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Les temps de l'indicatif

Valeurs et emplois

Temps et énonciation
Le temps- catégorie déictique
La deixis = l’ensemble des traits orientationnels de la langue, ceux
qui ont pour fonction d’embrayer l’énoncé sur la situation
d’énonciation, i.e. de situer l’énoncé par rapport à la situation
d’énonciation.
L’énonciation = l’acte individuel d’utilisation de la langue.
L’énoncé = le produit linguistique de cette activité.
Les composantes de la situation d’énonciation: les protagonistes
(énonciateur ou locuteur + co-énonciateur ou allocutaire) + les
circonstances spatio-temporelles (le lieu et le moment de
l’énonciation).
Les signes linguistiques qui y renvoient:
a) des déictiques personnels; b) des déictiques temporels; c) des
déictiques spatiaux.
Les déictiques personnels:
 les pronoms personnels je/ tu/ nous/ vous qui renvoient aux
protagonistes de l’E: locuteur et allocutaire + les groupes
auxquels ils appartiennent;
 Les pronoms et les adjectifs posssessifs qui contiennent un
de ces indices de personne: le mien, le tien, le nôtre, le
vôtre, mon, ton, notre, votre, etc.
Tous tirent leur référence du contexte situationnel, concret où
ils sont employés.

Par contre, les pronoms de la 3e personne (il, elle, ils, elles),


en fait une non-personne (E. Benveniste) (puisqu’ils
désignent des individus qui ne prennent pas la parole), tirent
leur référence du contexte linguistique (ou cotexte) où ils
apparaissent.
Les déictiques spatiaux:
Les adjectifs et les pronoms démonstratifs: ce,
cet, cette, ces, celui-c-/-là, celle-ci/-là, etc.
Les présentatifs: c’est (sert à caractériser un
référent déjà connu par le contexte (situationnel
ou linguistique), voici, voilà (servent à attirer
l’attention sur un nouveau référent).
Les adverbes et Sadv déictiques: ici/ là/ là-bas/
près/ loin/ en haut/ en bas/ à gauche/ à droite,
qui opèrent divers découpages de l’espace en
fonction de la position qu’y occupent le locuteur
et l’allocutaire (proximité vs. éloignement vis-
à-vis du locuteur/ allocutaire).
Les déictiques temporels:
 Des adverbes / Sadv: maintenant, en ce moment-ci,
aujourd’hui, ces jours-ci, cette semaine, ce mois-ci, cette
année, hier, avant-hier, il y a x jours/ semaines/ mois/ ans, la
semaine/le mois/ l’année dernier(e)/ passé(e), demain, après-
demain, dans x jours/ semaines/ mois/ ans, la semaine/ le
mois/ l’année prochain(e)/ à venir.
 Les formes temporelles qui prennent pour répère le moment de
l’énonciation (maintenant): le présent, le passé récent, le
passé composé, le futur proche, le futur simple. Toutes
comportent dans leur forme même un morphème de présent:
soit un auxiliaire (PC: j’ai chanté), soit un semi-auxiliaire
(PR, FP, FS: je viens de chanter, je vais chanter, je
chanterai). Le futur simple (FS) était à l’origine un temps
composé (d’un semiauxiliaire: avoir à + l’Inf du V à
conjuguer: je chanterai < j’ai à chanter “am sã cânt”).
En fonction des rapports entre le temps de l’énoncé et le temps de
l’énonciation, les formes temporelles se distribuent sur trois axes:
présent, passé, futur.
Quand les deux coïncident, c’est la présent qui apparaît: Je regrette de
partir. Quand ils sont décalés (J’ai regretté/ je regretterai de partir.),
c’est la passé ou le futur.
C’est l’énonciation qui fonde la catégorie du présent et de la catégorie
du présent naît la catégorie du temps. Le présent, les temps du système
centrique et les autres déictiques n’existent que dans et par l’acte d’E,
car ils n’ont de référent que rapportés à l’instance de discours moi-ici-
maintenant (ego-hic-nunc).

Ce soir je pars en vacances. – n’est pas interprétable hors contexte. Il


a une signification linguistique (résultat des lexèmes en présence),
mais il est dépourvu de référence situationnelle (on ignore par qui,
quand et où il a été produit.)
Demain on rase gratis.- référence variable aussi!
Mais toutes les indications ne sont pas directement
répérées par rapport au présent du locuteur.
 Dans Le soir d’avant son départ, Paul a vu
Virginie, l’identité des deux personnes est une
donnée de l’univers de discours qui relève du
savoir partagé du locuteur et de l’allocutaire. Le
Sadv le soir d’avant prend pour répère le SN son
départ et non pas le moment de l’E.
Pour les anaphoriques aussi, on trouve les mêmes
rapports: simultanéité au répère ou non-
simultanéité (antériorité ou postériorité).
La dichotomie déictique vs. non-déictique recoupe en grand celle
qui oppose les temps du discours aux temps de l’histoire (récit)
et qui caractérise le système de l’indicatif.
L’indicatif est le mode de l’actualisation maximale. Il offre une
représentation plus achevée du temps que le subjonctif. Ce dernier
est le mode du temps amorphe, non-divisible en époques
(Subjonctif présent-futur vs. Subjonctif passé).
Les temps de l’indicatif se distribuent en deux systèmes distincts et
complémentaires qui correspondent chacun à un type (plan) d’E
distinct: celui du discours vs. celui de l’histoire (récit). Cette
dichotomie repose, comme celle des déictiques/ non-déictiques, sur
la présence ou l’absence de rapport à l’instance d’E.
C’est à cause de la prétendue synonymie du PC et du PS que
Benveniste a découvert le principe de cette distinction.
Les deux appartiennent à deux plans différents: le PC sert de temps
de base au discours, le PS sert de point d’ancrage (répère) au récit.
Discours Récit
Tiennent du discours les énocés Tiennent du récit les énoncés écrits

oraux et écrits qui renvoient à qui sont coupés de l’instance d’E,


sont dépourvus de déictiques, ne
l’instance de l’E et qui
tolérant que la non-personne.
comportent des déictiques. Les temps du récit introduisent une
Les temps du discours mettent
rupture entre les événements narrés
l’énoncé en contact direct avec et le narrateur qui n’y laisse paraître
l’actualité de son énonciateur. aucune trace de sa sujectivité. Tout
Je assume son dire, d’où toute se passe ici comme si les événements
se racontaient tout seuls.
une gammes de marques de Modalisation zéro. Le narrateur se
cette prise en charge
cache derrière le IL de ses
(interjections, modalités personnages. Pas de prise en charge
logiques et affectives, par l’énonciateur. Sujet neutre et
performatifs, phraséologie impersonnel qui se contente de
exclamative), c’est-à-dire une constater au lieu d’asserter
forte modalisation. réellement.
Discours Récit

Mon ami, Jacques qui avait vu le


J’aurai 14 ans demain. geste, fit un saut éperdu
L’an dernier, je par-dessus des caisses et
murmurais: 14 ans… gagna en trois enjambées
-comme dans un beau rêve la passerelle, glissa au
insaisissable. Le temps milieu des porteurs, bondit
passe et nous flétrit. Et, au sur le quai et s’élança vers
fond, rien ne change. la gauche. Mais Daniel? Il
Toujours nous-mêmes. se retourna: Daniel
Rien n’est changé, si ce s’échappait lui aussi. […]
n’est que je me sens Ils se retrouveraient plus
décourgé et vieilli. tard[…]
= Fragment d’une lettre = un fragment d’un roman
Les temps de l’indicatif se distribuent entre DISCOURS et
HISTOIRE(RÉCIT) ainsi:
Le temps de base du discours est le Présent. L’antériorité au
présent : le Passé Composé ou l’Imparfait, formes
complémentaires dpdv aspectuel. La postériorité au présent:
le Futur Simple et le Futur périphrastique: Futur Proche
avec aller au présent + Inf ou devoir au présent + Inf.
Le temps de base du récit est le Passé Simple, qui se trouve
avec l’Imparfait dans le même rapport de complémentarité
que le PC (forme d’accompli vs. d’inaccompli). Les faits
antérieurs à ce répère passé sont énoncés au Passé Antérieur
ou au Plus-que-Parfait. Les faits postérieurs: le Futur
dans le Passé (-rait) ou les formes périphrastiques: aller/
devoir à l’Imparfait + Inf (le prospectif, selon Benveniste).
L’ Imp et le PQP sont communs aux deux plans.
Discours Récit
Les productions orales : de la
Les productions écrites :
conversation banale au narrations (contes, nouvelles,
discours d’apparat; romans…) qui portent les
Les productions écrites qui
marques de l’histoire.
imitent ou qui restituent l’oral:
 correspondances,
REMARQUE:
 mémoires, Un même texte peut faire
 théâtre, alterner les deux plans: la
 reportages, présence de citations au
 ouvrages didactiques. discours direct, voire de
Il y a des narrations orales longs passages dialogués
qui relèvent du discours!!! dans un récit historique
atteste le passage au plan du
discours. On parle alors
d’hétérogénéité discursive.
Les temps du discours se combinent avec des embrayeurs de toute
sorte: indices de personne (je, tu), adv/ Sadv (demain, hier, ce
soir…). Les temps du récit se combinent avec des non-
embrayeurs: la non-personne (il), adv ou Savd tels que alors, ce
jour-là, une semaine plus tard etc.
Remarques:
La présence de je/tu ne veut pas dire automatiquement discours, tout
comme leur absence ne signifie pas récit. C’est la combinaison
il/elle + PS qui fait le récit. La non-personne apparaît aussi dans un
discours, mais elle fonctionne différemment: s’oppose aux deux
autres en tant que non-personne. Dans une histoire, elle représente
une absence de personne plus qu’une non-personne.
De même le PS peut s’associer à JE dans le roman
autobiographique. Mais l’auteur donne à ce je le statut d’une non-
personne, d’un je narratif distinct de son je d’énonciateur. Dans ce
cas, je peut facilement être remplacé par il/elle.
MERCI
DE VOTRE ATTENTION! 

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