pour des gammes de puissance répondant aux besoins
cycles thermiques extrêmes. Les études réalisées estiment des
des nouveaux concepts. Ces études (tableau 2) ont été effectuées
gains de 30 % et 50 % sur le volume et la masse en fonction des
en estimant :
technologies [4] [5].
– les pertes et le rendement ;
Pour les applications de transport maritime, le concept de
répartition de convertisseurs à fort rendement permet d’envisager – les températures internes des composants.
des gains considérables de masse et de volume [6]. Ces gains peu- Ces travaux démontrent qu’il est possible d’obtenir un meilleur
vent être obtenus en remplaçant les transformateurs basses fré- rendement global, une fiabilité plus élevée et de réduire l’effort de
quences et leurs convertisseurs classiques en silicium (approches refroidissement (réduction du volume et de la masse d’un conver-
conventionnelles) par un ensemble associant « transformateur tisseur de 70 %) en utilisant des composants en SiC. Les réduc-
hautes fréquences » et « convertisseurs statiques à base de SiC ». tions de masse et de volume vont dans le sens de réduction de la
Dans le cas de convertisseurs 2,7 MVA, l’utilisation de composants consommation d’énergie de ces systèmes.

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93
1

94
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D3126

Fatigue des composants


électroniques de puissance
Physique de défaillance 1

par Mounira BOUARROUDJ-BERKANI


Docteur de l’École Normale Supérieure de Cachan
Maître de conférences, Université Paris-Est Créteil (IUFM Créteil)
Chercheuse au laboratoire SATIE de l’ENS Cachan
et Laurent DUPONT
Docteur de l’École Normale Supérieure de Cachan
Chargé de recherche, INRETS (Laboratoire des technologies nouvelles à Versailles Satory)

1. Problématique ........................................................................................... D 3 126 - 2


1.1 Besoins.......................................................................................................... 2
1.2 Sûreté de fonctionnement........................................................................... 2
1.3 Intégration des convertisseurs de puissance ............................................ 3
2. Technologies d’intégration pour l’électronique de puissance .... — 3
2.1 Niveau I : puces actives ............................................................................... 4
2.2 Niveau II : assemblage................................................................................. 6
2.3 Connexions................................................................................................... 8
2.4 Niveau III : encapsulation ............................................................................ 10
3. Domaines et contraintes applicatives ................................................ — 11
3.1 Automobile ................................................................................................... 11
3.2 Avionique...................................................................................................... 12
3.3 Ferroviaire..................................................................................................... 12
3.4 Autres............................................................................................................ 13
4. Mode de dégradation des technologies d’intégration ................... — 14
4.1 Au niveau de la puce ................................................................................... 14
4.2 Au niveau de l’assemblage ......................................................................... 14
5. Durée de vie des modules sous contraintes thermiques .............. — 16
5.1 Fiabilité et limites liées au domaine de l’intégration de puissance ......... 16
5.2 Fiabilité par une approche physique vers la robustesse .......................... 17
6. Conclusion et synthèse .......................................................................... — 21
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. D 3 126

e développement de l’électronique de puissance dans de nouveaux


L domaines d’usage conduit à un accroissement des niveaux de sollicitations
fonctionnelles et environnementales appliqués aux modules de puissance
(automobile, aéronautique...). Dès lors, de nombreuses ruptures techno-
logiques sont développées afin de satisfaire les objectifs parfois contradictoires
de maîtrise des coûts, de réduction du poids et de l’encombrement, tout en
améliorant les spécifications en termes de maintenabilité et de fiabilité.
Parution : novembre 2010

Or, un certain nombre de freins limitent l’exploitation des prescriptions défi-


nies dans le champ de la sûreté de fonctionnement et, plus spécifiquement,

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Référence Internet
D3126

FATIGUE DES COMPOSANTS ÉLECTRONIQUES DE PUISSANCE _______________________________________________________________________________

pour l’évaluation de la fiabilité des dispositifs intégrés à semi-conducteurs de


puissance. En effet, l’évaluation de la fiabilité, indissociable de l’approche sta-
tistique, est rendue délicate de par la grande durée de vie objectivée avec un
faible taux de défaillance, les nombreuses évolutions technologiques et le
faible volume de production des systèmes à semi-conducteurs de puissance.
La démarche présentée dans ce dossier propose une introduction à l’évalua-

1
tion de la robustesse des assemblages à semi-conducteurs de puissance à
partir d’une compréhension de la dégradation physique entraînant la
défaillance, avec :
– la présentation des constituants d’un assemblage de puissance
conventionnel et les principaux domaines d’application ;
– en rapport avec les profils de mission imposés, le défaut de l’état de l’art
des principaux modes de dégradations conduisant à des défaillances principa-
lement d’origine thermomécaniques ;
– dans le sens de l’approche de la physique de défaillance, l’exposé des
principaux mécanismes et facteurs d’endommagement et des moyens permet-
tant de les révéler.

1. Problématique Les développements réalisés à ce jour reposent majoritairement


sur l’association de ces briques où le convertisseur est placé au
plus proche de l’actionneur. Or, la mécatronique de puissance, per-
mettant d’atteindre une efficacité énergétique, nécessite une inté-
1.1 Besoins gration effective des constituants d’une chaîne de conversion
Dans le contexte d’une nécessaire réduction de l’usage des res- électromécanique.
sources fossiles, l’ensemble des acteurs impliqués cherche à amé- Dès lors, il est nécessaire de trouver une adéquation entre le
liorer les solutions existantes et à mettre en place des solutions module de puissance, réalisé à partir d’un assemblage très hétéro-
alternatives. Le recours à l’énergie électrique, avec des potentiels gène et des sollicitations fonctionnelles et environnementales
de rendements élevés, est l’une des solutions permettant de croissantes qui peuvent endommager cet assemblage.
réduire la consommation d’énergie fossile et les émissions de gaz
à effet de serre. Les enjeux du développement de l’énergie élec-
trique dans les systèmes reposent notamment sur l’efficacité éner- 1.2 Sûreté de fonctionnement
gétique, la maîtrise des coûts et sur l’assurance de leur fiabilité en
Dans le cas des dispositifs intégrés à semi-conducteurs de puis-
rapport avec les contraintes applicatives et législatives.
sance, le concept de fiabilité qui associe la durée de vie à un taux
La mise en œuvre de cette rupture nécessite des solutions pour de défaillances pose un certain nombre de problèmes. En effet,
la génération de l’énergie électrique embarquée, telles que les l’approche statistique pour ces systèmes est rendue délicate de par
piles à combustible, associée à des dispositifs permettant le stoc- la grande durée de vie objectivée, les nombreuses évolutions tech-
kage de l’énergie, comme les batteries éventuellement suppléées nologiques et le faible volume de production. Or, le module de
par des supercapacités pour les phases transitoires (figure 1). puissance, de par les fonctions sécuritaires du convertisseur, a une
Les performances des systèmes à énergie électrique, basés sur place stratégique dans la définition de la sûreté de fonctionnement
l’emploi de l’électronique de puissance, reposent sur l’adéquation du système. Ce constat conduit à devoir réviser la recherche de
de la technologie, de la topologie et des lois de commandes per- tenue aux sollicitations des assemblages de puissance au-delà des
mettant d’associer efficacement l’actionneur et le convertisseur. définitions conventionnelles de la fiabilité et de la robustesse.

Solutions conventionnelles
Énergies renouvelables

Énergie Réseaux
embarquée distribution
+ complexe
Flux d'
d énergie
e ge
Pile à combustible PAC
Gestion Moteur
Batterie de l'énergie Alternateur...
Supercapacit
p p té
é

Actionneurs
Stockage réversibles
d'énergie Convertisseur
+ Logique de commande optimisée
Gestion des flux d'énergie électrique
Brique sécuritaire du système

Figure 1 – Modèle d’architecture d’un système de gestion de l’énergie électrique

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D 3 126 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.

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D3126

_______________________________________________________________________________ FATIGUE DES COMPOSANTS ÉLECTRONIQUES DE PUISSANCE

Depuis ces 15 dernières années, les travaux de recherches ont


permis d’identifier nombre de facteurs conduisant à la dégradation
des dispositifs intégrés de puissance. Les méthodologies et les
moyens, développés dans le but d’évaluer des lois empiriques de
la fiabilité par une approche expérimentale, ont mis à jour de nom-
breux mécanismes de défaillances en rapport avec des sollicita-
tions représentatives de l’usage [1] [2].

1
L’accroissement des ressources disponibles, en termes
d’approche numérique et d’amélioration de la connaissance des
mécanismes de dégradation, permet de proposer une définition de la
fiabilité à travers une approche physique de la défaillance [3] [4] [5].

1.3 Intégration des convertisseurs


de puissance
a vue externe
Dans le domaine de l’électronique de puissance [6], la
conversion de l’énergie se compose de plusieurs parties
intimement liées à l’usage :
– la source d’énergie, les protections ;
– le stockage d’énergie associé à un filtre ;
– le convertisseur, la commande rapprochée et la stratégie
associée ;
– l’actionneur, les capteurs ;
– les liaisons électriques...

Afin de réduire ce vaste champ d’investigation, nous nous


limitons dans ce dossier au seul module de puissance
(éléments actifs et assemblage) permettant la gestion des flux
d’énergie électrique entre les différentes briques fonctionnel-
les d’une chaîne de conversion. b vue interne

Figure 2 – MOSFET SiC 1200 V-100 V (doc. Powerex)


Pour les applications moyennes et fortes puissances, les
composants électroniques de puissance sont généralement des
convertisseurs statiques (onduleurs pour la commande de
moteurs alternatifs) intégrés sur la base de l’association de 2. Technologies d’intégration
transistors MOS (Métal-Oxyde-Semi-conducteur ) ou d’IGBT
(Insulated Gate Bipolar Transistor ) (figure 2).
pour l’électronique
de puissance
Les contraintes liées aux domaines applicatifs amènent à un
accroissement des niveaux de sollicitations associées à de L’assemblage d’un composant de puissance désigne la structure
nouvelles conditions d’usage. Les solutions utilisées sont en plein et les procédés technologiques permettant d’interconnecter une ou
développement afin de satisfaire les nouvelles conditions d’usage plusieurs puces de puissance afin de réaliser une fonction de
dans le respect des réglementations en vigueurs. Les modules de conversion de l’énergie électrique (hacheur, onduleur...). D’une
puissance, proposés sous forme de boîtiers moulés (modules de manière générale, l’intégration de puissance est présentée en trois
puissance), sont constitués d’un empilement de différents maté- sous ensembles :
riaux très hétérogènes quant à leurs propriétés physiques et à
leurs lois de comportements (tableau 1) [7] [8]. De ce fait, ils – niveau 1 : éléments actifs (semi-conducteurs) ;
s’avèrent très sensibles aux sollicitations thermiques qu’elles – niveau 2 : assemblage ;
soient d’origines fonctionnelles ou environnementales. – niveau 3 : protection du dispositif.

Tableau 1 – Synthèse des caractéristiques des matériaux d’un assemblage de puissance [7] [8]
Conductivité
CTE Module d’Young Limite élastique
Constituant Matériau thermique
(10–6 · K) (Gpa) (MPa)
(W/m ⋅ K)
Puce Silicium 2,6 150 130 –
AIN 3,1 190 320 270
Céramique
Al2O3 5,5 30 370 –
Cu 16 390 130 98,7
Semelle
AlSiC 6,5 à 12 180 à 220 360 200
CTE (Coefficient of Thermal Expansion) coefficient de dilatation thermique : CTE = ∆œ / (œ ∆T ).

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D3126

FATIGUE DES COMPOSANTS ÉLECTRONIQUES DE PUISSANCE _______________________________________________________________________________

Connecteur Connecteur
de puissance de commande

Gel Puce Connection Brasure


Brasure
Métallisation Métallisation

1
DCB Céramique
Métallisation
Brasure

Semelle

Interface thermique

Refroidisseur

DCB pour Direct Copper Bonded

Figure 3 – Assemblage traditionnel d’un module de puissance

La figure 3 fait apparaître les principales parties d’un composant


1 400
Température de jonction maximale (oC)
de puissance :
6H SiC AsGa
– le premier niveau est constitué de puces, généralement à base
1 200 4C SiC Si
de silicium, qui représentent la partie active du module ;
– le second niveau concerne la connectique et l’isolation 1 000
électrique ;
– le troisième niveau permet le maintien et la protection méca- 800
nique de l’ensemble.
600

2.1 Niveau I : puces actives 400

Les éléments actifs d’un assemblage de puissance sont les 200


puces à semi-conducteur de puissance. Elles sont réalisées à partir
d’un matériau semi-conducteur, généralement en silicium et asso- 0
ciées en parallèle, afin de conduire de forts niveaux de puissance. 10 100 1 000 10 000
Tension de claquage (V)
2.1.1 Semi-conducteur
Figure 4 – Température maximale d’utilisation théorique
Le plus utilisé des matériaux semi-conducteur est aujourd’hui le des différents matériaux [12]
silicium. Mais dans de nombreux domaines d’utilisation, les dispo-
sitifs électroniques de puissance sont confrontés à des conditions
de fonctionnement de plus en plus sévères et, notamment, à une en fonctionnement à hautes températures avec des densités de
augmentation croissante du taux d’intégration et de la température courant allant jusqu’à 600 A/cm2.
de fonctionnement. Dans ces conditions, le silicium commence à
atteindre des limites physiques en rapport avec sa température de Exemple : réalisation récente d’un MOSFET 1 200 V-100 A entière-
fonctionnement qui est associée à sa tension de claquage. ment SiC (CREE et Powerex) pour des applications militaires [10] [11].
Ce MOSFET nouvelle génération possède une température de
D’une manière générale, la limite théorique du silicium est de jonction pouvant atteindre 200 oC.
l’ordre de 175 oC pour les dispositifs hautes tensions (VBR = 1 000 V),
contre 250 oC environ pour les composants dont la tension de cla-
quage est inférieure à 100 V [8]. 2.1.2 Technologies des principaux
composants commandés
Pour s’affranchir des limitations en température imposées par le
silicium, la tendance est au développement des matériaux 2.1.2.1 Transistors IGBT
semi-conducteur grand Gap (GaN, diamant et principalement SiC Le composant IGBT (Insulated Gate Bipolar Transistor ) résulte
aujourd’hui) permettant de repousser les limites de fonction- de l’intégration d’un transistor bipolaire et d’un MOSFET. Il répond
nement dans le plan tension de claquage/température ainsi au compromis permettant d’assurer une faible résistance à
(figure 4) [12]. l’état passant et une tenue en tension élevée. Sa commande est
Pour le SiC, le champ électrique critique (7 fois plus élevé que analogue à celle du transistor MOSFET et le courant est généré par
celui du Si) et la très bonne conductivité thermique devraient per- la combinaison des porteurs majoritaires et minoritaires [13]. Le
mettre de réduire significativement l’encombrement des dispositifs principal inconvénient de ce composant est sa faible fréquence de
de puissance [9]. Néanmoins, Il est encore difficile d’industrialiser commutation comparée à celle du MOSFET pour des tensions infé-
des composants commandés SiC en raison de la densité des rieures à 600 V, ainsi que des pertes dissipées plus élevées que
défauts trop élevée dans le matériau et d’un processus de réalisa- celles du thyristor ou du transistor GTO. Ces pertes réduisent l’effi-
tion difficile qui limitent la généralisation de l’utilisation du SiC. cacité du convertisseur et nécessitent des dispositifs de refroidis-
Toutefois, des JFET SiC ont montré des capacités très importantes sement plus important.

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D 3 126 – 4 est strictement interdite. – © Editions T.I.

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Référence Internet
D3126

_______________________________________________________________________________ FATIGUE DES COMPOSANTS ÉLECTRONIQUES DE PUISSANCE

VCEsat à 125 oC sous 75 A (V)


2e gén. 3e gén. 4e gén. 6e gén.
3,5
5e gén.

3 1re gén.

1
2,5

1,5

1
1988 1992 1996 2000 2004 2008 2012
VCEsat : chute de tension à l'état passant

Figure 5 – Évolution des dimensions des puces IGBT [15]

Deux principales technologies sont utilisées pour chercher à


optimiser le compromis entre les pertes en régimes de G S G
S
commutation et de conduction :
– la première structure nécessite la présence d’une couche
p+ n
+
p+ n+
tampon entre l’émetteur fortement dopé et la base faiblement
dopée (technologie Punch Trough PT) ;
– la seconde consiste en la réalisation d’un émetteur fin pour le n– p n p
contrôle de l’injection des charges (technologie Non Punch Trough n–
epi
NPT). n+ sub n+ sub
Dernièrement, d’autres technologies ont été développées pour
augmenter la densité d’intégration. Ainsi, la structure à grille enter- D
D
rée réduit considérablement la surface de la puce et permet d’aug- a MOSFET standard b CoolMOSTM
menter la densité de courant. Enfin, la puce IGBT à champ limité
field stop (Infineon, Fuji) a été développée pour tenter de réunir les
Figure 6 – Structure MOS à superjonction
avantages des structures PT et NPT [14]. Elle possède un champ
électrique de forme trapézoïdale similaire à celui d’une puce PT et
un contrôle de charge par l’émetteur du transistor bipolaire interne
analogue à celui des IGBT NPT. R0n · A [Ω · mm2]
Ces évolutions offrent des perspectives intéressantes quant au 20
développement de modules de puissance performants et MOSFET standard
compacts. La figure 5 [15] montre ainsi les évolutions techno- 2,4 à 2,6
16 R0n A ≈ V(BR)DSS
logiques des puces IGBT et la conséquence de ces évolutions sur
la taille des surfaces actives [15]. Ainsi, la réduction du volume de
silicium obtenue va dans le sens d’une diminution des coûts avec, 12 Nouvelles perspectives
en contrepartie, une augmentation de la densité de puissance qui pour les applications
induit une augmentation de température de fonctionnement et des haute tension
besoins de refroidissement. 8

2.1.2.2 MOSFET
Utilisé en faible et moyenne puissance, le transistor MOSFET 4
CoolMOSTM
(Metal Oxide Semiconductor Field Effect Transistor ) est un
composant unipolaire dont seuls les porteurs majoritaires
0
génèrent le courant. De cette manière, le transistor MOSFET est
adapté aux applications hautes fréquences en raison de l’absence 0 200 400 600 800 1 000
de charges stockées permettant des commutations rapides. Par Tension de claquage V(BR)DSS (V)
contre, le courant, résultant d’un seul type de porteurs, conduit à A surface de la puce (en mm2)
une résistance à l’état passant dépendante du dopage et de la
Cette figure montre la relation entre la résistance à l'état passant et la
dimension de la couche conductrice. Pour obtenir une faible résis- tension de claquage. Elle est quasi linéaire pour le transistor CooLMOS
tance, un dopage élevé est nécessaire mais cela réduit d’autant la 2,4 à 2,6 pour le transistor MOS classique.
alors qu'elle est en V(BR)DSS
tenue en tension.
Pour améliorer les caractéristiques à l’état passant, une nouvelle Figure 7 – Résistance à l’état passant du transistor MOS
génération de composants appelés CoolMOS (Infineon) a été déve- classique et du transistor CooIMOS
loppée dès 1998. La tenue en tension est assurée par une super-
jonction (succession de régions P et N, figure 6). Le transistor
V(BR)DSS (de l’ordre de 600 V à 800 V) et un meilleur comportement
CoolMOS présente de nombreux avantages par rapport aux tran-
à haute température de fonctionnement (figure 7).
sistors MOS classiques tels qu’une diminution de la résistance à
l’état passant Ron, une augmentation de la tension de claquage Nota : indice (BR)DSS pour (Breakdown) Drain Source Saturé.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. D 3 126 – 5

99
1

100
Composants actifs en électronique de puissance
(Réf. Internet 42245)

1– Composants actifs 2
2– Étages de pilotage rapproché Réf. Internet page

Commande des composants à semi-conducteurs de puissance : contexte D3230 103

Caractéristiques des composants à semi-conducteur de puissance en vue de leur D3231 109


commande
Composants bipolaires thyristors,triacs, GTO, GCT et BJT) : circuits de commande D3232 117

MOSFET et IGBT : circuits de commande D3233 121

MOSFET et IGB : circuits de commande, sécurisation et protection du composant à D3234 125


semi-conducteur

 Sur www.techniques-ingenieur.fr
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101
2

102
Référence Internet
D3230

Commande des composants


à semi-conducteurs de puissance :
contexte
par Stéphane LEFEBVRE

2
Professeur
SATIE, CNRS, Conservatoire national des arts et métiers, Paris, France
Bernard MULTON
Professeur
SATIE, CNRS, École Normale Supérieure de Rennes, Rennes, France
et Nicolas ROUGER
Chargé de recherche
Laplace, CNRS, Toulouse, France
Note de l’éditeur
Cet article est la réédition actualisée de l’article D3230 intitulé « Commande des semi-
conducteurs de puissance : contexte » paru en 2002, rédigé par Stéphane Lefebvre et
Bernard Multon.

1. Rôle des circuits de commande de CSCP ................................................. D 3 230v2 - 3


2. Le CSCP dans son environnement ............................................................ — 3
2.1 Le CSCP et sa commande dans la cellule de commutation .................... — 3
2.2 Les composants de puissance à semi-conducteur grand gap
et les nouveaux concepts de transistors en silicium ............................... — 7
2.3 L’intégration du CSCP et de ses périphériques ........................................ — 10
3. Le CSCP dans une cellule de commutation.............................................. — 14
3.1 Commutation commandée idéale ............................................................. — 14
3.2 Commutations spontanées et assistées.................................................... — 16
3.3 Influence du circuit de commande sur les vitesses de commutation .... — 16
3.4 Comportement spécifique des CSCP en régime de commutation ......... — 17
3.5 Formes d’ondes expérimentales de commutation .................................. — 18
4. Vers les cellules de commutation réelles et leurs particularités............ — 19
4.1 Interactions spécifiques entre les CSCP et leurs circuits de pilotage ..... — 20
4.2 Impacts du packaging : effets des mailles de puissance
et de commande ......................................................................................... — 20
4.3 Gestion optimale du temps mort............................................................... — 21
5. Conclusion ................................................................................................... — 22
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. D 3 230v2

es CSCP (composants à semi-conducteurs de puissance) permettent de réa-


L liser des fonctions interrupteur toujours plus fiables et plus performantes.
Pour gérer et moduler les échanges d’énergie électrique via les convertisseurs
électroniques de puissance, chaque CSCP ou chaque groupe de CSCP nécessite
un circuit dédié de commande rapprochée (aussi appelé gate driver) afin de
piloter son état (bloqué ou passant) et d’optimiser les transitions pendant les
changements d’état (commutations au blocage et à l’ouverture).
Les circuits de commande rapprochée comprennent ainsi, a minima, un
Parution : novembre 2017

étage de contrôle statique et dynamique de l’interface de pilotage du ou des

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés


D 3 230v2 – 1

103
Référence Internet
D3230

COMMANDE DES COMPOSANTS À SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE : CONTEXTE ___________________________________________________________

CSCP. D’autres fonctions complémentaires peuvent être intégrées ou asso-


ciées permettant d’observer, de protéger et plus généralement de garantir le
fonctionnement fiable et optimal du ou des CSCP. Une spécificité des CSCP
réside dans leur mode de fonctionnement en régime de commutation, avec
des contraintes fortes sur l’environnement du CSCP et du circuit de com-
mande rapprochée : celui-ci doit, en particulier, s’adapter à des potentiels
élevés et des variations rapides de tensions et courants. L’assemblage des
CSCP à leur environnement rapproché est lui aussi critique, depuis leurs
commandes rapprochées, les CSCP formant une ou plusieurs cellules de
commutation, jusqu’à leur circuit de refroidissement. Cet environnement des
CSCP est aussi important que ses performances intrinsèques, permettant

2 alors de proposer un fonctionnement adapté et optimisé aux compromis


classiques en électronique de puissance (thermique, compatibilité electro-
magnétique, rendement, densité de puissance, fiabilité).
D’autre part, de nouveaux matériaux dits grand gap (tels que SiC et GaN) et
d’autres ruptures sur les architectures des transistors de puissance en silicium
repoussent les contraintes et compromis classiques. Ceci est particulièrement
d’actualité avec la montée en tension, la montée en fréquence et l’augmentation
des vitesses de commutation, ainsi que les ruptures sur les structures de conver-
tisseurs (architectures entrelacées, associations série/parallèle). Les composants
à semi-conducteurs de puissance et leurs périphériques doivent toujours évoluer
afin de permettre d’aller toujours plus loin dans l’amélioration de l’efficacité
énergétique, de la sûreté de fonctionnement, de la fiabilité et de la compacité
des convertisseurs statiques.
Selon la technologie de composants à semi-conducteur de puissance
considérée et son environnement, mais également selon la nature des commu-
tations, la réalisation des fonctions de commande et les possibilités de contrôle
peuvent varier. C’est la raison pour laquelle nous avons séparé les composants
à semi-conducteurs de puissance en trois familles technologiques [D3231] :
– les thyristors et les triacs ;
– les transistors bipolaires et les thyristors GTO ;
– les transistors à grille (MOSFET, IGBT, HEMT GaN et JFET SiC) ;
Pour chacune de ces catégories de CSCP, les circuits de commande seront
détaillés dans les articles suivants [D3232] et [D3233].

Les composants à semi-conducteurs de puissance (CSCP) commandés ont connu une


évolution très rapide depuis l’avènement des premiers thyristors à la fin des années 1950
jusqu’à l’apparition des IGBT (Insulated Gate Bipolar Transistor) au cours des
années 1980 puis de l’émergence des matériaux grand gap (SiC et GaN) dans les
années 2010. Les dernières décennies ont été marquées, en outre, par une progression
continue des performances (pertes, rapidité, prix…) des composants de puissance, grâce
aux designs des puces, des boîtiers et de leur connectique, mieux optimisés, mais grâce
également à de nouveaux matériaux semi-conducteurs. Enfin une plus forte intégration
des fonctions et l’accroissement des performances et des fonctionnalités des circuits de
commande rapprochée ont contribué significativement aux progrès constatés. La facilité
apparente de la commande des composants à grille isolée, qui a fortement contribué à
leur succès, cache en réalité de nombreuses difficultés, surtout en haute fréquence et/ou
en forte puissance. En réponse à la demande, de nombreux fabricants se sont mis à pro-
poser toutes sortes de circuits (intégrés ou hybrides ou encore imprimés) destinés à la
commande des composants à semi-conducteurs de puissance. C’est ainsi que le concep-
teur de convertisseur est devenu de plus en plus fréquemment un assembleur de fonc-
tions ; il est néanmoins tenu de comprendre, ne serait-ce que pour conserver un esprit
critique par rapport aux propositions des fournisseurs, comment fonctionnent ces com-
mandes, quels sont les compromis rencontrés et quelles en sont les limites.
Les convertisseurs statiques d’énergie nécessitent, pour avoir des rendements compa-
tibles avec nos exigences énergétiques et économiques, de fonctionner en commutation.
À la suite des systèmes à commutation mécanique et des tubes à gaz, les CSCP ont per-
mis de réaliser des fonctions « interrupteur » toujours plus fiables, plus compactes et
énergétiquement plus efficaces. Ces progrès ont conduit à l’essor rapide de l’électronique
de puissance que l’on connaît, des faibles puissances (microwatts) jusqu’aux très
grandes (gigawatts), et qui joue un rôle majeur dans la transition énergétique en marche.

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____________________________________________________________ COMMANDE DES COMPOSANTS À SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE : CONTEXTE

1. Rôle des circuits 2. Le CSCP dans son


de commande de CSCP environnement
Les fonctions essentielles du circuit de commande rapprochée
d’un composant à semi-conducteur de puissance sont : 2.1 Le CSCP et sa commande
– la conversion d’une information logique (0-1) de com- dans la cellule de commutation
mande (donc sans énergie) en grandeurs électriques adaptées
(courant, tension) aux électrodes de commande du CSCP, pour La fonction interrupteur de puissance est construite autour de la
puce semi-conductrice elle-même couplée à un boîtier ou un subs-
obtenir les états passant et bloqué ainsi que des transitions opti-
trat d’assemblage, associé à un dissipateur de chaleur. Le CSCP
misées ;
est éventuellement connecté à un circuit d’aide à la commutation
– l’exploitation maximale des possibilités physiques du CSCP
compte tenu du contexte de commutation. Il s’agit en fait, si l’on se
réfère à un cahier des charges, d’utiliser des semi-conducteurs
que l’on peut considérer comme faisant partie intégrante de la
fonction interrupteur. Cet ensemble constitue la partie puissance
de la fonction. Le CSCP doit s’intégrer parfaitement au sein de la
2
dont les calibres en tension et courant sont les mieux ajustés au cellule de commutation de puissance, cellule regroupant deux
besoin, et de permettre le meilleur compromis entre les pertes et CSCP et une capacité de découplage pour les cellules de commu-
les perturbations générées ; tation de tension : la figure 1 présente un convertisseur statique
typique, basé sur une association parallèle de cellules de commu-
– sa protection en cas de défaut (surintensité, surtension) tation de tension, comprenant deux CSCP (qui peuvent être une
pouvant le mettre en danger et l’information du système de association de composants) et une capacité de découplage haute
commande éloignée sur la prise de décision de la commande rap- tension (bras de pont). Cette architecture de puissance est la base
prochée ; des convertisseurs électroniques de puissance tels que les ondu-
– la séparation galvanique entre la partie puissance et la par- leurs, redresseurs ou alimentations continues à découpage, ser-
tie commande logique, lorsque les électrodes de référence des vant par exemple pour les chargeurs de batterie, les onduleurs
différents composants à semi-conducteurs se trouvent à des pour les machines tournantes, etc. D’autres architectures de
potentiels différents et/ou si l’on souhaite, éventuellement pour convertisseurs peuvent aussi utiliser une association série ou
parallèle de cellules de commutation ou de CSCP [1][2][3][4].
des raisons de sécurité, une isolation entre puissance et com-
mande ; Pour commuter de façon commandée, chaque CSCP requiert
une commande rapprochée elle-même approvisionnée en énergie
– la compatibilité avec son environnement, notamment sur le
par une alimentation. C’est la partie commande de la fonction
plan électromagnétique interrupteur. Son rôle est défini dans le paragraphe 4 et les fonc-
– la montée en fréquence de découpage permise par les évolu- tions nécessaires pour le pilotage d’un CSCP sont présentées à la
tions récentes dans le domaine (composants grand gap et intégra- figure 2. Selon le niveau de tension du convertisseur de puissance,
tion) ; le type de CSCP et les performances souhaitées, la commande rap-
prochée peut être réalisée aujourd’hui par un seul circuit intégré
– l’autoprotection du circuit de commande rapprochée contre les pilotant, soit chaque CSCP, soit chaque cellule de commutation,
sous-tensions d’alimentation, les températures prohibitives… soit tout le convertisseur de puissance. Les problématiques et les
– son adaptabilité et sa flexibilité (adaptation des temps morts, choix associés à ces modes de réalisation et d’assemblage seront
adaptation et réglage des vitesses de commutation, adaptation en détaillés plus loin dans ce paragraphe ainsi que dans les articles
fonction du point de fonctionnement…). [D3232] et [D3233] correspondants au type de CSCP.
La figure 2 présente les éléments constitutifs de la fonction inter-
Selon le type de composants et la nature des commutations,
rupteur, depuis la puce de puissance jusqu’au circuit de commande
la réalisation des fonctions et les possibilités de contrôle varient rapprochée ainsi que les fonctions périphériques. Ici, un transistor
beaucoup. Pour prendre deux extrêmes, si l’on considère un de puissance de type MOSFET a été considéré à titre d’exemple,
thyristor, commandable seulement à l’amorçage, fonctionnant avec les trois broches classiques (grille, drain, source, notées res-
dans un redresseur assisté, par exemple par la source d’énergie pectivement G, D et S) mais aussi une reprise de potentiel de
à 50 Hz, ou un IGBT commutant à haute fréquence dans un source au plus proche de la puce de puissance (« Sk » pour source
onduleur pour moteur asynchrone, les problèmes sont très dif- kelvin en référence à la technique dite de mesure Kelvin), permet-
férents. tant de limiter l’influence de la commutation du courant dans le cir-
cuit de puissance drain-source sur le contrôle de la différence de
C’est la raison pour laquelle nous avons séparé les composants potentiel entre grille et source. Cette reprise de potentiel SK permet
à semi-conducteurs de puissance en trois catégories où, dans cha- d’améliorer les performances en commutation du transistor de
cune d’entre elles, les contraintes et les problèmes sont com- puissance et la protection du circuit de commande rapprochée.
muns : Cette technique est utilisée par les fabricants de composants de
– les thyristors et les triacs, fonctionnant aujourd’hui quasi puissance, par exemple sur les MOSFET SiC [5] et MOSFET silicium
exclusivement dans des convertisseurs où les blocages sont assis- [6], ces composants pouvant présenter de fortes vitesses de com-
tés par le réseau (redresseurs, gradateurs) ou par la charge (sys- mutation, ou sur les modules de puissance MOSFET et IGBT pré-
tèmes résonants) ; sentant des inductances parasites de source significatives. Un
capteur de température peut également être intégré sur l’embase,
– les transistors bipolaires et les thyristors GTO dont les caracté- avec une ou deux broches supplémentaires, permettant la détection
ristiques sont très proches ; de surchauffe de la puce de puissance (ou tout du moins celle du
– les transistors à grille (MOSFET, HEMT et IGBT) auxquels substrat sur lequel sont reportées les puces) et autorisant une
l’entrée capacitive confère un comportement tout à fait particu- action en conséquence du circuit de commande rapprochée. Ce
type de capteur de température est utilisé par exemple dans les
lier.
modules de puissance intelligents tels ceux du fabricant Mitsubishi
Enfin, nous avons cherché à traiter les spécificités, notamment [7]. Il peut être également intégré à la puce de puissance, c’est le
vue de leur commande, des composants émergents à base de car- cas notamment pour les composants de type smart power et il per-
bure de silicium et de nitrure de gallium. met dans ce cas une mesure ponctuelle au niveau de la puce.

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D3230

COMMANDE DES COMPOSANTS À SEMI-CONDUCTEURS DE PUISSANCE : CONTEXTE ___________________________________________________________

Bus de
tension
CSCP

CSCP

CSCP

CSCP
Contrôle
(0, 1) de l’état et
des transitions
Phase 1 Phase 2 Phase 3 High Side
Vbus Charge / Source Potentiel Vbus

2
de puissance flottant
CSCP

CSCP

CSCP

CSCP
IPh1 Contrôle
IPh1 de l’état et
(0, 1) des transitions
Low Side

Cellule de
Cellule de
commutation
commutation
a pont triphasé faisant apparaître trois cellules de commutation b détail d’une cellule de commutation de tension, avec deux CSCP
de tension permettant de moduler les transferts d’énergie entre une source
de courant et une source de tension

Figure 1 – Exemples de structures de convertisseurs électroniques de puissance, faisant apparaître une ou plusieurs cellules de commutation de
tension

Schéma
transistor D
de puissance
CSCP

G
Alimentation en Puce
Sk Embase
énergie des circuits S Bonding
de commande Capteur
Température
Vss GND Vdd
Circuit de
Autoprotection Puissance
Autoprotection
Sous-alimentation Température

Adaptation et
Contrôle
Commande logique Isolation
S

amplification
protection
en courant
DG

Protection
rapprochée
T– T+ k
S

GND
Mesures
Information d’état Tension
Isolation
diagnostic Courant
Température
Dissipateur thermique
Commande rapprochée – « Gate driver »

Figure 2 – Éléments constitutifs de la fonction interrupteur statique de puissance (avec un seul CSCP)

En lien avec la figure 1b et introduisant l’ensemble des fonctions de commande rapprochée. Les composants à semi-conducteurs de
nécessaires au pilotage des CSCP et la place occupée par la com- puissance du bras d’onduleur peuvent être assemblés dans un
mande rapprochée, la figure 3 présente deux approches possibles module de puissance. Par soucis de clarté, les connexions avec le
selon que chaque CSCP nécessite un circuit de commande ou selon capteur de température et les remontées d’informations de dia-
que chaque cellule de commutation est pilotée par un seul circuit gnostic ne sont pas représentées. De façon plus synthétique, la
de commande. La figure 3a décrit la structure de commande d’un figure 3b est l’illustration de circuits de commande distincts pour le
bras d’onduleur lorsque chaque CSCP possède son propre circuit pilotage d’un bras d’onduleur, nécessitant des convertisseurs isolés

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D3230

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pour l’alimentation en énergie des circuits de commande rappro- faible car ce type de transistor repose sur un courant de porteurs
chée et l’isolation des informations de commande. La figure 3c, en majoritaires de type trou. Or dans le silicium, les trous ont une
revanche, montre un circuit de commande unique pilotant les deux mobilité environ trois fois inférieure à celle des électrons [D3102],
transistors du bras. Cette solution impose des contraintes spéci- ce qui a pour conséquence de créer une résistance à l’état passant
fiques à la technologie du circuit de commande rapprochée (isola- des MOSFET de type P trois fois plus élevée que celle d’un MOS-
tion électrique, tenue en tension, optimisation des mailles de FET de type N, à surface identique. L’électronique de puissance
commande), et dans ce cas de figure particulier de commande ayant des objectifs élevés de rendement énergétique, les perfor-
unique des transistors High Side et Low Side. Des circuits spéci- mances moindres de composants de type P les écartent. Ceci
fiques tels que des pompes de charge, des montages bootstrap, ou explique leur faible disponibilité et par suite, l’utilisation quasi
encore des circuits de décalage de niveaux, pourront être utilisés exclusive de transistors de type N pour la réalisation de cellules
(cf. [D3233]), avec l’opportunité de maîtriser précisément la syn- de commutation. En revanche, ce choix de se restreindre unique-
chronisation des signaux de commande. ment à des transistors de type N impose des spécificités aux cir-
cuits de commande rapprochée d’une cellule de commutation de

2
Qu’il soit dédié à un seul CSCP ou à une ou plusieurs cellules
de commutation, le circuit de commande rapprochée assure prin- puissance de type bras de pont (voir figure 3).
cipalement la fonction d’interface entre la commande logique Dans le cadre des transistors de puissance à grille (MOSFET,
externe et les grandeurs électriques de commande requises par le IGBT, HEMT), l’état du transistor est contrôlé par une différence
CSCP. Mais cette fonction peut rapidement se compliquer de potentiel entre une électrode (la grille) et une électrode de réfé-
lorsqu’elle assure également l’isolation entre les circuits logiques rence (la source pour les MOSFET et HEMT ou l’émetteur pour les
de commande et la partie puissance ainsi que différentes protec- IGBT). En fonction de l’état du transistor de puissance, le potentiel
tions du CSCP telles que : de source peut être amené à varier, et par suite, le circuit de com-
– une autoprotection contre le risque de sous-tension d’alimen- mande rapprochée devra suivre et s’adapter à une valeur éven-
tation ; tuellement élevée, mais aussi aux perturbations dynamiques
– une protection contre les surtensions et/ou surintensités au rapides de ce potentiel de référence.
niveau du CSCP ; Comme présenté dans les figures 1, 3 et 5, la cellule de com-
– une maîtrise des temps de propagation et de fourniture de mutation de puissance fait ainsi apparaître un potentiel flottant,
l’énergie de changement d’état du CSCP ; selon l’état des CSCP. Dans la figure 5, le potentiel flottant est VS1
– une modification paramétrable et variable du mode de pilotage (identique au potentiel VSk1 si l’on néglige les inductances para-
du CSCP par le circuit de commande ; sites introduites par la connectique). Ainsi, une dissymétrie appa-
– un diagnostic des défauts et un retour d’informations avec iso- raît entre les deux CSCP intervenants dans la cellule de
lation galvanique. commutation, introduisant par suite la notion de CSCP « High
Side » (HS) et CSCP « Low Side » (LS) (cf. figures 1, 3 et 5). La
La figure 4 détaille les figures 2 et 3, et introduit la place de la particularité du CSCP en position « high side » est que son circuit
fonction interrupteur au sein d’un système de conversion d’énergie de commande (driver) doit être référencé par rapport à un poten-
électrique. Cette figure 4 permet de prendre conscience de l’impor- tiel flottant VSk1, subissant de fortes variations instantanées et
tance des interactions entre la commande rapprochée et l’ensemble pouvant atteindre des valeurs élevées, au-delà de la tension Vbus
du système, notamment sur les plans de la compatibilité électroma- de la cellule de commutation pour les applications à faible tension
gnétique et de la thermique. La commande rapprochée impose,
de bus. Quant au CSCP en position « low side », le potentiel de
dans une large part, les vitesses de commutation, donc les pertes
référence de son circuit de commande rapprochée VSk2 peut être
par commutation mais aussi les perturbations conduites et rayon-
référencé à un potentiel fixe (la masse de puissance soit VS2 dans
nées (les perturbations de mode commun sont notamment en partie
la figure 5) ou à une référence flottante proche de la masse de
conduites par les liaisons capacitives entre les boîtiers des compo-
puissance mais ne subissant ni une valeur élevée ni une variation
sants et leur dissipateur relié à la terre). De plus, le circuit de com-
temporelle rapide. Par suite, il existe une différence de potentiel
mande est également vecteur propre de perturbation mais aussi
variable entre la référence du circuit de commande du transistor
parfois victime, les perturbations qui remontent le circuit de com-
High Side VSk1 = VGND_HS et la référence du circuit de commande
mande pouvant être à l’origine de dysfonctionnements. Pour respec-
du transistor Low Side VSk2 = VGND_LS. La différence maximale de
ter les normes CEM (compatibilité électro-magnétique) et limiter le
potentiel entre les deux références flottantes des deux circuits de
volume des filtres CEM généralement placés sur le réseau d’alimen-
commande est de l’ordre de la tension du bus de puissance Vbus.
tation, les concepteurs de dispositifs de conversion d’énergie
doivent prendre en compte ces contraintes dès la phase de concep- La figure 5 présente les formes d’onde clés pour mettre en
tion. Ainsi, les perturbations conduites et rayonnées peuvent être avant la problématique de la commande des transistors de puis-
réduites au détriment des pertes par commutation en ralentissant sance à potentiel de référence flottant. La valeur maximale du
les vitesses de commutation. Cela peut aller, dans quelques cas potentiel de référence flottant (d’une dizaine de volts à quelques
d’applications, jusqu’au contrôle même de la forme du courant lors dizaines de kilovolts) ainsi que la vitesse de variation de ce poten-
des phases de commutation pour réduire significativement les per- tiel (de quelques centaines de volts par microseconde à quelques
turbations de mode différentiel. Une analyse similaire peut être centaines de volts par nanoseconde) vont fixer le choix du CSCP
conduite sur le dimensionnement de l’environnement thermique du mais aussi des circuits de commande rapprochée associés et de
CSCP : une augmentation de la température de fonctionnement du leurs modes d’intégration et d’assemblage, voire des circuits
CSCP peut permettre une réduction du volume du système de snubber qui devront leur être associés (pour les composants de la
refroidissement [D3116], mais au détriment d’une augmentation des famille des thyristors notamment).
pertes du CSCP et aux dépens de la fiabilité. Pour illustrer les aspects CEM évoqués sur la figure 4, deux
À la différence des circuits inverseurs en technologie complé- effets représentatifs de l’impact de la commutation de puissance
mentaire basse tension de la microélectronique (technologie sur le circuit de commande rapprochée et sur le contrôle du CSCP
CMOS [E2432]), le contrôle de l’état d’un CSCP et d’une cellule de sont présentés sur la figure 6 : la variation de courant di/dt va
commutation de puissance nécessite des circuits spécifiques. En créer une tension d’auto-induction aux bornes de tout élément
effet, dans un inverseur CMOS de microélectronique, deux tran- inductif parasite, dans la boucle de puissance mais également
sistors fonctionnant en régime complémentaire sont associés en dans celle de commande. Cela est d’autant plus critique concer-
série, utilisant un transistor MOSFET de type P avec un transistor nant l’inductance LS commune aux boucles de puissance et de
de type N et permettant d’utiliser un même signal de commande commande, qui peut modifier l’état du CSCP, limitant d’une part
pour piloter l’état de ces deux transistors. En électronique de puis- la dynamique de charge du CSCP, et pouvant créer d’autre part
sance, la disponibilité de MOSFET de type P en silicium est très des réouvertures ou remises en conduction parasites du CSCP.

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D3231

Caractéristiques des composants


à semi-conducteur de puissance
en vue de leur commande
par Stéphane LEFEBVRE
Professeur
SATIE, Conservatoire national des arts et métiers, Paris, France
2
Bernard MULTON
Professeur
SATIE, École Normale Supérieure de Rennes, Rennes, France
et Nicolas ROUGER
Chargé de recherche
Laplace, CNRS, Toulouse, France
Note de l’éditeur
Cet article est la réédition actualisée de l’article D3231 intitulé « Commande des semi-conduc-
teurs de puissance, principe » paru en 2002, rédigé par Stéphane Lefebvre et Bernard Multon.

1. Caractéristiques des thyristors et triacs en vue de leur commande ..... D 3 231V2 - 2


1.1 Spécificités de commande des thyristors ................................................. — 2
1.2 Thyristors à amorçage optique (LTT) ........................................................ — 5
1.3 Spécificités de commande des triacs ........................................................ — 7
2. Caractéristiques des transistors bipolaires et thyristors blocables
(GTO) en vue de leur commande .............................................................. — 8
2.1 Transistors bipolaires de puissance .......................................................... — 8
2.2 Thyristors GTO et GCT ............................................................................... — 15
3. Caractéristiques des transistors à grille en vue de leur commande...... — 23
3.1 Influence du circuit de commande sur les performances
des composants à grille.............................................................................. — 23
3.2 Principales caractéristiques de commande des transistors MSFET
de puissance................................................................................................ — 24
3.3 Commutations............................................................................................. — 26
3.4 Spécificités des transitors IGBT ................................................................. — 29
3.5 Spécificités des transitors MOSFET SiC.................................................... — 30
3.6 Spécificités des transitors HEMT Gan ....................................................... — 32
4. Conclusion ................................................................................................... — 37
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. D 3 3 231v2

ans cet article, nous étudions les spécificités des composants à semi-
D conducteurs de puissance, déjà présentés en [D 3230] :
– les thyristors et les triacs, qui fonctionnent aujourd’hui quasi exclusive-
ment dans des convertisseurs où les blocages sont assistés par le réseau
(redresseurs, gradateurs) ou par la charge (systèmes résonants) ;
– les transistors bipolaires (BJT) et les thyristors GTO et GCT dont les carac-
téristiques sont très proches ;
– les transistors à grille (notamment MOSFET, IGBT et HEMT) auxquels
l’entrée capacitive confère un comportement tout à fait spécifique.
Parution : février 2018

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CARACTÉRISTIQUES DES COMPOSANTS À SEMI-CONDUCTEUR DE PUISSANCE EN VUE DE LEUR COMMANDE ________________________________________

Pour chacun de ces composants nous spécifierons également les propriétés


spécifiques des composants émergents à matériaux grand gap (SiC et GaN) et
notamment des BJT et MOSFET SiC et des HEMT GaN
Pour chacune de ces catégories de composants à matériau semi-conducteurs
de puissance, les circuits de commande seront détaillés dans les articles [D 3232]
et [D 3233].

synchronisation des commandes à l’amorçage des thyristors d’un


1. Caractéristiques même interrupteur doit être particulièrement soignée.

2 des thyristors et triacs
en vue de leur commande
Les triacs (« Triode for Alternating Current ») [4] offrent, dans un
seul composant à électrode de commande unique, la fonction de
deux thyristors tête-bêche et, à quelques particularités près, que
nous décrirons plus loin, ils se commandent sensiblement de la
même façon que les thyristors et rencontrent les mêmes risques
Les thyristors, composants à commande uniquement à l’amorçage,
d’amorçage parasite par dv/dt et la même limite de di/dt à l’amor-
sont les plus anciens composants à semi-conducteurs de puissance
çage. Les triacs restent cantonnés aux petites puissances essentiel-
commandés (fin des années 1950). Ils sont normalement unidirection-
lement dans des applications grand public en variation de
nels en courant et bidirectionnels en tension mais se déclinent dans
puissance, en mode gradateurs (éclairage y compris à LED,
quelques variantes technologiques, notamment les thyristors asymé- moteurs universels, moteurs asynchrones monophasés, etc.) ou en
triques qui ne supportent que de très faibles tensions inverses mais commutation statique (commande d’électrovannes, de petits
sont plus rapides au blocage (actuellement destinés à des usages moteurs asynchrones, de résistances chauffantes, etc.). Les cou-
impulsionnels et à des onduleurs à résonance). Ils sont parfois inté- rants et tensions commutés n’excèdent pas une dizaine d’ampères
grés à une diode antiparallèle (thyristors à conduction inverse). Il et 1 000 V environ. Les contraintes de coût sont alors prépondé-
existe également des thyristors dits bidirectionnels (sur la même pas- rantes et les circuits de commande sont souvent conçus dans cet
tille, deux thyristors sont intégrés en montage tête-bêche, BCT pour esprit ; l’isolement galvanique est plus rare.
Bidirectionally Controlled Thyristors). Le blocage des thyristors
n’étant pas commandable, il s’effectue à l’annulation du courant et
nécessite un temps minimal d’application de tension inverse noté tq.
Ainsi, les thyristors sont essentiellement utilisés en « commande de
1.1 Spécificités de commande
retard à l’amorçage » ou « commande de phase » (avec des valeurs des thyristors
de tq pouvant s’élever jusqu’à quelques 100 μs) dans les redresseurs
et onduleurs assistés par la source alternative. Mais ces derniers sont 1.1.1 Conditions de mise en conduction
en déclin et se trouvent désormais confinés dans les convertisseurs
de très forte puissance, par exemple pour les liaisons à courant Avant de décrire les caractéristiques requises de commande à
continu haute tension (HVDC) de plusieurs milliers de mégawatts [1]. l’amorçage, nous proposons un bref rappel du principe du thyris-
Les thyristors sont également encore utilisés en montages tête-bêche tor qui permettra de bien comprendre l’origine physique des spé-
dans les gradateurs absorbeurs (sur inductance) pour les compensa- cifications techniques [D3107] [5] [6] [7] [8] [9] [10] [11]. La
teurs statiques de puissance réactive de très forte puissance [2] ainsi figure 1 montre notamment la coupe d’un thyristor classique au
que dans les dispositifs de mise sous tension progressive de charges silicium (structure P+N–PN+) ainsi que le schéma équivalent à
de forte puissance (démarrage de machines asynchrones en moteur deux transistors imbriqués qui permet d’expliquer simplement
ou générateur, transformateurs…) et, d’une façon générale, dans les quelques aspects de son comportement.
interrupteurs statiques en courant alternatif, comme dans les bypass Le thyristor peut en effet être représenté par une association
des alimentations ininterruptibles. Quant aux thyristors rapides (faible de deux transistors bipolaires TA et TK, respectivement d’anode
tq et faible charge recouvrée au blocage, quelques microsecondes à et de cathode, interconnectés pour obtenir une réaction posi-
quelques dizaines de microsecondes), ils sont encore utilisés pour tive. Notons que certains thyristors au carbure de silicium
certains onduleurs à résonance moyenne fréquence comme dans le (GeneSiC) ont adopté des structures N+P–NP+ dont le contrôle
chauffage par induction de forte puissance (dizaines de mégawatts) s’effectue par un courant de gâchette négatif dans une jonction
[3]. Les avantages majeurs des thyristors, comparativement aux gachette-anode. Dans toute la suite, nous continuerons à raison-
autres composants blocables (GTO et IGBT), résident dans leur faible ner avec des structures classiques P+N–PN+ nécessitant un cou-
chute de tension à l’état passant, qui conduit à des rendements de rant de gâchette positif. Si αA et αK sont les rendements
conversion élevés, ainsi que dans leur grande fiabilité, notamment d’émetteur des transistors et Icb0A et Icb0K sont les courants de
liées aux boîtiers pressés (press-pack) employés. fuites de leur jonction collecteur-base, on obtient l’expression
Il existe cependant encore un marché pour les petits thyristors sen- suivante du courant d’anode IA :
sibles car ils permettent de réaliser des fonctions très économiques
dans certaines applications (disjoncteurs différentiels, électroména-
ger). Ainsi les calibres en courant s’étalent sur une plage allant de Alors :
moins de 1 A à plus de 6 000 A pour une seule « puce » ; quant aux
tensions, elles vont de 400 V environ à plus de 10 kV. À ces derniers
niveaux de tension, on rencontre également des commandes
optiques directes (thyristors à amorçage optique ou Light Triggered
Thyristors LTT). La mise en série ou/et en parallèle est couramment À faible courant d’émetteur, le rendement d’émetteur α d’un
pratiquée et permet de contrôler des puissances très élevées que l’on transistor bipolaire est faible. Ainsi, pour le thyristor, à faible cou-
peut considérer illimitées. Les principales contraintes concernant la rant IA d’anode (ce qui n’est pas le fonctionnement normal du thy-
commande sont relatives à l’isolement galvanique nécessaire dans ristor), celui-ci est contrôlé par le courant de gâchette dans un
presque toutes les applications, compte tenu des niveaux de tension mode de fonctionnement linéaire (en amplificateur). Il existe ainsi
et des normes de sécurité. Lors de la mise en série et en parallèle, la une valeur IL du courant d’anode, dite d’accrochage (latching),

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a boîtier press-pack et image d’un wafer b coupe de la structure verticale (épaisseur disproportionnée
2
process (diamètre 6 pouces, 8,5 kV – 5 kA) sur ce dessin) et schéma de principe à deux transistors imbriqués.
(ABB [1]) montrant l’interdigitation Symbole
de jonction gâchette-cathode

Figure 1 – Thyristor

Tableau 1 – Ordre de grandeurs des courants de déclenchement IGT de différents thyristors

Calibres Thyristors sensibles (faible IGT)

Courant direct moyen nominal VRRM 100 à 400 V 200 à 800 V < 1 kV < 1 kV < 1 kV 1,5 à 8 kV

Tension inverse maximale IFAV 0,8 A 8 A 0,3 A 10 A 25 A > 500 A

IGT 1 μA 200 μA 200 μA 10 mA 20 mA 300 à 400 mA

IFAV/IGT 800 000 40 000 1 500 1 000 1 200 1 000 à 10 000

telle que la somme des rendements d’émetteur atteint la valeur 1. qu’à 150 °C, il est environ 2 fois plus faible. Enfin, si le courant
Dans ce cas, d’après l’expression précédente, le courant d’anode d’anode redescend en dessous d’une valeur IH (courant de main-
n’est plus contrôlé (dénominateur nul), la réaction positive atten- tien, « holding current »), légèrement différente de IL pour cause
due est enclenchée, le thyristor s’amorce, c’est-à-dire que la ten- d’un phénomène d’hystérésis, le composant se désamorce. Dans
sion à ses bornes s’effondre et que l’évolution du courant d’anode ce contexte, le courant de déclenchement IGT possède un coeffi-
est dictée par l’environnement du composant. cient de température négatif d’environ –5 %/°C.
Il faut cependant que l’amplitude de l’impulsion de courant de Pour toutes ces raisons, afin de garantir la conduction sur la
gâchette ainsi que sa durée soient suffisantes. En effet, pendant la plage désirée, et en dehors des applications impulsionnelles
phase où le courant d’anode est inférieur à IL, on a un fonctionnement (décharges), on préfère généralement envoyer des trains d’impul-
linéaire et au courant IL correspond un courant de gâchette de sions de courant de gâchette sur cette plage.
déclenchement noté IGT (gate triggering). En outre, dynamiquement, Le tableau 1 donne, pour divers calibres de thyristors, des ordres
il faut injecter une quantité de charges suffisante, c’est pourquoi il de grandeur des courants de déclenchement de gâchette IGT.
existe aussi une durée minimale tGT d’injection dans la gâchette. Il
faut ensuite que le circuit environnant permette au courant d’anode Exemple de spécifications du thyristor ABB 5SYA1074-01
de dépasser IL pour obtenir l’amorçage, alors, dans ces conditions, (8 500 V – 3 660 A) [11] 
l’injection de courant de gâchette peut être arrêtée. Cette précaution
– courant de gâchette de déclenchement : à TJ = 25 °C, IGT-
est importante en cas de charge très inductive (par exemple, grada-
teur pour compensateur statique) et, dans le cas des redresseurs à max = 400 mA ;
commande de retard à l’amorçage débitant sur charge inductive – tension de gâchette de déclenchement : à TJ = 25 °C,
(compensateurs de puissance réactive par exemple), au démarrage et VGT = 2,6 V ;
en régime de conduction discontinue. En dehors de ces cas, la vitesse – courant de gâchette de non-déclenchement : à TJ = TJmax
de croissance de IA est déterminée par les inductances de commuta- (110 °C) VD = 0,4 VFRM IGDmax = 10 mA ;
tion (phénomène d’empiètement) généralement faibles. – tension de gâchette de non-déclenchement : à TJ = TJmax,
Notons que, comme le rendement d’émetteur α d’un transistor VD = 0,4 VFRM VGDmax = 0,3 V ;
possède un coefficient de température positif, le courant d’accro- – courant de maintien à TJ = 25 °C, IHmax = 300 mA et TJ = 110 °C,
chage IL sera d’autant plus faible (amorçage plus aisé) que la tem- IHmax = 150 mA ;
pérature sera élevé. Le coefficient de température du courant
d’accrochage est donc négatif. Ainsi, c’est à froid que l’amorçage – courant d’accrochage à TJ = 25 °C, ILmax = 2 A et TJ = 110 °C,
est le plus difficile. Bien que son évolution ne soit pas linéaire avec ILmax = 1,5 A.
la température, on peut dire qu’à −40 °C, IL est environ 2 fois plus IGM = 0,6 A, dIG/dt = 0,6 A/μs, tG = 20 μs
élevé qu’à 25 °C (généralement température de spécification) alors

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avec IGTmax valeur maximale (compte tenu des dispersions de courant d’anode atteigne la valeur IL d’accrochage. Le faible
caractéristiques) du courant de gâchette temps de montée ainsi que l’amplitude du pic très supérieure à
permettant l’amorçage, IGT sont nécessaires pour assurer un effondrement rapide de la
IGM amplitude du courant de gâchette, tension pendant la montée du courant (vitesse limitée par le cir-
cuit externe). En effet, tout particulièrement lorsque le courant
RA résistance d’anode, d’anode croît rapidement (tout en restant dans les limites impo-
RGK résistance entre grille et cathode, sées par le fabricant : dIA/dt maximal, ici 100 A/μs à 50 Hz, voire
tG durée de l’impulsion de gâchette, 1 000 A/μs à 1 Hz), il est nécessaire que le croisement « tension
anode cathode – courant d’anode » conduise à une dissipation
TJ température de jonction, d’énergie et un échauffement acceptables pour le composant.
VD tension de polarisation pendant l’amorçage (influe D’une façon générale, compte tenu des dispersions de caracté-
sensiblement sur l’amorçage), ristiques, des contraintes de température et d’échauffement tran-

2
VFRM tension directe répétitive maximale. sitoire, les fabricants préconisent une impulsion dont le temps de
montée est inférieur à 1 μs et possédant un pic d’amplitude envi-
ron 3 fois IGTmax. Précisons que cette valeur de IGTmax correspond,
Amorçages indésirables non pas à une valeur à ne pas dépasser, mais à l’amplitude du
courant de gâchette de déclenchement du moins sensible des thy-
Les variations brutales de tension aux bornes d’un thyristor, ristors d’une série, compte tenu des dispersions de caractéris-
lorsqu’il est en polarisation directe, produisent des courants tiques et pour une température donnée, 25 °C en général. À des
capacitifs internes susceptibles de l’amorcer. Le constructeur températures plus basses, la valeur de IGTMax sera encore plus
spécifie ainsi un dVAK/dt critique (dans l’exemple du thyristor élevée.
ABB précédent : 2 000 V/μs à 110 °C). Dans les thyristors sen- La figure 3 décrit un schéma de test d’amorçage : la résistance
sibles (ne nécessitant qu’une faible valeur de IGT), les risques de charge R permet de régler l’amplitude du courant final d’anode
d’amorçages incontrôlés par dV/dt sont plus élevés (plus après amorçage et l’inductance L permet d’ajuster sa pente à la
faible valeur du dVAK/dt critique). Pour immuniser les thyris- croissance (au départ : dIA/dt = U/L). On a représenté sur ce
tors contre ce phénomène, on peut, par construction, les schéma le conducteur de reprise de cathode dédié au circuit de
« désensibiliser », mais en contrepartie les valeurs d’IGT sont commande.
considérablement augmentées. Notons que c’est seulement
pour les petits calibres en courant que l’on rencontre la possi- La figure 4 montre, à l’amorçage, les formes d’onde idéalisées
bilité de choisir le compromis sensibilité à l’amorçage-sensibi- de la tension anode-cathode, du courant d’anode et du courant de
lité aux dV/dt. gâchette, dans trois situations typiques (amorçage réussi, amor-
çage destructif et amorçage manqué). Rappelons qu’avant que le
Rappelons qu’il existe une seconde cause d’amorçage indé-
courant d’anode IA n’atteigne le courant d’accrochage IL, il est par-
sirable provoquée par d’éventuelles surtensions directes
tiellement contrôlé par le courant de gâchette IG, ensuite, lorsque
(dépassement de la tension VFRM). Plus la température est éle-
la tension VAK s’est effondrée, c’est le circuit extérieur qui dicte
vée, plus le risque est important. Ainsi, la tension maximale
complètement son évolution (à la chute de tension du thyristor, à
répétitive directe VFRM que peut supporter un thyristor est
l’état passant, près).
spécifiée à la température maximale (125 °C souvent, voire
110 °C dans l’exemple retenu), valeur relativement basse par Les conditions d’un amorçage réussi sont représentées sur la
rapport aux autres CSCP à cause de ce problème. figure 4a.
La plupart du temps, des circuits « snubber » RC série En cas de dIA/dt supérieur à la valeur critique spécifiée par le
doivent être placés aux bornes des thyristors ou des triacs, fabricant (figure 4b), la puissance dissipée, très localement, est
d’une part, pour limiter les dV/dt (ils agissent alors avec les anormalement élevée car l’amorçage est localisé aux contours de
inductances de commutation) et, d’autre part, pour réduire les la jonction gâchette-cathode et l’expansion du plasma s’effectue à
surtensions de blocage dues au recouvrement inverse. une vitesse limitée à environ 0,1 mm/μs. Il en résulte des points
chauds et un endommagement irréversible voire une destruction
immédiate. Notons que la valeur critique du dIA/dt dépend des
1.1.2 Interprétation et exploitation caractéristiques d’amorçage, notamment du temps de montée de
de la caractéristique VG(IG) l’impulsion et de sa valeur crête IGM. Si les constructeurs préco-
nisent un temps de montée inférieur à 1 μs et une amplitude
Théoriquement, la caractéristique courant-tension de gâchette d’impulsion supérieure à 3 IGT, c’est pour que le thyristor sup-
(vers la cathode) devrait être celle d’une jonction PN. Pratique- porte sans risque le [dIA/dt]crit spécifié. Cette dernière valeur
ment, le procédé technologique de désensibilisation du thyristor dépend également de la technologie du thyristor et peut être amé-
contre les risques d’amorçage par dV/dt conduit à une dégrada- liorée (par le fabricant) grâce à une interdigitation plus poussée de
tion considérable de cette caractéristique. Le schéma équivalent la jonction gâchette-cathode, telle que l’on peut l’observer sur la
résultant est alors plutôt celui d’une faible résistance en parallèle photographie de la « puce » de 6 pouces de la figure 1.
sur une jonction. La technologie de fabrication (réalisation de Enfin, la figure 4c montre une situation d’amorçage manqué car
« courts-circuits de cathode ») conduit, en outre, à une importante le courant d’accrochage n’a pas été atteint à la fin de l’impulsion
dispersion des caractéristiques de gâchette, ce qui explique les de gâchette faute d’une impulsion suffisamment longue eu égard
deux courbes limites (haute et basse) du graphique de la figure 2. à la faible vitesse de montée du courant d’anode (circuit inductif).
Sur la caractéristique de gâchette (figure 2a), on remarque des Dans ce cas, le thyristor retourne à l’état bloqué.
hyperboles de puissance maximale dissipable dans la jonction Pratiquement, le courant de déclenchement IGT des gros thyris-
gâchette-cathode. Comme il s’agit de régime impulsionnel, tors (au-delà de 100 A) est spécifié pour une durée d’impulsion de
notamment du point de vue thermique, ces valeurs de puissance gâchette donnée tG sans que tGT ne soit spécifié en tant que tel.
dépendent de la durée des impulsions. Dans le cas des « petits » thyristors, la situation est sensiblement
Ici (figure 2b), le constructeur préconise (à 25 °C) des impul- différente car leur amorçage peut être relativement rapide (l’envi-
sions avec un pic initial d’environ 5 A à montée rapide (moins ronnement de puissance est souvent tel qu’il n’y a pas besoin de
d’une microseconde) et d’une durée de 10 à 20 μs, puis l’impul- limiter le dI/dt) et le comportement est plus dynamique. Autre-
sion d’amorçage proprement dite (amplitude 1,5 × IGT soit environ ment dit, le raisonnement sur le modèle à deux transistors est
600 mA à 25 °C) dont la durée est liée au temps requis pour que le insuffisant pour décrire un amorçage rapide, l’impulsion de

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IG [t] IGM ≈ 5A
VFG [V]
8 IGon ≥ 1.5 IGT
Taux de répétition f = 60 Hz 100 % IGM tr ≤ 1 μs
7 PG(RMS) = 3 W; tp > 10 ms 90 % tp(IGM) ≈ 10...20 μs
PG(RMS) = 7 W; 10 ms > tp > 1 ms
6 PG(RMS) = 20 W; tp < 1 ms
5
P
G(

IFGM
4 RM
S ) =2
PG

0W dIG/dt

2
P G(R

IGon
(R

3 S)
M

=7
M

2 = W
S)

3W 10 %
1
tr t
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 tp(IGM) tp(IGon)
IFG [A]
a caractéristiques d’amorçages b préconisation d’impulsion d’amorçage

Figure 2 – Exemple de caractéristiques d’amorçage d’un thyristor 8 500 V – 3 660 A (ABB 5SYA1074-01) et de préconisation d’impulsion
d’amorçage (d’après [11])

réduire tq et par conséquent d’atteindre des performances en fré-


quence plus intéressantes.

1.2 Thyristors à amorçage optique (LTT)


La commande des thyristors de très forte puissance passe sou-
vent par une interface opto-électronique qui permet de satisfaire
les contraintes d’isolement liées aux hautes tensions. Les LTT
(Light Triggered Thyristors), quant à eux, permettent d’être amor-
cés directement par une impulsion optique. En 2014, Infineon a
commercialisé un LTT 8 kV – 540 A (référence T533N80TOH),
nécessitant une impulsion lumineuse de 40 mW pour l’amorcer, et
Figure 3 – Schéma de spécification d’amorçage d’un thyristor principalement destiné aux compensateurs statiques de puissance
réactive. En 2015, c’est un LTT 7,5 kV – 6 250 A (figure 5) qui a été
présenté pour des transmissions HVDC [12]. Un raccordement par
gâchette doit véhiculer une charge suffisante et l’amplitude IGT fibre optique permet une commande directe par impulsion lumi-
dépend de la durée tG de l’impulsion. neuse. À l’autre extrémité de la fibre, c’est une diode laser qui
■ Extinction ou blocage effectue la conversion du signal électrique de commande. C’est
durant les années 1980 que cette technologie est arrivée à matu-
Comme nous l’avons dit précédemment, la commande ne per- rité avec, au début des années 1990, le franchissement des 10 kV
met pas d’agir sur le blocage, c’est grâce à l’action du circuit exté- de tenue en tension (12 kV, Mitsubishi). À leurs débuts, les LTT
rieur que le courant s’annule et que l’état bloqué peut être obtenu. souffraient d’une faible tenue en dV/dt et en dI/dt ; depuis,
Cependant, lorsque l’on considère le schéma à deux transistors d’importants progrès ont été faits pour atteindre les niveaux des
représentant le fonctionnement d’un thyristor, on pourrait penser thyristors conventionnels.
que l’extraction d’un courant de gâchette suffisant est capable
d’entraîner le blocage du transistor TK et par là même le blocage Exemple : LTT Infineon (T 2563 N80) 7,5 kV – 2,3 kA
de tout le thyristor. C’est le principe du thyristor GTO blocable par Impulsion minimale requise de 40 mW optiques avec un temps de
la gâchette (voir § 2). Mais cette méthode de blocage n’est viable montée de 0,5 μs, via une diode laser InGaAs/GaAs émettant à
que si la jonction gâchette-cathode possède une structure très 905 nm et capable de délivrer une puissance maximale de 4 W avec
interdigitée. Pour minimiser les phénomènes de second claquage un courant de 5 A (en régime impulsionnel).
pendant la remontée de la tension, il est également nécessaire
[dV/dt]crit = 2 000 V/μs, [dI/dt]crit = 5 000 A/μs.
d’accélérer, par construction (réglage de la durée de vie et implan-
tation de centres de recombinaisons), les recombinaisons dans
l’émetteur du transistor TA dont on aurait annulé le courant de Ces dispositifs sont réservés aux applications de très forte puis-
sance pouvant nécessiter la mise en série de plusieurs thyristors
base.
de forte tension de claquage, comme pour le transport d’énergie
Avant l’apparition du thyristor GTO, on avait déjà compris en courant continu haute tension (liaison 100 kV et plus). L’isola-
qu’extraire un courant négatif de gâchette au blocage permettait tion optique, insensible aux champs magnétiques parasites, aug-
une amélioration des performances, notamment une réduction de mente considérablement l’immunité du circuit de commande aux
tq. Cette méthode d’extraction de charges est parfois utilisée dans perturbations générées par les commutations des thyristors. Mais
les thyristors rapides (jonction gâchette-cathode interdigitée). Le certains fabricants (ABB) continuent à préférer les thyristors à
courant de gâchette négatif au blocage permet de fortement amorçage électrique pour ces mêmes gammes de puissance.

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2
amorçage réussi :

Figure 4 – Formes d’onde idéalisées pour mettre en évidence les conditions de bon amorçage d’un thyristor

C
r=0 R n+

p– p

n–

a photographie montrant le boîtier press-pack et la fibre optique de commande b structure interne du composant

Figure 5 – LTT 7,5 kV – 6,25 kA (Infineon) (d’après [13])

En contrepartie, la commande optique directe empêche tout diode BOD (Break Over Diode), intégrée au centre du thyristor
contrôle actif par le circuit de commande, notamment contre les comme cela est indiqué à la figure 6b et qui se charge de
surtensions apparaissant lors des mises en conduction non remettre en conduction le thyristor en cas de surtension. La ten-
simultanées des différents LTT connectés en série. Pour cette sion de claquage de la diode BOD intégrée doit être inférieure à
raison, les LTT peuvent intégrer une protection interne contre celle « théorique » du thyristor. Par exemple, un LTT spécifié
les surtensions qui se charge de mettre en conduction le thyris- pour tenir 7,5 kV intègre une diode BOD de 7,5 kV alors que la
tor lorsque la tension qu’il supporte dépasse une certaine fonction thyristor est dimensionnée pour supporter au moins
valeur. La protection contre les surtensions est réalisée par une 8 kV.

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Figure 6 – Symbole et schéma de principe d’un LTT intégrant


une diode BOD (break over diode) assurant la mise en conduction
Figure 8 – Définition des quadrants d’amorçage d’un triac 2
et donc la protection du thyristor en cas de surtension anode-
cathode Pour répondre aux diverses exigences du marché, les fabricants
proposent différents compromis de conception :
Lorsque la tension aux bornes du LTT atteint la tension VBOD – des composants dits « sensibles » ou encore « logic level »
(VBOD = VRRM), la diode BOD passe en avalanche et met en dont les caractéristiques ont été optimisées pour minimiser le cou-
conduction le thyristor. rant de déclenchement IGT ;
Notons que cette protection, extrêmement utile à l’amorçage – des composants capables d’une bonne résistance aux dV/dt
de plusieurs LTT connectés en série, ne dispense pas du circuit (« high immunity » ou encore « snubberless ») permettant de
de protection du convertisseur contre les surtensions venant du réduire ou de se passer de circuits RC de protection ;
réseau. En effet, les thyristors ne doivent pas être mis en – des composants standards offrant un compromis entre les
conduction à l’occasion de ces surtensions, sans quoi ils occa- deux critères précédents.
sionneraient de dangereux dysfonctionnements du convertis-
seur. Le choix de la catégorie la mieux adaptée, pour une application
aux contraintes données, résulte d’un optimum économique fai-
sant intervenir les circuits de commande, le triac lui-même et son
1.3 Spécificités de commande des triacs circuit snubber RC.
Dans le cas des triacs sensibles (il en est d’ailleurs de même
Comme le montre la figure 7, la structure du triac comprend pour les thyristors sensibles), une résistance RGK, entre la
deux thyristors intégrés en montage tête-bêche [14] [15] mais gâchette et l’électrode MT1, est préconisée pour obtenir une endu-
une seule électrode de gâchette est sortie du côté de l’électrode rance suffisante aux dV/dt. En son absence, le courant de déclen-
de puissance notée A1 ou MT1 (MT = Main Terminal), parfois chement est encore plus faible mais la tenue en dV/dt est
également appelée COM (Common) puisque c’est l’électrode de généralement très insuffisante et peut requérir des circuits RC de
référence pour la commande. Cette structure va entraîner une limitation très surdimensionnés.
asymétrie de la commande et, notamment de la sensibilité à
l’amorçage. La figure 8 donne la définition des quadrants Avec les triacs sensibles et standards, l’amorçage est possible
d’amorçage du triac selon le signe de la tension V21 entre les dans les quadrants tels qu’ils sont définis à la figure 8. Mais les
deux électrodes principales MT2 et MT1 et le signe du courant triacs « snubberless » sont privés de l’amorçage dans le quadrant
de gâchette IG. Compte tenu de la structure présentée, il est clair IV, ils sont parfois appelés « triacs 3 quadrants ». Un amorçage
que l’amorçage le plus efficace est obtenu lorsque la tension V21 dans les quadrants I et III (signe du courant de gâchette identique
et le courant de gâchette sont tous deux positifs. à celui de la tension V21) est utilisé dans certains gradateurs éco-
nomiques à commande non isolée. La capacité de fonctionner
dans le quadrant IV peut permettre de simplifier les circuits
d’amorçage isolés en autorisant un courant de gâchette unidirec-
tionnel quel que soit le signe de V21.
Il existe également des variantes permettant de réduire les
besoins de protection en surtension ainsi que la commande, tels
que les ACS (AC Switch, 1999), commandables uniquement
dans les quadrants II et III, puis les ACST (AC Switch Trigger)
supportant également le quadrant I. Ces évolutions technolo-
giques, proposées par STMicroelectronics [16], permettent de
réduire encore les coûts et de maintenir une place pour ce com-
posant, en apparence rudimentaire, sur le marché de la conver-
sion d’énergie électrique.

Exemple
Une comparaison de spécifications de quelques triacs STMicroelec-
tronics, de mêmes calibres 4 A, montre les différents compromis de
conception dans le tableau 2.
La figure 9 montre un exemple de l’influence de la température sur
Figure 7 – Principe de la structure du triac, schéma fonctionnel les caractéristiques d’amorçage d’un triac T435 (snubberless) pour
équivalent et symbole les trois quadrants possibles.

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Tableau 2 – Comparaison des spécifications de triacs STM (calibre 4A)


IGT [mA]
Triacs et ACST
[A/ms]
4 A – 600 V et 800 V QI QII QIII QIV [V/μs]

T405Q-600 : sensible 5 5 5 10 10 1,8

T405 sensible 5 5 5 – 20 0,9 @ dV/dt = 10 V/μs

T410 standard 10 10 10 – 40 2 @ dV/dt = 10 V/μs

2
T435 « snubberless » 35 35 35 – 400 2,5 sans snubber

ACST410 (sensible) 10 10 10 – 500 2 @ dV/dt = 15 V/μs

ACST435 (high immunity) 35 35 35 – 1 000 5 sans snubber

Thyristor) qui ressemblent plus à de très gros transistors bipolaires


qu’à des thyristors. C’est pourquoi nous avons choisi de traiter leurs
IGT, VGT[Tj]/IGT, VGT[Tj = 25 °C]
3,0 commandes dans un même article.
Valeurs typiques Rappelons enfin que le transistor bipolaire a été évincé, non pas
IGT Q3 à cause de ses pertes (conduction et commutation) mais, principa-
2,5
lement à cause de la complexité de sa commande de base (stan-
dardisation de circuits dédiés quasi impossible), de la
2,0 consommation énergétique de cette dernière et, enfin, à cause du
IGT Q1-Q2
temps de stockage qui, même s’il n’introduit pas de pertes, accroît
1,5 les difficultés de contrôle du processus dans lequel le transistor
commute.
1,0 VGT Q1-Q2 -Q3
2.1 Transistors bipolaires de puissance
0,5
Tj[°C]
2.1.1 Structures des transistors et formes d’ondes
0,0 typiques
–40 –30 –20 –10 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130
Au cours de ces vingt dernières années, les domaines d’applica-
tion des transistors bipolaires [17] [18] se sont considérablement
Figure 9 – Influence de la température sur les caractéristiques
d’amorçage d’un triac « snubberless » 4 A (STMicrolectronics réduits. Ils ne sont plus utilisés aujourd’hui que dans des applica-
T435T-600 4 A – 600 V) selon les quadrants tions très spécifiques dans lesquelles le critère économique est
prépondérant et lorsqu’une très faible chute de tension à l’état
passant est requise. La structure conventionnelle des transistors
bipolaires silicium est à jonction base-émetteur interdigitée. Des
2. Caractéristiques structures technologiques plus fines sont encore employées, on
peut notamment retenir les structures verticales à doigts d’émet-
des transistors bipolaires teur perforés (figure 10) utilisées aujourd’hui pour l’obtention de
transistors à faibles VCESAT ou de structures multicellulaires [19]
et thyristors blocables [20].
Le faible gain du transistor bipolaire, dans le cas d’une tension
(GTO) en vue de leur de claquage élevée, a généralisé en haute tension l’emploi de dar-
commande lingtons intégrant deux, voire dans le passé trois (triple darling-
ton) ou quatre transistors, selon les dispositions de la figure 11.
Aujourd’hui on trouve encore quelques fabricants proposant des
Les premiers transistors de puissance étaient bipolaires, leur darlingtons par exemple pour l’allumage électronique dans des
maturité technologique fut atteinte à la fin des années 1970, lorsque applications automobiles ou la maintenance de convertisseurs.
le niveau de compréhension de leur comportement complexe per- Sur la figure 11a, les résistances R1 et R2 servent à réaliser une
mit de les améliorer sensiblement. Jusque là, ils se partageaient, polarisation négative des jonctions base-émetteur des deux tran-
avec les thyristors, le marché des composants à semi-conducteurs sistors à l’état bloqué. Dans le montage de plus forte puissance
de puissance. Puis, progressivement et successivement, les MOS- (figure 11b), on remarquera une électrode supplémentaire pour
FET et les IGBT les détrônèrent de leurs domaines d’applications. Au pouvoir extraire un courant, directement de la base du transistor
début du XXIe siècle, ils n’occupent plus que quelques niches. En de plus forte tenue en courant.
particulier, on les rencontre dans des applications « grand public » Les figures 12 et 13 montrent respectivement les formes
telles les ballasts électroniques pour l’alimentation de tubes fluores- d’ondes typiques en commutation d’un transistor bipolaire de
cents ou halogènes, ou encore dans les afficheurs cathodiques (TV, puissance ainsi que le trajet de son point de fonctionnement
moniteurs vidéo), eux-mêmes en déclin. Il pourrait donc sembler dans le plan (IC, VCE) lors des commutations d’amorçage et de
inutile de les traiter en détail. Mais en fait, nombre des problèmes blocage. Ce dernier revêt une importance tout à fait particulière
qu’ils soulèvent se retrouvent dans les thyristors GTO (Gate turn-Off dans le cas du transistor bipolaire car il doit s’inscrire à l’inté-

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116
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D3232

Composants bipolaires (thyristors,


triacs, GTO, GCT et BJT) :
circuits de commande
par Stéphane LEFEBVRE

2
Professeur
SATIE, Conservatoire national des arts et métiers, Paris, France
Bernard MULTON
Professeur
SATIE, École Normale Supérieure de Rennes, Rennes, France
et Nicolas ROUGER
Chargé de recherche
Laplace, CNRS, Toulouse, France
Note de l’éditeur
Cet article est la réédition actualisée de l’article D3232 intitulé « Commande des semi-
conducteurs de puissance : Thyristors GTO et GCT » paru en 2003, rédigé par Stéphane
Lefebvre et Bernard Multon.

1. Circuits de commande pour thyristors ..................................................... D 3 232v2 - 2


1.1 Contexte....................................................................................................... — 2
1.2 Principes de commande ............................................................................. — 3
1.2.1 Mise en forme de l’impulsion de commande.................................. — 3
1.2.2 Train d’impulsions pour thyristors ................................................... — 3
1.2.3 Auto-alimentation du circuit d’amorçage ........................................ — 4
2. Circuits de commande pour triacs ............................................................ — 5
3. Circuits de commande pour transistors bipolaires
(Bipolar Junction Transistors).................................................................... — 6
3.1 Principes de commande ............................................................................. — 6
3.2 Montage cascode ........................................................................................ — 8
3.3 Exemple de circuit de commande pour transistors bipolaires SiC......... — 10
4. Circuits de commande pour thyristors GTO et GCT ............................... — 11
4.1 Commande de gâchette pour GTO............................................................ — 11
4.1.1 Principes ............................................................................................. — 11
4.1.2 Protection contre les régimes de courts-circuits ............................. — 12
4.2 Commande dure (ou hard drive) pour thyristor GTO :
Gate Controlled Thyristor (GCT) ................................................................ — 12
4.3 Du GCT à l’IGCT .......................................................................................... — 13
5. Conclusion ................................................................................................... — 15
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. D 3 232v2

es contextes et les principes de la commande des composants bipolaires de 


L puissance ont fait l’objet des articles Commande des composants à semi-
conducteurs de puissance : contexte [D3230] et Caractéristiques des compo-
sants à semi-conducteur de puissance en vue de leur commande [D3231].
Dans cet article sont développés les circuits de commande :
– des thyristors commandés par impulsions de courant de gâchette, pour
lesquels une synchronisation des circuits de déclenchement est nécessaire ;
Parution : mai 2018

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117
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COMPOSANTS BIPOLAIRES (THYRISTORS, TRIACS, GTO, GCT ET BJT) : CIRCUITS DE COMMANDE __________________________________________________

– des triacs (bidirectionnels) qui se commandent sensiblement comme des


thyristors ;
– des transistors bipolaires (technologie silicium et carbure de silicium)
commandés en courant ;
– des thyristors GTO (Gate Turn Off) et GCT dont les principes de com-
mande sont assez proches de ceux des transistors bipolaires au silicium.
Les circuits de commande pour MOSFET et IGBT font l’objet de l’article Cir-
cuits de commande pour transistors à grille (MOSFET, IGBT, HEMT) [D3233].

2 1. Circuits de commande
pour thyristors
Pour les notations, le lecteur se reportera à la section 1 de
l’article [D3231].

1.1 Contexte Auto-alimentation

Mises à part les applications dans lesquelles les thyristors


servent à des déclenchements non périodiques (commandes de
flash, protections par mise en court-circuit), une synchronisation
des circuits de déclenchement est nécessaire qu’il s’agisse d’appli-
cations de type redressement ou gradateur avec commande de
retard à l’amorçage ou encore de contacteurs statiques.
Pour les petites et moyennes puissances (jusqu’à quelques
dizaines d’ampères et tension inférieure au kilovolt), une isolation
galvanique entre les composants de puissance et les circuits de
contrôle n’est pas toujours nécessaire. Dans les autres cas, soit
dans la plupart des convertisseurs à thyristors, l’isolation est effec-
tuée à l’aide d’un transformateur d’impulsion (figure 1a) qui assure
simultanément la fonction d’isolation et celle de transmission de
l’énergie de commande. En très forte puissance, notamment
lorsque plusieurs thyristors sont mis en série (applications en haute
et très haute tension), les dispositifs d’isolation peuvent être ame-
nés à supporter des tensions de plusieurs dizaines de kilovolts, et la
solution d’une isolation par fibre optique est généralement retenue.
Elle offre des tensions d’isolation plus élevées qu’avec un transfor- Figure 1 – Solutions possibles pour l’isolation du circuit de com-
mateur d’impulsion (maximum aux environ de 15 kV) ainsi qu’une mande de thyristors
plus grande insensibilité aux perturbations conduites par le circuit
de commande. Par ailleurs, la fibre optique permet facilement de
commander des thyristors éloignés de l’organe de commande, ce
qui est généralement le cas dans les convertisseurs de très forte
puissance. Pour les dispositifs à commande optique indirecte
(figure 1b) l’énergie de commande peut être prélevée sur le circuit
de puissance par l’intermédiaire d’un dispositif d’auto-alimentation
afin d’éviter que les différents problèmes d’isolement ne se
reportent sur les alimentations en énergie.
Lors de la mise en série, l’amorçage de tous les thyristors doit
être, de façon idéale, simultané. C’est en pratique irréalisable, à
cause notamment des incontournables dispersions de caractéris-
tiques entre les différents thyristors utilisés. Le principe (figure 2)
consiste à exploiter la tension VAK pour amorcer les différents thy-
ristors. Le thyristor qui entre en conduction le premier voit la ten-
sion à ses bornes s’écrouler. Cette tension se répartit sur les
autres thyristors qui voient leurs tensions VAK augmenter. Au delà
d’une certaine valeur, inférieure à leur tension de claquage, le dis-
positif de détection envoie l’impulsion et l’énergie de commande.
Ainsi, tout risque d’amorçage par surtension, lié à une mise en
conduction non instantanée des différents thyristors est a priori
Figure 2 – Mise en série de plusieurs thyristors, auto-alimentation
évité. La même méthode est appliquée sur les LTT (Light Trigge- des circuits de commande rapprochée et synchronisation des mises
red Thyristors) équipés de BOD (Break Over Diode) voir § 1.2 de en conduction par VAK

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D 3 232v2 – 2

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___________________________________________________ COMPOSANTS BIPOLAIRES (THYRISTORS, TRIACS, GTO, GCT ET BJT) : CIRCUITS DE COMMANDE

[D3231]. Une diode BOD [1] se comporte comme un thyristor sans meilleure tenue en di/dt possible. Généralement, une amplitude
gâchette dont l’amorçage s’effectue par dépassement de la ten- égale à 3.IGT (IGT étant le courant minimum d’amorçage spécifié
sion d’avalanche directe. dans les documentations constructeur) est recommandée en
n’oubliant pas que ce sont les basses températures qui sont les
Les dispositifs d’auto-alimentation comprennent généralement
plus contraignantes (valeur de IGT plus élevée).
un condensateur de stockage d’énergie qui se charge pendant
l’état bloqué du thyristor, la régulation de tension pouvant être La figure 4 montre le schéma de principe d’un circuit de com-
effectuée par un dispositif à diodes Zener [2]. mande, avec isolation galvanique par transformateur d’impulsion,
permettant de générer un courant de commande voisin de la
Avec une telle architecture, la transmission de l’information forme typique précédente. À la mise en conduction du transistor
peut être indifféremment magnétique ou optique. On utilise alors MOSFET de commande, la tension VCC est appliquée au primaire
souvent des opto-coupleurs avec une entrée par fibre optique. De du transformateur par l’intermédiaire de la capacité C1. Cette ten-
nombreuses architectures sont possibles, chacune d’elles présen- sion se retrouve (au rapport de transformation près) au secon-
tant des avantages et des inconvénients, ainsi que décrit dans [1].

2
daire, la résistance R2 limitant le courant dans la gâchette à la
valeur IGM. La décharge du condensateur entraîne une diminution
du courant de gâchette jusqu’à la valeur IG1 contrôlée par R1 et R2.
1.2 Principes de commande Un fusible F1 peut également être placé en série pour protéger le
circuit secondaire en cas de défaillance du thyristor. La résistance
R3 est utilisée pour améliorer la désensibilisation du thyristor aux
1.2.1 Mise en forme de l’impulsion de commande dVAK/dt ou pour maintenir le circuit de gâchette fermé en cas de
fusion du fusible. Sa valeur ne doit cependant pas être trop faible
De façon générale, l’allure typique d’une impulsion de com-
pour ne pas accroître la consommation du circuit de commande.
mande de thyristor est présentée sur la figure 3. Une montée
La diode Zener DZ assure la démagnétisation du transformateur
rapide de l’impulsion du courant de gâchette est requise ainsi
d’impulsion. On peut remarquer que la résistance R2 pourrait tout
qu’une injection de charge significative afin d’offrir au thyristor la autant se trouver au primaire du transformateur d’impulsion.
Les transformateurs d’isolement pour les commandes dédiées
aux applications « haute tension » sont équipés d’écrans électros-
tatiques au primaire et au secondaire qui permettent de maîtriser
le chemin emprunté par les courants capacitifs de mode commun
qui prennent naissance lors des dV/dt imposés par les commuta-
tions. Les écrans évitent que ces courants ne perturbent les cir-
cuits logiques de commande, ils augmentent ainsi leur immunité
aux perturbations générées par les commutations.
Le temps de montée de l’impulsion de courant est limité par
l’inductance de fuites du transformateur et, éventuellement, par
l’inductance de câblage du circuit de commande. Il est donc
important d’avoir un bon couplage magnétique primaire-secon-
daire. Cependant, les contraintes d’isolement galvanique en haute
tension conduisent à éloigner primaire et secondaire, ce qui
accroît les fuites magnétiques. C’est un des problèmes posés par
ce type de commande dans les applications de très haute tension
et qui conduit au choix des amorçages optiques.

1.2.2 Train d’impulsions pour thyristors


Lorsque les thyristors sont utilisés sur des circuits très inductifs,
le courant d’anode peut ne pas avoir eu le temps d’atteindre le
courant d’accrochage IL au bout de la durée tg maximale imposée
par le transformateur (cf. figure 3). Par ailleurs, l’instant de mise
Figure 3 – Forme typique d’une impulsion de commande de thyristors en conduction effective ne correspond pas nécessairement à l’ins-

IA

D2 F1

Figure 4 – Circuit de commande de gâchette et formes d’ondes associées

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D 3 232v2 – 3

119
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D2 F1

R3

Figure 5 – Principe de commande pour impulsions de longue durée

tant de déclenchement ; c’est le cas dans les onduleurs, mais éga-


lement dans les redresseurs en régime de conduction discontinue
(cas d’un redressement sur charge présentant une force contre-
électromotrice par exemple). Dans le montage présenté sur la
figure 4 la durée tg de l’impulsion de commande reste limitée, par
la saturation du circuit magnétique, à quelques dizaines de micro-
Rs
secondes pour des transformateurs de taille raisonnable (le pro-
duit E.T caractérisant l’aire maximale de l’impulsion de tension
correspond au flux total à saturation et est donc notamment lié
aux dimensions géométriques). Ainsi pour pallier ces difficultés Rd
de mise en conduction et commander les thyristors avec une
impulsion de plus longue durée, on module le signal de com- Cs
mande par un signal « haute fréquence » (de quelques dizaines de
kilohertz) qui est ensuite transmis par le transformateur d’impul- SCR
sion (figure 5). Les trains d’impulsions de courant de gâchette
ainsi transmis comprennent une courte pointe initiale. D2
Switch
Enfin, les circuits RC placés habituellement aux bornes des thy-
ristors pour limiter les dVAK/dt et amortir les surtensions à leurs D1 DZ
bornes contribuent à faciliter l’amorçage dans le cas de charges
fortement inductives en régime de conduction discontinue. La SCR0 Contrôle
décharge de la capacité pouvant permettre de créer un courant
Cg
d’anode supérieur au courant d’accrochage IL.
RZ
1.2.3 Auto-alimentation du circuit d’amorçage
Différentes topologies de circuits d’auto-alimentation ont été
imaginées. Elles sont généralement intégrées au snubber (circuit
RC de limitation des dV/dt et des surtensions de recouvrement
inverse), ce qui permet de faire chuter à moindres frais la tension
présente aux bornes du thyristor à un niveau compatible avec
l’électronique de déclenchement. Sur la figure 6, le thyristor princi- Figure 6 – Exemple de circuit réalisant une auto-alimentation avec
pal (SCR pour Silicon Controlled Rectifier) est muni d’un snubber diode Zener DZ et thyristor de régulation SCR0 (d’après [2])
Rs – Cs, d’un condensateur de stockage d’énergie Cg permettant de
maintenir la tension aux bornes du circuit de déclenchement (noté
ment reçoit, quant à lui, un signal de mise en conduction via un
« switch ») et d’un circuit de régulation de tension constitué d’une
dispositif d’isolation optique ou magnétique.
diode Zener DZ qui amorce le thyristor de régulation SCR0 lorsque
la tension devient trop élevée. Pour une tension VAK positive, On trouve également, sur le marché, des « gate drivers » dédiés
lorsque la tension aux bornes de la diode Zener dépasse la tension à la commande de deux thyristors tête-bêche destinés à des relais
souhaitée elle déclenche le thyristor SCR0 et limite la tension aux statiques. Leur commande à l’amorçage est généralement syn-
bornes du condensateur Cg. Pour les tensions négatives, la diode chronisée avec le passage par zéro de la tension, ce qui est idéal
D1 shunte le circuit. Donc, à la chute de tension près de la diode pour des charges résistives. Le fabricant NuWave Technologies
D2, et à la précision près de la tension Zener, le condensateur est Inc. [3] propose de tels circuits auto-alimentés qui simplifient
chargé à la tension Zener de la diode DZ. Le circuit de déclenche- grandement la conception de ces relais statiques.

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D 3 232v2 – 4

120
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D3233

MOSFET et IGBT :
circuits de commande

par Stéphane LEFEBVRE


Agrégé de Génie électrique
Docteur de l’École normale supérieure de Cachan
2
Maître de conférences au Conservatoire national des arts et métiers
et Bernard MULTON
Agrégé de Génie électrique
Docteur de l’université de Paris 6
Professeur des Universités à l’École normale supérieure de Cachan – Antenne de Bretagne

1. Dimensionnement.................................................................................... D 3 233 - 2
2. Protection contre les courts-circuits ................................................. — 3
2.1 Détection par mesure de la désaturation .................................................. — 4
2.2 Détection par mesure du courant............................................................... — 4
2.3 Mise en œuvre d’une protection ................................................................ — 4
3. Transistors low side ................................................................................ — 5
3.1 Principe......................................................................................................... — 5
3.2 Circuits intégrés de commande.................................................................. — 6
4. Transistors high side ............................................................................... — 7
4.1 Problématique.............................................................................................. — 7
4.2 Transmission des impulsions de commande............................................ — 7
4.3 Alimentations............................................................................................... — 10
4.4 Isolation simultanée de la commande et des alimentations
par transformateur d’impulsion ................................................................. — 13
5. IGBT de forte puissance......................................................................... — 14
5.1 Principes de commande.............................................................................. — 14
5.2 Circuits hybrides de commande................................................................. — 15
Références bibliographiques ......................................................................... — 16

es contextes et les principes de la commande des composants MOSFET


L (Metal Oxide Semiconductor Field Effect) et IGBT (Insulated Gate Bipolar
Transistor) ont fait l’objet des articles [D 3 230] et [D 3 231].
Dans cet article sont développés les circuits de commande des transistors à
grille isolée MOSFET et IGBT. Des exemples de circuit de commande pour tran-
sistor low side sans isolation et pour transistor high side sont donnés.
Les circuits de commande pour composants bipolaires de puissance sont étu-
diés en [D 3 232].
Parution : août 2003

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique D 3 233 − 1

121
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D3233

MOSFET ET IGBT : CIRCUITS DE COMMANDE ________________________________________________________________________________________________

1. Dimensionnement Il est délicat de dimensionner le circuit de commande à partir des


seules capacités du schéma équivalent, CGD étant fortement non
linéaire. Les fabricants de transistors MOSFET et IGBT indiquent la
charge QG qu’il faut apporter à la grille pour assurer la commuta-
tion, notamment en fonction de la tension d’alimentation du circuit
Pour les notations, le lecteur se reportera en [D 3 231, § 3].
de grille [1] [2].

On remarque en effet que la charge injectée pour une commuta-


Bien que la commande d’un transistor MOSFET ne nécessite que
l’application d’une tension constante, le circuit de commande peut
être amené à délivrer transitoirement des intensités élevées (jusqu’à
tion,
∫ I G d t , est sensiblement indépendante de IGM puisque les

plusieurs ampères) et de très courtes durées (quelques 10 ns) lors temps de commutation sont inversement proportionnels à IGM. La
des phases de commutation pour assurer la charge et la décharge valeur de courant commuté I0 influe assez peu car le temps de pas-

2
de sa capacité d’entrée. Ainsi, le dimensionnement et le câblage du sage de VT (tension de seuil de commande) à V0 (proche de la ten-
circuit de commande doivent être étudiés et réalisés avec soin. sion de plateau de commande) est généralement très faible (cf.
Exemple : les relevés expérimentaux de la figure 1 sur un transis- [D 3 231, figure 37]. En revanche, la tension commutée joue un rôle
tor MOSFET 600 V, 21 A inséré dans un hacheur série (I0 = 8 A, un peu plus important. Évidemment, la tension maximale de com-
UDC = 400 V) montrent les grandeurs de commande (VGS et IG) et les mande VGS joue un rôle majeur (figure 3).
grandeurs commutées (VDS, ID) lors des phases de mise en conduction
et de blocage. L’énergie WG fournie par le circuit de commande pour assurer la
commutation de mise en conduction s’écrit :
La figure 2 montre un circuit de commande unipolaire élémen-
taire, constitué essentiellement d’un push-pull à deux transistors

∫u i
bipolaires complémentaires, et d’une résistance RG de limitation du WG = d t = V CC Q G
courant maximal de grille. Les formes d’ondes simplifiées sont tra- S G
cées en négligeant l’effet de l’inductance totale de grille. T

1 15 1 20
Courant (A)

Tension (V)

Courant (A)

Tension (V)
0,75 VGS VGS 15
10
IG
0,5 0,5 10
5
0,25 5

0 0 0 0

– 0,25 –5
–5
IG
– 0,5 – 0,5 – 10
– 10
– 0,75 – 15

–1 – 15 –1 – 20
0 0,5 1 1,5 2 0 0,5 1 1,5 2
Temps (µs) Temps (µs)

500 50 10 500
Courant (A)

Tension (V)

Courant (A)

Tension (V)

400 40 8 400
VDS VDS
ID
300 30 6 300

200 20 4 200

100 ID 10 2 100

0 0 0 0

– 100 – 10 –2 – 100
0 0,5 1 1,5 2 0 0,5 1 1,5 2
Temps (µs) Temps (µs)

a mise en conduction b blocage

Figure 1 – Relevés expérimentaux, mise en conduction et blocage d’un transistor MOSFET (APT6030BVR, 600 V, 21 A) avec une tension de grille
bipolaire

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122
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________________________________________________________________________________________________ MOSFET ET IGBT : CIRCUITS DE COMMANDE

devant fournir une puissance moyenne de 110 mW pour une fré-


VCC quence de découpage de 100 kHz. Pour limiter les pertes par com-
mutation, les commutations devant être rapides, il est courant de
CG rencontrer des dVDS/dt de l’ordre de 10 kV/µs à la mise en conduc-
tion de tels composants (ils sont généralement légèrement infé-
VCC D rieurs au blocage). Pour le composant pris comme exemple ici, le
S G fabricant annonce une valeur de CGD = 300 pF (sous VDS = 25 V).
TP Pour obtenir un dVDS/dt de 10 kV/µs en ce point particulier, le circuit
0V RG
de commande devra fournir un courant de grille de 3 A. Notons que
US S ce courant sera atteint grâce à une résistance de grille inférieure à
4 Ω si VCC = 12 V.
Exemple : pour donner des ordres de grandeurs correspondant à

2
un IGBT de très forte puissance, on peut relever les valeurs suivantes
VGS
dans la notice constructeur de l’IGBT FZ1200R33KF2 (Eupec), 3 300 V,
US 1 200 A :
VCC
CISS = 150 nF (VCE = 25 V, VGE = 0 V)
CRSS = 8 nF (VCE = 25 V, VGE = 0 V)

IG t QG = 22 µC (VGE = − 15 V à 15 V)

VCC QG En suivant la même démarche que précédemment, on trouve


RG cette fois que le circuit de commande doit fournir une énergie égale
à VCCQG, à chaque commutation, et donc délivrer une puissance
T t valant cette fois 2f VCCQG (la grille étant commandée entre ± 15 V,
V
– CC pour les composants à grille isolée de forte puissance) à savoir
RG 0,7 W à 1 kHz. Si la puissance délivrée par le générateur de com-
mande reste acceptable à cette fréquence, le circuit de commande
Figure 2 – Schéma de principe d’un circuit de commande unipolaire doit pouvoir malgré tout fournir des courants crêtes élevés pour
et formes d’ondes simplifiées assurer des commutations à faibles pertes (jusqu’à une dizaine
d’ampère pour ce composant particulier).
Ces applications numériques montrent la très faible consomma-
tion que nécessite la commande d’un MOSFET ou d’un IGBT, et la
18
valeur transitoire élevée que doit prendre le courant de grille
VGS (V) ID = 18 A VDS = 160 V
lorsqu’une commutation rapide est recherchée.
14 VDS = 100 V
VDS = 40 V Un découplage très efficace de la source d’énergie du circuit de
commande (condensateur CG de la figure 2), ainsi qu’un câblage
12
très soigné (faibles inductances) sont nécessaires pour délivrer de
tels courants impulsionnels.
10

6
2. Protection
contre les courts-circuits
4

2 Le court-circuit est un dysfonctionnement très contraignant pour


les composants à semi-conducteur de puissance (figure 4), car il
0 leur impose en supportant simultanément de fortes tensions et de
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 forts courants d’avoir une aire de sécurité suffisante et d’être capa-
QG (nC) ble de dissiper de façon transitoire des énergies très élevées. Dans
l’exemple suivant, les transistors T1 et T5 d’un onduleur triphasé sont
normalement passants, et un court-circuit apparaît au niveau de la
Figure 3 – Charge de grille pour la commutation (IRFP250N, charge. La tension d’alimentation se retrouve appliquée aux bornes
International Rectifier) (VCC = 12 V) des deux IGBT passants à travers la seule inductance de la maille de
commutation. Le courant va donc croître très rapidement, avec une
vitesse imposée par la tension UDC et l’inductance de la maille. Les
Ici, seule la phase de mise en conduction nécessite un apport transistors MOSFET et IGBT, contrairement aux thyristors, ont la
d’énergie du circuit de commande. Lors du blocage, l’énergie néces- possibilité de limiter le courant à une valeur imposée par la tension
saire à la décharge de la capacité d’entrée est entièrement dissipée de grille en fonctionnant en régime linéaire (désaturation) et,
par RG. Ainsi, la puissance PG que devra fournir le circuit de com- contrairement aux transistors bipolaires courants, grâce à une large
mande, à la fréquence de découpage f, vaut : aire de sécurité. La désaturation des transistors limitera la valeur du
courant de court-circuit, et laissera le temps nécessaire à la détec-
PG = fVCCQG tion du défaut et à la protection des composants.
La figure 3 indique, sous 160 V de tension d’alimentation, et pour Les deux types de composants (MOSFET et IGBT) sont générale-
un courant de 18 A, une charge de grille de 95 nC environ pour une ment spécifiés pour tenir les courants de court-circuit pendant un
tension VCC de 12 V, ce qui nécessitera un circuit de commande temps généralement spécifié de l’ordre de 10 µs. Dans les IGBT, le

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MOSFET ET IGBT : CIRCUITS DE COMMANDE ________________________________________________________________________________________________

Défaut de VCC
court-circuit

T1 T2 T3
D
+
UDC M Tinhibition

Vref
T4 T5 T6
&
Inhibition C
G
Entrée

2 IC
ICC
Régime de
court-circuit
VGE = 15 V
Commande
grille
E

Figure 5 – Détection d’un régime de court-circuit par mesure


de la désaturation
Point
oint de fonctionnement
avant court-circuit
I0
C
G
UDC VBR VCE
E

Figure 4 – Exemple d’un défaut de court-circuit Détection RSense


(protection)

courant de court-circuit peut varier entre environ 3 et 10 fois le cou-


rant nominal.
Figure 6 – Détection d’un régime de court-circuit dans un transistor
IGBT à miroir de courant

2.1 Détection par mesure


de la désaturation capteur intégré de courant peut être mise à profit pour la détection
d’un régime de court-circuit ou de surintensité. On peut noter que
certains transistors intègrent la résistance de sense avec également
Le régime de désaturation des transistors en régime de court-cir- l’électronique permettant la détection et la protection du transistor.
cuit est souvent mis à profit pour la détection des courants de court-
circuit en vue de leur protection (figure 5). En effet, lors de cette
phase de fonctionnement accidentel, on retrouve une tension éle-
vée aux bornes de l’IGBT alors que, compte tenu de la tension appli- 2.3 Mise en œuvre d’une protection
quée sur l’électrode de grille par le circuit de commande, en régime
sans défaut, il devrait être passant avec une très faible chute de ten-
sion à ses bornes. Après détection d’un courant de court-circuit, le transistor doit
Lorsque la tension VCE devient supérieure à Vref (par exemple en être bloqué pour éviter sa destruction. La valeur généralement très
cas de court-circuit), la diode de désaturation D se bloque, ce qui élevée du courant de court-circuit rend délicate sa phase de blocage,
inhibe au bout d’un temps Tinhib le circuit de commande et bloque le car si rien de particulier n’est fait, la rapide décroissance du courant
transistor. La tension Vref fixe le niveau de la tension VCE devant être peut entraîner le claquage en avalanche du transistor par la surten-
considéré comme excessif. La durée d’inhibition Tinhib du circuit de sion due à l’inductance de la maille de commutation. En effet, à
protection est nécessaire pour assurer correctement les phases de résistance de grille RG donnée, le dI/dt au blocage est plus élevé à
mises en conduction (où l’on a également simultanément une fort niveau de courant. Deux techniques sont utilisées pour réduire
entrée de commande à un niveau logique haut et une tension ce risque au blocage d’un courant de court-circuit. La première
V CE significative). consiste, lorsqu’un défaut de type court-circuit est détecté, à blo-
quer le transistor à travers une résistance de grille plus élevée (sous
un faible courant de grille) pour limiter le dI/dt au blocage (figure 7),
et la seconde à réduire préalablement la tension de commande de
2.2 Détection par mesure du courant grille avant l’ouverture, afin de réduire la valeur du courant coupé.
On rencontre également des circuits de commande agissant
directement sur la grille pour limiter la surtension et dissiper l’éner-
La mesure directe du courant à l’aide de capteurs spécifiques est gie d’avalanche dans le composant sans que la tension VCE n’excède
rarement utilisée pour la détection d’un régime de court-circuit, la tension de claquage (écrêteurs actifs) [3] [4] [5]. Le principe d’un
essentiellement à cause de leur prix et de leur encombrement. En tel schéma est indiqué sur la figure 8.
revanche, des transistors MOSFET et IGBT intégrant un miroir de
courant (une petite fraction des cellules isolées pour refléter l’allure Lorsque la tension VCG dépasse la tension VZ de claquage de DZ,
du courant principal) sont disponibles (figure 6). Il faut ensuite relier la petite partie du courant de charge dévié dans cette diode permet
la connexion « Sense » à une résistance pour avoir une image ten- de charger la capacité d’entrée du transistor TP pour le mettre en
sion du courant traversant le transistor. L’information issue de ce conduction. La tension VAG est maintenue égale à la tension VZ,

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D 3 233 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique

124
Référence Internet
D3234

MOSFET et IGBT : circuits


de commande, sécurisation
et protection du composant
à semi-conducteur
par Nicolas GINOT 2
Professeur des Universités
Laboratoire IETR (Institut d’Électronique et de Télécommunications de Rennes)
IUT de Nantes, Nantes, France
Christophe BATARD
Maitre de Conférences HDR (Habilité à Diriger des Recherches)
Laboratoire IETR (Institut d’Électronique et de Télécommunications de Rennes)
IUT de Nantes, Nantes, France
et Philippe LAHAYE
Ingénieur d’études
ECA GROUP, Nantes, France

1. Du driver élémentaire au driver évolué .................................................... D 3 234 - 2


1.1 La fonction driver élémentaire................................................................... — 2
1.2 Les fonctions d’un driver évolué ............................................................... — 3
1.3 Produits industriels ..................................................................................... — 6
2. Transmission des ordres de commande................................................... — 6
2.1 Génération et transmission des impulsions d’amorçage et de blocage... — 7
2.2 Étage de sortie des commandes rapprochées ......................................... — 10
3. Mise en œuvre des fonctions de surveillance .......................................... — 15
3.1 Choix des tensions de référence................................................................ — 15
3.2 Méthodes de surveillance de la tension aux bornes du composant
de puissance................................................................................................ — 17
4. Mécanismes de protection associés ......................................................... — 20
4.1 Gestion de l’erreur ...................................................................................... — 20
4.2 Mise en œuvre du Soft Shut Down (SSD) ................................................ — 22
4.3 Structure à Active Clamping ...................................................................... — 26
5. Conclusion ................................................................................................... — 29
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. D 3 234

et article s’intéresse aux circuits de commandes évoluées des composants


C de puissance de type MOSFET et IGBT sur silicium, communément
appelés « drivers » ou « gate drivers ». Après un bref rappel portant sur la
fonction élémentaire de commande rapprochée, l’article se focalise sur la
structure des drivers industriels en analysant en détail les fonctions évoluées
qu’ils renferment. L’approche proposée est très pragmatique et s’appuie sur de
multiples relevés expérimentaux permettant de comprendre en profondeur les
nombreux schémas électroniques des fonctions internes des drivers. Une
analyse structurelle permet d’en faire ressortir les principales fonctions, à
savoir la transmission des ordres de commande à travers une barrière d’isola-
tion galvanique et la protection des composants de puissance. Par la suite,
Parution : août 2017

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D 3 234 – 1

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D3234

MOSFET ET IGBT : CIRCUITS DE COMMANDE, SÉCURISATION ET PROTECTION DU COMPOSANT À SEMI-CONDUCTEUR _________________________________

seule la transmission des ordres de commande à base de transformateurs est


étudiée. Quatre schémas électroniques répondant à ces besoins sont analysés
en profondeur. Deux principaux étages de pilotage de la grille, fréquemment
mis en œuvre, sont étudiés. Le premier renferme deux MOSFET complémen-
taires et le second exploite un étage à transistors bipolaires de type push-pull.
Les avantages et inconvénients de ces deux structures sont discutés à travers
des mesures montrant en détail leurs mécanismes de fonctionnement. La deu-
xième partie de cet article concerne la mise en œuvre des fonctions de
surveillance et de protection des composants de puissance. Les auteurs
montrent clairement que l’isolation galvanique des ordres de commande ainsi
que la structure des étages de pilotage de la grille ont une incidence directe

2 sur la mise en œuvre des mécanismes de protection internes aux drivers. Deux
structures électroniques assurant la détection du court-circuit franc dans une
cellule de commutation sont présentées. Cette surveillance de la croissance
rapide et anormale du courant s’appuie sur la mesure de la tension aux bornes
du composant de puissance. La détection d’un état de conduction ou d’une
commutation anormale déclenche différents mécanismes de protection. La
fonction de blocage en douceur du composant de puissance, appelée soft shut
down, est analysée pour les deux structures d’étage de pilotage de la grille
évoquées précédemment. L’implémentation de la variation de la résistance de
grille ou le contrôle de la durée du plateau de Miller par courant constant est
étudié. Enfin, en dernière partie, la protection du composant de puissance par
sa remise en conduction est abordée. L’implémentation de cette fonction,
appelée active clamping, est discutée pour l’étage de pilotage de la grille à
transistors bipolaires seulement.

1. Du driver élémentaire
au driver évolué Collecteur (C)
Drain (D)

1.1 La fonction driver élémentaire


Grille (G) Grille (G)
Pour commuter, les composants à semi-conducteur de puis-
sance nécessitent un circuit de commande alimenté en énergie
par une alimentation. Ces éléments sont regroupés dans une Source (S)
structure couramment appelée « driver » ou « gate driver ». Dans Émetteur (E)
la suite de cet article, et pour faciliter la lecture de cet article, seul
le terme driver sera employé.
Dans cette première partie, nous nous intéresserons à la fonc- Figure 1 – Composants MOSFET et IGBT
tion driver élémentaire sans y associer les fonctions secondaires
assurant, par exemple, l’intégrité du composant à semi-conduc-
teur. Cette partie est donc proposée dans le but de poser le pro- liaison drain-source ou collecteur-émetteur représente le chemin
blème lié à la fonction driver dans le contexte de l’électronique de de circulation du courant commuté. La fonction driver élémentaire
puissance. nécessite donc uniquement un accès aux connexions grille-source
Les convertisseurs statiques sont constitués de composants à ou grille-émetteur. Par la suite, l’article se focalisera sur le compo-
semi-conducteurs dont l’état de conduction dépend soit du contexte sant de type MOSFET. Comme évoqué plus haut, les schémas
électrique dans lequel ils sont connectés (composants dits à com- électroniques étudiés et les analyses proposées peuvent être pro-
mutations spontanées), soit de la commande qui leur est appliquée longés aux IGBT.
(composants dits commandés). Dans cette dernière famille, on peut
Le driver est l’interface entre les signaux de commande à bas
recenser, de manière non exhaustive, les composants nommés
niveau, issus de l’électronique de supervision, et la partie « éner-
IGBT (Insulated Gate Bipolar Transistor) ou encore MOSFET (Metal
Oxyde Semiconductor Field Effect Transistor). Ces deux catégories gie » du convertisseur statique. Ainsi, il lui est parfois confié l’iso-
de composants se distinguent dans leurs applications mais très peu lation galvanique afin de séparer électriquement ces deux parties.
dans les méthodes de pilotage et de surveillance. Les symboles et Ce choix dépend de l’application, des normes imposées (telle que
notations utilisés sont présentés à la figure 1. la EN 50178) et est très lié aux niveaux de tension mis en jeux et
aux risques de contacts directs ou indirects avec les utilisateurs.
Le pilotage des composants MOSFET et IGBT s’effectue en
contrôlant respectivement la tension VGS et VGE. En première
approximation, mais suffisante pour l’étude de la fonction driver, 1.1.1 Les structures non isolées
l’impédance vue entre la grille et la source ou entre la grille et
l’émetteur s’apparente à une capacité dont la valeur dépend de la Les structures non isolées sont nombreuses et largement discu-
tension qui lui est appliquée. Cette non-linéarité est largement dis- tées dans [D3233]. Pour les applications à très basse tension, com-
cutée dans les documentations techniques des composants. La patibles avec les niveaux électriques des circuits logiques CMOS

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D3234

_________________________________ MOSFET ET IGBT : CIRCUITS DE COMMANDE, SÉCURISATION ET PROTECTION DU COMPOSANT À SEMI-CONDUCTEUR

ou TTL, et drainant des courants de l’ordre de quelques ampères,


un étage « buffer » est souvent suffisant. Cette structure impose
évidemment que le potentiel de la source du MOSFET soit fixe
(figure 2a).
Dans le cas des structures présentées à la figure 2a, il est néces-
saire que les sources des composants pilotés (ici des MOSFET)
soient connectées à un des deux potentiels de l’alimentation du
buffer. Dans le cas d’un MOSFET canal N le potentiel commun est
le potentiel bas de l’alimentation. Inversement, dans le cas d’un
MOSFET canal P, le potentiel commun correspond au potentiel
haut de l’alimentation.
Pour les applications nécessitant une cellule de commutation, le

2
Buffer
pilotage du composant dit « high side » est plus délicat. Des cir-
cuits intégrés dédiés assurent le décalage de niveau ainsi que l’ali-
mentation du secondaire du driver à l’aide d’une structure à
pompe de charge (figure 2b).

1.1.2 Nécessité d’une isolation galvanique


Au delà de quelques centaines de volts, une barrière d’isolation
galvanique entre le primaire et le secondaire du driver est très fré-
quente. Comme évoqué précédemment, les contraintes norma-
tives imposent un niveau d’isolement fonctionnel mais aussi
sécuritaire pour les utilisateurs. Cette barrière d’isolement
s’applique tant à l’alimentation du driver qu’à l’électronique per- Buffer
mettant le transfert des ordres de commande du primaire au
secondaire du driver. Pour ce dernier cas, l’isolation par opto- a commande de composants à semi-conducteur à l’aide
coupleur, fibre optique ou transformateur d’impulsions est cou- d’un « buffer »
ramment implantée. La figure 3a montre une commande
élémentaire isolée par transformateur.
L’isolation galvanique est nécessaire sur des structures en bras
de pont, par exemple onduleur monophasé ou triphasé, pont en
« H », structures multiniveaux….
La structure d’alimentation isolée galvaniquement présentée à Vcc Vb
la figure 3b est fréquemment utilisée. Bien que cette structure ne
semble, à priori, pas respecter les règles élémentaires d’inter- Vin HO
connexion des sources, il est possible de l’exploiter pour de très
IR2184

faibles puissances de l’ordre de quelques watts. Son principal SD Vs


atout, outre sa simplicité, est la faible dépendance de sa tension 0V LO
de sortie au courant débité. Nous n’exposerons pas plus en détail
le fonctionnement de cette structure.
Pompe de charge et
En plus de l’isolation galvanique, d’autres fonctions sont égale- level-shifter
ment implémentées dans les drivers dits évolués. Le paragraphe
suivant est consacré à la présentation détaillée de ces fonctions.
b commande d’une cellule de commutation avec une structure à
« level shifter » et pompe de charge
1.2 Les fonctions d’un driver évolué
Figure 2 – Différentes structures non isolées de commande de com-
1.2.1 Surveillances aux secondaires posants à semi-conducteur
et mécanismes de protection
Pour maintenir une sureté optimale de fonctionnement des
convertisseurs, il est indispensable de mettre en œuvre des fonc-
tions de surveillance et de protection rapides et efficaces des com- 1.2.2 Structure d’un driver évolué
posants de puissance. Les principales fonctions sont la protection
contre les courts-circuits, la protection contre les températures Le synoptique d’un driver évolué est illustré à la figure 4a. Ce
excessives et la surveillance des tensions d’alimentation internes driver permet la commande d’un seul MOSFET (ou IGBT) dans
au driver. Les fonctions de protection sont indépendantes de une cellule de commutation de type hacheur unidirectionnel en
l’unité centrale qui gère la commande de composants de puis- courant et en tension ou la commande de deux MOSFET (ou
sance en fonctionnement normal. Ces fonctions de protection sont IGBT) dans un bras d’onduleur.
donc localisées au plus près des commandes de grilles des com- Le driver est constitué de trois principaux blocs isolés galvani-
posants. De plus, lorsqu’un défaut sur un composant est constaté, quement :
une information appelée « erreur driver » doit être envoyée à – les deux premiers blocs, appelés « étage secondaire haut » et
l’unité centrale afin que celle-ci puisse prendre les mesures adé- « étage secondaire bas », constituent les commandes rapprochées
quates concernant la commande des autres composants. des MOSFET (ou IGBT) et sont à proximité des jonctions grille-
Ces différentes fonctions de surveillance et de protection seront source. Ils fournissent les signaux de commande des composants
détaillées aux paragraphes 3 et 4. de puissance et assurent leurs protections ;

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MOSFET ET IGBT : CIRCUITS DE COMMANDE, SÉCURISATION ET PROTECTION DU COMPOSANT À SEMI-CONDUCTEUR _________________________________

Isolation

2
galvanique

a commande élémentaire par transformateur

Primaire Secondaire VP

Q
Vcc

Osc. GND
COM
ref.
Q\

GND
VN
Isolation
galvanique

b structure d’alimentation très répandue pour les drivers

Figure 3 –  Exemples de structures isolées concernant la commande de composants de puissance et son alimentation en énergie

– le troisième bloc, appelé « étage primaire », effectue le lien des composants de puissance mais également l’énergie néces-
entre l’unité de gestion centrale et la commande rapprochée des saire à la commande des grilles.
composants de puissance.
L’isolation galvanique des signaux de commande peut être réa-
lisée par trois technologies distinctes : optocoupleur, transforma-
1.2.2.1 Isolation galvanique
teur d’impulsions ou fibre optique. Les principaux critères de
L’isolation galvanique entre les différents étages doit respecter choix sont la capacité de tenir la tension statique d’isolement, la
les normes relatives à l’application visée. On peut citer, par robustesse aux dv/dt et le coût. Dans la suite de cet article, seule
exemple, les normes EN 50178 et CEI 61800. Pour synthétiser, la solution à base de transformateur d’impulsions est développée.
l’isolation entre les étages primaires et les secondaires concerne Avec cette technologie, la transmission des ordres d’amorçage et
la sécurité des personnes et nécessite une protection dite double de blocage s’effectue classiquement par des impulsions positives
ou renforcée. Cela se traduit par une distance d’isolement solide ou négatives de quelques centaines de nanosecondes (100 à
minimale à respecter entre les étages primaire et secondaires. 500 ns) alors que la transmission d’une erreur driver est réalisée
L’isolation entre les deux étages secondaires est qualifiée d’isola- par une impulsion positive d’une durée plus longue (1 à 2 μs). Cet
tion fonctionnelle. Pour respecter le critère relatif aux lignes de aspect sera traité aux paragraphes 2.1 et 4.1.
fuite, un usinage entre les deux étages secondaires est générale-
ment réalisée dans le circuit imprimé. Cela se traduit par des L’alimentation en énergie permettant de commander le compo-
contraintes fortes de routage et de placement des composants sant de puissance est toujours réalisée à base de transformateurs.
constituant le driver. Côté primaire, un oscillateur fournit une tension alternative de
À titre d’exemple et pour un driver fonctionnant avec une cel- plusieurs centaines de kilohertz au transformateur. Côté secon-
lule de commutation alimentée en 1500V, la norme EN 50178 daire, on retrouve un pont redresseur suivi d’un étage de filtrage
impose : de la tension, avec parfois la mise en œuvre d’un régulateur. Cet
– un isolement solide double d’environ 250 μm de PCB en FR4 ; article ne s’intéresse pas à l’étude des structures d’alimentation.
– une distance d’isolement de 17 mm ;
– une ligne de fuite de 13 mm. 1.2.2.2 Étage primaire
L’isolation galvanique entre les étages primaire et secondaires Outre l’oscillateur intégré au(x) primaire(s) des transformateurs
concerne la transmission des signaux d’amorçage et de blocage permettant de transférer l’énergie nécessaire à l’électronique des

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Étage secondaire haut : commande rapprochée du transistor haut (QPh)


Grille
Amplificateur QPh
Génération de l’impulsion Mise en forme de l’impulsion
de puissance
de commande de Th (écrêtage et mémorisation) Étage
de
Blocage en
Génération logique
Douceur
Pulse Erreur
Détection (SSD)
Logique Détection
INh d’erreur
+ mémo VPh VDS_h

2
(Single/HB) Alimentation
Pulse COMh Alimentation
voie haute Mesures
Erreur VNh
INb Dead time T

Pulses RAZ
Mode courtes

VPb VDS_b
Gestion
Détection Alimentation Mesures
Erreur des erreurs COMb Alimentation
+ mémo voie basse
VNb T
… Pulse Détection
Erreur Grille
d’erreur
Génération Amplificateur QPb
Pulse Erreur de puissance
Étage
Génération de l’impulsion de
Blocage en
de commande de Tb Mise en forme de l’impulsion logique
Douceur
(écrêtage et mémorisation) (SSD)
Vcc
Isolation
Alim. Oscillateur Étage secondaire bas : commande rapprochée du transistor bas (QPb)
GND galvanique

Étage primaire
a synoptique d’un driver évolué

Étage secondaire haut

Drain QPh

INh

De et vers INb Grille QPh


l’unité Source QPh
centrale Mode

Erreur
Grille QPb
Source QPb

Drain QPb
Isolation
Étage primaire Étage secondaire bas
galvanique

b exemple de réalisation

Figure 4 – Synoptique et exemple de réalisation d’un driver évolué

commandes rapprochées, l’étage primaire est constitué de plu- – les temps morts. Pour éviter les courts-circuits dans une cellule
sieurs blocs. Le bloc logique gère plusieurs fonctionnalités : de commutation de type de bras d’onduleur, la commande à
– la sécurité de la logique de commande. L’unité de gestion cen- l’amorçage du composant de puissance est retardée d’une durée
trale fournit les signaux INh et INb correspondant aux ordres appelée « temps mort » par rapport à la commande au blocage de
d’amorçage et de blocage des transistors haut et bas. Dans la l’autre composant de puissance. Selon le type de composant à
configuration indésirable (mais non improbable) où INb = INh = 1, semi-conducteur et l’application visée, le temps mort peut varier
ces deux ordres simultanés d’amorçage sont alors transformés en de quelques centaines de nanosecondes à quelques micro-
deux ordres de blocage afin d’éviter le court-circuit de bras ; secondes. Lorsqu’un seul composant de puissance est commandé

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MOSFET ET IGBT : CIRCUITS DE COMMANDE, SÉCURISATION ET PROTECTION DU COMPOSANT À SEMI-CONDUCTEUR _________________________________

(exemple de la cellule de commutation type hacheur), cette fonc- puissance est appelé Soft Shut Down (SSD) et sera étudié au para-
tion est inhibée. À titre d’exemple, la note d’application d’Infineon graphe 4.2. Le bloc « Étage de logique » permet, en cas d’erreur,
(AN2007-04) donne l’équation : d’inhiber le signal de commande à l’amorçage du composant de
puissance et d’activer le SSD ;
(1) – la seconde action est l’envoi d’une information d’erreur au pri-
maire du driver. La gestion de ce signal d’erreur sera étudiée au
où Td_off_max est le maximal turn off delay time, Td_on_min est le paragraphe 4.1.
minimal turn off delay time, Tpdd_max est le maximal propagation
delay time of driver et Tpdd_min est le minimal propagation delay
time of driver ; 1.3 Produits industriels
– la suppression des impulsions courtes. Afin d’éviter l’interpré-
tation d’une impulsion parasite comme étant un ordre d’amorçage De nombreux produits industriels intègrent les fonctions évo-
ou de blocage ou pour empêcher de véhiculer des signaux de

2
luées présentées précédemment. Les tableaux 1, 2 et 3 indiquent
commande trop courts susceptibles de ne pas être interprétés par quelques marques répandues dans le domaine des drivers ainsi
l’électronique, un étage de conditionnement filtre les pulses indési- que leurs principales caractéristiques en termes de structure.
rables (cet étage est souvent nommé SPS pour Short Pulse Sup-
pression). Les différentes solutions technologiques de SPS ne
seront pas présentées dans cet article, cette fonction n’étant pas
toujours implémentée selon les fabricants et les modèles ;
– la gestion des impulsions d’erreur : si un problème est détecté
2. Transmission des ordres
par une des deux commandes rapprochées, une impulsion
d’erreur est envoyée d’un étage secondaire vers l’étage primaire.
de commande
Lorsqu’un message d’erreur a été identifié, le bloc « Logique »
envoie un ordre de blocage aux deux transistors haut et bas (mise Comme indiqué précédemment, seule l’isolation galvanique des
en sécurité de la cellule de commutation) ainsi qu’une information signaux de commande des composants à semi-conducteurs par
à l’unité centrale. Il est à noter qu’aucun driver massivement com- transformateurs sera considérée. Cela implique que les signaux
mercialisé ne permet d’indiquer le type d’erreur rencontré (sous- de commande sont à valeur moyenne nulle et que la forme
alimentation, court-circuit de bras…). Lorsque l’origine du pro-
blème a été traitée, un signal remise à zéro (RAZ) émis par le bloc
« Logique » désinhibe la mémorisation de l’erreur. Selon les dri-
vers utilisés la RAZ est soit effectuée par un signal extérieur, soit Tableau 1 – Types de composants pilotés
par un passage par zéro des pulses de commande pendant un et références de drivers
temps donné.
Comme indiqué précédemment, la transmission des ordres Types de composants
Marques Référence
d’amorçage et de blocage du primaire vers les secondaires pilotés
s’effectue à l’aide de pulses de quelques centaines de nanose-
condes. Cette fonction est assurée au primaire par le bloc intitulé SEMIKRON SKHI22 IGBT / MOSFET
« Génération de l’impulsion de commande ». La transmission des
ordres est abordée au paragraphe 2.1. INFINEON 2ED020I12 IGBT / MOSFET

1.2.2.3 Étage secondaire CREE PT62SCMD17 MOSFET SiC


On y trouve une alimentation fournissant l’énergie et les ten- POWER INT. 2SC0650P IGBT / MOSFET
sions de référence à toute l’électronique de commande, des blocs
servant à la transmission des ordres de commande ainsi que leur TEXAS ISO5810 IGBT / MOSFET
mise en œuvre et d’autres blocs constituant les fonctions de sur- INSTRUMENT
veillance et de protection rapide des composants de puissance.
En fonctionnement normal, le bloc « Étage de logique » est trans- AGILESWITCH EDEM3 MOSFET SiC
parent. Les impulsions de commande sont mises en forme et
mémorisées avant d’être amplifiées en puissance pour polariser cor-
rectement la jonction grille-source ou grille-émetteur du transistor.
Lorsqu’un problème est constaté sur un composant de puis- Tableau 2 – Types d’isolation électrique
sance, il faut réagir très rapidement (dans un temps inférieur à
10 μs pour les IGBT et MOSFET en technologie silicium) sans tou- Marques Référence Types d’isolation
tefois aggraver le problème détecté. Aussi, chaque commande
rapprochée dispose de systèmes permettant la mesure de diffé- SEMIKRON SKHI22 Transformateur
rents paramètres tels que la tension VDS à l’état passant, la valeur
des tensions d’alimentations, éventuellement la température du INFINEON 2ED020I12 Transformateur
dissipateur… Dès qu’une erreur est détectée, deux actions sont CoreLess
déclenchées en parallèle :
– la première action est un blocage immédiat du composant de CREE PT62SCMD17 Transformateur
puissance avec un mécanisme permettant le blocage en douceur
du composant. Par exemple, lorsqu’un court-circuit de bras POWER INT. 2SC0650P Transformateur
d’onduleur est constaté, il est impératif de bloquer rapidement, et
avec un di/dt maîtrisé, les composants de puissance du bras consi- TEXAS ISO5810 Capacitive
déré. En effet, à cause des différentes inductances parasites répar- INSTRUMENT
ties au sein de la cellule de commutation, le blocage du composant
de puissance, avec un fort di/dt entraîne une forte surtension AGILESWITCH EDEM3 Optocoupleur
((V = L dicc/dt) qui peut lui être préjudiciable. Le mécanisme qui et transformateur
permet de bloquer rapidement et en douceur le composant de

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