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Dupont-Sommer André. L'énigme du dieu « Satrape » et le dieu Mithra. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des
Inscriptions et Belles-Lettres, 120ᵉ année, N. 4, 1976. pp. 648-660;
doi : 10.3406/crai.1976.13304
http://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1976_num_120_4_13304
PAR
M. ANDRE DUPONT-SOMMER
SECRÉTAIRE PERPÉTUEL
Mesdames, Messieurs,
L'historien et géographe grec Pausanias, au second siècle de
notre ère, atteste une curieuse tradition relative à un certain dieu
qui s'appelle Sarpàrc^ç. Ce dieu « Satrape », depuis le témoignage
de Pausanias, est resté étrange, extrêmement énigmatique.
Rappelons la notice de l'historien grec1 : « A l'endroit le plus fréquenté de
la ville des Éléens s'offre à leurs yeux une statue d'airain, d'une
taille non plus haute que celle d'un homme grand, imberbe, un pied
croisé sur l'autre et s'appuyant des deux mains sur une lance ;
on l'habille de vêtements de laine, et aussi de lin et de byssos. Cette
statue, disait-on, était celle de Poséidon, et elle était anciennement
honorée à Samicon de Triphylie, mais, ayant été transportée à Élis,
elle en est venue à y recevoir encore plus d'honneur, et les habitants
(d'Élis) l'appellent Satrape, et non pas Poséidon, ayant appris ce
nom du (dieu) Satrape après que les Patréens se furent installés
dans leur voisinage. Le (dieu) Satrape est un surnom de Corybante ».
Ainsi, au dire de Pausanias, les gens de la ville d'Élis, chef-lieu
de la province d'Élide au nord-ouest du Péloponnèse, avaient un
jour enlevé la statue d'airain installée anciennement dans le
« Samicon de Triphylie », où se trouvait l'antique sanctuaire de
Poséidon, face à la mer, à quelque trente-cinq kilomètres au sud
d'Élis. La fameuse idole transportée au cœur de la ville d'Élis
n'avait pas en réalité, explique Pausanias, le nom de Poséidon :
ce n'était pas le dieu grec de la mer, généralement doté d'une
chevelure et d'une barbe abondantes et armé d'un trident, mais un dieu
jeune nommé « Satrape » qui avait la figure imberbe et portait une
1. Description de la Grèce, VI, 25, 5-6.
L'ÉNIGME DU DIEU « SATRAPE » 649
8. Yasna, 44, 9. Cf. traduction par Bartholomae, « Herr des Reichs » ; I. Ger-
shevitch (The Avestan Hymn to Mithra, 1959, p. 243), « Lord of Power » ;
H. Humbach (Die Gathas Zarathustra, I, 1959, p. 119), « Herr der Herrscher-
macht ».
9. Yast, 10, v. 107 (traduction I. Gershevitch, op. cit., p. 126-127).
654 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
4e 14.
édition
F. Cumont,
1929), p. Les
144. Religions
L'observation,
orientales
a écritdans
F. Gumont,
le paganisme
est deromain
Darmesteter,
(Paris,
Zend-Avesta, II, p. 441.
15. Cf. F. Cumont, Textes et Monuments figurés relatifs aux Mystères de Mithra,
II (Bruxelles, 1896), p. 89 s. ; Les Religions orientales..., p. 133, flg. 9. — Sur le
syncrétisme Apollon-Mithra, ajouter par exemple le passage de Lactantius Pla-
cidus, Ad Statii Thebaidem, I, 717 (p. 73 Jahnke) : « Dicit Apollinem a diversis
gentibus variis appellari... apud Persas, ubi in antro colitur, Mithra vocatur »
(cf. F. Cumont, Les Mages hellénisés, I, p. 249, add. 179).
16. Cf. Burkhard Fehr, « Zur Geschichte des Apollo-Heiligtums von Didyma »,
dans Marburger Winckelmann-Programm 1971/1972 (Marburg-Lahn, Verlag des
Kunstgeschichtlichen Seminars, 1972), p. 53.
L'ÉNIGME DU DIEU « SATRAPE » 657
19. Cf. Marc Aurèle, dans Œuvres complètes de Ernest Renan, tome V (Paris,
1952), p. 1107.