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JEAN-PIERRE MARTINET
La Somnolence
Jean-Jacques Pauvert, 1975.
Un Apostolat d’A. T’Serstevens,
misère de l’utopie
Alfred Eibel, 1975.
Jérôme
Le Sagittaire, 1978.
Ceux qui n’en mènent pas large
Le dilettante, 1986.
L’Ombre des Forêts
La Table Ronde, 1986.
La grande vie
L’arbre vengeur, 2006.
Jean-Pierre Martinet
Nuits bleues, calmes bières
suivi de
l’orage
Postface de
Alfred Eibel
finitude
2009
Édition numérique
Prospéro’s books
IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE VINGT-CINQ
EXEMPLAIRES SUR PAPIER BLOND, SOUS
COUVERTURE EN “ßlER PAPIER LAGER” DES
PAPETERIES GMUND, PAPIER FABRIQUÉ AVEC DES
SOUS-BOCKS ET DES ÉTIQUETTES DE BIÈRE
RECYCLÉS, ADDITIONNÉS D’UN PEU DE HOUBLON
ET DE MALT.
TOUS CES EXEMPLAIRES SONT NUMÉROTÉS A LA
MAIN DE I À 25 ET MARQUÉS DU SCEAU DU
PAPETIER.
© Droits réservés.
Finitude 14, cours Marc-Nouaux Bordeaux
NUITS
BLEUES,
CALMES
BIÈRES.
« À présent, à soixante-dix ans.
j’ai renoncé à me trouver.
Ma vie ne fut rien. »
LOUISE BROOKS
Ou
L’ÉTERNEL
PURGATOIRE
PAR
Alfred Eibel
Alfred Eibel fut l’éditeur et l’ami de Jean-Pierre Martinet.
Il lui a consacré un long et bel article intitulé Le monde
désaccordé de Jean-Pierre Martinet dans Le Matricule des
Anges n° 36.
Longtemps assistant à la télévision française Jean-Pierre
Martinet (1944-1993) a toujours voulu écrire. Ceux qui l’ont
connu savent à quel point il était seul dans la vie, d’autant que
son père disparu, sa mère avait à charge son frère et sa sœur
tous deux arriérés. Un ménage en équilibre précaire qui
n’était d’aucun secours pour le jeune écrivain perdu dans un
Paris hostile. Une liaison sans espoir avec une jeune femme
noyée dans l’alcool fit Martinet se replier davantage. Le vin
vola à son secours pour le maintenir dans les brumes des
matins tristes. Martinet se lance alors dans la rédaction de La
Somnolence(1), histoire d’une femme de soixante-dix ans
vivant seule, menant une existence végétative entre une fin de
vie et la mort qui guette la vieille dame pour la narguer. La
vieillesse est dans son genre un précis de décomposition. Les
forces vives abandonnent le corps, des voix se font entendre,
on dirait que les murs parlent. Le lien ténu qui relie Marthe au
monde des vivants s’amenuise jusqu’à disparaître, laissant en
plan, à côté du monde qui bouge, une armature à forme
humaine. L’orage esquisse en quelques pages ce qui deviendra
La Somnolence où l’on retrouve Marthe en train de se
momifier n’ayant comme interlocuteur que l’écho de ses
bavardages.
Quand enfin paraît Jérôme(2), les thèmes abordés dans les
deux nouvelles réunies dans le présent recueil s’amplifient
jusqu’au délire. La ville dont parle Martinet inspirée par le
Pétersbourg d’Andréi Biely (1880-1934), « l’angoisse d’un
chaos social imminent », véhicule des personnages
fantomatiques aux réactions imprévisibles. Gérard Guégan,
Raphaël Sorin, Frédéric Vitoux, ont reconnu en Jérôme une de
ces œuvres inspirées, façonnées dans on ne sait quelle
soupente, un sommet dans l’épouvante et la cruauté, un
voyage initiatique pour atteindre le dernier cercle de l’enfer.
La disgrâce physique des personnages, leur danse au cœur de
la cité en cessation d’espérance, préfigurent l’aliénation des
hommes, les fléaux qui les accablent, la difficulté d’aimer. Par
sa symbolique, cet assèchement des sentiments évoque pour
nous ce manque d’eau dont souffre la planète car c’est un
devoir de pouvoir vivre d’amour et d’eau fraîche. Ceux qui
prennent la parole chez Martinet attendent leur permis
d’exister comme les sans-papiers attendent qu’on leur accorde
le droit de vivre. Ce sont des morts-vivants, des agonisants. La
rédemption par la déchéance est leur seule issue. Ils sont les
acteurs d’une pièce blasphématoire à la manière d’un Cyril
Tourneur (1575-1626) qui avec sa Tragédie du Vengeur
accumule les effets les plus horrifiques, sanglants et macabres.
ACHEVÉ D’IMPRIMER
EN OCTOBRE 2OO9
PAR PLEIN CHANT
À BASSAC (CHARENTE),
PAR UN JOUR BLANC,
PAS ORAGEUX POUR UN SOU,
MAIS AVEC LE RENFORT,
TOUT DE MÊME,
DE QUELQUES BIÈRES D’ORVAL
BUES A LA SANTÉ POSTHUME
DE JEAN-PIERRE MARTINET.
1 La Somnolence (Jean-Jacques Pauvert, 1975) est le premier roman de Jean-
Pierre Martinet.
2 Jérôme (Le Sagittaire, 1978), son second roman, est considéré comme son
œuvre majeure.