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statistique
Des processus élémentaires
aux phénomènes collectifs
Christophe Texier
Professeur à l’université Paris-Sud
Guillaume Roux
Maître de conférences à l’université Paris-Sud
Illustration de couverture : simultation Monte Carlo de la fusion à la surface d’un
solide (les lignes correspondent aux trajectoires des atomes).
D’aprés Farid F. Abraham, Two-dimensional melting, solid-state stability, and the
Kosterlitz-Thouless-Feynman criterion, Physical Review B 23, p. 6145 (1981).
© Dunod, 2017
11, rue Paul Bert, 92240 Malakoff
www.dunod.com
ISBN 978-2-10-075611-7
Table des matières
Avant-propos IX
Partie 1
Fondements
Chapitre 1 Le périmètre de la physique statistique 1
1. Introduction 1
4. Émergentisme 4
Chapitre 2 Probabilités 7
Les annexes 25
Exercices 33
Chapitre 3 Ergodicité 34
III
Table des matières
Les annexes 49
A. Formulation classique 49
B. Formulation quantique 52
Exercices 55
Chapitre 4 Entropie 56
1. L’entropie en thermodynamique 56
Les annexes 66
Exercices 68
3. Relâchement de contraintes 79
4. Irréversibilité 91
Exercices et problèmes 97
IV
Table des matières
Partie 2
Applications
Chapitre 8 Description classique des gaz 156
Exercices 181
V
Table des matières
3. Universalité 232
Exercices 236
Partie 3
Gaz quantiques
Chapitre 11 Statistiques quantiques 237
Exercices 254
1. Introduction 257
Exercices 271
VI
Table des matières
1. Introduction 276
Exercices 296
Formulaire 299
Solutions 303
Bibliographie 351
Index 353
VII
Avant-propos
Cet ouvrage propose un cours d’introduction à la physique statistique pour les étudiants
de premier et deuxième cycles universitaires. Il est le fruit de plusieurs années d’un en-
seignement dispensé à l’Université Paris-Sud à travers le cours magistral et des séances
de travaux dirigés. Le cœur du texte est basé sur des notes de cours rédigées par l’un
d’entre nous dans les années 2011-2012, qui ont été profondément remaniées et com-
plétées, notamment par de nombreux exercices et problèmes dont la plupart ont été posés
en examen. L’ouvrage a été conçu pour être utilisé de façon autonome et ne requiert
que des notions élémentaires de mécanique classique et de mécanique quantique (de
niveau L3). Il été écrit avec le souci de rester assez compact, proche des réalités d’un en-
seignement pratique, et dans cette optique, a été divisé en trois parties, « Fondements »,
« Applications » et « Gaz quantiques », que nous allons maintenant présenter.
La première partie s’ouvre sur quelques pages d’introduction (chapitre 1) dans
lesquelles nous définirons notre objet d’étude et essayerons de dégager quelques idées
directrices. En particulier, nous insisterons sur le statut très particulier de la physique
statistique en tant que grande théorie fondamentale, puisque son objet n’est pas de
décrire la dynamique à l’échelle élémentaire, mais de permettre de comprendre com-
ment les phénomènes collectifs émergent. Le chapitre 2 introduit a quelques notions de
théorie des probabilités nécessaires à notre présentation, i.e. le « langage » sur lequel
est basée la physique statistique. Le chapitre 3 est un chapitre de transition qui expose
comment le langage probabiliste sera appliqué dans le cadre des modèles physiques et
introduit a le jargon propre à la physique statistique. Nous introduirons également un
outil qui jouera un rôle très important par la suite : la densité d’états. Le concept d’en-
tropie, dont nous mentionnerons les différentes interprétations au chapitre 4, sera central
pour la suite. Le chapitre 5, qui introduit le postulat fondamental, correspond au cœur de
la physique statistique. Si son application directe concerne l’étude des systèmes isolés et
à l’équilibre (« ensemble microcanonique »), nous expliquerons au chapitre 6 comment
étudier le cas des systèmes non-isolés, en contact avec un réservoir, d’énergie et/ou de
particules (« ensembles canonique et grand canonique »). Le cas des systèmes en con-
tact avec un réservoir de volume (« ensemble isotherme-isobare ») sera discuté dans un
problème. Le chapitre 7 qui clôt la première partie donnera une vue d’ensemble pour
insister sur la logique globale.
Si la première partie illustre la construction et l’articulation des outils à travers les
exemples les plus simples, la seconde partie « Applications » propose de les appli-
quer dans des cas réalistes, centrés sur l’interprétation des observations expérimentales.
Trois sujets importants seront discutés : tout d’abord la théorie semiclassique des gaz
(chapitre 8). Nous discuterons ensuite la thermodynamique des ensembles d’oscilla-
teurs harmoniques (chapitre 9) à travers deux applications : les vibrations des atomes
d’un réseau cristallin, puis la thermodynamique du rayonnement, un sujet d’importance
historiquement puisqu’il initie l’émergence des idées quantiques, avec la loi de Planck
en 1900. Pour clore cette seconde partie (chapitre 10), nous verrons comment des in-
teractions sont responsables des phénomènes collectifs extrêmement spectaculaires que
sont les transitions de phase.
IX
Avant-propos
La troisième partie traite du rôle des corrélations quantiques, qui se manifestent dans
le régime de « basse » température. Le chapitre 11 montrera comment l’ensemble grand
canonique permet de traiter efficacement les problèmes d’indiscernabilité posés par la
mécanique quantique. Les deux derniers chapitres appliquerons ces concepts aux deux
types de particules existant, fermions (chapitres 12) et bosons (chapitre 13). Si l’obser-
vation des effets quantiques dans les gaz bosoniques requiert des conditions extrêmes
( quelques K), nous verrons que le comportement des électrons (des fermions) dans
un métal à température ambiante est dominé par le principe de Pauli.
Un dernier sujet d’importance est celui des phénomènes hors équilibre (dynamique,
transport, etc). Il a cependant été laissé de côté faute de place.
L’élaboration de ce cours a bénéficié très largement de notre environnement scien-
tifique. D’abord au sein des équipes enseignantes : nous remercions chaleureusement
Christian Boulet qui a dirigé l’équipe « physique statistique » au magistère d’Orsay
jusqu’en 2011, ainsi que tous les collègues avec qui nous avons eu le plaisir d’y
travailler : Meydi Ferrier, Giuseppe Foffi, Jean-Noël Fuchs, Henk Hilhorst, Roland
Mastripolitto, Nicolas Pavloff, Alberto Rosso (qui y a enseigné bénévolement) et Bartjan
van Tent. Nous remercions les étudiants du magistère à qui nous avons eu le plaisir
de dispenser cet enseignement : plusieurs années de fructueux échanges ont fortement
participé à façonner ce cours. Nous sommes particulièrement reconnaissants envers
plusieurs collègues qui ont apporté des contributions assez directes : Alberto Rosso
(pour les programmes python produisant les simulations du problème de Sinai, cf. les
figures. 5.2 et 5.3), Giuseppe Foffi (qui a inspiré le problème 5.4), Emmanuel Trizac
(l’exercice 10.3 sur la méthode variationnelle est basé sur un de ses articles), Jean-Noël
Fuchs (qui avait rédigé une autre version du problème 12.1 sur le graphène) et Gilles
Montambaux (le problème 11.2 a été imaginé comme application de la jolie relation
(11.39) qu’il avait pointée). Être membres d’un laboratoire de recherche en physique
statistique a certainement été un atout pour écrire ce livre, et nous avons bénéficié des
conseils et remarques de plusieurs collègues que nous souhaitons remercier particulière-
ment : Eugène Bogomolny, Alain Comtet, Silvio Franz, Olivier Giraud, Hubert Krivine,
Thierry Jolicœur, Martin Lenz, Satya Majumdar, Marc Mézard, Gilles Montambaux,
Nicolas Pavloff, Alberto Rosso, Raoul Santachiara, Grégory Schehr, Emmanuel Trizac
(qui aura la grande surprise d’être cité dans un livre de physique statistique pour ses
travaux photographiques, cf. page 61 !) et Denis Ullmo.
Au moment de clôturer ce projet, je souhaite (CT) exprimer ma gratitude aux trois
professeurs exceptionnels, Bernard Diu, Alain Laverne et Bernard Roulet, qui m’ont
enseigné les bases de cette théorie fondamentale fascinante.
Enfin, nous remercions Laetitia Herin et Vanessa Beunèche pour leur patience et leur
travail.
X
Notations
def
= égal par définition -
d quantité infinitésimale de travail
≃ ou ≈ approximativement égal à -
d quantité infinitésimale de chaleur
∼ de l’ordre de ( ) densité d’états
∝ proportionnel à Φ( ) densité d’états intégrée
∀ quel que soit Ω( ) nombre de microétats accessibles
ℕ ens. des entiers naturels ∗ entropie microcanonique
ℤ ens. des nombres relatifs ∗ température microcanonique
ℝ ens. des nombres réels ∗ pression microcanonique
ℂ ens. des nombres complexes ∗ potentiel chimique microcanonique
, Symbole de Kronecker fonction de partition canonique
( ) Distribution de Dirac énergie libre
C
H() Fonction de Heaviside moyenne canonique de l’énergie
Tr {⋯} trace C pression canonique
Produit tensoriel C entropie canonique
Moyenne de C potentiel chimique canonique
Var() Variance (= 2 − 2) Ξ fonction de partition grand canonique
Écart-type (= Var( )) fonction de partition pour l’état
individuel
grand potentiel
G
Hamiltonien moyenne grand canonique du
nombre de particules
G
spin d’une particule moyenne grand canonique de l’énergie
facteur gyromagnétique G pression grand canonique
= constante de Planck réduite G potentiel chimique grand canonique
2
G entropie grand canonique
Constantes fondamentales
constante de Planck = 6.63 × 10−34 J.s et = 1.05 × 10−34 J.s
constante de Boltzmann = 1.38 × 10−23 J.K−1
nombre d’Avogadro = 6.02 × 1023 mol−1
constante des gaz parfaits = 8.31 J.mol−1.K−1
vitesse de la lumière = 3.00 × 108 m.s−1
charge élémentaire = 1.60 × 10−19 C
masse de l’électron = 0.91 × 10−30 kg
masse du proton = 1.67 × 10−27 kg
magnéton de Bohr = = 0.93 × 10−23 J.T−1
2
XI
Des exercices et des problèmes pour
tester ses connaissances et s’entraîner
1 Introduction
Parmi les grandes théories fondamentales de la physique, la physique statistique est cer-
tainement l’une des plus importantes, puisqu’avec la mécanique quantique, elles forment
le socle de la physique moderne. Elle a été fondée (dans sa version classique) pendant la
seconde moitié du XIXe siècle par Clausius, Maxwell, Boltzmann et Gibbs, puis fertil-
isée par le développement de la mécanique quantique au cours de la première moitié du
XX e siècle. Elle s’attelle à l’étude des systèmes à très grand nombre de degrés de liberté
(typiquement le nombre d’Avogadro ∼ 1023 pour les corps matériels aux échelles
macroscopiques).
Elle a des applications dans quasiment tous les domaines de la physique : matière
diluée (gaz atomiques et moléculaires), matière condensée (solides, liquides, mag-
nétisme, polymères, cristaux liquides, etc), thermo-chimie, biophysique, physique des
plasmas, astrophysique, etc. Depuis sa fondation, elle a continué à voir son champ d’ap-
plication s’élargir, pour déborder aujourd’hui très largement le champ de la physique :
certains physiciens s’intéressent à des sujets tels que les réseaux (réseaux de commu-
nication, réseaux de neurones), des problèmes d’informatique théorique (optimisation
combinatoire, satisfaisabilité de contraintes, etc) ou étudient même des modèles socio-
économiques (réseaux sociaux, propagation d’épidémies, modèles de vote, étude des
marchés financiers, etc). Pour reprendre le titre d’un paragraphe de l’ouvrage de Roger
Balian [3], elle permet une certaine forme d’unification des sciences macroscopiques.
L’objet de ce chapitre introductif sera de continuer à cerner notre sujet d’étude et
mieux situer la place de la physique statistique.
1
Chapitre 1 • Le périmètre de la physique statistique
2
3 Une théorie fondamentale au statut particulier
Élémentaire Fondamental
Par exemple, pour le cas d’un système simple comme un gaz, essayons de com-
prendre pourquoi la mécanique newtonienne décrivant le mouvement des atomes à
l’échelle élémentaire échoue à expliquer les comportements du gaz à l’échelle macro-
scopique. Le point n’est pas que la mécanique newtonienne serait incorrecte, mais
seulement qu’elle devient inefficace dès que le nombre de degrés de liberté devient
trop grand. Dès que la dynamique est un tant soit peu complexe, ce qui peut se
manifester déjà pour quelques degrés de liberté (et donc a fortiori pour ∼ 1023), à
cause des phénomènes chaotiques, la mécanique classique perd tout caractère prédic-
tif. Elle ne fournit pas le bon langage pour analyser de tels problèmes. De même que
la validité de la mécanique newtonienne est limitée en allant vers les hautes énergies
(mécanique newtonienne→relativité restreinte) et/ou les petites échelles (mécanique
newtonienne→mécanique quantique), une autre limitation vient du cas des systèmes
plus complexes (mécanique newtonienne→mécanique statistique).
3
Chapitre 1 • Le périmètre de la physique statistique
Microscopique Macroscopique
∙ discret ∙ continu
∙ petit nombres de lois ∙ diversité, complexité,
simples (postulats de la MQ, grand nombre de théories
équations de Maxwell,...) effectives
∙ comportement aléatoire ∙ déterministe
∙ équations réversibles ∙ irréversibilité
4 Émergentisme
4
4 Émergentisme
d’analyse. L’origine du découplage entre les échelles repose sur l’existence de puis-
sants principes d’auto-organisation à l’échelle macroscopique, ce qui explique en grande
partie la disparition de l’information sur l’échelle microscopique, et l’universalité de
nombreuses propriétés à l’échelle macroscopique [1, 24].
La meilleure illustration de cette idée est probablement dans le phénomène de transi-
tion de phase. Discutons par exemple un système constitué d’un nombre macroscopique
d’atomes, ∼ 1023, dans un cadre classique où ils sont décrits comme des partic-
ules ponctuelles en interaction. Au niveau élémentaire, l’interaction entre les atomes
est bien décrite par une interaction à deux corps du type potentiel de Lennard-Jones :
0 12 0 6
() = 0 −2 , où 0 est une échelle d’énergie et 0 la portée de l’in-
teraction. Les ingrédients microscopiques sont donc extrêmement simples : les lois de
Newton avec ce potentiel d’interaction. L’expérience (de nombreux fluides sont bien
décrits dans ce cadre) nous enseigne cependant que l’étude de ce problème est extrême-
ment riche : le système peut présenter à l’échelle macroscopique des comportements
très différents et se présenter sous différentes « phases », gazeuse (à faible densité), liq-
uide ou solide. L’origine de ces différentes organisations de la matière n’est donc pas à
chercher dans les détails microscopiques.
5
Chapitre 1 • Le périmètre de la physique statistique
6
Chapitre 2
Probabilités
La physique statistique s’intéresse aux systèmes ayant un très grand nombre de degrés
de liberté. Par exemple dans un fluide ou un corps solide dans un volume macroscopique
(taille ∼ 1 m), le nombre d’atomes est typiquement de l’ordre du nombre d’Avogadro
qui représente le nombre de particules dans une mole. Loin de compliquer l’analyse,
cette observation va se révéler être la source d’une grande simplification puisqu’elle va
justifier l’utilisation de concepts probabilistes.
≃ 2.5 1020 .
10−3
= (2.2)
24
Si l’on fait une « photo » du gaz à un instant donné, son état sera défini par la donnée
des positions et des vitesses des atomes. La mémoire nécessaire est estimée à
ln
Mémoire ≃ octets . (2.3)
2 ln 2
7
Chapitre 2 • Probabilités
L’application numérique donne ≈ 1022 octets, soit 1010 disques durs de 1 To (un
TéraOctet = 1000 GigaOctet). Conclusion : si chaque être humain sur terre (environ
7 × 109 personnes) possédait un disque dur de 1 To, cela suffirait à peine à stocker
l’information (de la mécanique classique) correspondant à une « photographie » du gaz
contenu dans 1 cm3 !
Exercice 2.1
Combien de chiffres significatifs sont-ils nécessaires pour repérer la position de cha-
cun des atomes dans le gaz ? Déduire l’expression (2.3).
Indication : 1 octet = 8 bits, i.e. un chiffre entre 0 et 15.
D’un point de vue pratique, il est exclu de chercher à prédire la dynamique de l’ensem-
ble des constituants élémentaires d’un corps macroscopique. Non seulement l’objectif
est hors de portée (la limite des expériences numériques de dynamique moléculaire
correspond au million de particules) mais soulignons surtout qu’il n’a pas d’intérêt. En
effet, le nombre d’informations « intéressantes » que l’on souhaite extraire est en général
très faible : quelques propriétés telles la température, la pression, la densité, ou même
des distributions (de la vitesse, des distances entre atomes), etc. La connaissance du
nombre faramineux de données spécifiant les positions et les vitesses des particules ne
nous dit pas clairement comment remonter à ces informations intéressantes.
• Pour insister encore sur la faiblesse prédictive des équations du mouvement, remar-
quons qu’il est difficile en pratique de définir précisément l’hamiltonien du système.
Tout système « isolé » réel sera soumis à des perturbations extérieures résiduelles
perturbant sa dynamique.
• La seconde raison fondamentale a trait à la nature intrinsèquement probabiliste de la
description quantique des constituants élémentaires.
8
2 Probabilités et variables aléatoires
def
= lim (2.4)
→∞
= 1 (normalisation) . (2.5)
=1
9
Chapitre 2 • Probabilités
def
() = Proba{ = } = = , () , (2.6)
t .q. () = =1
où le symbole de Kronecker , (0 si les arguments sont distincts, 1 s’ils sont égaux) nous
a permis de déplacer la contrainte ailleurs que sur la sommation. Notons que plusieurs
′
évènements pourraient être associés à une même valeur () = ( ). Si les valeurs ()
sont toutes distinctes, on a simplement Proba{ = () } = .
1. Mathématiquement, une variable aléatoire est donc une application allant de l’espace des éventual-
ités E vers l’ensemble des valeurs prises par la variable. Dans le chapitre, nous noterons les variables
aléatoires en majuscules.
10
2 Probabilités et variables aléatoires
0.6
1.0
0.8
0.4
0.6
27/100 a
0.4
0.2
0.2
1/100
2 4 6 8 10
s −1 0 1 2 3 4
x
() d = 1 (2.8)
11
Chapitre 2 • Probabilités
() d = () d = 1 ; c’est même un bon moyen de se rappeler que l’on doit
écrire une égalité entre probabilités (et non entre densités) :
Par exemple la probabilité de trouver Alice en +1 et Bob en −1 est , (+1, −1) = 0.1.
Si l’on souhaite seulement l’information sur la position d’Alice, on doit additionner les
probabilités sur les lignes, par exemple la probabilité de trouver Alice
en +1 quelle que
soit la position de Bob est 0.7 + 0.1 = 0. 8 = (+1). Formellement (, ) =
,
() est la « loi marginale » de .
12
2 Probabilités et variables aléatoires
1()d = d d2 ⋯ d (, 2, ⋯ , ) (2.12)
= Proba 1 ∈ [, + d] sachant que les − 1 autres variables
peuvent prendre n’importe quelles valeurs} .
2.5 Indépendance
Considérons deux évènements et . S’ils sont indépendants, la probabilité d’oc-
currence des deux évènements est donnée par le produit des probabilités
loi jointe et 1() = d (, ) et 2() = d (, ) les deux lois marginales :
Exercice 2.3
Considérons
deux variables aléatoires
et décrites par leur loi jointe (, ) =
exp − − − 2 où , > 0. Quelle est la condition sur pour que
2 2
cette fonction soit bien une distribution ? Quelles sont les lois marginales de et
de ? Pour quelle valeur de les deux variables sont-elles indépendantes ?
13
Chapitre 2 • Probabilités
14
3 Moyenne, variance, moments, cumulants, corrélations,...
Exemple
Reprenons l’étude de la machine à sous discuté ci-dessus. La variable ne prend que
= 3 valeurs, ∈ {0 € , 5 € , 10 €}. Sa distribution ( ) a été donnée plus haut. On
peut calculer la moyenne = (18∕25) × 0 € + (27∕100) × 5 € + (1∕100) × 10 € =
29∕20 €.
Exercice 2.4
Comment le patron du casino choisit-il le coût d’utilisation de la machine à sous ?
Dans le cas d’une variable continue distribuée selon la densité de probabilité (),
la sommation fait intervenir une intégrale
= Proba ∈ [, + d] × = d () . (2.18)
Remarquons finalement que les formules (2.17) et (2.18) peuvent être généralisées
pour calculer la moyenne de n’importe quelle fonction de la variable aléatoire,
( ) = ( ) ( ) (2.19)
=1
( ) = d () () (2.20)
def
Var() = ( − )2 = 2 − 2 (2.21)
2. Nous pourrions aussi considérer − pour estimer les écarts à la moyenne. Nous
comprendrons plus tard pourquoi cet autre choix n’est pas très judicieux.
15
Chapitre 2 • Probabilités
def
= Var() (2.22)
0
(figure 2.1). Nous obtenons = (1∕) d e −∕ = et 2 = 22, donc
Var() = 2 et = .
3.3 Corrélations
Nous avons insisté plus haut sur la notion d’indépendance, obtenue par l’analyse
de la loi jointe de deux variables. Dans la pratique il est courant de chercher à révéler
l’indépendance (ou non) par l’étude de propriétés simples de variables aléatoires plutôt
que par l’analyse de la distribution complète.
Considérons deux variables aléatoires et (par exemple les positions de Al-
ice et Bob). Nous pouvons rencontrer trois situations, correspondant à trois types de
distributions de ces deux variables :
1. Les deux variables sont indépendantes, la moyenne du produit est :
= Proba{ = & = } = (2.23)
,
=Proba{ =}×Proba{ =}
où la somme ,
porte sur les différentes valeurs prises par les deux vari-
ables aléatoires supposées discrètes (par exemple les positions d’Alice et Bob qui
s’ignorent).
A A A A
B B B B
ou ou ou
x x
−1 0 x 0 +1 x −1 0 +1 −1 0 +1
16
3 Moyenne, variance, moments, cumulants, corrélations,...
A A
B B
ou
−1 0 x 0 +1 x
3. Les positions sont anti-corrélées : une fluctuation positive pour Alice − > 0
sera corrélée à une fluctuation négative pour Bob − < 0 (Alice et Bob
s’évitent) :
< . (2.25)
A B B A
ou
−1 0 +1 x −1 0 +1 x
Exercice 2.5
En faisant l’hypothèse que pour chacune des situations représentées ci-dessus,
les différentes éventualités sont équiprobables, calculer dans les trois
situations (les positions prennent deux valeurs −1 ou +1).
Exercice 2.6
sont des variables décorrélées
Justifier que les nouvelles variables =
de variances 2 (pour simplifier, considérer = 0).
17
Chapitre 2 • Probabilités
I.e. indépendance ⇒ = 0, mais on peut trouver des cas où la réciproque n’est pas
vraie.
18
3 Moyenne, variance, moments, cumulants, corrélations,...
def
( ) = e− = d () e − . (2.29)
19
Chapitre 2 • Probabilités
3. Correspondance avec la convention introduite plus haut : on écrit = e− et () = (e − ).
20
5 Théorème de la limite centrale
1
( )
• Nous avons introduit plus haut la moyenne statistique = , qui coïn-
=1
cide en effet à la variable , à un facteur 1∕ près. Une question intéressante est de
caractériser les fluctuations de la moyenne statistique (pour contrôler l’erreur faite en
pratique lorsqu’on extrait la moyenne d’un échantillon de données).
• Si nous considérons un gaz d’atomes ou de molécules, son énergie est dominée par
l’énergie cinétique (c’est presque la définition du gaz, l’énergie potentielle carac-
térisant l’interaction entre atomes/molécules est négligeable devant l’énergie ciné-
tique). Une question intéressante est de caractériser la distribution de l’énergie du gaz
1 2
atomique = .
=1 2
21
Chapitre 2 • Probabilités
Les cumulants de variables indépendantes sont des quantités additives (on pourra
vérifier que c’est également vrai pour des variables aléatoires non distribuées par la
même loi). Pour les premiers :
= , (2.35)
Var() = Var( ) . (2.36)
En particulier la seconde relation montre que les écarts types (i.e. l’ordre de grandeur
des fluctuations) sont reliés comme
= (2.37)
4. Un point subtil : l’écart-type ∝ caractérise des fluctuations typiques (i.e. les plus probables),
ce qui n’interdit pas l’existence de fluctuations atypiques (très peu probables), sur une échelle plus
grande, . L’étude de ces dernières est dénommée l’étude des « grandes déviations » (cf. annexe B).
22
5 Théorème de la limite centrale
par analyse dimensionnelle puisque [ ] = [] ). Nous comparons les fluctuations
encodées dans le cumulant d’ordre et dans la variance,
ce qui conduit à négliger tous les cumulants avec > 2 et justifie (2.38) (cette idée
est formulée plus rigoureusement dans l’exercice 2.9).
Ayant tronqué les contributions des cumulants au delà de la variance, nous obtenons
évidemment la fonction génératrice de la distribution gaussienne, éq. (2.38) d’où
2
1 ( − )
() ≃ exp − pour 1 . (2.39)
2 Var( ) 2 Var( )
Exercice 2.10
Montrer que la loi binomiale Π () = (1 − ) − étudiée plus haut coïncide
avec la loi gaussienne dans la limite des grands nombres, 1. À quelle condition
sur cette approximation est-elle justifiée ?
23
Chapitre 2 • Probabilités
p(x)
~ N σX
x
p(x)
x
0 s−N X ...
pour N
Figure 2.3 – Émergence de la loi gaussiennce (théorème de la limite centrale).
24
Les points clés
Les annexes
0.3
2 σX
0.2
0.1 〈X 〉
2 4 6 8 10 12
x
Figure 2.4
L’écart type = Var() donne une mesure de la largeur de la distribution.
25
Chapitre 2 • Probabilités
0.3 0.3
0.2
c3 >0 0.2
c3 <0
0.1 0.1
−6 −4 −2 2 4 6
x −6 −4 −2 2 4 6
x
Figure 2.5
À gauche : la loi de Gumbel () = exp(− − e− ) a pour premiers cumulants : 1 = 𝐂 =
0.577... (constante d’Euler), 2 = 2 ∕6, 3 = 2 (3) (fonction zeta de Riemann), 4 = 4∕15,
etc. Le signe de 3 indique si les fluctuations positives ou négatives (relativement à )
sont favorisées.
0.100 0.100
0.010 0.010
c 4>0 c 4<0
0.001 0.001
−4 −4
10 10
−6 −4 −2 0 2 4 6
x −4 −2 0 2 4
x
Figure 2.6
Γ(3∕)
La distribution () = Γ(3∕) , ici tracée pour = 1 (à gauche)
exp −
2Γ(1∕) 3∕2 Γ(1∕)
Γ(1∕)Γ(5∕)
et = 4 (à droite), a pour premiers cumulants (non nuls) : 2 = 1, 4 = − 3,
Γ(3∕) 2
etc. Le quatrième cumulant change de signe pour = 2 (les grandes fluctuations sont
favorisées si < 2). La courbe en tirets est la distribution gaussienne ( = 2).
26
B Fluctuations typiques vs grandes déviations
Exemples
∕
Loi de Cauchy. Considérons par exemple la loi () = (l’exposant est
2+ 2
= 1, donc tous les moments sont divergents, = ∞ ∀ ). Nous pouvons calculer la
fonction génératrice (i) = e−i = e −. Cette fonction est C0 (ℝ), i.e. continue,
mais non dérivable en = 0, ce qui signale l’absence d’un développement de Taylor
(2.28), i.e. la divergence de tous les moments 2 = ∞.
4∕
Un autre exemple. Étudions maintenant la loi () = ; en utilisant le
4+ 4
théorème des résidus, on vérifiera que (i) = e−i = cos + sin e− .
Le développement de la fonction pour → 0 est (i) = 1 − 2 + 3 + (4), ce
2
3
qui montre que (i) ∈ C 2(ℝ) (fonction continue et dérivable deux fois partout) et
que seuls les deux premiers moments sont finis : = 0, 2 = 2 et 2 = ∞
pour > 1.
Exercice 2.11
Nous considérons une variable continue positive distribuée selon la loi
1
( ) = e−1∕ , (2.40)
Γ( ) +1
où > 0. Calculer ses moments. Calculer également la fonction génératrice
( ) = e − et discuter son développement pour → 0.
Indication : on donne la représentation intégrale de la fonction de MacDonald
∞
1
2 2 0
d −− 2 ∕4
(Bessel modifiée de 3ème espèce) () = +1
e (pour Re >
0). Son développement est donné par la relation () = −() − () ,
2 sin
∞
(∕2) 2+
valable si ∉ ℤ, où () = est la fonction de Bessel modifiée.
=0
!Γ( + + 1)
27
Chapitre 2 • Probabilités
ni trop proche de 1). Bien entendu, cette observation ne peut être correcte que dans
la région où la distribution est maximum, pour ∼ ∗ = (pic gaussien). Si l’on
s’éloigne de ∗, en particulier si l’on s’approche des bords du support de la distribution,
[0, ], la loi binomiale sera très différente de la forme gaussienne (cf. figure 2.7).
Dans cette annexe, nous discutons comment comprendre la transition entre la forme
gaussienne et la forme non-gaussienne.
1. × 10 -9
1. × 10 -19
ΠN (n)
0.08
1. × 10 -29 0.06
0.04
1. × 10 -39
0.02
1. × 10 -49 0.00
0 20 40 60 80 100
1. × 10 -59
0 20 40 60 80 100
n
Figure 2.7
Comparaison entre la loi binomiale pour = 0. 25 et = 100 et son approxima-
tion gaussienne en tirets. Si les deux courbes sont indiscernables à l’œil lorsqu’elles
sont représentées en échelle linéaire (en insert), la représentation en échelle semi-
logarithmique montre que l’approximation gaussienne dévie significativement de la loi
lorsque s’éloigne de la valeur typique ∗ = .
( ) = d e−() (2.41)
où ∈ ℝ+ est un « grand » paramètre et () une fonction réelle. Dans ce cas il est
possible de trouver une bonne approximation de l’intégrale à l’aide la méthode du col,
dont nous exposons l’idée lorsque la fonction () possède un unique minimum (absolu)
en ∗ ∈], [, « loin » des bords (on suppose de plus que ′′( ∗) > 0, non nul). Dans la
limite → ∞ l’intégrale est dominée par les contributions du voisinage du minimum :
− (∗ )+ 1 ′′ (∗ )(− ∗ ) 2 +((−∗ )3 )
( ) = d e 2 (2.42)
d e− 2 +(
+ ′′( ∗ )(− ∗)
e −(∗)
− ′′( )( −)
1 2 3
−1∕2 )
= (2.43)
′′(∗ ) ∗ ∗
⟶ −∞ d e
+∞ − 1 2
2 = 2
→∞
28
B Fluctuations typiques vs grandes déviations
(les restrictions venant des hypothèses énoncées précédemment sont faciles à lever ; on
pourra obtenir des généralisations de cette formule lorsque toutes ces hypothèses ne sont
pas satisfaites, par exemple = ∗ , etc).
petite bosse à droite du pic principal. Dans la limite → ∞, l’intégrale d e− () est
dominée par le voisinage du minimum ∗ de ().
29
Chapitre 2 • Probabilités
Nous avons vu que la fonction caractéristique de la somme des variables est simple-
ment e− = ( ) = e − ( ) où ( ) = − lne − est la fonction génératrice
des cumulants des variables { }, éq. (2.31). Nous déduisons que la distribution de la
somme des variables est donnée par la transformée de Laplace inverse de e− :
d − ( ) d [− ()]
iℝ 2i iℝ 2i
() = ( ∗ ⋯ ∗ )() = e = e , (2.46)
fois
où nous avons introduit la nouvelle variable = ∕ . L’analyse de la limite → ∞
correspond à l’étude des intégrales (2.41) avec5 → et → − ( ). Nous avons
expliqué dans le paragraphe précédent que, dans la limite → ∞, de telles intégrales
sont dominées par un point col ∗ (en général dans le plan complexe de la variable
conjuguée ). Le point col est le point où la fonction − ( ) est stationnaire :
′( ∗ ) = (2.47)
(∗ est donc une fonction de ). En appliquant (2.44), nous déduisons
d [− ()]
iℝ 2i
1
( = ) = e ≃ e− [ ( ∗)−∗ ] (2.48)
→∞ ′′
−2 ( ∗)
Nous ne cherchons pas à exposer quelles sont les conditions générales qui autorisent ce
type d’approximation. Nous allons illustrer plus bas la méthode sur un exemple concret.
Le point important est d’avoir obtenu la forme d’échelle
def
() ∼ exp − Φ où Φ() = (∗ ) − ∗ (2.49)
→∞
est appelée la fonction de grande déviation. Nous retrouverons ce type de structure plus
tard et verrons que l’entropie pourra être interprétée comme une fonction de grande
déviation (cf. équation (5.20) page 80).
Le théorème de la limite centrale doit être compris comme une limite particulière de
ce résultat. On peut en effet le retrouver de la manière suivante : dans la limite → 0, la
solution de (2.47) est obtenue en utilisant le développement de la fonction génératrice
pour petit argument, ( ) ≃ 1 − (1∕2)2 2. La solution prend donc la forme ∗ ≃
(1 − )∕ 2. D’après (2.49) on retrouve bien que la fonction de grande déviation est
parabolique au voisinage de 1 :
( − 1 )2
Φ() ≃ . (2.50)
→ 1 22
5. Plutôt que d’écrire () comme la transformation de Laplace inverse de ( ) , nous aurions pu
considérer la transformée de Fourier () = (i) et utiliser la transformée de Fourier inverse de
(i) . Cela aurait même été nécessaire si la distribution () décroît trop lentement (par exemple en
loi de puissance).
30
B Fluctuations typiques vs grandes déviations
PN (s)
Universel :
Non universel Non universel
Gaussienne
Grandes Grandes
déviations déviations
~ N évènements
rares
s
~N
Figure 2.9 – Allure schématique de la distribution de 𝑺.
Au centre la distribution prend la forme gaussienne universelle (indépendante de ())
alors que les grandes déviations caractérisant les évènements rares dépendent des
détails de la loi.
On peut vérifier que le préfacteur de la gaussienne apparaissant dans (2.48) est correct
car ′′ (∗) ≃ − 2 dans la limite → 0. La fonction de grande déviation présente donc
un comportement universel, quadratique, à → 0 (théorème de la limite centrale),6
mais également un comportement non universel, i.e. dépendant de () via ( ), pour
1, caractérisant les grandes déviations.
31
Chapitre 2 • Probabilités
forme :
2+1−1
Φ() = 2 + 1 − 1 + ln 2 , (2.54)
2
(cette expression est aussi valable pour < 0 puisque la loi est symétrique). La fonction
est tracée sur la figure 2.10. Nous vérifions bien que Φ() ≃ 2∕4, qui est l’expression
→0
du théorème de la limite centrale puisque 2 = 2, i.e.
1 1 2
() ≃ e− 4 pour . (2.55)
→∞
4
D’autre part le comportement Φ() ≃ − 1 − ln(∕2) de la fonction de grande dévi-
ation pour 1 montre que la distribution de la somme présente le comportement
−
() ∼ e e
pour . (2.56)
→∞ 2
Ce comportement, qui est donc très différent de la décroissance gaussienne (figure 2.10),
est en effet typique de la convolution de lois exponentielles.
0
-1
-2
-3
-4
-5
-6
-6 -4 -2 0 2 4 6
Figure 2.10
Fonction de grandes déviations (2.54) ; comparaison avec la parabole (i.e. la distribution
gaussienne).
32
Entraînez-vous
Exercice 2.12 Loi jointe versus loi marginale – Tavelures et loi de
Rayleigh
Nous discutons la distribution de l’intensité du champ électrique dans un milieu turbide
(comme par exemple l’intensité d’un laser réfléchi sur un milieu désordonné). Le champ a
une amplitude et une phase et sera traité comme un champ scalaire complexe (nous oublions
les effets de polarisation) = + i . La loi jointe pour les deux composantes en un point
est gaussienne (, ) = exp[−( 2 + 2 )∕0 ] (et il n’y a pas de corrélations entre
deux points distincts). Calculer la constante de normalisation . Déduire la loi marginale de
l’intensité du champ = 2. Calculer la moyenne de l’intensité et interpréter le sens de la
constante 0 .
Exercice 2.13 Séance de travaux pratiques
Au cours d’une séance de travaux pratiques, des étudiants répètent fois la mesure d’une
grandeur physique . Chaque étudiant obtient données 1, ⋯ , et donne une analyse
1
statistique : il déduit une moyenne « empirique » = et une variance « empirique »
=1
1
Σ2 = ( − )2 . Ces deux grandeurs sont elles-mêmes aléatoires et diffèrent d’un
=1
étudiant à un autre.
a) Exprimer la moyenne et la variance de et Σ2, qu’on exprimera en fonction des cumulants
de .
b) Discuter la limite → ∞ de leurs distributions.
Exercice 2.14 Bruit de grenaille
Le courant électrique est porté par des porteurs de charge à caractère discret (les électrons
dans un métal), ce qui génère des fluctuations du courant électrique que nous allons étudier.
Par exemple, dans une lampe à vide, en appliquant une différence de potentiel entre une anode
et une cathode, les électrons sont arrachés avec un taux à des instants indépendants (qui
ont
donc une densité moyenne ). On peut écrire le courant électrique sous la forme () =
( − ) où est la charge de l’électron.
0
a) On introduit la charge ( ) = d () transférée pendant un temps . Quelle est la
distribution de ( ) ?
def
b) Le courant moyen (moyenne temporelle et probabiliste) est défini comme = ( ) ∕ .
Dans les expériences, les fluctuations du courant sont caractérisées par le spectre de bruit
def
défini comme = Var(( ))∕ . Quel est l’intérêt de mesurer indépendamment et ?
33
Chapitre 3
Ergodicité
Les quelques notions probabilistes que nous avons exposées au chapitre 2 peuvent ap-
paraître abstraites, aussi notre tâche sera d’établir la relation avec le vocabulaire de
la physique statistique. À partir de ce chapitre, nous allons opérer un petit glissement
sémantique : au lieu « d’événement », nous parlerons de « microétat », noté 𝓁, et une dis-
tribution {𝓁} sera dorénavant appelée un « macroétat » ou un « ensemble de la physique
statistique ». Avant de discuter ces points de vocabulaire, il convient toutefois d’exposer
plus en détail dans quelles situations et comment émergent ces notions probabilistes.
34
1 Équilibre macroscopique et ergodicité
pour = 10 atomes (partie gauche de la figure 3.1) : lorsque les atomes entrent ou sor-
tent du volume, le processus saute d’un entier, ce qui produit de très fortes fluctuations.
Si maintenant nous augmentons le nombre d’atomes jusqu’à = 100 (partie droite de
la figure 3.1), les fluctuations qui reflètent l’agitation au niveau microscopique sont très
fortement réduites relativement à la valeur moyenne = ∕2. D’après le théorème
de la limite centrale
(§ 5 du chapitre 2), nous pouvons estimer l’amplitude de ces fluc-
tuations à ∼ . L’examen de () est fait relativement à une échelle
macroscopique : l’axe des ordonnées correspond à l’intervalle ∈ [0, ]. À cette
aune, les fluctuations, qui traduisent l’agitation au niveau microscopique, sont « gom-
mées » en passant à la limite d’un grand nombre d’atomes, ∕ ∼ 1∕ → 0, et
la grandeur peut être simplement considérée stationnaire1 () ≃ ∕2.
8 80
6 60
4 40
2 20
temps temps
0 10 20 30 40 50 0 20 40 60 80 100
Figure 3.1
En haut : « photographies » du gaz pour = 10 et = 100 atomes. En bas : Nombre
d’atomes occupant une moitié du volume en fonction du temps : à gauche pour = 10
atomes et à droite pour = 100 atomes (simulation numérique).
1. On pourrait objecter
à cet argument que rien n’interdit de « zoomer » pour étudier ces fluctuations,
qui sont d’ordre 1. Cette question est tout à fait légitime et peut se poser dans certains cas. Le
point est qu’étudier les propriétés thermodynamiques du système, comme nous le ferons par la suite,
correspond à sélectionner l’échelle ∼ , à l’aune de laquelle les fluctuations apparaissent négligeables.
35
Chapitre 3 • Ergodicité
par un flot d’électrons : c’est une situation stationnaire et hors équilibre. En revanche à
courant nul, on retrouve une situation stationnaire et à l’équilibre.
Retenons que l’équilibre macroscopique est caractérisé par les deux conditions :
() la stationnarité des observables macroscopiques, et
() l’absence de flux macroscopiques.
1.2 Ergodicité
Pour étudier les propriétés d’élasticité d’un polymère, comme un brin d’ADN, des
expérimentateurs ont réussi il y a quelques années à fixer une petite bille à une des
extrémités de la longue molécule, l’autre extrémité étant fixée sur un substrat. Le sys-
tème ADN+bille, plongé dans un liquide, est soumis aux fluctuations au sein du liquide,
l’ensemble étant à l’équilibre macroscopique. Si l’on enregistre la position de la bille
en fonction du temps, (), on obtient typiquement une trajectoire du type de celle
représentée sur la figure 3.2, ici produite par une simulation numérique. La trajectoire est
extrêmement erratique, ce qui résulte de l’agitation thermique dans le fluide (mouvement
des molécules). Plutôt que d’analyser des propriétés instantanées (position, vitesse, én-
ergie, etc) qui sont fortement soumises aux fluctuations, il est plus judicieux de faire une
analyse statistique de cette unique trajectoire afin d’extraire des propriétés intéressantes :
on représente l’histogramme des positions (à droite).
x
Figure 3.2
Mouvement d’une petite bille accrochée à un polymère dans un fluide (simulation
numérique). L’analyse statistique des positions donne l’histogramme tracé à droite,
auquel on a superposée la distribution de probabilité (ligne continue) vers laquelle tend
l’histogramme dans la limite → ∞.
36
1 Équilibre macroscopique et ergodicité
Cette moyenne temporelle est réalisée sur une unique trajectoire ; elle correspond à
la moyenne statistique (2.15). Si le processus est stationnaire (i.e. le système est à
l’équilibre macroscopique), on peut également construire l’histogramme des positions
( )
enregistrées (à droite sur la figure) : la moyenne peut être aussi bien calculée
en pondérant les valeurs mesurées par leur fréquence (hauteur des barres de l’his-
togramme). Dans la limite → ∞, l’histogramme tend vers la distribution () de
la position de la bille (c’est la définition des probabilités du chapitre 2). La moyenne
prend simplement la forme de la moyenne probabiliste
= d () () , (3.2)
correspondant à l’éq. (2.16). Les deux moyennes s’identifient donc dans la limite
→ ∞, ce qui illustre la propriété d’ergodicité :
( )
(3.3)
→∞
lim = .
Dans la situation simple analysée ici, la justification de cette égalité repose sur l’hy-
pothèse que le processus perd rapidement la mémoire de son histoire antérieure, disons
sur un temps typique (temps de corrélation du processus). On peut alors « dé-
0
couper » l’intégrale temporelle en morceaux de tailles équivalentes d (()) =
=1
(−1)
aléatoires identiques et indépendantes, l’identification des moyennes, éq. (3.3), est alors
justifiée par le théorème de la limite centrale (§ 5 du chapitre 2).
Pour rendre explicite l’intérêt d’une telle relation, nous poursuivons l’analyse. Le
polymère exerce une force proportionnelle à son élongation (loi de Hooke) : nous notons
la constante de rappel de cette force. On pourra montrer dans quelques chapitres que
la distribution de la position de la bille est contrôlée par la température du fluide :
( ) = exp − 2 . (3.4)
2 2
Il est donc clair qu’il est beaucoup plus simple du point de vue théorique de calculer
la moyenne probabiliste (3.2) (c’est une intégrale élémentaire) que d’enregistrer une
trajectoire afin de calculer la moyenne temporelle (3.1). Nous ne révélons néanmoins
pas encore le principe qui nous permet de trouver la distribution (), ce qui sera
précisément l’objet des prochains chapitres.
Exercice 3.1
1 2
Calculer la moyenne de l’énergie potentielle () = .
2
37
Chapitre 3 • Ergodicité
Cette discussion s’applique aussi bien à des systèmes simples qu’à grand nombre
de degrés de liberté, comme un gaz d’atomes. Si nous considérons atomes sans de-
gré de liberté interne, l’espace des phases est un espace de dimension 6 , dont les
38
2 Microétats (état pur)
La dynamique des atomes est gouvernée par un hamiltonien (1 , ⋯ , , 1 , ⋯ , )
Une trajectoire physique Γ()
(Γ). est confinée sur la « surface » définie par = (Γ)
(une variété de dimension 6 − 1), que nous avons schématisée sur la figure 3.3. Partir
d’un point de l’espace des phases détermine complètement l’évolution ultérieure, même
s’il est exclu de la suivre en pratique. Un point Γ contient donc toute l’information
microscopique sur le système (positions et impulsions de tous les atomes) et il est
d’usage de parler de
L’état de spin. En sus des degrés de liberté de translation, les particules sont en général
caractérisées par un moment
cinétique intrinsèque appelé « spin », noté , dont le mod-
= ( + 1) où est entier ou demi-entier (l’équivalent classique
ule est fixé,
serait le moment cinétique caractérisant la rotation d’un corps matériel sur lui-même).
Les états quantiques de spin peuvent être repérés par un unique nombre quantique as-
socié à l’une des composantes du spin, par exemple : le vecteur décrit l’état où
= . Il peut prendre 2 + 1 valeurs : ∈ {−, − + 1, ⋯ , + − 1, +} (on dit
que « est quantifiée »). Par exemple, l’électron, le proton et le neutron ont un spin
= 1∕2 ; l’espace des états de spin est donc de dimension deux, nous les noterons plus
simplement ↑ (pour = +1∕2) et ↓ (pour = −1∕2).
Une particule libre dans une boîte. L’état de la particule libre est spécifié par son
impulsion (conservée), à laquelle on peut associer un vecteur d’onde grâce à la relation
de de Broglie : = ∕. La fonction d’onde caractérisée par un vecteur d’onde est une
39
Chapitre 3 • Ergodicité
onde plane () = exp i ⋅ . Dans une boîte, que nous supposons de forme cubique et
de côté pour simplifier, la fonction d’onde satisfait des conditions aux limites. Puisque
la particule est confinée, sa fonction d’onde est nulle hors de la boîte et un choix naturel
est d’imposer la continuité à l’interface, i.e. () = 0 (condition de Dirichlet). L’état
bord
quantique satisfaisant ces conditions est un état qui combine plusieurs ondes planes et
présente la forme factorisée () = sin( ) sin( ) sin( ) où les composantes du
vecteur d’onde sont quantifiées
= , = et = avec , , ∈ ℕ ∗ . (3.6)
Les différents états quantiques , , sont repérés par les trois nombres quantiques.
Il sera commode de repérer les états par rapport à leur énergie
2
= = (2 + 2 + 2 ) (3.7)
2
def
où = 2 2∕(22) est une échelle d’énergie caractérisant la quantification dans
une boîte. Cet exemple fait apparaître un phénomène intéressant et très générique :
plusieurs états quantiques sont associés à la même énergie. On dira que le niveau
d’énergie est dégénéré. Par exemple : les états quantiques 5, 5, 1 , 5, 1, 5 , 1, 5, 5 ,
7, 1, 1 , 1, 7, 1 et 1, 1, 7 ont tous l’énergie = 51 . On dira que le niveau a une
dégénérescence = 6. Il est intéressant de remarquer que si la dégénérescence entre
7, 1, 1 et 1 , 7, 1 est clairement liée à la symétrie du problème, celle entre 5, 5, 1
et 7, 1, 1 ne l’est pas : on parle de dégénérescence accidentelle dans ce second cas.
En conclusion, on retiendra que l’état quantique est un vecteur de l’espace de
Hilbert, l’espace des états quantiques. Nous le notons { 𝓁 }, où 𝓁 regroupe l’ensem-
ble des nombres quantiques permettant de spécifier un vecteur d’état (par exemple
𝓁 ( , , ) pour la particule dans la boîte tridimensionnelle discutée ci-dessus).
Notons que si le volume du système est fini, il est toujours possible de trouver une base
discrète. On retiendra :
Dans le paragraphe 1.2, nous avons exposé l’idée d’hypothèse ergodique sur un prob-
lème extrêmement simplifié. Cette idée peut être reformulée ici en des termes plus
généraux dans le contexte classique (en reprenant notre exemple de gaz atomique) :
l’évolution du gaz atomique est décrit par une certaine trajectoire Γ() dans l’espace des
40
3 Macroétats (mélange statistique)
( )
(Γ())
0
d
= . (3.8)
= (Γ) ( Γ) .
d6 Γ (3.9)
Les calculs des deux moyennes (3.8) et (3.9) requièrent des informations très différentes :
la première demande l’ensemble de l’information microscopique, i.e. la connaissance de
la solution des équations du mouvement, une masse d’information en pratique phénomé-
nale et inaccessible. La seconde moyenne requiert une information probabiliste sur
l’occupation des microétats, dont nous montrerons qu’elle découlera de règles très sim-
ples. Si le temps est suffisamment « long » pour permettre au système d’explorer
la majeure partie de son espace des phases accessible, nous pouvons supposer que la
moyenne (3.8) tend vers une limite lorsque → ∞. Une illustration concrète basée
sur une « expérience numérique » sera donnée au § 1 du chapitre 5. Nous allons donc
étendre l’hypothèse ergodique au cas des systèmes complexes :
( )
Hypothèse ergodique : lim = . (3.10)
→∞
Cette hypothèse joue un rôle absolument central en physique statistique puisqu’elle nous
permet d’oublier la dynamique temporelle : toutes les propriétés du système à l’équilibre
macroscopique sont encodées dans la densité de probabilité dans l’espace des phases,
qui sera appelée un
On parlera aussi de « mélange statistique ». L’objet des prochains chapitres sera pré-
cisément de montrer quelles règles simples permettent de déterminer la densité de prob-
abilité. Nous rencontrerons diverses situations correspondant à plusieurs distributions
(macroétats) définissant différents « ensembles de la physique statistique ».
Remarque. Dans le cas présenté au §1.2, le système n’est pas isolé et la présence du
« bruit aléatoire » rend plus intuitive l’ergodicité, i.e. la possibilité d’utiliser une de-
scription probabiliste. Dans le cas d’un système isolé, c’est le comportement chaotique
intrinsèque des systèmes complexes qui justifie l’ergodicité. La recherche de résultats
41
Chapitre 3 • Ergodicité
rigoureux sur l’ergodicité fait l’objet d’un domaine appelé « la théorie ergodique ».
Toutefois assez peu de résultats exacts ont été prouvés (on peut citer la preuve de l’er-
godicité pour le gaz classique de sphères dures par Ya. Sinai en 1963, problème discuté
en ouverture du chapitre 5). Notons pour conclure que si l’ergodicité est une condition
suffisante pour que l’égalité (3.10) soit satisfaite, ce n’est pas une condition nécessaire.
Il suffit que la moyenne temporelle de l’observable soit assez indépendante de la sous
partie de l’espace des phases accessible explorée pendant le temps de l’expérience.
Cette remarque est d’importance car, en pratique, le temps nécessaire pour explorer un
espace des phases de grande dimension peut devenir comparable à l’âge de l’univers !
On trouvera une excellente introduction à ces questions dans l’ouvrage [32].
Le cas quantique. Dans le cas quantique, les microétats sont dénombrables, ce qui
simplifie la discussion. En l’absence de contrôle de l’état quantique occupé par le sys-
tème, nous introduisons un jeu de probabilités d’occupation des états d’une base de
l’espace de Hilbert : nous notons 𝓁 la probabilité pour que le système occupe l’é-
tat quantique 𝓁 . La notion de macroétat (mélange statistique) s’identifie avec cet
ensemble de probabilités d’occupation (cf. Annexe B page 52) :
Macroétat ↔ probabilités { 𝓁 }
Notation générique pour les cas classique et quantique. Par la suite, il sera souvent
plus commode d’utiliser cette notation discrète (les microétats {𝓁 } et le macroétat {𝓁})
aussi bien dans le cas classique, 𝓁 → Γ = (1 , ⋯ , 1, ⋯), que dans le cas quantique,
𝓁 → 𝓁 . La moyenne de l’observable prend la forme
= 𝓁 𝓁 .
(3.11)
𝓁
Une première question naturelle concerne le dénombrement des microétats, rendu possi-
ble par le caractère discret des états quantiques. Nous verrons plus tard (cf. les annexes A
et B et les chapitres 5 et 6) que la probabilité d’occupation d’un microétat dépend de son
énergie, aussi devrons nous compter les microétats ayant une certaine énergie. Pour cela,
nous introduisons une grandeur qui jouera un rôle important par la suite : la densité des
états quantiques ou plus simplement la « densité d’états ». Ce concept, purement lié à la
mécanique quantique, encodera souvent toute l’information microscopique nécessaire
sur le système pour l’étude de ses propriétés thermodynamiques.
42
4 Le dénombrement des microétats : densité d’états
où la somme porte sur les états quantiques. On fera attention à ne pas confondre les états
quantiques avec les niveaux d’énergie, qui portent des dégénérescences en général : si
l’on note 𝓁 la dégénérescence du niveau 𝓁 , la densité d’états sera représentée comme
une somme sur les niveaux
( ) = 𝓁 ( − 𝓁) . (3.15)
𝓁
La représentation (3.14) rend la relation (3.12) évidente, mais elle montre aussi que la
densité d’états est un objet mathématique extrêmement singulier. Aussi il sera plus aisé
de considérer la « densité d’états intégrée »
def
Φ() = nombre d’états d’énergies inférieures à = ( ′) d ′ , (3.16)
où nous n’avons pas précisé la borne inférieure de l’intégrale, qui correspond en principe
à l’état fondamental du système. Elle peut encore être représentée par une somme de
fonctions de Heaviside
Φ() = H( − 𝓁) , (3.17)
𝓁
plus régulière mathématiquement que la somme des fonctions de Dirac. Par exem-
ple, nous représentons sur la figure 3.4 la densité d’états intégrée pour l’oscillateur
harmonique unidimensionnel.
À ce stade, toute la complexité du problème a été reportée dans la densité d’états. On
peut cependant comprendre l’intérêt de cette notion en examinant plus en détail le cas
de l’oscillateur harmonique, dont le spectre est régulier = ( + 1∕2) pour ∈ ℕ
(figure 3.4). Si la fonction varie « lentement » à l’échelle de l’écart entre niveaux,
Δ = , la somme est très bien approximée par une intégrale, beaucoup plus simple
43
Chapitre 3 • Ergodicité
0
0 1 2 3 4
Résolution « quantique » Résolution « classique »
Figure 3.4 – Densité d’états intégrée de l’oscillateur harmonique 1D.
Comparaison de la densité d’états intégrée Φ() avec son approximation semiclassique,
notée ici Φ Weyl ( ). « Vue de près » (à gauche) et « vue de loin », sur une échelle Δ
« macroscopique » (à droite).
à calculer en pratique :
∞ ∞
0
1
( ) ≃ d ( ) ,
=0
ce qui revient à écrire ( ) ≈ 1∕() (il y a un état par intervalle de largeur Δ = ).
Remplacer la densité d’états par une constante revient à approximer la densité d’états
intégrée par la droite Φ() ≈ ∕(), qui est la droite passant au milieu des « marches
d’escalier » sur la figure 3.4. Cette fonction régulière porte le nom de terme de Weyl,
ΦWeyl() = ∕() et Weyl () = 1∕(). Le point intéressant est que son calcul peut
être formulé en termes purement classiques (i.e. ne requiert pas la connaissance précise
du spectre quantique), comme nous allons le discuter maintenant.
44
4 Le dénombrement des microétats : densité d’états
(cf. exercice 3.4) aussi nous allons faire le choix qui simplifiera l’analyse et considérer
des conditions aux limites périodiques : (⋯ , + , ⋯) = (⋯ , , ⋯), ce qui montre
que le vecteur d’onde est quantifié comme
La somme porte sur tous les vecteurs d’onde quantifiés selon (3.18) (i.e.
1∈ℤ
⋯
∈ℤ
). La densité d’états intégrée compte ici tous les à l’intérieur de
l’hypersphère de rayon 2 ∕. Si le volume est « grand » (i.e. 2∕2 ), une
estimation de Φ() est donnée par le volume de l’hypersphère de rayon 2 ∕, di-
visé par le volume (2 ∕) occupé par un état quantique dans l’espace des vecteurs
d’onde (figure 3.5). Cela revient à faire une approximation continue et remplacer la
somme par une intégrale. Retenons la règle utile
(2)
⟶ d (3.20)
À ce stade, il est suggestif de substituer l’intégrale sur le vecteur d’onde par une intégrale
sur l’impulsion = , et le volume par une intégrale sur la position :
2
1
Φ() = d d H − , (3.21)
2
où = 2 est la constante de Planck. L’intérêt du changement de variables est d’avoir
reformulé le calcul de Φ(), une fonction comptant les énergies propres d’un problème
quantique, en termes de grandeurs purement classiques :
1 volume de l’espace des phases occupé
Φ() = × (3.22)
par les microétats d’énergies <
s’interprète comme le volume qu’occupe un état quantique dans l’espace des phases
classique, une interprétation réminiscente de la relation de Heisenberg Δ Δ ⩾ ∕2.
correspond au nombre de degrés de liberté, i.e. la moitié de la dimension de l’espace
des phases.
Nous pouvons maintenant terminer le calcul de la densité d’états
pour la particule
libre : (3.21) correspond au volume de l’hypersphère de rayon 2 dans un espace
45
Chapitre 3 • Ergodicité
ky
kx
2 mE
h
Figure 3.5
Dans l’espace des vecteurs d’onde , chaque état quantique d’une particule libre est
représenté par un nœud d’un réseau hypercubique de pas 2 ∕. Chaque état quantique
occupe donc un volume (2∕) dans l’espace des = ∕. La densité d’états intégrée
Φ() correspond
au nombre de nœuds du réseau compris à l’intérieur de l’hypersphère
de rayon 2 ∕.
avec Γ la fonction gamma (cf formulaire page 299), et où nous avons introduit l’échelle
def
d’énergie caractérisant la quantification dans la boîte cubique = 2 22 ∕( 2) (cette
échelle diffère d’un facteur 4 de celle obtenue pour les conditions de Dirichlet).
Le cas tridimensionnel sera important par la suite :
def 1 2 3∕2
′
( ) = Φ () = avec = (en = 3). (3.24)
4 2 2
Nous admettons que la formule (3.22) s’étend au cas où la particule est confinée par un
potentiel arbitraire. Si nous considérons une particule en dimension :
1
Φ() = d
d
H −
(,
) . (3.25)
46
4 Le dénombrement des microétats : densité d’états
Pour terminer, nous discutons le cas d’un système de particules identiques, comme
des atomes de même nature. La mécanique quantique pose un principe d’indiscernabil-
ité des particules identiques et fournit une prescription pour la construction des états
quantiques dans ce cas, qui doivent posséder une symétrie particulière sous l’échange
de particules (postulat de symétrisation). Cette règle affecte le comptage des états quan-
tiques. Considérons par exemple deux particules libres occupant deux ondes planes de
vecteurs d’onde et ; le microétat est noté 𝓁 ( , ). Puisque l’état est symétrique
en échangeant ces nombres quantiques, on ne doit compter chaque couple ( , ) qu’une
fois, i.e. ( , ) et ( , ) correspondent au même état quantique. Nous reviendrons
ultérieurement sur la question de l’indiscernabilité, qui sera discutée plus en détail (voir
aussi les rappels de mécanique quantique, Annexe B page 52).
Dans le cas plus général à particules indiscernables, la formule semiclassique est
affectée d’un facteur 1∕ ! pour ne compter qu’une fois tous les états équivalents par
permutations. Considérons un hamiltonien à particules en dimension 3 ( = 3 ) :
2
= + (1 , ⋯ , ) (3.26)
=1
2
où comprend tous les termes d’énergie potentielle. On retiendra la règle générale :
! 3
1
Φ() = d 3
1 ⋯ d3
d 3
1 ⋯ d3
H − ({ ,
}) (3.27)
Particules libres. Appliquons la formule (3.27) au cas du gaz de particules libres dans
la boîte de volume = 3. En remarquant que l’énergie cinétique des particules a
la même forme que l’énergie cinétique d’une particule en dimension = 3 , il nous
suffit de reprendre le résultat (3.23) en ajoutant le facteur 1∕! lié à l’indiscernabilité :
3∕2
1 3∕2 Stirling e 5∕2
Φ() = ≃ ,
! Γ( 3 + 1) 22 6 32
2
(3.28)
où = est maintenant le volume dans l’espace tridimensionnel. En pratique le
3
47
Chapitre 3 • Ergodicité
Néanmoins, on rencontrera deux types de situations : (i) des fluides, pour lesquels on ap-
pliquera (3.27). (ii) Des solides dans lesquels les atomes (indiscernables) sont localisés
sur des sites (discernables). Puisqu’il y a ! façons d’attacher les atomes sur les
nœuds du réseau cristallin, il y a une simplification !∕ !. On verra une illustration
de cette remarque dans l’étude du cristal paramagnétique au chapitre 5. Le mécanisme
de simplification du 1∕ ! sera détaillé dans le problème 7.3 page 154.
D’un point de vue conceptuel, il est important de comprendre que les atomes iden-
tiques sont toujours indiscernables (c’est une propriété très fondamentale, liée à la
structure de leur espace de Hilbert). Ce sont les sites du réseau auxquels sont attachés
les atomes qui sont discernables.
48
Les points clés
Les annexes
A Formulation classique
A.1 Mécanique analytique
Nous donnons des précisions et faisons des rappels de mécanique analytique dans le
but de motiver la description classique dans l’espace des phases, mais aussi préparer la
discussion d’autres systèmes classiques. En mécanique analytique, et plus particulière-
ment dans la description hamiltonienne, les coordonnées servant à la description de la
dynamique du système sont notées , avec l’indice de la coordonnées, et leur dérivée
temporelle. Leurs moments canoniquement conjugués sont notés et obtenus à partir
def
du Lagrangien par = . L’espace des phases est par définition l’espace des coor-
données Γ = {, }. La donnée de ces coordonnées caractérise entièrement l’évolution
du système, contrôlée par les équations de Hamilton
() = ( Γ()) et () = − (Γ()) , (3.29)
où (Γ)
est l’hamiltonien (l’énergie sur une trajectoire physique). Deux trajectoires
physiques sont représentées par deux lignes qui ne s’intersectent pas (figure 3.3).
49
Chapitre 3 • Ergodicité
de Liouville, que nous discutons maintenant. Il est naturel, pour décrire un équilibre
thermodynamique, de considérer une densité (Γ) indépendante du temps. Cependant,
les systèmes réels évoluent dans le temps. Si nous partons d’une distribution initiale
= 0) la probabilité de retrouver ultérieurement le système autour de Γ() est don-
(Γ,
) d 2 Γ()
née par (Γ(), car l’élément de volume d2 Γ() évolue a priori lui aussi au
cours du temps. Le théorème de Liouville stipule que le volume élémentaire d2 Γ() est
conservé le long des trajectoires physiques si bien que toute l’évolution temporelle du
système est encodée dans la seule fonction (Γ, ). On peut en particulier étudier si celle-
ci tend vers une distribution stationnaire correspondant à celle attendue à l’équilibre,
c’est-à-dire le processus de thermalisation ou d’approche de l’équilibre.
Démonstration du théorème de Liouville. Nous interprétons l’évolution entre les
temps et + , avec infinitésimal, comme une transformation entre les coordonnées
{, } vers les coordonnées { , } définies par :
def
= ( + ) ≃ () + () (3.30)
def
= ( + ) ≃ () + () (3.31)
D’après les équations de Hamilton, nous pouvons écrire :
= + (Γ) et = − ( Γ) (3.32)
Lors du changement de variables, les volumes élémentaires sont reliés par d 2Γ =
d 2Γ où est le Jacobien de la transformation, donné par
⋱ 0 0
2
∕ 2∕2
= det(1 + ) où = 0 0
− 2∕ 2 − 2∕
0 0 ⋱
la matrice 2 × 2, diagonale par blocs 2 × 2. En remarquant que2 det(1 + ) ≃
1 + Tr( ) , nous obtenons finalement
2
2
≃1+ − = 1 à l’ordre 1 en . (3.33)
=1
Autrement dit, nous avons bien d 2Γ = dd = i.e. si l’on
dd = d 2 Γ,
considère un domaine dans l’espace des phases, il évoluera au cours du temps de telle
sorte que son volume soit conservé (figure 3.6).
Une reformulation du théorème de Liouville
permet d’obtenir une équation d’évo-
). On a en effet d =
lution pour (Γ, + + , ce que l’on peut
d
2. Cette relation provient de la définition du déterminant en identifiant les termes d’ordre 1 en , ou
en écrivant det(1 + ) = exp ln det (1 + ) = exp Tr ln(1+ ) ≃ exp(Tr ) ≃ 1 +Tr .
50
A Formulation classique
t’>t p
t
Figure 3.6 – Théorème de Liouville.
On a représenté des trajectoires physiques dans l’espace des phases. L’évolution tem-
porelle conserve le volume dans l’espace des phases, i.e. les deux volumes grisés,
représentant un ensemble de microétats à deux instants de leur évolution, sont égaux.
d def
écrire comme = {, } + , où {, } = − est un crochet
d
d
de Poisson (cf. cours de mécanique analytique). est une dérivée totale, analogue
d
à la dérivée particulaire de la mécanique des fluides, et calculée le long d’une trajec-
toire physique Γ()
solution des équations du mouvement. En revanche, correspond
à la variation locale de la densité de probabilité. On peut montrer que le théorème de
d
Liouville équivaut à l’équation de conservation = 0 de la probabilité. On en tire
d
immédiatement l’équation d’évolution locale pour
(Γ, ) = { , ( Γ, )} . (3.34)
Cette discussion est naturellement adaptée aux systèmes isolés. Un système en contact
avec un thermostat aura également cette forme pour la distribution stationnaire : les en-
sembles de la physique statistique (les macroétats) correspondent à des distributions de
la forme (3.35) : ∗ (Γ) ∝ ( − (Γ))
pour la distribution microcanonique (chapitre 5)
et C (Γ) ∝ e− (Γ) pour la distribution canonique (chapitre 6).
51
Chapitre 3 • Ergodicité
B Formulation quantique
B.1 Rappel des postulats de la mécanique quantique
La mécanique quantique est le cadre définissant les lois de la physique aux échelles
élémentaires. Rappelons les quelques règles qui régissent la dynamique quantique (les
« postulats de la mécanique quantique ») ; voir par exemple les ouvrages [5, 11, 25, 35]
pour plus de détails.
(i) États quantiques. L’état quantique d’un système est décrit par un vecteur d’état ,
élément d’un espace vectoriel des états, l’espace de Hilbert H , construit sur le corps
des nombres complexes, et muni du produit scalaire satisfaisant = ∗ .
(ii) Interprétation probabiliste. Le produit scalaire s’interprète comme l’amplitude de
probabilité de transition (instantanée) entre deux états ( ← ) = , i.e. la
probabilité de transition3 est Proba( ← ) = 2 .
Conséquence – Notation Bra et Ket : Il est d’usage d’interpréter le produit scalaire
(« bracket ») comme le produit d’un vecteur, un « ket » , et son dual, un
« bra » . Nous faisons le lien entre le vecteur d’état et la fonction d’onde : soit
l’état quantique de la particule localisée en . La fonction d’onde s’écrit comme un pro-
duit scalaire () = et représente l’amplitude de (densité de) probabilité pour
trouver la particule en .
(iii) Observables et postulats de mesure. Les observables (grandeurs physiques) sont
représentées par des opérateurs linéaires agissant dans l’espace de Hilbert. Une observ-
able est caractérisée par son spectre de valeurs propres et vecteurs propres { , }.
Si le système est dans un état , le résultat d’une mesure de est une des valeurs
propres avec probabilité Proba( ← ) = 2. L’état du système après
mesure est (réduction du paquet d’onde). Le processus de mesure s’accompagne
d’une évolution stochastique et irréversible de l’état quantique.
(iv) Évolution temporelle. L’évolution temporelle du vecteur d’état est contrôlée par
l’équation de Schrödinger
d
i () = () , (3.36)
d
où est « l’opérateur hamiltonien » (l’énergie). C’est donc une évolution déterministe
et réversible d’un objet de nature probabiliste.
(v) Permutabilité des particules identiques. La description de l’état quantique en
terme d’amplitudes de probabilité conduit à postuler l’indiscernabilité des particules
identiques, i.e. que les états à plusieurs particules possèdent une symétrie sous la per-
mutation de deux particules. L’état à particules est donné par une fonction d’onde
3. Autrement dit : Proba( ← ) = 2 est la probabilité pour observer le système dans l’état
, sachant qu’il se trouve initialement dans l’état .
52
B Formulation quantique
2 est la probabilité pour que l’état initial étant , le système soit observé
dans l’état final (cf. rappel des postulats plus haut), alors que caractérise notre
ignorance sur l’état quantique occupé par le système.
La même observation s’applique aux moyennes d’observables. Considérons une
grandeur physique . D’après le postulat de mesure, la moyenne quantique de l’ob-
servable est = : elle représente la moyenne de résultats de mesures
répétées de , toujours réalisées à partir du même état . Ces moyennes quantiques
doivent être pondérées par les probabilités d’occupation des états, qui tiennent compte
de notre ignorance sur l’état quantique du système
moyenne statistique
= (3.39)
mélange
statistique
moyenne quantique
4. En général les particules ne sont pas uniquement caractérisées par leur état dans l’espace physique
mais possèdent aussi des dégrés de liberté interne, comme le spin (son moment cinétique intrinsèque).
On doit alors introduire une « coordonnée de spin » que nous notons . La fonction d’onde dépend
également de cette coordonnée. Si l’on regroupe les coordonnées (, ) alors on écrira en toute
généralité pour deux particules (1, 2 ) = ± (2 , 1) (+ pour des bosons et − pour des fermions).
53
Chapitre 3 • Ergodicité
Problèmes stationnaires. Une situation est décrite par une matrice densité qui com-
]
mute avec l’hamiltonien [, = 0. Un choix spécifique qui assure cette propriété est
une fonction de l’hamiltonien
)
= ( (3.43)
qui est l’analogue de (3.35). Autrement dit : si les états 𝓁 dans (3.40) sont des états
stationnaires, 𝓁 = 𝓁 𝓁 , on aura 𝓁 = (𝓁). Par exemple, la distribution
canonique qui sera introduite au chapitre 6 correspond à la matrice densité ∝ e− où
est un paramètre réel positif (i.e. 𝓁 ∝ e−𝓁 ).
54
Entraînez-vous
Exercice 3.2 Densité d’états de systèmes à deux niveaux
Nous considérons systèmes sans interaction, pouvant chacun se trouver dans deux états
± , d’énergies ±0.
a) Décrire les microétats du système. Quel est le nombre total de microétats ? Quel est le
spectre des énergies ?
b) On note ± le nombre de systèmes dans l’état ± . Exprimer + et − en fonction de et
l’énergie totale .
c) Déduire la dégénérescence des niveaux d’énergie. En supposant et ± 1, discuter la
forme de la densité d’états.
Exercice 3.3 Densité d’états de oscillateurs harmoniques
unidimensionnels
Nous considérons oscillateurs identiques (de même pulsation ), indépendants et
discernables.
a) Analyse quantique : On rappelle que le spectre d’un oscillateur est = ( + 1∕2)
pour ∈ ℕ. Quels sont les microétats du système de oscillateurs ? Quel est le spectre des
énergies ? Calculer le nombre de microétats accessible Ω() pour → 0 (i.e. la dégénéres-
cences des niveaux d’énergie).
INDICATION : le calcul de la dégénérescence des niveaux peut être reformulé comme le dénom-
brement des partitions d’un entier (relié à l’énergie) en entiers (les excitations des
oscillateurs).
b) Analyse semiclassique : Calculer la densité d’états intégrée à l’aide de la formule
semiclassique. Comparer au résultat quantique.
Exercice 3.4 Terme de Weyl de la densité d’états et formules de trace
On considère une particule en une dimension, décrite par l’hamiltonien = 2 ∕(2). Le
spectre des énergies est = 2 2 ∕(2) (par la suite on posera 2∕(2) = 1 pour simplifier).
La particule est confinée sur un intervalle [0, ], ce qui implique la quantification de l’énergie.
On compare les densités d’états pour les conditions aux limites de Dirichlet, (0) = () = 0,
et les conditions aux limites périodiques, (0) = () & ′(0) = ′().
a) Rappeler les spectres obtenus pour les deux types de conditions aux limites.
55
Chapitre 4
Entropie
1 L’entropie en thermodynamique
56
1 L’entropie en thermodynamique
Figure 4.1
Une balle rebondit sur le sol. À cause de la dissipation, la hauteur maximale atteinte à
chaque rebond diminue d’un rebond au suivant. Le second principe interdit le processus
inverse où la chaleur de l’environnement serait convertie en énergie mécanique.
Discutons une illustration simple de cette idée : travail et chaleur sont deux formes
d’énergie pouvant être converties l’une en l’autre, cependant les deux sens ne sont pas
toujours autorisés pour cette conversion : du travail moteur ne peut pas être produit en
présence d’une unique source de chaleur (thermostat), qui doit alors nécessairement
absorber de l’énergie sous forme de chaleur. Par exemple, une balle est lâchée d’une
hauteur et rebondit sur le sol, l’expérience montre que la hauteur maximale atteinte
par la balle à chaque rebond diminue. Au cours de son mouvement, l’énergie mécanique
de la balle est dissipée à cause des frottements sur l’air et de la déformation au moment
du rebond, qui n’est pas parfaitement élastique et produit de la chaleur transmise au
sol et à la balle. Entre l’état initial où l’énergie de la balle est purement mécanique,
balle = balle si la balle est lâchée sans vitesse initiale, et l’état d’équilibre final où
la balle est immobile sur le sol, balle = 0, le travail de la force gravitationnelle a été
converti en chaleur, absorbée par l’environnement (sol et air) qui joue le rôle de thermo-
stat. L’expérience que nous décrivons est purement régie par les lois de la mécanique
classique, qui sont réversibles (même à l’échelle atomique, une description classique du
mouvement des atomes du gaz et des solides est ici suffisante). Cependant, est interdit
le processus inverse où l’environnement se refroidirait en fournissant de la chaleur con-
vertie en travail, permettant à la balle de remonter de plus en plus haut (partie droite de
la figure). La formalisation de cette idée est précisément l’objet du second principe de
la thermodynamique.
57
Chapitre 4 • Entropie
58
2 Information et entropie statistique
répondre à la question dans le cas général, nous devons disposer d’une mesure de l’in-
formation, ou du manque d’information. Si l’on considère une distribution quelconque
{ 𝓁 }, quelle est la fonction des probabilités (1 , ⋯ , ) mesurant le manque
d’information ?
Remarque 2. Dans le cas trivial où l’espace des états se réduit à un unique microétat
(Ω = 1) celui-ci est occupé avec probabilité 1 = 1, i.e. nous disposons de l’information
maximale sur le système. L’entropie est nulle, i.e. (1) = 0.
59
Chapitre 4 • Entropie
𝓁, = 𝓁 ′ =
1
. (4.8)
Ω Ω′
Nous choisissons que le manque d’information soit extensif, notamment guidés par la
correspondance avec l’entropie de la thermodynamique. Autrement dit, (S S ′ ) =
( S ) + (S ′), i.e.
(Ω Ω′ ) = (Ω) + (Ω ′) . (4.9)
Cette propriété assure que si le système est dupliqué, l’information manquante augmente
dans les même proportions.
est la constante de Boltzmann. Elle est reliée à la constante des gaz parfaits et au
nombre d’Avogadro par = ∕ . Puisqu’elle mesure une quantité élémentaire
d’entropie, on parle parfois de « quantum d’entropie » (mais attention avec cette ter-
minologie, l’entropie n’est pas une grandeur quantifiée). Enfin, nous remarquons que la
constante de Boltzmann est une constante fondamentale au statut particulier puisqu’elle
est inséparable de la définition de l’échelle des températures (autrement dit, on verra sys-
tématiquement apparaître la combinaison : c’est déjà le cas dans l’équation (4.1)
qui lie entropie, chaleur et température).
Finalement, nous avons obtenu l’entropie de la distribution uniforme comme
Si cette formule fondamentale est attribuée à Boltzmann (elle est d’ailleurs gravée sur
sa tombe à Vienne, cf. figure 4.2), elle a été écrite pour la première fois sous cette forme
par Planck dans le cadre de son étude de la thermodynamique du rayonnement.
Cette expression de l’entropie est remarquable : elle fournit une méthode pour ex-
primer l’entropie d’un système en se ramenant à un problème de dénombrement des
60
2 Information et entropie statistique
microétats autorisés, i.e. un problème combinatoire. De plus elle nous donne une défi-
nition absolue de l’entropie, contrairement à la thermodynamique, qui ne nous permet
de caractériser que ses variations via le second principe, éq. (4.1).
61
Chapitre 4 • Entropie
M x
Les occupations étant fixées, ces Ω agencements sont équiprobables, i.e., d’après
(4.11), caractérisés par l’entropie
!
= ln ≃ − 𝓁 ln(𝓁 ∕ ) (4.13)
1 ! ⋯ ! 𝓁=1
Nous pouvons vérifier que, dans le cas de la distribution uniforme 𝓁 = 1∕Ω, nous
retrouvons l’entropie de Boltzmann-Planck = ln Ω. Finalement, c’est une situa-
tion assez particulière où, par un raisonnement astucieux, nous avons déduit la formule
générale (4.15) d’un cas particulier (4.11) !
Maximum. Le cas où nous avons le moins d’information sur l’occupation des mi-
croétats est lorsque ceux-ci sont équiprobables, = 1∕ ∀ . Rappelons que dans
62
2 Information et entropie statistique
Concavité. Considérons deux distributions { 𝓁(0) } et {𝓁(1) }. Nous définissons les prob-
() def
abilités 𝓁 = (1 − ) 𝓁(0) + 𝓁(1) avec ∈ [0, 1], qui correspondent à une distribution
interpolant entre les deux précédentes. On peut prouver la propriété
()
({ 𝓁 }) ⩾ (1 − ) ({ (0)
𝓁
}) + ({𝓁(1) }) pour ∈ [0, 1] (4.17)
qui assure que l’entropie est une fonction concave vis-à-vis de n’importe lequel de ses
arguments (figure 4.4).
S (1)
S (λ)
S (0) λ
0 1
Figure 4.4 – L’entropie est une fonction concave de n’importe lequel de ses arguments.
pour que le système (resp. ) se trouve dans le microétat (resp. ′ ), indépendam-
ment de toute information sur l’état du système (resp. ). Rappelons qu’en général
,
(l’égalité , = est réalisée lorsque les deux systèmes sont indépen-
63
Chapitre 4 • Entropie
second logarithme :
où
(, ) = +
def ,
, ln . (4.20)
,
({, }) = ({
}) + ({ }) si et sont indépendants (4.22)
Preuve que (, ) ⩾ 0 : Remarquons que (, ) porte l’information sur les cor-
rélations, ce qui explique le signe − devant le dernier terme de (4.19). Nous utilisons
l’inégalité de convexité ln() ⩾ 1 − 1∕ :
(, ) ⩾
, 1 − = (, −
)=0. (4.23)
,
, ,
64
2 Information et entropie statistique
65
Les points clés
Les annexes
(1 , ⋯ , ) = 0 . (4.26)
66
1 La méthode des multiplicateurs de Lagrange
(2) l’extremum de est donné par = − ln − 1 − = 0 pour 1 ⩽ ⩽ Ω, i.e.
toutes les probabilités sont égales − ln ∗ = + 1 ∀ .
(3) On injecte la solution dans la contrainte : ∗ = Ω∗ = 1 i.e. parmi tous
les macroétats, celui qui maximise l’entropie est celui correspondant à la distribution
uniforme :
∗ = 1∕Ω (4.28)
(on obtient donc + 1 = ln Ω).
On retrouve la distribution uniforme à partir d’un « principe d’entropie maximum »,
i.e. d’information minimale.
67
Entraînez-vous
Exercice 4.1 On considère une variable aléatoire continue distribuée selon la loi ().
Justifier que l’entropie de la loi peut être écrite comme
= ln[1∕( )] (4.29)
(pour = 1).
Déduire une estimation de l’entropie de la loi du demi-cercle () = 2 2 − 2 ∕(2).
Exercice 4.2 Entropie de Rényi
Une autre définition de l’entropie a été proposée par le mathématicien hongrois Alfréd Rényi
(1921-1970) :
def
({}) = ln (4.30)
1−
Quelle est la relation avec l’entropie de Gibbs-Shannon ? Montrer que l’entropie est maximum
pour la distribution uniforme et calculer max
. Laquelle des propriétés importantes satisfaites
par l’entropie de Gibbs-Shannon n’est pas vérifiée par l’entropie de Rényi ? Avec quelle(s)
conséquence(s)?
68
Chapitre 5
Systèmes isolés à
l’équilibre – Postulat
fondamental
Dans ce chapitre et le suivant, nous allons construire explicitement les distributions {𝓁 }
dans l’espace des microétats, correspondant aux différents « ensembles de la physique
statistique ». Dans un premier temps, nous nous plaçons dans la situation la plus épurée,
cas d’un système isolé, ce qui va nous permettre d’introduire le postulat fondamen-
tal. Nous allons considérer une situation particulière dont l’analyse va nous permettre,
par induction, d’énoncer un principe qui transcendera cette expérience spécifique. Nous
nous plaçons ainsi dans une position analogue à celle de Galilée étudiant le mouve-
ment de divers objets au fond de la cale d’un bateau, observations qui le conduiront
à proposer le principe d’inertie de la mécanique classique. Nous analysons ici une ex-
périence numérique sur le gaz de sphères dures (choix naturel puisque le gaz sera notre
système modèle pour appliquer les nouveaux concepts rencontrés).
69
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
4R
potentiel « inter-atomique » est soit nul soit infini : seule importe l’analyse des configura-
tions spatiales possibles, ce qui offre un avantage certain pour visualiser la dynamique
du système en profitant du découplage position-impulsion (figure 5.1). Ce problème
reste néanmoins extrêmement riche et difficile. Aussi nous allons encore le simplifier en
nous plaçant dans la situation bidimensionnelle, mais surtout en nous focalisant sur une
unique sphère, dont nous supposerons l’environnement gelé. Afin de « forcer le destin »
de cette sphère et induire de fréquentes collisions, nous la plaçons dans un carré de côté
égal à 4, aux coins duquel sont placées quatre sphères immobiles (partie droite de la
figure 5.1). Nous espérons ainsi rendre compte de l’histoire d’une sphère dure au sein du
gaz et de l’effet des collisions avec les autres particules. Après avoir ainsi drastiquement
simplifié le problème du gaz de sphères dures, nous allons pouvoir tirer des conclusions
simples à l’aide d’un petit programme simulant le mouvement de la sphère.
y y y
x x x
70
1 La recherche d’un postulat fondamental
Après un temps assez long, la trajectoire a exploré tout l’espace que les contraintes lui
permettent de visiter. Autrement dit, la densité de probabilité () pour trouver la sphère
en un endroit est non nulle partout où les contraintes stériques l’autorisent. Il nous reste
à déterminer la valeur de la distribution sur son support.
b) Mesure de la densité
400
300
y
200
100
0
x
Figure 5.3 – Ergodicité dans le problème de Sinai.
La densité de probabilité est uniforme dans la région accessible. (Remerciements à
Alberto Rosso pour les programmes python ; cf. l’ouvrage [20]).
1
(,
) = ( 2 − 20 ) pour ∈ domaine accessible , (5.1)
qui exprime (Γ) = cste pour tous les Γ = (, ) autorisés.
71
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
Exercice 5.1
Vérifier la normalisation de (5.1).
Nous allons postuler que cette assertion reste vraie dans le cas général, pour tout
système avec de nombreux degrés de liberté, arguant que la complexité de la dy-
namique (chaos, interactions,...) favorise une exploration efficace de l’espace des phases
accessible. Le postulat sera validé par comparaison avec les expériences.
Considérons un système isolé de particules, dont les microétats sont les points de
l’espace des phases, Γ = (1, ⋯ , , 1, ⋯ , ). Il sera plus commode (et plus physique)
de supposer que l’énergie n’est fixée qu’avec une précision près. Si nous étendons le
résultat (5.1) au cas plus général, nous postulons que la densité dans l’espace des phases
est uniforme dans la région accessible de l’espace des phases :
= (, )
1 ⩽ +
si ⩽ (Γ)
∗ (Γ) (5.2)
0 sinon
La constante assure la normalisation : (, ) est le volume de l’espace des phases
délimité par les deux contraintes ⩽ (Γ) ⩽ + (cf. figure 5.4). La dis-
tribution (5.2) est appelée la « distribution microcanonique », repérée par l’exposant
« ∗ ».
Γ2
ρ* (Γ) =cste
E H(Γ) =E+ δE
=
H (Γ)
Γ1
Figure 5.4
La densité de probabilité dans l’espace des phases est constante dans le domaine
accessible (la région entre les deux « surfaces » définies par ( Γ) = et (Γ) = + ).
En pratique il est plus facile de commencer par calculer le volume de l’espace des
phases classique occupé par les microétats d’énergies inférieures à :
() =
d6 Γ H − ( Γ) , (5.3)
72
2 Postulat fondamental de la physique statistique
où H() est la fonction de Heaviside. On déduit ensuite (, ) ≃ ′( ) .
Exercice 5.2
Que devient (5.2) si → 0 ?
b) Formulation quantique
1
si ⩽ 𝓁 ⩽ +
𝓁∗ = Ω() (5.5)
0 sinon
73
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
« l’entropie microcanonique ». Nous allons voir plus bas que cette fonction, qui dépend
en général des différents paramètres définissant le problème (volume , nombre de par-
ticules , etc) est la fonction fondamentale permettant d’obtenir les propriétés thermo-
dynamiques du système (c’est le sens du postulat fondamental de la thermodynamique
rappelé au début du chapitre 4). ∗(, , , ⋯) jouera le rôle de fonction génératrice
des propriétés thermodynamiques. Cette observation souligne le caractère remar-
quable de la relation fondamentale (5.6) qui relie Ω(), i.e. essentiellement la densité
d’états qui dénombre les microétats d’énergie , à des propriétés thermodynamiques
mesurables (équation d’état, coefficients calorimétriques, etc).
Dans les situations que nous allons considérer (gaz, solide, etc) les interactions entre les
constituants élémentaires du système ont une très courte portée. Deux exemples : dans
un gaz d’atomes, l’énergie potentielle d’interaction entre deux atomes décroît comme
−6 avec la distance (forces de van der Waals). Dans un métal, à cause de l’écran-
tage, l’interaction effective entre les électrons décroît exponentiellement sur une échelle
microscopique. Cette remarque assure que l’énergie et d’autres grandeurs physiques im-
portantes obéissent à des règles d’additivité. Discutons le cas de l’énergie : considérons
deux sous-parties S1 et S 2 d’un système S = S1 S2. Nous notons 1, resp. 2 ,
l’énergie de S1 , resp. S2. L’énergie totale de S doit aussi tenir compte de l’énergie
d’interaction entre les deux sous-systèmes : = 1 + 2 + 1int ↔2 . Si les interactions
entre les constituants élémentaires ont une courte portée,1 on s’attend à ce que l’énergie
de chaque sous-système croisse proportionnellement au nombre de particules 1, 2 ∝
(supposé le même dans les deux sous-systèmes pour simplifier l’argument), alors que
l’énergie d’interaction ne fait intervenir que les particules à la surface entre les deux
sous-systèmes, i.e. int
1↔2
∝ 2∕3 1, 2 . Dans la limite où le nombre de particules est
macroscopique, on peut finalement écrire
= 1 + 2 + int
1↔2
≃ 1 + 2 , (5.7)
1. Une situation où cela n’est pas le cas : les systèmes de particules en interaction gravitationnelle.
74
2 Postulat fondamental de la physique statistique
L’hypothèse d’interactions à courte portée nous permet d’introduire une distinction en-
tre deux types de variables : les variables extensives, comme l’énergie, le nombre de
particules ou le volume, qui croissent proportionnellement au nombre de constituants
élémentaires, et les variables intensives, comme la densité moyenne = ∕ , etc.
Dans le cas intermédiaire, si une grandeur croît comme ∝ avec ∈]0, 1[ ou
∝ ln , on dira que est sous-extensif.
Par exemple, considérons un système deux fois plus grand : les variables extensives
sont doublées, → 2 , → 2 , → 2 , etc, alors que les variables intensives sont
inchangées, → , → (température), → (pression), etc.
c) Extensivité de l’entropie
Si toutes les sous-parties sont équivalentes, on pourra écrire ∗(S ) ≈ ∗ (S1), i.e.
l’entropie est une grandeur extensive. Étant fonction de deux grandeurs extensives, et
, elle prend nécessairement la forme :
∗
(, ) = × (5.9)
où () est une fonction d’une variable qui mesure l’entropie par sous-système, en
unité de . Remarquablement, la propriété d’extensivité permet de réduire le nombre
d’arguments de la « fonction entropie » de deux à un.
Nous pouvons maintenant revenir sur le nombre de microétats accessibles, i.e. la
densité d’états. La propriété d’extensivité montre que la dépendance avec le nombre de
constituants élémentaires est exponentielle :
Ω(, ) = ( ) ∼ exp , (5.10)
On pourra confronter cette structure à (3.28). C’est donc un nombre faramineux en
général (cf. § 1 du chapitre 8 sur les ordres de grandeur).
75
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
1 2 3
...
...
N
Figure 5.5
Un système S est subdivisé en sous-systèmes S 1,..., S de dimensions macro-
scopiques ; pour des interactions mutuelles à courte portée, les sous-parties sont
(quasiment) indépendantes.
mag = − = − () (5.12)
=1
=
où () est l’aimantation totale. L’énergie de chaque spin peut donc prendre
𝔪
deux valeurs : ± = ∓ où = ∕2 (i.e. 𝔪 = ±𝔪0 avec 𝔪 0 = ∕2). L’état où
def def
le moment magnétique est aligné sur le champ est donc plus favorable énergétiquement
(état ↑ si > 0). Ce problème est donc le plus simple auquel on puisse penser : un
ensemble de systèmes à deux niveaux.
Nous avons étudié en détail la densité d’états du système (exercice 3.2), cependant
il est utile de reprendre rapidement l’analyse de Ω. Nous supposons que le cristal est
isolé, i.e. son énergie magnétique est fixée : mag = . Les nombres de spins dans
les deux états, notés respectivement + et −, sont donc fixés par les deux conditions
76
2 Postulat fondamental de la physique statistique
1
= ++ − et = (− + + − ) , d’où ± = ( ∓ ∕). Le nombre de microétats
2
accessibles correspond au nombre de manières de choisir + spins ↑ parmi , i.e Ω =
!∕ +! − ! . En utilisant la formule de Stirling (A.20), nous déduisons l’expression
de l’entropie microcanonique
∗ (, , ) ≃ ln − + ln + − − ln −
(5.13)
(1 − ) ln (1 − ) + (1 + ) ln (1 + )
= ln 2 − (5.14)
2
77
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
Exercice 5.3
Donner le sens de ↑ = +∕ et ↓ = − ∕ . Montrer que l’entropie par spin
def
spin = ∕ peut se mettre sous la forme
spin = − ↑ ln ↑ + ↓ ln ↓ (5.15)
Comparer avec la formule de Gibbs-Shannon (4.15).
Nous calculons maintenant l’entropie du gaz parfait de atomes contenus dans une
boîte de volume . Le calcul part de la densité d’états intégrée (3.28). Il est rendu très
direct grâce à l’observation suivante : l’entropie microcanonique (5.6) fait intervenir
le nombre de microétats accessibles Ω() = ( ) = Φ′ ( ). En utilisant que
l’exposant de Φ() ∝ 3∕2 est macroscopique,
∼ , nous
pouvons écrire ( ) =
3 3 3
Φ() ∝ 2 −1, d’où ∗ = ln Φ() + ln . Si le premier terme est
extensif, ( ), nous constatons que le second terme est sous-extensif. On peut négliger
2 2
78
3 Relâchement de contraintes
3 Relâchement de contraintes
Maintenant que nous avons défini une procédure pour calculer l’entropie microcano-
nique ∗ à partir de la description microscopique (essentiellement encodée dans la
densité d’états), la question que nous allons maintenant aborder est de savoir comment
extraire l’information physique « intéressante » de cette fonction fondamentale. Par ex-
emple, dans le cas du gaz décrit par la formule de Sackur-Tetrode (5.17), comment
déduire son équation d’état, ses coefficients calorimétriques, etc ?
Considérons deux systèmes S 1 et S 2 initialement isolés dont les énergies sont re-
spectivement (1) et 2() (figure 5.7). Chaque système est caractérisé par sa « fonction
entropie » ∗1 ( 1) = ln Ω 1( 1) et ∗2(2 ) = ln Ω 2(2 ), où Ω1, 2 sont les nombres
d’états accessibles des systèmes lorsqu’ils sont isolés. À un certain instant on les met
en contact thermique (la paroi isolante devient une paroi « diatherme » laissant passer
la chaleur), puis on laisse évoluer le système S = S 1 S2 vers l’équilibre macro-
scopique.2 Lorsqu’ils sont en contact, les systèmes échangent de l’énergie, 1 et 2
2. Dans la pratique, il suffit de mettre en contact deux corps, puis d’attendre suffisamment longtemps
car les échanges de chaleur mettent en jeu des processus de diffusion assez lents à l’échelle macro-
scopique.
79
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
deviennent des variables internes, bien que l’énergie totale = (1) + 2() = 1 + 2
reste fixée (avant et après le contact), puisque l’ensemble reste isolé.
1 2 1 2
δE
Clarifions le sens de la somme discrète sur l’énergie, en principe une variable continue.
La densité d’états de S s’exprime comme une convolution des densités d’états des
deux sous-systèmes : 12 () = ( − 𝓁1 − 𝓁2 ) = d1 d2 ( − 1 −
𝓁1 , 𝓁2
2 ) (1 − 𝓁1 ) (2 − 𝓁 2 ) = d1 1 (1 ) 2( − 1 ). Nous déduisons
𝓁1 𝓁2
d1
1 1 2
def
Ω 12( ) = 12 ( ) = Ω ( ) Ω ( − 1) . (5.19)
« 1 »
80
3 Relâchement de contraintes
c) Température microcanonique
1 def ∗ ( )
= (5.23)
∗ ( )
3. Combinée aux propriétés d’extensivé de l’entropie, la forme P∗ ( 1 ) ∼ exp[ ∗ ∕ ] illustre que
l’entropie s’interprète comme une fonction de grande déviation (cf. annexe B du chapitre 2 page 27).
4. Remarque sur les notations : dans le cadre de la thermodynamique, il est conventiel d’écrire ce type
de relation 1∕ = ( ∕) , . Dans le cadre de la physique statistique, l’entropie microcanonique
est naturellement une fonction de , , (système isolé) et il sera donc superflu de préciser que la
dérivation partielle de ∗ se fait à et fixés.
81
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
caractérisé par une autre fonction entropie et conduirait à une autre définition de la
température a priori. La question de l’équivalence des propriétés thermodynamiques
associées à différents macroétats (« ensembles ») sera discutée au chapitre 7.
(i)
E2
E2
~
(i) (f) S *( E1;E )
S *1 (E1)
S *2 (E−E1 )
(i) max E1
E1 E1
Nous pouvons maintenant réécrire la condition d’équilibre (5.22) à l’aide des tempéra-
tures microcanoniques des deux sous-systèmes :
∗1 (max
1
) = 2∗ ( − 1max ) (condition d’équilibre thermique) (5.24)
Nous ne devons pas oublier que cette équation ne définit que la valeur la plus prob-
able de la variable interne 1 , qui est sujette à des fluctuations. Le développement de
l’entropie réduite au voisinage de son maximum prend la forme
2 ∗
∗ ( max; ) + 1 (1 − max) 2 ,
∗(1 ; ) ≃ (5.25)
1 1
2 2 max
1 1
que nous pouvons injecter dans l’expression de la distribution (5.20), ce qui appelle
plusieurs remarques.
Tout d’abord l’existence d’un équilibre stable exige que max 1
soit un maximum de
l’entropie réduite. Puisque cette propriété est vraie dans toutes les situations, elle l’est
notamment si 1∗ = ∗2 , i.e. c’est une propriété générale de l’entropie microcanonique,
qui implique que la température est une fonction croissante de l’énergie
2 ∗ ∗
<0 ⇒ >0 (5.26)
2
82
3 Relâchement de contraintes
cf. figure 5.8. Sa variance est contrôlée par 2 ∗∕12 max . À ce stade il est intéres-
1
sant de clarifier le sens physique de la dérivée seconde : nous reconnaissons la capacité
calorifique à volume constant, définie dans le cadre de la thermodynamique comme
def
= ∕ , . Pour assurer la correspondance avec la thermodynamique, nous
posons la définition suivante de la capacité calorifique microcanonique
def 1 1
∗ = = − . (5.27)
∗∕ ( ∗) 2 2 ∗ ∕2
La capacité calorifique caractérise la capacité du système soumis à un accroissement
de température à augmenter son énergie, ≃ ∗ (à et fixés). La stabilité de
l’équilibre implique donc la positivité de la capacité calorifique.5
Reprenons l’analyse de la distribution : en introduisant le développement (5.25)
dans (5.20) et en comparant à la structure générique P (1 ) ∝ exp − (1 −
∗
(5.28)
D’après (5.27), on peut encore exprimer la variance en termes des capacités calorifiques
∗ 1 et ∗ 2 des deux sous-systèmes :
−1
2 1 1
1 = Var( 1) = ∗ 2 ∗
+ ∗ (5.29)
1 2
Cette expression montre que les fluctuations de l’énergie sont essentiellement contrôlées
par le système ayant la plus petite capacité calorifique :
1 ≃ ∗ ∗ 1 ∕ pour ∗ 1 ∗ 2 . (5.30)
Ce type de relation est intéressant : il établit le lien entre les fluctuations d’une grandeur
et un coefficient calorimétrique. On rencontrera d’autres exemples de ce type plus loin.
5. Notons que ces propriétés reposent sur l’hypothèse d’interactions à courtes portées, centrale dans
l’analyse du contact thermique. Lorsque cette hypothèse n’est pas satisfaite, il est possible de trouver
des situations où ∗ < 0.
83
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
84
3 Relâchement de contraintes
T2*( E−E 1)
T1* (i) (i)
E1
(i) max
E1 E1
Figure 5.9 – Le sens des échanges d’énergie est gouverné par les températures initiales.
f) Conclusion
En conclusion, nous pouvons formuler le « théorème » suivant qui nous permet de
caractériser le nouvel équilibre (figure 5.8) :
Lorsqu’une contrainte est relâchée dans un système isolé, celui-ci évolue spon-
tanément vers un état d’équilibre macroscopique qui maximise son entropie.
85
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
= +, i.e. = −𝔪0 , tous les spins sont anti-alignés sur le champ ↓↓ ⋯ ↓ ,
on a ∗ = −∞ ( ∗ = 0− ).
β*=1/(k BT * ) T*
Figure 5.10
def
Inverse de la température ∗ = 1∕( ∗) et température microcanonique pour le cristal
paramagnétique.
∗(, , ) =
2∕
− (5.38)
ln +
et présente donc une discontinuité autour de = 0 ; elle est positive pour < 0 et
négative pour > 0 (rappelons que ∗ = 0 K est le « zéro absolu »). L’existence de
températures (absolues) négatives, démontrée expérimentalement (figure 5.11), vient ici
simplement du comportement non monotone de l’entropie microcanonique (figure 5.6).
Cette propriété a pour origine une propriété du modèle assez atypique : le cristal possède
un nombre fini de microétats, égal à 2 , et le spectre des énergies est borné supérieure-
ment ∈ [− , +]. Le sens des températures absolues négatives est discuté
dans les exercices 5.6 et 5.7, dans lesquels nous montrons que les températures absolues
négatives sont plus chaudes que les températures absolues positives.
Pour finir, remarquons que la discontinuité de la température, qui passe de ∗ =
+∞ à ∗ = −∞, est uniquement liée à l’usage de quantifier l’agitation thermique à
l’aide de ∗ = 1∕ ∗ ∕ . Si les thermomètres donnaient plutôt une mesure de ∗ =
(1∕ )∗ ∕, il n’y aurait pas cet inconvénient (figure 5.10).
T* >0
Mz
T *<0
t
1 min
T *=+ −
86
3 Relâchement de contraintes
Considérons le problème de la détente de Joule (figure 5.12). Deux gaz occupent deux
parties d’un récipient séparées par une paroi isolante (« adiabatique »), bloquée par un
() ()
taquet. Le volume total est = 1 + 2 . À un instant on retire le taquet pour permettre
à la paroi de se déplacer librement. On permet également aux systèmes d’échanger de
l’énergie, i.e. la paroi devient « diatherme ». Les énergies 1 et 2 ainsi que les volumes
1 et 2 deviennent alors des variables internes, avec les contraintes = 1 + 2 et
= 1 + 2 .
L’analyse est analogue à celle de l’échange thermique, à la différence près que l’on
doit maintenant introduire une entropie réduite fonction de deux variables internes
∗ (1, 1; , ) = ∗1 (1, 1) + 2∗( − 1 , − 1 ). Nous avons discuté le prob-
lème du contact thermique avec un luxe de détails, aussi serons-nous ici beaucoup plus
brefs. D’après le « théorème » de maximisation de l’entropie, la condition d’équilibre est
∗1 max max 2∗
( 1 , 1 ) = ( − 1max , − 1max) (5.39)
1 2
∗1 max max 2∗
( , 1 ) = ( − 1max , − 1max) . (5.40)
1 1 2
Nous savons par ailleurs que l’équilibre mécanique est un équilibre entre forces, i.e.
entre pressions. Nous définissons donc la pression microcanonique en accord avec la
87
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
∗ def ∗
= (5.41)
∗
(bien que nous omettions les arguments de ∗ et ∗ , ce sont bien entendu les mêmes
arguments que ceux de l’entropie microcanonique ∗ (, , , ⋯)). La condition
d’équilibre prend finalement la forme
∗ = ∗ (5.44)
88
3 Relâchement de contraintes
qui est indépendante du nombre de particules. Cette écriture de la pression est une forme
non universelle (le facteur 2∕3 est une propriété du gaz monoatomique non relativiste).
Toutefois, la relation (5.45) est plus générale qu’il n’y paraît : dans le problème 5.1
page 98, nous montrons qu’elle n’est pas affectée par les corrélations quantiques et décrit
aussi bien le régime classique que le régime quantique.
La détente de Joule avec une paroi adiabatique est plus délicate à discuter (cf. [8] ; ex-
ercice II.16 de [15]). Même si les deux systèmes ne peuvent pas échanger de chaleur
à travers la paroi, ils peuvent échanger du travail : les variations d’énergies et de vol-
umes ne sont pas indépendantes. Montrons que l’équilibre est encore caractérisé par
la condition d’égalité des pressions. Pour cela nous supposons que le système est dans
son état d’équilibre et cherchons une propriété permettant de définir cet équilibre. Si
l’on écarte le piston de section d’une distance infinitésimale d, la variation de l’én-
ergie du gaz 1 est donnée par le travail des forces exercées sur le piston (par le gaz 2) :6
-
1 = −2→1d = − 2d 1 où d 1 = d. De même d 2 = −1 d2 . Les
∗ ∗
d1 = d
variations d’énergies et de volumes ne sont pas indépendantes. La variation d’entropie
(réduite) est donc complètement contrôlée par d1 = −d2 :
1 ∗1 1 ∗2 1 1
d = d 1 + d 2 = ∗ d1 + ∗ d1 + ∗ d2 + ∗ d 2 =
∗ ∗ ∗
∗
+ ∗ ( ∗1 − ∗2 )d1 .
1 1 2 2 1 2
L’équilibre correspond au maximum de l’entropie (réduite), i.e. ∗1 = ∗2. Cependant,
cette condition ne suffit pas à déterminer complètement l’état d’équilibre : on doit déter-
miner quatre inconnues, 1 , 2, 1 et 2 , alors que nous ne disposons que de trois
équations, 1 + 2 = , 1 + 2 = et ∗1 (1 , 1 ) = ∗2 (2 , 2 ). L’état d’équilibre
dépend des détails de la dynamique au cours de la transformation.
∗ def ∗
=− (5.46)
∗
6. Rappelons que le travail reçu par un système est le travail des forces extérieures. Pour un gaz séparé
- = −ext d où ext est la pression extérieure.
de l’extérieur par un piston, le travail infinitésimal est d
Si la transformation est réversible, i.e. le système passe par une succession d’états d’équilibre, il y a
- rev = − d .
égalité entre pressions intérieure et extérieure = ext et on a d
89
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
puis en maximisant une entropie réduite, on arrive à la condition d’équilibre ∗1 ∕1∗ =
∗2 ∕2∗. Si l’on échange des particules, on échange également de l’énergie, et donc
l’équilibre est également caractérisé par l’égalité des températures [8]
Étant une grandeur intensive, ∗ est en fait seulement fonction des deux rapports ∕
et ∕ . Il fait intervenir le même logarithme que l’entropie (5.17), ∗ = (5∕2) −
∗∕ ∗ . Puisqu’elle est dérivée de la formule de Sackur-Tetrode, la validité de cette
3∕2
expression est également limitée au régime dilué ( ∕ ) ∕(3 2 ) 1.
3.4 Résumé
Nous résumons les conclusions des trois sections précédentes dans le tableau 5.1.
Les différentes définitions (température, pression et potentiel chimique, etc) peuvent être
facilement retrouvées en utilisant la correspondance avec la thermodynamique. Si nous
partons de l’égalité fondamentale
d = d − d + d + ⋯ (thermodynamique) (5.49)
90
4 Irréversibilité
Tableau 5.1
Grandeur Force Équilibre Sens
conjuguée thermo. des échanges (∗)
1 ∗ energie
Énergie = ∗1 = 2∗ si 1∗() > 2∗ () S1 ⟶ S2
∗
∗ ∗ volume
Volume = 1∗ = 2∗ & ∗1 = ∗2 si ∗1() > ∗2() S 1 ⟵ S 2
∗
∗ ∗ particules
# de particules = − 1∗ = 2∗ & ∗1 = ∗2 si ∗1 () > ∗2 () S1 ⟶ S 2
∗
(∗)
: les sens d’échange de volume et de particules sont donnés en supposant égalité des
températures initiales ∗1 () = 2∗ ().
4 Irréversibilité
Avoir compris comment établir le lien entre les lois de la mécanique newtonienne, et les
lois de la thermodynamique est probablement le succès le plus remarquable de Boltz-
mann. Sa démarche a cependant rencontré une forte opposition parmi les physiciens
contemporains et certaines objections de l’époque sont restées aujourd’hui sous le nom
de « paradoxes ». Nous en évoquons deux dans cette section.
91
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
l’autre est vide (2) = 0. À un instant on retire la paroi, les molécules se répartissent
rapidement dans les deux volumes (figure 5.14). Puisqu’elles se déplacent dans tous les
sens aléatoirement, le nombre de molécules 1 est une variable interne (fluctuante), qui
vaut en moyenne ∕2. Une molécule ayant une probabilité 1∕2 de se trouver dans le
volume de gauche, la distribution du nombre de molécules dans le volume de gauche
est donnée par
!
P ∗ (1 ) = . (5.51)
2 1 !( − 1)!
P *(N1) δN1
N1
0 N/2 N
N1 N2
92
4 Irréversibilité
obtient :
Δmelange = ( 1 + 2 ) ln(1 + 2 ) − 1 ln 1 − 2 ln 2 , (5.54)
qui s’interprète
simplement comme l’entropie liée au nombre de façons (1 +
2 )!∕ 1 !2 ! pour répartir les atomes des deux gaz dans les deux volumes. Si les
7. Dans le cadre quantique, les particules sont décrites par une fonction d’onde et la notion de
trajectoire disparaît.
93
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
deux gaz sont de natures différentes, la transformation est irréversible et l’entropie aug-
mente. Ce n’est pas le cas si les deux gaz sont de même nature : la transformation
est alors réversible puisque réintroduire la paroi correspond à revenir dans l’état ini-
tial (figure 5.15). Le problème soulevé ici, appelé « paradoxe de Gibbs » (1875), vient
de ce que le calcul de Δmelange avec ∗disc ne fait pas intervenir la nature des deux gaz.
Irréversible :
Réversible :
nale est la somme des entropies des deux gaz de 1 et 2 atomes occupant le volume
1 + 2 , on obtient (5.54). Dans le cas où les gaz sont de même nature, l’entropie finale
est celle d’un unique gaz de 1 + 2 atomes occupant le volume 1 + 2 et l’on déduit
f inal ∶ 1 gaz dans 1 +2
1 + 2 1 1
Δmelange = (1 + 2) ln −1 ln − 2 ln =0
1 + 2 1 2
comme il se doit.
En conclusion, la nécessité de tenir compte de l’indiscernabilité dans la description
classique est une réminiscence remarquable de la mécanique quantique dans un régime
complètement classique. En effet, la réduction du nombre des microétats classiques par
le facteur 1∕! s’interprète comme la réduction de la dimension de l’espace de Hilbert
de particules indiscernables par rapport au cas discernable, conséquence du postulat
de symétrisation de la mécanique quantique, ce qu’on peut écrire très schématiquement :
1
dim Hindisc ≈ dim Hdisc.
!
94
4 Irréversibilité
95
Les points clés
96
Entraînez-vous
Exercice 5.6 Cristal paramagnétique et vibrations atomiques
Au § page 76, nous avons étudié les propriétés thermodynamiques du cristal de spin 1∕2
et avons montré que la température absolue peut être négative (correspondant aux plus
hautes énergies accessibles par le cristal magnétique). Cette conclusion repose toutefois sur
l’hypothèse que les moments magnétiques sont isolés. En pratique, ils sont portés par les
atomes, eux-mêmes soumis aux vibrations (agitation thermique) qui seront étudiées en dé-
tail au chapitre 9. L’énergie du cristal contient donc deux contributions : l’énergie magnétique
mag = (−+ + −) (notations du § page 76) et l’énergie de vibration vib > 0. Le modèle
classique de cristal montre que la température microcanonique de vibration est proportion-
nelle à l’énergie vib
∗
= vib∕(3 ) > 0. Formellement, le problème est équivalent à deux
systèmes à l’équilibre (l’aimantation et la vibration), mis en contact thermique (nous noterons
∗
mag la température magnétique donnée par l’éq. (5.38)). Nous supposons le cristal isolé :
= mag + vib est fixée.
∗ ()
a) Si le cristal est préparé dans un état initial tel que mag < 0, quel est le signe de la
température finale ?
b) Expliquer pourquoi il est plus facile d’observer des températures négatives avec les spins
nucléaires plutôt qu’avec les spins électroniques.
Exercice 5.7 Les températures (absolues) négatives sont les plus
chaudes !
Considérons deux solides cristallins de spins 1∕2, identiques ou non (on oublie les vibrations
des atomes discutées dans l’exercice précédent). Initialement, nous supposons les deux solides
∗ () ∗ ()
isolés, avec des températures 1 < 0 et 2 > 0 (où les deux températures sont données
par l’éq. (5.38). Les deux solides sont mis en contact. Quel est le cristal qui cède de l’énergie
à l’autre ?
Exercice 5.8 Distribution de Maxwell
On considère un gaz parfait monoatomique dans une boîte de volume . Le gaz est isolé.
def
a) Montrer que l’entropie microcanonique peut s’exprimer à l’aide de l’intégrale Σ ( ) =
2
3 3
d 1 ⋯ d − , dont on précisera la dépendance en . Calculer la tempéra-
=1
2
ture du gaz.
b) Donner l’expression de la distribution microcanonique ∗(1, ⋯ , , 1 , ⋯ , ) dans
l’espace des phases. Montrer que la normalisation est reliée à Σ ( ).
c) Montrer que la loi marginale de l’impulsion de l’atome numéro est
2
Σ −1 − 2
( ) = . (5.55)
Σ ( )
Analyser la limite → ∞ à température fixée.
97
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
et = 2. Les états stationnaires du système de atomes combinent donc états indi-
viduels de type onde plane. L’objet du problème est de montrer que des arguments généraux
permettent d’écrire l’entropie sous la forme d’une fonction () d’un seul argument combinant
les trois variables :
def
∗ (, , ) = () avec = . (5.57)
2
∗ = (gaz monoatomique classique et quantique) . (5.58)
3
Quel est l’exposant contrôlant l’équation de l’isentrope ∗ = cste dans le diagramme
- ?
4/ Gaz classique.– Montrer que la condition ∗ ∕ = 0 (i.e. ( ∕ ), = 0) donne la
fonction ().
5/ Gaz de bosons et condensation de Bose-Einstein.– Dans un gaz parfait de bosons, il existe
une température critique en dessous de laquelle le potentiel chimique s’annule, ∗ = 0. Dans
ces conditions, montrer que la fonction est une loi de puissance () = , où l’on donnera la
98
Entraînez-vous
valeur de l’exposant ( est une constante inconnue). Montrer que la pression est ∗ ∝ ∗
et indépendante de la densité . Donner l’exposant .
Problème 5.2 Distributions de Fermi-Dirac et de Bose-Einstein
On propose une dérivation des distributions de Fermi-Dirac et de Bose-Einstein caractérisant
l’occupation d’un niveau d’énergie individuel par un fermion, ou un boson, respectivement.
Nous nous plaçons dans la situation microcanonique où le système est isolé et utilisons un
argument combinatoire : particules identiques (donc indiscernables) peuvent occuper
états quantiques individuels d’un même niveau d’énergie dégénéré ( fois, donc).
1/ Exprimer la différentielle d∗ (, ) en fonction de la température microcanonique ∗ et
du potentiel chimique microcanonique ∗ .
2/ Fermions.– Les particules sont des fermions. Le principe de Pauli impose que chaque
état individuel ne peut être occupé que par une seule particule (figure 5.16).
Fermions :
Bosons :
Figure 5.16
Deux configurations (microétats) possibles : en haut : = 4 fermions dans = 10 états
individuels. En bas : = 7 bosons.
99
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
nous ignorons l’énergie cinétique des particules) et divisons par la pensée le volume en
cellules de volume (i.e. = ). Les particules sautent de cellule en cellule et les différents
microétats correspondent simplement aux différentes manières de remplir les cellules avec
les particules. Cette idée offre une manière commode de discrétiser le modèle du gaz parfait,
ce qui rend l’analyse numérique plus aisée. Les modèles de gaz sur réseau ont été beaucoup
étudiés par les théoriciens, notamment pour considérer les effets d’interaction entre particules
(pour une discussion élémentaire, cf. chapitre 8 de [21]).
1 2 ...
cellule m :
n m particules
... M
1/ Gaz de fermions (supposés sans spin).– La nature fermionique est prise en compte en
supposant que chaque cellule peut être occupée au maximum par un fermion, i.e. ∈ {0, 1}.
Donner l’expression du nombre de microétats accessibles ΩFerm (, ) (nombre de manières
de placer fermions dans cases). Déduire l’entropie microcanonique Ferm
∗ (, ) dans
∗
la limite 1 et 1, puis la pression microcanonique Ferm.
2/ Gaz de bosons.– On reprend l’analyse dans le cas d’un gaz de bosons (de spin nul). Dans
ce cas les facteurs d’occupation ne sont limités que par le nombre total de bosons : ∈
{0, 1 , 2, ⋯ , }. Déduire ΩBos(, ) puis l’entropie ∗Bos(, ) dans la limite 1 et
1. Calculer la pression microcanonique ∗Bos.
3/ Conclusion.– Comparer les trois équations d’états, ∗disc , ∗Bos et ∗Ferm .
100
Entraînez-vous
Figure 5.18
Des « molécules » de volume = (∕6)3 se trouvent dans une solution. Une grosse
« molécule » de volume mol = 𝓁3 réduit le volume disponible pour ces molécules.
A. Effet du volume exclu sur la pression.– Nous commençons par considérer les « petites
molécules » de volume , occupant un volume (sans la grosse molécule) et étudions les
effets de volume exclu. Nous décrivons les molécules classiquement.
1/ Le volume disponible pour une molécule en solution est . Quel est le volume disponible
pour une deuxième molécule ?
2/ En continuant le raisonnement (i.e. en ajoutant les particules successivement), justifier que
le nombre de microétats accessibles est
Ω ≈ − ( − 1) (5.59)
=1
101
Chapitre 5 • Systèmes isolés à l’équilibre – Postulat fondamental
2/ Si la grosse molécule s’approche de la paroi, à une distance < , comme sur la figure 5.18,
que devient le volume effectif ? Déduire l’expression de l’entropie microcanonique des petites
molécules en fonction de la distance ( , , ). Tracer l’entropie en fonction de > 0.
3/ Montrer que la grosse molécule de volume mol = 𝓁 3 subit une force lorsqu’elle se rap-
proche de la paroi. Dans quelle sens est dirigée cette force ? Interpréter physiquement le
résultat.
4/ Par analogie avec la définition de la pression, nous définissons la force comme
∗
= . (5.60)
Figure 5.19
a) Une membrane perméable au solvant mais imperméable au soluté sépare les deux
compartiments. On rajoute du soluté dans le compartiment de gauche. b) La paroi est
maintenant imperméable mais mobile.
102
Entraînez-vous
a. Écrire le nombre de microétats initial et montrer qu’il y a égalité des pressions 1 = 2. En
déduire une relation entre les 1∕2 et les volumes initiaux 1∕2,.
b. Après ajout du soluté, exprimer la pression dans le compartiment de gauche en fonction de
1, , et 1, . De même pour 2 en fonction de 2 , 2, et .
c. Dans quel sens se déplace la paroi ? Calculer la différence de volume Δ1 = 1, − 1,
en fonction de et des 1∕2∕. Simplifier l’expression en faisant l’hypothèse 1∕2 et
montrer comment la mesure de Δ 1 permet d’accéder à la concentration en soluté.
103
Chapitre 6
Systèmes non isolés
– Ensembles canonique
et grand-canonique
Dans le chapitre précédent, nous avons défini un mode opératoire efficace pour par-
tir de la description microscopique (informations encodées dans la densité d’états) et
déduire les propriétés thermodynamiques des systèmes isolés (via la détermination de
l’entropie microcanonique). Plutôt que de poursuivre plus avant les applications de ce
formalisme, plusieurs raisons nous poussent à développer de nouveaux outils et intro-
duire deux autres « ensembles » (macroétats) de la physique statistique. La première est
que les systèmes isolés sont peu courants et difficiles à réaliser en pratique. La situation
rencontrée plus fréquemment est celle où le système est maintenu à température fixée
grâce au contact avec un thermostat, un « gros » système, avec lequel il peut échanger
de l’énergie. Une deuxième raison qui nous pousse à chercher d’autres distributions
que la distribution microcanonique : cette dernière repose plus ou moins implicite-
ment sur l’hypothèse que le système est suffisamment « grand », proche de la limite
thermodynamique, afin d’assurer l’existence d’un équilibre thermodynamique grâce à
l’ergodicité. La situation « canonique » où le système est en contact avec un thermo-
stat va nous permettre d’échapper à cette restriction puisque même un « petit » système
pourra atteindre un état d’équilibre grâce aux échanges avec le thermostat. Finalement,
une dernière raison est d’ordre technique : lorsque le système est isolé, la contrainte de
conservation de l’énergie fait apparaître des problèmes combinatoires qui peuvent être
extrêmement difficiles à résoudre. Relâcher cette contrainte va conduire à d’importantes
simplifications dans les calculs.
Nous allons introduire dans ce chapitre deux nouvelles distributions correspondant
aux ensembles « canonique » (système en contact avec un thermostat, i.e. un réservoir
104
1 Ensemble canonique
1 Ensemble canonique
La discussion qui permet de déterminer les probabilités 𝓁C est très proche de celle con-
cernant le contact thermique (§ 3.1 du chapitre 5) : le système S considéré est supposé
en contact avec un thermostat T , un autre système suffisamment « gros » pour que les
échanges d’énergies avec S n’affectent pas ses propriétés thermodynamiques (comme
par exemple sa température microcanonique). Si nous notons S et T les énergies
des deux systèmes, cette condition sera respectée pour T S .
Thermostat ,T
δE
b) Distribution canonique
Quelle est la probabilité 𝓁C pour que S soit dans un microétat 𝓁 ? Notons 𝓁 les microé-
tats de S et ceux de T . Le nombre total de microétats accessibles pour S T est
noté Ωtot . D’après le postulat fondamental, les microétats de S T sont équiprobables,
∗
𝓁 = 1∕Ωtot . La détermination de 𝓁C requiert donc d’identifier le nombre de microé-
tats de T compatibles avec le fait que S soit dans le microétat 𝓁. Ces états satisfont
à tot ⩽ 𝓁 + ⩽ tot+, ce que l’on peut réécrire tot −𝓁 ⩽ ⩽ tot − 𝓁 +.
Par définition, le nombre recherché est donc le nombre de microétats accessibles pour
T autour de l’énergie tot − 𝓁 , soit ΩT (tot − 𝓁), d’où finalement
Ω T (tot − 𝓁 ) 1
∗ ( − )
𝓁C = ∝ e T tot 𝓁 , (6.1)
Ω tot
que nous avons exprimée en fonction de l’entropie microcanonique du thermostat
T∗ = ln Ω T (le facteur de normalisation Ωtot est indépendant de 𝓁). En utilisant
105
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
1 − 𝓁
𝓁C = e (6.4)
où
def def 1
= e −𝓁 et = (6.5)
𝓁
L’énergie de S n’est pas fixée mais fluctue. La première propriété que nous pou-
vons déterminer est l’énergie moyenne, qui peut être déduite de la fonction de partition
comme suit :
C 1 1 1
= C
𝓁 𝓁 = 𝓁 e−𝓁
= − e −𝓁
=− (6.6)
𝓁
𝓁 𝓁
autrement dit
C
=− ln (6.7)
C
À partir de maintenant, les deux notations ⋯ ou ⋯ désigneront la moyenne prob-
abiliste. L’équation (6.7) donne une première illustration de la logique qui apparaîtra
106
1 Ensemble canonique
def C
= ( , , , ⋯) (6.8)
C
L’examen de l’équation fait apparaître la combinaison − ln = − C , qui s’in-
terprète en thermodynamique comme l’énergie libre, ou fonction de Helmholtz (notée
= − en thermodynamique). Nous adopterons donc la même définition :
def
( , , ⋯) = − ln ( , , ⋯) (6.10)
C
−
C
( , , ⋯) = =− (6.11)
107
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
Exercice 6.1
Vérifier l’égalité C = − puis montrer que
2 C
= − = . (6.12)
2
Remarquons que cette relation fournit un moyen pratique pour déduire l’entropie de
( ′ )
0
la capacité calorifique, qui est mesurable : ( ) = (0) + d ′ .
′
Extensivité de . Parmi les arguments de l’énergie libre, est intensive alors que
et sont extensifs. Par conséquent, la propriété d’extensivité est
( , , ) = ( , , ) , (6.13)
où est un facteur de dilatation sans dimension. Autrement dit, cette propriété montre
que, bien qu’elle ait trois arguments (pour un fluide simple), l’énergie libre s’exprime à
l’aide d’une fonction de deux variables : ( , , ) = ( , ∕ ).
Rappelons l’énoncé du second principe de la thermodynamique Δ ⩾ d-∕ où d -
est une quantité infinitésimale de chaleur reçue par le système.
- =0
Si le système est isolé thermiquement (situation du précédent chapitre), on ad
et on déduit Δ ⩾ 0.
Si le système a une température fixée par un thermostat (présent chapitre), le second
principe prend la forme Δ ⩾ ∕ : il fournit une borne supérieure à la quantité
totale de chaleur reçue, ⩽ Δ , i.e. une borne inférieure à la chaleur cédée par le
système. Nous pouvons alors relier la variation d’énergie libre à la variation d’entropie
Δ = Δ( − ) = Δ − Δ . En utilisant le premier principe, Δ = + , nous
obtenons
Δ = + − Δ d’où Δ ⩽ (6.14)
108
1 Ensemble canonique
Nous définissons le potentiel chimique canonique comme le coût en énergie libre pour
rajouter une particule dans le système, soit
def
C = ( , , ⋯) − ( , − 1, ⋯) (6.15)
C
=− . (6.17)
C
L’expression = 𝓁C 𝓁 pourrait laisser penser que le calcul de la moyenne re-
𝓁
quiert de nombreuses informations microscopiques : les probabilités 𝓁C (i.e. les énergies
𝓁) et la connaissance de la valeur de l’observable 𝓁 dans chaque microétat. Au con-
C
traire, nous voyons que peut être obtenu par une simple opération de dérivation
sur l’énergie libre . Cette remarque permet de mieux comprendre le rôle central de
l’énergie libre dans l’ensemble canonique et illustre toute la puissance des outils de la
physique statistique (l’annexe A page 128 complète cette discussion).
109
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
0
( ) = d () e− , (6.18)
Var() =
C
2 2 ln
=− . (6.20)
2
C
(on peut le vérifier par une analyse directe de 2 = 𝓁C 𝓁2 ). La dernière égalité
𝓁
nous fournit une relation intéressante entre les fluctuations de l’énergie et la capacité
calorifique. En utilisant = − , il vient
1 2
= (6.21)
2
110
1 Ensemble canonique
dans le cas canonique). On vérifiera plus bas sur l’exemple du gaz parfait que les deux
définitions de la capacité calorifique coïncident dans la limite thermodynamique.
Exercice 6.2
Démontrer la formule (6.20).
Ce résultat offre donc un moyen extrêmement direct pour passer du problème d’un
sous-système à sous-systèmes (potentiellement 1023 ).
Cette discussion peut être appliquée à la distribution canonique elle-même, ce qui
conduit à ce qui est communément appelé la loi de Boltzmann pour des systèmes in-
dépendants. La probabilité C que l’état individuel soit occupé et la probabilité C ( )
pour que le système se trouve dans le niveau d’énergie sont données par
e − e−
C = ou C ( ) = , (6.24)
avec la dégénérescence du niveau . Avec ces notations 𝓁C = C .
111
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
def 1
≃ MB = (approximation de Maxwell-Boltzmann) . (6.25)
!
= (problème séparable) (6.26)
=1
112
1 Ensemble canonique
Nous avons déjà décrit les aspects microscopiques du problème au chapitre 5 (§ 2.2.d
page 76). Nous reprenons l’analyse du problème plus efficacement. Le calcul de la
fonction de partition pour un spin est particulièrement simple :
qui nous donne immédiatement les propriétés du cristal via sa fonction de partition
cristal = . Puisque les propriétés du cristal se déduisent directement de celles d’un
unique moment magnétique grâce à l’extensivité, notre analyse pourra rester au niveau
d’un seul spin, dont l’énergie libre, l’énergie moyenne et l’entropie sont données par
( , ) = − ln 2 ch( ) , (6.28)
C ( , ) = − th( ) , (6.29)
C ( , ) = ln 2 ch() − th() . (6.30)
C
L’énergie peut être reliée à l’aimantation moyenne d’un spin, 𝔪 = −C∕ :
𝔪 = 𝔪0 th( ) = 𝔪0 th( ∕ ) .
C
(6.31)
def
où 𝔪 0 = ∕2 est l’aimantation maximale. Cette expression fait apparaître la compéti-
tion entre l’énergie, caractérisée par l’échelle = 𝔪0 , qui tend à faire s’aligner le
moment sur le champ, et l’agitation thermique (l’entropie), caractérisée par l’échelle
, qui traduit le désalignement à cause des fluctuations thermiques (cf. exercice 5.5).
Pour , l’agitation thermique est négligeable, 𝔪 ≃ 𝔪0. Pour ,
C
mzc/m 0
+1
l’entropie domine
... ... ... ...
l’énergie domine
l’énergie domine B /T
... ...
−1
Figure 6.2
Aimantation du cristal de spins 1∕2 en fonction du rapport ∕ . À fort champ mag-
nétique/basse température ( ), l’énergie domine et le cristal se trouve dans
l’état d’énergie minimale (spins alignés sur le champ). À faible champ/haute tempéra-
ture ( ), l’entropie domine et le cristal explore un grand nombre de microétats
d’énergie ∼ 0 (les spins fluctuent).
113
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
Exercice 6.3
C
Retrouver l’expression de l’aimantation individuelle moyenne 𝔪 à partir de la
loi de Boltzmann appliquée à un moment magnétique, puis à partir du couple de
variables thermodynamiques conjuguées (, ) avec l’aimantation totale.
D’après les règles de dénombrement des microétats synthétisés au chapitre 3 (§ 4), nous
pouvons écrire la somme sur les microétats en intégrale sur l’espace des phases selon :
d2 Γ − ( Γ )
!
= e (6.34)
e− (Γ )
C (Γ ) = . (6.35)
!
114
1 Ensemble canonique
= (
− (Γ)
d2 Γ
!
C
Γ )e . (6.36)
Ce théorème classique repose sur une propriété des intégrales gaussiennes. Com-
mençons par discuter le cas très simple où l’hamiltonien a un unique degré de liberté
∈ ℝ et est quadratique, = 2, où est une constante positive. La loi de Boltzmann
nous permet de nous focaliser sur ce degré de liberté :
2 e− d × 1
∞
2
−∞ 2 1
2 = = = = . (6.37)
e
∞ 2 2
− 2
d
−∞
Ce résultat très simple est complètement indépendant de la nature de la variable (coor-
donnée ou impulsion) et surtout, du paramètre . Dans de nombreuses applications, il
se révèlera très utile pour caractériser les fluctuations 2 = ∕2.
Nous discutons la généralisation à des hamiltoniens plus complexes. Considérons
) = ( ) 2 + ( ) ,
(, (6.38)
où en sus de , l’hamiltonien dépend d’autres degrés de libertés, regroupés dans le
vecteur à composantes. ( ) et ( ) sont deux fonctions de ces variables qu’il
n’est pas besoin de spécifier. Le calcul de la contribution à l’énergie moyenne s’écrit
d d ( d e−( ) ( ) d 2 e −( )
2
)2 e− (,)
Finalement :
1
( ) 2 = (6.40)
2
𝟏
Chaque terme quadratique dans l’hamiltonien apporte une contribution 𝒌 𝑻 à
𝟐 𝑩
l’énergie moyenne.
Gardons en tête que ce résultat est limité aux hypothèses de validité de la description
semiclassique.
115
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
c) Particules indépendantes
qui conduit à
d3 d 3 −( , ) 1
d3 d3 −( , )
! =1 ! =1
1
= e = e (6.42)
3 3
soit finalement
d3 d3 −(, )
= avec = e , (6.43)
! 3
= avec = − ln +1 . (6.44)
116
1 Ensemble canonique
e−(, )
C(, ) = . (6.45)
3
Le gaz parfait. Appliquons ce résultat au cas du gaz parfait. Nous avons donc
d3d 3 − 2 d3
3 ℝ 3
2
= e 2 = d 3
e − 2
, (6.46)
3
L’intégrale sur les positions donne le volume tandis que l’intégrale sur les impulsions
fait apparaître des intégrales gaussiennes
+∞ +∞ +∞ +∞ 3 3
2 2 2
2 2
− 2 − 2 − 2 − 2
d e d e d e = d e = .
−∞ −∞ −∞ −∞
Au final, nous pouvons écrire
def
= ou Λ = (6.47)
Λ3 2
def
C = − . (6.49)
117
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
ln
Il vient alors C = = ∕ . Nous reviendrons en détail sur l’analyse
du gaz parfait au chapitre 8. Pour terminer, nous remarquons que l’entropie
5
C ( , , ) = − = ln + (6.50)
Λ 3 2
Nous suivons la même démarche que pour l’ensemble canonique et cherchons l’expres-
sion de la probabilité d’occupation 𝓁G d’un microétat 𝓁, l’indice G se rapportant à la
situation grand canonique. Notons S le système et R le réservoir, supposé suffisam-
ment grand pour que l’on puisse considérer sa température et son potentiel chimique
1. Notons que les particules transportant de l’énergie, le réservoir de particules se comporte néces-
sairement comme un thermostat.
118
2 Ensemble grand canonique
δq
Q
V
1 − (𝓁 −𝓁 )
𝓁G = e (6.54)
Ξ
def
Ξ= e − (𝓁 −𝓁 ) (6.55)
𝓁
119
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
Remarquons que Ξ se réexprime en fonction de (, ). En effet, en classant les mi-
croétats par paquets de même 𝓁, nous pouvons réécrire la somme sur les microétats
sous la forme
∞
Ξ(, ) = e e −𝓁 . (6.56)
=0 𝓁 tq. 𝓁 =
Un microétat sans particule n’ayant pas d’énergie, il est légitime de prendre la conven-
tion (, 0) = 1. Nous retiendrons ainsi le résultat suivant :
∞
∞
Ξ(, ) = e (, ) = (, ) . (6.57)
=0 =0
def
( , , ⋯) = − ln Ξ( , , ⋯) , (6.58)
G 1
= ln Ξ = − . (6.59)
120
2 Ensemble grand canonique
Si nous dérivons ln Ξ par rapport à , mais comme 𝓁G ∝ e− ( 𝓁− 𝓁) , nous n’obtenons
G G
pas uniquement l’énergie moyenne mais plutôt − , au signe près. Connaissant
G
, l’énergie moyenne est alors donnée par
G G G
− = − ln Ξ ou = − ln Ξ (6.60)
soit
G G
− −
G
= =− . (6.62)
G G
d = − G d − d − d + ⋯ (6.63)
Nous discutons le cas particulier d’un système de volume variable pour lequel une
pression peut être définie. Suivant la forme du travail élémentaire des forces de pressions,
la pression grand canonique se définit comme la dérivée du grand potentiel :
def
G = − . (6.64)
Dans le cas d’un fluide simple, il existe un lien entre le grand potentiel et la pression.
En effet, supposons que le grand potentiel n’est fonction que de , et du volume
, ce dernier étant la seule grandeur extensive, le grand potentiel lui est forcément
121
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
proportionnel et donc
( , , ) = −G( , ) . (6.65)
La « densité volumique de grand potentiel » est donc la pression (au signe près).
Exercice 6.6
En considérant une dilatation d’un système par un facteur réel et en considérant
le grand potentiel est une fonction extensive, justifier proprement la relation (6.65).
a) Le gaz parfait
122
2 Ensemble grand canonique
Nous discutons le problème de l’adsorption des atomes d’un gaz à la surface d’un
solide. Les surfaces des solides sont extrêmement rugueuses à l’échelle atomique, et
d’autre part inhomogènes chimiquement, ce qui se traduit par l’existence de pièges
sur lesquels les atomes du gaz peuvent venir s’accrocher. Cet effet est particulièrement
désagréable si l’on souhaite faire une expérience sous vide : des atomes piégés à la sur-
face de la chambre à vide pourraient être relâchés et polluer l’expérience, d’où l’intérêt
de bien comprendre le phénomène d’adsorption afin de contrôler la quantité d’atomes
de surface. On trouve des applications plus bénéfiques du phénomène comme dans le
procédé de chromatographie en chimie ou le filtrage par charbon actif présent les hottes
de cuisine.
Le système physique étudié est l’ensemble des atomes piégés à la surface du solide
(cf. figure 6.4). Leur nombre varie constamment à cause de la compétition entre les
forces de piégeages et l’agitation thermique. En dehors de la surface, les atomes sont à
l’état gazeux dans un volume et on supposera ce volume suffisamment grand pour que
le nombre d’atomes dans le gaz gaz reste beaucoup plus grand que le nombre d’atomes
piégés, gaz . L’ensemble est placé à température contrôlée par un thermostat.
Ainsi, le gaz en contact avec la paroi joue le rôle de « réservoir » d’atomes pour le
système. Il est donc naturel d’étudier les atomes adsorbés à la surface à l’aide de la
distribution grand canonique, où la température et le potentiel chimique sont fixés par le
gaz. Nous noterons le nombre de pièges (ou sites d’adsorption) présents sur la surface,
chaque piège contenant au plus un atome. L’interaction favorable d’un atome avec la
paroi est sommairement modélisée en attribuant une énergie −0 < 0 pour un atome
piégé, en une énergie nulle à un piège vide. L’objectif est d’obtenir la fraction moyenne
def G
de pièges occupés, notée = ∕, en fonction de la pression et température du
gaz, les paramètres contrôlables expérimentalement.
Calculons la grande fonction de partition Ξ pour les atomes adsorbés. Pour décrire
les microétats, introduisons des facteurs d’occupation ∈ {0, 1} pour les pièges. Le
microétat décrivant l’état de surface correspond à l’ensemble des facteurs d’occupation,
𝓁 = ( 1, ⋯ , ). Le nombre d’atomes dans 𝓁 est simplement donné par 𝓁 = . Si
=1
tous les pièges sont supposés identiques et indépendants, l’énergie des atomes adsorbés
est 𝓁 = −0 = − 0𝓁 .
=1
Exercice 6.7
Montrer que Ξ( , , ) = où = 1 + e (+ 0 ) est la grande fonction de partition
réduite à un piège.
123
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
0.5
0
0 1 2
Exercice 6.8
Après avoir donné l’expression de ( , , ), retrouver l’expression de Ξ à l’aide
de la variante de (6.57) donnée dans la remarque suivant cette équation. Préciser le
choix de max .
est une échelle caractéristique de pression. Pour différentes températures, cette rela-
tion définit un ensemble de lignes dans un diagramme (, ) appelées isothermes de
Langmuir, tracées sur la figure 6.4.
Exercice 6.9
Démontrer (6.69).
À donnée, l’adsorption est une fonction croissante de la pression ce qui est physique-
ment intuitif étant donné que la densité du gaz augmente. Cela illustre simplement que
124
3 Relâchement d’une contrainte
faire le vide favorise la désorption. D’autre part, 0( ) est une fonction croissante de
la température si bien qu’à fixée, augmenter la température favorise la désorption des
atomes. Pendant qu’on pompe le gaz contenu dans une chambre à vide, on aura donc in-
térêt à augmenter la température afin de favoriser la désorption et créer un « bon vide ».
Si ce modèle assez rudimentaire n’est pas pertinent pour une bonne partie des processus
d’adsorption pour lesquels d’autres ingrédients doivent être pris en compte, son analyse
a cependant une nouvelle fois illustré comment les outils de la physique statistique ont
permis le passage de la description microscopique aux propriétés thermodynamiques.
Considérons une variable interne échangée lors du relâchement d’une contrainte entre
S1 et S2 . Par exemple
• La détente de Joule : 1 et 2 fluctuent avec = 1 + 2 fixé.
• L’échange de particules : 1 et 2 fluctuent avec = 1 + 2 fixé.
125
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
notons 𝓁1 la valeur prise par la grandeur dans le microétat (𝓁1), nous pouvons écrire
P C( 1) = 𝓁C 𝓁 1, 𝓁 tot − 1 ,𝓁 . (6.73)
1 2 1 2
𝓁 1 𝓁2
Nous obtenons
( , 1 ) 2( , tot − 1 ) e− ( 1 +2 ) e − ( 1 ; ,tot )
P C (1 ) = 1 = = , (6.74)
12( , tot ) 12( , tot) 12( , tot )
où nous avons introduit l’énergie libre réduite
def
(1; , tot ) = 1( , 1 ) + 2 ( , tot − 1 ) , (6.75)
qui représente l’énergie libre du système lorsque 1 est fixé. La probabilité PC (1) est
maximale lorsque l’énergie réduite est mimimum
(max; , ) 1 2
tot
1
=0 ⇒ ( max )= ( − max ) . (6.76)
1 1 1 2 tot 1
Comme dans le chapitre précédent, nous pouvons donner un sens plus clair à cette condi-
tion d’équilibre, à condition d’introduire le paramètre conjugué (intensif) de la variable
def def
(extensive) : C = − (par exemple si → est le volume alors → C = −
est la pression canonique). La condition d’équilibre s’interprète alors comme une égalité
entre les paramètres conjugués intensifs :
(par exemple l’égalité des pressions canoniques C1 = C2 lors d’un échange de volume,
ou l’égalité des potentiels chimiques lors d’un échange de particules C1 = 2C ).
∗T S ( tot) = ln ΩT S (tot ) = ln Ω T (tot − 𝓁 ) Ω S (𝓁 ) (6.78)
𝓁
−𝓁
≃ ln Ω T ( tot) + ln ΩS (𝓁 ) e = ∗T (tot) + ln
𝓁
𝓁
126
3 Relâchement d’une contrainte
Finalement on aboutit à
∗T S (tot) ≃ T∗ (tot ) −
. (6.79)
Le théorème de maximisation de l’entropie du système (global) isolé (section 3), conduit
donc au théorème de la minimisation de l’énergie libre du système thermostaté.
3.4 Discussion
Nous pouvons poursuivre l’analyse du problème de relâchement de contrainte en
suivant les lignes du cas microcanonique. Terminons par quelques observations :
Stabilité. La stabilité de l’équilibre impose que l’énergie libre soit une fonction
convexe (à dérivée seconde positive)
2
>0 (6.81)
2
2 C
(par exemple > 0 et donc < 0, ce qui assure la positivité de la
2 ,
def 1
compressibilité = − ).
127
Les points clés
Les annexes
128
A Travaux élémentaires, forces généralisées et variables conjuguées
Pour calculer la moyenne, il n’est donc pas nécessaire de faire appel à tous les détails mi-
croscopiques, énergies 𝓁 et valeurs moyennes 𝓁 , mais seulement de pouvoir identifier
la dépendance du potentiel thermodynamique dans le paramètre conjugué . Cette rela-
tion générale nous fait mieux comprendre le rôle central de l’énergie libre et se révélera
très utile par la suite.
Exercice 6.10 Relation pression-énergie du gaz parfait
Utilisons les niveaux d’énergie (3.7) d’une particule dans une boîte cubique de côté
en dimension , si bien que le volume est donné par = . On prend comme
définition de la pression dans un microétat par 𝓁 = − 𝓁 , montrer la relation
C
2
C = . Vérifier ce résultat à partir du théorème d’équipartition et de l’équation
d’état des gaz parfait.
∗ ∗
= . (6.85)
∗
129
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
Exercice 6.12
Soit un dipôle électrique permanent astreint à se déplacer dans le plan et dont
on repère l’orientation avec l’angle par rapport à l’axe (voir figure 6.5 à droite).
Il porte un moment d’inertie et est soumis à une force dérivant d’une énergie po-
tentielle pot = − ⋅ avec = un champ électrique externe et on notera
130
B Mouvements de rotation, moment cinétique et dipôles permanents en champs externes
Exercice 6.12
= . Montrer que la fonction de partition canonique d’un seul dipôle se fac-
torise en = cin pot et donner l’expression de pot sous forme intégrale. Montrer
que la moyenne s’exprime comme une dérivée de l’énergie libre du dipôle.
Le point de vue quantique est également très simple dans cette situation. En effet, le
mouvement de rotation est décrit par les opérateurs du moment cinétique mais l’énergie
2
cinétique de rotation se résume à . Rappelons que les valeurs propres de sont
2
avec ∈ ℤ.
Exercice 6.13
Écrire la fonction de partition canonique cin dans le cas quantique comme une
somme sur les nombres quantiques qu’on ne cherchera pas à calculer. Montrer que
l’on retrouve le résultat classique dans la limite de température grande par rapport
à une température rot dont on donnera l’expression.
Bien que la géométrie sphérique fasse apparaître le terme non-trivial sin2 pour le terme
en , celui-ci est bien quadratique dans les moments conjugués.
2. Pour une molécule diatomique, en forme d’altères, de longueur pour deux atomes de masses ,
nous aurons = 2 ∕4.
131
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
132
B Mouvements de rotation, moment cinétique et dipôles permanents en champs externes
7
Gd 3+
5
Fe 3+
3
Cr 3+
0.5
1.30 K
2 2.00 K
3.00 K
1
4.21 K
0
0 0 10 20 30 40
0 5 10 15 20
B / T ( mGauss/K )
Figure 6.6
À gauche : fonction de Langevin (). À droite : Aimantation moyenne par ion en fonction
de ∕ pour trois sels paramagnétiques. Dans tous les cas = 2 (car = 0). On a = 3∕2
(Cr3+ ), = 5∕2 (Fe 3+) et = 7∕2 (Gd 3+ ). Les points sont les données expérimentales et les
courbes en traits pleins correspondent aux résultats obtenus en utilisant des fonctions de
Brillouin (6.88) [données tirées : de W. E. Henry, Physical Review 88, 559 (1952)].
un atome ou un ion, les moments magnétiques appréciables sont dus aux électrons en
orbite autour du noyau. Leur moment cinétique associé au mouvement de rotation est
une première source qui s’ajoute au moment cinétique intrinsèque des électrons, le
spin-1∕2. Les deux s’additionnent pour donner le moment cinétique total souvent noté
= + .
Les protons et neutrons portent également un spin 1∕2 qui peut entrer en
compte mais reste en général sous-dominant. Le moment cinétique suit les mêmes rè-
gles de quantification mentionnées ci-dessus pour à ceci près que les spin demi-entier
sont autorisées. Nous utiliserons 2 ( + 1) avec entier ou demi-entier et avec
− ⩽ ⩽ les valeurs possibles de 2 et . Pour un atome dans l’état fondamental,
la valeur de est déterminée par la configuration électronique et reste fixée : est donné
mais varie. De plus, le moment magnétique 𝔪 d’un atome est relié à par :
= =
𝔪 , (6.87)
où est le facteur gyromagnétique, le facteur de Landé et ≃ =
2
−9, 27.10−24 A.m 2 le magnéton de Bohr. Le facteur de Landé est une constante sans di-
mension, typiquement de l’ordre de l’unité.3 . L’énergie (potentielle) magnétique s’écrit
3. Si le moment angulaire du dipôle est seulement causé par le spin électronique, alors = 2. Si
il est seulement causé par le mouvement orbital, alors = 1. Si son origine est mixte on a =
3∕2 + [( + 1) − ( + 1)]∕[2 ( + 1)] où et sont les nombres quantiques angulaires intrinsèque et
orbital. est le nombre quantique associé au moment cinétique total = + , i.e. les trois nombres
satisfont la règle du triangle (cf. par exemple le problème 13.1 de [35]).
133
Chapitre 6 • Systèmes non isolés – Ensembles canonique et grand-canonique
134
Entraînez-vous
Exercice 6.17 Distribution canonique et principe d’entropie maximale
Une autre approche pour obtenir la distribution canonique est de partir du « principe d’entropie
maximale » et d’utiliser la méthode des multiplicateurs de Lagrange (Annexe A du chapitre 4
page 66). Chercher
la distribution
{𝓁 } qui maximise l’entropie de Gibbs-Shannon sous les
deux contraintes 𝓁 = 1 et 𝓁 𝓁 = .
𝓁 𝓁
135
Chapitre 7
Vue d’ensemble des
outils de la physique
statistique
136
1 L’équivalence des ensembles
sont très différentes. Si nous introduisons la fonction (𝓁 − ) telle que, pour don-
née, (𝓁 − ) = 1 si ⩽ 𝓁 ⩽ + et ( 𝓁 − ) = 0 sinon, nous pouvons écrire
la distribution microcanonique comme 𝓁∗ ∝ (𝓁 − ). Au contraire, la distribution
canonique, 𝓁C ∝ e− 𝓁 , est non nulle pour toute énergie.
Résumons les deux constructions microcanonique et canonique :
() un comptage des microétats, affectés d’un poids, correspondant à Ω() ou à ( ),
() l’obtention d’un potentiel thermodynamique, ∗ ou ,
() la déduction des propriétés thermodynamiques par dérivation partielle de ∗ et
par rapport à leurs arguments.
Thermostat ,T
δE
Ω() = ( 𝓁 − ) = ( ) ( ) = e −𝓁
𝓁 𝓁
Pl * Pl C
1 1 −𝓁
∗𝓁 = ( 𝓁 − ) 𝓁C = e
Ω() El El
E kB T
∗
() = ln Ω( ) ( ) = − ln ( )
C
1∕ ∗() = ∗ ∕ ( ) = − ln ( )
L’étude d’un exemple va nous conduire à l’assertion suivante, qui sera justifiée plus
généralement par la suite : les propriétés thermodynamiques obtenues dans les dif-
férents ensembles sont les mêmes. On parlera de l’équivalence des ensembles, qui est
valable dans la limite thermodynamique → ∞. Nous pouvons donc garder en tête
que l’équivalence ne sera pas strictement réalisée pour les systèmes de taille finie avec
petit, comme les agrégats ou les noyaux atomiques, mais également en présence de
forces à longue portée comme en astrophysique avec la loi de la gravitation.
137
Chapitre 7 • Vue d’ensemble des outils de la physique statistique
1 − ∗
1
∗ = = ln . (7.2)
∗ ( ) 2 1 + ∗
L’analyse canonique correspondante (§ 1.5.a du chapitre 6) donne l’énergie moyenne
C
( ) def
C = = − th C avec C = . (7.3)
Il est évident que l’inversion de (7.2) prend la forme ∗ = − th ∗ équivalente à (7.3).
Le cas de l’entropie, la fonction fondamentale dans l’ensemble microcanonique, mérite
également d’être discuté : nous partons de (6.30), C∕() = ln(2 ch C)− C th C =
C
C + ln(1 + e−2 ) − C th C . Réexprimant C en fonction de C , nous arrivons
1 1−C 2 C 1 − C
à C∕( ) = ln( ) + ln( ) − ln( ), qui donne finalement
2 1+C 1 − C 2 1 + C
(1 − C ) (1 − C ) (1 + C ) (1 + C)
C ∕() = − ln − ln , qui coïncide avec (7.1).
2 2 2 2
C
Autrement dit, = ( ) comme fonction de est la fonction réciproque de =
∗ ( ) comme fonction de . Sous les mêmes conditions d’identification, les entropies
sont égales. Soulignons que si le calcul canonique est exact quel que soit , le résultat
microcanonique repose sur l’hypothèse 1.
a) La compétition entropie-énergie
Puisque la distinction entre les deux ensembles concerne l’existence ou non d’une con-
trainte sur l’énergie, il est naturel d’analyser la distribution de l’énergie dans l’ensemble
∗
canonique, éq. (6.19). En utilisant ( ) = e ()∕ ∕, nous voyons qu’elle s’exprime
à l’aide de l’entropie microcanonique
e− −
+ 1 ∗ ( )
P C () = ( ) ∝ e ∝ e − ( ; ) , (7.4)
où nous avons introduit une « énergie libre » ( ; ) = − ∗( ) (stricto
def
sensu ( ; ) n’est pas l’énergie libre microcanonique, qui serait plutôt ∗() =
( ; ∗ ()) = − ∗( ) ∗( )). La valeur max de l’énergie qui maximise PC ( )
138
1 L’équivalence des ensembles
satisfait la condition
( ; )
1 ∗
= − ( ) = 0 ⇒ ∗(max ) = . (7.5)
D’après la figure 5.8, la valeur la plus probable max est le point où, dans le produit
( )e− , la forte croissance de la densité d’états (effet entropique) et la forte décrois-
sance de l’exponentielle s’équilibrent. Cela se traduit par l’égalité des températures
canonique et microcanonique.
Dans le cadre de l’ensemble canonique, l’énergie est autorisée à fluctuer. Nous
pourrions analyser plus en détail la distribution P C ( ), répétant ainsi l’analyse de la
section 3.1 du chapitre 5 dans laquelle nous avons obtenu une distribution gaussienne
très étroite P C () ∝ exp − ( − max)2∕(2 2 ) , avec max ∝ et ∝ .
Puisque les fluctuations sont négligeables devant les valeurs moyennes dans la limite
thermodynamique, → ∞, on est presque dans la situation où l’énergie est fixée
(distribution de l’énergie dans l’ensemble microcanonique) :
Remarquons
que (7.6) est uniquement schématique : la largeur de P C ( ) croît comme
, donc la distribution ne peut pas tendre vers un Dirac. Une écriture mathématique-
def
ment plus correcte est d’introduire la variable aléatoire = ∕ dont la moyenne tend
vers une limite finie = lim max∕ , tandis que ses fluctuations s’annulent à la limite
→∞
→ ∞ ; on a bien alors () ⟶ ( − ).
→∞
Le principe de minimisation de l’énergie libre et l’analyse de la distribution de
l’énergie illustrent un point intéressant que nous pouvons appeler la « compétition
énergie–entropie ». Puisque l’énergie libre s’exprime en fonction de l’énergie et de
l’entropie comme = − , sa minimisation procède d’un compromis entre énergie
et entropie : le principe de maximisation de l’entropie, à combiner avec la minimisation
usuelle de l’énergie. Ceci est rendu explicite dans l’expression de la distribution (7.4) de
l’énergie PC ( ) dont la maximisation procède du même compromis énergie-entropie.
b) Limite thermodynamique
Afin d’établir une correspondance entre les propriétés thermodynamiques déduites des
deux approches, nous devons examiner le lien entre les fonctions génératrices, ( ) et
∗ ( ). Analysons la fonction de partition canonique :
1 − + 1 ∗ ( )
( ) = e−𝓁 = d () e − = d e
. (7.7)
𝓁
139
Chapitre 7 • Vue d’ensemble des outils de la physique statistique
+ ∗ (max) + (ln ) .
C C
− ( ) − max
C
( ) = = (7.9)
Si nous passons formellement à la limite thermodynamique en faisant « → ∞ » :
présente des fluctuations qui deviennent négligeables
l’énergie totale en valeurs rel-
= ( 1∕3)
C
atives (∼ ) si bien que l’on peut négliger le premier terme − max
C
C ( ) = ∗ ( ( )) ou ∗() = C( ∗ ()) (à la limite thermo.) . (7.10)
C
1. La différence entre et max ne peut venir que du troisième cumulant, d’où le scaling.
140
2 Transformations thermodynamiques
2 Transformations thermodynamiques
2.1 Transformations élémentaires : point de vue
microscopique
Reprenons la notion de force généralisée introduite dans l’annexe A du chapitre 6.
Nous considérons un système pour lequel l’entropie ne dépend que de l’énergie et
d’une grandeur (comme le volume), soit (, ) pour l’entropie et ( , ) pour l’én-
C
ergie libre. Nous avons pour les différentielles d = −C d − d en canonique et
d = ∗d ∗ − ∗ d en microcanonique (voir (6.84) et (6.85)). À la limite thermody-
namique, nous pouvons utiliser l’équivalence des ensembles et identifier les grandeurs
C C
apparaissant dans ces expressions, en particulier prendre = ∗ = et = .
Considérons maintenant une transformation quasi-statique, c’est-à-dire une transfor-
mation infinitésimale entre deux états d’équilibre macroscopique, correspondant à une
variation d du paramètre . Elle n’est pas nécessairement réversible (il peut y avoir
création infinitésimale d’entropie). Plaçons-nous dans l’ensemble canonique, avec une
C
transformation qui est donc à constante. De = 𝓁 𝓁 , on tire
𝓁
d = 𝓁 d 𝓁 + 𝓁 d 𝓁 . (7.11)
𝓁 𝓁
Le fait que d𝓁 = − 𝓁d, avec 𝓁 la force généralisée dans le microétat 𝓁, permet
C
d’identifier le second terme à − d = − d , soit
− d = 𝓁 d𝓁 . (7.12)
𝓁
Calculons la différentielle de l’entropie statistique = − 𝓁 ln 𝓁 , correspondant
𝓁
à la variation d’entropie lors d’une transformation infinitésimale. Comme d𝓁 =
𝓁
0, nous obtenons d = − ln 𝓁d 𝓁 . En remarquant que pour la distribution
𝓁
canonique − ln 𝓁 = ln + 𝓁, il vient
d = 𝓁d 𝓁 . (7.13)
𝓁
141
Chapitre 7 • Vue d’ensemble des outils de la physique statistique
entre états d’équilibre éloignés, cette interprétation perd tout sens. Il faut alors dévelop-
per une physique statistique hors de l’équilibre (cf. [22] par exemple, ou [4, 26, 29] ou
les notes de cours de Master 2 [34]) pour décrire les états intermédiaires.
Hamiltonien. (chapitre 3). Une fois clairifiée la nature des microétats {𝓁 }, on déter-
minera leurs énergies {𝓁 }.
142
3 La physique statistique : mode d’emploi
Densité d’états. (chapitre 3). Cette fonction, notée ( ), permet d’effectuer le comp-
tage des microétats d’énergie . Elle encodera souvent toute l’information micro-
scopique qui est pertinente pour les propriétés thermodynamiques. Si les microétats
peuvent être décrits classiquement, la règle de calcul semiclassique (3.28) est extrême-
ment efficace. Pour les problèmes de particules indiscernables, la densité des états
individuels sera utile.
Macroétat. (chapitre 3). Un système à l’équilibre est décrit par un macroétat, carac-
térisé par l’ensemble {𝓁 } des probabilités d’occupation des microétats.
Les fonctions de partition. Chacun des ensembles introduit une fonction qui dénom-
bre les microétats en leur affectant un poids particulier, qui sont donc les inverses des
constantes de normalisation des distributions (7.14,7.15,7.16). Ces fonctions s’interprè-
tent comme des fonctions génératrices :
143
Chapitre 7 • Vue d’ensemble des outils de la physique statistique
Équivalence des ensembles. Le choix de l’ensemble approprié peut être motivé par
des raisons techniques (exemple : l’analyse des particules indépendantes se fait na-
turellement dans l’ensemble canonique où la fonction de partition se factorise). Une
idée importante est de retenir qu’à la limite thermodynamique (pour les systèmes possé-
dant les bonnes propriétés d’extensivité), comme les résultats obtenus dans les différents
ensembles coïncident, on pourra choisir l’ensemble qui simplifie les calculs, puis on
utilisera l’équivalence des ensembles pour revenir à la situation d’intérêt.
Modèles incontournables. Trois modèles sont incontournables, le gaz parfait, les os-
cillateurs harmoniques et le cristal paramagnétique (ou système à deux niveaux). Il
faudra maîtriser parfaitement l’application des principes exposés ci-dessus dans ces
situations très simples.
144
3 La physique statistique : mode d’emploi
145
146
Ensemble Paramètres Distribution Fonction Potentiel Relation
extérieurs fixés génératrice thermodynamique thermodynamique
Micro- d = d − d + d + ⋯
1 1
canonique , , , ... 𝓁∗ = (*) Ω(, , , ⋯) : # de ∗ (, , , ⋯) = ln Ω ou d = d + d − d + ⋯
Ω
1 def ∗ ∗ def ∗
système isolé (postulat fond.) microétats accessibles entropie d’où = , = , etc
∗ ∗
1
− (𝓁 +𝓁 )
isobare contact avec 𝓁ii = e − (𝓁 +𝓁 ) = e enthalpie libre d = − d + d + d + ⋯
𝓁
ii def ii def
un réservoir (**) (fonction de Gibbs) d’où = − , = , etc
Etc...
(*) pour ⩽ 𝓁 ⩽ +
(**) On traite le volume comme une variable prenant des valeurs discrètes pour simplifier les notations.
Les annexes
A Potentiels thermodynamiques
Nous montrons comment retrouver rapidement les définitions des grandeurs thermo-
dynamiques dans chacun des ensembles en utilisant les potentiels thermodynamiques
construits dans le cadre de la thermodynamique classique.
Considérons un fluide simple dont on note l’énergie interne, le volume et
le nombre de particules. Nous nous plaçons à la limite thermodynamique où ∗ =
C = G, etc, en utilisant l’équivalence des ensembles. Les différents potentiels
thermodynamiques jouent le rôle de fonctions fondamentales : la connaissance de la
fonction d’état (, , ), ou (, , ), (fonction de ces trois arguments précisé-
ment et obtenue pour le gaz parfait en inversant la formule de Sackur-Tétrode (5.17)),
encode toutes les propriétés thermodynamiques. Il en est de même pour la fonction
( , , ), donnée par la physique statistique, dont on tire l’ensemble des propriétés
3
thermodynamiques. En revanche ( , , ) = (l’énergie moyenne canon-
2
ique) ne donne aucune information sur l’équation d’état par exemple. Si d’autres
paramètres entrent en jeu (un champ magnétique, un champ électrique, etc) les potentiels
thermodynamiques se construisent de façon analogue.
d = d − d + d . (7.17)
147
Chapitre 7 • Vue d’ensemble des outils de la physique statistique
isobare , , enthalpie ( , , ) d = d + d + d
canonique , , énergie libre ( , , ) d = − d − d + d
(fct de Helmholtz)
isobare- , , enthalpie libre ( , , ) d = − d + d + d
isotherme (fct de Gibbs)
grand- , , grand potentiel ( , , ) d = − d − d − d
canonique
= − + , = + , = − + . (7.22)
d = − d + d (7.23)
= , − = , − = .
, , , , , ,
(7.24)
148
B Transformation de Legendre : l’exemple des partitions d’un entier
(notons que nous aurions aussi bien pu limiter la somme à plutôt que l’infini puisque
= 0 pour > ). Considérons un exemple : 1 + 1 + 2 = 2 × 1 + 1 × 2, i.e. la
partition est décrite par les facteurs 1 = 2, 2 = 1 et = 0 pour > 2. Nous pouvons
maintenant écrire une formule pour le nombre de partitions de :
∞
∞
Ω( ) = ,
où ⋯ (7.27)
{ } {} 1=0 2 =0
dénote la sommation sur toutes les partitions. Le calcul de la somme multiple est rendu
difficile à cause de la contrainte (7.26). Pour contourner le problème, nous introduisons
la fonction génératrice
∞
() =
def
∞ ∞ ∞ ∞
Ω( ) = ⋯ ⋯ = , (7.28)
=0 1 =0 =0 =1 =0
dont le calcul est rendu élémentaire grâce à la factorisation. L’idée maîtresse, en intro-
duisant la fonction génératrice, a été de lever la contrainte sur qui rendait le calcul
direct de la somme (7.27) inextricable. Finalement
() =
∞
1
pour < 1 . (7.29)
=1 1 −
149
Chapitre 7 • Vue d’ensemble des outils de la physique statistique
Exercice 7.1
On introduit () = − ln (). Pour → 1− , on peut transformer la somme en
def
La formule (7.33) a été obtenue en 1918 par deux mathématiciens ayant apporté
des contributions importantes à la théorie des nombres, Godfrey H. Hardy et Srinivasa
Ramanujan.
150
2 Transformation de Legendre : l’exemple des partitions d’un entier
(ce qui correspond à intégrer sur un cercle de rayon = e− 0 < 1 dans le plan complexe
de ). « L’entropie » est reliée à « l’énergie libre » par la transformation de Legendre
( ) = ∗ − (∗ ) où ( − ( )) = 0 (7.37)
∗
L’application,
élémentaire, donne ∗ ≃ ∕ 6 , qui nous conduit bien à () ≃
2∕3, un résultat non trivial.
151
Entraînez-vous
Exercice 7.3 Gaz parfait ultrarelativiste
Nous étudions les propriétés thermodynamiques d’un gaz de 1 particules indiscernables
ultra-relativistes confinées dans un volume avec fixé. L’hamiltonien du système est de la
forme
=
pour ∈ volume ∀ . (7.38)
=1
3 3
( ) = d 1 ⋯ d −
(7.39)
=1
0
() = d () e− (7.40)
Γ() 0
1
3/ En utilisant l’identité − = d −1 e− , montrer que
(8 ) 3
Φ() = . (7.41)
! (3)!
152
Entraînez-vous
extérieure constante (figure 7.1). L’hamiltonien (pour les atomes et le piston) est
2
2
= ++ (7.42)
2 =1
2
où et sont la position et l’impulsion du piston, supposé glisser sans frottement.
0 X
Figure 7.1– Enceinte fermée par un piston sur lequel une force 𝒇 est exercée.
A. Description canonique.
1/ Quelle est la probabilité canonique d’occupation d’un microétat ?
2/ À ∈ ℝ+ fixée, quel volume est accessible à un atome ? Calculer la fonction de partition
canonique du système . On exprimera en fonction de la longueur thermique des atomes,
notée . Déduire l’énergie libre ( , , ).
C C
3/ Calculer la moyenne de l’énergie cinétique cin et de l’énergie .
C
4/ Montrer que la position moyenne du piston est donnée par = + et la calculer. Quel
est le sens physique de l’équation obtenue ?
C 2
5/ Montrer que les fluctuations de la position de la paroi sont données par = Var() =
2
1
ln et les calculer. Que peut-on dire des fluctuations relatives ?
2 2
B. Analyse microcanonique.– L’énergie est séparée en deux contributions = cin + pot ,
ce qu’on peut considérer formellement de la même manière qu’un « contact thermique » entre
deux systèmes, caractérisés par deux entropies cin
∗ et ∗ (chap. 5).
pot
153
Chapitre 7 • Vue d’ensemble des outils de la physique statistique
1 − (𝓁 + 𝓁)
ii𝓁 = e (7.43)
L
ξn
0 1 2
... n ... N
p
x 0=0 x1 x 2 ... xn ... xN
154
Entraînez-vous
0
d
( ) = ( ) e− . (7.45)
Λ
Montrer que l’intégrale multiple est maintenant séparable.
def
2/ On introduit l’enthalpie libre = − ln . Justifier que le « volume » moyen est donné
par = ∕.
3/ « Sphères » dures. On considère la situation où le potentiel d’interaction décrit des « sphères
dures » de « diamètre » , i.e. ( ) = 0 pour > et ( ) = +∞ pour < . Déduire l’équation
d’état du gaz. Tracer la pression en fonction de la densité moyenne = ∕.
155
Chapitre 8
Description classique
des gaz
156
1 Gaz parfait monoatomique
cinétiques. Le modèle du gaz parfait a servi d’illustration aux formalismes associées aux
différents ensembles. Nous nous placerons ici dans le cadre canonique, qui est le plus
simple techniquement et conceptuellement. Certaines propriétés thermodynamiques ont
été obtenues dans le § 1.6 du chapitre 6, basées sur le calcul de la fonction de partition
canonique associée au degré de liberté de translation des atomes
1
= trans avec trans = (8.1)
! Λ 3
def
où Λ = ∕ 2 est la longueur thermique. On a déduit les différentes grandeurs
thermodynamiques : énergie libre, énergie, entropie, potentiel chimique et pression,
= ln( Λ3 ) − 1 , (8.2)
3
= , (8.3)
2
e5∕2
= ln , (8.4)
Λ 3
= , (8.6)
où = ∕ est la densité moyenne (nous utiliserons des notations allégées pour
C
décrire la limite thermodynamique : → , C → , etc). L’expression de l’énergie
nous permet d’obtenir la capacité calorifique du gaz monoatomique
3
= . (8.7)
2
En utilisant la relation de Mayer − = , nous déduisons le paramètre con-
def
trôlant les transformations isentropiques = ∕ = 5∕3 (l’équation de l’isentrope
est = cste). Rappelons que tous ces résultats ne sont valables que dans la limite
diluée Λ3 1 (à l’exception notable de l’équation de l’isentrope = cste qui
décrit également le régime quantique, cf. problème 5.1 page 98).
157
Chapitre 8 • Description classique des gaz
3
Énergie et vitesse. L’énergie (cinétique) moyenne d’un atome est ∕ = ≃
2
40meV, à laquelle nous faisons correspondre une échelle de vitesse ( ∕ = (1∕2)2 ) :
1
≃ 430 m/s. En écrivant plutôt ∕ = Δ 2, nous introduisons le volume Δ 3
2
disponible par atome dans l’espace des impulsions.
158
2 Densité spatiale en présence d’un champ extérieur et distribution des vitesses
Effet des interactions. Dans le cas d’un fluide de particules en interaction, la dis-
cussion devient bien plus compliquée car les positions des particules ne sont plus
indépendantes et il y aura une compétition entre énergie potentielle et énergie d’interac-
tion. Cependant, dans la limite où le potentiel extérieur varie lentement par rapport aux
échelles où le fluide apparaît localement homogène ( ( ) = 0), l’approximation de la
densité locale est généralement valide. Elle consiste à considérer le fluide à l’équilibre à
température avec un potentiel chimique fixé et utiliser la courbe 0 ( ; ) qui donne
la densité 0 en fonction de pour le système homogène. On notera 0 (; ) l’inverse
de cette courbe. L’approximation consiste à dire que la densité locale ( ) s’ajuste pour
assurer la constance du potentiel chimique à travers le fluide (ce qui est nécessaire à
l’équilibre) selon 0 (( ); ) + ( ) = . Le profil de densité est obtenu en inversant
cette relation ( ) = 0 ( − ( ); ).
3∕2
− 1
2
( ) = 3 3 C
d (, ) ⇒ ( ) = 2 (8.13)
2
Remarques.
• La loi de Maxwell (8.13) s’applique également au gaz moléculaire (§ 3), dont l’énergie
cinétique de translation prend la même forme que celle du gaz atomique. Elle décrit
alors la distribution des vitesses des centres de masse des molécules.
159
Chapitre 8 • Description classique des gaz
0.6
0.4 150 K
300 K
0.5
600 K
0.3
0.4
0.2 0.3
0.2
0.1
0.1
0 0
-1000 -500 0 500 1000 0 500 1000 1500
m.s -1 m.s-1
Figure 8.1
Distributions de la composante et du module de la vitesse des particules dans le
diazote N2 pour trois températures typiques.
• La présence d’interaction dans le gaz n’altère en rien le résultat (8.13). On pourra s’en
convaincre aisément par inspection de la structure de la distribution canonique
C (1, ⋯ , , 1 , ⋯ , ) ∝ e− cin ({ }) e− ({ }) (8.15)
où est l’énergie d’interaction, par exemple (8.33) plus bas. La loi de Maxwell repose
essentiellement sur le découplage classique entre les positions et les impulsions.
Exercice 8.3
Montrer que la loi marginale du module = de la vitesse est donnée par
3∕2
2
( ) = 2
4 exp − . (8.16)
2 2
Déduire différentes propriétés du module de la vitesse : sa valeur typique (la plus
probable) ∗ , sa valeur moyenne et son écart-type .
160
3 Capacité calorifique des gaz parfaits moléculaires
de vibration de la liaison qui n’est pas complètement rigide. Une quantité accessible
expérimentalement et simple à analyser théoriquement est la capacité calorifique. Elle
est d’autant plus importante qu’elle renseigne sur la capacité du système à emmagasiner
de l’énergie, et intervient à ce titre dans de nombreux bilans énergétiques. Son com-
portement en température ne peut pas être prédit par la seule thermodynamique et seule
la physique statistique donne les outils pour construire un modèle microscopique per-
mettant de prédire le comportement de cette grandeur macroscopique. In fine, bien que
plusieurs propriétés obtenues ont un caractère universel (indépendant de la nature de
la molécule diatomique), nous allons voir que la compréhension profonde de sa dépen-
dance en température ( ) révèle des informations très précises sur le comportement
des molécules et leurs caractéristiques au niveau microscopique.
2 2
molécule = + + liaison( ) (8.18)
2 2
161
Chapitre 8 • Description classique des gaz
quantum d’énergie de vibration est beaucoup plus grand que le quantum d’énergie de
rotation. Les échelles de temps caractéristiques sont en rapport inverse, i.e. la vibration
est très rapide et la rotation lente.
Tandis que le mouvement du centre de masse est traité classiquement comme nous
l’avons fait jusqu’à présent, il est pertinent de prendre en compte la quantification des
énergies pour la rotation et la vibration. Le problème est séparable ; les hamiltoniens de
rotation et de vibration sont caractérisés par les spectres quantiques suivants :
Hamiltonien Valeurs propres nb. quantique dégénérescence
𝓁 2 2
rot = rot
𝓁 =
𝓁 (𝓁 + 1) 𝓁∈ℕ 𝓁 = 2𝓁 + 1
2 2
2 2 ( − ∗) 2 1
vib = + vib
= + ∈ℕ 1
2 2 2
162
3 Capacité calorifique des gaz parfaits moléculaires
molécule − 2 +vib rot
+ 𝓁 − 0
= avec molécule = (2𝓁 +1) e . (8.20)
! 3 =0 𝓁=0
L’étude d’une molécule fait elle aussi apparaître un problème séparable et la fonction
de partition est de la forme (6.26). Finalement, on a la factorisation :
Ces deux fonctions de partition ne nous sont pas inconnues : nous les avons rencon-
trées à la page 114 et dans l’annexe B du chapitre 6, page 130. Ce sont deux fonctions
d’un unique argument qui, pour la première, s’écrit = vib∕ et, pour la seconde,
2∕(2) = rot ∕ , où nous avons introduit deux températures caractéristiques :
def def 2
vib = et rot = . (8.24)
2
163
Chapitre 8 • Description classique des gaz
164
3 Capacité calorifique des gaz parfaits moléculaires
Quel est le régime pertinent pour une plage de température autour de la température
ambiante ? Pour y répondre, essayons d’estimer l’ordre de grandeur de rot et vib. Com-
mençons par rot, qui est contrôlée par le moment d’inertie . Un ordre de grandeur
de ce dernier peut être obtenu en considérant une liaison de longueur ∗ reliant deux
masses ponctuelles donnant une masse réduite : vaut alors 2∗ . Si l’on considère
H2 , ∗ ∼ 10 −10m = 1 Å et ∼ 10 −27 kg donne ∼ 10−47 kg ⋅ m 2 et rot ∼ 50 K. De
plus, plus les atomes sont lourds, plus est grand et plus rot va être petite. Les données
rassemblées dans le tableau 8.1 correspondent bien à ces ordres de grandeurs. Pour vib ,
il est difficile d’estimer les paramètres du potentiel de liaison. Cependant, un moyen de
faire vibrer une liaison est de la déformer à l’aide d’un champ électromagnétique ex-
terne : c’est le principe de la spectroscopie infrarouge très utilisée en chimie. Comme
son nom l’indique, cette spectroscopie d’absorption correspond à des fréquences de vi-
bration dans l’infrarouge, ∼ 1014 Hz soit une température vib = ∕ ∼ 4 000K.
Cet ordre de grandeur de quelques milliers de Kelvins correspond bien aux valeurs du
tableau 8.1.
Tableau 8.1 – Températures caractéristiques de gaz diatomiques d’après [15].
165
Chapitre 8 • Description classique des gaz
02
N2
CO
Cl2
Figure 8.3
Contribution vibrationnelle à la capacité calorifique de divers gaz (O 2, N2, CO, Cl 2), en
fonction de ∕ vib. Données du livre de R. Balian [3].
166
3 Capacité calorifique des gaz parfaits moléculaires
expérience
théorie
3
1 Tvib
Trot
0
5 10 50 100 500 1000 5000 T (K)
Figure 8.4 – Capacité calorifique du dihydrogène deutéré (HD ≡ 𝟏𝟏 H–𝟐𝟏 H).
Partant des hautes températures, la décroissance de la capacité calorifique correspond
aux gels successifs des degrés de liberté de vibration puis de rotation. Les petits schémas
représentent l’état des molécules : rotation et vibration excitées pour > vib ; rotation
seule excitée pour rot < < vib (la molécule se comporte comme un bâtonnet rigide
en rotation) ; rotation et vibration gelées pour < rot (la molécule est un objet invariant
par rotation). Données tirées du livre de R. Balian [3].
e) Limites du modèle
Maintenant que nous avons analysé en détail le rôle des degrés de liberté interne sur ces
deux exemples, nous pouvons revenir sur la question des degrés de liberté électron-
iques, qui avaient été laissés de côté. Les électrons liés à l’atome ou à la molécule sont
caractérisés par un spectre de niveaux d’énergie. Si la température est suffisante, ces de-
grés de liberté peuvent être excités grâce aux fluctuations thermiques. Dans la pratique
les énergies (i.e. les températures) sont très élevées : les échelles typiques pour l’inter-
action coulombienne dans un atome ou une molécule sont 1 à 10 eV, or 1 eV correspond
à 11 600 K. C’est probablement ce qui explique l’écart entre les courbes de capacité
167
Chapitre 8 • Description classique des gaz
Rotation. Les molécules linéaires sont caractérisées par deux degrés de liberté de ro-
tation (deux angles sont nécessaires pour définir l’orientation), ce qui conduit donc à
= dans le régime classique. En revanche il faut trois angles d’Euler pour spé-
rot
cifier l’orientation d’un objet tridimensionnel (par exemple H2O, CH 4,...) et on trouve
= (3∕2) associée aux trois degrés de liberté de rotation.
rot
Vibration. Les molécules polyatomiques sont caractérisées par un nombre plus grand
de degrés de liberté de vibration, associés aux déformations de la molécule. Un comp-
tage du nombre de degrés de liberté permet d’identifier le nombre de modes de vibration.
Considérons une molécule formée à partir de atomes ; elle est caractérisée par 3 de-
grés de liberté, dont 3 de translation, 3 de rotation (molécules non linéaire) et donc
3( − 2) de vibration. Dans le régime classique on aura dans ce cas vib = 3( − 2)
si tous les modes de vibrations sont activés.
Dans cette dernière section, nous revenons à une description complètement classique
afin d’analyser l’effet des interactions entre atomes. S’il est en général légitime de
négliger les interactions dans les gaz dilués (cf. ordres de grandeurs à la fin de cette
section), rappelons que l’existence d’interaction résiduelles est cruciale à l’établisse-
ment d’un équilibre thermodynamique (on doit comprendre que le modèle du gaz
parfait correspond à une approximation d’interactions négligeables plutôt qu’inexis-
tantes). Si les interactions affectent peu les propriétés thermodynamiques dans l’état
gazeux dilué, elles sont cependant à l’origine de la formation des états condensés tels
que les états solide et liquide qui seront étudiés aux chapitres 9 et 10. Dans cette partie,
168
4 Rôle des interactions dans les gaz
nous allons voir les interactions entraînent des corrélations dans les positions des partic-
ules qui apportent des contributions aux grandeurs thermodynamiques. En particulier,
elles induisent une modification de l’équation d’état. Puisque le modèle du gaz parfait
décrit la limite diluée de faible densité, il est naturel de chercher un développement de
l’équation d’état sous la forme d’un développement
= + 2( ) 2 + 3( ) 3 + ⋯ (8.31)
qui porte le nom de développement du viriel (qui suppose que la pression est une
fonction analytique de ). Le premier terme correspond à la limite du gaz parfait. Les
coefficients ( ), fonctions de la température, sont appelés les coefficients du viriel,
et décrivent l’effet des corrélations entre atomes. Ces corrélations peuvent avoir une
origine quantique (corrélations quantiques induites par le postulat de symétrisation, cf.
problème 11.2 page 255) ou classique (les interactions étudiées dans ce chapitre). Les
coefficients du viriel peuvent être calculés systématiquement [29], même si nous allons
essentiellement nous concentrer sur l’analyse du second coefficient 2( ) plus bas.
1. Le potentiel () ne décrit pas une interaction fondamentale mais une interaction effective qui
a plusieurs origines : l’interaction coulombienne entre noyaux et électrons, dont la dynamique est
moyennée, le principe de Pauli. Rien n’exclut en principe l’existence d’interaction effective à davantage
que deux corps : à trois corps 3 ( − , − ), quatre corps, etc.
169
Chapitre 8 • Description classique des gaz
0 0
-1 -1
0 1 2 3 0 1 2 3
Figure 8.5
À gauche : Le potentiel d’interaction de type Lennard-Jones. À droite : Le modèle de
van der Waals avec un cœur dur.
1 1
= où = d3 1 ⋯ d3 e− (1 ,…, ) , (8.35)
! Λ 3
170
4 Rôle des interactions dans les gaz
(1 , … , ) = d 31 ⋯ d3 C(1 , … , , 1 , … , ) , (8.36)
(la loi marginale des positions). Autrement dit, elle donne la probabilité d’avoir une
« photo » correspondant à une configuration spatiale, sans s’intéresser aux vitesses.
Après simplifications des termes cinétiques, nous obtenons
a) Densité locale
La densité locale à la position s’écrit, pour une configuration des positions (1, … , )
donnée, sous la forme () = =1
( − ). Par définition, la valeur moyenne de cette
quantité vaut
( ) = 3 3
d 1 ⋯ d (1, … , ) ( − ) (8.38)
=1
171
Chapitre 8 • Description classique des gaz
( ) = d31 ⋯ d 3−1 d3 +1 ⋯ d3 (1 , … , −1, , +1, … , )
=1
= d3 2 ⋯ d 3 (,
2 , … , ) , (8.39)
où l’on a utilisé l’invariance par permutation des arguments de dans la seconde égalité
et choisit de mettre la première particule en puis de moyenner sur les positions des
autres. Dans un solide, la densité locale présente des maxima aux nœuds du cristal, élar-
gis par les fluctuations thermiques, tandis que dans une phase fluide, liquide ou gaz, la
densité locale est homogène ( ) = dès qu’on s’éloigne des bords, car les particules
sont libres d’explorer tout le volume de façon homogène, et le font.
Si les particules sont indépendantes, comme dans le gaz parfait, on a alors ()(′ ) =
() ( ′ ). En présence d’interactions, ce n’est plus le cas : si une particule est en ,
il y a peu de chances d’en trouver une autre à une distance = − ′ < 0 en raison
de la répulsion. Dans le contexte de l’étude des fluides, il est d’usage de caractériser les
corrélations dans le fluide non pas avec C (, ′), mais en termes d’une autre fonction
′ ) appelée fonction de corrélation de paires, que nous introduisons : tout d’abord
(,
nous écrivons le produit de deux densités associée à une même configuration :
=( )
′ ′ ′
() ( ) = ( − ) ( − ) = ( − ) ( − ) + ( − ) ( ′ − )
=1 =1
(8.41)
où l’on a isolé la contribution = de la double somme. On a pu sortir le dirac de la
somme en utilisant la propriété ( − 1) ( ′ − 1 ) = ( − ′) ( − 1). La moyenne
du premier terme de (8.41) fait apparaître la moyenne (8.39), i.e. ( − ′ ) si le fluide
est homogène, () = . La moyenne du second terme de (8.41) est par définition la
fonction de corrélation de paires
def 2
′ ) =
(, ( − ) ( ′ − ) (8.42)
( − 1)
172
4 Rôle des interactions dans les gaz
d’où
On comprend alors le choix de la définition (8.42) ou (8.44) qui assure que est sans
dimension. Par ailleurs, lorsque − ′ , avec = −1∕3 la distance moyenne entre
particules, les positions des particules peuvent être considérées comme décorrélées, de
sorte que ()( ′) ≃ () × ( ′) = 2. Dans cette limite, on voit donc que tend
vers 1. Bien que purement local, le terme ( − ′ ) de (8.43) jouera un rôle important
dans les règles de somme, comme pour exprimer la compressibilité (cf. exercice 8.8).
Finalement, en utilisant les mêmes arguments que pour la moyennes (8.39) (propriété
de la fonction delta et symétrie de la distribution (8.37) sous les permutations de ses ar-
guments), on vérifie sans peine qu’elle s’exprime en fonction de la densité de probabilité
des configurations
′ ) = 2
(, d 33 ⋯ d3 (,
′ , 3, … , ) (8.44)
Une grande partie de l’information sur la structure du fluide est contenue dans cette
fonction qui contrôle les grandeurs thermodynamiques.
La fonction renseigne donc bien sur la structure à l’intérieur du fluide, ce qui est illustré
sur la figure 8.6. Enfin, il est crucial de voir que le comportement de () dépend de la
densité et de la température via la moyenne thermique.
3
= + , (8.46)
2
173
Chapitre 8 • Description classique des gaz
4 2
3 1
2 1
1
0 0 0
0 1 2 3 4 5 0 1 2 3 4 5 0 1 2 3 4 5
Figure 8.6 – Comportement typique de la fonction de corrélation de paires 𝒈(𝑹) dans les
trois états d’un corps pur.
où
1
= − ln = d 3 1 ⋯ d 3 (1, … , ) ( − ) (8.47)
2
( − 1)
= 2
d3 1d3 2 ( 1 , 2) (1 − 2) (8.48)
2
(on a utilisé la forme (8.37) dans la première équation). En écrivant ( − 1)∕ ≃
∕ = et en utilisant l’isotropie de la phase fluide, on obtient une forme extensive
pour la contribution des interactions à l’énergie moyenne :
∞
0
= 2 d 2 () () . (8.49)
Capacité calorifique. Utilisons que () dépend de la température tandis que ()
n’en dépend pas :
∞
1
0
3
= = + 2 d 2 () () . (8.50)
, 2
0
2 2 d
= − d 3 ( ) ( ) . (8.51)
3 d
174
4 Rôle des interactions dans les gaz
0
= 1 + 4 d 2( () − 1) (8.53)
175
Chapitre 8 • Description classique des gaz
Autrement dit, () vue comme une probabilité se ramène simplement au « poids de
Boltzmann » avec l’énergie (). Il est d’ailleurs facile de la tracer. Ce comportent cor-
respond bien à ce à quoi on s’attend intuitivement et décrit sur la figure 8.6 (phase
fluide). Dans la limite → ∞, () → 0 et donc () → 1, comme discuté plus
haut. Lorsque → 0, () → ∞ (partie répulsive) et donc () → 0 . L’effet de la
partie () > 0 est donc bien de diminuer la probabilité pour que deux particules se
rapprochent. Au contraire, lorsque () < 0, on a ( ) > 1, et se manifeste par une
accumulation de particules par rapport à la densité moyenne ce qui se traduit par une
bosse dans (). Remarquons que c’est le signe de () qui compte et non celui de la
force −d∕d.
def
Justification du comportement à basse densité. Introduisons = e −( ) −1, une
fonction qui prend des valeurs significatives jusqu’à ≃ 0 et qui s’annule rapidement
lorsque → ∞. De plus, dans la limite basse densité et haute température on peut
prendre ≃ 0 1. Dès lors,
e− (1 ,…, ) = e− < ( ) = e −( ) = (1 + ) ≃ 1 + . (8.56)
< < <
Enfin, on considère que le volume d’action des interactions = d 3
∕ est négligeable devant le volume par particule ∕ = 1∕. Dans cette limite
= d3 1 ⋯ d3 e − (1 ,…, ) ≃ + d3 1 ⋯ d3 , (8.57)
<
dans laquelle le second terme est d’ordre −1 . On peut donc prendre
≃ . Dans le calcul de la fonction de corrélation de paires apparaît l’intégrale
3 3 − (1,2 ,3 ,…, ) 3 3
d 3 ⋯ d e ≃ d 3 ⋯ d 1 + 12 +
<,(,)(1,2)
= −2 + 12 −2 + d3 3 ⋯ d3
(, )(1,2)
<
dans laquelle le dernier terme est d’ordre −3 −2 . On obtient donc
2
( 1, 2 ) = d3 3 ⋯ d 3 e − (1 , 2,3 ,…,) ≃ (1 + 12 ) = e−(12) , (8.58)
d’où le résultat (8.55).
176
4 Rôle des interactions dans les gaz
0 0 0
d d −() 1
d 3 () () = d 3 e = d 3 1 − e−()
d d d
tend vers 0 en →∞
=0
3 ∞ 3 ∞
0
−()
= 1−e − d 2 1 − e−()
0
que l’on réinjecte dans (8.51) pour obtenir après simplifications
∞
0
2( ) = 2 d 2 1 − e−() (8.59)
Le second coefficient du viriel est donc une propriété du problème à deux corps (de
manière remarquable, cette remarque reste vraie dans le cas quantique, cf. § 77 de [23]).
Application au modèle de van der Waals. Appliquons ces idées au modèle de van
der Waals, consistant à simplifier le modèle d’interaction : vdW() = ∞ pour ⩽ 0
et vdW () = () < 0 pour > 0 (figure 8.5). Dans l’intégrale (8.59), séparons les
contributions < 0 et > 0 et faisons l’hypothèse haute température 0 1 qui
permet d’écrire 1 − e−() ≃ () :
∞ 0 ∞
0 0
d 2 1 − e−() ≃ d 2 + d 2 () . (8.60)
0
30 ∕3
Les deux termes traduisent les deux effets de la répulsion à courte distance et de
l’attraction à grande distance, ce que nous encodons dans les deux paramètres
∞
2 3
= −2 d 2 () , et = (8.61)
0
3 0
int = = 2 d 2 () () = − ∼ − 0 30 (8.63)
0
177
Chapitre 8 • Description classique des gaz
178
Les points clés
Les annexes
A Molécules diatomiques homonucléaires – H2
Dans le paragraphe précédent, nous avons considéré le cas des molécules diatomiques
hétéronucléaires (comme HD, CO,...). Le cas des molécules diatomiques homonu-
cléaires (comme H2, O2 ,...) introduit une complication liée au postulat de symétrisation.
Considérons par exemple le cas du dihydrogène H2 pour simplifier. Les deux noyaux
étant identiques (donc indiscernables), leur fonction d’onde doit satisfaire le postulat de
symétrisation, ce qui affecte la construction des états stationnaires. En effet, les états
de moment orbital 𝓁 pairs sont spatialement invariants par échange des noyaux (en ter-
mes des coordonnées sphériques (, ), cela correspond à une rotation → − et
→ + ). Ils doivent donc être combinés avec un état singulet ( = 0) pour les spins
nucléaires, afin de respecter l’antisymétrisation globale de la fonction d’onde (chapitre 8
& chapitre 11 de [35]). On parle de para-hydrogène pour désigner l’état singulet de spin
de H2. De même les états de 𝓁 impair, spatialement antisymétrique par permutation des
noyaux, doivent être combinés avec un des trois état triplet ( = 1) de spin. On parle
dans ce cas d’ortho-hydrogène. Finalement la fonction de partition rotationnelle est :
(H )
(rot) (rot)
rot2 = (2𝓁 + 1) e −𝓁 +3 (2𝓁 + 1) e− 𝓁 . (8.64)
𝓁 pair 𝓁 impair
para ortho
La capacité calorifique correspondante est (rot) = (−) ln rot , i.e.
2, rot) 2
(H
( ) = ln para + 3ortho (8.65)
Cette discussion peut être généralisée pour des molécules avec noyaux ayant des spins
arbitraires (cf. chapitre 6 de [29] ou complément III.B de [15]). Notons toutefois
179
Chapitre 8 • Description classique des gaz
que puisque les températures de rotation sont en général très basses (cf. tableau 8.1),
on peut se limiter en pratique au régime classique, pour lequel rot = (au lieu de
2 rot
pour les molécules hétéronucléaires). La capacité calorifique n’est bien entendu pas
rot
affectée par ces effets dans le régime classique.
Revenons sur le cas du dihydrogène pour lequel la température rot est telle qu’il est
possible d’observer la transition vers le gel de la rotation. On constate que le modèle
théorique discuté ci-dessus, équation (8.65), est en désaccord avec les données expéri-
mentales. La raison est liée au manque de relaxation entre para- et ortho- hydrogène
(la probabilité de transition d’un état vers l’autre est très faible car elle met en jeu des
états des spins nucléaires très faiblement couplés). Le gaz de dihydrogène se comporte
en pratique comme un mélange de deux gaz indépendants de para- et ortho- hydrogène
dans des proportions correspondant aux dégénérescences de spin 1∕4 et 3∕4, caractérisé
par une capacité calorifique
(para et ortho
(H2 , rot) 2 1 3
( ) = ln para + ln ortho , (8.66)
4 4 non équilibrés)
au lieu de (8.65). Cette subtilité est discutée dans le § 6.5.B de [29] et dans le chapitre 8
de [3]. Elle illustre bien l’importance des interactions microscopiques, même faibles,
afin d’atteindre un équilibre thermodynamique.
rot
CV / Nk B
2
équilibrés
1.5 para−H 2
0.5 mélange
ortho−H 2 T / T rot
0
1 2 3 4 5
Figure 8.7
Capacité calorifique (partie rotationnelle) du dihydrogène. On voit que les données
expérimentales (tirées de [29]) sont décrites par la capacité calorifique du mélange
(H , rot)
2
para
= (1∕4) + (3∕4) ortho
, équation (8.66), et non par la capacité (8.65) décrivant
la situation où les deux gaz seraient équilibrés (courbe en pointillés).
180
Entraînez-vous
Exercice 8.8 Fluctuations de densité et compressibilité
Un fluide est contenu dans une enceinte de volume tot, à fixée. Le système étudié est sous-
volume du récipient, isolé par la pensée et dont le nombre de particules fluctue donc au
cours du temps.
1/ Ordres de grandeur dans un gaz. Le gaz se trouve dans les conditions normales de tem-
pérature et de pression. Les particules ont une vitesse typique ≈ 500 m/s et un temps typique
entre deux collisions de ≈ 2 ns. On note 𝓁 = le libre parcours moyen entre deux colli-
sions. On cherche à estimer le renouvellement des particules du sous-volume = 3 , supposé
cubique. Exprimer le nombre de particules entrant/sortant du système pendant un temps
en fonction de 𝓁 et , puis évaluer ∕ pour un volume = 1 cm 3 . Quel est l’ensemble
approprié pour étudier cette situation ?
G
2/ Rappeler comment obtenir la moyenne et la variance Var() à partir de la grande
fonction de partition. Déduire la relation :
G
G 2
= . (8.67)
G
3/ Dans cette question, on identifie avec sa moyenne et on note = ∕ la densité
du fluide. Après avoir justifié
que = F (
∕ , ) et =G (∕ , ) où Fet G
sont deux
fonctions, montrer que =− et =− .
, , , ,
181
Chapitre 8 • Description classique des gaz
2/ Gaz moléculaire. L’énergie d’une molécule de dichlore peut être décomposée en : énergie
de translation, rotation, vibration et liaison. La fonction de partition d’une molécule se fac-
torise comme 2 = translation rotationvibtation liaison , avec liaison = e 0 où 0 est l’énergie de
liaison.
a. Exprimer translation en fonction de introduite plus haut.
b. En reprenant la notation du cours, on donne la température de rotation rot = 0.35 K.
Déduire l’expression de rotation décrivant le comportement du gaz à température ambiante,
en fonction de et rot .
c. De même, on donne vib = 808 K. Discuter le rôle de la vibration à température ambiante.
Que devient vibration ?
3/ Loi d’action de masse. En reprenant la notation du problème 6.1, exprimer la constante
( ). On donne 0 ∕ = 29 000 K ; que peut-on déduire sur l’efficacité de la dissociation du
dichlore à température ambiante ?
182
Chapitre 9
Thermodynamique
des oscillateurs
harmoniques
183
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
2 1
(, ) = + 2 2 . (9.1)
2 2
Son spectre quantique d’énergies équidistantes est très particulier [5, 35]
1
= + où ∈ ℕ . (9.2)
2
La fonction de partition est une série géométrique que nous calculons aisément
∞
1
= e−(+1∕2) = (9.3)
=0 2 sh(∕2)
1
= (9.5)
e∕ −1
mesure le nombre moyen de quanta d’énergie dans l’oscillateur. Cette fonction porte le
nom de distribution de Bose-Einstein et jouera un rôle très important par la suite.
Calculons également la capacité calorifique
2
def C 2
( ) = = . (9.6)
sh 2
C
et ( ) sont tracées sur la figure 9.1.
184
1 Oscillateur harmonique unidimensionnel
L’expression de l’énergie ( ) = ln 2 sh peut se réécrire
2
−
( ) = + ln 1 − e (9.7)
2
pour faire apparaître l’énergie fondamentale, à laquelle s’ajoute la contribution des états
excités. De même l’entropie peut être écrite en fonction de :
−
( ) = − ln 1 − e
. (9.8)
Les deux fonctions sont tracées sur la figure 9.2.
185
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
extrêmement peu probables, qui permettent de promouvoir l’oscillateur dans ses états
excités, et dont le facteur e− 1 est la signature. Stricto sensu, ce sont seulement
les fluctuations thermiques qui sont gelées, et l’oscillateur dans son état fondamental est
encore sujet aux fluctuations quantiques, qui se manifestent sur certaines observables
(nous en verrons une illustration à la fin du chapitre en discutant la pression Casimir).
On peut également voir la signature du gel de la vibration dans l’énergie libre
( → 0) ≃ 0 et l’entropie ( ) ≃ exp − → 0 (figure 9.2).
Un solide peut être considéré comme une « grosse molécule », constituée d’un nombre
macroscopique d’atomes. Deux contributions importantes à l’énergie sont d’une part
l’énergie des électrons formant la liaison chimique entre atomes et l’énergie des ions :
2 1 2
vibration ≃ + 20 − (9.11)
=1
2 2 ,
où la somme porte sur tous les couples d’atomes voisins : ce deuxième terme décrit
les énergies de liaison entre atomes plus proches voisins. C’est l’analogue de l’énergie
associée à la liaison chimique discutée dans le chapitre précédent pour la molécule
diatomique. Cette forme de l’énergie est une approximation au voisinage de l’état
d’équilibre du solide, loin de son point de fusion.
186
2 Vibrations d’un corps solide
...
...
... ...
...
Figure 9.3
Un modèle simple de solide : des atomes plus proches voisins en interactions har-
moniques, représentées par les ressorts, décrit par (9.11).
Puisque l’énergie de vibration est une forme quadratique des coordonnées des atomes,
il existe une transformation linéaire de l’ensemble des coordonnées qui la diagonalise :
1 2 2 Ω2 ∶ matrice 3×3
pot = 0 − ⋮ (9.12)
2
, ⋱ ⋱
1 2 2
3
1
= ⋯ ⋯ ⋱ ⋱ ⋱ =
2 2 =1
⋱ ⋱
⋮
où les 2 sont les 3 valeurs propres de la matrice Ω2 et les des combinaisons
linéaires des coordonnées atomiques (⋯ , , , , ⋯). Finalement, l’énergie de vibra-
tion s’écrit sous la forme
3
2 1
vibration = + 2 2 . (9.13)
=1
2 2
Les 3 coordonnées { }, combinaisons linéaires des { }, sont appelées les coor-
données normales (cf. annexe A page 203 pour l’analyse explicite d’un exemple). La
diagonalisation de la forme quadratique pot nous a permis de réécrire l’énergie de
vibration (9.11) comme la somme des énergies de 3 oscillateurs harmoniques unidi-
mensionnels indépendants, appelés modes propres de vibration (leur nombre est donné
par le comptage des degrés de liberté associés aux atomes).
187
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
0.5 Al Pb
0.4 2
ρ(ω) 0.3
T2
0.2 1 T2
T1
0.1 T1
L L
0 0
0 1 2 3 4 5 6 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 1.4
ω ( 10 13 rad.s −1 ) ω ( 10 13 rad.s −1 )
Figure 9.4
Densité de modes de l’aluminium et du plomb. Les courbes en traits fins représentent
les contributions des modes longitudinal (L) et transverses (T1 et T2). Données tirées de :
R. Stedman et al, Physical Review 162, p. 549 (1967).
def
3
( ) = ( − ) (9.14)
=1
0
d() = 3 . (9.15)
() Il existe des modes acoustiques de basses fréquences (les solides peuvent propager
du son). Dans la limite des grandes longueurs d’onde la relation de dispersion prend
la forme ≃ où est la vitesse du son (cf. table 9.1).
La troisième remarque nous permet de déduire le comportement générique de basse
fréquence de la densité de modes :
d3
(2)3
( ) = 3 ( − ) ≃ 3 ( − ) (9.16)
max
1. Bien qu’analogue à la notion de densité d’états décrivant les propriétés spectrales des problèmes
quantiques, la notion de densité de modes est parfaitement classique (cf. Annexe 9.A).
188
2 Vibrations d’un corps solide
où le facteur 3 tient compte des trois modes de vibration (un mode longitudinal et deux
modes transverses) associés à chaque vecteur d’onde. Finalement
3
( ) ≃ 2 (9.17)
max 2 2 3
Il est remarquable que du point de vue des propriétés de basse énergie, toute la com-
plexité du cristal (nature des atomes, structure cristalline, etc) est encodée dans un
unique paramètre . On a représenté les densités de modes de deux métaux obtenues
par diffusion de neutrons (figure 9.4) qui illustrent les propriétés (i) et (iii).
Remarques. L’étude détaillée des modes propres de vibration est une question in-
téressante discutée dans les ouvrages classiques de physique des solides [2, 19]. Si nous
avons utilisé une notation générique pour repérer les modes propres, , l’analyse mon-
tre qu’ils doivent être repérés par un vecteur appartenant à un domaine fini de ℝ 3
appelé la « zone de Brillouin » (cf. annexe 9.A page 203 pour une illustration).
D’autre part nous n’avons pas distingué les contributions des différents modes de
vibration, mode longitudinal (compression) et modes transverses (cisaillement), qui sont
en général caractérisés par des vitesses distinctes et . Cette remarque n’affecte pas
la forme de la densité de modes (figure. 9.4) : il suffira de poser 3∕2 = 1∕ 2 + 2∕2 .
Les modes propres de vibration sont des combinaisons linéaires des variables de posi-
tions atomiques. Il est donc naturel de quantifier ces oscillateurs. Les niveaux d’énergie
de vibration du cristal sont caractérisés par 3 nombres quantiques :
3
{ } = ( + 1∕2) avec ∈ ℕ . (9.18)
=1
Lorsque le mode de fréquence est dans son -ème niveau excité, on dira que le mode
est occupé par phonons. Un phonon représente un quantum d’excitation du mode.
Si nous revenons à l’indexation des modes à l’aide du vecteur, → , nous pouvons
interpréter comme l’énergie du phonon et comme son impulsion. La relation de
dispersion linéaire ≃ s’identifie avec la relation de dispersion relativiste pour
des particules de masse nulle.
Les phonons sont des particules émergentes apparaissant dans la théorie de basse
énergie décrivant les vibrations du cristal (les phonons n’ont d’existence que dans le
cristal). En outre, ces particules ne sont indépendantes qu’à basse énergie, dans la limite
où l’énergie de vibration peut être considérée quadratique. À plus haute énergie, l’én-
ergie de vibration doit être décrite plus correctement en incluant des termes quartiques,
etc, (oscillateurs anharmoniques). Ces anharmonicités sont interprétées comme des ter-
mes d’interaction entre les phonons. Si le solide explore les énergies encore plus élevées
(à plus haute température), il peut y avoir fusion du cristal.
189
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
L’étude de la thermodynamique des vibrations peut maintenant être menée très di-
rectement puisque nous nous sommes ramenés à un problème de 3 oscillateurs har-
moniques quantiques unidimensionnels indépendants. Le problème est donc séparable
et nous pouvons simplement utiliser la règle de factorisation (6.26)
3
1
vibration = où = , (9.19)
=1 2 sh
2
qui impliquera l’additivité des grandeurs thermodynamiques.
C
vib = + = d() + (9.20)
=1
2 e − 1
0 2 e − 1
Le premier terme correspond à l’énergie fondamentale du cristal
max
0
vide = d () , (9.21)
2
i.e. l’énergie du « vide de phonon ». Le second terme s’interpète comme l’énergie des
excitations, i.e. l’énergie du gaz de phonons :
max
0
C
phonons = d () . (9.22)
Elle met en jeu l’intégrale d’un produit de deux fonctions : la densité de mode (), de
largeur max , et la capacité calorifique ( ), de largeur ∕ .
190
2 Vibrations d’un corps solide
kBT/h k BT /h
kB kB ρ(ω)
c ω(T)
cω (T)
ρ(ω) ω
0 ωMax ω 0 ω Max
Figure 9.5 – Les deux fonctions intervenant dans l’intégrale (9.23).
0
d (). En utilisant la règle de somme (9.15), nous obtenons la loi de Dulong
et Petit (1819) :
( ) ≃ 3 (9.24)
Autrement dit la capacité calorifique (classique) des solides est une loi universelle,
indépendante de la nature du cristal, de la structure cristalline etc.
2
Λ
22 3 0
3 2
( ) ≃ d 2 , (9.25)
sh
2
191
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
18
16
14
12
C V/T
10
8
6
4
2
0
0 1 2 3 4 5 6
T2 (Kelvin2 )
0
pas à l’excitation. La variation d’énergie est donc ( ) − (0) ∼ d () ∼
0
d 3 ∼ 4, d’où nous déduisons ∼ 3. Q ED .
Plus haut nous avions vu que la présence d’un gap Δ dans le spectre des excita-
tions est associé au comportement ∼ e−Δ∕ . Le comportement en loi de puissance
( ) ∼ 3 caractérise au contraire l’absence d’échelle caractéristique. La den-
sité de modes () est une fonction continue, i.e. quelle que soit l’échelle d’énergie
à laquelle le système est sondé ( ), des degrés de liberté (des modes de vibration)
peuvent être excités, i.e. échanger de l’énergie avec le thermostat. Dans cette perspec-
tive, l’échelle max apparaît comme une échelle de coupure (un « cutoff ») délimitant
la validité de la description continue de basse énergie.
c) Ordres de grandeur
192
2 Vibrations d’un corps solide
0 0
−
( , ) = d () ( ) = vide + d () ln 1 − e (9.27)
phonon = 0 (9.28)
Rappelons également qu’il existe des modes phonons à énergie arbitrairement basse, ce
qui est associé ici au fait que ce sont des particules de masse nulle, ou plutôt que le
spectre des phonons ≃ est sans gap.
e) Modèle de Debye
Le modèle que nous avons introduit est une variante d’un modèle très populaire proposé
par Debye en 1912, qui est utilisé couramment pour analyser les données expérimen-
tales. Puisque le calcul de ( ) dépend essentiellement de la règle de somme (9.15)
193
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
0
3
satisfaire la règle de somme, d 2 3 2 = 3 . On déduit :
2
ρ(ω)
ρ(ω)
ω ω
0 ω Max 0 ωD
0
2 34
( ) = 3 × d 2 où = (9.31)
sh
194
3 Thermodynamique du rayonnement
qui permet de retrouver les comportements limites donnés plus haut, mais aussi
d’analyser le régime intermédiaire (figure 9.7). Par exemple nous pouvons réécrire le
comportement de basse énergie (9.26) en fonction de la température de Debye
3
12 4
( ) ≃ . (9.32)
5
Les solides sont communément caractérisés par leurs températures de Debye
(tableau 9.1).
3 Thermodynamique du rayonnement
3.1 Description du problème du corps noir
Dans cette dernière section nous étudions les propriétés thermodynamiques du ray-
onnement électromagnétique contenu dans une cavité et à l’équilibre (la cavité est
fermée pour ne pas laisser échapper le rayonnement, d’où la terminologie de « corps
noir »). Rappelons que l’équilibre thermodynamique ne peut être atteint que si des in-
teractions permettent de redistribuer l’énergie entre les différents degrés de liberté, or
le rayonnement peut s’interpréter comme un gaz de photons, qui sont des particules
strictement sans interaction. Le gaz de photons ne peut donc atteindre un équilibre ther-
modynamique que grâce aux interactions avec la matière (les parois de la cavité). Plus
correctement, le problème du corps noir correspond à l’étude du rayonnement à l’équili-
bre avec la matière thermalisée (ce problème ne se posait pas pour les phonons, qui sont
des particules émergentes, approximativement découplées, et pour lesquelles les inter-
actions résiduelles, ou médiées par les interactions avec les autres degrés de libertés du
solide, assureront la thermalisation).
Une étoile fournit un exemple plus concret d’application du concept de « corps noir » :
les photons produits lors des réactions de fusion au cœur de l’étoile, subissent de nom-
breux processus d’absorption/émission avant d’atteindre les couches externes de l’étoile
et d’être éventuellement émis à l’extérieur. On peut considérer qu’avant d’être émis par
l’étoile, les photons sont à l’équilibre thermodynamique avec la matière de la couche
externe. De plus l’émission de photons est suffisamment faible pour ne pas perturber
l’équilibre dans l’étoile.
Un autre exemple important qui réalise un corps noir est le fond diffus cosmologique :
après le big bang, la matière ionisée était à l’équilibre avec la lumière, mais l’ensemble
se refroidissait à cause de l’expansion de l’univers. Après ∼380 000 ans la température
de l’univers était suffisamment basse pour permettre la formation des atomes, la matière
est devenue électriquement neutre, i.e. il s’est produit un découplage entre lumière et
matière. Le rayonnement diffus à l’équilibre thermodynamique l’est resté, tout en se
refroidissant sous l’effet de l’expansion.
195
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
Les densités spectrales pour le soleil et pour le fond diffus cosmologique sont
représentées sur la figure 9.9. Elles sont bien expliquées par la loi de Planck que nous
allons retrouver plus bas.
UV visible infrarouge
haute atmosphère
densité spectrale
densité spectrale
niveau de la mer
Le vecteur ,± peut prendre deux valeurs indépendantes correspondant aux états de po-
larisation de l’onde plane (dans la jauge de radiation,2 ⋅ = 0). Dans la cavité les ,±
vecteurs d’onde sont quantifiés pour satisfaire certaines conditions aux limites dépen-
dant de la nature des parois. Un mode propre du champ dans la cavité est donc décrit
par le couple ( , ) où = ± indice les deux états de polarisation.3
2. Rappelons que les deux équations de Maxwell div = 0 et rot = − (induction) contraignent
les deux champs vectoriels à être de la forme = rot
et = grad − où et sont les
potentiels scalaire et vecteur. Étant donnée une distribution de charges, il reste cependant une liberté
pour déterminer ces potentiels (choix de jauge). Dans le vide, il est pratique d’imposer = 0 et
div = 0 (jauge de radiation), ce qui fixe alors les potentiels de manière univoque.
3. L’existence de deux états de polarisation est reliée à la nature vectorielle du champ électromagné-
tique (le potentiel vecteur). Un vecteur est un objet de « spin » = 1, cependant le champ ne peut être
196
3 Thermodynamique du rayonnement
L’analyse de la densité de modes rappelle celle des modes de vibration, à deux dif-
férences près : il y a maintenant deux états de polarisation pour les photons (au lieu de
3 pour les phonons). D’autre part la relation de dispersion linéaire = est ex-
acte (ce n’est plus une approximation de basse fréquence). Nous pouvons donc partir de
(9.17), corrigée du facteur 2∕3. On obtient
( ) = 2 pour ∈ ℝ . (9.35)
23
L’hamiltonien électromagnétique
2 2
d 0 +
2 2
1 3 2 1 2 1 3 1
e−m = = d 0 + rot
0 0
(9.36)
()ei⋅ .
1
(,
peut être écrit en termes du champ dans l’espace de Fourier ) =
Le terme « cinétique » peut être écrit en terme des composantes de Fourier grâce à la
relation de Parseval-Plancherel (équation (A.19) du formulaire)
0 2 0 2
d 2 = =
0
2
3
2 2
et le terme « potentiel »
d 3 2 = = ,
1 2 1 2 2
2 0
1
20 20
0 2
+
2
2
e−m = (9.37)
2
qu’on peut comparer à (9.13). L’expression montre que la composante de Fourier et
sa dérivée temporelle jouent le même rôle que les deux variables canoniquement con-
juguées d’un oscillateur harmonique. L’énergie électromagnétique est donc l’énergie
d’un ensemble d’oscillateurs harmoniques indépendants (un oscillateur pour chaque
mode de la cavité)
que dans deux états de polarisation indépendants, associés aux deux hélicités permises pour le photon
(ceci est lié au fait que le photon a une masse nulle et une vitesse ).
197
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
c) Quantification – photons
Comme dans le cas de l’énergie de vibration des solides, les oscillateurs harmoniques
associés aux modes propres du champ électromagnétique doivent être quantifiés. Un état
quantique du champ est caractérisé par l’état de chacun des oscillateurs. Les états propres
de l’énergie sont spécifiés par des nombres quantiques entiers ,± ∈ ℕ indiquant l’état
d’excitation du mode. L’énergie de l’état stationnaire est
1
{ } = , + avec , ∈ ℕ (9.38)
,
2
,
On dira que le mode (, ) est occupé par , photons, ceux-ci représentant les quanta
d’énergie des modes du champ électromagnétique. Comme pour l’analyse des vibrations
d’un corps solide, il y a donc deux interprétations physiques complètement équivalentes
de l’énergie du rayonnement :
(i) Soit l’énergie d’un ensemble d’oscillateurs harmoniques (quantiques) indépendants,
de pulsations { }.
(ii). Soit l’énergie d’un gaz de particules sans interaction (les quanta des modes propres),
de nature bosonique (cf. chapitre 13), décrites par la relation de dispersion =
(avec = et = ). Ces particules sont les photons.
où le produit porte sur tous les modes propres de la cavité. L’énergie libre correspondante
est : rayon : contrib. du rayonnement
e−m ( , ) = vide + ln 1 − e− ∕ où vide = (9.40)
2
, ,
photon = 0 (9.41)
198
3 Thermodynamique du rayonnement
Pour mener à bien les calculs, nous remplaçons la somme discrète sur les modes par une
intégrale sur les fréquences
∞
0
⟶ d () . (9.42)
,
0 0
rayon = d () × × = d (, ) (9.44)
# de modes
# de photons
dans le mode
3
(, ) = (loi de Planck). (9.45)
2 3 e∕ − 1
C’est donc une loi universelle contrôlée uniquement par la température. Nous obtenons
une courbe avec un comportement quadratique aux petites fréquences (résultat clas-
sique, loi de Rayleigh-Jeans) RJ (, ) = 2, présentant un maximum pour
2 3
≃ 2.82 ∕ , puis décroissant exponentiellement aux plus hautes fréquences (loi
de Wien), ce qui traduit le gel des oscillateurs de hautes fréquences (comme pour les
phonons). La loi de Planck décrit assez bien la distribution spectrale du rayonnement
solaire reçu sur terre en haute atmosphère, pour une température de ≃ 5 500 K
(figure 9.9).4 Pour le fond diffus cosmologique, l’accord est spectaculaire (figure 9.9).
rayon ∞
2 ( ) 4
0
tot ( ) = = d (, ) = (9.46)
15 ( ) 3
199
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
c) Pression de radiation
2 ( )4
rayon ( ) = (9.50)
45 ( ) 3
Cette expression correspond à l’équation d’état du gaz de photons. Par exemple pour
= 5 800 K (rayonnement du soleil), l’application numérique donne rayon ≃ 0.33 Pa.
Comparaison avec le gaz classique. On peut comparer l’équation d’état des photons
(9.50) avec l’équation d’état classique = en exprimant la pression en terme de
la densité moyenne de photons :
∞ 3
2 (3)
0
def 1
= d () = (9.51)
2
(l’intégrale est donnée dans le formulaire, page 299). Nous réécrivons (9.50) comme
(4) (4)
rayon = avec = 0.900 393... . (9.52)
(3) (3)
Le préfacteur diffère peu de l’unité, néanmoins cette valeur (4)∕ (3) < 1 s’interprète
comme un effet des corrélations quantiques positives. En favorisant le regroupement
des photons dans leurs états individuels, le postulat de symétrisation crée une interaction
attractive effective entre les photons, qui diminue la pression. Un phénomène analogue
sera discuté pour des particules massives au chapitre 13.
200
3 Thermodynamique du rayonnement
d) Pression Casimir
Revenons sur la présence de l’énergie du vide dans les différentes quantités rencontrées
précédemment. Cette contribution a le mauvais goût d’être infinie :
vide = =∞ (9.53)
,
2
2
∞
d2 ∥
(2)2
(avec plaques)
() = 2 − ( ∕ ) 2 + ∥ 2 = +()
=1 2 3
Weyl
où est l’aire des plaques. La composante ∥ parallèle aux plaques n’est pas quan-
tifiée, seule la composante perpendiculaire ⟂ = ∕ est quantifiée, conséquence de
l’introduction des conditions aux limites. Le premier terme est le terme de Weyl, obtenu
à la limite → ∞ où le spectre des fréquences propres peut être considéré continu. Le
second terme (), i.e. la différence entre la somme et l’intégrale, traduit l’effet des
plaques métalliques sur la distribution des fréquences, c’est à dire l’effet de la quantifi-
cation. Ce terme permet de quantifier la variation d’énergie induite par l’introduction
des deux plaques métalliques :
∞
0
(avec
vide
plaques)
− (sans
vide
plaques)
= d () (9.54)
2
Le calcul précis nécessite quelques régularisations afin de manipuler ces deux infinis.
En prenant compte plus rigoureusement l’effet des conditions aux limites (qui imposent
des conditions de Dirichlet seulement pour la composante parallèle du champ électrique,
∥ = 0 sur les plaques) on obtient finalement
(avec plaques) (sans plaques)
vide − vide 2
Casimir = − =− (9.55)
240 4
Cette pression négative décrit une petite force attractive entre les plaques métalliques.
La figure 9.10 montre le résultat d’une mesure de la force Casimir entre une boule et
une surface métallisées, réalisée à la fin des années 1990.
201
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
20
0
−100
−140
0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
distance plaque−sphère (μ m)
Figure 9.10
À gauche : Effet Casimir : deux plaques métalliques dans le vide s’attirent à cause des
fluctuations quantiques du champ électromagnétique. À droite : Mesure de la force
Casimir entre une boule et une surface métallisées. Les barres d’erreur sont seulement
indiquées pour quelques points ; la ligne continue correspond au calcul théorique. Don-
nées tirées de U. Mohideen & A. Roy, « Precision measurement of the Casimir Force from
0.1 to 0.9 m », Physical Review Letters 81, p. 4549 (1998).
202
Les points clés
Les annexes
A Modes propres d’une chaîne de ressorts
Afin de clarifier la notion de modes propres, on discute les modes mécaniques d’une
chaîne de ressorts, i.e. un modèle de « cristal unidimensionnel ».5 Considérons masses
sur une ligne, reliées entre elles par des ressorts identiques, de longueur à vide .
L’hamiltonien est :
2 1
= + 20( − −1 )2 (9.56)
=1
2 2
5. L’emploi des guillemets est motivé par un théorème général et très important dans l’étude des tran-
sitions de phases, le théorème de Mermin-Wagner, qui interdit en particulier la formation d’un cristal
en dimension = 1 et = 2. Dans le cas présent : l’ordre à longue portée (le cristal) est détruit par les
fluctuations thermiques (cf. chapitre 4 de [34]), mais aussi par les fluctuations quantiques à température
nulle (cf. exercice 7.8 de [35]).
203
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
2
6. On utilisera e i = ,0 où il est entendu que est quantifié comme = .
=1
204
B Corde vibrante : « quantification classique » versus « quantification quantique »
2 δ y2
δx +
δy
y(x,t)
δx
x
0 L
Figure 9.11 – Corde fixée entre deux points subissant une déformation (en tirets, la
corde au repos).
où le facteur 2∕ est introduit par commodité afin
de décomposer le champ de dé-
placement sur une base de fonctions, () = 2∕ sin(∕), orthonormées :
0
d () ′ () = ,′ . Les nouvelles variables { } sont appelées « coordon-
nées normales ». Introduisant (9.59) dans (9.58), on obtient l’expression de l’énergie
en termes des coordonnées normales
∞ 2
1 1
[{()}] = ()2 + ()2 . (9.60)
=1
2 2
1.0 1 0. 1.0
⋯
0.2 0.4 0.6 0.8 1. 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
0.5 0.5 0.5
205
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
excité () du mode correspond à des oscillations d’amplitude 2 avec
2
1
( ) = + (9.64)
2
(la moyenne est purement quantique).
Antenne RF
Corde de nanotubes
de carbone hω
Au
Re
Si 3 N4 L =1.7 μ m
Si
Figure 9.13
Une corde suspendue de ≈ 200 nanotubes de carbone est traversée par un courant
= 2A. Les modes de vibration de la corde (dans un état supraconducteur à = 120mK)
sont excités par un champ électromagnétique radio-fréquence. Expérience : B. Reulet,
et al, Physical Review Letters 85, p. 2829 (2000). Figure tirée de [35].
206
Entraînez-vous
Exercice 9.1 Donner l’expression de l’entropie microcanonique décrivant le rayonnement.
Problème 9.1 Mesure de (expérience de Kappler)
Nous discutons une expérience réalisée au début des années 1930 ayant permis de mesurer
la constante de Boltzmann en étudiant les fluctuations d’un petit pendule de torsion. Un petit
miroir est suspendu au bout d’un fil caractérisé par une constante de torsion . Dans la limite
des petits angles de rotation, l’hamiltonien décrivant la rotation du miroir est
21
( , ) = + 2 pour 1 (9.65)
2 2
1
où = est le moment conjugué de l’angle. = 2 est le moment d’inertie du miroir
12
de masse .
L
angle ϕ (t )
0 5 10 15 20 t (min.)
Le miroir est à l’équilibre avec le gaz à température qui l’entoure. Il est sujet à des
fluctuations dues à l’agitation thermique.
1/ Calculer la fonction de partition. Déduire l’énergie moyenne du miroir.
207
Chapitre 9 • Thermodynamique des oscillateurs harmoniques
208
Chapitre 10
Transitions de phase
On rencontre la plupart des corps simples sous forme gazeuse, liquide ou solide suivant
les conditions de température et de pression. L’existence d’états de natures différentes
(différentes « phases ») à basse et haute température est une nouvelle manifestation de la
compétition entre l’énergie et l’entropie contribuant à l’énergie libre = − . L’ex-
emple de la transition gaz-solide est particulièrement clair : si l’entropie est favorisée
dans la phase « désordonnée » de haute température (l’état gazeux étudié au chapitre 8),
c’est bien l’énergie qui est minimisée dans la phase « ordonnée » de basse température,
puisque les atomes se distribuent sur les nœuds d’un réseau cristallin afin de minimiser
les énergies de liaison dans l’état solide étudié au chapitre 9. Nous avons éludé jusque
là l’état liquide intermédiaire, ce à quoi nous allons remédier en étudiant la transition
gaz-liquide dans ce chapitre.
Une transition de phase correspond à une discontinuité dans le comportement du
système, qui apparaît en faisant varier un paramètre. Par exemple dans la transition
eau-vapeur, il existe une température de transition ( = 100 o C à = 1 atm, qui
a longtemps servi d’étalon de température) autour de laquelle le système se trouve
dans deux états bien différents, liquide juste sous 100 o C, et gaz juste au-dessus. La
discontinuité dans le comportement du système est identifiée à l’aide d’une grandeur
appelée paramètre d’ordre : pour la transition liquide-gaz, il s’agit de la densité
o 3 o
((100
eau
C)
= 958 kg∕m > (100vap
C)
= 0, 597 kg∕m3 ). C’est un exemple de transition
abrupte, dite « du premier ordre » car la densité est reliée à une dérivée première d’un
potentiel thermodynamique. Il est également possible de rencontrer des situations où
le paramètre d’ordre varie continûment à la transition : par exemple si l’eau passe par
son point critique à ≃ 374 o C et ≃ 220 atm. Le caractère discontinu doit être
identifié sur les dérivées secondes des potentiels thermodynamiques, comme la capac-
ité calorifique ou la compressibilité. Ce type de transitions continues sont appelées des
transitions « du second ordre ».
Bien que ces sujets, où les interactions jouent un rôle central, soient très difficiles,
le formalisme canonique va nous permettre de proposer une description quantitative
de ces phénomènes, moyennant une approximation dite « de champ moyen ». Cette
209
Chapitre 10 • Transitions de phase
1 Transition liquide-gaz
1.1 Description phénoménologique
Décrivons la transition liquide gaz qui sera étudiée dans la première partie du chapitre.
Plus généralement, les différents états d’un fluide sont représentés dans un « diagramme
de phases », comme ceux de la figure 10.1. Sur le diagramme de Clapeyron (à gauche)
est représentée quelle phase est thermodynamiquement stable pour une température
et une pression données (par exemple température ambiante et pression atmo-
sphérique). Les trois phases sont séparées par des lignes de transition, des courbes ( ),
sur lesquelles on observe la coexistence des phases. Les trois lignes se retrouvent au
point triple ( , ). La ligne de transition liquide-gaz ( ) part du point triple et se
termine au point critique , au-delà duquel le fluide passe continûment de l’état gazeux
à l’état liquide et il n’y a plus de distinction entre les deux phases : on parle de fluide
supercritique.
p
C C
solide liquide
pression
T >Tc
liquide liquide+gaz
T=Tc
gaz T<Tc
gaz
température V
Figure 10.1– La transition liquide-gaz.
À gauche : le diagramme de Clapeyron typique d’un corps pur, diagramme de phases à
( , ) fixées. La flèche correspond à une isotherme. À droite : tracé d’une isotherme ( )
pour < et = .
Une façon de contrôler les changement de phases d’un corps pur expérimentalement
est de placer le fluide dans un récipient de volume variable et dont la température est
fixée à . On mesure alors la pression dans l’enceinte en fonction de et l’on trace
l’isotherme comme représentée sur la partie droite de la figure 10.1. En partant d’un
volume suffisamment grand pour que le système soit dans l’état gazeux, on observe
210
1 Transition liquide-gaz
L’effet principal de l’interaction répulsive de cœur dur est d’exclure un volume pour les
centres de masse des autres atomes (voir figure 10.2). Si un atome est assimilé à une
sphère dure de rayon = 0 ∕2, la distance minimale relative entre deux atomes est 0 ,
ce qui exclut le volume
4 3
def
= , (10.1)
3 0
appelé le volume exclu (8 fois celui d’une sphère dure).
211
Chapitre 10 • Transitions de phase
b) Champ moyen
Pour calculer l’intégrale de configuration (8.35), nous allons procéder en deux étapes
correspondant à traiter séparément l’effet de la partie répulsive (cœur dur) du potentiel
() et la partie attractive. Pour faciliter la discussion, nous décomposons le potentiel
comme vdW () = rep() + att() avec rep () = ∞ pour < 0 et 0 pour > 0 ,
alors que att() = 0 pour < 0 et () pour > 0 . De manière équivalente, l’énergie
d’interaction dans le gaz est séparée en deux = rep + att .
Dans un premier temps, nous étudions l’effet de la répulsion. Nous introduisons par
la pensée les atomes un par un dans le volume : le premier atome dispose d’un volume
, le second d’un volume − , le troisième ≈ − 2 (figure 10.2), etc :
−1
3 3
d 1 ⋯ d e − rep
≃ ( − ) ≃ − (10.2)
=0 2
où nous avons supposé que (le calcul a déjà été présenté dans la question 3 du
problème 5.4 page 101). Bien que chaque atome exclut un volume pour les autres, tout
se passe comme si chaque atome disposait d’un volume effectif eff = − ∕2 =
− , où = ∕2 est le paramètre de van der Waals (chapitre 8).
Dans un deuxième temps, nous utilisons un argument de champ moyen pour traiter
l’effet de la partie attractive du potentiel. Pour une configuration donnée, le potentiel
« vu » par l’atome en 1 est
∞
0
()→
att(1 ) ≃ d3 () att( − 1) ⟶ 4 d 2 () = −2
=2
où nous avons substitué la densité () = (− ) par sa moyenne . Nous reconnais-
sons le double de l’énergie d’interaction par particule (8.63), où le facteur 2 s’explique
par le double comptage. Finalement, nous avons retrouvé ≃ − .
Combinées, ces deux observations nous suggèrent d’écrire l’intégrale de configura-
tion comme une intégrale séparable pour atomes indépendants, occupant chacun un
volume eff = − et soumis à un potentiel homogène ∕ ≃ − :
eff
2
− (− )
≃ 3
d e = ( − ) e . (10.3)
1 ( − ) 2
= e . (10.4)
! Λ3
Bien que cette approximation paraisse assez grossière, elle capture à la fois les effets
répulsifs et attractifs à travers les deux paramètres microscopiques et . Nous verrons
que les deux effets doivent être conservés pour expliquer la transition dans ce modèle.
212
1 Transition liquide-gaz
C 3 2
L’énergie moyenne = − est la somme de l’énergie cinétique moyenne
2
et de l’énergie d’interaction attractive moyenne (cf. chapitre 8). Remarquons que la ca-
3
pacité calorifique = est la même que celle du gaz parfait, cependant
2
5
diffère de (G.P.)
= . L’entropie s’obtient facilement
2
5 −
= + ln . (10.6)
2 Λ 3
Elle ne dépend que de qui contrôle le nombre de configurations spatiales accessibles.
= − 2 pour = < 1∕ (10.7)
1 −
Nous avons retrouvé l’équation d’état de van der Waals (1873) proposée sur la base
2
d’arguments heuristiques, et écrite sous la forme ( + 2 )( − ) = .
Exercice 10.1 Coefficients du viriel de l’équation de van der Waals
a) Interpréter physiquement les deux contributions à la pression dans (10.7).
b) À partir de la définition (8.31), déterminer les coefficients du viriel du modèle de
van der Waals. Commenter.
Les isothermes associées à l’équation (10.7) sont tracées sur la figure 10.3 et présentent
un comportement non-monotone pour les basses températures. Par ailleurs, la stabilité
du système requiert une compressibilité positive (chapitre 6 § 3) :
def 1 1 1
= − = >0. (10.8)
2
2
213
Chapitre 10 • Transitions de phase
C
T=T c
T<Tc
V1 V2 V 00 V1 V2 V
Nb Nb
Figure 10.3
À gauche : résolution graphique de (10.9). On trace les deux membres de (10.9) pour
différentes températures. À droite : allure des isothermes de van der Waals : pour < ,
la partie rayée (non physique) correspond à < 0.
214
1 Transition liquide-gaz
F p
vapeur
sur−saturée
homogène
plateau
diphasique de liquéfaction
A A B
liquide
B sur−chauffé
aires égales
Nb VA V VB V Nb V
Figure 10.4
À Gauche : Énergie libre pour < . L’énergie libre du mélange des phases A (liquide)
et B (gaz) est plus basse que celle du système homogène pour ⩽ ⩽ . À droite :
Construction de Maxwell. La ligne épaisse est la ligne d’équilibre thermodynamique.
Les deux branches AD1 et D 2B sont deux lignes de métastabilité. L’ensemble des points
1 et 2 pour différentes températures correspond à la courbe spinodale.
C’est une droite passant par deux points et appartenant à la courbe (10.5). Com-
ment trouver les positions des points et ? On voit graphiquement que l’énergie libre
diphasique la plus basse possible à donné est obtenue en prenant la double tangente à
la courbe (10.5). Sur la portion entre et , (10.10) donne une pression constante, qui
−
n’est autre que la pression de vapeur saturante ( ) = − =− .
−
c) Construction de Maxwell
Graphiquement, il est plus simple de trouver les volumes et par une analyse des
isothermes due à Maxwell plutôt que par la méthode de la double tangente. Écrivons la
relation de Gibbs-Duhem (7.23) (annexe A du chapitre 7) pour constante : d =
d, puis intégrons entre les points et . Il vient
→
() d = ( − ) = 0 . (10.11)
Nous retrouvons que l’équilibre entre les phases impose l’égalité des potentiels chim-
iques = . L’intégrale ci-dessus est égale à l’intégrale sur un circuit fermé reliant
à sur l’isotherme ( ) (voir figure 10.4) :
d = 0 . (10.12)
215
Chapitre 10 • Transitions de phase
216
1 Transition liquide-gaz
Tableau 10.1 – Positions du point critique pour divers gaz (pour une mole). Données
tirées de [15] citant N. Lange, « Lange’s handbook of chemistry », McGraw-Hill (1967).
(K) (cm 3) (atm)
217
Chapitre 10 • Transitions de phase
spinodale
isotherme
1
critique
0
C
0 1
9
(+) − (−) = . (10.24)
2
Toutes ces remarques montrent que le point critique est caractérisé par des comporte-
ments singuliers des dérivées secondes des potentiels thermodynamiques (capacité
calorifique discontinue, divergence de la compressibilité,..). Pour cette raison, on dira
qu’une transition de phase du second ordre se produit au point critique.
218
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
2.1 Introduction
a) Description du phénomène
Certains matériaux, comme les composés à base de fer, cobalt ou nickel, présentent
une aimantation spontanée même en l’absence d’un champ magnétique extérieur (dans
les aimants). On parle de phase ferromagnétique. Si ces matériaux sont chauffés
au-delà d’une température appelée température critique , aussi appelée la tempéra-
ture de Curie, leur aimantation disparaît. Ils entrent dans une phase paramagnétique
(figure 10.6). En général, est grande par rapport à la température ambiante, typ-
iquement de l’ordre de 1 000 K (Fe : = 1 043 K, Co : = 1 388 K, Ni :
= 627 K). L’existence d’une aimantation spontanée s’interprète microscopiquement
comme l’alignement des moments magnétiques locaux, dans le matériau, sous l’effet
des interactions microscopiques générant un effet coopératif à l’échelle macroscopique.
C’est une nouvelle manifestation de la compétition entre énergie et entropie, où l’une
ou l’autre domine suivant la température.
0.6 Nickel
Cobalt
0.4
Fer
0.2 Magnetite
Pyrrhotite
0
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
T / Tc
Figure 10.6
Aimantation en fonction de ∕ pour divers matériaux ( est la température de Curie).
Données tirées de : F. Bitter, Physical Review 39, p. 337 (1932).
Les moments locaux s’alignent sur des distances mésoscopiques (intermédiaires en-
tre l’échelle atomique et l’échelle macroscopique) pour former des domaines, appelés
« domaines de Weiss », au sein desquels l’aimantation est homogène. L’alignement des
aimantations des domaines à l’échelle du matériau fait intervenir des mécanismes que
nous n’étudierons pas, mais importants pour comprendre le phénomène d’hystérésis.
L’aimantation locale trouve son origine dans les boucles de courants microscopiques
(mouvement orbital) ou dans les moments magnétiques permanents, i.e. le spin des
électrons (sauf si les moments magnétiques électroniques ont une raison de s’annuler,
219
Chapitre 10 • Transitions de phase
ils dominent très largement les moments nucléaires, d’un facteur ∼ 1000). On parle de
magnétisme localisé lorsque les électrons qui participent à l’aimantation restent local-
isés aux nœuds d’un réseau cristallin et de magnétisme itinérant lorsque les électrons
sont délocalisés (électrons de conduction, comme dans les métaux cités plus haut ; cf.
problème 12.3 page 274 qui présente un modèle simple).
Quelle est la nature de l’interaction entre moments ? On pourrait penser à l’interac-
tion dipolaire magnétique DM ∼ 0 ⋅ ∕3 entre deux moments et distants de
4
. Cependant une estimation montre que cette interaction est trop petite de plusieurs
ordres de grandeurs pour expliquer les températures critiques ∼ 1000 K : pour des
distances interatomiques on trouve DM ∼ 10−5 eV, soit 0.1 K en échelle de tempéra-
ture. L’explication pertinente fait intervenir le mécanisme d’échange, où interaction
coulombienne et principe de Pauli se combinent pour produire une interaction effective
entre les spins voisins, de la forme
4
eff = − ⋅ . (10.25)
2
Rappelons que les états propres de eff sont les états singulet (spins anti-alignés) et
triplets (spins alignés) ; voir l’annexe A du chapitre 11. Assez souvent, cette interaction
d’échange tend à aligner les spins (comme dans la règle de Hund) : dans les états triplets
(fonction d’onde symétrique en spin et antisymétrique dans l’espace) la probabilité pour
que les deux électrons soient proches spatialement est plus faible que dans l’état singulet
(fonction d’onde antisymétrique en spin et symétrique dans l’espace). L’énergie coulom-
bienne est alors plus basse si les spins sont alignés, ce qui correspond à > 0. Dans
le cas de magnétisme localisé, les mêmes ingrédients, par des mécanismes différents,
peuvent également conduire à des interactions antiferromagnétiques < 0 favorisant
l’anti-alignement des spins (le chapitre 13 de [35] donne une discussion simple des deux
cas). Puisque l’interaction effective trouve son origine dans l’interaction coulombienne,
son ordre de grandeur est ∼ 1 eV (1000 K), ce qui correspond aux températures
critiques observées.
Si les spins sont localisés aux nœuds d’un réseau cristallin indicés par , la sommation
des interactions à deux spins (10.25) conduit à l’hamiltonien de Heisenberg
4
Heisenberg = − 2 ⋅ − ⋅ , (10.26)
<
où désigne l’interaction entre les deux sites et le facteur gyromagnétique. No-
tons que correspond physiquement à l’excitation magnétique externe (usuellement
couplée aux spins par effet Zeeman, mais qui est abusivement notée et
notée ),
désignée champ magnétique par la suite. Obtenir les énergies des microétats de ce
modèle quantique est une tâche extrêmement compliquée.
220
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
Nous allons opérer une simplification drastique en ne conservant que les termes
dans le produit scalaire pour des spins-1∕2 pour lesquels = ±∕2. Nous noterons
plus simplement les variables de spins ∈ {−1, +1}. De plus nous considèrerons pour
simplifier des couplages uniformes et limités aux plus proches voisins ce qui conduit à
l’hamiltonien d’Ising pour spins
Ising = − − (10.27)
, =1
où la somme porte sur les liens , du réseau, i.e. sur les couples de sites
,
plus proches voisins. Afin de simplifier l’analyse, les constantes de couplages sont ab-
sorbées dans le champ magnétique , qui aura la dimension d’une énergie, [ ] = [] =
[énergie]. Si les hypothèses conduisant à (10.27) peuvent être justifiées dans certains
composés où les couplages entre spins sont très anisotropes, on espère surtout que le
modèle réussira à capturer la physique de la transition para-ferro décrite plus haut, ce
qui est bien le cas comme nous le verrons. En outre, d’un point de vue plus théorique,
le modèle d’Ising apparaît dans des contextes physiques extrêmement variés, qui font
intervenir des variables locales binaires : gaz sur réseau, ensembles de systèmes à deux
niveaux quantiques, alliage binaire, réseaux de neurones. . . Gardons toutefois à l’esprit
que le changement de nature du paramètre d’ordre, d’une variable vectorielle (Heisen-
berg) à une variable discrète (Ising), affecte la nature de la transition (nous discutons
une autre conséquence sur les propriétés de basse température dans le problème 13.1
page 296).
Le cas = 0 a été traité au § 1.5 du chapitre 6 avec des notations légèrement différentes.
L’hamiltonien est alors séparable et la fonction de partition se factorise en crsital =
spin
,
avec pour la fonction de partition à un spin et l’énergie libre associée
1
L’aimantation locale moyenne = , conjuguée du champ externe, vaut
spin
( , ) = − = th() , (10.29)
def
et correspond à la susceptibilité à champ nul = = 1∕ (loi de Curie).
=0
221
Chapitre 10 • Transitions de phase
Pour analyser le rôle des interactions d’un spin avec ses voisins, il est utile d’introduire
le concept de champ local. Isolons les termes faisant intervenir le spin dans (10.27) :
− − = −(loc)
avec (loc) = + . (10.30)
∈vois() ∈vois()
Si l’analyse des solutions de (10.31) va être centrale, nous devons toutefois com-
pléter l’approche de champ moyen qui ne nous a pas fourni d’hamiltonien duquel nous
pourrions tirer les propriétés thermodynamiques autres que l’aimantation locale. Nous
allons préciser l’approximation ayant consisté à négliger les fluctuations et permis de
considérer les spins indépendants. L’idée du découplage des spins revient à écrire
où une fonction, l’hamiltonien restant bien symétrique dans l’échange des variables
et . Comme ne prend que deux valeurs, une fonction linéaire ( ) = +
convient en toute généralité. Pour isoler la contribution des fluctuations = − ,
nous introduisons = + ( − ) = + dans l’interaction
dans laquelle le produit des fluctuations a été écarté. Le découplage est donc réalisé en
choisissant donc () = − 2∕2.
Nous appliquons ces considérations à (10.27). La somme sur les liens est convertie en
1
somme sur les sites à l’aide de = , où le 1∕2 évite le double comptage
,
2 =1 ∈vois()
des liens (ce qui montre en particulier qu’il y a ∕2 liens au total). Finalement Ising
222
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
stable
1
énergie libre
-1 0 1
instable
0
ferro para
stable
-1 -1 0 1
Figure 10.7
À gauche : Diagramme des solutions ( = 0) de l’équation auto-cohérente (10.31) .
Droite : L’énergie libre cm () pour différentes températures (avec un décalage arbitraire)
justifiant de la stabilité des différentes branches : pour > , la phase paramagnétique
∗ = 0 est stable, pour < , ∗ = 0 est instable et les phases ferromagnétiques ∗ 0
sont stables.
2
cm = − ( + ) . (10.34)
2
cm
=0 ⇒ = th[( + )] . (10.37)
223
Chapitre 10 • Transitions de phase
( − ∗) 2
( , , ) ≃ ( , , ∗ ) + avec 2 = >0. (10.41)
22 2
2
224
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
et en faisant l’hypothèse que est extensive (reposant sur la courte portée de l’in-
teraction), il ressort que la distribution est localement approchée par la gaussienne
2 2
P () ∼ e −(−∗ ) ∕2 . Au passage, nous obtenons une relation essentielle pour la suite :
sous ces conditions, nous pouvons alors considérer que ≃ ∗ est fixée et remplacer
partout dans les fonctions thermodynamiques par ∗ ( , ). En particulier, l’énergie
libre par spin est
1
( , ) ≃ ( , , ∗ ) ≃ cm ( , , ∗ ) . (10.42)
La discussion fait ressortir les limites de l’approche de champ moyen : au voisinage de
la température critique, nous verrons plus bas que les fluctuations divergent, =
∞. Cette observation permet d’identifier l’intervalle de température autour de où
l’approximation de champ moyen n’est pas justifiée (c’est le critère de Ginzburg, dont
la discussion dépasse le cadre de cet ouvrage).
stable
1 énergie libre
0
instable
métastable
-1 -1 0 1
Figure 10.8
À gauche : Diagramme des solutions de l’équation auto-cohérente (10.43) pour > 0. À
droite : L’énergie libre cm() pour différentes températures justifiant de la stabilité des
différentes branches.
225
Chapitre 10 • Transitions de phase
∗ 1 − 2∗
= . (10.45)
( − (1 − 2∗ ))
De même, en dérivant (10.31) par rapport à nous obtenons après simplifications :
∗ ( ∗ + )(1 − 2∗ )
= , (10.46)
1 − (1 − 2∗ )
226
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
1.5 5
0.6
FERRO
HoRh 4 B4 4
PARA
cV ( T ) / kB
FERRO PARA
1.0 0.4 3
2
0.5 0.2
Figure 10.9
À gauche : Capacité calorifique. Comparaison avec les données expérimentales tirées
de : H. R. Ott, et al., Physical Review B 25, p. 477 (1982). À droite : Entropie et
susceptibilité (par spin) en fonction de la température .
Nous analysons plus en détail les comportements des grandeurs thermodynamiques pour
→ . Revenons à la figure 10.7 et étudions l’aimantation en champ nul pour .
1
Comme ∗ → 0, nous pouvons utiliser le développement th ≃ − 3 dans (10.38),
3
. Après simplification de ∗ 0 nous trouvons
∗ 1 ∗ 3
∗ ≃ −
3
3( − )
∗ ( , 0) ≃ ± . (10.52)
→−
qui sont les asymptotes représentées sur la figure 10.7. Le comportement des solutions
et leur stabilité, bref la transition para-ferro, est très simplement interprétée par l’analyse
de « l’énergie libre » : les hypothèses → , → 0, → 0 et associées au
227
Chapitre 10 • Transitions de phase
2 4
développement limité ln ch() ≃ − permettent d’écrire
2 12
( − ) 2 4
cm() ≃ − ln 2 − + + +⋯ . (10.53)
2 12
Un tel développement est appelé développement de Landau. Cette expression ap-
prochée fait ressortir plus directement l’analyse donnée plus haut. En champ nul : pour
> , le préfacteur du terme en 2 est positif, le minimum stable est en = 0.
Ce préfacteur s’annule à puis devient négatif pour < . La fonction cm()
développe alors un double puits : = 0 devient un maximum local tandis que les deux
minima 0 sont stables. Remarquons enfin qu’il est clair que la dérivée seconde
2 cm
= ( − ) s’annule à , ce qui complète la discussion sur l’impor-
2 =0
tance des fluctuations de l’aimantation au point critique (voir page 225). En présence
d’un faible champ, le terme − décale la position du minimum vers des > 0 pour
> et lève la dégénérescence des minima pour < (cf. figure 10.8).
Le saut de capacité calorifique en champ nul, lorsque la température tend vers par
valeurs inférieures, est obtenu en combinant l’expression de l’énergie (10.47) =
1 C 3
− 2∗ , avec le comportement (10.52) : ≃ ( − ) pour . On obtient
2 2
une limite finie (− ) = 3 ∕2 (figure 10.9). Comme ( + ) = 0, la discontinuité de
capacité calorifique est donc
3
(− ) − (+ ) = (10.54)
2
La loi de Curie (10.51) présente le comportement en loi de puissance pour → +. Le
comportement pour → − est obtenu en repartant de (10.50) dans laquelle on injecte
(10.52), ce qui donne après simplifications :
1
( ) ≃ pour . (10.55)
2 ( − )
La divergence est de même nature de part et d’autre de .
Il est facile d’établir la relation générale entre la susceptibilité et les fluctuations
d’aimantation. En remarquant que l’énergie contient le terme − on obtient 2 =
1 2 ln 1 2
− = 2 2
2 2
=− , ce qui conduit à une nouvelle relation entre
2 2
fluctuations et fonction de réponse
2 = ( ) , (10.56)
228
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
Analysons les courbes d’aimantation ∗( ) à fixée (isothermes) sur la base des résul-
tats de la figure 10.8. Ces courbes sont représentées sur la figure 10.10. Commençons
par > , lorsque < 0, la solution stable est ∗ < 0 qui diminue avec le champ et
s’annule avec lui. Le minimum de l’énergie libre passe alors dans le domaine ∗ > 0
et augmente avec jusqu’à saturation. À , la courbe d’aimantation est continue à l’o-
rigine mais sa dérivée est infinie à = 0 (partie gauche de la figure 10.10). De fait, la
pente à l’origine n’est autre que ( ) calculée plus haut et qui diverge à . Discutons
le cas < : partons de < 0 en suivant la solution stable jusqu’à = 0 où l’aiman-
tation atteint une valeur non-nulle ∗ ( , 0−) < 0. On pourrait continuer de suivre cette
solution lorsque > 0 (branche en pointillés), cependant elle devient métastable (cf.
figure 10.8). La solution thermodynamiquement stable est celle qui correspond à l’autre
puits ∗ > 0. Ainsi, l’aimantation fait un saut de ∗ ( , 0−) < 0 à ∗( , 0 +) > 0.
Puisque = − , on conclut que la discontinuité correspond à une transition du
premier ordre.
Dans certaines conditions, il est possible de suivre les branches métastables. Cepen-
dant, comme celles-ci n’existent que sur un intervalle de fini autour de = 0, le
système saute nécessairement sur la branche stable pour un trop grand. En augmen-
tant puis diminuant le champ, on peut ainsi envisager des chemins formant une boucle
dans le plan (, ), appelée cycle d’hystérésis. Rappelons toutefois que le phénomène
d’hystérésis décrit ici ne concerne qu’un seul des domaines magnétiques évoqués en in-
troduction. En pratique, les courbes d’hystérésis des matériaux sont plutôt gouvernées
par la réorientation des domaines de Weiss.
1
1.0
0.5
instable
0
0.0
hystérésis
0.5
métastable
1.0
-1
1.0 0.5 0.0 0.5 1.0
0
Figure 10.10
À gauche : Courbes d’aimantation ( ) pour trois températures caractéristiques. Pour
< , les lignes pointillées sont les solutions métastables, les lignes claires sont celles
instables et la zone grisée la construction de Maxwell. À droite : Isotherme critique.
229
Chapitre 10 • Transitions de phase
Si nous reconsidérons l’hamiltonien d’Ising (10.27), nous pouvons observer qu’il pos-
sède une symétrie dite de renversement des spins en l’absence de champ externe. Cette
symétrie de parité P ∶ → − laisse invariant le terme d’interaction mais pas le terme
de champ. Comme P2 = 1, on parle de symétrie ℤ2 en référence aux valeurs propres ±1
de P. L’aimantation locale change naturellement de signe → − sous l’action de P.
Ainsi, l’hamiltonien de champ moyen (10.34) est aussi invariant sous P lorsque = 0.
L’ensemble de ses solutions est lui aussi invariant (cf. figure 10.7).
Cependant, l’existence de l’état ferromagnétique pour < , démontrée expéri-
mentalement, montre que le système se trouve dans une des solutions ∗ 0. Puisque
une solution n’est pas invariante sous P (la parité relie une solution à l’autre), on dira
que la symétrie est « spontanément brisée » dans la phase ferromagnétique. Le fait que
des solutions particulières (et non l’ensemble des solutions) brisent la symétrie d’un
problème est un phénomène courant en physique. On peut penser à l’exemple classique
du flambage d’une tige déformable que l’on comprime par ses deux extrémités : la tige
se tord dans un plan, brisant la symétrie de révolution autour de l’axe initial de la tige.
−1
nécessairement paire, P (−) = P () d’où = d P () = 0. Ce résultat
est exact, il ne repose que sur la symétrie de l’hamiltonien. Comment comprendre alors
230
2 Transition paramagnétique-ferromagnétique
l’existence d’un état d’aimantation non-nulle ? La raison est que le système n’explore
plus toutes les configurations accessibles et reste piégé dans l’espace des configurations
telles que 𝓁 ≃ +∗ (ou −∗). On parle de brisure d’ergodicité. La structure en
double puits de la figure 10.7 permet de comprendre l’origine du piégeage : à = 0,
les deux états pour = ∗ > 0 et = −∗ < 0 ont la même probabilité, ce
qui est lié à la propriété = 0. Cependant, une fois que le système a choisi un
des puits, seule une fluctuation thermique lui permet d’aller vers l’autre puits, ce qui
l’oblige à passer par l’état intermédiaire instable = 0 très peu probable. Finalement,
le retournement de l’aimantation, qui restaurerait l’ergodicité, se produit avec une prob-
abilité P ( = 0)∕P (∗) ∼ e− ( (0)− (∗)) contrôlée par la différence d’énergie libre
(0) − ( ∗) > 0 extensive (∼ ).
La manière dont le système choisit une solution en pratique, est liée à son histoire
et à des perturbations extérieures, comme une petite fluctuation > 0 (ou < 0) du
champ extérieur. Cette sensibilité aux perturbations extérieures pour < est liée à
la non-analyticité des fonctions thermodynamiques discutées ci-dessous.
qui traduit l’extrême sensibilité aux perturbations extérieures à = 0. Or, pour fini,
def 1
l’aimantation 𝔪 ( , ) = − ( , , ) doit être continue en = 0 car
est une fonction analytique de , puisque est une somme finie de termes exponen-
tiels. Nous avons de plus justifié que 𝔪 ( , = 0) = 0 au paragraphe précédent (en
supposant l’ergodicité, ce que l’on fait ici). Par conséquent,
231
Chapitre 10 • Transitions de phase
qui est en apparente contradiction avec (10.58). Le fait que plus le système est grand, plus
il est sensible aux perturbations du champ (en dessous de ), suggère que la situation
physique correspond à inverser l’ordre des limites :
lim lim 𝔪 ( , ) 0 . (10.60)
→0 + →∞
3 Universalité
3.1 Analogies entre les transitions liquide-gaz et para-ferro
Prenant du recul sur les § 1 et 2, nous voyons apparaître de profondes analogies en-
tre les deux transitions étudiées. Par exemple, les courbes d’aimantation ( ) de la
figure 10.10, tournées de 90o , sont tout à fait similaires aux isothermes ( ) de la tran-
sition liquide-gaz de la figure 10.1. De même, l’équivalent du diagramme de Clapeyron
de la figure 10.1 serait pour le modèle d’Ising une droite de coexistence dans le plan
(, ) le long de l’axe = 0 et se terminant à . Les couples (, ) et ( , ) jouent
donc des rôles identiques. Pour la transition liquide-gaz, le paramètre d’ordre est la den-
sité , car c’est ce qui distingue en premier lieu les phases liquide et gaz, ou bien le
volume par particule = 1∕, conjugué au « champ » . Dans le § 1.5, nous avons
considéré les écarts au point critique, = − , et = − , afin que le paramètre
d’ordre s’annule en ce point. L’analogie entre les deux transitions a toutefois des limites
car il n’y a pas de symétrie brisée clairement identifiée pour la transition liquide-gaz.
232
3 Universalité
M ( T )/ M 0
0.6 champ moyen
0.5
solution 0.4
d’Onsager (2D)
0.2
0 0
0 50 100 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
Température ( K ) T /T c
Figure 10.11
À gauche : Paramètre d’ordre pour un composé antiferromagnétique stratifié (bidimen-
sionnel) ; la courbe continue est le résultat exact dû à Onsager ; données tirées de :
H. Ikeda & K. Hirakawa, Solid State Communication 14, p. 529 (1974). À droite : Com-
posé ferromagnétique (tridimensionnel) avec interactions à longue portée ; la courbe
continue est le résultat de champ moyen discuté dans le chapitre. Données tirées de :
H. R. Ott, et al. , Physical Review B 25, p. 477 (1982).
Tableau 10.2
def
Exposants critiques. = ( − )∕ . Les résultats obtenus pour le modèle d’Ising 3D
sont tirés de A. Pelissetto & E. Vicari, Physics Report 368, p. 549 (2002).
233
Chapitre 10 • Transitions de phase
Si ces exposants sont comparés aux résultats expérimentaux (cf. figure 10.11 et le
tableau 10.3), on constate en effet un remarquable accord entre théorie et expérience
d’une part, mais surtout entre exposants associés aux deux transitions.
Tableau 10.3
Exposants critiques obtenus expérimentalement pour les transitions liquide-gaz et para-
def
ferromagnétique (classe d’universalité d’Ising 3D). = ( − )∕ mesure l’écart au point
critique. Données expérimentales tirées de : H. W. Blöte, E. Luijten & J. R. Heringa,
Journal of Physics A 28, p. 6289 (1995).
liquide-gaz para-ferro
Capacité CO2 FeF 2
calorifique ( ) ∼
−
= 0.111(1) ( ) ∼ −
= 0.11(3)
Paramètre densité CO2 aimantation FeF 2
d’ordre ( ) − ∼ (−) = 0.324(2) ( , 0) ∼ (−) = 0.325(2)
Suscep- Compressibilité Xe Susceptibilité FeF 2
tibilité ( ) ∼ − = 1. 246(10) ( ) ∼ − = 1.25(1)
234
Les points clés
235
Entraînez-vous
Exercice 10.2 Le modèle d’Ising antiferromagnétique
Nous considérons le cas d’un réseau hypercubique
:
= + − (10.62)
,
où > 0, i.e. une interaction favorisant l’anti-alignement des spins. On admet que la phase
ordonnée à = = 0 correspond à l’ordre de Néel : les spins prennent des valeurs alternées
+1 et −1. Autrement dit, si nous divisons le réseau hypercubique en deux sous réseaux im-
briqués, notés et , l’aimantation prend une valeur constante sur chacun des sous-réseaux,
= +1 et = −1 (ou l’inverse). L’aimantation moyenne = 1 ( + ) est nulle mais il
2
1
existe un ordre caractérisé par la valeur de l’aimantation alternée stag = 2 ( − ) = 1 (ou
−1). Cette dernière joue donc le rôle de paramètre d’ordre dans la phase anti-ferromagnétique.
1/ En décomposant la somme sur les sites sur les deux sous réseaux = + ,
∈ ∈
donner l’expression de l’hamiltonien de champ moyen cm analogue à (10.34). Il sera com-
mode pour la suite d’introduire deux champs indépendants et sur chacun deux sous
réseaux.
2/ Calculer l’énergie libre associée à l’hamiltonien de champ moyen cm . Déduire deux
équations auto-cohérentes permettant de déterminer et .
3/ On admet que = −. Déduire une équation pour stag . Comparer au cas ferromagné-
tique. Résoudre cette équation graphiquement lorsque = 0. Identifier la température critique
. Analyser stag dans les limites et .
Exercice 10.3 La méthode variationnelle
À l’instar de la méthode variationnelle en mécanique quantique, on peut fonder l’approche
de champ moyen sur un principe variationnel, l’ansatz se faisant sur l’hamiltonien et non sur
la fonction d’onde. Il est par exemple naturel de choisir un ansatz 0 qui soit séparable pour
pouvoir effectuer les calculs plus facilement. Les paramètres de 0 sont ensuite à optimiser
selon un critère que nous définissons maintenant.
1/ Inégalité de Bogoliubov.– Partant de l’inégalité de convexité e ⩾ e pour une variable
aléatoire , montrer que l’énergie libre associée à un hamiltonien satisfait l’inégalité
⩽ 0 + − 0 0 (10.63)
où ⋯0 est la moyenne canonique par rapport à l’hamiltonien 0. Cette inégalité de Bogoli-
ubov montre que les paramètres variationnels doivent être choisis afin de minimiser le membre
def
de droite var = 0 + − 0 0.
2/ Hamiltonien d’Ising.– Nous souhaitons approximer l’hamiltonien
d’Ising ferromagné-
tique (10.27). Proposons l’hamiltonien d’essai 0 = −0 .
a/ Quelle est la valeur de l’aimantation moyenne par site associée à 0 ?
b/ Calculer − 0 puis déterminer var (0 ).
c/ Obtenir la valeur optimale de 0 puis montrer que satisfait à une équation auto-cohérente.
Comparer à celle obtenue dans le cours.
236
Chapitre 11
Statistiques quantiques
237
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
de température
def 22∕3
∗ = . (11.1)
À fixée, la transition entre les deux régimes se produit pour une densité ∗ ≃ 1∕Λ3 ,
ce que l’on peut résumer sur le diagramme ci-dessous :
0 T* T
quantique classique
n n = Λ−3
* T
= −1∕3 Λ . (11.4)
238
1 Particules indiscernables : fermions et bosons
Nous constatons qu’il s’agit en effet d’une approximation faible densité/haute tempéra-
ture, i.e. de gaz dilué : la distance typique entre particules doit être plus grande que la
longueur thermique. Inversement, si la température est abaissée, toutes choses égales
par ailleurs, les effets des corrélations quantiques se font sentir lorsque la distance en-
tre particules approche la longueur thermique. La distribution
de Maxwell montre que
l’incertitude dans l’espace des impulsions est Δ ∼ . Nous déduisons que l’in-
certitude dans l’espace est, en utilisant l’inégalité de Heisenberg, Δ ∼ ∕Δ ∼ Λ .
Autrement dit, il semble1 que la longueur thermique s’interprète comme la largeur du
paquet d’onde décrivant un atome, ce que nous représentons schématiquement sur la
figure 11.1.
ΛT n −1/3
Figure 11.1
Chaque atome peut être décrit par un paquet d’onde de largeur Λ . Dans la limite diluée
(classique) les paquets d’onde ne se recouvrent pas, il n’y a peu de corrélations quan-
tiques. Dans la limite opposée (quantique) le recouvrement des paquets d’onde conduit
à l’apparition de corrélations quantiques.
1. L’argument entretient une légère confusion car la longueur thermique Λ caractérise la largeur de
la distribution de Maxwell qui est une probabilité, i.e. caractérise un mélange statistique, et non une
fonction d’onde dans l’espace des impulsions.
239
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
Structure des états quantiques. Notons { } une base des états individuels
(ou états à une particule) de l’espace de Hilbert à une particule. Nous pouvons
construire les états de particules discernables, ou états non symétrisés, par pro-
duit tensoriel de ces états individuels : disc = 1 ∶ 1 2 ∶ 2 ⋯
∶ = 1 ∶ 1 ; 2 ∶ 2 ; … ; ∶ . La notation ∶ signifie la ie particule
est dans l’état et la dernière égalité est une simplification de la notation du pro-
duit tensoriel. Si nous permutons les deux premières particules, nous obtenons l’état
1 ∶ 2; 2 ∶ 1; … ; ∶ .
Prenons le cas de deux bosons dans deux états individuels différents = ou .
L’état bosonique peut être construit en symétrisant2 les deux états discernables selon
1
, bosons = 1 ∶ ; 2 ∶ + 1 ∶ ; 2 ∶ (11.5)
2
qui est bien invariant sous l’échange des particules. Là où il y avait deux états dis-
tincts pour les particules discernables il n’en reste plus qu’un pour les bosons. Si
les particules sont dans le même état individuel = , nous aurons naturellement
, bosons = 1 ∶ ; 2 ∶ qui est déjà symétrique sous l’échange. La procédure se
généralise à particules : on obtient un état à particules invariant sous les échanges
à deux particules. Les états « grégaires » de la forme , … , bosons, où tout les bosons
s’accumulent dans le même état sont autorisés.
La logique est la même dans le cas des fermions, si ce n’est que les états doivent être
antisymétriques, c’est-à-dire que la fonction d’onde prend un facteur −1 lorsque deux
particules sont échangées. Reprenons l’exemple des deux états et
1
, fermions = 1 ∶ ; 2 ∶ − 1 ∶ ; 2 ∶ . (11.6)
2
Il n’est en revanche pas possible d’écrire un état antisymétrique avec les fermions dans
le même état. C’est le principe de Pauli : deux fermions ne peuvent occuper le même
état individuel.
Il est courant de représenter les microétats des systèmes à particules par des
diagrammes montrant l’occupation des différents niveaux d’énergie (figure 11.2).
240
1 Particules indiscernables : fermions et bosons
Ces diagrammes illustrent le problème du comptage des états pour de petits systèmes.
Ils éludent cependant le fait que les états symétrisés sont des superpositions quantiques
d’états non symétrisés et un état individuel est occupé par toutes les particules à la fois.
C’est l’intrication qui entraîne des corrélations entre particules : même en l’absence
d’interaction, elles ne sont plus indépendantes. Le principe de Pauli l’illustre simple-
ment : si une particule occupe un état individuel, les autres ne peuvent y accéder, ce qui
peut s’interpréter comme une « force » d’exclusion effective.
Les règles de construction des états quantiques induites par le postulat de symétrisa-
tion sont importantes pour la physique statistique car elles impactent le dénombrement
des microétats. Alors que l’état non symétrisé (particules discernables) requiert de
spécifier l’état individuel de chaque particule, ce qui correspond à se donner une
liste ordonnée d’états individuels, 1 ∶ 1 ; 2 ∶ 2 ; … ; ∶ , définir l’état symétrisé
(particules indiscernables) demande moins d’information : seule importe l’occupa-
tion des états individuels pour caractériser les microétats, occupation encodée dans
les facteurs d’occupation définis plus bas.
2 1 1 2
1 2 1 2
0 0 0
6 0 1 1
0 0 0
0 0 0
2 1 1
1 1 1
1 1 1
0 0 0
3 1 1
1 1 1
1 1 1
1 1 1
241
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
Dans le cas discernable, il y a bien factorisation. Pour les bosons, pas de factorisation
et le résultat diffère de la formule (6.43) correspondant à l’approximation de Maxwell-
Boltzmann MB = ∕ !. Notons également que le poids relatif des microétats où les
bosons s’accumulent sur le même état augmente, par rapport au cas discernable. Enfin,
pour les fermions la différence est encore plus frappante.
242
1 Particules indiscernables : fermions et bosons
ue
P
s iq
as
fermions
cl
?
bosons
n
n*
Figure 11.3 – Allure attendue pour les équations d’états des gaz parfaits quantiques. La
déviation à la loi 𝒑 = 𝒏𝒌𝑩 𝑻 est due aux corrélations quantiques.
𝓁 { } (11.8)
Il est important de rappeler que l’indice parcourt les états individuels et non les par-
ticules. Pour des bosons dont le nombre est fixé à , peut prendre les valeurs de 0 à
(situation canonique), et si ce nombre n’est pas fixé alors = 0, 1, 2, … , ∞ (situa-
tion grand-canonique). Pour des fermions, le principe de Pauli impose = 0 ou 1. Le
nombre total de particules dans un microétat 𝓁 ainsi décrit est donné par la formule
𝓁 = , (11.9)
où la somme porte sur l’ensemble des états individuels et non sur les particules.
Enfin, en l’absence d’interactions entre particules, et nous ferons cette hypothèse
dans toute la suite, les particules occupant l’état d’énergie contribuent à hauteur
243
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
Remarque. En présence d’interaction, les états symétrisés ne sont plus états propres
de l’hamiltonien en général et il est nécessaire de connaître les énergies propres à
particules. Cela dépasse le niveau du cours et ne sera pas abordé dans cet ouvrage.
244
2 Les statistiques de Fermi-Dirac et Bose-Einstein
Ξ= avec = e− ( −) . (11.13)
La grande fonction de partition contient toute l’information sur les propriétés statis-
tiques de l’état individuel . Encore une fois, ce sont les états individuels qui peuvent
être traités de façon indépendante et non les particules qui restent corrélées. ne dépend
de l’état qu’à travers son énergie qui est supposée connue.
Ce résultat est très important : il montre que l’écriture en terme des facteurs
d’occupation et le formalisme grand canonique fournissent le « bon langage »
pour passer très directement des propriétés à une particule (le spectre des états
individuels) à la description statistique du système macroscopique.
1 − ( −)
G
() = e (11.14)
245
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
Le nombre d’occupation moyen est finalement donné par l’équivalent de (6.59) selon
G 1
= ln (11.15)
1
B = pour < 0 (11.17)
e ( −) −1
qui est appelée la distribution de Bose-Einstein. Nous verrons au chapitre 13 que la
contrainte sur est essentielle pour expliquer l’apparition du phénomène de condensa-
tion de Bose-Einstein. Une autre façon de la mémoriser est de se souvenir que B > 0,
puisque ⩾ 0. En observant (11.17), cela n’est possible que si e ( −) > 1, pour tout .
F 1
= . (11.18)
e ( −) +1
Limite diluée (classique). Nous voyons que les deux statistiques quantiques tendent
vers la même limite aux grandes énergies. En effet, s’il est possible d’avoir (0− ) 1
pour donnée, en ajustant le potentiel chimique, nous aurons pour tous les états
B F
e− ( −) 1 si bien que ≃ ≃ e− (−) 1. Dans ce cas, il n’y a plus de
différence entre les deux types de statistiques et le système est insensible aux effets du
postulat de symétrisation : c’est la limite classique, ou « diluée » en termes d’occupa-
tion des états. Cela correspond à l’approximation de Maxwell-Boltzmann. Il sera
commode d’introduire la notation
Les trois distributions sont représentées pour mêmes et sur la figure 11.4.
246
2 Les statistiques de Fermi-Dirac et Bose-Einstein
principe de Pauli
0
-6 -4 -2 0 2
Figure 11.4
Comparaison des distributions de Bose-Einstein et Fermi-Dirac avec la limite classique
de Maxwell-Boltzmann pour les mêmes température et potentiel chimique .
Remarque sur les fluctuations. D’après (11.14) et (6.66), les fluctuations du nombre
d’occupation sont déterminées par
2 B∕F
1 B∕F 1 e ( −)
Var( ) B∕F
= ln = = ( −) (11.20)
(e ∓ 1)2
Des manipulations élémentaires conduisent à l’expression intéressante
B∕F B∕F
Var( )B∕F = 1 ± (11.21)
247
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
1
B∕F = ± ln(1 ∓ e − (−) ) . (11.23)
Par linéarité de la moyenne statistique sur les expressions (11.9) et (11.10), nous avons :
B∕F B∕F
= B∕F et = B∕F , (11.24)
∞
0
( ) = d () () (11.25)
0
1
B∕F = ± d () ln(1 ∓ e− (− ) ) , (11.26)
puis
∞ ∞
0 0
B∕F B∕F B∕F
= d () ( ) et = d () B∕F () . (11.27)
248
2 Les statistiques de Fermi-Dirac et Bose-Einstein
Dans la somme multiple à gauche, est l’état occupé par la ie particule et les sommes
sont indépendantes. La formule de droite regroupe les contributions de même énergie
!
totale { } = en utilisant les nombres d’occupation . Les coefficients
!
3
sont appelés coefficients multinomiaux et leur expression se comprend en regardant
les diagrammes de la figure 11.2 : l’énergie totale est fixée par la donnée des { },
mais pour des particules discernables, plusieurs numérotations correspondent au même
{ }. En effet, si on permute les numéros des particules, cela ne change rien aux { } et
nous savons qu’il y a ! permutations possibles de particules. Cependant, lorsque
particules sont sur le même état, les ! permutations de leurs numéros
donnent le même
état et il ne faut pas les compter : nous divisons donc ! par ! d’où la formule.
249
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
Prenons maintenant le cas des bosons. Il n’y a alors plus de numéros mais un seul
!
état possible par configuration des nombres d’occupation { }. Là où il y avait
!
microétats discernables, il n’en reste
qu’un. Reprenons les formules ci-dessus en les cor-
!
rigeant « à la main » par l’inverse pour compter correctement les contributions.
!
Nous obtenons :
! − −
−
B
= e = ⋯ e 1e 2 ⋯ e −
{ }, =
!
1
Le traitement des fermions se fait en notant que comme = 0, 1, nous ne pouvons avoir
de configuration avec des occupations multiples. Pour ces configurations, le nombre de
configurations « numérotées » est exactement !. Dans la somme multiple, il reste à
introduire un terme correcteur qui interdit que deux indices et soient identiques,
ou bien, de façon équivalente, à ce qu’il y ait des > 1. Si nous introduisons une
fonction Pauli () telle que Pauli (0) = Pauli (1) = 1 et Pauli() = 0 sinon, nous pouvons
écrire
Pauli () − −
F −
= e 1e 2 ⋯e .
,⋯, !
1
Dans la limite diluée, les configurations pertinentes statistiquement seront celles telles
que Pauli( ) = 1 et F ≃ . En conclusion, nous avons justifié que dans
!
l’approximation de Maxwell-Boltzmann, B et F convergent vers une même fonc-
tion de partition notée MB et qui correspond à la règle heuristique du ! présente
4. Il est bon d’expliciter ces formules non-triviales pour quelques particules sur deux niveaux.
250
2 Les statistiques de Fermi-Dirac et Bose-Einstein
B ≃ F ≃ MB
= si 1 ∀ (11.30)
!
Retour sur l’exemple du gaz parfait classique. Avec les résultats de la section a
du chapitre 6, le calcul semiclassique donne la relation suivante entre la densité et la
fugacité :
def
= e ≃ Λ3 . (11.31)
D’autre part, la limite diluée (11.19) pour l’occupation des niveaux n’est possible avec
⩾ 0 que si e 1. Il y a donc équivalence entre le critère (11.3) et la validité de
l’approximation de Maxwell-Boltzmann :
BE FD MB
≃ ≃ ⇔ e 1 ⇔ Λ 3 1 . (11.32)
251
Les points clés
Les annexes
A Fermions de spin 1/2
Nous discutons ici le cas de deux fermions avec spin 1∕2 (cf. chapitre 11 de [35]). Il y a
deux états possibles pour le degré de liberté de spin ↑ et ↓ . Il est possible de choisir
la fonction d’onde sous la forme d’un produit Ψ = orb spin de deux fonctions
décrivant l’occupation des niveaux pour orb et l’état de spin pour spin . C’est la
fonction d’onde totale Ψ qui doit être antisymétrique : soit orb est symétrique et
spin est antisymétrique, c’est l’état singulet, de spin total tot = 0,
1 1
, singulet = 1 ∶ ; 2 ∶ + 1 ∶ ; 2 ∶ 1 ∶↑; 2 ∶↓ − 1 ∶↓; 2 ∶↑
2 2
1 1
= ; + ; ↑↓ − ↓↑ ( tot
= 0) (11.33)
2 2
où la seconde ligne est une écriture simplifiée. Soit orb est antisymétrique et spin
symétrique, c’est un des trois états triplets, de spin total tot = 1
↑↑ (tot = 1)
1 1
, triplet = ; − ; ↑↓ + ↓↑ (tot = 0) (11.34)
2 2
↓↓ (tot = −1)
252
1 Fermions de spin 1/2
Pour des états orbitaux différents ( ), nous passons donc de 4×4 = 16 états possibles
pour des particules discernables à 4 seulement pour les fermions. Dans cette situation, il
est possible de mettre deux fermions dans le même état orbital, à condition qu’ils soient
dans un état singulet tot = 0 pour satisfaire au principe de Pauli. Nous avons alors
1
, singulet = ; ↑↓ − ↓↑ . (tot
= 0) (11.35)
2
Il ne reste qu’un état possible là où il y en avait 4 pour des particules discernables.
253
Entraînez-vous
Problème 11.1 Bosons (ou fermions) dans un puits harmonique 1D
L’objet du problème est d’étudier l’effet de l’indiscernabilité (i.e. du postulat de symétrisation
de la mécanique quantique) sur les propriétés thermodynamiques d’un système simple, pour
lequel un calcul exact de la fonction de partition canonique est possible. On considère
particules se déplaçant sur une ligne et soumises à un potentiel de confinement harmonique :
21
= + 22 . (11.37)
=1
2 2
On rappelle que les états quantiques { } d’une particule dans le puits harmonique sont
indicés par un entier naturel ∈ ℕ. Le spectre des énergies est = ( + 1∕2).
B. Bosons.
1/ Décrire les états quantiques des bosons de spin nul. Quelle différence y-a-t’il dans le
labelling des états quantiques entre le cas des bosons et des particules discernables ? Cal-
culer la fonction de partition bosons . Dans quelle limite retrouve-t-on le résultat classique de
la question A ? Identifier l’échelle de température, notée ∗ , qui délimite les deux régimes
(classique/quantique). Discuter l’origine physique de la dépendance de ∗ en .
2/ Montrer que l’énergie libre est :
bosons ( , ) = + ln 1 − e −∕ . (11.38)
2 =1
C. Fermions.– Mêmes questions pour des fermions polarisés en spin (i.e . tous dans le même
état de spin). Montrer que les fonctions de partition des fermions et des bosons sont simple-
ment reliées selon fermions = bosons e− Δ0 , où Δ 0 est une constante dont on donnera
l’expression. Interpréter ce résultat.
254
Entraînez-vous
0
volume . On note () la densité d’états individuels et Φ() = d ′ ( ′ ) la densité d’états
intégrée. Dans un premier temps nous montrons que l’équation d’état du gaz parfait quantique
peut être mise sous la forme
0
)2
d Φ() (
=1± ∞ (11.39)
0
d Φ() ()
où le signe supérieur (resp. inférieur) correspond aux bosons (resp. aux fermions).
1/ Exprimer le grand potentiel pour des bosons ou des fermions, noté B∕F, comme une in-
tégrale faisant intervenir Φ() et l’occupation moyenne (). (Indication : partir de l’équation
(11.26) du cours). Justifier rapidement que la pression G est simplement proportionnelle au
grand potentiel. Donner la relation précise.
2/ En utilisant ′ () = − ()[1 ± () (+ pour les bosons et − pour les fermions), déduire
G
une représentation intégrale de faisant intervenir Φ() et ().
G
3/ Jusqu’à la fin du problème, on se place à la limite thermodynamique, i.e. → , G →
, etc. et on note la densité moyenne = ∕ . Déduire (11.39) des questions précédentes.
4/ Second coefficient du viriel.– Afin de décrire l’écart à l’équation d’état du gaz parfait
classique, on présente l’équation d’état comme un développement en puissances de la densité
(développement du viriel) = + 2 ( ) 2 + 3 ( ) 3 + ⋯. C’est un développement
utile dans la limite diluée. Nous allons nous limiter à l’étude du second coefficient du viriel,
i.e. 2 ( ).
a) Calculer explicitement Φ() (on oubliera la dégénérescence de spin pour simplifier)
b) Gaz parfait classique.– Dans la limite classique, justifier que () → MB () = e − (− ).
G
Calculer explicitement = en fonction de , et dans cette limite. Montrer que la
fugacité est donnée par
def
= e = Λ3 (classique) (11.40)
255
Chapitre 11 • Statistiques quantiques
d) Dans la limite diluée, on peut remplacer la fugacité dans le développement (11.41) par
l’expression classique (11.40). Déduire l’expression du second coefficient du viriel 2 ( ) en
fonction de Λ .
Température ( K )
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
0
B2 (T ) ( litre/mol. ) −0.5
−1.0
−1.5
−2.0
−2.5
Figure 11.6
Second coefficient du viriel de l’Hélium-4 pour des températures intermédiaires 1 K <
< 10 K. Données tirées de l’article : R. D. McCarty, J. Phys. Chem. Ref. Data 2, p. 923
(1973).
256
Chapitre 12
Fermions
Nous étudions dans ce chapitre les effets du postulat de symétrisation (i.e. du principe
de Pauli) sur la thermodynamique d’un gaz parfait de fermions libres. C’est un premier
exemple d’application des résultats du chapitre 11.
1 Introduction
1.1 La distribution de Fermi-Dirac
Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, les quantités thermodynamiques sont
gouvernées par l’occupation moyenne des états individuels qui est pour les fermions
caractérisée par la distribution de Fermi-Dirac :
F 1
() = . (12.1)
e (−) +1
Celle-ci est représentée en fonction de l’énergie sur la figure 12.1 dans différents régimes
de température pour un potentiel chimique donné. Dans la limite de température nulle
( → ∞), l’exponentielle du dénominateur va soit s’annuler lorsque < , ce qui
donne F () → 1, soit diverger lorsque > , ce qui donne F() → 0 (on notera que
F () = 1∕2 quelle que soit la température). La courbe est en forme de marche, ce qui
F
s’écrit () = H( − ). Lorsque , le saut de la marche s’élargit sur une
échelle typique donnée par mais la fonction tend toujours rapidement vers 1 et 0
lorsqu’on s’éloigne de . Enfin, rappelons que dans la limite classique , on a
F () 1 .
257
Chapitre 12 • Fermions
0.5
0
0 1 2 3 4
étudiée au chapitre 8. L’étude théorique du gaz parfait de fermions telle que présentée
dans ce chapitre remonte au principe de Pauli de 1925, à l’établissement de la loi (12.1)
par Fermi et Dirac en 1926 puis aux développements à basse température de Sommer-
feld en 1928. La réalisation expérimentale la plus naturelle d’un gaz parfait de fermions
correspond à un gaz d’atomes fermioniques neutres : on doit considérer l’atome le plus
léger possible pour maximiser l’effet des corrélations quantiques. Le meilleur candidat
est l’3He (noyau composé de deux protons et un neutron, donc un fermion), cependant
l’hélium se liquéfie dans les conditions standard, à une température comparable à celle
de l’apparition des effets quantiques (∗ ≃ 1 K). Cette situation idéale du gaz parfait de
Fermi dégénéré n’a été réalisée expérimentalement qu’en 1999, et avec des atomes de
Potassium 40 K, beaucoup plus lourds (∗ ≃ 10 −7 K) mais pour lesquels des techniques
de refroidissement très efficaces ont pu être développées.
Pour autant, l’étude du gaz de fermions dégénéré a connu un grand succès dès son
avènement, pour des situations où son applicabilité est moins directe. Dès 1926, dans
le domaine de l’astrophysique, la stabilité des naines blanches (qui correspond à la fin
de vie de certaines étoiles) fut expliquée grâce à la pression quantique résiduelle que
nous allons expliquer. Un peu plus tard, la stabilité des étoiles à neutrons est interprétée
par l’inhibition de la désintégration des neutrons par le principe de Pauli. Aujourd’hui,
d’autres états de type plasmas chargés comme ceux créés par des lasers intenses ex-
plorent les effets quantiques. Cependant, c’est dans le domaine de la matière condensée,
qui étudie la physique des solides et des liquides, que son utilisation est la plus répandue.
Tout d’abord, la physique de l’Hélium 3 dans les états fluide, superfluide ou solide se
situe dans un régime dominé par les corrélations quantiques. Ce problème fondamental
a suscité de nombreux travaux expérimentaux et théoriques, mais aussi des applica-
tions pratiques importantes : par exemple, une particularité du diagramme de phase de
l’Hélium 3 (la remontée de la ligne d’équilibre liquide-solide en allant vers les basses
températures, appelée effet Pomeranchuk) est utilisée dans les cryostats pour atteindre
de très basses températures (∼ 10 mK). Surtout, c’est le comportement des électrons
dans les cristaux qui a vu le plus d’applications, car ce sont des particules si légères
qu’elles sont profondément dans le régime quantique même à température ambiante.
Les électrons sont responsables des propriétés de conduction électrique (et en partie des
258
1 Introduction
propriétés de conduction thermique, avec les phonons) et à ce titre jouent un rôle central
dans les applications de la vie courante (électronique, capteurs, transport électrique et
conversion d’énergie,. . . ). Sans pour autant oublier les autres domaines, nous centrerons
donc ce chapitre sur l’étude des électrons dans un métal.
Un ingrédient important pour l’analyse grand canonique est la densité des états individu-
els, que nous notons (). Dans un cristal, il convient donc d’étudier les valeurs propres
de l’énergie pour une particule soumise à un potentiel périodique. Nous devrions en
2
principe déterminer le spectre des énergies de l’hamiltonien = − Δ + ions()
2
où le potentiel a la périodicité de la structure cristalline. Le problème est extrêmement
riche et pourrait donner matière à des discussions avancées dans le cadre d’un cours de
physique des solides [2, 19]. Fort heureusement, tous les détails microscopiques seront
« gommés », dans le sens où ils n’affectent que marginalement les propriétés thermo-
dynamiques du gaz d’électrons, pour des raisons que nous allons maintenant exposer et
qui reposent sur la structure de la distribution de Fermi-Dirac (figure 12.1).
À ce stade, il est inutile de connaître tous les détails des propriétés spectrales pour
un potentiel périodique, et il nous suffit de retenir les résultats déduits de l’observa-
tion suivante : l’hamiltonien est invariant sous les translations du réseau cristallin de
vecteurs = + + , ∀ (, , ) ∈ ℤ3 . Il commute donc avec les opérateurs
dont les valeurs propres prennent la forme e⋅ , avec un vecteur
de translations ( )
d’onde dont les valeurs permises sont restreintes à une région appelée zone de Brillouin.
Comme et les () commutent, ils sont diagonalisables simultanément (théorème de
Bloch, cf. chapitre 6 de [35]). Il s’ensuit que les états stationnaires sont étendus (délocal-
isés) à l’échelle du cristal. Le spectre en énergie présente typiquement une succession
de bandes en énergies ( ), où indice la bande, dont un exemple est représenté sur la
259
Chapitre 12 • Fermions
Silicium Aluminium
gap
-10 -5 0
Figure 12.2
À gauche : diagramme de bandes du Silicium (semi-conducteur), l’abscisse correspond
à un parcours selon une ligne brisée dans l’espace des , densité d’états () correspon-
dante, un gap sépare les deux bandes ( est le niveau de Fermi, tel que = à = 0).
À droite : la densité d’états de la bande de conduction de l’Aluminium (métal) est proche
de celle d’un gaz parfait (données tirées de [19]).
figure 12.2 pour le Silicium. Les bandes sont des domaines continus d’énergies accessi-
bles séparés par des gaps, i.e. des domaines en énergie vides d’états. Un point essentiel
est que l’échelle d’énergie de la largeur des bandes est celle des niveaux électroniques
de l’atome isolé, à savoir l’électron-Volt. Or, nous notons qu’à température ambiante
1 eV ≃ 12 000 K.
La structure de la distribution de Fermi-Dirac (figure 12.1) est à l’origine d’une sim-
plification drastique : elle montre que tant que (et ici ∼ eV), seuls les
états dans un voisinage du potentiel chimique (à distance au plus ∼ ) participent
à l’excitation thermique du système. Les autres électrons, à des énergies − ,
sont gelés à cause du principe de Pauli et ne participent pas aux propriétés thermo-
dynamiques. Par conséquent, seules importent des propriétés locales du spectre à une
particule, dans le voisinage de ∼ (figure 12.3). Cette observation importante nous
autorise à remplacer le problème (compliqué) d’un électron dans un potentiel périodique
par le problème (simple) d’un électron libre.
kBT kB T
simplification
électrons gelés
μ électrons électrons gelés
μ
excités
Cristal Problème libre
260
2 Gaz parfait de fermions libres dégénéré à = 0
La deuxième question que nous soulevons est celle du rôle des interactions entre élec-
trons, particules chargées et interagissant dans le vide via l’interaction coulombienne,
répulsive et de portée infinie : () = 2 ∕ où 2 = 2∕(4 0). La même force (mais
attractive) lie l’électron aux atomes si bien qu’en ordre de grandeur, elle est également
de l’ordre de l’eV et ne peut être traitée perturbativement. En présence des ions cepen-
dant, un mécanisme d’écrantage va rendre l’interaction à trés courte portée. Imaginons
qu’une charge soit introduite dans un métal, le gaz d’électrons réajuste alors sa den-
sité localement sur une longueur typique 𝓁ecr, appelée longueur d’écrantage, de sorte
que les charges positives et négatives neutralisent l’excès de charge, assurant l’électro-
neutralité. Par conséquent, à grande distance la charge globale est nulle et le potentiel
électrostatique créé par cette distribution de charge décroît extrêmement rapidement :
eff () = ( 2 ∕) e−∕𝓁 ecr . Autrement dit, l’interaction effective entre charges est à courte
portée (dans l’Argent, 𝓁ecr 1 Å), ce qui explique que les interactions sont, en général,
effectivement faibles et peuvent légitimement être négligées.
0
G 2
(0, , ) = d () = 3∕2 (12.3)
3
261
Chapitre 12 • Fermions
et
0
G 2 3 G
(0, , ) = d () = 5∕2 = (0, , ) . (12.4)
5 5
Nous avons remarqué qu’à température nulle, les fluctuations disparaissent (le gaz
fermionique est dans son état fondamental) puisque Var( ) = F (1 − F ) = 0 si
G
F = 0 ou 1 donne Var()G = 0. Il n’y a donc pas de distinction entre ou .
Nous pouvons inverser les formules grand canoniques afin d’obtenir des informations
canoniques, i.e. exprimer les grandeurs en fonction de et plutôt que et . Nous
déduisons de (12.3) une expression du potentiel chimique (canonique, donc)
def 2
C (0, ) = , où = (3 2) 2∕3 (12.5)
2
est une échelle d’énergie caractéristique du problème à et fixés, appelée l’énergie
de Fermi ; elle est uniquement fonction de la densité moyenne = ∕ , et de con-
stantes microscopiques. Du point de vue des propriétés thermodynamiques, elle est
def
donc la limite de température nulle du potentiel chimique canonique = lim ( , )
→0
Il est utile pour la suite de définir une échelle de température associée, la température
de Fermi, qui jouera un rôle dans les développements ultérieurs :
def 2
= = (3 2)2∕3 (12.6)
2
Nous avons ainsi obtenu une température caractéristique qui coïncide précisément, à
un facteur numérique près, avec la température caractéristique ∗ séparant les régimes
classique et quantique introduite au paragraphe 1.1 du chapitre 11 :
1
= (32) 2∕3 ∗ (frontière classique/quantique). (12.7)
2
262
2 Gaz parfait de fermions libres dégénéré à = 0
3
0 = (12.8)
5
désigne l’énergie fondamentale du gaz de fermions. À température nulle, l’énergie
fondamentale du gaz de fermions sature à une valeur « importante » du fait du principe de
Pauli (figure 12.6). Nous donnons plus bas deux illustrations (avec ordres de grandeur)
afin d’insister sur ce point.
b) Pression quantique à = 0
Nous pouvons relier l’énergie au grand potentiel grâce à (11.28) où = 3∕2 pour les
G
fermions libres : (0, , ) = − 23 (0, , ). En utilisant de plus que = −G , nous
def 2 G 2 G
obtenons la pression 0 = G (0, ) = 3 (0, , ) = 5
(0, , ) , que nous
pouvons réécrire comme une fonction de la densité
2 1 2
0 = = (3 2 )2∕3 5∕3 (12.9)
5 5
Dans un bon métal (Cu, Ag, etc) la densité typique d’électrons de conduction est
≃ 6 × 1028 m−3 (pour Ag), ce qui conduit à une énergie de Fermi importante,
≃ 4.8 eV. Par exemple si nous calculons la vitesse de Fermi associée à cette énergie,
1
donnée par = 2 , nous obtenons ≃ 1.2 × 10 6 m/s (la vitesse des électrons
2
de conduction dans l’argent). Enfin nous constatons que la température de Fermi est
énorme comparativement à la température ambiante : ≃ 56 000 K ! On trouve une
pression 0 ≃ 1.8 × 10 10 Pa = 180 kbar.
263
Chapitre 12 • Fermions
b) Naines blanches
0
G
( , , ) = d () ( − ; ) (12.11)
∞
0
G
( , , ) = d () ( − ; ) (12.12)
∞
0
1
( , , ) = − G( , ) = − d () ln 1 + e− (− ) . (12.13)
b) Stratégie de l’analyse
1. Sur l’article wikipedia, on trouve que les naines blanches observées sont dans les bornes :
0.17 < < 1.33 où = 2×1030 kg et 0.008 < < 0.02 où = 700 000km.
264
3 Comportement à basse température
c) Formules de Sommerfeld
Les différentes grandeurs physiques exprimées dans l’ensemble grand canonique sont
de la forme
∞
0
Φ( , , ) = d () ( − ; ) (12.15)
où () est une fonction régulière de l’énergie, cf. (12.11, 12.12, 12.13). Les développe-
ments de basse température sont effectués à l’aide de la formule2
0
def
Φ( , , ) = Φ( , , ) − Φ(0, , ) = d () ( − ; ) (12.18)
def
où (; ) = (; ) − H(−) est une fonction concentrée autour de = 0 et
décroissant exponentiellement vite sur une échelle (cf. figure 12.4). On utilise le
découplage entre échelles, i.e. que (; ) décroît « rapidement » (sur l’échelle )
La relation avec (12.17) est assurée par d () () () = (−1) ()(0).
265
Chapitre 12 • Fermions
0.5
-0.5
0 1 2 3 4
alors que () varie « lentement », ce qui permet de remplacer cette dernière par son
développement de Taylor au voisinage de = :
∞
2 ′′
−
Φ( , , ) = ′
d ( ) + () + () + ⋯ (; ) . (12.19)
2!
qui peuvent être déduites de (A.12) ; les premières sont 1 = 2 ∕12, 3 = 7 4∕120.
266
3 Comportement à basse température
G
obtenons en injectant ce développement dans l’expression de ( , , ) :
G
= ( , C ( , ), )
2 3∕2 2
2
2 3∕2
= 1 + +⋯ 1+ +⋯ (12.22)
3 8
=
3 2
2
1+( + )
+⋯=1
2 8
1.0
0.5
0.0
- 0.5
M
- 1.0 ax
we
ll-
- 1.5 Bo
ltz
- 2.0 ma
nn
- 2.5
0.0 0.5 1.0 1.5 2.0
Nous injectons (12.23) dans cette expression afin d’obtenir le développement de l’én-
C G
ergie canonique ( , , ) = ( , C( , ∕ ), ) :
2
+ ( 4 )
C 5 2
3
( , , ) = 1 + pour . (12.26)
5 12
267
Chapitre 12 • Fermions
Cette expression peut être comparée avec le résultat (classique) de haute température
C 3
≃ pour . On peut maintenant simplement dériver l’énergie
2
moyenne canonique par rapport à la température pour obtenir la capacité calorifique :3
+ ( 3)
2
= (12.28)
2
être très petit en pratique (par exemple, ∼ = 1∕200 dans l’argent à tempéra-
300
60 000
ture ambiante). Ce comportement linéaire ∼ est caractéristique des métaux et
trouve son origine dans le blocage de Pauli : à cause du principe de Pauli, seuls les
fermions d’énergies voisines de , à près, peuvent être excités, i.e. une très pe-
tite fraction des particules. Ces fermions gagnent individuellement typiquement
par rapport à la situation de température nulle. Le nombre de fermions excités étant
typiquement excites ∼ ( ) , l’énergie du gaz dépend de la température comme
( ) − (0) ∼ excites ∼ ( )( )2. En se rappelant que ∼ ( ) nous
retrouvons bien ∼ .
Ce résultat est important : il établit une connexion directe entre blocage de Pauli et
comportement linéaire de la capacité calorifique. Nous pouvons garder en mémoire que
le comportement ∝ est caractéristique de l’énergie électronique d’un métal : un
gaz de fermions libres caractérisé par un spectre d’excitation sans gap, i.e. une densité
d’états finie au niveau de Fermi.
e
qu
ssi
cla
principe
de Pauli
0 température T 0 température T
G
3. Pour bien apprécier le calcul précédent, on peut comparer la capacité calorifique à . Nous
dérivons (12.25) par rapport à la température et écrivons le résultat en fonction de et :
G
5 2
2
2 32 2
= 5∕2 + ( 3
) = = . (12.27)
5 4 2 4 2
+( 2 )
3
+ ( 3 )
5 2
2
268
3 Comportement à basse température
c) Entropie
On peut très facilement obtenir l’entropie canonique en utilisant la formule vue dans
C
la chapitre 6 : = . Puisque ∝ on a donc ≃ C (seuls les termes
linéaires en des deux quantités coïncident) :
+ ( 3 )
2
C ( , , ) = (12.29)
2
ce qui respecte le théorème de Nernst, ( → 0) = 0, (contrairement à la formule de
Sackur-Tétrode pour l’entropie du gaz classique).
Pour , la pression sature à une valeur finie → 0 (alors qu’elle s’annule avec
pour le gaz parfait classique).
Puisque ∝ 2∕3 , le développement (12.30)
est aussi un développement
valable
dans la limite de haute densité = (⋯) 1 + (⋯)
5∕3 2 −4∕3
+ ⋯ , ce qui montre que
l’isotherme présente une divergence à haute densité, ∝ , plus forte que dans le cas
5∕3
p p n 5/3
li
Pau
ue
siq
las
C
ue
n 5/3
siq
T’<T
as
T
Pauli
Cl
p0
T n=N/V
−3 −3
TF Λ T’ Λ T
269
Les points clés
270
Entraînez-vous
Problème 12.1 Métal (électrons piégés à une hétérojonction
GaAs/GaAlAs) et semimétal (graphène) en 2D
L’objet du problème est de comparer les propriétés thermodynamiques de deux systèmes bidi-
mensionnels importants en matière condensée : le gaz d’électrons 2D piégé à l’interface entre
deux semi-conducteurs et la feuille de graphène.
A. Hétérojonction GaAs/GaAlAs1− .– La technique de déposition par évaporation atom-
ique dans une chambre à vide permet de faire croître des structures cristallines couche
atomique par couche atomique et fabriquer des interfaces extrêmement régulières entre
matériaux de différentes natures. En réalisant ainsi une interface GaAs/GaAl As 1−, deux
semi-conducteurs du type III-V ayant des gaps différents, on produit un puits de potentiel à
l’interface qui peut piéger des électrons dans le plan de l’interface. À suffisamment basse tem-
pérature, le degré de liberté dans la direction transverse à l’interface est complètement gelé et
on dispose d’un gaz électronique bidimensionnel extrêmement pur.4 L’hamiltonien d’un élec-
tron piégé à l’interface est = 2 ∕(2∗) où = ( , ) est dans le plan et ∗ une masse
effective (∗ = 0.067 pour GaAs/GaAlAs). Nous supposerons les électrons confinés dans
un plan de surface .
1/ Vérifier que la densité des états individuels par unité de surface, notée 0 , est constante
en 2D.
2/ On se place dans la situation grand canonique. Exprimer le nombre d’électrons moyen en
fonction de la température et du potentiel chimique .
3/ On considère maintenant la situation où le nombre d’électrons est fixé. Déduire le poten-
tiel chimique en fonction de et de la densité = ∕. Donner l’expression de l’énergie
de Fermi . Quelle valeur obtient-on pour une densité ≃ 1015 m−2 ? Et la température de
Fermi ? Exprimer ( ) en fonction de et puis tracer la fonction. Que peut-on dire
sur la nature du gaz électronique à température ambiante = 300 K ? Et dans un cryostat à
=1K?
4/ On suppose que . Que devient ( ) ? Calculer l’énergie moyenne du gaz en fonction
de et (utiliser la formule (12.17) pour les développements de Sommerfeld). Déduire la
classique
capacité calorifique du gaz électronique. Calculer ∕ à = 1 K.
B. Graphène (feuille monoatomique de graphite).– Au milieu des années 2000, d’impor-
tants progrès ont été réalisés pour la fabrication et la manipulation de feuilles de graphène
monocouches (une couche d’atomes de carbone organisés en réseau « nid d’abeilles »). Dans
la limite de basse énergie, les états libres à un électron (ondes planes) sont caractérisés par une
4. Les meilleurs échantillons dont on dispose aujourd’hui correspondent typiquement à des densités
≃ 1000 m−2 et atteignent des mobilités = ∕∗ ≃ 500 T−1 , où est le temps de libre
parcours moyen élastique (temps typique entre deux collisions successives sur un défaut de l’inter-
face).
On peut relier la mobilité au libre parcours moyen élastique 𝓁 comme = 𝓁 ∕ 0 où
= 2 ∕ ≃ 65 nm est la longueur d’onde de Fermi et 0 = ∕ ≃ 4.1 mT.m 2 le quantum de
flux ; on obtient 𝓁 ≃ 25 m, une distance énorme à l’échelle atomique.
271
Chapitre 12 • Fermions
0 0
G G
( , ) − (0, 0) = − d (−) (; −) + d ( ) (; ) . (12.32)
0
def
( ) = ( ) − (0) = 2 ( ) = 2 d ( ) (; 0) , (12.33)
272
Entraînez-vous
A. Paramagnétisme de Pauli.– Dans cette partie nous étudions l’effet du champ magnétique
sur les moments magnétiques des électrons du gaz bidimensionnel. L’hamiltonien pour un
électron est
−
2
P = où = ( , ) . (12.35)
2∗
1/ Déterminer les contributions ±() des deux états de spin à la densité d’états.
2/ On suppose dans un premier temps et fixés. Calculer les nombres moyens d’électrons
de spin ± , notés ±.
3/ On suppose maintenant que le nombre d’électrons est fixé.
a) Déduire l’expression du potentiel chimique en fonction de = ∕0 et = où
def
= ∕(2 ) est le magnéton de Bohr. Analyser la limite de température nulle (distinguer
les cas > et < ).
b) Calculer pour = 1 T (en eV puis donner la température correspondante). Justifier
que pour un gaz d’électrons bidimensionnel (cf. problème 12.1) l’énergie de Fermi peut être
considérée comme indépendante du champ magnétique.
c) Si l’on désigne par ± le nombre d’électrons dans un état de spin ± , l’aimantation du gaz
est = (+ − − ). Déduire la susceptibilité de Pauli (pour = 0), définie comme
para
def
Pauli = lim para
→0
∕.
273
Chapitre 12 • Fermions
décrivant une particule chargée, sans spin et soumise à un champ magnétique homogène selon
. Le spectre des énergies est un spectre d’oscillateur harmonique de pulsation = ∕∗
(nous supposons > 0) :
1
= + avec = 0, 1, 2, ⋯ (12.37)
2
Chaque niveau porte une dégénérescence L proportionnelle à la surface du plan : L = .
2
Ce spectre est appelé le spectre de Landau (cf. chapitre 16 de [35]).
1/ Donner l’expression du grand potentiel d’un ensemble de fermions en terme du spectre des
énergies individuelles { }. Appliquer la formule au spectre de Landau.
2/ La formule d’Euler-MacLaurin permettant d’approximer une somme par une intégrale :
(0) + (3 )
∞ ∞
2 ′
→0 0
(( + 1∕2)) = d () + (12.38)
=0
24
où () est une fonction qui décroît à l’infini suffisamment rapidement. Déduire le comporte-
ment pour → 0 du grand potentiel.
3/ Justifier la propriété générale
( , , , ) = ( , , , 0) − Landau 2 + (4) .
1
(12.39)
→0 2
Déduire l’expression de la susceptibilité diamagnétique Landau.
A. Gaz de fermions libres sans spin.– On considère un gaz de fermions libres à température
nulle et dans un volume (à trois dimension). Dans cette partie, on ne prend pas en compte
la dégénérescence de spin.
1/ Calculer la densité d’états par unité de volume, notée (), en fonction de , et . Déduire
l’expression de l’énergie de Fermi en fonction de la densité moyenne = ∕ .
2/ Calculer l’énergie 0 du gaz de fermions en fonction de et de l’énergie de Fermi .
def
Exprimer l’énergie par unité de volume comme une fonction de la densité, E0() = 0 ∕ .
274
Entraînez-vous
états de spin (↑ ou ↓). Dans un métal, l’interaction effective entre électrons est de très courte
portée (∼Å). La supposant locale (interaction à deux corps ∝ ( − ′ )), elle n’affecte que
les électrons de spins opposés, à cause du principe de Pauli. L’hamiltonien du gaz s’écrit :
= + d3 ↑() ↓(), où ↑, ↓() est la densité d’électrons de spin ↑, ↓ et une
cin
constante caractérisant la force de l’interaction entre électrons.
Dans le modèle de Stoner, on suppose a priori que les électrons des deux états de spin sont
def def
caractérisés par deux densités moyennes ↑ = ↑() et ↓ = ↓ () pouvant (ou non)
différer et que les deux gaz se comportent comme deux gaz libres. La densité d’énergie du gaz
est donc
1
E (↑, ↓ ) = = E0 ( ↑) + E0 (↓ ) + ↑ ↓ (12.40)
où E0() est la fonction obtenue dans la partie A.
1/ Quelle est la dimension de ? Pour caractériser l’interaction, on introduit le paramètre 𝓁,
défini par = 2(3 2)2∕3 2𝓁∕(3). Quelle est la dimension de 𝓁 ?
2/ Nous notons = ↑ + ↓ la densité électronique totale. Une différence de densités, ↑ ↓ ,
def ↑ − ↓
correspond à une aimantation, proportionnelle à la polarisation M = . Montrer que
↑ + ↓
la densité d’énergie totale s’exprime comme
3(3 2) 2∕3 2 5∕3 2
E (↑ , ↓ ) = (1 + M )5∕3 + (1 − M) 5∕3 + 1 − M 2 . (12.41)
20 4
3/ L’idée de l’approche suivie ici est que la valeur de la polarisation M n’est pas libre, mais
« choisie » par le système afin de minimiser son énergie E ( ↑, ↓ ), à fixée. Par la suite nous
supposerons que la condition M 1 est réalisée.
a/ En utilisant le développement limité
2
+ (5 ) ,
5 3 5 4
(1 + ) 5∕3 = 1 + 5 +5 − +
3 3 3 3 3 3
écrire le développement de l’énergie jusqu’à l’ordre 4 dans la polarisation : E (↑, ↓ ) ≃
2 5∕3
cste + M 2 + M 4 . On exprimera la constante en termes d’une combinaison
adimensionnée de 𝓁 et ( est une autre constante sans dimension).
b/ Montrer que la constante change de signe quand 𝓁 (i.e. l’interaction) augmente. Identifier
la valeur critique du paramètre, notée 𝓁 , correspondant au cas où = 0. Tracer l’allure de
E (↑ , ↓) en fonction de M pour 𝓁 < 𝓁 et pour 𝓁 > 𝓁 . Conclure.
c/ Montrer que la valeur critique de l’interaction (correspondant à 𝓁 ) est simplement reliée
à la densité d’états ( ) par unité de volume et par spin de la question A.1 (où est l’énergie
de Fermi pour le gaz non polarisé, de densité ).
275
Chapitre 13
Bosons
1 Introduction
Concentrons-nous sur le cas de la vibration des corps solides, dont nous rappelons
l’énergie libre (les expressions obtenues pour le gaz de photons sont identiques)
énergie du vide vide excitation des oscillateurs
Max Max
0
1
0
vib( , ) = d () + d () ln 1 − e− (13.1)
2
et l’énergie moyenne énergie d’excitation d’un oscillateur
Max
0
C
vib = vide + d () × (13.2)
e −1
# de modes
276
1 Introduction
Dans la description canonique, nous avons pris le point de vue des oscillateurs. Nous
pouvons maintenant reprendre l’analyse du problème en prenant le point de vue des ex-
citations des oscillateurs (les particules émergentes) : l’énergie de vibration du solide
est l’énergie d’un gaz de particules libres, les phonons, décrites par une relation de dis-
persion linéaire, ≃ pour → 0 (et = pour les photons). Le nombre
moyen de particules dans un état (onde plane) d’énergie = est donné par la dis-
tribution de Bose-Einstein (11.17) pour un potentiel chimique que nous fixons à zéro,
(13.4). L’énergie moyenne du gaz de particules est
énergie d’un phonon
Max
0
G 1
phonons = d () × × . (13.5)
e − 1
# d’états indiv.
# de phonons dans l’état indiv.
Comme il se doit, nous avons retrouvé le même résultat que dans la description
canonique (en masquant l’existence d’une contribution du vide).
277
Chapitre 13 • Bosons
B 1
() = pour < 0 (13.6)
e (−) −1
0
-1 0 1 2 3
Si les atomes sont en contact avec un réservoir qui fixe , il est facile de déterminer
l’évolution du nombre de bosons dans le système lorsque la température varie. Partons
des hautes températures qui correspond au régime dilué étudié dans les chapitres 5, 6 et
8. En abaissant la température ( augmente) la distribution s’écrase B () ≃ e− (− ) →
0, i.e. le système se vide de ses atomes vers le réservoir.
Dans les expériences que nous discuterons à la fin du chapitre sur la condensation
des gaz ultrafroids, ceux-ci sont confinés dans des pièges : le nombre d’atomes est
fixé (et non le potentiel chimique). Si la température est abaissée, puisque les occupa-
tions des états de hautes énergies diminuent, les occupations des états de basses énergies
doivent augmenter afin de maintenir fixé, ce qui requiert une augmentation du poten-
tiel chimique. La croissance du potentiel chimique est cependant bornée par la condition
< 0 = 0. Nous allons voir plus bas qu’il existe une température finie, appelée
température de Bose-Einstein BE , sous laquelle le potentiel chimique reste bloqué à
= 0− et corrélativement des atomes s’accumulent dans l’état fondamental en nombre
macroscopique. Ce phénomène, que nous analysons plus bas en grand détail, est appelé
« condensation de Bose-Einstein ».
278
2 Le gaz parfait de bosons libres
b) Contexte expérimental
279
Chapitre 13 • Bosons
chapitre 11, éq. (11.36). Le fondamental individuel a une énergie 𝜺𝟎 = 𝟎. Par la suite
nous considérons des bosons de spin nul pour simplifier, 𝒔 = 𝟎.
0
( )
= d avec < 0 (13.7)
e (−) − 1
def
Λ3 = Li 3∕2() où = e < 1 (13.8)
est la fugacité, = ∕ la densité moyenne, Λ = 22 ∕( ) la longueur ther-
mique et Li3∕2() la fonction adimensionnée polylogarithme définie plus généralement
par la représentation intégrale
∞
−1
∞
Γ() 0
1
def
Li() = d = . (13.9)
e ∕ − 1 =1
La représentation en série est obtenue en développant l’intégrand sous forme de série
−1
∞
géométrique, e ∕ − 1 = e −, puis en intégrant chaque terme de la série
=1
(l’inversion de la somme et de l’intégrale est autorisée ici). La fonction est bijective,
de l’intervalle [0, 1] sur [0, Li (1)]. La valeur maximale est reliée à la fonction zeta
∞
de Riemann Li (1) = − = ( ) (cf. formulaire p. 299). Pour > 1, la borne
=1
supérieure Li (1) est finie, ce qui va se révéler être une observation cruciale (du point
de vue mathématique) reliée à l’apparition du phénomène de condensation de Bose-
Einstein.
280
2 Le gaz parfait de bosons libres
pour 1
Li3∕2 () ≃ (13.10)
(3∕2) − 2 1 − pour → 1 −
Dans la limite → 1 −, l’intégrale diverge. Elle est dominée par la borne inférieure :
d
Γ(3∕2) 0 ( + 1 − )2 1− 3∕2
1 d 1
Li ′3∕2 () ≃ ∼ ∼
1−
2.5
2.0
Li3/2 (φ )
1.5 nΛT3
1.0
0.5
0.0
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
φ
Figure 13.2 – Fonction polylogarithme 𝐋𝐢𝟑∕𝟐 (𝝋).
Si l’on fixe Λ 3 ∝ ∕ 3∕2 on déduit = e ∕ . Les lignes en tirets sont les comportements
limites (13.10).
281
Chapitre 13 • Bosons
2 2 2∕3
BE = (13.11)
(3∕2)2∕3
b) Condensation
Pour < BE , l’équation (13.8) n’a plus de solution. Que se passe-t-il pour ⩽ BE ?
L’origine mathématique de ce problème
remonte à l’équation (13.7) dont l’obtention a
B
utilisé le passage d’une somme, = , à une intégrale. Or ce passage n’est justifié
que si la fonction sommée (le facteur de Bose-Einstein) varie peu à l’échelle du pas de
la somme. Mais lorsque → 0, le nombre de bosons dans l’état fondamental, que nous
noterons dorénavant
def
0( ) = 0 B , (13.13)
est beaucoup plus important que les nombres de bosons dans les états excités : en effet
si → 0− on a
1
0 ( ) = ≃− − → +∞ (13.14)
e − − 1 →0
(si est fixé, 0 ne diverge pas mais est limité par ). Le passage de la somme à
l’intégrale n’est alors plus justifié (figure 13.3). Cette observation conduit à l’idée de
singulariser le premier terme de la somme :
B
= 0( ) + . (13.15)
(0)
282
2 Le gaz parfait de bosons libres
macroscopique
contribution
du fondamental
B
nλ T > TBE T <TBE
ελ ελ
Figure 13.3 – Passage de la somme à l’intégrale.
Le nombre de bosons est donné par la somme des aires des rectangles (les facteurs
d’occupation). Pour > BE , la somme est bien approximée par l’intégrale sous la
courbe. Au-dessous de la température BE , l’occupation de l’état fondamental est beau-
coup plus grande que les occupations des états excités et la somme des occupations
n’est pas correctement approximée par l’intégrale. Il faut singulariser la contribution du
fondamental.
1
M
0.8
ax
we
0.6 2
ll-
Bo
ltz
0.4 3
m
an
0.2
n
0.0
5
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 1.4 0 1 2 3 4
Figure 13.4
Fraction des atomes dans la phase condensée (à gauche) et potentiel chimique en
fonction de la température (à droite), obtenu par résolution de l’équation (13.8).
283
Chapitre 13 • Bosons
+
∼ BE à l’aide du comportement limite de Li 3∕2() : 1
( , ) ∝ −( − BE )2 (13.19)
Aux plus hautes températures BE , il rejoint l’expression classique (Maxwell-
Boltzmann) ( , ) ≃ −(3∕2) ln rappelé plus haut (figure 13.4).
2 2
1. Plus précisément, ( , ) ≃ − 3(3∕2)∕(4 ) BE ( − BE )∕BE .
2. Le postulat de symétrisation induit non seulement des corrélations favorisant le regroupement en
énergie, mais aussi favorisant leur regroupement dans l’espace, cf. chapitre 11 de [35], § 11.2.5.
284
2 Le gaz parfait de bosons libres
1.4
3
E(T )/Eclass (TBE )
e
iq u 1.2
ss
c la
1.0
BEC classique
CV /CVclass
2
0.8
BEC
0.6
1
0.4
T3/2
0.2
T 5/2
0 0.0
0 1 2 3 4 0 1 2 3 4
T /T BE T /TBE
Figure 13.5 – Énergie moyenne et capacité calorifique d’un gaz parfait de bosons libres.
L’énergie s’annule plus vite à basse température que celle du gaz parfait classique
= (3∕2) , notamment (BE ) ≃ 0.77BE . De même la capacité
(class)
b) Équation d’état
3∕2
= (5∕2) ( )5∕2 pour ⩽ BE (13.24)
2
2
≃1.341
285
Chapitre 13 • Bosons
pression reste constante tant qu’il y a mélange entre les deux phases. L’observation est
ici analogue : la pression du mélange gaz normal & condensat de Bose-Einstein (i.e.
fraction condensée dans l’état fondamental) est seulement fonction de la température,
indépendante de la densité. Une variation de densité à température constante ne fait que
redistribuer les atomes entre les deux phases, à pression constante.
p
n
T
p
T
TBE ~ TF ~ T* V
Nous traçons les isothermes dans un diagramme − sur la figure 13.6. Nous raison-
nons à fixée (isotherme) et faisons varier la densité , i.e. . Partons de la zone de
coexistence entre gaz et condensat (isotherme plate) : en augmentant , nous abaissons
BE ∝ 2∕3. Tant que BE > , l’isotherme est plate. Lorsque BE = , le condensat
a disparu. Une augmentation supplémentaire du volume induit une diminution de la
pression du gaz : l’isotherme doit rejoindre l’isotherme classique ≃ ∕ pour
les plus grandes valeurs de . La ligne séparant la zone de coexistence des deux phases
de la zone associée à la phase gazeuse est donnée en fixant BE = dans l’expression
3∕2
de la pression : = (5∕2) 2
( BE) 5∕2 ∝ ( ∕ ) 5∕3 .
2
c) Entropie
Nous obtenons l’entropie très directement grâce à la relation entre capacité calorifique et
entropie (canonique) = C ∕ (cf. exercice 6.1). Lorsque = est une loi
de puissance, la capacité calorifique présente un comportement analogue = ,
i.e. = . D’où
3∕2
5 (5∕2)
( ) = pour ⩽ BE (13.25)
2 (3∕2) BE
≃1.283
286
3 Bosons dans un piège harmonique
Nous avons vu au chapitre 9, et rappelé dans la section 1.1, que l’annulation du poten-
tiel chimique = 0 traduit la non conservation du nombre de particules. Nous vérifions
que cette interprétation est compatible avec les résultats obtenus pour ⩽ BE . Le
−3∕2
point de départ est la simplification BE ∝ ∕ = 1. Par conséquent, toutes les
grandeurs intensives, énergie et entropie par unité de volume, chaleur spécifique, et
pression deviennent également indépendantes de la densité :
3 (5∕2)
= ∼ = (5∕2) ∼ 5∕2 , (13.27)
2 Λ3
Λ3
où Λ = 22 ∕( ). La non conservation du nombre de bosons se comprend en
remarquant que le condensat (les bosons dans le fondamental) ne contribue à aucune
grandeur thermodynamique, et joue donc le même rôle qu’un réservoir de particules
(cette image sera exploitée dans le problème 13.2).
287
Chapitre 13 • Bosons
3 2 1
= , = et A = .
2 2 2
2
L’existence d’une transition (de phase) entre une situation où toutes les occupations
sont microscopiques et une situation où un facteur d’occupation devient macroscopique
repose sur le fait que la fonction Li () atteint une valeur finie lorsque = 1 (i.e.
= 0). Plus physiquement, il faut qu’il existe une température finie ( = BE ) telle que
G
= ( , , = 0). Autrement dit
∞
0
( )
∃ finie, telle que = d . (13.31)
e − 1
288
3 Bosons dans un piège harmonique
0
( )
d <∞ ⇒ il peut y avoir condensation de BE (13.32)
Il faut bien entendu qu’il existe également une loi de conservation sur le nombre de
particules, comme pour des atomes (mais pas pour des photons ou des phonons).
Exercice 13.1
Considérons un gaz de bosons sans interaction.
a) S’il s’agit de bosons libres, dans une boîte, pour quelle dimension le phénomène
de condensation est-il possible ?
b) Même question pour des bosons dans un piège harmonique isotrope.
289
Chapitre 13 • Bosons
3.5
3.0
2.5
C V /CVclass
2.0
BEC
1.5
1.0
classique
0.5
3
T
0.0
0 1 2 3 4
T /TBE
Figure 13.7 – Capacité calorifique d’un gaz de bosons dans un piège harmonique.
où
3∕4 − 2
e 2
0() = (13.38)
est la fonction d’onde de l’état fondamental individuel pour un puits harmonique
def
isotrope. 0 a une largeur 𝓁 = ∕().
Il est utile de discuter le profil de densité du gaz, qui est mesurée dans les expériences.
À température finie on a
(; ) = 0 ( ) 0 ()2 + excites(; ) . (13.39)
À haute température, le gaz est dans le régime classique
et la contribution des bosons
excités est simplement la maxwellienne de largeur ∕(2 ) (cf. chapitre 8) :
3∕2
2 2 2
(; ) = excites(; ) ≃ e− ∕(2 ) pour BE . (13.40)
2
Pour BE , la fraction condensée domine
3∕2 − 2∕
(; 0) = 0() 2 = e pour = 0 . (13.41)
Si le modèle du gaz parfait de bosons dans le piège harmonique prédit des propriétés
thermodynamiques (énergie, capacité calorifique,...) assez proches des observations ex-
périmentales, il ne décrit toutefois pas bien les profils de densité. Or c’est l’analyse
du profil de densité qui permet d’identifier directement la transition de phase dans les
expériences ; il convient donc d’en comprendre la nature. Pour BE , le profil de
densité est étalé sur une distance beaucoup plus grande que 𝓁 et la forme du profil
290
3 Bosons dans un piège harmonique
n’est même pas gaussienne. Cela suggère qu’un ingrédient physique important a été
négligé dans la description théorique du gaz, qui est la présence des interactions entre
atomes qui sont condensés en énergie, mais aussi concentrés dans un petit volume. Nous
introduisons maintenant le modèle qui décrit avec succès les expériences.
L’interaction entre deux atomes peut être considérée comme très locale à basse én-
ergie, et peut être décrite par un potentiel d’interaction () = () relié à la fonction
de Dirac.3 Si le gaz de bosons est décrit par la fonction d’onde à corps (13.37), on
peut écrire l’énergie comme une fonctionnelle de la fonction d’onde du fondamental
2 2
( − 1)
∇ 0() + () 0() + d3 0()
3 2 4
[0 ] = d
2 2
(13.42)
où le second terme est l’énergie d’interaction : ce terme est ( − 1)∕2 fois l’énergie
d’interaction d’une paire de particules, d3 d3 ′ 0() 2 ( − ′) 0( ′ )2 . Si cette
expression de l’énergie du gaz correspond à [0] = Ψ0 Ψ 0 pour la fonction
d’onde (13.37), l’hypothèse derrière ce calcul n’est pas évidente : en présence d’in-
teraction, il est loin d’être clair que la fonction d’onde a encore une forme factorisée,
(13.37).
L’analyse utilise une méthode variationnelle pour trouver la fonction 0 qui minimise
l’énergie, sous la contrainte que le nombre de bosons [0] = d3 0 2 est fixé.
La méthode des multiplicateurs de Lagrange (annexe 4.A page 66) permet d’étudier ce
problème de minimisation sous contrainte : nous cherchons la solution de
[ 0 ] − [0 ] = 0 . (13.43)
0 ()
Le calcul de la dérivée fonctionnelle4 conduit à l’équation de Gross-Pitaevskii :
2
2
− Δ + () + 0() 0 () = 0() (13.44)
2
3. Les subtilités liées à l’interaction locale en dimension ⩾ 2 sont exposées dans le problème 10.3
de [35].
4. Dérivation fonctionnelle : Considérons un vecteur dont les composantes sont . Le développe-
ment d’une fonction de au voisinage de zéro prend la forme ( ) = (0) + (0) + ⋯. La
dérivée fonctionnelle est l’anologue du gradient, pour le développement d’une fonctionnelle dépendant
d’une fonction ( )
[] = [0] + d () [0] + ⋯
()
Pour calculer les dérivées fonctionnelles, on pourra utiliser ∕ ′ = ,′ ⟶ ()∕(′) =
( − ′ ) et les règles habituelles de la dérivation. L’une des dérivées utiles ici :
∗0()
d ′ 0 ( ′ )2 = 0 () .
291
Chapitre 13 • Bosons
pression du potentiel chimique en exploitant la condition = d3 (). Pour le
piégeage harmonique, () = (1∕2)2 2 on obtient
2∕5
15
= (2 ) 3∕5( )2∕5 , (13.46)
16 2
(l’intégrale s’exprime à l’aide de la fonction Beta d’Euler, éq. (A.8)). La densité a un
profil parabolique, et non gaussien comme (13.41),
2
15
() = 1− pour ⩽ (13.47)
83
(∕2) d 3 () 2. Le calcul est sans difficulté et fait à nouveau apparaître la fonction
292
3 Bosons dans un piège harmonique
L’énergie potentielle par atome étant pot = d 3 () () = (3∕7), on déduit
l’énergie totale par atome (rappelons que nous avons négligé l’énergie cinétique)
pot + int 5
= . (13.50)
7
N ( unit 10 4 )
12
600
0.8 8
N 0 (T ) / N
4
0.6
0
0 0.5 1.0 1.5
0.4 T / T BE( N )
100 0.2
0
−40 −20 0 20 40 0 0.5 1.0 1.5
z ( μ m) T / TBE( N )
Figure 13.8
À gauche : Profil de densité d’un gaz de 80 000 atomes de Sodium ultrafroids. Densité
d’une colonne (en # atomes par m −2). La ligne continue correspond à (13.47) et la ligne
en tirets à (13.41) . Données tirées de l’article : L. V. Hau et al, Physical Review A 58, R54
(1998). À droite : Fraction condensée d’un gaz de Rubidium en fonction de la tempéra-
ture. La ligne continue est (13.33) ( diminue au cours du refroidissement évaporatif,
comme le montre l’insert, ce dont on doit tenir compte pour calculer BE ). J. R. Ensher
et al, Physical Review Letters 77, p. 4984 (1996).
Le piège est alors retiré, le gaz diffuse quelques millisecondes dans l’espace puis on
prend une « photo » qui permet de remonter au profil de densité : figure 13.8. À haute
température, le profil thermique gaussien (13.40) est observé. Lorsque la température est
abaissée, en-dessous d’une certaine température, qu’on interprète comme la température
de Bose-Einstein, on observe une transition de phase sur le profil de densité et l’on voit
« pousser » un pic non gaussien, qu’on interprète comme l’apparition du condensat. La
figure 13.8 montre que le profil obtenu expérimentalement coïncide parfaitement avec
le profil parabolique (13.47) (la courbe en pointillés est le carré de la fonction d’onde
gaussienne (13.38) qui décrirait le gaz parfait) ; il faut souligner le contrôle remarquable
293
Chapitre 13 • Bosons
de tous les paramètres microscopiques dans les expériences, la pulsation ∼ 100 Hz,
la constante d’interaction , etc. Une fois identifiée la contribution du condensat à la
densité, on peut l’intégrer pour obtenir une mesure de la fraction condensée 0( ).
Celle-ci est représentée sur la figure 13.8. Elle est assez fidèlement expliquée par le
résultat (13.34) pour le gaz parfait (l’interaction affecte fortement la forme du profil de
densité mais peu son intégrale). La déviation entre l’expérience et le modèle du gaz
parfait est déjà plus importante sur l’énergie (figure 13.9).
E ( T ) / N k B TBE( N )
2.0
E int / NkB ( en nK )
1.5
150
ue
1.0 ssiq
cla 100
0.5
50
0 0
0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 1.4 0 1 2 3 4 5
T / TBE( N ) # d’atomes N ( unité 106 )
Figure 13.9
À gauche : Énergie en fonction de la température. Les lignes en tirets sont les prédic-
tions du modèle du gaz parfait. Figure tirée de l’article : J. R. Ensher et al, Physical Review
Letters 77, p. 4984 (1996). À droite : Énergie d’interaction dans un gaz de Sodium ultra-
froids. Figure tirée de l’article : F. Dalfovo, S. Giorgini, L. P. Pitaevskii and S. Stringari,
Review of Modern Physics 71, p. 463 (1999).
Le rôle important de l’interaction peut être mis en évidence par une analyse ex-
périmentale très fine, qui permet de mesurer l’énergie d’interaction : le comportement
(13.49) est observé (figure 13.9), ce qui valide le modèle présenté plus haut.
294
Les points clés
295
Entraînez-vous
Exercice 13.2 Discontinuité de la capacité calorifique des bosons
Nous montrons que présente une discontinuité autour de = BE lorsque l’exposant qui
contrôle la densité d’états (13.29) est > 2 (cas des bosons dans un piège harmonique par
exemple). On reprend l’analyse générale de la section 3.
1) On considère ⩾ BE.
a) Montrer que l’énergie ( ) s’exprime à l’aide de la fonction Li+1(). Analyser le régime
classique (utiliser l’expression de (13.30) pour → 0).
def
def
b) On introduit les variables sans dimension = ∕ BE et = ∕( BE ). Montrer que
(13.30) et l’énergie prennent la forme
2 ( )
−
(BE +
) − (BE)= , (13.52)
( − 1)
à comparer à (class)
= . Que devient la discontinuité si → 2 ?
Problème 13.1 Loi de Bloch (ferromagnétisme)
Un matériau ferromagnétique est caractérisé par l’existence d’une aimantation spontanée en-
dessous de la température de Curie . Le problème vise à étudier le comportement de basse
température de l’aimantation (pour ). Rappelons le comportement prédit dans le cadre
du modèle d’Ising : ( ) ≃ (0) − 2 e −2∕ , qui est caractéristique de l’existence d’un gap
dans le spectre des excitations (cf. chapitre 10). Celui-ci est directement relié à la simplification
fondamentale du modèle d’Ising qui a consisté à supposer que l’aimantation ne peut prendre
que deux valeurs +1 et −1 (le gap correspond au coût associé au retournement d’un spin).
Dans la pratique, cette hypothèse simplificatrice n’est justifiée que pour décrire des matériaux
très fortement anisotropes. En revanche, dans les matériaux isotropes, on doit tenir compte de
la nature vectorielle de l’aimantation, ce qui change complètement la nature des excitations
de basse énergie : de faibles modulations spatiales de l’aimantation (des ondes de spin) de
vecteur d’onde produisent des excitations de très basse énergie caractérisés par une relation
de dispersion quadratique à basse énergie :
2.
∝ (13.53)
→0
296
Entraînez-vous
Lorsque le problème est analysé dans un cadre quantique, les quanta associés à ces modes sont
appelés des « magnons ».5 On peut donc interpréter l’excitation du matériau en termes d’un
gaz de particules libres (les magnons). Les états quantiques à une particule sont des ondes
planes, repérées par une impulsion = , d’énergie = . Étant des quanta de modes
collectifs d’excitation, les magnons sont des bosons caractérisés par un potentiel chimique nul
magnon = 0, puisque leur nombre n’est pas contraint.
130
Gd
M (T )
120
110
Aimantation
100
90
80 Gd 4 Bi3
70
0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7
( T / Tc )3/2
Figure 13.10
Aimantation en fonction de la température pour divers matériaux (Gd et Gd4 Bi3 ).
Données tirées de F. Holtzberg et al., J. Appl. Phys. 35, p. 1033 (1964).
5. Les magnons sont analogues aux phonons décrivant les quanta d’excitation de vibration des atomes
du cristal, ou aux photons décrivant les quanta d’excitation du champ électromagnétique.
297
Chapitre 13 • Bosons
1 = ). La densité des états individuels est () = 2 ∕ 2 () 3 . On se place à la limite
thermodynamique.
1/ Pour ⩽ BE, écrire le nombre de bosons comme la somme de la contribution du condensat
0 ( ) et des bosons excités ( ). Calculer explicitement ce dernier. Justifier qu’on peut
écrire 0( BE) = 0. Retrouver l’expression de BE .
2/ Déduire l’expression de la fraction condensée 0( )∕ pour ⩽ BE.
3/ Fluctuations.– Puisque est fixé, il n’est pas clair que l’application des formules grand
canoniques pour les fluctuations soit justifiée. Nous supposerons néanmoins que c’est bien
le cas au moins pour les états excités, dont les occupations sont microscopiques (i.e. nous
supposons que le condensat joue le rôle de réservoir pour les bosons excités).
a/ Justifier que la variance du nombre de bosons excités est
∞
e
0
Var() = d ( ) . (13.55)
(e − 1) 2
298
Formulaire
0
Des intégrales du type d e− apparaissent très couramment dans les calculs.
Un changement de variable élémentaire permet de relier cette intégrale à la fonction
Gamma d’Euler, définie comme :
∞
0
def
Γ() = d −1 e − pour Re > 0 . (A.1)
Intégrales gaussiennes
L’intégrale
+∞
−∞
2
d e− = (A.4)
est simplement reliée à Γ(1∕2). Plus généralement, on rencontrera souvent des intégrales
de la forme
∞ +1
0
1
− 2 2 1 2 2 +1
d e = Γ . (A.5)
2 2
2
On calcule de deux manières l’intégrale gaussienne = ∕2 (on a ici
d e−
utilisé la séparabilité). On peut également profiter de la symétrie sphérique et écrire
∞
0
d () = d () () où () = (1) −1 est la surface de l’hyper-
sphère de rayon :
∞
0
1
d e− = (1) d −1 e − = (1) Γ(∕2) ,
2 2
(A.6)
2
299
Formulaire
300
Formulaire
Distribution de Dirac
Rappelons la formule définissant l’action de la distribution de Dirac. Soit () une
fonction continue à l’origine :
d () () = (0) , (A.13)
où l’intégrale inclut l’origine. Autrement dit () est une fonction de « poids
ℝ
d () = 1 » concentré à l’origine.
La transformée de Fourier de la distribution de Dirac est une constante ( est la
superposition d’ondes planes à toutes les fréquences) i.e.
+∞
−∞
d i
( ) = e . (A.14)
2
1
Une propriété utile : soit ∈ ℝ ∗, on a () = (). La propriété montre que la
distribution a la dimension physique inverse de son argument () = 1∕ .
Soit () une fonction ayant un ensemble de racines simples notées . On a
( − ) 1
( ()) = = ′ ( − ) . (A.15)
tq
()
′ () tq
( ) = 0 ( ) = 0
Exemple 1
Appliqué à la parabole, on obtient
1
( 2 − 20) = ( − 0) + ( + 0) (A.16)
20
pour 0 > 0. Dans la limite 0 → 0+ on déduit (2) = −1 ().
Exemple 2
(sin ) = ( − ) est un peigne de Dirac.
∈ℤ
Formule de Poisson
ℝ
Soit () une fonction définie sur ℝ et () = d () e−i sa transformée de
Fourier. La formule de Poisson est
( ) = (2) (A.17)
∈ℤ ∈ℤ
301
Formulaire
Relation de Parseval-Plancherel
Nous reformulons la formule de Poisson (A.17) avec des notations plus usuelles pour
def
la transformée de Fourier discrète. Soit () une fonction définie sur [0, ] et =
1
1
d () e −i sa transformée de Fourier, i.e. () = e i. Rap-
0
2
pelons que les vecteurs d’onde sont quantifiés en volume fini : = avec ∈ ℤ pour
des conditions aux limites périodiques. La notation « () » désigne précisément
la sommation sur les vecteurs quantifiés (). En utilisant d e i = ,0 on
∈ℤ 0
obtient facilement la relation de Parseval-Plancherel
0
d ()2 = 2 . (A.19)
0
en l’écrivant Γ( + 1) = +1
d e−() avec () = − ln . On obtient la formule
de Stirling
1
Γ( + 1) ≃ 2 +2 e− (A.20)
→∞
ln(2) + (1∕)
1
ln Γ( + 1) = ln − + (A.21)
→∞ 2
Remarquons qu’il s’agit des premiers termes d’une série asymptotique (i.e. si on pour-
suivait le développement en complétant par des termes ∕ pour > 1, la série
∞
∕ a un rayon de convergence nulle).
=1
302
Solutions
Exercice 2.1 La distance typique entre les atomes du gaz est = −1∕3 où = ∕ est la
densité moyenne. La précision sur la position des atomes doit être au moins une fraction 1∕ de
cette distance (pour au moins les distinguer), où ⩾ 1 est la précision ( = 10 veut dire qu’il y
a dix graduations à l’échelle de ). Si = 1∕3 est la taille de la boîte, une coordonnée d’un
atome doit donc être repérée sur un segment [0, ] ayant au moins ∕ graduations. Il nous faut
donc log 10(1∕3 ) = log 10 ( 1∕3 ) chiffres significatifs par atome et par coordonnée (il y en a
six : trois coordonnées d’espace et trois pour les vitesses). Le nombre de chiffres significatifs par
atome (en base 10) est donc log10 ( 1∕3) × 6. On convertit ce nombre en octets en le multipliant
par ln 10∕ ln 16. Finalement on le multiplie par le nombre d’atomes. Après simplifications on
déduit Mémoire = ln(3 )∕(2 ln 2). Q ED .
Exercice 2.2 Changement de variable avec une fonction non bijective
2
( ) = e− ∕(2) est normalisée sur ℝ pour = ∕(2) (cf. annexe 3.3). Pour obtenir
la distribution de l’énergie = 2∕(2), nous devons prendre garde à ce que la fonction n’est
pas bijective : une valeur de l’énergie est associée à deux valeurs = ± 2 de l’impul-
sion (cf. figure ci-dessous). En tenant compte de cette remarque, on écrit ( ) d = ( =
+ 2) + ( = − 2 ) d . Comme la fonction est symétrique on a simplement ( ) =
2 () (d ∕d) = 2∕ ( = 2 ), d’où finalement ( ) = ∕() e −.
Exercice 2.3 (, ) = exp − ( 2 + 2 + 2 ) est une distribution si 2 + 2 +
2 est une forme quadratique positive (ainsi est normalisable). Autrement dit il faut que
− 2 > 0.
def
La loi jointe de est 1 () = d (, ). En écrivant 2 + 2 = ( + ∕) 2 − 2 2 ∕
nous pouvons intégrer sur (c’est une intégrale gaussienne), d’où 1() ∝ exp[−( − 2∕) 2 ].
De même la loi marginale de est 2() ∝ exp[−( − 2 ∕) 2].
En général (, ) 1() 2 (), i.e. les variables ne sont pas indépendantes statistiquement.
Cependant, pour = 0 on a 1 () ∝ exp[−2 ], 2 () ∝ exp[− 2] et (, ) = 1 () 2 () :
les variables sont indépendantes.
Exercice 2.4 Nous notons le coût de l’utilisation de la machine. Le patron du casino profite
du grand nombre de joueurs et son gain est une moyenne (alors que chaque joueur est sensible
aux aléas du jeu, i.e. aux fluctuations) : le casino gagne en moyenne − par utilisation de la
machine. Il choisit donc 1.45 €< < 5 €.
303
Solutions
Exercice 2.5 Les positions de Alice et Bob sont , ∈ {−1, +1}. Dans chaque cas, la
valeur = −1 apparaît autant de fois que la valeur = +1. Puisque les évènements sont
équiprobables, on trouve = 0 (idem pour Bob, = 0).
1. Les positions sont non corrélées : Le produit des positions prend les valeurs respectives (dans
l’ordre correspondant à la figure) : = (−1)(−1), (+1)(+1), (−1)(+1) et (+1)(−1). Cha-
cune de ces contributions étant pondérée par la même probabilité 1∕4, on obtient =
= 0.
2. Positions corrélées : On a maintenant deux configurations équiprobables, d’où =
(−1)(−1) × 1∕2 + (+1)(+1) × 1∕2 = 1 > = 0.
3. Positions anti-corrélées : = (−1)(+1)×1∕2+(+1)(−1)×1∕2 = −1 < = 0.
Exercice 2.6 Les corrélations des nouvelles variables sont
(on a utilisé −1 = T). Les nouvelles variables sont gaussiennes et non corrélées Q ED .
Exercice 2.7 Des moments à la distribution
a) Connaissant les moments { } ∈ℕ, on construit ( ) à l’aide de (2.28) puis on utilise la
transformation de Laplace inverse.
b) Application au cas des moments = ! : la fonction génératrice est donnée par une série
géométrique ( ) = 1∕(1 + ). La transformation de Laplace inverse est très simple. On utilise
le théorème des résidus. Pour < 0 on referme le contour par la droite, là où la fonction est
analytique, d’où ( < 0) = 0. Pour > 0 on referme le contour de Bromwich par la gauche, ce
qui attrape la contribution du pôle simple en = −1∕ :
+i∞
d e e () −∕
−i∞
1
() = = H () Résidu , en − = H e .
2i 1 + ( + 1∕)
ℝ
T 1
𝐱−2 𝐱 T −1 𝐱
(𝐛) ∝ d 1 ⋯ d e 𝐛
se fait sans intégration, par un simple changement de variable en remarquant que 𝐱T −1 𝐱 −
2𝐛T 𝐱 = (𝐱 − 𝐛)T −1 (𝐱 − 𝐛) − 𝐛T 𝐛. On déduit
(𝐛) = exp (1∕2)𝐛T𝐛
(la valeur pour 𝐛 = 0 est fixée par la normalisation). On utilise = ( 𝐛)𝐛=0 = .
QED .
304
Solutions
(l’intégrale est triviale si est diagonale ; si elle ne l’est pas, on peut toujours faire un changement
de variables qui la diagonalise). Finalement
1
( 1 , ⋯ , ) = exp − (1∕2)𝐱T −1𝐱 .
(2) det
Le résultat est remarquable : il montre que pour des variables gaussiennes, il est possible
d’identifier la matrice des covariances directement par examen de la mesure, sans calcul
supplémentaire.
Exercice 2.11 Le calcul des moments est élémentaire (il fait apparaître la fonction Γ) :
= Γ( − )∕Γ(). Il est clair qu’ils sont divergents si ⩾ .
305
Solutions
On utilise l’intégrale donnée : on voit que la fonction caractéristique s’exprime en termes de fonc-
2
tions de Bessel ( ) = 2 ∕2∕Γ() (2 ) = ∕2 −(2 ) − (2 ) .
Γ() sin
D’après la représentation en série de donnée dans l’énoncé, le terme ∕2 −(2 ) est ana-
lytique mais le second ne l’est pas : ∕2 (2 ) ∼ + ( +1). On voit bien que ( ) est
0
densités de probabilité), cf. (2.9). L’intensité moyenne est donnée par = d ( ) = 0 .
Si l’on est à l’aise avec la distribution de Dirac, une écriture alternative plus directe est :
306
Solutions
1 1 1 4 3 2 2
Var(Σ2) = 1− 1− − 1 − . En particulier, pour 1 on trouve
1
Var(Σ2) ≃ Var( 2 ), comme on pouvait s’y attendre.
b) Les distributions de et de Σ2 sont gaussiennes dans la limite → ∞. Les deux distributions
ont une largeur ∼ 1∕ .
Exercice 2.14 Bruit de grenaille
Nous étudions le bruit du courant lié à la granularité des porteurs de charges (bruit de grenaille
découvert par Walter Schottky en 1918).
a) On peut considérer le passage des électrons comme des évènements indépendants. La distribu-
tion de la charge est donc donnée par la loi de Poisson discutée dans le chapitre : Proba{( )∕ =
( ) −
} = e .
!
b) Les cumulants de ( )∕ sont tous égaux à . Nous déduisons l’expression du courant
moyen = et des fluctuations du courant = 2 . On obtient la relation = . Deux
mesures indépendantes de et permettent donc de déduire la charge des porteurs = ∕.
307
Solutions
d () = 2 ).
308
Solutions
( 2 + 2 ) ⩽ , i.e. définit le volume d’une hypersphère de dimension 2 de rayon . On
=1
utilise (A.7), d’où
1
Φ() = (semiclassique) . (B.4)
!
Remarquons que le facteur 1∕! n’a pas ici pour origine l’indiscernabilité.
Le résultat semiclassique correspond à la limite des grands nombres quantiques, . En uti-
1 1 −1
sisant ( + )!∕! ≃ pour → ∞, on déduit ≃ ( −1)! −1 ≃ .
( − 1)!
Puisque les niveaux sont régulièrement espacés, et ( ) sont reliées simplement : ( ) ≃
1 1 −1
≃ , dont l’intégrale est précisément (B.4). Qed.
( − 1)!
Exercice 3.4 Terme de Weyl de la densité d’états et formules de trace
L’état stationnaire d’énergie = 2 (où 2 ∕(2) = 1) est une combinaison linéaire d’ondes
planes () = e i+ e −i . On compare les densités d’états pour les conditions aux limites
de Dirichlet et les conditions aux limites périodiques.
a) Conditions de Dirichlet, (0) = () = 0 : on obtient = ∕ avec ∈ ℕ ∗.
Conditions aux limites périodiques, (0) = () & ′ (0) = ′ () : on obtient = 2∕
avec ∈ ℤ (mis à part le fondamental 0 = 0, les états sont dégénérés = −).
b) Conditions de Dirichlet : la densité d’états est
∞
1
∞
Dir () = ( − 2 )
= ( − ) + ( + )
=1 2 =1
où l’on a utilisé (A.16). On applique ensuite la formule de Poisson (A.18) :
1
( − ∕) = (∕ ) exp(2i ), d’où Dir() = − ( ) +
∈ℤ ∈ℤ 2
2
∞
cos(2 ) et
=1
1 1 1
∞
ΦDir () = − + sin(2 ) . (B.5)
2 =1
Conditions périodiques : En appliquant le même raisonnement on obtient Per () = +
2
∞
cos( ) et
=1
2 1
∞
ΦPer () = + sin( ) . (B.6)
=1
Les deux expressions(B.5,B.6) sont dominées par le terme de Weyl Φ Weyl() = ∕ (le
même dans les deux cas), proportionnel au « volume ». Les expressions exactes font cependant
apparaître des corrections.
309
Solutions
2 4 6 8
Figure B.1
Densité d’états intégrée pour la particule libre avec conditions aux limites périodiques
(fonction escalier). Terme de Weyl (ligne droite en pointillés) et contribution des trois
premières orbites périodiques, i.e. la série (B.6) est tronquée après = 3.
Commentaire : Les deux densités d’états intégrées (B.5,B.6) présentent la structure d’un terme
régulier, proportionnel au « volume » , puis d’une série de termes oscillants. On a identifié
le terme dominant avec le terme de Weyl, indépendant des conditions aux limites. Les termes
oscillants, sous dominants, ont une interprétation très intéressante : l’argument des fonctions si-
nusoïdales correspond à l’action d des trajectoires périodiques classiques (les « orbites
périodiques ») : avec des conditions de Dirichlet = 2 est l’action pour un aller-retour
et la somme génèreles trajectoires associées à allers-retours, alors que pour les conditions
périodiques, = est la trajectoire qui fait un tour. Cette observation montre que non
seulement le terme de Weyl, mais aussi ces corrections quantiques ont une interprétation clas-
sique. Ce type de développement porte le nom de formule de trace. Pour le problème libre, on
obtient une représentation exacte. En général, de tels développements fournissent une approxi-
mation de la densité d’états dans le régime semiclassique. Ils sont très utilisés pour étudier les
corrections liées à la quantification du spectre (les effets « mésoscopiques »).
Exercice 4.1 On rapproche la formule de Shannon (4.15) pour la distribution continue de
l’expression d’une moyenne, éq. (2.20) : = − d () ln () = ln[1∕( )].
On peut utiliser que le logarithme est une fonction variant très lentement pour estimer l’entropie.
Une distribution « étroite », de largeur ∼ est typiquement de hauteur ∼ 1∕, d’où ≃ ln .
Exercice 4.2 Entropie de Rényi
Faisons = 1 pour simplifier. Posons = 1 + . La limite → 0 prend la forme =
ln + ( 2 ) , d’où lim = (entropie
(−1∕) ln e ln = (−1∕) ln 1 +
→1
de Gibbs-Shannon).
On utilise la méthode des multiplicateurs
de Lagrange : on introduit la fonction auxiliaire
({}) = ({ }) + 1 − , où est le paramètre de Lagrange. La condition
({ }) = 0 conduit à = cste ∀ . Pour Ω microétats, la normalisation est donc
= 1∕Ω, d’où (en ré-introduisant ) max = ln Ω Ω− = ln Ω, comme pour
1−
l’entropie de Gibbs-Shannon.
310
Solutions
de cette dernière () = −1 ( 2 − 20). On passe en coordonnées polaires : d2 (
) =
∞ ∞
0 0
2 d (2 − 20) = d ( − 20) = 1. Q ED .
() =
1
′ ( )
=
∗(Γ) − ( Γ) avec d6 Γ H − (Γ) . (B.7)
311
Solutions
• À haute température ∗ ∕, on a ↑ ≃ ↓ ≃ 1∕2. Les deux états de spin sont équiproba-
bles, i.e. l’effet de l’énergie magnétique (qui favorise ↑ ) est négligeable. Les propriétés d’un
spin sont dominées par l’agitation thermique, i.e. l’entropie.
• Le cas des faibles températures négatives, − ∗ ∕ , correspond à la situation où les
spins sont anti-alignés avec le champ avec forte probabilité ↑ 1 et ↓ ≃ 1.
Exercice 5.6 Cristal paramagnétique et vibrations atomiques
∗ ( ) ∗ ( )
a) À l’équilibre on a mag = vib > 0. La température de vibration est nécessairement positive
car l’entropie associée à la vibration est une fonction croissante de l’énergie (plus l’énergie aug-
mente, plus l’espace de phases autorisés est grand). Si au départ ∗mag() < 0, alors le cristal cède
∗ ()
forcément de l’énergie aux degrés de liberté de vibration (rappelons que mag < 0 correspond
aux énergies mag > 0 les plus élevées). On peut également analyser le problème graphiquement
et étudier l’intersection des deux fonctions mag
∗
(mag) et ∗vib( vib) avec = mag + vib fixée.
T*
E
T *(f)
T *(
vib
i)
b) Les électrons participent à la liaison chimique : ce sont des particules légères dont la dy-
namique est plus rapide que celle des ions, plusieurs milliers de fois plus lourds. Les spins
électroniques sont fortement couplés aux degrés de liberté de vibration et relaxent très vite vers
l’équilibre. À l’inverse les spins nucléaires sont assez faiblement couplés avec les autres degrés
de liberté. Le temps caractéristiques sur lequel spins nucléaires et degrés de liberté de vibration
échangent de l’énergie est de l’ordre de la minute (cf. figure 5.1) !
2) Soit 1∗ ( ) = 2∗ ( ) < 0. L’énergie du système S 1 a baissé dans les deux cas, donc il a cédé
de l’énergie. Il était initialement plus chaud.
T*
T *(f)
E
T *(
2
i)
312
Solutions
313
Solutions
3/ On utilise ∕ = 3∕(2 ) et ∕ = ∕ , d’où ∗∕ = 3∕(2 ) ′ () et
∗ ∕ = ∕ ′ (). Le rapport des deux nous donne la pression
2
∗ = . (B.10)
3
L’isentrope est la transformation à ∗ = cste, d’où 2∕3 = cste. Combinée à (B.10), nous
déduisons l’équation de l’isentrope
Une observation remarquable : (B.10,B.11) sont très généraux et s’appliquent aussi bien au
régime classique que quantique (pour des atomes).
4/ Gaz classique : On impose que 1∕ ∗ = 3∕(2 ) ′() est indépendant de , d’où
′ () ∝ 1∕, i.e. () = ln( ) où et sont deux constantes. On a retrouvé la structure
3∕2
∗ = ln + cste de la formule de Sackur-Tetrode.
Remarque : Isotherme versus isentrope. Pour les gaz parfaits, si l’équation de l’isotherme
= cste est universelle, indépendante de la nature du gaz (atomique, moléculaire, etc), elle est
limitée au régime classique. En revanche l’équation de l’isentrope 5∕3 = cste n’est valable
que pour le gaz monoatomique, cependant elle est valable aussi bien dans le régime classique
que quantique.
5/ Gaz de bosons et condensation de Bose-Einstein La condition ∗ = 0 prend la forme
∗ ∕ = 0 (en utilisant ∕ = −5∕(2 )) d’où ()−(5∕2) ′ () = 0, i.e. () = 5∕2
où est une constante. L’entropie est bien indépendante de :
On déduit ∗ = 5 ∕(3 ∗) ∝ ( ∕ ) 2∕5. Combiné avec (B.10), nous obtenons l’équation d’état
5∕2
∗ = ∗ (B.13)
2/ Fermions
a. Le nombre de manières de distribuer les fermions dans les boîtes correspond au nombre
de manières de choisir boîtes occupées et − vides : Ω = !∕ !( − )! .
∗
b. L’entropie est ∗ ≃ ln − ln −( − ) ln( − ). D’où ≃ ln ( − )∕ .
314
Solutions
c. Puisque tous les états individuels ont même énergie, l’énergie est simplement reliée au nombre
de fermions : = . D’après la question 1 : d∗ = ( − ∗ )∕ ∗ d. En identifiant les deux
expressions de d∗ nous déduisons ( − )∕ = exp ( − ∗)∕ ∗ }.
d. L’occupation moyenne d’un état individuel est F() = ∕. D’après le d, nous obtenons la
distribution de Fermi-Dirac
∗ ∗
−1
F () = e (− )∕ + 1 ∈ [0, 1] (principe de Pauli) . (B.14)
L’occupation n’est cette fois pas bornée puisque chaque état quantique peut être occupé par un
nombre arbitraire de bosons (cf. Fig 13.1).
Le résultat montre que le potentiel chimique est contraint, ∗ < , afin d’assurer la positivité
de la distribution. Pour que cette condition soit satisfaite pour tous les états individuels, elle doit
l’être pour le fondamental ∗ < 0 . Cette différence entre fermions et bosons sera à l’origine
du phénomène très intéressant de « condensation de Bose-Einstein » qui sera étudié en détail au
chapitre 13.
Problème 5.3 Gaz parfaits quantiques sur réseaux
A. Chaque particule peut occuper une des cases, les particules sont indépendantes, donc
Ωdisc(, ) = . L’entropie microcanonique est ∗disc (, ) = ln . La pression
def
microcanonique est ∗disc = ∗ ∗disc∕ = (1∕)disc
∗
∕ nous redonne l’équation d’état du
gaz parfait classique disc = en fonction de la densité moyenne = ∕ .
∗ ∗
B. Particules indiscernables.
1/ Fermions Il ne peut y avoir qu’un fermion au plus par case, d’où ΩFerm(, ) =
!∕ !( − )! . On obtient ∗Ferm(, ) ≃ ln − ln − ( − ) ln( − ) .
2/ On déduit
∗
∗Ferm = − ln(1 − ) . (B.16)
Le principe de Pauli impose ⩽ 1.
2/ Gaz de bosons En reprenant le truc du problème 5.1 on obtient ΩBos(, ) = ( + −
1)!∕ !( − 1)! (l’argument est aussi le même que dans l’exercice 3.3). D’où ∗Bos(, ) ≃
315
Solutions
( + ) ln( + ) − ln − ln . Le calcul de la pression conduit à ∗Bos =
∗
ln(1 + ∕ ), i.e.
∗
∗Bos = ln(1 + ) . (B.17)
Figure B.2
Pressions des gaz parfaits sur réseau (bosons et fermions) en fonction de la densité. La
ligne en tirets correspond au gaz parfait classique.
3/ Conclusion Dans la limite diluée 1∕, les trois équations d’état coïncident ∗Bos ≃
∗Ferm ≃ ∗disc. La probabilité d’occupation d’une cellule (d’un état individuel) est très faible
et les corrélations quantiques ne jouent pas de rôle.
Dans le régime de forte densité on observe que ∗Ferm > ∗disc : le principe de Pauli génère une
augmentation de la pression par rapport au cas classique, liée à l’interdiction pour deux fermions
d’occuper le même état individuel, i.e. une « répulsion » effective. Si le modèle du gaz sur réseau
présente une divergence logarithmique de la pression lorsque l’on s’approche de la densité max-
imale max = 1∕, nous verrons que tel n’est pas le cas pour le modèle continu qui sera étudié au
chapitre 12, qui prédit un comportement ∗Ferm ∝ 5∕3.
Dans le cas des bosons on a ∗Bos < ∗disc : en favorisant le regroupement des particules dans
un même état individuel, le postulat de symétrisation génère une diminution de la pression,
i.e. joue le même rôle qu’une « force attractive » effective. Le gaz de bosons sera étudié au
chapitre 13 où sera pris en compte l’effet de l’énergie des particules : nous découvrirons l’appari-
tion du phénomène de condensation de Bose, correspondant au regroupement des bosons dans
un unique état individuel (le fondamental). Notre modèle de gaz sur réseau ne présente pas de
phénomène de condensation car, en l’absence d’énergie tous les états sont dégénérés et il n’y a
pas de fondamental dans lequel les bosons pourraient se condenser.
Enfin, une dernière remarque : nous avons évoqué la répulsion entre fermions et l’attraction entre
bosons. Attention, il s’agit d’interaction effective induites par les corrélations quantiques puisque
nous étudions un modèle de particules sans interaction.
Problème 5.4 Force de déplétion
A. Effet du volume exclu sur la pression
1&2/ Le volume disponible pour la première molécule est = , pour la seconde est = − ,
pour la troisième ≈ −2, etc. Le nombre de microétats accessibles est proportionnel au produit
316
Solutions
des volumes accessibles : Ω ≈ − ( − 1) . En outre l’analyse a négligé l’effet de
=1
l’énergie cinétique, qui produit le facteur qui ne jouera pas de rôle par la suite.
3/ Dans la limite pour laquelle le raisonnement précédent est valable, on peut écrire
ln Ω = ln − ( − 1) + ln et linéariser le logarithme. La somme correspond à moyen-
=1
ner la fonction sur ∈ {1, ⋯ , } et fait donc intervenir la valeur de la fonction au milieu de
l’intervalle, pour = ∕2. Par conséquent ln −(−1) ≃ ln −∕2 . Finalement
=1
l’entropie microcanonique est ( , ) ≃ ln ef f avec ef f = − ∕2.
∗
4/ La pression microcanonique ∗∕ ∗ = d’où ∗ = ∗∕( − ∕2). On identifie une
densité critique = 2∕ (la densité est notée = ∕ ), d’où
∗
∗ = (B.18)
1 − ∕
qui s’interprète comme la densité de la phase compacte. Notons que cette approximation ne
décrit pas correctement les contraintes stériques entre sphères dures au voisinage de la phase
compacte. On pourra vérifier que la phase la plus compacte où les sphères s’arrangent
pour former
un réseau cubique centré correspond à une densité maximale = (8∕9 3)∕ ≃ 1.61∕.
B. Force entropique
1/ En présence de la grosse molécule, le volume accessible et donc le volume effectif ef f sont
réduits de 𝓁3 .
2/ Si la grosse molécule se trouve à une distance < de la paroi, elle ne permet pas aux « petites
molécules » de se trouver entre la paroi et la grosse molécule. Un volume supplémentaire 𝓁 2
est donc perdu pour les petites molécules. Dans ce cas ef f → − ∕2 − 𝓁 3 − 𝓁2 . Si la
grosse molécule est immobile, l’entropie microcanonique des petites molécules dépend de la
distance : ∗ ( , , ) ≃ ln − ∕2 − 𝓁3 − 𝓁2 pour < et ∗ ( , , ) ≃
ln − ∕2 − 𝓁3 pour > .
3/ L’augmentation de l’entropie est favorisée, ce qui correspond à la situation où la grosse
molécule se rapproche de la paroi. Celle-ci subit donc une force dirigée vers la paroi. L’inter-
prétation est simple : en volume, les chocs des petites molécules sur ses huit faces produisent
des forces qui s’équilibrent. Au voisinage de la paroi ( < ) le déficit des forces exercées sur la
face proche de la paroi est responsable de la force effective qui pousse la grosse molécule vers la
paroi. Cette force a une origine purement entropique.
4/ En posant ef f = − ∕2 − 𝓁 3 nous obtenons la force ≃ − H ( − ) 𝓁 2∕
ef f ,
qui décrit l’attraction de la grosse molécule par la paroi pour < .
Insistons : nous n’avons introduit aucune interaction dans le modèle (d’ailleurs il n’y avait pas
d’énergie). La force attractive est d’origine purement entropique.
317
Solutions
c. Le soluté entraîne une surpression lors de son introduction qui tend à augmenter 1. À
l’équilibre, on s’attend à 1, > 1,. Vérifions par le calcul : Δ1 = 1, − 1, = ⋯ =
1 + 1
− (avec = 1 + 2 ) puis dans la limite considérée : Δ 1 ≃ 2 . Si
+ 2
la variation de volume est faible, la concentration = ∕1, ≃ ∕1, peut s’exprimer en
1, 1 1
fonction de quantités mesurables ≃ + Δ1 .
1, 2,
Exercice 6.1 Faisons le calcul en utilisant = = − :
ln ln ln −
− = = − ln − = − ln + = = C .
318
Solutions
2
Pour la chaleur spécifique : = = + = − , d’où = = − .
2
2
Exercice 6.2 Repartons de la définition de la variance Var() = 2 − et cherchons à
exprimer le premier terme en fonction de :
1 2 − 𝓁 1 2 − 𝓁 1 2
=2 C 2
𝓁 𝓁 = 𝓁 e = e = (B.19)
𝓁
𝓁 2 𝓁
2
Or, nous avons aussi
2
2 ln 1 1 1 2 2
= = − + = − + 2 = Var( ) . (B.20)
2
2 2
Exercice 6.3 Considérons un seul moment magnétique. Les poids de Boltzmann pour cha-
cune des orientations sont ± = −± ∕. L’aimantation prend les valeurs 𝔪 = ±𝔪0. d’où
(±𝔪0 ) = 𝔪0( 𝔪 0 − −𝔪 0 )∕ = 𝔪 0 th(𝔪0 ). Pour la seconde méthode, le
C
𝔪 = ± ±
C
travail élémentaire magnétique s’écrivant − d, on en tire = − , ou 𝔪 = − pour
sh(𝔪 0)
ln 2 ch(𝔪0) = 𝔪0
ch(𝔪 0)
C
un seul moment. Le calcul donne 𝔪 = , en
accord avec le résultat précédent.
Exercice 6.4 Par définition, C = − C
ln . Avec la première forme de (6.32), il vient =
− − ∕2 − ln(1 − e−
) = ∕2 + e− ∕(1 − e−) = (1∕(e − 1) + 1∕2).
C
Avec la deuxième forme, = ln(sh(∕2)) = ∕2 × ch(∕2)∕ sh(∕2).
Exercice 6.5 Longueur thermique ultrarelativiste
Pour une particule ultrarelativiste on convertit une longueur en énergie en écrivant énergie=
∕longueur, d’où Λ ∼ ∕( ). Pour une analyse plus précise voir l’exercice 7.3.
Exercice 6.6 Considérons un fluide dont le grand potentiel est une fonction extensive des vari-
ables ( , , ). Parmi les 4 grandeurs, seules et sont extensives. La propriété d’extensivité
prend donc la forme ( , , ) = ( , , ). Dérivons cette relation par rapport à et util-
isons (6.64) : ( , , ) = ( , , ) = ( , , ) = − G ( , , ). On déduit
que la fonction () = G( , , ) = − ( , , )∕ est en fait une constante indépendante
de si bien que G ne dépend pas du volume et il reste la relation (6.65).
Exercice 6.7 les pièges sont indépendants les uns des autres. La grande fonction de partition
se factorise selon
− ( − )
Ξ= ⋯ e =1 = ⋯ e− ( − ) = e− ( − ) = .
1 1 =1 =1
Reste à calculer = e − ( −) = 1 + e ( +0) , car une particule au plus par piège.
=0,1
319
Solutions
Exercice 6.8 Pour pièges occupés parmi , les microétats correspondent à toutes les
manières de répartir atomes parmi les pièges. Par ailleurs, l’énergie d’une telle config-
uration s’écrit 𝓁 = = − 0 et reste la même pour tous les microétats de même .
−
En revenant à la définition de la fonction de partition, on peut donc écrire : = e 𝓁 =
𝓁
0
e 0
1= e puisque le nombre de microétats à donné est le nombre de combi-
𝓁
naison de parmi . Enfin, utilisons (6.57), en tenant compte que max = dans ce cas, pour
écrire
( +0 )
Ξ(, , ) = e
(, , ) = e = 1 + e ( + 0) , (B.21)
=0 =0
où nous avons reconnu un développement du binôme.
Exercice 6.9 Les résultats sur le gaz
parfait de la section a nous permettent d’écrire =
e avec = ∕Λ et Λ = ∕ 2 . En combinant ces résultats, nous obtenons
3
2 3∕2
= exp , si bien que 0 ( )∕ = e− ( +0) et que (6.68) se réécrit
2
= 1∕(0 ( )∕ + 1) qui donne le bon résultat.
𝓁 1∕−1 2𝓁 2 𝓁
Exercice 6.10 Nous avons 𝓁 = − = = , puis le passage à
C
la moyenne donne le résultat. Le théorème d’équipartition donne = tandis que
2
C = est indépendante de (voir la section a en notant que seule dépend de ). On
retrouve bien le même résultat en les combinant.
Exercice 6.11 En canonique, nous avons 𝓁C = e −𝓁() ∕ (, ), d’où
𝓁C 𝓁 C 1 C C
= − 𝓁 − 𝓁 = 𝓁 C
𝓁 + (B.22)
𝓁
𝓁C
Or, comme 𝓁C = 1 et = 0, on obtient la relation (6.84) en sommant sur 𝓁. De
𝓁
𝓁
même, dans l’ensemble microcanonique, les énergies des microétats accessibles étant les mêmes
1 ∗( 𝓁 ,)∕
= 𝓁 et en écrivant 𝓁∗ = e , on obtient
𝓁∗ 1 ∗ 𝓁 ∗ 1 ∗ ∗ 1 1 ∗ ∗
∗
= 𝓁 + 𝓁 = − + (B.23)
∗ 𝓁 𝓁 𝓁
La sommation sur 𝓁 donne dans ce cas la relation (6.85).
2
Exercice 6.12 Avec l’énergie potentielle donnée, le hamiltonien s’écrit (, ) = −
2
cos et la fonction de partition se factorise selon
d d ∞ 2
d − 2
−∞ 0
− ( cin + pot )
= e = e 2 d e cos = cinpot (B.24)
320
Solutions
2
Par une intégrale gaussienne, le premier terme vaut cin = , tandis que le second ne
s’intègre pas mais on note que, lorsque = 0, il vaut 2, le « volume » exploré par la pointe du
1
dipôle. On peut écrire, en se rappelant que = − ln :
d d
e− ( cin− cos )
= cos
d d − ( − cos )
1 1 ln
= e cin = =− .
Ce résultat est normal puisque et sont des variables conjuguées. On remarquera qu’en
revanche = 0 à cause du sin dans l’intégrale.
Exercice 6.13 On a dans ce cas une somme
de Riemann qui apparaît dans la limite
2 rot
rot = dans l’expression : posons = qui devient alors une variable continue
2
− 2 2
+∞ +∞ 2
rot −∞
2
cin = e 2 ≃ e− d = = . (B.25)
=−∞ rot
Exercice 6.14 1/ L’énergie potentielle s’écrit pot = − cos . Il vient, en prenant garde à
l’ordre des intégrales :
d ddd
= e − (cin +pot ) (B.26)
2
2 ∞ 2 ∞ d 2
d −
0 0 −∞ −∞
−
= d e cos d e 2 e 2 sin2 (B.27)
1
= 2 d e cos 2 (B.28)
0 ∕2 ∕2 sin2
4 2 42
0
1 cos
= d sin e cos = − e (B.29)
2 2 0
2 sh(∕ )
= 4 (B.30)
2 ∕
cin pot
321
Solutions
On calcule
2
8
= − ln + ln(sh(∕ )) − ln(∕ )
2
ch(∕ )
puis la dérivation conduit à = − = ( ∕ ). On trouve
sh(∕ )
les comportements ≃ pour et ≃ pour . On se convainc
3
sur les intégrales que = = 0 comme attendu par la symétrie du problème.
Exercice 6.15 1/ La probabilité élémentaire que la pointe du vecteur pointe dans une direction
dΩ sin dd
(, ) vaut d (, ) = = , rapport de la surface élémentaire autour du point et de
4 4
dd
la surface de la sphère unité. On aurait d (, ) = sur une surface plane. Ici, la courbure
de la sphère entraîne une dépendance en .
2/ On a toujours pot = − cos . En présence d’un champ externe, l’énergie potentielle va
modifier la distribution angulaire avec une probabilité proportionnelle au poids de Boltzmann
dΩ
d (, ) ∝ e−pot qui ne dépend que de . En intégrant sur , on obtient pour la densité
4
sin
de probabilité d’avoir : () = e cos avec un facteur de proportionnalité que l’on
2
0
sh()
détermine par la condition de normalisation ( )d = 1, ce qui donne = . Au
sin()e cos
final, () = .
2 sh()
0
3/ Dans cette approche, on écrit = cos( )( )d. Le calcul de l’intégrale se fait par
intégration par partie en dérivant le cos et l’on retrouve le résultat précédent.
Exercice 6.16 1/ Expression générale : = e . Pour = 1∕2, on a = e−∕2 +
=−
2
e+∕2 = 2 ch(∕2). Pour quelconque, considérons e = e ( + ) = e =
=− =0
(2+1) sh(( + 1∕2))
e − 1 ∕ e − 1 , qui donne = . On retrouve le cas = 1∕2 en notant que
sh(∕2)
sh() = 2 ch(∕2) sh( ∕2).
C
e
d d
2/ 𝔪 = = e = = − . Le calcul donne
=− =− d d
𝔪 = [ln sh(( + 1∕2)) − ln sh(∕2)] = ().
C d
d
C ( + 1) C
3/ Pour , 𝔪 ≃ . Pour , 𝔪 ≃ (aiman-
3
tation maximum). À haute température, on lit directement les valeurs de sur la courbe : elles
correspondent aux valeurs de la légende de la figure 6.6.
322
Solutions
Exercice 6.17 Nous devons introduire deux multiplicateurs de Lagrange 1 et 2 associés aux
deux contraintes et considérer la fonction auxiliaire (faisons = 1 pour alléger) ({𝓁 }) =
− 𝓁 ln 𝓁 + 1 1 − 𝓁 + 2 − 𝓁 𝓁 . Son extremum est donné par =
𝓁
𝓁 𝓁 𝓁
− ln 𝓁 − 1 − 1 − 2 𝓁 = 0 ∀ 𝓁, i.e. 𝓁 = exp − (1 + 1 + 2𝓁 ) . Le sens physique
physique des multiplicateurs n’est pas très clair : par comparaison avec l’approche plus physique
du chapitre 6, nous posons 1∕ = exp − (1 + 1 ) et identifions le second avec l’inverse de la
température, 2 = , ce qui permet de retrouver 𝓁 = (1∕) exp(−𝓁 ).
dont la limite → 1 redonne 𝓁 ∝ exp(−𝓁 ) (notons qu’il y a une part d’arbitraire, lié à
notre définition de , dans la paramétrisation 2∕1 = (1 − ) . On aurait pu prendre 2∕ 1 =
(1 − ) ( ) où ( ) est une fonction régulière t.q. (1) = 1).
1∕(−1)
b) Si le spectre est non borné supérieurement, il est clair que 𝓁 ∝ 1 + 2 𝓁 ne
1
𝓁 𝓁
va converger que si < 1. La contrainte est plus forte si l’on considère 𝓁 𝓁 < ∞ : la conver-
𝓁
∞ −1∕(1−) ∞
gence à l’infini prend la forme d ( ) 1 + 2 ∼ d −1−1∕(1−) < ∞
1
ce qui impose − 1∕(1 − ) < 0 i.e. > ∕(1 + ). Finalement il faut que ∕(1 + ) < < 1. Si
ces deux conditions ne sont pas respectées, le problème de maximisation de l’entropie de Rényi
n’a pas de solution.
323
Solutions
1 et 2 fluctuent (i.e. sont des variables internes) et sont uniquement contraints par la loi de
conservation 0 = 2 + 21 . La fonction de partition du mélange est obtenue en sommant
1(1 ) 2 (2) sur toutes les valeurs permises des variables internes :
0
0
− 1(2(0 −2 ))+2(2 )
= 1(2(0 − 2 )) 2 (2 ) = e (B.32)
2 =0 2 =0
Remarque. La fonction ( ) sera déterminée précisément plus loin, dans l’exercice 8.9
page 181.
324
Solutions
Exercice 7.2 Nous avons déterminé la position du point col ∗ ≃ exp[−∕ 6 ] → 1 −,
qui est l’extremum de () (prendre en compte les termes correctifs dans () n’apporterait
que de petites corrections à ce résultat). Au voisinage de ce point on a donc () ≃ (∗ ) +
(1∕2) ′′ ( ) ( − )2. Si varie sur l’axe réel, le point est un minimum de (), toutefois
∗ ∗ ∗
c’est un maximum si varie perpendiculairement à l’axe réel. Le terme dominant la dérivée
−3
seconde est ′′
( ∗) ≃ ( 2 ∕3) − ln ∗ > 0. Le contour passe verticalement au niveau du
point col (cf. figure), donc, localement nous pouvons paramétrer le contour comme = ∗ + i :
e( ∗)
2i 2i
d () id (1∕2) ′′ (∗ ) (i )2
Ω() = e ≃ e (∗) e ≃ ,
2 ′′
∗
( )
où nous avons admis que seul le voisinage de ∗ contribue significativement à l’intégrale sur le
contour.
φ
point col φ∗
Finalement, le facteur pré-exponentiel est donc donné par les deux contributions
1 1
e−(1∕2) ln(2∕(− ln ∗)) ≃ .
2 ′′
(∗ ) 4 3
! 3
1
Φ() = d 3 1 ⋯ d3 d31 ⋯ d3 H −
. (B.35)
=1
! 3
′ 3 3
( ) = Φ () = d 1 ⋯ d −
. (B.36)
=1
Nous ne savons pas calculer ces intégrales qui n’ont pas d’interprétation géométrique simple
comme dans le cas non relativiste.
2/ La fonction de partition canonique s’exprime comme intégrales séparables dans ℝ3 :
∞
1 −
0 ! 3
() = d () e − = d3 1 ⋯ d 3 e =1
1
= d3 e−
! 3
325
Solutions
0
8
= −3 d3 e− = 4 −3 d 2 e− = . Écrivant = ∕ 3 , on
()3
fait apparaître la longueur thermique ultrarelativiste = 2∕3∕( ) (cf. exercice 6.5
page 117). Finalement = ∕! = −3 où est une constante.
3/ On pose = 3 , d’où ( ) = −3 ⟶ ( ) = 3−1 et par intégration Φ() =
Γ(3)
3 , qui correspond à (7.41).
Γ(3 + 1)
4/ Microcanonique ∗ = ln Ω( ) avec Ω( ) = ( ) = Φ()(3∕). La différence
entre ln Ω() et ln Φ() est donc un terme ln(3∕) sous-extensif. D’après (14.22)
3
∗
(, , ) = ln +4 (B.37)
2 3
On trouve C = − = ∕ et on vérifie bien l’équivalence des ensembles.
Problème 7.1 Équivalence des ensembles (moyennes) mais inéquivalence
des fluctuations
A. Description canonique
1/ La densité de probabilité canonique dans l’espace des phases est
C(, 1 , ⋯ , ; , 1 , ⋯ , ) = e − (⋯ ;⋯) où est une norme, avec la contrainte
que ∈ ℝ+ et que les positions soient toutes dans le volume = .
2/ On commence par intégrer sur les impulsions :
∞ ∞
! Λ 3 0 Vol.= ! Λ 3 0
1 1 1 1
= d d 3
1 ⋯ d3 e− = d () e−
326
Solutions
où = 22 ∕( ) est la longueur thermique des atomes et Λ = 22 ∕( ) =
∕ celle de la paroi. On utilise (A.1), d’où
+1
= . (B.39)
3+1
Nous obtenons l’énergie libre ( , , ) = − ln ≃ − ln . Comme
→∞ 3
∕ est la pression (intensive), l’expression a les bonnes propriétés d’extensivité.
C
3/ L’énergie cinétique est quadratique : on utilise le théorème d’équipartition : cin = (3 +
C C 5 + 3
1)∕2 . On utilise = − ln avec ∝ −(5+3)∕2 d’où = .
2
C
4/ La position moyenne du piston est par définition (⋯) C(⋯) où l’on intègre
=
dans l’espace des phases, avec C(⋯) = e− . La constante de normalisation est =
1∕( ! 3+1 ). En utilisant que contient un terme pot = + on peut remplacer par
une dérivée partielle par rapport à la force conjuguée , que l’on sort de l’intégrale
=1∕
C 1
= (⋯) e − = − (⋯) e − = − ln = + . (B.40)
C
On déduit explicitement = ( + 1) ∕ .
C C C C
Plus directement : on pouvait identifier pot = − cin = ( + 1) = , qu’il suffit
de diviser par .
= , donc cette relation est l’équation d’état, = .
5/ On procède de la même manière pour la variance :
2 2
2
1 1 1 − 1 − 2 1 −
− ln = − (⋯) e = (⋯) e − (⋯) e
2 C
C C 1
qui correspond bien à 2 − = 2 .
Q ED . On déduit explicitement =− = 2
C
( + 1)( ∕ ) 2. Les fluctuations relatives sont négligeables ∕ = 1∕ + 1 ⟶ 0.
→∞
B. Analyse microcanonique
1/ Au A.3 et A.4, on a trouvé cin = (3 ∕2) et pot = . On peut interpréter dans
∗
∗ −1 ∗ 3
la première comme cin = cin ∕cin , d’où, par intégration, cin = ln cin + ⋯.
∗
2
De même pot = ln pot + ⋯.
327
Solutions
∗
C 3
= = mais ∗= <C
= (B.41)
5
L’origine de cette réduction des fluctuations est dans la contrainte sur l’énergie totale. = cin +
pot est fixée dans l’ensemble microcanonique. Une fluctuation de pot = doit donc être
compensée par une fluctuation de cin, ce qui réduit les fluctuations, par rapport à la situation de
l’ensemble canonique pour laquelle pot = et cin fluctuent indépendamment.
0
d
12 = ( ) 2 ( ( − )) (B.42)
Λ 1
où Λ = 22 ∕ paroi est la longueur d’onde thermique de la paroi (ce facteur vient du
terme d’énergie cinétique associée au mouvement de la paroi).
2/ On note 𝓁 les énergies du système 1 et Λ celles du système 2. La probabilité d’un microétat
du système 1 2 est 𝓁Λ = e − (𝓁+ Λ) ∕ 12 (loi jointe). La probabilité d’un microétat du
𝓁Λ = e −𝓁 2( tot − 𝓁 )∕12 (loi marginale).
système 1, ∀ l’état de 2 est donc 𝓁 =
3/ Nous introduisons 2 = − ln 2 , d’où 𝓁 ∝ exp − [ 𝓁 +2(tot −𝓁 )] . Lorsque 2
𝓁 = 1, on développe l’énergie libre 2( tot − 𝓁 ) ≃ 2(tot ) + 𝓁 où 2 = −2 ∕ 2.
Finalement, nous obtenons que la probabilité d’occupation d’un microétat du système 1 est (7.43)
328
Solutions
où = e− ( 𝓁+𝓁 ) est la fonction de partition du nouvel ensemble, appelé « ensemble
𝓁
isotherme-isobare » puisque température et pression sont fixées.
def
4/ L’enthalpie libre = − ln joue donc le rôle de fonction génératrice des propriétés
thermodynamiques pour le nouvel ensemble. Le volume est maintenant une variable interne
(fluctuante) dont la moyenne est donnée par
ii
= . (B.43)
Nous appliquons la formule de Gibbs-Shannon ii = − 𝓁ii ln 𝓁ii :
𝓁
ii ii
+ −
ii
= (B.44)
ii ii
qui nous rappelle la transformation de Legendre de la thermodynamique = − ii + .
Problème 7.3 Gaz 1D de particules en interaction
A. Ensemble canonique La fonction de partition canonique est
( − 1)! 0 0
1
( ) = d1 ⋯ d −1 d1 ⋯ d −1 e− , (B.45)
où la factorielle tient compte de l’indiscernabilité. Chaque intégration sur une impulsion produit
un facteur 1∕Λ . On ordonne les coordonnées des particules comme 0 < 1 < 2 < ⋯ <
−1 < . Puisqu’il y a ( − 1)! manières d’ordonner les − 1 variables muettes, on simplifie
ainsi la factorielle d’où
0 1 −2
1 (−−1 )
( ) = d1 d2 ⋯ d −1 e− . (B.46)
Λ
−1
−1
intégrale supplémentaire d e −, d’où (7.45). En introduisant les nouvelles variables
= − −1 ∈ ℝ +, l’intégrale multiple devient séparable, d’où :
( ) .
∞ ∞
0 0
d d − (()+ )
( ) = ( ) e− = e (B.47)
Λ Λ
329
Solutions
2/ La mesure est e− ( +), la dérivation par rapport à fait descendre le « volume » , d’où
ii ii
= −(1∕ ) ln . Définissant l’enthalpie libre = − ln , on déduit = ∕.
ii
3/ L’intégrale est élémentaire : () = e− ∕(Λ ). On obtient = ( + ∕), ce
ii
qu’on reécrit plus suggestivement ( − ) = , qui a la forme de l’équation d’état d’un
gaz parfait où le volume est diminué de , qui est le volume de la phase compacte. On reécrit
l’équation d’état sous la forme = ∕(1 − ) : la pression diverge au voisinage de la densité
maximale = 1∕.
Exercice 8.1 L’énergie potentielle est l’énergie potentielle de pesanteur ( ) = en
prenant l’origine au niveau du sol = 0. En notant 0 la densité du gaz au niveau du sol, on
a immédiatement() = 0 e−∕ qui fait apparaître la longueur caractéristique ∕.
Exercice 8.2 Pour le gaz parfait, 0 () = ln(Λ3 ), l’approximation s’écrit = 0 (( )) +
( ) qui s’inverse en ( ) = e( − ( ))∕ ∕Λ 3 . Pour = 0, notons 0 = e∕ ∕Λ3 la densité
du système homogène correspondant à , alors ( ) = 0 e− ( )∕ qui est le résultat obtenu
par la loi de Boltzmann.
Exercice 8.3 Le maximum de la probabilité est obtenue pour ∗ qui annule la dérivée
d() 2 3 − 2 2 ∗ 2
∝ 2 − e =0⇒ = .
d 2
330
Solutions
ln
Exercice 8.6 1/ = . Sous la dilatation → ′ = , on a → ′ = 3 et
ln ′
1 ,…, ) . D’un côté, on écrit
− ( comme
→ ′ = 3 3 3
⋯ 1 ⋯ e
′ ′
1 33−1 3
′ = ′ − ′ ⋯ 3
1 ⋯ 3
⋅ ∇ e− (1,…, )
3
ln ′ ln ′
qui, en prenant = 1 donne = 3 −
⋅ ∇ . De l’autre, =
=1
ln ′ ′ 2
ln ′ ln ′ ln
′
= 3 ′
soit en = 1, =1 = 3 . En combinant les
ln .
deux, on trouve bien = − ⋅ ∇
3
2/ Remarquons simplement que = −∇ de sorte que = ∕ + ∕ . De plus, si
= − est la force exercée par sur , on a
=
1 1 1
⋅ = ( − ) ⋅ = − ⋅ =− ( )
2 2 2
La moyenne du terme du viriel est similaire à celle sur l’énergie d’interaction, il suf-
dans le raisonnement ce qui conduit à =
fit de remplacer () par
∞
2 0
() () 4 2 puis au résultat (8.51).
Exercice 8.7 1/ On écrit = () 3 et 2 = ()( ′) 3 3 ′ puis, par
2
définition, Δ2 = 2 − 2 = ( ) ( ′ ) 3 3 ′ − () 3 et l’on regroupe
les deux termes sous la même intégrale double.
2/ Pour un fluide, ( ) = et (, ′ ) = ( = − ′ ) par isotropie. En insérant (8.43) dans
l’intégrale, il vient
∞
0
Δ2 = ( − ′ ) + 2 ( () − 1) 3 3 ′ = + 2 3 ′ ( () − 1)42 ,
et enfin (8.68) qui nous permet de conclure.
Exercice 8.8 1/ Le flux entrant par un côté vaut = ∕ d’une part, et = avec
le courant = , la densité = ∕ et l’aire = 2 d’autre part. On trouve ∕ =
2 ∕3 = 𝓁 ∕ pour une face, en simplifiant à l’aide de = 𝓁. On obtient = ≃
2 × 1019 avec = 300K et = 105Pa, 𝓁 = ≃ 10 −6m, de sorte que ∕ ≃ 10−4 . Ainsi,
le reste du fluide joue le rôle de réservoir de particules et de thermostat, le système a un grand
331
Solutions
nombre de particules mais n’en échange qu’une fraction négligeable avec le réservoir. On pourra
le considérer comme un système macroscopique dans la situation grand canonique.
2/ En combinant les relations (6.66) et (6.59), on obtient la relation.
3/ Le potentiel chimique n’étant fonction que des variables intensives, il existe une fonction F
telle que ( , , ) = F ( = ∕ , ). En dérivant par rapport à et , il vient (exactement
le même raisonnement pour la pression ) :
1 F F
= et =− 2 ⇒ =−
, , , ,
4/ On utilise la relation de Maxwell =− , pour écrire
, ,
−1
= − = − = − −
, ,
,
= − = = = 2 ,
, ,
G
,
1
de laquelle on tire (8.68). Pour le gaz parfait, = ∕ donne = − = 1∕, ce
2
2 G
qui donne G
= et G
∕ = 1∕ 1.
332
Solutions
1∕4 3∕4
∗ 4 2 1∕3
(, ) = ∝ 3∕4 1∕4
3 15
2∕2
2/ Les fluctuations peuvent être obtenues par un calcul direct 2 = (...) d 2 e − , etc.
4/ Sous vide on élimine l’effet des fluctuations thermiques liées aux interactions avec le gaz, dont
l’analyse est le principe de l’expérience.
333
Solutions
0
1/ Dans l’approximation d’un spectre continu ( → ∞), on utilise ⟶ d, d’où () =
=1
0
2/ La fonction de partition canonique quantique associée au mode de pulsation est =
1∕ 2 sh( ∕2) . On déduit l’énergie moyenne du mode () = ( ∕2) coth(∕2). Dans
la limite → 0, on retrouve l’énergie fondamentale du mode () → ∕2.
3/ L’énergie moeyenne d’excitation de la corde est () − ∕2 . Donc l’énergie d’excitation
par unité de longueur est
∞
2 ∞ d ( )2
0 0 e − 1
E ex ( ) = 0 d coth −1 = = .
2 2 6
On déduit que la chaleur spécifique par unité de longueur dépend linéairement de la température :
C ( ) = (∕3) ∕( ). Ce résultat est équivalent au comportement de la chaleur spécifique
de vibration d’un cristal (modèle de Debye), ( ) ∝ 3, avec un exposant distinct qui vient de
la différence entre les dimensionnalités des deux problèmes.
4/ Pour une corde de dimensions macroscopiques dans des conditions normales, les effets quan-
tiques sont négligeables. Rappelons que le modèle caractérisé par le spectre de fréquences propres
a toutefois des limitations liées à l’approximation faite pour écrire l’énergie élastique (notre
expression est valable pour les petites déformations, i.e. les basses fréquences).
5/ a) Un microétat correspond à la donnée de l’ensemble des couples de coordonnées normales
{, }. La probabilité canonique est C({ , }) ∝ exp − .
b) Dans le régime classique, on peut appliquer le théorème d’équipartition qui nous donne
(2∕2) 2 = ∕2, d’où 2 = ∕(2 ) ∝ 1∕ 2.
La distribution C(⋯) est un produit de gaussiennes associées aux différents modes, i.e. le
problème est séparable. Les coordonnées normales sont décorrélées : ′ = , ′ 2. À l’aide
de ce dernier résultat, nous obtenons
′
2
() 2 = ′ sin sin = 1 − . (B.48)
,′
Les fluctuations sont donc plus importantes au milieu de la corde et s’annulent sur les bords à
cause des conditions aux limites.
c) A.N.
: Pour des valeurs macroscopiques typiques = 1 m, = 10 N et = 300 K, on obtient
= (∕2)2 ≈ 0.1 Å, ce qui est complètement négligeable (par exemple si l’on s’intéresse à
une corde de piano, la tension est plus grande, ∼ 1000 N donne ≈ 10 Å). Pour la corde de
nanotubes de carbone : ≈ 0.6 Å.
334
Solutions
2( ) = − et ( ) = −1 pour > 2 . (B.49)
caractérise la répulsion de cœur dur, qui a pour effet d’augmenter la pression par rapport au
(repuls)
gaz parfait, = −1 > 0. La partie attractive du potentiel n’intervient que dans le second
coefficient, 2(attrac) = − < 0, et apporte une contribution négative à la pression, dont l’effet
se réduit lorsque la température augmente.
Commentaire : il est intéressant de remarquer que, dans la limite de basse densité, l’approxi-
mation de champ moyen reproduit le résultat exact (8.62) du chapitre 8, ce qui nous donne un
certain contrôle sur cette approximation.
Exercice 10.2 1/ Chaque spin d’un sous-réseau n’interagit qu’avec des spins de l’autre sous-
réseau de sorte que = ( + ( − ))( + ( − )) ≃ − + + , en
négligeant le produit des fluctuations ( − )( − ). Par ailleurs on reécrit la somme sur les
liens comme une somme sur les sites = = , où vois() désigne
les voisins de (on somme soit sur les sites de soit sur ceux de ). On déduit
, ∈ ∈vois( ) ∈ ∈vois( )
cm = (− + + ) − −
,
= − + + − −
2 ∈ ∈vois() ∈ ∈vois() ∈ ∈
= − − ( − ) − − ( − ) ∈ (B.50)
2 ∈ 2
avec 1= 1 = le nombre de plus proches voisins et = = ∕2.
∈vois() ∈vois()
2/ L’Hamiltonien de champ moyen est séparable et, dans chaque sous-réseau, chaque spin a
le même Hamiltonien. Ainsi, = avec = e 2 2 ch[ ( − )] et =
e 2 2 ch[ ( − )] et une énergie libre par spin cm = cm ∕ qui vaut
cm ( , ) = − − ln 4 ch[ ( − )] ch[ ( − )] (B.51)
2 2
335
Solutions
cm
On détermine les aimantations de chacun des sous-réseaux par = = − et =
cm
= − . Il vient le couple d’équations couplées :
= th[ ( − )] et = th[ ( − )] (B.52)
1
3/ Considérons = = . Le paramètre d’ordre est l’aimantation alternée stag = ( −
2
). Supposant que = − on a stag = = −, d’où
Exercice 10.3 1/ Écrivons e = e(−) e = e(−) e . Or, ∀, e ⩾ 1 + ⇒
e(−) ⩾ 1 + − = 1, soit e ⩾ e. Par définition
− − ( − ) e− 𝓁,0
= e 𝓁 = 0 e 𝓁 𝓁,0
𝓁 𝓁
0
= 0e − ( −0 ) 0 ⩾ 0 e− −0 0 (B.54)
avec 𝓁,0 les énergies de 0 et 0 = e−𝓁,0 . En utilisant = − ln et 0 =
𝓁
− ln 0 avec − ln e− −0 0 = − 0 0, on trouve l’inégalité (10.63).
2/b/ Calculons les différents termes de var . On peut utiliser le résultat du cristal paramagnétique
pour 0 ce qui donne 0 = − ln[2 ch( 0)]. Par ailleurs, − 0 = − 0 −
,
( − 0) 0. Or, 0 = et comme 0 est séparable, les spins sont indépendants donc
non-corrélés si bien que 0 = 0 = 2 . Finalement,
var ( 0) = − ln[2 ch(0 )] − ( 0 )2 − ( − 0)( 0) (B.55)
2
avec le nombre de plus proches voisins et où l’on a explicité la dépendance en 0 .
2/c/ L’extrêmalisation de (B.55) par rapport à 0 conduit à
1 dvar sh(0 ) d d
= − − (0 ) − ( − 0) + (0) (B.56)
d 0 ch(0 ) d0 d0
=th(0 )=(0 )
336
Solutions
Exercice 11.1 Le spectre des énergies à deux particules est , = + . La fonction de
partition à deux bosons s’écrit avec la contrainte ⩾ (cf. figure B.3)
1 − ( + ) 1 −2 1
B
2 () = e− ( +) = e + e = ( )2 + (2 ) .
⩾
2 , 2 2
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
...
m m m
... ... ...
... ... ...
... ... ...
... ... ...
n n n
discernables bosons fermions
Figure B.3
Représentation graphique des états quantiques pour deux particules. Les états sont
indiqués en trait gras.
Pour deux fermions, la contraintes est > . La fonction de partition s’écrit donc
1 − ( + ) 1 −2 1
2F () = e− ( + ) = e − e = ( )2 − (2 ) .
>
2 , 2 2
337
Solutions
1 2
Exercice 11.2 1/ Nous écrivons d’après (11.7) B∕F
2 () = ± =
2 23∕2
2 1
1 ± 3∕2 , où nous avons utilisé que Λ → 2Λ si → 2 . Le terme ±1∕(2 3∕2) étant
2 2
une perturbation, nous obtenons l’énergie libre
1
MB
( , , 2) = ( , , 2) − ln 1 ± ≃ MB ( , , 2) ∓ (B.57)
2
3∕2 23∕2
Δpaire
où MB( , , ) = − [ln(∕ )+1] est l’énergie libre du gaz parfait classique étudiée au
chapitre 6. Δpaire est la correction due aux corrélations quantiques, pour une paire de particules.
2/ Nous extrapolons maintenant au cas d’un gaz de particules en écrivant ( , , ) ≃
( − 1)
class( , , ) + Δpaire où nous avons multiplié Δ paire par le nombre de paires
2
du gaz = ( − 1)∕2 ≃ 2 ∕2. Nous obtenons finalement ( , , ) ≃ class( , , ) ∓
Λ3
2 . Cette expression n’est valable que dans un régime de relativement haute tempéra-
25∕2
ture car elle ignore les corrélations à > 2 particules. Nous déduisons le comportement de la
pression :
∕ Λ3
=− ≃ 1 ∓ 2−5∕2 Λ3 i.e. 2 ( ) = ∓ . (B.58)
25∕2
La correction quadratique dans la densité fait apparaître le paramètre Λ3 et a un signe opposé
dans les cas bosonique et fermionique. L’expression est en accord avec le comportement attendu
(figure 11.3).
Exercice 11.3 Par exemple, pour les bosons
ΞB = 1 + e − + 2e−2 + ⋯ (B.59)
+ (3 )
− 2
−2
− ( + )
=1+ e + e + e (B.60)
>
le terme quadratique en est construit d’une part par les termes quadratiques 2 e −2 de , et
d’autre part par les produits e− e − de termes linéaires (chaque couple apparaît une fois
dans le développement). En notant que
−2 − ( + ) − ( + )
( )2 = e +2 e → e = [( ) 2 − (2)]∕2 (B.61)
> >
et en comparant ce développement avec (B.64), nous retrouvons bien la relation pour les bosons.
Pour les fermions, c’est plus simple
e− ( +) + (3 )
ΞB = 1 + e − = 1 + e− + 2 (B.62)
>
qui redonne également le bon résultat. Ce développement permet de déterminer (, 3), etc. . . en
regardant les termes d’ordre supérieur en .
338
Solutions
Exercice 11.4 Effectuons une intégration par parties dans (11.26) en écrivant () =
1 d
() . Nous obtenons
d
1 ∞
0
1 B∕F
B∕F = − d ( ) = − . (B.63)
e ( − ) ∓ 1
2/ Dans ce cas l’expression du grand potentiel est obtenue en écrivant ln(1 ∓ e− ( − )) ≃
def
∓e− ( − ), soit MB = − e , où = e− est la fonction de partition à une par-
ticule. Cette formule illustre de façon extrême avec quelle facilité le formalisme grand canonique
permet de passer des propriétés à un corps, la fonction de partition , aux propriétés à plusieurs
particules, le grand potentiel.
3/ Nous pouvons également examiner la structure de la grande fonction de partition ΞMB =
MB
e− = exp e = e . Nous déduisons la fonction de partition canonique en utilisant
1
(B.64) : MB = .
!
Problème 11.1 Bosons et fermions dans un puits harmonique 1D
A. Approximation de Maxwell-Boltzmann La fonction d’une particule est =
1∕ 2 sh(∕2) . Dans l’approximation de Maxwell-Boltzmann, la fonction de partition
des particules est MB = (1∕ !) ∼ (∕ ) e . Ce résultat ne distingue pas entre bosons
et fermions. Notons que la validité de cette approximation est MB 1 ; lorsque 1 cela
impose ∕ 1 i.e. . C’est une approximation valable aux hautes températures :
MB
∼ e . Ce qui correspond au résultat d’un calcul complètement classique.
Nous déduisons le potentiel chimique MB ( , ) ≃ ln( ∕) ≃ ln ∕ .
B. Bosons
1/ Rappel : particules discernables. Les états quantiques pour des particules discernables sont
des états produits tensoriels de la forme 1 2 ⋯ . Puisque les particules sont
indépendantes, la sommation sur les états quantiques correspond à sommer sur les nombres
quantiques indépendamment les uns des autres :
∞
∞ ∞
∞
−
disc = ⋯ exp − (1 + ⋯ + ) = e . (B.65)
1 =0 2=0 =0 =0
Bosons. Les états bosoniques sont des états symétriques sous l’échange des particules (ou des
nombres quantiques). Si deux bosons occupent deux états individuels 1 et 2 , on doit tenir
compte que 1 , 2 bosons et 2, 1 bosons désignent le même état dans la sommation sur les
339
Solutions
états quantiques. Si l’on souhaite effectuer une sommation sur les états quantiques à bosons
1 , 2 , ⋯ , bosons, il faut donc ordonner les nombres quantiques 1 ⩽ 2 ⩽ ⋯ ⩽ afin de
ne pas faire apparaître plusieurs fois le même état. La fonction de partition est donc
∞
∞
∞
bosons = ⋯ exp − ( 1 + ⋯ + ) . (B.66)
1 =0 2 =1 =−1
La somme sur les nombres quantiques est contrainte par le postulat de symétrisation.
On peut découpler les sommes en introduisant les nouvelles variables de sommation 1 = 1,
2 = 1 + 2 = 1 + 2 , 3 = 2 + 3 = 1 + 2 + 3 , etc, avec ∈ ℕ. On déduit
∞
−
1
bosons = e 2 e − ( −+1) = e − 2 . (B.67)
=1 =0 =1
1 − e −
Il est clair que si 1 ∀ , i.e. si , nous retrouvons le résultat classique
1
bosons ≃ .
!
Nous pouvons d’ores et déjà introduire l’échelle charactéristique de température qui sépare le
régime classique de haute température du régime de basse température où les corrélations quan-
tiques deviennent dominantes : ∗ = ∕ . En abaissant la température à partir du régime
classique (hautes températures), l’effet du postulat de symétrisation commence à se faire sentir à
l’échelle ∗ = ∕ , bien plus élevée que l’échelle fournie par le gap du spectre individuel,
∕ . La présence de ce facteur traduit précisément l’effet des corrélations quantiques qui
favorisent le regroupement des bosons dans le fondamental dès ∗ .
2/ De l’expression de bosons nous déduisons l’énergie libre (11.38). Le premier terme ∕2
est simplement l’énergie fondamentale du système, lorsque tous les bosons se trouvent dans le
fondamental individuel.
C
3/ L’énergie = − ln bosons est donnée par la somme :
C
= + − 1
. (B.68)
2 =1
e
0
Dans la limite , on peut remplacer la somme par une intégrale, → d :
=1
∗ ∕
( )2
2 0 0
C d d
≃ + = + , (B.69)
e − 1 2 e − 1
340
Solutions
Remarque. Il est intéressant de comparer ces résultats avec ceux du problème combinatoire
des partitions d’un entier (annexe 7.B page 149). C’est très clair sur l’entropie ( C ≃ dans
le régime intermédiaire) : en écrivant l’énergie d’excitation comme ( ) − (0) = ≃
2 ( )2 2 2
nous obtenons ∕() ≃ 6 ∕, d’où C ≃ ∕() = 2∕3,
6 3
en exacte correspondance avec le résultat de l’annexe. Notons que dans ce régime, le potentiel
chimique est sur le fondamental ≃ 0 = ∕2 et la conservation du nombre de bosons ne joue
pas de rôle.
Remarque. nous verrons au chapitre 13 que le fait que le potentiel chimique soit une fonction
continue et dérivable de la température est lié à l’absence de phénomène de condensation de
Bose-Einstein en 1D.
C. Fermions. Les états fermioniques, que nous notons 1 , 2, ⋯ , fermions , sont anti-
symétrisés. Afin de tenir compte de cette contrainte, nous imposons aux nombres quantiques
1 < 2 < ⋯ < . Le calcul est donc tout à fait similaire à celui du cas bosonique. Les deux
calculs sont tellement proches que les deux fonctions de partition sont proportionnelles :
( − 1)
fermions = bosons e − Δ0 où Δ0 = . (B.71)
2
Ce résultat remarquable montre que les propriétés thermodynamiques des deux systèmes (bosons
et fermions) sont absolument identiques. La raison est que les excitations des deux systèmes
coïncident puisqu’elles correspondent à augmenter l’énergie par quanta . L’unique différence
341
Solutions
est dans la valeur de l’énergie fondamentale des deux systèmes : bosons
0 = et 0fermions =
2
2 (la constante s’interprète comme Δ 0 = fermions
0 − bosons
0
).
2
Pour finir, il est intéressant de calculer le potentiel chimique des fermions, ( , ) ≃ ( −
1 1
)+( ) en ln(1− − ∕ qui tend vers l’énergie de Fermi = lim ( , ) = −1 (le dernier
2 →0
état occupé).
Problème 11.2 2nd coefficient du viriel des gaz parfaits quantiques
1/ Partant de (11.26), une intégration par parties donne
∞ ∞
e− (− )
0 0
B∕F = − d Φ() = − d Φ() () = − G (B.72)
1 ∓ e− (− )
où l’on a utilisé les propriétés d’extensivité ( , , ) = −G ( , ) (puisque G = − ).
2/ Le nombre moyen de particules est
∞ ∞
0 0
G
= d ( ) () = d Φ() ′()[1 ± ′ () (B.73)
′
où nous avons fait une intégration par parties en utilisant () = − ()[1 ± () .
G G
3/ On considère le rapport des deux relations précédentes ∕(− B∕F ) = ∕(G ) =
∕, qui donne donc (11.39).
La limite classique (diluée) correspond aux faibles occupations () 1, ce qui permet de
négliger le terme en ()2 dans l’intégrale : on retrouve ≃ .
4/ Second coefficient du viriel. a) Calcul semiclassique de la densité d’états intégrée pour
un atome libre de spin dans une boîte (chapitre 3) donne Φ() = 3∕2 avec =
4
(2 + 1) (2∕ 2 )3∕2 . Par la suite on oubliera l’éventuelle dégénérescence de spin, i.e. = 0.
3
MB def
b) Gaz parfait classique. Dans la limite classique, est tel que () ≃ e − (− ) = ()
∞ ∞
0 0
MB 3
1. L’intégrale = d ( ) () = e d e − s’exprime à l’aide de la
2
fonction Γ (annexe). On obtient
def
= e = Λ3 (classique) (B.74)
22
où Λ = est la longueur thermique.
∞
0
c) On fait () → MB () dans (11.39). Les deux intégrales d Φ() () et
∞
0
d Φ() ()2 sont faciles à calculers et s’exprime à l’aide de la fonction Gamma. On obtient
finalement ∕ ≃ 1 ± 2 −5∕2.
342
Solutions
d) Dans la limite diluée, on peut remplacer la fugacité dans le développement par l’expression
classique (B.74). Le développement précédent prend donc la forme ≃ 1 ∓ 2 −5∕2 Λ 3 , et
on retrouve le résultat de l’excercice 11.2 :
2
∕
( ) ≃ ∓2 −5∕2 Λ3 ∝ ∓ −3∕2 (B.75)
e) Pour les fermions, le postulat de symétrisation (le principe de Pauli) induit une répulsion ef-
fective, i.e. la pression est augmentée, 2 > 0. Pour les bosons, c’est l’inverse : le postulat
de symétrisation induit une attraction effective, i.e. 2 < 0. Dans la limite classique l’effet du
postulat de symétrisation disparaît et donc 2( ) ∝ −3∕2 → 0.
C’est ce qu’on observe sur la figure dans le domaine de température 1 K < < 10 K.
Remarque. Dans le problème, nous avons uniquement discuté l’effet des corrélations quan-
tiques (postulat de symétrisation) sur le second coefficient du viriel. Ce dernier est également
sensible aux interactions entre atomes. Pour cette raison, le comportement de plus haute tempé-
rature est assez différent de celui observé dans le régime 1 K < < 10 K. Au delà de 20 K, le
coefficient du viriel change de signe : il est dominé par l’effet de l’interaction répulsive de cœur
dur entre atomes. Il décroît avec la température au delà de 200 K (i.e. l’isotherme rejoint la loi
de Mariotte).
Problème 12.1 Métal et semimétal en 2D
A. Hétérojonction GaAs/GaAlAs1− .
( − ) = 2
d
(2)2
1/ Densité d’états : 0 = 2 ( − ) où = 2 2 ∕(2∗). En
0
G
2/ ( , ) = 0
grale se calcule sans problème (par rapport au cas 3D on profite du fait que la densité d’états est
constante) :
G
( , ) = 0 ln 1 + e . (B.76)
2
En faisant → ∞, on obtient l’énergie de Fermi = ∕ 0 = .
∗
L’AN pour une densité ≃ 10 15 m−2 donne ≃ 3meV (∗ = 0.067 est dans l’introduction)
et ≃ 35 K.
On écrit
( ) = ln e ∕ − 1 . (B.77)
343
Solutions
2
∞
0
2
d ( − 0 ) d’où () = .
( 0)2
2/ On montre facilement la propriété en utilisant 1 − (; ) = (−; −). Le premier terme
s’interprète comme le nombre de trous, ou anti-électrons (i.e. le nombre de lacunes d’électrons
dans la bande de valence), et le second terme comme le nombre d’électrons de conduction.
G G
3/ est tel que = 0. En utilisant (12.32), on écrit ( , ) = (0, 0) = . Le nombre de
trous doit égaler le nombre d’électrons. Puisque la densité d’états est symétrique, cela implique
( ) = 0 ∀ .
Λ∕
2( )2
(0 0
d
4/ On obtient la densité sous la forme = . Puisque Λ∕ ∼
e + 1)2
11 000 K on remplace la borne supérieure par l’∞. D’après la formule de l’annexe, l’inté-
2
grale vaut 2∕12, d’où finalement le comportement quadratique = . À = 300 K
6 0
on obtient ≈ 1.3 × 1015 m−2 , ce qui est comparable au 2DEG (mais ici la densité diminue
rapidement avec , donc à = 1 K on obtiendrait une densité ∼ 10−5 plus faible).
0 Λ
−Λ 0
5/ En retranchant(0) = d ( ) = − d (−) et en utilisant 1 − (; 0) = (−; 0),
6 (3) ( )3 36 (3)
( ) ≃ = ( ) (B.78)
(0 )2 2
18 (3) 2 108 (3)
et ( ) ≃ = ( ) .
0 2
344
Solutions
3/ On considère = + + − fixé.
a) À l’aide de l’expression précédente, nous obtenons e2 + 2 ch( )e + 1 = e 2 , où nous
avons introduit = ∕0 . d’où
( , ) = ln
1
ch ( ) + e − 1 − ch( )
2 2 (B.80)
d’où (0, ) = 2 − . Cela correspond à la situation où le gaz est complètement polarisé
2
ρ+(ε)
+ −F
ε =)−(
εF ( B)= εF
−F ) B ( 2 −F
ε
−
0
0
2 εB + −B
ρ−(ε) ερ )−(
εF −F
b) Si = 1 T, ce qui est déjà un très fort champ magnétique, nous obtenons ≃ 50 eV soit
0.5 K. D’une part cette énergie est plus faible que l’énergie de Fermi dans un gaz d’électrons 2D
345
Solutions
(quelques 10 K, cf. problème 12.1), d’autre part, à moins de considérer des très basses tempéra-
tures (dans un cryostat) c’est plutôt plus petit que . Dans la limite on peut
donc considérer que ( , ) ≃ ( , 0) ≃ est indépendant du champ magnétique.
Notons que la susceptibilité est toujours positive, quelle que soit la charge des porteurs, ce qui
traduit simplement l’alignement des moments magnétiques sur le champ.
B. Diamagnétisme de Landau
1
1/ L’expression générale du grand potentiel est = − ln 1 + e − ( − ) . Dans le cas
∞
du spectre de Landau la somme sur les états individuels prend la forme ⟶ 2
L . En
=0
remarquant que 2L = 0 , nous obtenons
( , , , ) = −0
∞
ln 1 + e − ( (+1∕2)−) . (B.82)
=0
0 2
( , , , ) = ( , , , 0) +
1 1
(B.83)
→0
+⋯
2 e − + 1 12 ∗
346
Solutions
25∕3
b/ On voit que la densité d’énergie est de la forme E ≃ const + (⋯) M 2 + M 4 où
= 3(1 − 𝓁 1∕3 ) peut changer de signe en fonction de la valeur de 𝓁 1∕3. La valeur critique de
l’interaction est simplement reliée à la densité : 𝓁 = −1∕3 . Si l’interaction est faible, 𝓁 < 𝓁 ,
le minimum de l’énergie est M = 0: le métal est dans une phase paramagnétique. Si 𝓁 > 𝓁 ,
l’énergie a deux minima en M = ± −∕2 0 : le métal est dans une phase ferromagnétique
(il est aimanté en l’absence de champ magnétique extérieur).
c/ ∼ 1∕( ).
Exercice 13.1 a) En dimension la densité d’états d’une particule libre est () ∝ ∕2−1 .
La condition d’apparition de la condensation de Bose Einstein est donc ⩾ 3.
b) Dans un puits harmonique () ∝ −1. La condition pour la condensation est cette fois ⩾ 2.
347
Solutions
( ∕ ) d H ( − ) = ∕2∕( Γ(∕2 + 1)) (2∗ ) ∕2. Une dérivation conduit à la den-
sité d’états individuels () = 2 −1 où = [∗ ∕(2 2)]∕2∕Γ( ∕2). Le nombre moyen
−1
∞
0
de magnons à température est = d 2 ∕ e − 1 .
348
Solutions
0
d 2 −2 = ∞. Cette divergence du nombre de magnons peut s’interpréter comme une diver-
gence des fluctuations thermiques empêchant l’apparition d’un ordre ferromagnétique en ⩽ 2.
Nous illustrons ici un théorème très important de la matière condensée : le théorème de Mermin-
Wagner (en présence d’interactions à courte portée, la brisure spontanée d’une symétrie continue
ne peut donner lieu à une transition de phase en dimension ⩽ 2 qui est la dimension critique
inférieure).
Problème 13.2 Fluctuations dans un condensat de Bose-Einstein
1/ Si diminue à fixé, on a vu qu’il existe une température finie, BE , à laquelle le potentiel
chimique atteint sa limite supérieure autorisée, = −
0 = 0
−. En dessous de cette température,
0
1
= 0 ( ) + d ( ) pour ⩽ BE (i.e. = 0)
e − 1
En utilisant une intégrale de l’annexe on obtient ( ) = (3)( ∕) 3.
= BE est la température en deçà de laquelle 0 devient macroscopique ; cependant il
peut encore être considéré microscopique à la transition, i.e. on peut écrire 0 (BE ) = 0 et
1∕3
(BE ) = d’où BE = ∕ (3) ∕ .
349
Solutions
2/ La fraction condensée est 0( )∕ = 1 − ( ∕ BE ) 3 pour ⩽ BE (et nulle au delà).
3/a/ La variance du nombre de bosons excités est la somme des variances (les états sont
indépendants et le condensat joue le rôle de réservoir pour les bosons excités)
B
e
∞
e
0
B
Δ 2 = Var( ) = 1 + = = d ( )
− 1)2 (e − 1)2
>0 >0 >0 (e
On a utilisé que = 0.
b/ Une I.P.P. donne
3
∞
3 (2)
()3 0
2 1
Δ = d = (2) =
e − 1 (3) BE
c/ d’où = 0 + est fixé, d’où Var( 0 ) = Var( − ) = Var( ). Nous déduisons :
Δ0 (2) 3∕2 def
= avec = . (B.87)
0 (3) 1 − 3 BE
Δ0 1
Les fluctuations relatives divergent en approchant la température critique : ∼
0 BE −
pour → BE
−
2.5
2.0 ΔN 0/N0
1.5
1.0
0.5 N 0/N
0.0
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 1.4
T /TBE
350
Bibliographie
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[20] W. Krauth, Statistical Mechanics : Algorithms and Computations, Oxford
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351
Bibliographie
352
Index
A champ moyen (approximation de), 212, 221
chaos, 8
adiabatique (transformation), 98
classe d’universalité, 233
aléatoire (variable), 10 Clausius, Rudolf, 1, 56
antiferromagnétisme, 220, 236, 335 col (méthode du), 28
approximation de Maxwell-Boltzmann, 112, compressibilité, 88, 127, 173, 175, 181, 213, 286
116, 238, 246, 249–251
(exposant critique), 218, 233
argon, 157, 170 condensation de Bose-Einstein, 278, 282
Avogadro (nombre d’), 60 conditions aux limites, 40, 44, 55
de Dirichlet, 40, 309
B périodiques, 45, 309
Bessel (fonctions de), 27 conditions normales de température et de
big bang, 195 pression, 7, 157
binomiale (distribution), 20, 23, 28 conjuguée
blocage de Pauli, 268 (variable canoniquement), 38, 49
Boltzmann, Ludwig, 1, 60, 91 constante de Boltzmann, 60
Born-Oppenheimer (approximation de), 161 construction de Maxwell, 215
Bose-Einstein (distribution de), 99, 184, 246, contact thermique, 79, 81, 105
278, 315 et irréversibilité, 84
boson, 53, 99, 100, 198, 237, 239, 242, 243, 246, Cooper (paires de), 279, 307
250, 251, 254, 255, 276, 279, 339, 342 coordonnées normales, 187, 203, 205
(corrélations quantiques), 255, 284 corps noir, 195
condensation, 282 corrélations quantiques, 237
dans un piège harmonique, 287 corrélations, 16
bra, 52 covariances (matrice des), 17
Bragg-williams (approximaton de), 223 cristal paramagnétique, 76, 113, 137, 219
brisure spontanée de symétrie, 230 températures négatives, 85
bruit de Schottky (bruit de grenaille), 307 crochets de Poisson, 51
cumulants, 18, 19, 25
C curie (loi de), 221
Curie-Weiss (loi de), 227
capacité calorifique, 83, 107, 161
(exposant critique), 233 D
à la transition liquide-gaz, 218
de l’oscillateur harmonique, 184 Debye (modèle de), 193
de vibration des solides, 190 dégénérescence, 40, 43
(modèle de Debye), 195 Démocrite, 2
des gaz réels, 174, 213 densité d’états, 42
du gaz de fermions, 265, 268, 271 densité de modes, 188
du gaz diatomique, 166 dérivée fonctionnelle, 291
du gaz parfait de bosons (cas général), 289, détente de Joule, 87
296 développement de Landau, 228
du gaz parfait de bosons libres, 285 développement du viriel, 169, 335
du gaz parfait diatomique, 166 diamagnétisme de Landau, 273, 346
du gaz parfait monoatomique, 85, 157 diatherme, 79
du gaz parfait polyatomique, 168 diluée (limite), 78, 157, 238
du modèle d’Ising, 226, 228 dimension critique, 233
du para et ortho H 2, 180 dimension critique inférieure, 349
et fluctuations, 110 distribution de Bose-Einstein, 99, 184, 246,
rotationnelle, 163, 164, 166 278, 315
vibrationnelle, 163, 164, 166 distribution de Dirac, 301
casimir (pression), 201 distribution de Fermi-Dirac, 99, 246, 257, 315
chaleur latente, 216 distribution de probabilité, 11
de condensation de Bose-Einstein, 287 Dulong et Petit (loi de), 191
chaleur spécifique, 287
353
Index
E de Landé, 133
gyromagnétique, 76, 133, 220
échange (interaction d’), 220 Fermi (énergie de), 262
effective (interaction), 161, 169, 200, 220
Fermi-Dirac (distribution de), 99, 246, 257, 315
effet Hall quantique entier, 234 fermion, 53, 99, 100, 237, 239, 242, 243, 251,
effet Hall quantique fractionnaire, 307 254, 255, 339, 342
élementaire, 2
(corrélations quantiques), 255
émergence, 4, 24, 189 ferromagnétisme, 219, 224
énergie de Fermi, 262 itinérant, 220, 274
énergie libre, 107, 138, 139, 141, 144, 209 fluctuation-dissipation, 110, 181
(extensivité), 108
fonction d’onde, 39, 52
(interprétation thermo.), 108 fonction de corrélation de paires, 172
d’un solide (vibrations), 193 fonction de grande déviation, 30, 81
de l’oscillateur harmonique, 185 fonction de partition, 106
du champ e-m, 198
fonction génératrice, 18, 119
du gaz parfait classique, 157 fond diffus cosmologique, 195, 199
du gaz réel (vdW), 213 forces de van der Waals, 169
sur le plateau de liquéfaction, 215
formule de trace, 310
energie libre, 147 fugacité, 120, 251, 280
ensemble canonique, 105
ensemble grand canonique, 118
ensemble isotherme-isobare, 154
G
ensemble microcanonique, 72 gap d’énergie, 164, 284, 289, 296
enthalpie, 216 gaussienne (distribution), 20
enthalpie, 147 gaz parfait, 7, 21, 75
enthalpie libre, 154 classique
enthalpie libre, 147 (fonction de grand partition), 122
entropie (fonction de partition), 112
(extensivité), 75, 78, 93 (potentiel chimique), 90
(principe d’entropie maximale), 93 (pression), 88
canonique, 107 monoatomique, 78, 117, 157
de Rényi, 68, 135, 323 Sackur-Tetrode (formule de), 78
de Tsallis, 323 de bosons libres, 279
grand canonique, 121 diatomique, 161
microcanonique, 74 moléculaire, 160
réduite, 81, 84, 87 polyatomique, 168
Sackur-Tetrode (formule de), 78, 287 quantique, 237
statistique (de Gibbs-Shannon), 62 de bosons, 276
entropique (effet), 77, 101, 209, 317 de fermions, 257
ergodicité, 37 sur réseau, 99
espace des phases, 38 gaz sur réseau, 99
espérance, 14 gaz ultrafroids, 279
état individuel, 111 gaz ultrafroids (BEC), 293
état singulet, 252 Gibbs, J. Willard, 1
états triplets, 252 Gibbs-Duhem (relation de), 148
étoiles à neutrons, 258 Ginzburg (critère de), 225
étoiles naines blanches, 258 grand potentiel, 147
Euler-MacLaurin (formule), 274 grand potentiel, 120
évènement, 9 grandes déviations, 29
exposants critiques, 232 Gross-Pitaevskii (équation de), 292
extensive (variable), 75 Gumbel (loi de), 26
extensivité, 75, 93, 108
H
F
Heisenberg (modèle de), 220
facteur hétéronucléaires (molécules), 160, 179
d’occupation, 100, 123, 149, 243 homonucléaires (molécules), 160, 179
354
Index
355
Index
356