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J. sci. pharm. biol., Vol.14, n° 1 - 2013, pp. 10-21


© EDUCI 2013

ADIKO N.M. 1, 2, *, CRIBLAGE PHYTOCHIMIQUE DE PLANTES UTILISÉES EN


OKPEKON A.T. 3, OPHTALMOLOGIE TRADITIONNELLE, RÉPERTORIÉES
BONY F.N. 4, SUR LES MARCHÉS D’ABIDJAN
KOFFI K.K.V. 5,
KABLAN B.J. 1,
ASSI Y.J. 6,
AKE-ASSI L. 6,
CHAMPY P. 2

RÉSUMÉ
Une étude ethnobotanique a été réalisée oculaire et les pathologies évoquées sont
en Abidjan dans le but d’identifier les notamment les conjonctivites allergique
espèces végétales utilisées en ophtalmologie (Koko), virale (Apollo) et bactérienne. Un
traditionnelle. Cette enquête semi-dirigée criblage phytochimique a permis de mettre
menée auprès de 17 vendeuses de plantes en évidence la présence de tanins, de
médicinales des marchés d’Adjamé et flavonoïdes, de mucilages, de saponosides,
d’Abobo a permis de recenser 36 plantes de quinones, de terpénoïdes et d’alcaloïdes
appartenant à 26 familles botaniques avec dans les drogues issues de ces différentes
une prédominance des Fabaceae. Parmi espèces. La présence de ces groupes
ces espèces végétales, les plus couramment chimiques pourrait permettre de justifier
employées sont Ocimum gratissimum, leur emploi dans les soins traditionnels
Dissotis rotundifolia, Kalanchoe crenata oculaires.
et Desmodium adscendens. Les feuilles
Mots-clés : Enquête ethnobotanique,
constituent l’organe le plus employé (70 %).
Plantes médicinales, Conjonctivites,
Les décotés avec 55% représentent le mode
Criblage phytochimique, Marchés d’Abobo
de préparation le plus utilisé. Les soins sont
et d’Adjamé
administrés essentiellement par instillation

1 Laboratoire de Physiologie et de Pharmacologie, UFR Sciences Pharmaceutiques et Biologiques, Université


FHB, BP V 34 Abidjan, Côte d’Ivoire
2 Chimie des Substances Naturelles, CNRS UMR 8076 BioCIS, Faculté de Pharmacie, Université Paris-Sud
11, 92296 Châtenay-Malabry Cedex, France
3 Laboratoire de Chimie Organique Biologique, UFR Sciences des Structures de la Matière et Technologie,
Université FHB, 22 BP 582 Abidjan 22, Côte d’Ivoire
4 Laboratoire de Chimie Analytique, UFR des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques, Université FHB, BP
V 34 Abidjan, Côte d’Ivoire,
5 Département d’Ophtalmologie, UFR Sciences Médicales, Université ADO, BP V 18 Bouaké, Côte d’Ivoire
6 Centre National de Floristique, Université FHB,
BP V 34 Abidjan, Côte d’Ivoire
* Corresponding Author : Adiko Marcelline
Tel. + 225 08378843
Email : adikomarc@yahoo.fr

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ABSTRACT

An ethnobotanical study was conducted Care is primarily administered by eyedrop


in Abidjan in order to identify plant species and the symptoms mentioned including
used in traditional ophthalmology. A semi- allergic (Koko), viral (Apollo) and bacterial
structured survey conducted among 17 conjunctivitis. A phytochemical screening
vendors of medicinal plants in both markets allowed highlighting the presence of tannins,
Adjamé and Abobo has identified 36 plants flavonoids, mucilages, saponins, quinones,
belonging to 26 botanical families with a alkaloids and terpenoids in these plant
predominance of Fabaceae. Among the species. The presence of these chemical
plant species, the most commonly used were groups could be used to justify their use in
Ocimum gratissimum, Dissotis rotundifolia, traditional eye care.
Kalanchoe crenata and Desmodium
Key words : Ethnobotanical survey ;
adscendens. Leaves were the principal
Medicinal plants ; Conjunctivitis, Phytochemical
organ used (70 %). Decoctions represented
screening, Abobo and Adjamé markets
with 55% the common method of preparation.

INTRODUCTION
Les plantes médicinales demeurent le toxiques. De nombreuses publications
principal arsenal thérapeutique accessible aux ont rapporté les accidents oculaires liés à
populations africaines. Selon l’OMS, environ leur usage. Certains auteurs traitent ces
80 % des Africains se soignent en ayant soins de pratiques oculaires nocives [Meda
recours aux vertus des plantes médicinales 2005, Mwanza 2001]. Pour d’autres, il y a
[OMS 2002]. Cette situation s’observe aussi une surestimation des complications du
bien en zones rurales qu’en zones urbaines. fait de l’absence d’études rapportant des
L’utilisation des plantes médicinales se fait de résultats positifs du traitement traditionnel
manière empirique. Les populations savent des affections oculaires [Goetz 2006,
en général l’effet thérapeutique attendu des Géguénon 1995]. Selon les travaux de
plantes sur l’organisme. Par contre, elles en Goetz, les plantes à huile essentielle ayant
ignorent souvent les mécanismes moléculaires une activité antimicrobienne, et celles
et cellulaires. contenant des flavonoïdes, des tanins
et des mucilages peuvent être utilisées
Concernant la phytothérapie en
comme désinfectant externe oculaire, dans
ophtalmologie, il existe très peu de données
une formulation galénique adéquate.
en Afrique faisant état de l’utilisation des
plantes dans les affections oculaires. En Bien qu’il existe en Côte d’Ivoire des soins
effet, celles existantes se rapportent le plus traditionnels oculaires, très peu d’études
souvent au recensement ethnomédicinal décrivent les propriétés des plantes utilisées
d’espèces végétales [Kheraro 1950, Bouquet à cet effet. C’est ainsi que notre objectif a
1973, Adjanohoun 1989]. été de réaliser une enquête ethnobotanique
dans les marchés d’Abidjan dans le souci
Les soins traditionnels oculaires
de recenser les plantes utilisées dans le
pratiqués sur les populations ne sont pas
traitement traditionnel oculaire et de mettre
toujours sans gravité, principalement ceux
en évidence les substances chimiques
concernant la chirurgie traditionnelle de
qu’elles contiennent.
la cataracte et l’emploi d’espèces végétales

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MATÉRIEL ET MÉTHODES

1- PRÉSENTATION DU MILIEU D’ÉTUDE de type Alpha 1/2 (Christ). L’évaporation


à sec des extraits méthanolique et
Les investigations ethnobotaniques
chlorométhylénique a été réalisée à l’aide
ont été menées dans le District d’Abidjan,
d’un Rotavapor de type Büchi R 114.
particulièrement dans les communes
Les chromatographies sur couche mince
d’Abobo et d’Adjamé. Le District
(CCM) ont été réalisées sur plaque de silice
autonome d’Abidjan constitue le pôle de
Alufolien Kiesselgel 60F254 (Merck).
développement économique de la Côte
d’Ivoire. Il regroupe dix communes et trois
3- MÉTHODES
sous-préfectures, et couvre une superficie
de 422 km2 ; sa population est comprise 3.1- Enquête ethnobotanique
entre 5 et 6 millions d’habitants.
Il s’agit d’une étude transversale
L’identification des plantes à visée qualitative effectuée depuis janvier 2008
oculaire a été effectuée sur les marchés jusqu’à octobre 2009, comprenant l’enquête
d’Abobo et d’Adjamé qui sont les sites ethnobotanique, la récolte et l’identification
les plus fournis en espèces végétales des plantes utilisées dans le traitement
médicinales du fait du développement du des ophtalmies sur les marchés d’Abobo
transport ferroviaire et de la présence de et d’Adjamé. Concernant les investigations
grandes gares routières. sur les marchés, nous avons privilégié le
contact direct avec 17 vendeuses de plantes
2- MATÉRIEL
médicinales afin d’identifier les espèces de
Les différents organes utilisés pour le leur étal qu’elles proposaient à leurs clients
criblage sont issus des plantes récoltées en cas d’infection oculaire. Ainsi, notre travail
suite à l’enquête ethnobotanique. La plus de sélection a été défini par le caractère
part des végétaux ont été récoltées dans infectieux des maladies oculaires décrites
les régions de Toumodi et de M’bahiakro. par nos informatrices selon les thèmes
La région de Toumodi, appelée le V-baoulé, suivants : «yeux rouges, yeux gonflés, yeux
est une zone présentant une richesse collés, yeux qui grattent, yeux qui coulent,
floristique remarquable ; on y retrouve koko et apollo». Les critères d’exclusion ont
aussi bien des végétaux des régions été le caractère non infectieux des maladies
forestières que ceux des zones de savanes. oculaires et celles qui ont un traitement par
Les plantes herbacées ont été cueillies voie d’administration oculaire : «yeux jaunes,
dans la savane herbeuse de Moossou où yeux qui tournent, yeux blancs, yeux qui
la végétation est composée de mangroves, voient les esprits (sorcellerie, envoutement)».
de forêts marécageuses, de cocoteraies,
et de savanes herbeuses. Les organes 3.2- Préparations des extraits
échantillonnés ont été séchés au laboratoire Les décoctés aqueux ont été préparés
à une température d’environ 27 oC pendant à partir de 100 g de poudre d’organe
un mois, et pulvérisés dans un broyeur bouillis dans 1000 ml d’eau distillée
mécanique de type SM 100 (Retsech, pendant 15 mn. Les décoctions obtenues,
France). Pour la préparation des extraits, refroidies, ont été filtrées, congelées puis
les poudres de plantes obtenues ont été lyophilisées. Les macérés méthanolique
pesées à l’aide d’une balance analytique et chlorométhylénique ont été également
de type AG 204 Delta Range (METTLER obtenus à partir de 100 g de poudre de
TOLEDO). La lyophilisation des extraits chaque organe placés sous agitation
aqueux a été effectuée avec un appareil mécanique dans 1000 ml de solvant,

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pendant 24 heures à la température du de Borntraëger après alcalinisation du


laboratoire. Concernant l’extraction des décocté par quelques gouttes de lessive
alcaloïdes, la poudre d’organe (10 g), de soude. La mise en évidence des stérols
alcalinisée avec quelques gouttes de NaOH et autres terpènes a été effectuée sur
(10 %, m/v), a été extraite par 100 ml de l’extrait sec chlorométhylénique par ajout
dichlorométhane. La phase organique a été d’anhydride acétique et d’acide sulfurique
ensuite épuisée par une solution d’acide pur. La présence de stérols ou de terpènes
sulfurique (5 %, v/v). Les alcaloïdes ont était marquée par une coloration mauve
été purifiés, après alcalinisation de la virant au vert. L’apparition d’une colonne
solution acide et extraction de celle-ci avec de mousse d’environ 1 cm de hauteur et
le dichlorométhane. persistant pendant au moins 15 mn, après
agitation du décocté dans un tube à essai,
3.3- Essais de caractérisation indique la présence de saponosides. La
présence de mucilages a été recherchée par
Les essais de caractérisation, réalisés
l’ajout d’éthanol absolu dans les décoctés
selon les méthodes décrites [Békro 2007],
provoquant des précipités floconneux. Les
ont été faits dans le but de rechercher des
alcaloïdes, sous forme de sels, ont été révélés
quinones, des saponosides, des mucilages,
par le réactif de Draggendorff provoquant
des terpénoïdes et stéroïdes, des alcaloïdes
l’apparition d’un précipité orangé.
et des composés phénoliques notamment
les tanins, les flavonoïdes et autres phénols. La confirmation de la présence des
groupes chimiques a été effectuée par
La présence de tanins a été mise en
CCM. En général, les mêmes réactifs de
évidence par l’addition de quelques gouttes
caractérisation ont été employés comme
de chlorure ferrique (FeCl3) à 2% (m/v) qui
révélateurs. Par ailleurs, le Fast Blue B
conduit à des colorations bleuâtre, bleu,
(FBB) a été également utilisé, donnant
noir intense ou brun. Les flavonoïdes
des colorations orangé à rouge pour les
ont été déterminés par la réaction à la
phénols. Pour les terpénoïdes et stéroïdes,
cyanidine, avec des colorations rouge,
la vanilline sulfurique a été employée.
rouge violacée, orangée ou rose. On
Elle donne une plaque polychrome après
obtient avec les quinones une coloration
chauffage à 100 °C au pistolet chauffant.
allant du rouge au violet avec la réaction

RÉSULTATS
1- ENQUÊTE ETHNOBOTANIQUE rotundifolia (11 fois), Kalanchoe crenata
(8 fois), Desmodium adscendens (5
Les plantes inventoriées (36 espèces)
fois), Combretum paniculatum, Manotes
sont reportées dans le tableau I qui présente
longiflora, Adenia lobata et Phyllanthus
les espèces en fonction de la famille
muelleranus (4 fois pour chacune de
botanique, des noms vernaculaires, de la
ces quatre espèces) (Tableau I). On note
fréquence de citation par les vendeuses,
également que les feuilles sont l’organe
des organes utilisés, et des modes de
le plus employé. En effet, les feuilles
préparation, d’emploi et d’indications. Les
représentent 74 % des organes servant
lieux de récolte et les numéros d’herbier y
à la préparation des soins. Les décotés
ont également été mentionnés.
avec 55 %, représentent le mode de
Les informations obtenues indiquent préparation le plus utilisé, ensuite viennent
que les plantes les plus employées, de les jus (36 %). Les différentes parties des
par la fréquence de citations, sont : végétaux préparées sous formes de décoctés,
Ocimum gratissimum (14 fois), Dissotis de macérés ou de jus, sont employées en

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instillation, en bain des yeux, parfois en 40 ans et sont toutes analphabètes. Elles
lavage du visage. Les applications se font 2 appartiennent principalement aux ethnies
à 3 fois par jour, surtout le matin et le soir. Malinké ou Dioula (9), Baoulé (4), Sénoufo
Les doses des plantes commercialisées ne (2), Lobi (1) et Moré (1). Les femmes Malinké
sont pas standardisées ; c’est en général la et Baoulé détiennent majoritairement ce
botte des différents organes proposée par les commerce si bien que la connaissance des
vendeuses qui sert de dose. Les préparations noms vernaculaires des espèces végétales
sont réalisées dans des canaris en terre cuite. dans ces deux langues est essentielle pour
Les préparations sont renouvelées environ les identifier et s’en procurer.
une fois par semaine. Les jus sont élaborés
généralement à partir des feuilles fraîches 2- TRI PHYTOCHIMIQUE
passées à feu doux et froissées ; l’extrait
Les résultats du criblage phytochimique
obtenu est instillé directement en gouttes
sont transcrits dans le tableau II. La
dans les yeux et renouvelé chaque jour.
figure indique la répartition des groupes
Concernant les indications, les affections
chimiques dans les extraits. Tous les
oculaires citées sont : les rougeurs des yeux,
extraits contiennent des terpénoïdes et
les taches blanches sur la cornée ou taies
des stérols. Les tanins, les flavonoïdes, les
cornéennes, l’Apollo et le Koko.
quinones, les saponosides et les mucilages
La commercialisation des plantes sont présents dans 27, 26, 13, 10 et 4
médicinales sur les marchés est une activité extraits, respectivement. Seules les écorces
essentiellement féminine. Les femmes de Zanthoxylum zanthoxyloïdes ont montré
rencontrées ont une moyenne d’âge de la présence d’alcaloïdes.

45
40
35
nombre d'extraits

30
25
20
15
10
5
0

Figure : Répartition des groupes chimiques dans les extraits

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Tableau I : Enquête ethnobotanique


Espèces Noms vernacu- Nombre Mode de prépara- Lieu de
Famille, espèce Organes Indications
(No herbier) laires de citations tion et Emploi récolte

Baoulé : Kotobla-
Alternanthera repens
mien Plante Décoction  Instilla- Ellinsué
Amaranthaceae Kuntze 1 Koko
Malinké : Dinminsi- entière tion ou lavage oculaire (Andé)
(ANM/16)
samara

Akyé : N’Gba-té
Spondias mombin L. Racine ; Décoction  Instilla-
Anarcardiaceae Baoulé : Troman- 2 Yeux rouges Aréhémou II
(ANM/17) Feuille tion oculaire
gna
Cussonia barteri Seem. Décoction  Lavage
Araliaceae Malinké : N’Gboto 1 Feuille Conjonctivite Toumodi
(ANM/18) du visage
Dioula : Iukou-
Acanthospermum hispi-
bassa Partie Décoction  Bain
dum DC. 2 Apollo Aréhémou II
Guéré : Sohon-ô aérienne oculaire
(ANM/19)
Asteraceae Gbahè
Struchium sparganophora
Jus  Instillation
(Linn.) Kuntze Akyé : Bé vê 1 Feuille Maux d’yeux Vitré II
oculaire
(ANM/07)
Akyé : Bétehoun
Heliotropium indicum L. Plante Jus / Décoction  Rougeur des
Boraginaceae Dioula : Non- 1 Yakassé-mé
(ANM/01) aérienne Instillation oculaire yeux
dingko
Buchholzia coriacea Engl Akyé : Mon Jus  Instillation
Capparaceae 1 Feuille Conjonctivite Yakassé-mé
(ANM/02) Oubi : Douhoutou oculaire
Combretum paniculatum
Akyé : Yatandza Décoction  Instilla-
Combretaceae Vent. 4 Feuille Koko Yakassé-mé
Guéré : Soui-manga tion oculaire
(ANM/03)
Baoulé : Wonsien,
Apollo ;
Cnestis ferruginea DC. Blakassa Jus  Instillation
1 Feuille Affection des Vitré II
(ANM/08) Dioula : Tangolo oculaire
Connaraceae paupières
sébé
Adjoukrou :
Manotes longiflora Bak. Jus  Instillation ou Rougeur des
Orkpéti 4 Feuille Abié
(ANM/04) lavage oculaire yeux
Akyé : Lorbiabaté
Kalanchoe crenata
Baoulé: Kpolembli Jus  Instillation Conjonctivite
Crassulaceae (Andrews) Haw. 8 Feuille Abié
Akyé : Togbo oculaire du nouveau-né
(ANM/05)

Scleria boivinii Steud. Akyé : Chietin Partie Décoction  Instilla- Taches cor-
Cyperaceae 1 Vitré II
(ANM/09) Guéré : Gnan aérienne tion oculaire néennes

Tetracera alnifolia Willd. Bété : Bimien Jus  Instillation


Dilleniaceae 1 Feuille Koko Toumodi
(ANM/20) Dioula : Noma oculaire

Hymenocardia acida Tul. Feuille Décoction  Instilla-


Euphorbiaceae Malinké : Tômônon 2 Conjonctivite M’ bahiakro
(ANM/21) Écorce tion oculaire

Baoulé : Alobogna;
Abrus precatorius L. Jus  Instillation
Malinké : Souka- 2 Feuille Apollo Abidjan
(ANM/14) oculaire
lobrou
Desmodium adscendens Akyé : Oun-mè- Décoction  Instil-
Plante
(Sw.) DC. pouan 5 lation Koko Vitré II
entière
(ANM/10) Guéré : Néné-djié ou lavage oculaire
Detarium microcarpum
Malinké : Tamani, Décoction  Bain
Guill. and Perr.b 1 Feuille Apollo M’ bahiakro
Tamaklo oculaire
(ANM/22)
Fabaceae
Detarium senegalensis Malinké : Tamani, Décoction  Bain Ferkessédou-
1 Feuille Apollo
JF Gmel.b (ANM/15) Tamaklo oculaire gou
Parkia biglobosa
Baoulé : Kpalè ; Jus  Instillation
(Jacq.) R.Br. ex G. Don 2 Feuille Conjonctivite Toumodi
Dioula : Néré oculaire
(ANM/23)
Piliostigma thonningii
Baoulé : Djambla
(Schumach.) Milne- Décoction  Instilla-
Malinké : Niama, 2 Feuille Koko Toumodi
Redh. tion ou lavage oculaire
Gnamon
(ANM/24 )

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Hoslundia opposita Vahl. Baoulé: Anomalié Décoction  Instilla-


1 Feuille Maux d’yeux Trontronou
(ANM/25) Oubi : Kouflahan tion ou lavage oculaire
Lamiaceae Baoulé : Aouloma-
Ocimum gratissimum L. Jus  Instillation
gnèrin 14 Feuille Koko Vitré II
(ANM/11) oculaire
Malinké :
Ceiba pentandra (L.)
Baoulé : Gnien Décoction  Instilla-
Gaertn. 2 Feuille Conjonctivite Toumodi
Malinké : tion ou lavage oculaire
(ANM/26)
Malvaceae Décoction  Bain
Hibiscus asper Hook.f. Malinké : Torida Partie Conjonctivite
1 du visage / Jus  Toumodi
(ANM/27) Sénoufo : Kaféli aérienne Corps étranger
Instillation oculaire

Dissotis rotundifolia (Sm.)


Akyé : Hindjimpè Plante Décoction  Instilla- Rougeur des
Melastomataceae Triana 11 Vitré II
Yacouba : Bloboudi entière tion ou lavage oculaire yeux
(ANM/12)

Antiaris toxicaria Lesch. Latex  Instillation


Bété : Tapa 1 Tige Koko Taabo
(ANM/28) oculaire

Moraceae Conjonctivite ;
Ficus exasperata Vahl Baoulé : Yenglé Décoction / Jus 
1 Feuille Taches sur la Toumodi
(ANM/29) Dioula : Niénié Instillation oculaire
cornée

Moringa oleifera Lam. Dioula Jus  Instillation


Moringaceae 1 Feuille Conjonctivite Grand Bassam
(ANM/13) baoulé oculaire
Baoulé : Aéreama
Adenia lobata (Jacq.) Engl. Tige ; Sève  Instillation
Passifloraceae Dioula : Hameli- 4 Conjonctivite Toumodi
(ANM/30) Feuille oculaire
gourou
Décoction / Macé-
ration  Instillation
Phyllanthus muel- Baoulé : Akona-
oculaire / Lavage du Azaguié/
Phyllantaceae leranus (Kuntze) Exell kodié 4 Feuille Koko
visage Taabo
(ANM/31) Dioula : Sounoum
Sève  Instillation
oculaire
Morinda lucida Benth. Baoulé : Kouahia Jus / Décoction 
1 Feuille Maux d’yeux Taabo
(ANM/32) Dioula : Namourna Lavage du visage
Rubiaceae Décoction  Lavage Conjonctivite
Nauclea latifolia Smith Dioula : Bati
Feuille oculaire / Bain du par crachat de Toumodi
(ANM/33) Akyé : Monleuh
visage serpent

Zanthoxylum zanthoxy- Baoulé : Tché Maux d’yeux


Écorce ; Jus / Décoction 
Rutaceae loides (Lam.) Zepernick kendjé ; Malinké : 2 par crachat de Toumodi
Feuille Bain du visage
et Timler (ANM/34) Wô serpent

Allophylus africanus Jus  Lavage des


Malinké : Gnan
P.Beauv. 1 Feuille yeux ou Maux d’yeux Toumodi
ngnaba
(ANM/35) Vapeur de l’infusion
Sapindaceae
Blighia sapida K.D.
Baoulé : Kaha Décoction  Lavage
Koenig 1 Feuille Conjonctivite Yakassé-mé
Dioula : Fihinzan des yeux
(ANM/06)
Vitellaria paradoxa C.F.
Baoulé : N’gouin Jus / Décoction 
Sapotaceae Gaertn. 1 Feuille Maux d’yeux M’ bahiakro
Dioula : Chié Lavage du visage
(ANM/36)

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Tableau II : Composition chimique qualitative des plantes récoltées


Sapo- Phé-
Muci-
Or- no- Flavonoïdes nols Tanins Quinones Terpénoïdes Alcaloïdes
Espèces lages
ganes sides (FBB)
Tube Tube Tube CCM Tube CCM Tube CCM Tube CCM Tube CCM
Abrus preca-
torius Fe 5 cm + + - - - - + + - -
Acanthos-
permum PA - - - - - - - + + - -
hispidum
Adenia lobata Ti - - + + - - + + - -
Adenia lobata Fe +/- - + ++ - - + + - -
Allophylus
africanus Fe + + + ++ - - + + - -
Alternanthera
repens PE 3 cm - - - - - - + + - -
Antiaris
toxicaria Fe +/- + + + + - - + + - -
Blighia sapida Fe - - + - - - + + - -
Buchholzia
coriacea Fe + + - - - - + + - -
Combrectum
paniculatum Fe 2,5 cm +/- + + + +++ + + + - -
Ceiba pen-
tandra Fe +/- + + - - ++ + + + - -
Cnestis ferru-
ginea Fe - - + + +++ + + + - -
Cussonia +
barteri Fe 5 cm + - ++ +++ + + + - -
++
Desmodium
adscendens Fe - + + + - - + + - -
Detarium
microcarpum Fe + - + +++ - - + + - -
Detarium
senegalensis Fe + + + +++ - - + + - -
Dissotis
rotundifolia PE - + + + + + + + - -
Ficus exas-
perata Fe + + + + +++ + + + - -
Heliotropium
indicum PA +/- - - - - - + + - -
Hibiscus asper PA + - - - - - + + - -
Hoslundia
opposita Fe 1 cm - - - - +++ + + + + -
Hymenocardia
acida Ec 5 cm + + + + +++ + + + - -
Hymenocardia
acida Fe +/- + - - - - + + - -
Kalanchoe
crenata Fe +/- - - - - - - + + - -
Manotes
longiflora Fe + + + +++ ++ + + + - -
Morinda
lucida Fe 2 cm - - - - ++ + + + - -
Moringa
oleifera Fe +/- - - - - - + + - -
Nauclea
latifolia Fe + - + ++ +/- - + + - -
Ocimum
gratissimum Fe - - + ++ - - + + - -
Parkia biglo-
bosa Fe 2 cm + + + +++ - - + + - -
Phyllanthus
muelleranus PA 2 cm +/- + - + +++ - - + + - -

Piliostigma
thonningii Fe + + + + +++ + + + - -
Scleria boi-
vinii Fe - + + ++ - + + + - -
Spondias
mombin Fe + + ++ ++ - - + + - -
Spondias
mombin Rac + - +++ ++ - - + + - -
Struchrium
sparganoflora Fe - + + ++ - - + + - -
Tetracera
alnifolia Fe + + + +++ - - + + - -
Vitellaria
paradoxa Fe + + + ++ +++ - - + + - -
Zanthozylum
zanthoxy- Fe - - + + - - + + - -
loïdes
Zanthozylum
zanthoxy- Ec 2 cm - - - - - - + + + +
loïdes
+++ = réaction franchement positive
+ + = réaction positive
+ = réaction très faible
+/- = réaction douteuse
- = réaction négative

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DISCUSSION
La vente de plantes médicinales, est une du tubercule de la plante. La pathologie la plus
activité informelle tenue essentiellement par représentative est la maladie hémorroïdaire.
les femmes [Tra-bi 2008]. Intermédiaires Le Koko des yeux est une conjonctivite
entre les spécificités des thérapies allergique (Limbo-Conjonctivite Endémique
traditionnelles et les logiques de brassage Tropicale). La maladie se caractérise par
interethnique de la métropole abidjanaise, une chronicité accompagnée de prurits, de
ces femmes jouent un rôle tampon larmoiement, de photophobie, de sensation
entre le monde rural et l’univers urbain, de corps étranger et de brûlure. Le vent,
constituant ainsi des relais socioculturels la poussière, le climat chaud aggravent les
d’opinions entre les récolteurs locaux et les démangeaisons. Le Koko oculaire peut être
consommateurs urbains. également toutes les affections kystiques
inflammatoires ou non de la surface du globe
Les marchés d’Adjamé et d’Abobo
oculaire et de ses annexes, dont l’épithélioma,
représentent les sites les plus importants
le ptérygion et le chalazion.
d’approvisionnement en plantes médicinales.
Celles-ci proviennent de différentes régions Alors que la médecine moderne utilise
de la Côte d’Ivoire par le biais de récolteurs un langage nosologique sophistiqué pour
locaux. Ces récolteurs sont constitués aussi désigner les pathologies, la médecine
bien de femmes que d’hommes. Les femmes traditionnelle se réfère à des représentations.
s’intéressent aux plantes herbacées plus C’est ainsi que Fainzang a identifié plusieurs
accessibles et faciles à récolter. Quant aux désignations de la maladie dont les plus
hommes, ils fournissent celles dont l’accès significatives sont descriptives ou causales.
et la cueillette sont plus difficiles. Les descriptions causales peuvent être
littérales ou métaphoriques. Dans la
Les maladies oculaires évoquées sont
description littérale, la maladie est désignée
principalement l’Apollo et le Koko. L’Apollo
en se référant au corps ou à la partie du
est une conjonctivite aiguë hémorragique
corps atteinte ou aux symptômes par exemple
à entérovirus très contagieuse. Le mode
«yeux qui coulent, yeux rouges». Dans la
de transmission se fait par contact direct
description métaphorique on prend en
ou indirect avec les sécrétions oculaires
compte le symptôme que l’on exprime sous
infectées. Son apparition est soudaine, avec
forme de métaphores. Parmi les désignations
une douleur ou une sensation de présence
métaphoriques on retrouve beaucoup
de corps étranger dans l’œil. La première
de maladies dont les noms expriment la
épidémie de l’Apollo fut décrite en 1969
ressemblance du symptôme avec un objet, un
au Ghana et surnommée Apollo disease.
animal ou un végétal «Koko» [Fainzang 2000].
Selon les interprétations sociologiques, les
atteintes oculaires seraient dues au fait que Les plantes employées dans les soins
les Ghanéens cherchaient à découvrir dans traditionnels des yeux en Côte d’Ivoire, sont
le ciel la capsule Apollo 11 [Lévêque 2007]. assez proches de celles retrouvées ailleurs
au Burkina-Faso [Forgues 2009], au Mali
Le Koko est le nom vernaculaire du taro
[Traoré 2000] et au Bénin [Adjanohoun
(Colocasia esculenta), plante de la famille
1989]. Ces pays ont en commun les
des Araceae. En Côte d’Ivoire, d’une manière
espèces telles que Moringa oleifera,
générale, le Koko, est une appellation
Spondias mombin, Piliostigma thonningii,
générique d’un ensemble de maladies qui
Nauclea latifolia, Vitellaria paradoxa, Ceiba
ont en commun un caractère kystique
pentandra, Blighia sapida, Hymenocardia
accompagné de prurit, en référence à l’aspect

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acida et Zanthozylum zanthoxyloïdes antiallergique, antiulcéreuse, antitumorale


(liste non exhaustive) retrouvées dans et antispasmosique [Bruneton 2009].
nos collectes. On retrouve également Les mucilages végétaux sont des
Cassia occidentalis, Ximenia americana, polysaccharides, formant en présence
Cymbopogon giganteus, Diospyros d’eau des systèmes colloïdaux fortement
mespiliformis et Combretum micrantum. visqueux. Les mucilages des plantes
Les remèdes sont des préparations médicinales ont pour effet de réduire
extemporanées sous forme de décocté, de l’irritation, en formant un film protecteur.
macérât, de suc et d’infusé, administrées Ils exercent ainsi une action favorable
en instillation ou en lavage des yeux contre les inflammations des muqueuses.
ou du visage. En dehors des maladies Cette activité est souvent mise à profit
courantes infectieuses, allergiques et en phytocosmétologie et en dermatologie,
virales oculaires impliquées, au Mali avec une reconnaissance par les
l’onchocercose (affection parasitaire) est autorités sanitaires européennes de
l’une des principales indications de soins certaines drogues végétales employées
traditionnels oculaires [Traoré 2000]. traditionnellement dans les cas d’irritation
oculaire. Ainsi, en France, certaines
Les données obtenues lors du criblage
plantes indiquées dans le traitement
phytochimique en tube corroborent celles
des irritations oculaires et conjonctivites
de la CCM. Elles sont souvent conformes à
sont des plantes anti-inflammatoires,
celles de la littérature [Adomi 2010, Mujovo
astringentes ou adoucissantes riches en
2008, Cavin 2006, Ngnokam 2003, Anam
tanins ou en mucilages, telles Plantago
2001]. Les propriétés pharmacologiques
lanceolata (plantain), Centaurea cyanus
des différents groupes chimiques mis en
(bleuet), Calendula officinalis (souci),
évidence sont nombreuses et variées. Les
Euphrasia officinalis (casse-lunette),
tanins sont hydrosolubles et leur intérêt
Matricaria recutita (camomille) et Vitis
médicinal réside essentiellement dans
vinifera (vigne rouge) [Goetz 2006]. Il existe
leur caractère astringent. Leurs propriétés
par ailleurs des spécialités sous forme de
tannantes, en créant une couche isolante
collyres ou de gélules élaborées à partir de
et protectrice, ont pour effet de réduire
quelques-unes de ces espèces. C’est le cas
l’irritabilité et la douleur, d’arrêter les petits
de Sensivision®, Optigem® et Optalmine,®
saignements. L’activité vasculoprotectrice
respectivement à base de plantain, de bleuet
des tanins peut justifier l’emploi des
et de vigne rouge. En Côte d’Ivoire, Ceiba
drogues qui en contiennent dans la prise en
pentandra dont les feuilles sont également
charge des conjonctivites. Différents types
employées comme condiment alimentaire
de flavonoïdes ont été isolés dans les feuilles
et contenant à la fois des flavonoïdes,
des plantes répertoriées. Des isoflavones
des tanins et des mucilages peut être
dans Ceiba pentandra [Ngounou 2000], des
un bon candidat pour l’élaboration de
proanthocyanidines chez Hymenocardia
phytomédicaments ophtalmiques. Il pourrait
acida et Piliostigma thonningii [Sofidiya
en être de même pour Vitellaria paradoxa,
2009], et des flavones dans Dissotis
Phyllanthus muelleranus (couramment
rotundifolia et Hoslundia opposita [Rim
employée dans les conjonctivites) et Cussonia
2012, Mujovo 2008]. Antioxydants, les
barteri riches en tanins, mucilages et en
flavonoïdes ont la capacité de piéger
flavonoïdes. Des anthraquinones ont été
les radicaux libres. On leur attribue,
isolées des feuilles de Morinda lucida
d’une manière générale, les activités
[Adomi 2010]. Beaucoup de quinones sont
anti-inflammatoire, anti-infectieuse,
antibactériennes et fongicides [Riffel 2002].
vasculoprotectrice, antihépatotoxique,

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L’effet toxique de certaines d’entre elles est l’écorce de Zanthozylum zanthoxyloïdes. Les
notable, et pourrait engendrer un rapport propriétés pharmacologiques des alcaloïdes
bénéfice/risque défavorable. Tous nos sont variées. Le genre Zanthozylum est
extraits contiennent des terpénoïdes. réputé pour ses alcaloïdes isoquinoléiques
Des monoterpénoïdes ont été décrits et quinoléiques. La toxicité de nombreuses
dans des huiles essentielles de Moringa isoquinoléines et quinoléines ont été décrites
oleifera, en particulier l’α-phellandrène et [Bruneton 2009]. On peut alors s’interroger
le para-cymène. Les huiles essentielles ont sur le rapport bénéfice/risque de l’emploi
souvent un caractère antimicrobien. Des de cette espèce dans le traitement des
diterpènes de type labdane et clérodane conjonctivites. Les alcaloïdes connus et
ont été isolés des feuilles de Detarium utilisés en ophtalmologie sont principalement
microcarpum [Cavin 2006]. Des triterpènes l’atropine et la pilocarpine. L’atropine est un
ont aussi été décrits dans les feuilles de alcaloïde tropanique extrait de la Belladone
Buchholzia coriacea [Ajaiyeoba 2003], (Atropa belladonna). Elle apaise les spasmes
d’Abrus precatorius [Kim 2002, Anam 2001], et dilate la pupille en relâchant les muscles
de Phyllanthus muelleranus [Saleem 2009] circulaires de l’iris (mydriase passive) ; elle
et de Nauclea latifolia [Ngnokam 2003]. est ainsi indiquée dans le traitement des
Des triterpènes saponines ont été signalées inflammations uvéales et permet de réaliser
chez Alternanthera repens [Sanogo 1998] des examens de fond d’œil. La pilocarpine,
et Cussonia barteri [Papajewski 2001]. Les alcaloïde imidazolé isolé de Pilocarpus
saponosides sont des composés tensioactifs microphyllus, a un effet contraire à celui de
(pouvoir moussant). Ils ont une action l’atropine ; elle réduit la pupille par contraction
hémolytique et toxique pour les animaux à des muscles circulaires de l’iris (myosis). C’est
sang froid. Les alcaloïdes sont présents dans la molécule utilisée contre le glaucome.

CONCLUSION
L’enquête ethnobotanique menée extraits de drogues de ces plantes. Les
auprès de vendeuses de plantes sur les propriétés pharmacologiques de ces
marchés d’Abobo et d’Adjamé a permis de groupes chimiques décrits pourraient
répertorier 36 espèces végétales utilisées permettre de justifier l’usage de certaines
dans le traitement traditionnel des de ces espèces collectées dans le traitement
infections oculaires. Des terpénoïdes, des traditionnel des affections oculaires.
tanins, des flavonoïdes, des saponosides, Toutefois, d’autres investigations devraient
des quinones, des mucilages et des être entreprises pour garantir leur qualité,
alcaloïdes ont été mis en évidence des leur innocuité et leur efficacité.
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