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L’ENFANT FEBRILE

P. Minodier, K. Retornaz
CHU Nord

COPACAMU
19 Février 2004
HOMEOTHERMIE HUMAINE

 Wunderlich 1868 : normale = 36 à 38°C

 A chaque individu, sa température

 Rythmes circadien et menstruel

 Poïkilothermie superficielle
THERMOGENESE
 Production de chaleur par les mitochondries
(ADP/ATP), puis par les autres organites
cellulaires

 Frisson : mécanisme d’urgence

 Chez le nouveau-né : graisse brune qui, sous


l’effet d’une innervation adrénergique
sympathique, libère des acides gras
REGULATION PERIPHERIQUE
Pertes
 Conduction
 Convexion
 Radiation Débit sanguin cutané
 Evaporation

Syst. Vasoconstriction / Vasodilatation


sympathique

Syst. Nerveux Central Modifications comportementales


REGULATION CENTRALE

ANTICIPATION HYPOTHALAMUS

Neurones Système limbique


thermosensibles
périphériques
Noyaux réticulés

Neurones
thermosensibles Moelle épinière
centraux

Ganglions sympathiques
Progress in brain research 1998
REGULATION CENTRALE
HYPOTHALAMUS PRE-OPTIQUE
Progress in brain research 1998

60 % Neurones thermo- Pas de modification


insensibles électrique

Neurones sensibles Augmentation de la


30 % au chaud fréquence d’excitation au
chaud
Rétrocontrôle négatif

10 % Neurones sensibles Pas de modification


au froid électrique
SCHEMA GLOBAL DE REGULATION
37°C

FIEVRE HYPERTHERMIE

39°C 37°C
MECANISME DE LA FIEVRE
STIMULUS
Nouvelle t°
Cell. de consigne
Immunocompétente Organum
vasculosum laminae
terminalis
IL-1
TNF Neurones
IL-6 thermosensibles

IFN PGE 2
IL-2
Dinarello J Infect Dis 1999
LA FIEVRE EST-ELLE DANGEREUSE ?

 Au-delà de 42 °C, l’homéostasie n’est plus possible

 MAIS la fièvre est un mécanisme hautement régulé :


 Le thermostat central fonctionne
 La thermogénèse est saturable à 42°C (neurones thermosensibles)
 Il existe des antipyrétiques endogènes (AVP, glucocorticoïdes…)
 Certaines cytokines inhibent la production de pyrogènes endogènes
 Certaines cytokines sont sécrétées avec leurs récepteurs solubles
qui exercent une inhibition double (blocage du récepteur cellulaire,
liaison à cytokine)

 Dans l ’évolution naturelle des maladies infectieuses les


patients ne dépassent jamais 42 °C
MESURE DE LA TEMPERATURE
 Fiabilité de l’appareil de mesure
 Thermomètres au mercure / thermomètres électroniques
 Thermomètres auriculaires
 Thermomètres frontaux

 Fiabilité du site de la mesure (proche de t° centrale)


 T° buccale, rectale, tympanique bien corrélées
 T° cutanée, axillaire moins fiables

Prendre la température au bon endroit avec le bon appareil !


Robonson J Pediat 1998
PROBLEMATIQUE DE LA FIEVRE
Quelle température : 38 °C, 38,2°C ?

FIEVRE AIGUE FIEVRE PROLONGEE

 Terrain  Définition
Nouveau-né, nourrisson  5, 7, 15, 21 jours ?
Maladie sous-jacente  5 j chez NRS, 7 j chez enf. ?

 Etiologie  Cadre étiologique différent

Explorations
Clinique Evolution paracliniques
FIEVRE AIGUE :
SIGNES DE GRAVITE
 Troubles de la vigilance et du tonus
 Troubles hémodynamiques : FC, TA, TRC
 Anomalies de la coloration :
Pâleur +++, cyanose, marbrures
 Détresse respiratoire
 Déshydratation
 Infections des parties molles ou du squelette
 Purpura
 Troubles du comportement : cri, réactivité, irritabilité,
difficultés d’alimentation
Gaudelus Presse Méd 1994
AUTRES CRITERES CLINIQUES

A l’examen de l’enfant nu, rechercher

 Hyper ou hypo (++) tonie de la nuque


 Hépatosplénomégalie
 Masse anormale
 Examen peau, bouche, tympan

Gaudelus Presse Méd 1994


VALEUR PRONOSTIQUE
CHEZ < 3 MOIS
Signes de gravité Présence Absence

Fréquences

IPS 17 % 8,6 %
Bactériémie 11 % 2%
Méningite 4% 1%
Baraff PIDJ 1992

Aucun score clinique n’a de VPN à 100 %


EPIDEMIOLOGIE CHEZ < 3 MOIS
 2/3 à 3/4 d’infections virales
(entérovirus, VRS, grippe, rhinovirus, HHV 6)

 6 à 25 % d’infections bactériennes sévères (PNA +++)

 5-10 % de bactériémies (risque de complications)

 chez < 1 mois, risque d’infection bactérienne plus élevé

Arch Pédiatr 1995 et JPP 1995


Emerg Med Clin North Am 1999
CRITERES
DE RISQUE FAIBLE
Rochester Philadelphie Boston

 60 j, t° 38°C 29-60 j, t° 38,2 °C 28-89 j, t° 38°C


antécédents + antécédents - antécédents +
GB, PNN GB, PNN GB
GB urines, selles GB + ED urines, GB urines et LCR
et LCR
GB + GR selles
radio thorax radio thorax

Se 92 %, Sp 50 % Se 98 %, Sp 42 % Se ?, Sp 94,6 %
VPP 12,3 %, VPP 14 %, VPP ?
VPN 98,9 % VPN 99,7 % VPN ?

Jaskiewicz Pediatrics 1994 Baker NEJM 1993 Baskin J Pediatr 1992


CRITERES DE RISQUE FORT
Bachur Pediatrics 2001

 Etude rétrospective, NRS  3 mois fébrile

 Facteurs de risque d’IBS :


 BU : GB +/- nitrites, ou GB  5 / hpf urines
+  GB sang > 20 G/l
Se = 82 %
 t° rectale > 39,6°C VPN > 98 %
 GB sang < 4,1 G/l
-  Age < 13 jours
RISQUE FORT / RISQUE FAIBLE

Partition récursive Critères Rochester

5279 931
IBS 7% IBS 7%

Ht Rq 1465 Pas Ht Rq 3814 Bs Rq 437 Pas Bs Rq 494


IBS 21% IBS 1,7% IBS 1,1 % IBS 12,3%

RR 12 ; VPN 98,3 % RR 11 ; VPN 98,9 %

NRS 0-3 mois tout venant NRS 0-2 mois paraissant bien
ALORS QUE FAIRE ?

 NN < 1 mois :
 BS, urines +/- PL
 Hospitalisation
 ATB si signes clinique +/- biologiques : C3G + AG +/- Péni A

 NRS 1-3 mois avec probable IBS :


 Hospitalisation et ATB
 Hospitalisation aussi si pb socio-familial
ALORS QUE FAIRE ?

 NRS 1-3 mois à bas risque :

 Domicile sans trt ATB : ap. hémoc et ECBU


 Domicile après une injection de ceftriaxone :
ap. hémoc, ECBU,
PL

 Sous réserve d’une surveillance familiale et médicale possible,


jusqu’aux résultats des cultures
AUTRES PROBLEMES DE TERRAIN

Epilepsie Crise
comitiale

Déficits Infection
immunitaires 3 9 grave

Pneumopathies Décompensation
chroniques Hypoxie

Insuff. Cœur
Cardiopathies Endocardite
SITUATION CLINIQUE

 Camilla, 4 ans, sans antécédent


 Fièvre 39°C, asthénie
Grippe ? PF ?
 Vomissements, céphalées
 Eruption purpurique

Quels caractères
En cas de PF, que faire ?
doivent être précisés ?
PURPURA ET FIEVRE
Tout purpura fébrile est un purpura fulminans
jusqu’à preuve du contraire

Purpura fulminans Purpura mécanique

Extensif Extrémité supérieure


Nécrotique Non extensif
 3 mm Non nécrotique
QUE FAIRE EN CAS DE PF ?
Avis du CSHPF du 10/03/00

Si signes infectieux + purpura évocateur


Et quelle que soit l ’hémodynamique

Rocéphine IV ou IM : 50-100 mg/kg (< 1g)


Claforan IV ou IM : 50 mg/kg (< 1 g)
Amoxicilline à défaut, IV ou IM : 25-50 mg/kg (< 1 g)

Transfert d’urgence à hôpital (après avoir prévenu)


SMUR si délai d’intervention < 20 min
SITUATION CLINIQUE

 Marc, 9 mois
 Diarrhée liquide (> 10 / 24 h) avec sang
 Fièvre 39,5 °C
 Asthénie

Bactérien ou pas ? Facteur de risque ou pas ?


DIARRHEE BACTERIENNE

 Présence de sang +/- glaires


 Fièvre associée > 48 heures Coproculture
 Voyage récent

CES CRITERES NE SONT PAS SYSTEMATIQUES !

TOUTE DIARRHEE BACTERIENNE NE NECESSITE


PAS UN TRAITEMENT ANTIBIOTIQUE !

LA TOLERANCE PRIME !
DIARRHEE BACTERIENNE ET
ANTIBIOTIQUES
 Salmonella typhi : toujours ATB

 Shigelles : au moins S. dysenteriae et S. flexneri

 Salmonelloses mineures :
NRS < 6 mois, diarrhée > 3 j, fièvre > 2 j,
drépanocytose, immunosuppression et SIDA, agamma-
globulinémie, granulomatose septique, bilharziose

 E. coli, Yersinia, Campylobacter


DIARRHEE BACTERIENNE ET
ANTIBIOTIQUES
 Salmonelles, Shigelles : problème de la pénicilline

1ère intention :C3G type ceftriaxone


50 mg / kg / j, 5 à 7 jours

 Fluoroquinolones : ciprofloxacine 20 mg / kg / j
Monodose, 5 à 7 jours / conditions d’utilisation

 Nouveaux macrolides : azithromycine ?

 Yersinia : Bactrim / Campylobacter : macrolides


FIEVRES D’ORIGINE
INDETERMINEE DE L’ENFANT
 5 à 7 jours consécutifs
 2 semaines avec fièvre à plusieurs reprises
 3 semaines avec explorations négatives en externe, ou 1
semaine avec explorations négatives à l’hôpital
 2 semaines en externe ou 1 semaine à l’hôpital
 2 semaines avec examen clinique négatif
 3 semaines à plusieurs reprises et sans diagnostic après
3 CS externes ou 3 jours d ’hospitalisation (def. Adulte)

5 jours consécutifs chez NRS, 7 jours consécutifs chez enfant


ETIOLOGIES DES F.O.I. ENFANT
Etudes Nombre Infections Cancers Maladies Divers Sans
inflammatoires diagnostic

Méta-analyse 1083 53,6 % 3,9 % 12 % 6,8 % 23,6 %


Enfant
1957-1997
9 séries

PACA 44 54 % 2,3 % 23 % 4% 16 %
1998-1999
enf. < 6 ans

Méta-analyse 1436 33 % 20 % 16 % 15 % 16 %
Adulte
1952-1994
13 séries

Retornaz Thèse Méd. 1999


PRISE EN CHARGE DES F.O.I.
DE L’ENFANT
 Spécificités pédiatriques

 La clinique seule compte :


 Interrogatoire poussé
 Examen soigneux
 Répétition des examens durant la surveillance

 Aucun protocole d’explorations paracliniques ne se


justifie
TRAITEMENT DE LA FIEVRE
EN SOI
 Faut-il traiter la fièvre ?
Plus qu’une valeur chiffrée, la tolérance !

 Quelles mesures physiques ?


Les bains tièdes sont : au mieux inefficaces,
au pire mal tolérés

Mieux vaut découvrir l’enfant, lui donner à boire,


le ventiler, utiliser des linges humides
TRAITEMENT DE LA FIEVRE EN SOI

 Faut-il craindre les convulsions fébriles ?

OUI, ET ALORS ?

 Les convulsions fébriles surviennent sur un terrain particulier


 Les convulsions fébriles sont toujours bénignes

 Ne pas confondre convulsion fébrile et convulsion avec fièvre :


bien préciser l’âge, les antécédents, le développement psycho-
moteur, le type et les circonstances de la crise, l’examen
neurologique normal avant et à distance de la crise
TRAITEMENT DE LA FIEVRE EN SOI
 Quels antipyrétiques ?

 L’aspirine a une fenêtre thérapeutique étroite et peut


occasionner des syndrômes de Reye avec certaines infections
virales, ou entraîner des troubles de la coagulation
 Les AINS de type ibuprofène ont beaucoup d’effets secondaires
(atteintes gastriques, facilitation des infections cutanées ?)

L ’ANAES recommande le paracétamol


en première intention et à bonnes doses
(60 à 80 mg/kg/j, 1ère prise de 20 mg/kg)
TRAITEMENT DE LA FIEVRE EN SOI
 Quelle alternance d’antipyrétiques ?

 Aucune étude a montré le bénéfice de l’alternance d’antipyrétiques


 L’alternance expose au risque de sous-dosage et augmente les effets
secondaires
 Un délai strict de 4 à 6 heures entre les prises ne tient pas compte de
la tolérance de la fièvre

L’alternance d’antipyrétiques ne se justifie pas


Les antipyrétiques peuvent être donnés à intervalles
rapprochés selon la tolérance de la fièvre
Privilégier le paracétamol ; réserver les AINS
EN CONCLUSION...

 La fièvre de l’enfant recoupe des situations très différentes

 L’évaluation du terrain et de la tolérance est importante

 La clinique prime toujours

 Le paracétamol seul est le traitement de choix

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