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pratique

EDITIONS
PARIS(8°)

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Poul-Clément JAGOT
1889-1962

« L’un des auteurs les plus appréciés


de l'entre-deux-guerres, dans le domaine
de la psychologie pratique. Se basant
sur rexpérimentation approfondie, il a
dégagé d'un véritable fatras, l'étude des
hautes sciences, et remis en honneur,
sur des bases saines, la culture de la
mémoire et de la volonté, la pratique du
magnétisme, de l'hypnotisme, de la sug­
gestion et de divers arts d'observation.
Ses écrits ont profondément influencé
l'évolution des idées modernes sur
l'éducation du caractère et la morale
active. »

La Radiesthésie pour tous


(Mars 1962)

P.-C. JAGOT, c'est le triomphe


de l'autodidacte. Sans diplôme, il
s'est cultivé lui-même toute sa vie.
Doué d'une mémoire étonnante, il
était un véritable érudit. Son in­
fluence fut grande sur de nom­
breux lecteurs. Mais sa notoriété
mondiale, n'eut aucune prise sur
sa simplicité naturelle. Nul écrivain
ne fut à ce int dépourvu de
vanité littéraire. Il ouvrait toujours
des yeux étonnés et sceptiques
quand on lui parlait du bien que
ses ouvrages répandaient dans le
monde.

Il est mort comme il a vécu, tout


simplement, sans faire de bruit. Il a,
pour le bercer dans sa tombe, le
souvenir reconnaissant de nom­
breux lecteurs qui lui doivent d'avoir
surmonté leurs difficultés ou d'avoir
pris conscience de leurs possibi­
lités pour se réaliser pleinement.
L'INFLUENCE A DISTANCE
DU MÊME AUTEUR, MÊME LIBRAIRIE

Méthode rationnelle pour acquérir la Maîtrise de Soi-Même.


Les Marques révélatrices du Caractère et du Destin. L’art de lire sur
le visage.
L’Éducation de la parole. L’art de parler clairement et avec assurance
dans la vie privée, dans les affaires et en public.
Le livre rénovateur des Nerveux, des Surmenés, des Déprimés et des
Découragés. Préface du Docteur Legrain.
Le Pouvoir de la Volonté, sur soi-même, sur les autres, sur le destin.
Méthode pratique d’Autosuggestion, appliquée en vue d’obtenir la maî­
trise de soi-même, la guérison des maladies et l’influence personnelle.
Méthode pratique pour développer la Mémoire.
La Timidité vaincue.
Les Lois du succès. La part de la chance. La part de la volonté.
Psychologie de l’Amour. L’instinct, la sensibilité, l’imagination.
L’Influence à distance,, la Transmission de la pensée et la Suggestion
mentale.
Méthode Pratique de Magnétisme, Hypnotisme, Suggestion.
Science Occulte et Magie pratique.
Initiation à l’Art de guérir par le Magnétisme humain.
Comment on devient hypnotiseur. Théories et Procédés de l’Hypnotisme.
Traité théorique et pratique de la Double-Vue.
L’aptitude à l’effort réalisateur.
Traité Méthodique de Magnétisme Personnel.
Chirologie, Chiromancie (épuisé).
En collaboration avec le DOCTEUR P. OUDINOT
Méthode pratique de développement du Charme Personnel.
L’Insomnie vaincue. L’art de s’endormir aisément et sans drogue malgré
les préoccupations, le bruit ou la douleur.
En collaboration avec F. DUCHIEZ
L’Éducation du Style. Une méthode simple et pratique pour acquérir
l’aisance et la clarté dans la correspondance, les travaux de rédaction
et la composition littéraire.
En collaboration avec René GERBEX
Revitalisation organique, musculaire et cérébrale par la Culture Physique.
Paul-C. JAGOT

La Transmission de la Pensée
et la Suggestion Mentale

Méthode Pratique de Télépsychie

68e mille

EDITIONS DANGLES
38, Rue de Moscou
— PARIS =====
Paul-Clément JAGOT (1889-1962)

ISBN : 2 - 7033 - 0089 -1


Né à Paris le 16 juillet 1889, Paul-C. Jagot est mort
à Paris le 25 janvier 1962. Toute sa vie s’est écoulée à
Paris et il est resté le type même du Parisien qui aimait
sa ville au point d’y vivre 365 jours par an. Il ignorait
les vacances, les voyages et il se sentait mal à l’aise dès
qu’il était loin de la capitale.
Issu d’une famille très modeste, son père, parisien
comme lui, était peintre verrier et sa mère, d’origine
suisse italienne, avait la simplicité et le dévouement des
vraies femmes du peuple. Il eut un frère aîné qui mou­
rut à la guerre de 1914.
Né chétif, Paul-C. Jagot eut une enfance difficile,
maladive et les médecins ne cachaient par leur scepti­
cisme sur les possibilités d’une longue vie. Très jeune
il fut mis en apprentissage dans la prothèse dentaire.
Toute sa vie il resta marqué par le souvenir de la situa­
tion pénible des apprentis de cette époque. Quand il eut
quinze ans il prépara tout seul l’examen d’entrée aux
chemins de fer du Nord et il devint fonctionnaire. Mais
son tempérament d’indépendant farouche ne supporta
pas longtemps cette vie réglée et monotone. C’est alors
qu’il découvrit l’Hypnotisme au contact d’un expérimen­
tateur, A. Lapôtre, et aussi près d’Hector Durville dont
il fut l’élève dès 1907 — il avait alors dix-huit ans —
pour devenir ensuite son collaborateur.
Avec l’Hypnotisme il eut le goût des Sciences Occul­
tes. Il étudia à fond le Magnétisme d’abord, puis la
Magie et toutes les Sciences d'Observations : Astrologie,
Chirologie, Physiognomonie et surtout la Graphologie
dans laquelle il excella. On peut dire que ce fut son
point fort. Il disséquait une écriture avec une aisance
déconcertante, car ses profondes connaissances de la
Psychologie individuelle lui permettaient des portraits
graphologiques tout à fait remarquables. Il fut l’élève
de Crépieux-Jamin qui lui laissa de nombreux témoigna­
ges de satisfaction. Hélas le livre qu’il préparait depuis
de nombreuses années sur l’interprétation graphologi­
que ne sera pas terminé. C’est dommage, car il y aurait
donné le meilleur de lui-même.
Il laisse cependant une Œuvre importante qui rayon­
ne dans le monde entier. De toutes parts ses lecteurs lui
rendent témoignage : ses livres leur ont apporté le ré­
confort dans l’épreuve, le courage et l’audace d’entre­
prendre et beaucoup lui attribuent leur réussite dans la
vie.
Paul-C. Jagot, c’est le triomphe de l’autodidacte. Sans
diplôme, il s’est cultivé lui-même toute sa vie. Doué
d’une mémoire étonnante, il était un véritable érudit. Il
aurait fait un médecin remarquable. Son influence fut
grande sur de nombreux lecteurs. Mais sa notoriété mon­
diale n’eut aucune prise sur sa simplicité naturelle. Nul
écrivain ne fut à ce point dépourvu de toute vanité lit­
téraire. Il ouvrait toujours des yeux étonnés et scepti­
ques quand on lui parlait du bien que ses livres répan­
daient dans le monde.
Il est mort comme il a vécu. Tout simplement, sans
faire de bruit. Il fut enterré au cimetière parisien de
Thiais, loin de toutes pompes officielles, entouré seule­
ment de quelques intimes. Il a pour le bercer dans sa
tombe le souvenir reconnaissant des nombreux lecteurs
qui lui doivent d’avoir surmonté leurs difficultés ou
d’avoir pris conscience de leurs possibilités pour se
réaliser pleinement.
LIVRE PREMIER

Cours Élémentaire

INTRODUCTION AU LIVRE I

Il existe un moyen sûr d'influer sur autrui, de loin


comme à proximité ; un moyen assez subtil pour de­
meurer inaperçu, si profondément qu'on subisse son
invisible action, à laquelle, d'ailleurs, nul n'est inac­
cessible.
Ce moyen n'est autre que la propriété communica­
tive, dominatrice et attractive de toute pensée émise
intensément.
Certains l'utilisent qui l'ignorent ou le contestent,
sans se rendre compte qu'ils doivent entièrement à
l'activité puissamment irradiante d'une vigoureuse or­
ganisation psychique l'ascendant de leur personnalité.
D'autres voudraient apprendre à user délibérément
de cette influence. C'est surtout à l'intention de ces
derniers que j'écris ce livre dans la rédaction duquel
prédomine, par conséquent, le souci de la clarté, de
la précision et de la simplicité.
Les trois premiers chapitres exposent les notions
. théoriques et pratiques dont la connaissance parfaite
est indispensable à qui veut tenter, soit d'obtenir les
phénomènes télépsychiques dont traitent les chapitres
IV, V et VI, soit d'appliquer l'influence mentale à
l'une des possibilités auxquelles sont consacrés les cha­
pitres suivants.
Comme pour toute chose, chacun vient au monde
plus ou moins qualifié pour l'action à distance, mais
10 l’influence a distance

le présent ouvrage s'est précisément fixé le but de


permettre à ceux qui sont peu doués de tirer de leurs
aptitudes actuelles le maximum d'effets et de les for­
tifier par l'entraînement.
J'affirme qu'avec un peu d'attention et de bonne vo­
lonté. la plupart d'entre nous peuvent mettre large­
ment à profit l'enseignement qui suit.
Paul-C. Jagot.
PREMIERE PARTIE

Théories et Procédés
I. — INTRODUCTION A L’ÉTUDE
DU POUVOIR DE LA PENSÉE

Chacun peut opérer ou subir les communications et l’imposition


de la pensée. — L’Influence télépsychique est une subséquence
constante de l’activité affective et cérébrale. — On peut l’uti­
liser délibérément. — Les travaux antérieurs.

La réalité des divers phénomènes d’influence directe


d’un esprit sur un esprit a été surabondamment véri­
fiée. Plusieurs enquêtes, simultanément conduites en
Europe et aux États-Unis, par des personnalités ou
des groupements scientifiques ont permis de dégager
d’une importante masse d’observations la certitude
que la pensée se communique parfois spontanément,
d’une personne à une autre, à travers la distance (1).
Nombre de chercheurs ont tenté, d’autre part, avec
succès, la transmission concentrée d’images à un col­
laborateur éloigné (2). L’exécution d’ordres, mentale­
ment intimés à un sujet d’expériences, a été égale­
ment obtenue (3). On a, enfin, réussi à provoquer l’hyp­
nose, à l’improviste, hors de la présence de l’hypno­
tisé (4).
A priori, tout ceci ne semble pas impliquer la pos-
(1-2-3-4) : Voir pages 16 et 17 les références documentaires relatives
à ces quatre genres de manifestations télépsychiques.
14 l’influence a distance

sibilité, en général, d’influer sur quelqu’un par des


suggestions intérieurement formulées : encore que
nombreux, ceux qui se sont révélés émissifs ou perci-
pients d’irradiations mentales ne constituent qu’une
minorité.
Faut-il donc considérer la communication ou l’im­
position de la pensée comme exceptionnelles et la ma­
jorité d’entre nous comme inaptes à opérer ou à subir
l’action télépsychique ? C’est l’opinion de certaines
compétences. D’autres, non moins avérées, professent,
au contraire, que toute pensée s'extériorise et tend à
affecter, conformément à ce qu'elle exprime, l'indi­
vidu à qui l'on pense. L’expérience pratique m’a
rangé, sans réserves, à ce dernier avis.
Certes, elle reste exceptionnelle, la répercussion ins­
tantanée, intégrale, d’une image, d un état affectif, sur
l’écran intellectuel ou la sensibilité d’un tiers proche
ou lointain. De tous les faits recueillis, il résulte que
semblable manifestation paraît nécessiter, de la part
de l’émetteur, une qualité et une vigueur d’émotion
singulières.
Certes, une suggestion ne saurait envahir d'emblée
la conscience de qui n’offre pas à semblable irruption
la plus extrême réceptivité. Ce que j’affirme, ce que
j’ai vérifié, ce que d’autres ont vérifié, c’est que si l'on
réitère longuement, ardemment, la suggestion, tout se
passe comme si l'on projetait sur le sujet une impré­
gnante effluvation qui éveille graduellement et fait
bientôt prédominer en lui les dispositions suggérées.
Si étranger soit-il à une notion, même imprécise, de
cette loi, tout individu volontaire et tenace impose in­
consciemment ses exigences. Et comme la goutte d’eau
dont ,1a chute répétée entame peu à peu une dure mar­
gelle, l’action mentale du plus débile peut, à la lon­
gue, marquer son empreinte sur de robustes résolu­
tions.
THÉORIES ET PROCÉDÉS 15

Tous, nous sommes impressionnés à notre insu par


d’innombrables projections psychiques, de même que
nous affectons, sans le savoir, non seulement les gens
spécifiés par nos pensées mais aussi ceux — parfois
inconnus — qu’elles évoquent. Cet incessant phéno­
ménisme demeure obscur, imperçu, car nous ne sau­
rions discerner qu’une faible partie des éléments dont
la confluence donne naissance à nos impressions, à nos
sentiments, à nos convictions. S’il en est qui nous vien­
nent du dehors, ils échappent donc nécessairement à
la conscience.
Ainsi, l'irradiation télépsychique, subséquence iné­
vitable de l'activité affective et cérébrale, doit être
considérée comme une propriété normale de l'esprit
humain. Si elle n’engendre que rarement ces commu­
nications instantanées qui l’ont rendue évidente, elle
n’en joue pas moins un rôle perpétuel et considérable
dans la vie quotidienne. Mais les orages n’ont-ils pas
tonné des siècles avant qu’on s’aperçût de la pré­
sence et de l’activité universelle de l’agent dont ils
étaient la seule manifestation frappante ?
Je me propose de montrer à utiliser délibérément
cette propriété de la pensée que chacun évertue in­
consciemment — et souvent dans un sens contraire
à son bien. Pour en user avec profit, il convient d'en
gouverner l'émission et d’en proportionner l’énergie,
la durée, la fréquence aux résistances qu’opposent à
son influx les caractéristiques morales du destinataire.
D’ailleurs, si précisément et si longuement exprimée
qu’elle soit, une incitation mentale ne possède par elle-
même qu’une faible vigueur propulsive. D’où l’insuf­
fisance d’une froide et systématique expérimentation
de laboratoire à rendre intégralement compte du pou­
voir de la pensée. Ce sont, en effet, les émotions inten­
ses, les sentiments exaltés, les avidités ardentes qui
irradient le plus efficacement notre invisible influence.
16 l’influence a distance

Encore faut-il savoir condenser, pour l’émettre en­


suite à haute tension, le dynamisme cérébral que les
dispositions précédentes engendrent à profusion mais
qu’elles éparpillent volontiers si l’on n’en contient pas
les multiples poussées.
En se conformant aux indications de ce livre, cha­
cun peut réaliser les conditions indispensables pour
vérifier par lui-même la réalité des actions à distance.
La technique opératoire exposée plus loin — déjà
professée verbalement à la grande satisfaction de
quelques-uns — resuite entièrement de mes recherches.
A diverses reprises, j’ai déjà traité de la question
et indiqué chaque fois des procédés différents. C’est
que, d’année en année, depuis 1909, où parut mon pre­
mier travail, à 1918 — date d’édition primitive de ma
Méthode scientifique moderne de Magnétisme, Hypno­
tisme, Suggestion — puis à ce jour, ma conception
fut sans cesse évoluée par les leçons de l’expérience.
Afin de ne rien imprimer qui ait déjà été publié
ailleurs, je m’abstiens de toute citation documentaire.
Mais, tant à l’appui de mes affirmations que pour obli­
ger les lecteurs désireux de puiser à d’autres sources
— à l’officielle notamment — je tiens à indiquer les
principaux classiques de la question. Les voici, par
ordre alphabétique. Je fais précéder d’un a les livres
relatifs aux faits de télépathie, télesthésie, télévision,
téléaudition spontanées ; d’un b ceux où l’on traite
de transmission concertée d'images ; d’un c les docu­
ments publiés sur la suggestion mentale imposée à des
sujets éveillés ou hypnotisés ; d’un d les contributions
à l'étude de l'hypnose provoquée à l'improviste par
intention concentrée ; enfin d’un e les ouvrages d’a/?-
plication pratique.

c) ATKINSON. — La Force-Pensée. Son action et


son rôle dans la vie. Paris, 1904.
THÉORIES ET PROCÉDÉS 17

e) BESANT (Annie). — Le Pouvoir de la Pensée, sa


maîtrise, sa culture. Paris, 1905.
</) BOIRAC. — La Psychologie Inconnue. Paris, 1913.
J) BOIRAC. — L’Avenir des sciences psychiques.
Paris, 1914.
c) BOURRU et BUROT. — La suggestion mentale
et les variations de la personnalité. Rochefort, 1895.
c) DURVILLE (Hector). — Télépathie, Télépsychie.
Paris, 1915.
, b) FLAMMARION (Camille). — L’inconnu et les
a)
Problèmes psychiques. Paris, 1915.
, b) FLAMMARION (Camille). — La Mort et son
a)
mystère. Paris, 1920.
, e) GUAITA (Stanislas de). — La Clé de la Magie
c)
Noire. Paris, 1897.
a) GURNEY, MYERS et PODMORE. — Les Hallu­
cinations télépathiques. Paris, 1891.
e) INGALESE (Richard). — L’Histoire et le pouvoir
de l’Esprit (traduction Dr P. Oudinot). Dangles, 1938.
c) JOIRE (Dr). — Les Phénomènes psychiques su­
pernormaux. Paris, 1912.
c) LEADBEATER. — La Pensée, sa puissance, son
emploi. Paris, 1910.
d) MARILLIER. — Les Actions mentales à distance.
Revue Philosophique, avril 1897.
d) MAXWELL. — Les Phénomènes psychiques. Pa­
ris, 1914.
e) MULFORD. — Vos forces. Paris, 1895.
b) , c), OCHOROWICZ. — De la Suggestion men-
tele. Paris, 1889.
, b), c) PERRONET (Dr). — Force psychique et
d)
suggestion mentale. Lons-le-Saunier, 1886.
, c) RICHET (Ch.). — La Suggestion mentale et le
b)
calcul des probabilités. Revue Philosophique. Décem­
bre 1884.
d) RICHET (Ch.). — Le Somnambulisme à distance
18 l’influence a distance

à l’insu du sujet. Revue Philosophique, avril 1888.


c) RICHET (Ch.). — Traité de Métapsychique. Pa­
ris, 1922.
c) ROCHAS (A. de). — L’extériorisation de la mo­
tricité. Paris, 1896.
e) SEGNO. — La Loi du mentalisme. Dangles,
Paris, 1954.
a), c) SERMYN (Dr de). — Contributions à l’étude
de facultés cérébrales méconnues. Paris et Genève,
1911.
e) SOCIETE DES RECHERCHES PSYCHIQUES
DE CHICAGO. — La lecture ou la transmission de la
pensée. Paris, s. d.
e) TURNBULL. — Magnétisme Personnel. Paris,
1904.
c) WARCOLLIER. — La télépathie. Paris, 1921.

On consulterait aussi avec profit la collection des


Annales des Sciences psychiques.
IL — CE QU’ÎL FAUT AVOIR COMPRIS
AVANT D’EXPÉRIMENTER

d’un état spécial, gl’une


MM MH * •
imprégnation graduelle-
■.......................... — -....... _

Lois des actions mentales à distance, —


De la netteté des images suggérées dépend
» la
La vigueur propulsive
i de

intention efficace par elle-même, — Psy-


- La détermination pério-
l’une élaboration et d’une

Les hypothèses provisoirement admises pour expli­


quer la téléphonie sans fil eussent semblé aberrantes
il y a un siècle. Quand, aujourd’hui, avec un disposi­
tif à cadre, on écoute dans un local clos un concert
lointain dont l’émission traverse l’espace et la matière
dense, on admet volontiers que les ondes radiophoni­
ques se transmettent par ondulation, au sein d’un
agent assez subtil pour interpénétrer tous les corps.
Qu’on le nomme aither ou qu’on le définisse autre­
2
20 l’influence a distance

ment, l’existence s’affirme d’un véhicule susceptible


d’imprégner toute chose à l’infini et de conduire les
ondes radioélectriques.
C’est d’une manière probablement analogue — sinon
identique — qu’on expliquera un jour ou l’autre les
phénomènes de télépsychie, ce qui corroborera, d’ail­
leurs, une théorie professée dès l’antiquité par les dis­
ciples de la science occulte (1).
Tout se passe, en effet, comme si, baignés et impré­
gnés d’un invisible océan fluidique sans limites, nos
âmes se trouvaient en constante communication.
Un enfant pourvu du populaire dispositif à galène
sait bientôt en régler les curseurs de manière à rendre
l’appareil sensible à telle ou telle longueur d’ondes.
Il l’accorde, ainsi, au ton des vibrations transmises
par le poste émetteur qu’il désire entendre et, de fait,
une fois l’accord établi, le récepteur reproduit toutes
les communications émises syntoniqucment à cet
accord.
Il se passe souvent quelque chose d’analogue entre
deux individus que leur intimité, leurs similitudes,
leur mutuelle dilection ont accordés mentalement. Les
pensées de l’un impressionnent le cerveau de l’autre
en lui communiquant leur ton de mouvement qui tend

avec une telle vigueur, avec une telle précision, que

(1) Voir, du même auteur, Science Occulte et Mayie /’/u/h/z/r, (Iditions


Dangles, Paris).

page 15 ».,
THÉORIES ET PROCÉDÉS 21

les communications télépsychiques les plus remarqua­


bles ont eu lieu entre intimes.
Supposons maintenant qu’on veuille agir sur un
individu non plus isotonique (1), mais indifférent ou
hétérotonique (2). Faute de cette réceptivité d’emblée
qui, seule, permet la communication proprement dite
de la pensée (3), il suffira de réaliser soi-même un ton
de mouvement psychique supérieur en force à celui
du sujet. Ce ton de mouvement entraînera peu à peu
le sien propre. Il s’imposera à lui. L’émission devra
donc s’effectuer avec une 'énergie particulière et une
longue insistance. Une seule séance suffit rarement à
imprégner quelqu’un au point d’influer péremptoire­
ment sur ses dispositions. Il faudra donc, dans pres­
que tous les cas, réitérer l’action journellement, durant
une période plus ou moins étendue. Enfin, il va sans
dire que si l’on s’adresse à un terrain psychologique
peu compatible avec l’objet des suggestions, celles-ci
ne sauraient le modifier que graduellement, au prix
d’efforts énergiques et inlassablement renouvelés.
Il y a, paraît-il, dans l’Inde, des adeptes de cette
doctrine qu’on nomme yoga, dont l’emprise sur une ou
plusieurs personnes s’établit en quelques minutes. Ces
expérimentateurs réussissent, sans présenter l’appa­
rence d’un pénible effort, à halluciner toute une foule.
On croit assister à une scène terrifiante, alors qu’en
réalité il ne se passe rien. Le même mirage abuse
chacun des spectateurs. Les latitudes orientales favo­
riseraient-elles ce genre de phénomènes ? Les yoghis
bénéficient-ils de facultés psychiques développées, de
génération en génération, par un exercice ininter-

(1) Iso : égal.


(2) Hétéro : différent.
(3) Entre deux expérimentateurs désireux, l’un de transmettre,
l’autre de percevoir des images mentales un accord peut-être artifi­
ciellement réalisé ainsi que je l’exposerai au chapitre IV.
22 l’influence a distance

rompu ? A répéter continuellement les mêmes expé­


riences, y acquièrent-ils une virtuosité particulière ?
Je l’ignore mais, en Occident, les annales du psychisme
n’ont pas enregistré jusqu’ici de répercussions psychi­
ques aussi instantanées.
Voici probablement ce qui se passe quand on agit :
— Une première vague ondulatoire arrive au sujet
et réagit insensiblement sur les éléments de son moral
auxquels l’opérateur cherche à substituer d’autres élé­
ments. A la faible imprégnation réalisée par cette va­
gue s’ajouteront les effets successifs de vingt, trente,
cent nouvelles émissions. En se combinant aux pensées
propres du sujet, l’élément suggéré qui lui arrive ainsi
les modifie d’abord d'une manière insignifiante, puis
suscite, des profondeurs inconscientes de son psy­
chisme inférieur (1), des diverses considérations, jus­
que-là étrangères à l’activité habituelle de ce dernier.
Ces considérations, sans cesse développées sous l’im­
pulsion périodique des irradiations de l’opérateur, évo­
luent peu à peu et présentent une conformité chaque
jour plus précise avec l’objet final des suggestions.
En résumé, l'influence extérieure après avoir ef­
fleuré, affecté puis imprégné de plus en plus appré-
ciablement l’esprit, finit par prédominer.
Définissons maintenant les conditions d’efficience de
l’action télépsychique.

LOIS DE LA TÉLÉPSYCHIE

LOI N° 1. — C’est principalement en images — et non pas seu­


lement d’une manière littérale — qu’il convient d’exprimer ce que

(1) L’élaboration et l’énoncé des lois qui suivent sont mon œuvre.
Je les formule sous ma responsabilité et je défie qu'on leur puisse opposer
le moindre fait. Elles seront certainement complétées et précisées
par de nouvelles, mais l’expérience les vérifiera sans aucun doute.
THÉORIES ET PROCÉDÉS 23

l’on veut suggérer, Il faut donc imaginer ce que l’on voudrait qui
ait lieu.,

LOS N° 2. — La conformité de F effet à l’intention s’opère en


raison directe de la précision des images irradiées,

LOI N° 3. — La vigueur propulsive d’une émission télépsychique


est proportionnelle à l’avidité qu’on éprouve de la réalisation cher­
chée ou plus généralement, au désir qu’on a d’affecter le sujet.

LOI N° 4. — Une seule émission journalière d’une durée de x


est d’une efficacité supérieure à celle de deux émissions d’une du­
rée respective de x/2.

LOI N° 5. — Chaque émission correcte modifie toujours, plus


ou moins sensiblement, les dispositions morales du sujet conformé­
ment aux intentions de l’opérateur.

LOI N° 6. — La modification du sujet s’affirme à mesure que


les émissions se poursuivent.

Une comparaison très simple va nous aider à bien


comprendre les plus essentiels de ces six principes :
le deuxième et le troisième.
Voici une lanterne magique disposée devant un
écran. Allumons la lampe et glissons une plaque à
projections derrière l’objectif. L’image va se projeter
sur l’écran. Elle s’y inscrira, parfaitement visible
dans tous ses détails, à deux conditions :
— d) Que ses contours soient nettement accusés.
— b) Que l’éclairage ait suffisamment d’éclat.
D’une plaque défectueuse, le plus puissant fanal ne
saurait tirer qu’une projection confuse. Inversement,
la perfection du cliché apparaîtrait malaisément sous
les rayons d’une lumière faible et vacillante.
En télépsychie, l’élan intérieur c’est la lumière pro­
jetante ; l’image mentale c’est la plaque génératrice.
24 l’influence a distance

Il convient donc d’apporter le plus grand soin à l’édifi­


cation des images qu’on désire communiquer et sur­
tout de celles dont on voudrait imposer la prédomi­
nance suggestive parmi les pensées habituelles de
quelqu’un.
Faute de visualiser très précisément les phases suc­
cessives d’une modification morale, on n’obtiendrait
que des dispositions plus ou moins divergentes de cel­
les qui satisferaient entièrement, et, s’il s’agissait d’une
suggestion d’acte, l’impulsion intentionnelle ne serait
pas fidèlement suivie.
Mais les représentations mentales les plus minu­
tieusement définies n’entraînent, par elles-mêmes, que
des ébauches d’effets. Pour les propulser énergique­
ment, il faut l’irrésistible élan d’une impérieuse vo­
lonté, d’une vive émotion ou d’une convoitise ardente.
Le désir pur et simple influe davantage, s’il est vif
et précis, que la concentration de pensées purement
cérébrale, telle qu’on l’enseigne dans certains manuels.
Et j’ai observé ce qui précède, pour la première
fois, il y a plus de quinze ans, à propos de l’expérience
bien connue qui consiste à obliger quelqu’un à se re­
tourner au moyen de la fixation du regard à la nuque
et du commandement mental. Depuis des années, il
m’était arrivé — comme à tous ceux qui ont tenté
cette expérience — de fixer mes yeux et mon atten­
tion dix ou quinze minutes sans aucun résultat. La
lumière se fit un soir, où, tandis qu’ils erraient dis­
traitement, mes regards furent captés, pendant cer­
tain entr’acte, par la nuque et les épaules d’une spec­
tatrice dont le visage m’inspira, sur le champ, la plus
vive curiosité. Tandis que je supputais les traits, ima-
V

ginant et désirant l'impression suave qu’ils devaient


dispenser, l’objet de ma contemplation manifesta bien­
tôt une évidente agitation. Des frémissements agitèrent
THÉORIES ET PROCÉDÉS 25
la région visée. Une main sembla vouloir effacer de
la peau quelque irritant contact. Enfin la tête se tourna
brusquement... Et je crois qu’une certaine intuition
de la cause du trouble ne fut pas étrangère au regard
incisif qui rencontra le mien.
Dans son apparente insignifiance, ce fait recélait
toute la substance de l’enseignement énoncé plus haut :
la vigueur propulsive des émissions télépsychiques est
proportionnelle à l’avidité qu’on éprouve de leur effet.
Leur principale condition d’efficience n’est autre que
l’aspiration impérieuse au résultat cherché. Ainsi
l’exaltation du centre émotionnel se communique au
centre cérébral qui vibre activement et irradie des vi­
brations avec force.
La difficulté consiste à déterminer périodiquement,
au moment opportun, cet état véhément, à l’entrete­
nir tout le temps nécessaire, puis à l’annuler jusqu’à
la séance suivante car sa persistance épuiserait rapi­
dement. Les adeptes de cet hermétisme dévoyé qu’on
nomme goétie l’ont compris, il y a des siècles, puis­
que leurs plus antiques formulaires abondaient en re­
cettes d’électuaires et philtres à base d’excitants psy­
chiques — effectifs mais dangereux. Eliphas Lévi nous
dit, dans son Dogme et Rituel de Haute Magie, que
pour accomplir des prodiges, il faut être hors des con­
ditions ordinaires de l’humanité, abstrait par la sa­
gesse ou exalté par la folie. Insuffisamment évolués
pour atteindre de sitôt l’abstraite sérénité, mais du
moins soucieux d’éviter les toxiques qui déséquili­
brent, il nous faut user de moyens compatibles avec
nos possibilités. Ces moyens consistent à observer les
conditions d’une abondante élaboration d’énergie psy­
chique et à retenir en soi-même, à accumuler, à con­
denser cette énergie au fur et à mesure qu’elle s’éla­
bore, en ralentissant considérablement son débit. On
crée ainsi une forte tension d’extériorisation qui porte
26 l’influence a distance

à son paroxysme l'intensité du vouloir, du désir, des


sentiments, aspirations, appétences et avidités (1).
Qu’il s’agisse de transmettre un message mental à
un collaborateur capable d’une volontaire passivité
réceptive, de suggestionner par la pensée un sujet
éveillé ou en état second, de provoquer le somnambu­
lisme artificiel à distance ou d’influer sur les disposi­
tions morales d’un tiers, l’imagination méthodique et
précise du résultat et l’avidité de l'obtenir constituent
les deux plus importants facteurs du succès.
Afin de disposer de la réserve énergétique indispen­
sable à l’objectivation aisée des images et à la vigueur
propulsive de leur émission, il y a lieu d'observer, au
cours de la vie quotidienne, certaines règles que je
vais définir. Elles exigent un effort attentif d’empire
sur soi-même. Accomplir cet effort c’est conquérir la
prérogative de mouvoir délibérément l’agent subtil
par lequel la majorité des êtres sont mus : la pensée.
Diriger ses pensées et régir leurs effets au lieu de
subir les unes et les autres : telle est la possibilité
qu’ouvre la connaissance des lois psychiques. Après
avoir songé à ce qu’elle implique, nul n’hésitera.

(1) Ce dernier vocable s’entend généralement dans une acception


péjorative. Je l’utilise ici dans un sens beaucoup plus large. Il est des
avidités légitimes qu’il convient de ressentir et de manifester avec une
vigueur mentale concentrée si l’on tient au milieu de la compétition

veulent déterminer leur juste rétribution.


III. — INSTRUCTIONS PRATIQUES
GÉNÉRALES POUR
INFLUENCER QUELQU’UN A SON INSU

Considérations préliminaires. — Premières dispositions à prendre.


— Edification des images mentales. — Elaboration et condensa­
tion de Fénergie psychique. — Disponibilisation.
I — Rapport. —
Emissions. — Récupération et détente.
73
J

Considérations préliminaires.

La circonspection, la suite dans les idées et la pré­


cision de la pensée semblent peu fréquentes parmi les
caractères vibrants, impétueux et volontaires. Inverse­
ment, les esprits circonspects, judicieux, précis, s’ac­
compagnent rarement d’une nature ardente. Quant
aux rarissimes individus qui unissent la vigueur per­
sistante du vouloir à la définition minutieuse de ce
qu’ils veulent, aucune pratique spéciale ne leur est
nécessaire pour influer à distance. Ils le font incons­
ciemment parce que, grâce à leurs heureuses disposi­
tions innées, ils se trouvent spontanément dans les
conditions voulues pour cela. La plupart des hommes
ne peuvent que réaliser momentanément, par un effort
méthodique, ces conditions indispensables pour com­
muniquer et surtout pour imposer, sa pensée. Essen­
tiellement, cet effort vise, d’une part, à l’édification
28 l’influence a distance

réfléchie d’images exactement expressives de ce que


l’on voudrait suggérer, et, d’autre part, à la disponi­
bilité d’un potentiel d’énergie psychique suffisant pour
donner lieu à des émissions efficaces.

Premières dispositions à prendre.

Quand on a décidé d’user d’action à distance, il faut


se tracer un plan de travail détaillé et réunir toutes
les indications susceptibles de quelque utilité.
En ce qui concerne les tentatives de communications
concertées, de suggestion mentale sur des sujets d'ex­
périences, ou d'obtention de l'hypnose par concentra­
tion d'esprit, on se reportera aux chapitres IV, V et VI
où toutes les dispositions à prendre pour chacune de
ces tentatives sont exposées.
Lorsqu’il s’agit d’affecter quelqu’un à son insu, les
préparatifs doivent être considérés comme la base du
succès et accomplis avec le plus grand soin. Voici en
quoi ils consistent :
1° Examiner de combien de temps on peut disposer
chaque jour et à quel moment de la journée, pour
travailler à l’action qu’on projette. Moins d’une heure
serait peu. Deux heures constituent la bonne mesure.
Choisir de préférence celles qui précèdent le coucher.
Ce premier point arrêté, commencer dans l’ordre
donné ci-après, à satisfaire les suivants :
2° Analyser attentivement la psychologie de l’indi­
vidualité sur laquelle on veut agir. Nous verrons tout
à l’heure qu’à chaque émission il faut se représenter
mentalement l’image du sujet afin d’établir le rapport.
Par image, entendez non seulement les contours exté­
rieurs, l’expression du visage, l’attitude, le geste, mais
aussi la vivante notion de la personnalité morale.
Si l’on a plus ou moins vécu dans son ambiance, on
fera appel, pour inventorier ses caractéristiques, aux
THÉORIES ET PROCÉDÉS 29
observations auxquelles il aura donné lieu. On pourra
aussi soumettre son écriture à un graphologue, mais
ce serait aborder une grosse difficulté que de chercher
à influencer quelqu’un en se l’imaginant autrement
qu’il est, surtout si ce que l’on voulait obtenir de lui
nécessitait une modification considérable de ses dis­
positions.
3° Définir très précisément le but de l’action entre­
prise, avec toutes ses subséquences. Se rendre compte
des dispositions morales dans lesquelles il faudrait
que le sujet soit pour penser et agir comme on le dé­
sire. Est-il loin de celles-ci ? Quelles sont les impres­
sions, les émotions, les pensées qui, s’il les éprouvait,
le modifieraient dans le sens cherché.
4° Ayant apprécié l’écart des dispositions actuelles
du sujet et de celles dans lesquelles il faudrait qu’il
soit pour penser et agir comme on le désire, envisager
une évolution graduelle des unes aux autres.
5° Matérialiser en images cinq ou dix étapes de cette
évolution. Exemple : de l’animosité à la sympathie.
a) Atténuation légère de l’animosité ; /?) atténuation
presque totale ; c) indifférence ; d) velléités de sym­
pathie ; é) sympathie.
6° Concentrer son attention sur la première étape.
Chercher à se figurer le sujet tel qu’il serait s’il l’avait
parcourue. Chercher toutes les considérations suscep-
tibles, une fois à lui transmises, télépsychiquement.
de transformer ses dispositions présentes conformé­
ment à celles qui caractérisent la fin de la première
étape.
7° Procéder de même pour les autres étapes.
8° Affecter, sur son plan de travail, une, deux, dix
séances à l’émission des suggestions nécessaires pour
l’accomplissement de la première étape, une, deux,
dix séances pour la seconde, etc... Cette évaluation,
toute provisoire d’ailleurs, nécessite une certaine pra-
30 l’influence a distance

tique et un peu de sagacité. Sa principale utilité est


de construire une représentation complète de la réa­
lisation qu’on va chercher à obtenir.
Ce travail demande réflexion. Loin d’occasionner
un retard, le temps qu’on passe à la méditation calme
et recueillie d’un plan constitue un commencement
d’action, une première et formelle notification mentale,
une orientation de toutes les aptitudes qu’on possède
vers une intention délibérée et clairement formulée.
C’est pourquoi il est préférable d’effectuer sans aide
cette préparation. Un conseil éclairé peut aider con­
sidérablement le débutant à ordonner ses efforts, mais
il ne saurait l’exempter, sans inconvénients, de l’inau­
gurale concentration de ses moyens psychiques.
Nous sommes certainement en rapport télépathique
continuel avec tous ceux que nous connaissons, mais
ce rapport s’affirme envers chacun dès qu’on songe
longuement, attentivement à lui. La préparation qui
précède importe à ce point de vue. Tandis qu’on s’y
applique, la mutuelle réceptivité de l’opérateur et du
sujet se précise. Aussi le premier perçoit-il presque
toujours, durant le travail, des vibrations provenant
de l’activité mentale du second, dont l’intimité psy­
chique lui devient alors sensible. C’est ainsi qu’une
mère peut percevoir à distance les émotions, les tour­
ments, les souffrances de l’enfant vers lequel s'oriente
son esprit.

Edification des images.

Quatre sortes d’images sont principalement néces­


saires pour toute action télépsychique : celle du su­
jet, celle de l’accomplissement de ce qu’on désire,
celle des effets successifs que l’action doit déclencher,
enfin celle du sujet éprouvant les impressions, émo­
tions, idées, expressives de ces effets. Après le tra­
THÉORIES ET PROCÉDÉS 31
vail préliminaire défini au paragraphe précédent, on
consacrera donc un certain nombre de séances à l’édi­
fication d’images aussi précises, aussi vivantes que
possible.
Pour bien comprendre en quoi consiste une image
satisfaisante, il suffit de se rappeler nos familières
incursions dans le domaine halluciné du rêve. Lors-
qu’en songe vous voyez un ami, cette imaginaire ren­
contre présente un tel cachet de réalité qu’elle vous
produit la même impression qu’une entrevue maté­
rielle. Or, les images nécessaires dans la pratique de
la télépsychie doivent, quoique volontairement for­
mées, posséder le même cachet de réalité et de persis­
tance que celles des rêves. Quand vous voulez agir
sur quelqu’un, il faut d’abord vous le représenter.
Secondement, il faut vous l’imaginer accomplissant
ce que vous désirez. La première image s’utilise de­
puis le début de chaque émission jusqu’à la fin ; la
seconde se superpose à la première après l’évocation
successive de toutes les images intermédiaires, envi­
sagées au paragraphe précédent.
Cette cinématographie cérébrale ne s’improvise pas
toujours aisément à l’instant même de l’émission. De
plus on a tendance à la laisser dévier en multiples
incidentes. D’où la nécessité de s’exercer soigneuse­
ment à l’avance à composer toute la série des images
expressives du sujet, de ses modifications progressives,
des idées ou impressions qu’on juge de nature à l’affec­
ter, enfin de la phase finale, de la réalisation de ce
qu’on désire.
Au début, l’édification est laborieuse. Les formes
évoquées se dessinent mal, manquent d’ensemble, de
cohésion, de netteté et s’évanouissent sitôt esquissées.
Mais si l’on persiste attentivement et qu’on réitère fré­
quemment les essais, un progrès ne tarde pas à se
manifester et la facilité survient de jour en jour plus
32 l’influence a distance

grande. On peut d’ailleurs s’exercer, à titre d’entraî­


nement :
1° A se représenter, avec la plus précise confor­
mité possible à leur modèle, des objets d’abord très
simples, puis d’autres plus complexes.
2° A prolonger la durée de chaque représentation.

Élaboration et condensation de l’énergie psychique.


Le sang constitue, pour ainsi dire, la matière pre­
mière d’où un mécanisme encore obscur élabore le dy­
namisme nerveux, moteur de toutes les fonctions, no­
tamment de la cérébrale. Quand un sang riche et pur
irrigue le cerveau, on pense activement et fortement.
C’est dire l’importance, au point de vue qui nous
occupe, de l’alimentation, de la respiration et de la
circulation. La diététique rationnelle, l’hygiène respi­
ratoire et vasculaire s’imposent à tous les expérimen­
tateurs. Considérant l’organisme comme le générateur
de la force qui s’irradie au cours des émissions men­
tales, l’équilibre physiologique (1) apparaît la condi­
tion primordiale d’une élaboration énergétique suffi­
sante.
Une chose est d’élaborer, une autre est de conden­
ser, d’accumuler — pour en disposer aux moments
opportuns — le dynamisme nerveux. Rappelons, tout
d’abord, que la recharge de nos accumulateurs inter­
nes (les plexus) s’effectue au cours du sommeil de cha­
que nuit. Quand'le sommeil est normal, le réveil s’ac­
compagne d’une sensation de parfait bien-être et d’un
besoin d’activité, car les accumulateurs physiologi­
ques s’étant fortement rechargés tendent à extérioriser
l’énergie qu’ils recèlent et cette tension pousse l’indi-
(1) D’ailleurs la pratique de la télépsychie n’est pas sans risques
pour les déprimés et les malades. Qu’ils cherchent avant tout à recou­
vrer la vigueur et la santé.
THÉORIES ET PROCÉDÉS 33
vidu à se dépenser — utilement ou désordonnément.
Donc, dormir convenablement (1) avant tout, mais
aussi, durant la veille, s’interdire toute dépense inu­
tile : non seulement se garder de l’agitation et du sur­
menage, mais s’attacher à réduire au minimum le
débit d’énergie nerveuse exigé par la vie. Pour cela,
se surveiller sans relâche, agir uniquement en mode
réfléchi, en réprimant toute spontanéité, toute expan­
sivité. Pensées, paroles, gestes, occupations quotidien­
nes, tout doit subir le critère constant d’une surveil­
lance étroite qui en élaguera les superfluités et en
réprimera le désordre.
Toute impulsion à une manifestation extérieure,
tout appel intérieur à une satisfaction sensorielle, émo­
tive ou cérébrale traduit une poussée du dynamisme
nerveux qui cherche à s’extérioriser. Céder à l’impul­
sion ou satisfaire le désir, c’est gaspiller sans profit
cette énergie qu’il s’agit, au contraire, de condenser.
Chaque fois qu’on cède par étourderie au laisser-
aller, les réserves nerveuses diminuent. Chaque fois
qu’on réprime une spontanéité, on retient en soi une
unité d’énergie qui s’ajoute à la réserve déjà exis­
tante. L’observance de cette élémentaire notion d’édu­
cation psychique (2) importe fondamentalement à ceux
qui veulent pratiquer avec succès l’action à dis-

(1) Voir L'Insomnie vaincue (Editions Dangles, Paris).


(2) L’Éducation psychique a pour objet :
1° De placer la sensibilité, l’impressionnabilité, l’imagination,
les impulsions et les instincts sous le contrôle de la pensée délibérée ;
2° De développer l’attention, le discernement la mémoire et l’éner­
gie volitive ;
3° D’instaurer et d’affermir cette assurance conceptuelle et réali­
satrice qui constitue la confiance en soi-même ;
4° De tayloriser l’élaboration et la gestion du dynamisme cérébral
de manière à réaliser en qualité et en quantité le maximum de rende­
ment utile des aptitudes et des facultés.
Voir à ce sujet l’ouvrage intitulé : Le Pouvoir de la Volonté (Éditions
Dangles, Paris).
34 l’influence a distance

tance. C’est, d’ailleurs, le remède par excellence à


toute atonie physique ou morale.

Disponibilisation.

On connaît l’effet stimulant du thé, du café et de


l’alcool pris à dose raisonnable. Ces substances sont
comparables à des chèques que l’on tire sur son pro­
pre dépôt d’énergie nerveuse : elles soustraient des
plexus une partie de la force qui s’y trouve emma­
gasinée.
Le dynamisme, ainsi libéré, revigore aussitôt l’éco­
nomie. En particulier, il augmente momentanément
l’activité cérébrale.
Si l’usage habituel des excitants contrarie la con­
densation, leur usage exceptionnel, immédiatement
avant une émission, est indiqué, car, alors, il s’agit
non plus d’accumuler de l’énergie, mais de disposer
du potentiel qu’on tient en réserve, de le faire pas­
ser de la statique à la dynamique, de le laisser affluer
au cerveau qui s’en sustentera pour vibrer intensé­
ment. C’est le moment / de déclencher les plus puis­
santes poussées centrifuges, d’émettre vigoureusement.
Aussitôt après avoir absorbé l’excitant choisi, il faut
commencer à orienter sa pensée sur l’objet de l’émis-
/

sion, en se remémorant tous les motifs de l’intérêt


qu’on porte au résultat de l’action à distance entre­
prise, en évoquant toutes les images expressives de ces
motifs.
En particulier, lorsqu’on tient à ce que tel ou telle
manifeste telle ou telle disposition, on sent qu’on y
tient à deux occasions principales :
A. Quand l’idée, l’image d’une des satisfactions
qu’on éprouverait si le désir qu’on a s’accomplissait,
vous vient à l’esprit ;
B. Quand l’imagination évoque quelqu’une des con-
THÉORIES ET PROCÉDÉS 35
séquences désagréables du non-accomplissement de ce
désir.
Dans le premier cas, on sent ardemment à quel
point on tient à ce qu’on désire. Dans le second, c’est
de crainte, d’irritation, de révolte qu’on vibre.
Ces mouvements intérieurs, ordinairement sponta­
nés, on doit les susciter volontairement par rappel au
début de chaque séance afin de porter à son paro­
xysme la tension volitive. Si l’on craint de trouver à
ce moment sa mémoire rebelle ou incomplète, on fera
bien, au cours des heures précédentes, de noter à tout
moment où elles surgissent les images A et B. On se
mettra, ainsi, à même de les reconstituer à l’heure
de l’émission à l’aide des notes qu’on aura prises. Cha­
que rappel d’impression ainsi obtenu contribuera à
exalter l’esprit, à déclencher des replis les plus pro­
fonds de la conscience de puissantes impulsions voli-
tives et dominatrices.
Au cours du travail préliminaire on aurait donc in­
térêt à rechercher et à noter toutes les considérations
susceptibles de donner lieu à des images du type A
et du type B. Cette recherche nécessite une série de
méditations spéciales qu’on oriente en se retraçant
l’exposé du cas, puis en supputant successivement tou­
tes les tournures que peuvent prendre les événements.
Le rapport.
Les diverses pratiques qui précèdent contribuent à
établir entre l’opérateur et le sujet un rapport psy­
chique particulier. Selon moi, ce rapport devient inté­
gral dès que l’expérimentateur a formé l’image men­
tale du sujet. A chaque séance, aussitôt la disponibi-
lisation accomplie, il y a lieu de préciser cette image,
d’évoquer toutes les impressions dispensées par la
présence réelle du sujet, de se le représenter d’une
manière vivante, agissante. L’état d’ardeur cérébrale
36 l’influence a distance

où l’on s’est préalablement placé facilite la formation


des images et leur prête un relief, un coloris, une ani­
mation qu’il faut avoir vécus pour s’en faire une idée.
L’obscurité et le silence favorisent ce travail. Certains
ont recommandé pour s’y livrer les heures où l’on sait
que le sujet dort. Sans être bien convaincu de l’impor­
tance de ce moment, je suis d’avis qu’il ne faut rien né­
gliger et que le sommeil peut augmenter la réceptivité.
L’action mentale me paraît cependant affecter le sub­
conscient, réceptif durant la veille comme au cours
du sommeil, puis, par le truchement de celui-ci, réagir
sur la conscience. Si mon hypothèse est exacte, on peut
aussi bien suggestionner mentalement quelqu’un à un
moment qu’à un autre. Ce dont je suis expérimentale­
ment certain c’est que, quelle que soit l’heure, dès
l'instant où l'image précise d'un être apparaît sur
l'écran de votre imagination, tout ce que vous penserez
durant cette comparution l'influera très appréciable-
ment. J’emploie le verbe comparaître à dessein, car,
en formant l’image abductrice, on convoque réelle­
ment un substrat invisible du sujet qui vient s’exposer
dans le champ d’action de l’évocateur (1).
On lit, dans de vieilles gloses, que pour influencer
quelqu’un il suffit de fixer sa photographie en le sug­
gestionnant. Cela se pratique encore. Une photo ne
crée cependant aucun rapport ; tout au plus peut-elle
aider la mémoire au cours de la formation des ima­
ges. Seul un négatif à la gélatine, impressionné par
pose, et conservé dans un paquet clos pourrait cons­
tituer une base secondaire de connexions à cause de
l’imprégnation magnétique de l’enduit. De même, tous
les objets saturés de l’influx nerveux d’un individu,
sont autant de foyers d’irradiation, fluidiquement re-

(1) Voir chapitre XII, et, pour plus amples indications, mon ouvrage
Science Occulte et Magie Pratique (Éditions Dangles, Paris).
THÉORIES ET PROCÉDÉS 37
liés à leur source primitive. D’où la statuette des en-
voûteurs et mille autres recettes, beaucoup moins
ineptes qu’elles n’en ont l’air, dont les recueils goéti-
ques sont pleins. Pratiquement je conseille, pour tirer
parti de tout :
— De réunir divers objets provenant du sujet (let­
tres, notamment) et d’en répartir l’ensemble en deux
paquets, l’un de dimensions réduites qu’on pourra con­
server sur soi, l’autre qu’on prendra en main au mo­
ment de chaque émission.
Il est malaisé d’apprécier la mesure dans laquelle
ce procédé est efficace, mais vu sa simplicité, mieux
vaut l’utiliser.

L’émission.

Les deux phases précédentes — disponibilisation et


rapport — s’enchaînent et concourent à engendrer un
état de véhémence volitive à la faveur duquel chaque
mouvement psychique évertue une intense irradiation.
L’image primitive (celle du rapport), doit être alors
diversifiée selon ce qu’on désire. On se représente le
sujet accomplissant ce qu’on cherche à lui suggérer,
éprouvant les impressions et admettant les idées sus­
ceptibles de l’incliner à cet accomplissement. Jamais
la contrainte ne sera envisagée, mais toujours l’ac­
quiescement délibéré. C’est à la représentation du su­
jet éprouvant spontanément le désir de se conformer
à ce qu’on veut, qu’il faut avoir recours. Supposez ce
qui se passerait s’il ressentait une irrésistible impul­
sion personnelle à vous satisfaire et veuillez que cela
ait lieu.
Ainsi que j’ai essayé de le faire comprendre aux
chapitres précédents, les images ainsi créées précisent
les intentions de l’opérateur mais leur transfert et,
une fois transférées, leur puissance élaboratrice des
38 l'influence a distance

dispositions qu’elles requièrent dépendent d’un vigou­


reux élan intérieur qu’on pourrait exprimer par :
« Je veux qu’il en soit ainsi. »
N’oublions pas que le plan de chaque séance doit
être réglé à l’avance afin d’éviter la dispersion et les
incidentes. N’oublions pas non plus qu’il y a lieu, dans
les cas subjectifs, d’envisager de graduelles modifica­
tions et non un aboutissement instantané (1). Au dé­
but de chaque émission, après évocation de F image-
rapport. on peut fixer quelques minutes son attention
sur la représentation de la solution finale en pensant :
« Voilà ce que je veux ! voilà ce qui aura lieu !
voilà ce que je suis en train d’imposer ! » mais il faut
revenir promptement au présent, imaginer les disposi­
tions actuelles du sujet et leur suggérer de légères
divergences, qu’on accusera ensuite de plus en plus.
Tout praticien de l’hypnotisme sensoriel et verbal
accoutumé à provoquer le somnambulisme et à ma­
nier la suggestion tirera utilement parti de ses con­
naissances en agissant, par représentation des procé­
dés d’hypnotisation, sur l’image-rapport. Se figurant
être en présence du sujet, il le verra, assis en face de
lui, subir les impressions qui mènent à l’hypnose. Ar­
rivé à l’image de cet état, on donne des suggestions
littérales comme dans la réalité, en prêtant au sujet
l’attitude qu’il aurait s’il les enregistrait passivement.
Ceux à qui les procédés hypnotiques ne sont pas fa­
miliers, se borneront à évoquer l’image du sujet, assis
et attentif, puis à lui adresser mentalement toutes les
paroles susceptibles de l’émouvoir, de le convaincre,
sans omettre de le voir comprendre et acquiescer.

(1) Voir ma Méthode Pratique de Magnétisme, Hypnotisme, Sugges


tion (Editions Dangles, Paris).
THÉORIES ET PROCÉDÉS 39

Durée et fréquence des émissions.


V

En principe on a avantage à prolonger chaque émis­


sion jusqu’au moment où, par épuisement des dispo­
nibilités énergétiques, l’exaltation fléchit et tombe. La
durée d’une séance devrait se mesurer en raison in­
verse de la vigueur émissive dont on est capable.
Quand on se propose de vaincre une difficulté considé­
rable, le maximum compatible avec un psychisme
moyen c’est une séance journalière de deux heures.

Récupération. — Détente cérébrale.

Aussitôt l’émission terminée, deux prescriptions


s’imposent à l’expérimentateur D’abord, cesser com­
plètement de penser au sujet et aux préoccupations
qui se rattachent à lui. Cette application du change­
ment volontaire d'orientation psychique dont j’ai
parlé dans Le Pouvoir de la volonté, est indispensable
pour éviter l’obsession. Ensuite, chercher une détente
parfaite des nerfs et du cerveau en s’adonnant à quel­
que délassement sain. Le meilleur serait de dormir
profondément et longuement. C’est pourquoi j’ai con­
seillé le choix des deux heures précédant le coucher.
Comme l’activité cérébrale déployée durant chaque
séance donne lieu à une combustion énorme de cel­
lules, il est utile de faciliter leur élimination en usant,
avant de se livrer au sommeil, et à petites doses répé­
tées, d’une eau diurétique.
DEUXIÈME PARTIE

Production de Phénomènes
sur des sujets d'expériences
IV. — LES COMMUNICATIONS CONCERTÉES

Conditions d’expérimentation : A, L’émetteur. — B. Le perci-


pient. — Le rapport. Les images. — pulsions muscu­
laires. — Les communications émotives. — Les transmissions
littérales.

Conditions d’expérimentation. — A. L’émetteur.

Les phénomènes psychiques à processus lent, tels


que l’imposition de la pensée dont nous avons exposé
la technique au chapitre III, dépendent surtout des
qualités de rémission. Si le sujet est aisément influen­
çable, l’opérateur arrive à ses fins en un petit nombre
de séances ; dans le cas contraire, celles-ci doivent être
plus longuement réitérées mais, à la longue, un sug-
gesteur habile, énergique et subtil parviendrait iné­
vitablement à influer sur n’importe qui.
Dans la recherche des phénomènes instantanés, le
succès des expériences dépend principalement de la
sensibilité du percipient (1). A l’émetteur, il suffit d’un
effort d’attention — à peu près analogue à celui qu’on
accomplit chaque fois qu’on tâche de comprendre

(1) Parmi les spécialistes, aucun ne paraît, jusqu’ici, s’être rendu


compte de cette distinction entre les phénomènes progressifs et les
phénomènes instantanés. C’est sans doute pourquoi certains déclarent
que seuls les sujets — entendez les prédisposés — sont accessibles à
la suggestion mentale.
44 l’influence a distance

quelque chose d’embarrassant — et d’un peu de mé­


thode. L’habitude de fixer sa pensée en images préci­
ses et soutenues, le désir de la communiquer facilitent
toujours la tâche du transmetteur, mais la virtuosité
et l’ardeur de ce dernier ne suppléeraient pas à l’in­
suffisance des dispositions réceptives du sujet. Un per-
cipient sensible et entraîné saisit, détecte, au contraire,
de très faibles émissions.

B. Le Percipient.

Les gens actifs, volontaires, réalisateurs, sont mieux


qualifiés pour émettre que pour recevoir. Entre deux
individus désireux d’expérimenter, c’est au plus con­
templatif que devrait échoir le rôle de percipient. On
tiendra compte, d’autre part, de ce que la sympathie,
l’analogie de la culture, et l’équivalence d’acuité in­
tellectuelle favorisent les communications de pensées.
Ce qui prépare le mieux à la réception des ondes
télépsychiques, c’est la pratique de l’exercice nommé
« isolement » qu’on indique dans la plupart des ma­
nuels d’éducation de la volonté (1) — car il est essen­
tiel à l’instauration de l’habitude de diriger sa pensée.
Cet exercice consiste à raréfier, puis à suspendre l’ac­
tivité intellectuelle. Or, la percipience nécessite l’apti­
tude à un profond recueillement expectatif, aptitude
que l’exercice en question développe rapidement.

Le rapport.
Les deux intéressés (2) conviendront des jours et
(1) Voir l’ouvrage Le Pouvoir de la volonté (Éditions Dangles). Il
constitue pour ainsi dire l'enseignement élémentaire de la question
dont nous traitons ici le degré supérieur. On y trouvera une méthode
détaillée pour l’accroissement des énergies psychiques et raffermisse­
ment du vouloir.
(2) Il peut y avoir plusieurs percipients dont chacun s’efforce de
saisir la pensée de l’opérateur. Je déconseille cette méthode car le rap-
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 45
*

des heures auxquels devront avoir lieu les essais et


situeront ceux-ci à des moments où l’un et l’autre
aient tout le temps de s’isoler dans le silence, sans
risque d’interruption.
L’objet de chaque essai sera laissé à l’initiative de
l’émetteur qui spécifiera néanmoins l’espèce des ima­
ges à transmettre : visuelles, auditives, etc... Un quart
d’heure doit être réservé, au début de toute séance,
pour établir le rapport télépsychique. Selon la durée
de la séance, on essaiera une, deux, trois transmis­
sions à raison d’une par quart d’heure.
Au moment de se mettre en télécontact, les deux in­
téressés auront l’un et l’autre intérêt à chercher une
position confortable où le bien-être organique confine
à l’incorporéité. Chacun conservera seulement une
demi-lumière placée derrière soi.
Durant à peu près cinq minutes, songer unique­
ment à réaliser une détente musculaire, une passivité
nerveuse complètes.
Secondement, l’émetteur évoquera mentalement
l’image du percipient. De son côté, ce dernier se re­
cueillera, cessera de penser activement, suspendra
toute spontanéité imaginative afin de demeurer dans
l’expectative psychique la plus complète. On a nommé
cet état le vide mental.
A titre d’indication complémentaire, je crois devoir
dire ici que certains expérimentateurs ont préconisé
pour établir le rapport, l’emploi d’une formule con­
venue que les deux intéressés devaient l’un et l’autre
réciter intérieurement à l’heure prévue pour les es­
sais, ou d’une figure qu’ils contempleraient quelques
instants. C’est à essayer. Personnellement, je m’en
tiens à l’évocation de l’image qui -m’a toujours donné

port simultané avec différents sujets s’établit malaisément et défec­


tueusement.
46 l'influence a distance

d’excellents résultats. D’ailleurs, quand l’émetteur se


sent très animé intellectuellement, son intention pure
et simple suffit à contacter le sujet.

Les iras âges à transmettre.


Les couleurs et les formes se communiquent assez
facilement, ensuite viennent : les sons (1), les odeurs,
les saveurs, les sensations tactiles, les impressions mus­
culaires, les états émotifs (2) et les formules générales.
Voici les directives à observer pour chaque groupe.

.A — Couleurs et formes

Progression : Une tache colorée à contours flous sur


fond blanc ; une figure simple, grassement tracée en
noir sur fond clair (triangle, cercle, hexagone, cœur,
lettre capitale, etc.) ; une figure simple colorée (cœur
rouge, triangle vert, etc...); une figure complexe co­
lorée (carte à jouer, mot écrit en lettres grasses de
couleur, objet usuel avec ses tons).
X’

Emetteur : Il contemplera attentivement un modèle


matériel préparé à l’avance, de ce qu’il veut trans­
mettre, puis fermant les yeux, il en construira l’image
mentale. Il imaginera, enfin, le sujet voyant apparaî­
tre cette image. La durée convenable pour chacune
de ces trois opérations est de trois à cinq minutes.
Percipient : Il aura devant les yeux un écran blanc,
légèrement teinté, uniformément éclairé par la demi-
lumière, et il laissera son regard errer paisiblement,
indifféremment, sur cet écran. Si plusieurs impres­
sions lui viennent, il les notera passivement en tenant
(1) Deux opérateurs auditifs réussiront aisément la téléaudiiion
deux visuels, la télévision.
(2) Entendez les états émotifs improvisés. Les émotions
se transmettent plus vite et mieux que n’importe quoi.
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 47

compte si l’une ou l’autre lui paraît plus intense. De


temps à autre, il fermera lentement les yeux et les
rouvrira, toujours lentement, au bout de quelques se­
condes.

B. — Son

Progression : Un son rythmé et continu (exemple :


sonnerie de réveil-matin) ; une série de bruits vio-
Z **

lents (détonations, coups de gong) ; un arpège ; un


contour mélodique bref et précis (exemple : leit-motiv
de l’épée) ; une injonction brusque (levez-vous ! —
attention)
S" ; une phrase courte et expressive.
Emetteur : L’audition réelle de ce qu’il veut trans­
mettre l’aiderait, considérablement, surtout au début.
Il visualisera le percipient, en imaginant que ce der­
nier est présent et qu’il paraît entendre. Faute d’audi­
tion réelle, les seules ressources auto-hallucinatrices
peuvent suffire.
Percipient : Pour la réception des sons, l’obscurité
opaque est préférable. Le silence s’impose, bien en­
tendu. Le percipient, assis ou étendu, pourra se laisser
aller à une légère somnolence.

C. — Olfactions et saveurs

Procéder d’une manière analogue à la précédente.


Plus une odeur ou une saveur est puissante, plus aisé­
ment elle se transmet. L’émetteur sera toujours aidé
par la mise en jeu réelle de ses sens. Comme précé­
demment, l’image du sujet et le fait de se figurer qu’il
perçoit l’émission sont indispensables.
48 l’influence a distance

D. — Sensations tactiles

Progression : Piqûre d’épingle, contact glacé, léger


courant d’air, application des mains, impression d’être
tiré en arrière par les épaules.
Emetteur : Il usera, à son gré, de l’un ou de l’autre
des deux procédés que voici :
— Se soumettre lui-même à la cause réelle de la
sensation à transmettre en se figurant voir le sujet, la
ressentir en même temps que lui ;
— Imaginer le sujet présent et agir sur ce phan­
tasme.
Percipient : Toujours passif, il veillera à écarter
de lui toute source d’impression réelle susceptible de
l’induire en erreur.

E. — Impulsions musculaires

Progression : (Le sujet est toujours assis au début de


la séance). Mouvements simples : se lever, lever un
bras, déplacer une jambe, etc., ambulation : se lever
et avancer, aller à droite ou à gauche, tourner, en un
mot décrire une trajectoire définie ; actes simples :
saisir un objet, le déplacer, le laisser choir ; actes
complexes : fumer, écrire, jouer d’un instrument de
musique, etc...
Emetteur : Le seul commandement resterait sans
effet dans 90 % des cas. C’est en images qu’il y a lieu
de formuler les suggestions. Voyez (en imagination) le
sujet se lever et suivez le décomposé des mouvements
suggérés. Ainsi, pour communiquer l’impulsion de
marcher, il faut, par la pensée, animer alternative­
ment les jambes du percipient. Chaque geste doit être
visualisé lentement, dans toute son étendue, quatre à
vingt fois de suite.
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 49
Percipient : Il devra s’asseoir au début de la séance.
Demi-lumière, afin d’éviter les heurts.

F. — États émotifs

Ainsi que je crois avoir réussi à le faire comprendre,


l’émotion constitue la clef des actions à distance. Spon­
tanée, elle se communique d’elle-même et entraîne
parfois à l’improviste un phénomène de percipience
intégrale. Nous avons vu, au chapitre précédent, pour­
quoi et comment il y a lieu de déclencher en soi-même
des poussées émotives lorsqu’on veut imposer sa pen­
sée. Ici, il s’agit de communiquer des états qu’on ima­
gine mais qu’on n’éprouve pas nécessairement. Les
praticiens entraînés de l’autosuggestion, qui ont appris
à faire réagir sur eux-mêmes leur imagination, sau­
ront tirer parti de cet acquis et se placer, en l’évo­
quant, dans tel ou tel état d’émotion. Deux méthodes
s’offrent à l’expérimentateur :
— Imaginer que l’on ressent une émotion quelconque
et que le percipient en a conscience ;
— Imaginer que le percipient ressent cette émotion
et tâcher de s’émouvoir soi-même de cette représen­
tation.
Il n’y a pas à considérer de progression. Tout état
affectif, nettement représenté, peut se communiquer
aussi bien qu’un autre. L’émetteur appréciera lui-
même, d’après sa propre psychologie et celle du per­
cipient, quels états conviennent le mieux.

G. — Transmissions littérales

Transmettre une phrase ou un ordre, littéralement,


sans l’aide d’un élan émotif, nécessite une concen­
tration attentive exemplaire et, d’autre part, une per-
50 l’influence a distance

cipience aiguë. Il y a des exceptions à cette règle —


du moins des exceptions apparentes. J’ai constaté chez
quelques rares individus, une étrange facilité de sug­
gestion littérale même sur des personnes non préve­
nues. Ainsi, l’un de mes élèves qui, sans enthousiasme,
avait à la veille d’une entrevue, suggéré à un ami —
et à l’insu de celui-ci — de lui adresser une proposi­
tion déterminée, s’entendit effectivement proposer ce
qu’il désirait et cela dans les termes mêmes où il
l’avait suggéré.
Le procédé le plus rationnel consiste à écrire la for­
mule à communiquer, d’une écriture ferme, claire, ré­
solue, sur un papier clair, à exposer ce papier sous
les rayons d’une forte lampe et à en répéter les ter­
mes, en les suivant du regard, en les énonçant menta­
lement, en imaginant leur assonance, en les exprimant
ensuite sous forme imagée mais avec l’idée persistante
que le sujet comprend, acquiesce. Il faut voir ce der­
nier donner des marques d’acquiescement, se le figu­
rer présent et attentif, comprenant d’emblée.
Le percipient utilisera un écran clair, comme pour
la réception des images. Si le sens de la phrase est
émouvant, ce sera un élément de succès très appré­
ciable.
V. — LA SUGGESTION MENTALE SUR
DES SUJETS D’EXPÉRIENCES
ÉVEILLÉS OU PRÉALABLEMENT HYPNOTISÉS

» Le cumberlan-
La suggestion men-
A l’état d’hypaose. — Conception vraie
Procédé dI ’hypnotisation. — Comment la
Indications pratiques.

Quand on opère chez soi sur des sujets présents et


qu’on peut renouveler les essais, il est possible d’en­
traîner ces sujets, de développer leur percipience, soit
à l’état de veille par un procédé que je vais décrire,
soit à l’état d’hypnose, au moyen de suggestions verba­
les réitérées.

A l’état de veille

Entraînement de la passivité mentale par les pro­


cédés de Cumberland. — Ce procédé repose sur les
inévitables manifestations musculaires de la pensée.
Tenez le poignet d’une personne qui pensera forte­
ment à vous faire exécuter un mouvement quelcon­
que : vous percevrez, avec un peu d’attention, une im­
pulsion que son bras reçoit de son cerveau et trans­
met à votre main. Certains expérimentateurs, virtuo­
4-
52 l’influence a distance

ses de cette lecture musculaire, arrivent à simuler avec


son aide la lecture de pensées. Ils vous prient de leur
commander mentalement un acte, vous saisissent le
poignet et interprètent assez habilement ses tressaille­
ments pour exécuter, guidés par vous-même, l’acte re­
quis. Pour réussir cela, il faut savoir dérober son/ at-
tention aux impressions extérieures, aux enchaîne­
ments d’idées qui tendent à se poursuivre dans l’esprit,
aux supputations que l’imagination enfante si volon­
tiers, en un mot, il faut se placer dans une condition
aïdéique, réaliser ce que les écoles psychiques orien­
tales nomment la nuit mentale.
Le cumberlandisme permet donc d’exercer un sujet
à se rendre passif, à interrompre son activité intellec­
tuelle, ce qui aiguise considérablement sa percipience
relative aux suggestions mentales sans contact. Voici
pourquoi j’utilise et je conseille ce procédé — connu
sous le nom de son inventeur — et dont voici la tech­
nique détaillée :
1° Choisir, dans le local où l’on opère, un endroit
où l’on viendra se placer avec le sujet à chaque essai.
Ce sera le point de départ de toutes les trajectoires
qu’on lui suggérera ultérieurement ;
2° Imaginez un acte à accomplir par le sujet. Au
début, ce sera quelque chose de simple, par exemple :
aller dans la pièce voisine, y saisir un objet et le dé­
poser sur une chaise ;
3° Décomposez cet acte en autant de mouvements
partiels qu’il en faut pour l’accomplir. Exemple : mar­
cher vers la porte, — se tourner vers la porte, — lever
le bras, — l’avancer vers le bouton de porte, — saisir
celui-ci, — le tourner, — tirer (ou pousser), — entrer
dans la pièce où se trouve l’objet à prendre, — avan­
cer jusqu’à cet endroit, — s’arrêter, — lever le bras,
— saisir l’objet, — retirer le bras, — se tourner vers
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 53

la chaise, — marcher vers la chaise, — y déposer


l’objet ;
4° Demandez au sujet de vous tenir le poignet droit
avec sa main gauche, assez fermement ;
5° Concentrez votre attention sur le premier des
mouvements à suggérer (marcher). Imaginez-vous voir
le sujet avancer une jambe, puis l’autre. Insistez sur
cette représentation jusqu’à ce qu’il parte. Continuez
à le pousser, par la pensée, en le suivant. (Il doit vous
conduire, marcher devant vous, ce qui, en présence de
profanes, crée tout à fait l’illusion d’une lecture de
pensées). Lorsqu’il arrive au terme de l’exécution du
premier commandement, donnez-lui le second, tou­
jours sous forme d’image accompagnée d’un ordre
mental énergique ;
6° S’il se trompe, voyez-le interrompre le mouve­
ment erroné, en commandant : « Arrêtez ! ». Quand
il s’est interrompu, reprenez la suggestion au point où
vous l’avez laissée ;
7° En poursuivant la série de vos suggestions par­
tielles vous assurerez l’exécution intégrale de l’acte
désiré.
Avec l’habitude, on parvient à obtenir l’accomplis­
sement des actes les plus complexes avec une rapidité
surprenante. Cela pourrait servir de jeu de société ou
même d’attraction pour salle de spectacles. Au point
de vue où nous nous plaçons ici, le procédé de Cum­
berland prédispose le sujet et l’opérateur à la sugges­
tion mentale sans contact, car s’il développe la perci-
pience du premier, il entraîne, en même temps, le se­
cond à la concentration de pensées.
Expérimentation sans contact. — Il est bon de choi­
sir un sujet auquel la méthode de Cumberland soit
familière et un moment où ce sujet paraisse bien dis­
posé. L’objet des tentatives reste à peu près indiffé-
54 l’influence a distance

rent, mais je conseille de toujours commencer par


l’une ou l’autre des deux expériences ci-dessous :
I. — Disposez sur deux ou trois tables dix, vingt,
trente objets. Procédez d’abord avec contact jusqu’à
ce que le sujet arrive devant celle des tables où se
trouve l’objet que vous spécifiez mentalement. Là, ces­
sez le contact et poursuivez votre effort suggestif. Le
percipient ne devra pas se hâter, mais attendre une
impulsion assez nette. Faut-il dire que, dans cette expé­
rience comme dans les précédentes, l’émetteur expri­
mera ses suggestions en images ? S’il veut bien, la
veille, ou même plusieurs jours à l’avance, consacrer
un peu de temps à étudier l’objet afin d’en construire
une image bien précise, l’expérience n’en marchera
que mieux.
IL — Bandez les yeux du sujet et, vous plaçant der­
rière lui, efforcez-vous d’en obtenir quelques mouve­
ments sur place : lever un bras, tourner la tête, etc...
Ensuite faites décrire une trajectoire bien déterminée.
Tous les essais du chapitre IV (communication con­
centrée) peuvent naturellement être pratiqués avec un
sujet entraîné comme on vient de le voir.

A l’état d’hypnose

J’étonnerai sans doute plus d’un parmi mes lec­


teurs — en particulier parmi ceux, très nombreux, qui
ont obtenu et étudié les phénomènes décrits dans ma
Méthode scientifique moderne de Magnétisme, Hypno­
tisme, Suggestion — si je leur dis que la réalité des
états d’hypnose est mise en doute, voire niée, par des
hommes que leurs titres intronisent comme d’ultimes
compétences. Ces sagaces ont discerné le caractère
simpliste des théories de Braid, l’excessive rigidité de
celles de Charcot, l’imprécision des doctrines de Lié-
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 55

beault et les imaginations trop abondamment mêlées


au système des magnétistes. Ils ont ensuite, grave­
ment, jeté l'enfant avec le bain. Jugeant inopportune
la longue dépense de temps et d’efforts* indispensable
à qui veut se livrer à de fréquents essais d’obtention
des états psychiques particuliers jadis étiquetés « hyp­
nose » (1), les doctes négateurs en question ne sau­
raient se targuer d’un critère expérimental suffisant.
A ce dernier seul devront recourir ceux qui tiendront
à savoir.
Essayez les manœuvres hypnotiques sur cent indi­
vidus quelconques. Vous n’observerez peut être pas
sur un seul d’entre eux les fameux états classiques (2)
(catalepsie, somnambulisme et léthargie) — produits
de la conjonction d’un terrain nerveux spécial, d’un
procédé singulier et de l’influence doctrinale de la
Salpêtrière — mais à coup sûr d’étranges modifica­
tions momentanées de la condition psychique normale
des sujets. Parmi ces modifications figureront dans
20 % environ des cas, l’inconscience et le degré de
suggestibilité qui permet d’éteindre la sensibilité et
d’impressionner le système nerveux au point d’activer
ou de ralentir instantanément toute fonction.
Vous constaterez non pas un état fixe, toujours sem­
blablement conditionné, mais autant d’hypnoses dif­
férentes que de sujets affectés.
Cette diversité, bien faite pour dérouter quiconque
n’a pas mis à l’épreuve un grand nombre de sujets,
cette inconsistance qui égare le jugement de quelques
illustres neurologues et psychiâtres, elle n’a échappé
à aucun de ceux qui, ayant fait de l’hypnotisme la

(1) Quoique ces états présentent rarement avec le sommeil l’analogie


impliquée par le choix du vocable hupnos.
(2) Dont les manuels préparatoires au doctorat en médecine décrivent
encore le détail, quoique les théories hypnotiques de Charcot soient
aujourd’hui désavouées officiellement.
56 l’influence a distance

principale affaire de leur vie, l’ont assidûment pra­


tiqué et en demeurent les véritables maîtres. Do-
nato (1) signalait, dans un ouvrage paru en 1882 (2),
la fugacité des caractères classiques de l’hypnose.
Alexandre Lapôtre (3) l’analyse dans un de ses ou­
vrages (4). Je l’indiquais moi-même dans mon premier
travail, un modeste opuscule, publié en 1909 (5).
La digression qui précède m’a semblé un utile
préambule à l’exposé des procédés que je conseille
pour provoquer l’hypnose, car elle commente la direc­
tive essentielle à toute tentative hypnotique : ne pas
s’attendre à une sorte de déclenchement après lequel
le sujet se trouve réduit à l’état d’automate passif et
inconscient, mais chercher une altération plus ou
moins accentuée de l'activité psychique consciente sur­
venant parallèlement à une extension de l’activité psy­
chique subconsciente. Cette dernière extension com­
porte celle de la percipience des suggestions mentales.
D’où l’intérêt de l’hypnose au point de vue des phéno­
mènes dont traite ce livre.
Procédé pour provoquer un état d'hypnose. — Ne
vous souciez ni de l’âge, ni du sexe, ni du degré de
vigueur physique (6), ni des qualifications intellec-
(1) Alfred, Baron d’Hont, dit Donato, décédé à Paris en 1900, cl
dont le nom est devenu la commune étiquette d’un certain nombre
d’imitateurs.
(2) La Fascination Magnétique, par Calvailhon, préface de Do
nato, Paris 1882, Dantu, éditeur.
(3) Célèbre vulgarisateur qui a bien mérité son titre de Plus grand
Hypnotiseur Français en donnant durant 25 années, à peu près chaque
soir, des démonstrations d’hypnotisme rigoureusement loyales.
(4) Méthode Pratique F Hypnotisme, 2e édition, Paris, 1924, l e
Soudier, éditeur. Préface du Dr H. Jean. Notes du Dr Joly.
(5) Hypnotisme et Suggestion, Paris, 1909. Eichler, Éditeur.
(6) Mieux vaut exclure : 1° les épileptiques ; 2° les hystériques :
3° les cardiaques ; 4° les candidats à la paralysie ou ceux qui en oui
eu, non qu’il y ait le moindre danger, mais s’il survenait au malade,
peu après l’hypnotisation, quelque désordre consécutif à son étal,
on ne manquerait pas de l'imputer à l'expérimentateur.
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 57
tuelles du sujet. L’aptitude aux états seconds dépend
d’un ou plusieurs éléments mal définis qu’aucune ca­
ractéristique appréciable n’exclut (1). Faites asseoir
votre collaborateur éventuel en face de vous et de
l’éclairage, auquel vous tournerez le dos.
1° Pressez dans vos mains les pouces du sujet. In-
vitez-le à vous regarder. Dirigez et maintenez votre
regard au point équidistant des bords internes de ses
yeux. Pensez attentivement qu’il va donner des signes
de fatigue oculaire. Continuez jusqu’à ce que le ré­
flexe palpébral s’accélère notablement. Si cela ne se
produit pas au bout de cinq minutes, passez tout de
même à la seconde manœuvre.
2° Présentez devant les yeux du sujet, à dix centi­
mètres environ, une tige de bois ou de métal terminée
en boule, ou du moins en saillie. Invitez le sujet à
fixer la convexité et à suivre ses mouvements. Faites
décrire au point qu’il fixe, très lentement, une cycloïde
descendante, déplaçant le point de centre d’environ
un millimètre à chaque tour. En même temps, dites
d’une voix claire, posée, assez basse : « Vos paupières
deviennent pesantes, elles s’alourdissent. Vous sentez
comme un picotement dans les yeux, une lourdeur de
plus en plus nette dans les paupières. Vous voyez
comme un brouillard, comme un voile. Votre tête s’en­
gourdit. Votre vue devient confuse. Vos yeux se fer­
ment... », réitérez ces suggestions jusqu’à ce que l’oc­
clusion des yeux soit obtenue.
3° Passez derrière lui. Appliquez vos mains latéra­
lement contre sa face, à hauteur d’yeux, vos médius
légèrement appuyés contre les globes oculaires. Sug­
gérez l’alourdissement de la tête : « Votre tête de­
vient pesante, lourde, plus lourde, de plus en plus
(1) Pour les signes révélateurs des sujets faciles à hypnotiser, voir
ma Méthode Pratique de Magnétisme, Hypnotisme, Suggestion (Éditions
Dangles, Paris).
58 l’influence a distance

pesante. Elle pèse lourdement, comme du plomb... »


Insistez jusqu’à ce que la tête s’incline vers la poi­
trine.
4° Revenez devant le sujet. Placez vos mains à plat
sur sa tête, les pouces réunis au milieu de la ligne
d’implantation des cheveux. Décrivez sans arrêt, d’un
rythme constant, des frictions en demi-cercle, tangen-
tiellement aux sourcils, avec l’extrémité de vos pouces,
sur le front. Affirmez la venue du sommeil (1) :
« Maintenant vous avez sommeil. Vous sentez que vous
allez vous endormir. Vous éprouvez un besoin irrésis­
tible de sommeil. Le sommeil vous gagne, vous enva­
hit. Vous sentez comme un engourdissement général.
Vous vous endormez. Vous vous endormez de plus en
plus profondément. Tout devient noir, chacune de mes
paroles vous endort plus profondément. Sommeil...
sommeil... profond sommeil... Vous êtes endormi, si
bien endormi... que quand je dirai sept vous tombe­
rez dans un plus profond sommeil. » Comptez lente­
ment jusqu’à sept.
5° Pressez assez fermement la racine du nez et le
vertex du sujet et dites, en articulant très distincte­
ment : « Dormez, dormez, vous dormez. A chaque se­
conde vous dormirez plus profondément. Rien ne peut
vous éveiller avant que je le veuille. De plus en plus
profond sommeil. Endormi. Dormez ! »
Baissez votre éclairage. Soulevez délicatement une
des paupières du sujet. Si le globe de l’œil est ré­
vulsé, ou si la pupille se trouve soit dilatée, soit rétré­
cie notablement, la condition psychique du sujet s’est
modifiée. Elle diffère de la normale, dans le sens indi-
(1) C’est seulement après avoir obtenu : a) la fatigue oculaire, h)
l'occlusion des yeux, c) l’alourdissement de la tête qu’on doit se permettre
de suggérer le sommeil. La plupart des personnes éprouvent une appré­
hension de perdre conscience et réagissent inconsciemment contre
les effets hypnotiques au seul mot de sommeil. Déjà très alourdie,
elles réagiront beaucoup moins.
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 59
qué p. 56, lignes 11 et suivantes. Vous pouvez essayer
les diverses épreuves usitées pour apprécier le degré
de l’hypnose : anesthésie suggérée, contractures syner­
giques, indifférence à l’olfaction de l’ammoniaque,
etc... (1). En donnant au sujet deux ou trois ordres
verbaux, vous jugerez de sa passivité. Quoi qu’il en
soit, donnez-lui plusieurs fois les suggestions suivan­
tes : « Vous ne pensez à rien. Vous cessez de penser.
Vous ne pouvez penser que ce que je vous suggérerai
verbalement ou mentalement. Je vais concentrer ma
volonté sur diverses images, sur differentes idées qui
se communiqueront à votre esprit et s’imposeront à
votre attention ».
Ceci accompli, les essais de communication de pen­
sée ou de suggestion mentale pourront commencer, soit
d’après les données du chapitre IV, soit d’après celles
du présent chapitre en ce qui concerne l’expérimenta­
tion à l’état de veille.
Gardez-vous de douter de votre aptitude ou de croire
extraordinaire d’obtenir ces manifestations. Les débu­
tants ont d’ailleurs souvent la bonne fortune de ren­
contrer, dès leur premier essai, des sujets très doués,
très sensibles. Je dirai même que beaucoup ont réussi,
du premier coup, sous mes yeux, à obtenir des mani­
festations précises et instantanées.
Trois à cinq minutes d’action sont généralement né­
cessaires pour que le phénomène se produise. Mais
il arrive que l’émission mentale de l’opérateur agisse
dès la première seconde.
Un dernier mot : évitez d’opérer avec plus de deux
ou trois assistants, surtout au début, ou avec un nou­
veau sujet, et obtenez des personnes présentes un si­
lence recueilli.

(1) Voir à ce sujet ma Méthode Pratique de Magnétisme, Hypnotisme,


Suggestion. On y trouvera d’ailleurs d’autres procédés d’hypnotisation.
VI. — L’HYPNOSE PAR ACTION MENTALE

I. — Sur un sujet ayant été plusieurs fois hypnotisé par les moyens
ordinaires. 2. — Sur une personne n’ayant pas été l’objet d’hy-
pnotisations préalables.

I. — Sur un sujet ayant été plusieurs fois hypnotisé


par les moyens ordinaires.

On sait qu’il existe quatre facteurs d’hypnotisation :


a) les excitations sensorielles ; b) la suggestion ver­
bale ; c) la radioactivité physiologique ou magné­
tisme animal ; d) l’action psychique proprement
dite (1).
Lorsqu’on cherche à déterminer des phénomènes
hypnotiques sur un sujet présent, il est judicieux
d’utiliser ensemble les quatre éléments d’influence.
Outre l’avantage quantitatif de leur totalisation, on a,
ainsi, la certitude d’affecter celui des modes de sensi­
bilité qui prédomine chez le sujet. Certains individus
sont, en effet, plus sensibles au facteur a), d’autres au
facteur b), etc...
Quand on désire réaliser la possibilité de provoquer
l’hypnose à l’improviste et à une distance plus ou
(1) Voir ma Méthode Pratique de Magnétisme, Hypnotisme, Sug­
gestion (Éditions Dangles).
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 61
moins étendue, le facteur d) restant le seul utilisable,
le succès sera plus facile avec un sujet qui y soit plus
sensible qu’aux trois premiers, ce dont on peut aisé­
ment s’assurer en soumettant chacun des sujets dont
on dispose à quatre séries de créations respectivement
sensorielles, verbales, magnétiques et psychiques.
Faute de choix on peut essayer sur un quelconque
hypnotisable.
Après avoir entraîné le sujet à percevoir les sugges­
tions mentales, suivant les instructions données au pré­
cédent chapitre, il devient possible de l’endormir et de
l’éveiller par un simple effort de volonté.
Quand ce dernier résultat devient coutumier, qu’il
ne demande plus guère d’effort, on l’obtient à grande
distance aussi bien qu’à quelques mètres. Un compte
rendu extrêmement intéressant d’une expérience de
ce genre, plusieurs fois répétée, par un comité de sa­
vants et de médecins (notamment P. Janet, Myers, Gi-
bert, Marillier et Ochorowicz) a été donné par M. Ocho-
rowicz, agrégé de l’Université de Lemberg, dans
son livre intitulé Suggestion mentale (Doin éditeur,
Paris, 1887). On en trouvera d’autres dans celui de
Boirac, recteur de l’Académie de Dijon, La Psycholo­
gie inconnue (Alcan, éditeur, 1913).

Sur une personne n’ayant pas été l’objet


d’hypnotisations préalables

Le lecteur attentif des trois premiers chapitres de


ce livre sait que les avis sont partagés quant à la pos­
sibilité d’un tel phénomène ; il connaît les bases de
l’opinion affirmative ; il conclura que seule l’expé­
rience, personnellement réalisée, peut, en l’occurrence,
donner à chacun une certitude.
J’ai montré au chapitre III comment influer à dis­
62 l’influence a distance

tance, sur quiconque, à son insu. Quel que soit le ré­


sultat cherché, l’hypnose en particulier, la technique
préparatoire et opératoire reste celle du chapitre en
question. C’est dire que, dans la presque totalité des
cas, il serait vain d’attendre un état second, bien ca­
ractérisé, d’une seule séance d’action mentale. Comme
pour tout autre effet conforme à une image précise, la
répétition de l’effort émissif est indispensable.
D’ailleurs, une essentielle condition s’impose, en
conformité des principes exposés au chapitre III, à
quiconque veut tenter d’obtenir l’hypnose à distance
sur des sujets non « travaillés » : c’est d’être rompu
à l’expérimentation hypnotique ordinaire, celle qu’on
pratique à l’aide du regard et de la parole sur des per­
sonnes présentes. Seul un expérimentateur à qui la
production de l’hypnose est devenue familière peut en
imaginer, en suggérer précisément la venue. Je crois
avoir, par ailleurs, suffisamment insisté sur le rôle im­
portant des images mentales en télépsychie.
Les diverses représentations à utiliser pour l’essai
d’obtention de l’hypnotisme à distance sont les sui­
vantes :
1° Image du sujet, présent, assis face à l’opérateur
comme pour l’hypnotisation verbale ;
2° Image de l’exécution de la première manœuvre
(décrite page 56) et des effets qu’elle détermine ;
3° Images successives des manœuvres qui suivent
la précédente (pages 56 à 59) et de leurs effets res­
pectifs ;
4° Image du sujet en état intégral d’hypnose.
L’élan volitif dont on sait l’indispensable ardeur
sera, ici, caractérisé par une intention résolue de pro­
voquer le sommeil hypnotique. Cette intention, à elle
seule, suffirait à affecter le sujet, pourvu qu’on l’émette
longuement et qu’on la réitère chaque jour pendant
quelques semaines. Mais, sans représentation bien
PRODUCTION DE PHÉNOMÈNES SUR DES SUJETS 63
nette de l’état qu’on désire, on influerait dans une
forme imprécise et le sujet éprouverait une sorte mal
définie d’engourdissement.
Il va sans dire qu’une fois l’hypnose obtenue, la
suggestion devient possible. De même qu’un sujet que
vous endormez par le regard et la parole atteint son
degré maximum de suggestibilité, celui qu’on hypno­
tise par action à distance devient suggestible mentale­
ment, tant qu’il est maintenu dans l’hypnose.
Le réveil ne présente pas de difficulté. Il s’effectue
dès qu’on le suggère, comme dans l’expérimentation
ordinaire.
TROISIÈME PARTIE

Adaptations diverses
VII — LA COMMUNICATION
TÉLÉPSYCHIQUE DES SENTIMENTS

Considérations générales. — Le dynamisme passionnel. - L’arrêt


de la dispersion du dynamisme. — La gestion intérieure, — Le
plan. — Les notes de disponibilisation. — Le rapport. — Détail
de l’émission journalière.

Considérations générales.

Dans un précédent ouvrage consacré aux doctrines


hermétiques (1), j’ai évoqué l'occulte puissance d'at-
tract, inséparable de toute véhémence intérieure. Je
vais, ici, dépouiller cet arcane de ses voiles hiérati­
ques, en profiler nettement le lumineux relief, afin qu’il
dispense aux meurtris sa clarté bienfaisante. Ma tâche
se trouve, d’ailleurs, largement ébauchée. L’attentif
lecteur des trois premiers chapitres de ce livre a déjà
compris que, dès l’instant où une âme s’émeut inten­
sément d’amour, d’affection, d’amitié, elle dispose
spontanément d’une possibilité d’influence psychique
proportionnelle à l'ardeur du sentiment qu’elle
éprouve.
Disons — pour prévenir une inévitable objection —
que l’insuffisance de cette conditionnelle ardeur expli­
que l’inopérance de multiples sincérités et que, seule,
(1) Science Occulte et Magie Pratique (Editions Dangles).
5
68 l’influence a distance

sa gestion réfléchie assure son efficace retentissement.


De ceci, par ailleurs, notons le corollaire : Quand la

pirer l’amour, de le perpétuer ou de le faire renaître,


peu de recours leur sont offerts par l’action télépsy­
chique, car on ne communique pas un état si on ne
l’éprouve ; qu’on le puisse imposer, c’est quelquefois
vrai, mais la fermeté dominatrice, l’impérieuse exal­
tation, indispensables pour cela supposent soit d’excep­
tionnelles prédispositions, exclues des caractères vul­
gaires, soit des prérogatives acquises au prix d’une
ascèse dispensatrice de singulier détachement.
Aux seules tendresses véritables, aux seules passions
spécifiquement amoureuses, s’adresse donc ce qui va
suivre. Quoique égoïstes tant qu’elles se soucient de
recevoir et non uniquement de donner, elles sont cer­
tainement utiles à l’évolution de beaucoup et toujours
préférables aux tiédeurs mornes de l’inertie.

Le dynamisme passionnel.
Dès qu’une passion s’éveille, toutes les ressources
intérieures semblent s’accroître. Une impulsivité inac­
coutumée anime à la fois l’organisme, l’imagination
et la volonté. On a l’impression de sortir d’une longue
torpeur et de commencer seulement à vivre avec plé­
nitude. En particulier, la pensée est considérablement
plus active qu’à l’habitude. C’est que la vigueur ani-
mique s’élabore abondamment. On voit d’emblée l’im­
portance de cet afflux : condition première d’une irra­
diation puissamment influente, l’élaboration abon­
dante des énergies psychiques suffit à entraîner la
communication des dispositions qui la gênèrent, à
affecter leur objet et à éveiller en lui des dispositions
réciproques.
Malheureusement, la réceptivité de ce dernier peut
ADAPTATIONS DIVERSES 69
se trouver perturbée par une ou plusieurs causes : dis­
sonances foncières entre les deux caractères, inclinai­
son ressentie pour quelque autre, rivalité, lassitude,
préoccupation dérivative. Alors l’influence spontanée
de la pensée ne suffit pas ; il faut user de son influence
condensée et réfléchie, de manière à doubler, à tri­
pler, à décupler sa puissance. Nous avons vu, au cha­
pitre III, comment procéder en général pour cela.
Nous allons maintenant préciser, en l’adaptant au cas
particulier de difficulté sentimentale, l’enseignement
du chapitre en question. Retenons, avant tout, ceci :
Du moment où il y a passion, sentiment, désir, pourvu
que l'ardeur en soit vive, on dispose d'une puissance
suffisante pour influer sur qui suscita cet élan. Mais
si l’élaboration de l’énergétisme psychique est alors
assurée, sa condensation exige un arrêt immédiat de
l’émission discontinue, à laquelle sont enclins les
cœurs malheureux. Cette dispersion constitue un écueil
des plus graves. Si l’on ne sait, préalablement à toute
tentative d’action à distance, dominer l’agitation qui
éparpille, sans utilité, l’énergie psychique, l’espoir
d’aboutir renonce à son seul appui.

L’arrêt de ïa dispersion du dynamisme.

Les déconvenues, les meurtrissures, les chagrins


sentimentaux deviennent volontiers obsédants. L’idée
fixe s’implante, agite sans cesse l’esprit, entraîne l’ima­
gination aux vagabondages les plus délirants et retient
si despotiquement l’attention que le sommeil même
devient malaisé. Pour certains, s’arracher un moment
à l’évocation des mille et une songeries expressives de
leur état, cesser l’espèce de possession fictive par quoi
ils trompent leur douleur, semble un vrai supplice.
Cette perpétuelle tension impossible pour tout autre
objet — apparaît spontanément dans la passion con-
70 l’influence a distance

trariée en raison même de l'afflux énergétique insé­


parable de tout état affectif intense, ardent, violent.
Elle engendre une émission psychique continuelle et
disperse inévitablement en mille pensées, paroles, im­
pulsions, le dynamisme qu’elle suscite. Il en résulte
que l’intéressé ne dispose à aucun moment d’un poten­
tiel suffisamment condensé pour agir avec force. C’est
pourquoi ceux qui prétendent que « si la télépsychie
existait, ils auraient beaucoup d’influence, puisqu’ils
pensent toute la journée à l’objet de leur préoccupa­
tion » se fourvoient.
Supposez que d’une fenêtre, au quatrième étage,
vous vouliez abattre un obstacle situé dans la rue et
que, pour cela, vous disposiez d’un stock journalier de
50.000 feuilles de papier. Si, de l’aube au couchant,
vous en jetiez, vers l’obstacle, une par seconde, cela
n’aurait aucun effet. Mais si, réservant votre stock pour
un moment déterminé, disons de cinq à six heures,
vous le répartissiez en paquets d’un ou deux milliers
de feuilles et qu’à l’heure prévue vous bombardiez
l’obstacle avec ces masses compactes, vous l’ébranle­
riez peu à peu pour le voir bientôt s’écrouler. Compa­
raison simpliste, puérile, soit, mais à coup sûr point
inutile à faire comprendre : 1° l’inanité d’escompter
un effet quelconque d’une idée fixe inlassablement res­
sassée et, 2° la nécessité de suspendre durant des heu­
res son débit d’énergie mentale quand on veut s’en
constituer une réserve susceptible d’être efficacement
projetée.
La première règle à observer pour tenter de commu­
niquer un sentiment consiste à s’interdire durant
vingt-deux ou vingt-trois heures sur vingt-quatre, d’y
penser, du moins constamment. Il faut, de propos déli­
béré, détourner son attention du sujet et de ce qui se
rapporte à lui, fixer cette attention sur des ordres
d’idées, des besognes, des dérivatifs prévus. Ceux qui
ADAPTATIONS DIVERSES 71

ne sont pas pratiquement familiers avec les principes


élémentaires de l’éducation psychique, en particulier
avec le changement volontaire de pensée, trouveront
terriblement difficile de résister à l’impulsion passion­
nelle qui tend à accaparer leur mental — et de l’en­
diguer jusqu’au moment journalier choisi pour la pro­
jection méthodique du potentiel ainsi accumulé.
Il faut aussi s’imposer l’effort de contenir les paro­
les et les impulsions diverses qu’on se sent porté à
extérioriser sous la pression du dynamisme émotion­
nel ; ne pas céder à la tentation de parler, de se con­
fier, de s’épancher, en un mot retenir en soi la force
chaque fois que sous une forme plus ou moins insi­
dieuse elle cherche à se libérer.
Ce n’est, certes, pas agréable, mais n’y a-t-il pas une
compensation énorme à songer qu’ainsi on s’arme pour
combattre la difficulté ? pour obtenir ce à quoi on tient
par-dessus tout ?
La gestion intérieure.
L’adepte bien pénétré de ce qu’il constitue un géné­
rateur d’énergie — cette énergie qu’il s’agit d’utiliser
en l’émettant méthodiquement — observera, outre les
règles précédentes, les principes les plus idoines à
l’élaboration maximum et à la condensation soigneuse
de ses forces psychiques. Pour le moral, ce sera un
emploi du temps précis, ne laissant nulle lacune à la
faveur de quoi les spontanéités imaginatives ou exté­
rieures puissent reprendre leurs cours ; pour le phy­
sique, une hygiène générale (1) minutieuse. A ce su­
jet, relire le chapitre III.
L’isolement (2) favorise la condensation. Il se re-
(1) Un régime très détaillé et spécialement étudié pour le cas dont
nous traitons ici a été exposé dans la Méthode pratique de développement
du charme personnel (Éditions Dangles, Paris).
(2) Être seul ou parmi la foule anonyme c’est être isolé.
72 l’influence a distance

commande à ce point de vue. Il facilite, d’ailleurs, la


surveillance de soi-même, laquelle vise à maintenir ses
pensées, ses paroles, ses actes en mode constamment
réfléchi.
La concentration en soi-même du dynamisme émo­
tionnel tend à déterminer un attract, une sorte d’ai­
mantation psychique constamment agissante sur le su­
jet. Aussi convient-il de s’interdire tout empressement
à son égard, de ne chercher ni à le voir ni à l’éviter
et de conserver, en sa présence éventuelle, l’attitude
de la plus courtoise indifférence. Sous l’empire de
l’attirance qu’il ne tarde pas alors à ressentir, le sujet
éprouve un désir de plus en plus obsédant d’appro­
cher de qui influe ainsi sur lui, de le rechercher, d’ob­
tenir son attention, de demeurer dans son ambiance.
N'allez pas vers lui : attirez-le à vous : telle est la
règle d’or.

Le pian. Les notes de disponibilisation.


J’ai expliqué au chapitre III qu’un plan d’ensemble
devait être médité et arrêté dès qu’on projette d’user
d’action à distance. Il s’agit de bien supputer le pro­
cessus graduel des modifications qu’on veut apporter
aux dispositions morales du sujet. Envisager un chan­
gement radical instantané serait téméraire (1). Il faut
se donner un mois, deux mois, six mois, davantage au
besoin, pour affecter graduellement le sujet en lui
communiquant d’abord des pensées compatibles avec
ses dispositions actuelles, puis de nouvelles considé­
rations qui le modifieront plus appréciablement et
ainsi de suite. Pour chaque jour on doit prévoir une
séance d’émission d’une à deux heures.
Tout en s’efforçant, au cours de la journée, d’endi-

(1) J’ai cependant vu obtenir des revirements incroyablement rapides


mais ceci reste exceptionnel.
ADAPTATIONS DIVERSES 73

guer, comme il a été dit, l’afflux de pensées qui sur­


gissent, relativement à ce que l’on désire, il faut noter
celles qui, particulièrement émouvantes, devront être
volontairement évoquées immédiatement avant l’émis­
sion journalière conformément aux instructions don­
nées page 34.
Le rapport.

Les indications de la page 35 pourront être utilisées,


mais ici le rapport ne nécessite aucun travail spécial,
car il existe nécessairement. De même que, du moment
où il y a passion, inclinaison, sentiment, il y a dyna­
misme, il y a aussi rapport. Cela explique comment
l’un se trouve parfois plus ou moins affecté, à l’ins­
tant, par les pensées, les émotions ou les souffrances
de l’autre.

L’Émission journalière.
Deux séances de trois quarts d’heure à une heure, ou
une séance d’une à deux heures sont généralement
nécessaires. L’isolement, le silence et l’obscurité favo­
risent toujours l’émission télépsychique. Mais tout ceci
n’a rien d’impératif. L’essentiel c’est d’atteindre un
état d’exaltation où ce que l’on veut soit ressenti in­
tensément et accapare entièrement le champ de la
conscience. Il ne suffit pas de constater, en une sorte
de colloque intérieur, son désir. Tout l’être doit vibrer
ardemment, se sentir résolu à affecter la personnalité
convoitée. Adjurer ou implorer le sujet, dans un mode
plaintif, de sympathiser avec soi serait peu efficace.
Seules conviennent les suggestions positives, affirma­
tives, et l’image du sujet témoignant qu’il se sent ga­
gné par leur influence.
Pour déterminer en soi-même l’état irradiant, l’usage
d’un stimulant nervoso-psychique a son utilité, car,
74 l’influence a distance

ainsi qu’on l’a vu au chapitre III, l’absorption des exci­


tants tire des plexus la force nerveuse qui s’y trouve
emmagasinée et la jette dans le torrent circulatoire,
d’où le cerveau l’attire et s’en sustente. Mais la considé­
ration successive de tous les motifs pour lesquels on
tient à obtenir ce que l’on veut, de toutes les satis­
factions qui découleront du succès, puis de toutes les
conséquences douloureuses de l’insuccès, suscite plus
sûrement encore la véhémence volitive. Se représen­
ter tout cela en tableaux bien nets, vivants, y assister
par la pensée, goûter, en imagination, les joies et
souffrir les douleurs, tel est le secret de l’animation in­
dispensable à une efficace télépsychie.
Dès qu’on se sent en pression, il est judicieux de
commencer l’émission proprement dite par l’évocation
de l’image du sujet. Je répète ici ce que j’ai dit, page
36 : « Quelle que soit l’heure, du moment où l’image
de quelqu’un comparaît sur l’écran de votre imagina­
tion, tout ce que vous penserez durant la comparution
influera appréciablement sur lui. »
Secondement, je recommande de suggérer au sujet
l’obsession du visage de l’expérimentateur. Pour cela,
il suffit de se représenter le sujet voyant lui apparaî­
tre cette image, penser à qui elle représente, laissant
capter son attention par ce personnage. On imaginera
que le sujet éprouve à ceci un vif agrément et qu’il
s’abandonne au charme. De là, par des transitions
logiques, on peut évoluer la représentation mentale du
sujet dans un sens conforme aux caractéristiques du
cas. Par exemple, lui suggérer le besoin de vous voir
ou de vous écrire. Vouloir fortement qu’il éprouve
cela et se figurer qu’il y donne une suite effective.
Si l’expérimentateur sait que le sujet apprécie ou
apprécia de lui telles ou telles manifestations intellec-
tives, sentimentales ou sensorielles, il suggérera de
ADAPTATIONS DIVERSES 75

cela un rappel prolongé, suivi d’un regret puis d’un


désir de réitération.
Une autre forme d’action mentale, très efficace, con­
siste à imaginer la présence du sujet et à lui parler
— à haute voix ou intérieurement — en le voyant té­
moigner qu’il comprend, qu’il est touché, troublé, qu’il
acquiesce.
Quoiqu’il ne soit guère praticable de donner des
instructions détaillées pour tous les cas, les directives
précédentes ont tenté d’enclore ce qui, pour chacun,
constitue l’essentiel.
Il existe des recueils de sortilèges qui laissent espé­
rer de l’accomplissement matériel d’un certain nom­
bre de pratiques bizarres l’immanquable obtention de
l’amour. On y trouve, en particulier, la recette de
philtres — tout bonnement aphrodisiaques — et celle
de l’envoûtement. Cette dernière, compliquée, étrange,
impressionnante, paraît combinée à dessein d’exercer
à la fois l’imagination, l’initiative et la volonté, de
provoquer ainsi l’exaltation la plus frénétique, et, par­
tant, l’émission télépsychique la plus vigoureuse. Là
comme ailleurs, une dépense considérable d’énergie
se trouve nécessitée. L’élan émotionnel de l’opérateur,
suscité et longuement soutenu par la succession des
rites, fait tous les frais de l’expérience. Que des agents
occultes (1), invisibles, coopèrent à l’action de l’expé­
rimentateur, loin d’y contredire, j’en ai la certitude
expérimentale, en ajoutant que la méthode indiquée
ici les♦ conjure tout aussi bien, sans formules cabalis-
tiques.

(1) Voir Science Occulte et Magie Pratique. Chapitre VIII : Le


médiateur des puissances.
VIII. — LE TRAITEMENT MENTAL DES MALADIES

La base émotionnelle de tout traitement mental. — Effets curatifs


de l’action psychique. — Choix du médicateur. — La chaîne. —
Directives générales. — Durée de l’action journalière. — Les
maladies chroniques. — Les maladies psychiques, habituelles,
toxicomanie, perversion, monomanies, obsessions, etc..., etc...
Action inconsciemment fâcheuse de certains entourages. — La
pensée peut tuer. — Importance pour le malade d’un moral
bienveillant.

L'efficacité d’un traitement par action mentale né­


cessite, avant tout, de la part du ou des expérimenta­
teurs, un vif sentiment de compassion envers le ma­
lade et envers ceux qui pâtissent de son état. Je sais
des exemples d’enfants chétifs que l’amour d’une
mère, matériellement fort limitée, a peu à peu forti­
fiés jusqu’à la robustesse. J’ai vu des mourants rappe­
lés à la vie et même des corps inertes ressuscités par
l’irradiation animique d’un des leurs, initié aux mé­
thodes de ce livre. Certes, l’amour ne remporte pas
toujours sur la mort, si ardent soit-il, une victoire
décisive. Il est de fatales lésions, d’irréparables usu­
res, d’incoercibles insuffisances. L’action mentale
transfuse à l’organisme en péril des énergies susten-
tatrices de ses autoréactions curatives, mais si ce der­
nier manque des ultimes ressources indispensables
pour réagir avantageusement, la guérison ne s’effectue
ADAPTATIONS DIVERSES 77
pas. Nombreux restent, en définitive, ceux qu’on pour­
rait sauver. Des autres, du moins, on soutiendra le
moral, on atténuera les souffrances, on prolongera la
vie.
Ce devrait toujours être un proche qui entreprenne
la cure, un parent, un ami intime, intégralement sym­
pathique au malade et animé du plus vif désir de
le soulager. Tout en laissant à une personnalité ainsi
qualifiée l’initiative directrice de l’intervention, plu­
sieurs personnes choisies parmi les plus affectionnées
au patient peuvent unir leurs efforts à ceux du prin­
cipal opérateur. Une chaîne de volontés accomplit par­
fois de véritables miracles, surtout composée d’au­
tant d’hommes que de femmes, le conducteur non
compris (1), afin d’observer la loi polaire des con­
cours fluidiques. Cette chaîne, l’occultisme préconise
de la prolonger dans l’invisible en évoquant le souve­
nir des disparus de qui le malade fut chéri, ce qui
aimante leur influence, et même en appelant à l’aide
les Êtres supérieurs tels qu’on les conçoit.
L’officiant et ses aides éventuels choisiront pour cha­
que jour un moment où ils se puissent réunir, du
moins où chacun, isolément sache disposer, là où il
se trouve, du temps de s’unir à l’intention des autres.
Ils concentreront leurs pensées sur l’image du ma­
lade (2) et, laissant leurs bons sentiments à son égard
s’épandre largement, ils déploreront ses souffrances,
et exalteront en eux-mêmes le désir de les atténuer,
de les annuler, d’irradier vers lui leur propre vitalisme
pour l’en conforter et le guérir. L’attention de chacun
devrait être successivement fixée, durant dix à quinze
minutes, sur les diverses pensées qui précèdent. Aussi
(1) Voir à ce sujet : Stanislas de Guaita : La Clef de la Magie Noire,
et Péladan : Le livre du sceptre.
(2) Si rien ne l’empêche, la chaîne peut se réunir à proximité du
malade : le voir aidera les effusions psychiques.
78 l’influence a distance

l’officiant sera-t-il judicieux en traçant une sorte de


programme comportant un certain nombre de formu­
les. Chaque collaborateur penserait ainsi en parfait
synchronisme avec tous les autres. Il ne s’agit pas,
bien entendu, de répéter des mots, mais de vivre inté­
rieurement, de sentir leur signification, d’animer des
images, de vibrer émotionnellement.
Après les ordres d’idées énumérés ci-avant, voici ce
qu’il convient d’envisager parmi les suggestions cura­
tives. D’abord, le sommeil, car c’est principalement à
la faveur de cet état que l’activité organique se joue,
thérapeutiquement (1). Suggérer au patient qu’il dorme
longuement, calmement, profondément. Se le repré­
senter dormant avec une expression physionomique
détendue, sereine. Le voir s’éveiller dans une impres­
sion de mieux-être, d’allègement. Ensuite, songer à ses
dispositions morales, lui communiquer l’espoir, la sé­
rénité, la conviction qu’on s’occupe utilement de lui,
la certitude que le faisceau des volontés concentrées
pour le guérir dispose d’une force bien supérieure à
l’action des agents adverses. Tâcher, aussi, de se re­
présenter avec une précision anatomique l’état actuel
des organes malades. Suivre par la pensée l’accom­
plissement des fonctions perturbées, les stimuler, les
régulariser d’intention. Enfin, visualiser la guérison,
la convalescence, le retour à l’activité normale. Cette
dernière représentation est d une grande importance.
Comme pour toute autre intervention télépsychi­
que, deux séances journalières de 45 à 60 minutes sont
nécessaires. Il va sans dire, d’autre part, que le trai­
tement mental ne proscrit nullement la médication
ordinaire.
(1) Aux temps de la Médecine dans les Temples, le Somnus médicus
était l’ultime remède dispensé à tous les maux. Plus près de nous, la
Neurhypnologie du Dr Braid, remit en évidence le rôle thérapeutique
du sommeil.
ADAPTATIONS DIVERSES 79
Dans les maladies chroniques, on pensera, avant
tout, à suggérer à l’intéressé de se conformer à toutes
les règles d’hygiène alimentaire et générale requises
par son cas. On aurait plus vite comblé le tonneau des
Danaïdes que guéri un patient adonné à des excès
ou même à l’usage modéré de quoi que ce soit d’anti­
physiologique.
On peut traiter et guérir par l’action mentale les
habitudes néfastes, les toxicomanies, les perversions,
les monomanies, la propension au suicide. Pour cela,
bien loin d’user de suggestions impératives prohibi­
tives, il faut affirmer à l’intéressé que l’obsession, la
tendance, la crainte dont il souffre lui devient de plus
en plus indifférente, qu’elle ne l’émeut pas, qu’elle le
trouve inerte, qu’elle lui laisse sa pleine sincérité. En
un mot, on doit imaginer que l’impressionnabilité du
sujet diminue quant à l’agent morbide. Parallèle­
ment, on cherchera à lui communiquer toute sorte de
pensées, de sentiments, de désirs antagonistes de ceux
qu’il s’agit de supprimer. On éveillera toutes les bon­
nes dispositions susceptibles d’exclure l’emprise du
mal.
L’entourage d’un psychopathe, à moins d’être initié,
fait presque toujours inconsciemment obstacle à sa
guérison. Plusieurs personnes s’affectent, depuis des
mois ou des ans, en mode appréhensif, angoissé, déses­
péré, autour du malade. Leurs influences mentales
additionnées constituent une puissance, et fâcheuse­
ment orientée. Ne pensent-elles pas qu’il ne saura s’ar­
rêter, s’amender, que son mal, héréditaire ou acquis,
est incurable, qu’il domine le malade et finira par le
briser ? Autant de suggestions qui incitent le malheu­
reux à continuer. Voir par avance une aggravation
et la croire inévitable, même si on la déplore ardem­
ment, c’est la conditionner, à moins qu’une violente
révolte intérieure ne suive ces pensées craintives.
80 l’influence a distance

Ainsi, l’influence psychique peut tuer aussi sûrement


qu’elle peut guérir. Comme la haine, comme l’avidité
d’un héritage, la désolation passive peut creuser une
tombe anticipée. K

L’antique usage des malédictions et imprécations,


dans lequel on ne voit communément qu’une attitude
oratoire, savait la puissance formidable des intentions
profondément ressenties, délibérément condensées et
nettement exprimées. Caré, Dathan et Abiron fou­
droyés au geste de Moïse, Ananias frappé à mort par
Pierre, Laubardemont assigné par Grandier à compa­
raître dans un mois au tribunal de l’invisible ; plus
près de nous Stanislas de Guaita et Boullan (1),
l’étrange cas de la gitane du docteur de Sermyn (2),
et nombre de faits moins connus manifestent du pou­
voir meurtrier de la pensée.
Sans même être visé par quiconque, ceux qui s’en­
tretiennent habituellement dans des dispositions hai­
neuses, malveillantes, sont en syntonisme cérébral
avec les myriades de vibrations psychiques, analogues
aux leurs, qui s’entrecroisent dans l’atmosphère. Ils
subissent l’effet destructeur de ces vibrations et en
souffrent. D’où la nécessité, dans tout traitement,
d’avoir égard au moral du malade, de l’inciter à l’ou­
bli des inimitiés et des injures, à la bienveillance, à
la bonté.

(1) Ces deux expérimentateurs se portèrent simultanément par


la voie hyperphysique des coups dont ils moururent l’un et l’autre.
(2) Voir l’ouvrage du docteur de Sermyn, cité page 18.
IX. — POUR COMBATTRE
LES MAUVAISES INFLUENCES

Troubles et déboires attribués à l’influence malveillante d’autrui.


— Persécutés et mythomanes. — Pourquoi la haine engendre
malaisément des effets télépsychiques précis. — Comment elle
peut agir. — Une loi générale. — Comment se défendre ? —
Comment défendre autrui.
r

Tous les neurologues, tous les psychistes, reçoivent


les doléances d’un certain nombre de personnes attein­
tes de troubles sensoriels ou cérébraux qu’elles impu­
tent à l’influence délibérée d’autrui. Elles attribuent
souvent aussi à cette influence leurs déboires et leur
insuccès.
C’est, presque toujours, un cas de fausse imputa­
tion, de mythomanie, explicable par un processus phy­
siologique. S’il est vrai, d’ailleurs, que nous avons,
presque tous, des envieux, des ennemis, des compéti­
teurs que notre défaite avantagerait ou que notre af­
fliction comblerait de joie, nul sans doute n’est capa­
ble de haine assez vibrante et assez soutenue pour
engendrer un véritable envoûtement. Qu’une pluralité
de mauvais vouloirs puisse nous affecter péniblement,
je le crois, mais pas avec la précision et l’intensité
admises par certains. Il faudrait pour cela, outre une
ardeur, une assiduité bien peu communes, des con-
82 l’influence a distance

naissances et une habileté télépsychiques étrangères


à presque tous.
On a vu ce qu’il faut de méthode, de vigueur et
d’insistance pour faire éprouver à quelqu’un un effet
télépathique précis. Cela ne s’improvise pas. Suppo­
sons que X en veuille à mort à Z, et y pense active­
ment, sans relâche durant des mois. Qu’arrivera-t-il ?
Z sera troublé en son point le plus faible. Si, par
exemple, il est inattentif, ou très impressionnable, il
le deviendra davantage et ses réflexes, soudain décoor­
donnés à l’occasion d’une traversée de rue parmi trop
de voitures, pourront le trahir. Il se fera renverser.
Si X souhaitait non la mort, mais la ruine de Z, ce
serait dans le domaine financier que les facultés de ce
dernier fléchiraient.
Généralisons. Étant donné l’incessante compétition
des avidités, tous ceux qui manquent de caractère su­
bissent nécessairement des influences asservissantes,
ou désavantageuses ou destructrices. Voilà l’aspect
exacte de la question.
Ceci posé, comment se défendre ? Comment défen­
dre autrui ?

Pour soi-même, c’est l’éducation psychique élémen­


taire qui permet de s’isoler, de se rendre hétérotoni-
que aux vibrations psychiques indésirables. Dans un
précédent ouvrage, Le Pouvoir de la Volonté, j’ai
exposé en quoi consiste l’éducation psychique. Je n’y
reviendrai pas ici. En se livrant chaque soir à un
examen serré des pensées, des incitations, des résolu­
tions de la journée, chacun peut se rendre compte si,
dans une mesure quelconque, il n’a pas été influencé.
En décidant chaque matin, conformément à une direc­
tion délibérément conçue, de ce que l’on fera des heu­
ADAPTATIONS DIVERSES 83
res suivantes, on dispose par avance de soi-même, on
s’entraîne à gouverner sa pensée, à en rester l’unique
générateur. Bien mieux, en appelant à soi les influen­
ces, les concours adducteurs de santé, de succès, de
V

progrès, on les attire très réellement. Ces circonstan­


ces, si fortuites qu’elles paraissent, répondent toujours
à un appel, à une tendance intérieure.
Par dessus tout, bannissons toute animosité, si jus­
tifiée qu’elle soit, oublions les malveillances, refusons
d’y songer. Ce serait d’abord de l’énergie mentale gas­
pillée. En outre, cela nous syntoniserait avec toute une
série de vibrations préjudiciables.

II

Pour améliorer l’état d’un persécuté, la première


règle à observer consiste à ne pas traiter son mal
d’imaginaire, le serait-il manifestement. La seconde
sera de lui assurer les plus parfaites conditions d’hy­
giène mentale et physique. L’engager, l’inciter ensuite
à pratiquer l’éducation psychique. Au besoin le lui
suggérer par la méthode exposée dans ce livre. Enfin,
user de la technique indiquée au chapitre précédent,
page 77.
X. — POUR PRÉVENIR OU MODIFIER
UNE DÉCISION FACHEUSE

Où la parole a échoué, la pensée peut triompher. — Méditation


préalable. — Le repos condensateur. — La recherche et 8a nota­
tion des pensées les plus évocatrices. — L’émission. — Une seule
séance suffit souvent. — Applications diverses du même procédé.
— Ayez confiance en vous.

Quelqu’un de votre entourage, de vos amis, va pren­


dre ou vient de prendre une décision fâcheuse. Vous
avez en vain dépensé vos ressources dialectiques pour
l’engager à réfléchir. C’est un des multiples cas où
l’action télépsychique agit plus sûrement et plus vite
que la parole.
Cessez toute intervention verbale. Isolez-vous dans
une pièce silencieuse. Paisiblement, méditez avec at­
tention sur ce que vous voudriez empêcher. Cette déci­
sion, étudiez-la en la genèse, représentez-vous son exé­
cution, dégagez-en toutes les conséquences et, pour
finir, précisez tous les avantages que retirerait l’inté­
ressé en changeant d’avis.
S’il peut y avoir un ou plusieurs compromis entre
les mobiles qui incitent le sujet à se déterminer dans
le sens regrettable en question et ce que conseille la
raison, imaginez-les.
ADAPTATIONS DIVERSES 85

Tout le détail de cette méditation devrait être noté


rapidement.
Quand la lassitude survient, détournez votre esprit
de l’ordre d’idées sur quoi vous venez de l’exercer et
occupez-le à autre chose. L’afflux des inspirations ou
de subséquences continuera cependant et de nouvelles
pensées surgiront que vous devrez noter à la suite des
précédentes.
De ces notes, il faudra tirer un extrait composé de
toutes les représentations qui suscitent en vous une
vive opposition. Ainsi toutes les conséquences désas­
treuses des actes que vous vous préparez à prévenir,
celles qui vous émeuvent, qui vous révoltent, qui font
jaillir de vous un « non » énergique, formel, retenez-
les.
Après une courte préparation basée sur les indica­
tions du chapitre III, en vue de condenser vos éner-
une
rablement à des moments où, toute l’affaire vous reve­
nant en mémoire, vous vous sentez violemment animé
du désir d’annuler la cause de votre préoccupation.
Relisez vos notes, exaltez-vous à l’évocation des ta­
bleaux qu’elles engendrent et terminez par celles qui
composent l’extrait prescrit plus haut. Ces dernières,
si vous les visualisez d’une manière très vivante, vou.v
arracheront des mouvements de révolte intérieure
extrêmement violents. Ceux-ci donneront lieu à autant
de projections psychiques dont les dispositions du
sujet seront ébranlées.
Imaginant alors que ce dernier est là, déconcerté,
moins résolu, raisonnez-le mentalement avec véhé­
mence, énoncez-lui votre propre conviction, figurez-
vous qu’il comprend, qu’il voit où son égarement pour­
rait le mener, qu’il éprouve subitement la joie du pé­
ril évité, qu’il vous exprime sa gratitude.
86 l’influence a distance

Le passage en italiques indique la phase essentielle


de l’action.
Si de très puissants mobiles concourent à la déci­
sion qu’il s’agit d’inhiber, plusieurs séances sont néces­
saires. Mais que de décisions regrettables dépendent
d’un simple caprice, de rêveries abusées, de maladroi­
tes influences : celles-là, on peut souvent les arrêter
ou en suspendre l’exécution par le seul effort d’une
heure bien employée.
Par un procédé analogue, agissez sur ceux qui vous
mécontentent : subalternes ou employeurs, collègues
ou confrères, clients ou fournisseurs, amis ou parents.
Concentrez en vous-même le sujet de votre méconten­
tement. N’extériorisez pas en représentations verba­
les, en doléances ou confidences les vibrations émo­
tionnelles désagréables qui vous agitent. Attendez
l’instant où, en récapitulant intérieurement vos griefs,
vous vous sentirez irrité. Cette disposition est, télé-
psychiquement, excellente. Profitez-en pour sugges­
tionner énergiquement celui ou ceux qu’elle concerne.
Vous ne tarderez pas à constater que l’influence de
la pensée, quoique insoupçonnée de la plupart et froi­
dement niée par des gens fort savants, opère des effets
impressionnants par leur précise évidence.
Un dernier mot : si difficile, si lointain que vous pa­
raisse un résultat, si dubitatif ou si débile que vous
vous sentiez devant la difficulté, ne désespérez jamais
d’aboutir, à l’aide de vos forces psychiques. Vivre, c’est
générer de l’énergie, se dominer, c’est l’accumuler ;
penser, c’est l’irradier ; s’émouvoir, c’est l’évertuer,
renouveler l’effort, c’est accentuer les pesées précé­
dentes. Le moyen d’action que je révèle dans ce livre
vous arme donc au même titre que quiconque et, si
vous vous exercez à l’utiliser, vos possibilités s’accroî­
tront de jour en jour.
XI. — POUR PRÉSERVER
OU PROTÉGER QUELQU’UN

L’intention rendue agissante. — La préservation du danger. —


Procédé. — Protection au cours d’une épreuve ou d’une diffi­
culté. — Applications diverses.

En procédant à peu près comme pour guérir, on


peut accompagner d’une influence protectrice un pro­
che, un ami éloigné, soit pour le préserver d’un péril,
soit pour conforter ses facultés, soit pour le favoriser
en toute occurrence. Isolément ou à l’aide d’une
chaîne, on pratique chaque jour l’évocation de l’image,
et, cette dernière précisée, on concentre longuement
sa pensée selon qu’il convient. Comme pour toute au­
tre action télépsychique, un certain nombre de séan­
ces sont indispensables à l’obtention d’un résultat bien
caractérisé.
S’il s’agit de sécurité et qu’on redoute pour le sujet
un danger particulier, tout en laissant une large place,
au cours de chaque séance, à la spécification de ce
danger, ne pas oublier ceux qu’on n’appréhende pas
— et qui sont souvent les plus à craindre, — s’imagi­
ner l’intéressé dans son intégrité physique, avec l’as­
pect extérieur le plus rassurant et insister, en mainte­
nant cette image sur l’écran imaginatif, sur l’affirma­
88 l’influence a distance

tion (1) : « Il demeure ainsi. Je veux, j’exige qu’il


demeure ainsi. » Lorsque le sujet doit nécessairement
courir un risque, ne pas spécifier comment il en ré­
chappera, mais affirmer qu’il passera, indemne, au
travers de tout. On peut songer aussi à stimuler chez
lui l’attention, la circonspection, la prudence et autres
facultés défensives, à soutenir sa confiance en lui, son
calme et son sang-froid.
Le fait de connaître intimement quelqu’un et celui
d’apprécier subtilement sa psychologie aident considé­
rablement à influer sur lui, car le rapport se trouve
alors établi d’avance et, d’autre part, on a une repré­
sentation claire et précise de ce que peut éprouver le
sujet. Les bons sentiments qu’on ressent à son égard,
l’intensité du désir de le protéger restent d’ailleurs les
éléments les plus essentiels d’efficacité.
A l’occasion d’un examen, d’une démarche, d’un
effort spécial, l’influence télépsychique peut contribuer
notablement au succès. Mais il faut s’y prendre à
l’avance et ne pas attendre la veille de l’événement
pour intervenir. Le minimum approximatif est de
trente à quarante jours.
Lors d’un examen, par exemple, l’action à distance
n’accroîtra évidemment pas les connaissances du can­
didat, mais elle le placera dans un état de parfaite
lucidité mentale, stimulera sa mémoire, son assurance,
sa présence d’esprit. Elle le rendra aussi sympathique
qu’il peut l’être. Elle agira aussi — quelque étrange
que cela paraisse — sur les examinateurs. Faut-il
ajouter qu’au cours des études on peut aussi bien sug­
gérer le goût du travail, l’intérêt pour les matières à
étudier, la compréhension aisée, l’application, l’équi­
libre physique et la vigueur intellectuelle. Souvenons-

violent et impérieux est indispensable.


ADAPTATIONS DIVERSES 89
nous que subir avec succès un examen ou obtenir un
diplôme n’assure nullement une carrière satisfaisante
à qui ne possède pas les aptitudes, les connaissances
et la combativité nécessaires pour cela.
Les directives précédentes s’adaptent d’elles-mêmes
à nombre de cas : démarches, sollicitations, début au
théâtre ou ailleurs.
XII. — LE DÉDOUBLEMENT

Les Faits. — Les Théories. — Le Double. — Les Formes-Pensées.


— L’expérimentation. — Les adaptations.

Les faits.

Se dédoubler, en d’autres termes être vu ou entendu


à une distance considérable de son corps ; voir et en­
tendre ce qui se passe au loin, constitue la plus extrê­
me des manifestations télépsychiques. L’histoire té­
moigne de nombreux exemples de dédoublement. J’en
ai rapporté quelques-uns dans Science Occulte et Ma­
gie pratique. De nos jours, les observations abondent.
Il suffit pour se convaincre de lire les procès-verbaux
de la Société des recherches psychiques de Londres ou
les ouvrages de Gurney, Myers, Podmore, Maxwell et
Boirac indiqués au chapitre I. On y trouvera la rela­
tion d’une foule de phénomènes spontanés. Ici, nous
allons voir comment tirer délibérément parti de cette
possibilité. Une prédisposition spéciale permet seule
de parvenir au dédoublement intégral, mais si l’inten­
tion soutenue d’influer sur la pensée d’autrui suffit à
beaucoup pour que leur activité mentale s’irradie effi­
cacement, une concentration d’esprit analogue déter­
mine presque toujours partiellement la projection bi-
locatoire.
ADAPTATIONS DIVERSES 91

Les théories. — I. Le Double.

Si la science moderne commence à peine à effleurer


— et avec quelle circonspection — l’étude du phéno­
mène en question, des textes se sont transmis, à tra­
vers les âges, qui affirment, en d’autres temps, la par­
faite connaissance, le maniement aisé des lois du dé­
doublement. L’occultisme — vestige du savoir des an­
ciens — nous montre l’homme constitué non seulement
d’une âme et d’un corps, mais aussi d’un troisième
élément intermédiaire entre l’une et l’autre. C’est le
double ou Ka des prêtres égyptiens, le Kama rupa
des Indous, le Nephesch des kabbalistes, le médiateur
plastique des hermétistes, plus connu de nos jours
sous le nom de corps astral. Exactement informé sur
le modèle de l’apparence matérielle, le corps astral,
fait d’une substance plus subtile encore que l’état ai-
thérique des physiciens, interpénètre l’organisme tan­
gible dont il est d’ailleurs l’édificateur, le conserva­
teur et l’animateur (1). A la faveur de ces léthargies
semblables à la mort que savent provoquer sur eux-
mêmes les praticiens de la magie et que peuvent obte­
nir de leurs sujets les magnétiseurs, l’âme (la cons­
cience psychologique) s’extériorise, véhiculée par le
corps astral et, laissant là le corps physique, auquel
un lien fluidique extensible le tient relié, elle trouve
l’espace aboli.
Outre cet ultime aspect, mille autres sont possibles
et même fréquents. Telles sont les diverses formes de
la métagnomie — nom créé par Boirac, le défunt rec­
teur de l’Université de Dijon — pour désigner la per-
ception de choses et d’êtres situés hors de portée des
sens dans le temps et l’espace : une somnambule lu­
cide, un clairvoyant, une personne douée de double-

(1) Voir Science Occulte et Magie Pratique (Éditions Dangles).


92 l’influence a distance

vue vous décrivent à Paris un ami résidant à Marseille


ou un événement à venir (1). Cela leur est possible
par un dédoublement partiel. Un homme frappé à
mort ou venant de mourir apparaît, outre-Océan, à
sa mère : dédoublement provoqué par l’émotion (2).
Sous l’effet du chloroforme, un patient s’extériorise et
assiste à son opération (3) : même phénomène. Au
cours du sommeil naturel, le dormeur rêve qu’il visite
la maison de son père et voit le feu s’y déclarer. Le
lendemain, il apprend le sinistre effectif de l’immeu­
ble. Il s’est donc biloqué et il a vu.
Maisons hantées, raps, et bon nombre de phénomè­
nes spirites s’expliquent aussi par l’extériorisation du
double. Mais il faut lire, de Gurney, Myers et Podmore,
les Hallucinations télépathiques pour concevoir la fa­
milière fréquence du dédoublement.
Dans la plupart des cas sérieusement constatés, le
dédoublé n’a pas conscience de l’être — et cela ne doit
pas nous surprendre — car il s’agit presque toujours
d’une projection du double seul, durant laquelle l’âme,
l’élément psychique, la conscience, demeure auprès du
corps physique.
Quand, assis, les muscles relâchés, à l’abandon, nous
songeons très exclusivement, très profondément à un
tiers, nous projetons inconsciemment notre double vers
lui. L’intéressé perçoit rarement cette présence invi­
sible, du moins en tant qu’imagé de nous-même. Et
cependant, notre double agit sur le sien et lui trans­
met son mouvement ondulatoire, lui communique le
ton de vibrations dont il se trouve animé, ce qui sus­
cite en lui des pensées nous concernant.

(1) Voir ouvrage de J. Maxwell, magistrat, intitulé Les phénomènes


psychiques. On y trouvera l’exposé des phénomènes de ce genre constates
par des personnalités éminentes.
(2) Voir Flammarion, La Mort et son Mystère.
(3) Un cas de ce genre a été publié en 1913, par Occult Review.
ADAPTATIONS DIVERSES 93

N'avez-vous jamais eu, tandis qu’en/oncé dans vos


pensées, vous vous étiez, pour ainsi dire, échappé du
monde extérieur, l'impression de revenir de très loin,
au moment où quelque appel brusque vous restituait
à la notion du réel ?
Ainsi, là comme ailleurs, il y a des degrés et si la
bilocation totale et consciente paraît nécessiter de sin­
gulières qualifications, chacun se dédouble spontané­
ment plus ou moins et chacun peut, en cherchant à
le faire délibérément, tirer parti de cette possibilité.

Les Théories. — II. Les Formes-Pensées.


Tout se passe, ai-je dit au chapitre II, comme si, bai­
gnés d’un invisible océan fluidique, nos âmes se trou­
vaient constamment en mutuelle communication. Cet
océan, l’occultisme le définit « plan astral » et lui
prête un rôle cosmologique des plus importants sur
lequel je ne m’étendrai pas ici (1). Ce qui nous inté­
resse plus immédiatement, c'est la propriété, attribuée
par les occultistes, à la substance du plan astral, de
se mouler en formes sous l’effet de notre activité psy­
chique. Les images mentales y sculptent des corps à
leur ressemblance. Le retentissement de nos impres­
sions, de nos émotions, de nos sentiments y engendre
des agrégats aux contours et aux couleurs variés (2).
Toutes ces créations sont douées de mouvement et
même d’une demi-conscience. Elles agissent en auxi­
liaires de l’intelligence d’où elles émanent. Vouloir agir
sur un tiers, en se transportant par la pensée là où il
est, c’est donc projeter une sorte de fantôme, de dou-
ble, A'alter ego qui travaillera l’inconscient du sujet

(1) Voir Science Occulte et Magie Pratique, du même auteur (Editions


Dangles. Paris).
(2) Voir Leadbeater, L'homme visible et invisible. Leadbeater, Les
Formes Pensées. A. Besant, Les aides invisibles.
94 l’influence a distance

selon nos intentions. De même, les images mentales


formées et transmises suivant la technique qu’on sait,
constituents des corps astraux réels, qui demeurent
dans l’ambiance du sujet et s’y manifestent, parfois,
jusqu’à l’obsession. On voit combien la théorie des
formes-pensées est suggestive et quelles utiles inspi­
rations on peut en tirer.

L’expérimentation.

Parmi les spécialistes qui ont écrit sur le dédouble­


ment, certains ont indiqué, pour obtenir ce phéno­
mène, l’usage de substances pernicieuses par elles-
mêmes et dont l’effet reste, d’ailleurs, incomplet. En
vérité, l’opium, l’éther, la cocaïne, la morphine, le has­
chich provoquent le dédoublement, mais retirent à
l’expérimentateur toute influence directrice du phé­
nomène, — c’est dire qu’il ne saurait l’utiliser. D’au­
tres ont préconisé une méthode moins immédiatement
dangereuse, qui met à profit l’extériorisation insépa­
rable du sommeil naturel. L’inconvénient de cette mé­
thode est évident : le candidat n’y ayant pas un con­
trôle continuel de lui-même, puisque la bilocation s’ef­
fectue en pleine inconscience, il se met ainsi dans les
meilleures conditions pour subir les influences am­
biantes les plus restrictives de sa propre volonté. De
fait, j’en ai vu quelques-uns complètement déséquili­
brés par leurs essais. Ce dédoublement ne constitue
rien moins qu’une porte ouverte sur un au-delà mys-
. térieux. Franchir cette porte, ligoté et annihilé psychi­
quement, quelle singulière témérité !
Le procédé que je vais exposer diffère essentielle­
ment des précédents, d’abord par sa complète inoffen-
sivité, ensuite parce qu’il conduit à une extériorisation
graduelle durant toutes les phases de laquelle l’expéri­
mentateur garde l’intégralité de sa conscience et de
ADAPTATIONS DIVERSES 95

sa volonté. Je l’ai déjà exposé dans Science Occulte


et Magie pratique, il est également à sa place ici.
1° On cherche avant tout à imposer au corps phy­
sique une passivité complète. Pour cela, la station éten­
due convient mieux que toute autre. L’attention doit
parcourir, une à une, chaque fibre, afin de relâcher,
de détendre parfaitement l’ensemble du système mus­
culaire. On parvient ainsi à l’immobilité la plus ab­
solue.
2° L’inertie locomotrice prédispose à un ralentis­
sement de l’activité intellectuelle, chose dont on se
rend très bien compte et qui dégénère tout simplement
en sommeil naturel profond chez ceux dont les éner­
gies psychiques sont insuffisamment condensées. Aussi,
faute d’avoir opéré selon nos précédentes indications,
cette condensation, l’expérience s’interrompt d’elle-
même.
3° L’expérimentateur, encore manœuvré par son
automatisme, observe la continuation de son agitation
cérébrale et c’est alors à la régularisation de celle-ci
qu’il convient de s’attacher. L’intention maintenue,
sans aucune tension volitive, de raréfier l’élaboration
des pensées, constitue la clé de l’exercice. Cette inten­
tion ne saurait aboutir d’emblée, ni même en un petit
nombre de séances, à la suspension complète de la
pensée. Progressivement, le calme succède à l’agita­
tion et, là encore, le sommeil guette les essayistes bé­
névoles. Mais après quelques semaines de tentatives
journalières, des moments de plus en plus prolongés
marquent un premier progrès. Puis, cet arrêt se pro­
longe encore et subsiste bientôt, à peine troublé par
quelque vague réaction. Enfin on l’obtient, uniforme.
C’est l’isolement. Dans cet état, l’acuité sensorielle se
trouve considérablement atténuée. Les bruits du de­
hors deviennent indifférents, de même que les sen­
sations visuelles, olfactives ou tactiles. On se trouve
96 l’influence a distance

dans une disposition analogue à celle d’un individu


tellement absorbé qu’il n’entend pas qui lui parle. Et
l’extériorisation s’esquisse ;
4° On a nettement l’impression de n’être plus étroi­
tement intégré dans les limites du corps physique. On
se sent comme élevé, parallèlement à lui, ou à quel­
que distance. La moindre intention volontaire réta­
blirait l’état normal. Aussi, nulle appréhension, mais
un bien-être quasi-nirvanique.
5° Parvenu à ces résultats et capable de s’isoler ainsi
en quelques minutes, à l’intention primitive de stase
intellectuelle on substituera celle de s’extérioriser de
plus en plus et l’on poursuivra l’expérience sans hâte,
en y consacrant à peu près une heure par jour. Suivant
le cas, l’évolution des possibilités bilocatoires prendra
un cours adéquat aux prédispositions de chacun. Ainsi,
les uns commenceront à percevoir le milieu astral sous
forme d’une lumière ou d’une ombre diffuse où des
formes, des silhouettes, des images s’esquisseront peu
à peu (a) ; pour d’autres, l’espace hyperphysique sera
aisément parcouru et les doubles des vivants seront
perceptibles (Z>) avant le plan astral lui-même (1).
6° Les expérimentateurs qui observeront (a) obtien­
draient de plus rapides résultats en s’orientant vers
la métagnomie. Ce sont des percipients plutôt que
des irradiants. Ceux qui observeront (b) sauront qu’ils
sont mieux doués pour agir, pour se manifester, que
pour percevoir les vibrations émises par d’autres cen­
tres. Ce sera donc dans l’action à distance qu’ils excel­
leront le plus facilement.
Comme on l’a vu, si l’on aborde ces pratiques sans
posséder les réserves énergétiques qui en assurent à
(I) Perception de choses et d’êtres situés hors de portée des sens
physiques dans le temps et dans l’espace. Exemples : autoscopie,
psychométrie, lucidité, somnambulisme, clairvoyance, visions dans
le cristal, etc...
ADAPTATIONS DIVERSES 97

la fois le succès et l’inoffensivité, on ne court aucun


autre risque que de goûter un sommeil réparateur.
Mais l’exercice lui-même entraîne peu à peu le prati­
cien et développe considérablement ses aptitudes.
Avec des essais renouvelés assidûment, chacun arrive­
rait donc au but.
Si l’on procède, dans l’action télépsychique à dis­
tance, par un dédoublement préalable, il suffira d’évo­
quer l’image du sujet et de bien préciser l’intention
de le joindre pour qu’un résultat conforme s’ensuive.
Et alors l’action sera plus puissante, plus rapide, tout
en exigeant beaucoup moins d’effort que la suggestion
mentale ordinaire.
XIII. — LA TÉLÉPSYCHIE DANS LA VIE
INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE

Le facteur télépsychique dans la trame du destin. La compéti­


tion universelle. — L’ardeur convoitante des effets. — L’action
extérieure des dispositions coutumières de l’homme. — Les apti­
tudes sans avidité et l’avidité sans aptitudes. — La télépsychie
et les affaires. — Dilection et vigueur appétente. — Invisibles
investissements. — Heurts collectifs des volontés. — Le psy­
chisme et la question sociale. — Optimisme et lucidité. — L’ap­
préhension stérile et l’appréhension utile. — Despotisme et ser­
vilité. — Les forts caractères et leur emprise. — Le travail
évertue efficacement la pensée. — L’amour et la télépsychie. —
Passions et sentiments. — Conclusion.

Ainsi que je l’ai déclaré au début de ce livre, l’in­


fluence télépsychique est une subséquence inévitable
de l’activité affective et cérébrale. Dès qu’on s’émeut,
dès qu’on désire, dès qu’on pense, on irradie des vi­
brations qui, renouvelées durant des jours, des mois,
des années, contribuent appréciablement à déterminer
maintes circonstances. Celles du passé retentissent sur
le présent ; celles du présent retentiront sur l’avenir.
Quelques considérations vont le préciser.
Un collectif s’agite et s’évertue. Chacun des indi­
vidus qui y tient place convoite avec plus ou moins
d’âpreté et d’aptitudes ce que ses prédispositions le
ADAPTATIONS DIVERSES 99

portent à considérer comme suprêmement désirable.


Du savant en quête de la découverte qui fera de lui
un sommet mondial au financier à l’affût de profita­
bles rafles, du politique impatient d’occuper le pre­
mier plan du règne au fonctionnaire qui dispute un
poste mieux payé, du soupirant qu’irritent ses rivaux à
l’écrivain en espoir de lauriers, la compétition est gé­
nérale. Ce que poursuit quiconque, d’autres le veulent
aussi. Or, si les qualifications, l’activité, les appuis de
chaque compétitionnaire sont autant d’atouts dans son
jeu, son ardeur convoitante en est un autre — et qui
compte. Le pouvoir de celle-ci explique maints succès
et maintes défaites incompréhensibles sans lui.
A équivalence de savoir, d’habileté, de travail et de
protections ce sera, dans tous les cas, la personnalité
9

aux plus vigoureuses appétences qui obtiendra le plus.


Cette vigueur de désir supplée même toujours, dans
une large mesure, aux insuffisances de la valeur intrin­
sèque, pourvu qu’on sache endiguer ses poussées
excessives. En fait, c’est la même et frénétique con­
voitise qui meut les plus habiles abducteurs d’or et
les plus audacieux pirates. Des uns, le jugement sa­
gace dirige l’effort au travers des écueils ; des autres,
le causalisme déficient s’égare aux folles suggestions
du bouillonnement intérieur. Mais la même espèce
d’énergie pousse les uns et les autres à entreprendre.
Ceux qui la régissent et l’émettent en images bien con­
çues identifient ses effets à leurs intentions ; ceux qui
la subissent, imaginent fâcheusement et leurs résul­
tats, toujours précaires, se mixtionnent d’insécurité.
Mieux vaut, certes, manquer tout à fait d’élan-mo­
teur si le gouvernail, fragile, faussé, doit nécessaire­
ment donner dans les récifs, mais, ici-bas, il n’en reste
pas moins vrai que l’avidité, bien plus que le mérite,
s’approprie et obtient.
Outre leur stimulant, la conviction de pouvoir, celle
7
100 l’influence a distance

d’avoir droit, celle d’être qualifié, influent sur toute


la série des gens de qui dépend ce à quoi l’on aspire.
Inversement, toutes les restrictions qu’on ressent,
qu’on admet, sur sa propre valeur se répercutent en
l’âme d’autrui. Voilà pourquoi les modestes, les sou­
cieux de juste mesure, les raisonnables avant tout, ne
reçoivent pas le quart de ce qu’ils se verraient dispen­
ser, pour d’identiques capacités, s’ils sentaient plus
passionnément, — j’allais dire aveuglément — le désir
de ce que l’inéquité des hommes leur refuse.
Cette élite cultivée, laborieuse, obscure, dont l’intel­
lect se dépense aux minutieux travaux d’où sort
l’avancement des sciences, reçoit de ses peines un bien
faible prix. On peut dire aussi qu’au budget national
la compétence émarge moins que l’adresse. C’est qu’il
s’agit d’hommes dont l’énergie psychique fut absor­
bée par une longue culture et dont les préoccupations
idéales dérivent la volonté d’obtention.
Certains diront que j’attribue à l’action télépsychi­
que l’effet d’un excès ou d’un manque d’initiative re­
vendicatrice. A quoi je réponds que les plus justes
revendications aboutissent faiblement quand l’avidité
de leurs promoteurs n’est pas intense.
*
* *

Dans la bataille des affaires, qui voit affluer les


offres et les demandes avantageuses ? Qui trouve les
concours les plus satisfaisants ? Les occasions favo­
rables ? Est-ce le plus actif? Est-ce le mieux doué,
professionnellement parlant ? Pas du tout. C’est le
plus ardemment, le plus assidûment évocateur de ri­
chesse ou de suprématie. Il lui vient, à celui-là, des
idées que les autres n’auront pas, mais cela pourrait
s’expliquer par les ressources intérieures de son psy­
chisme. Il lui vient aussi des collaborateurs financiers,
ADAPTATIONS DIVERSES 101
des techniciens adroits, des fournisseurs sérieux, des
clients considérables. Qu’on en reporte le mérite à sa
gestion, cela peut encore se soutenir, bien que parmi
ses concurrents il y en ait d’aussi intelligents et actifs
qui échouent. Mais toutes ces fortuités heureuses qui
font dire de quelqu’un : « Il a de la chance » ; « Il
réussit comme par magie » ne suffiraient-elles pas à
justifier ma thèse ? On m’opposera peut-être que tout
le monde désire réussir. — Pas avec la même ardeur,
pas avec la même fixité psychique. Tout le monde a
faim mais, entre l’intermittente esquisse d’appétit du
dyspeptique et le vigoureux besoin d’un solide gail­
lard, quelle différence (1).
Certes, il ne manque pas, en pays latin — ni ail­
leurs — d’êtres si délicieusement doués pour apprécier
toutes les possibilités de l’opulence qu’on peut se de­
mander comment leurs vibrations psychiques n’ai­
mantent pas ce qui satisferait leurs goûts. Mais dilec-
tion et ardeur soutenue du désir sont deux états d’âme
très différents. Nous désirons volontiers, idéologique­
ment, toute chose agréable. Nous n’en ressentons pas
forcément cet impétueux, ce véhément, ce continuel
besoin qui attire, conquiert, saisit. Et si l’on pense au
nombre formidable des humains lancés à l’assaut du
peu que la terre peut fournir, on se rend compte de
l’athlétisme animique nécessaire aux grandes vic­
toires.
Posséder n’est d’ailleurs pas conserver. L’héritier
que ses contingences ont gratifié de biens considéra­
bles devient le centre d’une incessante conspiration
où figurent les multiples convoitises qui, par état so-

(1) Et la comparaison n’est pas du tout forcée. Que de bonnes brutes


à la pensée rudimentaire mais compacte, forte et bien orientée stupéfiant
certains subtils, trop dispensés, par leur succès ? Une organisation
psychique judicieuse mais sans vigueur influe nécessairement moins
qu’un tempérament robuste et simple.
102 l’influence a distance

cial, investissent la fortune. Elles n'agissent pas seu­


lement par les voies matérielles. Elles suggèrent invi­
siblement l’imprudence, l’erreur, l’excès, le vice. Et
leur action mentale se grossit des envies, des jalou­
sies, des animosités que soulève toute opulence. Quelle
redoutable chaîne ! Et quelle circonspecte et robuste
défensive il faut au riche. S’il n’a pas reçu, avec le
reste, une organisation psychique à la mesure de son
importance possédante, il sera bientôt dépouillé.
L’aristocratie russe, qui comptait moins de psychis­
mes ardents que d’abdomens repus, dormait plus
qu’elle n’agissait et consommait plus d’alcools que
d’idées, a subi la loi d’une douzaine d’intellectuels pas­
sionnés. A notre monarchie, l’initiative fut soustraite
dès qu’elle s’arrêta de penser et de vouloir. Et si la
classe actuellement détentrice des privilèges subsiste
encore, malgré ses imprudences électorales, c’est
qu’elle totalise plus d’actifs psychismes que n’en réu­
nissent ses antagonistes.
*
* *

Le sort du prolétaire s’améliore lentement depuis


qu’il a cessé de considérer comme socialement indis­
pensables les abus sur lui perpétrés. Tout irait plus
vite s’il songeait à ses droits avec plus d’ardeur et de
coordination. A cause de leurs insuffisances psychi­
ques, les démocraties vivent encore sous un joug quasi-
dictatorial. Incapables de concevoir l’ordre désirable
en images précises, elles se laissent inlassablement
prendre à la duperie des suggestions qu’on leur prodi­
gue à chaque campagne électorale. Elles croient dési­
gner des obédiences organisatrices d’équité et voient
invariablement sortir de l’urne la tyrannie et la spolia­
tion. Tout changerait si les travailleurs ne se laissaient
aller entre deux guerres, entre deux sessions législati­
ADAPTATIONS DIVERSES 103
ves, entre deux meetings à une excessive résignation
surtout faite d’indolence et d’apathie. Tout changerait
si chacun formulait intérieurement mais inflexible­
ment 3 suggestions bien concrètes : possibilité de con­
sommation justement proportionnelle à l’importance
de production. — Organisation militaire des peuples
soustraite aux arbitraires nationaux et confiée, pour
chaque continent, à un collège international. — Exi­
gence d’un acquiescement direct des électeurs pour
toute destination des deniers publics (1). Cette con­
centration d’esprit agirait sans le moindre désordre,
car l’effervescence psychique impressionne nécessai­
rement ceux qui en sont l’objet. L’irritation silencieuse
influe profondément et décisivement ; elle est d’ail­
leurs incoercible. Inversement, les vociférations et les
révoltes tumultueuses n’aboutissent jamais qu’à des
réformes superficielles et transitoires.
*
* *

Les mécontentements, les rancunes et les haines ina­


voués mais vivaces — qu’ils soient collectifs ou indi­
viduels — opèrent de véritables envoûtements. Leur
paroxysme, la colère, fulgure, tonne et frappe, comme
la foudre. Quand elle a été fortement condensée, c’est-
à-dire longuement contenue, la violence désorganise,
stupéfie et tue.
Nul ne se peut targuer d’immunité contre l’imma­
nente répercussion des rivalités et des antagonismes
probables. Pour s’en défendre, il ne faut ni les igno­
rer ni les défier, mais densifier ses résistances. N’a-t-on
pas dit que quiconque se flatte de son bonheur ne voit
(1) Il faudrait pour cela, dit-on, une capacité d’appréciation que
les peuples ne possèdent pas. On se garde bien de la leur donner. Et
où exige-t-on du député, voire du ministre, un brevet de savoir et d’apti­
tudes économiques, techniques et politiques ?
104 l’influence a distance

pas à sa porte le malheur imminent. En vérité, l’opti­


misme n’est protecteur que toujours expectatif d’ad­
versité et prêt à réagir. Si cet optimisme-là présente
parfois l’apparence d’une insoucieuse suffisance, c’est
qu’on ne voit pas combien il se double de circonspecte
combativité. Comme aucune existence n’est exempte
de risques et que plus clairement on prévoit, mieux
on sait éviter, parer ou combattre, la vigilance reste
judicieuse en dehors même de toute considération té­
lépsychique mais, pour l’adepte de nos doctrines, elle
a la signification d’un palladium, par lui-même effi­
cace, car envisager et craindre suscitent et stimulent
les pensées défensives, la volonté de repousser le péril.
Si donc il est fâcheux de se croire voué à l’insuccès
ou à quelque malheur, il convient de conserver la no­
tion de leur possibilité et de conjurer inlassablement
celle-ci par une interdiction formelle. Appréhender
quelque chose avec le sentiment qu’on ne saurait s’y
dérober équivaut à l’accepter et souvent à l’appeler,
mais l’appréhension suscitative d’une volonté impé­
rieuse d’en écarter l’objet devient au contraire une
défense sérieuse. La peur, qui paralyse certains, donne
à d’autres des ailes.
*
* *

On sait que les gens volontaires, dont la pensée ordi­


nairement despotique engendre d’elle-même la sou­
mission, réussissent à impressionner, dès l’abord, la
plupart de ceux qu’ils approchent. On peut remarquer
aussi qu’à ces natures de satrapes accourent les plus
étonnantes servilités. Une mentalité de seigneur féodal
improvise toujours des serfs. Une mentalité serve ai­
mante toujours son licol. Aussi voit-on de très beaux
dévouements se dépenser en faveur d’individus par­
faitement implacables — parce qu’ils le sont.
ADAPTATIONS DIVERSES 105
Ce qui caractérise les forts psychismes — non pas
les subtils, ni les équitables — c’est qu’ils sont pleins
d’eux-mêmes et surtout de leur point de vue. Ils vous
découragent de discuter le vôtre parce que vous sen­
tez très bien l’inégalité de la lutte. On dit : « Voilà un
homme ou une femme de caractère » et on s’efface,
quoiqu'on ait raison. J’appelle ce phénomène une
emprise télépsychique et je remarque qu’il s’opère
même si les relations sont lointaines et si les deux in­
téressés ne se sont jamais vus. Ces puissants égotis­
mes se perdent souvent par leur facilité volitive même
qui les incite davantage à exiger qu’à réfléchir. Ceci
nous reporte à la page 23. La vigueur propulsive de
leurs pensées est admirable, mais leurs images men­
tales sont insuffisamment délibérées, donc imprécises.
Ils obtiennent beaucoup, mais jamais ce qui leur eût
exactement convenu.
Par ailleurs, une allure extérieure impressionnante,
un verbe net, un entourage imposant perdent vite leur
prestige si, derrière la façade gîte un moral débon­
naire, apathique ou craintif.
Selon les règles religieuses, œuvrer c’est, paraît-il,
prier, quand la besogne s’accomplit conformément à
un idéal spirituel. Du point de vue qui nous occupe, si
le travail donne lieu à une émission psychique concen­
trée, celle-ci concourt puissamment à assurer au tra­
vailleur ce qu’il espère de son industrie. Il arrive qu’on
suppute d’une entreprise un bénéfice qu’elle ne don­
nera pas, mais dont l’équivalent échoit par une voie
imprévue et d’apparence fortuite.
*
* *

Intimement mêlée à tous les rapports humains, l'in­


fluence télépsychique se manifeste puissamment dans
l’amojar. Les très ardents, fussent-ils fort distincts
106 l’influence a distance

d’Antinoüs, d’Apollon ou d’Hercule, triomphent aisé­


ment des amoureux transis, même beaux de cette
beauté qui, nous dit un poète, éclipse ses rivaux comme
le soleil disperse les nuées. Sous l’anesthésiante efflu­
vation du désir mâle, les résistances féminines fléchis­
sent et s’abandonnent, souvent sans grande dilection,
voire en dépit de précises répugnances.
Le degré d’attirance de chaque femme dépend mani­
festement d’ailleurs de facteurs impondérables qu’on
distingue d’autant mieux qu’ils excluent souvent la
beauté, la grâce et la distinction.
Les affinités amoureuses échappent pour la plupart
à l’analyse purement psychologique parce que leur
explication tient tout entière dans l’exact complé-
mentarisme de deux émissions et de deux percipien-
ces psychiques, de même que leur tiédissement et leur
fin procède d’une réciproque et fatale saturation. Tant
que dure l’idylle, les transports télépathiques sponta­
nés, les lucides intuitions, les prémonitions clairvoyan­
tes témoignent fréquemment du rapport des deux in­
téressés. Et quand surviennent de l’un les premiers
écarts, imaginatifs ou vécus, ce retrait tire invisible­
ment des fibres de l’autre une douloureuse dissonance
annonciatrice des brisures prochaines.
*
* *

Si la passion se dissocie d’elle-même sous l’action


corrosive du temps, les sentiments gagnent au con­
traire en influence par la durée. Il est tératologique -
ment exceptionnel que l’indifférence résiste longtemps
à l’affection et que l’antipathie ne cède pas, quelque
jour, à la bonté. En tous cas, la bienveillance indul­
gente et l’inoffensivité, en harmonisant le psychisme
individuel aux vibrations de même nature constituent
des états précieusement abducteurs. Mais il faut tenir
ADAPTATIONS DIVERSES 107

compte de ce que désir, avidité ou passion se satisfont


de leurs complémentaires, toujours caractérisés par
une passivité morale quelconque. Ainsi, la faiblesse
suggère tous les abus tandis que la fermeté les inhibe.
C’est pourquoi l’ingratitude est assurée aux âmes trop
exclusivement bénévoles.
De ce qui précède, nous pouvons dégager quelques
directives pratiques dont l’observance équivaut à uti­
liser constamment et sans émissions spéciales la pro­
priété téléinfluente de la pensée.
Si toutes nos activités psychiques ont un retentisse­
ment extérieur, il est évident que pour recueillir de
celui-ci des effets désirables, il faut apprendre à gou­
verner ses impressions, ses émotions, ses sentiments et
son imagination. Gouverner s’entend ici dans une
double acception quantitative et qualitative et aussi
bien dans le sens d’exalter que dans celui de modérer.
On parvient à se rendre maître de son psychisme par
un effort soutenu portant sur toute une série de règles
que j’ai définies dans un précédent volume (1) et sur
lesquelles je ne reviendrai pas. Ces règles, que plu­
sieurs spécialistes ont vulgarisées avant moi, on n’en
comprend généralement pas toute l’importante fina­
lité. Conduire sa pensée implique cependant la pos­
sibilité d’un maximum d’action sur tout ce qui nous
concerne. Sans parler de cette sérénité intérieure
qu’assure seule la possession de soi, l’individu le plus
ordinaire, dès qu’il a acquis l’habitude de libérer
l’orientation de ses pensées et d’en maintenir la con­
vergence, extériorise une somme considérable de vi­
brations auxiliaires de sa volonté qui affectent utile­
ment tous ceux qui ont un rapport quelconque avec
ce qu’il veut. Il devient capable de préciser en images
soigneusement élaborées l’ensemble et le détail de

(1) Le Pouvoir de la volonté (Éditions Dangles, Paris).


108 l’influence a distance

ses projets. Son énergie psychique, condensée par


l’effet des règles en question, s’émet d’elle-même puis­
samment au travers des images qu’il forme. Il opère
ainsi une action télépsychique généralisée d’où s’ensuit
cette aimantation connue sous le nom de « magnétisme
personnel ». Certains — à qui tout réussit — la pos=
sèdent inconsciemment grâce à d’heureuses disposi­
tions naturelles, mais les plus déshérités à cet égard
peuvent l’établir en eux-mêmes par plan et par
mesure.
QUATRIEME PARTIE

Indications complémentaires
XIV. — CONTRE-INDICATIONS, ÉCUEILS, AVIS

Si l’on ne possède pas un minimum de vigueur fonc­


tionnelle, la fatigue qui résulte des émissions télépsy­
chiques s’accentue volontiers en dépression, à la fa­
veur de quoi plus d’une désorganisation peut survenir.
*
**

Les diathésiques rénaux et généralement tous ceux


qui éliminent mal seraient prudents de s’abstenir.
Toute dépense cérébrale inusitée nécessite, en effet,
un effort supplémentaire du rein et de ses concours.
*
* *

La pléthore des intoxiqués florides alourdit suffisam­


ment leur psychisme pour les dissuader de l’action
à distance. Mais si, d’aventure, l’un d’eux s’y efforçait
trop ardemment, ce serait un sérieux risque de con­
gestion.
*
**

Les agités, les obsédés, les déprimés ; ceux dont la


pensée délibérée n’a aucune prise sur l’impulsivité
émotionnelle et imaginative aggravent généralement
leur état sans profit en pratiquant l’action télépsy­
chique. Ils devraient, avant tout, travailler à acquérir
112 l’influence a distance

cet empire sur eux-mêmes qui leur fait défaut et sans


lequel il n’y a ni élaboration, ni condensation, ni émis­
sion efficaces.
*
**
Faute de savoir, après chaque séance, se ressaisir,
fixer sa pensée sur un sujet reposant et, en tout cas,
étranger aux préoccupations pour lesquelles on vient
de travailler ; on peut fort bien voir s’installer l’idée
fixe, mère de la démence. On récupère d’ailleurs insuf­
fisamment ses forces et la lassitude s’ensuit.
*
*
*

Il n’est pas rare qu’au jour où quelque chose ne va


pas comme on le voudrait, et bien qu’on ait été jus­
que-là profondément indifférent aux questions psy­
chiques, on songe à se procurer un traité d’hypnotisme
avec la conviction d’y trouver le moyen de résoudre,
sur l’heure, n’importe quelle difficulté. Cependant, qui
prétendrait sténographier un discours aussitôt après
l’achat d’un traité de sténographie? On ne s’improvise
pas expérimentateur du jour au lendemain, par le
simple fait qu’on aurait besoin de l’être. Il faut tra­
vailler à comprendre, puis à appliquer.
*
**
Si un chimiste prétendait, sous prétexte qu’il en a
immédiatement besoin, composer un produit en moins
de temps qu’il n’en faut pour son élaboration, on le
considérerait avec inquiétude. Cependant, nombreux
sont les logiciens qui, parce qu’ils sont pressés, deman­
dent à la télépsychie des résultats beaucoup plus rapi­
des que le cas ne le permet.
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 113

*
* *

Être pressé ne confère pas d’aptitudes spéciales. Il


n’y a pas de résultats à la fois importants et immédiats
en télépsychie. C’est la répétition qui fait la force de
la suggestion et l’assiduité qui confère la facilité —
toujours relative, d’ailleurs.
*
* *

Beaucoup se croient incapables d’influence. Beau­


coup se croient capables, sans effort appréciable, d’ef­
fets instantanés et considérables. Quelques-uns com­
prennent la difficulté, l’abordent résolument, et l’in­
vestissent peu à peu avec une inébranlable constance.
Ces derniers recueillent le succès.
*
* *

Avant toute action à distance, on ne saurait trop


supputer les conséquences qu’aurait l’obtention de ce
qu’on désire. Certaines sont inévitables et il est bon
d’examiner si elles ne feront pas payer trop cher la
satisfaction dont elles découlent ; d’autres peuvent
être évitées à condition d’en spécifier l’intention dans
le plan général (1) qu’on sait.
*

Nous élaborons presque tous assez d’énérgie psychi­


que pour obtenir, au moyen des procédés exposés
dans ce livre, des résultats décisifs de tout le reste
de l’existence. Mais plus l’élaboration est abondante,
plus la tension d’extériorisation est forte, Cette ten-
(1) Voir chapitre III.
114 l’influence a distance

sion détermine des impulsions auxquelles on ne songe


même pas à résister. Pourtant, tous les ouvrages ana­
logues au mien indiquent prolixement que céder à
l'impulsion, c'est laisser de l'énergie psychique s'éva­
porer.
*
* *

Il est heureux que les gens emportés dépensent en


manifestations extérieures généralement inoffensives
le formidable dynamisme issu de leurs collègues. S’ils
savaient s’abstenir de vacarme verbal, de coups de
poing sur la table et de bris d’objets, ils pourraient
perpétrer de plus fâcheux dégâts. Vigueur propulsive
de la pensée, ardeur passionnelle, violences de l'âme
constituent de véritables sceptres à condition de pren­
dre l’initiative de leur maniement.
*
* *

Maîtriser la spontanéité, c’est maîtriser le destin.


Ceux qui gouvernent le monde sont des gens qui ont
su se rendre maîtres d’une formidable impulsivité na­
tive et l’ont ainsi changée en puissance dominatrice et
réalisatrice. Qu’on ne me fasse pas dire qu’il suffit de
se dominer pour gouverner le monde. J’indique au
contraire que la première condition pour devenir un
homme éminent est une animation innée exception­
nelle. Mais sur l’individu rigoureusement capable de
se gouverner, au triple point de vue sensoriel, émo­
tionnel et imaginatif, le destin a beaucoup moins de
prise que sur les autres. L’homme qui parvient à con­
duire sa pensée se libère à peu près de toute influence,
même collective. C’est par l’instauration d’une solide
archie intérieure, inverse des enseignements libertai­
res, que chacun peut conquérir sa liberté.
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 115

Si nous ne pouvons changer radicalement les élé­


ments psychiques et psychologiques dont l’hérédité
nous a doté, nous pouvons, avec de la méthode, en tirer
un maximum de bons services. Ainsi, en s’exerçant
correctement selon ses forces, on les accroît et on les
ductilise.
*
* *

La place m’étant mesurée, j’ai dû condenser en ce


volume une somme de notions accumulées par vingt
années d’observation journalière. Ne vous étonnez
donc pas d’être parfois obligé de méditer un peu le
texte pour le bien comprendre.
XV. — LE DÉVELOPPEMENT
DES APTITUDES TÉLÉPSYCHIQUES

La pratique de l’hypnotisme proprement dit, où l’on


agit sur des sujets présents au moyen du regard, de
la parole, du geste et de la volonté constitue une excel­
lente méthode préparatoire à la télépsychie. Toutes
les facultés mentales actives y sont exercées, en parti­
culier l’attention, le jugement et la valeur volitive.
C’est une psychogymnastique rationnelle et synthéti­
que qui évertue les qualités intellectuelles tout en af­
fermissant ce que l’on appelle la force de caractère.
Elle comporte tous les efforts d’initiative, de discerne­
ment, de maîtrise de soi et d’influence sur autrui sus­
ceptibles de concourir à la formation d’une puissante
personnalité. C'est pourquoi le plus court chemin pour
devenir bon télépsychiste consiste à se livrer assidu-
A

ment à l’hypnotisme direct. Un homme rompu à 1

l’usage des procédés ordinaires d’hypnotisation sait


penser avec toute l’ardeur, avec toute la précision né­
cessaires pour agir à distance.
De multiples considérations peuvent dissuader ou
arrêter le débutant. D’abord, difficulté de trouver des
sujets. Les personnes assez sensibles aux manœuvres
hypnotiques d’un commençant pour en éprouver, d’em­
blée, des effets péremptoires sont peu nombreuses. Il
y en a tout de même, 15 % environ et, sur ces quinze,
il s’en trouve deux ou trois qu’un enfant hypnotiserait
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 117

sans difficulté. D’ailleurs, par un phénomène facile à


comprendre, la plupart des gens que leur impression­
nabilité permet d’affecter aisément se laissent en gé­
néral plus vite décider que les réfractaires à permettre
qu’on essaie de les hypnotiser. Dans les séances publi­
ques, quand l’expérimentateur invite ceux des assis­
tants qui désirent subir l’épreuve de leur suggestibi­
lité à monter sur la scène, ce sont presque tous de
bons sujets qui se présentent. Dans la vie privée, ces
prédisposés se reconnaissent. Quelques précisions sur
les signes révélateurs à rechercher feront sans doute
plaisir à plus d’un.
Quoi qu’on puisse dire des théories — nécessaire­
ment appelées à disparaître pour faire place à d’autres
au fur et à mesure que l’expérience vient les modifier
— c’est dans un cadre théorique que les faits s’ordon­
nent le mieux. J’utiliserai donc un schéma qui m’est
familier : celui des quatre moyens d’influence.
Sur cent individus pris au hasard, certains semblent
particulièrement sensibles aux actions sensorielles,
celles qui procèdent de la périphérie nerveuse au cen­
tre, par exemple la fixation d’un point très brillant ou
le coup de gong. On sait le nombre important des com­
motionnés de guerre : un éclatement proche les figeait,
stupéfiés, dans l’attitude cataleptique. Le docteur Mes-
net a, d’autre part, fourni un exemple d’hypnose spon­
tanée par forte lumière. Dans son livre le Somnambu­
lisme provoqué, il note le cas d’un chef de gare, fas­
ciné par un projecteur de locomotive et écrasé, qui,
avant de rendre le dernier soupir, déclarait avoir
perdu conscience depuis le choc éblouissant du fanal
sur sa rétine, jusqu’au moment où il reprit connais­
sance à l’hôpital.
D’autres se montrent à peu près réfractaires à tout
procédé autre que la suggestion, laquelle, inversement
aux procédés sensoriels, frappe directement l’organe
118 l’influence a distance

central pour réagir ensuite sur le système nerveux en


mode centrifuge. On observe aussi des gens, peu af­
fectés autrement, sur lesquels les projections magné­
tiques réagissent en quelques minutes. Enfin, l’action
purement psychique — la suggestion mentale — a
aussi ses prédisposés. Ajoutons qu’on trouve assez fré­
quemment des sujets influencés à peu près également
par deux ou trois de ces quatre procédés.
Voici maintenant les observations à retenir pour
juger de l’aptitude à manifester les phénomènes étu­
diés en psychisme.
Tout d’abord, disons qu’un système nerveux assez
sensible aux actions sensorielles pour qu’un état se­
cond s’ensuive est nécessairement taré ou excessive­
ment déprimé. Hérédité alcoolique ou spécifique, dégé­
nérescence de la cellule nerveuse, hyperesthésie sont
toujours liées à l’hypnotisabilité sensorielle. Voilà
pourquoi Charcot et son Ecole étaient en désaccord
avec Liébeault et Nancy : à la Salpêtrière, on expéri­
mentait sur des hystériques, des hébéphréno-catatoni-
ques, — sur des anormaux — exclusivement. A Nancy,
le terrain expérimental plus large comprenait toute
espèce de malades. Voici également pourquoi Ba-
binsky et les neurologues vingtième siècle disent :
suggestibilité = hystérie = pithiatisme : ils travaillent
uniquement le terrain névrose.
Il existe un moyen bien simple de se rendre compte
si l’excitation d’un sens induirait à l’hypnose le su­
jet observé : disposez-le de manière que son
champ visuel soit frappé par une tenture, un panneau
à raies verticales alternées, noir et blanc, rouge et
blanc, bleu foncé et blanc, etc. Un normal n’accuse­
rait qu'une faible perturbation visuelle. Chez un sujet
sensoriel, on remarquera une altération accentuée du
système psycho-nerveux : ralentissement des associa­
tions d’idées, hébétude, torpeur, et parfois même hal­
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 119

lucinations spontanées. Passons au diagnostic de la


sensibilité à la suggestion. Elle se mesure, d’après
moi, à l’aptitude plus ou moins accusée au mono-
idéisme spontané. Les signes extérieurs qui la révè­
lent sont les suivants : visages ovales ou triangulai­
res, par opposition aux physionomies rondes ou car­
rées ; prédominance dans les linéaments de la face
des contours elliptiques sur les contours rectilignes ;
insuffisance de hauteur du tiers supérieur du visage
ou excès du tiers inférieur (dans ces deux cas le sujet
est aussi un prédisposé à l’hypnotisme sensoriel) ;
oreilles dépourvues d’ourlets, de lobes, ou des deux ;
pouce grêle ou court. Ligne mentale tenue ou absente.
Le nez fournit également un indice ; les suggestibles
se trouvent en proportion notable parmi les gens dont
l’organe olfactif affecte soit la forme convexe à ter­
minaison pointue, soit la forme concave à terminaison
ronde.
Tous ces signes donnent chacun une approximation.
Si le même individu en présente plusieurs, sans nul
doute c’est un « sujet ».

Une autre idée inhibitrice retient souvent les débu­


tants. C’est la crainte du ridicule, en apparence iné­
vitable, de l’échec. L’hypnotiseur, connu comme tel, et
dont le savoir-faire est admis, ne provoque aucune ma­
nifestation railleuse quand ses efforts n’ont point l’ef­
fet qu’on attendait. Le nouveau venu, au contraire, en­
tend rire de lui à chaque expérience inefficace. C’est
que, dans l’esprit du vulgaire, prétendre hypnotiser
c’est se targuer d’un pouvoir quasi-surnaturel. On ne
rit pas d’un échec, mais d’une prétention qu’on juge
saugrenue.
En vérité, l’épreuve mérite qu’on l’affronte, ne se­
rait-ce que pour s’exercer à l’assurance et à l’impassi­
bilité. Mais rien n’empêche de procéder avec circons­
120 l’influence a distance

pection et de choisir, pour les premiers essais, un indi­


vidu présentant les signes dont j’ai parlé. D’ailleurs,
le risque dure peu. Dès qu’un monsieur a réussi en
public une seule hypnotisation, ceux qui étaient les
plus enragés à railler ses tentatives le considèrent avec
stupéfaction. La routine intellectuelle claquemure
tant de cerveaux que celui qui s’en libère assez mani­
festement pour prendre l’initiative de pratiquer quel­
que chose d’aussi insolite que l’hypnotisme provoque
toujours l’étonnement.
Quoique la voie précédente reste la plus rapidement
préparatoire à la télépsychie, puisqu’on peut former
un expérimentateur en moins d’un mois, il existe d’au­
tres méthodes, qu’on peut utiliser, celles-là, à l’insu
de tous. D’abord, la conformité aux principes de
l’Education psychique élémentaires, tels que je les ai
exposés dans mon ouvrage Le Pouvoir de la Volonté.
Ensuite, la pratique habituelle de certaines règles dont
voici l’indication.

1° Le silence.

Il ne s’agit pas de devenir stylite, ni même stricte­


ment laconique. C’est surtout l’intimité morale et in­
tellectuelle qui doit rester silencieuse et se refuser à
toute confidence, à toute expression verbale, à toute
mise en contact. Ceci contient nombre de mouvements
affectifs extérioriseurs de dynamisme psychique et
opère une condensation méthodique susceptible d’ar­
mer les plus débiles. La spontanéité orale doit égale­
ment être maîtrisée par un effort d’attention qui sub­
stituera toujours des paroles réfléchies à celles que tend
à arracher l’impulsion première. Nouvel effort, nou­
velle contention, nouvelles unités d’énergie qui se con­
densent.
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 121

2° L’esseulement (I).
Une fois accoutumé à la règle précédente, on la
complétera par des retraites périodiques, dans la so­
litude. Il est bien entendu que, pour éviter ce désor-
donnement intellectuel qu’on nomme la rêverie et qui
contrevient, très insidieusement, aux règles du silence,
on fixera à ses pensées une orientation délibérée. Par
exemple : méditation des plans des prochaines réali­
sations, révision mnémonique des incitations ou vel­
léités ressenties depuis la précédente révision analo­
gue (ce qui permet d’éliminer les influences étrangè­
res), exercices d’entraînement respiratoire ou d’imagi­
nation active.
Cette pratique, l’esseulement, agrège solidement les
éléments psychologiques de la personnalité, prévient
les écarts, les dispersions, les dissociations, conforte en
un mot tout l’essentiel du « moi ».

3° Respiration.

On connaît les effets perturbateurs de l’attention sur


le rythme respiratoire. On sait, d’autre part, que tout
acte de télépsychie volontaire requiert une activité
prolongée de l’attention. En tonifiant les muscles qui
commandent l’inspiration, on se met donc à même
d’effectuer des émissions télépsychiques plus vigou­
reuses et plus longues et d’en éprouver une moindre
fatigue. On active aussi, considérablement, l’élabora­
tion de la force nerveuse dont le rôle primordial a été
défini au chapitre III. C’est pourquoi toutes les métho­
des de yoga, de fakirisme ou de simple magnétisme
animal insistent tant sur l’opportunité des exercices
respiratoires.

(1) Je n’emploie pas ici le mot isolement, usité en psychisme pour


désigner l’exercice décrit page 95.
122 l’influence a distance

Mille variétés de ces exercices ont été proposées. Le


lecteur n’aura donc que l’embarras du choix. Je tiens
néanmoins à dire qu’il suffit de respirer attentivement
et largement deux ou trois quarts d’heure par jour.
Le mouvement — la marche notamment — y peut
aider.
Les sports, tels qu’on les entend actuellement, abou­
tissent à un athlétisme presque uniquement muscu­
laire et d’ailleurs passager. En tout cas, ils sont conçus
dans une toute autre acception que la pratique du
psychisme. Seule la gymnastique dite suédoise reste
compatible avec nos enseignements. Elle augmente les
résistances physiologiques sans altérer aucun organe
en le surmenant.

4° Imagination.
Nous avons vu au chapitre III qu’il faut exprimer
en images ce que l’on veut suggérer. On n’y arrive
pas toujours d’emblée. Les peintres et les sculpteurs
quoique visuellement doués, s’exercent longuement à
fixer dans leur esprit des lignes, des couleurs et des
plans avant d’arriver à voir exactement. Peu à peu
ils deviennent capables non pas seulement de retenir
mais de créer.
Le praticien de la télépsychie devrait éduquer d’une
manière analogue ses facultés d’imagination. En y
songeant, il prendra l’habitude de considérer atten­
tivement les caractères morphologiques des choses et
des êtres. Il utilisera ses moments de retraite à se rap­
peler des objets, des personnes, des scènes. Il évoquera
des visages absents et détaillera leurs traits.
Pour parfaire cet entraînement, on peut l’adapter
à l’ouïe, à l’odorat, au toucher et même au goût.
5° La vie fournit journellement plusieurs occasions
d’user d’action mentale. En essayant d’abord des
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 123

efforts brefs et faciles, puis de plus en plus longs et


complexes, on parachève l’entraînement, ce qui ne
veut pas dire qu’il faille cesser de l’exercer. Bien au
contraire, il convient d’entretenir activement toutes
les facultés qui concourent à l’influence télépsychique.
XVI. — LA TÉLÉPSYCHÏE DES EMPIRIQUES

Tout le monde connaît, sinon par directe constata­


tion, du moins par témoignages, les phénomènes attri­
bués à ces empiriques décorés du nom de sorciers, dont
la race se perpétue, malgré la diffusion de l’école pri­
maire (1) et du positivisme (2), dans certaines de nos
régions, notamment en Bretagne et dans l’Isère.
Abstraction faite des fantasmagories surajoutées par
la légende et des ingrédients botaniques ou autres
qui expliquent suffisamment l’efficacité de certains
« sorts », il reste indéniable que des gens incultes et
crédules réussissent à agir, sans les toucher et même
sans les voir, sur ceux qu’ils ont décidé d’affecter.
Le type du sorcier et l’origine des doctrines dévoyées
qui inspirent ses pratiques ont été étudiées avec une
admirable sagacité et une documentation impression­
nante par Stanislas de Guaita (3). J’ai, comme ce der­
nier, la certitude qu’un monde supra-normal d’êtres
et d’énergies contribuent parfois aux œuvres de sor­
cellerie (4). Mais les seules propriétés du psychisme

(1) A l’examen subi par les recrues lors de leur arrivée au régiment,
on trouve 25 % d’illettrés.
(2) Il y a, en France, quelques millions de personnes qui croient
à l’existence du diable et transmettent à leurs enfants cette conviction.
(3) Voir, de cet écrivain, La Clé de la Magie Noire.
(4) Voir Science occulte et Magie pratique, du même auteur (Éditions
Dangles, Paris).
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 125

humain, telles que nous les avons envisagées dans ce


livre, rendent très bien compte de quantité d'effets
communément obtenus par les fervents du grimoire,
notamment de tous les troubles ou suggestions qu’ils
savent infliger aux hommes et aux animaux (1).
Ouvrons un Dragon Rouge ou tout autre enchiri-
dion goétique. Nous verrons que pour le moindre ré­
sultat l’expérimentateur doit accomplir une longue
série d’actes malaisés, pénibles, dangereux, impres­
sionnants, toujours de nature à exalter considérable­
ment sa passion.
Il lui faut rechercher et recueillir, à des moments
précis, des flores singulières, sacrifier rituellement tel
animal pour en extraire le sang ou les organes, visi­
ter nuitamment des sépultures afin de s’y procurer
des ossements ou des clous « du cercueil d’un homme
mort, sans confession, dans l’année ».
Quand il a réuni les substances, aussi nombreuses
qu’hétéroclites, requises pour ses maléfices, le sorcier
les doit consacrer aux Puissances des Ténèbres, mixtu-
rer et saturer d’influx — ce pourquoi le mélange s’ac­
compagne d’imprécations. Il y doit presque toujours
mêler quelque objet sur lequel il aura fait dire une
messe, à l’insu du prêtre, en le dissimulant sur l’autel
avant la cérémonie. Avant tout, une première initia­
tive, assez délicate, lui est imposée : celle de se pro­
curer, de la personne qu’il veut frapper, les cheveux
ou les parcelles vestimentaires sur quoi il compte pour
établir le rapport.
Tout cela exige de lui, pendant des jours, des se­
maines, une attention soutenue, fixement orientée, de
violents efforts de volonté — qui témoignent de son
implacable résolution. L’obsession de ce qu’il veut ob-
(1) L'animal ressent l'action télépsychique de l'homme et c'est
par le truchement de cette influence que s'établit l'ascendant humain.
Voir l’ouvrage précité.
126 l’influence a distance

tenir s’accroît au fur et à mesure que l’opération se


poursuit. Comme il croit entièrement à la gravité de
ses profanations, de ses sacrilèges et de ses invoca­
tions impies, son imagination en reste frémissante et
retentit sur son émotivité qui vibre intensément. Et
l’aveugle confiance qu’il attache à ses pratiques, à
l’irrésistible pouvoir dont il croit disposer en les ac­
complissant, donne à sa pensée une fermeté inébran­
lable.
Ainsi le modus operandi de maintes recettes supers­
titieuses s’identifie parfaitement avec celui du psy­
chisme méthodique. Les formules de l’officiant agis­
sent avant tout sur lui-même. En son âme à la fois
primitive et passionnée, elles déterminent de frénéti­
ques élans dont les télépsychiques répercussions frap­
pent souvent avec plus de vigueur qu’une émission
systématique. C’est sans doute décevant, mais l’ignare,
le stupide, le délirant sorcier obtient ce que tant d’hom­
mes cultivés, rationnels, mais tièdes et sans convic­
tion n’obtiendraient pas. Pour réussir des opérations
de sorcellerie, il faut être prédestiné, c’est-à-dire pré­
disposé par une nature comme seules certaines ré­
gions à demi-sauvages peuvent en conformer.
Rappelons, pour tranquilliser les craintifs, que selon
une loi absolument vérifiée, nul ne saurait affecter té-
lépsychiquement un être notablement plus subtil que
lui. Ceux qui me lisent et me comprennent peuvent
donc se considérer comme inaccessibles à toute entre­
prise maléfique de gens qui sont certainement beau­
coup moins évolués qu’eux.
XVII. — NÉGATEURS ET DÉTRACTEURS

On peut dire qu’en matière philosophique, métaphy­


sique ou religieuse, Vultima ratio de toute opinion
n’est autre que le tempérament. Les volte-face les plus
complètes s’expliquent par l’évolution de ce dernier.
Ce subjectivisme qui n’a rien que de normal en un
domaine idéologique devient malaisément admissible
lorsqu’il s’étend à la science expérimentale.
Cependant, les corps savants ont tour à tour rejeté,
admis, rejeté à nouveau la réalité des phénomènes du
magnétisme animal pour lui donner enfin, après les
travaux de Braid, vers 1742, une estampille officielle
qui ne devait être que provisoirement définitive.
L’hypnotisme eut alors dans le monde scientifique et
médical une vogue considérable. C’était la question à
la mode. On lui attribuait une portée qui dépasse con­
sidérablement ses limites :
« La découverte de Braid, écrivait en substance le
« Dr J.-P. Philips (1), a une bien autre importance que
« celles que viennent de lui découvrir quelques chi-
« rurgiens français. A moins d’être de simples pra-
« ticiens sans culture intellectuelle, ils devraient re-
« connaître qu’elle constitue la conquête la plus vaste
« qu’aient encore réalisée ou entrevue la médecine,
« l’histoire naturelle et la philosophie. »

(1) Dr J.-P. Phillips. — Cours théorique et pratique de Braidisme,


Paris, J.-B. Ballière, 1860, un volume in-8°.
128 l’influence a distance

Le vent a tourné. Il a suffi qu’un neurologue de mar­


que ait voulu primer et effacer ses prédécesseurs par
de nouvelles théories. — Magister dixit. La pure or­
thodoxie de la Faculté enjoint pour le moment à ses
dévotieux séides de se montrer au moins dubitatifs
à l’égard des phénomènes hypnotiques. Ainsi, nous
pouvons lire, sous les signatures de MM. F.-Achille
Delmas, ancien chef de clinique des maladies mentales
à la Faculté de Médecine de Paris, Médecin des Asiles,
et Marcel Boll, professeur agrégé de l’Université, doc­
teur ès sciences, les déclarations suivantes (1) :
« Nous ne retenons rien (2) de l’hypnose, telle qu’on
« a cru la comprendre, car elle repose sur des inter-
« prétations erronées... L’hypnose, c’est la simula-
« tion (3) du sommeil somnambulique par des « su-
« jets » parfaitement éveillés : il ne reste chez « l’hyp-
« notiseur » que l’alternative d’être ou le complice ou
« la dupe (4) de son sujet. » C'est péremptoire, mais
les auteurs devraient bien nous faire connaître de quel­
les recherches expérimentales ils ont tiré leurs affir­
mations. En particulier, ont-ils cherché à vérifier per­
sonnellement, par l’application des procédés hypno­
tiques sur une centaine d’individus pris au hasard, la
réalité ou l’inexistence de l’hypnose? C’est douteux.
L’hypnose c’est, disent-ils, simulation. Voire. Leurs
confrères d’il y a quatre-vingts ans étaient donc des
hallucinés. « Le 12 avril 1829, écrit Cullerre (5), le
« Dr Cloquet fit une opération de cancer au sein sur
« une dame âgée de soixante-quatre ans, pendant
« qu’elle était plongée en somnambulisme. Elle ne res-
(1) La personnalité humaine, par F.-Achille Delmas et Marcel. Boll.
Flammarion, éditeur, Paris, 1922.
(2) C’est moi qui souligne. P.-C. J.
(3) C’est moi qui souligne. P.-C. J.
(4) C’est moi qui souligne. P.-C. J.
(5) Dr Cullerre, Magnétisme et Hypnotisme, Paris 1887, J.-B. Baillère,
Éditeur.
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 129

« sentit aucune douleur et ne conserva aucun souve-


« nir de l’opération. En 1846, le Dr Loysel, de Cher-
« bourg, extirpait une tumeur de la région mastoï-
« dienne chez une fille de trente ans endormie. A son
« réve’il, elle déclara qu’elle ne souffrait pas, qu’elle
« n’avait éprouvé aucune douleur et n’avait conservé
« aucun souvenir de ce qui s’était passé. Le même
« chirurgien, en quelques mois, en était arrivé à sa
« douzième opération pratiquée durant le sommeil
« hypnotique. A la même époque, Fanton, Toswel et
« Joly, de Londres, firent en des conditions semblables
« l’amputation de deux cuisses et d’un bras. En 1847,
« deux médecins de Poitiers, MM. Ribaud et Kiaro,
« opérant une jeune fille atteinte d’une tumeur du
« maxillaire firent, dans une première séance l’inci-
« sion de la tumeur, dans une seconde l’extraction
« d’une dent ; dans la troisième, l’extirpation du néo-
« plasme, le tout sans douleur, grâce à l’hypnose. Ce
« long et cruel travail, lit-on dans le compte rendu
« de la Gazette des Hôpitaux, avait plutôt ressemblé
« à une leçon de dissection faite à des élèves qu'à une
« opération pratiquée sur un corps en vie. Le 4 décem-
« bre 1859, MM. Broca et Follin ont pratiqué à Paris
« l’incision d'un abcès à l’anus sur une femme de
« 40 ans, hypnotisée. L’opération s’est accomplie sans
« douleur. Quelques jours plus tard, le Dr Guérineau,
« de Poitiers, amputa la cuisse d’un homme pendant
« l’anesthésie hypnotique. Le patient ne ressentit au-
« cune douleur, mais il eut conscience de l’opération.
« J’ai senti, dit-il, ce qu’on m’a fait (1) et la preuve,
« c’est que la cuisse a été coupée au moment où vous
« me demandiez si j’éprouvais quelque douleur. Le
« Dr Esdaille, chirurgien des Hôpitaux de Calcutta,
« exécuta en six ans, à la même époque, six cents

(1) Gazette des Hôpitaux, du 29 octobre 1859.


130 l’influence a distance

« opérations sans douleur par l’hypnotisme, sous le


« contrôle d’une commission de médecins, de chirur-
« giens et de savants nommée sur sa demande par le
« gouvernement (1). »

MM. Achille Delmas et Marcel Boll nous diront-


ils que tous les sujets dont il vient d’être question, ont
poussé la simulation jusqu’à feindre l’insensibilité
alors que le scalpel, les scies et les rugines disséquaient
leur chair ? On comprendrait dans ce cas que les mé­
decins qui les opérèrent trouvaient quelque avantage
à être des complices ou des dupes. Que de complices
et que de dupes, alors, dans le corps médical. Pour ne
citer que les principaux, nommons les docteurs :
Azam, Baréty, Beaunis, Bérillon, Bernheim, Binet,
Bottey, Bourneville, Bourru, Brierre de Boismont,
Broca, Brémaud, Burcq, Burot, Charcot, Clocquet, Cul-
lerre, Croq, Demarquay, Dumontpallier, Dupouy, Du-
puy, Durand de Gros, Eliotson, Esdaille, Esquirol,
Féré, Gigot-Suard, Gilles de la Tourette, Giraud-Teu-
lon, Grasset, Guérineau, Janet, Liçbeault, Luys, Ma-
gnin, Mesnet, Maricourt, Pitres, Regnard, Richer, Ri­
chet, Velpeau et Voisin.
Certes, les théories émises par tous ces praticiens
se sont peu à peu révisées, dans le sens que j’indiquai
au chapitre V (2) et parmi les faits qu’ils observèrent,
la mythomanie et la simulation eurent sans nul doute
un rôle considérable, mais il n’en reste pas moins que
l’hypnose existe parfaitement et que les véritables du­
pes ne sont pas celles que pensent certains. Il suffit
d’ailleurs d’expérimenter pour constater qu’en dépit
de toute négation, l’hypnotisme subsiste par des faits
qu’on ne saurait supprimer d’un trait de plume.

(1) Dr Cullerre, Loc. cit.


(2) Page 74.
INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES 131

*
* *

On peut en dire autant de l’action télépsychique,


quel que soit le suffisant dédain de la Faculté et, en
particulier, de MM. Achille Delmas et Boll pour « ces
interprétations tendancieuses de coïncidences qu’on a
décorées du nom de télépathie » (1). A qui fera-t-on
admettre que parmi les milliers d’observations et
d’expériences relatées dans les ouvrages indiqués pa­
ges 16 et 17, il n’y ait pas au moins un fait probant.
Et ce fait fût-il rigoureusement isolé suffirait à enga­
ger tout homme plus soucieux de la vérité que des
caprices de la science officielle à essayer de le repro­
duire pour sa conviction personnelle. C’est ce que j’ai
fait, c’est ce que depuis longtemps par mes leçons ora­
les et aujourd’hui par le présent ouvrage, j’ai mis ceux
qui le désirent à même de répéter. Peut-être réussirai-
je ainsi, en suscitant de nouveaux et nombreux expé­
rimentateurs, à provoquer de nouvelles lumières sur
cette question, si attachante, de l'influence réciproque
que nous exerçons tous, consciemment ou inconsciem­
ment, les uns sur les autres.

( 1 ) Achille Delmas et Boll. Loc. cit.


LIVRE II

Cours Supérieur
INTRODUCTION AU LIVRE ÎI

Les dix-sept premiers chapitres qui constituent le Li­


vre 1 de ce traité furent composés en 1925.
Bien avant sa publication, de multiples correspon­
dants m'écrivaient en vue d'obtenir des instructions
pratiques sur l'influence télépathique. L'idée me vint
alors de condenser en un volume toutes les indications
nécessaires à l'expérimentateur.
Vingt ans ont passé. La réimpression de cet ouvrage
m'ouvre la possibilité de le compléter. J'y annexe
donc un Livre II où l'on trouvera une série de com­
mentaires et de développements que m'ont inspiré,
d'une part la poursuite de mes observations, et d'au­
tre part, diverses questions que m'ont adressées les
lecteurs de l'édition primitive.
Le domaine des sciences psychiques est vaste. Cha­
cune de ses branches a son attrait particulier. Celle qui
s'imposa, dès 1904, au premier plan de mes investiga­
tions, ce fut la télépsychie, cette étrange propriété,
cette subséquence indéniable, vérifiable, de la vie intel­
lectuelle et affective. A l'exposé initial, celui du Livre I
l'expérience acquise depuis sa production ne m'a sug­
géré aucune modification : elle m'a confirmé la réalité
de tout ce que j'y affirmais et l'efficacité des procédés
qui y sont révélés, car, en raison de nombreux témoi­
gnages, je puis dire que leur mise en pratique a permis
136 l’influence a distance

à ceux qui s'y sont consciencieusement conformés de


déterminer les résultats quils envisageaient.
Ce qui va suivre présuppose de la part du lecteur
une intégrale compréhension préalable de tout ce qui
se trouve exposé dans le Livre I.
I. — DISPOSITIONS NATURELLES
ET DISPOSITIONS ACQUISES

Analysez votre condition psychique. — Un test. — Gouverner sa


pensée. Les sources de la pensée. Bases fondamentales
l’aptitude à la télépsychie délibérée. — Le poste de commande­
ment. — Conditions nécessaires à toute intervention efficace.

Analysez vos conditions psychiques.


Inconsciemment, chacun émet une influence télé­
psychique. Nos intentions, nos aspirations, nos avidi­
tés, nos aversions, l’orientation fixe ou divergente de
nos pensées s’extériorisent et agissent plus ou moins
sur ceux qui en sont l’objet : puissamment si elles
sont ardentes, fermes et constantes, faiblement si elles
sont velléitaires et multiples. Chaque individu a son
influence personnelle, bien particulière, de laquelle
résultent l’impression qu’il produit, les sympathies ou
les antipathies qu’il détermine, le degré d’autorité dont
il jouit, non pas en raison d’un titre ou d’un galon,
mais par l’irradiation directement humaine de sa per­
sonnalité.
Parmi ceux qui veulent utiliser la télépsychie, de
propos délibéré, soit pour influer systématiquement
sur les autres, en général dans la vie quotidienne, soit
éventuellement en vue d’une décisive emprise sur
138 l’influence a distance

quelqu’un, il s’en trouve de bien doués parce qu’ils


sont venus au monde avec une structure physique ro­
buste et dominatrice, comme certains naissent avec une
structure musculaire puissante et une carburation
surrénalienne abondante, ce qui se traduit par une ap­
titude innée à l’effort, au travail acharné, aux luttes
obstinées, aux initiatives hardies. Inversement, chez
certains, la clarté, l’esprit, la détermination, l’ardeur
convoitante demeurent incertaines ou fugitives parce
que les composantes de leur conditionnement psychi­
que manquent de vitalité ou d’homogénéité.
Mais les moins bien doués, s’ils ressentent le goût du
pouvoir mental, possèdent la plus importante des dis­
positions, car ce goût, s’il préoccupe leur esprit cons­
tamment, les propulse suffisamment pour les amener
à accomplir, d’abord malaisément, puis de plus en plus
hardiment et avec obstination, les efforts indispensa­
bles au développement de la vigueur psychique. C’est
exactement comme le timide travaillé sans répit par
l’obsédante ambition de posséder la plus impertur­
bable assurance. Chaque fois qu’il se sent troublé en
présence de quelqu’un, il éprouve pour son état une
aversion profonde. Obscurément, il tente de s’enhardir,
cherche et trouve des indications méthodiques pour
réagir et quelquefois, des compagnons doués d’aplomb,
en la société desquels, l’exemple étant contagieux, il
s’entraîne inconsciemment à surmonter son impres­
sionnabilité. Avec le temps, ce timide se transforme
et un jour vient où il n’est plus au pouvoir de qui que
ce soit de l’impressionner le moins du monde, où il
parle devant un auditoire avec la même aisance qu’à
ses intimes et possède en définitive un degré d’assu­
rance supérieur à celui d’un être normal.
Ainsi, les derniers peuvent devenir les premiers en
matière de télépsychie si le désir qui les anime d’exer­
cer efficacement et délibérément cette influence prédo­
mine au fond d’eux-mêmes.
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 139

Bien avant les travaux d’Adler et la définition du


complexe d’infériorité, maint psychologue avait ob­
servé que de nombreux individus affligés d’une insuf­
fisance, d’une débilité ou d’une infirmité, soit physi­
que, soit psychique, s’évertuaient à compenser ce désa­
vantage par l’acquisition, au prix d’une application
tenace, d’efforts laborieux, d’un degré de capacité au-
dessus de l’ordinaire, d’une suprématie quelconque.
Pourquoi certains réagissent-ils ainsi ? Parce que non
seulement, ils évaluent et ressentent avec acuité ce
que leur condition a d’affligeant, mais encore parce
qu’une perpétuelle révolte intérieure les soulève con­
tre un tel état, galvanise leurs énergies, oriente leurs
pensées vers la possession de quelque indiscutable vir­
tuosité ou supériorité.
Tout au long de ma vie, j’ai vu de frappants exem­
ples de telles évolutions, certaines étaient précoces,
d’autres tardives, toutes semblaient surprenantes. A
noter que bon nombre de ces redressements furent
quelquefois déclenchés, souvent activés, par la lecture
d’un ou plusieurs traités d’éducation mentale, lecture
qui fit « jaillir » l’étincelle et apparaître clairement à
l’esprit des possibilités jusque-là confusément soup­
çonnées.
Les privilégiés dont je parlais au début de ce cha­
pitre, ceux que leur hérédité a doué d’une structure
psychique robuste, vigoureuse et dominatrice, ne
s’avèrent pas avantagés d’une manière absolue, car
l’énergie qui les anime suscite presque continuelle­
ment en eux des pensées et des actes impulsifs. Il s’en­
suit que leur influence ne s’exerce consciemment que
dans certains domaines à l’exclusion de certains au­
tres. Chacun a pu observer des hommes autoritaires
et même despotiques dans l’exercice de leurs fonctions
professionnelles, mais étrangement passifs sous d’au­
tres rapports. Leur empire sur eux-mêmes n’étant pas
Î40 l’influence a distance

continu, s’ils maîtrisent bien certaines spontanéités se­


condaires afin de les subordonner à d’autres sponta­
néités plus importantes, ils en laissent d’autres s’épa­
nouir en automatismes asservissants. S’ils possèdent
en ce qui concerne leur métier ou leurs affaires une
capacité remarquable de concentration mentale, cette
capacité s’éclipse s’ils essaient soit de fixer longuement
leur attention sur un sujet qui ne leur est pas fami-
lier, de la détourner volontairement d’une pré occupa -
tion importune ou plus encore s’ils tentent de suspen-
dre volontairement le cours de leurs pensées, ce qui,
j’y reviendrai, constitue l’une des pratiques essentiel­
les de l’expérimentation télépsychique.
On ne fait bien que ce pour quoi on ressent de l’at­
trait. Aussi, fussent-ils ' doués de cette « forte struc­
ture » que j’ai dépeinte, ceux-là ne se trouvent pas
dans les meilleures dispositions, qui viennent à recou­
rir aux procédés décrits dans la première partie de ce
livre uniquement en désespoir de cause, parce qu’ils
ont épuisé tous les autres moyens d’obtenir tel ou tel
résultat, à moins que la mise à exécution des procédés
en question ne leur inspire, en soi, un vif intérêt.
Inversement, le moins bien doué que séduit l’idée
de manier le phénomène télépsychique, d’exercer son
aptitude à l’utiliser, de s’entraîner à surmonter les dif­
ficultés inséparables de la pratique, progresse rapide­
ment.
J’ai insisté, au cours du Livre I, sur l’importance de
l’intensité de l’ardeur convoitante et de la précision
des images mentales. Il y a un troisième élément qui,
dans bien des cas, joue un rôle important et quelque­
fois essentiel. C’est la représentation de l’état psycho­
logique du sujet, chose qui nécessite une évaluation
caractérologique sagace de celui-ci, principalement de
son degré de sensibilité et de subtilité.
L’opérateur qui, faisant abstraction de sa propre
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 141

mentalité, peut ainsi se mettre pour ainsi dire « dans


la peau » du sujet qu’il cherche à influencer, s’effor­
cera d’évoquer l’état d’âme exact de celui-ci et lui
transmettre ainsi des pensées de nature à trouver une
résonance immédiate dans sa vie intérieure. Je con­
sacre plus loin à ce « syntonisme » un chapitre spécial.

Un test.

Votre activité psychique, vos émotions, vos senti­


ments, vos pensées, vos avidités (1), vos aversions s’ir­
radient à l’extérieur de vous-même et tendent à éveil­
ler une résonance dans les dispositions d’esprit de ceux
qui en sont l’objet. Un agent universel, commun véhi­
cule de toutes les irradiations humaines, comme l’éther
des physiciens est le commun véhicule de toutes les
émissions de tous les postes d’émissions radiophoni­
ques, vous met en constant rapport avec tous. Cet
agent ne doit pas être considéré comme une simple
hypothèse, comme une conception opportunément
explicative, car aussi loin qu’atteignent dans la nuit
du passé les investigations de l’histoire, on le trouve

(1) Pour préciser l’acception que je donne aux mots « avidité » et


« aversion », je reproduis ici la définition que j’en ai donné dans Ï Aptitude
à P Effort réalisateur : C’est au sens du psychisme que sont à la fois
ressentis et représentés avec plus ou moins de véhémence et de précision :
— les électivités sensorielles et émotionnelles,
— l’attrait des appropriations matérielles, celui des appropriations
intellectuelles, esthétiques, des contentements affectifs et des qualifi­
cations qui rendent possibles ces abstentions et satisfactions,
— l’ambition des diverses modalités de la virtuosité, de la suprématie
ou de la puissance,
— le goût des réalisations constructives, de l’organisation et de la
création,
— l’intérêt investigateur, orienté vers l’extension de la connaissance,
— les aspirations idéalistes, spirituelles ou mystiques,
— enfin l’aversion pour tout ce que l’on tend à cesser ou à éviter de subir.
142 l’influence a distance

mentionné dans les écrits d’une chaîne ininterrom­


pue de savants et de philosophes (1). Loin de se trou­
ver isolé, fut-ce au centre du désert, loin de se trouver
réduit à ses seuls moyens physiques, l’homme le plus
déshérité, le plus opprimé, le plus ignoré use incons­
ciemment de cette propriété normale du psychisme
humain d’influer invisiblement dans une aire étendue.
Le jour même où il prend conscience de ce fait et de
la possibilité d’intensifier, de diriger, de concentrer
délibérément son influence, son horizon se trouve con­
sidérablement élargi. Tout lui apparaît sous un angle
nouveau. Il n’est pas de découverte mondiale qui ait
pour lui autant d’importance. Y rêvera-t-il simple­
ment, en alimentant ses rêveries de lectures adéqua­
tes, de la parole que prodiguent maints conférenciers
spécialisés ou de conciliabules au sein de quelque
« cercle d’études », ou bien passera-t-il d'emblée à
l'expérimentation. secrètement, sans rechercher d’ap­
probation, de confirmations, sans se laisser ni détour­
ner ni distraire de la pratique silencieuse et assidue.
. Première épreuve de notre « test ».
Deuxièmement, ayant admis la possibilité d’obtenir
par l’action télépsychique un résultat particulier,
l’idée de se mettre en personne au travail dans ce sens,
d’exercer soi-même l’influence, d’accomplir l’effort
nécessaire pour cela éveille-t-elle en lui un sentiment
analogue à celui du goût de Vévertuation vers la vir­
tuosité chez l'artiste, ou demeure-t-elle à l’état de vel­
léité avec tendance à esquiver la difficulté et à recou­
rir à l’intervention d’un tiers.
A l’aide de ces considérations, le lecteur appréciera
dans quelle mesure il peut envisager ses dispositions
comme effectives.
(1) A titre documentaire, j’indique à ceux qui voudraient vérifier
cette assertion l’œuvre en trois volumes de Stanislas de Guaita, le
Serpent de la Genèse.
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 143

La difficulté.

Il suffit de quelques tentatives expérimentales pour


prendre conscience de la principale difficulté qu’il va
s’agir de surmonter. A vrai dire, cette difficulté, tout
le monde s’y heurte. Ainsi, lorsque l’on essaie de main­
tenir longuement son attention sur une question étran­
gère à celles auxquelles on se trouve déjà exercé à pen­
ser, on s’aperçoit combien cela exige d’efforts. Il en
est de même quand on cherche à détourner son esprit
d’une préoccupation obsédante. Cela n’a rien d’anor­
mal car l’attention volontaire nécessite toujours une
réaction contre notre naturel. Cette réaction, l’enfant
s’y trouve contraint dès qu’il entre en classe. Aupara­
vant, son seul mode d’attention était l’attention spon­
tanée, celle qu’il apportait à ses jeux, par exemple, ou
à l’examen des objets, des spectacles dont l’aspect cap­
tivait son esprit. Dès sa sixième année, on requiert de
lui qu’il surmonte toute distraction et tienne les yeux
fixés sur le tableau noir, sur le modèle alphabétique ;
on lui impose de différencier avec précision lettres et
syllabes en associant à chacune sa consonnance ou sa
sonorité. C’est là une astreinte pénible dont il se sent
joyeux d’être momentanément délivré quand sonne
l’heure de la récréation.
A toutes les étapes de la scolarité, puis de l’initiation
à la vie professionnelle, la même difficulté surgit cha­
que fois qu’il faut s’assimiler de nouvelles connaissan­
ces, s’appliquer à l’exécution de besognes inhabituel­
les ou s’ingénier à résoudre un problème distinct de
tous les précédents.
Tout ceci implique que, bon gré mal gré, chacun se
voit dans l’obligation, du moins à certaines heures, de
gouverner sa pensée, de l’orienter et de la maintenir
délibérément sur tel ou tel sujet, souvent dépourvu
d’attrait, parfois même d’une extrême aridité.
144 l’influence a distance

C’est devant une difficulté de même ordre que se


trouve l’expérimentateur débutant, bien qu’exercé à
la concentration volontaire de la pensée sur tout ce
qui a fait l’objet de ses études, sur tout ce que com­
porte sa profession ; il s’aperçoit que nul n’arrive
d’emblée à fixer son attention sur une catégorie d’ima­
ges mentales qu’il n’est pas entraîné à se représenter
et à maintenir sans interruption sur l’écran de son
imagination.
Qu’il s’obstine, réitère chaque jour sa tentative, la
prolongeant autant qu’il le peut, .et il ne tardera pas
à constater que, là comme ailleurs, l’application assi­
due crée l’aptitude, la possibilité.
Plus généralement, et en dehors des heures affectées
à l’expérimentation, une continuelle vigilance en vue
de la subordination des automatismes à la pensée déli­
bérée développe considérablement l’aptitude à la con­
centration.
En visant ce résultat axial : l’entraînement à gou­
verner constamment sa pensée, l’adepte des sciences
psychiques s’assurera en quelques mois une efficience
remarquable.
Les sources de la pensée.

Aux promoteurs de la « New Thought » ou « Ecole


de la pensée nouvelle » (1), notamment à Prentice Mul-
ford et à W.-W. Atkinson revient l’incontestable mérite
d’avoir mis en évidence l’importance et le pouvoir de
la pensée considérée comme une force. Ce qui reste
surprenant, c’est le caractère simpliste de leur ensei­
gnement. A lire les œuvres de ces novateurs, on pour­
rait croire qu’il suffit à l’adepte d’un assentiment, d’une
décision de principe, d’une ferme résolution pour

(1) Cette Ecole prit naissance aux Etats-Unis, il y a environ un demi-


siècle.
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 145

substituer à ses habituels états d’âme, les conceptions


et l’attitude mentale qu’ils recommandent. « Que votre
pensée soit : courage, optimisme, énergie », écrit At­
kinson. Excellente exhortation, mais ne s’y conforme
pas d’emblée qui veut. En effet, les sources de la pen­
sée, multiples affluents dont seule la résultante se ma­
nifeste en mode conscient, s’élaborent au sein de nos
automatismes subconscients, lesquels ne sauraient être
instantanément subordonnés à la volonté délibérée.
Pour permettre à chacun de concevoir la complexité
des éléments qui concourent à l’élaboration de la pen­
sée, je vais énumérer brièvement les principaux ; je
dis brièvement, car il faudrait un volume entier pour
exposer la question avec toutes les précisions possibles.

I. — Eléments d'origine directement physiologique.


a) Tout d’abord le type humoral (bilieux, nerveux,
sanguin, lymphatique). Chaque type prédispose à une
orientation psychique distincte. Par exemple, le bilieux
est enclin à la prévoyance, et le lymphatique insou­
ciant ; au nerveux, idéologue, s’oppose le sanguin, réa­
liste ;
b) Secondement, l’état endocrinien. En particulier,
l’activité thyroïdienne, qui rend le sujet d’autant plus
rapide dans les associations d’idées, d’autant plus hâ­
tif, d’autant plus agité qu’elle est plus intense. De
même, le rendement des surrénales, duquel dépend la
capacité d’effort soutenu, de persistance, d’acharne­
ment ;
c) En troisième lieu, la cœnesthésie générale dont
l’équilibre se ressent de toute surcharge, carence ou
irrégularité fonctionnelle ;
d) Quatrièmement, l’écho des appétitions nutritives
ou reproductrices, appétitions dont le degré d’ardeur
procède de la structure organo-végétative.
146 l’influence a distance

II. — Eléments psychologiques individuels.


e) L’impressionnabilité, l’émotivité, la sensibilité 5

1) Les tendances (avidités et aversions) subcons­


cientes ;
I

g) Le contenu de la mémoire et les réminiscences ;


h) L’imagination, étroitement liée aux éléments e),
0 g);
i) Les habitudes et plus généralement les automa­
tismes.

III. — Eléments extérieurs.

j) Les perceptions visuelles, auditives, olfactives,


tactiles et gustatives, lesquelles retentissent sur l’im­
pressionnabilité qui les interprète selon ses caracté­
ristiques ;
k) Les idées, conceptions ou affirmations émises ver­
balement en présence du sujet ;
l) Les exemples et les spectacles auxquels il as­
siste ;
m) Ses lectures. (Ainsi, une série de notions puisées
dans un exposé écrit, puis réfléchie méthodiquement,
peut engendrer de profondes modifications du déter­
minisme intérieur primitif) ;
n) L’influence irradiante des personnes proches ou
éloignées que le sujet intéresse à un point de vue quel­
conque ; de ceux dont il préoccupe la pensée ;
o) L’influence télépsychique d’individualités incon­
nues, que certaines analogies mettent en rapport syn-
tonique avec le sujet.
Tous ces éléments concourent à l’élaboration au sein
de l’inconscient, de la pensée spontanée. Ce qui nous
(2) Au sujet des tempéraments, le lecteur pourra consulter les travaux
de Polti et Gary, ceux du Dr Carton ainsi que mon livre les Marques
révélatrices du caractère (Éditions Dangles, Paris).
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 147

vient à l’esprit s’engendre, ainsi à notre insu, avant


que nous en prenions conscience.
La pensée spontanée, constamment jaillissante, tend,
donc, à prédominer, de même que les automatismes
psycho-physiques tendent à déterminer le comporte­
ment. Essayez de détourner votre attention de ce qui
vous vient en ce moment à l’esprit et de la reporter
pendant cinq minutes sur un tout autre ordre d’idées,
délibérément choisi parmi ceux qui ne vous sont pas
familiers, et vous vous rendrez compte de la difficulté
capitale qu’il s’agit de surmonter dans l’expérimenta­
tion télépsychique. Autre observation : évaluez la du­
rée des intervalles qui, au cours de vingt-quatre heu­
res, circonscrivent les moments où prédomine la pen­
sée réfléchie, objective, issue des délibérations raison-
nées, en d’autres termes la conscience psychologique.
Ces intervalles vous sembleront, sans nul doute, con­
sidérables. Or, si vous visez à les réduire, vous les
réduirez progressivement, et vous pourrez ainsi sup­
pléer par la continuité à l’intensité.

Bases fondamentales de l’aptitude à la télépsychie délibérée.


Gouverner sa pensée, c’est la maintenir constam­
ment en mode délibéré.
Ce résultat ne saurait s’obtenir d’emblée.
Si l’on veut y arriver, une première mesure s’impose :
c’est l’adoption d’un réglage du comportement quoti-
dient. Dans le Pouvoir de la Volonté et dans la Maî­
trise de soi-même, j’ai exposé avec précision en quoi
consiste le réglage en question qui place, sous le con­
trôle de la volonté réfléchie, les éléments directement
physiologiques et les éléments psychologiques indivi­
duels dont on vient de lire la nomenclature au para­
graphe précédent.
Cette auto-discipline implique une modification ra-
10
148 l’influence a distance

dicale du modus vivendi habituel, une décision in­


flexible de cesser de vivre, de penser, d’agir « comme
tout le monde ».
L’adepte de la télépsychie vise au développement
d’une aptitude supérieure à la normale. Une telle apti­
tude nécessite un effort exceptionnel.
En second lieu, l’intéressé visera à subordonner à
son jugement toutes ses manifestations, à s’auto-sur-
veiller sans relâche, à suivre mentalement ses actes
même les plus simples, les plus triviaux, à réfléchir les
paroles qui lui viennent aux lèvres avant de les pro­
férer, à contenir ses impulsions physiques ou émotion­
nelles, enfin à orienter le courant de ses pensées et à
le maintenir vers l’objectif assigné, ce qui sera facilité
par la fixation quotidienne d’un emploi du temps pré­
cis et minuté.
Trois exercices l’aideront considérablement à déve­
lopper son aptitude à la télépsychie volontaire.
a) La suspension du cours de la pensée (1). — Cela
paraît simple et facile. Nombre d’ouvrages et de
« cours » indiquent en quoi cela consiste. Dans 95 %
des cas, le lecteur s’imagine qu’il va y arriver dès le
premier essai. En réalité, je ne connais pas d’exemple
où quelqu’un ait réussi à suspendre, à volonté, le cours
de sa pensée, avant de s’y être efforcé 150 à 200 fois
sérieusement. Ne penser à rien ? Cela semble para­
doxal. Le penseur, la pensée et l’objet de la pensée
sont cependant trois éléments distincts. Que le pen­
seur soit sous la dépendance de la pensée, c’est ce qui
se passe chez toutes les individualités étrangères à la
Culture psychique. Nous voulons, nous, placer la pen­
sée sous la dépendance du penseur. L’exercice classi­
que dénommé « isolement », « nuit mentale » ou

(1) Il en a été question au chapitre XII.


DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 149

« retraite du silence » va nous permettre le résul­


tat cherché.
Cet exercice, j’en ai, à diverses reprises, exposé le
détail.
J’y reviens ici, car il faut en surmonter les difficul­
tés si l’on tient à manier l’agent télépsychique.
Tout d’abord, s’asseoir ou s’étendre dans une posi­
tion facilitant la relaxation musculaire. Ne pas son­
ger, au début, à cesser de penser, mais uniquement à
relâcher le tonus musculaire et à conserver une immo­
bilité semblable à celle d’un bloc de mastic. Il va sans
dire que le silence et l’obscurité aident considérable­
ment à l’obtention de ce premier résultat.
Après dix ou quinze minutes d’immobilité, cesser de
prêter attention aux images, aux considérations qui
se présentent à l’esprit. Conserver une attitude men­
tale indifférente. Envisager chaque « train d’idées »
comme un spectacle dépourvu d’intérêt. Se dire :
« Ça m’est égal », « Je m’en désintéresse ». Les yeux
mi-clos, s’imaginer voir les contours de son corps et
se figer, pour ainsi dire, dans cette contemplation.
I •

Après dix ou vingt essais, on s'apercevra qu'il se


produit des raréfactions et des suspensions totales de
la pensée pendant cinq, dix, quinze secondes.
Réitérer chaque jour l’exercice, et les suspensions
atteindront une, deux, trois minutes.
Après un certain temps, on arrivera à ne « penser
à rien » pendant dix à quinze minutes.
Cet état de « nuit mentale » cesse dès que la plus
fugitive intention d’y mettre fin se manifeste.
Un sentiment de repos et d’accroissement des éner­
gies intérieures lui succède.
Avec un peu d’entraînement, il devient possible de
« s’isoler » ainsi au milieu de la foule, malgré le bruit
et très rapidement. L’intention de « rentrer en soi »
150 l’influence a distance

suffit à mettre en veilleuse le geyser de la pensée


spontanée.
L’un des obstacles les plus fréquemment signalés par
nos correspondants réside dans le fait qu’ils s'endor­
ment au cours de l’exercice. Même dans ce cas, la réi­
tération des tentatives amène le résultat cherché. Je
dois ajouter que si la somniation nocturne est pro­
fonde, régulière et suffisamment prolongée, la suspen­
sion volontaire de la pensée ne détermine pas le som­
meil.
b) La concentration. — On peut imaginer de multi­
ples exercices de concentration. Pour l’expérimenta­
teur télépsychiste, l’exercice le plus efficace consiste à
se représenter l’image d’une personne qui lui soit ab­
solument indifférente et à maintenir cette représenta­
tion de dix à soixante minutes.
c) Le report. — Au cours du Livre I, j’ai expliqué
pourquoi il était nécessaire, au cours d’une interven­
tion télépsychique, de s’abstenir de penser au sujet 22
heures sur 24. La pratique de la « suspension » volon­
taire du cours de la pensée exerce le penseur dans ce
sens. L’adoption d’un horaire minuté pour toutes ses
occupations aide aussi considérablement.
On se trouvera bien, d’autre part, de s’entraîner à
écarter résolument du champ de la conscience toute
image, toute préoccupation qui tendent à s’imposer
d’une manière obsédante. Pour cela, reporter immé­
diatement son attention sur un autre objet de médi­
tation et s’efforcer de l’y maintenir. Au début, les ré­
sultats ne sont pas encourageants. L’idée que l’on
cherche à écarter revient avec obstination et rompt
presque constamment le cours de la méditation choi­
sie.
Si le penseur s’obstine lui-même à revenir à ce à
quoi il veut penser, il effectue un effort dont l’effet
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 151

immédiat peut rester presque inopérant, mais dont la

toute pensée inopportune.


Outre leur portée expérimentale, ces trois exercices
concourent à élargir la liberté intérieure, la plus
exceptionnelle et la plus appréciable de toutes les
libertés.

Le poste de commandement.

Je désigne ainsi une application pratique de la télé­


psychie, très intéressante et à titre d’entraînement et
par ses effets. Elle est à la portée de tous, du moins
de tous ceux qui se trouvent déjà assez maîtres d’eux-
mêmes pour effectuer chaque jour un effort pré­
médité.
Cette pratique nécessite une heure quotidienne. Elle
peut être exécutée à n’importe quel moment de la
journée.
Dans la plupart des cas, on sera amené à choisir
une heure précédant les occupations ordinaires, no­
tamment professionnelles, donc à avancer de soixante
minutes l’instant du réveil.
De même que dans la retraite silencieuse de son
P.C., l’officier rumine ses plans, réfléchit les données
des problèmes que lui posent les circonstances et ar­
rête ses décisions, l’expérimentateur, seul, secrète­
ment, résolument, envisage ce à quoi il va devoir faire
face, considère chacun de ceux avec qui il se trouve
habituellement en relations, de même que toute per­
sonnalité en présence de laquelle il devra paraître,
ceci en précisant ce qu’il entend accomplir, ce qu'il
entend obtenir, en un mot : sa volonté.
Projetez d’abord votre emploi du temps pour les
152 l’influence a distance

vingt-quatre heures ; en d’autres termes, imaginez,


dans l’ordre noté sur votre agenda, l’accomplissement
de chaque étape, de chaque besogne prévues.
Secondement, faites successivement comparaître sur
l’écran de votre imagination chacun de ceux dont les
dispositions vous importent, dont la conduite a un re­
tentissement sur la réalisation de vos projets. Consa­
crez à chacun quelques minutes. Tout en « regardant »
l’image mentale du sujet, représentez-vous ce que
vous voulez qu’il ressente, qu’il pense, qu’il se trouve
porté à admettre, à décider, à exécuter et formulez
intérieurement à son adresse l’ordre de se conformer
à vos décisions.
Ne vous attendez pas, dès la première séance, à dé­
terminer une docilité manifeste chez vos « sujets ».
Rappelez-vous que l'influence télépsychique ef­
fleure, affecte, imprègne graduellement le subcons­
cient de ceux sur qui elle est projetée, puis prédomine
et suscite en eux les pensées, les dispositions, les impuls-
sions suggérées.
C’est à force de répétitions quotidiennes que l’exer­
cice du P. C. s’avère, avec certitude, efficace. On obser­
vera, cependant, dès les premiers jours, de très encou­
rageantes répercussions.
Il est bon de le terminer en songeant aux inconnus
avec lesquels on souhaiterait entrer en relations, à
ceux dont le concours ou l’appui seraient intéressants,
dont les objectifs simultanés ou complémentaires des
nôtres donnent lieu à des échanges inconscients de
pensées.
Et, s’il reste du temps, une représentation précise
de la tournure que l’on voudrait voir prendre aux évé­
nements, un rappel des buts précis que l’on s’est as­
signé, de ce que l’on veut obtenir et de ce que l’on
veut éviter ajoutera au retentissement de ce qui a
précédé.
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 153

Après quelques semaines ou quelques mois, celui


qui se sera sérieusement appliqué à cet exercice aura
acquis une certitude, une confiance et un moyen d’ac­
tion considérable.
On constatera, d’autre part, combien cet exercice
stimule les mécanismes cérébraux : mémoire, à-pro­
pos, clarté d’esprit, déductivité, s’en trouvent amélio­
rés. Le jugement devient plus lucide, plus sûr, les déci­
sions plus rapides. Le gouvernement de soi-même et en
particulier celui de la pensée, est grandement facilité
par la pratique du « Poste de commandement », car la
conscience reste en éveil, en « alerte » sans fatigue
spéciale, dans les heures qui suivent tandis que l’in­
conscient, ductilisé, effectue de mieux en mieux sa
tâche de secrétaire.

Conditions nécessaires à toute intervention efficace.


«

L’exercice du P. C. constitue la plus judicieuse des


applications de l’influence télépsychique. Sa pratique
habituelle entraîne merveilleusement le mental à ces
interventions particulières dont nous avons traité au
cours du Livre I, notamment au chapitre VII. Il s’agit,
alors, de transmettre, de suggérer ou d’imposer à quel­
qu’un telle ou telle disposition, inclination ou dé­
cision.
Nous avons vu que la séance quotidienne d’émission
comporte deux heures de concentration en dehors des­
quelles l’expérimentateur doit s’abstenir de penser au
« sujet ». Ce que j’ai exposé au cours des chapitres III
et VII, ne me semble pas, en lisant certaines lettres
de mes correspondants, avoir toujours été compris
avec précision. C’est pourquoi je reviens ici sur cer­
tains points essentiels.
a) Tout doit être subordonné à une élaboration et à
154 l’influence a distance

une accumulation de l’influx nerveux. Il convient donc


de dormir suffisamment, de s’interdire tout excès et
toute dispersion de l’énergie psychique. C’est pour­
quoi je recommande à tous : ne pariez à personne de
ce qui vous préoccupe et, plus généralement, parlez le
moins possible, réprimez votre expansivité, isolez-
vous, fuyez les réunions, les spectacles, la dissipation
sous toutes ses formes. Efforcez-vous de vous mainte­
nir en état de calme et de recueillement.
b) Minutez l’emploi de votre temps.
Si vous exercez une profession, absorbez-vous atten­
tivement dans l’exécution des tâches successives qu’elle
comporte, donnez-vous corps et âme au métier, ce qui
vous aidera à « maintenir à la porte » le sujet de
votre intention télépsychique pendant vingt-deux heur-
res sur vingt-quatre.
c) Si vous n’avez pas d’occupations obligatoires ré­
gulières, ayez pour chaque jour un programme bien
défini, sans
Dirigez votre activité. Assignez à vos pensées une sé­
rie d’orientations préméditées. Faites alterner les pau­
ses (sommeil, suspension volontaire de l’activité psy­
chique), la lecture, le mouvement (marche, exercice
physique), le travail volontaire.
d) Laissez deux heures d’intervalle entre le dernier
repas qui précède votre séance d’émission, et l’émis­
sion elle-même.
e) Environ une demi-heure avant l’émission, remé­
morez-vous avec clarté les satisfactions inséparables
du résultat cherché et le caractère inacceptable de la
contrariété qu’entraînerait l’inverse de ce résultat, re­
lisez ensuite les notes où sont définies les représenta­
tions mentales que vous allez transmettre.
Enfin, résistez à l’impulsion de rechercher ou de
provoquer des entrevues avec le sujet, ce serait don-
DISPOSITIONS NATURELLES ET DISPOSITIONS ACQUISES 155

ner cours à une expansivité si nuisible à la condensa­


tion de l’influx nerveux, matière première de l’énergie
psychique : noli ire fac venire. Si sa présence est, cir-
constantiellement, inévitable, ayez vis-à-vis de lui la
même attitude que s’il vous était absolument indif­
férent.
H. — LE MAGNÉTISME PERSONNEL

Son acception simpliste et son essence réelle. Causes de Fin-


fluence du regard et de la parole. — Lois fondamentales du
magnétisme personnel. — La loi d’intensité et celle de lucidité.
— La fermeté et l’ascendant. — La toi du qualitatif. — Réper­
cussions multiples.

Son acception simpliste et son essence réelle.

Qu’une sorte de charme, d’ascendant, semble éma­


ner de certains individus, c’est un fait d’observation
courante. Les avantages pratiques qui en résultent
fixèrent, il y a environ un demi-siècle, l’attention de
divers psychologues américains. Ils s’efforcèrent de dé­
finir la nature de cet appréciable attribut, ainsi que les
procédés à mettre en pratique pour l’acquérir ou le
développer et ils convinrent de le désigner par l’ex­
pression séduisante de « Magnétisme personnel ».
Depuis, les ouvrages traitant de la question se sont
multipliés. Dans la Bibliographie de Caille t, publiée
en 1913, il y a trente-deux ans, on relève déjà qua­
rante-six auteurs de traités ou de cours de magné­
tisme personnel.
L'examen de cette littérature laisse regretter, excep­
tion faite pour les œuvres d’Hector Durville, son in­
suffisante distinction entre l’essentiel et l’accessoire.
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 157

Il y aurait, nous disent presque tous les auteurs, des


hommes « magnétiques » et des hommes « non ma­
gnétiques ».
En réalité, chacun irradie une influence exactement
expressive de ses qualifications affectives ou intellec­
tuelles. Insignifiante ou intense, harmonieuse ou in­
harmonieuse, alternante ou continue, une influence in­
visible s’extériorise de toute créature humaine et im­
pressionne plus ou moins favorablement ceux avec les­
quels elle se trouve habituellement en relations, ceux
à qui elle pense et même, comme je l’ai déjà noté,
certains inconnus que leur similitude ou leur complé-
mentarisme mettent en rapport syntonique, en récep­
tivité avec l’émetteur. Le magnétisme personnel doit
donc être considéré comme une subséquence de la vie
psychique, c’est-à-dire de la pensée, de toutes les sour­
ces de celle-ci, telles que je les ai énumérées au para­
graphe 4 du chapitre précédent. Chez les ardents, il
surabonde, chez les apathiques, il vacille. Les carac­
tères fermes, résolus, irradient un magnétisme domi­
nateur, tout différent de celui des velléitaires. Instable
chez les êtres changeants qui passent fréquemment de
l’exaltation à la dépression, il garde une continuité
très efficace quand l’orientation du cours des pensées,
maintenu vers la poursuite d’un objectif bien défini,
assure la convergence de celles-ci. Des qualités mo­
rales : bienveillance, sociabilité, droiture résulte son
harmonie qui détermine une résonance sympathique
dans l’âme des bienveillants et des sociables, ainsi que
la confiance et l’estime de ceux-ci. Chez les violents,
les despotiques, il peut être oppressif, et imposer à
certains une véritable subordination, mais il engen­
dre de l’extérieur des antagonismes et des heurts. En
résumé, l’agent essentiel du magnétisme personnel
n’est autre que l’influence radio-psychique dont nous
traitons tout au long de ce livre.
158 l’influence a distance

Causes profondes de l’influence du regard et de la parole.


Dans les premiers ouvrages publiés sur la question,
l’aspect extérieur, le regard, la parole, l’attitude pa­
raissaient considérés comme des éléments capitaux.
En réalité, tout cela est secondaire. De deux hommes,
l’un d’allure bénigne, effacée, l’autre d’allure hardie,
ostentatoire, le premier peut être plus magnétique que
le second.
Expliquons-nous :
Des yeux brillants, fixes, largement ouverts consti­
tuent un élément physique d’esthétique qu’il ne faut
pas sous-estimer. Un regard fuyant et mal assuré im­
pressionne désavantageusement, mais la puissance fas­
cinatrice de l’œil s’apparente de très près à celle du
point brillant (1) à l’aide duquel le Dr Braid produi­
sit pour la première fois l’hypnose en 1841, justement
pour démontrer qu’un instrument matériel détermi­
nait le même résultat que la fascination humaine.
S’exercer à regarder sans ciller et hardiment à la ra­
cine du nez, entre les deux yeux, ceux à qui l’on a
affaire, développe une certaine forme de l’assurance.
A ce titre, c’est un exercice utile. Mais c’est l’intensité
de la vie psychique qui donne au regard son influence
magnétique. Ce qu’il y a derrière les yeux importe
plus que les yeux eux-mêmes. La fermeté intérieure
réelle l’emporte ici sur la simulation extérieure de la
hardiesse.
Il est entendu qu’une parole distincte, claire, calme­
ment affirmative, constitue un moyen d’influence con­
sidérable. Le caractère résolu de la pensée qui s’ex­
prime ainsi donne d’autre part à la voix un magné­
tisme qui en restera absent si l’excellence de la die- K

tion, si la facilité d’élocution et la virtuosité expressive


(1) C’était un « porte-lancette ». Voir : Théories et procédés de /’Hy­
pnotisme (Éditions Dangles).
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 159

restent seules en jeu. Qui possède mieux qu’un comé­


dien, qu’un tragédien, la maîtrise de ses moyens vo­
caux ? Or, ce même artiste, si émouvant sur scène,
peut fort bien manquer de puissance persuasive, d’au­
torité, sinon de charme, dans la vie quotidienne, même
et surtout lorsque ce à quoi il tient par-dessus tout
devient le sujet d’un débat.
De même, l’homme accoutumé professionnellement
à commander, à obtenir, en vertu d’insignes ou de ti­
tres, l’obéissance passive et qui, de ce fait, use d’un
verbe péremptoire, perd souvent tous ses moyens s’il
a affaire à des gens qui ne dépendent pas de lui.
Comme le regard « magnétique », la parole « ma­
gnétique », celle qui imprègne profondément l’esprit,
qui y implante le germe de sentiments ou de convic­
tions irrésistibles, procède de dispositions intérieures,
d’une invisible influence inséparable de qualifications
intrinsèques, tout à fait distinctes du talent oratoire.
La faconde du « beau parleur » et les subtilités de
la rhétorique sont des éléments de suggestion verbale
qui suffisent à perturber l’imagination ou.le jugement
des indécis, des subjectifs et plus encore des débiles
mentaux ; elles restent sans effet sur les esprits objec­
tifs dont le discernement, sans cesse en éveil, gouverne
l’impressionnabilité physique et intellectuelle.
Il en va de même pour l’attitude. Celle des présomp­
tueux. des impulsifs, des infatués ou des égolâtres, leur
donne l'apparence de la sûreté de soi. Mais cette appa­
rence repose sur une illusion. La sûreté de soi, elle,
repose sur des certitudes : certitude d’une capacité
d’effort éprouvé, d’un savoir étendu et précis, de pos­
sibilités réalisatrices mises en évidence par des accom­
plissements antérieurs, d’une impassibilité plusieurs
fois vérifiée en mainte circonstance périlleuse. Là, en­
core, ce sont les dispositions psychiques qui dégagent
160 l’influence a distance

une influence, non pas l’imitation de l'attitude qu’en­


gendrent ces dispositions.
Une valeur intrinsèque supérieure n’est pas incom­
patible avec la timidité, la gaucherie, l’embarras en
public. Cela vient souvent de ce que l’intéressé, préoc­
cupé principalement de choses sérieuses, de l’exécu­
tion de quelque grand dessein, de hautes idéologies,
se détourne malaisément des richesses de sa vie inté­
rieure et ne saurait posséder la désinvolture d’un dan­
seur mondain.
Son magnétisme personnel, inopérant sur l’immense
majorité, sans résonance sur l’infantilisme cérébral de
ceux qui le considèrent d’un œil narquois, influe exclu­
sivement sur les gens dont le mental est réceptif à
l’espèce et à la qualité de ses sentiments et de ses
pensées.
La mise en pratique des indications et exercices don­
nés au chapitre précédent dissipe, d’ailleurs, infailli­
blement les diverses formes de la timidité (1).

Lois fondamentales du magnétisme personnel.

I. — L’ardeur, l’activité de la vie psychique déter­


minent l’intensité du magnétisme personnel.
II. — La lucidité, l’objectivité, la précision avec les­
quelles l’activité de la vie psychique est dirigée déter­
minent la conformité des effets de l’influence person­
nelle aux intentions de l’intéressé.
III. — De la fermeté du caractère dépend le degré
d’ascendant qu’exerce sur autrui l’irradiation indivi­
duelle.
IV. — Selon sa subtilité, sa qualité, son degré d’élé­
vation, la pensée, agent fondamental du magnétisme
personnel, attire vers l’émetteur des individualités
(1 ) Voir également La Timidité vaincue (Éditions Dangles).
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 161

analogues à lui-même, et animées à son égard de dis­


positions identiques aux siennes.
V. — Par le truchement de cette invisible influence,
toute avidité ou aspiration aimante son objet ; toute
aversion tend à faire cesser ou à écarter ce qui l’ins­
pire.
De ces cinq points, que nous commentons plus loin,
et de ce qui précède, se dégagent deux corollaires :
a) La mesure dans laquelle l’on gouverne sa pensée
est la mesure même du magnétisme personnel cons­
cient que l’on émet, autrement dit des résultats favo­
rables que l’on peut en attendre.
b) L’être le plus chétif, le plus insignifiant, le plus
nul, fut-il, par surcroît, difforme, peut acquérir, s’il
s’efforce à la fois d’intensifier et de gouverner lucide­
ment son activité psychique, un magnétisme personnel
qui attirera à lui l’espèce de gens et la sorte de choses
nécessaires à la réalisation de ses aspirations ou am­
bitions.

La loi
Quand nous parlons de la vie psychique, nous l’en­
visageons sous deux aspects : intellectif et affectif.
L’intellect, plus ou moins actif, observe, discerne, s’as­
simile, définit, compare, associe, ingénie. C’est le do­
maine de l’intelligence. L’affectif, plus ou moins ar­
dent, manifeste les tendances caractérologiques, aspi­
rations, sentiments, passions et avidités de toute na­
ture. La vie affective réagit constamment sur celle de
l’intelligence. Par exemple, c’est en raison de prédis­
positions, de goûts, d’aptitudes bien déterminées que
l’intellect oriente son effort de compréhension et d’ap­
propriation intellectuelle vers tel ordre de connais­
sances plutôt que vers tel autre. Certains se passion­
nent pour les sciences exactes, d’autres pour les scien-
162 l’influence a distance

ces philosophiques. Celui-ci témoigne dès ses premiè­


res années d’une tendance à s’exercer aux arts graphi­
ques et deviendra dessinateur. Celui-ci s’intéresse pré­
cocement aux technicités et sera ingénieur ou indus­
triel. On peut dire que pour tous, le degré d’intensité
des principales avidités conditionne l’ardeur de la vie
psychique, ardeur qui, en stimulant les facultés céré­
brales, leur confère une activité plus ou moins consi­
dérable, laquelle se traduit par une pensée plus ou
moins résolue, plus ou moins lucide, plus ou moins pré­
cise. De ce même dynamisme procède l’influence dési­
gnée par l’expression « Magnétisme personnel ». Si sa
tension est basse, atone, le sujet, peu émissif, ne sau­
rait avoir qu’une influence insignifiante. Les hautes
tensions, seules, s’extériorisent puissamment.
Un mental, très judicieux, très circonspect, très sub­
til, disons magnifiquement doué pour l’abstraction,
n’irradie pas nécessairement, même si son activité est
remarquable, une influence assez énergique pour s’im­
poser, car cette influence ne trouvera de résonance
qu’au sein de mentalités analogues.
Inversement, une nature enthousiaste, fougueuse,
passionnée, volontaire mais impulsive, violente, indis­
ciplinée, irréfléchie — donc sujette à l’aveuglement —
manifeste bien toute l’intensité nécessaire à une irra­
diation psychique et télépsychique persistante, et, en
fait, elle influera sur nombre de personnes (toutes
moins subtiles qu’elle-même), mais restera incapable
de gouverner sa pensée, donc de la diriger de propos
délibéré sur qui que ce soit avec la continuité et la ré­
gularité nécessaires.
J’ai noté, au cours du Livre I : « Une mentalité de
seigneur féodal aimante toujours des serfs ». J’ajoute
ici : « Elle n’obtient pas nécessairement l’inféodation
de qui elle voudrait, mais exclusivement de gens à
mentalité serve. »
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 163

En outre, comme dans le domaine psychique, les


semblables attirent les semblables, la nature de nos
pensées habituelles, surtout si elles sont intenses, im­
porte en premier lieu car elle tend à éveiller chez les
autres, vis-à-vis de nous, des dispositions analogues
à celles dans lesquelles nous nous entretenons vis-à-vis
d’eux (1). Les mêmes pensées nous mettent en rapport
attirent à nous des individualités favorables ou hosti­
les, selon le cas.
Ceux dont le naturel comporte des prédispositions
d’où s’ensuit l’intensité, ont intérêt à placer celle-ci
sous le contrôle de leur conscience psychologique,
d’abord afin de diriger avec discernement son dyna­
misme, ensuite afin d’éviter de le disperser, soit par
des manifestations extérieures, soit en donnant cours
aux impulsions qu’elle engendre.
Quand l’intensité fait défaut, il convient de recher­
cher les causes de cette atonie. J’ai traité cette ques­
tion en détail dans un précédent ouvrage (2) ; ne vou­
lant pas que celui-ci fasse double emploi, je ne donne­
rai ici que des indications générales.
L’insuffisance énergétique procède partiellement de
causes purement physiologiques, endocriniennes en
particulier. Dans le plus grand nombre des cas, elle
résulte surtout de l’anarchie intérieure, d’une passivité
due à l’habitude d’éluder l’effort et à celle de céder
impulsivement à l’attrait du plaisir immédiat. Une ré­
éducation psychologique bien comprise permet tou-
(1) Ici, on peut prévoir une objection. « Comment telle personne
dont je convoite la présence, ne ressent-elle pas à mon égard les mêmes
dispositions » ? C’est que vous envisagez surtout l’agrément que vous
auriez d’être avec elle, non pas celui quelle pourrait ressentir du fait
d’être avec vous. A moins qu’elle ne soit déjà animée du désir de vous
être agréable, votre pensée ne trouve pas de résonance. Il faudrait
d’abord suggérer cette disposition d’esprit.
(2) L'Aptitude à P Effort réalisateur. Les sources biologiques et
psychiques de l’énergie individuelle (Éditions Dangles).
/ /
164 l’influence a distance

jours de réagir et. en particulier, d’assurer la conver­


gence des sources de l’énergie et de la pensée par leur
orientation méthodique vers la réalisation d’un plan
mûrement délibéré.
Il faut noter que pour presque tous, l’élaboration de
l’énergie s’effectue d’une manière satisfaisante, mais
se trouve dispersée, gaspillée sans utilité et souvent
d’une manière déplorable, ce qui entrave la conden­
sation indispensable à un haut degré continu de
tension.
L’un des premiers analystes du Magnétisme person­
nel, N. Turnbull, dont les travaux furent publiés par
la « Society for psychical Research of Chicago » avait
fort bien vu qu’en contenant toutes les impulsions de
nature à disperser l’énergie psychique, on déterminait
une élévation de sa tension d’extériorisation
« Le désir sous toutes ses formes, dit l’auteur (1), est
« un courant mental chargé de puissance, cette même
« puissance que l’homme magnétique exerce sur son
« prochain. Quand je dis « courant mental », je parle
« littéralement, je ne me sers pas seulement d’une mé-
« taphore. Tous les désirs agissent d’après le principe
« des courants électriques et sont régis, sinon par les
« mêmes lois, du moins par des lois analogues.
« Lorsque vous vous êtes rendu compte que vous
« pouvez tirer du désir, sous toutes ses formes, sa puis-
« sance et son magnétisme, vous avez découvert, pour
« ainsi dire, une mine d’,or dans votre propre jardin.
« Car le désir est toujours accessible. Sa source se
« manifeste en une infinité de manières. Lorsque vous
« cédez au désir, vous gaspillez de la force et vous
« diminuez, en conséquence, votre puissance d’attrac-
« tion ; vous déchargez le magnétisme que vous au-

(1) Turnbull : Cours de magnétisme personnel. Traduction Beaugeard.


Bureau d’études psychiques, Paris 1903.
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 165

« riez dû garder en réserve afin d’attirer vers vous


« les bonnes choses de la vie. Quand vous aurez ap-
« pris à considérer le désir, non comme un obstacle
« mais comme une ressource, votre succès dans la vie
« sera assuré. La force du désir se manifeste sous un
« grand nombre de courants mentaux, tels que l’impa-
« tience, la colère, la prodigalité, le laisser-aller ou la
« vanité. Ce dernier courant est de tous celui qui,
« peut-être, affaiblit le plus. Il se manifeste sous des
« formes si insidieuses qu’un homme ne se rend pas
« compte, souvent, qu’il cherche de propos délibéré à
« satisfaire la vanité, qui agit en lui d’une manière
« indistincte.
« La façon de procéder est donc, aussitôt que vous
« sentez un courant de désir, de le retenir en vous, de
« refuser de le satisfaire. Par cet effort conscient de
« votre volonté, vous vous isolez de la décharge affai-
« blissante de force et en même temps vous créez un
« état d'attraction, qui existera aussi longtemps que
« ce désir ne se neutralisera pas, en étant satisfait.
« Servons-nous d’abord d’un exemple des plus com-
« muns et des plus affaiblissants de courant de la
« vanité, le désir de surprendre.
« En premier lieu, comprenez bien l’importance du
« secret. Lorsque vous avez une nouvelle, quelque ba-
« nale qu’elle soit, malgré le plaisir que vous éprou-
« veriez à la communiquer à une de vos connaissan-
« ces, gardez le silence parce que c’est votre premier
« essai de mise en pratique de l'acquisition du magné-
« tisme par le désir réprimé. Votre secret est une
« unité de magnétisme mental mise en réserve dans
« la batterie de votre cerveau, et ce secret gardé, pro-
« duit une force qui en attire une autre à elle du de-
« hors, de même que votre argent mis en banque pro-
« duit des intérêts. Plus vous avez de secrets en ré-
« serve dans votre esprit, plus est grande l’impression
166 l’influence a distance

« et l’attraction que vous exercez ! de même, plus vous


« maîtrisez vos impulsions, plus grande est l’accumu-
« lation de votre force de réserve qui demeure latente,
« intacte et prête à vous servir dans les entreprises
« importantes. »
Quelques jours suffisent pour vérifier l’efficacité du
procédé Turnbull. Tout se passe comme si le fait de
contenir toute impulsion, de s’abstenir de toute expan­
sivité, de réprimer toute forme de désir rechargeait,
positivement, la « batterie de réserve ». Cela ne nuit
en rien à la sociabilité, bien au contraire, car en mo­
dérant ses manifestations extérieures, en mesurant la
portée de ses paroles, en écoutant plus volontiers que
l’on ne parle, on ne peut produire qu’une excellente
impression.
Quand Turnbull signale la vanité comme l’une des
principales sources de déperdition psychique, il met
en garde l’étudiant contre cette tendance, assez natu­
relle mais pernicieuse, que l’on peut observer à tout
instant chez nombre de personnes à rechercher l’ap­
probation, à donner directement ou indirectement une
idée avantageuse de leurs qualifications, à « se faire
valoir ». Evitez, dit Turnbull, de provoquer la flatterie.
Gardez-vous de faire montre de vos connaissances, de
votre savoir, de votre habileté.
En surmontant la tendance en question, on s’exerce
non seulement à « retenir en soi un potentiel » qui
contribuera à élever la tension d’extériorisation ma­
gnétique, mais encore à gouverner sa pensée, ce qui,
ainsi que je l’ai plusieurs fois noté dans ce livre, cons­
titue la principale condition requise pour pratiquer
systématiquement la télépsychie.
La fermeté et l’Ascendant.
S’efforcer de donner à son regard une expression dé­
cidée, de parler posément sur un ton affirmatif, de
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 167

former habilement ses phrases, enfin de conserver un


masque imperturbable, telles sont les principales re­
commandations faites à l’étudiant dans la plupart des
cours de magnétisme personnel.
L’observance de ces recommandations exerce utile­
ment la volonté délibérée et concourt à la maîtrise de
soi-même.
Tout ceci aidera appréciablement celui auquel échoit
le rôle de commander, de diriger, sans toutefois lui
donner l’ascendant profond de l’homme auquel ses su­
bordonnées obéissent même quand ils ne se sentent pas
surveillés, que ses égaux suivent volontiers et que ses
supérieurs prennent en considération. Un tel ascen­
dant émane de cette qualification du caractère qu’on
nomme « fermeté » et qui donne à la pensée, donc au
magnétisme personnel, une puissance dominatrice à
laquelle rien ne peut suppléer.
En quoi consiste donc la fermeté ? A se conformer
soi-même inflexiblement aux résolutions qu’on a pri­
ses, à accomplir chaque jour, en dépit de toute cause
fortuite de dérivation ou d’inhibition, et dans l’ordre
prévu, le programme d’activité qu’on s’est assigné, à
s’abstenir de tout ce que l’on juge inutile ou funeste,
à résister à toute influence humaine ou circonstantielle
tendant, éventuellement, à nous dissuader d’observer
les règles précédentes.
Cette définition, volontairement rigide, représente
l’absolu de la fermeté. La mesure dans laquelle un
homme les réalise marque la mesure de son ascen­
dant magnétique. Il peut être aimé (s’il est équitable,
bienveillant, diplomate) ou détesté (s’il est arbitraire,
dur et dépourvu de tact).
Dans les deux cas, son influence dominatrice res­
tera identique.
Inversement, un homme sympathique et même fon­
cièrement bon, mais sans fermeté, a peu d’autorité et
168 l’influence a distance

résiste malaisément à l’emprise des psychismes réso­


lus. Ceux-là mêmes, dont il force l’estime, abusent
parfois de lui. C’est que le magnétisme personnel n’est
pas un « agent » simple, mais une influence compo­
site, une résultante fidèle de tous les éléments de cha­
que psychologie individuelle.

La loi du qualitatif.

La subtilité de l’intelligence joue un rôle distinct


de celui de chacun des éléments que nous venons de
passer en revue. En particulier, elle détermine le
champ de l’influence psychique individuelle : nous ne
pouvons influer appréciablement sur des esprits plus
subtils que le nôtre, car nos vibrations mentales ne
trouveront en eux aucun retentissement, du fait même
qu’elles expriment une sorte de pensées moins précises
et moins élevées que celles qui leur sont familières.
Si deux personnes pensent sur des plans très dis­
tincts, elles émettent sur des longueurs d’ondes sans
réceptivité réciproque. Un attrait physique, une simul­
tanéité d’ambition peuvent momentanément les rap­
procher, les illusionner sur l’unisson réel de leur « in-
nermost ». Mais, de même que l’accoutumance ne
tarde pas à émousser l’acuité des réactions sensoriel­
les, l’égotisme engendre des discordances d’intérêts, et
les divergences profondes, un moment masquées, ap­
paraissent alors et la dissociation, sinon l’antagonisme,
lui succède.
Qui se ressemble s’assemble, chacun s’agrège en un
groupe, une chaîne d’individualités présentant avec
lui des analogies psychologiques. Une rencontre d’al­
lure fortuite et suivie d'une fréquentation harmo­
nieuse, assidue, résulte souvent d’impondérables affi­
nités qui, depuis longtemps, sans qu’ils puissent le sa­
voir, mettaient en rapport les deux parties.
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 169

L’élévation morale n’a pas moins d’importance que


l’intensité de la vie intérieure, la fermeté du vouloir,
la lucidité du jugement et la précision des représenta­
tions mentales. Cette élévation, du moins telle que je
la conçois, comporte avant tout une équité indéfecti­
ble, équité sans laquelle l’honnêteté, la droiture et la
loyauté restent relatives. L’homme équitable ne veut
que ce qui est juste et use exclusivement de moyens
irréprochables.
Fidèle à la parole donnée, pour les petites choses
comme pour les grandes, consciencieux dans l’accom­
plissement des obligations qu’il a contractées, il ins­
pire, il se crée des sympathies principalement parmi
ceux dont il peut attendre un complémentarisme fa­
vorable. Son magnétisme personnel aimante vers lui
ceux qui recherchent « quelqu’un de confiance », ceci
sans qu’il fasse quoi que ce soit : démarches, sollici­
tations, protestations pour attirer ou fixer l’attention.
Les sentiments altruistes, surtout s’ils se manifestent
judicieusement et sans faiblesse, intègrent à l’irradia­
tion personnelle une propriété salutaire qui éveille
chez les autres un écho dans ce qu’il y a de meilleur
au fond d’eux-mêmes, qui, d’autre part, freine chez les
êtres les plus tarés leurs mauvais instincts et inhibe
les pires intentions que certains ruminent. S’il est vrai
que la pensée la plus fugitive laisse une trace durable,
l’indulgence (juste et compréhensive appréciation des
possibilités de chacun), la bienveillance, la bonté ha­
bituelles agissent par le truchement radio-psychique,
avec une efficacité certaine, bienfaisante. Ce sont les
sentiments altruistes qui donnent au magnétisme per­
sonnel la propriété d’aimantation continue, de charme
perpétuel, privilège incompatible avec la sécheresse
d’âme.
170 l’influence a distance

Répercussions multiples.

Nos pensées, nos émotions, agissent avant tout sur


nous-mêmes. Leur retentissement sur le chimisme du
sang, sur l’activité viscérale, sur les fonctions endo­
criniennes sont expérimentalement vérifiées. Certaines
déterminent des effets nettement toxiques, bien con­
nus depuis les expériences de Pavlow. Selon leur na­
ture régulatrice et stimulante ou perturbatrice et dé­
primante, elles jouent un rôle salutaire ou nocif.
Toute série d’images mentales, considérée avec com­
plaisance et longuement, tend d’autre part à se repro­
duire, à s’imposer, à engendrer des actes, à s’immis­
cer dans le déterminisme du comportement. La han­
tise et l’obsession n'ont pas d'autre origine.
Elle attire, d'autre part, du dehors des influences
analogues à la sienne, et si elle a pour objet une ou
plusieurs personnes, sa résonance provoque à notre
égard des dispositions amicales ou hostiles selon le
cas.
L’envie, la jalousie, l’animosité, la rancune, la
haine doivent être considérées comme des forces dan­
gereusement répercussives, des forces employées à se
désorganiser, à se blesser soi-même.
L’observation nous montre qu’il y a autour de nous
tout un monde de forces subtiles dont certaines appor­
tent la confiance, l’entrain, l’optimisme, l'énergie, les
bonnes aspirations. Nous vivons dans un océan de vi­
brations, les unes favorables, constructives, les autres
pernicieuses, perturbatrices. Apprenons à attirer à
nous les premières et à nous isoler de l’action des se­
condes.
Certaines âmes élevées nourrissent de bonnes pen­
sées même à l’égard de ceux qui leur veulent ou leur
font du mal. Ce serait trop demander à la plupart
d’entre nous, mais ne serait-ce que par hygiène men-
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 171

taie, mieux vaut considérer avec la plus parfaite in­


différence toute personne contre laquelle nous avons
des griefs, l’expulser de notre champ mental, refuser
d'y penser. C’est là où s’avère particulièrement pré­
cieuse la suprématie de la pensée délibérée sur la pen­
sée spontanée.
Il est d’autres émotions, telles que la crainte et l’ap­
préhension, dont il est judicieux de se rendre maître.
Chacun peut d’ailleurs observer que ce que nous re­
doutons survient rarement tandis que l’adversité réelle
diffère presque toujours des éventualités dont la pos­
sibilité nous tourmentait. Les « coups du sort », géné­
ralement imprévus, arrivent en général soudainement.
C’est que toute perspective angoissante, si elle in­
surge l'esprit avec une vigueur suffisante, se trouve
presque toujours jugulée. Ce que vous restez ferme­
ment résolu à ne pas subir se produit rarement, car
votre influence télépsychique l’écarte ou vous en
écarte.
L’adepte du « magnétisme personnel », j’entends
celui qui pratique, dispose du plus sûr des moyens
d’auto-défense. Si péniblement handicapé qu’il puisse
être au moment où il commence à mettre à exécution
les principes et les procédés télépsychiques, il sait qu’il
surmontera progressivement les oppressions, les as­
treintes et les obstacles, qu’en se transformant lui-
même, il modifiera, en ce qui le concerne, la menta­
lité de ceux qui l’environnent et les impondérables
facteurs de la résultante desquels se dégageront les
circonstances, le « climat » de son avenir.
S’abstenant de tout optimisme irréfléchi, il compte
sur son activité, son effort, sa perspicacité, son ingé­
niosité, au lieu de vivre, comme tant d’autres, dans
l’expectative de fortuités gratuites.
La continuité, la persistance, la convergence syner­
gique de ses pensées vers les objectifs qu’il veut at­
172 l’influence a distance

teindre lui fraient le chemin vers ce qui, présentement,


lui semble inaccessible. Animé d’une noble confiance
justifiée par l’énergie qu’il déploie silencieusement,
jour pour'jour, sans se détourner de ce que visent ses
aspirations, il garde un état d'âme calme, attentif, re­
cueilli et connaît une sérénité intérieure qu’aucune
surprise ne déconcerte longuement.
Même s’il « perd une bataille », il ne capitule pas,
mais ne perd ni son temps ni ses énergies à se lamen­
ter, ou à rechercher, en exposant ses doléances, l’api­
toiement de qui que ce soit, le stimulant des boissons
fortes ou les dérivatifs de la dissipation. Il a recours
à l’isolement, à la méditation, regroupe ses forces,
cherche et trouve en quoi les circonstances nécessitent
une réadaptation de son plan. Celui-ci une fois rema­
nié il se remet à l’œuvre et, à nouveau, va de l’avant.
D’une erreur, d’un échec éventuel, d’une déconve­
nue, il tire un enseignement, en réfléchissant sur
l’origine, sur les causes de ce qu’il lui advient.
Ainsi, son psychisme, ses moyens d’influence et
d’action se fortifient des enseignements de l’expé­
rience en s’évertuant à les comprendre subtilement et
à réagir sans désemparer.
On conçoit que quand il y a lieu d’entreprendre
une action mentale, de suggérer, d’imposer quelque
chose à quelqu’un l’homme exercé à une concentra­
tion soutenue et vigoureuse dispose d’un avantage évi­
dent. Cela se compare à l’état du culturisme accoutu­
mé à l’exercice physique et auquel le port d’un far­
deau quelconque ou toute autre fatigue exceptionnelle
sera infiniment plus léger que s’il avait laissé sa capa­
cité thoracique se réduire et ses muscles s’atrophier.
Je le répète, le moins bien doué, le plus débile,
l’inerte, le stuporeux peut, s’il a quelque suite dans les
idées, dynamiser et diriger son invisible influence
par une application persévérante. Les perspectives qui
LE MAGNÉTISME PERSONNEL 173

s’offrent à lui tiendront en éveil son esprit et l’encou­


rageront heure par heure dans la tâche qu’il entre­
prend. Il arrivera au pied du but et c’est le succès qui
sera sa récompense.
III. — LE SYNTONISME

Suggestion mentale et transmission de la pensée.


— Influence par communication de pensée. — Rêverie et pro­
jection active. — Substitution. — Technique hypnotique. — Le
syntonisme avec des inconnus.
<k

Suggestion mentale et communication de la pensée.

Imposer à quelqu’un, par suggestion mentale, un


état d’âme déterminé nécessite une ardeur psychique
(que la passion conditionne presque toujours) mais
aussi un minimum de subtilité et de sens tactique. Au
cours de la première partie de ce livre, les procédés
à employer pour cela ont été clairement exposés. Ici,
nous allons envisager comment un état d’âme peut se
communiquer (et non plus s’imposer) par une sorte
d’endosmose très douce, très « enveloppante » dont
la réalisation exige plus de subtilité et de persistance
que de puissance. On sait qu’il est souvent plus aisé
et plus sûr d’agir par persuasion que de chercher à
contraindre, mais l’art de persuader procède d’une fi­
nesse psychologique supérieure, d’une évaluation
compréhensive de la mentalité d’autrui, ce pour quoi
se trouvent rarement qualifiés les despotiques et les
violents.
Flammarion, en France, Gurney, Myers et Pod-
LE SYNTONISME 175

more (1) en Angleterre ont composé divers recueils


d’observations relatives à la communication sponta­
née de la pensée. Ces observations mettent en évi­
dence, pour chaque cas, le syntonisme de l’émetteur
et du percipient.
Il s’agit invariablement de deux personnes que leur
proche parenté, leur mutuelle affection ou leurs affi­
nités d’esprit maintiennent en un rapport télépsychi­
que plus ou moins intime. Qu’un événement très
émouvant survienne à l’un d’eux ; sous l’action dyna­
mogénétique de l’émotion, sa tension d’extériorisa­
tion psychique s’élève alors au-dessus de son niveau
habituel et donne lieu à une puissante projection
d’images dont l’immédiate résonance s’opère sans ré­
sistance dans le champ de la conscience de l’autre.
Réaliser, de propos délibéré, expérimentalement,
un syntonisme permettant de communiquer sa pensée
c’est une opération délicate exclusivement accessible
aux esprits attentifs, observateurs, analystes et doués
d’adaptibilité. Une connaissance approfondie de la ca­
ractérologie facilite toujours la tâche, tâche dont l’ul­
time finalité est la possibilité de se représenter la vie
intérieure du sujet, de s’identifier à lui, de lui trans­
mettre des pensées en harmonie avec les siennes, puis
de donner à l’orientation de celles-ci une impulsion
modificatrice, d’abord légère, insensible, que l’on ac­
centuera au fur et à mesure des séances quotidiennes
d’émission.
La difficulté.
Pour créer, en soi, l’unisson avec un psychisme
extérieur, la première condition requise est de con­
naître moralement avec précision, le sujet qu’on cher­
che à influencer moralement, de discerner l’origine
profonde de toutes les manifestations de son compor­
(1) Voir bibliographie page 16.
176 l’influence a distance

tement, des mobiles qui inspirent ses actes, des ten­


dances que révèlent ses propos, ses réactions. En d’au­
tres termes, on connaît une personne dans la mesure
où l’on se représente sa manière de voir, où l’on a dé­
fini les aspirations sensorielles, affectives, intellectuel­
les et spirituelles. Un tel effort d’analyse semble ma­
laisé car, à de rares exceptions près, on peut dire que
chacun, principalement préoccupé de soi, cherche ra­
rement à s’assimiler le secret des âmes qui l’environ­
nent. A moins d’un effort investigateur, sagace, nous
ne connaissons que superficiellement nos intimes eux-
mêmes. Certains traits saillants de leur caractère nous
frappent, mais l’interprétation de ceux-ci reste ap­
proximative et d’ailleurs subjective, car nous ne rete­
nons que la répercussion agréable ou contrariante
qu’ils ont sur nous. L’essentiel échappe presque tou­
jours.
Il convient d’autre part, de tenir compte du fait
que, depuis la plus tendre enfance, la vie sociale porte
l’homme à dissimuler, à masquer, à travestir cer­
tains de ses penchants dans la crainte de se voir né­
gliger, de rester incompris. Il lui faut aussi, en main­
tes circonstances, affecter des dispositions qu’il ne
ressent pas.
Ces refoulements et simulacres donnent lieu à de
nombreuses méprises, à de regrettables mésententes.
Ce qui semble une « mutation », une modification ra­
dicale et soudaine du caractère ou des sentiments
s’explique presque invariablement par l’émergence
d’une « lame de fond », surgie des zones secrètes de
l’inconscient avec un élan d’autant plus irrésistible
que telle sorte d’avidité (1) ou d’aversion étroitement
contenue depuis des années.
Tout être est un monde à peu près inexploré et plus

(1) Revoir page 141 l’acception dans laquelle j’utilise ces mots.
LE SYNTONISME 177

ou moins complexe. Le plus banal comporte des origi­


nalités imprévues. Déjà, à un certain degré de
l’échelle ontologique, l’animal se différencie de ses
congénères par des idiosyncrasies bien personnelles.
Deux chats ou deux chiens issus de la même portée et
élevés d’une manière identique présentent des diver­
gences évidentes de goûts et d’habitudes. Au sein de
l’humanité, la diversité devient infinie.
Or, la réalisation du syntonisme exige qu’un large
secteur de la mentalité du sujet soit clairement intelli­
gible à l’émetteur.
Ainsi, lorsqu’il s’agit d’une désaffection, la recher­
che, la compréhension de son déterminisme, c’est-à-
dire de toutes ses causes prédisposantes et détermi­
nantes, importe en premier lieu. Une excellente mar­
che à suivre pour accomplir cet examen consiste à
remonter, à l’aide des souvenirs, le cours du temps
jusqu’au jour où l’on fit connaissance du sujet, puis à
reconstituer l’évolution de celui-ci, sans omettre de
noter les éléments de discordance, aussi bien que les
éléments d’attirance qui se sont manifestés successive­
ment entre les deux intéressés, depuis l’origine de
leurs relations jusqu’au moment présent. Toute désaf­
fection procède nécessairement de deux séries de cau­
ses : insuffisance de satisfaction dispensée à certaines
avidités du sujet et aversion inspirée à celui-ci par
certaines caractéristiques de la personne dont il se
déprend. De ceci, un état psychique (indifférence ou
antagonisme) s’ensuit, et c’est précisément cet état
qu’il y a lieu de se représenter d’une manière aussi
lucide, aussi objective, aussi comprénensive que pos­
sible, afin de rétablir le syntonisme puis, à la faveur
de celui-ci, de communiquer au sujet les pensées, les
images, les incitations de nature à modifier ses dispo­
sitions.
En tout état de cause, le fait de prendre en considé-
178 l’influence a distance

ration l’état d’âme du sujet, de le concevoir aussi clai­


rement, de se représenter ce qui l'a motivé, contribue
dans une large mesure à créer le « rapport » d’inter­
communication.
Deuxième exemple : Vous voulez vous placer en
syntonisme avec votre frère. Accompagnez l’évoca­
tion de son image par celle de tout ce qui vous est
commun. Représentez-vous les similitudes et les dis­
cordances de vos caractères réciproques, puis revivez
par la pensée, diverses scènes vécues ensemble en par­
faite harmonie. Si ses préoccupations vous sont con­
nues, passez-les en revue. Ceci vous conduira à la re­
présentation au moins approximative du cours de sa
pensée au moment présent. Ayant ainsi établi la com­
munication mentale, ce que vous cherchez à lui sug­
gérer aura un retentissement certain.
Troisième exemple : L’un de vos proches se trouve
malade. Il souffre. Vous aimeriez alléger ses souffran­
ces et accélérer le processus de sa guérison. Rendez-
vous exactement compte d’une part des particularités
pathologiques de son état, et, d’autre part, de ce qu’il
ressent physiquement et moralement. Identifiez-vous
à lui. Imaginez aussi clairement que possible sa condi­
tion physique et psychique. Tel est le moyen de vous
placer en syntonisme avec votre patient et d’influer
utilement sur lui.

Influence par communication de pensée.

La représentation de l’état d’âme du sujet « ac­


corde » votre mental au « ton de vibration » du sien.
Quelles idées modificatrices aimeriez-vous voir faire
irruption au sein de sa subconscience ? A vous de
les définir et de les ruminer avec l’intention, le désir,
la volonté de les lui transmettre. Ces idées, ces im­
pressions, ces sentiments pourvu qu’ils ne présentent
LE SYNTONISME 179

pas une incompatibilité absolue avec les dispositions


actuelles du sujet, vont réagir sur lesdites disposi­
tions et amorcer leurs modifications dans le sens que
vous désirez. Imaginez le changement d’attitude que
cela peut entraîner. Représentez-vous le sujet animé
de dispositions un peu plus favorables que la veille.
Voyez-le agir en conformité de celles-ci. Songez qu’il
se rapproche sensiblement de votre point de vue, que
son état d’âme est « en devenir ». Par anticipation,
évoquez les modifications successives que votre action
poursuivis, jour par jour va déterminer en lui, pré­
figurez l’ultime aboutissement de cette évolution,
l’harmonie finale de vos sentiments respectifs. En
résumé, construisez et projetez sur l’écran de votre
imagination un véritable film, partant de la situation
actuelle, et suivant toutes les étapes de son déroule­
ment, depuis les plus légères variations jusqu’à
l’aboutissement de vos desiderata.
Rêverie et projection active.
Je dois mettre en garde le lecteur contre la con­
fusion qu’il pourrait faire entre le fait de s’abandon­
ner à une rêverie passive et l’effort mental caracté­
ristique de la communication active de la pensée.
Le « rêve éveillé » place bien l’expérimentateur
qui s’y adonne en syntonisme relatif avec celui ou
ceux, auxquels il pense, mais il s’agit alors d’un syn­
tonisme réceptif non pas émissif. Semblable récep­
tivité perméabilise le subconscient aux influences
extérieures et plus particulièrement à celle des per­
sonnes dont on évoque l’image. Elle amorce parfois
des manifestations de double-vue (1) mais n’opère
aucun retentissement modificateur.

(1) Voir Traité théorique et pratique de la double vue (Éditions Dangles.


Paris).
/2
180 l’influence a distance

Dans la « projection active », l’imagination ne s’en


va pas à la dérive comme dans la rêverie, son activité
est dirigée selon un plan prémédité vers un « nord »
déterminé.
Les images s’enchaînent avec cohérence, avec vrai­
semblance, dynamisées par une tension énergique de
l’esprit.
Plus vous rêvez à une personne, plus vous vous
subordonnez à son influence, plus vous vous inféodez
à sa volonté. Rêver à quelqu’un, c’est se placer sous
sa dépendance : Une telle attitude mentale développe
l’impressionnabilité, mais annihile les éléments domi­
nateurs du magnétisme personnel.

Substitution.
Si l’on parvient à s’identifier profondément à la
personne du sujet, il devient possible de procéder
par substitution. Cela consiste à s’imaginer être le
sujet et à se mettre dans le même état d’âme que lui,
puis à ressentir les impressions, les émotions que l’on
voudrait qu’il éprouvât, à prendre en considération
les inspirations, les idées de nature à l’amener à ce
que l’on désire.
Ce procédé semble aisé, simpliste. Ne perdez pas
de vue qu’il présuppose une connaissance exacte,
précise, détaillée, complète et objective de la psy­
chologie du sujet, car il ne faut lui prêter que des
pensées compatibles avec sa sensibilité et sa menta­
lité.
La mise à exécution de ce mode d’influence peut
être poursuivie plusieurs heures chaque jour et,
même, si l’on dispose de tout son temps, des journées
entières. Elle amorce un véritable dédoublement, une
sorte de transfert dont l’effet surpasse en rapidité et
en intensité toute autre forme d’action télépsychique.
LE SYNTONISME 181

Elle ne va point sans inconvénients. Toute médaille


a son revers. Insuffisamment exercé, l’expérimenta­
teur risque de créer en lui un état de « double cons­
cience » c’est-à-dire de déséquilibre cérébral. Aussi
convient-il, avant d’aborder la « substitution », d’ac­
quérir par une culture psychique assidue, un degré
de stabilité et de vigueur mentale au-dessus de la
moyenne.

Technique hypnotique.
Les praticiens de l’hypnotisme, c’est-à-dire ceux
qui ont acquis la sûreté et la virtuosité nécessaires
pour provoquer aisément les phénomènes courants
de « suggestion à l’état de veille » et d’hypnose som­
nambulique peuvent user du procédé suivant :
a) Évoquer l’image extérieure du sujet que l’on
se représentera assis dans un fauteuil, en face de soi ;
b) Effectuer sur cette image les six manœuvres
classiques usitées pour déterminer l’hypnose (1);
c) Suggérez au sujet, ainsi endormi, un rêve dans
lequel il ressente, il manifeste, une modification de
ses dispositions morales ; se le représenter pensant,
parlant, agissant sous l’empire des suggestions qu’on
lui adresse. Ces suggestions peuvent être verbales ou
mentales : dans les deux cas, c’est leur répercussion
télépsychique qui agit.
<50 Pour accentuer la subordination du sujet on
peut intercaler entre b) et c) un temps d’exécution
de suggestions motrices analogues à celles que les
hypnotiseurs ont accoutumé de faire accomplir à ceux
qu’ils endorment afin de bien s’assurer de leur auto­
matique passivité.
e) Terminer par toutes les post-suggestions que l’on
__

(1) Voir Magnétisme, hypnotisme, suggestion (Editions Dangles).


182 l’influence a distance

jugera de nature à influer sur le proche comportement


du sujet.
Ce procédé ne saurait en aucun cas plonger dans
une hypnose réelle, dans l’inconscience, la personne
à l'image de laquelle il est appliqué. Il influe sur elle
sans quelle puisse s’en rendre compte. Son efficacité
tient à ce qu’il suscite chez l’émetteur une série de
représentations fort précises, accompagnées d’une
tension ardente de la volonté (1). Si le moment de son
exécution coïncide avec une heure où le sujet dort
profondément du sommeil naturel, cela favorise ses
effets.
Le Syntonisme avec des Inconnus.
Le lecteur attentif a déjà compris que, volontaire­
ment ou non, toute individualité se trouve en synto­
nisme psychique avec nombre d’inconnus. Similitudes
et complémentarismes créent automatiquement un
« rapport » simple ou multiple. Si, par exemple, vous
ressentez l’avidité d’un savoir quelconque, un « at-
tract » s’établit entre vous et ceux qui sont à même
de vous communiquer ce savoir. Plus l’avidité est
ardente, plus l’effet est rapide. La même loi subsiste
en ce qui concerne la vie affective : l’acuité de votre
sensibilité attire vers vous telle personne pourvue
d’une sensibilité analogue ; elle se vérifie également
dans ses acceptions matérielles et tend à agréger à
chacun de nous des gens animés d’ambitions analo­
gues aux nôtres, et doués de facultés de même enver­
gure que les nôtres.
Il suffit donc d’évoquer mentalement une entité
humaine pourvue d’attributs précis, que l’on se repré­
sente clairement, pour aimanter vers soi un être réel
identique à l’image attractive ainsi créée.
(1) Voir Magnétisme, hypnotisme, suggestion (Editions Dangles).
LE SYNTONISME 183
Cela ne s’opère pas en un jour, mais à la suite
d’une répétition quotidienne prolongée des semaines
et parfois des mois, de l’évocation en question.
Soyez bien certain que le type exactement con­
forme à votre idéal, à vos aspirations, à vos besoins
existe en un lieu proche ou éloigné, et que vous
êtes à même de provoquer par votre influence psy­
chique, réagissant par la chaîne d’or des intermé­
diaires naturels la rencontre, et s’il y a lieu, la sym­
biose.
Par la pratique de la concentration syntonisante,
ceux à qui l’utilisqtion de vos aptitudes, de vos con­
naissances ou de vos possibilités seraient précieuses,
viendront à vous.
Ce que vous cherchez, quelqu’un désire en dispo­
ser : obstinez-vous à vouloir ce que vous cherchez
et vous trouverez « fortuitement » le quelqu’un.
Les recherches matérielles, les efforts accomplis
par les voies ordinaires ne doivent pas être négligés
du fait qu’on utilise l’action mentale. Toute éver-
tuation ardente s’accompagne, en effet, d’une irra­
diation dont le rôle reste considérable.
Travailler, agir, surtout avec attention et avec
énergie, aide à maintenir l’orientation de l’esprit
vers le résultat que l’on vise et sert d’appui à la con­
centration proprement dite (1).

(1) J’ai maintes fois vérifié que l’action télépsychique qui accompagne
une tentative matérielle, en vue de l’obtention d’un résultat peut amener
celui-ci par une voie imprévue, tandis que la tentative, elle-même
échoue complètement.
IV. —L’ACTION TÉLÉPSYCHIQUE MÉDICATRICE

La mesure des possibilités. Considérations


I directives. — L’élé
ment objectif. — L’élément subjectif. — Principes à observer
au cours de chaque séance. — Les dispositions morales. —
Connaissances nécessaires.

La mesure des possibiiités.

En prenant connaissance du huitième chapitre


(Livre I) le lecteur a appris l’essentiel de ce qu'il faut
savoir pour influer utilement sur l’état d’un malade.
Nous allons envisager ici diverses précisions destinées,
soit au médecin spécialisé dans le traitement mental,
soit à toute personne animée d’une ardeur assez vive
pour entreprendre, en vue de résultats optima un
travail comportant l’acquisition de connaissances phy­
siologiques et pathologiques détaillées et un effort
à la fois intense et assidu.
L’étendue des possibilités thérapeutiques de l’in­
fluence radiopsychique ne saurait, en l’état actuel de
nos connaissances, être exactement délimitée. Ce dont
j’ai acquis la certitude expérimentale c’est qu’à dis­
tance, comme de près, faction mentale a, dans n’im­
porte quel cas, une certaine efficacité. Dans les ma­
ladies aiguës, l’agent télépsychique peut contribuer
x

dans une mesure appréciable à sustenter les réactions


l’action télépsychique médicatrice 185

d’auto-défense, la nature médicatrix coopérant ainsi


aux effets de la médecine classique. En ce qui con­
cerne les maladies chroniques, trop peu de cas on été
traités pour permettre une assertion généralisée, mais
il y a eu d’incroyables guérisons.
Des résultats surprenants se manifestent quand il
s’agit de troubles fonctionnels sans substruction étio­
logique toxi-infectieuse. C’est que l’influence irra­
diante du psychisme humain exerce une action essen­
tiellement régularisatrice, réorganisatrice et stimu­
lante. On sait que certaines lésions peuvent être com­
pensées par un processus spontané : celui-ci se trouve
activé si le patient reçoit un traitement mental. Enfin,
dans la majorité des névroses et des psychoses non
lésionnelles, l’influence télépsychique peut déterminer
à elle seule des cures radicales et définitives alors que
de nombreux traitements, même la psychothérapie et
la suggestion hypnotique restent peu efficaces (1).
En résumé, nous ne sommes pas en présence d’une
panacée, mais d’un moyen d’action exceptionnel.
Considérations directives.
Ainsi que cela a été mis en évidence au cours du
Livre I, l’action télépsychique imprègne l’inconscient
et prédomine progressivement. Ce qui est suggéré
s’immisce parmi les multiples et obscurs déterminants
de la pensée spontanée du sujet et tend à modifier leur
résultante. Il s’ensuit qu’une personne suggestionnée
télépsychiquement n'a jamais conscience du fait
qu’une influence extérieure s’exerce sur elle. Les
nouvelles dispositions qui lui viennent à l’esprit sem-
(1) La psychothérapie et l’hypnose provoquent parfois des résistances
inconscientes qui tiennent en échec les meilleurs suggestions verbales.
La suggestion mentale qui agit à l’insu du sujet n’éveille aucune réaction
mentale qui agit à l’insu du sujet n’éveille aucune réaction au sein de
son subconscient.
186 l’influence a distance

blent procéder d’elle-même. Leur source s’identifie à


celle de ses propres inspirations et impulsions.
Or, l’inconscient tient sous sa dépendance l’intégrité
du système organo-végétatif. Son activité retentit sur
toutes les fonctions. D’où l’efficacité thérapeutique de
la suggestion mentale.
Que le complexe neuro-cérébral joue vis-à-vis des
mécanismes physiologiques le rôle de chef d’orchestre,
nul n’en doute et cela suffirait à expliquer comment
il se fait que la médecine psychique puisse guérir alors
que tout avait échoué.
Mais la substance même du cerveau et du système
nerveux, son prolongement ramifié n’est que le subs-
trateur d’un élément plus subtil.
« Si l’on étudie le corps humain, que l’on pense
« d’abord être notre plus ferme réalité, écrit le Dr
« Paul Carton (1), on s’aperçoit de ce fait déconcer-
« tant qu’il est composé d’éléments tissulaires et chi-
« miques en continuelle instabilité... A tout instant
« des matériaux sont absorbés, puis élaborés et fixés
« dans les organes et enfin usagés, éliminés et rem-
« placés, si bien qu’après un certain nombre de mois
« rien de ce qui composait notre corps n’existe plus,
« malgré la persistance du même aspect, des mêmes
« tendances, du même plan mental, physiologique et
« physique, qui constitue l’identité personnelle. »
« Il existe donc, dans l’homme, quelque chose qui
« ressemble dans un potentiel non visible, un élément
« constructeur et conservateur de la forme et une
« permanence directrice qui est non matérielle. »
De son côté le Dr Geley, dans son ouvrage l'Etre
subconscient (2) appelle l’attention sur « la perma­
nence de la personnalité malgré les perpétuelles va­
riations moléculaires de l’organisme ».
(1) Dr Paul Carton : Le guide de la vieillesse.
(2) Dr Geley : P Etre subconscient, Alcan éditeur.
l’action télépsychique médicatrice 187
Les conclusions de cet éminent spécialiste de la
métapsychie sont formelles :
« Il y a dans l’Etre vivant un dynamo-psychisme
« qui constitue l’essentiel du moi et qui ne peut abso-
« fument pas se ramener au fonctionnement des cen-
« très nerveux. Ce dynamo-psychisme n’est pas con-
« ditionné par l’organisme ; bien au contraire, tout
« se passe comme si l’organisme et le fonctionnement
« cérébral étaient conditionnés par lui (1). »
Le dynamo-psychisme en question, c’est le « dou­
ble » dont nous avons parlé au chapitre XII, ce double
que l’antiquité savante considérait comme le cohéreur
entitaire de la vie fragmentaire des cellules constitu­
tives de l’organisme. L'action télépsychique émane
du double et agit sur le double. Elle transfuse la vie,
sustente l’énergétisme, communique l’équilibre et
régularise les fonctions. Ces résultats sont inséparables
mais distincts du puissant réconfort moral qu’elle
engendre et des modifications qu’elle détermine dans
la condition mentale du sujet.
L’élément objectif.
Pour pratiquer la thérapeutique télépsychique, il ne
suffit pas d’être animé de bonnes intentions, enthou­
siaste, ni même d’avoir acquis l’intensité de concen­
tration requise pour l’expérimentation de la suggestion
mentale. Il faut, au surplus, posséder des notions éten­
dues de physiologie et de pathologie afin de pouvoir
se représenter avec précision ce qui se passe dans
l’organisme du patient, c’est-à-dire les caractéristiques
internes de son état.
Pour en donner une idée, voici un exemple. Mon
regretté maître Hector Durville, en vue de modifier I

certaines manifestations d’urémie brightique, se re-


(1) Dr Geley : De Cinconscient au conscient, Alcan éditeur.
188 l’influence a distance

présentait ainsi en suivant très exactement le fonc­


tionnement de l’appareil rénal, l’action mentale qu’il
tentait d’exercer :
« Du hile, je pénètre à l’intérieur par l’artère, en
« suivant ses divisions et ses subdivisions jusqu’aux
« artérioles et je reviens par les veinules, les subdi-
« visions et les divisions de la veine rénale. Ce par-
« cours accompli, je rentre dans le nerf qui suit l’ar-
« tère jusqu’aux artérioles en me disant : Je pénètre
« par la partie sensitive du nerf et je suis ses divi-
« sions et subdivisions jusqu’à leur extrémité et je
« reviens par la partie motrice du nerf. Du hile, je
« pénètre dans le bassinet que je remplis. Je me
« concentre en haut pour aller en bas et aussi plu-
« sieurs fois de bas en haut et de haut en bas comme
« pour frictionner les calices. De là, par les tubes
« urinifères, je pénètre dans une pyramide de
« Malpighi en imaginant bien l’action que je vais y
« exercer et qui se transmettra à toutes les autres.
« Je parcours les tubes droits et les tubes contournés
« jusqu’aux glomérules de Malpighi et j’agis par
« pression sur ces derniers comme pour élargir les
« mailles des filtres afin de permettre aux toxines de
« passer au lieu de rester dans le sang. J’exécute des
« allées et venues, des glomérules au calice et de
« celui-ci aux glomérules pour bien ouvrir tous les
« tubes urinifères et favoriser la circulation (1).
Bien qu’exceptionnellement doué et exercé du point
de vue émissif, celui qui fut le plus illustre praticien
du siècle apportait la plus minutieuse attention à la
représentation mentale précise de chacun des états
pathologiques dont il entreprenait la cure. Il obtint
ainsi nombre de guérisons inespérées.
De nos jours, un médecin fort expert en psycho-

(1) Durville (Hector) Magnétisme Personnel.


l’action télépsychique médicatrice 189
thérapie, le Dr Oudinot, s’inspirant à la fois des tra­
vaux d’Hector Durville et des plus récentes acquisi­
tions de la psycho-physiologie tient compte non seu­
lement de ce que permettent d’envisager l’étiologie et
l’anatomie pathologique, mais encore du type humoral
de chaque malade et des antécédents de celui-ci.
Il s’efforce de saisir l’origine lointaine, prédispo­
sante, du mal, ses diverses manifestations ou du moins
ses prodromes au cours du passé, d’évaluer le degré
de vigueur des réactions d’auto-défense du patient,
tout ceci en vue d'imaginer avec coordination l’orga­
nisme, l’agencement structurel particulier de ses
rouages, ses tendances pathologiques foncières et
l’actuel aboutissant de celles-ci (1).
A défaut de connaissances médicales étendues, l’ex­
périmentateur désireux d’user de sa propre influence
télépsychique pour traiter un malade (dans son en­
tourage par exemple) aura intérêt à acquérir des
notions au moins sommaires d’anatomie et de physio­
logie de manière à pouvoir consulter avec profit un
traité détaillé de pathologie où il puisera une con­
ception aussi précise que possible du cas de son ma­
lade.
L’élément subjectif.
La vision lucide des mécanismes internes aide l’opé­
rateur à se mettre en syntonisme avec le sujet, c’est-
à-dire à se rendre compte de ce qu’il ressent, à ima­
giner son état cœnesthésique, en un mot, à s'émou­
voir utilement dans un sens analogue à celui de
F « ardeur convoitante » dont il a été plusieurs fois
question au cours du Livre I.
Le syntonisme, l’émotion concourent en effet, à

(1) Dr Oudinot : La Médecine, les Sciences secrètes et leurs ressources


thérapeutiques (Editions Dangles).
190 l’influence a distance

créer l’ardeur convoitante des résultats désirables, soit


ici, soulagement, apaisement, régularisation, amélio­
ration, guérison.
L’activité psychique atteint son maximum d’effica­
cité dès qu’elle se manifeste à la fois en mode volitif
(détermination de ramener à la normale l’état du
patient), en mode intellectif (représentation objec­
tive des mécanismes viscéraux en cause) et en mode
sensitif (compassion) suscitée par l’évocation de la
sorte et du degré de malaise, de tourment ou de souf­
france dont on sait la présence et qu’il s’agit d’atté­
nuer puis de faire cesser.
Principes à observer an cours de chaque séance.

S’il suit les indications précédentes, l’opérateur


arrive à créer en lui-même l’état psychique optimum
décrit au paragraphe précédent. Au moment fixé pour
la séance quotidienne, il s’isolera dans le silence d’une
pièce exclusivement éclairée d’une faible lumière
bleue placée de préférence, derrière lui. Il s’imaginera
alors voir le malade, comme s’il était au chevet de ce
dernier (1).
Après avoir considéré pendant dix à quinze mi­
nutes son aspect extérieur, il faut s’efforcer de « voir
en dedans », c’est-à-dire d’évoquer ce qui se passe
dans l’organisme du patient, ceci avec la plus grande
précision possible, puis ce qui devrait se passer nor­
malement ; en d’autres termes, l’état pathologique
actuel et le jeu normal des fonctions momentanément
troublées.
L’influence modificatrice de la pensée de l’opérateur
s’exercera alors avec une pleine efficacité s’il se re-

(1) Je rappelle qu’on influence plus aisément une personne si on


l’a préalablement vue, en chair et en os. Dans la plupart des cas ce
contact visuel est indispensable.
l’action télépsychique médicatrice 191

présente alors les diverses améliorations les plus


immédiatement désirables, la diminution des manifes­
tations pénibles, la détente, l’apaisement et le som­
meil.
Voir ensuite le malade dormir profondément, pai­
siblement, les traits détendus, la respiration normale,
lui suggérer une longue nuit de repos récupérateur et
régularisateur. L’importance de la somniation, quel
que soit le cas, est considérable. C’est pourquoi la
séance quotidienne devrait se situer, de préférence, le
soir au moment où l’on sait que le malade cherche à
dormir.
Assister ensuite à son réveil du lendemain, réveil
accompagné d’un sentiment de mieux-être, d’une atté­
nuation des troubles, du retour des forces, de pensées
optimistes, réconfortantes, en particulier de celle de
la guérison. Imaginer les phases successives de la
journée du malade et vouloir que, d’heure en heure,
il ait l’impression de « remonter la pente ».
Enfin, revenir à la représentation objective de son
état, de manière à agir sur les organes en cause et
leurs fonctions, à stimuler celles-ci, à activer leurs
mécanismes.
Il serait peu judicieux de suggérer des modifications
ou améliorations d’une rapidité incompatible avec
l’état du patient, avec la gravité du cas, ou l’origine
profonde et lointaine de ses troubles. La télépsychie
n’opère pas de miracles : elle accélère, elle intensifie
le processus, le cheminement des modifications tis­
sulaires, fonctionnelles et organiques dont l’aboutis­
sement est le retour à la normale.
Comme pour toute autre intervention, un plan
minutieusement établi est nécessaire pour guider,
coordonner l’action de l’opérateur au cours des
séances dont l’ensemble constituera le traitement.
Bien entendu, le plan théorique composé dès le
192 l’influence a distance

début du traitement restera l’objet d’une souple et


constante révision au fur et à mesure que les résul­
tats se manifesteront.

Les dispositions morales du malade.

Trois cas peuvent se présenter :


a) le malade sait qu’une influence télépsychique
s’exerce sur lui et il l’envisage avec confiance,
b) le malade sait qu’une influence télépsychique
s’exerce sur lui et il l’envisage avec scepticisme,
c) le malade ignore la tentative de l’opérateur.
Dans le premier cas, pour aider l’intéressé à se
mettre en état de réceptivité, on placera devant lui
de manière qu’il puisse le regarder sans effort, un
agrandissement photographique de l’opérateur et on
lui conseillera de diriger son regard sur cette image
pendant la durée de chaque émission. S’il s'endort au
cours de la séance, cela n’en vaudra que mieux, car le
sommeil est essentiellement réparateur et les der­
nières images qui le précèdent agissent puissamment
sur l’inconscient.
Dans le deuxième cas, il serait vain d’essayer d’ob­
tenir la confiance du patient.
D’abord, cette confiance n’a pas une importance
considérable ; ensuite, toute tentative pour la faire
naître n’aurait d’autre résultat, dans quatre-vingt-
quinze pour cent des cas, que susciter des dispositions
contraires.
Enfin, si le patient ignore que l’on essaie sur lui l’in­
fluence télépsychique, l’expérience n’en sera que plus
intéressante, car on n’imputera pas les résultats à de
l’autosuggestion. J’ai cru longtemps que la mise en
réceptivité du sujet constituait une condition essen­
tielle de l’efficacité d’un traitement télépsychique. Un
essai tenté, il y a 25 ans, sur un diabétique sexagé-
l’action télépsychique médicatrice 193

naire, qui ignorait même mon existence ébranla cette


conviction car, dès les premières séances, le taux de la
glycosurie et de l’acétonurie s’effondra littéralement,
puis, en quelques semaines, disparut. Il n’y eut pas
de rechute. Enhardi par cette tentative, j’ai, au cours
des années suivantes, vérifié par une vingtaine
d’épreuves sur des cas très distincts, que l’on peut
influer utilement sur un malade, absolument à son
insu. Ce qui sembla encore plus incroyable, c’est que
des déficients cérébraux : mythomanes, paranoïaques,
délirants puissent ressentir l’influence télépsychique
curative ; et cependant, c’est ainsi.

Connaissances nécessaires.

J’ai insisté au paragraphe 3 sur l’importance d’une


représentation précise des caractéristiques de chaque
cas dont on voudrait tenter la cure. Pour procéder du
général au particulier, voici l’indication de quelques
ouvrages dont l’étude donnera à chacun la possibilité
de comprendre clairement les composantes de l’entité
humaine, puis le détail des troubles et altérations qui
constituent chaque maladie.
Dr P. Carton. — Diagnostic et conduite des tempé­
raments, et du même L'Art médical (Le François,
Paris).
Dr A. Hitier. — La Machine humaine (Delagrave,
Paris).
Hédon. — Précis de physiologie (Doin, Paris).
Dr G. Encausse. — Essai de physiologie synthétique.
Forgue. — Pathologie externe (Doin, Paris).
Collet. — Pathologie interne (Doin, Paris).
Rogues de Fursac. — Manuel de Psychiatrie (Alcan,
Paris).
194 l’influence a distance

La bonne volonté, ou la volonté tout court, doivent


être respectivement considérées comme une certaine
orientation et un certain degré de tension de la pen­
sée, cet agent dont le pouvoir extérieur est immense,
mais qui s’exerce d’autant plus conformément aux in­
tentions de l’émetteur qu’il se trouve dirigé avec plus
de précision.
Cette précision, en ce qui concerne l’action médica­
trice, nécessite de claires conceptions sur la structure,
le fonctionnement, les dysfonctionnements et lésions
de la machine organique.
Certes, l’intention seule, quand elle est irradiée avec
intensité, longuement, obstinément, peut, à elle seule,
déterminer des résultats considérables, ce qui expli­
que certaines cures extraordinaires obtenues par des
« guérisseurs » uniquement armés d’une foi ardente et
d’un dynamisme intense. Dans la majorité des cas et
surtout dans les cas rebelles, la foi et le dynamisme
triomphent plus vite et plus sûrement à l’aide du sa­
voir.
Un dernier mot. Nous avons traité au chapitre II
la question du « magnétisme personnel ». A savoir
égal, celui qui en est doué impressionnera toujours in­
finiment mieux un affligé que celui à qui font défaut
les qualifications d’où procède cette influence. Qu’il
s’agisse d’une personne de l’entourage du patient, du
garde-malade, de l’infirmier spécialisé ou même du
médecin, une présence magnétique contribue dans une
mesure considérable à l’effet des soins et des médica­
ments, car elle apaise, rassure, réconforte non seule­
ment le moral, mais tout l’être, jusqu’aux sources les
plus profondes de sa vitalité.
La « loi d’intensité » dont il a été question au cha­
pitre II prend une importance particulière dans l’ac­
tion télépsychique médicatrice.
D’une manière générale, on peut dire que l’homme
l’action télépsychique médicatrice 195
sans passion est comparable à un moteur sans carbu­
rant. L’intensité psychique procède de la passion. Ima­
gine-t-on un virtuose de la métaphysique qui ne serait
pas animé d’une passion pour les sciences abstraites ?
Conçoit-on un homme d’Etat que la passion du pou­
voir ne propulserait pas ? Un artiste sans la passion de
la beauté et de l’harmonie ? Un « money-maker » sans
la passion de l'argent ?
On interprète généralement le mot passion par ses
acceptions péjoratives. Nous tenons compte ici de la
signification axiale : intense avidité, spirituelle ou ma­
térielle, affective ou intellectuelle.
C’est la passion du pouvoir télépsychique qui cons­
titue la qualification principale de l’expérimentateur.
C’est la passion de guérir, de supprimer la douleur, de
régulariser les troubles perturbateurs de l’équilibre
organique qui crée l’ardeur concentrée et l’acharne­
ment indispensables pour réussir une cure, surtout
difficile.
Cette même ardeur donnera à chacun la détermi­
nation nécessaire pour se livrer aux études dont il
vient d'être question ; elle engendrera en lui l’avidité
d’une connaissance étendue de la machine organique,
surtout s’il comprend clairement qu’au vieil adage
« Vouloir c’est pouvoir » il convient d’ajouter « à la
condition de savoir ».

13
v. — la chaîne télépsychique

Principe de la chaîne. — Pratiques empiriques. — Chaîne déli­


bérée. — Objectifs matériels. — Traitements physiques. —
Traitements moraux. — Contre-chaîne.

Principe de la chaîne.

Inconsciemment, chacun de nous entre en invisible


rapport avec ceux dont la pensée, les aspirations, les
avidités se trouvent complémentaires des siennes ou
analogues à celles-ci. Inversement, nous influons sur
nos antagonismes de même que ceux-ci agissent sur
nous dans une modalité stimulante ou perturbatrice,
selon que nous sommes forts ou faibles.
Quand plusieurs individus poursuivent harmonieu­
sement le même objectif, ils forment une sorte de bat­
terie mentale d’une efficacité particulière d’autant plus
puissante qu’elle reste silencieuse et secrète, afin de
ne pas donner l’éveil à de possibles opposants.
« Le courant émis par un petit cercle d’individus
« bien unis et toujours d’accord est d’une valeur ines-
« timable et puissante, dit Prentice Mulford ; il attire
« la pensée et la force des sages, vigoureux et bien-
« veillants esprits attirés ainsi vers le groupe et qui
« viendront à son aide dès que l’un de ses membres
« en manifestera le désir. La génération de pensées
« nobles et pures émises en commun, la recherche de
« la vérité, le désir du bien universel purifient l’intel-
LA CHAINE TÉLÉPSYCHIQUE 197

« ligence, accroissent l’énergie, préservent de l’erreur


« et des déboires, améliorent la santé. Elle communi-
« que d’autre part une puissance qui attire tous les
« biens matériels. »
Une famille unie et bien hiérarchisée représente le
type de la chaîne la plus féconde qui soit. L’entente
organisatrice, l’équitable répartition des devoirs de
chacun, un objectif commun bien défini et auquel tous
coopèrent, l’assentiment à l’autorité qu’impliquent les
responsabilités et l’expérience, telles sont les caracté­
ristiques d’une chaîne familiale parfaite, abductrice
de santé, de succès et d’agrément.
Généralement parlant, nous avons intérêt à vivre au
sein d’un groupe restreint au sein duquel nous ayons
à exercer une initiative coordonnée avec celle de tous
les membres du groupe.
La dispersion et la passivité anéantissent les res­
sources mentales même chez les mieux doués.
Dans Vos Forces, son ouvrage capital, Prentice Mul-
ford, déjà cité plus haut, a précisé admirablement le
mécanisme des inter-réactions psychiques.
« Tout lieu de réunion, tout salon, dit-il, où se ren-
« contrent des désœuvrés, plus ou moins sous l’in-
« fluence d’un stimulant, tout milieu, quelle que soit
« sa destination conventionnelle, si l’on y ment ou si
« l’on y fait quelque commerce trompeur est un ré-
« servoir de pensée inférieure. Elle en jaillit, aussi
« réelle quoique invisible que l’eau qui sourd d’une
« fontaine. Tout groupe de gens bavardant, caque-
« tant, répandant les scandales, est une source de pen-
« sées mauvaises, de même que toute famille où
« régnent le désordre, les mots acrimonieux, les re-
« gards aigres, l’humeur acariâtre. Même doué d’une
« robuste structure mentale, nul ne peut vivre dans
« un tel milieu sans en être affecté. Il faut une perpé-
« tuelle tension des forces pour y résister. On finit par
198 l’influence a distance

« s’y mêler, y être pris comme dans un filet, être aveu-


« glé par son obscurité, accablé par le fardeau qu’il
« apporte. Vous avez pu remarquer vous-même com-
« bien vous êtes libre de tout désir désordonné quand
« vous quittez la ville pour résider à la campagne.
« Environnés comme nous le sommes de l’invisible
« force-pensée, continue Mulford, c’est une nécessité
« de rechercher exclusivement la présence de ceux
« dont les aspirations sont naturellement droites. Se
« réunir souvent avec un groupe ainsi composé, en-
« gendrerait par une silencieuse communion un cou-
« rant de pensée limpide. Par une telle coopération
« chaque membre du groupe aura plus de force pour
« se mettre à l’abri, durant la veille ou pendant la
« nuit, des attaques défavorables et des influences
« destructrices environnantes. On constituera ainsi
« une chaîne qui rattachera chacun des participants
« à la région spirituelle la plus haute, la plus pure et
« la plus puissante. »
Ainsi, notre comportement, selon l’orientation des
pensées qu’il implique, nous intègre soit à une com­
munauté psychique favorable, soit à une confluence de
forces désorganisatrices.

Pratiques empiriques.

La notion des interférences radio-psychiques a ins­


piré un certain nombre de pratiques superstitieuses
dont le caractère empirique restreint considérablement
l’efficacité, car il présuppose un assentiment qu’il
trouve exclusivement parmi des mentalités subjecti­
ves. Telles sont « les chaînes de prières » qui circu­
lent en diverses régions et trouvent créance malgré la
désapprobation des experts en orthodoxie. Nombre de
personnes trouvent un jour dans leur courrier une
formule d’invocation accompagnée de l’avis impéra-
LA CHAINE TÉLÉPSYCHIQUE 199
tif (sous peine de s’attirer toute sorte de calamités), de
recopier sept fois ladite formule, puis de l’envoyer à
sept personnes avec injonction à chacune d’en faire
autant. Aux obédients, santé, revenus et agréments
sont promis ainsi que des chances exceptionnelles.
Ne pas s’exécuter serait « briser la chaîne » et cou­
per le fil d’une sorte d’épée de Damoclès. On conçoit
que certains s’exécutent par crainte plus que par con­
viction.
Or, céder à la menace équivaut à se placer en un
état de passivité alors que la vigueur psychique pro­
cède de l’initiative et de l’objectivité.
Il y a eu aussi les « clubs succès » dont le premier
fut lancé aux Etats-Unis vers 1900 par A.-Victor Se-
gno, auteur d’un ouvrage intitulé La Loi du Menta­
lisme. Tout adhérent recevait chaque mois un pli où
se trouvait une courte formule. En principe, chaque
jour, au même instant, tous les participants se met­
taient en communication mentale en lisant la formule-
clé et le potentiel-pensée de tous agissait au profit de
chacun. Pour qu’une telle pratique engendre des résul­
tats, il eût fallu que la formule donnât lieu à des re­
présentations identiques chez tous, alors que chacun
l’envisageait différemment selon son degré de culture,
ses prédispositions et ses désirs particuliers, disons
« à travers le verre coloré de son subconscient ».
Les conceptions de M. Segno ne manquaient pas
d’envergure, mais sa tentative fit long feu, car elle
ne tenait pas compte de l’infinie diversité des menta­
lités, donc du nombre restreint des possibles synto-
nismes.
Chaînes délibérées.
J’entends traiter ici des conditions à remplir pour
constituer de propos délibéré, et en toute connaissance
de cause, une chaîne d’influence télépsychique.
200 l’influence a distance

Ces conditions, les voici :


a) Chacun des participants doit connaître avec pré­
cision les lois de l’influence en question ;
b) Trois d’entre eux — au moins trois — seront des
expérimentateurs exercés, sûrs d’eux-mêmes, c’est-à-
dire ayant obtenu dans le passé des résultats indiscu­
tablement positifs par la mise en pratique des indi­
cations exposées dans la première partie de ce livre.
S’il n’y en avait qu’un, sa suprématie (même justifiée),
resterait dubitative dans l’esprit de certains de ses
coopérateurs. Deux, nombre bipolaire, ne convient pas
car il engendre inévitablement l’antagonisme. Trois
ou plus permettent l’harmonieuse synergie.
c) L’objectif visé doit être tel que tous les partici­
pants ressentent à son égard une ardeur convoitante
intense.
d) Des vues d’ensemble communes, un plan conçu
et arrêté avec l’assentiment de tous, puis subdivisé en
étapes dont on n’abordera la deuxième qu’après avoir
atteint la première, sont indispensables.
Ceci posé, reste à envisager le modus operandi.
Celui-ci se présente sous un triple aspect :
1° Tous les participants, réunis, silencieusement (1),
aussi fréquemment que possible accompliront l’édi­
fication des images mentales et l’effort de concentra­
tion prévus pour la séance en cours, l’ordre et objet
des séances étant définis par les trois leaders de la
chaîne ;
2° Les jours où les participants ne se réunissent
pas, chacun d’eux, à un moment commun pour tous,
s’isolera dans le silence et effectuera (après avoir vi­
sualisé imaginativement tous ses collègues), l’effort
psychique conforme au programme prévu pour ce
jour-là ;
(1) La parole disperse les énergies mentales. Concentration nécessite
silence.
LA CHAINE TÉLÉPSYCHIQUE 201

3° L’activité intellectuelle et matérielle de tous sera


coordonnée, au cours de la vie quotidienne, en fonc­
tion de l’objectif poursuivi.
Au sujet de ce dernier, une seule considération im­
porte : c’est qu’il soit légitime, c’est-à-dire conforme
aux principes de la droiture la plus irréprochable.
Nous verrons au paragraphe VII, que la méconnais­
sance de cette loi suprême : l’Equité, entraîne d’auto­
matiques sanctions d’une importance exactement pro­
portionnelle à la puissance exercée.

Objectifs matériels.

Toute communauté d’intérêts implique une chaîne


télépsychique à laquelle participent inconsciemment
tous les intéressés. Si l’un d’eux, nanti d’un savoir pré­
cis et d’une sûreté expérimentale acquise par la pra­
tique, exerce sur ses collaborateurs un ascendant tel
qu’il en soit le « leader », la coordination des efforts
de tous se trouve réalisée très avantageusement.
Ce qui est essentiel, c’est que la prospérité de l’af­
faire, son objet, son développement demeurent conti­
nuellement au premier plan des préoccupations des
associés. La somme des ardeurs convoitantes constitue
alors une synergie extrêmement puissante. Les diver­
gences relatives à la conduite de l’affaire elle-même
contribuent à en amoindrir le rendement, car elles en­
traînent une dispersion des forces mentales directrices
et une répercussion inhibitrice.
De même, la concentration d’ensemble se trouve dé­
rivée quand l’un des participants vient à ressentir plus
d’intérêt pour un objectif personnel, privé, que pour
l’objectif commun.
Les meilleures conditions psychiques de succès fi­
nanciers, industriels ou commerciaux stables sont, par
ordre d’importance, les suivantes :
202 l’influence a distance

a) Conception en harmonie avec l'intérêt général ;


b) Comportement loyal vis-à-vis de la compétition ;
c) Hiérarchie justifiée par une évaluation judi­
cieuse des valeurs individuelles et harmonieusement
coordonnée avec souci de déterminer l’assentiment de
tous ;
d) Assemblée régulière et fréquente des dirigeants
en vue de « faire le point », de confirmer (en les adap­
tant au mouvement présent), leurs décisions de prin­
cipe et de communiquer une impulsion renouvelée à
leurs exécutants ;
e) Mise en pratique des indications données plus
haut au paragraphe 3, en ce qui concerne les séances,
spécialement consacrées aux émissions télépsychiques
collectives.

Traitements physiques.

L’entourage d’un malade influe collectivement sur


lui, pas toujours harmonieusement, si bien intentionné
soit-il, car l’unanimité de l’affection ne s’accompagne
pas nécessairement de celle de la pensée, de l'attitude
et du comportement.
Quand nous écrivons le mot « psychisme », nous
entendons à la fois l’activité purement intellectuelle et
la vie affective : l’une et l’autre sont inséparables. On
pourrait les comparer à un engrenage de deux roues
dentées et dire que ce qui anime l’une entraîne chez
l’autre un mouvement connexe.
Supposons au sein d’une famille très unie, un ma­
lade dont l'état apitoie tout le monde. Une chaîne
affective se trouve ainsi créée, dont l’influence collec­
tive contribue à soutenir la vitalité et le moral du pa­
tient.
Cette chaîne serait plus effective si au moins l’un
des participants, pourvu de connaissances physiologi­
LA CHAINE TÉLÉPSYCHIQUE 203
ques et pathologiques suffisantes, était à même de se
représenter avec précision, d’abord ce en quoi les mé­
canismes internes du malade se trouvent perturbés ;
r

ensuite, le processus d’une évolution normale de l’état


actuel à l’équilibre, c’est-à-dire à la guérison.
Le participant, en effectuant chaque jour, avec tous
ses intimes, une séance d’émission télépsychique, diri­
gerait utilement le total des énergies psycho-affectives
représentées par cette batterie humaine.
L’optimum serait une action exercée par plusieurs
spécialistes, individuellement exercés à l’observance
des indications du chapitre IV.
Dans les maladies aiguës, il s’agit, avant tout, de
transfuser au patient un potentiel énergique destiné
à soutenir ses réactions d’auto-défense ; secondement,
on pensera à l’atténuation de la souffrance ; enfin, le
sommeil du patient fera l’objet d’une attention spé­
ciale, car le fait de dormir chaque nuit, profondément
et longuement, contribue dans une très large mesure
à toute guérison.
Dans les maladies chroniques, comme dans les cri­
ses aiguës, l’activation du vitalisme - importe principa­
lement. En second lieu, il convient de suggérer au ma­
lade l’observance rigoureuse des prescriptions d’hy­
giène correspondantes à son état. Ces deux conditions
réunies suffisent à améliorer considérablement l’état
général. Elles rendent possibles les modifications tis­
sulaires, fonctionnelles et organiques que chacun des
suggesteurs se représentera clairement et avec inten­
sité, en parfaite unanimité avec tous les membres de
la chaîne.
Le miracle instantané et même les améliorations très
rapides sont exceptionnels : il faut du temps et de la
persistance pour effectuer des cures radicales et per­
manentes au moyen de l’action télépsychique, mais
celle-ci se montre souvent efficace là où toutes les au-
204 l’influence a distance

très médications avaient échoué. Il n’est pas de cas


où elle ne puisse déterminer d’appréciables résultats,
si désespéré qu’il puisse paraître.

Traitements moraux.

S’inspirant des travaux de Dupré (1), quelques psy­


chiatres considèrent la perversité parallèlement à la
mythomanie, à l’hyperémotivité ou à la paranoïa
comme une psychose constitutionnelle. Il semble bien
que certains individus manifestent à la fois et cons­
tamment l’amoralité et l’inaffectivité qui, selon Régis
(2), caractérisent la constitution dite « perverse ». Du­
pré insiste sur l’irréductibilité des tendances propres
à la dite constitution et qui se traduisent par la réci­
dive incessante et l’incorrigibilité. S’il est vrai (et tout
nous porte à l’admettre) que la constitution perverse
procède d’une anomalie de la structure cérébrale, di­
sons d’une singularité anatomique, ceux qui l’envisa­
gent sous l’angle matérialiste ne peuvent que la dé­
clarer incoercible.
Cependant, avons-nous le droit de désespérer ?
Le cerveau, organe matériel de la pensée, peut fort
bien être conçu comme l’instrument de l’entité pyschi-
que invisible dont la réalité a été mise en évidence
par certains phénomènes d’extériorisation (3) et de
dédoublement — exceptionnels certes — mais parfai­
tement vérifiés. Cette entité que les théosophes dési­
gnent par l’expression : « Le Penseur » jouerait vis-à-
vis du cerveau un rôle analogue à celui du pianiste
vis-à-vis du piano.
En tout état de cause, l’expérience montre qu’une
( 1 ) Dupré : Pathologie de P émotivité et de P imagination.
(2) Régis : Traité de Psychiatrie.
(3) L’hétéroscopie notamment, du moins celle de ses modalités
qui permet au métagnome de lire dans l’inconscient d’une autre personne.
LA CHAINE TÉLÉPSYCHIQUE 205

chaîne de volontés suffisamment aptes à la concentra­


tion intense, prolongée et régulièrement effectuée, dé­
termine peu à peu des modifications assez profondes
pour atténuer largement les anomalies les plus graves.
Plus rapides sont les résultats quand il s’agit d’in­
fluer sur un être normal momentanément dévoyé par
quelque entraînement passionnel, désorganisé par les
effets d’une vie dissipée, ou, plus généralement, aveuli.
Pour obtenir un comportement nouveau, il convient
de suggérer tout d’abord, au sujet, les pensées, les dis­
positions morales de nature à engendrer le change­
ment de conduite désiré. Celles-ci lui viendront à l’es­
prit comme des pensées spontanées et l’effort se pour­
suivant, prédomineront bientôt : désaffection pour la
sorte de contentement funeste auquel il s’est accou­
tumé, aversion pour les conséquences de ses errements
actuels, avidité de ce dont ils le privent, réveil du sen­
timent de la dignité et des aspirations élevées.
Comme pour toutes les interventions télépsychiques,
un plan méthodique, divisé en étapes jusqu’au détail
de chaque séance, doit être conçu d’un commun ac­
cord, par ceux qui entreprennent ensemble une cure
morale, car la concordance de leurs représentations,
leur unisson en assure la synergie.
Ainsi que je l’ai déjà noté, la suggestion mentale a
sur la suggestion verbale — notamment sur les remon­
trances — l’avantage de ne pas susciter de réactions
antagonistes. On peut rétorquer le raisonnement le
plus judicieux, résister aux admonestations les mieux
fondées, les mieux exprimées. En fait, elles éveillent
presque toujours automatiquement une sourde résis­
tance, une regrettable aversion. Ceux qui assument la
tâche d’influer mentalement sur le moral d’un être,
ont avantage à s’abstenir de tout recours à la parole,
en d’autres termes, à le suggestionner uniquement à
son insu.
206 l’influence a distance

Contre-chaîne.
On sait que toute action engendre une réaction égale
et de sens contraire. Ainsi, le dynamisme irradiant
d’une batterie d’influence psychique, si habilement
agencée qu’elle soit, détermine immanquablement la
formation d’une chaîne antagoniste quand les résul­
tats visés par ses promoteurs impliquent la mécon­
naissance des droits d’autrui. L’arbitraire et le despo­
tisme galvanisent d’emblée les énergies mentales des
plus lucides et des plus forts d’entre les spoliés ; puis
l’invisible résonance de leur insurrection intérieure se
transmet de jour en jour à nombre d’autres et les coor­
donne en une somme toujours grandissante de foyers
émissifs.
Il y a un quart de siècle, au sein d’un pays d’Europe,
se constitua, sous l’égide de quelques volontés réso­
lues, un centre d’emprise télépsychique d’une enver­
gure sans précédent. Ses organisateurs réussirent à
placer quatre vingt-dix millions d’homme dans un état
de monoidéisme aveuglément fanatique (1). Tout ce
que nous avons observé, appris et vérifié tend à mettre
en lumière ce fait que le créateur de la chaîne en
question procéda — intuitivement peut-être, mais avec
une parfaite précision — en conformité des lois du
phénoménisme inter-psychique. L’impulsion centri­
fuge, irradiée du sommet à la base (c’est-à-dire d’une
volonté propulsante à la multitude des passifs, par
diverses chaînes intermédiaires hiérarchisées), reve­
nait au sommet en mode centripète, multipliant alors
incommensurablement la puissance de celui-ci.
Du fait même de son implacable impériosité, cette
formidable chaîne portait en elle, dès l’origine, le dé­
terminisme de son propre anéantissement. L’intense
(1) On use de répression pour anéantir les résistances. Seule la sug­
gestion crée l’assentiment enthousiaste.
LA CHAINE TÉLÉPSYCHIQUE 207

révolte silencieuse de quelques-uns, se diffusant même


du fond des geôles, s’est communiquée à des centaines,
à des milliers d’êtres, jusqu’à ce que des continents
entiers vibrent à l’unisson.
Et, comment s’est manifesté, essentiellement, le choc
en retour ? Par Paltération progressive de la lucidité
d'esprit des principaux détenteurs du pouvoir central.
A partir d’un certain moment, leurs évaluations et
leurs décisions furent d’une stupéfiante extravagance.
Chez ces réalistes, le sens des réalités semble, dans
les derniers temps, s’être intégralement obscurci au
point de les aliéner aux plus lumineuses évidences.
Leur influence primitive, s’interposant comme un
écran entre le discernement de leurs assujettis et le
monde extérieur, leur permit de créer la psychose col­
lective grâce à laquelle chacun devenait un docile et
ardent auxiliaire de leurs ambitions.
Rigoureuse, la loi répercussive vint désorganiser et
finalement anéantir l’entendement des despotes.
Tout au long de l’Histoire, on voit s’effondrer, à
échéance plus ou moins longue, les régimes en appa­
rence les mieux conçus ; on voit se fragmenter tour
à tour les empires les plus vastes.
C’est qu’il n’y eut jamais de régime rigoureusement
équitable ni d’empire édifié par d’autres moyens que
l’usage arbitraire et outrancier de la force brutale.
L’usage politique des forces psychiques, dont le
deuxième quart de ce siècle devait voir l’avènement
s’est avéré d’une efficience invraisemblablement ra­
pide et massive au point de sembler s’identifier à la
certitude d’une irrésistible suprématie. Plus fulgurante
encore en a été la répercussion désorganisatrice.
Restreinte ou étendue, toute chaîne émissive d’exi­
gences contraires à l’équité se voue elle-même à l’iné­
luctable destruction.
VI. — LA TÉLÉPSYCHIE ET L9AMOUR

Considérations générales, Comment éveiller l’amour. — Pour


prévenir la dissociation. L’importance d’une réaction précoce
•iéi

Les rivalités, Après la rupture. — L’avantage d’être


exercé.

Considérations générales.

Le chapitre VII du Livre I donne toutes les indica­


tions pratiques nécessaires pour la « communication
télépsychique des sentiments ». Nous allons, ici, consi­
dérer la question sous un angle plus large.
Dans un précédent ouvrage (1), j’ai tenté l’analyse
de cet état psychique qui constitue l’amour. On peut le
définir : un complexe conditionné par l’attirance phy­
sique et par un ou plusieurs éléments d’ordre affectif.
Péladan, le plus subtil des psychologues du xixe siècle,
a noté dans l’un de ses romans (2) ce qui distingue
l’amour réel du para-amour tel que je l’ai défini dans
mon ouvrage précité :
« Il y a, dit-il, des solidarités, des paralléljsmes de
« carrière, des simultanéités de plaisir, il y a des com-
« merces de vanités et des complicités variées qui
« tiennent la place de l’amour. »
Agi par sa sexualité, tout être jeune et inexpéri-
r

( 1 ) Psychologie de P Amour (Editions Dangles).


(2) Modestie et vanité (Le Mercure de France).
I.A TÉLÉPSYCHIE ET L’AMOUR 209
menté se fourvoie aisément. Il croit aimer et être aimé,
alors qu’il ne se trouve nullement en présence de l’être
postulé par son complexe électif (1).
Il s’ensuit de nombreuses et meurtrissantes déconve­
nues.
Que l’action télépsychique puisse jouer un rôle con­
sidérable dans la .vie affective, cela ne fait pas l’om­
bre d’un doute. Inconsciemment, ceux mêmes qui n’ont
aucune notion de l’influence en question l’exercent et
la subissent à leur insu. Leurs ardeurs convoitantes,
leurs avidités, aimantant vers eux diverses opportu­
nités. Eux-mêmes enregistrent, sans s’en rendre
compte, les ondes mentales émises par les individua­
lités qu’ils attirent.
En matière d’amour, l’attrait à prédominance
sexuelle peut se produire entre deux êtres dont les psy­
chismes

respectifs ne présentent qu’un minimum de
comptabilité. C’est pourquoi tant d’unions évoluent
vers l’antagonisme.
Considérons ce que devrait faire, dès l’âge où l’on
songe à la vie commune, une personne initiée à la télé-
psychie.
a) Partir du principe que celu’i ou celle qui incarne
son idéal existe en un point proche ou éloigné du
globe ;
b) Décider d’agir de manière à attirer cet être com­
plémentaire ;
c) Etablir une représentation mentale de celui-ci,
c’est-à-dire imaginer, avec précision, les caractéristi­
ques physiques, affectives et intellectuelles de l’être en
question ;
d) Effectuer chaque jour une séance de concentra­
tion consistant à se représenter le sujet que l’on veut
aimanter vers soi et à vouloir qu’il vienne à soi ;
(1) Voir du même auteur Psychologie de VAmour (Editions Dangles,
Paris).
210 l’influence a distance

e) Se refuser à agréer les avances de toute personne


qui ne soit pas rigoureusement conforme à la repré­
sentation correspondante au triple idéal envisagé ;
f) Savoir persister et attendre jusqu’à ce que satis­
faction pleine et entière soit obtenue.
La mise en pratique de cette méthode, déjà expéri­
mentée par un certain nombre d’adeptes, détermine
immanquablement l’abduction désirée. Cela s’expli­
que, si l’on tient compte des lois générales du synto­
nisme, telles que je les ai définies au chapitre III.
Etant donné que la plupart des gens ne viennent
que tardivement à l’étude des questions psychiques, les
problèmes qui se posent le plus fréquemment sont ceux
qui ont trait à l’indifférence, à l’inconstance, à l’insuc­
cès en amour.
Nous allons examiner tour à tour ces divers pro­
blèmes.
Au préalable, nous avons à faire justice d’un scru­
pule, certes louable mais infondé, dont on nous a sou­
vent fait part : « Influencer quelqu’un par l’action
télépsychique en vue de s’en faire aimer ou de le ra­
mener à soi semble à certains une sorte d’abus, une
tentative d’inféodation, d’emprise insoucieuse du libre
arbitre du sujet.
Cependant, nul n’hésite à user des ressources les plus
variées de la suggestion verbale pour arriver à ses
fins.
Or, la suggestion mentale, l’influence télépsychique
est aussi naturelle, aussi inséparable de la vie que la
suggestion verbale — disons que la parole et ses pro­
priétés persuasives. — Que vous en ayez ou non l'in­
tention, vous influez sur toute personne dès l’instant
même où vous pensez à elle avec le désir d’en obtenir
quoi que ce soit.
Si vous possédez une certaine virtuosité persuasive,
vous n’hésitez pas à vous en servir. Il n’y a pas lieu
LA TÉLÉPSYCHIE ET L’AMOUR 211

d’hésiter davantage à utiliser l’influence invisible qui


émane de vous, lorsque, seul, dans le silence et le re­
cueillement, vous pratiquez la concentration de la
pensée.

Comment éveiller F Amour.

Le désir, le rut, le simple besoin animal ne consti­


tue qu'un des éléments de l’amour. Il postule, tout au
plus, un type morphologique, non pas un être en par­
ticulier. Ceux qui ont observé, par introspection, le
processus de la naissance de l’amour, savent que son
premier symptôme réside dans le fait de ressentir un
contentement très vif en présence de l’être aimé (1).
En utilisant les ressources de la télépsychie, il y a
lieu de s’inspirer du processus en question, c’est-à-dire
de commencer par associer l’idée de présence à l’idée
de contentement. Telle est la première étape à ac­
complir.
Si vous voulez vous faire aimer, visez avant tout à
suggérer au sujet que votre présence détermine en lui
un état agréable.
Après quinze ou vingt séances, passez à la deuxième
étape qui consiste à fixer dans l’inconscient du sujet
une impulsion à rechercher le contentement qu’il
éprouve en votre compagnie, donc à venir à vous.
Quand vous constatez qu’il s’ingénie à tirer parti de
toute occasion de se trouver auprès de vous, abordez
la troisième étape : suggérez-lui qu’il ressent le besoin
de vous voir le plus souvent possible et qu’il s’ennuie
à tout moment où vous n’êtes pas auprès de lui.
En persistant dans ce sens, un moment vient où
prédomine au premier plan de la vie intérieure du
(1) Ibsen fait dire à Peer Gynt : « Est-ce une fête que de te voir » ?
14
212 l’influence a distande

sujet, cette notion que l’harmonie de son existence né­


cessite votre perpétuelle compagnie.
Il va de soi, que dès lors, la partie est gagnée.
Pour mettre en pratique ce qui précède, il faut, à
la fois être résolu et maître de soi. En d’autres termes,
il faut être fermement déterminé à obtenir le résultat
et assez exercé à diriger ses pensées et ses impul­
sions, pour s’abstenir, entre l’heure quotidienne de
l’émission télépsychique et le lendemain de songer au
sujet ou d’aller à lui.

Pour prévenir !a dissociation.

Tout est en « devenir ». Chacun de nous évolue. Les


électivités que nous ressentons aujourd’hui intensé­
ment se modifient peu à peu, s’atténuent progressive­
ment, pour disparaître à échéance plus ou moins lon­
gue. L’accoutumance émousse de jour en jour les con­
tentements les plus vifs. D’autre part, certaines diver­
gences tout d’abord peu sensibles prennent, avec le
temps, tout leur relief.
C’est pourquoi l’amour, sauf exceptions fort rares et
dont rend compte un complémentarisme très harmo­
nieux, tend normalement vers l’indifférence ou vers
de graves antagonismes qui se résolvent en ruptures.
Bien qu’amplement vérifiées dans la vie sociale, ces
notions ne semblent pas familières à la plupart des
humains.
Une fois conclu l’accord liminaire, qui donc songe
aux lointains lendemains ? Qui doute de l’indéfinie con­
tinuité ?
Le mal resterait, somme toute, bénin si la désaffec­
tion finale survenait, de part et d’autre, au même mo­
ment, si son decrescendo suivait la même courbe des­
cendante. Mais, il arrive que l’un demeure très épris
alors que l’autre ne réagit plus.
LA TÉLÉPSYCHIE ET L’AMOUR 213

Ici encore, la télépsychie a son rôle à jouer, et avant


tout, un rôle préventif. Ce rôle est à base d’observation,
de psychologie et de vigilance.
Par l’observation et l’analyse caractérologique,
l’adepte des sciences psychiques peut définir et évaluer
les diverses composantes de l’individualité dont il en­
tend conserver l’amour, afin de penser et de diriger son
comportement de manière à maintenir l’harmonie pri­
mitive.
Il peut, en développant son « magnétisme person­
nel » (1) et en usant judicieusement de la suggestion
mentale, conserver et même intensifier son influence.
Inconsciemment et de propos délibéré, vous avez
suscité chez quelqu’un l’état psychique « amour ». Pré­
muni contre l’illusion, communément admise qu’une
fois créé, cet état va se perpétuer spontanément et in­
définiment, vous avez avantage à le considérer comme
instable par définition du fait même de l’instabilité des
causes qui l’ont engendré.
A vous d’en faire une création continue, c’est-à-dire :
a) d’entretenir en vous le courant de pensées, orienté
par le désir de plaire, qui, à l’origine, caractérisait
votre attitude mentale ;
b) de viser à maintenir l’intégrité de tous éléments
d’attrait qui ont déterminé l’amour dont vous souhai­
tez la continuation. Ces éléments, les uns morphologi­
ques, les autres caractérologiques, psychiques, cultivez-
en le relief, l’harmonie ou l’intensité ;
c) de tenir pratiquement compte des lois du magné­
tisme personnel : de cette influence procède le charme
dans son acception la plus profonde, la plus intégrale ;
d) de recourir régulièrement à la concentration irra­
diante, autrement dit de la suggestion mentale.

(1) Le chapitre II donne à cet effet toutes les indications nécessaires.


214 l’influence a distance

La mise en pratique de ces indications nécessite l’ha­


bitude d’un comportement constamment réfléchi, la
prédominance de la pensée délibérée sur l’imagina­
tion, l’impulsivité et le laisser-aller.
De cette aptitude à gouverner judicieusement et
avec continuité sa propre pensée dépend la possibilité
le conserver non pas uniquement l’amour, mais plus
généralement la sympathie, la considération, la con­
fiance, l’amitié et toutes les formes de l’affection.

L’importance d’une réaction précoce.


Les premiers signes de désaffection échappent rare­
ment à un esprit attentif — ou du moins sensitif.
Une réaction entreprise dès ces premières manifes­
tations a des effets plus rapides et plus sûrs qu’un
effort tardif. Comment procéder ? Principalement par
une série de séances d’action mentale quotidiennes ou
bi-quotidiennes, accomplies à des moments où l’on
puisse s’isoler et où l’on soit dans un état de tension
psychologique maximum. Subsidiairement, il convient
d’observer certaines règles, en vue de ne pas créer, de
ne pas accentuer l’indifférence ou la dysharmonie dont
on a cru observer les symptômes. L’impassibilité exté­
rieure, l’abstention absolue de toute observation, cri­
tique ou revendication s’imposent en premier lieu.
Toute parole maladroite ou désagréable ne peut que
diminuer la réceptivité. C'est exclusivement par la
voie inter-psychique quil faut agir, sans que le sujet,
alerté par quelque notification verbale, puisse se dou­
ter soit de la clairvoyance avec laquelle on a détecté
ce qui se passe en lui, soit du fait qu’il est l’objet de
suggestions mentales.
En surmontant son impulsivité, son expansivité, sa
tendance à exposer ce qu’il ressent, à trahir le secret
de sa vie intérieure, l’adepte de la culture psychique
LA TÉLÉPSYCHIE ET L’AMOUR 215

condense en lui-même un potentiel énergétique, dont


la projection sous forme télépsychique affectera plus
puissamment le sujet que toutes les tentatives décla­
matoires.
Indirectement, le maintien d’un masque d’impertur­
babilité, le souci de rester agréable, de garder « le sou­
rire », de ne contrarier en rien le sujet et de lui mani­
fester opportunément de la prévenance ou de la solli­
citude contribuent à l’impressionner utilement : cette
tactique augmente sa suggestibilité.
Elle « endort » pour ainsi dire son subconscient, le
quel enregistre alors au maximum vos suggestions
mentales.
Les vertus cardinales du praticien de l’influence télé­
psychique résident en une patience inaltérable et en
une opiniâtreté inflexible.

Les rivalités.

L’effort nécessaire à l’exécution quotidienne d’une


séance d’émission telle que définie au Livre I, chapitre
III, requiert toutes les ressources énergétiques d’un
être normal. Ce serait donc disperser et gaspiller ses
forces mentales que de tenter d’influencer deux per­
sonnes à la fois. Je ne connais pas, je n’ai jamais connu
d’expérimentateur capable d’accomplir deux interven­
tions télépsychiques dans le même espace de temps.
C’est pourquoi je mets en garde ceux qui me suivent
contre la tentation d’assumer, en cas de rivalité, une
tâche outrepassant leurs moyens, autrement dit d’es­
sayer d’agir et sur la personne qui les intéresse et sur
celle avec laquelle ils se trouvent en compétition.
Les lecteur connaît déjà la règle des vingt-deux heu­
res : afin de prévenir l’éparpillement inséparable d’une
perpétuelle rumination, il convient, dès que l’on entre­
prend de mettre à exécution les procédés du chapitre
216 l’influence a distance

III, de régler ses occupations de manière à cesser de


penser vingt-deux heures sur vingt-quatre, au sujet sur
lequel on étend son emprise, les deux autres heures
étant affectées à la séance d’émission. Ainsi l’on récu­
père et l’on accumule ses énergies psycho-nerveuses et
l’on se retrouve, régulièrement, en haute tension.
Corollaires de cette règle : en cas de rivalité, dé­
tourner absolument sa pensée de la tierce personne :
l’ignorer pour ainsi dire et concentrer toutes ses res­
sources vers un seul objectif : l’individualité dont on
veut obtenir, conserver ou déterminer à nouveau
l’amour.
Si vous portez à un certain degré de puissance votre
propre attract, le sujet se détournera spontanément de
toute autre personne dès qu’il se sentira plus forte­
ment attiré vers vous que par celle-ci.

Après rupture.

Un examen attentif, réparti sur un certain nombre


d’heures médiatives, permet d’inventorier les causes
déterminantes de la rupture, d’évaluer leur impor­
tance, leur origine et d’apprécier, s’il y a lieu ou non,
d’envisager le fait accompli comme définitif, s’il sem­
ble opportun d’entreprendre une tentative en vue d’in­
fluencer le sujet. Cet examen exige un sérieux effort
de réflexion objective. A la base de certains désac­
cords, il y a, en effet, des incompatibilités très profon­
des, disons même : incoercibles. En d’autres cas, les
déterminants sont plus circonstantiels qu’essentiels. Il
importe de noter ici que la première condition pour
réussir à ramener quelqu’un à soi est la décision, non
pas fugace, mais inébranlable de s’y employer. Une
telle décision se forge dans la retraite, la concentra­
tion mentale et l’analyse méticuleuse du cas.
Une fois la décision d’agir bien arrêtée, on passera
LA TÉLÉPSYCHIE ET L’AMOUR 217

à l’étude du plan d’action, tel que défini Livre I, cha­


pitre III. Ainsi que je l’ai dit page 112, il n’y a pas
de résultats à la fois immédiats et importants en télé­
psychie. C’est la répétition qui fait la force de la sug­
gestion et l’assiduité qui confère la facilité.
Ce à quoi il faut viser, c’est à modifier insensible­
ment, graduellement, les dispositions intérieures du
sujet ; il serait présomptueux de suggérer des revire­
ments instantanés. En général, quatre à six mois de
travail quotidien sont nécessaires pour imprégner,
pour saturer un psychisme au point d’y stabiliser la
prédominance des sentiments auxquels on désire l’in­
féoder.
Une détermination opiniâtre, un plan judicieuse­
ment établi et une ponctualité irréprochable quant
aux séances d’émission ne sauraient demeurer sans
efficacité. L’exposant — au sens algébrique — de ces
trois facteurs, l’élément qui peut en élever la puis­
sance à un degré invraisemblable et cependant réel,
c’est l'ardeur convoitante du résultat. En ce qui pré­
cède, j’ai déjà noté l’importance de l’ardeur convoi­
tante. J’y reviens pour montrer ses rapports avec l’opi­
niâtre détermination et avec le plan prémédité, insé­
parables d’une influence télépsychique intense et mé­
thodique.
L’ardeur convoitante implique la permanence du
résultat visé au premier plan des préoccupations de
l’opérateur ; ce dernier subordonne alors à l’utilisa­
tion des procédés télépsychiques tout le détail de son
comportement. En particulier, il adopte, sans se lais­
ser influencer par quelque considération que ce soit
un modus vivendi tel que l’élaboration et la conden­
sation de ses énergies psycho-nerveuses (1) s’effectuent
sans entrave, dans les conditions optima ; subsidiai-

(1) Voir chapitre III (Livre I).


218 l’influence a distance

rement, il élimine de son existence tout ce qui occa­


sionne directement ou indirectement la dépression de
ses forces psychiques.
Quand, donc, nous disons de tracer un plan, nous
entendons d’une part celui de l’action télépsychique
proprement dit avec ses étapes successives, mais aussi,
d’autre part, celui de chaque journée informé par le
principe de tout subordonner à la réalisation des con­
ditions dans lesquelles il est indispensable de se trou­
ver pour mettre à profit toute la puissance mentale
que l’on est à même d’élaborer et de projeter utile­
ment.
Voici dans ce sens quelques indications élémen­
taires :
a) Réglage physiologique : favoriser par un régime
bien conçu la durée et la profondeur du sommeil.
C’est au cours du sommeil que les accumulateurs psy­
cho-nerveux se rechargent ;
b) Réglage de l’activité : une série d’occupations
bien coordonnées et susceptibles de fixer tour à tour
l’attention, si possible de captiver celle-ci ;
c) Réglage social : laisser ignorer ce qui vous pré­
occupe. Ne pas se confier ni s’épancher. Parler peu.
Ecouter ce que l’on ne peut se dispenser d’entendre
en tâchant d’y prendre intérêt. S’écarter de toute réu­
nion composée de gens légers, verbeux ou dissipés.
Eviter le jeu, et plus généralement, tout ce qui active
l’émotivité. User exclusivement de délassements pai­
sibles.
L’observance persévérante de ces principes de tac­
tique psychique semble d’autant plus accessible que
l’ardeur convoitante a plus d’intensité. L’expérimen­
tateur, animé d’un tel élan intérieur, se complaît,
même, à cet entraînement grâce auquel ses possibilités
d’influence se trouvent, de jour en jour, augmentées.
A son désarroi initial, une réorganisation harmonieuse
LA TÉLÉPSYCHIE ET L'AMOUR 219
se substitue, d’ailleurs. Après quelques semaines d’ef­
forts, lorsque les premiers résultats apparaissent, l’ac­
tion se poursuit d’autant plus favorablement que l'in­
téressé se sent désormais sûr de lui.
La conception du plan à suivre pour les séances
d’émission télépsychique nécessite l’observance de
directives inspirées du principe énoncé plus haut :
il n’y a pas de résultats importants et immédiats. Les
vagues successives de suggestion mentale affleurent,
imprègnent peu à peu le subconscient du sujet et pré­
dominent après un certain nombre de séances.
Pour aider ceux qui me lisent à bien concevoir les
diverses étapes de leur action mentale, voici ce que
je conseille :
a) Pendant quelques semaines, viser exclusivement
à « maintenir le contact ». Se représenter, non seule­
ment l’image visible du sujet, mais les éléments de son
caractère, ses manifestations, ses goûts, ses tendances.
On crée ainsi le syntonisme dont il a été question dans
un précédent chapitre ;
b) Deuxième étape : déterminer par les représenta­
tions convenables la reviviscence dans le cours des
pensées du sujet, dans ses rêveries, des souvenirs de la
phase harmonieuse des relations que l’on a eues avec
lui ;
c) Troisième étape : suggérer au sujet l’impulsion
de se manifester, d’écrire, de téléphoner, de venir, etc. ;
d) Quatrième étape : l’opérateur ayant clairement
défini toutes les caractéristiques de sa personnalité qui
inspirèrent jadis au sujet de l’affection ou l’amour
qu’il s’agit de déterminer à nouveau, suggérera la revi­
viscence des impressions premières, à un degré accru,
obsédant ;
c) Enfin, adopter le mode impérieux pour détermi­
ner la reprise d’une fréquentation.
220 l’influence a distance

Ce dernier résultat obtenu, il suffit de persister pour


fixer à nouveau l’état psychique du sujet.

L’avantage d’être exercé.

A l’époque déjà lointaine (1904) où j’ouvris pour la


première fois un livre analogue à ceux que j’écrivis
plus tard, le fait de s’intéresser aux sciences psychi­
ques semblait témoigner de penchants singuliers. Quel­
ques rares adeptes venaient dans le plus grand secret
lire dans l’unique bibliothèque spécialisée de Paris et
assister aux leçons du célèbre Hector Durville ou du
docteur Encausse. Depuis, la vulgarisation des diver­
ses branches du psychisme expérimental et des ques­
tions connexes est devenue telle que personne n’en
ignore les données, au moins élémentaires, ni les res­
sources. Cependant, les praticiens, j’entends ceux qui,
par un entraînement méthodique, acquièrent la vir­
tuosité nécessaire pour tirer personnellement parti des
moyens d’influence personnelle que représentent la
suggestion, l’hypnotisme, le magnétisme et de la télé­
psychie restent peu nombreux.
Dans la plupart des cas, l’attention se trouve appelée
sur ces questions au moment où se produit une éven­
tualité en présence de laquelle on conçoit l’intérêt de
se trouver en possession de cette sûreté d’utilisation des
procédés que seule une application assidue permet
d’acquérir.
L’homme ou la femme, désireux de mettre pleine­
ment à profit les possibilités qu’offrent à chacun les
sciences psychiques, a intérêt à travailler en vue de
devenir pratiquement capable d’influer, invisiblement
et de propos délibéré, sur toute personne dont la pen­
sée et le comportement lui importent.
Pour cela, il est judicieux de commencer par le
commencement, de prendre tout le temps nécessaire et
LA TÉLÉPSYCHIE ET L’AMOUR 221

de ne pas brûler les étapes. Avant d’extraire des raci­


nes carrées, nous avons dû tous apprendre les quatre
règles et l’on n’aborde la trigonométrie qu’après avoir
pratiqué l’algèbre élémentaire.
Certains adeptes des sciences psychiques, bien ins­
pirés ou bien orientés, procèdent d’une manière analo­
gue et suivent le programme que voici :
a) Pratique d’une auto-culture individuelle ayant
pour objet :
1° de fortifier sa volonté dans toutes ses manifesta­
tions : fermeté, ténacité, empire sur soi-même, con­
fiance en soi, assurance ; de devenir capable d’exécu­
ter ses décisions, de se conformer à ses résolutions, de
réaliser ses projets ;
2° d’éliminer les éléments défectueux de son carac­
tère : émotivité excessive, impulsivité, instabilité, irré­
solution, timidité, mauvaises habitudes, etc., et de se
former ainsi une disposition mentale énergique indé­
pendante, imperturbable, inaccessible aux influences
déprimantes ;
3° de cultiver la souplesse et la subtilité intellec­
tuelles, la lucidité d’esprit, l’attention soutenue, la mé­
moire, l’initiative méthodique et l’ingéniosité, de ma­
nière que le travail cérébral lui devienne facile
et que ses aptitudes naturelles atteignent un ni­
veau suffisant pour lui assurer le maximum possible
de succès ;
4° d’acquérir le calme, la sûreté de parole, l’habileté
persuasive et l’autorité qui sont à la base de l’influence
personnelle dans la vie et dans les affaires.
b) Entraînement de quelques semaines à la produc­
tion des phénomènes courants de l’hypnotisme expéri­
mental. Cet entraînement représente pour le télépsy-
chiste ce que les deux heures quotidiennes de gammes
représentent pour le pianiste.
222 l’influence a distance

c) Utilisation habituelle, dans la vie ordinaire, de


la suggestion mentale.
Ainsi, lorsque surgit une difficulté que seule peut
résoudre l’influence personnelle invisible, celle dont
traite ce livre, on se trouve en état d’y faire face avec
des moyens pleinement développés.
TABLE DES MATIÈRES

LIVRE 8. — Cours Élémentaire

Introduction au livre I ...........................................................

PREMIÈRE PARTIE

Théorie et Procédés généraux

I. Introduction à
Chacun peut opérer ou subir la communication et Pim-
position de la pensée. — L’influence psychique est une
subséquence constante de l'activité affective et céré­
brale. — On peut l'utiliser délibérément. — Le prin­
cipal objet de ce livre est d'indiquer comment. — Les
travaux antérieurs....................................................................... 13
IL — Ce qu'il faut avoir compris avant d'expérimenter. —
Les analogies de la T. S. F. et de la télépsychie. — L’ac­
cord radiophonique et l'accord mental. — Le syntonisme
et la réceptivité spontanée. — La supériorité du ton de
mouvement et l'imposition de la pensée. — Nécessité d'un
état spécial et de plusieurs émissions prolongées. — L'im­
prégnation graduellement modificatrice. — Lois des ac­
tions mentales à distance et commentaires. — De la
netteté des images suggérées dépend la conformité des
effets à l'intention. — La vigueur propulsive de celle-ci
proportionnelle à l'avidité qu'on éprouve du résultat. —
L'intention efficace par elle-même. — Psychologie d'une
expérience classique. — La détermination périodique de
l'état efficient. — Nécessité d'une élaboration et d’une
condensation systématique de l'énergie psychique ........... 19
III. — Instructions pratiques générales pour influencer
quelqu'un à son insu. — Étude du plan d’action. —
Édification des imaees mentales. — Elaboration. — Con-
densation. — Disponibilisation de l'énergie psychique.
— Le rapport. — L'émission. — La récupération. —
La détente cérébrale ................................................................ 27
224 l’influence a distance

DEUXIÈME PARTIE
Production de phénomènes si r des sujets d’expériences
IV. — Les communications concertées. — Conditions d’ex­
périmentation : A. L’émetteur. — B. Le percipient. —
Le rapport. — Les images. — Les impressions audi­
tives, tactiles, gustatives et olfactives. — Les impulsions
musculaires. — Les communications émotives. — Les
transmissions littérales............................................................... 43
V. — La suggestion mentale sur des sujets d'expériences
éveillés ou préalablement hypnotisés. — Entraînement
de sujets. — A l’état de veille : Le Cumberlandisme,
sa technique, son rôle éducatif de la percipience. — La
suggestion mentale sans contact. — A l’état d’hypnose :
Conception vraie des états seconds. — Comment la sug­
gestion favorise la percipience. — Indications pratiques . . 51
VI. — L'Hypnose uniquement par action mentale. — A.
Sur un sujet ayant été plusieurs fois hypnotisé par les
moyens ordinaires. — B. Sur une personne n’ayant pas
été l’objet d’hypnotisations préalables................................... 60
TROISIÈME PARTIE
Adaptations diverses
VII. — La communication télépsychique des sentiments. —
Considérations générales. — Le Dynamisme passionnel.
— L’arrêt de la dispersion de ce dynamisme. — Le plan
— Les notes de disponibilisation. — Le rapport. — Dé­
tail de l’émission journalière ................................................... 67
VIII. — Le traitement mental des maladies. — La base
sentimentale de tout traitement mental. — Effets curatifs
de l’action psychique. — Choix de l’opérateur. — La
chaîne de volontés. — Directives générales. — Durée
de l’action journalière. — Les maladies chroniques. —
Les maladies psychiques. — Influence inconsciemment
fâcheuse de certains entourages. — La pensée peut tuer.
— Importance pour le malade d’un moral bienveillant. 76
IX. — Pour combattre les mauvaises influences. — Trou­
bles et déboires attribués à l’influence malveillante d’au­
trui. — Persécutés et mythomanes. — Pourquoi la haine
engendre malaisément des effets précis. — Comment elle
peut agir. — Une loi générale. — Comment se défen­
dre ? — Comment défendre autrui ?....................................... 81
X. — Pour modifier ou prévenir une détermination fâ­
cheuse. — Où la parole a échoué, la pensée peut triom-
TABLE DES MATIÈRES 225
pher. — Méditation préalable. — Le repos condensateur.
— La recherche et la notation des pensées les plus évoca­
trices. — L'émission. — Une seule séance suffit souvent.
— Applications diverses du même procédé. — Ayez con­
fiance en vous.............................................................................. 84
XI. — Pour préserver ou protéger quelqu'un. — L’inten­
tion rendue agissante. — La préservation du danger.
— Procédé. — Protection au cours d’une épreuve ou
d'une difficulté. — Applications diverses ............................. 87
XII. — Du dédoublement ou des possibilités analogues. —
Les faits. — Les théories. — Le Double. — Les formes-
pensées. — L'expérimentation. — Les adaptations.............. 90
XIII. — L'influence psychique dans la vie, le monde, les
affaires. — Le facteur télépsychique dans la trame des
destins. — L’universelle compétition. — L’ardeur convoi­
tante, ses effets. — L'action extérieure des dispositions
coutumières de l'homme. — Les aptitudes sans avidité et
l’avidité sans aptitudes. — La télépsychie et les affaires.
— Dilection et vigueur apparente. — Invisibles investis­
sements. — Heurts collectifs des volontés. — Le psy­
chisme dans la question sociale. — L’appréhension sté­
rile et l’appréhension utile. — Despotisme et servilité.
— L.es forts caractères et leur emprise. — Le travail
évertue efficacement la pensée. — L’Amour et la télé­
psychie. — Passions et sentiments. — Conclusion .............. 98

QUATRIÈME PARTIE

Indications complémentaires
XIV. — Contre-indications. Inconvénients. Ecueils.................... 114
XV. — Le développement des aptitudes â l'expérimentation
télépsychique.................................................................................. 116
XVI. — La télépsychie des empiriques . ....................................... 124
XVII. — Négateurs et détracteurs ............................................... \T1

LIVRE II. — Cours Supérieur

Introduction au livre II .........................................................


I. — Dispositions naturelles et dispositions acquises. —
Analysez votre condition psychique. — Un test. — Gou­
verner sa pensée. — Les sources de la pensée. — Bases
fondamentales de l’aptitude à la télépsychie délibérée. —
Le poste de commandement. — Conditions nécessaires à
toute intervention efficace......................................................... 137
226 l’influence a distance

IL — Le magnétisme personnel. — Son acception sim­


pliste et son essence réelle. — Causes de l’influence du
regard et de la parole. — Lois fondamentales du magné­
tisme personnel. — La loi d’intensité et celle de lucidité.
— La fermeté et l’ascendant. — La loi du qualitatif.
— Répercussions multiples ..................................................... 156
III. Le syntonisme. — Suggestion mentale et transmis­
sion de la pensée. — La difficulté. — Influence par
communication de pensée. — Rêverie et projection active.
— Substitution. — Technique hypnotique. — Le synto­
nisme avec des inconnus ......................................................... 174
IV. — L'action télépsychique médicatrice. — La mesure des
possibilités. — Considérations directives. — L’élément
objectif. — L’élément subjectif. — Principes à observer
au cours de chaque séance. — Les dispositions morales.
— Connaissances nécessaires................................................... 184
V. — La chaîne télépsychique. — Principes de la chaîne.
— Pratiques empiriques. — La chaîne délibérée. — Ob­
jectifs matériels. — Traitements physiques. — Traite­
ments moraux. — La contre-chaîne, réaction égale et
de sens contraire ........................................................................ 196
VI. — La télépsychie et l'amour. — Considérations géné-
raies. — Comment éveiller l’amour. — Pour prévenir
la dissociation. — L'importance d’une réaction précoce.
— Les rivalités, — Après rupture. — L’avantage
d’être exercé ............ 208

Photocomposé en Times de 11 et achevé d’imprimer le 1er mars 1974


par Joseph FLOCH, Maître-Imprimeur à Mayenne
N° 4937

Dépôt légal éditeur : N°.288

Droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour


tous pays.
Du même auteur, dans la même
collection :

• INITIATION A L'ART DE GUÉRIR


PAR LE MAGNÉTISME HUMAIN.
La vitalité se communique comme
la maladie.
Les propriétés thérapeutiques de cette irradiation
connue sous le nom de « Magnétisme » semblent
se manifester avec une extraordinaire intensité chez
certains individus. Médiocrement ou puissamment
doué, l'expérimentateur obtiendra le maximum de
résultats s'il s’initie à la technique précise et sûre
décrite dans cet ouvrage. Ce livre indique, point par
point, quels procédés il convient d'employer dans
chaque cas de maladie pour obtenir les résultats
désirés. C'est un véritable formulaire de médecine
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L'HYPNOTISME. Comment on de­
vient Hypnotiseur. Cours d'entraî­
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Devenir hypnotiseur, c'est acquérir au moyen de
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des personnes de tout âge et de toute condition,
l'aisance, la précision, le tact, la sûreté et l'autorité,
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Ce cours clair et précis, rigoureusement scien­
tifique, n'en reste pas moins à la portée de tous, et
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Cet ouvrage rigoureusement scientifique met à la
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cédés et les diverses possibilités du psychisme. On y
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fluence invisible : comment aug­
menter sa puissance et la diriger
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sources profondes du pouvoir personnel. Vous y
trouverez les indications nécessaires pour vérifier
expérimentalement, au moyen de procédés très
simples, immédiatement utilisables, le fait que vous
influez autour de vous, lequel fait, peut être considé­
rablement renforcé.
Dans la seconde partie, vous découvrirez le
secret de l'extériorisation du magnétisme personnel
dans la vie privée, sociale ou professionnelle. Vous
acquérerez ascendant, autorité et attractivité sur
tous.
La troisième partie vous apprendra l'art d'influer
psychiquement, d'une manière secrète et silencieux e,
sur qui que ce soit, de près comme de loin.
•r

L'iNFLUENCE A DÎSTANCE

Il existe un moyen sûr d'influer sur autrui, de loin


comme de près ; un moyen assez subtil pour demeurer
inaperçu, aussi profondément que l'on puisse.subir son
invisible action, à laquelle d'ailleurs, nul ne peut se sous­
traire.
Ce moyen n'est autre que la propriété communi­
cative, dominatrice et attractive de toute pensée émise
intensément.
Certains l'utilisent inconsciemment. D'autres la
• •

contestent sans se rendre compte qu'ils doivent l'ascen­


dant de leur personnalité à cette activité puissamment
irradiante, reflet d'une vigoureuse organisation psychique.
D'autres voudraient apprendre à user délibérément
de cette influence. C'est à eux que cet ouvrage, essen­
tiellement pratique, s'adresse.
Comme pour toute chose, chacun vient au monde
plus ou moins qualifié pour l'action à distance', mais
cet ouvrage s'est précisémment fixé le but de permettre
à ceux qui sont peu doués, de tirer de leurs aptitudes
actuelles, le maximum d’effets, et de les fortifier par
l'entraînement.
Un ouvrage unique sur la question, qui expose
d'une manière limpide les procédés permettant d'influer,
de près ou à distance, sur qui que ce soit, à son insu.

ISBN : 2-7033-0089-1

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