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Signé: S. HADDOUCHE
shaddouche@hotmail.com
Les inondations du 10 octobre 2001, suivies une année plus tard par le séisme du 21
mai 2003, deux catastrophes d’origine naturelle qui, au delà des pertes spectaculaires
qu’elles ont causées en vie humaines et en biens économiques, ont révélé l’anarchie dans
laquelle s’est opérée l’urbanisation en Algérie et mis à nu les défaillances institutionnelles
dans la prévention et la lutte contre les effets de tels cataclysmes.
Face à ces événements, l’Etat est souvent mis en cause par l'opinion publique et
accusé de faillir à son rôle d'anticipation dès lors qu’il est investi de la mission de
protection des populations et de leurs biens. Pour couvrir les répercussions financières et
économiques on a toujours eu recours aux dépenses du trésor public à travers les fonds
d’affectation spéciale dont les ressources se révèlent le plus souvent insuffisantes pour
faire face aux dépenses engendrées.
De sa part, le système d’assurance, représenté par les compagnies publiques et
privées, s'est avéré incapable d'intégrer dans la panoplie des couvertures qu'il offre, les
risques de catastrophes naturelles dont les caractéristiques les rendent profondément
différents des risques habituellement couverts.
C'est une problématique qui se trouve actuellement au cœur des préoccupations
majeures de nombreux pays soucieux de préserver leur patrimoine face à des phénomènes
imprévisibles et difficilement maîtrisables.
Les assureurs ont toujours considéré les évènements naturelles majeurs comme des
risques situés au-delà de leurs limites d’assurabilité ; l’ampleur des dommages aux biens et
à l’environnement et le nombre des victimes qu’elles peuvent causer rend difficile, voire
impossible la mise en œuvre du principe de la mutualisation des risques qui est le
fondement même de l’opération d’assurance, en ce qu’il permet, aux quelques
malchanceux victimes d’un événement assuré, d’être indemnisés par l’ensemble des
cotisations versées par les assurés.
Par ailleurs, ces risques, en raison de leur faible fréquence et de la variabilité de leurs
amplitudes, ne se conforment pas aux techniques de modélisation actuarielles développées
jusqu’à présent par les réassureurs et du coup, écartent les possibilités d’ajuster les primes
et les conditions d’assurance en rapport avec la cadence de réalisation des sinistres et leur
portée.
Tout bien considéré, les assureurs ont, et à juste titre, exclu les CAT-NAT1 de leur
champ d'intervention à cause des difficultés de leur compensation (risques non
indépendants) et l'absence de statistiques fiables permettant leur modélisation et donc
l'assise d'une tarification appropriée.
I. Définition des risques CAT-NAT:
1
Abréviation de Catastrophes Naturelles..
Elles sont communément définies comme des "phénomènes naturels d’intensité
anormale pouvant causer des dommages sur les biens et les vies humaines".
D'une manière plus méthodique, nous parlerons de CAT-NAT dès lors que nous
sommes en présence d’un événement potentiellement dangereux confronté à un enjeu
humain, économique ou environnemental.
Ces événements peuvent être des inondations, un tremblement de terre, un cyclone,
une sécheresse … pour autant que leur intensité soit anormalement destructrice et qu'ils
soient, bien entendu, associés à un enjeu humain, car un séisme ou une sécheresse, aussi
intenses soient-ils ne peuvent être qualifiés de Cat-Nat s'ils surviennent dans un désert.
II. Couverture des CAT-NAT:
Ces dernières années, nous assistons à une augmentation du nombre des catastrophes
naturelles, due essentiellement au développement des enjeux humains et leur extension
spatiale; résultat direct de la croissance démographique avec son lot d’agglomérations
urbaines et d’installations industrielles qui, dans de nombreux cas, se font dans des zones à
risque potentiel.
De ce fait, les gouvernements de plusieurs Etats se concertent avec les organismes
d'assurance et de réassurance pour la mise au point de dispositifs de couverture plus ou
moins adaptés aux spécificités socio-économiques qui les caractérisent et aux risques qui
les menacent.
Comme nous le verrons, les solutions adoptées sont multiples et variées selon les
régimes économiques et l'histoire des pays en question. La solidarité, qui vient, en quelque
sorte se substituer à la mutualisation, apparaît tout de même, comme le principe de base
qui fait l'unanimité des différents dispositifs.
Elle est mise en œuvre à travers l'institution d'une double obligation : une obligation
de souscrire une assurance contre les effets des CAT-NAT pour les entreprises et les
ménages d'une part et une obligation d'octroyer la garantie pour les compagnies
d'assurance d'autre part.
Ce recours à la solidarité est justifié par la défaillance des mécanismes traditionnels
de l'assurance à réaliser la mutualisation quand ceux-ci concernent un environnement de
concurrence pure.
En d'autres termes, dans le cas où l’assurance fonctionne dans un cadre d’économie
de marché et donc de liberté contractuelle ; face à un danger, les assureurs sont conduits à
faire payer à chaque assuré le prix du risque qu’il représente pour la mutualité de
l’ensemble des assurés. Les personnes non ou très peu exposés n’auront pour ainsi dire
rien à payer; en revanche, celles qui sont largement exposées, devront verser une prime si
élevée qu’elle ne pourront souscrire.
À la limite, l'opération d’assurance ne verra même pas le jour.
C’est donc seulement par l’intégration de l’idée de solidarité que l’on peut
raisonnablement envisager un dispositif d’assurance CAT-NAT susceptible de maintenir un
équilibre financier.
Toutefois, la volonté de maintenir le marché comme seule institution régulatrice
persiste dans quelques pays, laissant apparaître par la même, un éventail de solutions dont
les différences se situent essentiellement dans:
1°.D'abord, le degré d'intervention de la puissance publique dans la gestion des
opérations d'assurance catastrophes naturelles et des garanties financières offertes
aux assureurs et réassureurs intervenant dans l'opération.
2°.Ensuite, entre des dispositifs du type interventionniste, c'est plutôt, l'arbitrage
entre le souci de prévention et de lutte contre les effets des CAT-NAT d'une part et
l'objectif de faire prévaloir la solidarité entre les assurés nationaux d'autre part qui
fait la différence. Nous retrouvons ainsi, des systèmes assis sur une tarification qui
varie selon l'exposition au risque et vise à responsabiliser les assurés dans la
prévention, d'autres dispositifs, sont en revanche, basée sur l'unicité tarifaire et vise
plutôt à consacrer l'équité sociale entre assurés.
III.Les expériences à travers le monde:
Ces deux systèmes, américain et nippon, que nous qualifions de systèmes libéraux,
sont entièrement basés sur l'assurance privée, les organismes publics n'interviennent que
pour fixer les conditions tarifaires. La garantie de l'Etat étant, par ailleurs, limitativement
ou pas du tout acquise, si les tranches de réassurance, rendues disponibles par le dispositif,
viendraient à être entièrement épuisées par une accumulation exceptionnelle des pertes, ce
sont les assurés eux même qui participeraient à la résorption du déficit par une réduction
proportionnelle des indemnités.
Conclusion.
Au-delà de l'indemnisation des seuls dommages directs, le dispositif d'assurance des
catastrophes naturelles, dont l'application est prévue dés Septembre 2004, permettra à coup
sûr de consolider, de par son caractère obligatoire, le taux de pénétration de l'assurance
dans la population. Il reste néanmoins, aux assureurs locaux de chercher les formules
intelligentes permettant d'intégrer dans les contrats les autres garanties facultatives afin
d'accroître leurs encaisses notamment dans l'assurance des habitations.
Par ailleurs, dans le cas ou l'accès aux garanties notamment tremblement de terre
serais soumis au respect des règles de construction et d'occupation des sols, le système
jouera le rôle du régulateur pour autant que la volonté d'asseoir la prévention comme
objectif à long terme serais consacrée, faute de quoi la pérennité même du dispositif
pourrait être compromise.
Enfin, les différents acteurs intervenant dans l'urbanisation (architectes, géologues,
aménagistes…), et l'assurance (actuaire et techniciens) doivent être associés afin de
définir un modèle de tarification construit à partir des bases de données se rapportant au
triptyque: Réparation des risques – Nature des périls - Vulnérabilité.