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Université de Nice Sophia Antipolis

Le mystère de la pizza : comment un plat a l’origine pour les pauvres a


conquis le monde ?

Etudiante : Tîrteață Marilena Andreea

Nice

2018
Introduction

Pizza, symbole de la mondialisation alimentaire ?

L'alimentation a été pendant l’histoire représentative des environnements, des techniques


agricoles et culinaires, mais surtout des cultures. « Nous mangeons tous comme nous pouvons,
en fonction de nos moyens, mais aussi selon nos rêves, selon les représentations que nous nous
faisons de l'alimentation » (Pitte, 2001). L’alimentation est donc un élément de la culture, mais
dans le contexte de la mondialisation et l’uniformisation des goûts, on peut encore parler d’une
alimentation spécifique à chaque culture ou plutôt d’un système alimentaire mondial ?

La mondialisation est une notion largement débattue dont on a beaucoup écrit et qui a des
nombreuses définitions. Le Fond Monétaire International la décrit comme « l’interdépendance
économique croissante de l’ensemble des pays du monde provoquée par l’augmentation du
volume et de la variété des transactions transfrontières de biens, de services et de personnes,
ainsi que des flux internationaux des capitaux et la diffusion accéléré et généralisé de la
technologie. » (http://libertariens.chez-alice.fr/mondialia.htm)

Au-delà du cadre théorique, la mondialisation est une réalité. Elle n’est pas qu’une
interdépendance économique, mais prend des différents formes et dimensions, englobant tous les
domaines de nos vies quotidiennes. Les façons dont on consume, dont on se habille, dont on
utilise les technologies, la diffusion des normes, valeurs, d’un mode de vie, tout ça signifie que la
mondialisation est aussi culturelle. Et si on parle de la culture, on parle alors de l’alimentation.

La mondialisation a envahi tous les aspects de notre quotidien et elle est arrivée aussi dans nos
assiettes. On peut y trouver le monde, parce qu’un plat peut être prépare avec des tomates
d’Espagne, huile d’olives de Grèce, mozzarella d’Italie, dattes d’Algérie ou bien ananas de
Caraïbe etc.

Plus qu’une simple circulation des aliments facilitée par le contexte d’échange, de flux continu,
de la libre marche et des avancements technologiques, la mondialisation alimentaire est aussi une
tendance d’uniformisation, une convergence des gouts. Partout dans le monde on peut trouver
presque les mêmes aliments. En France on peut manger du sushi et vice-versa, on peut manger
du foie gras en Chine. Et partout on peut manger de la pizza.
La mondialisation « atterrisse » souvent dans nos assiettes sous la forme d’une pizza, elle peut
être appréhendée en utilisant la métaphore de ce mets. Ce plat connu dans les quatre coins du
monde incarne le symbole de la mondialisation, c’est sa forme comestible, l’un de ses
expressions alimentaires suprêmes. (Helstoky, 2008)

Est-il le monde proche de consommer les mêmes aliments, plats, partout ? Quels sont les enjeux
d’une telle tendance, les conséquences, est-elle vraiment une menace ? On va essayer de
comprendre la mondialisation et sa forme alimentaire à travers une pizza. L’exemple peut
paraitre trivial, mais une banale pizza qu’on peut trouver partout dans le monde peut servir
comme point de départ pour une réflexion qui porte sur l’impact que la mondialisation a sur nos
modes d’alimentations, les conséquences et les tendances contraires.

On va commencer d’abord avec une histoire des origines de la pizza, comment elle a passé d’un
plat pour les pauvres a un motive de fierté nationale, ensuite dépassant les frontières italiens pour
« immigrer » aux Etats-Unis d’où elle a connu la célébrité internationale. Le deuxième chapitre
décrit les différentes significations que les groups ont accordé au plat et comment la pizza reflète
et s’adapte aux changements sociaux. Le troisième chapitre porte sur les paradoxes de la pizza,
plat dispute par les italiens ainsi que par les américains, en même temps produit phare de
l’uniformisation et exemple de la diversification.

I. Histoire de la pizza: de plat pour les pauvres de Naples à l’un des plus mangés
aliments du monde

A l’origine un plat pour les pauvres de Naples pendant le XVIII siècle, pizza est maintenant une
source de fierté régionale et nationale et un symbole de l’identité culturelle de l’Italie. Dans le
XX siècle, les immigrants italiens ont apporté la pizza dans les Etats Unis, ou elle est devenue le
plus populaire plat du pays et a engendré l’apparition et le succès des entreprises géant, comme
Pizza Hut et Domino’s. Dans son parcours et tour du monde, la pizza a été adaptée au spécifique
de la cuisine locale et est devenue une métaphore pour l’échange culturel.
1. La pizza, plat pour les pauvres à Naples

Dans son ouvrage, « Le Corrico », l’auteur français Alexandre Dumas décrit son voyage à
Naples, Italie, où il a observé la vie et les habitudes des pauvres de la ville, « lazzaroni »,
appelés ainsi à cause de leur aspect déguenillé qui évoquait l’image de Lazarus. Dans son livre,
Dumas décrit leur nourriture, la pizza, un plat simple, mais qui pour lui était dans le même temps
un moyen d’observer et mesurer l’état de la société.

La pizza était une sorte de pain plat, sur laquelle les pauvres mettaient des ingrédients simples,
comme tomates, d’ail, saindoux, sel, fromage etc. et la mangeaient pour le petit déjeuner,
déjeuner et diner. La versatilité de la pizza, les différents ingrédients qu’on pouvait combiner
pour ne jamais s’ennuyer d’elle et le fait qu’elle n’était pas chère, l’ont transformée dans le mets
préféré de ceux avec peu des moyens. (Helstoky, 2008)

Au début, les critiques regardaient la pizza comme un plat sale pour les pauvres. Elle est restée
une spécialité locale jusqu’après La Deuxième Guerre Mondiale, quand la migration et le
tourisme ont fait de la pizza le symbole de l’héritage culinaire de l’Italie et le nouveau plat
préféré du monde.

2. La pizza, motive de fierté nationale

La pizza est restée pour longtemps une spécialité locale. C’est pendant et après la Deuxième
Guerre Mondiale qu’elle gagne son renom international. L’un des facteurs qui ont contribué à la
propagation du plat à l’Italie sont les soldats américains de la Deuxième Guerre Mondiale. Ils
auraient essayé la pizza au sud de l’Italie et demandaient de la manger partout où ils allaient. La
migration des italiens vers le nord du pays ont fait aussi qu’ils ont apporté la pizza avec eux.
Enfin, le développement de la société des loisirs, du tourisme ont apporté aussi leur contribution
à la recette du succès de la pizza. D’un plat méconnu, la pizza est devenue le symbole de l’Italie,
de son identité et son ambassadeur culinaire à l’étranger.

Même si c’était un plat qui nourrissait les pauvres, la légende suggère aussi que la pizza a
sensibilise les gouts des aristocrates. La plus connue histoire est celle de l’impératrice Margherita
qui, en passage par Naples en 1889, a demandé au chef Raffaele Esposito de lui préparer une
variété des pizzas. L’impératrice a particulièrement savouré la pizza avec des tomates, basile et
mozzarella, qui a été nommée Margherita en son honneur. (Helstoky, 2008)

On peut argumenter que la pizza Margherita s’inscrit parfaitement dans le récit nationaliste
italien, ses couleurs étant celles du drapeau, mais aussi dans l’idée d’identité culinaire du pays.
La pizza Margherita est revendiquée par les italiens comme l’une des trois pizzas napolitaines
authentiques qui doivent être protégées. L’histoire de la pizza Margherita semble à l’histoire du
Cendrillon. Un plat modeste est savoure par une impératrice devient après l’un des plus connus
mets du monde. Pizza dépasse les classes sociales, promeut l’égalité et se montre comme un plat
délicieux qui peut être apprécie par tous. (Helstoky, 2008)

La pizza a commencé à être regardée avec beaucoup plus de respect ainsi qu’un mouvement est
déclenché pour protéger la véritable, authentique pizza de Naples de la menace de la
standardisation et extinction, incarnée notamment par les Etats Unis. Les “puristes” de la pizza
pensent que « lorsqu’un plat est séparé de ses racines, il va dégénérer, il va devenir dégrade,
dévalorise, comme par exemple la pizza dans les mains des américains ». (Helstoky, 2008)

Mais on peut argumenter que les efforts pour standardiser les règles à suivre si on veut faire une
“pizza verra” et pour imposer les trois pizzas de Naples comme authentiques amènent aussi a une
uniformisation. Les « protectionnistes » de la pizza veulent imposer un modèle de pizza, mais ce
modèle limite les définitions du plat, ainsi que son essence: la versatilité, adaptabilité (Sanchez,
2007). Les efforts pour distinguer la véritable pizza de son version standardisée et industrialisée
engendrent encore de la standardisation.

L’envie de protéger la pizza pour protéger l’héritage, le passée, l’histoire de l’Italie coexiste en
même temps avec, pas sans disputes, les autres façons de fabriquer et manger la pizza. L’une de
ces façons est celui des Etats Unis.

3. La pizza, un plat italien aux Etats Unis

Même si les italiens s’attribuent l’invention de la pizza, on peut argumenter que la pizza qu’on
connait aujourd’hui est née dans le Etats Unis. Pizza est devenue aussi part de la culture
américaine comme de la culture italienne.
C’est hors de l’Italie que la pizza va connaitre un « destin inattendu » et va être prise dans « un
processus de revalorisation symbolique », en devenant un marqueur identitaire pour les
immigrants italiens (Sanchez, 2008). À New York, la pizza va apparaitre sous la forme d’un
« plat totem ». Selon Sylvie Sanchez, un plat totem est « une préparation ethnique qui reçoit, au
cours d’un processus de revalorisation sélective induit par le déracinement de sa communauté
d’origine, un statut nouveau qu’elle n’avait pas dans le pays d’origine et qui répond à la nécessité
de renforcer une identité dans un contexte d’intégration contraignant » (Sanchez, 2008).

Les restaurants italiens vont déraciner la pizza de sa consommation intracommunautaire et de


« son auréole ethnique » (Sanchez, 2008) et vont permettre aux américains de se familiariser
avec elle. Aux Etats Unis comme en Italie, la pizza est sorite des frontières d’un groupe ethnique
et est devenue populaire parmi toute la population après La Seconde Guerre Mondiale. Les
américains ont employé beaucoup de technologie et d’aptitudes entrepreneuriales pour produire
et vendre la pizza, ce qui a contribué à la popularité croissante du plat, mais aussi à la perte de
son caractère exclusivement ethnique (Sanchez, 2008).

II. Pizza, le plat qui répond au et reflète les changements de la société

1. Pizza et ses significations à travers l’histoire

La pizza n’est pas un simple plat. Elle contient de l’histoire, des représentations, d’imaginaire,
elle est un « thermomètre » de la société comme Dumas l’avait dit et reflète comme un miroir
son condition, son spécifique. Pizza est un objet culturel, d’échange, qui serve à la fois comme
élément identitaire, de distinction et comme élément qui homogénéise, qui nous permet à être à
l’aise partout où on va.

Au fil des siècles, la pizza s’est éloignée de ses origines modestes et maintenant peut même être
servie comme un plat gourmet. Une fois la nourriture des pauvres du Naples, la pizza est
aujourd’hui l’un des plus populaires plats du monde. Millions des individus mangent de la pizza
parce qu’elle est un mets simple, convenable, facile à trouver et à préparer.

En pénétrant les différentes sociétés, la pizza a commencé à signifier des choses différentes pour
d’individus différents. Pour le napolitains, la pizza était un mode de survivre, mais plus tard elle
s’est converti dans l’histoire, le patrimoine, la légende de Naples et son plus connu ambassadeur
dans le monde entier. Pour le reste de l’Italie, la pizza est devenue d’abord un plait préféré, puis
le plat national, représentant une partie de la cuisine italienne qui doit être célébrée et protégée.
Maintenant, pizza fait partie de l’identité nationale des italiens (Helstoky, 2008).

Pour les émigrants italiens, pizza représentait une façon de se sentir comme chez eux et de
gagner un peu d’argent. Pour le reste du monde, pizza était à la fois un plat ethnique et un «
support » qui permettait tous les formes d’expérimentation culinaire. Les différents sociétés ont
intégré la pizza parmi leurs plats préférés, l’ont adaptée selon leurs gouts et leurs idées. Elle
pouvait refléter les gouts américains, italiens, locaux ou cosmopolites, être à la fois exotique et
familière (Helstoky, 2008).

2. Pizza, d’élément de rencontre avec l’altérité a un plat familier

Premièrement occasion d’aller à la rencontre de l’altérité, l’exotique dans les restaurants italiens,
la pizza est maintenant quelque chose du familier. Ce sont ces restaurants qui vont « désenclaver
la pizza de sa consommation intracommunautaire et de son auréole ethnique et vont permettre
aux autochtones de se familiariser avec elle » (Sanchez, 2008).

Mais la pizza a connu sa popularité après la Seconde Guerre mondiale. L’engouement pour ce
nouveau plat « va initier une série d’inventions tant culinaires que techniques, permettant au
mets de s’ajuster aux besoins et aux valeurs de son temps » (Sanchez, 2007). La pizza est
devenue populaire en Italie et les Etats Unis parmi la moyenne classe de la société grâce à son
versatilité. Elle représentait un plat qui satisfaisait tous les membres de la famille avec ses
nombreux « toppings », une occasion de manger en dehors de la maison, mais aussi chez soi, un
plat pour les fêtes etc. Ainsi, la pizza s’est converti d’un plat pour les pauvres dans un plat qui
l’on mangeait comme un « snack », populaire dans tout le monde. (Helstoky, 2008)

3. Pizza, le plat versatile qui réponds aux besoins de la société.

On peut dire que la fascination mondiale pour la pizza est née de la mondialisation et les
changements qu’elle engendre. Ce mets versatile, symbole de la mondialisation alimentaire, n’est
pas que le produit de l’uniformisation des gouts, mais aussi des changements sociétaux, des
transformations que la mondialisation a produit.
Par exemple, l’urbanisation, le développement accélère de l’emploi urbain, le rythme alerte de la
vie, ont changé considérablement les pratiques alimentaires. Les citadins n’utilisent pas leur
propre production pour se nourrir, car en ville ils ont un accès plus facile aux produits et aux
plats prêts à consommer, comme la pizza. Le temps consacré aux préparations des plats est aussi
réduit, la distance et le rythme de travail amènent les citadins à chercher des plats facilement
prêts à proximité du lieu de travail. A tous ces changements du mode d’organisation de la vie, la
pizza répond avec succès (Pitte, 2001). Elle peut être préparée facilement, vite, on peut l’acheter
dans un coin de rue ou surgelée d’un supermarché et on a très rapidement un repas convenable et
nourrissant.

Un autre changement de la société qui a favorise le choix de la pizza comme plat préférée est
aussi le développement de la société des loisirs et de la restauration extérieure. La pizza était la
réponse pour ceux qui voulait sortir le soir avec les amis ou la famille et manger quelque chose
pas très chère hors de chez soi. (Helstoky, 2008) Aussi, l’accès plus facile au travail pour les
femmes a changé l’organisation domestique et les repas en famille, en se traduisant aux États-
Unis par une demande croissante de la nourriture toute prête. La pizza était aussi le plat préfère
quand on parlait de la « TV dinner » (repas télé) aux Etats Unis (Sanchez, 2008).

III. Les paradoxes de la pizza

Née à Naples et après amené aux Etats Unis, ou elle a connu sa gloire, la pizza peut paraitre
aujourd’hui un plat banalisée, commun, mais son histoire est loin d’être banale. Surtout, elle est
difficile d’appréhender et de catégoriser. Est-elle un mets italien ou américain ? Ou on peut dire
plutôt qu’elle est un plat mondial ? Grace à l’immigration des italiens dans les Etats Unis et au
processus de la franchise, la pizza est aujourd’hui disponible partout dans le monde, mais est-elle
vraiment le symbole de l’uniformisation des gouts ? Les réponses de tous ces questions sont
ambivalents: à la fois oui et non. Ce sont les paradoxes de la pizza qu’on va détailler dans les
sous-chapitres suivants.
1. La pizza, un plat revendique par les italiens, mais popularise par les américains.

Si on dit pizza, on dit Naples. Les italiens surtout déclarent que c’est là où la vraie pizza est née.
Mais si on regarde dans l’histoire, on peut dire que les ancêtres de la pizza sont les pains plats
que les Egyptiens, Grecqués, ou les Romans mangeaient.

Les italiens même essaient de faire de la pizza un plat officiellement reconnu comme héritage
mondial du pays. Mais est-elle pizza un plat vraiment italien ? Si on tient compte des ingrédients,
on peut dire que même au départ la pizza était un plat international, mondialisé, symbole de la
mondialisation. Les tomates venaient du Nouveau Monde, la mozzarella était faite du lait de
bufflon, un animal à l’origine de l’Asie, le basile venait aussi de l’Inde etc. (Helstoky, 2008).

On peut dire que la contribution des napoléoniens était leur savoir-faire, la façon dont ils
mélangeaient les ingrédients. Mais la pizza qu’on connait aujourd’hui est plutôt le résultat de
l’immigration des italiens aux les Etats Unis et c’est là où la pizza a commencé vraiment son
voyage autour du monde. Née en Italie, la pizza a dû être exportée aux Etats-Unis, où elle a été
appropriée, intégrée dans la culture américaine, déclinée selon les gouts, standardisée et exportée
à l’étranger.

La pizza qu’on mange aujourd’hui est donc le résultat des plusieurs facteurs, et on peut dire
qu’elle est un plat qui n’appartient entièrement a aucun pays, elle échappe toujours les
catégorisations, en devenant un plat adopte par tous, qui appartient à tout le monde. Pizza peut
être considérée aujourd’hui comme un plat cosmopolite, adoptée par tous les pays et qui adopte
à son tour leur spécificité locale, en reflétant les caractéristiques gastronomiques de la region.

2. La pizza, étendard de la mondialisation alimentaire ?

Pour Semprini, le processus de la mondialisation est « très abstrait et […] presque insaisissable
», mais il « présente un aspect bien particulier et tout à fait concret: sa production très abondante
d’objets, que l’on pourrait qualifier d’objets mondialisés »(Semprini, 2001).

Ces objets mondialisés fonctionnent de manière acontextuelle, « en deçà de toute inscription


dans un contexte local » et aussi de manière transcontextuelle, « au-delà de tout contexte local ».
« L’acontextualité » lui permet de ne pas s’ancrer dans la réalité locale, ainsi que la
« transcontextualite » lui permet de « cohabiter avec le contexte local, sans vraiment l’intégrer »,
« Il négocie une sorte d’«entente cordiale» qui lui permet de s’insérer dans un contexte sans en
modifier les paramètres de base » (Semprini, 2001).

La spécificité de l’objet mondialisé est donc son agilité de s’insérer dans les contextes les plus
diverses, d’afficher une élasticité par rapport aux contextes. « Cette capacité les rend
particulièrement aptes à véhiculer un monde possible «sans frontières» et à contribuer activement
aux processus de mondialisation » (Semprini, 2001)

L’un de ces objets mondialisé peut être considéré aussi la pizza. Mais le succès et la rapidité de
leur diffusion planétaire a comme résultat, selon certaines voix, « l’homogénéisation des cultures
et, parallèlement, la perte de l’authenticité des identités et des styles de vie locaux ».(Balkaran,
2016)

Dans ce « débat large et très actuel sur les dangers de la mondialisation », s’inscrivent aussi les
craintes qui concernent les changements des habitudes alimentaires engendrés par les
corporations qui contrôlent le système alimentaire mondial. Les produits alimentaires phares de
la mondialisation, parmi lesquels se trouve aussi la pizza, nous amèneront vers « l’émergence
d’une uniformisation alimentaire qui menace l’identité, la spécificité culinaire ». (Balkaran,
2016)

La pizza peut servir comme exemple pour décrire l’uniformisation des aliments, étant aussi
soumise au processus de standardisation. Dès son arrive aux Etats Unis et son ascension à la
gloire, la pizza a été « déshabille » de son caractère ethnique et standardisée, industrialisée pour
répondre aux besoins et caractéristiques de la société américaine. Son préparation a été
« segmentée en différentes opérations techniques confiées à des acteurs différents (recours à des
centrales d’achat pour les garnitures, surgélation préalable de la pâte étalée et disposée dans des
moules, utilisation de fours à infra rouges) » (Sanchez, 2008).

Aux Etats Unis, la pizza est loin de son caractère artisanal. Elle a pris progressivement tous les
attributs d’un mets adapte à l’industrie du fast food (Sanchez, 2008). Sa forme surgelée ou
exportée par les chaines de restaurants comme Pizza Hut témoigne son caractère uniforme,
standardise, connu partout dans le monde.
La pizza peut être considérée comme un produit mondialisé si on prend en compte le fait qu’elle
est mangée partout et les chaines des restaurants qui offrent presque la même pizza à Paris
comme au Hong Kong. Mais la pizza existe aussi hors de sa forme surgelée, standardisée. Ils
existent aussi des autres versions, interprétations de la pizza, ils existent encore les pizzerias qui
ont pas été ruinées par les chaines de restauration. Il existe, alors, la diversité dans
l’uniformisation.

3. Pizza, expression de la diversité des gouts et interprétation culturelle de l’alimentation

Il y a des autres voix qui sont sceptiques face à la menace de l’homogénéisation. Pour Sylvie
Sanchez, les cultures sont caractérisées par une dynamique qui est leur caractéristique définitoire
: ‘l’évolution et le changement – le déplacement, la reconstruction, l’invention des frontières –
nous semblent davantage manifester la vitalité des cultures plutôt que leur désagrégation »
(Sanchez, 2007).

Nicolas Bricas pense que « tous les pays sont soumis aux mêmes forces, mais ils n’évoluent pas
tous au même rythme, […] il reste heureusement de grandes disparités d’une région à l’autre ».
(Pitte, 2001). Il ne croît dans l’uniformisation alimentaire et distingue les produits des plats et de
la façon de faire la cuisine. Même si l’uniformisation alimentaire nous amené à manger les
mêmes aliments et plats, c’est la façon dont on les prépare que fait la distinction.

C’est là, dans le savoir-faire, la créativité, la diversité que l’uniformisation alimentaire ne peut
pas s’imposer. Il n’existe pas une uniformisation totale dans le système alimentaire mondial, car
toutes les saveurs, les ingrédients, les recettes circulent et sont réinterprétées par les cultures
locales. Ils empruntent quelques éléments et les intègrent toujours dans leurs systèmes
alimentaires.(Pitte, 2001)

Andrea Semprini pense que « ceux qui s’inquiètent le plus de l’aplatissement des valeurs
provoqué par la mondialisation tendent systématiquement à sous-estimer le phénomène de la
réception ». Cette réception est inscrite dans des « contextes, dans des logiques et dans des
grammaires de réception locales » (Semprini, 2001).

Si on mange de la pizza en Allemagne et en Californie ça ne veut pas dire qu’on partage


nécessairement les mêmes valeurs et qu’on est identiques. Les objets mondialisées qui sont
appropriés passent par un processus «d’adaptation, de filtrage, de négociation qui permet
d’ancrer l’objet dans les pratiques de vie et les usages quotidiens ». Ils sont saisis, inscrits dans
un contexte local, adaptées aux modes de vie. Apres ce processus les objets mondialisés sont
« modifiés, redéfinis, réinterprétés, apprivoisés ». (Semprini, 2001)

C’est aussi le cas de la pizza. Elle est toujours « bricolée et recontextualisée selon des logiques et
des conditions » des sociétés ou elle va (Semprini, 2001). La pizza est le résultat de l’emprunt
(son parcours en témoigne) et en même temps « moyen de canalisation de l’emprunt (la variété
des différentes lignées de pizzas le montre)’ (Sanchez, 2008). Pizza est un produit mondialisé,
mais contrairement au fast-food, elle n’est pas porteuse d’une homogénéisation culturelle et
alimentaire, en témoignent ses multiples formes, ingrédients, adaptations. (Sanchez, 2007).

Partout où la pizza va et est adoptée, il y a toujours un processus de réappropriation. La pizza est


façonnée avec des éléments de la culture locale, savoir-faire, technologies, ingrédients. (Sanchez,
2007). Elle émerge toujours comme une pizza, mais une nouvelle forme, type, qui reflète et
s’intègre dans la culture locale. Même les chaines de restaurants comme Pizza Hut ne sont pas
insensibles aux contextes locaux, essayant d’adapter leurs menus selon la culture locale, avec des
pizzas qui incorporent des ingrédients locaux.

Métaphore pour la mondialisation, la pizza montre comment le local est le global coexistent dans
nos sociétés. Les tendances globales imposent des modelés, des produits etc., mais le local les
réinterprète. Mais, en même temps que cette localisation du plat engendrée par la mondialisation,
car les consommateurs fabriquent leur propre version de pizza, elle a gardé son identité italienne,
et, en quelque part, américaine. Et parce que la pizza est consommée partout dans le monde, elle
a aussi une identité cosmopolite (Balkaran, 2016).

IV. Conclusion

L’un des plus aimés plats du monde, la pizza est une recette de succès. D’abord un plat local, la
pizza a su insérer de la diversité la ou les moyens étaient faibles et à partir de ce qui était
disponible. Le savoir-faire a fait de ce mets un moyen de se nourrir sans s’ennuyer. La grande
réussite de la pizza est de s'être « présentée sous les traits du mélange - des cuisines, des
pratiques, des cultures - sans jamais s'y perdre » (Sanchez, 2008).
La pizza est un plat connu universellement, tous les individus savent qu’est-ce c’est une pizza,
mais en même temps on met notre empreinte individuelle, régionale ou nationale dans sa
préparation. Elle fait le lien entre les individus, mais permets aussi aux groups de se distinguer,
de montrer leur gouts et culture culinaire. (Sanchez, 2007)

Son succès est dû à son versatilité, sa « souplesse culinaire, comme son large spectre de
variations possibles, qui en ont assuré la pérennité à travers le temps et l’espace. Lui substituer
une forme dite pure, ce serait oublier la qualité majeure de ce mets devenu « polyglotte »
puisqu’il fait la preuve de sa capacité à communiquer dans toutes les langues, et risquer, in fine,
de saper la diversité au profit de l’homogénéité contre laquelle on entendait se dresser. »
(Sancez, 2008).

La pizza n’est pas un simple plat, elle est un objet culturel qui montre « la manière dont la
diversité se maintient et se renouvelle dans le flux des emprunts » (Sanchez, 2008) et le fait que
le processus d'homogénéisation est souvent de « surface ». Ce qu'on appelle les pertes d'identité
sont, en fait, des réadaptations, des réactualisations, un « renouvellement de la diversité »
(Sanchez, 2007). La pizza permet alors « de revisiter les scénarios d’homogénéisation culturelle
et culinaire, ou l’effacement des frontières qu’induirait le processus de mondialisation »
(Sanchez, 2008).
Bibliographie

1. Sanchez, S. Pizza connexion. Une séduction transculturelle, CNRS Editions, 2007.


2. Sanchez, S. Pizza, cultures et mondialisation, CNRS Editions, 2007.
3. Helstoky, C. Pizza. A global history., C&C Offset Printing Co., Ltd., 2008

Sources en ligne.

1. http://libertariens.chez-alice.fr/mondialia.html [accédé le 15.03.2018, 10:40]


2. Balkaran, R. Globalisation and convergence of food taste in the case of South African
Pizza, African Journal of Hospitality, Tourism and Leisure, Vol. 5, 2016. Disponible sur:
https://www.researchgate.net/publication/309406519_Globalisation_and_convergence_of
_food_taste_in_the_case_of_South_African_Pizza [Accédée le 6.04.2018, 13:31]
3. Pitte, J-R., La géographie du goût, entre mondialisation et enracinement local, Annales
de geographie, nr 621, 2001. Disponible sur: https://www.persee.fr/doc/geo_0003-
4010_2001_num_110_621_1717 [Accédée le 07.04.201, 16:53]
4. Sanchez, S. Frontières alimentaires et mets transfrontaliers : La pizza, questionnement
d’un paradoxe, Passions politiques, Vol. 32, no 3, 2008. Disponibile sur:
https://www.erudit.org/fr/revues/as/2008-v32-n3-as2914/029724ar/ [Accédé le
20.03.2018, 12.35]
5. Semprini, A., Objets sans frontières, La société des objets. Problèmes d’interobjectivité,
Vol. 29, nr 1, 2001. Disponible sur: https://www.erudit.org/en/journals/pr/2001-v29-n1-
pr2785/030611ar/ [Accédée le 16.04.2018, 19:23]

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