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ManuelTheories Comptables-01Dec10
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION 5
ManuelTheories Comptables-01Dec10 2
Lecture de référence no. 13 200
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Lecture de référence no. 26 406
LE SAVOIR-ETRE 406
Les Principes Comptables et leur mode de développement : une analyse critique 412
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INTRODUCTION
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Nous pourrions poursuivre ainsi longtemps l'énumération des thèmes fondamentaux
débattus par les théoriciens comptables. Toutefois, l'énumération précédente permet à
l'étudiant d'apprécier l'importance et l'utilité de la recherche en théorie comptable si la
comptabilité veut maintenir son leadership, dans la subvention de données propres à la
prise de décision à une gamme étendue d'utilisateurs.
Comme nous 1’avons mentionné précédemment, il s'agit d'un cours comme il pourrait
en exister bien d'autres en théorie comptable. Un cours parmi plusieurs de composition
différente que nous aurions pu rédiger et sans aucun doute un cours différent de ceux
qu'auraient pu dispenser d'autres Professeurs. I1 est donc important pour nous de
préciser les raisons du choix de la présente composition de ce cours. En fait, nous avons
choisi de structurer ce cours comme une introduction à la théorie comptable avec
l'objectif premier d'amener l’étudiant à la théorie comptable telle qu'elle fut et est
utilisée en pratique pour déterminer les "principes comptables généralement reconnus".
Dans cette revue des principes et concepts actuels, nous introduirons la question
toujours vivante de l'évaluation en comptabilité. Même si le coût historique est
généralement reconnu, le sujet du coût historique versus les valeurs actuelles, de
même que la question distincte mais connexe de l'indexation et de l'effet de l'inflation,
ont été débattus dans la littérature comptable depuis plus de cinquante ans.
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Lecture de référence no. 1
par
Paul Lurkin
Professeur Institut Catholique des H.E.C.
Bruxelles (Belgique)
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Parler d’une profession, c’est dire comment s’y préparer et dire quelle est sa sphère
d’action. C’est donc parier formation et entreprise et c’est anticiper sur deux ateliers
prévus pour ce colloque et m’attirer les foudres des collègues qui me suivront dans mon
intervention.
Si H.E.C.-Moncréal est une affaire d’excellence, il faut être conscient que la profession
comptable est une profession d’excellence. C’est ce que je voudrais tenter de
démontrer ce matin.
I. L’ENVIRONNEMIENT ACTUEL
A) La perception de difficultés
Les caractéristiques générales du monde actuel ont été et sont encore quotidiennement
décrites ailleurs et mieux que je ne pourrais le faire. Si l’on s’arrête un instant en
regardant ce qui perturbe le recommande, les sujets difficiles sont légion
- le défi japonais,
- l’émergence d’une nouvelle force de travail exprimant des besoins fort différents de
ceux du passé,
- etc.
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«ignorant certaines fonctions essentielles dans l’entreprise». Tous ont critiqué les
systèmes d’analyse saris âme en soulignant les dégâts causés par l’intérêt porté aux
dossiers au détriment des individus. Comme le souligne très justement le professeur
Yves-Aubert Côté dans son remarquable article consacré à la « Comptabilité et au
contrôle dans la mouvance de l’avenir « : « Ce qui a changé à notre époque, c’est le
rythme des interpellations devenues beaucoup plus fréquentes, la diversité et la
complexité croissantes des problèmes soulevés, l’ampleur des moyens mis en œuvre
pour répondre aux attentes plus rapidement qu’auparavant, la vigueur des institutions
comptables qui en est résultée face à des forces externes grandissantes et de plus en
plus influentes. Rien ne laisse présager l’affaiblissement de ces tendances dans les
vingt prochaines années ».
Le monde économique est donc troublé mais exigeant et rarement satisfait de ce qu’il
a, espérant plus d’information, plus vite et sans coût complémentaire.
Est-ce une ère différente qui est à nos portes, faite de défis à relever par les
entreprises et leurs dirigeants, par les professionnels ou par la profession elle-même ?
Sans entrer dans le vif du sujet de l’atelier suivant, disons que l’entreprise est
confrontée à des défis permanents. Elle est confrontée à la fois à des pressions
externes que sont, d’une part, la concurrence des autres entreprises et, d’autre part,
l’intervention de l’État qui dessine le cadre juridique de l’entreprise en lui imposant
des charges fiscales et sociales rigoureuses, en réglementant le marché des capitaux,
etc. Par ailleurs. il y a les contraintes internes, inhérentes à toute organisation
humaine : conflits de personnes. soif du pouvoir, arrêts de travail, etc.
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• la sécurité et la rémunération des services rendus par les hommes dont il a la
responsabilité.
B. Le défi international,
C. Le défi social.
D. Le défi de la communication.
E. Le défi comptable.
A. Le défi technologique.
B. Le défi international
L’internationalisation des échanges est entrée dans les fans et revêt souvent,
pour les divers pays, une importance considérable : source d’emplois et de
revenus, accroissement des échanges, mais aussi diversité des interlocuteurs par
leurs caractéristiques et les potentiels de développement qui sont les leurs.
Accroissement de la concurrence internationale, parfois difficile à égaler, voire à
détrôner. Pour l’entreprise, le repli sur soi-même n’est pas une solution. Elle
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doit affronter la concurrence en mettant l’accent sur les points forts qui lui sont
propres.
C. Le défi social
Le chef d’entreprise devra tenir compte de la finalité humaine dans son action
économique ; mais celle-ci reste cependant prépondérante. S’il en était
autrement, la survie même de l’entreprise serait en péril.
D. Le défi de la communication
L’entreprise a souvent fait silence ; dans son isolement, elle a entretenu un vide
devenu souvent préoccupant. Le silence n’est plus d’or. Ce que l’entreprise sait,
d’autres sont prêts à le révéler, le déformer, réinventer. Dans les travaux du
Congrès de Madrid de la Chambre de Commerce Internationale, on a souligné
que « l’entreprise devait rendre des comptes sincères à ses publics dans des
langages adaptés ».
Le vide créé par un défaut de communication sera rapidement comblé par des
rumeurs, de faux rapports, des ragots et du poison. L’entreprise est débitrice
d’informations à l’égard de tous ceux qui sont intéressés par son action ou qui
sont susceptibles d’affecter son existence ou son développement.
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Selon A. Sauvy, «la nuit dans l’information entraîne la nuit tout court
L’ignorance ne peut être reprochée aux ignorants, la faute c’est le silence » . La
politique de communication succède à l’information, car on découvre celui qui a
quelque chose à dire, à défendre. L’entreprise doit mettre en place une
politique de communication claire, sincère, crédible, adaptée à son objectif,
adressant à des partenaires un message authentique, révélant son identité.
Faire comprendre et instruire plutôt que séduire. II faut dire et bien le dire.
E. Le défi comptable
- L’importance des directives européennes et leur insertion dans les droits nationaux,
Au Canada, de même que dans les autres pays anglo-saxons tels que les Etats-Unis, la
Grande-Bretagne et les pays scandinaves, ce défi comptable est probablement moins
ressenti : on y parle des Principes comptables généralement admis alors que dans les
principaux pays d’Europe, soit la France, la Belgique, l’Italie et l’Allemagne, la
tradition professionnelle se trouve modifiée par les Directives européennes dans une
optique qui est celle dune réglementation, d’un droit juridique comptable. Faisant
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maintenant partie de la Communauté Économique Européenne, la Grande-Bretagne doit
faire face à ces directives, exigeant de plus leur insertion dans un droit national. Ceci
est une approche tout à fait nouvelle pour ce pays.
Les dirigeants d’entreprises auront à présenter des situations comptables respectant les
prescriptions légales nouvelles. Ils doivent répondre à ce défi en respectant la
législation et en prenant conscience de l’importance nouvelle des comptes annuels
comprenant le bilan, le compte de résultats et l’annexe dont l’importance est à
souligner. L’annexe, faisant partie intégrante des comptes annuels, comprend de
nombreux renseignements à communiquer dont l’exactitude et le caractère complet
ont autant d’importance au point de vue de la loi que le bilan et le compte de
résultats. II convient que chacun en soit conscient.
Ces cinq défis obligent l’entreprise à vivre et à lutter dans les turbulences du temps
présent, à appréhender des avenirs de plus en plus incertains avec de plus en plus de
souplesse mats aussi avec de plus en plus de rigueur.
C) L E S E X I G E NC E S DE L ’ E NT R E P R I S E FU T U R E
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- À côté du défi national, il y ale besoin d’informations nationales et internationales en
matière juridique, comptable et fiscale.
Face au défi comptable, disons qu’à notre époque l’analphabétisme comptable est un
crime économique. La profession doit être consciente du besoin de connaissances
comptables nécessaires au respect des prescriptions légales et professionnelles, et des
besoins des clients relatifs à la formation permanente de son personnel en matière
comptable et financière.
1 BASILE, Joseph, Retrouver le sens de la vie, Renaissance du Livre, Brixelles, 1984, 116 pages
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Ce qui frappe l’homme mûr, c’est le changement survenu en une décennie ; ce qui
paraissait solide hier apparaît aujourd’hui bouleversé, incohérent ou fragile ; ce qu’il a
construit depuis le début de sa vie professionnelle est menacé, son entreprise et même
son emploi vacillent ; l ‘age mûr le trouve mal préparé au changement et au doute.
Les jeunes élevés en temps de crise n’ont connu le passé et s’engagent dans des études
qui conduisent à un milieu économique en proie à des difficultés. N’ayant pas connu
l’abondance, ils ne doutent pas mais se battent pour prendre place dans une société
que l’on a décrite comme difficile d’accès.
Cette façon d’attaquer le problème de sa place dans l’entreprise sans se lamenter sur
le passé mais en se battant pour l’avenir constitue un avantage psychologique
indéniable. Il ne faut pas l’oublier.
Le cadre en proie au doute doit éviter les pièges tendus par le défaitisme, le
renoncement à l’adaptation, la motivation et le laxisme ambiant. Si le cadre lucide
sent le changement et s’y prépare, il deviendra l’intermédiaire social indispensable
pour promouvoir une nouvelle dignité humaine. Il sera prêt au retour aux sources et au
progrès en s’appuyant
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III. PROFESSIONNELS COMPTABLES ET PROFESSION
Le professionnel est quelqu’un qui, ayant reçu une formation appropriée et permanente
renforcée par l’expérience, accomplit une mission en toute indépendance sur une
question ou des faits qui lui sont soumis.
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3. la mise en commun, le partage des connaissances et techniques par les
membres.
Il faut les partage des connaissances et de l’expérience avec les jeunes entrant dans la
profession car, quoiqu’on en dise ou en pense, le jeune n’a pas autant de compétences
que le professionnel mûr. Il a l’avantage d’avoir un œil neuf mais il faut le parrainer,
le guider. Cela est fondamental non pas pour la survie mais pour le progrès de la
profession.
Face à ces caractéristiques, il résulte que ce que le professionnel classique doit avoir
reçu, c’est :
- Un enseignement du savoir,
- Et un savoir-devenir parce qu’une personne qui ne sait pas devenir perdra toutes
ces qualités du professionnel.
Certains ouvrages classiques récents, tels que Le Prix de l’Excellence, n’indiquent rien
de nouveau sauf qu’il faut retourner aux sources. Mais dans la pratique de
l’excellence, il y a une dimension sur laquelle il faut insister : c’est le BON SENS. Dans
les cabinets importants de revisorat, on enseigne aux nouveaux venus qu’il y a des
normes, des feuilles de travail, des procédures et quelqu’un qui les supervise. Mais le
nouveau venu peut avoir préparé quatre dossiers et être passé à côté de l’essentiel. On
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enseigne les procédures mais pas le BON SENS. Dans la pratique de l’excellence, le
retour aux sources est d’abord le bon sens. Dans une profession telle que la profession
comptable, parmi toutes les qualités qu’il faut avoir, il faut retrouver cette qualité et
la défendre. Il est fondamental de former le jeune, dès son premier jour de travail
dans un cabinet ou dans l’entreprise, à émettre lui-même un jugement. Et si ce
jugement est faux, on le corrige et à temps.
- rallier ses collaborateurs à sa vision des choses afin de les amener à faire ce qu’il
faut faire ;
- motiver, dans la mesure où le leader connaît ses propres limites, afin d’amener
ceux avec qui il travaille à se dépasser et à devenir meilleurs. S’ils sont
meilleurs, ils sont prêts de l’excellence.
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À côté de cette innovation et de cette passion, il faut conserver la rigueur dans le
raisonnement et la conclusion de même que la crédibilité. A ce niveau, la profession a
une grande responsabilité car la crédibilité du professionnel dépend de la crédibilité
qu’on attache à la profession.
Le leadership est une petite flamme vacillante qu’il est plus facile de laisser s’éteindre
que de lui conserver son éclat. La même image peut être reprise pour les idées qui,
trop souvent, meurent dans l’œuf faute d’avoir trouvé un support pour assurer leur
épanouissement, leur aboutissement.
Si dans les H.E.C., dans la profession, on a parfois servi une tradition, il faut conclure
que servir une tradition, ce n’est pas garder la cendre mais c’est raviver la flamme !
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Lecture de référence no. 2
par
E. Lande
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Ce qui est alors perçu au travers de la comptabilité n'est pas tant une vérité absolue
que quelque chose à laquelle toutes les parties peuvent adhérer, même si ce n'est que
temporairement et même si cela est assorti de beaucoup de réserve (p.83).
Cette position est également soutenue par l'AAA[2] qui précise que "les états financiers
sont basés sur des conventions dérivées de l'expérience" (p. 359). Mais au-delà de cet
aspect consensuel et social de la comptabilité, il ne faut pas non plus exclure les
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A titre d'exemple, les biens acquis par le biais d'un crédit-bail ne sont pas comptabilisés
toujours de la même manière en France, puisque au niveau des comptes sociaux,
l'optique juridique a été privilégiée, alors que dans les comptes consolidés et à l'instar
de la pratique adoptée dans les pays anglo-saxons c'est une approche économique qui a
été privilégiée. Ainsi, en France les biens acquis en crédit-bail sont comptabilisés par la
société bailleresse qui en est juridiquement propriétaire dans ses comptes sociaux,
tandis que dans les pays anglo-saxons et dans les comptes consolidés français, les biens
sont comptabilisés dans les comptes de la société utilisatrice privilégiant ainsi la réalité
économique sur la forme juridique de l'opération (substance over form).
Autre exemple, le cas des provisions pour retraite. Il y a quelques années en France,
leur comptabilisation et leur inscription à l'annexe n'étaient pas exigées. Maintenant,
les entreprises doivent mentionner dans l'annexe de leurs états financiers les
engagements qu'elles ont pris envers leurs salariés et il est possible (mais pas
obligatoire pour l'instant) de faire apparaître au passif du bilan ces engagements par le
biais de provisions pour retraites. Cet exemple montre que la pratique comptable
évolue dans le temps pour une même catégorie d'entreprise.
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Ces deux exemples illustrent le fait que la comptabilité est contingente c'est-à-dire
qu'elle est fonction d'un certain nombre de facteurs ou variables qui vont l'influencer.
L'objectif de cette première partie va donc être de présenter ces différents facteurs
qui influencent la comptabilité et d'en déterminer l'impact sur l'information comptable
diffusée par les entreprises. Ces deux sections devront vous permettre d'avoir un regard
critique sur la comptabilité pratiquée en France.
Cette première section a pour objet d'identifier les différents facteurs qui influencent
la comptabilité ce qui permettra dans la deuxième section de comprendre pourquoi et
comment la comptabilité est affectée par ces facteurs. Les facteurs influençant la
comptabilité sont de deux ordres :
- d'une part, les facteurs qui sont liés à l'environnement particulier d'un pays ou
d'une région, ce sont donc des facteurs d'ordre culturel, historique et économique
pour l'essentiel, auxquels il faut ajouter le rôle joué par les différents acteurs
(marchés financiers, organisations professionnelles…) ;
- d'autre part, les facteurs qui sont liés au fonctionnement des organismes de
normalisation et par conséquent au processus de normalisation comptable adopté par
les différents pays.
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En adaptant les travaux de LUDER au cas des entreprises, il est possible d'identifier
trois finalités de l'information financière et comptable :
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Quant aux variables définissant le contexte national, elles sont également au nombre
de trois :
1. L'importance relative des tiers, des actionnaires des marchés financiers, de l'Etat et
des gestionnaires internes. Par exemple, aux Etats-Unis, les marchés financiers et les
actionnaires sont comparativement plus importants que les autres utilisateurs et
influencent ainsi la finalité des informations financières et comptables en fonction de
leurs propres besoins. En France, la situation est plus complexe puisqu'il faut faire la
distinction entre les comptes sociaux qui ont une finalité juridique et fiscale
importante, et les comptes consolidés qui retiennent une optique plus économique
orientée vers l'information des actionnaires et des marchés financiers.
- dans les pays de droit écrit, les lois encadrent les systèmes comptables qui
tendent à être plus unifiés mais moins flexibles puisqu'il faut mettre au point une
nouvelle législation pour que les changements soient adoptés,
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une plus grande uniformité. Les innovations du système comptable sont donc plus
fréquentes dans ce type d'environnement.
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Cette matrice met en évidence les relations qui existent entre la finalité de
l'information financière et comptable (en direction des tiers, des gestionnaires ou de
l'Etat) et les différentes variables orientant ou influençant ces finalités. C'est ainsi que
les pays ayant une codification de la comptabilité par la loi importante et une faible
influence des organismes professionnels auront une comptabilité plutôt orientée vers
une information de type macroéconomique et juridique. C'est le cas de la France avec
les comptes sociaux mais aussi de l'Allemagne par exemple.
En revanche, les pays ayant une comptabilité faiblement codifiée par la loi et une forte
influence des organismes professionnels auront une comptabilité plutôt orientée vers
une information financière externe. C'est le cas par exemple des Etats-Unis et d'une
manière générale des pays anglo-saxons. Par conséquent, les facteurs
environnementaux influencent la finalité des états financiers et comptables (et donc de
l'information qu'ils véhiculent) et cette finalité conditionne les principes comptables en
vigueur.
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Cette analyse des facteurs influençant la comptabilité des entreprises françaises se fera
en deux temps en présentant :
Cette influence des facteurs historiques et culturels peut être analysée à travers trois
aspects : la place de la comptabilité au sein du droit, la place de l'Etat dans le
processus de normalisation et l'impact de la fiscalité sur le développement et
l'application de la norme comptable.
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De même, en 1919, l'obligation est faite à toutes les sociétés de déposer leurs comptes
au registre du commerce. La comptabilité devient petit à petit une obligation légale
réglementée par des dispositions d'ordre légal (lois, décrets, arrêtés).
Ainsi, le décret-loi du 30 octobre 1935 impose les premières mesures qui tendent à
normaliser[8] la présentation des bilans et de comptes de pertes et profits qui "doivent
être établis chaque année dans la même forme que les années précédentes" et qui
précisent :
- que "les méthodes d'évaluation des divers postes doivent être immuables",
- que le compte de pertes et profits "doit exprimer sous des rubriques distinctes les
profits ou les pertes de provenances diverses".
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- l'introduction des plans comptables dans la loi comptable (arrêté du 30 avril 1982
réformant le PCG français en tenant compte de la 4e directive européenne).
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Le décret n° 57-129 du 7 février 1957 institue, sous l'autorité du ministre chargé des
affaires économiques, le conseil national de la comptabilité (CNC). Il se substitue à la
commission de normalisation des comptes et au CSC. Le CNC a été par la suite modifié
et élargi en 1964 et récemment en 1996 (cf. infra).
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Le PCG de 1957 n'a toujours aucune force obligatoire (il n'est pas inséré dans le code de
commerce, ni ne fait l'objet d'une loi ou d'un décret). Le plan comptable français de
1957 est plus complet que celui de 1947 car certaines règles et principes sont précisés,
il ne peut toutefois pas se comparer à un cadre conceptuel[15].
Un plan comptable sera toujours établi pour faciliter les travaux statistiques des
pouvoirs publics (administrations financières ou fiscales, ministère de l'Economie,
Comités d'organisation ou offices professionnels).[16]
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Ceci explique pourquoi le PCG de 1957, bien que non obligatoire (il ne fait pas l'objet
d'une disposition légale le rendant obligatoire), ait été, dans les faits, suivi par
l'ensemble des sociétés et entreprises françaises. L'influence de la fiscalité sur la
comptabilité s'est également fait ressentir sur le contenu des normes puisque pour
bénéficier des avantages fiscaux (par exemple amortir un bien sur une durée plus
courte que sa durée de vie économique), les entreprises sont obligées de l'enregistrer
dans leurs comptes (dans l'exemple de l'amortissement fiscal, le surplus
d'amortissement devra être inscrit dans les comptes de l'entreprise en tant
qu'amortissement dérogatoire pour ouvrir droit à déduction au niveau du calcul du
résultat fiscal). Par conséquent, la comptabilité en France est pour partie contrainte
par des aspects fiscaux et à ce titre ne reflète pas la situation économique et
financière réelle de l'entreprise.
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Ce constat doit être relativisé suivant que l'on considère les comptes individuels ou les
comptes consolidés. En effet, seuls les comptes individuels servent de base pour le
calcul de l'impôt, par conséquent, seuls ces derniers intègrent des aspects fiscaux
étrangers à l'activité de l'entreprise. En revanche, les comptes consolidés font
abstraction des données fiscales par retraitement des comptes individuels et, à ce
titre, peuvent être considérés comme reflétant plus fidèlement l'information financière
et comptable du groupe.
Résumé :
La comptabilité française semble être influencée par différents facteurs ayant trait :
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La Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) a une action orientée
vers l'audit et plus particulièrement vers la réglementation de la profession d'auditeur
(définition et respect de la déontologie). La CNCC s'occupe de la déontologie de la
profession, répond aux questions liées à la pratique comptable, prend position à travers
sa revue (Le bulletin trimestriel des commissaires aux comptes) et des notes
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18
Organismes officiels
CNC (France)
(1) Cela peut poser des difficultés en particulier lorsque les dispositions de ces
organismes de normalisation internationaux ou étrangers adoptent des dispositions
qui peuvent aller à l'encontre des règles nationales. Voir en ce sens la deuxième
partie sur la fonction du comité de réglementation comptable.
Dans la suite de ce cours, le rôle du CNC sera traité de manière plus approfondie.
Toutefois, il est possible de remarquer dès à présent les interactions fortes existant
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Cette influence des marchés financiers s'exerce au niveau national par le biais
d'organismes comme la COB (commission des opérations de bourse), qui organisent la
régulation des marchés boursiers et réglementent les informations qui sont diffusées.
Ces organismes sont également associés aux travaux des organismes de normalisation
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L'influence de l'Europe
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les législations nationales. Il existe donc des différences dans le choix des options au
niveau européen, même si elles peuvent être considérées comme mineures, qui sont le
fait d'adaptations nationales et qui démontrent que, s'il est possible de définir un cadre
de normalisation commun à plusieurs pays, la mise en œuvre de ce cadre génère des
divergences d'application.
Par conséquent, est-ce que l'harmonisation comptable du fait d'une volonté politique
(la création de l'Europe) aura à terme un succès plus faible que l'harmonisation
comptable du fait de la mondialisation des marchés (par référence aux cas d'adoption
des normes de l'IASC ou du FASB par des entreprises française) ?
Pour pouvoir répondre à cette question, il faudrait pouvoir se projeter dans le temps.
Toutefois, on peut apporter quelques éléments de réflexion sur l'harmonisation
comptable. En tout premier lieu, l'Europe comptable, si elle se fonde sur une volonté
politique, est également adossée à une volonté et à une réalité économique d'échange.
En second lieu, les directives européennes ont eu un impact sur l'ensemble des
entreprises de taille moyenne ou grande[22], alors même que les normes de l'IASC ou du
FASB pour l'instant n'ont d'impact que sur la pratique des groupes internationaux cotés
ou faisant appel à l'épargne publique sur différentes places boursières[23].
Les directives européennes ont donc un impact plus large, car le critère économique de
la mondialisation pour harmoniser les positions comptables ne concerne que les grands
groupes alors que la volonté politique étend les critères ou normes comptables à un
ensemble plus large d'entreprises, n'ayant pas forcément accès aux marchés financiers.
L'harmonisation internationale des positions en terme de traitement comptable des
événements d'une entreprise est donc un besoin émis essentiellement par les
entreprises amenées à intervenir dans différents pays, mais elle ne pourra se réaliser
sans une volonté politique à l'instar de celle entourant les directives européennes sur la
comptabilité. Ceci démontre également, que le rôle des organismes nationaux de
normalisation est dépendant pour partie de volontés politiques émises par l'Etat
national ou l'Europe dans le cas de la France, mais aussi de contraintes économiques
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22
3.... Synthèse
- historiquement par une forte codification par la loi et une forte influence de la
fiscalité,
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part, ceux qui sont gérés par des Etats comme c'est le cas en France avec le CNC qui est
sous la tutelle du ministère de l'Economie et des Finances. Les normes comptables
suivront un mode d'élaboration différent suivant le mode de gestion de ces organismes
de normalisation et leur fonctionnement interne. Dans le cadre de ce cours, il ne sera
toutefois pas possible de faire une analyse comparative des différents modes
d'élaboration des normes comptables pour en mesurer l'incidence sur la
normalisation[24].
- en premier lieu, pouvoir satisfaire les exigences des grands groupes français cotés
ou faisant appel public à l'épargne sur des places étrangères souhaitant établir leurs
comptes consolidés suivant des référentiels comptables différents de celui en vigueur
en France (il s'agit des normes de l'IASC et du FASB) ;
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24
Par conséquent, les objectifs de cette réforme sont d'adapter les normes comptables
françaises en tenant compte de la globalisation de l'économie et des marchés de
capitaux, et de fournir un cadre comptable plus cohérent pour l'ensemble des entités
du secteur privé en octroyant le pouvoir de réglementation comptable à un seul
organisme.
Plus précisément, concernant la dérogation aux normes comptables françaises pour les
groupes internationaux, ceci correspond à une prise en compte d'un état de fait
puisqu'en France, "une quarantaine de groupes déclarent utiliser soit les normes
françaises et celles de l'IASC, soit les normes françaises et celles du FASB, soit, enfin,
des principes internationaux sans autre précision ni référence aux normes
nationales[25]". Il apparaît donc qu'un nombre limité de groupes souhaite publier leurs
états financiers en faisant référence à des normes internationalement reconnues plutôt
qu'à des normes nationales.
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25
les besoins de ces groupes ne correspondent pas aux besoins des autres entreprises ni
n'intègrent les contraintes juridico-économiques nationales[27]. Dans ces conditions, le
choix de la France s'est porté sur un système dérogatoire s'organisant autour de trois
principes[28] :
- les groupes faisant appel à l'épargne sur des marchés de capitaux étrangers,
établissant des comptes consolidés, seraient autorisés à publier des comptes
consolidés établis suivant des normes internationales, sous des conditions à définir ;
Cet objectif a nécessité de prendre un grand nombre de précaution ce qui s'est traduit
par un processus de réforme relativement lent (le CNC dès le début des années 1990 a
souhaité une réforme du processus de normalisation comptable) et associant des
instances politiques pour l'adoption des normes comptables (souci du respect de la
Constitution).
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depuis le début des années 90 tendant à réformer l'organisation du CNC (voir figure 5
page suivante).
Il s'avère donc que cette réforme du processus de normalisation met en jeu des
contraintes économiques, financières et juridiques parfois antagonistes. Ceci explique
pourquoi la réforme française est en fait multiple car elle s'est opérée à plusieurs
niveaux comme cela va être exposé à présent.
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27
Le décret du 26 août 1996 instaure une réforme du CNC ayant pour objet d'établir ses
missions et de réformer son fonctionnement. Concernant les missions du CNC, il est en
charge d'émettre dans le domaine comptable des avis et recommandations concernant
l'ensemble des secteurs économiques. Plus spécifiquement, ses missions s'organisent
autour de 4 pôles dont les deux premiers sont novateurs par rapport aux dispositions
antérieures régissant le CNC (article 2), tandis que les deux suivants reprennent les
dispositions préexistantes :
- Le CNC donne un avis préalable sur toutes les dispositions d'ordre comptable,
qu'elles soient d'origine nationale ou communautaire, étudiées par les administrations
ou services publics, les commissions ou comités créés à l'initiative des pouvoirs
ManuelTheories Comptables-01Dec10 27
28
- Le CNC donne un avis sur les normes élaborées par les organismes internationaux
ou étrangers de normalisation comptable. Cette mission s'insère dans la
ManuelTheories Comptables-01Dec10 28
29
- Le CNC propose toutes mesures relatives à l'exploitation des comptes, soit dans
l'intérêt des entreprises et des groupements professionnels d'entreprises, soit en vue
de l'établissement des statistiques nationales ou des budgets et comptes économiques
de la nation.
Les missions du CNC ont été élargies pour atteindre les objectifs d'unification du droit
comptable (toutes les normes comptables établies par les organismes de normalisation
que sont le Comité de réglementation bancaire (CRB) et le conseil national des
assurances doivent être soumises au CNC[30]) et de possibilité de dérogation aux normes
nationales par le biais de la reconnaissance de référentiels internationaux ou étrangers.
Pour autant, est-ce que le CNC aura les moyens d'accomplir ces missions ? En effet, le
CNC a souvent été critiqué sur ce point : "La structure du CNC, le manque de moyens
de son secrétariat général et la recherche systématique d'un consensus ont été un frein
à l'efficacité du CNC"[31]. Pour remédier à ces difficultés de fonctionnement, le décret
du 26 août 1996 a été amené à réformer en profondeur le fonctionnement du CNC en
adoptant trois dispositions.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 29
30
renouvelables. Ces membres sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'économie
en raison de leur appartenance à l'une des catégories suivantes (article 3) :
ManuelTheories Comptables-01Dec10 30
31
général est fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie pris sur proposition du
président du conseil. Le rôle et les attributions du secrétariat général n'ont pas
beaucoup évolués et à ce titre il ne devrait pas y avoir de grandes différences par
rapport au fonctionnement actuel. Toutefois, il faut noter que le secrétariat général
sera commun au CNC et au CRC. Cela devrait favoriser le suivi administratif des normes
comptables mais aussi accroître le nombre de personnes mises à la disposition de ces
deux structures.
- le président du CNC,
- les 6 vice-présidents,
Ce comité est saisi par le président du CNC ou par le ministre chargé de l'économie de
toute question relative à l'interprétation ou l'application d'une norme comptable
nécessitant un avis urgent. Il doit statuer dans un délai maximum de 3 mois à compter
de la date de saisine. Les décisions du comité d'urgence prendront la forme d'avis. A cet
égard, le président du CNC a précisé lors d'un entretien que :
Ces avis ne seront pas transmis au CRC et ne seront donc pas des règlements. Ils
auront donc la même force doctrinale que les avis du CNC d'aujourd'hui. De même que
le FASB américain n'est pas ligoté par les décisions de son comité d'urgence (EITF), il
ManuelTheories Comptables-01Dec10 31
32
ne faudra pas considérer que les avis du comité d'urgence seront gravés dans le
marbre. Comme les avis du CNC d'aujourd'hui, ils seront source de droit tant qu'un
avis futur du CNC ne les aura pas infirmés. (BCF, 1996, p. 20, op. cité).
Ces avis auront donc une force supérieure aux recommandations sans pour autant avoir
une force légale en l'absence d'adoption de ces normes par le CRC (voir infra) :
Le CNC avec cette nouvelle organisation devrait donc être à même de mener ses
missions plus rapidement qui se concrétiseront par la publication :
- d'avis adoptés par le conseil et qui pourront être soumis au CRC en vue d'adopter
un texte réglementaire,
Le rôle d'organisme préparateur des normes comptables du CNC est réaffirmé avec
cette réforme, sans pour autant que cette réforme attribue un pouvoir réglementaire
au CNC. La réforme comptable française a opté pour la création d'un nouvel organisme,
le CRC, possédant ce pouvoir réglementaire. Le CNC garde donc son rôle d'instance
consultative tandis que le CRC est institué en tant qu'instance décisionnelle.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 32
33
- le président du CNC :
Si l'on compare les membres du CRC avec ceux du CNC, il apparaît que les membres du
CRC sont presque tous représentés au CNC. Il devrait donc exister une forte identité
dans les positions exprimées par le CRC et le CNC. Le rôle du CRC est d'adopter des
règlements en matière comptable qui s'appliqueront à l'ensemble des secteurs de la vie
économique, à l'exception des personnes morales de droit public soumises aux règles de
la comptabilité publique. Ces règlements sont adoptés à la majorité des voix, la voix du
président est prépondérante en cas de partage égal des voix (article 5.1). Ces
règlements du CRC doivent être précédés de l'avis du CNC (article 3).
Les règlements comptables du CRC doivent ensuite être homologués par arrêtés
conjoints du ministre chargé de l'économie, du ministre de la Justice et du ministre
chargé du budget. Dès leur homologation par arrêtés, ces règlements qu'il s'agisse de
prescriptions comptables générales ou le cas échéant de règles sectorielles (par
exemple des règles bancaires ou d'assurances) qui s'y ajoutent ou s'y substituent, ont
force obligatoire et s'appliquent à toute personne physique ou morale légalement
soumise à l'obligation de tenir une comptabilité en raison de son activité ou de son
objet social.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 33
34
"tant que le CRC n'aura proposé l'homologation de règlements les remplaçant ou les
modifiant. En revanche, le problème de la coexistence des textes anciens et nouveaux
(décret du 29 novembre 1983 et futurs arrêtés) devra être étudié. Une solution possible
consiste à proposer de déclasser en arrêtés certaines dispositions du décret a précisé le
nouveau président du CNC (BCF, 1996, p. 23; op. cité).
Le droit comptable reviendrait donc à l'initiative du CRC et du CNC puisque ces deux
organismes élaboreraient la plus grande partie des normes incluses dans le droit
comptable, mais la validation finale serait du ressort des instances politiques en
l'occurrence par le biais d'arrêtés interministériels.
On peut noter que le processus d'adoption des normes est plus cohérent puisque toutes
les normes comptables sont soumises pour avis au CNC. De même, le CRC, chargé de la
transformation des avis du CNC en règlements, travaille en étroite collaboration avec le
CNC, et à la limite on pourrait considérer que le CRC est un comité restreint du CNC
ManuelTheories Comptables-01Dec10 34
35
puisque presque tous les membres du CRC sont représentés au CNC. Enfin, comme la
structure administrative du CNC et celle du CRC sont identiques (le secrétariat général
travaillera pour le compte des deux organismes), on peut supposer que les délais de
transmission et d'adoption seront très courts.
Au vu de ces remarques sur les liens très étroits unissant le CNC et le CRC, il est
possible de se demander s'il n'aurait pas été possible de regrouper en une seule
structure les compétences du CNC et du CRC. Cette optique n'a pas été privilégiée
semble-t-il pour une raison juridique, le CNC étant créé par un décret et le CRC par une
loi.
En résumé :
En revanche, toutes les normes comptables émises par ces deux organismes (le Comité
de réglementation bancaire et financière et le Conseil national des assurances) devront
être soumises pour avis au CNC avant qu'elles ne puissent être transformées en
règlements par le CRC et par la suite être homologuées sous la forme d'arrêtés
interministériels.
III.... CONCLUSION/SYNTHESE
La France appartient aux pays de droit écrit. Cela a des incidences directes sur la
comptabilité et le processus d'élaboration des normes comptables. C'est ainsi que la
comptabilité est un instrument de preuve entre commerçants et de calcul de l'impôt
avant d'être une information financière en direction des marchés financiers. Toutefois,
ManuelTheories Comptables-01Dec10 35
36
Ainsi, des facteurs comme la fiscalité ou les aspects juridiques semblent avoir moins de
prises sur les normes comptables adoptées et par conséquent sur le processus
d'élaboration des normes comptables. Cette opinion doit là encore être relativisée en
faisant la distinction entre les petites entreprises pour lesquelles la comptabilité
demeure une obligation légale et fiscale, les grandes entreprises qui s'orienteraient plus
vers une information financière et les groupes cotés ou faisant appel public à l'épargne
sur des places étrangères qui aimeraient pouvoir adopter des normes privilégiant les
besoins des investisseurs financiers (normes de l'IASC et du FASB par exemple).
Par conséquent, la France est confrontée à des populations d'entreprises n'ayant pas la
même vision de la comptabilité et de son utilité ce qui complexifie l'action des
organismes de normalisation.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 36
37
- en dotant le CNC d'un comité d'urgence chargé de publier des avis sur des
questions posées par les entreprises. Cela devrait permettre de pallier pour partie le
problème de la comptabilité créative, le CNC étant en mesure de répondre
rapidement aux difficultés d'enregistrement comptable des entreprises. De même, le
CNC voit son champ de compétence élargi ce qui lui permet de traiter le problème
des dérogations aux normes comptables nationales pour les grands groupes cotés ou
faisant appel public à l'épargne sur des places étrangères ;
Ces conséquences peuvent s'observer, au niveau des principes comptables qui sont pris
en référence. C'est ainsi que la comptabilité n'est pas un langage universel car elle fait
ManuelTheories Comptables-01Dec10 37
38
De manière schématique, on peut opposer les pays qui se sont dotés d'un cadre
comptable conceptuel, pour l'essentiel des pays anglo-saxons, des pays comme la
France ayant opté pour une série de principes comptables. En fait, s'il existe des
différences entre les cadres conceptuels et les principes comptables, elles résultent
pour l'essentiel dans l'effort des concepteurs des cadres conceptuels de définir de
manière explicite et dans la mesure du possible non contradictoire des différents
principes et objectifs devant servir de guide à l'établissement des états financiers et
comptables. Ces cadres conceptuels ne sont pas pour autant exempts de critiques, il
demeure toutefois intéressant de présenter cet effort de conceptualisation de la
comptabilité avant de présenter les principes comptables retenus en France.
Le premier cadre conceptuel a été conçu aux Etats-Unis par le FASB à la suite des
conclusions du rapport Trueblood[32] publié en 1973. L'étude des objectifs assignés aux
états financiers a amené le groupe Trueblood à s'intéresser :
- aux informations fournies par la comptabilité et leur adéquation avec les besoins
des utilisateurs,
C'est ainsi que le rapport Trueblood présente une série d'objectifs (voir ci-après figure
8) assigné à la comptabilité qui a été à la base de tous les cadres conceptuels
(conceptual frameworks) élaborés par la suite[33].
ManuelTheories Comptables-01Dec10 38
39
Après le rapport Trueblood, le FASB publia de 1978 à 1985 des "statements of financial
accounting concepts" (SFAC) en tout 5[34]. C'est l'ensemble des 5 SFAC qui forment le
cadre conceptuel du FASB :
ManuelTheories Comptables-01Dec10 39
40
Quant à la fiabilité de l'information, il est fait plus référence aux processus d'obtention
de l'information et notamment à la nécessité de s'assurer que l'information est
véritable, neutre et qu'elle est bien représentative de la réalité.
Ces deux qualités, la pertinence et la fiabilité, doivent être confrontées pour qu'un
équilibre cohérent s'organise. En effet, une information opportune est une information
qui est fournie à temps en fonction des décisions que l'investisseur doit prendre. Mais
cette contrainte de temps peut nuire à la fiabilité de l'information. On peut ainsi poser
le problème de la manière suivante : est-ce qu'il vaut mieux fournir à temps une
information dont la fiabilité n'est pas sûre à 100 % ou bien attendre et ne diffuser que
les informations fiables à 100 % quitte à ce qu'elles ne soient plus opportunes pour
l'investisseur qui a dû prendre sa décision en n'ayant pas à sa disposition au moment
opportun les informations dont il avait besoin [35]?
3. Les définitions des éléments composant les états financiers précisées par le SFAC 3
Elements of financial stantements of business enterprises en 1980. Ces définitions
marquent un effort louable pour définir des concepts comme les actifs, les passifs, les
capitaux propres, les charges, les produits, les pertes et les gains.
- Les actifs sont des avantages économiques futurs probables obtenus ou contrôlés
par l'entreprise à la suite d'événements passés.
- Les passifs sont des sacrifices futurs probables d'avantages économiques devant
être consentis à la suite d'obligations actuelles, les obligations d'une entreprise
peuvent être de deux natures : transférer des actifs ou fournir des services ; elles
résultent d'événements passés.
- Les capitaux propres sont un solde résiduel constitué des actifs de la société après
déduction de tous ses passifs.
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41
- Les charges sont des diminutions d'actifs ou des accroissements de dettes au cours
d'une période, à la suite de la production de biens, de la prestation de service ou
d'autres opérations liées à l'activité de l'entreprise.
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44
Il existe d'autres cadres conceptuels dans le monde qui développent les mêmes thèmes
de réflexion abordés par le FASB. Leur contenu variant peu par rapport à celui du FASB,
il ne semble pas utile de les aborder tous ici.
Le cadre conceptuel américain est intéressant à titre de comparaison avec les principes
comptables retenus par la France et qui vont être étudiés à présent.
Les principes comptables en France sont depuis 1983[37] régis par un objectif fédérateur
inscrit dans le code de commerce : l'image fidèle traduisant l'expression anglo-saxone
true and fair view.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 44
45
(…) Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle
du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise.
Lorsque l'application d'une prescription comptable ne suffit pas pour donner l'image
fidèle mentionnée au présent article, des informations complémentaires doivent être
fournies dans l'annexe.
Il est à noter que le code de commerce mentionne "une image fidèle" et non "l'image
fidèle". Est-ce à dire qu'il peut en exister plusieurs et dans ce cas laquelle choisir ? En
fait, toute la première section sur la contingence de la comptabilité a mis en évidence
les différentes interprétations possibles de la comptabilité et de son utilisation. Par
conséquent, la notion d'image fidèle sera différente suivant les pays et les utilisateurs.
C'est ainsi que les états financiers et comptables produits par les différents membres de
l'Europe, et qui ont tous retranscrits dans leur législation, la 4e directive sur les
comptes sociaux et la 7e directive sur les comptes consolidés, ne produisent pas les
mêmes états financiers en raison principalement d'utilisation de dérogations[38]. Pour
autant, les comptes des entreprises européennes doivent tous refléter une image fidèle
de leur situation financière. Cette contradiction apparente entre un objectif commun,
l'image fidèle et les comptes publiés s'explique par la contingence de la comptabilité.
En France, à cet objectif fondamental d'image fidèle sont également associés deux
autres objectifs que l'on peut qualifier de dépendants et qui permettent de cerner la
conception de l'image fidèle en France : la sincérité qui est l'application de bonne foi
de la loi et des règlements et la régularité des comptes qui est la conformité à la loi et
aux règlements (décrets et arrêtés)[39]. En conséquence, l'image fidèle française est
liée aux normes comptables en vigueur (c'est-à-dire la doctrine comptable) car la
régularité et dans une moindre mesure la sincérité s'observent ou se mesurent par
rapport aux normes de références censées représenter les caractéristiques de l'image
ManuelTheories Comptables-01Dec10 45
46
fidèle. L'image fidèle est donc contingente aux règles comptables et à leur évolution.
C'est ainsi que les comptes peuvent être réguliers en ne comptabilisant pas les
amortissements pour dépréciation tant que la doctrine comptable n'oblige pas la
comptabilisation de ces amortissements. De même, peut-on considérer que les états
financiers ne sont pas sincères en ne comptabilisant pas certains engagements futurs
pour lesquels aucune norme comptable ne fait référence ? Cela a été le cas avec les
engagements pour retraites pris par les entreprises mais qui ne figuraient pas dans les
états financiers des entreprises. De même, les biens acquis en crédit-bail ne sont pas
comptabilisés dans les comptes sociaux mais le sont dans les comptes consolidés. Est-ce
à dire que les comptes sociaux sont plus (ou moins) réguliers et sincères que les
comptes consolidés ? Ce qui est certain, c'est que l'image fidèle n'est pas la même pour
les comptes sociaux et les comptes consolidés mais pour autant ces comptes sont
conformes (et donc réguliers et sincères) aux dispositions comptables les régissant.
Ce principe est énoncé dans les articles 8 et 15 du code de commerce et établit que les
états financiers doivent être établis tous les 12 mois.
(…) Elle doit contrôler par inventaire, au moins une fois tous les 12 mois, l'existence
et la valeur des éléments actifs et passifs du patrimoine de l'entreprise. Elle doit
établir des comptes annuels à la clôture de l'exercice au vu des engagements
comptables et de l'inventaire. Ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte
de résultat et une annexe : ils forment un tout indissociable. (art. 8)
De même, ces comptes annuels doivent enregistrer les bénéfices liés à ce seul exercice
ce que l'on nomme également le rattachement des charges aux produits (mécanisme de
ManuelTheories Comptables-01Dec10 46
47
variation des stocks, charges constatées d'avance, produits constatés d'avance) et les
régularisations de fin d'exercices permettant de comptabiliser toutes les charges et
tous les produits engagés (charges à payer, produits à recevoir…)
Seuls les bénéfices réalisés à la date de clôture d'un exercice peuvent être inscrits
dans les comptes annuels. Peut être inscrit, après inventaire, le bénéfice réalisé sur
une opération partiellement exécutée et acceptée par le cocontractant lorsque sa
réalisation est certaine et qu'il est possible, au moyen de documents comptables
prévisionnels, d'évaluer avec une sécurité suffisante le bénéfice global de l'opération.
(art. 15)
ManuelTheories Comptables-01Dec10 47
48
ManuelTheories Comptables-01Dec10 48
49
Ce principe est très important car il conditionne pour une large part les autres principes
notamment ceux liés à l'évaluation des comptes. En effet, la constatation des
amortissements, l'enregistrement des biens pour leur coût d'achat, le calcul des
provisions… doivent faire l'hypothèse d'une continuité d'exploitation. Dans le cas
contraire, par exemple lorsque l'entreprise est en liquidation judiciaire, l'absence de
continuité d'exploitation remet en cause la valeur comptable du patrimoine qui devra
faire référence à leur valeur de liquidation, entraîne la comptabilisation de toutes les
charges liées à la liquidation, remet en cause l'étalement des charges, les
amortissements…
Ce principe est très important dans une optique de comparaison des informations
financières et comptables diffusées par une entreprise, en mesurant l'incidence d'un
ManuelTheories Comptables-01Dec10 49
50
A titre d'exemple, si une entreprise A détient une créance de 100 F sur l'entreprise B et
une dette de 80 F envers cette même entreprise B, les états financiers doivent
mentionner à la fois la créance de 100 F et la dette de 80 F, mais en aucun cas le solde
de 20 F en créance. De même, lorsqu'une entreprise reçoit une subvention pour
financer l'acquisition d'une immobilisation, il n'est pas possible de minorer le coût
d'achat de l'immobilisation du montant de la subvention. Il existe malgré tout quelques
exceptions à ce principe en particulier l'enregistrement des factures d'achat ou de
vente pour le net commercial (c'est-à-dire déduction faite des rabais, remises ou
ristournes inscrits sur la facture).
ManuelTheories Comptables-01Dec10 50
51
L'article 12 du code de commerce précise les modalités de valorisation des biens lors de
leur entrée dans le patrimoine de l'entreprise : coût d'achat, coût de production, valeur
vénale… Cet article précise également que :
En conséquence, le coût d'entrée du bien quelle que soit la valeur d'évaluation retenue
(le coût de production, le coût d'achat ou la valeur vénale), ne peut être modifié par la
suite pour constater une revalorisation du bien. On considère alors que les biens
figurent au bilan pour leur valeur historique et non pour leur valeur réelle.
Il est à noter que les moins-values sont en revanche systématiquement enregistrées soit
par le biais d'amortissement (dépréciation irréversible) soit par le biais de provisions
(dépréciation réversible) par référence au principe de prudence.
Toutefois, les incidences fiscales très lourdes de la réévaluation font que dans la
plupart des cas, les entreprises ne réévaluent pas leur patrimoine en France.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 51
52
Ce principe de prudence est certainement celui qui est le plus en contradiction avec
l'objectif d'image fidèle, ou tout au moins conduit-il à adopter une vue
systématiquement pessimiste : comptabilisation des moins-values et ignorance des
plus-values, sauf rares exceptions comme pour les titres de participation évalués par
équivalence et qui seront étudiés cette année.
Les comptes annuels doivent respecter le principe de prudence (…). Même en cas
d'absence ou d'insuffisance du bénéfice, il doit être procédé aux amortissements et
aux provisions nécessaires.
Il doit être tenu compte des risques et des pertes intervenus au cours de l'exercice,
même s'ils sont connus entre la date de la clôture de l'exercice et celle de
l'établissement des comptes.
Synthèse
Les deux points précédents ont eu pour objectif de montrer quels étaient les impacts
de la contingence de la comptabilité sur l'information financière (sa finalité) sur la
ManuelTheories Comptables-01Dec10 52
53
Conclusion
La comptabilité ne doit pas être conçue comme une simple technique d'enregistrement
d'événements économiques et juridiques. Les objectifs de la comptabilité peuvent
varier dans le temps et dans l'espace en raison de facteurs historiques, culturels et
économiques principalement. Par conséquent, lorsque l'on mentionne que la
comptabilité française est régie par le PCG, on se situe dans un référentiel comptable
particulier et il est bon de savoir qu'il n'est pas universel.
[1]
Michel CAPRON, La comptabilité faut-il y croire pour avoir confiance ? Gérer et comprendre,
décembre 1990, pp. 75-83. Voir en ce sens également Bernard COLASSE, La notion de normalisation
comptable industrielle et normalisation sociale, Revue française de comptabilité, n° 182, pp. 42-46,
septembre 1987.
[2]
AAA (American association of accounting), The entity concept, The accounting review, April 1965,
PP. 358-367.
[3]
Daniel BOUSSARD, Séminaire de recherche de l'AFC, Grenoble, janvier 1981, cité par Michel CAPRON,
(1990), op.cité,P.30.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 53
54
[4]
En particulier, Klaus LUDER, Comparative government accounting study, Interim summary report,
Speyer, (Speyer Forschungsberichte n° 76), 1989. Ces travaux de recherche analysent les comptabilités
adoptées par les Etats, pour l'établissement des comptes nationaux. Il est donc nécessaire de les
adapter au secteur privé des entreprises.
[5]
Camille PINCELOUP, Comptes et comptables contemporains, 1er volume, P. 17, 1976 : "L'ordonnance
royale du 20 mars 1673, que prend Louis XIV, à la demande de Colbert, pour servir de "règlement pour
le commerce des négociants et marchands tant en gros qu'en détail". L'ordonnance comporte 12
chapitres, le 3me traite des "Livres et registres des commerçants, marchands et banquiers". Les
dispositions précises relatives à la tenue des registres et des inventaires, que n'appliqueront guère que
les plus importantes maisons, sont cependant à l'origine de la publication des premiers ouvrages de
comptabilité traitant de méthodes et de procédés pour la tenue des livres. Tels sont "Le parfait
négociant" (1975) et le "Dictionnaire du Commerce" (1724) de SAVARY ainsi que les "Livres et comptes
faits" de BARREME (1782)".
[6]
Cf. PINCELOUP, p. 51, op. cité qui reproduit également le modèle de bilan proposé par LEAUTEY et
qui comporte 4 rubriques : 1. Le capital, 2. Les valeurs d'inventaires (immobilisées, disponibles et
engagées), 3. Les tierces personnes, 4. Les résultats.
[7]
PINCELOUP, op. cité, p. 56
[8]
PINCELOUP, op. Cité, p. 121
[9]
4e directive européenne sur les comptes annuels publiée le 25 juillet 1978
[10]
7e directive européenne sur les comptes consolidés publiée le 13 juin 1983
[11]
En 1947, une proposition de plan de comptes avait été faite par la commission du plan comptable
basé sur le plan allemand de 1937, dit "plan Goering". En fait, le PCG47 français fait plus référence au
plan allemand de Schmalenbach de 1926 qu'à celui de 1937. Voir aussi Jacques RICHARD (1995), The
evolution of accounting chart in Europe from 1900 to 1945 : some historical elements, pp. 87-124, vol.
4, n° 1, The european accounting review.
[12]
Jean-Claude SCHEID & Peter STANDISH (1988), A study of french and English-speacking perceptions
on accounting standardization, European accounting association, Nice.
[13]
Ce plan était composé :
- d'un plan de compte appelé cadre comptable et comportant 10 classes (classes 1 à 5 : comptes de
bilan, classes 6 et 7 : comptes de gestion, classe 8 : comptes de résultat, classe 9 : comptes pour la
comptabilité analytique, classe 0 : comptes de statistiques qui peut s'assimiler à l'annexe) ;
- d'un compte d'exploitation générale (classe 6, 7 et 3 : variation des stocks),
- d'un compte de pertes et profits (classe 8) ;
- d'un bilan ;
- d'une annexe.
[14]
Voir en ce sens Yannick LEMARCHAND (1993), "Du dépérissement à l'amortissement - Enquête sur
l'histoire d'un concept et de sa traduction comptable", Nantes Ouest éd., 719 p., mettant en
évidence que la pratique des amortissements était très fluctuante d'une entreprise à l'autre, et même
au sein d'une même entreprise en fonction des résultats déficitaires ou bénéficiaires.
[15]
PINCELOUP, op. cité, p. 369 : "(…) La nomenclature des comptes s'est complétée de la précision du
langage technique, des définitions, par suite et plus généralement de la doctrine qui manquait à
l'enseignement et que recherchaient dans leur congrès et attendaient depuis longtemps tous les
professionnels".
[16]
BOURG, op. cité, p. 16
[17]
Cf. PINCELOUP, p. 83, "La loi de 1867 sur les sociétés anonymes donne mission à la comptabilité de
"déterminer les bénéfices" (lois de 1914 et de 1917). Les besoins du Trésor, nés davantage encore des
dépenses énormes occasionnées par les guerres, 1870 et 1914-1918, que par l'évolution économique et
sociale, provoquent la recherche de ressources nouvelles, et par suite une pression fiscale qui peut
brièvement se résumer comme suit :
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55
- loi du 29 juin 1872. Création de l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières, dividendes et produits
des sociétés de capitaux,
- loi du 25 février 1901. Institution des droits de succession avec justification du passif commercial.
- loi du 15 juillet 1914. Création de l'impôt sur le revenu. La loi charge la comptabilité de déterminer le
bénéfice taxable.
- loi du 1er juillet 1916. Création de l'impôt sur les bénéfices de guerre qui nécessite comme
précédemment la détermination du bénéfice, solde du compte de pertes et profits et, de plus,
justification des variations du capital.
- loi du 31 juillet 1917. Création de la cédule des bénéfices industriels et commerciaux,
- loi du 25 juin 1920. La loi va plus loin : créant les taxes sur le chiffre d'affaires, elle définit le compte
d'exploitation, et les moyens qui permettent de le contrôler.
Il en résulte que le droit fiscal, par son besoin de contrôle et éventuellement de répression, a
profondément marqué les notions comptables et la comptabilité".
[18]
PINCELOUP, op. cité, p. 366.
[19]
Toute personne ayant obtenu le diplôme d'expert-comptable peut exercer la profession de
commissaire aux comptes. En revanche, les personnes qui n'auraient que l'examen de commissaire aux
comptes, ne peuvent pas exercer en tant qu'expert-comptable. Il existe des incompatibilités dans
l'exercice de ces activités, une même personne ne pouvant établir les comptes d'une société et les
réviser. Ces deux professions s'exercent à titre libéral.
[20]
Cela exclut les experts-comptables exerçant en tant que salariés d'une entreprise, pour lesquels
l'inscription à l'OEC est facultative.
[21]
La Revue française de comptabilité (RFC) et la Revue SIC (science, indépendance, conscience).
[22]
Les très petites entreprises ne sont que marginalement touchées par les normes comptables, en
France par exemple, les très petites entreprises sont dispensées de tenir une comptabilité du point de
vue fiscal (loi Madelin du 6 février 1995).
[23]
Il est vrai cependant que, de manière indirecte, les organismes de normalisation nationaux peuvent
être influencés par les normes publiées par d'autres pays. Par exemple, le traitement comptable des
fonds de pension en France est inspiré des normes de l'IASC et du FASB.
[24]
Toutefois, pour ceux qui souhaiteraient approfondir ce point, il est possible de se reporter aux
travaux menés par le CREA (Centre for research in european accounting) consistant en des analyses
comparatives des modes d'élaboration des normes comptables en Europe. ACCO editor, 1997.
[25]
BCF (1996), La réforme de la normalisation comptable - Entretien avec le nouveau président du
CNC, Bulletin comptable financier, juillet, août, septembre 1996, p. 24.
[26]
Jean-Paul MILOT (1996), Contribution au débat sur l'harmonisation comptable internationale,
Bulletin trimestriel du CNC, n° 107, 2me trimestre 1996, pp. 5-10.
[27]
MILOT (1996, op. cité), distingue "Les pays dans lesquels la comptabilité a pour objet essentiel
d'enregistrer et de quantifier des droits et obligations des destinataires des comptes par rapport à ceux
qui les établissent, de ceux dans lesquels elle sert avant tout à fournir une information sur la
performance et la situation financière de l'entreprise en laissant une certaine souplesse quant aux
conséquences à tirer de ces informations sur les divers domaines" p. 6.
[28]
MILOT, 1996, op. cité p. 8.
[29]
Cf. Jean-Claude SCHEID & Evelyne LANDE, The regulation of financial reporting in France, Centre for
research in european accounting (CREA), May 1996.
[30]
Les avis émis par les organismes professionnels tels que l'OEC ne sont donc pas soumis au CNC.
[31]
Henri GIOT, Création du CRC - Réforme du CNC, SIC n° 146, octobre 1996, p. 13.
[32]
Groupe de travail créé en 1971 sur l'initiative de l'AICPA (American institute of certified public
accountants) avec pour mission d'étudier les objectifs des états financiers.
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56
[33]
Aux Etats-Unis, le FASB de 1978 à 1985 pour le secteur privé et le GASB (governmental accounting
standards board) en mai 1987 pour le secteur public ont défini des cadres conceptuels, il en va de
même au Canada avec l'ICCA (Institut canadien des comptables agréés, 1988), l'ONCC (office des
normes comptables du Canada, 1987) et le comité secteur public de l'ICCA (1984), en Australie sous
l'impulsion de l'AARF (Australian accounting research foundation) et enfin au niveau international le
cadre conceptuel de l'IASC.
[34]
Les 5 SFAC sont :
- SFAC 1 : Objectives of financial reporting by business enterprises (nov. 1978),
- SFAC 2 : Qualitative characteristics of accounting information (mai 1980),
- SFAC 3 : Elements of financial statements of business enterprises (déc. 1980),
- SFAC 4 : Objectives of financial reporting by non-business organizations (déc. 1980),
- SFAC 5 : Recognition and measurement in financial statements of business enterprises (déc. 1984).
[35]
Ce problème existe également à un autre niveau, celui du journalisme. En effet, les journaux
doivent diffuser des informations fiables (donc vérifiables, neutres et proches de la réalité) et
pertinentes (donc opportunes ou fournies à temps). Or, l'effet d'annonce tout comme la primeur ou
l'exclusivité d'une information ont un impact publicitaire important en démontrant la capacité
d'information du journal par rapport à ses concurrents, mais il doit toujours s'assurer de la fiabilité de
ses sources s'il ne veut pas que son image en soit ternie.
[36]
Le FASB distingue 5 composantes dans les états financiers :
- une situation financière à la clôture de l'exercice (financial position)
- les résultats des périodes (earnings),
- le résultat global de la période (comprehensive income),
- un tableau des flux pendant la période (cash-flow),
- les investissements en capital et les distributions aux propriétaires du capital pendant la période
(investments by and distributions to owners).
[37]
Loi du 30 avril 1983 modifiant les articles 8 à 17 du code de commerce
[38]
Cf. Lefebvre "Communauté européenne" 1996/1997, n° 9502 "Les Etats membres sont chargés de les
intégrer dans leur législation nationale, en amendant ou complétant leur propre législation, lorsque
celle-ci ne comporte pas de dispositions correspondant à celles exigées. La méthode a l'avantage de
rendre chaque Etat membre responsable de la mise en place de la directive. L'inconvénient est que
certaines dispositions ont pu être interprétées de manière différente dans chacun des Etats membres et
que la mise en application est lente : certains pays n'ont toujours pas adapté leur législation ou n'ont
procédé qu'à une adaptation partielle de celle-ci". n° 9504 "Les directives ne contiennent que les
"exigences minimales", condition nécessaire pour arriver à une harmonisation des états financiers. Des
questions sur lesquelles il paraissait plus difficile d'arriver à un accord ont été volontairement laissées à
l'écart : crédit-bail, impôts différés, conversion en devises étrangères, engagement de retraite.
D'autres questions, devenues d'actualité plus récemment, n'ont pas reçu de réponse au niveau européen
: nouveaux instruments financiers".
[39]
Initialement il y avait seulement une obligation de sincérité et de régularité des comptes. C'est
seulement depuis la loi comptable de 1983 que la notion d'image fidèle a été ajoutée. En ce sens,
l'image fidèle peut s'assimiler à une "super" sincérité et autorise (en France) la dérogation aux règles.
Donc les comptes sont "réguliers" c'est-à-dire conformes aux lois et règlements sauf lorsqu'ils ne
permettent pas de satisfaire l'objectif d'image fidèle. On peut remarquer qu'en Allemagne, l'image
fidèle correspond au strict respect des normes en vigueur tandis qu'en Angleterre, l'image fidèle permet
au comptable de porter un jugement d'ensemble sur les règles comptables pour déterminer si leur
application permet de satisfaire l'objectif d'image fidèle. La France se situe donc à mi-chemin entre les
positions de l'Allemagne et de l'Angleterre.
[40]
Generally accepted accounting principle.
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par
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1. Il nous semble que les écrits sur l’exercice de la profession comptable en Haïti
sont plutôt rares. Mais ce n’est pas là le motif principal de notre choix.
2. L’état actuel de la profession en Haïti, n’est pas tout à fait spontané ni détaché
de notre réalité socio-économique. Et pour preuve, le contexte professionnel
actuel semble vouloir nous rattacher beaucoup plus au passé qu’au présent, si on
considère, les nouveaux développements de la profession partout ailleurs. La
dialectique d’action voulant que le passé soit connu pour mieux comprendre le
présent et le futur, nous entendons profiter de l’étude du cadre légal et
institutionnel de la profession en Haïti comme source de renseignements
historiques et comme tremplin pour mieux poser et appréhender des problèmes
actuels.
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que ce programme est celui qui a été mis en application dès l’ouverture de la filière
des Sciences Comptables à l’INAGHEI en 1981 et qui est aujourd’hui encore en
application avec quelques modifications plutôt à la baisse.
En dehors de toute considération d’ordre évaluatif on peut dire que la reforme a
touché les domaines suivants : la formation, la normalisation et l’exercice
professionnel. Elle a donné naissance aux institutions suivantes :
1. Le Conseil National de la Comptabilité (CONACO)
2. L’Ordre des Comptables Professionnels Agrées d’Haïti (OCPAH)
3. Le Comite des Programmes de L’Enseignement Comptable (COPEC)
4. L’Ajout de la Filière des Sciences Comptables au Curriculum de L’INAGHEI
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Les Membres d’Honneur ; ce sont des personnes qui ont rendu des services
méritoires à la profession et à qui le Conseil de l’Ordre a décidé d’octroyer ce
titre purement honorifique.
1. Les Stagiaires sont des postulants qui ont subi avec succès les examens
d’admission mais qui n’ont pas encore le minimum de cinq ans (5) d’expérience
pratique pertinente prescrite par les règlements intérieurs parmi les exigences
pour devenir Membre Actif de l’Ordre.
2. Les Postulants Etudiants sont des étudiants admis, au moins, en deuxième année
dans un programme de formation universitaire en Sciences Comptables dispensé
par une institution d’Enseignement reconnue ; lesquels étudiants ont
volontairement demandé de se placer sous la Surveillance et l’autorité
disciplinaire de l’Ordre pendant leur cheminement pour en devenir membre actif
à part entière.
ADMISSION A L’OCPAH
Peuvent devenir membres actifs les personnes physiques réunissant les conditions
suivantes :
Etre majeur et de nationalité haïtienne.
Détenir à la date d’inscription un diplôme en Sciences Comptables.
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Conclusion
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RÉFÉRENCES :
Décret du 16 avril 1981 instituant le Plan Comptable National, le Conseil National
de la Comptabilité et de l’Ordre des Comptables Professionnels Agréés d’Haïti.
Décret du 11 octobre 1983 mettant le Plan Comptable National en application à
partir du 1er octobre 1983.
Décret du 31 octobre 1983 restructurant sur de nouvelles bases l’enseignement
des sciences comptables et instituant le Comité des Programmes de
l’Enseignement Comptable.
Arrêté du 11 novembre 1983 créant l’Ordre des Comptables Professionnels Agréés
d’Haïti.
Le livre d’or des Comptables professionnels Agréés d’Haïti incluant : Le Code de
déontologie des CPAH ; Les statuts Règlements intérieurs de l’OCPAH
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Les découvertes des archéologues permettent aujourd’hui d’affirmer que les rudiments
de la comptabilité remontent à plusieurs milliers d’années avant notre ère. Les plus
anciennes traces de comptage figurent sur des os d’animaux, dont un radius de loup,
vieux de plus de vingt mille ans, comportant cinquante-cinq encoches réparties en deux
séries. Il constitue probablement la plus ancienne “machine à compter” connue
chaque fois que le chasseur tuait un gibier, il entaillait l’os d’un cran. Les multiples
encoches, sous forme de traits verticaux, retrouvées sur les parois des grottes
préhistoriques témoignent également du besoin que l’être humain a éprouvé très tôt de
compter. Avant que le nombre ne devienne une conception abstraite, l’utilisation des
cailloux a été très répandue et a donné naissance au mot calcul (du latin calculus:
petit caillou). Durant l’antiquité, les Grecs, les Perces se servaient de ficelles; les Incas
nouaient toujours, au moment de la conquête espagnole, des cordelettes de différentes
couleurs, désignant la nature des biens dénombrés; l’ensemble de ces cordelettes
constituait des registres comptables et statistiques.
Les bergers ont longtemps compté leurs têtes de troupeaux en gravant des traits
verticaux sur des planchettes de bois: cette pratique a laissé des traces jusqu’au xxe
siècle, notamment en France chez certains boulangers qui utilisaient cette méthode
pour vendre le pain à crédit.
Les cailloux ont laissé la place à des objets en terre crue, de tailles et de formes
différentes, chacun représentant conventionnellement un ordre d’unité d’un système
de numérotation. Certaines pratiques consistaient à enfermer ces objets dans des
bulles-enveloppes (sachets en argile sphériques ou ovoïdes), sur lesquelles pouvaient
figurer des inscriptions numérales. Au IVe millénaire avant notre ère, en basse
Mésopotamie, une brillante civilisation, celle des Sumériens, utilisa des tablettes
d’argile crue rectangulaires pour y tracer à la pointe des dessins représentant des êtres
et des objets. Ces signes permettaient d’effectuer des inventaires d’entrepôts et,
l’argile une fois séchée, d’en garder la mémoire. La transformation des signes utilisés,
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sous l’effet d’un changement du stylet qui gravait l’argile, donna progressivement
naissance à l’écriture cunéiforme. Presque simultanément, le même phénomène
conduisit, dans l’Égypte pharaonique, aux hiéroglyphes, puis à l’écriture hiératique,
cursive, que les scribes transcrivaient sur des papyrus. En liant leur sort à l’écriture,
les premiers systèmes comptables offraient la possibilité à l’humanité d’accéder du
langage à la durée.
Vers 1750 avant notre ère, l’Hammourabi, monarque de Babylone, fit graver sur un bloc
de diorite (exposé au Musée du Louvre) le plus ancien recueil de lois commerciales et
sociales connu, imposant notamment l’obligation légale de l’enregistrement, en forme
de comptes, de certaines transactions (par exemple, le contrat de commission). Étant
donné l’intense activité commerciale de cette région à cette époque, l’utilisation des
lettres de crédit nécessitait des techniques comptables appropriées et en particulier
des comptes récapitulatifs. Toute la vie publique et privée se déroulait sous l’égide
des temples, et ce sont eux qui constituaient les centres de tenue comptable. Ils
resteront très longtemps le lieu privilégié des échanges et deviendront, dans la Grèce
ancienne, les premières banques de dépôts, réunissant pratiquement tous les éléments
de la technique financière moderne, y compris les chèques et les virements directs de
compte à compte. Les premiers banquiers, qui étaient généralement des changeurs de
monnaie, tenaient un livre-journal ou éphémérides détaillant les opérations
quotidiennes. C’est ainsi que les recettes et dépenses étaient inscrites les unes en
dessous des autres dans un ordre chronologique donnant lieu à un jeu d’additions et de
soustractions. Il existait également des comptes synthétiques résumant les opérations
au cours d’une période donnée. Les registres de ces banques avaient une valeur
probatoire reconnue de tous.
Les livres comptables des romains dont il nous reste de nombreuses traces portaient le
nom de calendaria. Très précis et méticuleux, les banquiers romains perfectionnèrent
la technique comptable en ouvrant des comptes de tiers et appelèrent adversaria le
journal du premier enregistrement. On leur doit l’idée, bien qu’il ne s’agisse pas
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70
encore de comptabilité en partie double, de faire deux colonnes dans les livres de
caisse, afin de séparer les encaissements et les sorties de fonds, avec les intitulés
acceptum (crédit) et expensum (débit).
Au Moyen Âge, peu de gens savent écrire et les livres de comptes, lorsqu’ils existent,
ont surtout pour but de conserver une mémoire des opérations commerciales, d’où le
nom qui leur est attribué: “mémoriaux”. Dans leur forme primitive, les écritures dans
un mémorial se suivent dans un ordre chronologique, sans classification, et se limitent à
un enregistrement des créances et des dettes. Mais d’autres mémoriaux plus évolués
retracent des opérations de caisse et même des inventaires. Les moines dans les
abbayes jouent un rôle essentiel dans la tenue de ces documents.
Néanmoins, la période des croisades (1096 - 1251) fut propice à l’extension du crédit et
à la prospérité d’ordres militaro-religieux, comme les Templiers, véritables puissances
économiques et financières internationales. Leurs monastères devinrent des
forteresses, où leurs valeurs étaient en sécurité, et des établissements de crédit: les
templiers devaient tenir un compte exact de leurs recettes et de leurs dépenses et
pouvoir justifier de la gestion des biens à la moindre requête. Les comptes des clients
étaient tenus d’une manière identique à celle des comptes de banque aujourd’hui.
Innovation importante: ils prirent l’habitude d’arrêter les comptes périodiquement,
trois fois par an, au moment des échéances des fermages, et de reporter à chaque
échéance le solde de l’arrêté précédent. Il s’agissait là d’un véritable compte courant;
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au débit figurent les sommes dues par le client; au crédit, ses versements, le solde seul
étant dû. Les écritures étaient enregistrées chaque jour dans un journal, puis
reportées dans des grands livres.
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72
dans la tenue de leurs affaires. Il se forme alors des sociétés commerciales qui
préfigurent les sociétés par actions et constituent l’ossature du capitalisme naissant.
La comptabilité doit donc adapter et perfectionner ces méthodes pour répondre aux
nouvelles exigences de l’activité économique.
Dès la fin du XIIIe siècle, les comptables vénitiens et florentins tiennent un compte par
client et par fournisseur, sur lequel ils enregistrent le “doit” (synonyme de débit) et l’
“avoir” (synonyme de crédit) de chacun d’eux. Chaque opération requiert deux
écritures: l’une sur le compte de tiers, l’autre sur le compte de caisse, et nécessite la
tenue de livres différents. Parallèlement les commerçants et les premiers
“entrepreneurs” éprouvent le besoin d’évaluer les mouvements de leur patrimoine (par
exemple, la cargaison d’un navire avant après l’expédition).
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73
Quoi qu’il en soit, la comptabilité en partie double est née: si l’on en retient la
définition donnée par Pierre Garnier, elle se distingue d’une simple tenue des comptes
en deux colonnes par deux éléments caractéristiques: une dualité d’inscription dans les
comptes (chaque écriture a nécessairement sa contrepartie) et un jeu complet de
comptes (personnes, valeurs, débours, résultats et capital).
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74
Karl Marx s’est attaché à décrire le rôle de la comptabilité dans la division sociale du
travail. Dans le livre I du Capital, il montre que les communautés archaïques des Indes
avaient déjà, pour les travaux agricoles, un comptable dont la fonction était exclusive.
Dans le livre II, il souligne que “la comptabilité, contrôle et synthèse idéale du
processus de production, devient d’autant plus nécessaire que la production s’effectue
davantage sur une échelle sociale et perd son caractère purement individuel; donc plus
nécessaire dans la production communautaire que dans la production capitaliste”.
Dans le seul texte où il esquisse les principes généraux de la société communiste
(Critique du Programme de Gotha du parti social-démocrate allemand), Marx fournit
des indications d’ordre comptable sur la manière dont doivent être constitués les
différents fonds d’affectation des fruits du travail.
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75
d’habitudes de pensée, qui sont sans conteste des biens culturels et qui, comme tels,
voyagent et s’échangent”, il faut reconnaître que la comptabilité en partie double
constitue l’un de ces moyens, et qu’elle s’est perpétuée jusqu’à nos jours.
Si, depuis le traité de Luca Pacioli, les méthodes d’enregistrement comptable n’ont pas
subi de profonds bouleversements, la comptabilité a évolué sous l’effet des progrès
techniques et des changements économiques et sociaux. A partir du XVe siècle,
l’invention de l’imprimerie permet de généraliser progressivement et inégalement la
partie double à l’ensemble de l’Europe et, en premier lieu aux régions où s’épanouit
l’expansion du commerce. Au XVIe siècle, le centre de la littérature comptable se
déplace de l’Italie du Nord vers les Pays-Bas, mais la partie double ne gagne pas encore
l’Allemagne. La France qui, au XVIIe siècle, occupe une place dominante en Europe, va
donner à la comptabilité son visage contemporain: une ordonnance de Colbert en 1673,
oblige les commerçants à tenir des livres comptables, tandis que le livre journal
devient un moyen juridique de preuve.
Ainsi apparaît une nouvelle fonction de la comptabilité qui devient auxiliaire de l’État
dans la surveillance et le contrôle de l’activité économique liant, par-là même, son
devenir au rôle fiscal et à l’interventionnisme de l’État.
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76
L’essor de la grande industrie, dans la seconde moitié du XIXe siècle, fait naître, en
particulier aux États-Unis, un besoin de connaissance des coûts de produits, qui ouvre
la voie à la comptabilité analytique qu’on appellera aussi comptabilité industrielle. La
comptabilité devient un instrument interne d’aide à la décision, de prévision et de
contrôle de gestion.
Au XXe siècle, les États nations se préoccupent d’une formalisation des règles
comptables, imposée à toutes les entreprises, afin de répondre aux besoins de la
collectivité et, en particulier, aux exigences d’information du fisc. Dans les pays
occidentaux, c’est l’Allemagne nazie qui, la première, en 1937, adopte un plan
comptable (“plan Goering”) unifiant les principes et les méthodes de la comptabilité
des entreprises. En URSS, également, la réalisation des plans quinquennaux est suivie,
au niveau des unités de production, grâce à la mise en œuvre d’un plan comptable
général: le premier date de 1925.
Aux États-Unis, on s’est inquiété très tôt de définir des méthodes et des principes
communs, mais il faut attendre la crise de 1929 qui jette une lumière crue sur les
insuffisances de l’information financière, pour que les milieux professionnels, en liaison
avec les pouvoirs publics, édictent les premières règles essentielles.
En France, le premier plan comptable est élaboré en 1942 sous le régime de Vichy. Il
n’est pas appliqué, mais le plan de 1947 s’en inspire néanmoins. Il est révisé en 1957
et une troisième version, préparée à partie de 1971, débouche sur le plan actuellement
en vigueur, promulgué en 1982.
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78
Par
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On attend beaucoup de la comptabilité parce qu’elle est censée apporter, d’après les
termes de la législation française. une « image fidèle du patrimoine, de la situation
financière et du résultat de l’entreprise ». Cette idée a été empruntée à to législation
britannique qui a généré l’expression true and fair view (« vue exacte et loyale:). Or,
cette expression n’a jamais été vraiment définie et a suscité beaucoup de com-
mentaires critiques.
On a fait valoir qu’il pouvait exister plusieurs images « fidèles » d’une même réalité,
comme il peut exister plusieurs représentations photographiques à un même objet
selon l’angle de prise de vue, l’éclairage, la distance, etc. et qu’il faudrait, par
conséquent, choisir entre ce qui apparaîtrait le plus conforme à la loi ou le plus
conforme à la situation donnée. Et on a aussitôt mis l’accent sur les risques de
contradiction qui pouvaient apparaître entre le respect des principes comptables et le
souci de reflet de la réalité économique. On privilégiera, selon le cas, les valeurs
historiques, économiquement significatives ou des comptes fournissant des résultats
socialement admissibles ou bien encore des critères imposés par le fisc.
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80
La question de l’authenticité ne peut être examinée sur un plan ontologique 2, car nous
avons vu que la comptabilité n’existe pas, en e1le-même, mais dans des conditions
sociales et historiques déterminées. L’authenticité peut renvoyer à la sincérité : un
bilan pourra être déclaré faux si l’on a pu prouver l’intention de tromper.
L’authenticité peut aussi renvoyer à la qualité d’un document émanant réellement de
l’auteur auquel on l’attribue, d’où l’importance des signatures (notamment celles des
Commissaires aux comptes) qui produisent un effet d’authenticité.
2 ontologique adjectif
Philos.
1. Relatif à l'ontologie.
– Preuve ontologique de l'existence de Dieu, qui consiste, après avoir posé Dieu comme parfait, à soutenir que, s'il lui manquait
l'existence, il ne serait pas parfait, donc qu'il existe. (Elle a été utilisée en particulier par saint Anselme.)
2. Qui relève de l'être (par opp. à ontique). 2
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81
En vertu de cette analyse, il n’est donc pas’ possible de dire que la comptabilité est en
mesure de délivrer une vérité, un message objectif. Il est donc vain de vouloir
connaître, comme le font souvent certains médias, la « vraie » valeur ou le résultat «
réel » d’une société lorsque plusieurs estimations sont avancées. Comme l’écrit le
doyen André Cibert, il y a autant de vérités que de destinataires de l’information et
dans la mesure où elle exclut le qualitatif, l’effet réducteur de toute mesure est
inévitable. D’autres (Pierre Lassègue, Bernard Colasse, Daniel Boussard...) ont
également admis que la comptabilité ne dit pas le « vrai » et n’est qu’un filtre
permettant l’appréhension d’une réalité. Néanmoins, grâce à sa cohérence interne, qui
en fait à la fois sa force et sa faiblesse, la comptabilité permet d’arriver à une vérité
formelle qui repose sur ses postulats de départ: conventions, normes, règles de
classification... .
Ainsi, la comptabilité n’est pas le révélateur magique que d’aucuns attendent. On est
souvent tenté de dire qu’elle ferait bien, comme les miroirs de Jean Cocteau, « de
réfléchir avant de renvoyer les images ». A l’inverse, peut-on dire que la comptabilité
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Nous avons déjà pu nous rendre compte que les directions pouvaient, en jouant de
toutes les possibilités fiscales légales, moduler le résultat final. Malgré la
réglementation apparemment rigoureuse, les entreprises ont de grandes latitudes pour
constituer des provisions qui ne sont pas déductibles fiscalement, mais diminuent le
résultat présenté aux actionnaires et aux représentants des salariés. Des « oublis » de
constitution de provision ou de non-reprise de provision sent aussi des moyens usuels
d’« ajustement » du résultat.
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83
législation en rend l’illégalité discutable. Dans tous les cas, ces pratiques conduisent à
une « déformation » du résultat, qui vise généralement à rendre un bénéfice moins
important, ou une perte moins conséquente. On constate ainsi, sur une longue période,
un effet d’atténuation des irrégularités des résultats des entreprises. La technique de
déformation consiste en une majoration ou minoration de produits ou de charges..
Les cas les plus connus, mais difficilement démontrables qui peuvent s’appliquer aux
quatre hypothèses précédentes, sont la livraison de produits sans factures et l’artifice
des prix de transfert. La première est surtout répandue dans l’artisanat et le petit
commerce et se trouve immanquablement liée au phénomène du travail clandestin. Les
prix de transfert, au contraire, ne peuvent se pratiquer que dans les groupes, c’est-à-
dire dans un ensemble de sociétés relevant d’une même autorité. Les prix de cession
de marchandises ou de services son majorés ou minorés par rapport aux prix usuels du
marché, de façon à transférer le bénéfice d’une société dans l’autre (généralement
dune société bénéficiaire à une société déficitaire) ou, dans les groupes
multinationaux, d’une société implantée dans un pays à lourde fiscalité vers une
société implantée dans un « paradis fiscal » (Luxembourg, Bahamas, Bermudes..).
L’industrie pharmaceutique est réputée pour effectuer cette pratique entre filiales
industrielles et filiales de commercialisation.
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Les postes comptables se prêtant le plus à des possibilités de majoration du résultat (ou
de minoration) sont les postes dons les valeurs sont appréciées en fonction du coût de
revient. Même sans intention de fraude, une mauvaise connaissance des données
analytiques par l’entreprise, ou tout simplement des modes de comptabilisation
différents conduisent à des résultats différents. C’est le cas avec la prise en compte
des produits nets partiels issus de travaux en cours d’exécution d’un contrat à long
terme : le prix de vente définitif est susceptible de modification et le degré
d’avancement des travaux à une date précise n’est pas aisé à déterminer (c’est le cas
notamment des entreprises qui ont à l’étranger des contrats de grands travaux
d’infrastructure ou des contrats d’ingénierie).
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Dans les petites et moyennes entreprises, à caractère familial, l’attention se porte plus
vers les virtualités de charges indues d’exploitation : frais généraux excessifs,
notamment, dus à des confusions (volontaires ou involontaires) entre les dépenses
privées du chef d’entreprise et de sa famille et les charges dues à l’activité spécifique
de l’exploitation de l’entreprise. Il est assez fréquent que la cuisinière ou le jardinier
attachés au service de la maison du chef d’entreprise soient salariés de l’entreprise,
sans parler de la voiture de fonction dont dispose sa famille. L’exemple, sans doute le
plus spectaculaire, est celui des frères Schlumpf qui, en quelques dizaines d’années,
avaient trouvé le moyen de mettre à la charge de leurs entreprises textiles en Alsace le
financement de leur hobby : la constitution, à Mulhouse, du plus grand musée mondial
de voitures anciennes !
Mais gare à ceux qui dénoncent trop haut et trop fort les sociétés qui pratiquent les
maquillages de comptes. Terry Smith, analyste financier de l’une des plus célèbres
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Toutes ces illustrations montrent à quel point le résultat comptable ne présente aucune
signification économique et que son usage, notamment dans les ratios d’analyse finan-
cière, doit être soigneusement évité. Ce n’est malheureusement pas la pratique de la
presse, des médias et de la plupart des analystes économiques qui continuent de
présenter et de commenter les réussites et les difficultés des entreprises à partir des
chiffres des résultats comptables (c’est le cas, en particulier, lorsqu’il s’agit
d’apprécier les entreprises publiques industrielles). Quand ouvrira-t-on enfin les yeux
du grand public en lui disant clairement qu’une perte (comptable) ne signifie pas
nécessairement « perdre de l’argent » ?
Plusieurs auteurs ont souligné combien la recherche d’« image fidèle » pouvait entrer
en contradiction avec certains principes comptables ou comment certains principes
pouvaient être contradictoires entre eux. André Cibert s’est en particulier attaché à
montrer la « contradiction majeure » entre le principe de prudence et le principe de
continuité d’exploitation. Le principe de prudence conduit souvent à retenir des
valeurs d’actif proches des valeurs vénales de liquidation, par conséquent à sous-
évaluer les moyens d’activité de l’entreprise et, en gonflant les provisions pour dépré-
ciation, à avoir un effet de minoration des résultats, alors qu’à l’inverse la
comptabilisation des plus-values latentes n’est pas admise.
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Vouloir, à partir de ces valeurs, tirer des enseignements sur la situation de l’entreprise,
en mettant en rapport certaines grandes masses du bilan, en particulier entre le haut
et le bas, relève alors d’un exercice périlleux ou purement conventionnel. Tant en
France qu’à l’étranger, la littérature comptable relative aux problèmes posés par
l’inflation est abondante, mais aucune solution définitive n’a pu être trouvée. Les
comptabilités anglo-saxonnes ont été les premières, surtout depuis 1975, à se
préoccuper de trouver des remèdes appropriés.
En France, depuis la fin des années soixante, le patronat n’a cessé de réclamer une
réévaluation légale des actifs immobilisés, arguant principalement du fait que la sous-
évaluation de la valeur des moyens de production des entreprises donnait aux banquiers
et aux créanciers une vision pessimiste, les incitant à accorder les prêts de façon
parcimonieuse. Il s’est très longtemps heurté à l’administration des finances qui
traduisait réévaluation des bilans par manque à gagner pour les recettes fiscales de
l’État (une réévaluation des immobilisations entraîne, en effet, une charge
ManuelTheories Comptables-01Dec10 87
88
Même après une réévaluation, qui reste une mesure ponctuelle, plus le temps passe et
plus l’analyste financier se trouve confronté aux mêmes problèmes concernant la
mesure de la rentabilité (difficulté la plus souvent évoquée). En effet, la situation
inflationniste est plus complexe qu’une hausse générale des prix : les hausses sont
différenciées selon les biens et surtout les dettes et les créances, en vertu du Code
civil, restent à leur valeur nominale. On oublie trop souvent que l’endettement, en
période d’inflation, présente des avantages financiers incontestables qui ne sont pas
chiffrés par la comptabilité.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 88
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En effet, face aux différentes solutions que leur offrent, en particulier, les
possibilités fiscales, les directions d’entreprises doivent, avant l’arrêté définitif des
comptes, effectuer des choix entre des contraintes contradictoires et les intérêts qui
en résultent. Il leur faut notamment anticiper les comportements prévisibles des
différents « partenaires » de l’entreprise.
La première préoccupation est généralement d’ordre fiscal : pour ne pas avoir d’ennuis
avec le fisc, on aura tendance à décider des choix comptables en fonction des
possibilités de choix fiscal ; mais, parallèlement, pour payer le moins d’impôts
possibles, on s’efforcera, par exemple, d’accroître les charges déductibles afin de
réduire au maximum le bénéfice fiscal, voire d’induire une perte fiscale reportable sur
d’autres exercices ; c’est ce que les spécialistes appellent une « stratégie
d’optimisation fiscale ». Cette pratique ne peut cependant être reproduite
systématiquement à chaque exercice, car elle risquerait d’éveiller les soupçons du fisc
et de provoquer prématurément un contrôle fiscal qui n’a lieu, en moyenne, que tous
les huit ou neuf ans.
Il faut tenir compte de l’attitude des actionnaires qui sont surtout attentifs au montant
du bénéfice (comptable), car c’est à partir de ce bénéfice que pourront leur être
versés des dividendes ; or, une société qui ne distribue jamais ou rarement des
dividendes perd la confiance de ses actionnaires et ceux-ci cherchent alors à se
ManuelTheories Comptables-01Dec10 89
90
Les intérêts propres des dirigeants peuvent, eux-mêmes, être contradictoires : vis-à-vis
des salariés, ils auront tendance à vouloir réduire le bénéfice, voire à présenter une
perte de manière à pouvoir calmer les ardeurs revendicatives ou à pouvoir justifier des
mesures de compression de personnel ; mais si, simultanément, ils ont besoin d’un prêt
bancaire, ils doivent être en mesure de présenter une situation financière saine et des
résultats d’exploitation performants pour convaincre l’organisme financier de leur
accorder ce prêt. En général, les managers d’entreprise qui ne sont pas de gros
actionnaires souhaitent dégager un résultat confortable, distribuer relativement peu de
dividendes et conserver le maximum de ressources financières propres en vue de
développer l’entreprise.
La décision finale, appartenant aux organes statutaires de gestion, sera soit un savant
dosage entre ces divers intérêts contradictoires, soit un choix délibéré pour l’un
d’entre eux, en fonction de l’opportunité ou de l’urgence du moment.
Dans une étude réalisée en vue d’un congrès commun tenu en octobre 1989, l’Ordre
des experts-comptables et la Compagnie des commissaires aux comptes concluaient
que si les utilisateurs d’informations normalisées sont satisfaits, en revanche, les
demandeurs d’informations personnalisées ne le sont pas. Il est en effet
particulièrement difficile de concilier, dans un document unique de présentation des
résultats, des exigences qui relèvent de stratégies différentes et souvent
contradictoires.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 90
91
Dans ces conditions, il faut d’abord se garder de n’utiliser qu’une seule notion de
profit. En effet, l’entreprise dégage une certaine masse de profits (bruts), mais celle-ci
se trouve amputée de différents prélèvements financiers : rémunération des prêteurs
de capitaux, ponction fiscale de l’État, « rémunération » éventuelle des actionnaires,
etc.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 91
92
Pour la partie du profit restant dans la firme, qui constitue ses ressources propres et
qu’on appelle autofinancement, une méthode relativement simple consiste à déduire
les charges des produits, à l’exception des charges calculées et en reprenant les
produits calculés ; ce qui, en calculant par le bas du compte de résultat, donne la
formule suivante
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93
les charges financières sont une part du profit d’exploitation transférée aux organismes
financiers.
ManuelTheories Comptables-01Dec10 93
94
Commentaires du Professeur :
vérité
Définition : Qualité d'une représentation qui répond au double critère de la nécessité
et de l'universalité. (Larousse)
Une représentation nécessaire est une représentation qui saisit le réel tel qu'il est
dans son principe, tandis qu'une représentation universelle réalise l'accord de tous les
sujets humains raisonnables.
La représentation vraie
Seule une représentation peut être tenue pour vraie. Parler d'une " réalité vraie " n'a
pas de sens, c'est exclusivement la réalité représentée qui peut être considérée comme
vraie ou fausse.
Depuis Thomas d'Aquin (1227-1274), la vérité est définie comme une adéquation, une
conformité de la chose avec l'esprit qui la conçoit (adequatio rei ad intellectum). Avant
d'examiner ce critère, il convient d'indiquer que la vérité exige d'abord l'adéquation ou
l'accord de la pensée avec elle-même (adequatio intellectus ad rem), qui détermine la
vérité formelle ou logique. Une telle vérité ne nous apprend certes rien sur les choses
elles-mêmes, mais une pensée contradictoire peut en revanche être d'emblée rejetée
comme fausse.
Dire d'une représentation vraie qu'elle doit être conforme au réel, c'est affirmer
ManuelTheories Comptables-01Dec10 94
95
qu'une représentation n'est vraie que si elle est la copie fidèle de la réalité. Or si la
représentation vraie n'est que la simple reproduction de l'objet, elle maintient celui-ci
dans son opacité. Le principe thomiste ne vaut donc que parce que la réalité est
interprétée comme l'expression de la volonté divine, principe de son intelligibilité. Le
critère de l'adéquation signifie l'adéquation de la pensée à l'ordre instauré par la
volonté divine. À cette problématique appartiennent la contemplation platonicienne et
la déduction cartésienne, qui présupposent également que le monde est organisé par
un principe d'intelligibilité.
Le paradoxe énoncé par Albert Einstein - " Il est incompréhensible que le monde soit
compréhensible " - ouvre sur une conception toute différente de la vérité.
L'intelligibilité n'est plus interprétée comme nichée au cœur de la réalité elle-même
mais comme importée dans le monde par l'activité du sujet connaissant. Cette
conception est soutenue par l'empirisme anglo-saxon, le criticisme kantien et mise en
œuvre par la science expérimentale : le réel est interrogé à la lumière d'hypothèses qui
sont vérifiées ou infirmées expérimentalement.
Ainsi se dégagent deux grandes conceptions de la vérité : une conception " réaliste ",
qui présuppose une vérité tapie dans le monde ; une conception " constructiviste ", qui
fait de la vérité le fruit tout entier de l'activité de connaissance.
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Par
Michel Métayer
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Avant propos
Nous vivons aujourd’hui dans un monde dominé par la science et la technologie. Notre
travail, nos loisirs et nos modes d’interaction et de communication avec autrui sont
continuellement remodelés par les découvertes scientifiques et les innovations
technologiques. Que serait notre quotidien sans l’automobile, le téléphone, la pilule
anticonceptionnelle, la télévision ou l’ordinateur ? Nos environnements familiers – la
maison, le bureau, les lieux publics – sont de plus en plus dominés par la technologie.
En moins d’un siècle, la science et la technologie ont complètement transformé notre
milieu de vie.
Par ailleurs, nous pouvons constater que ce développement obéit à une logique où
n’entre en ligne de compte aucune préoccupation morale. Ce mouvement est si
puissant qu’il tend à écraser les considérations morales ou à les traiter comme des
obstacles. Les rapports entre la morale et le couple science-technologie sont souvent
conflictuels. Nous allons, tout d’abord, examiner les sources de ce conflit et quelques-
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unes de ses manifestations les plus typiques, plus particulièrement dans les domaines
de la recherche scientifique et de l’informatique.
La science cherche à décrire ce qui est. Elle élève une prétention à la neutralité et
s’abstient de porter des jugements de valeur. Un énoncé scientifique comme « Si on
fait usage du tabac, on compromet sa santé » ne contient aucune recommandation. Il
ne s’agit que d’un jugement hypothétique. C’est seulement par un jugement de valeur
sur l’importance qu’il accorde à la santé qu’un individu peut adopter une règle de vie
et se prescrire d’arrêter de fumer. Il peut aussi préférer continuer de fumer pour le
plaisir qu’il en retire, quitte à écourter sa vie de quelques années. C’est dans cet esprit
que Jacques Monod, prix Nobel de médecine, écrit : « Il n’y a strictement aucun moyen
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L’analyse qui précède peut sembler mener à la négation de tout fondement solide et
objectif des jugements moraux et poser l’activité scientifique comme essentiellement
extérieure à la morale. Cette perception est pourtant très contestable et peut être
assez facilement réfutée. Il suffit de montrer que l’activité scientifique elle-même est
impossible sans un fondement éthique et qu’elle présuppose implicitement un certain
nombre de principes éthiques.
C’est la thèse que soutient le philosophe allemand Karl-Otto Appel dans le passage
suivant : »L’argumentation rationnelle qui est déjà présupposée non seulement dans
chaque science, mais aussi dans chaque discussion de problèmes, présuppose elle-
même la validité de normes éthiques universelles 4. » Selon Appel, l’activité scientifique
est inconcevable en dehors d’une communauté de discussion réunissant l’ensemble des
scientifiques. Cette discussion ne peut avoir de sens que si elle respecte un certain
nombre de normes morales fondamentales, telles que l’interdit du mensonge, la liberté
d’expression, l’égalité de tous les participants à la discussion et la loi du meilleur
argument, suivant laquelle seule la force des arguments doit prévaloir dans une
discussion et non des éléments extérieurs tels que le pouvoir ou le statut social. Si les
savants mentent, s’ils commettent des fraudes, s’ils s’appuient sur l’argent et le
pouvoir pour faire avancer leurs idées, s’ils font entrave à la libre discussion et à la
libre circulation des idées, c’est tout l’édifice de la science qui s’écroule et toute
l’activité scientifique qui perd son sens. Sans cet ensemble de principes moraux
fondamentaux, la science ne peut plus aspirer à la rigueur objective et à la rationalité.
3 Jacques Monod, “De la relation logique entre connaissance et valeurs”, dans Watson Fuller (dir), Responsabilité biologique, Paris, Herman,
1974, p. 20.
4 Karl Otto Appel, L’éthique à l’âge de la science – L’a priori de la communauté communicationnelle et les fondements de l’éthique, trad. Par R. Lelloche et
I. Mittman, Presses Universitaires de Lille, 1987, p. 90.
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100
La même idée peut être abordée sous un autre angle. La recherche de la vérité
objective demande un engagement et des attitudes de vie qui ont une dimension
morale. L’impartialité, l’honnêteté intellectuelle, l’humilité, la maîtrise de soi et la
discipline sont des vertus essentielles au travail scientifique. Le parti d’accepter de voir
le monde tel qu’il est, d’aller au fond des choses et de regarder la réalité en face, sans
savoir à l’avance si cette réalité nous plaira ou non, est un engagement exigeant et
lourd de conséquences.
La pratique scientifique est donc impossible sans l’appui d’une éthique. Mais, le respect
de cette éthique n’a rien d’automatique.
L’activité scientifique ne s’exerce pas en vase clos. La recherche n’est pas à l’abri des
conflits d’intérêts et des activités illégales. On assiste, en cette fin de siècle, à une
prolifération de questionnements éthiques sur les pratiques scientifiques. Le milieu
scientifique ne jouit plus de la confiance aveugle du public et des gouvernements. Trop
de scandales, de fraudes et de pratiques répréhensibles ont été dévoilées pour qu’on
puisse se fier entièrement à la parole des chercheurs. On sait trop bien maintenant que
les scientifiques, malgré la grande rigueur que leur impose leur travail, peuvent être
tentés, comme le commun des mortels, de déroger à leurs devoirs moraux.
brevets, et les chercheurs protègent jalousement le fruit de leurs travaux pour s’en
assurer la propriété intellectuelle.
Le dossier des fraudes scientifiques pèse lourd également dans ce bilan éthique. Dans
les dernières décennies, certains cas de fraudes ont eu un écho retentissant dans les
médias et ont contribué à nourrir la suspicion à l’endroit du milieu scientifique. Par
exemple, le psychologue américain Stephen Breuning a été condamné pour avoir publié
des travaux sur les enfants hyperactifs retardés en se réclamant d’études qu’il n’avait
jamais effectuées. Entre-temps, certains Etats américains s’étaient appuyés sur ces
études pour réorienter leur politique de traitement de ces cas. Un des plus éminents
psychologues américains, Cyril Burt, célèbre pour ses recherches sur l’hérédité de
l’intelligence auprès de couples de jumeaux, est tombé dans une disgrâce totale
lorsque des enquêtes ont révélé que la plus grande partie de ses observations étaient
de la pure fiction. On peut aussi mentionner le cas du docteur Roger Poisson. Le
docteur Poisson, un chirurgien québécois très respecté, a été accusé en 1994 d’avoir
contourné certaines règles de protocole concernant la sélection des participantes à une
recherche sur le traitement du cancer du sein. Cette affaire a fait la manchette durant
plusieurs jours.
En fait, comme dans tous les secteurs d’activités d’une société, le comportement des
individus est déterminé par toutes sortes de motivations et de circonstances. Par
exemple, l’âge des chercheurs s’est avéré être un facteur important sur le plan
éthique. Des études ont en effet démontré que la préoccupation pour les questions
d’éthique décroît à mesure que les chercheurs avancent dans leur carrière. Par ailleurs,
dans certains pays, les savants et les médecins prêtent leur concours à des pratiques
immorales ou les cautionnent par leur statut. Au Pakistan, des médecins procèdent à
l’amputation des mains ou des pieds des voleurs. Au Chili et au Brésil, ils supervisent
des séances de tortures « scientifiques » menées par la police. Dans l’ex-URSS et en
Roumanie, des psychiatres se faisaient complices des politiques d’internement des
opposants politiques au régime.
La recherche menée sur des sujets humains est l’un des aspects les plus controversés de
la recherche scientifique. Les attitudes du milieu scientifique ont beaucoup évolué en
cette matière tout au long du siècle. La date la plus importante dans cette évolution
est 1947, l’année de l’adoption du code de Nuremberg.
Le code de Nuremberg
On sait que ces recherches servaient les desseins des nazis, qui visaient à assurer la
domination de l’Allemagne sur l’Europe. Pour Hitler, tous les moyens étaient bons pour
En réaction aux horreurs dévoilées durant le procès des criminels nazis, le tribunal
militaire américain de Nuremberg formula un code de recherche médical comprenant
dix principes éthiques. C’est le code de Nuremberg. Voici un extrait des plus
importants de ces principes.
Ce nouveau code d’éthique professionnelle eut une grande influence. Il met l’accent
ce qui est devenu le principe d’éthique le plus important dans la recherche avec des
sujets humains, le principe du consentement libre et éclairé. Mais l’adhésion du milieu
scientifique à une éthique de la recherche véritablement respectueuse des sujets
humains fut un processus lent et progressif.
L’APPROCHE UTILITARISTE
0
51 Tiré de Claire Ambroselli, l’éthique médicale, n 2422, Paris, PUF, coll. Que sais-je ? 1988, p. 104-105
0
1 Tiré de Claire Ambroselli, l’éthique médicale, n 2422, Paris, PUF, coll. Que sais-je ? 1988, p. 104-105
L’approche déontologique
De nos jours, il est clair que les considérations utilitaristes, bien que toujours
populaires, ont cédé le pas à une éthique déontologique qui affirme le primat du
principe de respect de la personne et des droits individuels. Un appel au PRINCIPE
KANTIEN DU RESPECT DE LA PERSONNE est tout à fait pertinent pour fonder les
principes d’une éthique de la recherche avec des suites humains :
Toute démarche scientifique, par ses méthodes et quelle qu’en soit la discipline, vise à
acquérir des connaissances ou des savoir-faire sur des êtres humains. Or, certains
moyens de la mise en œuvre de la démarche scientifique sont susceptibles de
provoquer une relation d’objectivité entre le chercheur et le sujet de recherche. Ce
dernier devient alors un objet d’expérience. Il existe un réel danger de penser ou de
traiter le sujet de recherche simplement comme un objet d’expérience, en ignorant ou
en compromettant sa pleine humanité. […] La question éthique devient alors :
comment, dans la recherche scientifique, respecter la dignité des personnes et éviter
les multiples formes de déshumanisation ? Bref, comment traduire par des mesures
concrètes l’impératif kantien du respect de la personne ?
En pratique, l’impératif du respect se traduit par une série de NORMES stipulées dans
des codes de déontologie. Ces normes énoncent certains droits fondamentaux des
participants à la recherche. Le code de Nurremberg, que nous avons cité plus haut,
contenait déjà l’essentiel de ces normes. La plus importante de toutes est celle
affirmant le droit du participant à un consentement libre et éclairé. Cette norme
consacre l’autonomie inaliénable du sujet. Elle vise aussi à établir une égalité
fondamentale entre le scientifique chercheur et le sujet pressenti, qui se rencontrent
en tant que personnes libres et concluent un accord dans un contexte de respect
mutuel.
Que le consentement soit libre implique d’abord qu’aucune pression ne sera exercée
sur les sujets pour obtenir leur participation, qu’aucune sanction ne découlera d’un
refus de leur part. Par exemple, les étudiants d’université, qui sont la population de
cobayes préférée des chercheurs, ne devraient pas craindre une mauvaise évaluation
de leurs professeurs par suite d’un refus. Un patient ne devrait pas voir l’accès à un
service médical lié sa participation à une recherche. Un détenu ne devrait pas devoir
cette procédure soulève plusieurs objections. En particulier, il n’est pas certain qu’elle
garantisse toujours le respect du meilleur intérêt du sujet.
Un des pires exemples d’abus de ce genre a eu lieu à Montréal à la fin des années 50,
r
lorsque le D Ewen Cameron de l’Institut Allan Memorial, attaché à l’Université McGill,
a mené en secret une recherche, subventionnée par la CIA, sur 53 patients
schizophréniques, alcooliques ou dépressifs. Il s’agissait d’expérience de «lavage de
cerveaux». Elles consistaient à maintenir les patients dans un état de sommeil
prolongé, pendant plusieurs mois, en leur administrant des électrochocs et des drogues
comme le LSD et en leur faisant entendre des messages enregistrés des milliers de fois.
Ces expériences furent un échec total, mais elles eurent des effets dévastateurs sur
plusieurs des patients. Neuf d’entre eux ont intenté des poursuites contre la CIA et ont
obtenu en 1988 des indemnités totales de 750 000$. Il est intéressant de mentionner
que le docteur Cameron était considéré à cette époque comme une sommité dans son
domaine, qu’il occupa le poste de président de l’American Psychiatric Association et
qu’il fut même un des cinq spécialistes appelés à évaluer l’état de santé mentale des
criminels de guerre nazis lors des procès de Nuremberg !
La responsabilité prospective
Peu importent les actions bizarres qui leur sont demandées, ils présument
spontanément qu’elles doivent avoir une justification scientifique. La plupart des
gens sont prêts à faire dans le cadre d’une expérimentation scientifique toutes sortes
de choses qu’ils refuseraient ordinairement d’accomplir. Les sujets sont donc,
suivant l’analyse de Jonas, dans une situation d’extrême vulnérabilité qui devrait
commander une sollicitude extrême de la part du chercheur, qui doit alors protéger
le sujet contre sa crédulité et prendre ses intérêts à cœur.
[…] une expérience avec des sujets humains – tant en psychologie qu’en
médecine – constitue une situation tout à fait spéciale, une interaction
caractérisée par une énorme différence de pouvoir. D’un côté l’on
trouve une attitude de confiance et un abandon de l’identité propre,
de l’autre le pouvoir de contrôle et réglementation. Voilà qui donne
une responsabilité toute spéciale aux chercheurs, car la nature
singulière de la situation expérimentale leur confère un statut et un
rôle qui s’apparente davantage à celui d’un médecin face à un patient
qu’à celui d’un partenaire de statut égal.
soumettre des adolescents à un traitement ou à une opération qui laisse des marques
visibles sur leurs corps peut représenter pour eux une terrible violation de leur
intégrité physique, alors que des personnes âgées s’en offusqueront moins.
Il est intéressant de mentionner également que l’on fait appel dans certains manuels
portant sur la recherche scientifique aux notions de VERTUS ou de TRAITS DE
CARACTERE MORAUX. Les chercheurs disposent d’une grande autonomie dans leurs
activités. Il est sans doute peu souhaitable qu’ils soient l’objet de contrôles
systématiques, lourds et tatillons. On doit pouvoir s’en remettre, pour cette raison, à
des qualités humaines fondamentales, des attitudes et des traits de caractères qui
témoignent de la moralité de leurs actions
Bien sûr, le domaine médical est celui où il est le plus facile de trouver des cas litigieux
dans la recherche menée sur des sujets humains. Mais il en existe aussi dans le secteur
des sciences sociales et de la psychologie. Une de ces expériences controversées est
celle de Stanley Milgram, dont nous avons déjà parlé dans le chapitre sur l’éthique de
la responsabilité. Rappelons que, dans cette expérience, des sujets jouant le rôle
d’enseignants étaient que stimuler leurs souffrances. Cette expérience célèbre ne
soulève pas seulement la controverse par ses conclusions alarmantes sur le phénomène
de la soumission à l’autorité. Elle fut aussi sévèrement critiquée pour ses effets
perturbateurs potentiels sur les participants à l’expérience. Milgram lui-même
rapporta que plusieurs des sujets étaient secoués à la fin de l’expérience.
D’autres expériences ont également alimenté les débats sur l’éthique de la recherche
en sciences humaines. Certains portaient sur la facilité à entraîner des sujets à
commettre des actes immoraux, tels que voler, escroquer, mentir ou mettre sa propre
vie en danger. La plupart des expériences portant sur le stress posent des problèmes
éthiques, car la validité de l’expérimentation dépend de l’authenticité des réactions
des sujets. Plusieurs expériences sur la peur de mourir furent conduites auprès de
soldats de l’armée américaine sans que ceux-ci soient avertis à l’avance de ce qui les
attendait. On leur fit vivre des expériences traumatisantes, tels que le risque
d’écrasement en avion. On fit croire à d’autres qu’une erreur fatale lors d’une prise
de sang allait les mener rapidement à la mort. Une autre expérience controversée
consistait à enfermer un groupe de personnes dans une pièce et à souffler de la fumée
sous la porte. En 1962, deux chercheurs, A. E. Bergin et D. Bramel, firent croire
faussement à des sujets que leurs résultats à des tests indiquaient la présence chez eux
de fortes tendances homosexuelles.
D’un strict point de vue kantien, toute duperie et tout mensonge implique une
manipulation d’autrui et un manque de respect à son égard. Toutefois, nous savons
également que le consentement moral est l’un des critères du PRICIPE DU RESPECT
chez KANT. Kant nous dit que nous devons nous demander avec la plus grande
honnêteté :«Est-ce qu’autrui pourrait consentir moralement à l’action que je veux
Voici un exemple de recherche controversée en sciences humaines. Elle porte sur un thème classique,
les effets de la récompense et de la punition sur la réussite scolaire.
L’étude consistait dans l’utilisation de cinq systèmes de notation différents dans la correction d’examens. Qu
est
Ces cinq systèmes étaient d’une sévérité graduée, allant du plus rigoureux au plus indulgent. Ils furent
ion
appliqués aux premiers examens mi-semestriels d’un cours dans un collège. On évalua ensuite les
s
conséquences de ces divers systèmes de notation sur le rendement des élèves lors d’un second examen
mi-semestriel. Les différences dans les notes étaient très marquées. Par exemple, le système le plus
An
rigoureux attribua un échec à 30% des élèves, alors qu’un autre système leur donnait des notes variant de aly
60% à 70%. Après le deuxième examen, on informa les élèves de l’affaire et on publia de nouvelles sez
cet
notes pour le premier examen conformes au système de notation habituel. Il est bien évident qu’entre-
te
ex
périence sur le plan éthique
17
par
Gérard Mégie
1. Introduction
Face à cette évolution, on constate, dans les pays développés, plusieurs types de
réaction de la société et des multiples acteurs qui la composent :
- d’un côté, beaucoup se méfient des ‘progrès’ technologiques et des nouvelles
‘avancées’ de la science en extrapolant, d’expériences passées, certaines conséquences
qui ont été mal évaluées ou se sont révélées imprévisibles ;
- d’un autre côté, cette société aimerait obtenir des chercheurs, perçus comme
dépositaires du savoir, des avis qui soient sans ambiguïté, compréhensibles par un large
public et les plus objectifs possibles.
Par ailleurs, la demande d’expertise, exprimée tant par des instances politiques et
administratives que par des acteurs économiques ou des représentants de la société
civile, s'amplifie et se diversifie, ces différents acteurs ayant besoin d’informations pour
décider, d’arguments pour justifier une décision ou d’éléments pour la contester, voire
s’y opposer.
Il est fait, alors, appel aux chercheurs spécialistes, considérant tous ceux qui
‘savent’ comme des experts sans prendre conscience que, devant une question aux
dimensions multiples ou des situations complexes et lorsqu’il s’agit de l’avenir, le
chercheur ne peut souvent communiquer qu’une conviction, instruite par son expérience
et ses compétences.
Quand la demande d’expertise concerne des pays moins développés, entraînés dans
la mondialisation, les sensibilités, attentes, analyses de ces derniers sont à prendre
largement en compte sur le double plan d’impératifs de solidarité d’une part, de
valorisation d’expériences ou de pratiques spécifiques d’autre part.
Dans tous les cas, la complexité, la multiplicité des approches possibles relativisent
toujours le point de vue d’une expertise et incitent à une certaine humilité.
Au total une expertise bien conduite peut, selon nous, représenter un moyen de
médiation important entre des espaces d’intervention souvent très éloignés —
producteurs de connaissance d’un côté, utilisateurs de technologies ou de procédés de
l’autre — et, de façon évidente, apporter une aide à la décision.
Dans ces différents contextes, on fera alors appel soit à l’expertise d’un individu
réputé pour son expérience et ses connaissances, soit à un groupe organisé d’experts.
Ainsi des organismes, des agences nationales — comme l’Agence française de sécurité
sanitaire des aliments (AFSSA) — ou internationales — comme le Groupe international
d’étude du changement climatique — ont pu organiser des expertises collectives pour
des problèmes complexes nécessitant une approche pluridisciplinaire.
Mettre en œuvre une expertise, qui porte sur des situations et des projets impliquant
des personnes et affectant le développement de la société, peut avoir un impact
considérable. L’approche et les conditions de l’expertise doivent donc être très
attentivement examinées et si possible codifiées.
Nous nous proposons ici de réfléchir au cadre éthique portant sur la fonction et les
modalités de l’expertise, lorsqu’elle est exercée dans le cadre individuel ou
institutionnel du CNRS. Cette réflexion éthique s’inscrit en amont de règles juridiques
qui pourraient encadrer cette expertise. Notre but est de proposer des conditions qui
puissent créer une confiance authentique dans la mise en œuvre des expertises. En
dégageant les valeurs, principes et règles éthiques pouvant servir de référence, ces
propositions veulent permettre aux scientifiques d’assumer leurs responsabilités devant
la société, de contribuer au renforcement des liens sociaux, de participer avec d’autres
à la résolution de grands problèmes qui concernent le monde et les sociétés humaines.
l’intelligence de ceux-ci et l’utilisation qui peut en être faite. Une expertise n’existe
pas en soi, elle ne prend sens qu'en fonction de ses finalités et des modalités de son
appropriation par ceux auxquels elle est destinée. Aussi examinerons-nous
successivement le contexte éthique de l’expertise proprement dite, puis des aspects
concrets relevant de l’expertise lors de sa mise en place et son exploitation.
Une expertise est un ensemble d’activités nécessaires pour analyser un problème posé
en s’appuyant sur l’état des connaissances, sur des démonstrations et sur l’expérience
des experts. Elle conduit en général à la rédaction d’un document (rapport d’expertise)
pouvant se conclure, selon la demande, par des interprétations, voire des
recommandations. Le demandeur peut être public ou privé. La prestation peut être
gratuite ou payante.
i. Expertise individuelle :
Pour énoncer des positions dans les meilleures conditions, il est tout d’abord
nécessaire de disposer d’une commande précise, explicite, de bien connaître les règles
L’expert doit ensuite être très clair dans ses formulations. Une exigence majeure de
l'expertise est de présenter explicitement les conditions, les critères et les raisons qui
ont motivé les positions prises. C’est à cette condition impérative que la société pourra
comprendre et accepter les réponses proposées aux questions soulevées. L’expert doit
justifier ses conclusions, de façon à pouvoir les faire valoir en cas d’appel ou de contre-
expertise. Il doit les motiver de façon précise et argumentée, éviter les sous-entendus
et les ambiguïtés. Pour être compréhensibles par le plus grand nombre, ses analyses et
recommandations seront formulées avec pédagogie. Si l’importance du travail
d’expertise a été sous-évaluée, le risque est grand de voir dévoyées ces règles
essentielles.
L’expert a souvent été choisi grâce à des compétences reconnues par son
établissement. Donc son intervention peut affecter, positivement ou négativement,
l’image de cet établissement à l’extérieur de celui-ci. Dans ce contexte, la relation
entre le chercheur et son établissement a besoin d’être précisée. Il serait sans doute
bon que l’expert rappelle toujours qu’il intervient à titre personnel, sauf en cas de
procédure spécifique. En effet, si l’expert — qu’il soit chercheur ou ingénieur —
n’engage pas juridiquement l’établissement auquel il appartient, c’est souvent sa
situation professionnelle et sa reconnaissance au sein de cet établissement qui a conduit
le demandeur d’expertise à faire appel à lui. Le problème est que la société aura
tendance à prêter les positions de l’expert à son établissement de rattachement. Les
insuffisances, les dérives d’un expert deviendront celles de son établissement ; une
prise de position personnelle, et respectable comme telle, sera perçue comme une
position collective.
Les chercheurs devront donc trouver le meilleur équilibre entre, d’une part liberté
d’expression et d’intervention, traditionnellement associée à la « culture CNRS », et
d’autre part esprit de responsabilité, dans la mesure où leur engagement es-fonction
implique leur établissement. Dans le maintien d’un contexte fondamental de liberté, le
travail d’expert se doit d’être davantage « cadré », sans devenir encadré.
fortiori lorsqu’il s’en écarte. Le chercheur exprimant, comme expert, une opinion qui va
au-delà de ses connaissances prendra conscience que, le plus souvent, la science n’est
pas l’élément essentiel du débat. Il doit alors exercer une responsabilité éthique de
scientifique et de citoyen, en marquant clairement les limites de l’une et de l’autre.
Un organisme de recherche est directement concerné par l’expertise, parce que ses
chercheurs et ses ingénieurs de recherche sont appelés, individuellement ou parfois en
groupe, à formuler des avis. Nous avons ci-dessus attiré l’attention sur le fait que ceux-
ci peuvent alors mettre en jeu la crédibilité scientifique de l’établissement.
aider à la mise en place d’un code de bonnes pratiques, et donner une formation
appropriée à ses agents.
organiser des expertises institutionnelles, en veillant à la composition, la qualité
et l’indépendance des experts qu’il choisit, en veillant à ce que les conditions de
l’expertise soient les meilleures possibles — s’agissant de la qualité de la
commande, de la transparence du fonctionnement et des débats, de la clarté des
avis
faire savoir à l’extérieur sa disponibilité et son intérêt pour l’organisation de
telles expertises, à condition qu’il soit prêt à assumer le travail qu’elles exigent.
organiser des débats en son sein ou bien en partenariat, publics ou non publics,
pour des problèmes de société actuels, ou bien qu’il anticipe. Ces débats, au
CNRS, devraient avoir un caractère pluridisciplinaire, enrichissant ainsi la
pluralité des points de vue.
faciliter la publication ultérieure de monographies de référence sur les thèmes
considérés.
rapport d’expertise, lequel sera alors considéré comme une expertise institutionnelle et
diffusé sous le label de l’établissement.
rejeter l’avis demandé sans justifications fortes, ou encore le laisser sombrer dans
l’indifférence. Il doit contrôler la diffusion des résultats de l’expertise en facilitant la
plus grande transparence — sauf cas spécifique —, et être attentif à la précision des
informations délivrées aux médias Ceux-ci doivent également manifester une exigence
éthique, en relatant objectivement les conclusions de l’expertise et en présentant avec
équilibre les analyses et commentaires ponctuels associés à la diffusion de l’expertise.
5. Recommandations
L’expert doit prendre en compte les effets potentiels de ses positions sur
d’autres partenaires ou composantes que le donneur d’ordre. Une expertise
peut conduire à des conséquences importantes concernant la justice sociale,
la liberté individuelle, la santé, le développement durable, la protection de
l’environnement, les solidarités Nord-Sud … Par son interaction avec la
société, le chercheur en tant qu'expert contribue donc aux relations entre
recherche et société.
L’expert doit conduire l’expertise avec les approches intellectuelles et les
exigences de la méthodologie scientifique ; il doit aboutir à des positions
responsables, même s’il perçoit qu’elles puissent être impopulaires.
L’expert doit prendre conscience de ses propres limites éthiques et éviter les
situations où il ne serait pas capable d’obéir aux principes éthiques ci-dessus
énoncés, attiré qu’il serait par des attitudes de pouvoir ou d’intérêt
personnel.
A l’attention de l’établissement :
6. Conclusions
Une expertise bien conduite doit permettre d’associer une démarche éthique de
précaution à une démarche éthique de l’action, rendant acceptable une certaine prise
de risque.
Septembre 2005.
GLOSSAIRE
Avis :
Il s’agit d’un terme qui s’applique au résultat d’une consultation souvent
effectuée dans l’urgence et fréquemment par les médias sur une
problématique donnée, un résultat récent et important. L’avis est le plus
souvent individuel et ne doit engager que son auteur.
Expertise :
Il s’agit de la réponse à une demande spécifique et bien définie faite par
une autorité administrative, une structure, ou un tiers sur un sujet donné.
Elle a pour but de fournir des appréciations d’ordre technique mais aussi
sociétal sur une problématique afin d’éclairer les demandeurs.
Expertise individuelle :
Expertise réalisée par un seul expert sous sa propre responsabilité.
Expertise collective :
Expertise réalisée par plusieurs experts.
Expertise institutionnelle :
Expertise conduite sous la responsabilité propre d’une institution et
réalisée par un ou plusieurs experts habilités par elle-même.
Ethique et entreprise
Par
Si l’on admet que les trois termes sont des éléments qui découlent l’un de l’autre, "la
morale, science du bien et du mal, permet de dégager une éthique qui est un art de
diriger sa conduite, son comportement, qui s’exprime dans les principes guidant les
aspects professionnels de ce comportement : la déontologie" [Rojot].
L’éthique permet donc d’élaborer un certain nombre de règles dirigeant la conduite des
individus pour distinguer la bonne et la mauvaise façon d’agir.
La liberté d’action
Les problèmes éthiques se posent quand les actions menées librement par un individu
ont un impact positif ou négatif sur d’autres. Ils apparaissent donc dès qu’il y un
Le choix éthique ne se pose donc que là où il existe un degré de liberté d’action : les
décisions prises sous une contrainte absolue ne sauraient être évaluées du point de vue
éthique. Cependant, au niveau de la direction des entreprises, il existe une marge de
manœuvre importante et les interrogations éthiques permettent de forger un choix
personnel. Ce degré de liberté est le point précis sur lequel la gestion rejoint l’éthique.
La culture organisationnelle
Chaque organisation a une culture. Parfois, cette culture peut être fragmentée et
difficile à percevoir. Dans d’autres cas, au contraire, la culture est très forte, cohésive
et clairement perçue aussi bien par les employés que par ceux qui se trouvent à
l’extérieur de l’entreprise.
• Elle délimite les frontières de l’entreprise, c’est-à-dire qu’elle crée une distinction
entre une organisation et les autres.
• Elle permet de transmettre une certaine identité à ses membres, ce qui facilite la
notion d’implication à quelque chose de plus large que la recherche de l’intérêt
personnel. Elle peut donc contribuer à augmenter la stabilité du système social.
• Elle est un mécanisme de contrôle qui permet de guider et de façonner les attitudes
et les comportements des employés.
Le contrat psychologique
Pour certains, parler d’éthique en gestion est une absurdité. Le monde des affaires
n’obéit qu’à la loi du profit et est exempt d’interrogations éthiques. Pour d’autres, on
ne peut avoir d’éthique appliquée : l’économie et les affaires devraient simplement
être soumises aux mêmes normes que toute autre activité sociale. Cependant, de plus
en plus d’universitaires et de professionnels s’intéressent à la réflexion éthique
appliquée à l’entreprise.
Les entreprises sont tenues, de plus en plus, de justifier leurs moyens d’action et la
finalité de leurs activités. L’étude de la relation entre moyens employés et les fins
visées fait donc apparaître une préoccupation d’ordre éthique.
La réflexion éthique en entreprise est au cœur des contradictions entre les logiques
économiques et sociales. C’est une réflexion concernant la responsabilité de
l’entreprise vis-à-vis des acteurs internes et externes. Cette notion de responsabilité
évoque l’obligation de justifier tout acte ou décision en fonction de normes morales et
de valeurs.
La formalisation de l’éthique
La formalisation éthique consiste à poser explicitement, par écrit, les idéaux, valeurs,
principes et prescriptions de l’entreprise. Elle prend donc l’aspect d’un document de
référence rédigé par l’entreprise, énonçant ses valeurs et comportant une dimension
éthique.
A- La dimension environnementale
Martinet définit une pression sociopolitique comme étant une "exigence formulée par
une partie de la société environnante envers l’entreprise afin que cette dernière
intériorise des coûts sociaux nouveaux, imputables ou non à ses activités de production".
L’environnement sociopolitique s’attend à plus d’engagement éthique de la part des
organisations et cherche à se situer dans un environnement plus honnête. Il est donc
prompt à condamner et à sanctionner le comportement d’entreprises mettant en danger
par leurs produits ou leurs pratiques de gestion la santé ou la sécurité humaine [Seider].
La pression morale et la mobilisation de l’opinion publique peuvent considérablement
réduire la marge de manœuvre des entreprises, voire leur imposer une démarche à
suivre.
De plus en plus, les entreprises doivent répondre aux obligations et devoirs qui sont
leurs vis-à-vis de l’environnement. Il s’agit donc de maîtriser leur image externe auprès
• La formalisation des règles éthiques favorise les relations avec les actionnaires et
permet d’obtenir et de conserver la confiance des investisseurs.
B- La dimension organisationnelle
En résumé, il convient de noter que la formalisation éthique semble être une réponse à
des préoccupations tant externes qu’internes. L’objectif externe peut être de
promouvoir une image positive de la firme par la formulation d’engagements
autonomes. En effet, une telle démarche montre que l’entreprise est concernée par
l’éthique et qu’elle se soucie de la communauté dans laquelle elle opère. Du point de
vue interne, l’objectif est de déterminer des principes éthiques que les employés
devront suivre. La formalisation constitue donc un moyen de régulation. L’entreprise
cherche à susciter l’adhésion et le dévouement de ses collaborateurs, et donc à
instaurer stabilité et prévisibilité dans leurs comportements. Ce recours à l’éthique est
peut-être l’expression d’une quête de nouveaux rapports sociaux au sein de
l’entreprise.
2. Ethique et responsabilité
Pour Jonas, la responsabilité signifie la sollicitude, l’intérêt pour ceux qui sont touchés
par le cours de nos actions. Elle soulève une obligation fondamentale, sans réciprocité
envers autrui et comprenant la nature et le futur. La notion de responsabilité évoque
donc l’obligation de justifier tout acte ou décision en fonction de normes morales et de
valeurs.
Le débat concerne donc la finalité de l’entreprise : son rôle est-il d’enrichir ses
actionnaires ou peut-il être plus large ? D’un point de vue éthique, c’est bien sûr la
seconde perception qui semble la plus satisfaisante.
L’entreprise n’a, dans ce cas, aucun devoir à l’égard des salariés, des consommateurs,
des fournisseurs, des sous-traitants ou des collectivités publiques. Ses rapports avec les
uns et les autres sont subordonnés à l’intérêt des seuls apporteurs de capitaux.
Pour les tenants de la théorie des parties prenantes, l’entreprise capitaliste a d’autres
responsabilités beaucoup plus étendues. Cette théorie présente une vision systémique
des rapports que l’entreprise entretient avec son environnement. Une entreprise qui
assume ses responsabilités sociales, d’une part, reconnaît les besoins et les priorités des
intervenants de la société ; d’autre part, évalue les conséquences de ses actions sur le
plan social afin d’améliorer le bien-être de la population en général tout en protégeant
les intérêts de son organisation et de ses actionnaires.
La gestion des ressources humaines dans l’entreprise fait référence à des préoccupations
éthiques importantes. La relation entre le salarié et son employeur est
fondamentalement inégale. Cette relation est mise en œuvre au moyen d’une hiérarchie
et de procédures dans l’entreprise.
On assiste à un changement significatif dans les valeurs et attitudes des employés quant
à leurs attentes. La nouvelle génération d’employés réclame plus d’opportunités de
développement, plus d’autonomie et de flexibilité.
Dans ce contexte, l’organisation se doit d’être un lieu dans lequel les individus peuvent
se développer. Le style de management doit donc changer : il faut trouver de nouvelles
incitations pour attirer, retenir et motiver des collaborateurs de talent. Pour réussir,
l’entreprise cherche à faire converger ses besoins et valeurs avec ceux de l’individu. Ce
processus d’échanges réciproques est au cœur des politiques éthiques des organisations.
Le personnel est un partenaire vital pour l’entreprise. Il est très dépendant de la firme
pour son bien-être. L’entreprise a donc une responsabilité forte face à ses employés. Il
existe bien évidemment diverses obligations imposées par la loi mais, dans une véritable
perspective éthique, la responsabilité de l’entreprise va au-delà de la loi. La politique
éthique est donc l’occasion pour les entreprises d’exposer leur politique sociale, de
décrire leur idéal de management (découlant de la vision de l’entreprise comme une
communauté humaine).
L’éthique de l’entreprise vis-à-vis des tiers est une éthique du respect [La Bruslerie].
C’est un respect qui s’inscrit dans une logique de relations à long terme. Le respect du
partenaire actuel est une nécessité car il sera peut-être aussi le partenaire de demain.
Le respect de l’environnement
L’entreprise citoyenne
La notion d’entreprise citoyenne repose sur le fait que l’activité d’une entreprise est
inséparable de la communauté au sein de laquelle elle exerce. Etre "bon citoyen" pour
une entreprise, ce n’est pas seulement respecter scrupuleusement les lois et les
règlements du pays où elle opère, c’est, tout en apportant une plus-value économique,
constituer un élément vivant de l’environnement social.
Le concept d’entreprise citoyenne découle du constat que l’Etat ne peut prendre seul
en charge la solution des grands problèmes de société. Le danger est alors de dédouaner
les instances politiques de leurs responsabilités et de laisser supposer que le marché
peut remédier lui-même à ses imperfections.
Conclusion
La réflexion éthique permet de nous interroger sur ce que doit être la finalité d’une
entreprise. Depuis la fin des années soixante-dix, la gestion a tour à tour été séduite
par le management participatif, puis par la recherche de la qualité totale et, enfin,
par le projet et la culture d’entreprise. L’évolution naturelle a conduit l’entreprise à
s’interroger sur ses valeurs propres. Au-delà des modes, on note un intérêt croissant
pour la prise en compte du facteur humain. Cette redécouverte de l’entreprise non
plus comme une structure économique, mais surtout comme une communauté
Bibliographie
L’éthique en comptabilité
par
Pour les comptables agréés, le respect d’un code de déontologie est essentiel puisque
l’objectif de la comptabilité est de fournir une information financière utile à laquelle
les décideurs peuvent se fier. Comment ceux-ci pourraient-ils se fier à l’information
financière s’ils ne peuvent pas faire confiance aux comptables agréés ? Afin d’éviter
cette situation, l’Ordre a conçu un Code de Déontologie qui énonce les règles de
conduite auxquelles les membres de la profession doivent se soumettre.
inacceptable. On ne peut donc pas présumer que quelqu’un qui respecte les lois a pour
autant un comportement qui correspond aux règles d’éthique.
Une personne peut être confrontée à une situation où il est difficile de décider si une
action est acceptable ou pas. La meilleure décision à prendre dans de telles
circonstances est celle qui ne laisse planer aucun doute sur la justesse de l’action. Par
exemple, à titre de membre du conseil d’administration d’un organisme sans but
lucratif, vous devez prendre une décision qui pourrait permettre à l’entreprise d’un
membre de votre famille d’obtenir un contrat. Devez-vous participer au processus de
décision ou devez-vous vous retirer de la discussion ? La réponse éthique serait d’éviter
ce conflit d’intérêt en refusant de participer à la discussion. De même, les utilisateurs
de l’information financière pourraient, par exemple, mettre en doute la fiabilité de
l’information financière contenue dans des états financiers vérifiés par des experts-
comptables qui auraient un lien financier avec l’entreprise et auraient donc intérêt à
présenter une situation financière favorable. Faut-il interdire aux vérificateurs le droit
d’investir dans les entreprises dont ils sont les vérificateurs à moins que le montant
investi soit minime ? Afin d’éviter d’avoir à définir ce qu’est un investissement minime,
le Code de Déontologie défend aux vérificateurs d’exprimer une opinion sur les états
financiers d’une entreprise dans laquelle ils auraient un intérêt financier quelconque,
quelle que soit l’importance des montants en cause. De plus, Il est défendu aux
vérificateurs d’accepter un mandat de vérification dont les honoraires seraient établis
en fonction des résultats divulgués dans les états financiers. Ces règles ont été établies
afin d‘éviter les conflits d’intérêt qui pourraient amener les utilisateurs de
l’information financière à mettre en doute l’intégrité et l’indépendance du
vérificateur.
Les obligations éthiques des comptables agréés rejoignent quatre aspects particuliers :
Plusieurs situations controversées auxquelles vous aurez à faire face ont une dimension
qui relève des règles d’éthique. Au cours des dernières années, nombreux sont ceux qui
ont exprimé leur opinion sur la détérioration des règles d’éthique en affaires. Touche
Ross, firme internationale d’experts comptables, a effectué un sondage d’opinion sur
ce sujet. Ce sondage a été mené auprès de 1100 administrateurs de sociétés,
politiciens et doyens de facultés de gestion dans des universités. Selon les résultats, 94
% d’entre eux considèrent que, de nos jours, le milieu des affaires est préoccupé par
les problèmes d’éthique. Ce même sondage révèle que, pour survivre, une entreprise
doit respecter un code de déontologie très strict. Cela nous permet de conclure que le
respect des règles d’éthique très strictes est bon en affaires. Les entreprises qui se sont
donné des pratiques soumises à un code de déontologie ont créé un climat de confiance
qui leur permet de s’assurer de la fidélité de la clientèle et des fournisseurs, d’avoir à
leur emploi un personnel honnête et productif et de maintenir une solide réputation.
Pour ces entreprises, le code de déontologie contribue donc à leur succès.
Finalement, les comptables agréés sont fréquemment appelés à choisir entre plusieurs
méthodes comptables qui peuvent influer sur le bénéfice des entreprises. Les décisions
relatives au choix des pratiques comptables ne peuvent être prises à la légère car elles
peuvent avoir des conséquences sur l’attribution de biens et de ressources à des
individus ou à des groupes d’individus. Ainsi, le choix d’une méthode comptable doit
faire l’objet d’une analyse objective et ne devrait pas être influencé par l’impact qu’il
peut avoir sur les résultats de l’entreprise. Si c’était le cas, cela pourrait constituer un
manquement aux règles d’éthique.
Ces quelques exemples démontrent l’importance d’un code de déontologie autant pour
les CPAH que pour leurs clients et le public en général. Ce code leur sert de guide dans
les relations d’affaires et dans leurs prises de décision. Il les incite à être responsables
et intègres dans toutes les situations, peu importe les difficultés qu’elles soulèvent. Il
permet aussi aux clients de connaître les règles rigoureuses auxquelles sont assujettis
les CPAH dans l’exercice de leur profession et rassure le public en général sur la
fiabilité des états financiers. Il faut dire, en fait, que le bon fonctionnement de notre
système économique repose pour une bonne part sur une information financière digne
de confiance.
selon un code de déontologie strict si l’on veut qu’elle soit un outil utile au service de
la société dans laquelle nous vivons.
par
Bernard Colasse
Professeur, Université de Nancy-II, France
Ainsi que nous l'a dit Yves Lequin, l'appareil de formation des experts-comptables
français s'est considérablement perfectionné au cours de ces dix dernières années.
une filière gérée en partie par les Universités et dont l'élément spécifique est un
diplôme de 2e cycle, la maîtrise dite des sciences et techniques comptables et
financières (M.S.T.C.F. );
une filière gérée par la profession dont l'élément spécifique est le diplôme d'études
comptables supérieures (D.E.C.S.).
La création de ces filières s'est accompagnée d’une révision complète des programmes
qui sont devenus beaucoup plus multidisciplinaires que dans le passé.
Nous souhaitons mettre l'accent sur deux maladies de la formation comptable qui
peuvent entraver le succès de toute réforme: le technicisme et le scientisme. II est
sans doute peu important de savoir si la comptabilité est une technique ou une science
mais il semble bien que les idées de technique et de science soient à l’œuvre dans les
pratiques comptables de formation comme elles le sont plus généralement dans nos
pratiques sociales ainsi que l'a montré le grand philosophe allemand contemporain
Jürgen Habermas auquel nous rendons hommage en récupérant le titre de l'un de ses
Dans une première partie, nous tenterons de montrer en faisant appel à l'histoire de la
pédagogie comptable, que le technicisme et le scientisme sont des maladies anciennes
de la formation comptable.
Enfin, dans une troisième partie, nous ferons quelques propositions visant à limiter les
effets négatifs du technicisme et du scientisme dans le contexte de la mise en oeuvre
de programmes de formation multidisciplinaires.
Bien sûr, tout notre exposé sera inspiré par la situation de l'enseignement supérieur
comptable français et c'est simplement pour ne pas trop alourdir son titre déjà long que
nous n'avons pas précisé ...en France. Toutefois, peut-être est-il suffisamment général
pour s'appliquer, au moins en partie, à la situation de l'enseignement supérieur
comptable dans d'autres pays; il semble d'ailleurs qu'un certain nombre de réflexions
faites tout au long de ce colloque rejoignent celles que nous allons présenter
maintenant.
1. TECHNICISME ET SCIENTISME
Ainsi que nous l'a dit Edmond Marqués, elle a bien d'autres aspects qui stimulent la
réflexion: religieux, culturels, esthétiques, etc.
Cette tendance est ancienne, on peut même dire qu'elle fut représentative de la
formation pendant plusieurs siècles.
De nos fours, elle s'est détournée du positivisme mais continue de s'épanouir et a pour
conséquence extrême une hyper spécialisation du futur professionnel dont elle risque
de faire moins un expert qu'un hyper-comptable.
A la suite de Luca Pacioli, c'est toute une longue lignée d'auteurs qui, à des fins
essentiellement pédagogiques, se consacrera à la diffusion et à l'illustration de la partie
double.
Si l'on en croit Vlaemminck, jusqu'au XVIIe siècle, il ne s'agissait que d'enseigner aux
futurs comptables la tenue des livres: les divers comptes à ouvrir, le moyen de
distinguer les comptes à créditer et à débiter, les procédés de vérification, etc. Le plus
souvent, l'auteur se contentait de passer en revue toutes les opérations possibles de
l'entreprise pour en indiquer le traitement routinier et ce, sans faire référence à une
quelconque théorie explicative.
Néanmoins, quelques auteurs, et Pacioli lui-même, tenteront très tôt d'imaginer une
théorie, en l'occurrence la «théorie de la personnification» (tous les comptes sont des
personnes qui doivent et reçoivent), pour faire comprendre le mécanisme du débit et
du crédit et, plus généralement, le jeu des comptes. Ils étaient les précurseurs de tous
ces auteurs qui, à partir du XVIIe siècle, se mirent à élaborer, toujours à des fins
pédagogiques, des théories explicatives de la méthode comptable.
Le positivisme, comme doctrine philosophique, est constitué par les différentes thèses
(ou «lois») du philosophe Auguste Comte (1798-1857) sur l'évolution de l'esprit humain
et de la société. II apparaît que beaucoup d'auteurs comptables ont été marqués par la
doctrine d'Auguste Comte, que celle-ci a donné naissance à un positivisme comptable
qui n’est en fait qu'un dévoiement du positivisme proprement dit. Mais pouvait-il en
être autrement avec un tel nom? Les mots sont souvent chargés de déterminisme.
La principale thèse d'Auguste Comte est relative à l'évolution des sciences. Selon lui,
elle passerait nécessairement par trois états successifs. Le premier est l'état
théologique ou actif: les phénomènes y sont expliqués par l'intervention d'agents
surnaturels. Le deuxième est l'état dit métaphysique ou abstrait: les phénomènes y sont
expliqués par des abstractions lointaines telles la «vertu dormitive», la «génération
spontanée» ou le < phlogistique». Enfin, le troisième est l'état scientifique ou positif:
les phénomènes y sont expliqués par des lois, c’est-à-dire des relations entre faits
observés susceptibles de faire l'objet de vérifications expérimentales. La principale
application de cette thèse dite des trois états est une hiérarchie des domaines de la
connaissance en haut de laquelle on trouve les mathématiques, en bas les sciences
humaines, et dont est absence la comptabilité...
Qu'il nous suffise, pour illustrer notre propos, d'évoquer les figures de deux grands
pédagogues de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, Eugène Léautey et Adolphe
Guilbaut dont le principal ouvrage, au titre très évocateur, La science des comptes
mise à la portée de tous (1889), vient d'être réédité, en français, par un éditeur new-
yorkais. Ils expriment sans ambages leur volonté de faire de la comptabilité une
science, et pas n'importe quelle science, une branche des mathématiques; autrement
Comment, par exemple, ne pas voir dans la place faite aux comptabilités spéciales et à
l'informatique dans certains programmes et dans certains sujets d'examens, l'expression
d'un technicisme poussant à une hyper-spécialisation du formé. Ce n'est pas en
renforçant le technicisme que l'on négociera au mieux le fameux «virage technolo-
gique».
Certes, le futur expert doit être un technicien et la formation qu'il reçoit a pour
vocation d'en faire un technicien et il est bon, par exemple, qu'il connaisse les
particularités comptables des entreprises des grands secteurs de l'économie mais il
paraît inutile qu'il reçoive, en première formation, un enseignement approfondi de
De la même façon, le futur expert doit connaître l'informatique mais est-il nécessaire
qu'il acquiert des compétences de programmeur? Non, sans doute... Des compétences
d'analyste? Peut-être... Par contre, il importe qu'il sache dialoguer avec les
informaticiens, qu'il sache apprécier l'intérêt et les limites des solutions informatiques;
aptitudes qui n'impliquent pas nécessairement une très forte spécialisation en
informatique mais qui supposent, par contre, des capacités de communication. Fasse
que soient entendues les recommandations très pondérées faites en la matière par
André Pérès.
Par rapport au mal que nous venons de dénoncer, une formation techniciste,
l'apparition de programmes de sciences comptables, au pluriel, apparaît, de prime
abord, comme une saine médication. Et pourtant. . .
Par rapport à cet objectif, deux grands risques: l'éclatement du savoir professionnel et
l'hypo-spécialisation.
Tout d'abord, remarquons qu'il ne suffit pas de juxtaposer dans, un programme des
disciplines pour qu'elles se fécondent réciproquement. La multidisciplinarité, entendue
comme simple juxtaposition de disciplines au sein d'un programme, ne fait pas naître
spontanément l'interdisciplinarité, entendue comme interaction entre les disciplines; la
multidisciplinarité est un état, l'interdisciplinarité est une dynamique. Chaque
discipline cherche en effet spontanément à se singulariser à la fois par son objet et par
sa méthodologie et dresse autour d'elle de forts remparts épistémologiques. Si bien que
l'étudiant, engagé dans un programme multidisciplinaire et voulu tel parce que la
pratique l’est, fait souvent l'expérience d'un savoir en morceaux dont la maîtrise à des
fins professionnelles lui paraît problématique.
L'hypo-spécialisation
D'autre part, ainsi que nous l'avons déjà remarqué, les disciplines ont des statuts
universitaires très différents. Reconnaissons-le, bien qu'il se soit considérablement
amélioré depuis une dizaine d'années, le statut de la comptabilité dans l'Université
française n'est guère très élevé. Aussi peut-on craindre que, dans les programmes à
finalité professionnelle comptable, la comptabilité en tant que technique, para-
doxalement, ne soit dominée par ces disciplines bien assises que sont par exemple la
statistique, l'économie ou le droit et qui, sans doute, ne sont guère prêtes à se
considérer comme ses auxiliaires, ce que pourtant elles devraient être du point de vue
de la formation de futurs comptables. Ces sciences sont ainsi conviées à une petite
révolution: alors que certaines, comme l'économie et le droit, considéraient facilement
la comptabilité comme leur auxiliaire, il leur faut se mettre à son service..
Très concrètement, on peut craindre que cette révolution n'ait pas lieu, du moins
rapidement, et que les futurs experts soient plus statisticiens, plus économistes ou plus
juristes que comptables. Ce serait, du point de vue de l'exercice même de la
profession, une nouvelle forme, très pernicieuse, de scientisme qui, poussée à
Un problème non négligeable réside dans le fait que ce nouveau scientisme qui pointe à
l'horizon de la formation comptable peut faire bon ménage avec la vieille tradition
techniciste; l'une et l'autre peuvent en effet se soutenir et se renforcer mutuellement.
Ainsi donc, les programmes de sciences et techniques comptables pourraient, si l'on n’y
prenait garde, devenir d’une certaine façon les lieux d'un soutien et d'un renforcement
réciproques et pervers du technicisme et du scientisme.
Comme tout notre exposé, ces propositions sont inspirées de la situation française et
peut-être sont-elles, dans d'autres contextes, déjà complètement dépassées.
La solution pédagogique dont nous voulons parler est celle tardive qui consiste à prévoir
des examens sur la base d'épreuves commune à plusieurs disciplines; cette solution
existe pour l'obtention en France du nouveau Diplôme d'Études Comptables Supérieures
(D.E.C.S.) sous la forme de deux épreuves dites de synthèse: l'une, portant simulta-
nément sur l'économie et 1a comptabilité et l'autre, sur le droit et la comptabilité.
L'idée de telles épreuves est a priori satisfaisante même si le champ de la synthèse ne
couvre que deux disciplines et se trouve singulièrement limité. Mais, malheureusement,
pour différentes raisons et, en particulier, parce que l'élaboration d'un sujet se prêtant
à la synthèse est chose délicate, les sujets donnés à ces épreuves ne sont le plus
souvent que des juxtapositions d'exercices qui accentuent les clivages disciplinaires et
illustrent davantage l'éclatement du savoir professionnel que son unité. Mais quelles
qu'en soient les modalités, de telles épreuves posent la question fondamentale
suivante: peut-on laisser faire à l'étudiant une synthèse que nous avons, en tant que
professeurs, bien du mal à faire nous-mêmes?
La deuxième solution, de notre point de vue la meilleure mais bien plus difficile, se
trouve dans ces enseignements dits de théorie comptable pour lesquels l'ouvrage
d'Hendricksen, traduit en français par Alain Beauchesne, reste une référence. Que faut-
il entendre par théorie comptable? Il convient de le préciser car le mot théorie, comme
l’ont montré les communications de Doria Tremblay et de Van The Nhut, est chargé
d'acceptions très diverses. Et il est à remarquer au passage, que les acceptions du mot
français «théorie» ne couvrent pas exactement celles du mot anglais «theory» et qu'il
est quelque peu incorrect de traduire accounting theory par «théorie comptable».
Disons, en l'occurrence, qu'il s'agit de développer un discours critique, au sens
Ajoutons que l'enseignement de théorie comptable, parce qu'il est fondé pour partie sur
une critique des concepts et des méthodes, développe chez l'étudiant un sens du
relatif, un sens des limites de l'outil, sans lequel il ne peut devenir un bon professionnel
sachant adapter sa démarche aux situations, sachant aussi déroger aux principes et aux
règles usuels quand ils s'avèrent inadaptés pour rendre compte d’une situation
particulière. Dans un univers de plus en plus normé, l'aptitude à déroger devient de
plus en plus nécessaire. À noter que le sens du relatif, qui est aussi le sens de la
différence, est non seulement une aptitude scientifique mais aussi une attitude
éthique; s'il en est ainsi, en le développant, l'enseignement de théorie comptable
participe aussi à la formation déontologique du futur expert, laquelle doit commencer
très tôt et ne saurait se faire exclusivement «sur le tas».
Il importe tout d'abord que l'enseignement supérieur comptable joue, comme tous les
enseignements supérieurs, dans quelque discipline que ce soit, son rôle de véhicule des
connaissances nouvelles et qu'il fasse donc connaître les résultats de la recherche
comptable. Nous pensons par exemple que la théorie positive de la comptabilité de
Watts et Zimmerman constitue une contribution importante à la formation
déontologique du futur expert. C'est encore malheureusement loin d'être le cas en
France où, fait symptomatique, la grande majorité des ouvrages utilisés ne comportent
pas de références bibliographiques; et, quand ils en contiennent, ce sont le plus
souvent des références relatives à d'autres ouvrages et non à des articles issus de
revues scientifiques; à la décharge des auteurs cependant, il faut dire que la recherche
comptable française est récente mais elle existe. La création en 1980 de l'Association
Française de Comptabilité (A.F.C.) qui réunit les professeurs des Universités et des
Grandes Écoles a joué le rôle décisif de déclencheur. Il faut également dire que
l'obstacle de la langue empêche certains d'entre eux d'avoir accès aux grandes revues
américaines.
Mais, il faut sans doute aller encore plus loin et faire de la recherche un instrument de
formation en intégrant dans le cursus du futur professionnel un travail qui soit une
initiation à la recherche. L'intérêt d'un tel travail est double : d'une part, il développe
la créativité, le sens de la rigueur méthodologique et aussi la débrouillardise dont Yvon
Houle nous a dit qu’e11e était une qualité du bon professionnel (le chercheur doit aussi
être débrouillard); d' autre part, dans la mesure où la recherche appliquée est
Il est aujourd'hui admis que, compte tenu notamment de la diversité des tâches qui les
attendent, la formation des futurs professionnels de la comptabilité doit être
interdisciplinaire. Mais il ne suffit pas d'inscrire dans les programmes diverses
disciplines, scientifiques ou techniques, pour qu'elle le soit effectivement. Deux
dangers, qui peuvent coexister, la guettent en permanence: l'un ancien, le
technicisme, qui survalorise la comptabilité comme outil de traitement de
l'information: l'autre, plus récent, le scientisme, à l'état potentiel dans la notion de
«sciences comptables», qui survalorise les sciences auxiliaires de la comptabilité aux
dépens de celle-ci. L'interdisciplinarité, nécessaire en vue de l'exercice de la
profession, vent qu’il y ait relation et dynamique entre les disciplines et que soient,
d’une certaine façon, abolis les remparts que dressent autour d'elles le technicisme et
le scientisme. Pour promouvoir une formation véritablement interdisciplinaire, il
faudrait:
Par
James Fremgen
Professeur Associé de Comptabilité à l’Ecole Navale de Post-
graduation
I1 est rare qu’un texte d’introduction à la comptabilité manque d’aviser son lecteur
néophyte que l’entité comptable est supposément une permanence de l’entreprise.
Avec ce fragment évidemment important (c’était en italique n’est-ce pas :)
d’information soigneusement emmagasiné dans son esprit et /ou, dans son cahier de
notes, l’étudiant continue son étude de la comptabilité - en ayant probablement jamais
à rencontrer cette idée évidemment importante, sauf, peut-être, lors d’un examen. I1
est certain que l’hypothèse de la permanence de l’entreprise ou de la continuité
semble être un des concept de base de comptabilité le plus fermement confirmé et le
moins controversé (conventions.? Postulats ?). Mais, un survol de la littérature
comptable, particulièrement les énoncés qui font autorités, nous force à questionner
l’importance et possiblement la validité même de l’hypothèse. Tel est le but de cet
exposé.
7
Accounting and Reporting Standards for Corporate Financial Statements and Preceeding Statements and Supplements (Association
Américaine de Comptabilité, 1957), p.2
Même les auteurs qui acceptent et utilisent l’hypothèse reconnaissent ses limites.
Plusieurs concèdent que ce n’est pas « un fait scientifique ou même une hypothèse
complètement rationnelle » 9 . Paton admet que l’hypothèse « est impossible à
démontrer en cas particulier, malgré qu’il soutient qu’elle « est absolument
raisonnable et a besoin de peu de qualification 10 . Tandis qu’il l’employait à supporter
son argumentation, Carson observa: « L’hypothèse de la permanence de l’entreprise
n’est pas sans défauts. Les statistiques sur la longueur de vie des entreprises ne la
supportent pas » 11.
IMPLICATIONS DE LA CONTINUITE
8
The Postulate of Accounting: What It Is, How It Is Determined, Flow It Should Be used, (Arthur Andersen & Co.,' (September 1960),
pp.18-20
9 George O. May, « Postulates of Income Accounting », The Journal of Accountancy, August 1948, p. 108
10 W.A. Paton, « Assumptions of the Accountant », in Herbert F. Taggart, (ed)
11 A.B. Carson, « Replacement Cost is compatible with Going Concern Postulate », The Journal of Accountancy, Janvier 1949, p. 33
son destinées à échouer durant l’année. Plus d’attention devrait être donnée aux bases
de l’hypothèse pour chaque entité individuelle. Peut-être que la définition citée plus
tôt devrait se lire: « L’Entité est vue comme restant en opération indéfiniment » en
reconnaissance de l’évidence à cet effet, non « en l’absence de l’évidence du
contraire ». Le changement dans les mots suggère que la continuité devrait être un
jugement basé sur l’évidence dans le cas. Ainsi, si pertinent à tout, la continuité serait
une conclusion, non une hypothèse. En fait, si le comptable cherchait actuellement à
déterminer s’il y avait une évidence du contraire « et n’en trouvait aucune, il pourrait
postuler la continuité comme une conclusion plutôt qu’une hypothèse. D’autre part, si
le comptable et particulièrement le vérificateur suppose qu’une firme a la permanence
sans même considérer l’évidence de supporter ou de refuser cette opinion, alors
l’hypothèse de continuité devient une charade sans sens, une nullité. Pire, si une
comptabilité appropriée dépend de la permanence ou non de l’entité, une acceptation
aveugle de l’hypothèse peut résulter en états financiers erronés.
ALLER OU ?
12 Duright R. LADD, Contemporary Corporate Accounting and the Public (Richard D. Irwin, Inc, 1963) p. 44
une compagnie séparée. Ses employés gardent leurs emplois. Ses clients continuent à
être servis 13 .
La même idée a été substantiellement exprimée dans des mots différents. On suppose
que l’entité continuera d’exploiter assez longtemps pour compléter ses « plans et
programmes existants » 15 ou « pour remplir ses engagements existants. L’achèvement
des programmes et engagements existants inclurait la conversion de ressources
productives en produits commerciaux et en vente subséquente de tels produits par les
canaux normaux du marché, et ceci est le sens essentiel d’une liquidation ordonnée.
13 Raymond J. Chambers, Accounting, Evaluation and Economic Behaviour, Prentice-Hall, Inc, p. 204
14 Ibid
15 American Accounting Association, opus ct. p. 49
L’étude de la comptabilité en tant que telle n’a aucune raison de postuler des
observations abstraites au sujet de l’environnement. Le fait que la terre est ronde et
que les hommes préfèrent les blondes, par exemple, est peut-être vrai, mais il n’a rien
à voir avec la comptabilité. Ainsi, le fait (s’il est tel), qu’une entité a une vie indéfinie
doit avoir des implications pour la comptabilité. Autrement, les comptables cesseraient
16
CARSON, 1c . cit.
POSTULATS ET PRINCIPES
I1 est clair que Moonitz 17 croyait que la continuité est significative en comptabilité, car
il l’a décrit comme un des postulats de base sur lesquels reposent les principes
comptables18. Ainsi, firent Sanders, Hatfield, et Moore et Gilman avant lui, malgré que
ces auteurs s’y référaient comme à une convention plutôt qu’à un postulat. Mais, les
discussions s’ensuivirent sur les principes comptables et ne purent préciser comment le
postulat de la permanence de l’entreprise détermine les principes â être appliqués.
Malgré que Spronse et Moonitz19 suggérèrent que leurs grands principes comptables
dérivant des postulats mis en place dans 1’étude de la recherche antérieure à leurs
discussions des principes spécifiques n’incluent pas les explications, du comment le
postulat de la continuité les y mena. I1 en est de même pour le rapport de Sanders,
Hatfield et Moore. Malgré qu’ils considérèrent la permanence de l’entreprise comme
17
MAURICE MOONITZ, The Basic Postulates of Accounting: Accounting Research, Study no 1 (American's Institute of CPAs, 1961),
pp. 38-41
18
THOMAS HENRY SANDERS, HENRY RAND HATFIELD, -and UNVERHILI MOORE, A statement of Accounting Principles
(American Accounting Association, 1959), p.3
19
(17)ROBERT T. SPRONSE et MAURICE MOONITZ, A Tentative Set of Broad Accounting Principles for Business Enterprises:
Accounting Research Study no 3 (American Institute of CPAs, 1961), p.9
une convention importante, ils ne l’utilisèrent pas pour justifier directement des
principes comptables. Peut-être que ce manque de lien direct entre postulat et
principes ne reflète simplement le fait que la permanence de l’entreprise est une
hypothèse si fondamentale qu’elle ne nécessite pas une justification en termes de
principes conséquents. Peut-être, aussi, que le postulat est accepté dès le départ parce
qu’il apparaît être raisonnable, mais il n’est plus mentionné parce qu’il n’est pas
suffisamment spécifique pour supporter un quelconque principe particulier.
COMPTABILITE D’EXERCICE
May allégua que toutes les répartitions entre le passé et le futur dépendent de
l’hypothèse de la continuité des opérations 20. En d’autres mots, la comptabilité
d’exercice suppose que l’entité a une permanence. Donc, la comptabilité de
l’amortissement, par exemple, serait basée sur le postulat de la continuité.
Conséquemment, dans une entité affrontant une liquidation forcée, la comptabilité de
l’amortissement serait inapplicable. Examinons cette implication. Supposez qu’un gros
département à rayons doit être exploité par un liquidateur pour une année afin de
liquider son stock à des prix raisonnables, favorables aux créanciers. Le liquidateur a
décidé que la continuation du service de livraison du magasin est compatible avec cet
objectif. Afin d’y arriver, il doit acheter un nouveau camion de livraison d’une durée de
vie utile de cinq ans. Il est clair qu’ici, l’entité n’a pas de permanence. Comment,
alors, tenir compte du camion de livraison ? On le consignera initialement à son coût
actuel. La différence entre ce coût et la valeur estimée de revente à la fin de l’année
sera chargée à la dépense d’amortissement pour l’année du liquidateur. Ainsi, à la fin
de l’année, l’actif sera consigné à sa valeur originairement estimée réalisable.
Comment ce traitement diffère-t-il de la comptabilité conventionnelle de
l’amortissement ? Seuls les montants sont touchés par la possibilité d’une liquidation
forcée. Le principe est le même. Le vie utile et la valeur de récupération estimative
peuvent être différentes de ce qu’elles seraient si le magasin s’attendait à utiliser le
camion pendant cinq ans. En conséquence, le montant de l’amortissement serait
manifestement différent, mais le principe de la comptabilité de l’amortissement serait
appliqué de la même manière. Si le magasin avait déjà possédé le camion lorsque le
liquidateur assuma la responsabilité des opérations, la comptabilité de l’amortissement
aurait continué, malgré que la dépense annuelle aurait été ajustée pour se conformer à
une vie utile prévue courte et à une valeur de récupération révisée. Ceci n’est pas
différent des procédés appliqués par une permanence de l’entreprise lorsque la vie
utile de l’actif est redéterminée.
21
Accounting Research Bulletin no 43: Restatement and Revision of .Accounting Research Bulletin (American Institute of CPAs, 1953),
ch. 10-B.
22 APB Opinion no 2: Accounting for the "Investment Credit" (American Institute of CPAs, 1962) et APB Opinion no 4: Accounting
for the "Investment Credit" (American Institute of CPAs, 1964). Au moment de cette rédaction, le Comité des Prinoipes
Comptables a fait circuler un projet d'une nouvelle opinion au sujet de la comptabilité d'impôts différés et de crédit de placement.
Dans ce projet, la convention de la permanence de l'entreprise est spécifiquement citée comme hypothèse de base
23 PATON, op. cit. p. 128.
24 SANDERS, HATFIELD et MOORE, loc. cit. Les créanciers, évidemment, sont ici vus comme saisissant les actifs diminuants d'une
entreprise moribonde.
Dans une telle situation, les actifs retenus pour la vente peuvent continuer à apparaître
dans le bilan à leurs coûts originaires moins l’amortissement accumulé, avec une note
indiquant leur statut et la vraisemblance d’une perte au moment de leur disposition
ultime.
COUT D’ORIGINE
VALEURS COURANTES
En 1949, Carson argumenta que le coût de remplacement est plus compatible avec
l’hypothèse de la permanence de l’entreprise qu’avec le coût originaire. « L’hypothèse
d’une vie indéfinie », soutenait-il, « ne fournit pas autant une base pour la
comptabilité conventionnelle de l’amortissement (basé sur le coût originaire), qu’une
raison pour penser en termes de remplacement et de coûts de remplacement »25 .
Edwards et Bell acceptent spécifiquement l’hypothèse de la permanence de
26 EDGAR 0. EDW:1RDS et PHILIP W. BELL, The Theory and Measurement of Business Income (University of California Press,
1961), pp.90-2 et 275.
LA VALEUR D’EXPLOITATION
La valeur d’exploitation d’un actif est la valeur présente des mouvements futurs de
trésorerie que l’actif peut possiblement générer. On pourrait être tenté de conclure
que, en théorie, ceci est la base de l’évaluation de l’actif le plus compatible avec
l’hypothèse de la permanence de l’entreprise. C’est, évidemment, sujet à la limite
pratique importante qu’elle ne peut être mesurée objectivement. Les mouvements
futurs de trésorerie ne peuvent être prédits de façon certaine. De plus, les
mouvements de trésorerie attribuables aux actifs individuels employés en harmonie
(e.g. usine et machinerie) sont indéterminés. Ainsi, où plusieurs actifs sont
mutuellement interdépendants dans le procédé de production, les mouvements futurs
totaux de l:a trésorerie venant des opérations de production pourraient être connexes à
n’importe quel ou à tous les actifs. Canning signala, par exemple, qu’une installation
minière complexe pourrait être tout à fait inopérable, à cause de la nécessité d’un
simple tuyau de chaudière. Ainsi, avec tous les autres actifs en place, la valeur
anticipée de ce tuyau de chaudière est égale au courant entier des mouvements prévus
de la trésorerie venant de l’opération de la mine 33. Tandis que ceci peut être une
application valable, mais extrême, d’une analyse marginale, ce n’est guère une base
utile pour l’évaluation des actifs individuels dans les rapports financiers. Ainsi, la valeur
d’exploitation est une mesure qui peut être appliquée utilement qu’à une entité
entière. Même alors, elle ne peut être quantifiée avec le degré d’objectivité que les
32
En fait, Chambers indique que l'équivalent liquide courant des stocks usinés est le coût courant de remplacement des biens et services
sacrifiés dans la production (op. cit.,p.232). Ceci est équivalent; en fait, au "coût courant" d'Edwardss et de Bell. Ainsi, Spronse et Moonitz
semblent actuellement s'approcher davantage de l'équivalent en liquidité courante dans leur, recommandations, touchant les stocks que ne
le fait Chambers lui-même .
33
JOHN B. CANNING, The Economics of Accountancy (The' Ronald Press Company 1929), pp.189-190.
CONCLUSION
comptables pour une firme subissant une liquidation forcée existent. Ils
découlent d’une conclusion irréductible que l’entité n’a pas une permanence. De
la même manière, des principes pour la firme continuant à exploiter devraient
être appliqués seulement où il y a évidence, que l’entité exploitera dans le
futur.
Le Concept d’Equité
par
Harold E. Arnett
Les dernières années ont vu les comptables mettre de nouveau de l’avant le concept de
l’équité comme un élément essentiel dans le développement de la théorie comptable.
I1 est probable que la première suggestion explicite en vue de considérer ce concept
dans cette perspective vient du Docteur Scott en 1951, alors qu’il rangea ce concept
sous les principes comptables et publia l’énoncé suivant: « Les règles, procédures et
techniques comptables devraient être justes, non biaisées et impartiales. Elles ne
34
devraient pas privilégier un intérêt particulier ».
En 1965, le concept de fidélité et d’équité fut le sujet d’un livre de James W. Pattillo,
qui incluait le passage suivant:
34
Dr. SCOTT, "The Basis for Accounting Principles", The Accounting Review, December 1971, p. 343.
35 ARTHUR ANDERSEN & CO., "The Postulate of Accounting" September 1960, p.31.
Quand nous ajoutons cette phrase de Scott voulant que « Les énoncés généraux qui
relient les règles et procédures comptables aux principes sociaux sous-jacents
pourraient eux-mêmes être appelés principes comptables » 37 , il devient clair que ces
auteurs privilégient une approche sociale ou éthique au développement de la théorie
comptable.
Les écrits desquels sont tirés ces extraits représentent des tentatives réfléchies et bien
documentées pour faire avancer les connaissances en comptabilité; elles méritent donc
une certaine considération.
Mon sentiment est, toutefois, que le concept de fidélité et d’équité n’est pas une base
utile comme cadre de développement de la comptabilité. Ce qui suit a pour objet
d’expliquer ce point de vue .
Dans tous domaines de recherches, les participants doivent comprendre le sens des
termes employés dans le domaine. Pour ce faire, idéalement, chaque mot devrait
36 JAMES W. PATTILLO, "The Foundation of Financial Accounting", (Louisiana State University Press, 1965), pp. 60-61.
37
SCOTT, p. 342.
identifier sans équivoque une notion ou devrait invoquer un objet qui lui est propre.
Autrement, il y a place pour l’incertitude et la confusion. Vraisemblablement peu de
mots, dans un domaine comme la comptabilité, rencontrent pleinement ces exigences;
mais ce concept d’équité et dé fidélité que les comptables anglophones appellent
« fairness » m’amène à me demander si cette terminologie s’approche même quelque
peu de l’exigence mentionnée ci-haut. Le problème ressort mieux si on utilise le mot
anglais « fair ». Ainsi, que signifie-t-on, lorsqu’on dit dune femme qu’elle est « fair » ?
Cela peut signifier qu’elle est belle ou qu’elle a des cheveux blonds ou qu’elle est
honnête, franche, impartiale ou juste. Ce mot est utilisé en anglais de certaines façons
comme synonyme de plausible, gracieux, courtois, élégant, désirable, propre, pure,
moyen, très bon et ainsi de suite. .On pourrait entreprendre une discussion semblable
sur le sens des mots « équitable » et « fidèle ».
Si des termes comme « fair » ou « fairness » doivent être utilisés en comptabilité, les
comptables doivent l’utiliser dans un sens précis ou au moins éduquer les utilisateurs
des états financiers de telle sorte qu’ils reconnaissent la signification du mot lorsqu’il
est utilisé dans une communication à leur adresse. Ceci constituerait une tâche très
difficile pour deux raisons:
(1) les comptables devraient tout d’abord s’entendre sur un sens précis et
(2) il faudrait convaincre les utilisateurs qu’ils doivent accepter le sens convenu
dans leur utilisation des états financiers.
Aussi longtemps que ces deux obstacles n’auront pas été surmontés, les termes ne
véhiculeront pas les observations d’une personne à une autre d’une façon claire et sans
équivoque.
sur des termes comme « fairness » ou fidélité et équité, mots qui ont des sens
infiniment plus subjectifs.
« Combien nombreux sont ceux dont la réflexion s’arrêtent aux mots alors qu’ils
voudraient réfléchir à une idée, en particulier lorsqu’il s’agit d’exercer son esprit
sur des questions d’ordre moral; et qui peut s’étonner ensuite que ces réflexions
sur rien de plus que des sens en réalité, ne produisent que la confusion et l’erreur
comme résultat, d’autant plus que les idées sous-jacentes à ces mots sont fragiles
et confuses et peut-être même inexistantes...? » . 38
Si on ajoute à la difficulté du consensus entre les comptables, l’obstacle de l’accord
avec les utilisateurs des états financiers, le problème est substantiellement accru.
Chacun aime à penser qu’il est équitable et personne ne peut nier que tous devraient
réfléchir à la notion d’équité dans leurs rapports avec leurs concitoyens. C’est l’utilité
de ce concept comme fondement de la pensée comptable qui est mis en cause ici, et
non pas l’importance du concept comme telle. Les opinions varient considérablement,
et plus un sujet devient complexe (et l’expérience nous a appris combien la tâche de
présenter des informations financières aux utilisateurs de bonne foi est complexe et
difficile), plus il est vraisemblable qu’une ambiguïté même légère à propos de la
signification d’un terme sera amplifiée.
Quand nous abordons des mots qui expriment un concept, une relation complexe, un
symbole intangible ou peu connu, les déformations par l’usage courant, l’usage
inapproprié et la confusion prennent une importance considérable. Prenons des
mots comme « monarchie », « tyrannie », « libertés civiles », « liberté de
contracter », « hôte », « gentilhomme », « suffisance », « culture », « éducation »,
« tempérance », « générosité ». Non seulement trouvons-nous difficile de donner
une définition analytique de tels mots: nous pourrions même être incapables de le
faire et pourtant prétendre avoir une compréhension nette de leur signification.
Mais si l’on observe une discussion entre deux personnes sur un sujet qui met en
cause n’importe quel de ces mots, on ne tarde pas à s’apercevoir qu’ils l’utilisent
39
dans des sens différents.
I1 est facile de reproduire un mot. C’est une chose beaucoup plus difficile que de
reproduire l’idée qu’il représente.
« Quelle est la signification de termes tels que « bonheur », « liberté », « justice
sociale » ? Moi qui analyse leurs significations depuis des années, j’avoue être
40
encore sceptique devant certains usages de ces termes ».
l’inflation est inéquitable pour certains groupes sociaux, comme les personnes à
revenus fixes. Je suis assuré que les propriétaires des scieries n’ont pas eu le sentiment
que cette décision était équitable. De nouveau, si nous considérons les différents
groupes affectés par une décision, il devient amplement évident que ce qui est
équitable ou inéquitable dépend de la position de ceux qui sont affectés par la
décision. Lorsque nous considérons des groupes ayant des intérêts contradictoires, un
groupe considèrera vraisemblablement une décision équitable alors que l’autre la
considèrera grossièrement inéquitable. Nous n’avons pas de standard fixe, qui puisse
nous servir â jauger l’équité ou l’iniquité. Si nous prétendons pouvoir présenter une
information équitable pour tous les, groupes, alors, nous devons vraisemblablement
nous attendre à subir le courroux de tous ces groupes.
L’à-propos de la discussion précédente est que les comptables devront s’entendre sur
des critères ou des standards pour jauger l’équité avant que ce terme ne puisse devenir
opérationnel en comptabilité Même en assumant que les comptables puissent en venir à
un consensus, une grande difficulté, telle que mentionnée précédemment, viendrait de
la nécessité d’obtenir l’accord des utilisateurs des états financiers sur cette définition
de ce qui est équitable. A défaut d’une entente volontaire, ce qui est peu probable, la
profession comptable devrait imposer sa décision. Contrairement aux questions légales
où les jugements de la Cour ont un pouvoir exécutoire, la comptabilité ne dispose
d’aucun mécanisme de pouvoir exécutoire. Si elle en avait un, l’état serait sans aucun
doute le pilier nécessaire à ce pouvoir. Au pire, dans ces conditions, l’état
s’attribuerait le pouvoir de dicter les règles, procédures et principes comptables; au
mieux, elle pourrait superposer son jugement à celui des comptables.
autorité de dicter aux utilisateurs ce qui est équitable et ce qui n’est pas équitable, ils
devraient nécessairement penser en termes des effets de certaines causes sur les
utilisateurs plutôt que de déterminer l’effet des transactions financières sur les
entreprises. En d’autres mots, le centre de gravité de la comptabilité serait déplacé de
l’entité vers ceux qui ont un intérêt quelconque dans l’entité.Etant donné que ceux qui
ont un intérêt dans les entités ont été définis, par bien des comptables, comme la
société en général, et si la comptabilité se préoccupe avant tout de refléter avant tout
les droits économiques et les intérêts de la société, la porte est naturellement ouverte
à une plus grande intervention gouvernementale et peut-être même à une étatisation
de cette fonction. Les tribunaux ont maintenu à plusieurs reprises que l’Etat a pleine
autorité pour réglementer ce qui touche à l’intérêt public. Cela pourrait sonner le glas
de la comptabilité telle qu’elle existe présentement.
Dans des rapports entre humains, des conflits naissent. Le compromis entre les
différentes opinions est une condition de la survie culturelle. Les lois ont pris naissance
de la nécessité de résoudre les conflits d’intérêts et les institutions légales ont surgi
comme moyen de sanctionner et de faire appliquer les lois. Les comptables ont
toujours considéré l’entité comme centre d’intérêt ou de gravité et ont laissé le
marché et/ou les tribunaux déterminer ce qui constitue une répartition « juste », ou
« équitable » d’un revenu, ou ce que sont les droits légaux de deux parties en conflit.
L’expérience passée offre de nombreux exemples démontrant que « quels que soient
les changements sociaux, des conflits d’intérêts demeurent ». De nouvelles lois devront
être créées et d’anciennes seront modifiées avec les changements de l’environnement.
Toutefois, l’expérience seule ne nous indique pas dans quelle direction évolueront les
conflits, ni ne donne un aperçu sur les principes légaux qui les résoudront. Les lois qui
les concilieront se développeront à partir de ces conflits mêmes. Il serait donc
présomptueux de la part des comptables, de tenter de présenter des états financiers
qui prétendraient refléter les droits légaux des intérêts divers et souvent
contradictoires que l’on retrouve dans une entité.
Il n’est pas suffisant de suggérer que l’équité pourrait être mesurée « à la lumière de
l’environnement économique et politique et des façons de penser et coutumes de tous
ces segments, pour en arriver à ce que les principes comptables issus de ce postulat
permettent d’établir une discipline comptable qui soit équitable pour les droits et
41
intérêts économiques de tous les segments » .
Tout d’abord, « équitable » est rarement utilisé en droit. « Juste » est utilisé et un
principe en droit veut qu’une décision soit juste quand toutes les avenues de la loi ont
été explorées et qu’une décision ultime a été atteinte. Bien que l’expérience passée, la
jurisprudence et les grands principes agissent comme indicateurs dans un cas donné,
c’est l’interprétation des faits relatifs à un cas donné qui finalement amène la décision.
Lorsque les faits sont différents, les décisions sont différentes; les faits ne sont
habituellement pas complètement connus jusqu’au moment où le cas est soumis aux
tribunaux. Avec la gamme des intérêts présents dans une entreprise donnée et les
innombrables conflits d’intérêts qui peuvent surgir, il serait difficile pour les
comptables d’assurer que les droits économiques des individus ou des groupes
(créanciers, actionnaires, travailleurs, etc.) soient respectés.
législation qui a été développée dans des cas précédents et avec un juste regard sur
42
les cas connexes qui pourraient se produire dans le futur.
Si nous chargeons les comptables d’être à la fois juge, jury, avocat de la défense et
procureur de la couronne, en prenant de telles décisions’(c’est-à-dire si les comptables
insistent pour que de tels « faits » soient représentés), il est, bien sur, raisonnable
41
ARTHUR ANDERSEN & CO., p. 31
42
ARTHUR T. VANDERBILT, "Judges and Jurors: Their Functions, Qualifications, and Selection" (Boston University Press, 1956), p.
4.
La première difficulté dans les rapports avec ces autres concepts de nature éthique,
comme dans ceux avec la notion d’équité, est de les définir. Cela est en soi une tâche
difficile que Pattillo reconnaît lorsqu’il mentionne: « Considérant le concept de vérité,
on ne peut espérer en donner une définition (car les philosophes n’en ont pas encore
trouvée après des siècles de recherches) autre que d’exprimer que ce qui est vrai est
43
conforme à la réalité. » . Mais ne pourrions-nous pas dire également que ce qui est
conforme à la réalité est « objectif », « équitable », « juste ». Autrement dit, cet
énoncé ne mentionne pas de critères pour distinguer le concept de « vérité » des autres
concepts. Et, en réalité, comme il a été mentionné précédemment, le dictionnaire
donne comme synonyme d’ « équitable » des mots tels que « juste », « impartial »,
« objectif » et « non biaisé ». Pattillo ajoute :
43
PATTILLO, p 5q
qui est correct sans considérations pour les autres facteurs. « Impartial » implique
l’absence d’un préjugé favorable ou défavorable envers un parti. « Non biaisé » est
plus fort et suppose l’absence de préjugé et une disposition à être équitable pour
tous. « Objectif » implique une tendance à considérer les événements et les
personnes (et les concepts) de façon impartiale et sans tenir compte de ses propres
sentiments. 44
Malgré que j’admire l’approche directe de Pattillo dans sa tentative pour saisir ces
concepts intangibles, ses définitions me laisse perplexe sur la question de savoir quand,
où et comment je devrais les utiliser. Par exemple, certains mots sont utilisés pour en
définir d’autres ce qu’est un cercle vicieux en quelque sorte. I1 emploie également,
pour définir d’autres mots, des mots qui eux-mêmes, demandent à être définis.
Sans s’acharner sur la question, le point demeure qu’aucun de ces concepts de nature
éthique n’a un contenu opérationnel. Chaque comptable devrait décider dans chaque
cas ce qui est équitable, juste et vrai, puisqu’il ne pourrait utiliser de critères
généralement reconnus pour se guider. De plus, dans toutes les circonstances où des
concepts entreraient en contradiction, le comptable devrait décider lequel aurait
préséance. Encore là, l’opinion personnelle devrait trancher puisqu’il n’existe pas de
relations établies entre ces concepts. Cela augmenterait encore les controverses au
sujet de certaines pratiques.
Le but n’est pas ici de convaincre le lecteur que l’on doit développer des méthodes
telles que le comptable n’aura pas à exercer son jugement. Au contraire; puisqu’il
existe des pratiques et des procédures différentes, un bon jugement est toujours de
circonstances. D’autre part, on ne devrait pas appliquer des pratiques différentes pour
une même situation (ce qui est souvent le cas aujourd’hui). Si nous acceptons l’appro-
che sociologique au développement de la comptabilité, la variété des pratiques ne
44
PATTILLO,
LA NATURE DE LA COMPTABILITE
45 R.K. Mautz and Hussein S. Sharaf, « The Philosophy of Auditing », American Accounting Association, pp 13-14
Au cours des dernières années, plusieurs auteurs ont fait valoir l’idée que la théorie
comptable devrait être fondée en considérant « l’environnement politique et
économique et les façons de penser et coutumes de tous les segments de la
46
communauté des affaires ». Je n’ai pas encore vu de discussions sur ces coutumes et
façons de penser qui en auraient fait une notion suffisamment claire pour justifier leur
utilisation comme fondement de la comptabilité. De plus, les considérations qui
seraient ainsi accordées à ces facteurs pourraient nous conduire dans des voies que
nous ne voulons vraisemblablement pas emprunter. Prenons quelques exemples
pratiques pour mettre ces points à l’épreuve.
CONCLUSION
Tout développement de la théorie comptable, devrait à mon avis, être fondé sur des
points de vue scientifiques et objectifs. Les conclusions seront ainsi bien fondées et
vérifiables. Nous devons nous baser dans une large mesure sur l’observation si nous
voulons obtenir un consensus. C’est sur un tel fondement que l’on peut exercer une
Par
Maurice Moonitz
Quand on compare les différentes façons de définir le passif, on constate bien que
cette notion n'est pas si simple, ni toujours bien comprise.
I1 semble que la notion de passif change, évolue. On a beaucoup discuté, ces dernières
années, du "crédit" du bilan. En effet, on s'est souvent penché sur la signification de
taxes reportées, sur la présentation des coûts de fonds de retraite et sur la durée,
courte mais importante, des "réserves pour dépenses estimées". A la suite de ces
études, on constate qu'il n'existe pas de distinction très nette entre les aspects "débit"
et "crédit" des transactions observées. On découvre que ces réflexions ont porté surtout
sur l'établissement du "débit" d'abord, le "crédit" venant après coup. Selon certains
indices, le procédé courant consiste à se servir des dépenses et des autres frais pour
déterminer le profit sans avoir, au préalable, analysé la situation et s'être demandé si
la valeur d'un actif n'a pas été diminuée ou si une dette n'a pas été contractée. C'est
pourquoi, nous apercevons assez souvent des dépenses associées à des crédits faisant
partie de l'avoir des actionnaires.
Evidemment, il n'y a là rien de nouveau puisque tout ceci reflète bien une difficulté
plus grande que l'on rencontre de façon régulière: la méconnaissance de la relation
entre le bilan des revenus et des dépenses. Et il semble que le nombre d'exemples de
ce genre, de même que leur niveau d'importance, s'accroissent continuellement. Plus
loin, nous nous étendrons sur la définition du passif; notons, pour le moment, que
l'interprétation qu'on en fait n'est pas conforme à la réalité. Par exemple; nous nous
opposons à ce qu'une "taxe différée" puisse être considérée indifféremment comme une
taxe réelle ou non; et, à supposer que cette taxe soit réelle, nous nous opposons à ce
qu'elle apparaisse indifféremment comme passif ou comme soustraction d'un actif. Tout
passif doit, en effet, être inscrit du côté "crédit" du bilan, mais certains crédits (par
exemple: amortissement accumulé, provision pour créances douteuses) ne sont pas des
passifs. Nous avons donc besoin de différencier les crédits qui représentent des passifs
de ceux qui n'en représentent pas.
C'est pourquoi, il semble nécessaire de mener une enquête qui déterminera la vraie
nature du passif. Cependant, il est une question plus difficile et plus importante encore
que de déterminer la véritable définition d'un passif, c'est celle de savoir si nous
sommes prêts à envisager les nouveaux problèmes au fur et à mesure qu'ils se
présentent.
Accounting Trenas and Techniques rapporte que les états financiers publiés récemment
présentaient les postes suivants comme des passifs, sous des rubriques les distinguant
clairement de l'avoir des actionnaires. Dans le but d'alimenter la discussion, nous en
avons nous-mêmes établi la classification. Cette classification est composée d'exemples
spécifiques tirés de Accounting Trenas and Techniques; nous avons simplement
explicité les titres de comptes reproduits littéralement dans cette publication:
G) Cas impliquant des points qui ne sont probablement pas du tout des actifs:
Le lien ou les liens qui relient entre eux ces "passifs" nombreux et variés posent un réel
problème. Plus loin, nous soumettrons une structure qui pourra contenir la plupart de
ces passifs.
Il ne s'agit pas, ici, de savoir si les passifs comprennent quelque forme de capital-
actions. Si nous mettions l'avoir des actionnaires dans cette catégorie, il y aurait encore
des problèmes. Néanmoins, nous posons comme hypothèse qu'une distinction est
établie entre le passif et l'avoir des actionnaires comme, en fait, elle existe dans la
plupart des états financiers publiés. Vaut-il mieux traiter le capital-actions privilégié
comme une dette plutôt que de le traiter comme partie de l'avoir des actionnaires ?
Cela devient un sujet d'ordre secondaire puisque, pour les fins de notre discussion, nous
parlons de créanciers externes.
Toute définition acceptable du passif nous permet tout de suite de décréter que
certains des postes mentionnés plus haut n'expriment pas réellement des passifs.
Décision qui serait sûrement entérinée par un côtiseur d'impôt. Toutefois, afin
d'amorcer la discussion, voici des énoncés qui démontrent bien pourquoi on ne peut
faire l'unanimité sur la nature d'un passif :
2) Selon la nature même de leur profession, les avocats sont plutôt intéressés à
connaître d'abord les conséquences d'un bris de contrat c’est-à-dire à en
déterminer les conséquences financières. Ainsi, le droit - dans la mesure où cette
attitude l'influence - tend à ne reconnaître les dettes que lorsqu'un ensemble de
conditions précises à été réalisé.
Quand on compare les différentes façons de définir le passif, on constate bien que
cette notion n'est pas si simple, ni toujours bien comprise.
"En rapport à un bilan, on peut définir le passif comme suit: Quelque chose qui
est exprimée par un solde créditeur et qui, à la fermeture des livres, est ou
serait reporté selon les règles ou principes de la comptabilité, pourvu que ce
solde créditeur ne représente pas la contre-partie d'un actif. Utilisé ainsi, le
terme "passif" inclut non seulement les postes exprimant des dettes ou
obligations au sens populaire du terme, - incluant les provisions pour dettes
éventuelles - mais aussi les comptes à solde créditeur n'exprimant aucun rapport
entre un débiteur et un créancier. Ainsi, le capital-actions et les autres postes
constituant l'avoir des actionnaires représentent des soldes dont il faut tenir
compte bien que n'étant pas des dettes, au sens légal du mot. S'appuyant sur
cette dernière phrase des comptables ont conclu:
que le passif devait englober les dettes et l'avoir des actionnaires; que le
bilan est composé des sections "actifs", "passifs" et "avoir des
actionnaires"; que le montant total de la première section doit égaler la
somme des montants des deux autres. Nous sommes d'avis que ce point de
vue et la définition exprimée plus haut sont cohérents". 47
Cette définition révèle que si vous voulez connaître la nature d'un passif, demandez à
un comptable. Je suis comptable moi-même, et vous l’êtes également. A qui le
demanderons-nous?
47
American Institute of Certified Public Accountants, Accounting Terminology Bulletins, Review and Resume, 1953, pp.13-14
48
Kohler définit le "passif" comme suit :
"Un montant dû par une personne (débiteur) à une autre (créancier), payable en
argent, biens ou services; le résultat de l'acquisition d'un actif ou d'un service reçu ou
d'une perte encourue; particulièrement, toute dette:
b) due à une date déterminée dans le futur (dette à long terme, dette courue); ou,
"Les intérêts des créanciers (passifs) sont des réclamations qui, résultant ou d'activités
ou d'événements passés, exigent d'être satisfaites par des sorties de ressources de la
part de l'entreprise. (...) On doit comptabiliser les créances dans la période où l'argent,
les biens ou les services sont reçus ou les obligations encourues, et on doit les évaluer
en argent ou en quelque chose d'équivalent. On doit éliminer une créance dans la
période ou elle cesse effectivement d'exister". 49
Cette définition est assez vague. Le seul point qu'on doive retenir à ce moment-ci, c'est
que The Committee on Concepts and Standards identifie "passif" à « créanciers ». Les
notions de créancier et de débiteur relevant du domaine légal, apparemment, on se
base sur le droit pour déterminer ce qui devrait apparaître dans la section "passif" du
bilan.
La première partie de cette définition est très vaste. Cependant, si nous examinons la
définition légale de "dette", nous avons un point de vue différent.
"(...) une dette, c'est une obligation de payer une somme d'argent précise à une
date déterminée (avec possibilité de recours de la part du créancier), et
l'intérêt, même s'il n’est pas gagné. ("Pas gagné" par le débiteur, je présume)". 51
50
Corpus Juris Jecundum , Vol. 53, p.17
51
HILLS, GEORGES S., The Law of Accounting and Financial Statement. Boston, 1957, pp.119-120.
"Distinctes des notions d'obligation ou de passif légal, les créances sont des droits
sur les actifs de l'entreprise; elles peuvent résulter de considérations légales,
économiques ou administratives. Bien que certaines créances disparaissent
lorsqu'elles sont payées, elles peuvent aussi disparaître pour une foule d'autres
raisons". 52
Après ce tour d'horizon des définitions, nous nous permettons une conclusion: tous les
items qui répondent aux critères légaux de "dette" se qualifient également comme
"passifs". Une définition idéale de "passifs" devrait, par exemple, permettre de
déterminer:
a) si tous les postes qu'on étiquette comme des "passifs" aux états financiers le sont
réellement;
c) si les événements de caractère financier notés au bas d'un bilan doivent apparaître
au bilan lui-même.
En plus, une telle définition devrait nous permettre d'analyser les nouvelles situations
afin d'être en mesure de confirmer s'il existe quelque élément de passif.Ainsi, nous
pourrions apporter une certaine continuité à notre travail, et nous n'aurions pas besoin
de nous fier à des déclarations d'autorité qui surviennent du fait qu'on ait adopté deux
ou plusieurs façons de traiter le sujet.
52
VATTER, Fund Theory of Accounting, p.95
Les quatre caractéristiques suivantes nous serviront de point de départ pour établir une
définition des passifs:
Les courus n'apparaissent pas sur cette liste; il en est de même de l'amortissement des
coûts ainsi que des "transactions internes", tel que le transfert de produits en cours en
produits finis. Cependant, ces courus, amortissements et transferts résultent de
"transactions passées", à l'encontre de certains événements qui, eux, ne se sont pas
encore produits: la paye du mois prochain; l'achat l'an prochain d'actifs immobilisés;
l'émission d'obligations du prochain trimestre. Cependant, d'après la deuxième
caractéristique, ces derniers événements ne peuvent être identifiés comme des
"passifs".
3.- le montant du passif doit être le résultat de calculs ou d'estimation précise. C'est
d'ailleurs vrai de toute écriture comptable.
"(...) à cause de ces facteurs, si le coût total des prestations de réussite qui
seront versées ne peut être déterminé d'avance avec exactitude, on peut, en se
servant de techniques actuarielles, l'estimer de façon assez précise. La marge
d'erreur étant si minime, nous croyons qu'on ne doive pas exclure un cas comme
celui-là. Et, il y en a d'autres cas de ce genre". 53
"De l'avis de plusieurs personnes, les coûts encourus en vertu d'un régime de
retraite ne devraient pas nécessairement dépendre des ententes conclues en
vertu de ce régime ou ne devraient pas être déterminés selon la seule
interprétation légale face à ce régime". 54
En d'autres mots, il faudrait que les coûts d'un fonds de retraite soient en fonction des
facteurs d'opérations auxquels ils se rapportent. Cependant, dans la recommandation
suivante, on se base sur la définition légale de dette:
"(...) pour le moment, le comité croit que, à tout le moins, les comptes et les
états financiers devraient montrer des courus qui soient égaux à la valeur
actuelle, calculée selon les techniques actuarielles, des options de prestations
aux employés dans la mesure où ceux-ci ont des droits acquis; au bilan, cette
valeur devrait être réduite de tout montant accumulé en fiducie ou de rentes
viagères achetées". 55
53
Accounting Research Bulletin, no 47.Septembre 1956, par.4
54
Ibid., par.5
55 Ibid., par.7
Cette importance qu'on accorde à l'effet ou 1’incidence d’une transaction sur le profit a
comme résultat de fragmenter les états financiers. Prenons, par exemple, la "réserve
estimée pour perte sur option d'achat". La "perte" n’est pas la dette. Ne sommes-nous
pas, en effet, responsables du montant total en contrat ? Littéralement, la "perte" c'est
le montant qu'on estime devoir payer s'il y a bris de contrat. Aussi, si nous
comptabilisons selon le système à partie double – 1’actif (marchandises commandées) -
cette sorte de distinction n'a plus sa raison d'être et le problème de 1’établissement du
passif disparaît.
Autres exemples
Discutons maintenant des différents cas cités au début de cet article. Pour fins de
sondages, nous nous servirons des quatre caractéristiques du passif établies
antérieurement qui sont, en résumé:
Tous les cas impliquant un déboursé dans l'avenir se qualifient comme passifs. Les
estimations de coûts de recouvrement, de coûts supplémentaires sur contrats terminés
et de coûts encourus en vertu de différentes sortes de garanties impliquent non
seulement des déboursés futurs, mais sont aussi les résultats de transactions passées et
sont des éléments de la comptabilité à partie double.
Le cas des rendus et rabais sur ventes estimés est intéressant. Si on doit rembourser le
client, il s'agit d'un passif. Si, par contre, cette estimation réduit le montant à
recouvrer d'un client, elle est semblable à une provision pour créances douteuses et
devrait être inscrite au bilan.
Les déboursés en vertu de baux se qualifient nettement comme des passifs, non
seulement d'après notre définition, mais aussi d'après la définition légale. En fait, un
vieux cas de jurisprudence établit assez bien le principe légal. Une personne avait loué
un magasin pour une période de cinq ans à un taux mensuel fixe. Elle a fait faillite
après dix-huit mois. La cour décréta que le montant représentant les quarante-deux
(42) mois non écoulés constituait une dette pour le locataire. Ces dernières années, des
TAXES DIFFEREES
Ces cas sont importants, car il est fort probable que les revenus déjà réalisés ou
reconnus aux livres seront taxés une année ou l'autre. S'ils n'ont pas été déclarés pour
fins d'impôt, mais différés, on est alors certain de devoir payer l'impôt sur ces revenus.
Les probabilités d'imposition sont minimisées si, profitant de la loi, nous avons déduit,
pour fins d'impôt, un plus grand montant que celui qui est inscrit aux états financiers.
Prédire les revenus futurs constitue un plus grand risque que de prédire un paiement
d'impôt sur des revenus déjà connus.
Quant aux "facturations sur contrats non terminés", leur montant total constitue un
passif si on les considère comme des avances du client pour financer le contrat. Si tel
est le cas, ce passif disparaîtra lors du remboursement ou, plus couramment, lors de la
livraison du produit fini au client. De plus, selon cette interprétation, le passif est
composé du montant total facturé ou à facturer; tous les coûts encourus à une certaine
date équivalent, en somme, à ceux d'un produit en cours et de ce fait, constituent un
actif pour l'entreprise. Si, par contre, le montant facturé excède les coûts réels, cet
excédent constitue un "profit non réalisé" qui, diminué de l'impôt, est l'un des éléments
composant l'avoir des actionnaires. Traditionnellement, la section "avoir des
actionnaires" incluait les bénéfices réels à l'exception du "surplus d'évaluation"; ceci
nous forçait à inscrire les "profits non réalisés", quelque part ailleurs. Mais nous
constatons qu'il n'y a pas de place ailleurs, au bilan, pour cette sorte de "profit" et que,
d'ailleurs, quelle que soit l'interprétation que l'on fasse du bilan, cet excédent n’est pas
un passif.
Nous abordons maintenant les cas qui ne possèdent pas les caractéristiques de passifs.
Une "réserve pour auto-assurance" représente une transaction future qui pourrait ne
jamais avoir lieu; cette "réserve" ne résulte pas d’une transaction passée. Le fait de
posséder un édifice ne me condamne pas à le voir incendier en tout ou en partie à un
certain moment. Le fait de n'avoir pas payé de prime d'assurance l'an dernier ne
m'oblige pas à payer quoi que ce soit à quelqu'un cette année-ci ou les années
prochaines. Si une "réserve pour auto-assurance" doit exister, elle doit être une
affectation des bénéfices non répartis.
CONCLUSION
Les difficultés se rapportant aux passifs sont plus faciles à résoudre que celles qui se
rapportent aux actifs. Néanmoins, la croissance de situations dans lesquelles les
engagements financiers semblent de plus en plus importants et l'acceptation comptable
des courus ont augmenté la difficulté à déceler un passif. D'autre part, en utilisant la
partie double de façon plus rigoureuse et en envisageant moins le court terme, nous
pouvons améliorer le bilan de façon sensible, le faisant passer de son rôle technique de
balance de vérification après fermeture à son rôle beaucoup plus important d'état de la
situation financière.
Par
Dang Pham 56
Résumé
La survaleur est un point important de la stratégie des groupes qui adoptent une
politique de croissance externe, tant elle pèse sur les bilans et les résultats consolidés.
La comptabilisation de cette différence entre le prix payé lors d’une acquisition et la
valeur comptable après revalorisation de certains éléments identifiables du bilan de la
société acquise fait l’objet de controverses permanentes depuis le début du siècle. Le
présent article permet de mieux appréhender la complexité du problème à travers la
revue des fondements théoriques ambigus de la survaleur, de ses modes de traitement
comptable et de la diversité des normes et des enjeux. L’évolution de l’harmonisation
internationale est mise en évidence et ses difficultés évaluées à la lumière de la
théorie des marchés efficients, qui préconise l’adoption d’une solution moins
ambitieuse sur le plan conceptuel mais acceptable dès lors qu’elle est accompagnée
par des informations détaillées en annexe.
56 56
Dang Pham est professeur au département comptabilité-contrôle de gestion du Groupe HEC. Il est l’auteur de
plusieurs ouvrages et articles sur la comptabilité anglo-saxonne et la consolidation des comptes de groupe. Ses
recherches portent sur l’harmonisation internationale des normes, la communication financière et la valeur
actionnariale, et l’évolution du management.
Quand une société M acquiert le contrôle d’une société F qu’elle intègre dans son
périmètre de consolidation, un « écart de première consolidation», constitué par la
différence entre le prix d’achat et la quote-part des capitaux propres de F qui revient à
M, est dégagée. Cet écart doit être ensuite décomposé en « écarts d’évaluation »
afférents à la revalorisation un par un des actifs et passifs identifiables du bilan de F
(pour les amener de leurs valeurs comptables à leurs valeurs à la date d’acquisition de
F) et en un solde résiduel appelé « écart d’acquisition » ou survaleur (« purchased
goodwill »). En schématisant, la survaleur est donc la différence entre le prix payé et la
valeur comptable de ce qu’on acquiert, compte tenu des revalorisations de certains
éléments identifiables du bilan.
Certains font coïncider goodwill financier et survaleur comptable : celle-ci serait alors
la capacité de la société acquise à produire un surcroît de rentabilité par rapport à une
rentabilité considérée comme normale par le marché. D’autres poussent plus loin
l’analyse en attribuant cette sur-rentabilité à l’existence d’actifs intangibles
spécifiques à la société acquise et non reconnus dans ses comptes, (savoir-faire,
réputation, etc.), de synergies internes ou externes avec l’acheteur. Il semble toutefois
illusoire de chercher à attribuer une sur-rentabilité anticipée à des actifs particuliers
en raison des interactions obligatoires entre tous les actifs utilisés, qu’ils soient
tangibles ou intangibles. Enfin, on ne peut écarter l’hypothèse de distorsions
d’opportunité dues au contexte de négociation, et d’erreurs dans la revalorisation des
actifs identifiables. Dans la réalité, dès lors qu’il s’agit d’isoler et de mesurer ces
éléments, les difficultés souvent sont telles que l’on peut s’interroger sur l’opportunité
d’une telle décomposition. Cela d’autant plus que, pour certains, lorsque le prix payé
s’est fondé uniquement sur l’anticipation globale des revenus futurs, il n’y a pas de lien
avec les valeurs des actifs acquis. Dans ces conditions, la différence n’aurait pas de
justification, et pour des auteurs comme Canning, la survaleur n’est qu’un simple
résidu arithmétique dont il faudrait se débarrasser au plus vite.
Plusieurs raisons sont avancées, notamment par les Britanniques : difficulté à identifier
les origines de la survaleur et à déterminer la durée d’un éventuel amortissement,
ambiguïté du concept qui fait que son caractère d’actif peut être contesté (ce n’est pas
un élément séparable qui peut être vendu sans céder d’autres éléments du patrimoine
ou l’entreprise), cohérence avec la non-reconnaissance à l’actif du goodwill créé en
interne.
Les modes de traitements précédents n’ont pas le même impact sur les états financiers
: les deux derniers présentent l’avantage de ne pas pénaliser le résultat comme le fait
l’amortissement systématique, et ce d’autant plus que dans certains pays comme la
France et le Royaume-Uni, il n’y a pas de déductibilité fiscale. Les adversaires de
L’imputation sur les capitaux propres, en les diminuant, permet de doper le taux de
rentabilité
financière mais peut aboutir à des situations nettes négatives (cas de Blenheim et
Saatchi et Saatchi dans le passé) et à des ratios d’endettement dégradés. Elle a aussi
comme inconvénient de voiler le montant investi et de faire disparaître toute mauvaise
affaire rendant ainsi plus difficile l’appréciation de la performance après l’acquisition.
D’autre part, on peut dans les pays anglo-saxons recourir à la méthode de mise en
commun d’intérêts (pooling of interests) qui permet, dans certains cas, de
comptabiliser les regroupements d’entreprises non comme des acquisitions mais comme
des mariages: on se contente alors d’agréger des valeurs comptables, les survaleurs
n’étant pas dégagées.
57
Norme SSAP 22 (actuellement en vigueur) : traitement préférentiel : imputation de la survaleur en déduction des réserves traitement
alternatif : immobilisation et amortissement sur la durée d’utilisation.
58
A partir de 1999, norme FRS10 : amortissement obligatoire sur une durée en principe limitée à 20 ans : en cas de durée supérieure
justifiée, un test de dépréciation annuel est requis. Dans le cas particulier de la durée infinie, cela équivaut à un maintien à l’actif sans
amortissement, sous réserve de ce test.
Le tableau (voir page V) donne une idée de la variété des solutions retenues, et met en
évidence la flexibilité qui peut exister, certains pays autorisant plusieurs traitements.
Le débat est-il en voie d’extinction pour cause de convergences, via l’IASC, ou n’a-t-il
fait que de changer de formes, allant d’abord de l’amortissement vers les marques,
puis de celles-ci vers les modalités du test de dépréciation ? Les mois qui viennent nous
le diront, mais quoi qu’il en soit, si l’on en croit la théorie des marchés efficients, il
aurait dû être clos depuis longtemps.
En effet, sur de tels marchés, les cours boursiers sont censés refléter rapidement toute
information publique disponible. Normalement, ces marchés seraient capables de
décrypter n’importe quel mode de traitement, d’analyser la situation économique
réelle et de l’incorporer dans les cours. Cette constatation n’implique pas qu’il faille
renoncer à s’entendre sur une solution commune : le décryptage pouvant être long et
ardu, il faut en optimiser le coût. Il importe cependant de ne pas s’essouffler à
chercher un consensus sur un traitement ultra-sophistiqué, « le meilleur possible
conceptuellement ». Il suffit de retenir une solution simple et claire, qui serait
accompagnée de la diffusion en annexe de suffisamment de détails pour que chaque
utilisateur puisse retraiter les comptes s’il le juge opportun.
Dans ces conditions, une solution pragmatique du type de celle proposée par la France
(amortissement avec recours au Snome), même si elle ne se situe pas dans la droite
ligne du cadre conceptuel de l’IASC, pourrait fournir une bonne base de discussion.
Mais le bon sens peut-il encore l’emporter sur les intérêts et les passions après tant
d’années de débats ?
Son vocabulaire est limité, au point d'être parfois incapable d'exprimer certaines
réalités économiques importantes.
Peut-on dès lors s'étonner des critiques plus ou moins sévères dont la comptabilité fait
l'objet? I1 n'y a qu'à parcourir les revues et journaux spécialisés du monde des affaires
pour constater le doute largement répandu dans le public concernant la validité des
états financiers. Le commentaire suivant en est un exemple typique: « …le bilan est
devenu un état pratiquement sans signification en tant qu'indicateur des ressources et
des obligations réelles d'une compagnie. De plus, l'état des revenus et dépenses est
distorsionné davantage par le fait que les compagnies peuvent utiliser une myriade de
méthodes comptables alternatives."59
"Un simple précédent, peut-être accompagné par une menace de l'entreprise de confier
à d'autres son travail de- vérification, peut suffire à transformer un traitement
60
comptable douteux en une pratique généralement reconnue."
59
Business Week, 23 décembre 1972.
60 Forbes, 15 mai 1967, tel que reproduit dans: Accounting: Socially Responsible and Socially Relevant, Richard G. J. Vamgermeersch, New-York,
Bref, il semble que les réactions du public convergent dans une même direction:
surprise devant le peu de crédibilité qui peut être accordé aux états financiers et
devant la capacité d'accommodement des comptables dans leur rôle de vérificateurs.
D'autre part, cette surprise face aux états financiers semble d'autant plus grande que le
public avait toujours cru que l'élaboration des états financiers devait se faire
conformément à des principes comptables professionnellement établis. N’est-il pas dit
dans le rapport du vérificateur que "les états financiers représentent équitablement la
situation financière en conformité avec les principes comptables généralement ac-
ceptés"?. De là à penser que parce que les états financiers étaient rédigés selon ces
principes comptables généralement acceptés ils représentaient équitablement la
situation financière de l'entreprise, il n'y avait qu'un pas: le public l'avait franchi.
L'urgence d'avoir une réponse satisfaisante à cette interrogation nous apparaît évidente
pour plusieurs raisons:
Les PCGR se sont traditionnellement développés au rythme des situations plus ou moins
urgentes auxquelles avait à faire face la profession comptable. Cette dernière a
toujours été plus empressée de trouver des solutions satisfaisantes à des problèmes
précis d'actualité que de vérifier le degré d'intégration de ces solutions à l'ensemble de
la théorie comptable. Là réside à notre avis une des causes importantes de la faiblesse
des PCGR. En effet, cette approche comporte en elle-même plusieurs difficultés
susceptibles de freiner le développement de principes comptables féconds et robustes.
61
common law noun droit m coutumier61
le rôle des techniciens de la comptabilité devait se limiter dans une large mesure à un
travail de codification des coutumes comptables et à un effort de rationalisation de ces
coutumes..
Cependant, ce mode de PCGR faisait courir le risque que l’ensemble des standards,
règles et procédures qui en résulteraient viendraient à se contredire partiellement.
Bien plus, en admettant qu’on puisse éviter l’écueil de la contradiction et, par
conséquent de l'incohérence, rien ne garantissait qu'en suivant cette approche, la
codification des coutumes comptables puisse aboutir à un corps de doctrine
suffisamment complet et riche pour servir de guide à la résolution des problèmes
futurs. De fait, de ces deux écueils possibles inhérents à l'approche suivie, la
comptabilité n'a su en éviter aucun.
Les principes comptables ont aussi été lourdement handicapés par l'absence remarquée
d'explications satisfaisantes concernant certains concepts fondamentaux.. Si on
examine la codification des PCGR qu'a faite Paul Grady aux Etats-Unis ou la version
canadienne de ces mêmes principes par Skinner, on est frappé tout d'abord par l'effort
qui s'y est fait pour expliquer comment chaque poste des états financiers doit être
traité, ou bien comment les postes du bilan et de l'état des revenus et des dépenses
doivent être classifiés ou encore comment procéder pour en arriver à la détermination
du profit comptable. Cependant, très peu d'efforts sont consacrés à la définition du
sens qui doit être donné à des termes aussi fondamentaux que "position financière,"
"profit," "bilan," etc.
La difficulté de codifier venait du fait qu'il fallait trouver réponse à plusieurs questions
avant que tout effort de codification puisse espérer avoir du succès. Par exemple, il
fallait déterminer à quel moment une coutume était suffisamment établie pour qu'on
puisse la considérer comme un PCGR. Les coutumes comptables devant constituer les
PCGR devaient-elles se restreindre à quelques concepts de base très généraux ou au
contraire s'étendre aux règles et procédures'? Comment pourrait-on s'assurer que toutes
les principales coutumes comptables avaient été recueillies? Des difficultés de ce genre
firent que ce n'est que très récemment que des tentatives de codification des PCGR ont
abouti. Cette absence de codification dans le passé n'a pas été sans soulever certaines
difficultés pour le moins embarrassantes pour la profession. Par exemple, Ie
gouvernement fédéral introduisit en 1947 un projet de loi dans lequel il était stipulé
que "le revenu pour une année d'imposition d’une entreprise ou une propriété devait
être déterminé selon les principes comptables généralement acceptés". La profession
comptable dut demander que l'expression "principes comptables généralement
reconnus" soit retirée du projet de loi parce qu'elle ne référait à aucune codification au
La deuxième difficulté, soit celle de pondérer l'importance relative des divers groupes
influençant la coutume comptable, était encore plus importance car elle posait le
problème de l'autorité relative des divers groupes ayant un intérêt dans la
comptabilité. Traditionnellement, la profession comptable a laissé à la direction des
entreprises une voix très importante dans la détermination des coutumes comptables.
"... le management n'a pas pour objectif premier le développement d'un ensemble de
principes comptables sur lesquels il y aurait accord général. Le management voit les
"principes comptables" comme un aspect de l'environnement dans lequel il doit opérer.
En conséquence, les principes comptables sont considérés comme des contraintes
(facteurs, forces) auxquelles il faut s'adapter. Si les forces de l'environnement ne
peuvent être changées, le management s'adaptera à ces forces. Si ces forces peuvent
être manipulées, le management les façonnera selon ses besoins. La profession
62
Cette prépondérance concédée au management dans l'élaboration des PCGR explique aussi la timidité traditionnelle du Comité de
recherche de l'Institut. Par exemple, il est intéressant de voir comment ce comité concevait son rôle en ce qui concerne l'élaboration des
bulletins comptables il y a environ 20 ans : "II est inévitable, et à bien y réfléchir, il est éminemment désirable que !es bulletins dans cette
série contiennent peu qui soit nouveau aux membres do la profession. I1 serait déplorable que les bulletins contiennent de fait de telles
surprises, car ce que le Comité désire faire dans cette série de bulletins c'est d'énoncer ce qu'il croit être ces principes et ces procédures qui
sort généralement acceptés par les membres de la profession. La valeur des bulletins, s'ils sont généralement acceptés par les membres de
la profession, réside dans le fait que la profession elle-même et non pas quelqu'un d'autre détermine ce qui peut être considéré comme une
bonne pratique comptable <ru Canada." (7, pp. 284-235)
comptable concède vraiment trop lorsqu'elle accepte de laisser la priorité dès le départ
au management dans le domaine des principes." .
11 est intéressant de noter qu'il n'y a pas que des personnes venant du milieu
académique à partager ce point de vue. La Fédération des Analystes Financiers par
exemple, dans son mémoire soumis au Groupe d'étude de l'American Institute of
Certified Public Accountants sur les objectifs des états financiers, faisait remarquer que
le rôle du management implique plusieurs situations de conflit d'intérêt,
particulièrement dans le cas où le management a la responsabilité des rapports de la
compagnie, alors que sa propre performance est le sujet de ces rapports.
"II est difficile de définir d'une façon précise l'expression "généralement reconnus". On
en comprendra probablement plus facilement le sens en étudiant la manière dont la
pratique comptable devient généralement reconnue. La pratique comptable en
question devra avoir au moins une, et la plupart du temps, plusieurs des
caractéristiques suivantes:
o Etre en usage dans un nombre suffisant de cas, pourvu, bien entendu, que les
circonstances le justifient.
Peut-on s'étonner des libertés que certains ont pu prendre avec autant de latitude, en
ce qui concerne les états financiers? Il n'est pas étonnant non plus de voir des praticiens
réclamer la disparition de l'expression "en conformité avec les principes comptables
généralement reconnus" parce que selon eux::
2) On n'a pas su établir d'une façon suffisamment claire par qui ils devaient être
acceptés et le degré d'acceptation nécessaire.
3) Une présentation équitable des états financiers est incompatible avec un mode de
présentation prisonnier de règles détaillées et précises qui restreignent la pos-
sibilité pour le praticien d'exercer son jugement.
En résumé, nous venons de voir que les PCGR étaient déficients sous deux aspects
différents: l'aspect conceptuel et l'aspect pratique. Sous l'aspect conceptuel, il semble
y avoir un manque évident d'une approche plus systématique pour guider l'élaboration
des PCGR. Du point de vue pratique, l'absence d'une méthode d'élaboration des PCGR
qui ne prête pas le flanc aux conflits d'intérêts se fait sentir.
Les commentaires qui précèdent ont nettement fait ressortir les limitations d'une
approche "common law" trop strictement appliquée pour le développement des
principes comptables. Par conséquent, on ne s'étonne pas de constater aussi que la
structure théorique de la comptabilité, si étroitement liée aux PCGR, soit elle aussi
déficiente au point de ne pouvoir toujours servir de guide sûr à la pratique.
position "d'agir", il faut absolument que la profession se dote d'un corps de doctrine
beaucoup plus solide. A cet effet, on serait bien avisé de s'inspirer davantage de la
démarche scientifique, qui maximise les chances d'en arriver à de meilleures solutions.
Or, cette démarche scientifique ne met pas en opposition l'approche inductive
caractéristique de la situation actuelle et l'approche déductive, mais en fait au
contraire les éléments complémentaires et nécessaires d'un processus de recherche
itératif. Dans cette optique, les résultats auxquels aboutit une méthode servent de
point de départ pour l'activité de l'autre méthode. Il s'agit donc d'un processus constant
d'autorégulation qui ne manifeste aucune préférence quant à l'endroit où il doit
démarrer. La solution au problème de la méthodologie à utiliser pour la construction
d'une théorie comptable robuste ne réside donc pas dans le remplacement de la
méthode inductive par la méthode déductive, mais plutôt dans une volonté de
décloisonnement des efforts qui sont faits à partir des deux méthodes. C'est dans cette
optique que le plaidoyer de Skinner (5, p.331) en faveur d'une forte injection de
logique déductive dans le développement des théories comptables prend tout son sens.
o S'il advenait qu'un accord s'établisse autour de la nécessité pour les états financiers
de présenter de l'information non seulement historique mais de faire voir davantage
de l'information interprétative et prévisionnelle, ce choix nécessiterait au niveau de
la théorie comptable une modification profonde de l'interprétation actuelle du
concept "d'objectivité".
o Le rapport Trueblood a proposé qu'un des objectifs des états financiers soit de servir
prioritairement ceux qui, à cause de leur situation particulière, n'ont pas d'autres
sources d'information que les états financiers pour juger des activités économiques
d'une entreprise. L'acceptation de cet objectif pour la profession aboutirait tôt ou
tard à une interprétation modifiée du concept de "divulgation".
Une bonne partie de la faiblesse actuelle des PCGR provient d'objectifs non clairement
établis ou parfois contradictoires pour les états financiers. A notre avis, aussi longtemps
qu'un consensus plus grand n'aura pas été atteint concernant les objectifs des états
financiers, nous serons condamnés à tourner en rond en ce qui regarde le
développement des PCGR. On a vu dans le passé des recommandations cohérentes et
pratiques n'être pas retenues parce qu'elles présumaient des objectifs pour les états
financiers qui n'étaient pas alors acceptés par la profession.
Il nous apparaît évident que si les difficultés d'ordre théorique que nous venons de
discuter étaient amoindries, il en résulterait un ensemble de PCGR dont la robustesse
emporterait une plus grande adhésion, diminuant d'autant le problème de l'autorité
dans la détermination des principes comptables. D'autre part, un effort certain a été
fait pour solutionner le problème de l'autorité lorsqu'en 1973 l'Institut des comptables
agréés scinda le Comité de recherches en comptabilité et vérification, en un Comité de
recherche comptable et un Comité des normes de vérification et accepta que des
représentants d'autres organismes fassent partie du Comité de recherche comptable.
Ce faisant, l'Institut reconnaissait du même coup que la comptabilité et son
développement n'était pas l'affaire exclusive des comptables agréés. Il élargissait aussi
la base sur laquelle une autorité véritable en matière de développement des PCGR
pouvait désormais s'appuyer.
Il est certes trop tôt pour juger des résultats de ce changement. Cependant, en n'allant
pas au moins aussi loin qu'on le fit aux USA alors que le "Financial Accounting Standards
Board" est devenu indépendant de l'A.I.C.P.A., nous estimons que l'Institut a perdu une
belle occasion de prendre toutes les mesures appropriées pour donner au Comité de
recherche comptable une indépendance telle que personne ne puisse plus le
soupçonner d'être indûment influencé par des groupes particuliers.
Le rôle de la recherche
"Une des façons par lesquelles toute profession responsable répond au changement est
en s'assurant (sic) que les principes fondamentaux ainsi que les frontières de son bagage
de connaissances soient tournés vers les besoins de ses membres et ceux qu'elle sert. La
recherche doit tendre à s'assurer que la profession dirige ses nouvelles idées à
l'intérieur d'un cheminement de développement ordonné. L'histoire nous donne (sic) des
exemples de rejets causés par un développement désordonné et, (signe d'avertissement
à nous tous) retrace les souvenirs de disparition d'espèces et de civilisations qui n'ont
pas évolué avec leur environnement." (6, p. 50) (italiques ajoutées).
Quant à la recherche présente, il est difficile de ne pas conclure qu'elle soit encore
largement ballottée et orientée au gré des problèmes immédiats qui se présentent. De
par les thèmes qui y sont étudiés, nous ne pouvons déceler chez elle cette volonté de
vision globale de la comptabilité nécessaire à quiconque prétend orienter un
développement ordonné. Un ensemble de principes comptables cohérents, complets et
robustes est largement tributaire d'un effort de recherche approprié. Cet effort de
recherche existe; il importe de le mieux orienter.
Par
Ahmed Belkaoui
b) une discussion logique, préférablement basée sur une théorie, des moyens à
résoudre le problème;
Catégorie 1: spécifie que les comptables doivent communiquer ce qu'ils font par
la publication des principes comptables qu'ils ont adoptés.
Premièrement, est-ce que les normes de la quatrième catégorie sont établies sur une
base théorique et, deuxièmement, est-il possible de les choisir sur une base théorique ?
Beaucoup de gens sont convaincus que la réponse est doublement négative. De toute
façon, les quatre types de normes font partie de la situation comptable courante. Il
doit donc y avoir un bon côté aux normes comptables. Ainsi :
2. Elles servent de guides et de règles aux comptables pour s'assurer, dune façon
prudente et indépendante, de leur expertise et de leur intégrité en vérifiant les
rapports des entreprises et en certifiant leur validité.
4. Elles développent un intérêt pour les principes et théories chez ceux qui sont
intéressés à la discipline comptable. En fait, l'établissement même d’une norme
comptable crée beaucoup de controverses et de débats dans les mondes
pratiques et académiques.
Les approches traditionnelles pour la formulation d’une théorie comptable ont été
proposées surtout par les associations comptables. Ces dernières se divisent en:
Les principales associations comptables que nous venons de citer sont fédérales et
chacune a une section provinciale (au Québec, par exemple, on trouve l'Ordre des
Comptables Agréés du Québec, la Corporation professionnelle des Comptables en
administration industrielle et la Corporation professionnelle des Comptables généraux
licenciés).
e) Les effets et comptes à recevoir, dus par des directeurs, des employés,
ou des filiales, doivent être indiqués séparément et ne doivent pas
apparaître sous la rubrique « Effets à recevoir et comptes à recevoir ».
3. En 1934, une autre loi fur adoptée par le Congrès américain : le Securities
Exchange Act donna naissance à la Securities Exchange Commission (S.E.C.) et
exigea l'enregistrement des valeurs inscrites et des courtiers sur les marchés
boursiers.
a) AR.S. No. 2, «Cash Flow Analysis and the Funds Statement, par Perry
Mason, A.I.C.P.A., 1961.
e) A.R.S. No. 8, « Accounting for the Cost of Pension Plans », par Ernest L.
Hicks, A.I.C.P.A., 1965.
k) A.R.S. No. 14, « Accounting for R & D Expenditures », par Oscar S. Gellein
et Maurice S. Newman, A.I.C.P.A., 1973.
Pendant des années, la profession comptable américaine fut vivement critiquée pour ne
pas avoir prévu et permis d'éviter des abus qui nécessitèrent, dans certains cas,
l'intervention de la justice (par exemple, les procès de Westec, Mill Factors, Four
Seasons Nursing Homes, Continental Vending, Revenue Properties, Black Watch Farms,
Orvis Brothers et Penn-Central). Pour répondre à ces critiques, l'A.I.C.P.A. créa en 1971
deux groupes d'études, l'un chargé de la formulation des objectifs de la comptabilité, le
Trueblood Committee (du nom de son président), et l'autre chargé de la formulation
des principes comptables, le Wheat Committee (du nom de son président). Ce dernier
était chargé plus précisément d'étudier le mode de développement des principes
comptables et de faire des recommandations afin d'accélérer ce processus de
développement. Une des recommandations de ce comité donna naissance au Financial
Accounting Standards Board (F.A.S.B.), qui remplaça l'A.P.B.
dont 4 sont des experts-comptables (C.P.A.). Les autres membres, bien que non
experts-comptables, sont parmi les mieux informés de la discipline comptable. On a
souvent critiqué le F.A.S.B. pour la lenteur de ses détails de publication. Contrairement
au C.A.P. et à l'A.P.B. qui faisaient partie de l'A.IC.P.A., le F.A.S.B. fut créé en 1972
comme comité indépendant avec l'objet de formuler et de publier des normes
comptables destinées à améliorer l'information publiée par les entreprises à but lucratif
et les organismes à but non lucratif. Le F.A.S.B. procède à la résolution des problèmes
comptables premièrement, par la publication d'un mémoire dans lequel est étudié le
problème comptable et qui contient également toutes les solutions possibles,
deuxièmement, après avoir reçu le point de vue d'audiences publiques, par la
publication d'un exposé-sondage sur le sujet et, troisièmement, après avoir reçu les
commentaires de la publication d’une norme comptable, par la publication de bulletins
d'interprétation.
L'ICCA joue au Canada le rôle que joue l'A.ICPA aux USA. L'Institut s'occupe d'édicter des
normes comptables et des principes d'enseignement, de recrutement et de pratique
professionnelle. Depuis sa fondation, l'ICCA. a beaucoup évolué.
- Le 15 mai 1902, une loi créant l'Association Dominion des Comptables Incorporés
fut sanctionnée.
- En 1949, la loi fut changée pour donner à l'association le nom d'Institut canadien
des comptables agréés.
Le tableau n° 2 décrit la structure de l'ICCA. Les comités les plus importants sont le
Comité de recherche comptable et le Comité des normes de vérification. Tous deux
sont chargés d'édicter des normes comptables ; ils se différencient par leur domaine
d'intérêt respectif. Leur principale tâche est de publier dans le Manuel de l'ICCA des
recommandations et des prises de position relatives à la comptabilité. Les deux comités
utilisent les exposés-sondages pour connaître l'opinion des membres de l'Institut et du
monde des affaires concernant divers sujets comptables. Toute prise de position doit
être ratifiée par au moins les 2/3 des membres du comité concerné avant d'être
publiée. Il convient de voter que six membres du Comité de recherche comptable
peuvent être nommés par d'autres associations telles que la Société des comptables en
administration industrielle, l'Association des comptables généraux licenciés du Canada,
le « Financial Executive Institute of Canada » et le «Financial Analysts Federation » .
Aux USA et au Canada, les bourses de valeurs et les commissions des valeurs mobilières
tentent de protéger les intérêts des lecteurs des Etats Financiers, en exerçant une
surveillance sur l’évolution des principes comptables.
l'enregistrement des marchés boursiers nationaux, ainsi que celui des courtiers et
agents transigeant des valeurs sur le marché hors bourse ou au comptoir.
Le S.E.C. édicte les procédures à utiliser pour l'établissement des rapports spéciaux qui
lui sont destinés. Ces recommandations publiées sous forme de manuels appelés
«Accounting Series Release», sont la plupart du temps conformes aux Opinions de
l'A.P.B. Cependant, le S.E.C. intervient parfois pour formuler des règles lorsque la
solution apportée par l'A.P.B. n’est pas jugée satisfaisante. En fait, le S.E.C. a un
certain pouvoir pour influencer le développement des pratiques comptables. Ce pouvoir
n'a pas été continuellement utilisé, le S.E.C. laissant à la profession comptable le soin
de réglementer les principes comptables. Cependant, lorsque la profession comptable
est trop lente à réagir, le S.E.C. risque d'intervenir et d'imposer des solutions rigides.
II convient de noter que tant au Canada qu'aux USA, les lois fiscales ont aussi exercé
une influence importante sur la formulation des pratiques comptables.
L'A.A.A. est avant tout une association d'académiciens comptables, quoiqu'elle inclue
parmi ses membres tout comptable. Elle fat fondée en 1935 pour :
Ainsi, en 1936, le Comité exécutif de l'A.A.A. publia un ouvrage sur les principes
comptables intitulé: « A Tentative Statement of Accounting Principles Underlying Cor-
porate Financial Statements». Différents autres travaux traitant du même sujet furent
publiés dans les années suivantes. Le plus important, publié en 1966 et intitulé «A
Statement of Basic Accounting Theory » souligna les nouvelles directions de la pensée
comptable en redéfinissant la comptabilité et en proposant une structure théorique de
cette discipline.
4. «Accounting Controls and the Soviet Economic Reform.r of 1966», par Bertrand
Horwitz.
11. « The Impact of Audit Frequency on the Quality of Internal Control », par R.M.
Barefield.
De même, l'A.A.A. publie les résultats des recherches des membres dons la revue
« Accounting Review ». En général, les approches de l'A.A.A. pour la formulation dune
théorie comptable sont essentiellement normatives et déductives.
a) «définir et publier, dons l'intérêt du public, les normes de base qui doivent être
respectées lors de la vérification des livres et la présentation des états
comptables ;
Le tableau suivant présente une liste des membres fondateurs et des membres associés
du CINC. (Remarquons que le F.A.S.B. ne peut siéger au Comité car cela pourrait créer
des conflits entre les normes édictées par chacun des deux organismes).
Membres fondateurs
- Wirtschaftsprüferkammer
Membres associés
Bangladesh - The Institute of Chartered Accountants of Bangladesh
Chacun de ces membres est tenu d'appliquer les normes du CINC. dans son pays. C'est
pourquoi, les normes de base définies par le CINC. devraient être conçues de façon à
être acceptées et respectées à l'échelle internationale. Cependant, les normes du
C.LN.C. peuvent être en conflit avec les normes propres à chaque pays. Dans un tel cas,
les normes publiées par le CINC. n'ont pas préséance sur les règlements locaux
s'appliquant à la publication des états financiers. Toutefois, le vérificateur est tenu
d'inclure dans son rapport une déclaration de non-conformité ou d'indiquer les
différences qu’il a notées. Ceci ne résout pas pour autant le problème de l'uniformité
des normes internationales.
Notons finalement qu’en 1966, l' « Accounting International Study Group» fut créé par
les trois instituts britanniques de comptables agréés et par l'ICCA et l'AICPA. Cette
nouvelle association a publié quinze études comparatives des pratiques utilisées dans
les pays d'expression anglaise.
Les experts-comptables sont chargés de fournir des services comptables à leurs clients.
Une des tâches principales est de vérifier les livres comptables d’une entreprise et
émettre un rapport dans lequel ils portent un jugement professionnel sur l'exactitude
et la fiabilité des états financiers. Les cabinets d'experts-comptables les plus influents
sont connus comme les «huit géants ». Par ordre alphabétique, ce sont :
3. Coopers et Lybrand
4. Ernst et Whitney
Les experts-comptables sont supposés être indépendants des intérêts de leurs clients.
En plus du travail de vérification, ils fournissent d'autres services tels que la
Différents groupes d'intérêt sont concernés par les résultats des entreprises à but
lucratif et des organismes à but non lucratif. Ils sont généralement identifiés soit
comme usagers directs, soit comme usagers indirects.
6) des clients.
3) des avocats,
5) de la presse financière,
7) des syndicats,
8) de la concurrence, et
9) du public en général.
1. des états financiers à but général pour satisfaire les besoins généraux des
usagers;
2. des états financiers à but spécifique pour satisfaire les besoins des usagers
spécifiques;
Cette période est marquée par l'influence et l'intervention des dirigeants d'entreprises
pour la formulation des principes comptables. Cela consiste en fait dans l'adoption de
solutions ad hoc à tout problème ou controverse comptable. Comme résultat, on a
constaté les conséquences suivantes :
d) Tout problème complexe était évité et toute solution pratique était adoptée.
Les théories d'intérêt public maintiennent que la réglementation est fournie en réponse
à la demande par le public d’une correction des pratiques du marché considérées
inefficaces ou inéquitables. Elles sont créées principalement pour la protection et
l’avantage du public en général.
Les théories des groupes d'intérêt maintiennent que la réglementation est fournie en
réponse à la demande des groupes spéciaux d'intérêt qui cherchent à maximaliser le
revenu de leurs membres. Ces théories sont généralement divisées entre :
Alors que la théorie politique repose sur le pouvoir politique pour réglementer le
contrôle, la théorie économique repose sur le pouvoir économique.
Laquelle de ces théories peut mieux expliquer le processus de formulation des normes
comptables ? Malheureusement, la théorie de ce que constitue un comportement
optimal en matière de réglementation comptable est à ses débuts. Cependant,
Benston 63 a essayé d'expliquer le comportement de S.E.C. en se référant à la notion de
prudence suggérée par la théorie économique de réglementation. De la même façon,
Hussein et Ketz64 ont examiné et rejeté la possibilité d'expliquer la réglementation
comptable par la théorie politique. Plus d'études empiriques seront nécessaires avant
de développer une théorie de réglementation des normes comptables. II peut s'avérer
utile de considérer en premier les avantages et limitations des différentes formes de
formulation des normes comptables. Dans ce qui suit, chacune des approches à la
formulation de normes comptables est considérée.
63
BENSTON, G., «Accounting Standards in the U.S. and the U.K.: Their Nature, Causes and Consequences », Vanderbilt aw Review
(janvier 1975), p. 255.
64
HUSSEIN, M.E. et J.E. KETZ, « Ruling Elites of the F.A.S.B.: A Study of the Big Eight », Journal of Accounting, Auditing, and
Finance (été 1980), pp. 354-367.
rang que les autres produits ou services. Ainsi, l'information comptable sera sujette aux
forces des demandes par les usagers et des offres pour les producteurs d'information. Il
en résulte un montant optimal d'information produit à un prix optimal. Chaque fois
qu’une information est requise à un bon
1. L'échec explicite du marché est créé quand soit la quantité, soit la qualité d'un
produit dans un marché non réglementé laisse à désirer en matière d'optimum
social. Cette situation peut arriver aussi à l'information comme produit du
marché.
2. L'échec implicite du marché résulte des défaillances suivantes dans les marchés
privés d'information comptable :
e) la fixité fonctionnelle, et
f) le manque d'objectivité
La réglementation des normes comptables par le secteur privé repose sur l'hypothèse
principale que l'intérêt public en comptabilité est mieux servi par le secteur privé.
Ceux qui favorisent la réglementation des normes comptables par le secteur privé
mentionnent les arguments suivants pour soutenir leur position:
1. Le F.A.S.B. comme l’ICCA. semblent concernés par les intérêts de tous leurs
électeurs.
Ceux qui s'opposent à la réglementation par le secteur privé utilisent les arguments
suivants :
1. Le secteur privé n'a pas le pouvoir et l'autorité du secteur public pour rendre
effective la réglementation comptable.
3. Le F.A.S.B. comme l'ICCA. sont souvent accusés de réagir trop lentement aux
controverses importantes. Ceci est aggravé par le temps que les deux
organisations prennent dans leurs délibérations.
2. Elle existe pour éliminer ou prévenir tout dommage social, réel, ou probable.
4. Elle ne devrait pas être utilisée si les mêmes buts pouvaient être atteints par des
organisations dans le secteur privé.
6. Elle ne devrait pas être utilisée juste pour corriger un comportement social
occasionnel.
Ceux qui favorisent la réglementation des normes comptables par le secteur public
mentionnent les arguments suivants pour soutenir leur position.
2. La réglementation des normes comptables par le secteur public est motivée par
le besoin de protéger l’intérêt public.
3. La réglementation des normes comptables par le secteur public est aussi motivée
par le désir de créer un niveau de divulgation estimé nécessaire et adéquat à la
prise de décision.
5. Il est généralement dit que le secteur privé doit être surveillé et contrôlé étant
donné le fait que ses objectifs peuvent être en conflit avec l'intérêt public.
1.5. CONCLUSION
Par
Ahmed Belkaoui
Les Gestionnaires ont besoin d'information concernant les effets de leurs décisions sur
le profit comptable et les mouvements de trésorerie. Les actionnaires soucieux de
maximaliser la rentabilité de leurs investissements utilisent l'information pour évaluer
l'efficacité des méthodes de gestion de l'entreprise. Enfin, les investisseurs et les
créditeurs cherchent dans l'information divulguée, un indicateur de la capacité qu'a la
firme de payer ses dettes et ses dividendes. La comptabilité financière fournit la
plupart de ces informations. Elle a un but pratique très précis : informer de façon
pertinence les divers lecteurs. Pour accomplir cette tâche, le comptable dispose d'un
ensemble de techniques de collection, de classification, d'enregistrement et de
communication. Certaines de ces techniques ont une portée assez vaste, une
acceptation dite générale. Connues sous le nom de «principes comptables
généralement reconnus », (PCGR), elles guident depuis longtemps la profession
comptable dans le choix des techniques et la préparation des états financiers. Ces
PCGR se sont traditionnellement développés au rythme des crises qu'a connues la
profession comptable, et dans le but d'apporter des solutions satisfaisantes à des
problèmes précis. Cette approche a freiné le développement d’une base logique, d’une
théorie comptable. à cause de l'accent mis sur la recherche de solutions à court terme
plutôt que sur l'intégration de ces solutions à l'ensemble de la théorie.. Cependant,
cette approche a été utilisée par la profession comptable dans la formulation d'une
théorie comptable.Elle résulte, la plupart du temps, de. l'application de diverses
méthodes d'analyse, appelées approches traditionnelles de formulation d'une théorie
comptable.
a) l'approche déductive;
b) l'approche inductive;
c) l'approche morale;
d) l'approche psychologique;
e) l'approche sociologique;
f) l'approche macro-économique;
65
The Accounting Principles Board, Statement n'. 4 - Basic Concepts and Accounting Principles Underlyng Financial Statement of
Business Enterprises (New York: American Institute of Certifies Public Accountants, Int , 1971, paragraphe 138.
Ces techniques servent de base à la plupart des fonctions entamées par les comptables;
entre autres:
serait utile d'étudier certaines de ces images qui ont façonné les
développements en comptabilité financière. Parmi ces images, on peut
distinguer la comptabilité comme :
une idéologie,
un langage,
un enregistrement historique,
et un produit.
La comptabilité peut être perçue comme le langage des affaires. C'est l'un des moyens
de communiquer toute information sur une entreprise. La perception de la comptabilité
comme langage est bien acceptée dans les milieux académiques. Par exemple, Ijiri
maintient que:
Qu’est-ce qui fait que la comptabilité peut être perçue comme un langage?
66 WEBER, M.., Economy and Society. Vol. 1, Bechminscer Press, 1909;. p. 85.
67 I)uu, Y., Theory of Accownting Meatxrement. Studies in Accounting Research No. 10, (American Accounting Association, 1975) p. 14.
68
Belkaoui Ahmed, « Linguistic Relativism in Accounting», Accounting, Organizations and Society, 1978, p. 97-104
Tout langage a deux dimensions qui sont les symboles et les règles de grammaire. La
reconnaissance de la comptabilité comme un langage repose donc sur l'identification de
ces deux dimensions comme les deux niveaux de la comptabilité. Ceci peut être
expliqué de la façon suivante:
a) Les symboles ou caractéristiques lexiques d'un langage sont les unités ou mots
identifiables dans tout langage. Ces représentations symboliques existent
aussi en comptabilité. Par exemple, Macdonald a identifié les chiffres et les
mots, les débits et les crédits comme des symboles généralement acceptés et
tout à fait uniques à la discipline comptable.
b) Les règles de grammaire d'un langage ont trait à la syntaxe existant dans tout
langage. De telles règles existent en comptabilité. Elles ont trait à l'ensemble
des procédures utilisées dans la création de données financières de
l'entreprise. Par exemple, Jain établit le parallèle suivant entre les règles de
grammaire et les règles de comptabilité. Le vérificateur certifie l'exactitude
de l'application des règles de comptabilité de la même façon qu'on vérifie la
bonne grammaire d’une phrase. Les règles de comptabilité organisent la
structure de la comptabilité de la même façon que la grammaire structure un
langage naturel. 69
69
MCDONALD, D., Comparative Accoionttng Theory (Addison-Wesley Publishing Co., 1972).
Dans les deux premières périodes, l’agent devait retourner intactes les ressources au
propriétaire, après avoir accompli des tâches vraiment minimales pour s’acquitter de sa
tâche de sauvegarde. Ces deux périodes considèrent la publication et la divulgation des
données du bilan comme étant suffisamment adéquates.
plus représentative de la réalité économique repose sur les prix actuels ou futurs plutôt
que sur les coûts d’origine. L’objectif principal de cette image de la comptabilité est la
détermination du « vrai profit » (ou profit idéal »), un concept qui reflète le
changement de richesse de la firme pour une période donnée. Quelle est la base
d'évaluation des actifs qui pourrait engendrer ce profit idéal, est généralement le sujet
d'études théoriques et empiriques qui font d'ailleurs l'objet des chapitres 8-10.
- premièrement, cela implique que le système comptable est le seul système formel
de mesure dans l'entreprise.
70 BELKAOUI, Ahmed, « Linguistic Relativity and Accounting., Accounting Organization and Society, octobre 1978, pp. 97-104.
La comptabilité peut aussi être perçue comme un produit résultant d'une activité
économique. Ce produit existe du fait de l'existence d'une demande pour des
informations données et de la bonne volonté et capacité des comptables à les produire.
En tant que produit, l'utilité de la comptabilité peut être évaluée sur une base de coût-
avantage. Elle devient aussi un candidat idéal à la réglementation et à la supervision de
tout type de contrats entre la firme et son environnement. Le choix d une information
comptable et/ou d'une technique comptable peut donc avoir un impact sur le bien-être
des différents groupes sociaux. Il s'en suit d'un marché d'information comptable
résultant des forces d'offre et de demande de la dite information.
La comptabilité repose sur des bases de béhaviorisme. Son objectif principal est
d'orienter le comportement des individus dans des directions favorables à une gestion
optimale de l'organisation. Pour réaliser ses objectifs, la comptabilité doit s'adapter aux
différentes dimensions qui composent la personnalité des individus dans l'organisation
et qui influencent aussi leur rendement. Une des dimensions concerne le choix de la
fonction objective en comptabilité. Ce choix affecte le comportement de l'organisation,
la conduite de la comptabilité et la construction d'un système d'information. Un choix
optimal conduit nécessairement à une bonne performance. Les alternatives présentées
dans la littérature et dans la pratique comptable se résument à trois fonctions
objectives :
Bien qu'un grand effort ait été fait pour développer l'ensemble des principes
comptables généralement reconnus, peu d'auteurs ont essayé de prouver que la
comptabilité est une théorie. Quelques exceptions méritent cependant notre attention.
Hendriksen 71 propose une définition de la notion de théorie qui peut être appliquée à la
comptabilité. Une théorie représenterait un ensemble cohérent de principes
hypothétiques, conceptuels et pragmatiques, formant un cadre de référence pour un
champ d'intérêt. Ainsi, la théorie comptable pourrait être définie comme étant un
raisonnement logique, exprimé par un ensemble de principes généraux, et qui :
1. Une théorie comptable ne peut à elle seule expliquer toutes les pratiques
comptables à ce stade embryonnaire de la comptabilité. Ce dont on a besoin, c'est
d'un ensemble de théories comptables complémentaires ou concurrentes, qui nous
amèneraient à une vision exhaustive de la discipline comptable. Chacune de ces
théories serait composée de propositions basées sur la logique, et chacune des
propositions serait elle-même composée de différentes hypothèses. Le choix d'une
théorie à l'intérieur de cet ensemble reposerait sur un test d'explication et de
prédiction d'événements économiques.
71
HENDRIKSEN, Eldon, Accounting Theory, 3ème édition, R.D. Irwin Inc. 1977, p. 1
2. Une théorie comptable a une base logique, alors que la plupart des techniques
comptables ne sont pas conçues d'une façon logique. En d'autres termes, certains
faits comptables peuvent être expliqués par une théorie comptable, tandis que
d'autres dépendent de facteurs non comptables. Le choix d'une théorie comptable
optimale reposerait donc sur le pouvoir d'explication et de prédiction de tous les
faits affectant l'entreprise.
nouveau, on peut affirmer que la comptabilité comporte de telles règles; par exemple,
les techniques de tenue des livres, de détermination du profit comptable, etc.. ou
encore, le profit comptable qui est exprimé par une relation de postes de revenus et de
dépenses correspondant spécifiquement à la différence entre les revenus réalisés de la
période et les dépenses correspondantes. --
La comptabilité est d'abord une profession. Les comptables offrent différents services
aux entités économiques qui composent le marché. Cependant, le côté conceptuel et
académique de la comptabilité peut nous amener à la percevoir comme une science
sociale. Certains soupçonneront peut-être l’auteur de ce livre d’essayer de donner à la
comptabilité un statut qu'elle n'a pas encore atteint, de l'honorer du titre de science»
ou de la classifier avec les autres sciences sociales reconnues pour qu'elle puisse jouir
du même statut. En fait, la comptabilité a déjà atteint ce statut, car les services
qu'elle rend demandent une grande compétence, le niveau et le résultat de la
recherche dans son domaine sont élevés, et des règles morales existent et sont
respectées dans la profession.
Cependant, est-ce que la comptabilité peut être considérée comme une science
sociale? La réponse à cette question repose sur la détermination du degré de
correspondance entre les critères qui définissent une science comme étant « sociale »
et les caractéristiques de la comptabilité.73
Les critères de définition d'une science sociale diffèrent dans la littérature. Seligman et
Alvin, par exemple, l'ont définie en ces termes
73
MAUTZ, R.K., « Accouiuing as a Social Science », Accounting Review, Avril 1963, pp. 317-325
« Les sciences sociales peuvent être définies comme étant les sciences
culturelles qui ont trait aux activités de l'individu comme membre d'un groupe». 74
Cependant, avant que la comptabilité puisse vraiment être qualifiée de science sociale,
d'importants changements devront survenir clans la discipline comptable. Le point de
vue suivant en témoigne :
« Nous avons besoin d'enseignants qui soient plutôt des sociologues que des
praticiens. I1 faut aussi améliorer notre système d'éducation. Il faudrait une
approche qui reconnaîtrait la comptabilité comme une méthode d'analyse plutôt
que de la considérer comme un art, une façon de faire ou une série de
procédures et techniques ». 76
74
SELIGMAN, Edwin, R.A. et Hamson, Alini, Encyclopedia of the Social Sciences, New York, Macmillan Co., 1930, Vol. 1, p.3
75
HERRING, Pendleton, « Toward an Understanding of Man », in New Viewpoint in the Social Sciences, Twenty Eight Yearbooks of the
National Council for the Social Studies, Ray A. Price. Editor, National Council of the Social Studies, 1958.
Nous avons montré, dans la section précédente, que la comptabilité peut être
considérée comme une théorie parce que :
Cette approche a cependant été beaucoup critiquée par les tenants d’une
méthodologie normative, pour qui la théorie comptable cherche à déterminer ce qui
77
American Institute of Certified Public Accountants, Committee on Terminology Accountting, Bulletin No. I., Review and Résumé.
New York, A.LC.P.A., 1959. p. 9
Par
Richard Leftwich78
Résumé
78 Richard Leftwich est titulaire de la chaire de comptabilité et de finance Fuji Bank and Heller de la Graduate School of Business de l’Université de Chicago. Ses
recherches portent sur l’audit, la notation des émissions obligataires, les changements de statuts et les achats en blocs.
La Securities and Exchange Commission (SEC)américaine joue un rôle clef dans les
efforts faits pour développer un référentiel comptable international qui puisse être
accepté partout. Sans son accord, les sociétés cherchant à se financer aux Etats-Unis ne
peuvent pas présenter des états financiers selon les normes internationales pour
satisfaire aux exigences en matière d’information financière.
Des différences existent aussi entre les pays dans les systèmes de reporting interne
(informations destinées aux dirigeants d’une société), mais elles sont moins discutées
pour deux raisons.
- D’autre part, dans le choix d’un système comptable interne, l’influence des instances
réglementaires est moindre. En effet, les entreprises peuvent tester plus facilement un
nouveau système comptable ; elles peuvent également adopter des pratiques et des
normes qu’elles jugent plus performantes, sans avoir à convaincre les autorités de la
pertinence de leur choix.
Parfois tout à fait anodines, ces divergences peuvent porter sur la forme ou sur le fond.
Deux pays ayant la même langue (l’anglais, par exemple) peuvent adopter des
terminologies différentes : sales (Etats-Unis) et turnover (Royaume-Uni) pour chiffre
d’affaires ou retained earnings (Etats-Unis) et undistributed profits (Royaume-Uni) pour
report à nouveau.
Même lorsque les pays utilisent des normes similaires, la présentation des comptes
varie. Aux Etats-Unis, par exemple, l’actif est présenté à gauche du bilan et les
différents postes sont classés par liquidité décroissante, actif circulant en tête. Au
Royaume-Uni, l’actif peut être présenté à droite du bilan, et les postes sont classés
dans l’ordre inverse, en commençant par les immobilisations.
Dans certains pays (Allemagne, Belgique, France et Italie), les actionnaires ne reçoivent
généralement que deux tableaux de synthèse (le compte de résultat et le bilan). Dans
d’autres pays, un troisième état (tableau de financement) est également présenté,
mais il décrit les ressources et les emplois du fonds de roulement, et non les ressources
et les emplois de la trésorerie.
valeur des instruments financiers), reflétant les disparités entre les principes généraux
qui sous-tendent les référentiels de chaque pays.
De plus, l’absence de notes dans l’annexe sur les mouvements de provisions empêche
les analystes financiers d’évaluer dans quelle mesure le résultat est affecté par ces
transferts ou de déterminer la part du résultat imputable à l’activité économique et
celle imputable aux services comptables.
Le tableau 2 utilise le prospectus établi par Daimler-Benz pour la SEC pour souligner
l’impact considérable des mouvements de provisions. Les débats sur les mérites relatifs
des normes comptables de divers pays, et notamment depuis que ces débats ont été
portés au niveau politique, exagèrent souvent les divergences des différentes
philosophies.
l’influence des gouvernements sur les marchés financiers et autres marchés, ainsi que
les traditions et les cultures. Des méthodes comptables économiquement sensées dans
un pays peuvent se révéler peu appropriées dans un autre.
Les grandes banques sont ainsi les principaux actionnaires des grands groupes allemands
; elles sont représentées au conseil d’administration et ont accès au reporting interne.
Les dirigeants allemands sont sanctionnés ou récompensés essentiellement par les
représentants de ces actionnaires, et non en fonction des performances boursières de
l’entreprise. L’impact des choix comptables fait donc l’objet d’une analyse moins
détaillée dans les états financiers en Allemagne que dans un environnement où les
actionnaires sont moins bien représentés au conseil d’administration.
La situation est d’autant plus complexe que le choix des normes comptables est
réglementé dans chaque pays. Les normes comptables et les procédures de
gouvernement d’entreprise d’un pays sont le fruit de processus économiques et
politiques, et pas simplement le résultat du jeu du marché. De plus, aucun argument
économique précis n’a pu être apporté pour justifier la réglementation des normes
comptables.
facteurs tels que le système judiciaire et la législation sur les droits de propriété,
même si, en fin de compte, ces facteurs eux-mêmes font intrinsèquement partie de
chaque culture.
Pendant les dix premières années de son existence, l’IASC a essentiellement oeuvré
dans l’ombre, et le processus d’élaboration de normes comptables internationales était
davantage considéré comme un pur exercice intellectuel que comme un moyen de
faciliter la comparaison des états financiers des entre-prises de pays différents.
Rares ont été les grands marchés financiers mondiaux à reconnaître formellement les
normes comptables internationales et l’IASC n’avait aucun moyen de contraindre les
sociétés à adopter ses normes. Dans un premier temps, l’IASC s’est essentiellement
attaché à concevoir des normes internationales qui soient cohérentes avec des
référentiels nationaux très disparates. Par conséquent, ces normes internationales
autorisaient différents traitements comptables et les normes nationales de la majorité
des pays constituaient en quelque sorte des sous-ensembles des normes internationales.
Les grandes Bourses cherchent à optimiser leurs bénéfices et leur croissance comme
leur rentabilité sont tributaires des nouvelles cotations. Elles sont également
conscientes que les entreprises considèrent les contraintes d’information financière
comme un droit d’entrée implicite très élevé, notamment aux Etats-Unis.
Dans d’autres domaines, l’IASC a remporté quelques succès. Plusieurs pays (la Malaisie
ou le Pakistan, par exemple) ont adopté les IAS existantes, qui constituent donc leur
référentiel national, et de nombreux Etats (notamment en Europe de l’Est) venant de
se doter d’une place boursière mais dépourvus de système comptable national
semblent prêts à leur emboîter le pas.
4. Américanocentrisme
D’autres pays ont adopté certaines normes internationales venant se substituer à leurs
normes nationales ou les compléter. Certaines places boursières, au premier chef celle
de Londres, ont admis des sociétés dont la comptabilité est conforme aux normes IAS et
plus de 200 grands groupes (la plupart domiciliés au Canada, en France et en Suisse)
ont produit un deuxième jeu de comptes établi selon ces normes.
des effets tangibles. De plus, les pays européens ayant adopté le principe de
reconnaissance mutuelle des normes, le processus d’intégration a marqué le pas.
Malgré la création d’un groupe de travail ad hoc en 1990, l’harmonisation comptable
n’est plus une priorité, aucune proposition ni déclaration en ce sens n’ayant été faite
depuis.
A moins que les normes IAS ne soient acceptées par la SEC, les sociétés qui s’y
conforment ne remplissent pas les conditions pour être admises sur les places
boursières américaines. Pour être coté outre-Atlantique, un groupe allemand comme
Daimler-Benz doit satisfaire aux règles et spécifications (conditions d’admission à la
cote) de la Bourse où ses actions seront échangées et se conformer à l’arsenal des
règles d’information comptable imposé par la SEC, légèrement amendées à titre de
concession pour les émetteurs étrangers.
La SEC exige notamment que les sociétés étrangères présentent soit des comptes
conformes aux US GAAP 79, soit un tableau de rapprochement avec les US GAAP des
comptes préparés selon le plan comptable de leur pays d’origine (l’Allemagne dans le
cas de Daimler-Benz). Peu de sociétés optent pour la première méthode, néanmoins,
même la méthode du rapprochement comptable coûte cher.
Selon une étude de la SEC, les tableaux de rapprochement comptable (Formulaire 20f)
publiés par des sociétés étrangères font apparaître de profondes différences, même
lorsque le référentiel appliqué est considéré comme similaire aux normes américaines
(comme pour les sociétés britanniques et canadiennes).
De plus, les divergences vont souvent dans le même sens - s’il existe une différence, il
y a 70 % de chances que le résultat net publié en fonction des US GAAP soit inférieur à
celui publié selon le référentiel national.
A l’inverse, pour faire admettre sa société sur la plupart des places boursières
(Londres, Hong-Kong ou Tokyo par exemple), il suffit de mettre à la disposition des
investisseurs des comptes conformes aux règles comptables prévalant dans le pays
d’origine après traduction dans la langue officielle du marché sur lequel la société doit
être introduite.
Si le marché boursier américain demeure l’un des plus importants marchés mondiaux,
les normes IAS non conformes aux règles américaines deviendront caduques. Mais si la
SEC persiste dans son attitude exclusive, la domination des Bourses américaines
pourrait bien être compromise.
C’est bien ce qui préoccupe les acteurs de ces marchés soucieux de leur rentabilité, et
notamment ceux du New York Stock Exchange (NYSE). Les membres du Nyse ont vu se
profiler la concurrence d’autres places boursières attirant à elles des sociétés
étrangères souhaitant ouvrir leur capital, voire des sociétés déjà cotées. Les grands
groupes américains non cotés à New York ne sont pas légion, mais il existe dans le
monde des centaines de sociétés très importantes dont l’éventuelle cotation au Nyse
n’est pas à négliger.
Attirer ces sociétés accroîtrait les bénéfices des organisations membres, rehausserait la
visibilité et le prestige de la place new-yorkaise et augmenterait, ou du moins
préserverait, les rémunérations des membres de sa direction. A l’évidence, si le Nyse
était libre de choisir, il accueillerait les sociétés étrangères en les autorisant à
présenter une comptabilité ne se référant pas nécessairement aux US GAAP.
Le défi que l’IASC doit relever est considérable. Nombre de sujets à aborder dans le
cadre du noyau dur comportent des points épineux comme la comptabilisation des
Aucun critère objectif ne permet de désigner le meilleur traitement comptable pour tel
ou tel élément. De façon plus générale, il n’existe aucun consensus sur certaines
grandes questions de comptabilité fondamentales entre les membres de l’IASC.Pour
parvenir à un accord sur un projet de norme, la méthode la plus simple consiste à
adopter une formulation assez souple pour être compatible avec les règles nationales.
Comme prévu, le processus de normalisation progresse sans heurt dès lors qu’il y a peu
de conflit entre les référentiels nationaux et lorsque la norme internationale édictée
est compatible avec le plus grand nombre de normes nationales.
L’IASC a plus que des problèmes épineux à régler. Politiquement, le comité est placé
entre le marteau et l’enclume et semble enclin à élaborer des normes susceptibles
d’être adoptées par les sociétés étrangères en remplacement du référentiel national.
Implicitement, cela reviendrait à créer un système d’information financière à deux
niveaux si les émetteurs nationaux continuent à utiliser le référentiel national ; un tel
système créerait inévitablement des tensions considérables dans les pays comme les
Etats-Unis où les normes nationales sont jugées au moins aussi coûteuses.
En s’opposant à une solution à deux vitesses, la SEC court le risque de révéler que le roi
est nu. Elle déclare redouter un nivellement par le bas si les sociétés étrangères étaient
autorisées à adopter des normes comptables jugées moins onéreuses et moins strictes
que les normes américaines. Si la SEC refuse d’assouplir les règles nationales, il serait à
craindre en effet que les groupes américains ne se délocalisent à l’étranger pour y
fonder une nouvelle structure juridique et revenir lever des fonds sur les marchés
financiers américains en s’appuyant sur les normes IAS.
Avec ce raisonnement, la SEC feint d’ignorer que si les normes américaines sont
effectivement meilleures (même en prenant en compte leurs coûts supérieurs), les
sociétés adoptant les normes internationales supposées moins strictes devraient voir
leur valeur boursière chuter du fait du coût plus élevé des capitaux.
Qui connaît les péripéties de la monnaie unique en Europe peut avoir une idée de la
complexité du chantier que représenterait la création d’un véritable espace comptable
international. l
Objectif premier Informer les actionnaires (ex. Protéger les créanciers, éviter
de l’information Etats-Unis et Royaume-Uni) de communiquer des
financière informations susceptibles de
pénaliser l’entreprise par
rapport à ses concurrents (ex.
Allemagne et Japon)
Orientations Instructions d’application très Grandes lignes uniquement,
données par les précises, couvrant toutes les laissant aux dirigeants une
normes transactions (ex. Etats-Unis) grande marge de manœuvre
pour de nombreuses transactions
(ex. Allemagne et Japon)
Sujets traités dans Des normes très pointues Pas de normes précises pour
les normes traitent largement les activités certaines activités essentielles
principales et annexes des (ex. systèmes de prévoyance
entreprises, par exemple le coût pour les retraités en Allemagne,
de modification des logiciels au Canada et aux Pays-Bas)
pour le passage à l’an 2000
(Etats-Unis)
Liens avec la L’information financière et la C’est le résultat publié qui sert
législation sur déclaration fiscale obéissent à essentiellement de base
l’impôt sur les des règles si différentes qu’il d’imposition (ex. Allemagne,
bénéfices existe deux jeux de compte (ex. France et Royaume-Uni)
Australie, Canada, Etats-Unis et
Pays-Bas)
Par
Dominique Thouvenin80
Résumé
Pour faire face aux disparités existant entre les normes et les pratiques comptables
nationales, l’IASC a été créé, en 1973, pour contribuer à l’amélioration et
l’harmonisation des états financiers essentiellement en publiant des normes
comptables internationales. Successivement harmonisateur puis innovateur, l’IASC
affiche un bilan largement positif quant à la réalisation de ses travaux et leur
utilisation dans le monde entier. Néanmoins, l’IASC se trouve aujourd’hui à la croisée
des chemins compte tenu de ses moyens limités par rapport à la diversité des objectifs
fixés : recherche sur des thèmes nouveaux, développement d’un package de normes
pour les opérations trans-frontières, développement d’un référentiel pour les petites
entreprises... L’IAS a accompli un travail considérable et a obtenu de grands résultats,
mais il ne faudrait pas que l’accélération trop rapide du processus et les évolutions
récentes puissent remettre en cause les chances de succès final, en particulier auprès
des vrais utilisateurs potentiels de l’IASC, les entreprises d’Europe continentale et
d’Extrême-Orient.
80 Dominique Thouvenin est Associé à la firme comptable Ernst & Young Audit et Responsable de la doctrine comptable. Il est également
membre du Conseil National Français de la Comptabilité
Chargé d’élaborer un véritable langage comptable mondial au plus tard pour 1999,
l’IASC doit conjuguer aujourd’hui des objectifs divers et des moyens limités.
- Certains autres pays enfin envisagent de se servir de l’IASC comme référentiel pour
leurs sociétés nationales ayant des activités internationales (France, Allemagne) et
ce en dérogation de leur propre référentiel.
- susceptible d’être adopté comme référentiel national par les pays en voie de
développement ou par d’autres pays qui connaissent de profondes mutations
économiques et ne disposent pas d’un référentiel reconnu ;
- destiné aux entreprises en général (et pas seulement aux grandes multinationales
cotées qui souhaitent utiliser un référentiel connu internationalement pour la
préparation de leurs états financiers ;
- qui doit servir à toutes les entreprises souhaitant obtenir une cotation de leurs titres
ou faire appel public à l’épargne à l’étranger (accord Iosco).
Dans le même temps, l’IASC se trouve impliqué dans un travail collectif d’innovation
pour développer, conjointement avec les normalisateurs comptables les plus avancés,
des normes novatrices sur des sujets non encore résolus.
Tous ces travaux sont menés avec l’hypothèse implicite qu’ils concernent un référentiel
international unique et, en fait, tout se passe comme s’il y avait un seul référentiel en
cours de développement pour ces différents objectifs. Cette approche est à la base
d’une partie des difficultés actuelles de l’IASC et, à terme, peut l’amener à un échec si
des actions correctrices ne sont pas décidées rapidement.
Pour chacun des objectifs précités, on constate en effet des insuffisances ou certaines
évolutions qui peuvent remettre en cause l’objectif visé.
Ce travail de coordination des recherches des grands normalisateurs nationaux sur des
problèmes qui n’ont pas encore trouvé de solution satisfaisante est un des éléments
essentiels du rôle de l’IASC dans le développement des normes futures ; il ne doit
cependant pas nécessairement aboutir à l’introduction systématique de ces réflexions à
plus long terme dans des normes d’application quasi immédiate. En effet :
- la « reculade » que l’IASC a dû effectuer sur son discussion paper sur les instruments
financiers en est une autre illustration : les marchés financiers, clé de voûte du
nouveau modèle comptable que veut introduire l’IASC, n’ont pas le même degré de
développement partout dans le monde, et la mise en oeuvre rapide de la norme
telle qu’elle était prévue aurait été impossible dans de nombreux pays faute de
marchés organisés et liquides ;
- les concepts qui sont utilisés dans l’étude de ces normes nouvelles, comme la mise
systématique à la valeur de marché des actifs et des passifs, ne font pas partie
intégrante du cadre conceptuel (qui prévoit le maintien de divers modèles) et n’ont
pas fait l’objet d’une discussion ouverte, en particulier en ce qui concerne leur
impact sur la mesure de la performance. Toute finalisation de norme sans accord
formel sur ces concepts de base serait, à terme, vouée à l’échec.
Ces travaux de recherche doivent être poursuivis mais dans le cadre d’une
réflexion plus ouverte et plus complète sur le cadre conceptuel et en prévoyant
des degrés dans leur mise en oeuvre selon le type d’entreprise et les régions du
monde concernées.
La pression énorme que s’est imposée l’IASC avec l’objectif d’aboutir à un package
complet en 1998 affecte le processus d’élaboration des normes et risque de nuire à leur
qualité : nombreuses normes à réaliser dans des délais très courts, groupes de travail
menant en parallèle des projets séparés sans pouvoir se coordonner. Un décalage d’une
année serait beaucoup moins dommageable que des normes de moindre qualité ou
n’ayant pas fait l’objet d’un consensus.
Le package minimum n’est pas encore complet et les normes qui restent en discussion
sont parmi les plus délicates (provisions, immobilisations incorporelles, dépréciation
des actifs, instruments financiers...).
De plus, le package prévu, même s’il peut être acceptable par l’Iosco, ne pourra être
considéré comme un référentiel complet tant qu’il ne traitera pas des spécificités
sectorielles (banques et assurances bien sûr, mais aussi entreprises pétrolières et
minières...). Enfin, les entreprises ont besoin d’être rassurées sur la position de la SEC
pour les cotations aux Etats-Unis. Or celle-ci laisse planer des doutes sur sa décision ;
en particulier, elle a fait savoir à plusieurs reprises que les normes de l’IASC actuelles
manquaient d’interprétations, ce qui a conduit à la création du comité SIC, responsable
de la préparation de telles interprétations. Le risque est qu’en l’absence
d’interprétations officielles, la SEC prenne des positions différentes de celles retenues
par les entreprises.
Enfin sur des aspects très importants (pooling of interests, dépréciation des actifs...),
l’IASC a ou va retenir des normes beaucoup plus strictes que les normes du FASB
risquant de mettre ainsi les entreprises qui ont opté pour l’IASC dans une situation
concurrentielle défavorable par rapport à celles qui appliquent les US GAAP. Ce point
est primordial car il peut pousser des entreprises qui envisageaient d’adopter l’IAS à ne
pas le faire : ainsi l’IAS ne prévoit pas, comme la norme SFAS 121, un premier calcul
non actualisé des cash-flows futurs pour déterminer si une provision pour dépréciation
est requise mais impose directement un calcul actualisé, ce qui peut entraîner des
différences très significatives au niveau du résultat.
De plus, les normes de l’IASC, qui visent à satisfaire les besoins des marchés financiers
internationaux, imposeraient des contraintes beaucoup trop lourdes, en termes de
retraitements comptables ou d’informations à donner, aux entreprises des pays en voie
de développement qui envisageraient de l’adopter comme référentiel national.
Un comité stratégique
Introduction
Jusqu’à une époque récente les procédures comptables se sont développées dans une
optique patrimoniale. Ainsi, pour l'entreprise la comptabilité assure trois fonctions :
évaluer les résultats et le patrimoine :
contrôler l'activité‚ de l'entreprise
soutenir la gestion
Mais la comptabilité est aussi une source d'informations qui intéresse également les
actionnaires qui suivent l'évolution de la firme.
Or, les investisseurs ont beaucoup de mal à identifier, mesurer et analyser les données
sociales. Les entreprises rencontrent également des difficultés à communiquer une
information pertinente dans le domaine des ressources humaines car il leur faut
transformer des données qualitatives en données quantitatives.
Pour surmonter cette difficulté, de nombreux auteurs ont imaginé intégrer les
ressources humaines dans les actifs de l'entreprise. C'est ainsi que dans les années 60 -
70, Gary BECKER a développé la théorie de capital humain. L'être humain est considéré
comme un actif ayant une valeur monétaire caractérisée par l'ensemble de ses
aptitudes, ses connaissances et son savoir-faire. Comme tout capital, il doit faire l'objet
d'un investissement et de dépenses d'entretien qui procurent des avantages aux
entreprises qui l'emploient.
L'émergence de la comptabilité des ressources humaines renvoie au problème de la
difficulté d'obtenir l'information financière et à celui des limites des états comptables
en matière de prise de décisions. De façon plus générale, elle pose le problème de
l'évaluation économique et financière des ressources humaines dont l'entreprise utilise
le savoir faire et les connaissances pour créer de la valeur.
L'art 911-1, al 1 du P.C.G 1999 définit l'actif comme "tout élément du patrimoine ayant
une valeur‚ économique positive pour l'entité". Ainsi, les actifs sont des valeurs
positives indifférentes au découpage du temps en période, conservés dans le
patrimoine, convertibles, récupérables dans l'attente d'une affectation ultérieure sous
forme de produits et de charges.
Cette définition a par la suite été modifiée. Une conception patrimoniale et juridique
du bilan s'est imposée. Ainsi, les actifs sont considérés tels que les biens durables, les
créances, les liquidités. Ils sont objet de propriété ou de créance et ils ont une valeur
vénale : les actifs sont garants de la solvabilité‚ de l'entreprise car susceptibles de
procurer un revenu par l'utilisation ou par la location.
A côté‚ de ces actifs qui ont une valeur vénale, ont été rajoutés des actifs fictifs
entraînant une nouvelle conception économique du bilan : un actif est devenu un
instrument de production durable qui procurera des recettes dans l'avenir par sa
contribution à la production. Il n'a pas forcément une valeur vénale et n'est pas
nécessairement objet de propriété.
Cette dernière définition de l'actif a permis de prendre en compte le capital
immatériel dont fait partie le capital humain. Ce dernier est défini par Gary BECKER,
auteur de la théorie du capital humain, comme l'ensemble des capacités productives
qu'un individu acquiert par accumulation de connaissances générales ou spécifiques, de
savoir-faire etc …
Malgré cette définition, le concept de capital humain demeure un concept pauvre
difficilement interprétable car la notion de capital humain exprime l'idée que c'est un
stock immatériel imputé à une personne pouvant être accumulé et s'user. Cette
constatation est appuyée par le fait que le capital immatériel est défini comme étant
"la détention d'un savoir d'une expérience concrète, d'une technologie d'organisation,
de relations avec les clients et de compétences professionnelles qui confèrent un
avantage compétitif sur le marché".
Cependant, la notion de capital immatériel n'inclut pas seulement la capacité cérébrale
humaine, mais aussi les marques déposées et les actifs comptabilisés à leur coût
d'acquisition et qui sont valorisés avec le temps.
Il faut remonter aux années 60 pour trouver les premières tentatives développées
pour intégrer les ressources humaines dans le bilan comptable. Dans les années 1970,
le programme de recherche sur le Capital humain par T. Schultz et G. Becker a
donné lieu à divers projets sur la comptabilité des ressources humaines ; plus
précisément la reconnaissance de l’investissement humain comme un actif.
On part d’un constat : l’information financière, les états comptables sur lesquels
s’appuient les managers, les investisseurs, traduisent mal la valorisation du capital
humain.
- A - Charge ou immobilisation ?
Coûts d’investissement ?
Auquel cas il doit être fait état d’une immobilisation incorporelle portée à l’actif du
bilan et sujette à amortissement.
Face à l’absence de définition précise de l’ancien PCG et du nouveau (1999), référons
nous à la norme IAS 38 quant aux conditions d’activation des éléments incorporels :
L’élé
ment doit générer des avantages économiques futurs qui profiteront probablement à
l’entreprise (l’estimation doit reposer sur des données objectivement vérifiables).
son usage interne ou sa commercialisation ; l’existence d’un marché pour les produits
qui seront issus de l’incorporel ou pour l’incorporel lui-même, ou son utilité pour un
usage interne et l’existence des ressources financières et techniques qui lui
permettront d’achever le développement. »
Afin d’illustrer ces propos, prenons l’exemple de la seule entreprise ayant présenté des
documents de synthèse intégrant les ressources humaines au bilan : la R. G. Barry
Corporation (1968,1969). Il s’agit d’une entreprise de taille moyenne dans l’Ohio à
Colombus (USA) qui fabrique des chaussures.
Dépenses de la période
Accueil Développement de
l’expérience
II - Méthodes d’évaluation
Cette méthode a été développée à l’origine par Brummet, Flamholtz et Pyle (1968).
L’analyse du coût des ressources humaines en investissement, susceptible
d’amortissement, et charges de période ne soulève pas de difficulté technique, dès lors
que le système d’évaluation reste fondé sur le coût historique. Dans cette optique,
c’est le coût réel d’obtention des ressources par l’entreprise qui fonde l’évaluation.
Cette problématique classique nécessite la conception d’un réseau d’analyse des
dépenses de personnel permettant la mise en œuvre, à un niveau suffisamment
Enfin, il ne faut pas omettre d’intégrer des coûts spécifiques directs et indirects
propres à la substitution de personnel comme les coûts liés au départ du salarié, coûts
de recherche et de mise en place d’un salarié assurant des services équivalents.
Les besoins et la rareté des ressources sont mis en relation, de sorte que la valeur
des biens est ainsi établie. Les agents économiques effectuent donc des choix en
essayant d’obtenir les biens qui leur sont personnellement les plus utiles, selon la
rareté relative : ils cherchent la meilleure valeur. Ce choix implique un schéma de
référence qui pondère les valeurs en détermine un ordre de priorité. Par exemple, il
faut manger avant de profiter des loisirs sinon nous mourrons de faim et nous ne
pouvons plus profiter des loisirs. Cependant on peut se demander qui fait le choix ? La
personne qui a le pouvoir économique c’est-à-dire la personne qui contrôle les
ressources rares d’une part et celle qui peut pondérer ses besoins d’autre part.
Pour un étudiant le bénéfice d’opportunité représente la différence entre son futur
salaire de diplômé et le meilleur salaire qu’il aurait perçu avant de faire ses études. Il
faut évidemment tenir compte aussi de l’intérêt de ce salaire non perçu.
L’opportunité peut donc se définir comme le résultat, le gain obtenu ou perdu suite
à un choix économique. L’opportunité est positive quand nous considérons les
avantages du choix effectué et négative dans le cas contraire.
Dans l’entreprise, dès qu’on se limite aux productions efficaces, on ne peut
accroître la quantité d’un bien qu’en diminuant la quantité d’un autre bien. Cette
diminution est inévitable alors que les ressources utilisées dans la production du second
bien sont dorénavant consacrées à la production du bien désiré en plus grande
quantité. Inversement si on diminue la quantité d’un bien, il faut augmenter le niveau
de production d’un autre bien sinon des ressources seront gaspillées. De ce fait le coût
d’opportunité d’un bien est la quantité de l’autre qu’il faut sacrifier pour obtenir une
unité supplémentaire du premier bien. On peut mesurer le coût d’opportunité d’un
bien en diminuant sa quantité. Alors son coût est la quantité de l’autre qu’on obtient.
En ce qui concerne les ressources humaines, le coût d’opportunité est défini comme
la valeur des ressources humaines dans leur utilisation alternative la plus favorable.
HEKIMIAN et JONES ont suggéré un système concurrentiel d’enchères au sein de
l’entreprise où les responsables de division jouent le rôle d’acheteurs de personnel.
L’enchère doit permettre de déterminer une situation d’équilibre qui représente le prix
du groupe de personnes, assimilé à la valeur économique incorporable aux actifs de
l’entreprise. La valorisation au coût d’opportunité suppose donc la mise en place d’un
marché interne des ressources humaines, la valeur de chaque individu étant la
résultante naturelle de la confrontation de l’offre et de la demande. La valeur du
capital humain correspondrait à la somme des valeurs individuelles ayant fait l’objet
d’une confrontation interne. Cette méthode fait référence à un prix du marché donc
est très proche de la méthode du coût de remplacement, l’apport résidant
essentiellement dans la détermination de la valeur de chaque individu par un
mécanisme d’évaluation interne. Selon une procédure d’appréciation interne des
compétences et des disponibilités du marché, la valeur de l’individu est estimée et
capitalisée.
- D - L’évaluation économique
Lorsque l’entreprise évolue dans une situation de concurrence pure et parfaite alors
le salaire versé correspond à la productivité effective marginale du salarié, c’est à dire
à ce que celui-ci « rapporte » par son travail. Dans cette situation, les flux actualisés
des revenus sont équivalents à ceux des salaires versés. Mais dans la réalité, l’entité est
confrontée à un certain nombre de facteurs qui limitent cette situation. De plus,
Friedman et Lev (1974) ont comparé les salaires probables actualisés aux salaires réels
de la société. Chaque année, la différence constatée entre les deux reflète une
économie de coûts (salaire réel < salaire probable actualisé), propre à la politique de
rémunération mise en œuvre. Cette économie représente le retour sur investissement
de l’investissement qui est ainsi valorisé.
Dans cette optique, il n’est prévu aucune évolution de carrière pour le salarié, Sadan
et Auerbach (1974) ont donc proposé un modèle faisant appel aux chaînes de Markov
pour déterminer une matrice des probabilités de transition afin d’estimer à terme
l’évolution d’une population de base.
- III - Influence sur la normalisation comptable et sur les états financiers actuels
- A - Le traitement comptable de l’immatériel
Les travaux relatifs à la prise en compte des ressources humaines dans le états
financiers, en s’inscrivant dans une problématique de type charges contre
immobilisations, ont préfiguré les réflexions actuelles sur le traitement comptable de
l’immatériel.
Le Comité de l’Information Statistique (CNIS) définit l’investissement immatériel
comme « une dépense qui, bien qu’inscrite en charge d’exploitation, développe la
capacité de production et valorise l’entreprise en s’accumulant sous la forme d’un
capital amortissable sur une production future en constituant une valeur patrimoniale
cessible sur le marché ».
On considère comme investissement immatériel la recherche et développement, les
fonctions commerciale et marketing, les ressources humaines, la formation,
l’organisation et les systèmes d’information, les systèmes et les processus de
production.
Modalités de comptabilisation
En principe les charges constatées lors d’un exercice constituent des charges de cet
exercice et sont comptabilisées en tant que telles.
Leur constatation à l’actif n’est que facultative et s’agissant d’une dérogation au
principe de prudence assortie le plus souvent de conditions, cette constatation
constitue donc une décision de gestion. Dans tous les cas si les entreprises le souhaitent
elles peuvent laisser ces frais en charges.
Si une entreprise décide d’inscrire à l’actif ces éléments immatériels, deux options
s’offrent à elle.
Soit elle les enregistre en immobilisations incorporelles. Pour cela, ces éléments
doivent cumulativement constituer une source régulière de profits, être dotés d’une
pérennité suffisante et être cessibles.
Soit elle les enregistre en charges à répartir. Les charges à répartir sur plusieurs
exercices comprennent :
- Les frais d’acquisition des immobilisations
- Les frais d’émission des emprunts
- Les charges différées : Elles ne concernent que les charges dépensées dans le
cadre d’opérations spécifiques à venir ayant de sérieuses chances de rentabilité
globale.
- Les charges à étaler : représentent des charges importantes, non renouvelables
que l’entreprise peut décider de répartir sur plusieurs exercices. Ne peuvent
être valablement étalées que les charges ayant un caractère bénéfique durable
pour l’entreprise.
L'évolution des charges et des recettes des clubs de football de D1 (en KF)
87/88 97/98
% % Variation
(20 clubs) (20 clubs)
Produits d'exploitation :
Matches de championnat 295 962 24 322 209 10 9%
Matches de coupe d'Europe 29 888 2 64 135 2 115%
Autres matches 40 362 3 33 987 1 -16%
Sponsors, publicités 167 768 14 433 847 14 159%
Subventions collectivités
territoriales 212 608 17 250 328 8 18%
Charges d'exploitation :
Achats marchandises et stock 81 375 7 101 083 3 127%
Services extérieurs 83 849 3
Frais de déplacement 58 990 5 146 509 4 148%
Frais d'organisation des matches 64 716 5 101 021 3 56%
Autres services extérieurs 100 203 8 285 249 9 185%
Impôts et taxes 32 671 3 140 650 4 331%
Charges de personnel 645 749 54 1 458 663 45 126%
Indemnités de mutation versées 140 976 12 446 827 14 217%
Amortissement indemnités de
mutation 383 436 12
Autres charges 72 948 6 27 433 1 548%
Dotations amortissements et
provisions 61 524 2
TOTAL 1 197 628 100 3 236 244 100 170%
Cet « actif humain » est donc sous-évalué, d’autant plus que la valeur des joueurs peut
considérablement augmenter et que ceux issus du centre de formation ou recrutés en
fin de contrat ne sont pas valorisés. Le bilan ne donne donc pas une image fidèle du
club, la valeur des joueurs n’est pas intégrée, la situation des comptes reflète une
fragilité exagérée.
III – Les problèmes de mise en place d’une comptabilisation des ressources humaines :
les limites
L’intégration des ressources humaines dans les bilans comptables semble être soumise à
quelques contraintes. Ces contraintes se matérialisent par des problèmes de définition
des objectifs et d’évaluation.
Les problèmes d’évaluation présentent avant tout des difficultés juridiques dans la
mesure où les actifs humains au bilan ne répondent pas aux critères de patrimonialité,
et fiscales, puisqu’elle pourrait être considéré comme une réévaluation libre
génératrice d’une imposition.
Conclusion
En France, l'observation des pratiques comptables montre que peu d'entreprise ont
recourt à l'activation de l'investissement en ressources humaines. En effet, le recours à
la comptabilité des ressources humaines est une comptabilité sophistiquée que seule la
Barry Corporation a su mettre en oeuvre. Cependant, beaucoup d'entreprises sans
mettre en oeuvre cette comptabilité, suivent avec attention les coûts de recrutement,
d'embauche et de formation.
Une évidence s'impose : la dimension humaine est le fondement et le moteur de
l'entreprise. Les structures, les systèmes ne génèrent rien par eux-même. Seul l'humain
donne vie et futur à l'entreprise. Or, cette évidence est à l'opposé de ce que les outils
de mesure reflètent.
On peut ainsi conclure qu'il n'existe pas de méthode simple pour mesurer la valeur de
ce qui se passe dans les têtes et les cœurs des dirigeants et des employés.
BIBLIOGRAPHIE
Deloitte & Touche (1997), Annual Review of football Finance, Deloitte Touche
Tohmatsu International, London
Edwards E. O. and Bell P.W. (1961), Theory and Measurement of Business Income,
University of California Press, Berkeley
Lev B. and Schwartz A. (1971), On the Use of the economic Concept of Human
Capital in Financial Statements, The Accounting Review, January, pp. 103-112
Likert R. (1967), The Human Organization : Its Management and Value, McGraw-Hill
Book, New-York
Par
Pour le commun des mortels, la comptabilité apparaît comme une technique tout à fait
neutre. Les comptables donnent l'image d'êtres rigoureux... un peu tristes dans leur
rigueur. Ils semblent faits de la même matière que les chiffres qu'ils manipulent avec
aisance et délectation. On s'en moque et on les respecte tout à la fois comme on l'a
toujours fait de ce genre de personnages qui semblent détenir quelque pouvoir magique
et inquiétant.
II est assez rare que la question soit posée des caractéristiques profondes de la
comptabilité, et du véritable rôle des comptables. De même que le paysan ne s'étonne
plus du rythme régulier des saisons. tout en se réjouissant que la nature fonctionne
«normalement», les chefs d'entreprise, les banquiers, les salariés... tous les utilisateurs
des documents financiers considèrent comme tout à fait normal la production d'états
chiffrés, régissant de fait de très nombreux rapports économiques, juridiques et sociaux
entre individus. Il semblerait que la comptabilité soit un instrument à peine plus
compliqué que le compteur de gaz ou d'électricité que chaque abonné s'est vu placé à
l'entrée de sa résidence et qui, silencieusement, impartialement, et sans jamais faillir,
enregistre les consommations énergétiques.
Une vision strictement nationaliste des choses ne fait d'ailleurs qu'accroître cet état de
fait: à l'intérieur des frontières d'un même pays, il semblerait que toutes les
conventions étant bien en place, les règles de droit solidement élaborées, les pratiques
largement admises, la technique comptable ne puisse souffrir d'aucune critique
fondamentale. Que l'on s'assure que toutes les précautions ont été prises pour éviter les
erreurs d'enregistrement, les erreurs techniques, les éventuelles malversations, bref,
que l'instrument soit fiable, et les instrumentistes moralement irréprochables, et tout
le monde est rassuré. Cette quasi-sacralisation de la comptabilité la met au rang des
religions: face à tant de rigueur, l'on ne peut qu'accomplir un acte de foi, et le doute
est déjà péché...
Qu'un jour l'on découvre que 1'on peut adorer un même Dieu suivant des rites
différents, et voilà que naît l'inquiétude métaphysique... Et s'il y avait plusieurs
« vérités» ? Et si des comptables de bonne foi avaient une lecture différente des tables
de la loi: les fameux «principes comptables généralement admis»? La comptabilité
deviendrait-elle alors exercice d'exégèse? 81
En restant dans l'évêché, il est difficile de s'apercevoir que ce qui est vertu pour les uns
est péché pour les autres. Les grands conciles oecuméniques auxquels les organisations
comptables internationales nous ont habitués ne semblent pas avoir réuni l'adhésion de
tous les fidèles sur les points les plus délicats de notre pratique. C'est peut-être là le
signe qu'il ne peut y avoir de vérité «révélée» dans notre discipline, et pas davantage
de vérité «fondamentale». Par fondamentale, j'entends celle que l'on découvre par les
voies habituelles de la démarche scientifique. Si c'était vraiment le cas, la comptabilité
apparaîtrait alors comme la manifestation technique d'un consensus social, ce qu'en
termes un peu pédants l'on pourrait qualifier d'«artefact 82 social». Les rigueurs de la
technique parent la comptabilité des apparences de la science. Sous la charpente
rigoureuse se cachent des fondations plus incertaines, plus mouvantes, relief toujours
remodelé par les courants politiques, économiques et sociaux. C'est ce que j'essaierai
de montrer en faisant référence au contexte international qui est aujourd'hui le nôtre.
La vieille Europe présente à ce sujet un avantage sur le nouveau continent. Diverse par
la géographie, les langues, l'histoire, les religions, ayant subi dans le passé toutes les
influences, ayant façonné l'Amérique, subissant à son tour la très forte influence du
«nouveau monde», l'Europe permet à un observateur attentif d'identifier les causes des
divergences de vues concernant la façon dont les comptabilités doivent être élaborées.
Si d'ailleurs l'on n'oublie pas que l'Europe s'étend jusqu'aux frontières de l'Oural, l'on
englobe dans cette mosaïque de peuples, de régimes politiques, de systèmes de
pensée, aussi bien les économies centralisées que les économies libérales, l'on
comprend mieux encore que les documents comptables ne font que traduire une vue
particulière des rapports entre les individus et les richesses qu' ils produisent et se
partagent.
Le continent africain est encore largement le reflet des colonisations récentes. Les
Anglais, les Français, et à un degré moindre les Allemands, les Italiens, les Hollandais et
les Portugais ont marqué les modes de vie africains de façon quelquefois caricaturale.
Je n'en veux pour preuve que cette anecdote, tout à fait authentique: deux étudiants
noirs, l'un de l'ex-Nigéria anglais, l'autre de ce qui fut 1'A.O.F.(Afrique Occidentale
Française), sirotent une bière dans un bar de Dakar, et le premier dit à son camarade
avec un accent mi-oxfordien, mi-africain: Comprenez-vous, mon cher, vous autres
latins, et nous autres anglo-saxons, nous ne nous entendrons jamais... Même plusieurs
décennies après la «décolonisation», la marque de l'européen se fait encore fortement
sentir. Toutefois, la colonisation par la puissance économique et linguistique, celle des
Etats-Unis, est déjà présente.
L'Amérique latine porte bien son nom, et ses modes de pensée, ses réflexes profonds
sont encore largement ceux d’une lointaine péninsule ibérique, même si l'influence
nord-américaine gagne progressivement le Mexique et le Venezuela.
• la religion,
• le droit,
1) La religion
C'est un élément fort important pour notre propos. À travers la comptabilité, nous
traitons du rapport des individus entre eux et avec les biens de ce monde. La Bible, le
Coran, le Talmud, et d'une façon générale tous les livres sacrés ont édicté certains
préceptes de conduite concernant l'attitude que les hommes devaient avoir vis-à-vis de
la richesse. Le monde judéo-chrétien a ensuite évolué, et, après la réforme,
catholiques et protestants ont divergé à ce sujet sur bien des points. Ainsi, la pauvreté
est vertu pour les catholiques, alors que le profit, la richesse, sont la récompense
temporelle que Dieu accorde au «bon serviteur» qui, suivant la parabole, a su faire
fructifier les talents que le Seigneur lui avait confiés. Aujourd'hui encore les manuels
américains de comptabilité font référence à la notion de stewardship et rappellent que
ceux à qui l'on a confié de l'argent dans l'espoir qu'ils le feraient fructifier se voient
aussi confier la mission de rendre compte du bon usage de ces fonds.
2) Le droit
L'Europe offre de nouveau un champ d'observation de tout premier plan lorsqu'il s'agit
de comprendre l'influence de la pensée juridique sur les actuels systèmes comptables.
La Rome antique nous a légué le droit civil; elle a fait que pendant des siècles les
rapports entre les individus, tant collectifs que privés ont été régis par des documents
servant tantôt de référence, tantôt d'instrument de preuve. Les pays méditerranéens
mais aussi une partie des actuelles contrées germaniques (la région de Cologne par
exemple) furent dominés par les Romains.
De façon quasi caricaturale ces deux modes de régulation de la vie sociale se sont
diffusés dans le monde entier par le biais des colonisations. Il se trouve par ailleurs que
par une coïncidence historique notoire, les pays se réclamant du droit écrit sont aussi
ceux où la religion catholique prévaut, alors que les pays de droit coutumier ont été
conquis par les idées de la réforme.
sous la forme d'un médaillon d'argile sur lequel l'inventaire de ce qu'il faut déjà appeler
« exploitation agricole » est consigné en langage cunéiforme. Les livres de comptabilité
les plus anciens que l'on ait retrouvés, tenus en partie double, appartenaient à des
commerçants de Gènes vivant au XIIe siècle, et les comptables peuvent s'honorer du
fait que parmi les tout premiers livres sortis des presses de Gutenberg, à la fin du XVe
siècle, figurait, en même temps que la Bible, le premier manuel de comptabilité. Or,
dans ce fameux ouvrage de Luca Pacioli, l'on décrit entre autres choses la façon
d'inventorier un patrimoine, de consigner des créances et des dettes, et ceci en tenant
compte des diverses monnaies en usage dans les grandes places commerciales.
Il faudra attendre la révolution industrielle dont chacun sait qu'elle est née en
Angleterre et qu'elle a gagné ensuite l'Allemagne (alors que l'Italie, l'Espagne et la
France restaient agricoles) pour que la comptabilité prenne une autre dimension: la
naissance de la grande industrie, c'était aussi celle de la grande entreprise, qu'à son
tour supposait la réunion de capitaux fort importants, ce qui devait avoir pour consé-
quence la conception de modèles juridiques nouveaux, fixant les modes de partage de
la propriété, de la responsabilité, des risques, des fruits de l'activité économique. Alors
que la pensée comptable française était encore marquée par une conception quasi
terrienne de la vie économique, les Ecossais, les Anglais, les Hollandais devaient
développer une vision capitaliste, une vision financière des principes comptables, vision
qui s'est très largement développée par la suite dans toute l' Amérique du Nord. Un peu
schématiquement l'on pourrait dire que les comptables français, soucieux de respecter
l'esprit des codes napoléoniens (civil et commercial) attachés à la propriété terrienne
et immobilière, ont orienté la comptabilité essentiellement vers la notion de
sauvegarde d'un patrimoine, gage commun des créanciers, alors que les comptables
britanniques se sont très tôt tournés vers la notion de profit distribuable, d'où
l'élaboration des fameux «principes comptables de base» qui n'ont d'autre effet que de
déterminer correctement les charges et les produits d'une période.
II est évident qu'en dehors des influences lointaines de la religion, du droit, en dehors
des influences plus proches, plus immédiates des modes du développement
économique, les systèmes de gouvernement propres à chaque nation ont modelé les
pratiques comptables nationales. Certains exemples sont assez caricaturaux pour qu'ils
méritent d'être rappelés: la France est, depuis Colbert, marquée par une attitude
gouvernementale particulièrement centralisatrice. De Napoléon à nos jours, cette
tendance s'est maintenue, même si le discours politique actuel est différent. La
profession comptable joue dans notre pays un rôle de prescription nettement moins
important que ne le font les autorités gouvernementales à travers l'organisme de
normalisation qu'est le Conseil National de la Comptabilité qui dépend du Ministère des
Finances. Au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, il nous apparaît que la situation est tout
autre, et que la profession joue un rôle d'orientation fort important, alors que les
gouvernements n'interviennent que de façon indirecte pour délimiter une zone de
Dans les pays d'économie centralisée où l'idée de profit capitaliste est officiellement
refusée, où il n'existe pas de marché financier, donc pas de sanction par les lois
traditionnelles de l'offre et de la demande, où gouverner c'est fixer les règles d'un
échange, déterminer les besoins des individus et le prix des biens, la comptabilité est
avant tout analytique, orientée vers la détermination des coûts, utilisée pour accorder
ou refuser des subventions, récompenser ou sanctionner un gestionnaire. La
comptabilité «privée» a de ce fait certains traits des comptabilités «publiques». Le
comptable est le gardien d'une propriété collective; il n'est point le gestionnaire des
fonds confiés par des actionnaires.
Entre ces visions un peu extrêmes de la comptabilité et de ces usages, chaque pays a
cherché une voie, soit par mimétisme ou habitude (c'est la voie un peu passive), soit en
raison d'impératifs économiques (c'est la voie dynamique). Ainsi, l'Espagne, le Portugal,
et par tradition, les pays africains d'expression française ont-ils pour habitude de copier
le système français (règles juridiques, méthodes d'évaluation. plan comptable
normalisé). Tout à fait à l'opposé, les Hollandais dont la vocation capitaliste
internationale s'est depuis des siècles largement manifestée ont-ils adopté les vues
économiques et libérales les plus avancées en matière de comptabilité. L'école du coût
de remplacement de Limpberg a fait aux Pays-Bas de nombreux adeptes, et environ la
moitié des entreprises cotées à la bourse d'Amsterdam publient leurs comptes à partir
de cette méthode. Il n'existe cependant pas de méthode unique en ce pays qui attache
une très grande importance à la liberté des pratiques comptables, et qui accepte
difficilement l' idée de normes, qu'elles soient nationales ou internationales.
Et pourtant …
avec quel instrument de mesure, étant entendu qu'en la matière, aucune méthode
véritablement scientifique (au sens épistémologique du terme) ne peut être
adoptée.
De notre point de vue, un résultat comptable est «exact» donc « vrai» s'il est
socialement acceptable. 83
83
Il est arrivé, trop souvent hélas, dans l'histoire de l'humanité, que des vérités scientifiques naturelles, donc hors de la
portée de l'homme, soient refusées parce qu'elles n'étaient pas, dans leur contexte historique, socialement
acceptables...
o La Terre devait être plate et la voûte céleste supportée par des colonnes.
o Et même, plus proche de nous, Einstein se refusait-il à accepter que la position d’une particule élémentaire ne
puisse être déterminée dans le temps et l'espace, que par une «densité de probabilité» parce que le croyant qu'il
était ne pouvait admettre que Dieu qui décide tout. laissait une part au hasard.
Les fumes multinationales américaines dictent à leurs filiales du vieux continent leurs
méthodes comptables en vue d’une consolidation. Les Big Eight répandent leur évangile
dans le monde entier. Les professeurs d'université ne limitent plus leur enseignement
aux pratiques nationales, mais introduisent une part plus ou moins importante de
«comptabilités comparées» dans leurs cours. Tous ces éléments contribuent à ouvrir les
esprits, à admettre le point de vue d'autrui, à abandonner les certitudes rassurantes
d'un chauvinisme intellectuel au profit d'une nouvelle réflexion fondamentale sur ce
qu'est notre discipline.
L'harmonisation comptable pourrait et devrait être plus rapide encore si, au lieu d'être
le seul fait de praticiens cherchant à fixer des règles acceptables par le plus grand
nombre, elle était proposée par ceux que j'appellerais un peu pompeusement les
«professionnels de la conceptualisation», c’est-à-dire les enseignants et chercheurs.
Nous, les enseignants, portons tous une certaine part de responsabilité, car nous
n'avons que trop peu proposé de nouveaux schémas théoriques aux praticiens. Notre
rôle ne peut être de découvrir les «lois naturelles>. de la comptabilité. Ce serait une
absurdité, car notre discipline n'est en rien comparable aux sciences physiques.
Nous sommes, en cette ville de Montréal, issue de l'esprit d'aventure des pionniers
européens des siècles derniers, au carrefour de mondes latins et anglo-saxons, dans une
école qui affiche légitimement et avec fierté sa vocation internationale. Notre ami, le
Professeur Yves Aubert Côté, a eu le grand mérite de provoquer ce carrefour d'idées,
d'aiguiser noire appétit de réflexion sur le thème alléchant de l'enseignement et la
L'on peut avoir deux attitudes vis-à-vis du futur que les deux boutades suivantes, l'une
pessimiste, l'autre optimiste, peuvent résumer. La première, pessimiste, en langue
anglaise: Due to a lack of interest, tomorrow is cancelled. La seconds,
optimiste dons notre langue: Le futur m'intéresse, c’est là que j'ai !'intention
de passer mes prochaines années .
L’AUDIT SOCIAL
Depuis l’introduction du concept de l’audit Social dans les années cinquante selon CA
Magasine, des centaines d’articles ont été consacrés à ce sujet tant aux USA qu’en
Europe. Les experts en Comptabilité et les spécialistes de la responsabilité sociale ont
depuis, fait converger leurs efforts pour dégager un cadre théorique satisfaisant dans le
but de consacrer la notion de comptabilité sociale et élaborer des moyens concrets de la
mettre en application. Ainsi donc la plupart des chercheurs et spécialistes ont préfère
l’utilisation de l’expression comptabilité sociale à celle d’audit social qui rappelle trop
la vérification comptable au sens traditionnel.
Ce qui nous a valu très peu de définition de l’audit social, en terme d’approche de
vérification d’un nouveau genre, mais plutôt beaucoup de tentatives de définitions des
champs, couverts par la comptabilité sociale. Selon Brooks et Davis, ` »Le but de la
comptabilité sociale est de déterminer les effets que les actions d’une entreprise ont sur
la qualité de la vie de la société. ».
N’empêche que la plupart des auteurs qui se sont penchés sur la problématique de la
comptabilité sociale, se sont mis d’accord sur un ensemble d’éléments qui caractérisent
l’audit social.
Les principales caractéristiques de l’audit social sont :
Le caractère professionnel de l’audit découle de l’utilisation de démarches et d’outils
rigoureux et d’une compréhension approfondie du domaine audité.
• Le champ de l’audit social est large : Tous les aspects qui découlent de la
mobilisation des ressources humaines par une organisation en font partie.
• L’utilisation de référentiels pertinents est essentielle. Les constats faits, ne
prennent toute leur valeur que lorsqu’ils sont comparés à des données qui
permettent des comparaisons avec les résultats d’autres entreprises du même
secteur d’activité.
• La formulation d’une opinion est essentiellement et la qualité de celle-ci dépend
à la fois du choix de l’indicateur et de celui du référentiel.
• Au delà de l’opinion, de l’audit doit permettre de formuler des recommandations
afin d’améliorer la qualité de la Gestion des Ressources Humaines (GRH).
Les années quatre-vingt dix ont marqué le développement de l’audit social. Des
procédures de certification d’auditeurs sociaux ont été mises en place en 1994 (normes
ISO 9002) pour répondre aux attentes des entreprises et des organisations.
En tenant compte de différentes réflexions produites sur la comptabilité sociale, cinq
étapes de la démarche d’audit social peuvent être distinguées : Fixation de la mission,
pré-diagnostique, adaptation du programme de travail, réalisation des travaux, rapport
d’audit avec sa présentation.
Un nombre croissant de directeurs des Ressources Humaines s’intéresse aux pratiques et
aux apports de l’audit social pour améliorer la qualité de leur Gestion des Ressources
Humaines. Le développement de nouveaux instruments d’évaluation et cette
préoccupation des gestionnaires pour la performance social de l’entreprise ont porté les
DRH à développer une série d’attente face à l’audit social. Ces attentes se situent à
cinq niveaux : plus de sécurité (audit de conformité), des informations sociales fiables
et pertinentes, plus d’efficacité (vérifier que les objectifs sont atteints), plus
d’efficience (meilleure maîtrise des coûts), meilleurs choix stratégiques. A chaque
niveau correspondent des missions spécifiques.
Cependant, il faut préciser que si parmi les pays industrialisés les plus avancés, la
comptabilité sociale a commencé à se développer jusqu`à arriver au concept de profit
social ou encore de profit socio-économique depuis plus de 25 ans, il n’est pas moins
vair qu’à cause du caractère nouveau et complexe du profit social et économique,
différents problèmes de mesure et de comptabilisation se sont posés, et font l’objet
aujourd’hui encore de recherches assez sérieuses.
LE BILAN SOCIAL
Les notions d’audit social, de profit social, revoient naturellement à celle de bilan
social. En effet, le bilan social a été à l’origine, un tableau de bord imposé aux
entreprises par le législateur. Il s’agissait d’avoir la base d’un référentiel d’obligations
à caractère social dans le but d’arriver à établir un cadre de dialogue social dans
l’entreprise.
Ceci dit, on notera que ce sont les Etats-Unis qui, les premiers, ont recherché les
mesures pertinentes des facteurs sociaux de l’entreprise. A l’image de la comptabilité
générale et de la comptabilité analytique, ils ont cherché à exprimer à travers un
certain nombre d’indicateurs, un bilan annuel de la gestion sociale dans son ensemble.
En Europe, le besoin s’est fait sentir à la fin des années 60, d’abord aux Pays-Bas puis en
Allemagne. Dans le même temps, le patronat français a commencé à réfléchir à la
promotion du bilan social et a émis des propositions qui ont été largement reprises dans
le projet de loi relatif au bilan social adopté en Conseil des ministres du 26 janvier 1977.
La loi du 17 juillet 1977 a fait du bilan social le premier tableau de bord social,
obligatoire pour les entreprises et les établissements dont l’effectif habituel est d’au
moins trois cents salariés.
• Information
• Concertation
• Planification
Ces objectifs expriment ce que le professeur Pierre Sudreau désigne comme étant :
` »la volonté de transformer la vie de l’organisation et en particulier de nouer un
dialogue social dans l’entreprise ». S’agissant de la structure, le bilan social présente
un grand nombre d’indicateurs sociaux regroupés en sept grands groupes, elles-mêmes
divisées en sous-groupes avec comme unité de base : L’indicateur social.
Les sept grands groupes d’indicateurs du bilan social sont :
• L’emploi
• Les rémunérations
• Les conditions d’hygiène et de sécurité
• Les autres conditions de travail
• La formation
• Les relations professionnelles
• Les autres conditions de vie relevant de l’entreprise
C’est dans le secteur du commerce et des services que le bilan social comporte le plus
grand nombre d’indicateurs puisqu’on en dénombre plus d’une centaine.
CONCLUSION
Cependant il faut souligner que ce concept de responsabilité sociale est loin de faire
l’unanimité car, pour répéter le professeur Léo-Paul Lauzon, «Plusieurs administrateurs,
comptables politiciens et économistes croient encore fermement au point de vue
traditionnel qui limite le rôle de l’entreprise strictement à ses fonctions économiques».
L’économiste Milton Friedman fait partie de cette catégorie. Dans son célèbre ouvrage
``Capitalisme et Liberté``, il s’exprimait ainsi : «le Business n’a qu’une responsabilité
sociale et une seule : utiliser ses ressources et s’engager dans des activités destinées à
accroître ses profits, et cela aussi longtemps qu’il pratique une concurrence ouverte
libre, sans tromperie, ni fraude…Si les hommes d’affaires ont une responsabilité sociale
autre que celle de maximiser les profits de leurs actionnaires, comment pourront-ils
discerner de quelle responsabilité il s’agit exactement ?»
Ceci dit, nous concluons en disant comme l’ont souligné C. Gougnaud & E. LAVILLE, les
points commun entre toutes ces initiatives ont fait apparaître divers principes
méthodologiques, fondateurs de l’audit social et ont justifié du même coup le bilan
social :
Il croise les points de vue des différents publics ayant un intérêt dans l’entreprise :
clients, employés, fournisseurs, actionnaires, environnement et société au sens large.
L’évaluation est en outre faite sur la base des valeurs de l’entreprise de sa mission
affichée, de ses objectifs spécifiques et de différents indices appropriés.
Il est comparatif : lorsque c’est possible et pertinent, la performance de l’entreprise
est rapprochée des standards externes (statistiques nationales ou meilleures pratiques
connues), pour mettre aux divers publics d’évaluer par eux-mêmes la performance de
l’entreprise par rapport à des entreprises comparables.
Il complète et prend en compte toutes les facettes de l’activité de l’entreprise, pour
être sûr de ne pas exclure ni ``oublier`` des points faibles ou ``douteux``.
Il est régulier et est conduit la plupart du temps chaque année, en phase avec l’audit
financier ; l’audit éthique et social fait en effet partie intégrante du processus
d’évolution d’une organisation.
Il est soit réalisé par un ``auditeur`` extérieur spécialisé soit, au minimum, soumis à
une vérification extérieure, afin de garantir l’objectivité des résultats et la crédibilité
de la démarche notamment vis-à-vis des publics extérieurs à l’entreprise.
Enfin, il est rendu du public, une dimension qui ne doit pas être sous-estimée. De même
que la diffusion du rapport financier permet aux actionnaires (réels ou potentiels)
d’évaluer la performance d’une organisation puis de décider soit d’influencer telle ou
telle pratique de l’entreprise soit d’acheter ou de vendre des actions, la publication de
l’audit éthique et social remplit ce rôle auprès des divers autres publics.
Pour finir nous dirons, que les expériences existantes montrent que les entreprises
engagées dans cette voie sont perçues par les consommateurs différemment de celles
qui ne font que parler de leur responsabilité sociale. En outre, l’audit éthique et social
apparaît d’une part comme un outil de marketing réel auprès des consommateurs
attentifs aux engagements des entreprises dont ils achètent les produits ou service, et
d’autre part comme une formidable source de motivation pour les employés qui
attendent de leur entreprise honnêteté et transparence.
Le Triple Bilan
par
Anne Papmehl, MA
Le triple bilan transforme la façon dont les sociétés et les actionnaires envisagent les
impératifs de l’entreprise.
Bien que l’évocation du triple bilan puisse inviter aux sarcasmes sur l’affaire Enron,
ceux pour qui l’expression est familière considèrent cette forme de rapport comme une
étape obligée du périple vers une plus grande transparence de l’entreprise. Le triple
bilan - ou triple résultat - comme on le nomme parfois – renseigne sur trois impératifs
organisationnels qui sont en corrélation : la prospérité économique, l’intégrité
environnementale et la contribution sociale.
Le triple bilan (TB) est le résultat des plus récents progrès réalisés en ce qui
concerne ce que l’on appelle souvent les rapports sur le développement durable de
l’entreprise ou la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) ; il en diffère toutefois,
de façon subtile mais néanmoins importante, à deux égards. Alors que les rapports sur
la RSE livrent en très grande partie de l’information prospective de nature qualitative,
le TB résume à l’aide d’information quantitative la performance économique,
environnementale, sociale de l’entreprise au cours de l’exercice écoulé. La popularité
du TB dénote un virage à l’échelle mondiale, vers la standardisation de l’information
qui doit être transmise au public et du mode de communication de cette information,
afin de créer une base de comparaison pertinente relativement à des critères autres
que la performance financière.
<< En termes concrets, explique Mel Wilson, cela signifie que la société pétrolière et
gazière canadienne examinera, pour ce qui est de l’environnement, les émissions de
CO2 et leur incidence sur les sols, tandis que sa principale préoccupation sociale sera
probablement ses négociations avec les communauté autochtones. Les questions
relatives aux normes du travail sont rarement soulevées dans les sociétés pétrolières
canadiennes, mais elles revêtent généralement d’une grande importance chez les
fabricants de produits de détail établis dans les pays en développement. Pour que
l’information développée soit pertinent, il faut donc lier les indicateurs aux activités de
l’entreprise et aux parties prenantes.>>
Mais dans un contexte ou les indicateurs et les normes prolifèrent, le choix des
indicateurs qui conviennent le mieux à une entreprise particulière peut se révéler
difficile. C’est pourquoi certaines sociétés comme DuPont ont élaboré leurs propres
indicateurs. << Nous estimons que les indicateurs doivent avoir un lien stratégique
avec ce que nous nous efforçons d’accomplir dans notre entreprise >> , explique
Colleen Brydon, directeur du projet d’innovation sociale chez DuPont Canada Inc., à
Mississauga. <<Plutôt que d’utiliser un certains type de normes dont l’objectif serait
générique et qui déterminerait la nature de l’information que nous devons diffuser et
le mode de communication de cette information, nous examinons quelles sont les
interdépendances des trois éléments que sont l’environnement, l’économie et la
société, en vue de réaliser cette stratégie.>>
D’autres sociétés, comme BC Hydro, associent les lignes directrices du GRI et leur
propre travail indépendant au sein de l’organisation pour déterminer les indicateurs qui
conviennent à la fois aux objectifs de l’entreprise et à ceux des parties prenantes.
La table ronde nationale sur l’environnement et l’économie (TRNEE), sise à Ottawa, a établi
trois indicateurs de base visant à cerner et à mesurer l’utilisation des matières et qui sont
fondamentales dans l’évaluation de l’élément d’intégrité environnementale du triple bilan : les
indicateurs d’intensités pour l’énergie, les déchets et l’eau.
L’indicateur de base de l’intensité énergétique mesure tous les carburants directs et indirects
servant à la fabrication de produits ou à l’offre de services. Cette intensité se mesure en
mégajoules et inclut la mesure de l’électricité, du gaz, du pétrole, du charbon, du coke et
d’autres sources énergétiques utilisés pour fabriquer un produit ou offrir un service.
L’indicateur de base de l’intensité des déchets mesure la matière totale entrant dans le
processus de fabrication d’un produit, moins la matière qui finit dans le produit. Les déchets
englobent tout entrant que l’on élimine, qui est libéré dans l’environnement ou qui n’est pas
considéré comme le produit désiré d’un procédé de fabrication.
L’indicateur de base de l’intensité de l’eau mesura la quantité d’eau utilisée par unité de
produit fabriqué ou de services offerts. Il englobe l’eau des puits, de l’approvisionnement
municipal et l’eau amenée des plans d’eau.
Dans son guide calcul des indicateurs de l’éco-éfficacité, la TRNEE explique clairement
comment calculer ces indicateurs et offres divers conseils aux entreprises qui désirent calculer
divers autres indicateurs complémentaires. Les indicateurs complémentaires visent à aider les
entreprises à obtenir une image plus complète des indicateurs de base.
Le guide offre également aux lecteurs des conseils relativement à certains particuliers qui
peuvent se présenter dans l’exécution de ces calculs. Par exemple, comment procéder si
l’entreprise produit sa propre électricité, si elle a son propre site d’enfouissement ou si elle
recueille l’eau de pluie comme source d’eau de refroidissement pour son procédé de
fabrication ? Pour plus d’information, consultez le site web de la TRNEE, www.nrtee-
trnee.ca/Publications/ eco-efficient_workbook/ index.html.
Les indicateurs du bilan social sont plus difficile à mesurer. << Il est très malaisé de
dire ‘’ Nous réalisons tel profit si nous posons tel geste social’’>>, déclare Allison
Morrison, directrice du projet de bilan social chez BC Hydro. Si les indicateurs
environnementaux ou les indicateurs d’éco-éfficacité ont certaines répercussions
mesurables sur les coûts ou les économies du bilan financier, ce n’est pas le cas des
systèmes sociaux. << Peu importe l’ardeur que vous mettez à quantifier, vous faites
toujours face à un élément subjectif avec les indicateurs de performance sociale.>>
Les indicateurs sociaux peuvent aussi être onéreux pour l’entreprise. << Si vous
informez les parties intéressées de votre performance sociale, certains seront
associés à toute consultation initiale visant à déterminer quel sont les indicateurs
appropriés, explique Allison Morrison. Ensuite, il vous faudra prendre les
dispositions nécessaires pour mesurer votre performance en en fonction de ces
indicateurs et faire états des résultats aux parties intéressés, ce qui pourrait
entraîner des coûts importants, ne serait-ce qu’en une heure de travail. De plus,
vous voudrez vous assurer de choisir des indicateurs qui sont pertinents et qui sont
porteurs de valeur pour l’entreprise.>>
le cours de l’action, bien que bon nombre des adeptes de ces rapports envisagent leur
valeur sous l’angle de la gestion du risque.
<< Le risque est un facteur intangible mais primordial qui influe sur le coup de
l’action et réside au cœur des stratégies d’investissement, explique Mel Wilson.
Presque toute l’information qu’une entreprise peut publier au sujet de ses activités et
de son exploitation, y compris l’information environnementale et sociale, peut être
intégrer à l’évaluation plus large de sa capacité à diagnostiquer et à gérer le risque,
l’entreprise les rassure quant à la sécurité de l’investissement qu’elle représente.>>
Mis ensemble, ces facteurs peuvent avoir des répercussions positives sur le cours de
l’action et justifier pour de nombreuses sociétés, semble-t-il, la production d’un triple
bilan.
Si l’on inverse le raisonnement, peu nombreux sont ceux qui nieraient qu’une image
défavorable, provoquées par des pratiques environnementales et sociales
irresponsables, puise avoir une influence négative sur la capacité de l’entreprise à
créer de la valeur pour les actionnaires. << Les sociétés initiatrices de projets qui ne
respectent l’environnement ou qui le détruisent ne seront soutenues par personne, ce
qui inclut les bailleurs de fonds institutionnels, fait remarquer Mel Wilson. Prêter à
des sociétés dont la valeur nette risque d’être compromise par un lourd passif
environnemental serait manifestement contraire aux principes de saine gestion.>>
Quant à savoir si le TB sera imposé aux entreprises, Mel Wilson croit que le Canada
adoptera certaines règles élémentaires en cette matière, mais pas dans un avenir
immédiat.<< Il serait illogique de réglementer la production du TB durant l’étape
initiale de croissance du modèle. Il est préférable de laisser agir le marché, car c’est là
que le modèle prendra son essor. La réglementation vise presque toujours, de part sa
nature, à faire en sorte que les retardataires se plient à la norme ; pour le moment, le
mieux est de laisser le marché faire son œuvre et de permettre aux leaders de se
manifester.>>
Puisque le milieu des affaires s’entend sur le fait que les questions
environnementales sont là pour rester, c’est aussi le cas du TB. << L’on convient
aujourd’hui de la nécessité de respecter la capacité limite de la planète, ajoute David
McGuinty. Cet acquiescement est un premier pas vers une grande diversité d’activité
de gestion du changement, dans le domaine de l’éco-éfficacité, que l’on commence à
observer dans un grand nombre d’entreprises qui se disputent la maternité des progrès
accomplis.>>
Mais David McGuint y met en garde : << Le TB doit baigner dans la réalité des règles
et de réglementation de la comptabilité, de la fiscalité et du marché libre, et les
entreprises d’aujourd’hui ne disposent pas de beaucoup de temps pour contempler le
paysage. Diverses questions se posent maintenant quant à la façon dont les entreprises
doivent cheminer de manière créatrice et graduelle dans cette voie, mais c’est
essentiellement en rétrospective que l’on évalue le chemin parcouru et le type de
valeurs que les entreprises en sont venues à produire dans ce domaine.>>
84 Continuité de l’exploitation : Hypothèse selon laquelle l’entité poursuivra ses activités dans un avenir
prévisible et justifiant la comptabilisation des actifs en fonction de leur utilisation continue plutôt que de
leur valeur de marché ou de liquidation. (TRADUCTION LIBRE — Terminology for Accountants, 4th
Edition, 1992)
Les sociétés exercent toutes leurs activités suivant l’hypothèse que leur exploitation se
poursuivra. Ce n’est cependant pas toujours ce que disent les chiffres.
Les parties prenantes doivent être mises au fait des finances réelles de la société. S’ils
sont informés suffisamment à l’avance des risques de faillite d’une entreprise, les
investisseurs y réfléchiront à deux fois avant d’investir et les actionnaires pourront
limiter leurs pertes. Les bailleurs de fonds pourront également évaluer le risque de
manquement auquel ils s’exposent.
Or, les entreprises font-elles toutes état des incertitudes relatives à la continuité de
l’exploitation dans leurs états financiers? Selon une étude récente, non.
Dans leur étude intitulée Predicting Going Concern Risks in Canada (janvier 2004), les
professeurs J. Efrim Boritz et Jerry Sun (Université de Waterloo) se sont penchés sur
249 sociétés qui étaient en difficulté entre 1987 et 2002 et ont constaté que 46 % de
ces sociétés avaient présenté des notes narratives sur ce type d’incertitudes. Les
sociétés en difficulté englobaient les entreprises qui avaient demandé la protection de
la loi sur les faillites, avaient été mises sous séquestre, liquidées ou restructurées, ou
étaient visées par des mesures inhabituelles comme une interdiction d’opérations sur
valeurs ou une radiation de la cote. Les divers modèles de prévision des faillites
permettaient pourtant de prévoir la faillite de 75 % à 90 % de ces sociétés. Il n’est pas
étonnant de constater, par ailleurs, que plus l’intervalle est court entre la date des
états financiers et la date de la faillite, plus les informations fournies sur l’incertitude
relative à la continuité de l’exploitation sont exactes. Pourquoi donc l’écart est-il si
vaste entre les prévisions des entreprises quant à leur propre avenir financier et les
résultats des modèles de prévision utilisés dans l’étude?
L’analyse de la cote Z figure parmi les modèles utilisés dans l’étude de Boritz et Sun.
Parmi les autres modèles que M. Boritz trouve encore plus efficaces, mentionnons trois
modèles canadiens, soit les modèles Springate (1978), Altman et Levallee (1980), et
Legault et Véronneau (1986), ainsi que le modèle américain Ohlson (1980).
Lorsque la cote Z de son client est faible, M. Etter demande à celui-ci de présenter une
note sur l’incertitude relative à la continuité de l’exploitation. « Je prends cette
question très au sérieux. Cela fait partie du rôle du vérificateur. Il nous incombe de
nous assurer que l’entreprise est viable... Si j’estime qu’une entreprise se dirige droit
vers la faillite, je dois en faire état. Si l’entreprise ne présente pas l’information par
voie de note, je dois le mentionner dans mon rapport de vérification. »
Les modèles de prévision des faillites peuvent aider les vérificateurs à évaluer
l’hypothèse de la continuité de l’exploitation car ils leur fournissent les munitions
nécessaires pour discuter des problèmes avec leurs clients et recommander des
modifications aux états financiers. Ils peuvent également servir de défense en droit.
Les modèles de prévision peuvent toutefois donner lieu à deux types d’erreurs : des
erreurs de type un (une entreprise en difficulté est classée à tort comme une
entreprise saine) et des erreurs de type deux (une entreprise saine est classée comme
une entreprise en difficulté). Dans le premier cas, expliquent Boritz et Sun, il se peut
que la direction ne soit pas consciente de la gravité de la situation, que les
investisseurs ne soient pas suffisamment prévenus de la faillite imminente et que les
vérificateurs ternissent leur réputation ou s’exposent à des litiges. En revanche, une
erreur de type deux peut devenir une sorte de « prophétie qui s’exauce », c’est-à-dire
que la prévision peut entraîner la faillite d’une entreprise saine. Pour éviter les erreurs
de type deux, il est possible que les vérificateurs aient à engager des frais d’enquête
élevés.
« Au Canada, la profession semble estimer que les erreurs de type deux sont plus
coûteuses que les erreurs de type un », souligne Stephen Spector, FCGA, qui enseigne
la comptabilité à l’Université Simon Fraser (Colombie-Britannique). « Si le vérificateur
affirme publiquement avoir des doutes quant à la continuité de l’exploitation, les
investisseurs décamperont et ce sera le début d’un cercle vicieux. » Selon M. Spector,
le vérificateur devrait plutôt expliquer le problème à la direction et s’assurer que celle-
ci prendra des mesures correctives ou fournira les informations nécessaires.
présence de risques, explique M. Boritz. En outre, les normes canadiennes diffèrent des
normes américaines et internationales. Selon le chapitre 5510 du Manuel de l’ICCA, si la
société présente adéquatement les informations sur l’incertitude liée à la continuité de
l’exploitation dans les notes complémentaires, le vérificateur ne peut mentionner cette
incertitude dans son rapport. Cette position va à l’encontre du SAS 59, qui exige que les
vérificateurs américains ajoutent dans leur rapport un paragraphe énonçant leurs
conclusions quant à la continuité de l’exploitation.
M. Spector explique que, lorsque le CNC s’est penché sur la question à la fin des
années 1990, il a décidé de ne pas formuler d’exigences, en raison de la responsabilité
à laquelle les vérificateurs s’exposaient en mentionnant l’incertitude relative à la
continuité de l’exploitation. Le raisonnement était le suivant : si une société présente
toute l’information pertinente sur la continuité de l’exploitation dans les notes, alors le
vérificateur s’est acquitté de sa responsabilité car les notes font état de la situation
financière de la société. « Les états financiers sont réputés donner une image fidèle et
être conformes aux PCGR », précise M. Spector.
Cette situation est appelée à changer. Devant les études attestant de l’insuffisance de
l’information fournie aux investisseurs sur les incertitudes liées à la continuité de
l’exploitation, le CNVC a décidé d’élaborer des recommandations sur la responsabilité
du vérificateur dans le cadre de l’évaluation de la capacité d’une entreprise de
poursuivre son exploitation. Ces recommandations fourniront aux vérificateurs des
indications de base sur les mesures qu’ils doivent adopter et sur l’information qu’ils
doivent présenter dans leur rapport. Elles permettront en outre d’harmoniser les
normes canadiennes avec les normes américaines et internationales (voir l’encadré
« Une norme canadienne »).
Parallèlement, le CNC élabore des indications plus claires sur les responsabilités de la
direction quant à la continuité de l’exploitation. Le CNC révisera le chapitre 1000,
« Fondements conceptuels des états financiers », en s’inspirant de l’IAS 1, Financial
Statement Presentation. « Avant que le CNVC puisse rédiger des directives sur la
vérification de l’hypothèse de la continuité de l’exploitation, il fallait d’abord définir
Un problème courant
Les constatations de Boritz et Sun, tout comme les résultats d’études américaines et
britanniques, laissent entrevoir des lacunes importantes au chapitre de l’information
sur la continuité de l’exploitation.
M. Etter se dit néanmoins surpris des résultats de l’étude. Il se serait attendu à ce que
le pourcentage des sociétés en difficulté qui ne présentent pas d’informations sur
l’incertitude relative à la continuité de l’exploitation s’établisse aux alentours de 10 %.
« La situation échappe parfois complètement au contrôle de la société », insiste-t-il, en
citant la dépendance économique envers une autre société, les désastres
environnementaux et les poursuites inattendues.
« Les informations fournies dans les notes afférentes aux états financiers d’un seul
exercice ne constituent pas un indice de faillite sûr », souligne M. Spector. Il ajoute
qu’il n’est pas étonnant que les modèles de prévision donnent des résultats plus précis
car ils reposent sur des analyses chronologiques ou autres faisant intervenir plusieurs
points de données.
Il est possible de mieux prévoir les risques avant la faillite, indique M. Boritz,
notamment en ayant davantage recours aux modèles de prévision. « Il est époustouflant
de voir avec quelle rapidité et quelle facilité ces modèles peuvent condenser les
données numériques contenues dans les états financiers pour produire un diagnostic
positif ou négatif. » Le vérificateur peut alors poser des questions, tout comme
l’analyste financier, et les investisseurs peuvent choisir leurs placements de façon plus
circonspecte.
Ce projet vise la publication d’une nouvelle norme qui intégrerait les principes et
procédés fondamentaux contenus dans la norme ISA 570, Going Concern, de
l’International Auditing and Assurance Standards Board, et dans le SAS 59, The Auditor’s
Consideration of an Entity’s Ability to Continue as a Going Concern, de l’American
Institute of Certified Public Accountants.
Bien que les normes internationales et américaines contiennent des indications précises
sur les informations à fournir sur la continuité de l’exploitation, elles divergent quant à
la période future sur laquelle le vérificateur fait porter son appréciation. Le CNVC
tiendra compte des incidences juridiques et des attentes des utilisateurs des états
financiers pour déterminer la durée appropriée de la période future couverte par
l’appréciation du vérificateur au Canada.
L’Information sectorielle
Par
Nadi Chlala
INTRODUCTION
LE PROBLÈME FONDAMENTAL
1-Les états financiers d’une entreprise sont généralement établis sur une base
consolidée, c’est-à-dire regroupant les données financières pertinentes à toutes les
activités variées de l’entreprise. Bien qu’investisseurs et créanciers reconnaissent
l’importance de ces données regroupés pour rendre compte de la performance
d’ensemble de l’entreprise, ils soulignent également l’utilité de décomposer cette
information en vue d’une analyse plus détaillée des opérations. L’évaluation de la
rentabilité et du degré de risque d’une entreprise particulière constitue un facteur
déterminant dans les décisions d’investissement et de prêt. Or, dans le cas d’une
entreprise aux activités diversifiées, il est impossible d’effectuer une telle évaluation
sans détenir de l’information sur ses différents secteurs d’activité. Bien qu’il y ait
plusieurs possibilités d’envisager la composition de l’information sectorielle, les
présentations généralement suggérées sont surtout celles portant sur la gamme des
biens et des services, sur les secteurs géographiques et sur les principaux clients.
2-. Bien que le paragraphe précédent fournisse un aperçu général des avantages de
l’information sectorielle, il existe des arguments contre la publication de ce type de
renseignements. Voici ces principaux arguments :
pied par le Financial Accounting Standards Board, et portant sur les états
financiers périodiques.
5-. Ainsi que nous l’avons déjà indiqué, l’objectif des normes contenues dans le
chapitre 1700 du Manuel de l’I.C.C.A. est d’aider les utilisateurs à analyser et à
comprendre les états financiers de l’entreprise, en leur permettant une meilleure
évaluation de la performance passée et des perspectives d’avenir de cette dernière, au
moyen d’une analyse plus détaillée de ses activités. En d’autres mots, l’information
sectorielle vise à fournir les renseignements utiles à la comparaison d’un exercice à
l’autre des opérations d’une entreprise particulière. Cette étude plus détaillée des
tendances économiques fourn9it une aide précieuse dans l’établissement des prévisions
concernant le montant, le calendrier et le degré de risque liés aux flux monétaires
futurs anticipés.
6-. Il faut toutefois prendre garde de faire des comparaisons d’une entreprise à
l’autre pour des secteurs d’activité en apparence similaires. Pour rendre de telles
comparaisons valables, il faudrait établir des normes assez détaillées sur le procédé à
suivre par toutes les entreprises pour délimiter les secteurs. De même, il faudrait
préciser des méthodes uniformes à utiliser pour comptabiliser les cessions
intersectorielles et pour procéder à la répartition des frais communs à plusieurs
secteurs, en vue d’établir le bénéfice sectoriel. Au Canada et aux Etats-Unis, le
sentiment général est qu’il serait inapproprié de contraindre toutes les entreprises qui
publient une information sectorielle à se plier à de telles exigences. De plus, il est
pratiquement difficile, voire impossible d’établir des règles uniformes qui
conviendraient à toutes les entreprises. C’est le point de vue reflété dans les prises de
décisions des deux pays. On doit donc s’attendre à ce que les règles utilisées dans la
préparation de l’information sectorielle varient sensiblement d’une entreprise à une
autre. Par conséquent, la comparaison d’une manière significative de l’information
sectorielle d’une société à l’autre est rendue difficile, voir même trompeuse.
L’information sectorielle doit reposer sur les mêmes principes comptables que
ceux qui président à l’établissement des états financiers de l’entreprise. Les
opérations intersectorielles qui ont été éliminées des états financiers doivent
être rétablies dans l’information sectorielle.
8-. Selon le Comité des normes comptables, il est peu probable que, pour rendre
compte des opérations intersectorielles dans les états financiers, on puisse concevoir
des règles uniformes pour la publication de l’information sectorielle, notamment en ce
qui concerne les prix de cession interne. Par conséquent, on n’a pas cherché à
uniformiser les règles qui prévalent dans ce domaine. Le paragraphe 1700.14 en
témoigne :
9-. Nous avons déjà souligné, au paragraphe 7, que les principes comptables qui
régissent la présentation de l’information sectorielle sont, général, les mêmes que ceux
qu’on utilise pour la publication des états financiers. Toutefois l’information
sectorielle nécessite d’établir des données supplémentaires. Le chapitre 1700 du
Manuel de l’I.C.C.A. contient donc des définitions appropriées pour ces mesures
comptables additionnelles particulières à l’information sectorielle. La première de ces
mesures est celle du CHIFFRE D’AFFAIRES SECTORIEL, ou PRODUITS SECTORIELS. Elle
est définie au paragraphe 1700.10 de la façon suivante :
Normalement, les intérêts gagnés sur des avances ou des prêts consentis à d’autres
secteur ne sont pas inclus dans les produits sectoriels à moins que les activités du
secteur ne soient essentiellement des activités de financement. Les éléments suivants
sont exclus des produits sectoriels soit parce qu’ils ne concernent pas le secteur, soit
parce qu’il n’est pas toujours possible de les répartir entre les secteurs : produits
gagnés au niveau du siège social ou de la direction générale de l’entreprise et qui ne
proviennent pas de l’exploitation d’un secteur particulier, gains provenant de
participations comptabilisées à la valeur de consolidation, intérêts créditeurs et
dividendes provenant de titres ne faisant pas partie des éléments d’actif sectoriels,
gains extraordinaires. Les facturations intersectorielles relatives au coût d’installations
partagées par plusieurs secteurs ou à d’autres frais engagés conjointement ne
constituent pas des ventes ou des cessions intersectorielles aux fins de la présente
définition ; elles représentent plutôt une récupération de frais dont il faut tenir compte
dans les charges sectorielles.
12- La seconde mesure comptable particulière est celles des CHARGES SECTORIELLES.
Etablir une définition appropriée de cette notion de charges sectorielles constitue le
problème le plus difficile à résoudre de la publication d’information sectorielle. La
question fondamentale est d’établir si l’information présentée doit être fondée sur les
14-. Compte tenu des définitions précédentes, le bénéfice (ou la perte) d’exploitation
sectoriel (le) consiste simplement en la différence entre les produits sectoriels et les
charges sectorielles. Certaines entreprises peuvent toutefois vouloir fournir d’autres
mesures de rentabilité. Le paragraphe 1700.35 note à ce sujet :
15-. Enfin, une dernière définition est donnée pour les ELEMENTS D’ACTIF SECTORIELS.
Voici cette définition, contenue également au paragraphe 1700.10 :
17-. On peut se demander quelles sont les entreprises qui devraient être assujetties à
la publication de l’information sectorielle comme partie intégrante de leurs états
financiers. Les paragraphes 1700.10 et 1700.08 répondent à cette question de la
manière suivante :
Les états financiers des entreprises dont les titres se négocient sur un marché
public ou qui sont assujetties au dépôt annuel de leurs états financiers auprès
d’une commission des valeurs mobilières doivent fournir des renseignements
sectoriels établis premièrement par secteurs d’activité et deuxièmement par
secteurs géographiques. De plus, ces entreprises doivent indiquer le montant de
leurs ventes à l’exportation.
20-. Cette définition demande que l’on fasse preuve de beaucoup de discernement dans
le groupement des biens ou des services en secteurs d’activité. En raison de la grande
diversité des activités qu’exercent les entreprises, le paragraphe 1700.17 ne fait
qu’énoncer des procèdes généraux pour aider celles-ci à choisir et définir leurs secteurs
d’activité propres :
Lorsque l’on cherche à déterminer si des biens et des services ont quelque chose en
commun et s’ils doivent être groupés en conséquence dans un même secteur
d’activité, il faut considérer un certain nombre de facteurs, dont les suivants :
22-. L’usage auquel on destine le produit d’un secteur d’activité donné exerce une
certaine influence sur son classement. C’est ce que reflète le paragraphe 1700.20 du
Manuel de l’I.C.C.A. :
23-. Les paragraphes 1700.18 et 1700.19 font ressortir le fait que les grandes catégories
d’activité comme la fabrication, le commerce de gros, le commerce de détail ou les
biens de consommation ne sont pas, en elles-mêmes, des indications valables des
secteurs d’activités tels que définis dans le Manuel de l’I.C.C.A. De même le fait
qu’une entreprise s’engage dans plusieurs activités appartenant a des domaines
connexes ou ayant des produits voisins ou complémentaires ne démontre en rien
l’existence de secteurs d’activité distincts.
24-. Le paragraphe 1700.22 indique que le Comité des normes comptables souhaiterait
que le groupement en secteurs d’activité d’une entreprise multinationale soit fait à
l’échelle mondiale. Toutefois, celui-ci reconnaît que cela soit souvent irréalisable en
pratique. Lorsque tel est le cas, la partie des opérations à l’étranger, pour lesquelles il
est impossible de ventiler l’information par secteurs d’activités, doit être regroupée
dans un secteur d’activité distinct.
Les principaux facteurs dont il faut tenir compte lorsqu’on cherche à déterminer si
un secteur d’activité est isolable pour fins de présentation de l’information
sectorielle sont les suivants : l’importance du chiffre d’affaires sectoriel, le
bénéfice (ou la perte) d’exploitation sectoriel (le) et les ressources engagées dans
l’exploitation du secteur. Le Comité considère qu’un secteur d’activité est
important s’il satisfait a l’une des conditions suivantes :
a) Les produits sectoriels comptent pour 10 pour cent ou plus des produits réalisés
par l’ensemble des secteurs d’activité (y compris les ventes et les cessions
intersectorielles) ;
ii) La perte d’exploitation totale de tous les secteurs d’activité qui ont
subi une perte d’exploitation
c) Les éléments d’actif sectoriels comptent pour 10 pour cent ou plus du total des
éléments d’actif sectoriels afférents aux divers secteurs d’activité.
26-. EXEMPLE – La complexité apparente de la seconde condition, soit celle fondée sur
le bénéfice d’exploitation sectoriel, justifie un exemple simple. Supposons qu’une
entreprise ait défini huit secteurs d’activité, dont les bénéfices ou les pertes
d’exploitation respectifs sont les suivants :
A 63 000 $
B 210 000 $
C 50 000 $
E ( 239 000 $)
F (64 000 $)
G (45 000 $)
27-. La perte d’exploitation tous les secteurs d’activité qui ont subi une perte
d’exploitation, est supérieure au bénéfice d’exploitation total de tous les secteurs
d’activité qui ont réalisé un bénéfice d’exploitation. En vertu du paragraphe 1700.23,
un secteur d’activité est considéré isolable si la perte ou son bénéfice d’exploitation
excède 65 000 $ ou 10 pour cent de 650 000 $. Ceci signifie donc que les secteurs B,D,E
et H sont considérés comme des secteurs d’activités isolables, en vertu du paragraphe
1700.23 (b). Les secteurs A,C,F, et G ne sont pas assez importants pour mériter d’être
isolés en vertu du paragraphe 1700.23 (b). Toutefois, ces derniers secteurs pourraient
être classés isolables en vertu de l’une ou l’autre des deux autres conditions énoncées
au paragraphe 1700.23 (a) ou (c).
30-. L’objectif des directives précédentes sur le choix et la définition des secteurs
d’activité isolables est de faire en sorte que la majeure partie de l’ensemble des
activités de l’entreprise soit décomposée en secteurs faisant l ‘objet d’une
présentation distincte dans l’information sectorielle. Cet objectif est reflété dans les
paragraphes 1700.27 et 1700.28 du Manuel de l’I.C.C.A. :
Tout secteur d’activité juge important pour l’entreprise doit être considéré
comme isolable pour fins de présentation de l’information sectorielle.
31-. Comme nous l’avons déjà mentionné, ces normes de présentation de l’information
sectorielle s’appliquent à toutes les entreprises dont les titres se négocient sur le
marché public, et à celles qui sont assujetties au dépôt annuel de leurs états financiers
auprès d’une commission des valeur mobilières (voir le paragraphe 17). Seules les
entreprises dont pratiquement toutes les opérations sont concentrées dans un seul
secteur d’activité sont dispensées de ces normes. Cette situation est prévue au
paragraphe 1700.30, comme suit :
On doit donner une description générale des biens et des services dont chaque
secteur d’activité isolable tire son chiffre d’affaires. Pour chaque secteur d’activité
isolable, et pour tous les autres secteurs d’activité de l’entreprise considérés
globalement, on doit indiquer :
33-. Dans le cas des entreprises qui ne comportent qu ’un seul type de secteur
d’activité, le paragraphe 1700.34 exige la présentation suivante :
Du fait de la diversité des méthodes d’exploitation en usage dans les pays étrangers
et de la diversité des conditions économiques que l’on trouve dans ces pays, il est
impossible en pratique de prescrire une méthode précise qui permettrait de
regrouper en zones géographiques les pays étrangers ou l’entreprise est implantée
en tenant compte de toutes ces différences. Il incombe à la direction de
35-. Ces principes directeurs laissent une large place à l’exercice du jugement dans la
définition des secteurs géographiques étrangers. Une entreprise pourrait, par exemple,
opter pour un groupement fondé sur le lieu géographique (l’Europe, l’Afrique et le
reste du monde), alors qu’une autre pourrait choisir un groupement fondé sur les
conditions économiques qui prévalent (les pays développés et les pays en voie de
développement). Il existe, bien sûr, une foule d’autres possibilités que celles-ci.
Toutefois, étant donne la nature même du problème, cette diversité de choix possibles
est pratiquement inévitable et démontre encore une fois que la comparaison de
l’information sectorielle d’une entreprise à l’autre n’est pas souhaitable.
a) les produits qu’il tire des ventes à des tiers comptent pour 10 pour cent ou plus
de l’actif total des produits déclarés dans l’état des résultats de l’entreprise
b) son actif sectoriel compte pour 10 pour cent ou plus de l’actif total figurant au
bilan de l’entreprise.
37-. Notons que, contrairement à la situation qui prévaut pour la définition des
secteurs d’activité isolables, la règle du 10 pour cent des produits exclut les ventes ou
les cession intersectorielles dans le cas des secteurs géographiques étrangers. Cette
différence est justifiée au paragraphe 1700.40, comme suit :
Les composantes des produits finis d’une multinationale peuvent être fabriquées
dans diverses zones géographiques. Il est possible, dans certains cas, que les
ventes ou les cessions intra-entreprises de telles composantes représentent une
partie considérable des produits réalisés par un secteur donne. Cependant,
comme ces opérations dépendent d’autres secteurs d’exploitation de
l’entreprise, on ne tient normalement pas compte du chiffre d’affaires qu’elles
produisent lorsqu’on cherche à déterminer l’importance d’un secteur
géographique étranger.
39-.Ces principes soulignent le fait que, dans le groupement sur la base des diverses
activités, les composantes intégrées verticalement ne sont pas présentées en tant que
secteurs distincts, mais le seraient si ces composantes étaient localisées dans
différentes zones géographiques.
39-. Il existe une autre différence entre les directives données pour la définition des
secteurs d’activité isolables et les règles similaires servant à définir les secteurs
géographiques étrangers isolables : c’est l’absence du critère de rendement. Selon le
paragraphe 1700.41, le rendement n’est pas un critère généralement admis pour la
définition des secteurs géographiques étrangers isolables. Voici comment le Comité
justifie ce point de vue :
40-. Lorsqu’un secteur géographique étranger est défini comme isolable, le paragraphe
1700.43 présente la norme à satisfaire à cet égard, comme suit :
Tout secteur géographique étranger jugé important pour l’entreprise doit être
considéré comme un secteur géographique isolable aux fins de présentation de
l’information sectorielle.
41-. Une fois les secteurs géographiques étrangers établis, les renseignements suivants
doivent être fournis dans les états financiers, en vertu du paragraphe 1700.44 du
Manuel de l’I.C.C.A. :
chiffre d’affaires, le bénéfice net et le total de l’actif figurant dans les états financiers
de l’entreprise.
AUTRES NORMES
Lorsque les ventes de biens et les prestations de services à des tiers situés à
l’étranger effectuées par les établissements mais nationaux de l’entreprise sont
importantes, on doit en indiquer le montant total.
43-. On souligne également qu’il peut être souhaitable de fournir une ventilation des
ventes à l’exportation par zones géographiques.
46-. AUTRES NORMES GENERALES – Le chapitre 1700 permet une grande flexibilité dans
la présentation des renseignements sectoriels. Cette information peut être consignée
dans le corps des états financiers, par voie de note afférente aux états financiers, ou
dans un tableau connexe auquel renvoient les états financiers. Lorsque sont présentés
des états comparatifs, les paragraphes 1700.51 et 1700.52 dictent les règles suivantes :
Chaque fois que l’on modifie la composition des secteurs d’activité ou des
secteurs géographiques étrangers, on doit redresser les renseignements ayant
trait aux exercices précédents donnés pour fin de comparaison à l’égard des
divers secteurs de l’entreprise.
47-. Les autres normes générales comprennent également une recommandation relative
à la publication des conventions comptables. Les principes comptables que l’entreprise
a adopté pour un secteur d’activité ou un secteur géographique étranger particulier
peuvent ne pas avoir été jugés important pour l’ensemble de l’entreprise, et ne sont
donc pas décrits dans l’énoncé des conventions comptables de l’entreprise. Toutefois
dans les cas où l’on juge qu’il pourrait être utile au lecteur de connaître une
convention comptable particulièrement significative pour un secteur isolable, le
paragraphe 1700.49 exige d’en informer le lecteur :
48-. L’édition de 1985 de Financial Reporting in Canada, publié par l’Institut canadien
des Comptables Agrées, relève qu’en 1984, parmi les 325 rapports annuels de sociétés
canadiennes composant l’étude, 205 contenaient une information sectorielle par
secteurs d’activité, par secteurs géographiques ou les deux à la fois. Par contre, 80
autres sociétés ont déclaré exercer leur activité essentiellement dans un seul secteur
d’activité dominant. Les 40 sociétés restantes n’ont tout simplement fourni aucune
information sectorielle, ni par secteurs d’activité, ni par secteurs géographiques.
L’information sectorielle publiée en 1984 par les 205 sociétés relevées dans l’étude de
l’I.C..C.A. présentait le plus fréquemment des renseignements à la fois par secteurs
d’activité et par secteurs geographiques, soit chez 78 de ces sociétés. Suivent les 66
rapports annuels contenant des renseignements sectoriels par secteurs d’activité
seulement. Enfin 61 sociétés présentaient l’information sectorielle uniquement par
secteurs géographiques.
49-. Le nombre de secteurs d’activité que présentent les sociétés composant l’étude
varie de deux à huit. Quant au nombre de secteurs géographiques présentes, il varie
entre deux et six. Dans les deux cas, la plupart des sociétés présentent quatre secteurs
ou moins, les autres faisant exceptions. Notons également que 103 sociétés ont publie
leur chiffre de ventes à l’exportation.
par
John Yu
Plus que jamais, les comptables doivent se tenir au fait des progrès technologiques et
de leurs innombrables répercussions.
1) Connaissances informatiques
2) Intégrité de l'information
3) Confidentialité et sécurité
profilage sur la vie privée, tant en leur qualité de consommateurs que d'intervenants
dans l'élaboration de processus administratifs.
4) Application stratégique des technologies Internet
Les technologies Internet n'ont pas été reléguées à l'histoire après l'effondrement des
sociétés point com. Au contraire, elles demeurent un outil stratégique important pour
les entités de toutes tailles. De nombreux organismes, notamment dans le secteur
public, continuent à accroître leur efficience, à améliorer leur efficacité et à
rationaliser leur exploitation avec des stratégies de commerce électronique qui
intègrent les technologies Internet aux processus opérationnels de base. Nombreuses
sont les grandes sociétés qui intègrent les technologies Internet à la gestion de leur
chaîne logistique et de leurs relations avec la clientèle, ainsi qu'à leur système de
planification d'entreprise.
Les comptables doivent aider les entités à mettre en œuvre les technologies Internet
de façon stratégique en cherchant des applications qui conviennent à ces technologies
et en jouant un rôle de premier plan dans leur utilisation.
5) Fiscalité Internet
Faut-il imposer les transactions conclues dans Internet? Comment s'y prendre? Les
législateurs du monde entier n'ont toujours pas trouvé réponse à ces questions. Certains
pays, notamment les États-Unis, ont opté pour un moratoire sur l'imposition des
services Internet et des transactions électroniques, mais ce n'est là qu'une mesure
temporaire. Les comptables doivent intervenir dans le débat mondial pour veiller à ce
que les mesures fiscales qu'adopteront finalement les pouvoirs publics soient fondées
sur des principes d'intégrité et d'équité. Plus que jamais, les comptables du monde
entier doivent se concerter pour faire en sorte que toute la question de la fiscalité
Internet soit abordée de manière cohérente. (Pour plus de renseignements, voir « Tout
est permis » dans le numéro de mars 2000 de CGA Magazine.)
6) Droit Internet
7) XBRL
CGA Magazine s'est déjà penché sur les répercussions du langage XBRL (Extensible
Business Reporting Language) pour la profession comptable et pour les CGA (voir
« Double clic » dans le numéro de septembre-octobre 2001). XBRL est une spécification
ouverte qui se sert de marqueurs XML pour décrire les états financiers des sociétés
publiques et privées. Ce langage se prête particulièrement bien à la publication d'états
financiers dans Internet. À l'heure actuelle, un consortium international regroupant plus
de 120 organismes, dont CGA-Canada, travaille à l'élaboration des normes XBRL.
Depuis l'affaire Enron, XBRL revêt une importance particulière pour la profession
comptable ainsi que pour le secteur des placements. En effet, bien que ce langage ne
puisse empêcher la manipulation par la direction de l'information financière que
Les technologies sans fil comme Bluetooth, WiFi et les téléphones cellulaires 3G
annoncent l'ère du mobile et du sans fil (voir la chronique « Double clic » du présent
numéro). Au Japon et en Suède, on s'intéresse même au commerce mobile, lequel met
à profit les technologies d'Internet et du téléphone cellulaire.
La société japonaise DoCoMo est l'un des chefs de file du commerce mobile. Les
utilisateurs de DoCoMo peuvent non seulement naviguer dans Internet grâce à leur
téléphone format poche, mais ils peuvent échanger de courts messages et payer
certaines marchandises achetées dans des distributeurs automatiques. Les technologies
mobiles et sans fil posent toutefois des problèmes de taille aux comptables. L'intégrité
des transactions, les pistes de vérification, la sécurité, la confidentialité et les mesures
antisinistres sont autant de questions qui n'ont pas encore été étudiées à fond. Les
vérificateurs et les comptables qui participent à l'élaboration des systèmes et à l'achat
des produits informatiques de leur entreprise doivent intervenir dans la conception et
la vérification de ces systèmes.
Bien que ces dix priorités doivent toutes être abordées individuellement, elles sont
souvent indissociables. Par exemple, les technologies mobiles et sans fil sont liées aux
questions de confidentialité et de sécurité. À vrai dire, on ne saurait concevoir et
mettre en œuvre des technologies mobiles et sans fil sans avoir d'abord réglé les
questions de confidentialité et de sécurité. Et comment dissocier l'utilisation
stratégique d'Internet, de la fiscalité et du droit Internet? De nombreux organismes
n'utiliseraient jamais Internet de façon stratégique à moins de savoir à quoi s'en tenir
en matière de droit et de fiscalité. De même, XBRL ne sera jamais efficace si l'intégrité
de l'information ne peut être garantie. Et les comptables ne peuvent encadrer
efficacement leur personnel informatique s'ils n'ont pas une connaissance suffisante
des TI.
De toute évidence, les comptables du monde entier doivent continuer à approfondir
leur connaissance des TI pour conserver la place de choix qu'ils occupent dans le monde
des affaires.
[ Haut de la page ]
John W. Yu, M.Sc., CDP, FCGA, travaille depuis 1970 dans le secteur des TI, où il a
occupé divers postes à titre de gestionnaire et de conseiller. M. Yu est vice-président,
Technologies de l'information, à CGA-Canada.
LE SAVOIR-ETRE
Par
Le monde des affaires exige aujourd'hui beaucoup plus que de solides compétences
techniques; pour réussir, les professionnels doivent également parfaire leurs aptitudes
en relations humaines.
Les CGA ont les connaissances techniques et spécialisées voulues pour faire face aux
nombreux enjeux propres à la profession. Et les exigences en matière de formation
professionnelle continue garantissent que les CGA de demain disposeront des
compétences nécessaires pour affronter les difficultés de l'avenir, du moins en ce qui a
trait aux aspects techniques de la comptabilité. Je me suis toutefois demandé, en tant
que CGA, si nous possédions les compétences appropriées en matière de savoir-être.
Dans son livre publié en 1995, L'intelligence émotionnelle : Comment transformer ses
émotions en intelligence, le psychologue américain Daniel Goleman a créé l'expression
« intelligence émotionnelle » pour décrire cet ensemble de compétences. Selon
M. Goleman, l'intelligence émotionnelle, ou QE, se compose de compétences acquises.
Ainsi, contrairement au QI, qui est notre potentiel intellectuel inné, notre intelligence
émotionnelle peut être exploitée et enrichie.
Matt est compétent mais ses notes ne sont pas aussi remarquables que celles de Penn.
Cependant, ses compétences interpersonnelles sont très efficaces. Il établit et
entretient de nombreuses relations, est optimiste, a une grande estime de lui-même,
est prêt à saisir les occasions, sait régler des différends et s'adapte aux nouvelles
situations. Bref, tous ceux qui ont travaillé avec lui l'apprécient, ce qui est manifeste
au cours des entrevues. Matt reçoit sept offres d'emploi après huit entrevues, et
connaît un grand succès professionnel. Penn perd son premier emploi au bout de
deux ans.
On trouve des gens comme Penn et Matt dans toutes les entreprises. Penn et Matt se
distinguent l'un de l'autre par leur degré d'intelligence émotionnelle, ou de savoir-être,
lequel est élevé dans le cas de Matt et restreint dans celui de Penn.
Compétences recherchées
• pouvoir cerner les éléments positifs de toutes les situations, même les plus
difficiles.
• reconnaître les besoins et les attentes des clients, y satisfaire et les dépasser;
• stimuler les habiletés des autres par des commentaires et des conseils;
Ce ne sont pas là des qualités que nous recherchons généralement chez des experts
techniques. Ces compétences humaines sont-elles réellement nécessaires dans le
quotidien des experts-comptables? En un mot : oui. En réalité, elles jouent un rôle
déterminant dans la réussite des CGA et de tous les professionnels canadiens.
Raisonnement
Une étude menée en 2001 par RHI Consulting auprès de plus de 1 400 directeurs
financiers confirme ces résultats. Ces directeurs financiers prévoient qu'en 2006, un
responsable de mission consacrera 37 % de son temps à des questions et à des
Leçons à tirer
Les CGA ont le potentiel intellectuel pour réussir au XXIe siècle, mais ont-ils également
les compétences humaines nécessaires? Ils en ont certainement les moyens : leur
décision de les parfaire leur appartient totalement.
Par
85
Maurice Landry, Ph.D., C.A., est professeur agrégé à la Faculté des Sciences de l'administration de !'Université Laval.
Son vocabulaire est limité, au point d'être parfois incapable d'exprimer certaines
réalités économiques importantes.
Peut-on dès lors s'étonner des critiques plus ou moins sévères dont la comptabilité fait
l'objet? I1 n'y a qu'à parcourir les revues et journaux spécialisés du monde des affaires
pour constater le doute largement répandu dans le public concernant la validité des
états financiers. Le commentaire suivant en est un exemple typique: « …le bilan est
devenu un état pratiquement sans signification en tant qu'indicateur des ressources et
des obligations réelles d'une compagnie. De plus, l'état des revenus et dépenses est
distorsionné davantage par le fait que les compagnies peuvent utiliser une myriade de
méthodes comptables alternatives."86
86
Business Week, 23 décembre 1972.
"Un simple précédent, peut-être accompagné par une menace de l'entreprise de confier
à d'autres son travail de- vérification, peut suffire à transformer un traitement
87
comptable douteux en une pratique généralement reconnue."
Bref, il semble que les réactions du public convergent dans une même direction:
surprise devant le peu de crédibilité qui peut être accordé aux états financiers et
devant la capacité d'accommodement des comptables dans leur rôle de vérificateurs.
D'autre part, cette surprise face aux états financiers semble d'autant plus grande que le
public avait toujours cru que l'élaboration des états financiers devait se faire
conformément à des principes comptables professionnellement établis. N’est-il pas dit
dans le rapport du vérificateur que "les états financiers représentent équitablement la
situation financière en conformité avec les principes comptables généralement ac-
ceptés"?. De là à penser que parce que les états financiers étaient rédigés selon ces
principes comptables généralement acceptés ils représentaient équitablement la
situation financière de l'entreprise, il n'y avait qu'un pas: le public l'avait franchi.
L'urgence d'avoir une réponse satisfaisante à cette interrogation nous apparaît évidente
pour plusieurs raisons:
87 Forbes, 15 mai 1967, tel que reproduit dans: Accounting: Socially Responsible and Socially Relevant, Richard G. J. Vamgermeersch, New-York,
Les PCGR se sont traditionnellement développés au rythme des situations plus ou moins
urgentes auxquelles avait à faire face la profession comptable. Cette dernière a
toujours été plus empressée de trouver des solutions satisfaisantes à des problèmes
précis d'actualité que de vérifier le degré d'intégration de ces solutions à l'ensemble de
la théorie comptable. Là réside à notre avis une des causes importantes de la faiblesse
des PCGR. En effet, cette approche comporte en elle-même plusieurs difficultés
susceptibles de freiner le développement de principes comptables féconds et robustes.
pré-établi, dicté par des théoriciens à partir d'un schéma déductif rigoureux. Ils ont
toujours préféré utiliser une approche dite "common law" 88 au développement de leur
discipline et laisser les situations qui se présentaient, ainsi que les solutions qui y
étaient apportées, forger la structure théorique de leur discipline. Dans cette optique,
le rôle des techniciens de la comptabilité devait se limiter dans une large mesure à un
travail de codification des coutumes comptables et à un effort de rationalisation de ces
coutumes..
Cependant, ce mode de PCGR faisait courir le risque que l’ensemble des standards,
règles et procédures qui en résulteraient viendraient à se contredire partiellement.
Bien plus, en admettant qu’on puisse éviter l’écueil de la contradiction et, par
conséquent de l'incohérence, rien ne garantissait qu'en suivant cette approche, la
codification des coutumes comptables puisse aboutir à un corps de doctrine
suffisamment complet et riche pour servir de guide à la résolution des problèmes
futurs. De fait, de ces deux écueils possibles inhérents à l'approche suivie, la
comptabilité n'a su en éviter aucun.
Les principes comptables ont aussi été lourdement handicapés par l'absence remarquée
d'explications satisfaisantes concernant certains concepts fondamentaux.. Si on
examine la codification des PCGR qu'a faite Paul Grady aux Etats-Unis ou la version
canadienne de ces mêmes principes par Skinner, on est frappé tout d'abord par l'effort
qui s'y est fait pour expliquer comment chaque poste des états financiers doit être
traité, ou bien comment les postes du bilan et de l'état des revenus et des dépenses
88
common law noun droit m coutumier88
La difficulté de codifier venait du fait qu'il fallait trouver réponse à plusieurs questions
avant que tout effort de codification puisse espérer avoir du succès. Par exemple, il
fallait déterminer à quel moment une coutume était suffisamment établie pour qu'on
puisse la considérer comme un PCGR. Les coutumes comptables devant constituer les
PCGR devaient-elles se restreindre à quelques concepts de base très généraux ou au
contraire s'étendre aux règles et procédures'? Comment pourrait-on s'assurer que toutes
les principales coutumes comptables avaient été recueillies? Des difficultés de ce genre
firent que ce n'est que très récemment que des tentatives de codification des PCGR ont
abouti. Cette absence de codification dans le passé n'a pas été sans soulever certaines
difficultés pour le moins embarrassantes pour la profession. Par exemple, Ie
gouvernement fédéral introduisit en 1947 un projet de loi dans lequel il était stipulé
que "le revenu pour une année d'imposition d’une entreprise ou une propriété devait
être déterminé selon les principes comptables généralement acceptés". La profession
comptable dut demander que l'expression "principes comptables généralement
reconnus" soit retirée du projet de loi parce qu'elle ne référait à aucune codification au
Canada. Heureusement, la situation a changé depuis dans ce domaine puisqu'une
référence aux PCGR a été inscrite récemment dans les directives des Commissions des
Valeurs Mobilières de quelques provinces.
La deuxième difficulté, soit celle de pondérer l'importance relative des divers groupes
influençant la coutume comptable, était encore plus importance car elle posait le
problème de l'autorité relative des divers groupes ayant un intérêt dans la
comptabilité. Traditionnellement, la profession comptable a laissé à la direction des
entreprises une voix très importante dans la détermination des coutumes comptables.
"... le management n'a pas pour objectif premier le développement d'un ensemble de
principes comptables sur lesquels il y aurait accord général. Le management voit les
"principes comptables" comme un aspect de l'environnement dans lequel il doit opérer.
89
Cette prépondérance concédée au management dans l'élaboration des PCGR explique aussi la timidité traditionnelle du Comité de
recherche de l'Institut. Par exemple, il est intéressant de voir comment ce comité concevait son rôle en ce qui concerne l'élaboration des
bulletins comptables il y a environ 20 ans : "II est inévitable, et à bien y réfléchir, il est éminemment désirable que !es bulletins dans cette
série contiennent peu qui soit nouveau aux membres do la profession. I1 serait déplorable que les bulletins contiennent de fait de telles
surprises, car ce que le Comité désire faire dans cette série de bulletins c'est d'énoncer ce qu'il croit être ces principes et ces procédures qui
sort généralement acceptés par les membres de la profession. La valeur des bulletins, s'ils sont généralement acceptés par les membres de
la profession, réside dans le fait que la profession elle-même et non pas quelqu'un d'autre détermine ce qui peut être considéré comme une
bonne pratique comptable <ru Canada." (7, pp. 284-235)
11 est intéressant de noter qu'il n'y a pas que des personnes venant du milieu
académique à partager ce point de vue. La Fédération des Analystes Financiers par
exemple, dans son mémoire soumis au Groupe d'étude de l'American Institute of
Certified Public Accountants sur les objectifs des états financiers, faisait remarquer que
le rôle du management implique plusieurs situations de conflit d'intérêt,
particulièrement dans le cas où le management a la responsabilité des rapports de la
compagnie, alors que sa propre performance est le sujet de ces rapports.
"II est difficile de définir d'une façon précise l'expression "généralement reconnus". On
en comprendra probablement plus facilement le sens en étudiant la manière dont la
pratique comptable devient généralement reconnue. La pratique comptable en
question devra avoir au moins une, et la plupart du temps, plusieurs des
caractéristiques suivantes:
o Etre en usage dans un nombre suffisant de cas, pourvu, bien entendu, que les
circonstances le justifient.
Peut-on s'étonner des libertés que certains ont pu prendre avec autant de latitude, en
ce qui concerne les états financiers? Il n'est pas étonnant non plus de voir des praticiens
réclamer la disparition de l'expression "en conformité avec les principes comptables
généralement reconnus" parce que selon eux::
2) On n'a pas su établir d'une façon suffisamment claire par qui ils devaient être
acceptés et le degré d'acceptation nécessaire.
3) Une présentation équitable des états financiers est incompatible avec un mode de
présentation prisonnier de règles détaillées et précises qui restreignent la pos-
sibilité pour le praticien d'exercer son jugement.
En résumé, nous venons de voir que les PCGR étaient déficients sous deux aspects
différents: l'aspect conceptuel et l'aspect pratique. Sous l'aspect conceptuel, il semble
y avoir un manque évident d'une approche plus systématique pour guider l'élaboration
des PCGR. Du point de vue pratique, l'absence d'une méthode d'élaboration des PCGR
qui ne prête pas le flanc aux conflits d'intérêts se fait sentir.
Les commentaires qui précèdent ont nettement fait ressortir les limitations d'une
approche "common law" trop strictement appliquée pour le développement des
principes comptables. Par conséquent, on ne s'étonne pas de constater aussi que la
structure théorique de la comptabilité, si étroitement liée aux PCGR, soit elle aussi
déficiente au point de ne pouvoir toujours servir de guide sûr à la pratique.
o S'il advenait qu'un accord s'établisse autour de la nécessité pour les états financiers
de présenter de l'information non seulement historique mais de faire voir davantage
de l'information interprétative et prévisionnelle, ce choix nécessiterait au niveau de
la théorie comptable une modification profonde de l'interprétation actuelle du
concept "d'objectivité".
o Le rapport Trueblood a proposé qu'un des objectifs des états financiers soit de servir
prioritairement ceux qui, à cause de leur situation particulière, n'ont pas d'autres
sources d'information que les états financiers pour juger des activités économiques
d'une entreprise. L'acceptation de cet objectif pour la profession aboutirait tôt ou
tard à une interprétation modifiée du concept de "divulgation".
Une bonne partie de la faiblesse actuelle des PCGR provient d'objectifs non clairement
établis ou parfois contradictoires pour les états financiers. A notre avis, aussi longtemps
qu'un consensus plus grand n'aura pas été atteint concernant les objectifs des états
financiers, nous serons condamnés à tourner en rond en ce qui regarde le
développement des PCGR. On a vu dans le passé des recommandations cohérentes et
pratiques n'être pas retenues parce qu'elles présumaient des objectifs pour les états
financiers qui n'étaient pas alors acceptés par la profession.
Il nous apparaît évident que si les difficultés d'ordre théorique que nous venons de
discuter étaient amoindries, il en résulterait un ensemble de PCGR dont la robustesse
emporterait une plus grande adhésion, diminuant d'autant le problème de l'autorité
dans la détermination des principes comptables. D'autre part, un effort certain a été
fait pour solutionner le problème de l'autorité lorsqu'en 1973 l'Institut des comptables
agréés scinda le Comité de recherches en comptabilité et vérification, en un Comité de
recherche comptable et un Comité des normes de vérification et accepta que des
représentants d'autres organismes fassent partie du Comité de recherche comptable.
Il est certes trop tôt pour juger des résultats de ce changement. Cependant, en n'allant
pas au moins aussi loin qu'on le fit aux USA alors que le "Financial Accounting Standards
Board" est devenu indépendant de l'A.I.C.P.A., nous estimons que l'Institut a perdu une
belle occasion de prendre toutes les mesures appropriées pour donner au Comité de
recherche comptable une indépendance telle que personne ne puisse plus le
soupçonner d'être indûment influencé par des groupes particuliers.
Le rôle de la recherche
"Une des façons par lesquelles toute profession responsable répond au changement est
en s'assurant (sic) que les principes fondamentaux ainsi que les frontières de son bagage
de connaissances soient tournés vers les besoins de ses membres et ceux qu'elle sert. La
recherche doit tendre à s'assurer que la profession dirige ses nouvelles idées à
l'intérieur d'un cheminement de développement ordonné. L'histoire nous donne (sic) des
exemples de rejets causés par un développement désordonné et, (signe d'avertissement
à nous tous) retrace les souvenirs de disparition d'espèces et de civilisations qui n'ont
pas évolué avec leur environnement." (6, p. 50) (italiques ajoutées).
Quant à la recherche présente, il est difficile de ne pas conclure qu'elle soit encore
largement ballottée et orientée au gré des problèmes immédiats qui se présentent. De
par les thèmes qui y sont étudiés, nous ne pouvons déceler chez elle cette volonté de
vision globale de la comptabilité nécessaire à quiconque prétend orienter un
développement ordonné. Un ensemble de principes comptables cohérents, complets et
robustes est largement tributaire d'un effort de recherche approprié. Cet effort de
recherche existe; il importe de le mieux orienter.
L’Economie du savoir
par
Jean-Michel Charpin
Le sens donné à la connaissance dans les sciences économiques varie selon les travaux.
Il convient donc de présenter les différentes approches de la connaissance et la
définition retenue par le groupe de travail. Celles-ci peuvent être caractérisées à partir
des réponses apportées à trois questions :
- De quels savoirs parle-t-on ?
- Distingue-t-on connaissance et information ?
- Limite-t-on la connaissance aux résultats des activités délibérées de production de
savoir ?
Les études existantes, sur lesquelles le groupe de travail s’est appuyé, donnent une
place prépondérante aux savoirs technologiques. Pourtant, tout au long de ses travaux
le groupe a tenu à ne pas limiter son intérêt à un type particulier de savoir et à traiter
toutes les connaissances et les compétences mobilisées dans les activités économiques.
Kenneth Arrow, prix Nobel d’économie en 1972, est à l’origine d’une première
conception économique de la connaissance, qui conduit à l’assimiler à la notion
d’information. Les savoirs sont produits par un secteur d’activité spécialisé, à partir
d’une fonction de production qui combine du travail qualifié et du capital. L’output de
ce secteur consiste en information échangée sur un marché.
Cette conception insiste sur trois propriétés qui font de la connaissance un bien
économique particulier, tant dans l’usage que dans la production, en comparaison des
biens tangibles.
celui qui entretient le verger voisin, dans lequel ses abeilles vont butiner. Ensuite, la
connaissance est un bien non rival au sens où elle ne se détruit pas dans l’usage ; le
théorème de Pythagore peut être utilisé à l’infini sans perdre ses qualités.
Par conséquent, le prix d’une connaissance ne peut pas être fixé comme celui de la
plupart des biens 90. Enfin, la connaissance est cumulative ; la production de savoirs
nouveaux repose largement sur les savoirs existants si bien que les progrès de la
connaissance sont d’autant plus rapides que celle-ci est largement diffusée.
Ces trois propriétés, qui donnent au savoir les caractéristiques d’un bien public, sont à
l’origine de ce que l’on appelle le dilemme de la connaissance.
D’un côté, comme les nouvelles théories de la croissance l’ont souligné, les activités de
production de connaissance ont un rendement social particulièrement élevé et sont un
fondement déterminant de la croissance économique. De ce point de vue, il faut
encourager la diffusion des savoirs de manière à garantir leur exploitation optimale, il
est donc préférable d’attribuer au savoir un prix nul.
D’un autre côté, le rendement privé est plus faible que le rendement social. Les agents
privés ne seront incités à prendre en charge la production de connaissances nouvelles
que s’ils peuvent exclure les autres agents de l’usage ou bien vendre les savoirs dont ils
sont à l’origine à un prix qui couvre au moins les coûts de production. Ce dilemme, «
entre l’objectif d’assurer à l’échelle de la société un usage efficient de la
connaissance, une fois celle-ci produite, et l’objectif de fournir une motivation idéale
au producteur privé », justifie l’intervention publique dans le financement de
l’éducation et de la recherche et dans la conception d’un système de protection de la
propriété intellectuelle, notamment par le biais du système de brevet.
Les travaux des vingt dernières années en économie de l’innovation ont permis de
relativiser le problème de bien public attaché à la connaissance. Ils ont souligné le
caractère déterminant, pour comprendre les processus de création et de diffusion des
savoirs, de la distinction entre connaissance et information. En effet, par information,
il faut entendre des flux de messages, alors que la connaissance implique une activité
cognitive de la part de l’agent ; celle-là consiste à sélectionner, traiter et interpréter
des messages pour en produire de
nouveaux. Ainsi, contrairement à l’information, qui existe indépendamment des
individus, la connaissance est « attachée » aux individus puisqu’elle repose sur leurs
facultés subjectives, ce qui en fait un bien plus facilement contrôlable.
Pour illustrer cette idée, on peut songer à la différence évidente qui existe entre
l’information contenue dans une recette de cuisine et le savoir mobilisé par le cuisinier
pour la réaliser.
90
Le coût marginal d’usage de la connaissance est nul ce qui rend impossible la fixation de son prix sur la
base des coûts marginaux.
Dans le modèle de Kenneth Arrow, certains agents sont spécialisés dans la production
de savoir ; ils sont localisés dans les laboratoires de R & D 91 des grandes firmes et dans
les industries de la connaissance. Cette conception a suscité de nombreux travaux
empiriques dans lesquels un secteur spécialisé dans la production de connaissance est
isolé. Fritz Machlup regroupe dans ce secteur l’éducation, les activités de
91
R & D: Recherche et Développement
Dans cette perspective, une part considérable des activités économiques et des agents
n’est pas considérée comme partie prenante de l’économie de la connaissance.
Pourtant, le savoir produit par les entreprises ne provient pas seulement des activités
formelles de R & D. Toutes les activités de production et d’usage des biens et services
peuvent être l’occasion d’un apprentissage et donc d’une production de connaissance.
Ces formes non délibérées de production de savoir ou, tout du moins, dont l’objectif
principal n’est pas la production de savoir, peuvent être appréhendées au travers des
concepts d’apprentissage par la pratique et d’apprentissage par l’usage.
Parler d’entrée de l’économie du savoir suggère l’existence d’une rupture dans les
modes de fonctionnement des économies qui serait due au rôle nouveau joué par la
connaissance. Ceci soulève trois questions traitées
successivement :
Les premières tendent à rejeter l’existence d'une historicité dans la dynamique des
économies. Les ruptures dans la croissance sont considérées comme des phénomènes
de déséquilibre passagers, les économies finissant toujours par retourner vers la
trajectoire de long terme.
Les secondes considèrent que l’histoire du capitalisme est marquée par une succession
de modes de développement92. Dans cette perspective, les transformations qu'ont
connues nos économies depuis les années quatre-vingt marqueraient l’avènement d'un
nouveau mode de développement ou régime
de croissance.
Si l’on accepte l’existence d’une rupture dans le fonctionnement des économies, l’idée
selon laquelle le nouveau régime de croissance reposerait sur la connaissance peut
susciter la perplexité, puisque la connaissance a toujours été au coeur des processus de
croissance 93. Le groupe de travail n’a pas tranché en ce qui concerne l’évolution de la
quantité de connaissance produite et mobilisée dans le système économique ; ceci
étant, il préfère souligner que le rôle joué par la connaissance dans le nouveau régime
de croissance tient moins à un changement dans la quantité de savoirs produits qu’à
l’évolution de l’organisation des acteurs dans la dynamique de production des
connaissances.
92
Dans les travaux évolutionnistes, inspirés de Joseph Schumpeter, la périodicité tient essentiellement à
des innovations technologiques majeures (voir notamment Freeman et Perez, 1988) ; dans d’autres
travaux, en particulier ceux de l’école de la régulation, elle est davantage associée à des
transformations institutionnelles (voir Boyer et Saillard, 2002).
93
Ainsi, Peter Howitt, un des économistes à l’origine de la théorie de la croissance endogène, refuse
cette idée et considère que la période actuelle s’inscrit dans la continuité des périodes précédentes,
Howitt, 1996.
Cette approche se révèle difficile à valider car le rythme tout comme l’intensité de
l’innovation sont délicats à mesurer. Le manque de recul peut conduire à considérer la
période actuelle comme exceptionnelle, alors qu’elle peut simplement correspondre à
une période de turbulence, caractéristique des phases d’ajustement à un nouveau
régime de croissance. Toutefois, la capacité à innover apparaît clairement comme un
critère de compétitivité déterminant dans les économies contemporaines.
Selon cette deuxième approche, l’entrée dans l’économie du savoir se caractérise par
un changement dans le mode de production de la connaissance ; celui-ci est de plus en
plus collectivement distribué.
Sans sous-estimer le rôle des TIC, il convient d’éviter le biais techniciste qui consiste à
voir dans ces technologies la cause principale des transformations contemporaines de
l’économie.
Tout d’abord, les TIC ne constituent qu’un support de la connaissance parmi d’autres.
Ainsi, si le groupe de travail a choisi de caractériser le nouveau régime de croissance
par le concept d’économie de la connaissance, alors que d’autres se réfèrent à la «
94
TIC : Technologies de l’Information et de la Communication
Depuis 1999, l’OCDE fournit une évaluation quantitative de l’économie fondée sur le
savoir, à l’occasion de la publication des Perspectives et du Tableau de bord de la
science, de la technologie et de l’industrie 22. Parallèlement, la Commission
européenne, suite au sommet de Lisbonne tenu en mars 2000, a publié un Tableau de
bord de l’innovation comme outil visant à fonder un exercice d’étalonnage
(benchmarking) des politiques d’innovation. Ces publications fournissent une série
d’indicateurs construits à partir des statistiques disponibles et comparables sur le
thème de l’économie du savoir, c’est-à-dire pour l’essentiel relatifs à l’innovation
technologique. Par ailleurs, de façon à évaluer de manière globale l’évolution vers une
économie de la connaissance et à comparer les performances relatives des différentes
nations, l’OCDE et la Commission européenne présentent également, à l’occasion de
ces publications, des indicateurs synthétiques de l’économie du savoir.
• Les industries du savoir sont définies comme les secteurs « qui emploient
relativement intensément la technologieet/ou le capital humain ». Il s’agit des
industries manufacturières de haute et de moyenne-haute technologie et de trois
catégories de service : 1) les services fournis à la collectivité, sociaux et personnels,
2) les activités de banque, assurance et autres services aux entreprises et 3) les
services de communication. L’entrée dans une économie fondée sur le savoir ne fait
pas de doute non plus quand on s’intéresse à l’évolution du poids économique de
ces industries dans la valeur ajoutée des entreprises de l’OCDE ; il représente plus
de 50 % au milieu des années quatre-vingt-dix, contre environ 45 % au milieu des
années quatre-vingt.
Cet indice est relatif ; il ne permet pas une évaluation, dans l’absolu, de l’entrée dans
une économie de la connaissance puisque son propos est de comparer les pays de l’UE
en niveau et en tendance.
Certes, les indicateurs synthétiques permettent de déceler une évolution générale vers
une économie fondée sur la connaissance, ils posent pourtant un certain nombre de
problèmes qui font qu’ils ne peuvent pas être repris dans le présent rapport.
Le second problème posé par les indicateurs synthétiques proposés par l’OCDE et la
Commission européenne est qu’ils ne sont pas compatibles avec la définition retenue
par le groupe de travail. D’une part, la connaissance considérée, pour construire ces
indicateurs, est pour l’essentiel technologique, et résulte d’activités formelles de
production de connaissance.
D’autre part, le choix des variables ne repose pas sur une distinction claire entre
information et connaissance. Ainsi, par exemple, les dépenses de logiciel apparaissent
davantage comme des investissements spécifiques à une économie de l’information. De
même, la spécificité des secteurs de la banque et de l’assurance est leur intensité en
information plutôt qu’en connaissance.
Pourtant, malgré leurs limites, il ne faut pas écarter les analyses comparatives fondées
sur des indicateurs quantitatifs. En effet, sous certaines conditions, ces analyses
peuvent s’avérer très utiles non seulement en termes de compréhension du
fonctionnement des économies mais également en tant qu’outils de politique publique,
Trois principes généraux sont retenus par le groupe, en ce qui concerne la mesure de
l’économie du savoir :
• Étant données les limites des données disponibles, il est préférable de fonder le
diagnostic de l’insertion de la France dans l’économie du savoir sur une batterie
d’indicateurs plutôt que sur un indicateur synthétique.
Ces principes sont à la base du chapitre suivant, qui propose un état des lieux général
et comparatif de l’insertion de la France dans l’économie du savoir. Les données
utilisées, qui sont pour l’essentiel celles de l’OCDE et de la Commission européenne,
correspondent à un panel très large d’indicateurs conçu de manière à limiter le plus
possible le biais technologique. Par ailleurs, considérant que l’entrée dans l’économie
de la connaissance correspond à un nouveau régime de croissance et de
développement, les indices de performance retenus reflètent non seulement l’ampleur
de l’investissement dans le savoir mais aussi les conséquences de cet investissement sur
la performance économique et sociale de l’économie dans son ensemble, au travers
notamment de la croissance, de l’emploi, de la compétitivité des entreprises et de
l’attractivité du territoire.
95
Lundvall et Tomlinson, 2001 ; voir également Barré, 2001 et le chapitre 7 du document de synthèse des
travaux du séminaire d’experts sur l’économie de la connaissance consacré à l’étalonnage des politiques
de la recherche et de la technologie, CGP, 2001.
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