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n°24 SEPTEMBRE 2019

par Camille Vanier, chargée d’études

Le non déplacement des victimes


auprès des autorités suite
à des violences sexuelles
L’enquête « Cadre de vie et sécurité » (CVS) permet d’estimer propositions n’étant pas exclusives, les e nquêtés avaient la
qu’en moyenne, chaque année, 235 000 personnes âgées possibilité de citer autant de raisons qu’ils le souhaitaient.
Le non déplacement des victimes auprès des autorités
de 18 à 76 ans ont été victimes de violences sexuelles1
entre 2011 suite
et 20172 à (soitdes
0,5 % violences
de la population). sexuelles
Parmi La raison majoritairement évoquée par les victimes de vio-
ces victimes, 78 % ont expliqué dans l’enquête ne paspar s’être lences
Camille sexuelles
Vanier, est que,d’études
chargée selon elles « cela n’aurait servi à
déplacées à la police ou à la gendarmerie pour déclarer rien ». En effet, 72 % des victimes qui ne sont pas allées à la
les faits, 16 % ont dit s’être déplacées et 6 % n’ont pas don- police ou la gendarmerie ont mentionné ce motif [].
’enquête «néCadre de vie
de réponse à ceet sécurité
sujet [Œ]. » (CVS) permet d’estimer qu’en moyenne, chaque
nnée, 235 000 personnes âgées de 18 à 76 ans ont été victimes de %violences
Dans 69 des cas, les victimes1 ont préféré trouver une
sexuelles
2
ntre 2011 et 2017 (soit 0,5 % de la population). Parmi ces autre victimes,
solution78et % ont
dans un expliqué
peu plus de la moitié des cas, elles
« Cela
ans l’enquête n’aurait
ne pas s’être servi
déplacéesà rien
à la»police ou à la gendarmerie
ont précisé nepour déclarer
pas avoir lesles faits subis pour éviter
déclaré
aits, 16 %Les
ontenquêtés
dit s’être déplacées et 6 % n’ont pas donné de réponse à ce sujet [1].
victimes qui ont déclaré ne pas être allés à la des épreuves supplémentaires (56 %).
police ou à la gendarmerie sont invités à préciser pourquoi
parmi les raisons proposées dans le questionnaire3. Ces
1. Parts des victimes s’étant déplacées ou non, à la police ou à la
gendarmerie pour déclarer les faits subis
 Parts des victimes s’étant déplacées ou non, à la police ou à la gendarmerie pour déclarer les faits subis

Déplacement
Non 16 %
déplacement
Non renseigné
78 %
6%

Source : Enquêtes « Cadre de vie et sécurité », Insee-ONDRP-SSMSI, 2012-2018.


Champ : Personnes ayant déclaré avoir été victimes de violences sexuelles au cours des deux années
précédant l’enquête, âgées de 18 à 76 ans et résidant en France métropolitaine.

(1)Que les violences aient été commises par une personne habitant ou non avec elles au moment de l’enquête. Pour plus d’informations, voir Source et Définitions.
(2)Jusqu’à l’enquête CVS 2016 incluse, seuls les enquêtés francophones étaient interrogés de façon détaillée sur les faits de violences sexuelles subies. Notre population d’étude est donc
ource : Enquêtes « Cadre
composée de vie
de victimes et sécurité
francophones et non », Insee-ONDRP-SSMSI,
francophones pour les enquêtes 20172012-2018.
et 2018 et de victimes uniquement francophones pour les enquêtes 2012-2016.
(3)Les raisons proposées sont : « pour éviter que cela se sache », « parce que vous préférez trouver une autre solution », « par peur des représailles, d’une vengeance », « parce que cela
hamp : Personnes
n’aurait ayant
servi à riendéclaré avoir
», « parce que été
ce n’était pas victimes
grave », « pourde
éviterviolences sexuelles au
des épreuves supplémentaires cours confrontations)
(témoignage, des deux». années
récédant l’enquête, âgées de 18 à 76 ans et résidant en France métropolitaine.
Dans 69 % des cas, les victimes ont préféré trouver une autre solution et dans un peu
plus de la moitié des cas, elles ont précisé ne pas avoir déclaré les faits subis pour éviter
des épreuves supplémentaires (56 %).

 Raisons évoquées
2. Raisons par les
évoquées
autorités
aux autorités
victimes
par pourpour
les victimes expliquer leur non
expliquer leur déplacement
non déplacement aux SOURCE
100%
ET DÉFINITIONS

80%
72 %
69 % Éléments méthodologiques
60% 56 % Les données proviennent de l’enquête
« Cadre de vie et sécurité », menée
44 % 43 %
conjointement par l’Insee et l’ONDRP
40% 35 %
chaque année depuis 2007, et avec
le SSMSI depuis 2014. Afin de réa-
20%
liser des analyses plus précises, les
données des enquêtes de 2012 à
0%
"Cela n'aurait "Préférer trouver "Éviter des "Éviter que cela "Ce n'était pas "Par peur des
2018 ont été compilées. Sauf men-
servi à rien" une autre
solution"
épreuves
supplémentaires"
se sache" assez grave" représailles,
d'une vengeance"
tion contraire, les différences présen-
tées lors des comparaisons sont signi-
Source : Enquêtes « Cadre de vie et sécurité », Insee-ONDRP-SSMSI, 2012-2018.
Source : Enquêtes « Cadre de vie et sécurité », Insee-ONDRP-SSMSI, 2012-2018.
Champ : Personnes ayant déclaré avoir subi des violences sexuelles au cours des deux années précédant l’enquête, ne
ficatives au seuil de 1 %.
Champ
s’étant pas :déplacées
Personnes
à laayant
policedéclaré avoir subi des
ou à la gendarmerie pourviolences
déclarer sexuelles au cours
les faits, âgées de 18des
à 76deux années
ans et précédant
résidant en France
l’enquête, ne s’étant pas déplacées à la police ou à la gendarmerie pour déclarer les faits, âgées de 18 à 76 ans et
métropolitaine.
résidant en France métropolitaine.
Note de lecture : 72 % des victimes de violences sexuelles ne s’étant pas déplacées à la police ou à la gendarmerie pour
Note de lecture : 72 % des victimes de violences sexuelles ne s’étant pas déplacées à la police ou à la gendarmerie
Violences sexuelles
déclarer les faits estiment
pour déclarer que « cela
les faits estiment n’aurait
que « celaservi à rien
n’aurait ». à rien ».
servi
Les violences sexuelles au sens de
l’enquête CVS regroupent les attou-
Les
Lesvictimes
victimes de de
d’une vengeance
viol,viol, plus réticentes
plus réticentes par peur despar peur ou
représailles chements et les rapports sexuels non
désirés, qu’ils aient été imposés ou
des représailles
La proportion oudéclaré
de victimes ayant d’une avoir vengeance
subi un viol qui précisent s’être déplacées à
la police ou à la gendarmerie n’est pas significativement différente de celle des autres tentés de l’être en utilisant la violence,
La victimes
proportion de victimes
de violences ayant
sexuelles. déclarélesavoir
Toutefois, subideunviolviol
victimes qui précisent
ressentent s’être
davantage de dépla- les menaces, la contrainte ou la sur-
peur à aller déclarer les faits subis aux autorités que les autres victimes. Près de la
cées à lad’entre
moitié police oun’étant
elles à la gendarmerie n’estoupas
pas allées à la police à la significativement différente
gendarmerie disent avoir eu peurde celle prise.
des représailles ou d’une vengeance (49 % contre 30 % pour les victimes de violences
dessexuelles
autres d’autre
victimes de violences sexuelles. Toutefois, les victimes de viol ressentent
nature). De même, elles sont aussi relativement plus nombreuses à ne
davantage de peur aux
pas s’être déplacées à aller déclarer
autorités les faits
pour éviter subis aux
que l’affaire autorités
se sache (53 % que les40autres
contre % vic- Situations décrites
pour les autres victimes d’agressions sexuelles) et pour éviter des épreuves
times. Près de la(65
supplémentaires moitié d’entre
% contre 54 %).elles n’étant pas allées à la police ou à la gendar-
Seuls les faits ayant eu lieu au cours
merie disent avoir eu peur des représailles ou d’une vengeance (49 % contre 30 %
des deux dernières années sont dé-
pour les victimes de violences sexuelles d’autre nature). De même, elles sont aussi re-
crits dans l’enquête CVS (plus exac-
lativement plus nombreuses à ne pas s’être déplacées aux autorités pour éviter que
tement, le dernier fait subi pour les
l’affaire se sache (53 % contre 40 % pour les autres victimes d’agressions sexuelles)
violences hors ménage, et l’ensemble
et pour éviter des épreuves supplémentaires (65 % contre 54 %).
des violences pour les atteintes in-
tra-ménages). Dans la mesure où
Des raisons différentes selon le lien nous étudions les suites données aux
violences sexuelles, lorsqu’un enquê-
avec l’agresseur té a subi des violences hors ménage
et intra-ménages, nous avons choi-
Les proportions estimées de victimes qui se sont déplacées à la police ou à la
si de décrire ces deux situations de
gendarmerie pour dénoncer les violences sexuelles subies ne diffèrent pas significa-
violences séparément et donc de re-
tivement selon que les victimes vivaient ou non avec leur agresseur au moment des
présenter cet individu deux fois dans
faits. En revanche, lorsque la victime et l’agresseur vivaient ensemble, la principale
notre échantillon (excepté dans l’esti-
raison évoquée pour ne pas s’être déplacée à la police ou à la gendarmerie est
mation du nombre de victimes).
le fait d’avoir préféré trouver une autre solution. Cette raison est citée par 76 % des
victimes de violences sexuelles commises par une personne habitant avec elles au
moment de l’agression, contre 66 % sinon.

À l’inverse, les victimes ne connaissant pas leur agresseur disent moins souvent avoir
préféré une autre solution, avoir voulu éviter que cela se sache ou avoir eu peur
des représailles, pour expliquer leur non déplacement aux autorités dans le but de
déclarer les violences subies. Plus exactement, 48 % des personnes qui ne se sont
pas déplacées à la police ou à la gendarmerie et dont l’agresseur était un inconnu
disent avoir préféré trouver une autre solution contre 74 % sinon, et 27 % de ces
victimes ont voulu éviter que l’agression se sache contre 48 % pour les victimes INSTITUT NATIONAL DES HAUTES ÉTUDES
DE LA SÉCURITÉ ET DE LA JUSTICE
connaissant leur agresseur. Enfin, notons que 22 % des victimes ne connaissant pas Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales
leur agresseur ont cité la peur des représailles comme frein au déplacement à la Tél : +33(0)1 76 64 89 70 – Contact : ondrp@inhesj.fr

police ou la gendarmerie contre 39 % sinon. Directrice de la publication : Hélène CAZAUX-CHARLES


Rédacteur en chef : Christophe SOULLEZ

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