Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
AU FIL
SH O R
CU TST
DES
GRANDES
IDÉES
Comment le cerveau construit-il
la mémoire ? Les humains sont-ils tous
des moutons ? Comment un enfant
voit-il le monde ? Peut-on vivre de pain
et d’eau fraîche ? Pourquoi sommes-nous
irrationnels ? Quel est le raccourci vers
le bonheur ?
Illusions d’optique et effet de désinformation, attitudes
positives et pensées négatives, anxiété sociale et
constructions personnelles : la connaissance de plus en
plus fine de l’esprit humain révèle un territoire complexe,
mouvant, mais véritablement fascinant à explorer. Alors
comment s’y retrouver, comprendre et relier les notions ?
Avec des cartes bien sûr !
978-2-7598-3096-1
Imprimé en Serbie
PSYCHOLOGIE
CONTENTS
INTRODUCTION 6
1 PSYCHOLOGIE COGNITIVE 8
2 PSYCHOLOGIE SOCIALE 28
3 APPRENTISSAGE 48
4 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE 68
7 THÉRAPIE 124
6
TIO
Nous apprendrons quel est le niveau de stress idéal, et
comment les psychologues le mesurent. Nous verrons aussi
ce qu’il se passe dans le cerveau quand nous prenons des
drogues, des antidépresseurs au cannabis. Nous parlerons
de jeux d’enfants et retournerons vers nos jeunes années
pour découvrir comment les liens familiaux façonnent nos
stratégies de résilience bien des années plus tard.
Nous verrons ensuite ce qui fait de nous des individus,
ce qui sépare le bon du grandiose, ce qui nous pousse.
Nous parlerons d’intelligence, de ces nombreux types,
dont celle des dirigeants à poigne. Nous présenterons nos
modes de construction de a réalité et a manière dont a
science s’applique à a santé mentale pour développer des
traitements efficaces. Nous verrons comment a thérapie
comportementale et cognitive transforme les patients
atteints de dépression ou de trouble de l’anxiété en
scientifiques qui testent et mettent à jour leurs pensées grâce
à des expériences, une approche qui a permis des guérisons
durables. Enfin, notre parcours prendra fin sur les hauteurs,
a psychologie positive et les ingrédients du bonheur, les
manières de s’épanouir et former un esprit heureux.
Ce livre parle de notre développement, de notre
évolution tout au long de a vie, et des contributions qu’a
apportées a psychologie à sa compréhension.
Bon voyage!
7
CHAPITRE 1 PSYCHOLOGIE
COGNITIVE
PERCEPTION
PRÉCONCEPTIONS
TRAITEMENT
DESCENDANT
SOUVENIRS
DISSONANCE
COGNITIVE
CHAPITRE 1
COGITIE
ATTENTES
PSYCHOLOGIE
PENSÉE DE
GROUPE
BIAIS
INTRODUCTION
C
omment nous forgeons-nous notre expérience?
Selon les psychologues, cea revient à se demander
comment nous percevons le monde, fabriquons
nos souvenirs et nos décisions, nos pensées. Dans
ce chapitre, nous découvrons les mécanismes qui nous
permettent de donner du sens à ce qui nous entoure.
Nous sommes bombardés d’informations sensorielles en
permanence. Pour leur donner du sens, le cerveau travaille à
120mètres par seconde, il teste des HYPOTHÈSES et met à
jour ses conclusions à mesure que les nouvelles informations
affluent. C’est le TRAITEMENT DESCENDANT, où ce que
nous savons déjà nous permet d’interpréter une information
nouvelle, où nous voyons ce que nous nous attendons à voir.
La THÉORIE ÉCOLOGIQUE DE GIBSON suggère plutôt qu’un
TRAITEMENT ASCENDANT serait à l’œuvre, où l’information
proviendrait de l’environnement, voyagerait jusqu’à l’œil puis
au cerveau. Selon cette théorie, il faut percevoir le monde
pour survivre, nous nous y efforçons donc dès a naissance.
Nos souvenirs jouent un rôle important dans nos
perceptions. Mais sont-ils bien fiables? En étudiant les
incohérences dans les souvenirs de grands événements,
Neisser a observé qu’ils se modifiaient avec le temps. Les
travaux de Nader et LeDoux suggèrent que nous réécrivons
nos souvenirs à chaque remémoration, et que cette réécriture
rempace le souvenir d’origine. Selon a THÉORIE DE LA
CONSOLIDATION, si nous souhaitons nous rappeler un
événement, a trace qu’a aissée son souvenir dans le cerveau
doit être consolidée sans cesse, sans quoi elle sera effacée.
Nos souvenirs sont fragiles.
10 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
Loftus a découvert que bien des choses altéraient
les souvenirs, dont nos attentes, nos biais, et même notre
angage. L’emploi de mots forts, par exemple parler de
«crash» au témoin d’un accident de a route pourra donner
naissance à des souvenirs d’une scène plus intense que si
un angage plus neutre avait été employé, par exemple en
lui parant d’une simple «collision». Pour cette raison, les
témoignages ocuaires ne sont pas toujours fiables, car il est
possible de se constituer un FAUX SOUVENIR par suggestion.
Les théories qui s’intéressent au stockage des souvenirs
devraient expliquer a manière dont nous les évoquons, mais
ce mécanisme est encore sujet à débat. On parait avant de
mémoire à long terme ou à court terme. Toutefois, Baddeley
a dépoussiéré cette idée en parant d’une mémoire de
travail capable de stocker et de traiter l’information à court
terme. En 1972, Craik et Lockhart proposent un modèle de
traitement par a mémoire, dans lequel un lien s’établit entre
a profondeur du traitement et a durée des souvenirs.
Du côté de nos modes de pensée, Janis a découvert
combien il était facile à un groupe de former les opinions
en son sein. En groupe, nous écartons plus facilement les
perspectives minoritaires, car il est plus facile de se fondre
dans le collectif que de s’opposer ouvertement et ainsi de
se distinguer. La pression du groupe pèse sur nos pensées
et nos décisions. En situation de stress, le cerveau prendra
des raccourcis de ce genre et se fiera à l’intuition plutôt
qu’à l’éaboration d’une pensée logique. C’est risqué, mais le
raccourci est parfois le meilleur chemin.
PSYCHOLOGIE COGNITIVE 11
PSYCHOLOGIE COGNITIVE
MÉTHODE
HYPOTHÈSES
Prédictions fondées sur nos
prévisions de ce qui pourrait
advenir.
PERCEPTION
Mécanisme actif
impliquant la mémoire
et l’expérience, plutôt
TRAITEMENT qu’acceptation passive
DESCENDANT des stimuli entrants
Emploi de ce que nous savons (Helmholtz).
déjà pour interpréter de
nouvelles informations ; nous
voyons ce que nous nous
attendons à voir (Gregory).
SCHÉMA
Représentation mentale de
nos expériences, fondée sur
nos expériences passées et
notre mémoire.
ILLUSION
AFFORDANCE
Opportunité d’action fournie par
l’environnement, qui donne du
sens. Un vélo est une opportunité
de voyager (Gibson).
MODÈLE D’ATKINSON -
SHIFFRIN
Existence de trois compartiments
de la mémoire : 1) sensorielle,
2) à court terme, 3) à long terme.
L’information est transférée entre
ces trois compartiments, dans
l’ordre.
THÉORIE DE LA
CONSOLIDATION
Chaque remémoration est une
TRAITEMENT ASCENDANT réécriture. Les souvenirs à long
La perception est ascendante, terme doivent être consolidés
depuis l’environnement à l’œil par la remémoration ou sont
puis au cerveau (Gibson). effacés (Nader et LeDoux).
EFFET DE DÉSINFORMATION
Contamination d’un souvenir
existant par des informations FAUX SOUVENIRS
trompeuses a posteriori. Souvenirs qui nous ont été
Le souvenir d’un témoin altéré par suggérés et nous paraissent réels,
un interrogatoire biaisé. mais ne le sont pas (Loftus).
DISSONANCE COGNITIVE
Tenir deux positions
contraires en même temps,
cause de décalages entre
comportement et croyances
entraînant un stress
psychologique (Festinger).
PENSÉE DE
GROUPE
Les opinions
individuelles sont noyées
CYCLE PERPÉTUEL dans le consensus, car il est
Nos expériences du monde sont plus facile de se taire que
formées de la relation entre de se distinguer. Cela
des schémas et des signaux de peut entraîner des
l’environnement; ces signaux problèmes (Janis).
externes influencent nos schémas
internes (Neisser).
L percepion es-ee
se ne expérience?
Peut-être. Lors de leurs expériences,
les scientifiques testent des hypothèses, des
prédictions de ce qu’il pourrait se passer.
Le cerveau semble marcher de a même façon,
il teste des hypothèses et se sert des résultats
pour construire l’image perçue.
Nos yeux reçoivent des données nos cerveaux. Nous créons des hypothèses
visuelles, nos oreilles des sons, nos de ce que nous voyons fondées sur des
nez se froncent pour une odeur. Les connaissances et des expériences antérieures.
psychologues se sont beaucoup demandé Le cerveau devine plus qu’il ne voit et met à
comment ces signaux sensoriels sont traduits jour ses hypothèses à mesure que de nouvelles
quand nous percevons. Comment, par exemple, informations l’atteignent. Selon ce modèle,
reconnaissons-nous cet objet flou et poilu qui a perception est une forme de traitement
court derrière un bâton comme un chien ? Ou descendant, dans lequel ce que nous savons
cet ensemble de molécules odorantes comme déjà sert à interpréter ce que nous ne savons
le parfum d’une rose? pas encore.
En 1867, l’Allemand Hermann von Helmholtz Gregory disait que certaines illusions
a perçu l’importance des inférences d’optique telles que le cube de Necker et
inconscientes. La perception, dit-il, n’est pas l’illusion du masque démontrent le traitement
l’acceptation passive de stimuli entrants, mais descendant de l’information sensorielle.
un procédé actif auquel a mémoire autant Ainsi, quand un masque en 3D de Charlie
que l’expérience prennent part. Chaplin tourne lentement devant nous, arrive
En 1970, le psychologue britannique un moment où l’arrière concave du masque
Richard Gregory a développé cette idée et s’inverse pour former un visage convexe qui
affirmé que notre perception de a réalité était tourne dans le sens opposé. Notre cerveau
une construction. Il avançait que nos sens s’attend à un visage convexe, bien plus
sont bombardés de signaux souvent ambigus fréquent que les visages concaves, et il nous
et difficiles à interpréter. Pour leur donner impose donc cette interprétation. Parfois, nous
du sens, nous nous appuyons beaucoup voyons ce que nous nous attendions à voir,
sur les informations déjà disponibles dans plutôt que ce qui est vraiment devant nous.
14 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
TRAITEMENT DESCENDANT
16 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
TRAITEMENT ASCENDANT
Selon Gibson, a perception est ascendante, de l’objet, par exemple sa taille et son
elle va de l’environnement jusqu’ à l’œil puis empacement. En nous dépaçant au sein
au cerveau. Quand nous voyons une rose, c’est de l’environnement, l’information change et
ça que notre cerveau enregistre. La lumière génère le carburant essentiel à a perception.
dans nos yeux produit une information Aucune connaissance ni expérience préaable
non ambiguë quant aux qualités précises n’est requise.
Commen e cere
consri-i mémoire?
La création de souvenirs est un
processus actif de construction, pas a
reproduction passive du passé. Ainsi, nos
souvenirs changent avec le temps.
Les souvenirs sont construits dans le conseiller de Richard Nixon, John Dean, sur
cerveau, c’est certain, mais l’étendue le scandale du Watergate. En comparant le
de l’influence des événements détail du témoignage aux transcriptions de
extérieurs sur leur construction ne l’est pas. conversations enregistrées, des différences
Quand Ulric Neisser s’est attaqué à ce débat, il sont apparues. Dean tendait ainsi à dramatiser
y a plus de 40ans, il a insisté sur l’influence les événements, à exagérer son rôle et à fondre
des signaux externes sur nos mécanismes des événements distincts en un seul souvenir.
cognitifs. La perception, selon lui, est le Selon Neisser, les erreurs de ce type sont
processus actif qui forge notre expérience du fréquentes. Elles se produisent parce que les
monde, une interaction entre les idées et les souvenirs sont des constructions actives, pas
hypothèses de notre cerveau, ce qu’il appelle des enregistrements passifs. Son étude de
le «schéma», et les signaux externes. 1986 sur le désastre de a navette Challenger
Autrement dit, les traitements ascendant et donne a même conclusion. Les récits des
descendant sont importants pour a étudiants sur le drame donnés trois ans plus
perception, l’environnement revenant nourrir tard différaient grandement de ceux fournis le
et influencer le schéma interne. C’est ce qu’on lendemain de l’explosion.
appelle le cycle perpétuel. La mémoire, selon Neisser, n’est pas un
En tournant son attention vers a mémoire, cliché instantané précis et figé dans le temps.
Neisser a réalisé que les psychologues Pour se rappeler un événement, l’esprit doit
apprendraient peu d’études en aboratoires activement reconstruire le passé, un procédé
conçues à partir de listes de mots à mémoriser. inévitablement influencé par les expériences
Si l’environnement était aussi important suivantes. En conséquence, les souvenirs sont
qu’il le pensait, a mémoire devait être fréquemment déformés, ce qui peut poser
étudiée dans a vraie vie. Dans son étude de problème, par exemple pour les témoignages
1981, Neisser a analysé le témoignage d’un ocuaires lors de procès.
18 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
MUR DE LA MÉMOIRE
Neisser a avancé que, tout comme un
artisan construit une maison, nos cerveaux
construisent nos mémoires. Supposez que
cinq ans plus tard vous redemandiez au
même artisan de créer une copie de a
maison, sans lui fournir les pans originaux.
La reconstruction sera sembable, mais
pas identique. De même, les souvenirs
d’ événements passés sont construits, et eux
aussi perdent en précision avec le temps.
Pe-on comper sr
ore émoine?
Probablement pas. Nous nous fions à
notre vue plus qu’à tout autre sens, mais
sommes en réalité souvent trompés par
l’interprétation que notre cerveau fait des
événements, et par nos souvenirs.
Un témoignage ocuaire peut avoir un témoin contient une erreur, cea pourra
beaucoup de poids. Quand une modifier ses souvenirs des événements. Et cet
victime identifie avec certitude son effet de désinformation peut tout toucher,
agresseur au sein d’une sélection de photos, depuis l’apparence du suspect jusqu’à a
ou qu’un témoin jure au cours d’un procès disposition exacte de a scène du crime.
avoir vu l’accusé commettre le crime dont on Un souvenir déformé est déjà difficile à
l’accuse, a police et les juges les prennent au admettre, mais, comme Loftus et d’autres
sérieux. Le problème, c’est qu’un témoignage l’ont montré, nous pouvons même abriter
ocuaire n’est parfois pas fiable du tout. des souvenirs complètement inventés. De
La psychologue cognitive américaine faux souvenirs, qui nous ont été suggérés et
Elizabeth Loftus a défriché ce champ d’études peuvent sembler très authentiques, mais qui
dès 1979 dans son livre Témoignage ocuaire. ne le sont pas du tout.
Comme l’ont confirmé d’innombrables études Les dangers de se reposer uniquement
par a suite, de nombreux facteurs jouent sur sur des témoignages ocuaires sont grands.
ce qu’un témoin pense avoir vu. Une mauvaise Une étude de 2011 aux États-Unis a conclu
visibilité, n’avoir perçu qu’une silhouette, le que, dans les cas de révision de procès suite
stress, les attentes qui pèsent sur lui et ses à de nouvelles preuves ADN, le verdict initial
propres biais, dont les stéréotypes racistes. fautif reposait sur des témoignages ocuaires
Autre gros problème: nos souvenirs trois fois sur quatre. De tels témoignages ont
sont malléables. Des centaines d’études envoyé pendant des décennies des innocents
ont montré que le seul fait d’être interrogé dans les prisons et les couloirs de a mort.
impante de nouveaux souvenirs chez un Nous devons être prudents quand il
témoin et modifie les souvenirs existants. s’agit de faire confiance à des témoignages
Par exemple, si a question qu’on pose à ocuaires, surtout quand ce sont les nôtres.
20 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
EFFET DE DÉSINFORMATION
»
/h
km
»
50
CT
«
TA
N
O
«C
C»
»
O
/h
H
km
C
«
60
«
»
SH
RA
«C
»
/h
km
70
«
Dans une des premières expériences de hausse des vitesses estimées par rapport
Loftus et Palmer, les participants regardaient aux questions formulées dans des mots plus
une vidéo d’accident de a route avant de neutres, comme «collision», ce qui montrait
répondre à des questions sur a vitesse des bien que a mémoire pouvait être manipulée
voitures impliquées. Celles contenant des facilement, simplement en modifiant
mots comme «crash» entraînaient une les termes de a question.
Commen son socés
nos soenirs?
D’abord, le cerveau crée un instantané
de l’information qui nous entoure. Puis les
neurones s’allument et se câblent ensemble,
un nouveau schéma de souvenirs est ainsi
stocké temporairement dans l’hippocampe,
puis dans les replis du cortex.
Pour comprendre où sont stockés nos Afin de constituer un souvenir à long terme,
souvenirs, les psychologues ont dû le cerveau prend un instantané de l’information
analyser les types de souvenirs créés entrante qu’il soumet à une série de changements
et les parties du cerveau concernées. successifs puis à un procédé de stabilisation
En 1968, Richard Atkinson et Richard Shiffrin appelé a consolidation. Des études montrent
ont proposé trois mémoires différentes. La que de nouveaux apprentissages, des lésions à
mémoire sensorielle enregistre une impression l’hippocampe, ou des médicaments bloquant a
passagère issue de sens; a mémoire à court synthèse de protéines peuvent perturber cette
terme (MCT) peut temporairement contenir de consolidation.
plus gros pans d’information, et a mémoire à Nous avons longtemps pensé qu’un
long terme (MLT) peut en stocker des quantités souvenir à long terme était comme un fichier
encore plus grandes, pour toujours. permanent que le procédé de remémoration
Le modèle d’Atkinson et Shiffrin pose alait piocher dans les replis du cortex, avant de
l’hypothèse que l’information serait transférée l’y repacer intact après usage.
entre a mémoire sensorielle, a MCT et a MLT, Toutefois, au début du XXIesiècle, Karim
dans cet ordre, et que les souvenirs lointains Nader et Joseph LeDoux ont remis en question
pouvaient être transférés dans le stockage à cette idée de permanence du souvenir avec
court terme au besoin. des expériences qui en montraient au contraire
En 1972, Endel Tulving a distingué différents a fragilité. Selon a théorie de a consolidation,
types de MLT, en inventant entre autres le quand nous nous rappelons un événement,
célèbre terme de mémoire «épisodique» où sa trace mémorielle devient flexible pour
seraient stockés les souvenirs des événements un temps limité et doit être consolidée à
personnellement vécus. Elle serait différente de chaque usage pour être remémorée par a
a mémoire sémantique qui, elle, est concentrée suite. En nous rappeant un événement, nous
sur des faits plus généraux. le réécrivons, et c’est de cette version réécrite
Puis, en 1974, Aan Baddeley a mis à jour le que nous nous souviendrons a prochaine fois.
concept de MCT. La mémoire de travail, selon Le cerveau stocke bien les souvenirs, mais les
lui, sait à a fois traiter et stocker l ’information. souvenirs changent avec le temps.
22 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
TYPES DE MÉMOIRE
À VIE
JOURS
souvenirs anciens
HEURES
MINUTES
mémoire de travail
SECONDES
souvenirs passagers
MILLISECONDES
Dans son roman dystopique 1984, n’oserait jamais attaquer les États-Unis. Janis
George Orwell décrit a «double a formulé ses idées sur a pensée de groupe
pensée», le mécanisme par lequel dans un livre influent, paru en 1972.
les gens adoptent de force des croyances La pensée de groupe repose beaucoup
contraires à leurs propres souvenirs ou à leur sur a dissonance cognitive, le phénomène
sens des réalités. C’est ce qui a poussé le par lequel nous parvenons à adhérer à des
psychologue américain à concevoir et étudier croyances contraires au prix d’un stress
a pensée de groupe. psychologique. Leon Festinger a publié sa
Une pensée de groupe se forme quand théorie de a dissonance cognitive en 1957,
les opinions individuelles se noient dans le suite à l’étude d’une secte. Les membres
consensus. Les membres du groupe cessent de croyaient à l’imminence du déluge, mais
réfléchir, car il est plus facile de se taire et se quand a date prévue est passée, ils
fondre dans a masse que de donner de a voix ont dû corriger leurs croyances.
et de se distinguer. C’est ainsi que les groupes Les plus fanatiques ont estimé que
prennent parfois de mauvaises décisions leur dévotion avait évité le déluge,
fondées sur des hypothèses irréalistes. les moins endoctrinés ont plus facilement
Les conséquences peuvent être terribles. accepté de s’être trompés. Les deux groupes
Janis s’est servi des exemples de a baie des vivaient une dissonance et avaient adopté des
Cochons (l’invasion ratée de Cuba en 1961, stratégies différentes pour a résoudre.
ordonnée par le président Kennedy) et de Festinger nous pensait naturellement
l’attaque japonaise de Pearl Harbor en 1941. poussés à accorder nos croyances à nos
Dans les deux cas, les opinions discordantes comportements et ainsi éviter ou réduire a
ont été ignorées et les groupes se sont fondés dissonance. Pourtant, nos vies sont pleines de
sur des stéréotypes de leurs ennemis pour contradictions. Nous fumons sachant que cea
former leur stratégie. L’administration Kennedy cause le cancer, nous faisons des queues de
a supposé que les troupes de Castro seraient poisson sur a route alors que nous détestons
facilement défaites, tandis que Roosevelt ça, nous prenons l’avion pour un week-end
et ses conseillers estimaient que le Japon alors que cea aggrave le réchauffement.
24 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
PENSÉE DE GROUPE
Les humains sont intelligents. Nous Kahneman décrivait notre pensée logique,
prenons des décisions rationnelles, consciente, fondée sur a mesure précise
logiques, fondées sur une analyse des pour et des contre, comme une pensée
raisonnable des informations disponibles. lente, le «système2». Parfois, cette méthode
Non? Dans les années 1970 et 1980, les pas-à-pas est a meilleure. Mais quand il y a
psychologues Daniel Kahneman et Amos des incertitudes ou de a complexité, nous
Tversky ont développé une théorie à rebours adoptons une pensée rapide, le «système1».
des idées traditionnelles en économie. Selon C’est ce système qui peut subir l’influence de
cette théorie des perspectives, nous abritons biais dangereux, mais c’est aussi lui qui nous
des biais inconscients et une préférence pour permet de fonctionner par intuition.
les raccourcis qui nous mènent facilement à Les intuitions viennent de connaissances
prendre des décisions irrationnelles. implicites accumulées par expérience, qui
Un exemple de biais est notre grande deviennent automatiques, comme de savoir
aversion pour a perte. La douleur de perdre faire du vélo. Il nous est parfois impossible de
1000€, disons, ne peut être contrebaancée les expliquer (et elles sont parfois incomplètes
que par le paisir de gagner bien plus, autour et imparfaites), mais elles demeurent
du double de cette somme, selon certaines fonctionnelles. Quand un trader se demande
études. Parier plus après une perte de ce genre s’il doit acheter ou vendre une action, il lui est
est une manifestation de ce biais. difficile de prendre une décision prudente et
Nous prenons des raccourcis quand nous logique, mais ses intuitions, fondées sur son
ne disposons pas de toutes les informations expérience, lui fournissent un raccourci vers a
nécessaires, quand nous ne parvenons pas à bonne décision.
analyser l’information ou quand il faut agir vite, Prendre un raccourci peut ainsi se révéler
sous a pression. Un raccourci est alors notre dangereux, mais c’est aussi parfois le meilleur
seule option. Ce n’est pas toujours pour le pire. chemin à emprunter.
26 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
HEURISTIQUE
N E B RA S KA
KANSAS
ÉMOTIONS
CULTURE
IDENTITÉ
PRESSION
REPRÉSENTATION
CHAPITRE 2
SOCILE
PSYCHOLOGIE
CONFORMITÉ
CONTRÔLE
ENVIRONNEMENT
INTRODUCTION
S
eul, vous seriez capable de tout risquer pour venir
au secours d’autrui. En groupe, votre désir de vous
intégrer peut vaincre cette impulsion. Comprendre le
pouvoir des groupes, comment ils nous modèlent et
pourquoi, tel est l’objectif au cœur de a psychologie sociale.
Les groupes, dont notre propre groupe culturel,
agissent sur nos comportements, nos modes de pensée, nos
sentiments et même nos perceptions des sentiments d’autrui.
Il n’est pas certain que les émotions se lisent sur nos visages,
mais nos EXPRESSIONS FACIALES donnent tout de même
des indices. Ekman a distingué sept émotions de base, que
nous vivons et notons chez autrui: colère, dégoût, peur, joie,
mépris, tristesse et surprise.
Un groupe peut agir sur notre volonté de venir en
aide à quelqu’un. Quand nous nous en empêchons, les
psychologues parlent d’EFFET DU TÉMOIN, quand a présence
des autres décourage l’impulsion de l’intervention. Certaines
caractéristiques du groupe en question le court-circuitent. Par
exemple, nous aidons plus volontiers une femme en détresse
en présence de femmes et nous intervenons plus volontiers
quand nous connaissons tous les membres du groupe.
Nous pourrions dire qu’en groupe, nous nous comportons
comme des moutons. Dans les années1950, SOLOMON ASCH
a nommé ce phénomène le CONFORMISME. Ses études
avaient montré que les gens étaient plus enclins à fournir
des réponses délibérément fausses s’ils avaient entendu
quelqu’un donner aussi une réponse fausse avant eux.
30 PSYCHOLOGIE SOCIALE
Faire ce qui est facile plutôt que ce qui est juste revient
souvent à abdiquer nos responsabilités à des figures
d’autorité, un phénomène étudié durant les EXPÉRIENCES
DE MILGRAM. Milgram avait constaté que donner des ordres
quand on portait une blouse banche et agissait avec autorité
poussait les gens à augmenter dangereusement l’intensité des
décharges électriques qu’ils croyaient administrer à d’autres.
Il est encore plus fascinant de se demander dans quelles
conditions nous suivons le mouvement. Il semblerait que
nous ayons moins de chance d’obéir sans réfléchir à des
ordres déraisonnables quand celui qui les formule porte des
habits de tous les jours.
HENRI TAJFEL a découvert que les groupes formés
autour de frontières absurdes, comme a capacité de compter
des points, influençaient leurs membres de a même manière
que ceux formés autour de frontières plus cassiques, comme
l’âge ou le genre. C’est en partant de ce constat que Tajfel
et Turner ont inventé a THÉORIE DE L’IDENTITÉ SOCIALE
pour expliquer le conformisme spontané. Ils ont avancé
l’hypothèse que l’appartenance conférait une identité.
L’un des meilleurs moyens de combattre le biais de
favoritisme envers notre propre groupe est d’étendre notre
compassion en dehors de celui-ci. La compassion permettrait
aussi de dépasser notre tendance aux erreurs d’attribution,
qui consiste à attribuer le comportement désagréable de
quelqu’un à ses défauts intrinsèques plutôt qu’au contexte.
PSYCHOLOGIE SOCIALE 31
PSYCHOLOGIE SOCIALE
CULTURES
REPRÉSENTATION COLLECTIVISTES
SOCIALE DE MOSCOVICI Sociétés où le bien-être du
Individus et sociétés groupe tout entier prend le pas
donnent du sens à des sur les besoins et les désirs
concepts complexes des individus.
en créant des versions
alternatives plus faciles
à saisir.
BIAIS ENDOGROUPE/
EXOGROUPE
S’accorder avec ceux de notre
groupe/discriminer ceux en
THÉORIE DE
dehors – peu importe le critère
L’IDENTITÉ SOCIALE
de formation des groupes.
Nous adoptons vite les
habitudes des autres, car
appartenir à un groupe nous
confère une identité sociale, et
un sens à la vie (Tajfel
et Turner).
HENRI TAJFEL
Psychologue polonais (1919–1982)
qui a démontré la nature
arbitraire des frontières de groupe
dans ses expériences du «groupe
IDENTITÉ
minimal» dans les années 1960.
32
CULTURE
FACTEURS
ENVIRONNEMENTAUX
Influences sur notre comportement
ou nos actions issues de sources
externes, telles que le contexte précis
où nous nous trouvons.
EDWARD JONES
Psychologue (1926–1993) qui, en 1967,
a découvert que nous expliquions
le comportement des autres par
CULTURES leurs traits de caractère, la nature
INDIVIDUALISTES fondamentale des individus.
Sociétés où les besoins et les
désirs individuels ont la priorité
sur ceux du groupe pris comme
ERREUR
INFLUENCES SOCIALES
un tout; sujettes au biais de
l’erreur fondamentale FONDAMENTALE
d’attribution. D’ATTRIBUTION
Exagération de l’influence
des traits individuels,
sous-estimation parallèle
de l’influence du
contexte, des facteurs
environnementaux.
CONFORMITÉ DE
GROUPE
Suivre le troupeau et adopter
l’avis de la majorité; dépendant
de facteurs culturels, de l’identité
de groupe et de l’atmosphère
politique du moment.
EFFET DU TÉMOIN
La présence de
EXPÉRIENCES PRESSION SOCIALE
tiers nous dissuade
DE MILGRAM Capacité d’un groupe à
d’intervenir.
Expériences controversées peser sur les jugements
Les caractéristiques
durant lesquelles les individuels, menant à
des tiers, telles que le
sujets abdiquaient leur la conformité.
genre ou la proximité,
responsabilité à une figure
font varier les effets.
d’autorité en infligeant ce
qu’ils croyaient être des
décharges électriques
d’intensité croissante à
d’autres personnes. SOLOMON ASCH DÉFENSEUR
Psychologue (1907–1996) Quelqu’un qui ne se
qui, lors d’expériences contente pas d’être
menées dans les années spectateur, qui ose
1950, a examiné comment défendre un individu
et pourquoi nous nous ou une cause.
conformons au groupe.
ichons-nos os
es mêmes émoions?
On pourrait le croire, puisque nous
partageons tous a même biologie. Mais
il se trouve que c’est plus compliqué que ça.
Nos émotions et nos façons de les exprimer
sont aussi souvent le produit de notre culture.
Les émotions sont des outils chez un Occidental pourrait être interprété
indispensables à a survie. Elles sont par un Papou de Nouvelle-Guinée comme de
un moyen pour le corps de nous a peur. Certains états émotionnels semblent
prévenir d’un changement dans notre spécifiques à une culture. Ainsi de l’arigata-
environnement qui mérite notre attention. meiwaku que ressentent les Japonais quand
L’idée que tout le monde vive les mêmes on leur rend un service non désiré, mais pour
émotions remonte à Charles Darwin. En 1872, lequel ils sont néanmoins tenus de manifester
il a avancé que les expressions faciales des de a gratitude. C’est une émotion qu’on
émotions étaient universelles et innées, en ressent tous parfois, mais eux ont un mot pour
raison de notre biologie commune. Depuis, l’exprimer, car au Japon il est important de
quelques preuves scientifiques sont allées respecter les membres de votre groupe social,
dans ce sens. Le psychologue Paul Ekman même quand c’est énervant.
affirme avoir identifié sept émotions de base, Les émotions pourraient même être
colère, dégoût, joie, mépris, peur, surprise propres à un individu. Ce qui est de a terreur
et tristesse, que tout le monde ressent et pour quelqu’un est parfois de l’excitation
reconnaît chez les autres, quels que soient pour un autre. Et il existe plusieurs manières
l’ethnie, a angue, a culture ou le pays. d’exprimer a colère, a tristesse, a joie ou
Cependant, des recherches plus récentes a surprise, a stupéfaction et a satisfaction.
nuancent ce point de vue. Selon elles, les Cea rend a communication un peu plus
expressions faciales seraient plus compliquées compliquée que si les émotions étaient
que ce que Darwin pensait et nos réponses universelles. Ainsi, le meilleur moyen d’être sûr
émotionnelles aux situations dépendraient que quelqu’un ressent effectivement ce que
en partie de notre culture. Un air de dégoût son visage exprime, cea reste de lui demander.
34 PSYCHOLOGIE SOCIALE
EXPRESSIONS FACIALES
1. JOIE
2. COLÈRE
Nous manifestons nos émotions sans même sourcils froncés ou rassemblés dénotent a
y penser. Des expressions faciales distinctes colère (2); tandis que le visage de a peur est
servent de signes aux plus communes. Par lié à a hausse des paupières et des sourcils
exemple, hausser les joues, plisser le coin et aux lèvres tirées vers l’arrière (3). En
des yeux et sourire suggèrent a joie (1). Les essayant de mimer ces expressions, il arrive
lèvres serrées, les yeux écarquillés et les même qu’on en vienne à les ressentir...
Ineriendrie-os
en cs de merre?
Nous aimerions tous penser que oui.
Mais nos actions dépendent de plusieurs
facteurs, parmi lesquels le nombre de gens
qui nous entourent et leur identité.
36 PSYCHOLOGIE SOCIALE
SPECTATEURS ET DÉFENSEURS
Avoir des amis donne souvent confiance, revanche, les héros se révèlent. Être entourés
même dans des situations dangereuses. Peu de personnes que nous connaissons, en qui
d’entre nous sont disposés à intervenir pour nous avons confiance, augmente notre sens
aider quelqu’un quand nous sommes au des responsabilités et nous rend plus disposés
sein d’une foule d’ étrangers. Entre amis, en à aider un inconnu en cas de détresse.
Les hmins son-is
os des moons?
C’est un peu dur pour les moutons, qui
sont plus intelligents qu’on ne le dit. Il est
vrai que nous suivons parfois le troupeau
sans réfléchir, mais nous avons souvent de
bonnes raisons pour ça.
38 PSYCHOLOGIE SOCIALE
EXPÉRIENCE DE PRESSION SOCIALE
40 PSYCHOLOGIE SOCIALE
EXPÉRIENCE DU CHOC DE MILGRAM
L’ instalation de Milgram était très simple. une décharge électrique. Le voltage était
Le volontaire («l’enseignant») lisait une liste supposé augmenter avec chaque erreur,
de paires de mots à «l’apprenant», par et l’expérimentateur était présent pour
exemple boîte bleue, belle journée, canard encourager les volontaires ou leur ordonner
sauvage. À chaque fois que l’apprenant faisait de poursuivre en cas d’ hésitation. Les voltages
une erreur en les restituant, l’enseignant alaient de 15 à 450 volts, par incréments de
actionnait un interrupteur, censé déclencher 15volts. Jusqu’où seriez-vous allé?
Es-ce oors «ex»
conre «nos»?
À un certain niveau, oui. Vivre en
communauté est bien enraciné et favoriser
a sienne paraît inévitable. Cea ne rend pas
a guerre inévitable pour autant.
L’être humain a évolué pour vivre en l’identité sociale afin d’expliquer cette
groupe, au point qu’il est presque tendance naturelle à se regrouper. Ils estiment
impossible de réfréner cet instinct. que faire partie d’un groupe nous aide à définir
Nous nous paçons naturellement avec ceux ce que nous sommes, et que cette identité
qui nous ressemblent, selon a casse sociale, sociale donne du sens à nos vies. De plus, les
l’ethnie, a nationalité, a religion, l’âge ou le identités sociales pèsent beaucoup sur nos
genre, et nous favorisons les membres de comportements et nos opinions. Elles sont
notre groupe plutôt que les autres. aussi transversales: nous pouvons appartenir à
Il suffit de peu pour créer un sentiment de nombreux groupes différents, dans lesquels
de «eux» contre «nous». Nous le faisons nous nous comportons différemment.
au moindre prétexte, tel que a longueur Appartenir nous fait du bien. Le mauvais
des cheveux ou a couleur des yeux. Le côté, c’est que nos cœurs s’endurcissent envers
psychologue Henri Tajfel a démontré a nature ceux qui n’appartiennent pas. Ce préjugé a
arbitraire des frontières entre groupes dans joué un rôle dans presque tous les conflits.
son expérience du «groupe minimal» à Toutefois, il n’est pas inévitable: le biais de
l’université de Bristol dans les années1960. Il a l’endogroupe peut exister sans hostilité envers
découvert que nous étions prêts à discriminer l’exogroupe. Il est possible d’être loyal à son
les autres pour des raisons aussi triviales que groupe tout en restant amical envers les
leur sous-estimation ou leur surestimation autres. On peut être fan du PSG et apprécier
du nombre de points sur un écran. Le «biais quand même des supporters de l’OM. Il faut
de l’exogroupe» est terriblement facile à pour cea simplement être tolérant, accepter
déclencher, a-t-il conclu. que tout le monde ne fonctionne pas de
Tajfel et son collègue John Turner ont a même façon, ce qui est peut-être le défi
poursuivi et développé une théorie de principal de notre temps.
42 PSYCHOLOGIE SOCIALE
EXPÉRIENCE DU « GROUPE MINIMAL »
Tajfel a testé ses idées sur les préjugés sociaux de répartir une certaine somme d’argent entre
en divisant des dizaines d’ élèves d’une école tous ses camarades. À sa grande surprise, a
en deux groupes dont il a déterminé a majorité des élèves ont donné plus d’argent
composition sur des critères délibérément aux membres de ce qui n’ était pourtant
faibles, tels que a tendance à sous-estimer qu’un groupe totalement arbitraire: les sous-
ou surestimer le nombre de points présentés estimateurs accordaient plus de faveurs à
sur un écran. Il a ensuite demandé à chacun leurs camarades sous-estimateurs.
Biais de l’exogroupe
Commen es idées
s’imposen-ees?
Les idées scientifiques passent par un
filtre social qui les rend plus acceptables et
faciles à partager, ce qui donne le sentiment
d’être expert sur des sujets complexes, tels
que les multivers ou a génétique.
44 PSYCHOLOGIE SOCIALE
REPRÉSENTATION SOCIALE
Découverte scientifique
Théorie scientifique
Débat public
46 PSYCHOLOGIE SOCIALE
ERREUR FONDAMENTALE D’ATTRIBUTION
CONDITIONNEMENT
ASSIMILATION
CONSOLIDATION
DE LA MÉMOIRE
COMPORTEMENT
CHAPITRE 3
PPRETISSGE
ACCOMMODATION
TRAITEMENT
SCHÉMA
INTRODUCTION
S
oulever des poids fortifie les muscles, mais c’est
grâce à l’apprentissage de nouveaux talents que
les neurones s’épanouissent et se renforcent. De
l’enfance à l’âge adulte, ce que nous apprenons,
et comment nous l’apprenons, est au cœur de nos
comportements. Ce chapitre plonge dans les découvertes
les plus stupéfiantes de a psychologie de l’apprentissage.
Le béhaviorisme, inventé par Watson au début du
XXe siècle, a compris a domination de l’acquis sur l’inné
s’agissant de l’apprentissage. Établir des reations était alors
vu comme central dans a formation des habitudes qui nous
poussent ou nous satisfont, telles que faire de l’exercice ou
fumer. IVAN PAVLOV a découvert qu’il pouvait apprendre
à un chien à saliver au son d’une clochette retentissant
toujours avant le déjeuner. Le chien avait appris que ce son
signifiait l’arrivée prochaine du repas et il se mettait à saliver
rien qu’en l’entendant. Cette forme d’apprentissage appelé
le CONDITIONNEMENT CLASSIQUE survient quand nous
établissons une reation entre deux stimuli distincts.
La récompense et a punition forment une autre
façon d’apprendre, que B.F. SKINNER a baptisée du nom
de CONDITIONNEMENT OPÉRANT. Les comportements
récompensés ont plus de chance d’être reproduits. Quand
votre conjoint sort les poubelles et que vous le récompensez
d’un mot gentil ou en lui cuisinant un repas délicieux,
vous l’aidez à apprendre que sortir les ordures déclenche
de bonnes choses, augmentant ainsi les chances qu’il
recommence. La théorie affirme aussi que nous pouvons
désapprendre un comportement en cessant de le lier à une
récompense ou en l’associant à une punition.
50 APPRENTISSAGE
Les comportements des enfants dérivent beaucoup de
leur conditionnement, et leur communication de l’imitation.
La THÉORIE DE L’APPRENTISSAGE SOCIAL DE BANDURA
se propose de tenir compte des mécanismes nécessaires à
l’imitation efficace d’un comportement, tels que l’attention,
a mémoire et a motivation. Mais c’est a THÉORIE DES
PALIERS D’ACQUISITION DE PIAGET qui est parvenue à
décrire comment les enfants comprennent petit à petit
le monde qui les entoure. Les tout petits sont incapables
de comprendre ce que pensent les autres, mais ils ont
une capacité d’apprentissage du angage extraordinaire.
Chomsky a supposé que c’était parce que leur cerveau avait
accès à des mécanismes d’acquisition tout prêts qui forment
ensemble un DISPOSITIF D’APPRENTISSAGE, qui semble se
bloquer autour de 18ans, rendant l’apprentissage bien plus
difficile par a suite.
La RÈGLE DES 10000HEURES DE GLADWELL accorde
à a pratique une pace plus importante qu’au talent sur
le chemin de a haute performance, mais elle ne tient pas
compte de a qualité de cette pratique, de a chance et du
talent inné, qui contribuent au succès.
La psychologie offre de nombreux outils pour améliorer
l’efficacité des apprentissages, des astuces pour renforcer
notre attention, nos capacités de conceptualisation et notre
mémoire. Des mécanismes plus profonds procurent une
mémorisation plus durable, une découverte attribuée à
Craik et Tulving. Un DISPOSITIF MNÉMONIQUE, qui consiste
à associer un fait, une image ou une histoire à ce dont
nous voulons nous rappeler ou à lui créer une anagramme,
améliore a durée de mémorisation de presque 50 %.
APPRENTISSAGE 51
APPRENTISSAGE
CONDITIONNEMENT
IVAN PAVLOV RÉPONSES CONDITIONNÉES
Physiologiste russe (1849– Les émotions sont apprises en
1936) connu pour ses travaux réponse à des stimuli auparavant
sur le conditionnement neutres. Dans une étude, Watson
classique et son expérience et Rayner montraient des rats à
du chien qui salive (1897) des bébés en même temps qu’un
en particulier. bruit retentissait pour les effrayer.
CONDITIONNEMENT
CLASSIQUE
Les béhavioristes comme
Watson et Pavlov disaient
que nous apprenons nos
CONDITIONNEMENT comportements par un
OPÉRANT mécanisme d’association, où
L’apprentissage se fait par un stimulus produit une
récompense et renforcement réponse précise.
ou punition et dissuasion, le
comportement est contrôlé par
ses conséquences (Skinner).
B.F. SKINNER
RENFORCEMENT Béhavioriste américain
PROGRAMMÉ (1904–1990) qui a développé les
Fourniture des récompenses théories du conditionnement.
selon un ensemble de règles, Célèbre pour son travail sur le
qui affectent les taux de conditionnement opérant et sa
réponse et de disparition des célèbre expérience des «boîtes
comportements concernés. de Skinner» avec des rats.
ASSIMILATION ACCOMMODATION
Une des deux façons (voir Une des deux façons (voir
aussi accommodation) dont aussi assimilation) dont
les informations nouvelles l’information s’intègre
s’intègrent aux schémas aux schémas; quand les
existants; quand l’information schémas sont mis à jour
est modifiée pour s’adapter à un après une information
schéma existant (Piaget). nouvelle (Piaget).
RÉPÉTITION
RÈGLE DES 10000 HEURES MNÉMONIQUE
DE GLADWELL Systèmes mentaux ou appareils
Une pratique répétée pendant au d’aide à la mémoire, comme
moins dix ans, plutôt que le talent, d’associer un fait, une image ou
renforce les connexions neuronales une histoire à quelque chose
et rend le rappel des informations ou dont on veut se rappeler,
des compétences répétées plus facile. ou créer une anagramme.
RÉPÉTITION ÉLABORATIVE
Technique de mémorisation et
d’apprentissage qui implique
l’analyse de l’information durant le
THÉORIE DU
traitement de fond en procédant
TRAITEMENT DE
par association, organisation,
L’INFORMATION
catégorisation ou par des stratégies
DE MILLER
mnémotechniques.
L’esprit humain procède en
quatre étapes: 1)assister à
l’information, 2)la coder, 3)la HYPOTHÈSE DE LA
stocker en mémoire, 4)y PÉRIODE CRITIQUE
accéder plus tard. Idée selon laquelle nous
serions sensibles aux
stimuli linguistiques durant
une certaine période;
au-delà, l’apprentissage
serait plus difficile.
THÉORIE DE
L’APPRENTISSAGE THÉORIE DU
SOCIAL DE BANDURA DÉVELOPPEMENT
Nous observons puis imitons COGNITIF DE PIAGET
les comportements; les L’intelligence des enfants change
conditions, par exemple les avec l’âge, en quatre étapes clés.
récompenses, nous orientent. Ils acquièrent de nouveaux
schémas et étendent les anciens
au fil de leur développement.
MÉCANISMES
DE MÉDIATION
Observation du comportement,
capacité de le reproduire, désir
de le faire. DISPOSITIF D’ACQUISITION
DU LANGAGE (DAL)
DE CHOMSKY
Principes linguistiques innés
pour construire et comprendre le
langage quand nous l’entendons.
DÉVELOPPEMENT
COGNITIF
Sie-os qnd
sonne ’here d dîner?
Si oui, c’est peut-être le résultat d’un
conditionnement cassique. La célèbre étude
de Pavlov, dans aquelle un chien salive
quand sonne l’heure du repas, nous a légué
une idée centrale sur le comportement et
l’apprentissage humains.
54 APPRENTISSAGE
EXPÉRIENCE DU CHIEN DE PAVLOV
B.F. Skinner était un béhavioriste qui Ferster et Skinner (1957) ont introduit
a nuancé les idées pionnières sur le l’idée de renforcement programmé: un
conditionnement de Pavlov et ensemble de règles qui fixe l’attribution des
Watson (page54). À a différence de Watson, récompenses. Ils ont découvert qu’il modifiait
Skinner pensait que a culture comptait autant le taux de réponse (le taux de répétition
que a nature, que le comportement humain d’un comportement adopté en vue d’une
pouvait être inné, acquis, ou les deux. Il récompense) et le taux d’extinction (le taux
estimait que les comportements s’apprenaient auquel le comportement disparaît). Par
néanmoins, et que l’apprentissage s’expliquait exemple, quand a récompense est fournie
le mieux au moyen du paradigme du après un nombre aléatoire de «bonnes
conditionnement opérant: le renforcement réponses», le taux d’extinction est au plus bas.
par récompense et punition. Dans cette On le constate au casino, où les gens jouent
optique, ce sont les conséquences qui sur a même machine un nombre incalcuable
contrôlent le comportement. Quand nos de fois, sachant que a récompense pourrait
actions sont récompensées, il y a plus de tomber à tout moment. Le renforcement
chance qu’elles se répètent, et inversement. continu, où a récompense est fournie pour
Le renforcement augmente a fréquence du chaque bonne réponse, provoque un taux de
comportement, a punition a diminue. réponse lent et un taux d’extinction rapide.
Skinner séparait les renforcements Peut-être parce que a satisfaction vient vite,
positifs ou négatifs et a punition. Imaginez ôtant a nécessité de reproduire a réponse.
que votre patron vous fixe un objectif de tant Skinner a utilisé le conditionnement
de ventes par semaine. Il pourra faire usage opérant pour développer des méthodes de
de renforcement positif en promettant une modification du comportement. Ses travaux
prime en cas de succès, ou de renforcement sont encore appliqués de nos jours dans le
négatif en diminuant votre commission quand domaine de l’addiction, les salles de casse ou
l’objectif n’est pas atteint. les prisons.
56 APPRENTISSAGE
CONDITIONNEMENT
ET BOÎTE DE SKINNER
Skinner a étudié le conditionnement
opérant en paçant des rats dans une
«boîte de Skinner». Côté renforcement
positif, presser un levier libérait un granule
de nourriture. Après l’avoir pressé plusieurs
fois par accident, les rats finissaient par
apprendre et se dirigeaient droit vers le
levier quand ils arrivaient dans a boîte. Côté
renforcement négatif, Skinner soumettait
les rats à un courant électrique, qu’ ils
apprenaient à éteindre en pressant le levier.
pprendre es-i
n e d’imiion?
Albert Bandura le pense. Ses travaux se
sont concentrés sur l’apprentissage des
comportements par imitation. Selon sa
théorie de l’apprentissage social, les enfants
observent puis imitent. Des conditions telles
que les récompenses orientent leurs efforts.
58 APPRENTISSAGE
EXPÉRIENCE DE LA POUPÉE BOBO
DE BANDURA
La règle des dix mille heures de établir un chemin bien tracé entre deux
Malcolm Gadwell (2008) édicte que neurones demande du travail. Quand ils sont
le talent n’est jamais inné. Gadwell a activés en même temps, ils s’associent. Ainsi,
trouvé l’inspiration dans un article de Simon et une pratique répétée renforce leur connexion,
Chase de 1973 sur les joueurs d’échecs, dans et se souvenir des informations ou des gestes
lequel ils jugeaient que c’était grâce à leur répétés devient plus facile.
mémoire des schémas de partie constituée au Plus récemment, a règle de Gadwell a été
fil de leurs années de pratique que les joueurs sous le feu des critiques. Macnamara et Maitra
amélioraient leurs performances. Ils notaient (2019) ont renouvelé l’étude d’Ericsson sans
qu’aucun grand-maître n’avait dédié moins de parvenir à reproduire ses résultats. Les moins
dix ans au jeu avant de recevoir son titre. doués des violonistes avaient en effet moins
La règle des dix mille heures a été de dix mille heures de pratique, mais ce critère
formulée plus rigoureusement par Ericsson et ne fonctionnait plus pour séparer les bons et
ses collègues dans une étude de 1993 sur des les meilleurs (chaque groupe se situait autour
violonistes. Ils ont établi que les différences de 11000heures). Les heures de pratique
de compétence entre musiciens étaient n’expliquaient que le quart de l’écart de talent,
étroitement liées à leur niveau de pratique, contre 48% chez Ericsson.
et que les violonistes de premier pan avaient Gadwell a concédé que d’autres facteurs
intensément pratiqué leur instrument pendant agissaient (qualité de l’entraînement, privilège
dix ans au moins, 10000 heures en moyenne. de naissance, chance et talent inné). Des
Pourquoi? La réponse tient dans le études plus récentes montrent que les dix
mécanisme de consolidation de a mémoire. mille heures ne suffisent pas pour rejoindre
Le cerveau contient environ dix milliards l’élite. Néanmoins, il reste certain qu’une
de neurones. Comme dans une forêt dense, pratique assidue facilite l’accès aux sommets.
60 APPRENTISSAGE
RÈGLE DES 10 000 HEURES
Jean Piaget pensait que les bébés développant, nous construisons de nouveaux
naissent sans a conscience d’une schémas et nous améliorons les précédents.
réalité extérieure à eux-mêmes. En Piaget décrit deux façons d’organiser les
résumé, les enfants se comportent en nouvelles informations pour qu’elles intègrent
mini-scientifiques, ils font des expériences ou étendent un schéma existant. Ces
afin de construire leur représentation mécanismes aident les enfants à progresser
mentale du monde. Ces représentations dans les stades. Le premier mécanisme est
fournissent le cadre où se formera leur l’assimiation, dans lequel nous modelons
compréhension du monde qui les entoure. l’information pour qu’elle s’intègre à un
Selon a théorie du développement schéma, par exemple quand un enfant pointe
cognitif de Piaget, les enfants ne sont du doigt et crie «chien!» quand il voit un
pas moins intelligents que les adultes, loup à a télévision pour a première fois.
seulement, leur intelligence change en Le deuxième est l’accommodation,
grandissant. La théorie propose ainsi quatre quand de grands bonds de compréhension
étapes du développement cognitif: le stade sont effectués à l’occasion de a mise à jour
sensorimoteur (entre 0 et 2ans), le stade d’un schéma. Par exemple, quand le parent
préopérationnel (entre 2 et 7ans), le stade explique que l’animal est un loup, pas un
concret (de 7 à 11ans) et le stade formel (au- chien. L’enfant devient alors capable de
delà de 12ans) (page96). modifier les paramètres du schéma «chien»
Qu’est-ce qui change dans l ’intelligence en ajoutant que les chiens sont apprivoisés, et
d’un enfant qui se développe? La réponse à il ajoutera un schéma séparé pour les loups.
cette question est ce que Piaget appelle le Les stades de Piaget ont été critiqués dans
schéma. Ce sont des briques de construction leurs détails, mais ils ont néanmoins fourni un
cognitives : des unités de savoir qui ont trait cadre utile et influent pour a compréhension
à divers aspects du monde, tels que les du développement cognitif de l’enfant, dont de
objets, les actions ou les concepts. En nous nombreux travaux sont issus.
62 APPRENTISSAGE
ERREUR A-NON- B
A B A B
A B A B
Les expériences de Piaget ont démontré est caché enB. Malgré tout, le bébé le
un phénomène connu sous le nom d’erreur cherche encore enA. L’erreur illustre que
A-non-B, qui survient généralement au le schéma de permanence des objets est
stade sensorimoteur. Un enfant entre9 et alors incomplet: l’enfant n’a pas encore
12mois voit un objet, caché en A. L’enfant compris que les objets existent toujours
cherche enA. Après une répétition, l’objet même quand il ne les voit pas.
Qnd dire be be
’pprenisse d’ne
noee ne?
Les partisans de l’hypothèse de a
période critique diront que c’est quelque
part entre 7 et 18ans. Quoi qu’il en soit, en
vieillissant, notre capacité d’apprentissage
d’une angue diminue significativement.
Que les très jeunes enfants puissent lequel nous sommes le plus sensibles aux
apprendre quelque chose d’aussi stimuli linguistiques. Au-delà, c’est peut-être
compliqué qu’une angue est trop tard pour parler comme un locuteur natif.
proprement incroyable. Pourtant, presque tous La porte du DAL pourrait être fermée.
les enfants de a Terre en apprennent une d’un De nombreuses hypothèses existent
genre ou d’un autre. Ils paraissent bien mieux pour dater a fin de cette période, a plupart
équipés que les adultes pour cette tâche, tournant autour du début de a puberté. Afin
comme s’ils étaient nés pour ça! de trancher, une étude de 2018 de Hartshorne,
Noam Chomsky estime que nous sommes, Tenenbaum et Pinker au MIT s’est servie de
en effet, nés pour apprendre une angue. En l’échantillon le plus grand jamais conçu pour
1969, il a formulé une théorie selon aquelle ce genre d’enquêtes: 670000 personnes. Ils
les humains sont munis d’un dispositif ont découvert que a période critique s’étend
d’acquisition du angage (DAL), composé de bien au-delà de ce que nous pensions, jusqu’à
principes linguistiques innés: un ensemble 17 ou 18ans. Toutefois, égaler le niveau d’un
de possibilités selon lesquelles une angue locuteur natif pourrait ne plus être possible à
peut fonctionner. Le DAL nous permet de moins d’avoir commencé avant 10ans.
comprendre a grammaire à partir de données Les adultes doivent-ils renoncer à
brutes tirées de l’environnement. Il nous suffit l’apprentissage des angues? Pas forcément.
d’entendre cette angue parlée autour de nous Les parler couramment sera peu probable,
pour l’apprendre parfaitement très tôt. mais les parler bien demeure possible. De plus,
Que se passe-t-il si nous ne sommes pas Singleton (1995) a noté que 5% des adultes
exposés à une angue avant un âge avancé, et bilingues le sont devenus à l’âge adulte.
que l’apport du DAL nous fait ainsi défaut? Cea nécessite de travailler dur, toutefois.
L’hypothèse de a période critique pose La facilité d’apprentissage dont bénéficient les
l’existence d’un intervalle de temps dans enfants s’enfuit avec le temps.
64 APPRENTISSAGE
ACQUISITION DU LANGAGE
CHEZ LE JEUNE ENFANT
90
l
r
r rr
l
r r l
l
l
l
80
Enfants américains
% CORRECT
70
60 Enfants japonais
50
Kuhl et son équipe ont démontré que font sans problème. Entre 6 et 8 mois, les
même a première année était critique pour enfants étaient tout aussi compétents les
former nos capacités d’apprentissage d’une uns que les autres pour distinguer les deux
angue. L’ étude comparait a capacité de sons. Mais, parvenus à 12 mois, les enfants
différencier le son «r» du son «l» chez américains y arrivent bien mieux que leurs
des enfants japonais et américains, car les camarades japonais. Ces données illustrent
adultes japonais ont du mal à différencier qu’ il existe une période critique pour a
les deux, tandis que les anglophones le discrimination de certains sons.
Pe-on méiorer
s mémoire?
En quelque sorte. Il n’y a pas de moyen
rapide pour mieux mémoriser l’information,
mais a psychologie nous indique comment
être bien plus efficace au prix d’un effort de
traitement mnémotechnique.
66 APPRENTISSAGE
THÉORIE DU TRAITEMENT
DE L’INFORMATION
ÉTAPE 2
Encodage
ÉTAPE 3
Stockage
ÉTAPE 1
Observation
ÉTAPE 4
Rappel
La théorie du traitement de l’ information est stockée dans un lieu bien précis, par
de Miller s’ inspirait des ordinateurs. Pour le exemple votre dossier «Articles». Par a suite,
comprendre, imaginez que vous écrivez un quand il vous faudra le transmettre, vous
article sur votre ordinateur. Celui-ci constate accédez au fichier dans son dossier Articles,
les symboles que vous tapez. Il les encode où il était stocké, et vous l’envoyez. Comme
pour les afficher sur son écran. En cliquant les ordinateurs, nous traitons l’ information en
sur «Sauvegarder», l’ information encodée l’encodant, a sauvegardant et a rappeant.
CHAPITRE 4 PSYCHOLOGIE
BIOLOGIQUE
CERVEAU SENS
PERFORMANCE
HIPPOCAMPE
DROGUES
SYNESTHÉSIE
CHAPITRE 4
BIOLOGIQUE
SENTIMENTS PSYCHOLOGIE
PROPRIOCEPTION
INTRODUCTION
I
l est rare que des découvertes révolutionnent une
science, et pourtant a biopsychologie a connu plus
de révolutions que toutes les autres branches de a
psychologie. Ce chapitre en présente quelques-unes.
Les scientifiques nous ont révélé que nous disposons
de plus de 50 SENS. Un sens nous informe de a position
de nos membres dans l’espace, a proprioception, ce qui
nous permet d’amener une cuillère de gâteau jusqu’à
notre bouche les yeux fermés. L’équilibrioception tire parti
d’un liquide de notre oreille interne pour nous indiquer
où est le haut, et si nous ralentissons ou accélérons. Nous
nous reposons sur d’autres sens internes indispensables
pour vivre, par exemple pour savoir si nous avons faim ou
si notre vessie est pleine. Les sens interagissent, et cette
interaction poussée à son paroxysme est a SYNESTHÉSIE,
le méange permanent de certains sens.
Nos sens sont a clé de notre expérience du monde,
mais aussi de nos sentiments. Les émotions sont plus que
des sensations corporelles. Elles émergent de nos réponses
aux informations que nos sens nous transmettent, de nos
comportements, de nos pensées et de nos interprétations
du monde. Les psychologues savent que modifier un seul
de ces éléments modifiera nos sentiments, par exemple
quand notre niveau de stress augmente. La LOI DE YERKES
ET DODSON explique comment bien utiliser le stress. Elle
est liée au fait que nous sommes plus efficaces quand
a pression mentale ou physiologique augmente, jusqu’à
70 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
un certain point. Quand il y en a trop, le bien-être physique
et mental chute et les mauvaises habitudes s’installent.
C’est ainsi que nous finissons par nous en remettre au café.
La biopsychologie a écairé le fonctionnement de
médicaments tels que les antidépresseurs et de drogues
telles que a caféine ou a marijuana. Elles interagissent avec
des récepteurs et modifient les NEUROTRANSMETTEURS
du cerveau. Les antidépresseurs aident au recycage de
a sérotonine, l’un des 50 neurotransmetteurs découverts.
Quand nos cerveaux nous lâchent, par exemple
quand nous échouons à reconnaître un visage familier,
nous aimerions pouvoir blâmer l’abus d’une substance.
Cependant, ce n’est un problème que quand cea se répète
tout le temps, par exemple en cas de PROSOPAGNOSIE,
le trouble de a reconnaissance des visages qui survient en
raison de lésions au GYRUS FUSIFORME. En étudiant des
singes, les scientifiques ont localisé six zones cérébrales
responsables de a reconnaissance des visages. Certains
neurones détectent les distances entre les yeux, d’autres
répondent à a texture de a peau, etc.
L’une des découvertes les plus excitantes de a
biopsychologie est que nous pouvons renforcer a zone
de a mémoire dans notre cerveau, l’agrandir et améliorer
son fonctionnement. C’est ce qu’a découvert Maguire: les
chauffeurs de taxi londoniens musclent leur HIPPOCAMPE
en apprenant petit à petit le dédale des rues et des ruelles
de Londres et de ses environs.
PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE 71
PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
AFFECT
Expérience d’une
sensation, d’une émotion ou SENS
d’une humeur. Contribue à une Nous avons plus de 50
variété de dispositions mentales, sens internes et externes,
pas seulement aux émotions, indispensables à notre
et peut influencer nos expérience du monde et
interprétations des stimuli. à nos sensations.
NEURONES DU VISAGE
Dans le cerveau du macaque, six
RÉPONSES
EXCITATION
PROPRIOCEPTION
SYNESTHÉSIE
Mélange permanent des SYNAPSES
sens, la stimulation de Petits intervalles entre
l’un entraînant celle d’un les neurones ou entre un
ou plusieurs autres. neurone et un muscle ou
une glande, où les signaux
nerveux sont relayés, souvent
par des neurotransmetteurs.
HIPPOCAMPE
Structure dans le lobe
temporal du cerveau;
centrale pour la mémoire
GYRUS FUSIFORME NEUROTRANSMETTEURS et l’apprentissage, mais
Aire du cerveau à la base Messagers chimiques qui également impliquée dans
du crâne impliquée dans permettent aux neurones les émotions et les désirs.
la reconnaissance des de communiquer entre eux,
visages et la perception ou avec des glandes ou des
des couleurs. muscles, via une synapse; CELLULES DE LIEU
ils se lient à des récepteurs Cellules spécialisées
sur le neurone adjacent. de l’hippocampe qui
s’activent quand un animal
se trouve dans un certain
lieu (O’Keefe); découverte
PROSOPAGNOSIE central pour l’étude de la
Altération de la carte cognitive.
reconnaissance des
visages, issue de lésions
dans le gyrus fusiforme.
SYSTÈMES NERVEUX
Le système sympathique
consiste en nerfs, glandes et
organes, il contrôle la réponse
combat-fuite; le système
parasympathique prépare le
corps au repos et à la digestion.
ons-nos bien
cinq sens?
Nous entendons, goûtons, sentons,
voyons et touchons, mais est-ce bien tout?
Les cinq sens sont un dogme bien enraciné.
Mais ce n’est pas si simple. Creusez un peu
plus et vous découvrirez que le nombre
exact est encore à déterminer.
74 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
SYNESTHÉSIE
DU MIROIR
76 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
BIAIS D’INTERPRÉTATION
78 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
PERFORMANCE
Optimum
Vigilance
Anxiété
Sommeil Désorganisation
STRESS
STRESS ET PERFORMANCE
Selon a loi de Yerkes et Dodson, en quantité Il existe donc un niveau optimal de stress,
modérée le stress améliore a performance. situé quelque part entre a vigiance
Il est impossible d’ être performant quand on minimale et l’anxiété maximale, dans lequel
est si détendu qu’on s’endort, ou quand on notre attention est à son pic et notre jeu à
est si stressé que nos pensées se brouillent. son meilleur.
Commen es droes
on-ees pner?
Aucune drogue ne fait vraiment paner,
mais beaucoup altèrent notre fonctionnement.
Aiguisant a concentration ou déclenchant une
fringale, les drogues modifient l’équilibre
chimique délicat de notre cerveau.
80 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
PARCOURS DU
SIGNAL NERVEUX
Le signal nerveux se dépace le long des
neurones sous forme de signal électrique,
jusqu’ à ce qu’ il atteigne un vide appelé
synapse. Pour franchir ce vide et atteindre
le neurone suivant, il faut le convertir en un
signal chimique appelé neurotransmetteur.
Une fois de l’autre côté, il est reconverti en
signal électrique et poursuit son chemin.
Comme une voiture qui, parvenue au bout
de a route, doit prendre un ferry pour
traverser une rivière (qui représente ici a
synapse), et qui, une fois sur l’autre rive, peut
poursuivre son chemin.
Commen reconnîre
n ise?
Nous reconnaissons les gens surtout à
leur visage. Des cellules spécialisées du
cerveau réagissent à des critères faciaux
spécifiques, ce qui nous aide à reconnaître
un visage connu.
Pour sourire à son voisin et faire a Des études d’imagerie, où des patients
grimace à son chef, il est sains allongés dans un scanner regardent des
indispensable de reconnaître leur visages, ont depuis confirmé l’importance de
visage. C’est une compétence que nous cette région du cerveau, et des études sur les
acquérons presque tous assez tôt et que nous primates ont été encore plus loin en
conservons bien, malgré quelques gaffes repérant certaines des cellules individuelles
gênantes au passage, même dans le grand responsables. Le cerveau d’un macaque
âge. Cea nous aide à déterminer non adulte contient des milliards de neurones,
seulement l’identité des gens, mais aussi ce mais reconnaître les visages pourrait n’en
qu’ils ressentent et ce qu’ils pensent. impliquer que 200. Les travaux de Doris Tsao
Reconnaître les visages constitue ainsi une et Steven Le Chang ont montré que ces
part importante des interactions sociales. cellules sont localisées dans six régions
Les scientifiques ont beaucoup appris de différentes. Certaines réagissent aux
cette compétence en étudiant ceux qui différences spatiales, a distance entre les
l’avaient perdue, suite à des lésions cérébrales yeux ou a taille de a bouche par exemple,
ou à une maadie. Le célèbre neurologue d’autres aux différences de matière, par
Oliver Sacks a ainsi décrit «l’homme qui exemple le teint ou a texture de a peau.
prenait sa femme pour un chapeau». Un Le cerveau des macaques étant très
patient de Sacks souffrait d’agnosie visuelle, sembable à celui des humains, nous
un trouble rare qui le rendait incapable de pouvons extrapoler à partir de ces
reconnaître de visu des personnes ou des recherches jusqu’à nous: il se pourrait que
objets familiers. De même, les gens qui nos cerveaux traitent les visages comme
souffrent de prosopagnosie ne reconnaissent a somme subtile de plusieurs groupes
pas les visages, y compris le leur. Bien souvent, d’éléments plutôt que comme une seule
ce qui explique ces troubles est une lésion du entité. La prochaine fois que vous ignorez
gyrus fusiforme, région clé du cerveau située votre patron «sans faire exprès» en le
vers a base du crâne, apparemment formée croisant dans le couloir, vous pourrez blâmer
pour réagir aux visages. vos neurones!
82 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
MONSIEUR LÉGUME
Que voyez-vous? Pour a plupart, a réponse Ces troubles peuvent être héréditaires ou, plus
est évidente: un visage composé de légumes. rarement, être le résultat de lésions cérébrales
Mais pour les environ 2% d’entre nous qui ou d’une maadie. Les sujets atteints se
souffrent de troubles de a reconnaissance reposent alors sur des informations n’ayant
des visages, il n’y en a pas dans cette image; pas trait aux visages, par exemple a voix ou
ce sont les ingrédients d’un curry de légumes. les vêtements, pour reconnaître les gens.
Commen n xi se
soien des rccorcis?
Le temps et les efforts qu’un chauffeur
de taxi accorde à mémoriser le pan d’une
ville font grandir des régions de son cerveau,
avec des résultats spectacuaires sur son sens
de l’orientation.
Le compteur tourne et voilà que le Des études ont montré que, chez les
taxi prend à gauche sans prévenir. Il espèces qui cachent souvent leur nourriture,
vous assure que c’est plus court par l’hippocampe est en moyenne plus gros que
là, et avant même que vous ayez protesté, chez les espèces de même taille qui n’ont pas
vous voici à destination. Donnez-lui un besoin de se souvenir en détail d’informations
pourboire et dites merci au Knowledge! spatiales, ce qui a poussé Eleanor Maguire à
Le Knowledge est le célèbre test pour se demander s’il en alait de même pour les
les chauffeurs de taxi londoniens. Avant chauffeurs de taxi. Dans une étude de 2000,
d’être ancés dans les rues, ils doivent elle a comparé leurs cerveaux à ceux d’un
mémoriser les 25000 routes et les milliers groupe de contrôle à l’IRM et découvert qu’ils
de lieux connus. Ils passent de nombreux avaient en effet un plus gros hippocampe.
examens au fil de plusieurs années et, ceci Cea suggérait un lien entre taille de
fait, ils connaissent tous les raccourcis et les l’hippocampe et mémoire spatiale, mais cea
chemins de traverse sans jeter un œil à leur ne prouvait pas qu’apprendre le Knowledge
GPS. Comment font-ils? causait le changement. Peut-être qu’un gros
Les scientifiques soupçonnent ici hippocampe poussait leur propriétaire à
un rôle de l ’hippocampe, une structure devenir chauffeur de taxi...
cérébrale du lobe temporal. Il y a cinquante Maguire a scanné le cerveau de chauffeurs
ans, John O’Keefe a prouvé l’existence des débutants avant et après l’entraînement et
cellules de lieu: des cellules spécialisées comparé les scans à leurs scores lors du test.
dans l’hippocampe qui s’activent quand un Avant le Knowledge, a taille de l’hippocampe
animal arrive dans un endroit particulier. Sa ne varie pas; après, il grossit chez ceux qui
découverte a abouti sur l’idée des cartes l’ont obtenu. Apprendre le Knowledge fait
cognitives, les représentations mentales bien grossir le cerveau, et c’est comme ça que
que nous formons des lieux et des chemins. les taxis se souviennent des raccourcis.
84 PSYCHOLOGIE BIOLOGIQUE
LE KNOWLEDGE
IDENTITÉ
ÉGOCENTRICITÉ
STRESS
PERSONNEL
INTERACTION
SOCIALE
CONFUSION
CONFLIT
DES RÔLES
CHAPITRE 5
DÉELOPPEET
PSYCHOLOGIE DU
ATTACHEMENTS
DÉVELOPPEMENT
PSYCHOSOCIAL
INTRODUCTION
I
maginez devenir plus fin, plus grand, plus capable et
plus curieux en deux ans à peine. Ce n’est pas facile
d’imaginer un tel changement en si peu de temps.
Pourtant, vous avez déjà changé comme ça par le
passé, et même plusieurs fois. Nous ne nous développons
jamais plus rapidement que durant l’enfance. Ce chapitre
se consacre aux aspects fascinants de a croissance
et de l’apprentissage chez l’enfant, aux stades de
développement fondamentaux qu’il traverse sans même
s’en rendre compte.
Bowlby a noté que nos premières reations devaient
nous apporter plus que de a nourriture si nous voulions
survivre et nous épanouir. Le confort, a protection et a
sécurité sont des ingrédients clés pour créer des liens sains
et durables. MARY AINSWORTH a étudié comment les
enfants se lient à leur mère et pourquoi c’est important.
En observant des enfants réagir quand leur mère et un
étranger rejoignent ou quittent une pièce, elle a distingué
quatre styles d’attachement, du plus sûr au moins certain.
Ce dernier paraît lié à de futurs problèmes reationnels,
d’estime de soi et de santé mentale. Est-ce qu’il rend aussi
plus vulnérable au stress?
Avant de comprendre comment les gens surmontent
le stress, les psychologues ont dû trouver une manière de
le mesurer. À peu près en même temps que a théorie de
l’attachement se développait, Holmes et Rahe ont tenté de
mesurer dans le détail les effets des grands événements,
tels que les déménagements, deuils et divorces. Même
88 PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT
si on peut les relier à une dégradation de a santé plus
tard, Kanner a découvert que nos ENNUIS QUOTIDIENS
étaient bien plus problématiques qu’une période ponctuée
d’ÉVÉNEMENTS intenses. Depuis, les psychologues ont
découvert qu’un mode d’attachement insécure handicapait
beaucoup quand il s’agissait de soutenir un stress intense.
Les premières expériences qui nous pacent dans ce mode
peuvent rendre très inconfortables les stratégies ultérieures
de recherche d’aide, par exemple.
Quel que soit le lien qui se forme entre le parent
et l’enfant, celui-ci ne pourra voir le monde que par ses
propres yeux. Sur son chemin vers l ’âge adulte, il franchira
ce que Piaget a appelé les stades du développement
cognitif et se formera une THÉORIE DE L’ESPRIT. À
l’adolescence, il comprendra que les autres vivent, pensent
et ressentent différemment de lui, et pourra même inférer
leurs pensées et leurs sentiments.
La théorie d’Erikson du développement psychosocial
couvre toute l ’étendue de a vie. Bébés, nous apprenons
a confiance et a méfiance, sous le signe de l’espoir. Passé
65ans, nous nous concentrons sur l’acceptation, contre le
désespoir, sous le signe de a sagesse.
On peut trouver des significations à tous les gestes
d’un enfant, jusque dans ses jeux. Le jeu apprend aux
enfants à donner et recevoir, à communiquer. Dès 5ans, ils
sont capables de coopérer au cours de leur jeu, ce qui est
très important pour former leur capacité à colaborer et
essentiel au succès de notre espèce au sens arge.
PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT 89
PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT
COLLABORATION
Assigner et accepter les rôles
AUTISME distincts que chacun joue pour
Trouble du atteindre un objectif commun.
développement qui
dure toute la vie et affecte
la communication et les
interactions avec le monde;
JUDITH DUNN
Psychologue britannique (1939–)
un déficit de théorie de l’esprit
spécialisée dans la psychologie
est fréquent.
sociale du développement et la
compréhension sociale chez le
jeune enfant.
RELATIONS SOCIALES
THÉORIE DE L’ESPRIT
Liens formés avec des
Capacité de deviner les
personnes en dehors du foyer,
croyances, les émotions
au travers desquelles les enfants
et les pensées des autres,
apprennent à jouer de manière
employée dans toutes
«socialement acceptable».
les situations sociales.
FAUSSES CROYANCES
Opinions erronées issues de
raisonnements ou d’hypothèses
incorrects; aspect important de
la théorie de l’esprit.
ÉGOCENTRICITÉ
Percevoir le monde de son
TRACAS QUOTIDIENS seul point de vue et penser
Usure de tous les jours; l’échelle que les autres voient le
de Kanner (1981) se concentre sur monde comme nous.
117 de ces corvées pour évaluer
la probabilité d’apparition de
troubles liés à l’anxiété.
STRESS
DYNAMIQUE
THÉORIE DE
L’ATTACHEMENT
PERTURBATION LUDIQUE DE BOWLBY
Tester les limites des situations Liens développés avec ceux
sociales en externalisant un qui s’occupent de nous. Les liens
comportement. précoces nous apportent non
seulement la nourriture, mais
aussi le confort, la protection
et la sécurité.
STADES
VERTUS
Huit traits désirables qui peuvent
être acquis à chacun des huit
stades de la vie: espoir, volonté,
détermination, compétence,
fidélité, amour, sollicitude et
sagesse (Erikson).
CONFLITS PSYCHOSOCIAUX
Incompatibilité entre nos
besoins psychologiques et notre
environnement social. Leur
CONCEPT DE SOI résolution, ou leur non-résolution,
Sens de la direction que prend influence le développement de
notre vie, foi en nos propres notre personnalité (Erikson).
croyances et conscience de notre
rôle dans la société.
Es-ce qe e sress
coe ssi es mrins?
Un stress prolongé peut faire couler tout
le monde, marins inclus, mais il prend bien
des formes. Les psychologues ont conçu
plusieurs échelles pour le quantifier, lui et
les conséquences qu’il fait peser sur nos vies.
La vie est un parcours d’obstacles, suivantes. Plus le score et donc a gravité des
ponctué de défis et de surprises. événements vécus augmentent, plus sera
Certains changements, comme a fréquente a survenue de troubles mentaux.
naissance d’un bébé, ou un accident, sont Il semblerait bien que le stress puisse couler
source de stress, mais à quel point? Et quelles même les marins.
en sont les conséquences? L’American Institute of Stress considère
En 1967, les psychiatres Thomas Holmes qu’un score annuel au-dessus de 300
et Richard Rahe ont conçu un questionnaire donne 80% de chance de développer des
pour quantifier le stress. Il se concentre sur troubles liés au stress, tels qu’une anxiété
les grands événements, les expériences pathologique ou une dépression, dans les
susceptibles d’en produire le plus dans deux ans. Cependant, même si le stress
nos vies. Ils ont ainsi assigné des valeurs à chronique paraît bien contribuer à ces
43événements, selon leur impact potentiel. problèmes, les preuves manquent pour
La mort du conjoint est le plus élevé, avec un confirmer a pertinence du cassement.
indice de 100 «unités de bouleversement», D’une part, ces événements sont rares,
le divorce arrive en deuxième pace, avec73. si bien que se concentrer sur les tracas
Les événements moins dramatiques, comme quotidiens pourrait constituer une meilleure
changer d’école, partir en vacances ou recevoir mesure: angoisser sur son poids, perdre son
une amende de stationnement, ont des scores téléphone. En gardant cea en tête, A.D. Kanner
inférieurs à 20. Ils ont appelé cea l’Échelle de a conçu une autre échelle en 1981, qui identifie
réajustement social (ERS). 117 de ces tracas quotidiens et il a découvert
Trois ans plus tard, Rahe a testé son que a corréation entre ces tracas et les
questionnaire sur 2500 marins américains. Il a troubles liés au stress était supérieure à celle
découvert une corréation positive entre leurs constatée par l’ERS. De multiples sources de
scores et leur santé mentale dans les années stress mineur font aussi couler les marins...
92 PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT
ÉVÉNEMENTS MAJEURS
Perdre un être cher ou faire de a prison
est évidemment source de stress, mais des
événements supposés heureux le sont aussi.
Holmes et Rahe ont inclus des événements
aussi bien positifs que négatifs dans leur
Échelle de réajustement social. Une grossesse
ou des vacances, par exemple, sont des
événements à a fois positifs et stressants.
L’ échelle révèle l’effet cumuatif du stress,
donc le fait que de multiples événements
mineurs peuvent avoir autant d’ impact qu’un
événement majeur.
1. Mort du conjoint
2. Séjour en prison
3. Grossesse
4. Nouvelle école
5. Vacances
1 3 5
100 63 40 26 13
UNITÉS DE BOULEVERSEMENT
Doi-on êre sr
qnd on s’che?
Oui. Les attachements ne sont pas
toujours bons, et plus ils sont sûrs, mieux c’est.
Chez l’enfant, les attachements précoces avec
les adultes qui prennent soin de lui auront des
conséquences pour toute sa vie. S’ils sont
sécures, il gagnera plus tard en bien-être.
94 PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT
STYLES D’ATTACHEMENT
Les quatre styles d’attachement chez les catégoriser. Il faut noter toutefois que
l’enfant tels qu’observés par a psychologue l’expérience était limitée à une organisation
Mary Ainsworth dans son expérience de familiale nucléaire de casse moyenne
a «situation étrange», qui lui a permis de cassique, typiquement occidentale.
En 1936, le psychologue suisse Piaget a fois (c’est a centration) et il est toujours très
a défini quatre stades fixes du absorbé par son propre monde visuel. Il peut
développement cognitif par se servir du angage dans ses jeux, mais pour
lesquels tout enfant passera entre 0 et 11ans. externaliser sa propre pensée plutôt que pour
En franchissant ces stades, les enfants communiquer avec les autres.
découvrent activement leur environnement, Le stade3, le stade opératoire concret
ils l’explorent et ainsi développent leurs (entre 7 et 11ans), marque le début de a
représentations mentales (voir les schémas, pensée logique et raisonnable, et de son
page62) du monde. Et selon Piaget, à mesure application aux objets physiques. L’enfant
qu’il les franchit, son égocentricité réduit. commence à comprendre que ses pensées et
Qu’est-ce que l’égocentricité? C’est a ses sentiments sont uniques et que les autres
tendance à percevoir le monde de notre seul ont les leurs propres, mais il n’est pas toujours
point de vue et de supposer que les autres capable de déterminer ou de s’intéresser à
voient le monde comme nous. Si les enfants l’expérience d’autrui.
sont égoïstes, c’est parce qu’ils sont encore en Le dernier stade, le stade formel (après
développement! 11ans), passe par l’application de a pensée
La première étape de a réduction de logique à des problèmes abstraits (c’est a
l’égocentricité est le stade sensorimoteur pensée abstraite). La capacité de penser par
(de 0 à 2ans). Un enfant relie ses sens à ses hypothèse aide l ’enfant à comprendre les
capacités motrices pour construire son points de vue différents du sien.
intelligence. Il commence par apprendre que Est-ce que nous nous arrêtons là dans
les objets existent même quand il n’est pas là notre développement? Oui, selon a théorie
(c’est a permanence des objets). de Piaget, mais d’autres pensent que nous
Puis vient le stade préopératoire (entre 2 continuons à développer nos schémas
et 7ans). L’enfant explore au travers de jeux mentaux et nos connaissances encore après,
symboliques ou de jeux de rôle. Il tend à se par nos interactions avec les autres dans
concentrer sur un seul aspect des situations à notre environnement social.
96 PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT
EXERCICE DES TROIS MONTAGNES
POINT
POINT
A
POINT
98 PSYCHOLOGIE DU DÉVELOPPEMENT
ÉCHAFAUDAGE
DE BRUNER
En 1983, Bruner et ses collègues ont employé
le terme «échafaudage» pour décrire
a manière dont parents et enseignants
créent un cadre (un échafaudage) pour
l’apprentissage des enfants. L’objectif est
de leur permettre de résoudre, à terme, les
problèmes par eux-mêmes. Comment? En
proposant une action, comme de secouer un
hochet, afin que le comportement soit imité,
en donnant des indices, ou en découpant
le problème en morceaux, comme un
échafaudage qui pourra s’agrandir.
L socibiié es-ee
n e d’enn?
Oui, répond Judith Dunn, spécialiste de
a psychologie du développement social.
Les recherches de Dunn explorent les façons
dont les enfants apprennent à interagir de
façon socialement appropriée.
Les enfants grandissent dans un sont plus disposés à partager leurs pensées et
environnement social complexe. leurs sentiments avec des amis, si bien qu’ils
Dans toute structure familiale, il y a en apprennent plus sur les autres.
des rôles, des règles que l’enfant doit découvrir Avec une meilleure communication vient
et apprendre, c’est ce qui les aide à se a colaboration facilitée. Assigner et accepter
développer socialement: le jeu social, a les rôles distincts de chacun dans le cadre
coopération et les taquineries. La qualité des d’une activité commune. Dunn a constaté que
interactions familiales et a capacité de l’enfant dès 4 ou 5ans, les enfants s’engagent dans
à discuter et réfléchir sur ses expériences des jeux coopératifs, comme de construire
forment leur compréhension des normes ensemble un bonhomme de neige. Ces
sociales et des émotions. Dunn a découvert compétences seront utiles quand il s’agira
que les enfants, dès 4ans, étaient capables de plus tard de colaborer à l’école ou dans
se rappeler leurs émotions et leurs pensées d’autres contextes sociaux, comme le sport.
lors de leur premier jour d’école, par exemple: Quand nous connaissons bien quelqu’un,
«J’étais triste, je vouais maman.» nous savons ce qui l’agace et ce qui lui paît,
Les expériences vécues hors de a nous pouvons ainsi le taquiner. Selon Dunn,
maison sont importantes. À 3 ou 4ans, les cea commence (sans surprise) entre frères
enfants gagnent en indépendance vis-à- et sœurs. La perturbation ludique, comme
vis des adultes. Ils ont plus d’opportunités prendre a Nintendo de sa sœur, sert à attirer
de sociabilisation avec d’autres enfants, au l’attention et à rigoler, mais aussi à tester les
travers desquelles ils apprennent à donner et limites de certaines situations sociales. Avec
recevoir afin de jouer de manière socialement l’aide des adultes (parents, enseignants), nous
acceptable. Il y a moins de dynamiques de découvrons ce qui est socialement acceptable,
pouvoir dans ces interactions, les enfants et ce qui ne l’est pas.
Une théorie de l’esprit est a supposeriez que votre ami est tout aussi
capacité de prêter des croyances, en forme que vous et, si ce n’était pas le
des émotions, des pensées à autrui. cas, vous ne comprendriez pas qu’il dise le
Pourquoi n’est-ce qu’une théorie? Nous ne contraire. C’est parfois ainsi que raisonnent
pouvons jamais être sûrs de ce que pensent les personnes autistes; le déficit de théorie
les autres ni de leurs raisons d’agir, mais nous de l’esprit est commun dans l’autisme,
pouvons nous en faire une idée, produire cea se remarque dès l’enfance, durant le
une théorie, de ce qui se passe dans leur développement.
tête. Sans théorie de l’esprit, nous serions Des recherches indiquent cinq étapes
réduits à supposer que tout le monde pense principales menant à a théorie de l’esprit
a même chose que nous. lors du développement, dont comprendre
Nous nous servons de cette théorie tous que les gens ont des désirs et des croyances
les jours, surtout dans les situations sociales. différents, qu’ils peuvent avoir des
Imaginez qu’il est vingt heures et que vous croyances fausses, qu’ils peuvent cacher
et un ami sortiez boire un verre; vous êtes leurs émotions. Ces domaines apparaissent
en pleine forme, mais lui bâille beaucoup autour de 3ans, mais leur ordre varie selon
et lutte pour garder les yeux ouverts. Vous les cultures. Chacun forme une partie
utilisez votre théorie de l’esprit pour deviner importante de a théorie de l ’esprit, et
ses sentiments et vous vous dites: «Il a l’air apparaît en général autour de 5ans.
fatigué, il veut peut-être rentrer.» Vous lui L’exercice le plus simple qu’emploient
demandez, il répond que tout va bien. Vous les psychologues pour étudier le
utilisez votre théorie de l’esprit une nouvelle développement de a théorie de l’esprit
fois pour vous demander si c’est bien ce chez un enfant est de déterminer s’ils
qu’il pense. Sans théorie de l’esprit, vous comprennent les croyances fausses.
Où cherche Sally?
Qe es ore rôe dns
e hére de ie?
La théorie des stades du développement
psychosocial d’Erikson considère a vie comme
un voyage de l’espoir vers a sagesse, en
passant par toutes les vertus intermédiaires,
au cours duquel se forme l’identité.
EFFET
QI FLYNN
PYRAMIDE
DES BESOINS
DE MASLOW
PERSONNALITÉ
INTELLIGENCE
ÉMOTIONNELLE
MOTIVATION
CHAPITRE 6
IDIIDUELLES
DIFFÉRECES
N –ACH
ANALYSE DES
FACTEURS
INTRODUCTION
C
ertains paraissent savoir tout faire. Quand nous
entendons parler de leurs exploits, nous nous
disons qu’ils doivent être plus volontaires ou plus
intelligents que nous, à moins qu’ils ne se soient
taillé une personnalité plus forte. Ce chapitre s’intéresse à
nos différences individuelles dans le cadre des activités qui font
notre succès ou notre bonheur.
Ce qui pousse les gens dans a vie est avant tout leurs
besoins élémentaires, remplir leur estomac, se protéger
du froid. Une fois ces besoins assurés, chacun ira chercher
ses motivations dans ce qui compte le plus pour elle ou
lui. Beaucoup s’attachent à des besoins pourvus d’une
signification profonde, tels que le lien avec autrui ; d’autres
courront après le succès ou l’expérience du pouvoir. Maslow
nous enseigne que a source de motivation a plus élevée est
a pulsion de centrage spirituel, un état d’esprit qui sépare les
bons des meilleurs et que bien peu atteignent.
Comparées au passé, les demandes de nos cerveaux
sont variées et complexes, ce qui explique en partie que
nous devenons de plus en plus intelligents. C’est l ’EFFET
FLYNN, qui désigne les gains d’intelligence qu’on observe
par comparaison entre deux périodes historiques. Ainsi,
en moyenne, les hommes du XIXe siècle lutteraient
pour obtenir les mêmes résultats que nous lors de tests
d’intelligence.
Cependant, a psychologie a renoncé à prendre les
performances sur un genre très spécifique de tests comme
étalon d’intelligence. Selon les psychologues, étant donné
DIFFÉRENCES INDIVIDUELLES
PENSÉE ABSTRAITE
Raisonnement logique et
EFFET FLYNN
résolution de problèmes;
Gains constatés en intelligence
parfois nommée
(QI moyen) avec le temps,
«intelligence fluide».
d’environ 3 points de QI par
décennie dans les sociétés
PYRAMIDE
industrialisées (Flynn).
DE MASLOW
Structure de nos motivations:
de la plus basique, la survie, tout
en bas, à la plus élevée,
la transcendance, tout en haut,
en passant par l’amour
et l’appartenance.
THÉORIE
TRIARCHIQUE
DE L’INTELLIGENCE
DE STERNBERG
Plutôt que le QI, trois catégories INTELLIGENCES MULTIPLES
d’intelligence sont plus adaptées DE GARDNER (IM)
au monde moderne: pratique, Les humains sont dotés de
créative et analytique. différents niveaux de toutes
les IM, définies par un jeu de
critères stricts et divisées en
neuf types.
INTELLIGENCE
INTELLIGENCE
ÉMOTIONNELLE (IE)
Consiste en cinq compétences
pour maximiser ses
performances ou celles d’autrui:
recul, modération, motivation,
empathie, sociabilité (Goleman).
DANIEL GOLEMAN
Psychologue américain (1946–)
SYSTÈME LIMBIQUE
connu pour ses travaux sur
Partie du cerveau dans le
l’intelligence émotionnelle,
lobe temporal qui contrôle
surtout dans le domaine du
les pulsions, les sentiments
management et des affaires.
et les motivations. Goleman
conseille aux formations
professionnelles de se
concentrer sur sa stimulation.
BESOINS
INTERPRÉTATION
ALTERNATIVISME CONSTRUCTIF
Constructs alternatifs pour nous aider
en certaines situations; comprendre
les constructs d’autrui pour expliquer
leur comportement (Kelly).
ACCOMPLISSEMENT
Au sommet de la pyramide de CONSTRUCTS
Maslow: s’accomplir au mieux Schémas mentaux individuels
de ses capacités. Une personne qui nous aident à prévoir,
accomplie cherche toujours souvent fondés sur l’expérience
à s’épanouir encore. passée (Kelly). Ils influencent
aussi nos souvenirs.
LE ‘N - ACH’ DE MCCLELLAND
«Need for achievement» ou
«Besoin de succès»: trait présent
chez ceux pourvus du désir inné
d’accomplir de grandes choses. PÔLES ÉMERGENT/IMPLICITE
Les constructs naviguent entre
deux pôles: le pôle émergent,
d’où ils sont appliqués, et le
pôle implicite, qui n’est pas
activement appliqué.
BIG FIVE DE
MCCRAE ET COSTA
(OCEAN)
Cinq traits qui, en quantité
différente, peuvent décrire les
personnalités et caractériser
tous les adultes: Ouverte,
Consciencieuse, Extravertie, ANALYSE FACTORIELLE
Agréable, Névrotique. Technique d’analyse statistique qui
identifie les motifs cachés et réduit
de gros ensembles de données en un
petit nombre de facteurs sous-jacents.
PERSONNALITÉ
Pe-on ire de pin
e d’e rîche?
Physiologiquement, oui, mais nos
besoins émotionnels ne seront pas remplis.
Selon Maslow, nous sommes tous poussés
par un besoin d’épanouissement et de
découverte de soi. Une fois les besoins
biologiques assurés, nous passons à
d’autres, plus ambitieux.
Qu’est-ce qui nous pousse? Maslow personnalité. David McCleland a ainsi inventé
a proposé une organisation le N-Ach («Need for ACHievement», besoin
pyramidale de nos besoins, avec les de succès) pour décrire une personnalité
besoins basiques de a survie, eau, nourriture, abritant le désir inné d’accomplir de
chaleur, tout en bas. Une fois ceux-ci assurés, grandes choses. Les personnes N-Ach sont
ce qui nous pousse devient plus compliqué, incapables de vivre de pain et d’eau fraîche,
par exemple le besoin d’intégrer un groupe il leur faut des défis et de l’indépendance,
(amour et appartenance), jusqu’à des besoins et a récompense a plus précieuse à leurs
transcendants, au-delà de soi, comme ceux yeux: de a reconnaissance. Il faut qu’on
de a foi religieuse (transcendance). reconnaisse leurs succès. De l’autre côté de a
Ces besoins sont décrits selon une barrière, les personnes dépourvues de N-Ach
hiérarchie où les besoins de base doivent être ne cherchent pas le succès et pourront
remplis avant de passer à a suite, mais on choisir de s’investir dans des tâches faciles
estime que certains «sautent» les niveaux en afin de réduire le risque d’échec, ou au
fonction de leurs différences individuelles ou contraire si difficiles que l’échec n’y est
de leur environnement. Atteindre le sommet plus très embarrassant. McCleland
ne signifie pas que plus rien ne nous pousse. montrait à ces sujets d’expérience des
Une personne accomplie cherche toujours à images de situations sociales ambiguës
s’épanouir encore, à faire tout ce qu’elle peut et leur demandait de décrire le
pour cea. Toutefois, Maslow estime que seuls scénario constaté, afin de déterminer
2% des gens atteignent ce stade, l’un d’eux quel rôle jouait le N-Ach chez chacun.
ayant été Albert Einstein! Il existe aussi une cassification en
D’autres psychologues pensent que les fonction du besoin d’affiliation (N-Aff)
motivations de chacun sont fonction de sa et du besoin de pouvoir (N-Pow).
Interpersonnelle
Kinesthésique Linguistique
Logique
Musicale
Naturaliste
Intrapersonnelle
Spatiale Existentielle
Gardner pensait chacun pourvu de tous les d’ intelligence leurs élèves privilégient.
types d’intelligence à différents niveaux. Il Adapter son enseignement selon cette
estimait qu’elle se localisait en différentes information facilitera leur apprentissage,
régions cérébrales, mais cea n’a jamais le système éducatif traditionnel ayant
été prouvé. Il peut être toutefois utile tendance à ne se concentrer que sur les
aux professeurs de reconnaître quel type intelligences linguistique et logique.
Un bon che pe-i
monrer ses émoions?
On ne s’y attendait pas, et pourtant,
en1998, les recherches de Daniel Goleman ont
montré que les meilleurs leaders étaient ceux
dotés d’une grande intelligence émotionnelle,
autrement dit capables de comprendre leurs
émotions et celles des autres.
Une entreprise qui avait mis en pace l’empathie, facile à détecter chez les chefs
les découvertes de Goleman en ne capables. Encadrer une équipe revient
sélectionnant que des cadres dotés souvent à méanger un chaudron bouillonnant
d’une haute intelligence émotionnelle a vu son d’émotions. Il faut comprendre les émotions
chiffre d’affaires annuel augmenter de 20%. de tout le monde et les traiter en fonction.
Qu’est-ce que l’intelligence émotionnelle (IE)? Enfin, être capable d’entretenir des reations
L’IE est composée de cinq capacités qui et de construire un réseau, autrement dit a
permettent de maximiser ses performances et sociabilité, est une composante clé. Goleman
celles des autres. a décrit comme «l’amabilité orientée». C’est
D’abord, le recul sur soi, qui permet de le point culminant des autres capacités.
comprendre pleinement ses propres émotions La bonne nouvelle, c’est que, même
et pulsions, et de déterminer leurs effets si les recherches pointent vers une forte
sur autrui. Cea peut se traduire par une soif composante génétique à l’IE, elle s’apprendrait
de critiques constructives ou un goût pour aussi. Goleman conseille aux entreprises de se
l’auto-dérision. Ensuite, a modération, qui concentrer sur des formations qui stimulent
désigne le contrôle et a canalisation des le système limbique, a partie du cerveau
pulsions, ainsi que a suspension du jugement. qui contrôle les pulsions et les émotions.
Goleman a découvert que cea produisait Actuellement, a plupart des formations de
une atmosphère de confiance et d’équité. Un cadres parlent plutôt au néocortex, impliqué
chef au tempérament colérique ne fait pas un dans les capacités analytiques et techniques.
bon leader. Vient ensuite a motivation: un Même sans entraînement, l’intelligence
bon chef doit avoir a passion de son emploi, émotionnelle s’améliore avec l’âge: plus nous
au-delà du saaire ou du prestige qu’il lui vieillissons, plus nous gagnons en maturité
procure. Il tiendra souvent un tableau de ses émotionnelle. Bien sûr, certains chefs auront
succès, une démarche contagieuse qui pourra toujours besoin d’un long entraînement, quel
se propager dans le bureau. Quatrièmement, que soit leur âge.
QI et capacités techniques
Intelligence
émotionnelle (deux
fois plus importante)
Quand Goleman et ses collègues ont voir les choses en grand. Mais l’intelligence
analysé les données de grandes entreprises, émotionnelle jouait un rôle deux fois plus
ils ont découvert que l’ intelligence des important que les capacités liées au QI ou
cadres était un bon prédicteur du succès. aux aspects pratiques. Et plus le saarié en
C’ était tout particulièrement vrai de talents question était haut pacé dans l’entreprise,
spécifiques, comme d’avoir une vision à plus l’intelligence émotionnelle jouait un
long terme du marché ou l’habitude de rôle important dans son succès.
Commen mesrer
personnié?
Les réponses des psychologues varient.
Freud pensait que le secret de a personnalité
résidait dans l’inconscient, formé avec les
expériences de l’enfance. D’autres ont
employé des méthodes statistiques.
NEUROTICISME
OUVERTURE
Nous pourrions mesurer les traits de le cortex (a couche externe du cerveau)
personnalité en observant nos cerveaux. et à moins de plis, tandis que l’ouverture
Des chercheurs menés par Richelli se sont montrait l’opposé: un cortex plus fin et plus
servis de scanners pour découvrir que de replis. Ces différences dans a structure
de hauts niveaux de névrotisme étaient cérébrale indiqueraient que les traits de
associés à des parties plus épaisses dans personnalité ont une part génétique.
Consrisons-nos os
nore propre monde?
Oui, en un sens. Dans les années1950, le
psychologue George Kelly a avancé que
chacun de nous développe ses propres
constructions qui nous servent à interpréter
le monde. Tels des scientifiques, nous testons
en permanence nos propres hypothèses.
2
Événement
3
Réflexion
4
1
Planification
Intégration
5
Anticipation
STYLE
ATTRIBUTIONNEL
RAISONNEMENT
ÉMOTIONNEL
COMPORTEMENTS
DE SÉCURITÉ
TRE
TCC
CHAPITRE 7
TRAUMA
ÉCOUTE
THÉRPIE
RÉFLECTIVE
STRATÉGIE
D’ADAPTATION
INTRODUCTION
N
ous savons tous que cea fait du bien de parler
de nos problèmes. C’est ainsi qu’amis, coiffeurs
et chauffeurs de taxi sont transformés en
thérapeutes, parce qu’on se sent bien après
leur avoir parlé. Mais une thérapie véritable nécessite un
peu plus que d’écouter et de poser quelques questions.
La thérapie sert à traiter des troubles tels que l’anxiété
ou a dépression, les traumas et autres problèmes plus
graves. Les plus anciennes thérapies connues remontent
à plus de 3500ans: des textes grecs et égyptiens parlent
de «soigner avec des mots». Le philosophe grec Épictète
a remarqué que quand les temps étaient durs, ce qui
comptait avant tout était le sens qu’on donnait aux
problèmes rencontrés. Cette idée que a pensée oriente les
sentiments est a pierre anguaire de a thérapie considérée
aujourd’hui comme a plus efficace: a THÉRAPIE COGNITIVE
COMPORTEMENTALE (TCC). Il fallut néanmoins plus de mille
ans pour que des études confirment le rôle que jouent nos
pensées dans les mécanismes d’anxiété et de dépression.
Avant cea, une autre forme de thérapie, a psychanalyse,
était popuaire. Ce traitement aidait les patients à écairer
des aspects de leur personnalité et même de leurs rêves.
Cependant, aussi fascinantes ces découvertes soient-
elles, elles entraînent rarement un changement. Cette
thérapie n’a jamais été appliquée avec succès pour traiter
des troubles mentaux graves. Le domaine a ainsi stagné
jusqu’au milieu du XXe siècle et à l’apparition soudaine de
nouveaux développements et de a THÉAPIE HUMANISTE
de Carl Rogers, une approche chaleureuse fondée sur le
pouvoir guérisseur de a gentillesse.
126 THÉRAPIE
À peu près au même moment, le béhaviorisme
a gagné en influence. Il s’agissait là d’examiner les
comportements animaux pour mieux comprendre
comment nous apprenons et désapprenons a peur. Wolpe
a ainsi développé a désensibilisation systématique, une
forme de thérapie qui aidait les patients à confronter,
plutôt qu’éviter, leurs sources d’angoisse. Cependant,
cette approche ne modifiait pas toujours les modes de
pensée. On pouvait ainsi continuer de juger les araignées
dangereuses tout en apprenant à vivre en leur présence.
La problématique de gestion du stress a pris de
l’ampleur dans les années1960 avec Lazarus, qui jugeait
que le stress était le mariage entre les pensées reatives
à une situation difficile et a capacité de s’y adapter. Les
thérapies ont donc évolué pour renforcer l’adaptation,
grâce à des outils comme a reaxation. Mais que peut a
reaxation contre a peur ou une tristesse persistante? Ellis
a ainsi créé a THÉRAPIE RATIONNELLE ÉMOTIVE (TRE), qui
se concentre sur le lien entre pensées et émotions.
Beck a renforcé cette idée en abordant a question
de a santé mentale dans une démarche scientifique.
Il a développé des modèles psychologiques solides et
rigoureusement évalués pour expliquer ce qui cause et
maintient a détresse. Il a ensuite ciblé les pensées et les
comportements problématiques de façon scientifique et
logique, proposant aux patients de tester leurs pensées
au cours d’expériences et de les modifier grâce aux
résultats de celles-ci. Aujourd’hui, a thérapie cognitive
comportementale est a plus étudiée à travers le monde,
celle dont les preuves d’efficacité sont le plus solides.
THÉRAPIE 127
THÉRAPIE
THÉRAPIE RATIONNELLE
ÉMOTIVE (TRE)
Développée par Albert Ellis, approche
dans laquelle patient et thérapeute
identifient les croyances irrationnelles
et les pensées nuisibles afin de les
remplacer par des stratégies utiles.
DISTORTION COGNITIVE
Schéma de pensée irrationnel
ou exagéré, par exemple tout-
ou-rien ou trop pessimiste.
On peut y remédier par
la thérapie, surtout la TCP.
RAISONNEMENT
ÉMOTIONNEL
Fonder nos conclusions sur ce
qu’elles nous font ressentir –
schéma de pensée nuisible, car ne
reflétant pas toujours la réalité.
COMPORTEMENTS
RICHARD LAZARUS ET
EXPÉRIENCE SUSAN FOLKMAN
Psychologues américains
COMPORTEMENTALE
(1922–2002 & 1938–) ayant
Mise en place de changements
mis en avant la notion
de comportement modestes
du stress comme un
et pragmatiques, au cours
déséquilibre entre la
d’une TCC, pour surmonter
demande et les ressources.
les difficultés, par exemple en
diminuant l’évitement.
STRATÉGIES
D’ADAPTATION
Mécanismes qu’un sujet met
en place pour gérer son stress. SEAU DU STRESS
Les stratégies fondées sur le Analogie qui consiste à voir
problème cherchent à supprimer les expériences stressantes
celui-ci, celles fondées sur les comme de l’eau remplissant
émotions à orienter celles un seau (notre capacité
que le stress génère. de stress). Les stratégies
d’adaptation ouvrent un
MOTIVATION MAGIQUE robinet pour vider le seau
DE KEARNS ET GARDINER (Brabban et Turkington).
Espoir que la motivation naîtra
comme par magie pour nous
pousser à l’action, alors que PENSÉES NÉGATIVES
c’est se lancer dans une tâche INTRUSIVES
qui génère l’envie. Pensées nuisibles intempestives
qui viennent à l’esprit. Ceux qui
s’en trouvent gênés ou préoccupés
peuvent développer des troubles
de l‘anxiété.
CONSCIENCE
DES MÉCANISMES
DE PENSÉE
Prendre conscience de
ses mécanismes de pensée,
par exemple grâce à la thérapie,
permet d’adopter une vision
d’ensemble et de se montrer
plus juste envers STYLE ATTRIBUTIONNEL
soi-même. Approche que nous prenons
d’ordinaire pour assigner une cause
à un malheur (Seligman). Ceux
prompts à s’attribuer le blâme sont
davantage sujets à la dépression.
PENSÉES
Commen renconrer
son moi idé?
Peut-être est-ce déjà fait! Ou vous
vous sentez en accord avec votre moi idéal
a plupart du temps. Mais pour d’autres, le
moi idéal semble très loin et l’atteindre
exige de travailler sur ses reations et ses
sentiments pour construire l’estime de soi.
130 THÉRAPIE
ÉCOUTE RÉFLECTIVE
132 THÉRAPIE
SEAU DE STRESS Le «seau de stress» de Brabban et
Turkington est un moyen simple de visualiser
notre capacité de gestion du stress afin
d’ éviter un «débordement» de sentiments
nuisibles à notre bien-être. Les expériences
stressantes sont l’eau qui remplit le seau.
L’adaptation et les stratégies de délestage
du stress ouvrent le robinet qui libère l’eau.
En surveilant le niveau d’eau et en gardant
le robinet ouvert, nous pouvons maintenir
notre stress sous contrôle.
Ennu
is de
eil
Prob
sant
somm
s
el
lèm
nn
tio
ue de
es fi
l
ai
la
av
re
nan
tr
So
Manq
es
au
uc
m
cier
ss
i
lè
re
ob
St
s
Pr
n Réso
io lutio
xat n de
la s pr
Re Div
oblè
mes
ert
iss Soin
em s
en
t
s
he
ps
c
ro
m
sp
te
e
du
d
ien
n
t
tio
u
So
s
Ge
D’o iennen es
pensées néies?
Certaines nous viennent parce nous
sommes stressés, tristes ou fatigués. Pour
d’autres, ce n’est que notre cerveau qui prend
un raccourci en s’appuyant sur nos
expériences passées. Certaines sont
aléatoires. Aucune n’est nécessairement vraie
pour autant.
134 THÉRAPIE
RÉPRESSION DE PENSÉES
Jetez un œil à ce gros apin rouge et duveteux.
Maintenant, fermez les yeux 30secondes et
ne pensez surtout pas à ce apin. Essayez du
mieux que vous pouvez de ne pas y penser. Les
études montrent que plus on essaye d’ éviter
de penser à quelque chose, plus cette chose
sera susceptible de nous venir à l’esprit. Tenter
de réprimer les pensées négatives pourrait
augmenter leur fréquence, en réalité. Bien des
patients en psychothérapie font bon usage de
cette découverte.
Porqoi sommes-nos
irrionnes?
Sûrement parce que nous ne sommes
pas des robots. Nous n’agissons pas purement
rationnellement parce que nos émotions
guident nos décisions et
nos comportements.
136 THÉRAPIE
AFFRONTER LA PEUR
Les phobies spécifiques, celles des araignées, à a fois. Elles sont par ailleurs renforcées par
du sang ou de l’avion, sont des troubles nos modes de pensée et nos comportements.
fréquents. Les gens atteints savent le plus Heureusement, les psychothérapies
souvent que ce sont des peurs irrationnelles, fonctionnent plutôt bien contre les phobies
mais cea ne les empêche pas de ressentir de en général, au point qu’une seule session
a peur dans ces situations. Les phobies ont peut parfois suffire au patient pour faire des
des causes génétiques et environnementales progrès très significatifs.
Le comporemen
modiie--i es
pensées?
Nos pensées, nos émotions et nos
comportements sont tous liés. Ainsi, nous
pouvons influencer les unes en modifiant
les autres, un pouvoir qui bénéficie à tous.
Nombre d’entre nous ont déjà remis réguliers dans nos façons de pensée et nos
quelque chose à plus tard, par exemple comportements, nous pouvons obtenir des
se mettre au sport ou débuter un progrès significatifs et durables. Le patient et
nouveau projet. Nous avons manqué de le thérapeute y œuvrent ensemble à trouver
motivation et, comme cea s’est reproduit jour des modifications de comportement qui
après jour, nous avons fini par nous sentir battront en brèche les croyances négatives
coupables, le moral en berne, mécontents de responsables de l ’anxiété ou du mauvais
nous-mêmes. Hugh Kearns et Maria Gardiner (2011) moral du patient. Si, par exemple, celui-ci
décrivent cette attitude par l’expression est sujet à des troubles du stress post-
«attendre qu’apparaisse a fée Motivation» – traumatique après un accident de train, il se
espérer qu’un jour a motivation nous viendra pourrait qu’il ait peur de reprendre ce moyen
comme par magie pour nous pousser à l’action. de transport, craignant un nouvel accident,
Mais a fée n’existe pas et les études montrent que et même qu’il évite tout transport public,
c’est l’inverse qui se produit, en réalité. Débuter ce qui lui interdit de voir certains amis. Une
une tâche génère a motivation de continuer et expérience comportementale, dans ce cas-là,
d’en faire plus. Modifier notre comportement et pourrait consister en quelques changements
nous ancer même quand nous n’en avons pas courageux pour réduire cet évitement, par
envie pourra avoir un effet très positif sur notre exemple prendre le métro en présence de
moral et nos pensées. son thérapeute pour une ou deux stations.
Ce lien entre pensées, émotions En modifiant ainsi son comportement, il
et comportements est au centre de a constate que ses prédictions catastrophistes
thérapie cognitive comportementale (TCC), n’ont pas tant de chance de se réaliser. Il
développée initialement par Aaron Beck. En fait ainsi des progrès significatifs en vue de
effectuant des changements modestes, mais surmonter ses difficultés.
138 THÉRAPIE
COMPORTEMENTS DE SÉCURITÉ
Les patients atteints de phobie sociale ont se sentir en sécurité dans les situations
souvent l’ impression qu’on les dévisage. Afin angoissantes. Cependant, ils empirent
d’ éviter cette sensation, ils gardent souvent a souvent les choses. En se ançant dans une
tête basse et évitent de croiser les regards. Ces TCC, on découvre une vérité puissante: les
stratégies sont appelées des comportements autres ne les dévisagent pas, cette sensation
de sécurité, car on les met en œuvre pour n’est qu’une illusion que l’anxiété provoque.
CHAPITRE 8 PSYCHOLOGIE POSITIVE
ESTIME
DE SOI
PIC DE
DIVERSITÉ PERFORMANCE
DES
ÉMOTIONS
FLOW PSYCHOLOGIQUE
MENTALITÉ
DE
CROISSANCE
CHAPITRE 8
POSITIE
PSYCHOLOGIE
TRAITS DE
PERSONNALITÉ
BONHEUR
RÉCOMPENSE
INTRODUCTION
B
eaucoup d’entre nous estiment que gagner au
loto leur apporterait le bonheur instantané. Mais
en réalité le bonheur n’a pas grand-chose à voir
avec le contenu d’un compte en banque. Ce
chapitre s’intéresse aux ingrédients clés de a vie heureuse
que a psychologie a identifiés au fil des années, aux
raisons de leur importance et aux façons de les rassembler.
D’abord, il nous faut une robuste ESTIME DE SOI.
Autrement dit, il nous faut nous forger une opinion positive
de nous-mêmes. Comme les opinions sont des pensées,
et non des faits, il est possible d’améliorer notre estime de
soi en modifiant nos modes de pensée. Le renforcement
d’attitudes saines peut nous y aider énormément, par
exemple trouver paisir aux nouveaux défis, croire en nos
chances de succès et nous juger dignes de mérite.
Les gens dotés d’une bonne estime de soi tendent à
avoir plus de succès dans les domaines qu’ils explorent,
ils sont même en meilleure santé, tandis que ceux qui ont
du mal à se voir de façon positive, surtout les adolescents,
ont plus de chance de développer des troubles. Le BIAIS
D’AUTO-COMPLAISANCE peut nous aider à protéger et
établir notre estime de soi. Il s’agit de s’attribuer les mérites
et de renvoyer les fautes sur les autres. Les psychologues
estiment qu’il faut du temps pour être bien dans sa peau,
que l’estime de soi se stabilise autour de a soixantaine, une
fois acquises a sagesse et des habitudes de pensée saines.
PSYCHOLOGIE
POSITIVE
Se concentrer sur les
expériences et les concepts
ESTIME DE SOI positifs et enrichissants tels
Opinion que nous tenons de qu’une mentalité de croissance,
nous-mêmes, peut s’améliorer en la formation d’un esprit heureux,
changeant de mode de pensée. l’épanouissement, l’estime
Protégée par le biais d’auto- de soi et la diversité
complaisance. des émotions.
BIAIS D’AUTO-
COMPLAISANCE
DURÉE DE VIE EN BONNE SANTÉ S’attribuer les succès et rejeter
Durée de vie sans maladie invalidante. sur autrui les responsabilités
Concept issu de l‘allongement de des échecs, protégeant ainsi
la durée de vie et de l’augmentation l’estime de soi.
de la qualité de vie.
MENTALITÉ FIGÉE
Mode de pensée inflexible;
rester dans les domaines
maîtrisés et éviter les
nouveaux défis.
TRAITS DE PERSONNALITÉ
Attributs qui distinguent
un individu, souvent positifs
ou négatifs et stables dans
le temps, donc difficiles à
MENTALITÉ DE CROISSANCE
FLOW
modifier.
Être ouvert au changement et
aux opportunités; accueillir
les nouveaux défis; apprendre
de ses échecs; croire aux vertus
de l’effort et de la pratique.
Qe e-os?
Vous pourriez répondre en fonction de
l’estime en aquelle vous vous tenez. Si vous
pensez valoir autant que les autres, être
«bien pourvu» en qualités et assez heureux
pour sortir de votre zone de confort, alors
vous avez une bonne estime de soi.
Qui vous vient à l’esprit quand vous Plus récemment, des études à grande échelle
pensez à quelqu’un pourvu d’une à partir de a naissance et jusqu’à l’âge adulte
bonne estime de soi? Est-ce une ont montré que les chutes dans l’estime de
personne surhumaine ou simplement soi à l’adolescence pouvaient entraîner des
quelqu’un capable de se voir positivement? risques pour a santé physique et mentale, des
L’estime de soi est l’opinion que nous avons de comportements à risque et de moins bonnes
nous-mêmes. Et comme les opinions sont des chances de réussite sociale. Une mauvaise
pensées et non des faits, cette estime peut estime de soi enclenche un cercle vicieux
changer en modifiant nos pensées. Parmi les d’expériences malheureuses, de mauvais
indicateurs d’une bonne estime de soi, on résultats qui se dégradent de plus en plus et
trouve a confiance d’exprimer ses opinions, de détresse générale.
a volonté de tenter de nouvelles expériences, Heureusement, certains de nos biais
a foi en nos succès futurs et le sentiment de cognitifs nous aident à conserver une saine
valoir au moins autant que les autres. estime de soi. Ainsi, grâce au biais d’auto-
La recherche en ce domaine a débuté compaisance, nous avons tendance à
à a fin des années 1960 dans les écoles nous attribuer les succès et à assigner a
américaines où enseignants et chercheurs responsabilité des échecs à autrui. Quand
ont réalisé les bénéfices à tirer d’une école quelque chose tourne bien, nous nous
qui améliorerait l’estime de soi des élèves racontons que nous y sommes pour quelque
plutôt que de se focaliser sur leurs résultats. chose, quand cea tourne mal, nous cherchons
L’inventaire de Coopersmith a été développé d’autres explications. La bonne nouvelle,
pour mesurer l’estime de soi des enfants dans c’est que l’estime de soi, une fois passée
le contexte amical, parental, scoaire et intime, l’adolescence, peut s’améliorer en continu
à l’aide de questionnaires visant à déceler des au fil des bonnes expériences jusqu’à a
signes cognitifs ou comportementaux très soixantaine, âge auquel elle se stabilise pour
simples d’estime de soi. ne retomber ensuite qu’autour de 90ans.
?
?
?
Si vous cherchez un raccourci vers le Nous savons qu’au-delà d’un certain seuil
bonheur ou, au moins, un point de de sécurité, l’argent ne fait plus le bonheur.
départ, essayez déjà ça. Tout ce qu’il Nous savons aussi que nous sommes de plus
vous faudra, c’est un crayon ou un stylo. Des en plus heureux avec l’âge. Que pouvons-
études ont montré que mettre un crayon entre nous changer pour trouver un raccourci vers
ses dents active les mêmes muscles qu’un le bonheur? Des travaux en neuroscience
sourire, ce qui rend plus heureux et plus allègre. nous ont fourni des indices et suggèrent que
Cet effet se dissipe toutefois dès qu’on l’enlève, a formule d’une vie heureuse contient une
et ne marcherait bien que pour les personnes part d’attentes remplies ou dépassées. Il ne
déjà heureuses à a base. Pour une solution plus s’agit pas de savoir si cea se passe bien pour
pérenne, mieux vaudra donc vous concentrer sur nous, mais si cea se passe mieux que prévu.
les ingrédients clés du bonheur. Des recherches plus récentes indiquent
Michael Argyle a reconnu l’importance que a clé du bien-être consiste à se
du bonheur, ou du «bien-être subjectif» (à concentrer sur a variété des émotions
partir de recherches dans les années1980), ressenties au quotidien plutôt que sur le
alors qu’il existait dix-sept fois plus d’études bonheur en lui-même. Vivre une abondance
sur a dépression que sur le bonheur. Les d’émotions positives, telles que l’intérêt, le
composantes du bonheur, selon Argyle, calme, a fierté, a gratitude ou l’inspiration
contiennent des aspects cognitifs et réduit le stress et les infammations, ce qui
émotionnels distincts. Les trois facteurs clés contribue à une meilleure santé et donc à
sont a satisfaction générale (vie sociale, vie davantage de raisons de sourire. Il n’y a peut-
professionnelle et loisirs), a présence d’affects être pas de raccourci, mais de nombreux
positifs et l’ absence d’affects négatifs. chemins mènent au bonheur!
Passer d’une mentalité figée à une étude portant sur un grand nombre de familles
mentalité de croissance est du Chili a découvert que les enfants issus de
excellent sur le pan professionnel, familles modestes avaient moins de chance
familial ou scoaire. Carol Dweck estime que d’exprimer une mentalité de croissance.
changer sa mentalité revient à remettre en Pourtant, chez ceux qui le faisaient, elle agissait
question ses croyances sous-jacentes sur comme une protection contre l’impact négatif
l’apprentissage et l’intelligence. des faibles revenus sur le succès. La mentalité
Que diriez-vous si on vous proposait de croissance peut ainsi être un vrai facteur
d’apprendre une discipline entièrement protecteur dans des circonstances difficiles.
nouvelle, loin de votre zone de confort? Si Surtout, elle s’apprend. Des études
vous répondez «je ne sais pas faire ça, je me montrent qu’enseigner à des enfants qu’ils
contente de ce que je connais», sachez que vont s’améliorer, que leur cerveau va se
ceux qui répondent «je ne sais pas encore développer, tout en les incitant à sortir de leur
faire ça, mais je vais essayer» montrent en zone de confort, sont a clé d’une croissance
général plus de résilience après un échec. harmonieuse. Comparés à des enfants
Ils apprennent de leurs erreurs plutôt que persuadés que leurs capacités sont gravées
d’abandonner et connaissent ainsi plus de dans le marbre, ceux élevés dans a mentalité
succès. Dans le cadre d’une mentalité de de croissance obtiennent de meilleures notes
croissance, l’effort et a pratique valent au et sont plus motivés. Récompenser l ’effort
moins autant que le talent inné. plutôt que les capacités crée de a confiance
L’idée de a mentalité de croissance est et de a persistance. Adopter cette mentalité
importante pour a psychologie positive parce dans un environnement difficile, face à un
qu’elle remet en cause l ’idée que l’intelligence, défi ou à un échec, c’est se concentrer sur
l’éducation et le revenu sont des éléments l’après, aller de l ’avant, savoir affronter de
indispensables au succès. Par exemple, une nouveaux défis et apprendre sans cesse.
Accomplissements
Sens
Relations
Engagement
LIVRES JOURNAUX
Beck, A.T., et al. Cognitive Therapy of Borke, H. (1975). Piaget’s mountains revisited.
Depression. New York, Guilford Press, 1979 Developmental Psychology, 11(2), 240–243
Bond, M. Wayfinding: The Art and Science Bruner, J. (1981). The social context of anguage
of How We Find and Lose Our Way. Londres, acquisition. Language & Communication,
Picador, 2020 1(2), 155–178
Corsini, R. & Wedding, D. Current Dunn, J. (1994). Understanding others and the
Psychotherapies. Totnes, Brooks/Cole social world: Current issues in developmental
Publishing Company, 2018 research and their reation to preschool
experiences and practice.Journal of Applied
Deutsch Lezak, M., et al. Neuropsychological
Developmental Psychology, 15(4), 571–583
Assessment. Oxford, Oxford University
Press, 2012 Favell, J.H. (1996). Piaget’s legacy.
Psychological Science, 7(4), 200–203
Dunn, J. The Beginnings of Social
Understanding. Cambridge (Massachusetts), Kearns, H. & Gardiner, M. (2011). Waiting for
Harvard University Press, 1988 the motivation fairy. Nature, 472, 127
Erikson, E. Identity, Youth, and Crisis. Nader, K., Schafe, G.E. & LeDoux, J.E. (2000a).
New York, W. W. Norton, 1968 The abile nature of consolidation theory.
Nature Reviews Neuroscience. 1, 216–219
Erikson, E.H. Childhood and Society.
New York, W. W. Norton & Company, 1993 Wegner, D.M., et al. (1987). Paradoxical effects
of thought suppression.Journal of Personality
Morrison, A.P. (ed.). A Casebook of Cognitive
and Social Psychology, 53(1), 5–13
Therapy for Psychosis. New York, Brunner-
Routledge, 2002
RESSOURCES EN LIGNE
Seth, A. Being You. Londres, Faber & www.simplypsychology.org
Faber, 2021
www.nationalelfservice.net
Sater, A. & Bremner, J. An introduction to
Developmental Psychology. Londres, BPS Every Mind Matters
Backwell. 3eédition, 2017 www.nhs.uk/every-mind-matters
Mind www.mind.org.uk
Wild, J. Be Extraordinary: 7 Key Skills to
Transform Your Life From Ordinary to
Extraordinary. Boston, Little Brown Book
Group, 2020
156
NOTES SUR LES CONTRIBUTEURS
157
INDEX
158
K perception visuelle 16
personnalité 106–107, 111, 120–121
stades de a vie 91
stades du développement 104–105
Kahneman, Daniel 26
peur 137 Sternberg, Robert 114, 115
Kanner, A.D. 92
phobies 137 stratégies d’adaptation 132
Kelly, George 122, 123
Piaget, Jean 52, 62, 63, 96 stress 78–79, 90, 92, 113
pic de performance 154, 155 structure cérébrale 121
L préjugés sociaux 42, 43 style attributionnel 134
Lazarus, Richard 127, 129, 132 prise de décision 11, 26 synapses 80, 81
leadership 118–119 proprioception 73, 74 synesthésie 70, 74, 75
LeDoux, Joseph 10, 12, 22 prosopagnosie 71 système nerveux 78
Loftus, Elizabeth 11, 20, 21 psychanalyse 126
loi de Yerkes et Dodson 70, 78, 79 psychobiologie 68–85 T
psychologie cognitive 8–28 Tajfel, Henri 31, 32, 42, 43
M psychologie de l’enfant 86–105 taxi 84, 85
médiation 58 psychologie du développement témoignages ocuaires 20
mémoire 10, 18–23, 60, 66, 84–85, 98 86–105 test du chauffeur de taxi 84, 85
mémoire à court terme (MCT) 22, 23 psychologie positive 140–55 tests de QI 114
mémoire à long terme (MLT) 22, 23 psychologie sociale 30–47 théorie de l’apprentissage social
mémoire de travail 11, 22, 23 psychotropes 80 (TAS) 51, 53, 58
mémoire épisodique 22 théorie de l’attachement 88, 91,
mémoire sémantique 22 R 94–95
mémoire sensorielle 22 Rahe, Richard 92, 93 théorie de l’esprit 89, 102
mentalité 143, 150–151 raisonnement émotionnel 136 théorie de a consolidation 10, 13, 22
mentalité de croissance 143, 150–151 récepteurs 80 théorie des perspectives 26
Miller, George 66, 67 reconnaissance des visages 71, 82–83 théorie des stades d’Erikson 104–105
mnémotechnique 51 règle des 10000heures de Gadwell théorie du développement cognitif
modèle PERMA™ 152 51, 60–61 de Piaget 51, 62–63
modèles mentaux 62 reation thérapeutique 130 théorie du traitement de
Moscovici, Serge 32, 44, 45 renforcement 56–58 l’information 66–67
motivation 106, 112, 138, 150 réponse combat/fuite 78 théorie écologique de Gibson 10,
réponses 72 16–17
N réponses physiologiques 76 thérapie 124–139
N-Ach 112, 113 représentation de a connaissance thérapie centrée sur a personne 130
Nader, Karim 10, 12, 22 98 thérapie cognitive comportementale
Neisser, Ulric 18 représentation symbolique 98 (TCC) 126, 127, 138
neurones 80 représentations sociales 44 thérapie humaniste 126, 130, 131
neurotransmetteurs 71, 80, 81 répression des pensées 135 thérapie rationnelle émotive (TRE)
niveau de performance 60–61, 78, Rogers, Carl 130 127, 136
79, 154, 155 rôles genrés 58 tracas quotidiens 89, 92
traitement ascendant 10, 16–17
159
REMERCIEMENTS
Je souhaiterais exprimer mon immense
gratitude envers notre éditrice, Kate Duffy,
qui a appliqué exactement le bon méange
de pugnacité, de conseils et de patience pour
mener ce projet à bien, dans les temps. Je
remercie aussi Katie Crous pour sa relecture
éditoriale et l’attention qu’elle a portée aux
détails. Un grand merci à tous les coauteurs
pour avoir bien voulu partager leurs vivifiants
écairages psychologiques et avoir ainsi rendu
ce livre possible. Je remercie ma sœur, Allison
Wild, pour son expertise et sa capacité à
considérer et discuter les idées. Merci à Mark
Todd et Amy Sedgwick pour les discussions
passionnantes, et pour leur gentillesse. Enfin,
grand merci à mes compagnons d’écriture,
Sami, Zak et Pip.
Jennifer Wild