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JuriBistroMD eDOCTRINE

Date: 2017/11/14

Volume 425 - Développements récents en droit de la santé et sécurité au travail (2017)


Le droit de refus selon la législation fédérale et provinciale
*
Pierre Brabant
Informations bibliographiques

Table des matières


Le droit de refus selon la législation fédérale et provinciale
Brabant, Pierre
Introduction
1. La Loi sur la santé et la sécurité au travail (LSST)
1.1 Exigences substantives à l’exercie du droit de refus
1.1.1 Être un travailleur au sens de la LSST
1.1.2 Devoir exécuter un travail à la demande de l’employeur
1.1.3 Appréhender raisonnablement un danger résultant de l’exécution de ce travail, pour soi-
même ou pour autrui
1.1.3.1 Illustrations de crainte raisonnable de danger
1.1.3.1.1 Affaires carcérales
1.1.3.1.2 Autres affaires
1.1.3.2 Illustrations d’absence de motifs raisonnables
1.1.3.2.1 Le droit de refus comme levier de négociation
1.1.3.2.2 Crainte hypothétique de danger
1.1.3.2.3 Conditions médicales personnelles
1.1.4 Conditions ou circonstances anormales du travail à exécuter
1.1.5 Le refus ne doit pas mettre dans l’immédiat la sécurité d’autrui en péril
1.1.6 Le travailleur doit rapporter le plus tôt possible à l’employeur le droit de refus qu’il veut
exercer
1.2 Immunité des travailleurs exerçant un droit de refus
2. Le Code canadien du travail
2.1 Exigences substantives à l’exercice du droit de refus
2.1.1 Être un employé au sens du C.c.t.
2.1.2 Être au travail
2.1.3 Avoir des motifs raisonnables de croire en l’existence d’un danger pour sa santé et sa
sécurité au travail, pour soi-même ou pour autrui
2.1.4 Conditions ou circonstances normales du travail à exécuter
2.1.5 Le refus ne doit pas mettre directement la santé ou la sécurité d’une autre personne en
danger
2.1.6 Le travailleur doit rapporter le plus tôt possible à l’employeur le droit de refus qu’il veut
exercer
2.2 Immunité des travailleurs exerçant un droit de refus
Conclusion
Bibliographie

Le recours en responsabilité civile à la suite d’une lésion professionnelle


Laporte, André ; Lavallée, Christiane
Les décisions récentes en matière de partage des compétences dans le domaine de la santé et
de la sécurité du travail
Lajeunesse, Pierre-Michel
Le débat loyal : chimères, utopie ou idéal atteignable ? Une vue de l’intérieur
Arsenault, Jean-Pierre
Les infractions à la Loi sur la santé et la sécurité du travail : bien plus que des amendes !
Thibaudeau, Éric

[Page 5]

INTRODUCTION

Le droit de refus au travail est une exception légale et d’ordre public au devoir d’un travailleur d’obéir
aux ordres de son employeur dans l’exécution de son travail. Les articles 30 de la Loi sur la santé et la
sécurité au travail (LSST) et 147 du Code canadien du travail (C.c.t.) prévoient en effet qu’un employeur ne
peut exercer de mesures de représailles contre un travailleur qui exerce un droit de refus selon la
procédure prévue dans la loi. Par ailleurs, les dispositions portant sur le droit de refus sont libellées
selon « un vocabulaire général – motif raisonnable pour l’exercice d’un refus, danger justifiant un refus,
conditions normales d’exécution du travail, cas particuliers, droit utilisé de façon abusive, etc. – que
1
seule la pratique du droit de refus à travers le temps peut arriver à définir avec un peu de précision » .
D’ailleurs, dans les années suivant l’adoption de la LSST, de nombreux auteurs ont étudié l’évolution du
cadre normatif de ce droit à l’égard du vocabulaire utilisé dans la procédure applicable afin, bien sûr, de
pouvoir distinguer les comportements susceptibles d’être visés par une mesure disciplinaire de ceux
2
qui ne le sont pas . Alors que ces recherches ont donné lieu à plusieurs articles dans les années 1980, il
semble y avoir eu peu d’écrits à partir de l’année 1990.

Avec l’avènement du nouveau Tribunal administratif du travail (T.A.T.) et les amendements apportés
à la Partie II du Code canadien du travail (C.c.t.) en 2013, nous croyons qu’une analyse

[Page 6]

jurisprudentielle des décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles (1998 à 2015) et des tribunaux fédéraux compétents en matière de
droit de refus s’impose. Notre recherche a pour objectif d’examiner si le droit de refus prévu à la LSST et au C.c.t. a évolué au cours des dernières
années. Dans un premier temps, nous allons présenter les décisions qui ont élucidé les zones d’incertitude générées par le vocabulaire utilisé aux
articles 12 et suivants de la LSST et à l’article 128 du C.c.t. que l’on pourrait nommer les « conditions substantives d’exercice du droit de refus ».
Dans un deuxième temps, nous allons présenter les protections légales des travailleurs qui décident d’exercer un droit de refus. Sauf exception, ces
décisions ne doivent pas être érigées comme un principe juridique universel, puisqu’en matière de droit de refus, chaque cas en est un d’espèce, comme en
matière disciplinaire. Elles permettent néanmoins de comprendre l’attitude des tribunaux lorsqu’ils doivent trancher une question de droit en cette matière.

1. LA LOI SUR LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ AU TRAVAIL (LSST)

Les dispositions relatives à l’exercice du droit visé dans l’article 12 se retrouvent aux articles 12 à 26
de la LSST. Pour que l’exercice de ce droit soit reconnu, le travailleur doit se trouver dans une situation
qui corresponde aux conditions substantives d’existence de ce droit. Selon la jurisprudence, l’article 12
protège le refus des travailleurs qui appréhendent raisonnablement un danger ou qui sont en présence
3
d’un danger réel et avéré .

1.1 Exigences substantives à l’exercie du droit de refus


4
Selon l’affaire Trudel et FTQ , les exigences substantives à l’exercice du droit de refus sont les
suivantes :

[...]

1. Être un travailleur au sens de la loi (art. 12);

[Page 7]

2. Devoir exécuter un travail à la demande de l’employeur (art. 12);


3. Appréhender un danger résultant, pour soi-même ou pour autrui, de l’exécution de ce
travail (art. 12);

4. Fonder cette appréhension sur des motifs raisonnables (art. 12);

5. Que les conditions ou les circonstances du travail à exécuter menant à l’exercice du


droit de refus soient anormales (art. 13);

6. Que le refus d’exécuter le travail demandé ne mette pas dans l’immédiat, la sécurité
d’autrui en péril (art. 13);

7. Rapporter le plus tôt possible à un représentant de l’employeur le droit de refus que


l’on veut ainsi exercer (art. 15).

Ces exigences sont inhérentes à la légalité du droit de refus, « sans quoi, il paraîtra farfelu,
5
insoutenable, ou fruit d’un caprice, d’un moyen de pression ou même d’une fantaisie » . L’application de
ces exigences apparemment simples dépend beaucoup des faits soumis au tribunal. Nous allons donc
les présenter une à la fois au regard de la jurisprudence pertinente. À des fins purement pratiques, nous
avons regroupé les exigences 3 et 4 susmentionnées en une seule.

1.1.1 Être un travailleur au sens de la LSST


Selon l’article 1 de la Loi un « travailleur » est défini comme étant :

Une personne qui exécute, en vertu d’un contrat de travail ou d’un contrat d’apprentissage,
même sans rémunération, un travail pour un employeur, y compris un étudiant dans les
cas déterminés par règlement, à l’exception :

1° d’une personne qui est employée à titre de gérant, surintendant, contremaître ou


représentant de l’employeur dans ses relations avec les travailleurs;

[Page 8]

2° d’un administrateur ou dirigeant d’une personne morale, sauf si une personne agit à
ce titre à l’égard de son employeur après avoir été désignée par les travailleurs ou une
6
association accréditée.

(Nos soulignements)
7
Quoique cette définition ait fait l’objet d’une abondante jurisprudence , rares ont été les décisions qui
ont interprété cette définition en relation avec les dispositions sur le droit de refus. Lorsqu’il en fut le
cas, la CLP a retenu de cette définition qu’un « travailleur », selon l’article 1 de la Loi, est d’abord une
personne et, qu’en ce sens, le droit de refus est un droit individuel. Il ne peut donc être fait au nom d’un
8
autre travailleur par une collectivité de travailleurs ou par une organisation syndicale . Par ailleurs, un
syndicat peut, dans certaines circonstances, contester la décision d’un inspecteur de la CSST portant
9
sur le droit de refus d’un travailleur lorsque cette décision lui a été défavorable . Au surplus, l’article 27
de la LSST permet à plusieurs travailleurs de refuser d’exécuter un travail en raison d’un même
10
danger .

À la lecture de la définition du terme « travailleur », il appert que seules les personnes exécutant « un
travail », « pour un employeur », « en vertu d’un contrat de travail », s’inscrivent dans les conditions
donnant droit au droit de refus. En conséquence, les travailleurs autonomes ne sont pas des
« travailleurs » au sens de la

[Page 9]
11
Loi, puisqu’ils sont assujettis aux règles du contrat d’entreprise ou de service .

Le paragraphe 2° de la définition de « travailleur » exclut les personnes qui agissent « à titre de


gérant, surintendant, contremaître ou représentant de l’employeur dans ses relations avec les
travailleurs. » Cette exclusion s’apprécie au cas par cas, selon les tâches exercées par la personne
ainsi que les responsabilités qui lui sont attribuées. Ainsi, une personne agissant à titre de « gérant »
peut, selon les circonstances, être un « travailleur » ou un « représentant de l’employeur dans ses
12
relations avec les travailleurs. » À titre d’exemple, dans l’affaire Forget Chagnon et Marché Bel-Air , la CLP
a jugé qu’une personne exerçant les fonctions de responsable d’une boulangerie répondait à la
définition de « travailleur ». En l’espèce, une liste des propriétaires, directeurs et gérants de l’employeur
excluait la travailleuse. Au surplus, la convention collective liant les parties ne reconnaissait pas la
13
travailleuse comme cadre de l’entreprise .

1.1.2 Devoir exécuter un travail à la demande de l’employeur


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Selon l’affaire Denis et Hydro-Québec , un travailleur doit, préalablement à l’exercice d’un droit de
refus, avoir reçu un ordre d’un représentant de l’employeur. En l’espèce, le travailleur avait avisé son
supérieur immédiat qu’il refusait de procéder à l’inspection intérieure d’une bâche spirale qu’il
considérait dangereuse et dépourvue de méthodes sécuritaires de sauvetage. Or, selon les
témoignages du plaignant et de son collègue, l’employeur n’avait pas encore décidé qui de ces deux
travailleurs devait descendre à l’intérieur de la bâche spirale et procéder à son inspection. Le
commissaire Langlois

[Page 10]

15
a expliqué que dans ces circonstances, le travailleur ne pouvait refuser un travail qu’il n’aurait peut-être pas été appelé à faire . Il a ajouté au paragraphe
66 de sa décision que « le législateur n’a voulu donner au droit de refus décrit à l’article 12 de la loi une utilisation selon un travail hypothétique ». Il a admis
par ailleurs que dans des situations d’exception « il serait possible à un travailleur d’exercer un droit de refus avant que les travaux ne soient
16
commencés » .

Nous sommes d’avis que les énoncés dans l’affaire Denis doivent être considérés avec prudence.
Selon nous, nombreuses sont les situations où un travailleur peut exercer un droit de refus dans le
cadre d’un ordre anticipé. Il serait même rationnellement difficile de suggérer à ces travailleurs
d’attendre que leur supérieur immédiat leur ordonne d’effectuer le travail avant d’exercer leur droit de
refus. Tel en est le cas par exemple d’un travailleur routier (camionneur, livreur, chauffeur de taxi) ou de
tout autre travailleur du transport pris avec un ennui mécanique de son véhicule. Il en est de même pour
les travailleurs qui se déplacent d’un domicile à un autre et qui y appréhendent un danger dans une
résidence en s’y introduisant pour effectuer leur travail. Nous croyons donc qu’il est préférable
d’analyser ce critère au cas par cas.

1.1.3 Appréhender raisonnablement un danger résultant de l’exécution de ce travail, pour soi-


même ou pour autrui
La CLP a rendu plusieurs décisions sur l’interprétation du mot « danger », ce dernier se trouvant aux
articles traitant du droit de refus (art. 12), d’inspection (art. 19) et du droit au retrait préventif du
travailleur exposé à un contaminant (art. 32) ou de la travailleuse enceinte (art. 40). En matière de droit
de refus, la CLP s’est souvent inspirée de la jurisprudence sur le droit au retrait préventif de la
17
travailleuse enceinte pour interpréter ce mot . Bien qu’il pourrait être souhaitable qu’un mot utilisé dans
18
une loi ait partout le même sens , « il ne faut pas oublier que le contexte factuel n’est

[Page 11]

19
pas le même, et qu’il faut tenir compte des circonstances propres à chaque affaire pour apprécier l’existence ou non d’un « danger » » . Le terme
« danger » mentionné à l’article 12 doit donc être modulé à l’ensemble du texte de l’article et des objectifs de la LSST. Selon la CLP, le législateur a
20 21
distingué l’élément objectif et l’élément subjectif du danger . Dans l’affaire SCFP (local 1983) et STCUM , la CLP a mentionné que :

L’élément objectif est l’existence d’un danger compte tenu des conditions d’exécution
d’un travail au moment de l’exercice du droit de refus, danger que constate l’inspecteur
en vertu de l’article 19 de la LSST. L’élément subjectif est constitué des motifs
raisonnables que le travailleur a de croire que l’exécution de son travail l’expose à un
danger selon les dispositions de l’article 12 de la LSST.

Ainsi, un travailleur peut avoir des motifs raisonnables de croire à la présence d’un danger et décider
de cesser son travail, ce qui n’empêchera pas l’inspecteur de décider de l’absence objective de danger,
22
obligeant le travailleur à retourner au travail à compter de ce moment .
23
La commissaire Marie Langlois dans l’affaire Casino du Lac Leamy et Villeneuve explique bien le sens
et la portée de la notion de « crainte raisonnable de danger » prévue à l’article 12. Se référant aux
motifs de la commissaire Mathieu de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles
24 25
(CALP) , qui s’était référée à une décision du juge Marc Brière du Tribunal du travail sur le sujet, elle
mentionne que :

[...] l’exercice d’un droit de refus n’exige pas la preuve d’un danger réel, objectif ou
imminent, mais plutôt la crainte

[Page 12]

raisonnable d’un danger de la part du travailleur concerné5 qui doit être « sinon établie
de manière formelle, du moins s’inférer du contexte général du cas ».

[65] Il faut que ce refus soit motivé par une croyance, une appréhension ou des
craintes raisonnables d’un danger pour le travailleur concerné ou pour une autre
personne. Ainsi, une preuve prépondérante, dont le fardeau appartient au travailleur,
doit établir qu’au moment où le travailleur refuse d’exécuter un travail, d’une part, il a
cette croyance, appréhension ou crainte et, d’autre part, la croyance, appréhension ou
crainte est raisonnable, selon les circonstances propres de l’affaire.

[66] Ajoutons que le caractère raisonnable de la croyance du travailleur s’analyse


comparativement à celle que pourrait avoir une personne normale dans les mêmes
circonstances. D’ailleurs, la commissaire Mathieu écrit : « une croyance purement
subjective du travailleur ne saurait suffire; il faut que les circonstances démontrent
qu’une personne normale dans sa situation pourrait logiquement se former la même
conviction ».

[67] La commissaire souligne également que « l’employeur n’a pas à s’interroger sur
les motifs raisonnables ni non plus à questionner le travailleur sur ceux-ci; c’est au
travailleur lui-même de juger de la situation et de se poser la question : a-t-il des motifs
raisonnables de cesser de travailler devant telle situation de travail précise ? »

[68] Il en ressort que l’exercice du droit de refus n’exige pas la preuve d’un danger réel
objectivé. Cependant, la simple déclaration d’exercice du droit de refus de la part d’un
travailleur ne constitue pas, en soi, la preuve de l’exercice réel du droit. Il faut donc
regarder toutes les circonstances du cas et s’assurer qu’il ne s’agit pas de l’exercice
dénaturé du droit prévu par la LSST.

____________________
5 Bernard CLICHE, Serge LAFONTAINE et Richard MAILHOT, Traité de droit de la santé et de la sécurité au travail : le régime
juridique de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, Montréal, Éditions Yvon Blais, 1993, 563
p.; Hydro-Québec c. Valiquette (18 février 1985), 200-28-000077-849, D.T.E. 85T-232 (T.T.); Fauteux c. International Granit Inc. (11
décembre 1982), SST 81-10-M-005, D.T.E. 83T32 (C.T.); David c. Métro-Richelieu (4 octobre 1983), 500-28-000087-833, D.T.E. 83T-899
(T.T.);

[Page 13]

Dion c. Québec-Téléphone (6 novembre 1985), SST-00-062-01, D.T.E. 86T-20 (C.T.); Rose et Minéraux Maranda inc. (5 octobre
1989), 10353-60-8812, D.T.E. 89T-1106 (C.A.L.P.); Villeneuve c. Gouvernement du Québec (21 novembre 1985), SST00-010-01 et SST-
002-02-85, D.T.E. 86T-34 (C.T.); Entreprises J.R. Girard inc. c. Masson (15 février 1984), 500-28-000620-821, D.T.E. 84T-323 (T.T.); (10
avril 1984), Montréal 500-05-002950-846 (C.S.), en appel à la Cour d’appel de Montréal sous le numéro 500-09-000593-848, aucun jugement n’a
été rendu à ce jour; Beaudoin et Thiro ltée, [1991] C.A.L.P. 1280.

Par ailleurs, « pour qu’une appréhension de danger soit qualifiée de raisonnable, il faut qu’une
personne normale placée dans la même situation y voit la probabilité de l’existence d’une menace (le
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danger) et non seulement la possibilité d’une menace (le risque) » . Le droit de refus peut être d’ordre
préventif puisqu’il permet au travailleur d’exercer ce droit avant qu’un danger réel, objectif ou imminent
27
se matérialise ou soit sur le point de se matérialiser . Le test de la personne raisonnable doit donc être
modulé au contexte global du moment où le travailleur a exercé ce droit pour apprécier la réalité du
28 29
danger et la probabilité qu’il se matérialise , chaque cas en étant un d’espèce .

La crainte de danger peut être d’ordre psychique, telle que la crainte de subir du harcèlement
30
psychologique par son supérieur

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31
puisque cela ne relève pas des relations de travail du travailleur, mais de ses conditions de travail proprement dites . La crainte du travailleur pour sa
32
santé psychique ne doit pas nécessairement se concrétiser par des manifestations physiques telles que la perte de cheveux, de l’eczéma, etc. .

1.1.3.1 Illustrations de crainte raisonnable de danger


1.1.3.1.1 Affaires carcérales
Un nombre important de décisions illustrant une crainte raisonnable de danger portent sur le milieu
carcéral. En cette matière, les craintes émanent de règles de base en matière de santé et sécurité au
travail pour les agents des services correctionnels (ASC). Ces principes de base sont le surnombre, le
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support (back up) et la possibilité de communiquer en cas de problème .

En ce qui a trait au principe du surnombre, la CLP a, dans l’affaire Sirois et Établissement de détention de
34
Rimouskijugé que deux ASC avaient raisonnablement craint un danger lorsque leur employeur leur a
demandé d’accompagner deux détenus pour leur

[Page 15]

comparution au palais de justice. Craignant le comportement d’un des détenus, une des ASC avait demandé l’ajout d’une troisième personne, ce que
l’employeur lui avait refusé. Au surplus, le système de communication externe mis en place en cas d’urgence s’avérait déficient. Le tribunal a conclu que le
principe du surnombre n’est jamais respecté lorsqu’il n’y a qu’un seul agent par personne incarcérée qui les accompagne lors de leur comparution au palais
de justice, ce qui aurait été le cas en l’espèce. Au moins une personne supplémentaire est nécessaire pour accompagner un détenu et, lorsque plus d’une
personne incarcérée doit comparaître au palais de justice, au moins trois personnes. Puisqu’il y avait un manquement flagrant au principe de surnombre, la
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crainte de danger des ASC était justifiée .

En matière de support et de possibilité de communiquer en cas de problème, la CLP a, dans


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l’affaire Grall et Québec (Ministère de la Sécurité publique) , avalisé le refus de deux ASC qui devaient se
rendre à l’hôpital en ambulance pour accompagner un détenu souffrant de problèmes respiratoires.
Leur refus était motivé par le fait qu’on ne pouvait leur garantir un moyen de communication permanent
37
parce qu’il est interdit d’utiliser des radios émetteurs ou des téléphones cellulaires dans les hôpitaux .
38
Dans l’affaire Proulx et Établissement de détention de Sherbrooke la CLP a estimé que le fait pour une ASC
d’accompagner seule un détenu à l’hôpital dans une voiture banalisée justifiait une crainte raisonnable
de danger. En plus de ne pas être en surnombre avec le détenu, l’ASC ne disposait que d’un téléphone
cellulaire. Puisque aucun dispositif main libre n’était installé dans le véhicule qu’elle conduisait, il ne lui
aurait pas été possible de communiquer rapidement avec un autre ASC pour demander du support en
cas d’urgence.

Dans les cas d’accompagnement de prévenus au palais de justice, la CLP a considéré qu’il était
raisonnable pour un ASC de craindre un danger lorsque cet établissement n’était pas suffisamment
39
muni de caméras de surveillance . Il en est de même pour les ASC dans un quartier cellulaire, et ce,
malgré un ratio de deux ASC

[Page 16]

40
pour un prévenu . Puisqu’il leur était impossible de communiquer avec l’extérieur pour demander du support lorsqu’un prévenu agresse un ASC, son
collègue ne pouvait quitter les lieux pour demander de l’aide et laisser l’autre seul avec le prévenu qui l’agressait. À défaut de disposer d’un moyen de
communication efficace avec l’extérieur ou en l’absence d’un troisième ASC, ces derniers étaient justifiés de craindre raisonnablement un danger pour leur
santé et leur sécurité au travail.

Dans les établissements de détention, la dangerosité des détenus a parfois été banalisée, au point
de manquer au principe du surnombre. Dans l’affaire SAPSCQ et Québec (Ministère de la Sécurité publique)
41
(Détention) , deux ASC avaient exercé leur droit de refus parce que le pavillon où ils étaient affectés
contenait 65 détenus alors que sa capacité d’accueil était de 56 détenus. L’augmentation du nombre de
détenus faisait suite à la fermeture d’un pavillon et du transfert des détenus dans le pavillon en cause.
Selon les critères de classement de l’établissement, les détenus transférés étaient des cas « légers ».
Par ailleurs, la preuve démontrait que certains détenus avaient été mal classés par manque de place
dans le pavillon approprié. En considération de cette preuve, le commissaire Jean-François Clément a
conclu que les travailleurs avaient raisonnablement craint un danger pour leur santé et leur sécurité au
42
travail. Il a motivé sa décision en ces mots :

[Page 17]

[152] Il est bien important de toujours avoir à l’esprit que le milieu de travail en question
n’est pas un restaurant, un musée ou une garderie mais bien un centre de détention où
séjournent des personnes ayant commis des infractions d’ordre pénal ou criminel.

[153] Il faut également toujours se rappeler que l’établissement où évoluent les


travailleurs avait été conçu au départ pour accueillir une centaine de détenus alors que
le jour de l’exercice du droit de refus, près de 200 détenus étaient présents au Centre
de détention.

[154] Ces faits en soi ne constituent pas la justification du droit de refus exercé par les
travailleurs puisque ces conditions de travail sont insidieusement devenues plus ou
moins normales avec le temps.

[155] Il faut toujours cependant les garder à l’esprit pour apprécier le contexte général
dans lequel s’est opéré le droit de refus des travailleurs sans compter qu’il ne faut pas
banaliser le contexte de travail en milieu carcéral, ce dernier demeurant ultimement un
lieu où l’on emprisonne des criminels afin de protéger la société. La mission de
réhabilitation des centres de détention ne saurait occulter cette réalité.

[157] Par exemple, on constate que le 11 avril 2005 un vrai poignard a été retrouvé à
l’établissement de l’employeur par un agent des services correctionnels. On voit des
exemples de livraison de drogue à des détenus, des moments de tension importants,
des cas d’altercations verbales, des agressions physiques d’autres détenus, de la
violence verbale envers des agents, des bagarres entre prisonniers, des fouilles de
cellules où l’on trouve de la drogue, des menaces aux agents, des interventions
physiques auprès des détenus, des alarmes d’incendie avec ou sans incendie, la
possession d’objets interdits tels un pic artisanal ou un couteau, etc.

[158] Dans le présent dossier, le tribunal croit que le 9 novembre 2005 vers 8 h 50, les
deux travailleurs avaient des motifs raisonnables de croire que le mauvais classement
d’une partie significative des détenus qui se trouvaient dans les pavillons 6 et 7 avait
pour effet de les surexposer par rapport à ce qu’ils sont en droit de s’attendre
normalement si les règles de classement sont respectées.

[Page 18]

Mais, bien qu’en l’espèce la CLP ait avalisé l’exercice du droit de refus des ASC, il importe de
garder à l’esprit qu’elle résulte d’une analyse factuelle. Si la décision du commissaire Clément peut
s’avérer utile pour comprendre l’application de l’article 12 en milieu carcéral, la solution qui y est
préconisée ne peut être automatiquement importée dans un autre litige puisque les faits sont différents
43 44
d’une cause à une autre . Dans l’affaire Lavigne et Détention Montréal par exemple, des ASC avaient
refusé d’effectuer une fouille partielle d’un sous-secteur à la suite d’une altercation entre deux détenus,
impliquant le trafic illicite de drogues et d’alcool, survenu la veille. Au surplus, des enquêteurs avaient
trouvé des pics artisanaux cachés dans des lumières. Les ASC estimaient qu’elles étaient en nombre
insuffisant pour effectuer cette fouille et suggéraient de faire une fouille complète de tout l’étage. La
CLP a conclu que les travailleuses n’avaient pas de motif raisonnable de craindre que l’exécution de
leur travail les exposait à un danger puisqu’en raison de leur expérience, de la classification des
détenus de la sous-section et des mesures prises par l’employeur, il était peu probable que le danger
allégué par les travailleuses se matérialise. Selon la CLP, « Une personne raisonnable, bien informée
des conditions prévalant dans ce milieu de travail, ne pourrait croire que l’exécution de ce travail
l’expose à un danger au simple motif qu’une autre altercation a eu lieu et que de nouvelles cachettes
45
sont découvertes » .

La jurisprudence démontre que le principe du surnombre est appliqué plus sévèrement lorsque le
travailleur en cause n’a pas la formation ou l’expérience pratique pour intervenir auprès d’un détenu.
46
Dans l’affaire Institut Philippe-Pinel de Montréal et Fiola , un infirmier dans un établissement psychiatrique
de détention a refusé de travailler avec deux éducateurs comme troisième intervenant, notamment
parce qu’il croyait que le nombre d’intervenants était insuffisant pour agir de façon sécuritaire et parce
qu’il n’avait pas d’expérience pratique pour intervenir physiquement. Le tribunal a conclu que
l’employeur avait demandé au travailleur d’agir en tant qu’éducateur et non en tant qu’infirmier. Il n’avait
ni les connaissances, ni les habiletés pour faire des interventions physiques, de sorte qu’il avait des
motifs raisonnables de craindre un danger en

[Page 19]

47
tant que troisième intervenant. Dans l’affaire Léonard et Ministère de la sécurité publique et SAPSCQ , un cuisinier dans un centre de
détention a exercé un droit de refus, notamment parce qu’il craignait d’être agressé physiquement par un des détenus qui travaillait dans la cuisine. La
preuve démontrait que le cuisinier travaillait tous les jours seul avec au moins deux détenus. Se référant à l’affaire Proulx et Établissement de
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détention de Sherbrooke, précitée , la CLP a conclu que la règle du surnombre s’applique autant pour les ASC que pour un cuisinier. Le cuisinier
pouvait raisonnablement craindre une agression physique, peu importe le classement du détenu, d’autant plus qu’il porte en tout temps un couteau inséré
dans un fourreau.

1.1.3.1.2 Autres affaires


Dans les milieux autres que carcéraux, la détermination des craintes raisonnables de danger est très
factuelle, de sorte qu’il est difficile d’en dégager une quelconque tendance jurisprudentielle. À
49
commencer par l’affaire Service de prévention des incendies et Prézeau , la CLP a été appelée à trancher sur
le refus d’un pompier membre d’une équipe d’hommes-araignées d’effectuer une manœuvre
d’entraînement simulant le sauvetage d’une personne en détresse sur le Mont Royal. Le travailleur se
sentait en danger parce qu’il ne disposait d’aucun équipement de communication adéquat pour
communiquer de façon constante avec ses coéquipiers. La CLP a jugé qu’en l’espèce, la crainte du
travailleur était raisonnable.
50
Ensuite, dans l’affaire Centre Sheraton et Beauregard , un sauveteur d’une piscine intérieure a refusé
d’effectuer d’autres tâches que celle de surveiller la piscine en raison de la très grande chaleur, qu’il
était le seul sauveteur, de l’important achalandage et qu’il ne lui était pas possible de prendre de
période de repos ni de repas. Selon l’évaluation de l’indice de chaleur admissible faite par le tribunal, la
contrainte thermique était au-delà des valeurs maximales admissibles selon l’annexe V du Règlement sur
51
la santé et la sécurité du travail . Considérantle contexte global de la situation, le tribunal a jugé que le
travailleur était justifié d’avoir exercé un droit de refus.

[Page 20]

52
Similairement, dans l’affaire Experts Verts inc. et Fleurant , la CLP a conclu que la présence d’une forte chaleur et de puissantes odeurs dans les
bureaux de l’employeur, lui causant ainsi des malaises justifiait une crainte raisonnable de danger. Enfin, dans l’affaire Bédard et Brossard (Ville
53
de) , des policiers ont décidé d’exercer leur droit de refus à la suite de la perte de l’arme de service de trois policiers pendant qu’ils poursuivaient un
voleur. Selon le rapport d’un inspecteur de la CSST, l’étui utilisé par les policiers pour retenir l’arme était inadéquat. Compte tenu de ces trois incidents, le
54
tribunal a conclu que le droit de refus exercé par les policiers était fondé sur une crainte raisonnable de danger .

1.1.3.2 Illustrations d’absence de motifs raisonnables


55
La CLP a rendu plusieurs décisions illustrant l’absence d’appréhension raisonnable de danger. Aux
56
fins de notre texte, nous n’avons retenu que les affaires Lafontaine et Waterville TG inc. et

[Page 21]

57
Trudel et FTQ . Bien que ces dernières énoncent des principes importants en matière de droit de refus, nous croyons qu’elles doivent être utilisées
avec prudence, comme nous l’expliquerons ultérieurement.

1.1.3.2.1 Le droit de refus comme levier de négociation


Le droit de refus ne peut être utilisé comme levier pour améliorer les conditions d’un travailleur ou
d’un groupe de travailleurs. L’affaire Trudel en est le meilleur exemple. Dans cette affaire, un conseiller
spécial du président de la FTQ a allégué une crainte de danger pour sa santé mentale en raison de
plusieurs problèmes d’organisation et de relations de travail. Le tribunal a conclu que l’événement
allégué par le travailleur ne pouvait justifier une crainte raisonnable pour sa santé mentale et qu’il
s’agissait davantage d’un moyen de pression et d’intimidation pour améliorer ses conditions de travail.
58
Selon la CLP « ce droit n’a pas et ne peut avoir la finalité que recherchait le travailleur » . Le cas
échéant, le motif à l’appui du droit de refus sera considéré comme un prétexte plutôt qu’une crainte
raisonnable d’un danger.

Nous comprenons la position du tribunal de vouloir distinguer l’exercice du droit de refus des
manœuvres syndicales propres aux relations de travail. Or, l’exercice du droit de refus par un travailleur
constitue en soi un levier pour forcer l’employeur à bonifier les conditions de travail ou du moins
changer l’organisation du travail en matière de santé et sécurité au travail. Comme l’avaient exprimé les
auteurs Renaud et St-Jacques, « le droit de refus, c’est un peu comme un droit de grève : c’est un
59
moyen de rendre public les différends » . Dans ce même ordre d’idées, dans l’affaire SAPSCQ et
Québec (Ministère de la Sécurité publique) (Détention) précitée, le commissaire Clément a déclaré à la fin de
60
sa décision que :

[...] le genre de problèmes dont il a été saisi dans ce dossier est de nature à se régler
autour d’une table de négociation. Force est de constater que cela n’a pas été possible d’où le recours
au

[Page 22]

qui, devant la preuve que les conditions d’ouverture au droit de refus


présent tribunal
étaient présentes le 9 novembre 2005, n’a d’autre choix que d’intervenir.

(Nos soulignements)

Rappelons-nous que le droit de refus constitue une exception à l’obligation du travailleur d’obéir aux
ordres de son employeur, afin de s’assurer de « l’élimination à la source même des dangers pour la
santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs ». Définitivement, dans l’affaire Trudel le
travailleur avait allégué une crainte raisonnable de danger pour justifier un acte d’insubordination. Mais
cela ne pourrait pas toujours en être le cas, dans une autre affaire, les faits étant générateurs de droit.

1.1.3.2.2 Crainte hypothétique de danger


Dans l’affaire Waterville, la CLP s’est penchée sur le refus d’une travailleuse occupant un emploi de
mouleur aux presses, d’insérer des pièces fraîches dans une presse. Ces pièces étaient pour la
travailleuse plus difficile à insérer que les vieilles pièces, ce qui lui causait des douleurs au cou et à
l’épaule droite. Elle craignait qu’à terme l’insertion de ces pièces lui cause une maladie professionnelle.
La travailleuse était de petite taille et avait déjà souffert d’une myosite du trapèze droit. Au regard de la
preuve, la CLP a conclu que les douleurs alléguées par la travailleuse n’étaient appuyées par aucune
pathologie précise, que la presse en cause ne comportait aucun danger objectif et que le refus de la
travailleuse relevait davantage de sa crainte de la réapparition de douleurs aux épaules et au cou,
61
provenant d’une condition personnelle que de l’exercice même du travail . En se référant à l’affaire
62
Bootlegger c. Couture , qui postule que « la condition personnelle d’un travailleur ne peut, à elle seule,
63
constituer un motif justifiant un droit de refus au sens de l’article 12 de la LSST » , la CLP a été d’avis
qu’une crainte hypothétique de douleurs dans l’exécution d’un travail ne constituait pas une crainte
64
raisonnable de danger .

[Page 23]

1.1.3.2.3 Conditions médicales personnelles


Les principes de l’affaire Bootlegger ont été repris dans l’affaire Waterville, dans le cadre d’une requête
en évocation d’une décision du commissaire du travail. Ce dernier avait conclu que l’employeur avait
exercé des mesures de représailles à l’encontre de la travailleuse en refusant de la rémunérer durant la
période correspondant à l’exercice de son droit de refus. En l’espèce, la travailleuse détenait un
certificat médical contenant un diagnostic de dorsalgie et lui prescrivant de « ne pas soulever
régulièrement des poids de 15-25 lbs ». Puisque son travail régulier ne lui permettait pas de respecter
cette restriction, la travailleuse avait demandé d’être réaffectée à des travaux légers. L’employeur avait
répondu qu’il n’y avait de pas de travaux légers de disponibles pour la travailleuse et qu’à défaut de
pouvoir effectuer ses tâches régulières elle devait s’absenter du travail et réclamer des prestations
d’assurance-salaire. La travailleuse s’était dès lors absentée du travail et avait demandé de faire
reconnaître cette absence comme un droit de refus parce que sa situation l’exposait à un danger pour
sa santé. La Cour supérieure a jugé que l’absence de la travailleuse ne constituait pas un droit de refus.
À cet effet, le juge Benoit de la Cour supérieure a mentionné que :

L’étude de la loi [la LSST] fait voir qu’elle vise le danger à la santé et à la sécurité
venant des lieux, de leur aménagement, de l’équipement, des méthodes de travail, etc.
et non pas de la condition physique ou de l’état de santé du travailleur et du changement de l’état de
santé.

L’article 18 parle de corrections apportées faisant disparaître le danger. L’article 19


autorise l’inspecteur à exiger les corrections nécessaires. Les articles de la loi ne traitent que
du danger en raison des conditions de travail et non en raison d’une indisposition du travailleur. C’est
65
bien ce qu’il appert de la loi. (Nos soulignements).

Dans cette affaire, la condition personnelle de la travailleuse ne pouvait justifier une crainte
raisonnable de danger. Comme l’a si bien mentionné le juge Benoit, « un employé travaillant à
66
l’extérieur ne peut prétendre exercer un droit de refus parce qu’il est grippé » .

[Page 24]

67 68
Mais ce principe doit être adapté au contexte ainsi qu’aux conditions prévues aux articles 17 et 19 de la LSST qui précisent que le droit de refus peut
reposer sur des motifs qui sont acceptables dans le cas particulier d’un travailleur, mais qui ne le sont pas pour un autre travailleur. Le juge Benoit évoque
d’ailleurs ces articles en mentionnant qu’« il est vrai que les articles 17 et 19 traitent du cas où le refus repose sur des motifs acceptables dans le cas
69
particulier du travailleur et ne pouvait justifier un autre de refuser d’exécuter le travail » . Mais il considère par ailleurs que ces dispositions ne s’appliquent
pas à un travailleur qui, avant d’avoir une condition médicale, pouvait exécuter le travail dans les mêmes conditions que les autres. Selon lui, elle vise, entre
70
autres, les cas des travailleurs qui sont affectés à des fonctions qu’ils n’effectuaient pas avant la manifestation de leur condition médicale .

71
Comme l’a mentionné la CLP dans l’affaire Waterville , la pensée du juge Benoit a été précisée par la
Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (CALP) dans l’affaire Tremblay et Noranda
72
Inc. (Division CCR) . Dans
cette affaire, la CALP devait trancher sur le refus d’un travailleur cardiaque
sommé de déplacer un chariot contenant six barils de 800 à 900 livres sur une distance de 10 à 15
pieds. Le tribunal a accueilli l’appel du travailleur pour le motif que même si celui-ci portait une condition
personnelle l’empêchant de faire des efforts physiques importants « son refus n’était pas exclusivement
motivé par son état de santé mais aussi

[Page 25]

73
par l’existence d’un danger découlant d’une méthode de travail inadéquate et susceptible de causer des accidents à tous les travailleurs » . Reprenant les
principes énoncés dans l’affaire Bootlegger, la CALP a conclu que :

Il ressort des articles 12 et 19 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail que l’exercice
d’un droit de refus ne peut être fondé exclusivement sur un motif relatif à l’état de santé
personnel d’un travailleur. En effet, c’est l’exécution du travail qui doit exposer le
travailleur à un danger qui peut normalement être éliminé au moyen de mesures ou
corrections ordonnées par l’inspecteur. Toutefois, le second alinéa de l’article 19 reconnaît la
possibilité que le refus d’un travailleur repose sur des motifs acceptables dans son cas particulier mais
qui ne .justifieraient pas un autre travailleur de refuser d’exécuter le travail. Il est possible d’en déduire
que l’état de santé d’un travailleur pourrait être considéré dans l’appréciation de la présence d’un
danger mais que cela ne peut constituer l’unique facteur.

(Nos soulignements)

La CALP a plus tard repris ces mêmes principes, notamment dans l’affaire Centre d’accueil Émilie-
74 75
Gamelin et Thivierge et dans l’affaire Mercier et Coopérative fédérée du Québec . Dans cette affaire, la CALP
a précisé le sens à donner aux règles énoncées par le juge Benoit dans l’affaire Bootlegger, soit que :

Ainsi que le précise cet article [12], ce doit être « l’exécution de ce travail » qui doit
représenter pour le travailleur un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité
physique. En somme, le danger dont il est question doit être celui représenté par les
conditions d’exercice des fonctions accomplies et doit revêtir un degré sérieux d’objectivité.

(Nos soulignements)

En somme, au regard de la jurisprudence et de l’article 19, al. 2 de la LSST, il importe de garder en


tête que le droit de refus est un
[Page 26]

recours individuel et qu’en conséquence, la crainte raisonnable de danger est différente d’une personne à une autre, selon le contexte et la condition
personnelle du travailleur. Ainsi, la crainte d’une travailleuse « col bleu » de travailler seule en raison d’une hypersensibilité émotionnelle développée à la
76
suite d’un stress post-traumatique deux années auparavant pourrait, selon les circonstances, être jugée raisonnable .

1.1.4 Conditions ou circonstances anormales du travail à exécuter


Selon l’article 13 de la LSST, un travailleur ne peut exercer son droit de refus, lorsque « [...] les
conditions d’exécution de ce travail sont normales dans le genre de travail qu’il exerce ». Par exemple,
un pompier ne peut refuser d’intervenir lors d’un incendie puisque cette tâche est inhérente à son travail.
Mais cette tâche pourrait devenir anormale si des normes d’intervention sécuritaires ne sont pas
77
respectées . Il serait alors justifié d’exercer un droit de refus.

Selon la jurisprudence, pour connaître l’existence des conditions normales du travail, on doit
analyser ces conditions non pas en fonction de la perception du travailleur, mais en fonction de
78
l’analyse du « genre de travail » exercé . Cette analyse se fait selon certains critères établis par la
79
jurisprudence et la doctrine, soit :

[Page 27]

[...]

1. est-ce que le travail s’effectue selon les règles de l’art ?

2. est-ce que le risque est inhérent à la tâche ?

3. est-ce que toutes les mesures de sécurité généralement reconnues ont été prises
pour faire face à cette situation ?

4. est-ce que l’équipement est dans les conditions normales de fonctionnement ?

5. est-ce que l’intégrité physique ou l’état de santé du travailleur lui permet


d’effectuer cette tâche sans représenter pour lui-même ou pour d’autres personnes un
risque supplémentaire ?

En répondant par la négative à l’une ou l’autre de ces questions, il y aura lieu de


conclure à l’existence de conditions anormales de travail. Il ne suffit pas que les
conditions d’exécution de travail soient les mêmes depuis plusieurs années ou que ce
même travail soit exécuté par d’autres personnes pour conclure à des conditions
normales.

Ce processus d’analyse se présente particulièrement dans les décisions traitant des droits de refus
80
exercés en milieu correctionnel. Dans l’affaire Proulx et Établissement de détention de Sherbrooke la
commissaire Luce Boudreau a énoncé des balises auxquelles se sont référés d’autres commissaires
pour procéder à l’analyse du

[Page 28]

genre de travail des ASC aux fins de l’application de l’article 13. Tel qu’expliqué précédemment, cette affaire concernait le refus d’une ASC d’accompagner
seule un détenu à l’hôpital dans une voiture banalisée et ne disposant que d’un téléphone cellulaire, sans dispositif main libre, comme moyen de
communication. Bien que l’ASC pouvait craindre raisonnablement la survenance d’une agression par le détenu, l’employeur alléguait qu’il y avait une
évaluation du détenu avant de décider des conditions de son accompagnement. Certes, un risque résiduel d’agression demeurait, mais l’employeur
considérait que cela faisait partie des conditions normales de travail dans ce genre de profession. Le tribunal n’était pas du tout de cet avis, tel qu’il en
appert des paragraphes suivants :
[85] [...] cette évaluation n’est pas faite de façon exhaustive et peut parfois même, telle
que la preuve l’a démontré, être incomplète. Malgré le témoignage de monsieur
Gagnon à l’audience, le tribunal n’est pas convaincu que le directeur ou le directeur-
adjoint va vérifier de façon complète l’évaluation qui est faite lorsque, par exemple,
certaines cases ne sont pas remplies. Il est donc difficile de conclure ici que les
conditions d’exécution de ce travail d’accompagnement sont normales pour un agent
des services correctionnels.

[86] Le tribunal n’est pas convaincu que l’accompagnement seul s’effectue selon les règles de l’art et
que les risques présentés soient inhérents à la tâche d’agent lorsqu’il est par ailleurs possible de
prendre des mesures simples pour protéger le travailleur des risques et dangers possibles. Comme
précédemment mentionné, la LSST a pour objet l’élimination à la source même des
dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs et dans ces
circonstances, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que le fait d’escorter un détenu
seul dans les circonstances telles que mises en preuve ne respecte pas cet objectif.

(Nos soulignements)

Par ailleurs, lorsque les règles de l’art et les mesures de sécurité reconnues en matière
d’accompagnement de détenus sont respectées, la CLP est d’avis que le risque résiduel est inhérent à
81
la tâche des ASC. Tel en a été le cas dans l’affaire Gagnon et Ministère Sécurité publique . En l’espèce
deux ASC avaient refusé d’accompagner un

[Page 29]

détenu à un rendez-vous médical à la suite du refus de l’employeur d’affecter un troisième ASC. Le prévenu était fouillé à nu avant de quitter l’établissement
et était enchaîné et menotté. Les travailleurs avaient le loisir de choisir l’itinéraire de leur choix, ils étaient équipés d’émetteurs-récepteurs portatifs, d’un
téléphone cellulaire, portaient une veste pare-balles, l’un des ASC était armé et ils avaient du poivre de Cayenne. Quant au véhicule de transport, le
prévenu était dans une cage et deux barrières le séparaient des travailleurs. Les ASC avaient été formés pour intervenir auprès d’un détenu. Finalement,
selon la procédure existante et non contestée par les travailleurs, seuls les détenus faisant partie d’un gang criminalisé étaient accompagnés par trois ASC.
Le tribunal en a conclu que les règles de l’art et les mesures de sécurité en cette matière avaient été respectées. Considérant l’ensemble de ces facteurs, la
CLP a conclu que les conditions d’exécution du travail des ASC étaient normales et qu’ils ne pouvaient exercer un droit de refus.

Notons que dans l’affaire Gagnon, la CLP a conclu que les conditions d’exécution des ASC étaient
normales parce que l’employeur avait respecté les règles de l’art ainsi que les mesures de santé et
sécurité en matière d’accompagnement de détenu. Dans ce contexte, l’employeur ne pouvait remédier
aux risques inhérents au travail d’un ASC. Mais cela ne lui permettait pas pour autant de se « cacher
derrière le fait qu’il s’agit d’un établissement de détention pour ne pas prendre des mesures minimales
82
afin d’assurer la santé, sécurité et l’intégrité physique de ses travailleurs » . Néanmoins, la CLP était
d’avis que, « la délation, la présence d’armes artisanales, de drogues ou d’alcool ne sont pas
83
inhabituelles dans ce milieu de travail » . Par ailleurs, la position de la CLP est bien différente lorsqu’il
84
s’agit d’un cuisinier travaillant dans un centre de détention. Dans l’affaire Léonard précitée, la CLP a
affirmé qu’il n’était pas normal que des détenus d’un centre de détention puissent se procurer un
85
couteau de cuisine en présence d’un cuisinier .

[Page 30]

L’agressivité de la clientèle peut constituer une condition inhérente du travail lorsque la nature des
activités de l’organisation est susceptible d’appréhender ce genre de comportement. Cela va de soi
86
pour les ASC. Il en est également le cas pour les Centres de réadaptation ainsi que les Centres
87
d’hébergement de soins de longue durée (CHSLD) . Par ailleurs, un travailleur faisant l’objet de
88
harcèlement psychologique au travail ne se trouve pas dans un cadre normal de relations de travail .

1.1.5 Le refus ne doit pas mettre dans l’immédiat la sécurité d’autrui en péril
Selon l’article 13 de la LSST, un travailleur ne peut exercer son droit de refus « si le refus d’exécuter
ce travail met en péril immédiat la vie, la santé, la sécurité ou l’intégrité physique d’une autre
89
personne ». Dans l’affaire SAPSCQ et Québec (Ministère de la Sécurité publique) (Détention) précitée, le
commissaire Clément a bien expliqué la teneur de cette disposition. Ses explications tiennent pour
l’essentiel sur l’interprétation de l’expression « péril immédiat ». Se référant d’abord à l’affaire Grall et
90
, et, ensuite au Petit Larousse illustré, il conclut que le « péril
Québec (Ministère de la Sécurité publique)
immédiat » doit être une menace de quelque chose qui précède ou qui suit instantanément un
91
événement . En l’espèce, l’employeur n’avait pas réussi à faire cette preuve. Cette disposition
s’applique donc dans des situations d’urgence extrême ou lorsque le service faisant l’objet du refus est
92
essentiel à la sécurité de la population. Par exemple, dans l’affaire Bédard et Brossard (Ville de) ,
l’inspecteur de la CSST a ordonné aux policiers ayant exercé un droit de refus de retourner au travail
en vertu de l’article 13 puisque le service de police est essentiel à la sécurité de la population. À
l’opposé, la CLP a été d’avis que le refus de deux ASC d’accompagner en ambulance un détenu
souffrant de problèmes respiratoires ne mettait pas en péril immédiat la vie du prévenu. « Les
ambulanciers étaient sur place et

[Page 31]

93
se sont occupés du trouble respiratoire à l’origine des problèmes du prévenu » .

1.1.6 Le travailleur doit rapporter le plus tôt possible à l’employeur le droit de refus qu’il veut
exercer
Pour terminer, le travailleur doit rapporter à son supérieur hiérarchique qu’il a exercé ce droit ou qu’il
a l’intention de l’exercer. Comment en effet peut-il se prévaloir des immunités légales prévues à ce droit
si l’employeur n’en est pas informé ? Au surplus, comment l’employeur peut-il remédier à
l’appréhension de danger du travailleur si ce dernier ne l’informe pas qu’il refuse d’effectuer le travail
demandé ? Cette dernière étape s’avère donc essentielle au respect des conditions d’exercice du droit
94
de refus. Conformément à l’article 15 de la LSST , le travailleur doit donc rapporter le plus tôt possible
le droit de refus qu’il veut exercer. La communication de son intention doit pouvoir se déduire de
95
l’ensemble des gestes posés , de façon expresse ou implicite. Il n’y a donc pas de formule
96
sacramentelle sur la façon de communiquer cette intention .

1.2 Immunité des travailleurs exerçant un droit de refus


Si le législateur a, par l’article 12 de la LSST, reconnu aux travailleurs le droit de refuser d’exécuter
un travail présentant un danger pour sa santé ou sa sécurité au travail, celui-ci a encadré son exercice
selon une procédure bien définie. Le travailleur désirant exercer un droit de refus doit suivre la
procédure qui y est prévue, à défaut de quoi il est passible de sanctions de la part de son employeur.
En d’autres mots, un travailleur ne peut se contenter d’invoquer devant le tribunal qu’il a exercé un droit
de refus, sans avoir suivi les prescriptions de la LSST pour être immunisé des mesures de représailles

[Page 32]

97
de son employeur . L’interprétation de l’article 30 de la LSST, lequel immunise tout travailleur refusant d’exécuter une tâche dangereuse, de mesures de
représailles de leur employeur diffère. Pour certains auteurs, le droit de refuser d’exécuter une tâche étant une condition d’exception, la protection que lui
98
confère l’article 30 de la LSST doit être interprétée restrictivement . Pour d’autres, la LSST étant une loi à caractère social, l’article 30 doit recevoir une
99
interprétation large et libérale pour permettre la réalisation de son objet, soit l’élimination à la source des risques de lésions professionnelles . À cet effet,
l’article 30 de la LSST, énonce que :

L’employeur ne peut congédier, suspendre ou déplacer un travailleur, exercer à son


endroit des mesures discriminatoires ou de représailles ou lui imposer toute autre
sanction pour le motif que ce travailleur a exercé le droit visé dans l’article 12.
Toutefois, dans les 10 jours d’une décision finale, l’employeur peut congédier,
suspendre ou déplacer le travailleur ou lui imposer une autre sanction si le droit a été
exercé de façon abusive.

Au regard de cet article, l’employeur ne peut sanctionner un travailleur qui a exercé un droit prévu à
l’article 12. A contrario, les travailleurs refusant de travailler dans les conditions prévues à l’article 12,
100
mais qui lui sont interdites selon l’article 13 , sont passibles de mesures disciplinaires.

Il appert du deuxième alinéa de l’article 30, que l’employeur peut sanctionner un travailleur qui a
exercé le droit de refus « de façon abusive ». Selon la jurisprudence de la CLP, l’exercice abusif du
droit de refus doit être compris comme un abus de procédure, soit lorsque le refus du travailleur
101
outrepasse les limites prescrites à l’article 12, sans toutefois contrevenir à l’article 13 c’est-à-dire par
« l’exercice

[Page 33]

manifestement déraisonnable d’un droit, dont on use d’une manière nettement déloyale ou incompatible avec la conduite normale d’une personne prudente
102 103
et diligente » . Par exemple, l’usage du droit de refus aux fins de poursuivre une stratégie syndicale sera considéré comme un usage abusif de ce droit .
Lorsqu’un travailleur exerce un droit de refus de façon abusive, le pouvoir disciplinaire de l’employeur est suspendu jusqu’à ce qu’un inspecteur de la CSST
rende une décision sur la dangerosité de la situation. Il pourra sanctionner le travailleur qui abuse de son droit dans les dix jours qui suivent la décision de
104
l’inspecteur. La décision de l’inspecteur est exécutoire, malgré une demande de révision selon l’article 20 alinéa 2 de la LSST. Jusqu’à cette décision, le
travailleur est présumé être au travail et a droit à son salaire.

2. LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

C’est suite à une réforme en profondeur opérée en 1978 que le gouvernement fédéral a inclus dans
ses lois du travail une disposition donnant aux employés le droit de refuser d’effectuer un travail
105
dangereux . Ces dispositions ainsi que celles régissant la santé et la sécurité au travail se retrouvent
dans la Partie II du Code canadien du travail (C.c.t.) ou, plus précisément, aux articles 122(1) à 160 du
Code. Les dispositions relatives au droit de refus se retrouvent à l’article 128 C.c.t.

2.1 Exigences substantives à l’exercice du droit de refus


Les exigences substantives à l’exercice du droit de refus en droit du travail fédéral se retrouvent à
l’article 128 du C.c.t. Libellé en 19 paragraphes, cet article dispose de l’essentiel des exigences
substantives à l’exercice de ce droit à son premier paragraphe. Bien que non négligeables, les autres
dispositions abordent des conditions

[Page 34]

d’exception ou des conditions procédurales à l’exercice du droit de refus. Le paragraphe 128(1) du C.c.t. est libellé comme suit :

128(1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, l’employé au travail peut
refuser d’utiliser ou de faire fonctionner une machine ou une chose, de travailler dans
un lieu ou d’accomplir une tâche s’il a des motifs raisonnables de croire que, selon le cas :

a) l’utilisation ou le fonctionnement de la machine ou de la chose constitue un danger pour lui-


même ou un autre employé;

b) il est dangereux pour lui de travailler dans le lieu;

c) l’accomplissement de la tâche constitue un danger pour lui-même ou un autre employé.

(Nos soulignements)
Le paragraphe 128(1) comprend deux questions préalables à l’exercice du droit de refus : 1) l’employé
106
était-il « au travail » et 2) avait-il des « motifs raisonnables de croire à l’existence d’un danger » .
Lorsque les réponses à ces deux questions sont affirmatives, l’employeur ne peut, qu’après la tenue
d’une enquête complète incluant le droit d’appel au TSST, sanctionner l’employé que dans deux
circonstances, soit : 1) s’il a d’autres motifs justes et suffisants de le sanctionner ou, 2) s’il a abusé de
107
son droit au sens de l’article 147.1. .

Par ailleurs, le libellé du paragraphe 128(1) est très semblable à celui de l’article 12 de la LSST et les
paragraphes qui suivent ce dernier s’apparentent beaucoup aux articles 13 à 15 de la LSST. Pour que
son droit de refus soit reconnu au sens de la Partie II du C.c.t., une personne doit en effet :

1. être un employé (art. 128(1));

2. être au travail (art. 128(1));

3. qui a des motifs raisonnables de croire en l’existence d’un danger (art. 128(1));

[Page 35]

4. qui ne constitue pas une condition normale de son emploi (art. 128(2)b));

5. que le refus qu’il désire exercer ne met pas directement en danger la vie, la santé
ou la sécurité d’une autre personne (art. 128(2)a));

6. Rapporter sans délai à l’employeur le droit de refus qu’il décide d’exercer (art.
128(6) et (7)).

Nous allons donc présenter l’analyse du droit d’exercice du droit de refus sous la législation fédérale
selon cette même structure au regard de la jurisprudence pertinente.

2.1.1 Être un employé au sens du C.c.t.


L’article 122 de la Loi définit le terme « employé » comme étant « une personne au service d’un
employeur ». Nous n’avons pas recensé de décision abordant cette définition en lien avec l’article 128(1)
C.c.t. Nous retenons par ailleurs qu’un employé au sens de l’article 122 est encore et toujours une
personne et que, tout comme pour l’article 12 de la LSST, le droit de refus est un droit individuel. Il ne
peut donc, par analogie, être fait au nom d’un autre travailleur par une collectivité de travailleurs ou par
une organisation syndicale. Le Code ne contient pas de disposition équivalente à l’article 27 de la
LSST permettant à plusieurs employés de refuser d’exécuter un travail en raison d’un même danger. Le
Code ne contient par ailleurs aucune disposition interdisant à une collectivité d’employés d’exercer
simultanément leur droit individuel de refus.

Il est intéressant de constater que le mot « employé » est défini d’une manière plus restrictive dans
108
la Partie I du Code (la partie sur les relations de travail), soit à l’article 3(1) . Comme le disent si bien
109
les auteurs Coutu, Bourgault et Desjardins ceci, « [...] démontre

[Page 36]

110
l’intention du législateur de couvrir le plus de personnes possibles, dont celles occupant des postes de direction ou de confiance » .

2.1.2 Être au travail


La notion « d’employé au travail », n’a pas fait l’objet d’un grand débat jurisprudentiel. L’arrêt Saumier
111
c. Canada (Procureur général) fait figure d’autorité en cette matière. Dans cette cause, la Cour d’appel
fédérale devait trancher sur une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Commission des
relations de travail dans la fonction publique (maintenant CRTFEP) qui avait rejeté la plainte d’une
membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) déposée sous les articles 133 et 147 du C.c.t. Au
moment des événements, la plaignante était absente du travail pour des raisons médicales depuis un
long moment. À la suite d’une filature demandée par son employeur, un médecin-expert a conclu que
les activités de la plaignante étaient incompatibles avec ses incapacités fonctionnelles et qu’elle était
prête à reprendre un travail modifié (tâches administratives) à temps complet immédiatement. Son
supérieur hiérarchique lui a dès lors signifié un ordre de retour au travail. La plaignante a invoqué son
droit de refus prévu à l’article 128 pour le motif qu’elle ne voulait pas aggraver sa santé, ce qui a amené
l’employeur à presser la plaignante à revenir au travail d’où la plainte à la CRTFP.

Le commissaire a conclu que la plaignante a exercé son droit de refus conformément à l’article 128
du Code, notamment qu’elle était au travail au moment où elle l’a exercé, et qu’elle avait rencontré les
exigences prévues à l’article 128(6) en informant sans délai son employeur des motifs de son refus.
Par ailleurs, le commissaire a conclu que la plainte de la plaignante était irrecevable parce qu’elle
n’avait pas démontré qu’elle avait des motifs raisonnables de croire que son retour au travail constituait
un risque pour sa santé et sa sécurité au travail. La plaignante a demandé le contrôle judiciaire de cette
décision à la Cour d’appel fédérale.

[Page 37]

La Cour a brièvement conclu que la décision de la CRTFP n’était pas déraisonnable et a rejeté la
demande de contrôle judiciaire. Elle s’est par ailleurs permise d’émettre en obiter l’avis selon lequel le
commissaire avait erré en concluant que la plaignante était au travail lors de l’exercice de son droit de
refus : au paragraphe 50 de cet arrêt le juge Nadon s’est exprimé ainsi :

[50] À mon avis, le commissaire a erré en concluant ainsi. Il est indéniable que la
demanderesse était absente de son travail depuis plusieurs mois, pour des raisons de
maladie, lorsqu’elle a invoqué l’article 128 du Code au soutien de son refus de
travailler. Le simple fait que la demanderesse se soit présentée physiquement au
bureau de son employeur le 27 septembre 2005, après une absence de plusieurs mois,
ne faisait pas en sorte qu’elle était « au travail » au sens du paragraphe 128(1) du
Code. En d’autres mots, l’employée n’est pas « au travail » en se présentant pour
quelques minutes au bureau de son employeur pour l’aviser qu’elle refuse de travailler
pour des motifs de santé, peu importe la ou les tâches qui lui seront confiées.

L’existence de cette condition au droit de l’employé d’exercer son droit de refus est essentielle, sans
quoi il est inutile d’évaluer si celui-ci avait des motifs raisonnables de croire en l’existence d’un danger.

2.1.3 Avoir des motifs raisonnables de croire en l’existence d’un danger pour sa santé et sa
sécurité au travail, pour soi-même ou pour autrui
Contrairement à la LSST, le terme « danger » est, depuis 1984, défini à l’article 122(1) C.c.t. La
définition de ce terme a fait l’objet de plusieurs changements au cours des 30 dernières années. Le
terme « danger » a, au départ, été défini comme un « risque ou situation susceptible de causer des
blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être
remédié. » L’inclusion de cette définition dans le Code n’a eu aucun impact par rapport à la situation qui
prévalait avant 1984. En effet, avant cette date, le Code accordait aux employés le droit de refuser de
112
travailler lorsqu’il y avait « un danger imminent ou immédiat » , sans que le terme

[Page 38]

« danger » y soit défini. Lorsque le législateur a défini ce terme en 1984, le Conseil canadien des relations de travail (aujourd’hui CCRI) l’a traité exactement
113 114
de la même manière qu’il traitait antérieurement le terme « danger imminent » , soit comme « une situation où le risque de blessure est immédiat » , et
ce, malgré l’absence de la notion « d’imminence du danger » dans son libellé.

Lors de la réforme du Code en 2000, le législateur a élargi la portée du terme « danger » en


115
modifiant sa définition, lequel était libellé comme suit :
Situation, tâche ou risque — existant ou éventuel — susceptible de causer des
blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade — même si ses
effets sur l’intégrité physique ou la santé ne sont pas immédiats — , avant que, selon le
cas, le risque soit écarté, la situation corrigée ou la tâche modifiée. Est notamment
visée toute exposition à une substance dangereuse susceptible d’avoir des effets à
long terme sur la santé ou le système reproducteur.

De nombreuses décisions ont abordé ce terme dans le cadre de la décision d’un agent de santé et
116
de sécurité (ASS) selon l’article 140(1) C.c.t. . Ce dernier était chargé d’enquêter sur les circonstances
entourant le droit de refus d’un employé. Son enquête le menait à

[Page 39]

conclure à l’existence ou à l’absence de « possibilité raisonnable de danger ». Cette décision pouvait être contestée par un appel au Tribunal de santé et
117 118
sécurité au travail (TSST) . Dans ce contexte, la juge Marie-Josée Bédard a, dans la décision Laroche c. Canada (Procureur général) , cité
119
avec approbation les critères d’application du terme « danger » définis par la Cour d’appel fédérale :

Aux paragraphes 71 à 78 de ses motifs, l’agent d’appel a passé en revue la


jurisprudence de la notion de « danger ». Se fondant plus particulièrement sur la
décision de notre Cour dans Martin c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 156 (CanLII), et sur
celle de la juge Gauthier dans Verville c. Canada (Service correctionnel), 2004 CF 767 (CanLII),
l’agent d’appel a déclaré que le risque, la situation ou la tâche peut être existant ou
éventuel; qu’en l’espèce, le risque était éventuel en soi; que, pour conclure à la
présence d’un danger, il faut déterminer dans quelles circonstances le risque éventuel est
raisonnablement susceptible de causer des blessures, et établir que ces circonstances se
présenteront dans l’avenir, non comme simple possibilité, mais comme possibilité
raisonnable; que pour conclure à la présence d’un danger, il s’agit de déterminer les
probabilités que ce qu’affirme le plaignant se produise plus tard; que le risque doit être
raisonnablement susceptible de causer des blessures avant qu’il ne soit écarté; et qu’il n’est
pas nécessaire d’établir à quel moment précis le risque surviendra, ni qu’il survient
chaque fois.

Cet énoncé du droit est irréprochable ou, à tout le moins, il est raisonnable au sens de
l’arrêt Dunsmuir.

(Nos soulignements)

Bien que cette nouvelle définition fut libellée en des termes généraux, la nécessité d’imminence ou
120
de spécificité du danger demeurait en vigueur comme il en était le cas avant son introduction en
121
2000. Comme l’a mentionné la juge Tremblay-Lamer dans l’affaire Martin et Canada (Procureur général) :

J’estime malgré tout que la nouvelle définition [de « danger » adoptée en 2000] rend
nécessaire un élément d’imminence, la
[Page 40]

blessure ou la maladie devant survenir « avant que, selon le cas, le risque soit écarté,
la situation corrigée ou la tâche modifiée ».

Le 12 décembre 2013, le législateur a de nouveau modifié la définition de « danger », laquelle est


122
actuellement libellée comme suit :

Situation, tâche ou risque qui pourrait vraisemblablement présenter une menace


imminente ou sérieuse pour la vie ou pour la santé de la personne qui y est exposée
avant que, selon le cas, la situation soit corrigée, la tâche modifiée ou le risque écarté.
La modification de cette définition s’est inscrite dans le contexte d’une réforme apportée par le
123
gouvernement conservateur de Stephen Harper. Dans son document d’information , le législateur a
mentionné qu’avec cette nouvelle définition :

Les employés conserveraient leur droit fondamental de refuser un travail dangereux, et l’on
s’assurerait à la fois que le processus de refus de travailler est clair et équilibré. Le
nouveau processus renforcerait le système de responsabilité interne et permettrait de
s’assurer que les parties au lieu de travail évaluent et résolvent les questions de santé
et de sécurité au travail de façon efficace, efficiente et collaborative.

Il n’y a pas eu, depuis la réforme de 2013, de jurisprudence nous permettant d’évaluer l’impact de
cette nouvelle définition sur l’exercice du droit de refus.

Quoiqu’il en soit, cette définition n’a pas de lien avec les protections accordées aux employés
exerçant un droit de refus en raison de « motifs raisonnables de croire en l’existence d’un danger »,
précisée à l’article 128(1). Les exigences applicables à cette notion n’ont pas été modifiées lors de la
124
réforme de 2000 , et l’article n’a pas été modifié lors de la réforme de 2013. Le fardeau de preuve de
l’employé en cette matière est faible, même s’il a été démontré plus tard que cette croyance était
125
erronée . Les tribunaux ont d’ailleurs

[Page 41]

126 127 128


interprété largement cette notion . Dans l’affaire Isinger et TSI Terminal Systems Inc. , le CCRI cite quoique avec prudence , des décisions
du CCRT pour établir des critères de détermination de l’existence d’une crainte raisonnable de danger, notamment l’affaire Miller où il y est mentionné
que :

Pour déterminer s’il existait un motif raisonnable de croire à la présence d’un danger imminent, il faudra
dans une large mesure tenir compte de l’évaluation, faite par le Conseil, des différents facteurs qui ont
amené l’employé à décider de refuser de travailler; notamment de ses motifs, qu’ils soient de bonne foi
ou non, de son expérience et sa connaissance du travail et du lieu de travail, ainsi que du degré de sa
connaissance des circonstances l’ayant amené à redouter un danger. Il est également possible de
soutenir que l’anxiété peut avoir influé sur son jugement au moment de son refus.
Toutefois, pour que cet élément ait une incidence favorable sur la détermination de la
légitimité de sa conviction, son état d’esprit devra avoir été motivé de façon directe et
compréhensible par des préoccupations fondées sur la situation qui existait déjà au lieu
129
de travail, en matière de sécurité.

Ainsi, l’employé qui exerce son droit de refus doit convaincre le tribunal qu’une personne
130
raisonnable, placée dans la même situation conclurait en l’existence de ce danger . L’employé peut se
131
tromper dans l’évaluation du danger, mais il doit aussi démontrer qu’il y croyait sincèrement .

[Page 42]

2.1.4 Conditions ou circonstances normales du travail à exécuter


Selon l’article 128 (2) b) un employé ne peut exercer son droit de refus lorsque le danger visé
constitue une condition normale de son emploi. La notion de « condition normale d’emploi » n’a pas été
définie par le législateur, mais plutôt par les tribunaux, tel qu’il en appert de l’affaire Rathwell et Air
132
Canada :

[76] En outre, la Cour fédérale, dans P&O Ports Inc. et Western Stevedoring Co. Ltd. c. Le
Syndicat international des débardeurs et des magasiniers, Section Locale 5005, a maintenu
l’interprétation de l’agent d’appel dans ce dossier concernant un danger qui constitue
une condition normale d’emploi. Tout comme la Cour, je suis tout à fait d’accord avec
l’interprétation de cette notion par l’agent d’appel, qui est reproduite au paragraphe 46
comme suit :

[152] Je crois qu’avant qu’un employeur puisse affirmer qu’un danger est une condition
de travail normale, il doit reconnaître chaque risque, existant et éventuel, et il doit,
conformément au Code, mettre en place des mesures de sécurité visant à éliminer le
danger, la situation ou l’activité; s’il ne peut l’éliminer, il doit élaborer des mesures
visant à réduire et à contrôler le risque, la situation ou l’activité dans une mesure
raisonnable de sécurité, et finalement, si le risque existant ou éventuel est toujours
présent, il doit s’assurer que ses employés sont munis de l’équipement, des vêtements,
des appareils et du matériel de protection personnelle nécessaires pour les protéger
contre le danger, la situation ou l’activité. Ces règles s’appliquent évidemment, dans la
présente affaire, au risque de chute ainsi qu’au risque de trébucher ou de glisser sur les
panneaux de cale.

[Page 43]

[153] Une fois toutes ces mesures suivies et toutes les mesures de sécurité mises en place, le risque
« résiduel » qui subsiste constitue ce qui est appelé une condition de travail normale. Toutefois, si
des changements sont apportés à une condition de travail normale, une nouvelle
analyse de ce changement doit avoir lieu en conjonction avec les conditions de travail
normales.

[154] Aux fins de la présente instance, je conclus que les employeurs ont négligé, dans
la mesure où la chose était raisonnablement possible, d’éliminer ou de contrôler le
danger dans une mesure raisonnable de sécurité ou de s’assurer que les employés
étaient personnellement protégés contre le danger de chute des panneaux de cale.

[...]

[77] De même, et plus récemment, dans Canada c. Vandal et al., la Cour fédérale a
confirmé le raisonnement de ce Tribunal sur ce qui constitue une condition normale
d’emploi dans le contexte des agents de correction qui doivent escorter des détenus.
Dans Éric V. et autres c. Service correctionnel du Canada6, ce Tribunal a déclaré :

[302] Il y a aussi une autre distinction importante à faire entre ce danger et un danger
qui constitue une condition normale d’emploi qui ne justifierait pas un refus de travail.
Ce dernier danger présuppose que l’employeur a d’abord identifié la présence d’un
danger lors d’escortes et que de ce fait, il a pris toutes les mesures nécessaires
pour protéger ses employés i.e. qu’il a identifié et contrôlé tous les facteurs qui ont
une importante incidence négative sur la tâche de faire des escortes. À ce moment,
rien de plus ne peut être fait par l’employeur pour protéger davantage les employés.

_____________
6
TSSTC-09-009

(Nos soulignements)

Au regard de la jurisprudence, cette disposition doit être interprétée restrictivement puisqu’il s’agit
133
d’une disposition d’exception . Les exemples donnés par les tribunaux fédéraux pour

[Page 44]

illustrer cette notion sont sensiblement les mêmes que ceux donnés par la CLP pour l’article 13 de la LSST. Ainsi, dans l’affaire Court, le CCRI explique
134
que le danger auquel fait face un pompier travaillant dans un aéroport constitue une condition normale de son emploi .
2.1.5 Le refus ne doit pas mettre directement la santé ou la sécurité d’une autre personne en
danger
Selon l’article 128(2) a) du C.c.t., un employé ne peut exercer son droit de refus si celui-ci met
directementen danger la vie, la santé ou la sécurité d’une autre personne. Notre recherche
jurisprudentielle ne nous a pas révélé de décision abordant cette matière. Par analogie avec l’article 13
de la LSST, nous croyons que cette disposition n’est applicable que dans des situations d’urgence
extrême ou lorsque le service faisant l’objet du refus est essentiel à la sécurité de la population.

2.1.6 Le travailleur doit rapporter le plus tôt possible à l’employeur le droit de refus qu’il veut
exercer
L’employé qui exerce ce droit doit le rapporter le plus tôt possible à l’employeur (sans délai). À défaut
de le faire, son droit ne sera pas reconnu. Celui-ci pourrait être perçu comme un refus de travail,
assimilable à un acte d’insubordination et passible d’une mesure disciplinaire. Comme pour l’article 15
de la LSST, il n’y a pas de formule sacramentelle ni de processus officiel pour aviser l’employeur de
son intention d’exercer son droit de refus. L’employé peut exprimer verbalement ou tacitement son
intention d’exercer son droit de refus, en autant que l’expression de cette intention ait été clairement
135
communiquée à l’employeur « d’une manière raisonnable et adéquate » .

Par ailleurs, l’employé doit, au moment de l’expression de son intention d’exercer son droit de refus,
communiquer à l’employeur les motifs à l’appui de son refus. Cette exigence se justifie par le fait que
pour pouvoir examiner la situation appréhendée par l’employé, l’employeur doit être en mesure de
l’identifier. Cette exigence

[Page 45]

est indissociable au devoir de l’employé d’informer l’employeur de son intention d’exercer son droit de refus. Par exemple, un employé exerçant un droit de
refus en raison de manœuvres racistes et discriminatoires dans son milieu de travail, mais qui, pour des motifs de confidentialité et de vie privée, ne
136
mentionne aucun fait précis pour motiver son refus, contrevient au devoir d’information prévu à l’article 128(6) du C.c.t. . Dans cette même veine, le
refus d’une agente correctionnelle de prodiguer des soins à une détenue, sans avoir fait part de ses préoccupations à son employeur et d’avoir entamé une
discussion sur ses appréhensions constitue également une violation de l’article 128(6). Dans cette affaire, la CRTFP a déclaré que si la plaignante
s’était vraiment préoccupée de sa santé et de sa sécurité au travail, elle aurait fait part de ses inquiétudes à ses supérieurs hiérarchiques. En ayant omis de
137
le faire, le tribunal a conclu que la plaignante n’avait pas exercé son droit de refus .

2.2 Immunité des travailleurs exerçant un droit de refus


L’immunité dont bénéficie un employé d’une entreprise assujettie au C.c.t. et qui exerce un droit de
refus est prévue à l’article à l’article 147 C.c.t., lequel est libellé comme suit :

Interdiction générale à l’employeur – Il est interdit à l’employeur de congédier, suspendre,


mettre à pied ou rétrograder un employé ou de lui imposer une sanction pécuniaire ou
autre ou de refuser de lui verser la rémunération afférente à la période au cours de
laquelle il aurait travaillé s’il ne s’était pas prévalu d’un des droits prévus par la présente
partie, ou de prendre – ou menacer de prendre – des mesures disciplinaires contre lui
parce que :

a) Soit il a témoigné – ou est sur le point de le faire – dans une poursuite intentée ou
une enquête tenue sous le régime de la présente partie;

b) Soit il a fourni à une personne agissant dans l’exercice de fonctions attribuées par la
présente partie un renseignement relatif aux conditions de travail touchant sa santé ou
sa sécurité ou celles de ses compagnons de travail;
[Page 46]

c) Soit il a observé les dispositions de la présente partie ou cherché à les faire appliquer,
(Nos soulignements)

Selon l’article 123 du C.c.t., la Partie II du Code s’applique à tous les employés œuvrant dans une
138
organisation de juridiction fédérale, incluant les employés de l’État . Selon l’article 133(1) du C.c.t., le
Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) a juridiction exclusive pour traiter toute plainte d’un
139
employé qui allègue avoir fait l’objet de mesures contraires à l’article 147 . Par contre, l’article 240 de la
140
Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP)
atténue la portée de cet article. En effet,
selon cet article, les plaintes déposées pour la violation de l’article 147 sont à la fois traitées par le CCRI
141
et par la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (CRTEFP) .
L’article 240 de la LRTFP mentionne à cet effet que :

[...] la partie II du Code canadien du travail s’applique à la fonction publique et aux


personnes qui y sont employées comme si la fonction publique était une entreprise
fédérale visée par cette partie, sous réserve de ce qui suit :

a) En ce qui concerne la terminologie :

[...]

(ii) Conseil s’entend de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique,

[...]

(Nos soulignements)

À l’an 2000, le législateur a ajouté l’article 147.1(1), lequel prévoit qu’au terme d’une enquête
effectuée conformément à la

[Page 47]

procédure du C.c.t., un employé qui s’est prévalu d’un des articles de la Partie II peut faire l’objet de mesures disciplinaires s’il a délibérément exercé
142
ses droit d’une manière abusive . Par ailleurs, un employeur ne peut imposer de mesure disciplinaire tant que le processus d’enquête, incluant le
droit d’appel prévu au C.c.t., n’a pas été complété. Enfin, le droit de l’employeur d’imposer à un employé une mesure disciplinaire doit se justifier parce
143 e
que celui-ci a délibérément exercé ses droits de façon abusive. Dans l’affaire Court c. John Grant Haulage Ltd. , M Graham J. Clarke, vice-
président du CCRI, explique les changements générés par ce paragraphe et l’analyse effectuée par le Conseil depuis son introduction en 2000 en ces
mots :

[116] Par contre, le nouveau paragraphe 147.1(1) permet explicitement à l’employeur


de prendre des mesures disciplinaires même si la conduite de l’employé avait trait à
l’expression de préoccupations en matière de sécurité. Cependant, il y a un délai pour
la prise de telles mesures disciplinaires. De plus, l’employeur doit démontrer que
l’employé a délibérément exercé de façon abusive les droits importants que lui confère la
partie II du Code à cet égard.

[117] Le paragraphe 147.1(1) du Code accorde d’importantes garanties procédurales aux employés :
avant de pouvoir prendre des mesures disciplinaires à l’égard d’un employé qui a délibérément exercé
ses droits de façon abusive, l’employeur doit faire enquête et, le cas échéant, attendre la conclusion du
processus d’appel. Cette restriction garantit qu’il existera un dossier de preuve complet lorsque le
Conseil sera saisi de l’affaire.

[Page 48]

[118] En l’espèce, M. Court avait fait part de ses préoccupations en matière de


sécurité à JGH. Le Conseil a conclu que M. Court avait un motif raisonnable de croire
à l’existence d’un danger et qu’il bénéficiait donc des protections prévues à la partie II
du Code. Il est vrai que JGH avait entamé une enquête, mais elle a suspendu M. Court
quand elle a appris qu’il avait falsifié des documents.

[119] Selon le Conseil, si JGH voulait se fonder sur la falsification de documents pour
prendre des mesures disciplinaires à l’encontre de M. Court parce qu’il avait exercé
ses droits de façon abusive, le paragraphe 147.1(1) du Code obligeait d’abord JGH à
faire enquête. La falsification de documents clés pendant une enquête sur la sécurité
correspondrait au genre d’exercice abusif de droits envisagé au paragraphe 147.1(1)
du Code.

[120] Toutefois, comme elle a pris des mesures disciplinaires à l’encontre de M. Court avant la fin de
l’enquête exigée par le Code, JGH n’a pas respecté les exigences du paragraphe 147.1(1). Par
conséquent, JGH ne pouvait pas se prévaloir du droit de prendre des mesures
disciplinaires, même des questions de sécurité.

(Nos soulignements)

Selon cette même affaire, le CCRI associe les cas d’abus lorsque le droit de refus est utilisé à
d’autres fins que pour la santé et la sécurité au travail, tels que pour des motifs de relations de travail
144
tout comme pour l’article 30 alinéa 2 de la LSST. Il cite à cet effet l’affaire William Gallivan , où il y est
mentionné que :

L’employé doit se prévaloir judicieusement du droit que lui reconnaît l’article 82.1 de
refuser un travail et ne doit y recourir que pour des raisons de sécurité. Abuser de ce droit
en l’utilisant à d’autres fins, par exemple pour marquer des points dans la négociation collective, finira
à la longue par compromettre les objectifs visés par la Partie IV [maintenant partie II]
du Code. Dans une atmosphère de méfiance et d’hostilité, il est impossible d’accroître
la sécurité et d’améliorer l’hygiène au travail par le
[Page 49]

dialogue et la collaboration. Chaque fois que le refus d’exécuter un travail coïncidera


avec d’autres conflits en relations du travail, le Conseil se montrera particulièrement
145
minutieux dans l’examen de la question.

(Nos soulignements)

Encore comme pour l’article 30 de la LSST, l’article 147 du C.c.t. n’interdit pas à l’employeur de
sanctionner un travailleur qui a exercé un droit de refus qui ne lui est pas permis au sens des
paragraphes 128(2) et 128(4) du C.c.t. Rappelons-nous par ailleurs que l’article 128(2) doit être interprété
restrictivement puisqu’il s’agit d’une disposition d’exception.

CONCLUSION

Notre analyse jurisprudentielle nous a révélé qu’autant les tribunaux de juridiction provinciale et
146
fédérale ont rendu un nombre limité de décisions en matière de droit de refus , ce qui démontre qu’un
nombre important des droits des refus exercés en milieu de travail ne sont pas judiciarisés. Ils sont
appliqués en amont par les différents acteurs en milieu de travail tels que les comités de santé et de
sécurité au travail. Cette application préventive du droit de refus témoigne d’une bonne application du
droit en matière de santé et sécurité au travail. Nous constatons par ailleurs une judiciarisation
importante de ce droit en milieu carcéral par rapport aux autres milieux de travail.

D’autre part, notre analyse révèle assez bien les rapports sociaux en milieu carcéral entre
l’employeur et les travailleurs, ainsi qu’entre les travailleurs et les détenus en ce qui a trait aux
« perceptions de ce qui est dangereux et de ce qui ne l’est pas, de ce qui est raisonnable de ce qui ne
147
l’est pas, de ce qui est normal/habituel/ inévitable/tolérable/acceptable, etc. et de ce qui ne l’est pas » .
En revanche, en ce qui concerne les autres milieux de travail, il nous a été difficile de dégager une
quelconque tendance, autant en matière provinciale que fédérale, vu la disparité des décisions qui ont
été rendues.
[Page 50]

148
Du côté de la LSST, il appert qu’hormis pour les questions de santé mentale , l’ensemble des
décisions analysées ont été fondées sur des principes jurisprudentiels développés peu de temps après
149
l’entrée en vigueur de la Loi. D’ailleurs, dans l’affaire Casino du Lac Leamy , une des décisions les plus
citées par la CLP, la commissaire Marie Langlois a seulement repris des principes énoncés par la
commissaire Mathieu pour les appliquer aux faits de la cause.

Du côté fédéral, puisque les exigences substantives à son exercice sont déterminées par la
jurisprudence, en l’absence de décision rendue depuis les amendements de 2013, nous ne pouvons
déterminer comment ces changements ont été accueillis par les tribunaux. Par ailleurs, l’article 128(1) du
C.c.t. a été interprété d’une manière beaucoup plus large et libérale que son article équivalent du côté
provincial qui, pourtant, est libellé d’une manière très similaire. Il n’en demeure pas moins que
l’existence des conditions substantives du droit de refus au regard du droit fédéral s’avère toujours une
question de faits, dans un milieu de travail particulier et selon un contexte particulier.

Force nous est donc de conclure que la jurisprudence en matière de droit de refus est demeurée
stable.

Rappelons-nous que les lois en matière de santé et de sécurité au travail ont pour objet « de
150
prévenir les accidents et les maladies liés à l’occupation d’un emploi » ou de veiller à « l’élimination à
151
la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs » . Le
droit de refus constituant l’un de ces mécanismes, les dispositions y afférentes ont, selon nous, été

[Page 51]

libellées selon un vocabulaire général et interprétées d’une manière large et libérale pour permettre la réalisation de cet objet, et ce, bien qu’il s’agisse d’un
droit d’exception. L’application de ce droit protégé par les articles 30 de la LSST ou 147 du C.c.t., demeure encore et toujours une question de faits, dans
un milieu de travail particulier et selon un contexte particulier. Ceci expliquerait pourquoi la jurisprudence est demeurée stable depuis les 30 dernières
années.

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Jean-François GILBERT, « Dangers et risques selon la LSST : une question d’appréciation, dans Développements récents en droit de la santé
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[Page 52]

Katherine LIPPEL et Anne-Marie LAFLAMME, « Les droits et responsabilités des employeurs et des travailleurs dans un contexte de sous-traitance : enjeux
pour la prévention, l’indemnisation et le retour au travail », dans Développements récents en droit de la santé et sécurité au travail,
vol. 334, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 267-360.

Katherine LIPPEL, « L’interprétation libérale des lois sociales : une pratique révolue ? », dans Stéphane BEAULAC et Mathieu DEVINAT (dir),
Interpretatio non cessât : mélanges en l’honneur de / Essays in honour of Pierre-André Côté, Montréal, Éditions Yvon Blais,
2011, p. 201-232.

Gilles TRUDEAU, « Les refus d’exécuter un travail dangereux : aux confins du droit et des sciences sociales », (1986) 18 :2 Sociologie et sociétés 87-
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Marc RENAUD et Chantai ST-JACQUES, « Le droit de refus : cinq ans après : l’évolution d’un nouveau mode d’expression des risques », (1986) 18 :2
Sociologie et sociétés 99-112.

Marc RENAUD, Gilles TRUDEAU, Chantai ST-JACQUES, Louise DUBÉ, Le droit de refus : une révolution tranquille, Étude de la mise en
œuvre d’un nouveau droit, coll. Monographie 21, Montréal, École de relations industrielles, Université de Montréal, 1989, 329 p.

Notes de bas de page


*. Cet article a été rédigé en collaboration avec la Chaire de recherche du Canada en droit de la santé et de la sécurité au travail. L'auteur tient à remercier
e
M Katherine Lippel (LL.M.), titulaire de la Chaire, pour son aide et ses judicieux conseils à la rédaction de cet article. Nos remerciements vont également à
me
M Claire Moissan et M. Denis Béland pour leur assistance à la rédaction de cet article. Tous droits réservés ©.

1.
Marc RENAUD, Gilles TRUDEAU, Chantai ST-JACQUES et Louise DUBÉ, Le droit de refus : une révolution tranquille, Étude de la mise en
œuvre d'un nouveau droit, Montréal, coll. Monographie 21, École de relations industrielles, Université de Montréal, 1989, p. 9.

2.
Ibid. Voir aussi Luc CHAMBERLAND, « L'exercice du droit de refus en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail », (1984) 44:5 R.
du B. 939- 954; Gilles TRUDEAU, « Le refus d'exécuter un travail dangereux : aux confins du droit et des sciences sociales », (1986) 18:2 Sociologie et
sociétés 87-97; Marc RENAUD et Chantai ST-JACQUES, « Le droit de refus cinq ans après : l'expression d'un nouveau mode d'expression des risques »,
(1986) 18:2 Sociologie et sociétés 99-112.

3.
Trudel et FTQ, CLP, n» 208836-62-0305, 4 déc. 2003, SOQUIJ AZ-50209808, Suzanne Mathieu, par. 63; Casinodu Lac Leamy et Villeneuve,
CLP, n° 209750-07-0306, 27 mai 2004, SOQUIJ AZ-50254016, Marie Langlois, par. 61; Potuin et Ivaco inc. division Galuano, CLP, n» 138585-62B-
0005, 16 nov. 2000, SOQUIJ AZ-00304066, Marie Danielle Lampron, par. 51.

4.
Trudel et FTQ, CLP, n° 208836-62-0305, 4 déc. 2003, AZ-50209808, Suzanne Mathieu, par. 65.

5.
Ibid.

6.
Par ailleurs, l'article 11 de la LSST précise que « les personnes visées dans les paragraphes 1° et 2° de la définition du mot « travailleur » à l'article 1
jouissent des droits accordés au travailleur par les articles 9, 10 et 32 à 48 ».

7.
Voir Katherine LIPPEL et Anne-Marie LAFLAMME, « Les droits et responsabilités des employeurs et des travailleurs dans un contexte de sous-traitance :
enjeux pour la prévention, l'indemnisation et le retour au travail », dans Développements récents en droit de la santé et sécurité au travail,
vol. 334, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 267-360.

8.
Bénis et Hydro-Québec, CLP, n° 215277-71-0309, 14 juillet 2004, SOQUIJ AZ-50263210, Robert Langlois, par. 65; Syndicat des Métallos
(Local 9700) et Aluminerie de Bécancour inc., 2011 QCCLP 5078 (CanLII), par. 20.
9.
Syndicat des Métallos (Local 9700) et Aluminerie de Bécancour inc., 2011 QCCLP 5078 (CanLII), par. 26; SAPSCQ et Québec
(Ministère de la Sécurité publique), 2011 QCCLP 298 (CanLII), par. 37.
10.
L'article 27 de la LSST précise que : « Lorsque plusieurs travailleurs refusent d'exécuter un travail en raison d'un même danger, leurs cas peuvent être
examinés ensemble et faire l'objet d'une décision qui les vise tous ». Voir à cet effet les affaires Construction
Énergie Renouvelable et St-Onge,
2012 QCCLP 7248 (CanLII); Bénard et Mines Seleine inc., 2010 QCCLP 4517 (CanLII) et Experts Verts inc. et Fleurant, CLP,
n° 226519-63-0402, 10 décembre 2004, SOQUIJ AZ-50285790, Francine Mercure.

11.
L'article 2098 C.c.Q définit le contrat d'entreprise ou de service comme étant celui par lequel « une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le
prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un
prix que le client s'oblige à lui payer ». L'article 2099 C.c.Q. précise que : « L'entrepreneur ou le prestataire de services a le libre choix des moyens
d'exécution du contrat et il n'existe entre lui et le client aucun lien de subordination quant à son exécution ». (Nos soulignements).

Bel-Air, CLP, n°s 106261-63-9811, 107226-63-9811 et 109475-63-9901, 18 août 2000, SOQUIJ AZ-00302460, Diane
12.
Forget Chagnon et Marché
Beauregard, par. 299.

13.
Ibid.

14.
Supra, note 8.

15.
Ibid., par. 66.

16.
Ibid., par. 67.

17.
Centre hospitalier de St. Mary et Iracani, 2007 QCCLP 3971 (CanLII), par. 73.

18.
Jean-François GILBERT, « Dangers et risques selon la LSST : une question d'appréciation », dans Développements récents en droit de la
santé et de la sécurité au travail, Service de la formation permanente du Barreau du Québec, Montréal, Éditions Yvon Blais, 1992, p. 125-126.
19.
Supra, note 17, par. 74.

20.
SCFP (local 1983) et STCUM, CLP, n» 110010-71-9901, 24 novembre 1999, SOQUIJ AZ-99303499, Jean-Claude Danis, par. 26.

21.
Ibid.

22.
Construction Énergie Renouvelable et St-Onge, 2012 QCCLP 7248 (CanLII), par. 51; SAPSCQ et Québec (Ministère de la Sécurité
publique) (Détention), 2007 QCCLP 4912 (CanLII), par. 146.
23.
Casino du Lac Leamy et Villeneuve, CLP, 209750-07-0306, 27 mai 2004, SOQUIJ AZ-50254016, Marie Langlois.

24.
Affaire Trudel, supra, note 3.

25.
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 1500 et Hydro-Québec, [1993] T.T. 83, p. 122-123.

26.
SAPSCQ et Québec (Ministère de la Sécurité publique) (Détention), 2007 QCCLP 4912 (CanLII), par. 137.

27.
Ibid., par. 138. Voir aussi Proulx et Établissement de détention de Sherbrooke et Ministère de la sécurité publique, 2007
QCCLP 274 (CanLII), par. 75; Girard et Québec (Ville de), CLP, n° 169104-32-0109-5, 20 décembre 2004, SOQUIJ AZ-50287645, Guylaine
Tardif, par. 147 (révision rejetée, 19 octobre 2005, AZ-50339719, Jean-Marc Dubois, requête en rejet de la requête en révision judiciaire déclarée sans objet,
2006 QCCS 4773 (CanLII), requête en révision judiciaire rejetée, 2007 QCCS 5894 (CanLII)); Service de prévention des incendies
et Prézeau, CLP, n° 102837-73-9807, 5 août 1999, SOQUIJ AZ-99301802, Lina Crochetière.

28.
Comme il en fut le cas dans les affaires Girard et Québec (Ville de) (dans le cadre du refus d'un capitaine d'une caserne de pompiers avec des
effectifs insuffisants pour effectuer des sauvetages de manière sécuritaire) et Service de prévention des incendies et Prézeau (dans le cadre
d'une manœuvre d'entraînement d'hommes-araignée simulant le sauvetage d'une personne en détresse sur un escarpement du Mont-Royal, sans moyen de
communication adéquat), supra, note 27.

29.
SAPSCQ et Sylvestre, 2008 QCCLP 2710, par. 13.

30.
Supra, note 1, par. 300-318; voir aussi Perreault et Ville de Laval, 2009 QCCLP 1824 (CanLII), par. 46. (L'appréhension d'une altercation
avec un collègue de travail peut aussi constituer une crainte raisonnable de danger.).

31.
Ibid., par. 325.

32.
Ibid., par. 319.

33.
Sirois et Établissement
de détention de Rimouski, 2011 QCCLP 2328 (CanLII), par. 65; voir aussi SAPSCQ et Ministère de la
Sécurité publique (Détention), 2008 QCCLP 4406 (CanLII), par. 76 à 80; Léonard et Québec (Ministère de la Sécurité
publique), 2007 QCCLP 4175 (CanLII), par. 203; Proulx et Établissement de détention de Sherbrooke, 2007 QCCLP 274
(CanLII), par. 79; SAPSCQ et Québec (Ministère de la Sécurité publique), 2007 QCCLP 4912 (CanLII), par. 228; SAPSCQ et
Sécurité publique-Établissement de détention de Trois-Rivières, CLP, n° 274391-04-0510, 2 octobre 2006, SOQUIJ AZ-50393956, Alain
Vaillancourt, par. 16; SAPSCQ et Sécurité publique-Palais de justice Drummondville, CLP, n° 209715-05-0306, 17 novembre 2003, SOQUIJ
AZ50207179, Luce Boudreault, par. 69.

34.
Sirois et Établissement de détention de Rimouski, 2011 QCCLP 2328 (CanLII); voir aussi SAPSCQ et Sylvestre, 2008 QCCLP
2710. Dans cette affaire, la CLP a jugé que la présence de quatre agents des services correctionnels pour accompagner neuf prévenus au palais de justice
qui font face à des procédures judiciaires à la suite d'accusations criminelles, justifiait l'appréhension raisonnable d'un danger pour leur santé et leur sécurité
au travail. Parmi les neuf prévenus, il y avait une femme, deux frères accusés de meurtre, une personne impliquée dans le meurtre commis par les deux
frères mais qui agissait comme délateur dans le dossier, un prévenu provenant du secteur de la protection du centre de détention parce que vivant des
problèmes psychiatriques et quatre autres détenus sans problématique carcérale particulière. Le nombre d'agents par rapport au nombre de détenus étant
nettement insuffisant, la CLP a jugé que les ASC appréhendaient raisonnablement un danger pour leur santé et leur sécurité au travail.

35.
Ibid., par. 97.

(Ministère de la Sécurité publique), CLP, n°s 106488-71-9810 et 106492-61-9819, 23 août 1999, SOQUIJ AZ-99301953,
36.
Grall et Québec
Gilles Robichaud.

37.
Ibid., par. 12.

38.
Proulx et Établissement de détention de Sherbrooke et Ministère de la Sécurité publique, 2007 QCCLP 274 (CanLII).

39.
SAPSCQ et Sylvestre, 2008 QCCLP 2710.

40.
SAPSCQ (Gérald Minville) et Sécurité
publique Établissement de détention de Trois-Rivières, CLP, n° 274391-04-0510, 2 octobre 2006,
SOQUIJ AZ-50393956, Alain Vaillancourt; SAPSCQ et Sécurité publique Palais de justice de Drummondville, CLP, n° 209715-05-0306, 17
novembre 2003, SOQUIJ AZ50207179, Luce Boudreault.

41.
Supra, note 26.

42.
Sur le même sujet voir aussi SAPSCQ et Ministère de la Sécurité publique (Détention), 2008 QCCLP 4406 (CanLII), par. 71 : « Vu
le contexte dans lequel les travailleurs sont appelés à travailler, lors d'intervention auprès de détenus incarcérés, il va de soi que le caractère préventif revêt
une importance particulière » et Rahhali et Québec (Ministère de la Sécurité publique), 2008 QCCLP 5800 (CanLII), par. 62-63 : « Il
appert que durant les deux semaines précédant le conflit du 14 février 2007, on a retrouvé une trentaine d'armes artisanales chez les prévenus du secteur C.
Ces armes sont constituées de pics fabriqués de divers matériaux. Bien que la preuve révèle que les armes sont généralement conservées par les prévenus
en vue de se défendre, il n'est pas exclu que celles-ci soient utilisées envers les agents des services correctionnels. De plus, la situation comportait une
certaine tension puisqu'on avait demandé aux agents de fournir les noms de cinq prévenus qui posaient problème. Il s'agit ici d'éléments objectifs corroborant
l'explication qui veut que la tension était grande lorsque survient le conflit du 14 février 2007. Devant ce fait, on peut aisément conclure que les risques
d'agression sont présents le 15 février 2007. »
43.
Imbeault et Établissement
de détention de New Carlisle, 2015 QCCLP 1970 (CanLII), par. 56; Lavigne et Détention Montréal,
2010 QCCLP 7861 (CanLII), par. 168.

44.
Ibid.

45.
Ibid., par. 189.

46.
Institut Philippe-Pinel de Montréal et Fiola, CLP, n° 112631-73-9903, 2 février 2000, SOQUIJ AZ99304551, Alain Archambault.

47.
Léonard et Ministère de la Sécurité publique et SAPSCQ, 2007 QCCLP 4175 (CanLII).

48.
Supra, note 46.

49.
Service de prévention des incendies et Prézeau, CLP, n° 102837-73-9807, 5 août 1999, SOQUIJ, AZ99301802, Lina Crochetière.

50.
Centre Sheraton et Beauregard, CLP, n° 189567-71-0208, 10 mars 2004, SOQUIJ AZ-50226009, Thérèse Giroux.

51.
Ch. S-2.1, r. 13, art. 122.

52.
Experts Verts inc. et Fleurant, CLP, n° 226519-63-0402, 10 décembre 2004, SOQUIJ AZ-50285790, Francine Mercure.

53. s
Bédard et Brossard (Ville de), CLP, n° 112407-62-9903 et 112409-62-9903, 2 septembre 1999, SOQUIJ AZ-99302237, Yves Tardif.

54.
Ibid., par. 48.

55.
Gendron et Glencore Canada Corporation Fonderie Home, 2015 QCCLP 3030 (CanLII), par. 39 : « la défectuosité de l'accoudoir
d'une chargeuse ne peut constituer une crainte raisonnable d'une lésion musculo-squelettique en manipulant les manettes »; Mario
et al. Régis, et
Siemens Canada ltée (Diu. Drummond), 2010 QCCLP 7275 (CanLII), par. 27 : « L'inconfort occasionné par les reflets de la protection
latérale des lunettes ne justifie donc pas un droit de refus »; Gaumond et Ministère de la Sécurité publique, (Santé sécurité) 2008
QCCLP 3263 (CanLII), par. 54 : « occuper un emploi d'agent préposé au dôme qui implique la manipulation d'armes à feu sans la formation appropriée
ne constitue pas une menace raisonnable de danger »; Casino du Lac Leamy et Villeneuve, CLP, n° 209750-07-0306, 27 mai 2004, SOQUIJ AZ-
50254016, Marie Langlois, par. 79 : « bien que, selon littérature fournie, l'exposition à la fumée secondaire du tabac présente un risque d'effet néfaste sur la
santé "rien dans la preuve ne démontre que ce risque appréhendé s'actualisera de façon probable pour pouvoir constituer un danger au sens de l'article 12
de la LSST" »; Gagnon et Urgence-Santé, CLP, n° 3274065-1008, 24 août 2000, SOQUIJ AZ-00302540, Ginette Godin, par. 18 : « le fait que le crochet
servant à retenir une civière dans une ambulance ne soit pas solide ne constitue pas une crainte raisonnable de danger pour un ambulancier » (requête en
révision judiciaire rejetée, 2009 QCCS 2869 (CanLII)); St-Pierre et Premier horticulture ltée, CLP, n° 115787-01A-9904, 13 avril 2000,
SOQUIJ AZ-00300197, Michel Renaud, par. 22 : « le travailleur ne pouvait exercer un droit de refus pour justifier du réarrangement de son poste de travail ou
pour exiger de l'employeur un local plus fonctionnel ou moins bruyant ».

TG inc., 2007 QCCLP 1059 (CanLII); voir aussi Larivière et Commonwealth Plywood Ltd, CLP, n°s
56.
Lafontaine et Waterville
173763-07-0111-2 et 173763-07-0111, 12 avril 2002, SOQUIJ AZ-02300163, Marie Langlois et Lagarde et Corporation Urgence-santé région est,
s
CLP, n° 101759-60C-9806 et 101774-60C-9805, 20 octobre 1998, SOQUIJ AZ-98301544, Margaret Cuddihy.

57.
Supra, note 3.

58.
Ibid., par. 106; voir aussi l'affaire Henrichon et Ville de Montréal, CLP, n° 189105-62-0208, 26 mars 2003, SOQUIJ, AZ-50171247, Louise Bouclier.

59.
Marc RENAUD et Chantai ST-JACQUES, « Le droit de refus : cinq ans après : l'évolution d'un nouveau mode d'expression des risques», (1986) 18:2
Sociologie et sociétés 103.

60.
Supra, note 38, par. 284.

61.
Supra, note 56, par. 85.
62.
Bootlegger c. Couture, D.T.E. 84T-171 (C.S.); voir aussi Beaudoin et Domtar, C.A.L.R, 17 septembre 1993, SOQUIJ AZ-4999017341, Jean-Guy
Roy.

63.
Supra, note 56, par. 81.

64. s
Ibid., par. 83. Ce même principe a été repris dans les affaires hagarde et Corporation
Urgence-santé région est, CLP, n° 101759-60C-9806
s
et 101774-60C-9805, 20 octobre 1998, SOQUIJ AZ-98301544, Margaret Cuddihy, p. 8 et Larivière et Commonwealth Plywood Ltd, CLP, n°
173763-07-0111-2 et 173763-07-0111, 12 avril 2002, SOQUIJ AZ-02300163, Marie Langlois, par. 26.

65.
Ibid., p. 12.

66.
Ibid.

67.
L'article 17 mentionne que : « Si le travailleur persiste dans son refus d'exécuter le travail alors que le supérieur immédiat ou, le cas échéant, l'employeur
ou son représentant, et le représentant à la prévention ou la personne qui l'a remplacé sont d'avis qu'il n'existe pas de danger justifiant ce refus ou que ce
refus repose sur
des motifs qui sont acceptables dans le cas particulier du travailleur mais ne justifient pas un autre travailleur
de refuser d'exécuter le travail, l'employeur peut, malgré l'article 14, faire exécuter le travail par un autre travailleur. Ce travailleur peut accepter de le
faire après avoir été informé que le droit de refus a été exercé et des motifs pour lesquels il a été exercé ». (Nos soulignements).

68.
L'alinéa 2 de cet article précise : « Si, de l'avis de l'inspecteur, le refus de travailler repose sur des motifs qui sont acceptables
dans le cas particulier du travailleur mais ne justifient pas un autre travailleur de refuser d'exécuter le travail, l'employeur peut,
malgré l'article 14, faire exécuter le travail par un autre travailleur qui peut accepter de le faire après avoir été informé du fait que le droit de refus a été
exercé et des motifs pour lesquels il a été exercé ». (Nos soulignements).

69.
Supra, note 62, p. 14.

70.
Ibid.

71.
Supra, note 56.

72.
Tremblay et Noranda Inc. (Division C.C.R.), CALP, n° 62-00101-8607 (00626-62-8607), 3 septembre 1987, SOQUIJ AZ-87156206, Susan Blais.
73.
Ibid., p. 566.

74.
Centre d'accueil Émilie-Gamelin et Thivierge, CALP, n° 01160-60-8610, 13 mai 1987, SOQUIJ AZ87156184, Laurent McCutcheon, à la p. 334 : « si la
condition personnelle d'un travailleur ou d'une travailleuse est le seul motif à l'origine d'un refus d'exécuter un travail, ce motif ne saurait donner ouverture à
l'exercice d'un droit de refus ». Requête en évocation rejetée, [1988] CALP 195 (C. S.).

75.
Mercier et Coopérative fédérée du Québec, CALP 32252-04-9111, 7 août 1992, SOQUIJ AZ-4999012782, Jean-Guy Roy.

de Montréal, CLP, n°s 157686-71-0103 et 169860-71-0110, 22 janvier 2002 (décision rectifiée le 25 février 2002), SOQUIJ AZ-
76.
Henrichon et Ville
01306616, Bertrand Roy; voir aussi Krasteu et Coopérative d'habitation Village Cloverdale, 2013 QCCLP 6979 (CanLII), par. 71 « la
simple présence de vertiges ne saurait constituer un motif de droit de refus en l'absence de conditions particulières liées à l'exercice du
travail qui crée un danger. Par contre, le fait de travailler à une hauteur de trois étages sur une plateforme élévatrice sans être attaché en étant affecté de
vertiges représente une situation plus à risque ».

77.
Girard et Québec (Ville de), supra, note 27, par. 133 : « À l'évidence, le travail de pompier est dangereux en lui-même. Cependant, le danger est
augmenté lorsque le pompier ne dispose pas de l'équipement requis et que l'organisation du travail n'est pas sécuritaire ».

78.
Potvin et Ivaco
inc. division Galvano, CLP, n° 138585-62B-005, 16 novembre 2000, SOQUIJ AZ-00304066, Marie-Danielle Lampron, par. 55;
Villeneuve c. Gouvernement du Québec, OS. Montréal, 50005008894-832, 1984-01-24, D.T.E. n° 84T-171.

79.
Bernard CLICHE, Serge LAFONTAINE et Richard MAILHOT, Traité de droit de la santé et de la sécurité au travail : le régime juridique
de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, Montréal, Éditions Yvon Blais, 1993, p. 220-221; Institut
Philippe-Pinel de Montréal et Comtois, 2012 QCCLP 4254 (CanLII), par. 287; Proulx et Établissement de détention de
Sherbrooke, 2007 QCCLP 274 (CanLII), par. 78.

80.
Proulx et Établissement de détention de Sherbrooke, 2007 QCCLP 274 (CanLII); voir aussi Sirois et Établissement de
détention de Rimouski, par. 96-97 : « [...] selon les balises de l'affaire Proulx et Établissement de détention de Sherbrooke déjà citée, les
conditions qui prévalaient le 27 mai 2008 ne peuvent être considérées comme des conditions normales de travail, les règles de l'art n'étant pas respectées.
En effet, il y avait manquement au principe du surnombre et des lacunes au regard de la communication à l'externe en cas de problèmes. »; SAPSCQ et
Québec (Ministère de la Sécurité publique) (Détention), par. 263-264 : « [263] Comme le travail ne s'effectue pas dans des conditions
respectant les règles de l'art et les normes même de l'employeur et que toutes les mesures de sécurité généralement reconnues n'ont pas été prises pour
faire face à une telle situation notamment par l'ajout de personnel, on peut conclure que les conditions qui prévalaient le 9 novembre 2005 ne peuvent être
considérées comme des conditions normales de travail. [264] Au surplus, et comme l'extrait de doctrine précité le rappelle, il ne suffit pas que les conditions
justifiant le droit de refus aient déjà existé dans le passé pour qu'on puisse conclure à des conditions normales. »; voir aussi Institut Philippe-Pinel de
Montréal et Comtois, par. 287-295.

81.
Gagnon et Ministère Sécurité publique, 2011 QCCLP 1537 (CanLII).

82.
Rahhali et Québec (Ministère de la Sécurité publique), 2008 QCCLP 5800 (CanLII), par. 67.
83.
Lavigne et Détention, 2010 QCCLP 7861 (CanLII), par. 193.

84.
Supra, note 47, par. 207; voir aussi SAPSCQ et Sylvestre, 2008 QCCLP 2710, par. 50 : « En somme, le tribunal estime que le 22 août 2005, les
travailleurs ne faisaient pas seulement face à des risques inhérents à leurs tâches. Leur clientèle à accompagner était particulière. De plus, la surveillance
des détenus par caméras était déficiente au palais de justice. La porte de l'ascenseur amenant les détenus dans les salles d'audience était dysfonctionnelle
compte tenu de la clientèle qui l'utilisait. Enfin, les travailleurs étaient privés de moyens de communication adéquats ».

85.
Ibid.

86.
Centre Le Gouvernail et Rancourt, CLP, n° 144195-32-0008, 12 décembre 2001, SOQUIJ AZ-01305523, Lise Langlois.

87.
CSSS du Nord de Lanaudière et Chartier, 2011 QCCLP 6060 (CanLII).

88.
Supra, note 12, par. 324.

89.
Supra, note 26.

90. s
Grall et Québec (Ministère de la Sécurité publique), CLP, n° 106488-71-9810 et 106492-61-9819, 23 août 1999, SOQUIJ AZ-99301953,
Gilles Robichaud.

91.
Supra, note 26, par. 251 à 253.

92.
Supra, note 53, par. 14.

93.
Supra, note 36, par. 39.

94.
L'article 15 mentionne que : « Lorsqu'un travailleur refuse d'exécuter un travail, il doit aussitôt en aviser son supérieur immédiat, l'employeur ou un
représentant de ce dernier; si aucune de ces personnes n'est présente au lieu de travail, le travailleur doit utiliser les moyens raisonnables pour que l'une
d'entre elles soit avisée sans délai ».

(Ville de), 2009 QCCLP 1824 (CanLII), par. 52; St-Denis et Corporation Urgences-Santé, CLP n°s 240667-71-
95.
Perreault et Laval
0407 et 240815-62-0407, 23 mars 2006, Lucie Landriault, SOQUIJ AZ-50364631, par. 87 (Requête en révision judiciaire rejetée, 2006 QCCS 5333
(CanLII)).

QCCLP 6351 (CanLII), par. 30; St-Denis et Corporation Urgences-Santé, CLP n°s
96.
Salain-Kurppa et Agence de personnel Yott, 2013
240667-71-0407 et 240815-62-0407, 23 mars 2006, Lucie Landriault, SOQUIJ AZ 50364631, par. 87.

97.
Linda BERNIER, « L'insubordination », dans Les mesures disciplinaires et non disciplinaires dans les rapports collectifs du travail,
2
e éd., Montréal, Éditions Yvon Blais, 2009, p. 11/374.

98.
Ibid.

99.
Katherine LIPPEL, « L'interprétation libérale des lois sociales : une pratique révolue ? », dans Stéphane BEAULAC et Mathieu DEVINAT (dir.),
Interpretatio non cessât : mélanges en l'honneur de / Essays in honour of Pierre-André Côté, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2011, p.
215.

100.
« Le travailleur ne peut cependant exercer le droit que lui reconnaît l'article 12 si le refus d'exécuter ce travail met en péril immédiat la vie, la santé, la
sécurité ou l'intégrité physique d'une autre personne ou si les conditions d'exécution de ce travail sont normales dans le genre de travail qu'il exerce. »

101.
Ibid.

102.
Arcelormittal infrastructure Canada S.E.N.C. et Archambault, 2015 QCCLP 1043 (CanLII), par. 414; voir aussi Trudel et FTQ, CLP, n»
208836-62-0305, 4 décembre 2003, SOQUIJ AZ-50209808, Suzanne Mathieu, par. 106; Henrichon et Ville de Montréal, CLP, n» 189105-62-0208, 26
mars 2003, SOQUIJ AZ-50171247, Louise Boucher, par. 28.

103.
Ibid.

104.
« La décision de l'inspecteur peut faire l'objet d'une demande de révision et d'une contestation devant la Commission des lésions professionnelles
conformément aux articles 191.1 à 193, la décision de l'inspecteur a effet immédiatement, malgré une demande de révision. »
105.
Loi modifiant le Code canadien du travail, S.C. 1977-78, ch. 27, art. 27 et s.

106.
Isinger et TSI Terminal Systems Inc., 2013 CCRI 688 (CanLII), par. 52.
107.
Saumier et Conseil du Trésor (Gendarmerie royale du Canada), 2009 CAF 51 (CanLII), par. 43.
108.
À l'article 3(1) C.c.t. le terme « employé » est défini comme une « personne travaillant pour un employeur; y sont assimilés les entrepreneurs
dépendants et les agents de police privés. Sont exclus du champ d'application de la présente définition les personnes occupant un poste de direction ou un
poste de confiance comportant l'accès à des renseignements confidentiels en matière de relations de travail » (« employée »).

109.
Michel COUTU, Julie BOURGAULT, Annick DESJARDINS, Droit fédéral du travail, coll. Droit fondamental du travail, Montréal, Éditions Yvon Blais,
2011, p. 437.

110.
L'article 3(1) du C.c.t. (Partie I) définit le mot « employé » comme une « personne travaillant pour un employeur; y sont assimilés les entrepreneurs
dépendants et les agents de police privés. Sont exclus du champ d'application de la présente définition les personnes occupant un poste de direction ou un
poste de confiance comportant l'accès à des renseignements confidentiels en matière de relations de travail ».

111.
Supra, note 107.

112.
Anderson et Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, (2001) vol. 3-01, décision n° 106, (CCRT 21276-C), par. 14; voir aussi
l'affaire Pratt (David) (1988), 73 di 218; et 1 CLRBR (2d) 310, p. 223-224 : « Si l'on se souvient que la Partie IV du Code utilisait l'expression « danger
imminent » avant l'adoption de la définition actuelle de danger en 1984, il est évident – d'après les mots soigneusement choisis de la définition – que le
législateur a voulu préserver dans la notion de danger le caractère immédiat de celui-ci. C'est dans cette acception du terme qu'il faut comprendre le droit de
refuser de travailler qu'accordent à l'employé les articles 85 et 86, ainsi que les pouvoirs conférés par le paragraphe 102(2) à un agent de sécurité de donner
des instructions dans des situations dangereuses. »; l'affaire Lambert (Gilles) (1989), 78 di 69 (CCRT n° 748) à la p. 79; Scott et Montani (Scott
C.) (1994), 95 di 157 (CCRT n° 1089) (CCRT n° 686), p. 165.
113.
Ibid.
114.
Ibid., par. 16.

115.
Supra, note 106.

116.
Cette fonction n'existe plus depuis le 31 octobre 2014 (Gouvernement du Canada, ministère des Finances, « Projet de loi C-4-Loi n" 2 sur le plan
d'action économique de 2013, partie 3 – Diverses mesures : section 5 – Code canadien du travail », en ligne : www.fin.gc.ca/pub/c4/7-
fra.asp>; Décret fixant au 31 octobre 2014 la date d'entrée en vigueur de la section 5 de la partie 3 de la loi, C.P. 2014-13,
TR/2014-52 (Gaz. Can. II). L'article 140(1) se lit désormais comme suit : « Le ministre peut, aux conditions et selon les modalités qu'il
précise, déléguer à toute personne compétente ou toute catégorie de personnes compétentes les attributions qu'il est
autorisé à exercer pour l'application de la présente partie. » (Nos soulignements).
117.
Art. 129 C.c.t.

118.
Laroche et Canada (Procureur général), 2011 CF 1454 (CanLII), par. 32.

119.
Société canadienne des postes et Pollard, 2008 CAF 305 (CanLII), par. 16.
120.
DP World (Canada) Inc. et Syndicat des débardeurs et magasiniers, section locale 500, 2013 TSSTC, par. 209 à 218.
121.
2003 CF 1158 (CanLII), par. 59.

122.
L.C. 2013, ch. 40, art. 176.
123.
Gouvernement du Canada, ministère des Finances, « Projet de loi C-4 —
Loi n° 2 sur le plan d'action économique de 2013, partie 3 –
Diverses mesures : section 5 – Code canadien du travail », en ligne : www.fin.gc.ca/pub/c4/7-fra.asp>.
124.
Supra, note 107, par. 50.

125.
Court c. John Grant Haulage Ltd., 2010 CCRI 498 (CanLII), par. 107.

126.
Danielle Caponi, 2002 CCRI 177 (CanLII), par. 22.
127.
Ibid., par. 79-84.

128.
Ibid., par. 83 : « [...] elles ont été tranchées à une époque où le Code ne contenait pas les garanties procédurales prévues au paragraphe 147.1(1), qui
doivent être exécutées avant qu'un employeur puisse imposer des mesures disciplinaires à un employé pour avoir délibérément exercé le droit de refus de
travailler de façon abusive. »

129.
Ibid., par. 79.

130.
Alexander et Conseil du Trésor (ministère de la Santé), 2007 CRTFP 110 (CanLII), par. 33

131.
Ibid., par. 34; voir aussi Court c. John
Grant Haulage Ltd., 2010 CCRI 498 (CanLII), par. 102; Leary c. Conseil du Trésor, 2005
CRTFP 35 (CanLII), par. 128; Boivin c. Agence du revenu du Canada, 2003 CRTFP 94 (CanLII), par. 128; Leary c. Conseil du
Trésor, 2005 CRTFP 35, par. 128; Jocelyn Simon c. Société canadienne des postes, (1993) 91 di 1, p. 10-11; Kucher c. Compagnie des
chemins de fer nationaux du Canada, (1996) 102 di 121, décision du CCRT n° 1180, par. 14 « [...] La notion de motif raisonnable comporte et un
élément objectif et un élément subjectif (Francine Tremblay et al. (1985), 59 di 163 (CCRT n° 497)), puisque le Code ne confère pas un droit de refus
uniquement parce que l'on « croit sincèrement » qu'il y a danger. Le danger doit être grave et immédiat et ne pas seulement découler du stress que l'on
pourrait ressentir à la perspective de rapports avec des collègues de travail (voir Antonio Almeida (1990), 82 di 10 (CCRT n° 819)). »

132.
Rathwell et Air Canada, 2011 TSST 15, par. 76-77; voir aussi Canada
(Service correctionnel) et Brown et Kunkel, 2013 TSST 20, par. 104 et
Verville et Canada (Service correctionnel), 2004 CF 767 (CanLII), par. 55 (la juge Gauthier déclare « que dirait-on qu'il entre dans les
conditions normales d'emploi d'un gardien de sécurité de transporter de l'argent à partir d'un établissement bancaire si des modifications étaient apportées à
son emploi de telle sorte que cette tâche doive être exécutée sans arme à feu, sans compagnon et dans un véhicule non blindé ? »).
133.
Canada et Éric Vandal, 2010 CF 87 (CanLII), par. 35 (au par. 36, le juge Beaudry ajoute que cette « approche est non seulement raisonnable,
mais correcte. »); voir aussi Canada et Vandal,2008 CF 1116 (CanLII), décision confirmée par la Cour d'appel fédérale, 2009 CAF 179
(CanLII).
134.
Supra, note 125, par. 60.

135.
Alexander et Conseil
du Trésor (ministère de la Santé), 2007 CRTFP 110 (CanLII), par. 40; voir aussi Grolla et Société
canadienne des postes, 2011 CCRI 592 (CanLII), par. 67 et 78; Green c. Air Niagara Express Inc., (1992) 90 di 186 (C.C.R.T).

136.
Ibid., par. 49.

137.
Lewchuk c. Conseil du trésor (Solliciteur général du Canada – Service correctionnel), 2001 CRTFP 76, par. 98.
138.
Sous réserve des exceptions prévues dans ce même article.

139.
L'article
133(1) mentionne que « l'employé – ou la personne qu'il désigne à cette fin – peut, sous réserve du paragraphe (3), présenter une plainte
écrite au Conseil au motif que son employeur a pris à son endroit, des mesures contraires à l'article 147 ».

140.
L.C. 2003, ch. 22, art. 2.

141.
Voir aussi l'affaire Mike Isinger et TSI Terminal Systems Inc., supra, note 106, par. 60.
142.
147.1 (1) « À l'issue des processus d'enquête et d'appel prévus aux articles 128 et 129, l'employeur peut prendre des mesures disciplinaires à
l'égard de l'employé qui s'est prévalu des droits prévus à ces articles s'il peut prouver que celui-ci a délibérément exercé ces droits de façon abusive.

(2) L'employeur doit fournir à l'employé, dans les quinze jours ouvrables suivant une demande à cet effet, les motifs des mesures prises à son égard. »

143.
Supra, note 125; voir aussi Isinger et TSI Terminal Systems Inc., supra, note 106, par. 83 « Le Conseil doit faire preuve de prudence lorsqu'il
fait référence aux affaires du CCRT Bien qu'elles tiennent compte de la question des « motifs raisonnables », elles ont été tranchées à une époque où le
Code ne contenait pas les garanties procédurales prévues au paragraphe 147.1(1), qui doivent être exécutées avant qu'un employeur
puisse imposer des mesures disciplinaires à un employé pour avoir délibérément exercé le droit de refus de travailler de façon abusive. » (Nos
soulignements).

144.
Ibid., par. 101; voir aussi Isinger et TSI Terminal Systems Inc., supra, note 106, par. 91 : « Le droit de refus de travailler n'est pas un
mécanisme d'appel permettant de régler les frustrations découlant du régime de conformité du Code. »

145.
(1981) 45 di 180; et [1982] 1 Can LRBR 241 (CCRT n» 332), p. 189 et 248.

146.
Nous avons recensé 86 décisions pertinentes sur le droit de refus avec le moteur de recherche SOQUIJ pour le droit provincial et une trentaine avec le
moteur de recherche CAIJ pour le droit fédéral.

147.
Supra, note 3.

148.
Jusqu'en 2000, seules deux décisions avaient été rendues sur le droit de refus en matière de santé mentale, soit l'affaire Richard et Ministère du
revenu, CALP 03051-60-8705, 29 juin 1988, Laurent McCutcheon et l'affaire Imbeault et Collège de Maisonneuve, CALP, n» 47510-60-9301, 20
décembre 1994, SOQUIJ AZ-95156052, Monique Billard. Selon cette dernière affaire, le droit de refus ne pouvait être exercé pour des questions de santé
mentale. Depuis l'affaire Forget Chagnon et Marché Bel-Air inc. (supra, note 21), la CLP estime que « le terme commun « santé » inclut
nécessairement la santé mentale, s'appuyant sur les définitions du terme « santé » de dictionnaires médicaux reconnus, sur les principes d'interprétation des
lois qui obligent à analyser les dispositions législatives selon un principe général de cohérence de la loi et sur le fait que le législateur n'a pas précisé que les
dangers dans l'exécution du travail ne concernaient que les dangers physiques ».

149.
Supra, note 23.
150.
Art. 122.1 du C.c.t.
151.
Art. 2 LSST.

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