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Univ. Ibn Zohr, Fac. Sci. Agadir. Dép. Géol. T-P. Md. Métallogénie (STU5) -2020/2021- ABIA E. H.

Le district à cobalt, nickel et arsenic de Bou


Azzer
(Anti-Atlas central)

Localisation : Bou Azzer est situe à 45 km à vol d’oiseau au SW de Ouarzazate, dans l’Anti-Atlas
central (fig.1). Les gisements corallifères se localisent tout le long de la boutonnière de Bou Azzer-El
Grara, depuis le gisement de Mechoui à l’ouest jusqu’à Aït Ahmane à l’est.

Fig. (1) : Localisation du secteur minier de Bou Azzer-El Graara sur la carte routière Michelin au 1/1 000000.

Substances exploitables : Cobalt, arsenic, nickel, or.

Historique des travaux : L’histoire de la découverte du cobalt dans cette boutonnière débuta par
la commercialisation de l’érythrine utilisée jadis comme insecticide et raticide, alors que
l’exploitation à caractère économique du minerai de cobalt commença à partir de 1929 jusqu’à nos
jours, avec un arrêt durant la période de la 2ème guerre mondiale. A partir de 1958, l’exploitation
s’est assurée sous la direction de l’ONA par le biais de sa filiale CTT (Compagnie de Tifnoute
Tirhanimine). Actuellement, la production annuelle est de 2 500 t métal de cobalt, 10 000 t d’arsenic,
300 t métal de nickel et 250 kg d’or.

Contexte géologique : Les terrains précambriens affleurant dans la boutonnière sont subdivises
en deux grands ensembles, l’un (le plus ancien) métamorphique, l’autre, postérieur, non-
métamorphique (Fig. 2) :
- L’ensemble métamorphique est formé d’empilements complexes d’écailles tectoniques
résultant de la collision panafricaine, et qui comportent ;
i) des orthogneiss et des métagabbros au sud daté à 750 Ma (D’Lemos et al., 2006, El
Hadi et al., 2010) ;
ii) des dépôts de la plate-forme néoproterozoïque établie sur la marge nord du craton
de l’Ouest-Africain (Groupe de Taghdoute-Lkest) ;
iii) des séries volcano-sédimentaires de Tichibanine-Ben Lgrad au nord dont l’affinite
d’arc est bien établie (Bodinier et al., 1984 ; Naido et al., 1991) ;
iv) le Complexe ophiolitique de Bou-Azzer (Leblanc, 1975,1981).
Ces unités métamorphiques sont recoupées par des diorites syntectoniques datées aux alentours
de 650 Ma (Inglis et al., 2005).

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- L’ensemble non-metamorphique repose en discordance majeure sur les terrains décrits


précédemment et comporte :
i) à la base, les séries clastiques du Groupe de Tidilline, redressées et plissées dans des
couloirs faillés lors des derniers stades de la tectonique panafricaine (phase B2) ;
ii) les coulées pyroclastiques et dépôts volcano-détritiques du Groupe de Ouarzazate qui
repose en discordance angulaire sur celui de Tidilline.
Les couches sédimentaires du Cambrien font suite sans hiatus important à ces dépôts fini-
précambriens.

Fig. (2). Carte géologique simplifiée de la boutonnière de Bou Azzer–El Graara (in Fanlo et al., 2015, d'après
Leblanc, 1975, modifié).

Description des gisements : La boutonnière de Bou-Azzer compte plus de 100 corps minéralisés
en arséniures de cobalt (Fig.3). Ces corps sont spatialement et génétiquement associés aux
serpentinites, issues de la transformation des ultrabasites ophiolitiques. Ils se présentent soit :
- en filons sécants sur le contact entre les serpentinites et les autres roches ;
- en amas allongés parallèlement à ce contact.
Les deux types sont postérieurs à la B1, et les terrains les plus récents recoupés par les filons,
correspondent à la base de la formation adoudounienne.

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Fig.(3) : Localisation, par rapport aux serpentinites (en noir), des gîtes et gisements du district de Bou-Azzer
(d’après Leblanc, 1975).

Les filons et les amas présentent globalement les mêmes paragenèses minérales. Il s’agit,
essentiellement, d’arséniures de Co, Ni et Fe (Skuttérudite, safflorite, loellingite) (Fig.4) avec
accessoirement sulfoarséniures de Fe, Co et Ni (cobaltite CoAsS, nickeline NiAs, mispichel FeAsS), des
sulfures de Cu, Zn et Pb, de l’Or et de la molybdénite. La gangue est constituée de quartz et de
calcites et accessoirement de dolomite, du talc, et des minéraux reliques des serpentinites (chromite,
magnétite). Les phénomènes de l’altération supergène se traduisent par la néoformation de
nombreuses phases minérales secondaires représentées, entre autres, par des arséniates de cobalt
(érythrite).

Fig.(4) : Champs de stabilité des solutions solides à 800°C : (A) triarséniures [(Co,Ni,Fe)(As,S0.5)3] et (B)
biarséniures [(Co,Ni,Fe)(As,S)2].

Skuttérudite Erythrite

Modèle génétique: Les minéralisations à Co, Ni, As de Bou-Azzer sont de type hydrothermale
étroitement liée aux massifs de serpentinites qui constituent d’ailleurs le métallotecte principal.
Plusieurs modèles ont été proposées pour leur genèse dont on retient celui de Mâacha (1994) et
Maacha et al. (2011a) qui fait intervenir des fluides endogènes, chargés de Mo, Se, Bi, Au et des
fluides exogènes chargés en chlorures, Co, Ni et As lessivés des serpentines issues des altérations
des péridotites (fig.5).
L’âge de mise en place de ces minéralisations est encore débattu :
La présence de structures minéralisées recoupant les dépôts de l’Ediacarien et les termes
inférieurs du cambrien inférieur confère un âge fini- à post Ediacarien à ces minéralisations et dont
le moteur thermique probable de cet événement hydrothermal serait lié au volcanisme alcalin qu’à
connu le secteur durant la transition Ediacarien-Cambrien inférieur. Ceci peut être confirmé par la
datation à 550 Ma d’une brannérite (Ennaciri et al., 1996).

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Bien que la présence d’une minéralisation néoprotérozoïque reste indiscutable, d’autres


datations ont fourni des âges plus récents qui témoignent d’une longue histoire pour la mise en
place ces minéralisations. Celle-ci peut être d’âge :
(i) paléozoïque comme en témoigne les datations Sm-Nd à 308 ± 31 Ma et U-Pb à 310 ± 5 Ma
obtenus sur des carbonates et brannerite coexistant avec la molybdénite (Oberthür et al., 2009). En
effet, cette hypothèse est cohérente avec l’existence d’un réchauffement du socle de l’Anti-Atlas
occidental-central jusqu’à T > 300°C vers 330 Ma (Sebti et al., 2009 ; Oukassou et al., 2011) ;
(ii) Mésozoïque comme en témoigne l’âge Ar/Ar à 218 ± 8 Ma obtenu sur un adulaire (Levresse,
2001) et correspond à l’âge de mise en place des minéralisations argentifères postérieures au
arséniures de cobalt (Essarraj et al., 2005).

Fig. (5) : Modèle génétique adoptée pour la genèse des minéralisations de Bou-Azzer (Mâacha , 1994). ZO :
Zones d’ouverture. B.H : Bréchification hydraulique. Zonalités métallogéniques : (a) Sulfures, (b)
Sulfoarséniures et Séléniures, (c) diarséniures, (d) triarséniures.

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