Vous êtes sur la page 1sur 25

« Chrétiens et christianisme en terre d'islam »

Unité de recherche pluridisciplinaire


de la Faculté de théologie Institut catholique de Toulouse
22-24 octobre 2007

« Le texte arabe : seulement islamique ? »


-------------------------------------------------

Patriarcats d'Orient et culture arabe

Par le Frère Jean- Marie Mérigoux, OP, de l'IDEO du Caire

--------------------------------------------------------------
Monseigneur et père, mes révérends Pères, mesdam e s, mes sieurs

Sous le titre « Patriarcats d'Orient et culture arabe », je voudrais évoquer


la place de la langue et de la culture arabes dans le christianisme proche
et moyen oriental, tant dans le passé que de nos jours.
S'il est bien connu que l'arabe est la langue sacrée des musulmans, le
fait qu'elle soit aussi une grande langue du christianisme l'est beaucoup
moins.
Quant à l'importance du rôle des chrétiens orientaux dans le
développement et l'enrichissement de la culture arabe, cela est trop
souvent ignoré.

Parler des « Patriarcats d'Orient » c'est parler du christianisme oriental


lequel est constitué d'un ensemble d'Eglises locales, ou Patriarcats.
Les racines historiques et linguistiques de ces Eglises sont aussi
diverses que les régions où elles sont nées et se sont développées

Dans tous les pays du Proche et du Moyen Orient les chrétiens arabes
ou arabophones sont nombreux.
Au Liban ce sont d'une façon prioritaire les Maronites, en Irak les
Chaldéens, en Syrie les Grecs et les « syriaques », Suriânî, en Jordanie,
en Palestine et en Israël les Latins, en Egypte les Coptes, et à Istanbul
de nos jours bien des « Suriânî » du Tûr Abdine et de Mardine.

A côté des langues originelles propres à ces Patriarcats : le grec, le


syriaque occidental, le syriaque oriental ou chaldéen, le copte et
l'arménien, on a pu voir que l'arabe s'est imposé comme la langue
commune pour ces Eglises, pour les assemblées de leurs patriarches et
de leurs évêques, la langue de la rédaction des documents
ecclésiastiques, des discours dans les congrès et celle de toutes les
catéchèses adressées aux fidèles.
Chacune de ses Eglises, tout en conservant son héritage linguistique et
culturel propres, a donc habituellement connu dans l'histoire une
inculturation progressive, mais rarement totale, en direction de la langue
arabe.
La langue arabe est de fait habituellement dominante dans la plupart de
ces pays où vivent les chrétiens d'Orient.

Au Liban, en Syrie, en Irak, en Egypte, en Jordanie et en Palestine,


l'arabe est bien dans toutes les Eglises locales la langue d'enseignement
dans les séminaires, les scolasticats, les noviciats et les facultés de
théologie, même si ces étudiants connaissent et approfondissent la
langue propre à leur tradition ecclésiale.

Andrea Pacini, évoquant dans la revue « Proche Orient Chrétien », les


communautés chrétiennes vivant en contexte musulman arabe, rappelle
que ces populations en Egypte, en Jordanie, au Liban, en Syrie, en Irak,
dans les territoires palestiniens et en Israël, « plongent leurs racines
dans l'histoire ancienne et plus récente des sociétés moyen- orientales et
constituent un témoignage - encore éloquent aujourd'hui - de la richesse
culturelle et religieuses des différentes traditions orientales » .
1

Par « textes arabe s » je privilégierai ces nombreux « textes arabes » qui


sont entre les mains de millions de chrétiens, surtout les textes des
liturgies pratiquées en Orient, les textes de formation chrétienne, qu'ils
soient bibliques ou catéchétiques, ainsi que les nombreuses revues.

Le christianisme est né en Orient


Le christianisme est né en Orient, il y a deux mille ans. Il n'est pas pour
autant le produit d'une culture ou d'une civilisation, car il est d'en Haut.
Toutefois il a beaucoup reçu des peuples et des langues parmi lesquels
il s'est développé et comme « incarné ».

Bien avant la conquête musulmane, de nombreuses tribus arabes de


Syrie et du Croissant fertile étaient chrétiennes, et elles possédaient
leurs évêques, les uns sédentaires, les autres nomades2 .
Gérard Troupeau rappelle que « ces Arabes chrétiens installés dans les
pays du Croissant fertile, y avaient répandu l'écriture arabe, bien avant
que celle-ci fût introduite à la Mekke.
En effet, les deux plus anciens témoins de cette écriture, inventée par
les Arabes chrétiens d'al-Hira à partir de l'écriture syriaque, sont deux
inscriptions chrétiennes trouvées en Syrie, l'une à Zabad, dans la région
d'Alep, datée de 512, et l'autre à Harran, dans le Hauran, datée de
568 ». 3

On distinguait à cette époque trois groupes d'Eglises : les Melkites,


étaient chalcédoniens, donc catholiques; les Nestoriens qui avaient
refusé le concile d'Ephèse (431) et les Monophysites qui avaient refusé
celui de Chalcédoine (451).
La tribu des Banou Lakham était nestorienne, et celles des Banou
Ghassan et des Banou Taghlib étaient monophysites.

L'Eglise d'Antioche ayant évangélisé l'ensemble de ces populations


chrétiennes de culture araméenne et arabe de la Syrie, le nom même de
« Syrie », devint synonyme de « Pays chrétien » . 4

Dans la langue araméenne parlée de nos jours en Mésopotamie5, , on


emploie pour désigner un "chrétien " le terme de « sourayyé », c'est-à-
dire "syrien".

Gérard Troupeau remarque qu'après la mort de Muhammad « l'une des


principales préoccupations des premiers califes fut d'imposer l'islam à
toutes les tribus arabes installées à l'intérieur de la péninsule arabique.
Omar 1er ordonna d'expulser d'Arabie les Arabes chrétiens qui refusaient
de se convertir à l'islam » .
6

C'est ainsi que les Banou l-Harith, qui habitaient Nejrân, furent obligés
pour conserver leur foi, d'émigrer vers l'Irak où ils s'installèrent près de
Koufa.

Quant à l'Egypte son islamisation fut partielle mais son arabisation totale
fut imposée par les Mamelouks circassiens 7

Les Patriarcats dans l'Eglise


Parce que l'ensemble de l'Eglise, d'Occident et d'Orient, est constituée
de plusieurs Patriarcats ou Eglises locales , il convient de nous interroger
sur l'origine de ces Patriarcats qui regroupent l'ensemble des chrétiens
d'Orient et précisément ceux du monde arabe.

Le lieu de naissance d'une « Église patriarcale » c'est l'une des


grandes villes de l'Antiquité, au départ païennes, évangélisées,
directement ou indirectement, par un ou plusieurs Apôtres. Ce fut le cas
d'Antioche, de Rome et d'Alexandrie.

Chacune de ces villes était appelée « ville métropole » (ville mère,


métro) et sa communauté chrétienne avait à sa tête un évêque
« métropolite ».

Mais au Concile de Chalcédoine, ces trois villes, ainsi que


Constantinople et Jérusalem, devinrent des « villes patriarcales », et
leurs évêques s'appelèrent dès lors des « Patriarches ».

Par la suite, à ces cinq patriarcats, furent ajoutés deux "catholicossat s",
ou « quasi patriarcats », celui des Arméniens et celui de l'Eglise de
l'Orient, soit celle « les Syriens orientaux » qui comprend aujourd'hui les
Assyriens, ou Nestoriens et les Chaldéens catholiques.

1- Les Patriarcats
d'Orient et l'histoire de la
culture arabe
Dans sa contribution à l'ouvrage l'histoire du Christianisme , Gérard
Troupeau a montré que si la diffusion de l'islam amena la diffusion de la
langue arabe, la langue du Coran, les Eglises chrétiennes, tout
spécialement celles d'Antioche, eurent un grand rôle dans
l'enrichissement de la culture arabe.
« La conquête arabe transforma cette situation en un trilinguisme. Dans
les villes le grec disparut assez tôt comme langue vernaculaire faisant
place à l'arabe au VIIIe siècle.
Dans les campagnes en revanche l'araméen subsista beaucoup plus
longtemps et ne fut remplacé que très lentement par l'arabe » . 8

Dans la liturgie, le grec et le syriaque continuèrent à être employés


conjointement jusqu'à ce que l'arabe s'introduise à partir du 9e siècle
dans la théologie, l'exégèse, le droit, la liturgie où il fut utilisé
concurremment avec le syriaque.

Si la langue arabe, déjà existante, se diffusa et s'imposa souvent du fait


de l'islam, la culture arabe ne possédait pas encore de textes culturels et
philosophiques. C'est là que se situe l'apport des arabes chrétiens dans
l'enrichissement de cette culture.
Grâce à un groupe de traducteurs melkites, aux 10e et 11e siècles, se
déroula à Antioche, une vaste entreprise de traduction qui mit en arabe
bien des œuvres theologiques et catéchétiques des Pères grecs pour la
formation des fidèles et ceci enrichit la culture arabe.

« Bayt al-Hikmat », la Maison de la Sagesse


L'importance de la « Maison de la Sagesse », fondée à Bagdad, par le
calife al-Ma'mun en 832, est bien connue. Cette entreprise de traduction
vers l'arabe des chefs d'œuvres de l'Antiquité grecque fut l'oeuvre
commune de nombreux traducteurs, juifs, sabéens, musulmans et
chrétiens.
Le rôle des chrétiens y fut remarquable car, souvent plus que d'autres,
outre l'arabe, ils connaissaient fort bien le grec et le syriaque .
9

Lors du festival Ephrem- Hunayn organisé à Bagdad en 1974, auquel j'eu


la joie de participer, on ne manqua pas de faire l'éloge d'Hunayn, l'un
des grands traducteurs de la « Maison de la Sagesse », ce chrétien
syriaque qui traduisit en arabe bien des chefs d'oeuvre de l'Antiquité
grecque et une visite fut organisée à Hira, sa ville natale, près de Koufa.

Le Père Anawati qui participait à ce congrès en était profondément


heureux. Ce dominicain, fondateur au Caire de l'Institut Dominicain
d'Etudes Orientales avait oeuvré toute sa vie dans les domaines où avait
excellé Hunayn : le travail théologique, philosophique, scientifique et son
expression en arabe
C'est au retour de ce Congrès, que le Père Anawati conçut l'un de ses
derniers livres et qui eut un grand succès : Al masihiyya wa al hadharat
al arabiyya, (Le christianisme et la civilisation arabe)
10

Quant à la littérature arabe chrétienne en général, on reconnaît bien


aujourd'hui son importance.
Après bien des pionniers dans son étude, comme François Nau 11 et le
père jésuite Louis Cheikho, citons par exemple le professeur Gérard
Troupeau 12, madame Marie-Thérèse Urvoy, le père Emilio Platti, le père
Samir Khalil, qui, en collaboration avec Mgr Edelby, a publié de
nombreux textes du patrimoine arabe chrétien.

2- Les Patriarcats
d'Orient et la culture
arabe de nos jours
Permettez-moi maintenant un petit témoignage personnel.
Alors que j'étais étudiant, en 1957, j'étais entré un jour à Marseille, dans
l'église maronite de Notre-Dame du Liban dont le recteur était Mgr
Joseph Hayek. J'ai assisté alors à ma première messe catholique « non
latine ». J'étais à la fois culturellement dépaysé à cause de l'étrangeté
pour moi du rite et, en même temps, pleinement chez moi du fait de la
même foi catholique. J'ignorais alors tout de l'arabe et du syriaque, mais
j'étais en pleine communion avec cette Eglise que je ne connaissais pas
encore.

Peu de temps après, je découvris toujours, à Marseille, la belle église


grecque catholique de Saint Nicolas de Myre. Je ne puis oublier une
belle messe byzantine à laquelle j'assistai alors et qui me fit découvrir
encore un visage de mon Eglise catholique.

Ce jour là, la messe avait été célébrée en arabe, en grec et en français.


Quant au prédicateur, c'était le père Yves Congar, ce dominicain qui
allait avoir un très grand rôle au concile de Vatican II.
Plusieurs fois il répéta : « L'Eglise a deux faces, une face orientale et
une face occidentale ».

Devenu dominicain, ayant visité un jour le père Congar, hospitalisé aux


Invalides, je lui rappelais cette messe dont il se rappelait très bien. Il me
dit alors que ce thème des « deux visages de l'Eglise » était peut être à
l'origine d'une image devenue très chère au pape Jean Paul II, celle des
« deux poumons de l'Eglise », l'oriental et l'occidental, avec lesquels
l'Eglise doit respirer pour être en bonne santé.

Peu de temps après ces découvertes, je m'inscrivis au tout premier


cours d'arabe qui commençait à l'Université d'Aix-en-Provence 13 .

Lorsque la même année, en 1957, je suis entré au noviciat dominicain


de Saint Maximin, je savais donc que le Monde arabe comprenait à la
fois le monde arabe chrétien et le monde arabe musulman que j'avais
aussi découvert à Marseille. J'avais en effet organisé dans une banlieue
de la ville une troupe scoute pour des jeunes Algériens qui arrivaient du
fait de la guerre qui commençait dans leur pays.

C'est en 1967, à Alger, après mes études dominicaines, que j'ai vraiment
commencé, sous la conduite des Sœurs libanaises des Saints-Cœurs et
du Père Henri Tessier, l'étude la langue arabe.
J'étais alors le compagnon d'étude du frère Pierre Claverie, dominicain
lui aussi, qui devint évêque d'Oran et dont nous avons célébré cette
année le dixième anniversaire de la mort héroïque.
L'apport culturel des religieuses libanaises des Saints Cœurs en Algérie,
ne se limitait pas au petit groupe de religieux et religieuses étudiant
l'arabe, car on entendait dire que des personnalités importantes du pays
faisaient relire par les Sœurs les discours qu'ils devaient faire en arabe.

Au Liban j'ai continué mon étude de l'arabe et découvert avec passion ce


pays aux profondes racines chrétiennes. Ce fut ensuite pour moi une
longue et belle aventure dominicaine à Mossoul, en Irak, où je fus
enthousiasmé de découvrir une chrétienté admirablement arabophone
et qui parlait aussi l'araméen, chrétienté dont je n'ai cessé depuis
d'étudier le patrimoine arabe et syriaque et d'en vivre aussi ! .
14
Les Patriarcats orientaux catholiques
Je me limiterai ici aux Patriarcats orientaux catholiques car ils sont très
profondément enracinés dans la langue et la culture arabes.

Les Patriarcats orthodoxes, sont certes plus nombreux que les


patriarcats catholiques, mais ils appartiennent habituellement à des
mondes culturels différents du Proche Orient arabe : Patriarcats russe,
serbe, grec, ukrainien… et lorsqu'ils sont centrés sur les villes
patriarcales d'Antioche, d'Alexandrie, de Jérusalem, ces patriarcats sont
hellènes et habituellement de langue et de culture grecque.

Mais évoquer tout spécialement les catholiques orientaux, c'est une


manière de les faire sortir de l'oubli ou de l'ignorance dans lesquels ils se
trouvent parfois, même auprès de catholiques latins, qui identifient
parfois «Orient» avec «Orthodoxie», et «Occident » avec « Catholicité »
et par là semblent ignorer un peu leurs frères catholiques orientaux .15

« Vous avez des frères catholiques orientaux ! » répétait à l'occasion, et


parfois avec véhémence, le patriarche Maximos V Hakim . 16

Présentons maintenant les titulaires de ces Sièges patriarcaux


catholiques, les plus vénérables de l'Eglise après celui de Rome, en
remarquant que dans l'Eglise catholique tous les Patriarches orientaux
ont la nationalité d'un pays arabe.

Le patriarche d'Alexandrie des Coptes catholiques, S.B. Antonios Naguib


est égyptien.

Le patriarche d'Antioche des Maronites, Mâr Nasrallah Butros, Cardinal


Sfeir est libanais.

Le patriarche d'Antioche des Syriens catholiques, Mâr Ignace-Pierre VIII


Abdel-Ahad, est syrien.

Le patriarche d'Antioche des Grecs melkites catholiques, SB Grégoire III


Laham, est syrien .
17

Le patriarche latin de Jérusalem, S.B. Michel Sabah est palestinien.

Le patriarche de Babylone pour les Chaldéens, Mâr Emmanuel III,


cardinal Delly est irakien18.

Le patriarche de Cilicie pour les Arméniens catholiques, S.B. Narsès


Bedros XIX Tarmouni est égyptien.

Voilà donc sept patriarches parlant l'arabe et qui sont les pères et les
chefs d'Eglises (pater et caput ecclesiae ) de millions de chrétiens qui
sont du monde arabe depuis des siècles et qui sont tous des
personnalités fort à l'aise dans la langue et la culture arabes 19.
Signalons que Beyrouth et Damas, constituent aujourd'hui comme une
«Nouvelle Antioche » puisque deux de nos Patriarches d'Antioche, le
syrien et le grec, y ont une résidence.

La langue arabe et les chrétiens


d'Orient
Au Proche et au Moyen-Orient la grande majorité des chrétiens parlent
l'arabe, la langue de leurs pays, et célèbrent une partie importante de
leur liturgie dans cette langue. En Irak, si la majorité des chrétiens
parlent en priorité l'araméen, dans sa forme appelée « soureth » et si
dans certaines régions ils parlent kurde ou turcoman, ils n'en pratiquent
pas moins habituellement et parfois exclusivement la langue arabe.

La langue liturgique des Grecs est le grec, celle des Syriens et des
Maronites est le syriaque occidental, celle des coptes est le copte, celle
des Chaldéens est le syriaque oriental, celle des Arméniens est
l'arménien et celle des Latins de Jérusalem est le latin. Mais pour tous
ces rites, l'arabe est une langue liturgique incontournable.

La langue arabe est une grande langue du christianisme et depuis


longtemps. Le Père Samir Khalil aime à dire : « Citez moi une langue du
christianisme qui plus que la langue arabe, est toujours vivante et cela
depuis des siècles ! »
20

Étonnement et admiration en Algérie lors de la visite du patriarche


Maximos V Hakim, de nationalité égyptienne, qui, venu en visite officielle
au temps du président Boumedienne, avait fait un magnifique discours
en arabe . Beaucoup en l'écoutant, se demandèrent d'où lui venait cette
21

connaissance si parfaite de l'arabe, lui qui n'était pas musulman.


La langue arabe est bien la langue sacrée des musulmans, mais son
emploi par les chrétiens d'Orient est parfois ignoré au Maghreb.

Étonnement aussi de bien des chrétiens d'Occident qui découvrent que


des millions de leurs frères chrétiens, parlent arabe, étudient la
théologie, célèbrent leurs liturgies et prêchent dans cette langue.

Voici maintenant quelques aperçus, fort brefs, non exhaustifs, cela pour
dire à nouveau l'importance de la langue arabe dans le christianisme
oriental.

Au Liban et en Syrie
Les Maronites publièrent à Alep au 11e siècle, un livre intitulé le
« Huda' », contenant des directives en manières canoniques et
liturgiques. L'arrivée des musulmans dans la région avait imposé la
langue arabe, et l'Eglise maronite adopta alors cette langue comme
langue liturgique à côte du syriaque, mais pendant des siècles l'arabe
s'écrivit en caractères syriaques, c'est le Karshûnî .
22

En 2005, le Synode patriarcal maronite qui s'est tenu au Liban a décidé


que les nouvelles traductions arabes des livres liturgiques seraient
toujours faites à partir des textes originaux syriaques de ces liturgies .
23

Quant à la communauté arménienne, elle est souvent partagée au sujet


de l'utilisation liturgique des langues. Bien des Arméniens qui parlent
arménien ne savent pas le lire ou l'écrire, et beaucoup d'entre eux sont
plus à l'aise en arabe.
A Alep, il y a ceux que l'on appelle « les Arméniens de langue arabe » et
les « Arméniens de langue arménienne», qui vont, les uns aux offices en
arabe et les autres aux offices en arménien. Dans les églises
arméniennes il y a souvent deux messes : l'une en arabe et une autre en
arménien.

Dans le beau volume édité par l'UNESCO, Le livre et le Liban. 24

Basile Aggoula, l'éditeur des inscriptions araméennes d'Hatra, y a


présenté l'histoire du livre libanais de 1585 à 1900. Cette histoire a
commencée au monastère de Saint –Antoine près de la vallée de la
Qâdîshâ, a manifesté le rôle des chrétiens dans le domaine de
l'imprimerie de livres, de journaux et de revues en arabe. Monsieur
Aggoula conclut ainsi son étude : « Le livre libanais, à l'intérieur comme
à l'extérieur, explique en grande partie l'éveil de la conscience arabe »
25

Nombreux sont les dictionnaires arabes publiés par l'Imprimerie


Orientale des Jésuites : du Maroc à l'Irak, qui ne connaît le Belot, les
divers Munjid et les grammaires arabes telles celle Shartûnî.
Le 19è siècle les Pères jésuites de Beyrouth ont édité une magnifique
Bible arabe en trois volumes et au 20è, ils en ont fait une nouvelle
édition en un, ou deux volumes, qui est l'équivalent arabe de la la « Bible
de Jérusalem ».
Il existe aussi une édition de poche Nouveau Testament qui est un vrai
trésor pour les fidèles qui vivent dans le monde arabe et ailleurs.

Et aussi Mawsû'a al-ma'rifat al masihiyya, une petite encyclopédie de


culture chrétienne. Elle présente en une série de livrets sur des sujets
dogmatiques, bibliques, moraux, liturgiques, spirituels et d'hagiographie.

Le domaine liturgique :
Les rites catholiques présents au Liban et en Syrie ont édité en arabe
leurs nouveaux missels et leurs bréviaires, suivant la demande du
concile soucieux de voir toutes les liturgies faire leur aggiornamento.

Nous avons une nouvelle édition de l'Office grec melchite traduit à partir
de l'original grec. Cette traduction fut confiée à une commission
liturgique présidée par Mgr Lutfi Lahham, devenu par la suite le
patriarche Grégoire III, et elle fut publiée durant le patriarcat de S.B.
Maximos V Hakim.
Soit cinq volumes : Kitâb al-salawât al-taqsiyya 'ala madâr al-sanat, li-
kanîsat al-rûm al-malakiyyin al-kâthûlik.
Et un volume pour la Semaine Sainte al-'usbû' al-'azîm al-muqaddas .26

Chez les Syriens catholiques, il y a maintenant nouveau missel pour la


messe :
Kitâb rutbat al-qaddâs hasab taqs al-kanîsat al-suryyânyyat al-rasûliyyat
al-antâkiyyat. 27

Chez les Maronites il y a une nouvelle édition arabe du Shîmo, ou


bréviaire : Salât al-fardh al mârûnî, en six volumes.

Le Patriarche émérite Stephanos II, cardinal Ghattas, précédemment


patriarche des Coptes catholiques avait fait procéder à une traduction
arabe de la messe copte .28

Quddâs al-qiddis bâsîlîûs al-kabîr.

Cette traduction toutefois semble avoir déplu à des responsables coptes


orthodoxes qui ont pensé que la langue copte avait disparu chez les
catholiques .
29

Un récent entretien avec un jeune copte orthodoxe originaire de Haute


Egypte m'a pourtant bien confirmé l'importance de la langue arabe chez
les Coptes orthodoxes et l'opportunité de mieux la reconnaître au plan
pastoral : « Seul le prêtre à la messe, m'a-t-il dit, emploie un peu la
langue copte et il est seul à la comprendre. Tout le reste chez nous,
prières, catéchèse, prédication se fait en arabe ».
En 2004, fut faite à Assiout pour les coptes catholiques, une nouvelle
édition du bréviaire, al-agbiyya,

L'enseignement de l'Eglise
Les pères paulistes du Liban ont réalisé d'excellentes traductions arabes
des documents officiels de l'Eglise et cela souvent sous la direction du
père Hannâ al-Fâkhûrî.
Nous possédons aujourd'hui :

La traduction complète des textes du Concile,


Al- majma' al-fâtîkânî al-thânî : dasâtîr, qarârât, byânât, Beyrouth, 1992

Le Catéchisme de l'Eglise catholique.


Al-ta'lîm al-masîhî lilkanisa al-kathoulikiyya , Beyrouth,1999
La traduction du Code de droit canon oriental

Toutes les récentes encycliques des Papes sont accessibles en arabe


et sont diffusées régulièrement par les nonciatures des pays
arabes :
Parmi les encycliques qui on eu le plus de succès citons celle de Jean
Paul II, Al îmân wa al'aql , La foi et la raison,
Karamatu –l mar'at (La diginté de la femme)
et celle de Benoît XVI, Allah mahabbat, (Dieu est amour)

La presse chrétienne et les Media


Il existe de nombreuses revues arabes chrétiennes :

Al-Mashreq, des pères jésuites de Beyrouth


Al-Masarat , des pères paulistes à Harissa. et celle des Missionnaires
libanais : al-Manârat

A signaler aussi les nombreuses éditions arabes faites par le Patriarcat


Syrien- orthodoxes de Damas.

La place des Médias chrétiens d'expression arabe est à remarquer ici :


Pour la radio au Liban : Sawt al-mahabbat (La voix de la charité) et au
plan international, Radio Vatican, dont l'émission en arabe est assurée
quotidiennement par les Pères maronites mariamites.
Pour la télévision, la chaîne Télé Lumière, regardée avec passion dans
tout le Proche et Moyen Orient et par les fidèles de l'émigration.
J'ai constaté cela à Istanbul où depuis quelques années grâce à Télé
Lumière la télévision a pris un nouveau visage pour les chrétiens d'Irak
qui s'y trouvent. C'est souvent du matin au soir que cette chaîne
chrétienne est regardée.
A tous ces « textes arabes » évoqués on peut encore ajouter les « textes
arabes » chantés par des « voix chrétiennes en Orient », par exemple
celle des chanteuses comme Fayruz, du père Mansour Labaki, de la
sœur Kayrouz et de Wâdî al-Sâfî. 30

-En Irak

Le séminaire syro chaldéen, de Mossoul


Le Séminaire Saint Jean de Mossoul institué au XIXe siècle pour la
formation du clergé chaldéen et syrien de l'Irak fut confié durant un siècle
aux Dominicains (1878-1978). Ce séminaire qui était bi-rituel, chaldéen
et syrien, a joué un grand rôle dans la vie spirituelle et culturelle de
l'Eglise en Irak.
La connaissance de l'arabe y était excellente de même celle du syriaque
et de cette langue d'étude qu'était aussi le français. Tout un clergé fort
compétent dans les matières théologique, historique a pu écrire livres et
articles dans un excellent arabe.

L'imprimerie des Dominicains à Mossoul


Le père Besson, le premier dominicain français venu à Mossoul au
milieu du 19e siècle , fonda une imprimerie, l'une des premières d'Irak,
31

qui avait pour but de subvenir aux besoins en livres pour les écoles que
les Dominicains venaient de fonder à Mossoul et dans ses environs.
L'imprimerie se développa et édita la première Bible arabe de l'Irak ainsi
que les livres liturgiques arabes et syriaques pour les rites chaldéen et
syrien .
32

Imprimer des livres en arabe durant l'Empire ottoman, au 19e siècle,


était une chose courageuse, c'était une vraie participation à la nahdha ou
renaissance de la culture arabe .33

Bagdad et la langue arabe


Au terme du « Mahrajân Ephrem- Hunayn » précédemment évoqué qui
regroupa bien des arabisants, tels Gérard Troupeau, Fû'ad Ephrem al
Bustânî, le Père de Halleux, le père Anawati…les participants furent
invités à se déplacer pour une brève visite à Mossoul. Beaucoup de
congressistes participèrent à la célébration de l'Eucharistie dans l'église
du couvent des Dominicains.
C'est alors que le docteur Fû'ad Ephrem al-Bustânî, demanda qu'on lui
accorde la joie, au cours de la messe, de lire un texte d'Isaïe, dans la
traduction arabe éditée par les Pères de Mossoul, et pour laquelle il avait
beaucoup d'admiration 34 .

Une nouvelle génération d'historiens de l'Eglise


en Irak
Le Père Jean Maurice Fiey , dominicain, fut un maître dans le domaine
35

de l'histoire et de l'archéologie chrétienne de l'Irak, il passa 40 ans en


Irak avant de terminer sa vie à Beyrouth.
Son oeuvre est considérable et il intéressa à ses recherches bien des
prêtres de l'Irak

Plusieurs de ses livres ont été traduits en arabe et j'ai constaté au Caire,
à la bibliothèque de l'IDEO, qu'ils étaient souvent demandés par les
lecteurs musulmans, surtout son livre : Ahwâl al-Nasârâ fî khilâfat banî
al-'Abbâs , (Les chrétiens au temps des Abbassides)
36

-De même fut traduit en arabe son livre Mossoul chrétienne , sous le
37

titre de Al-masihiyya fîl Mawsil, Bagdad, 2000.

Nombreux sont les écrits du père Albert Abouna , concernant l'histoire


38

de l'Orient et de l'Irak chrétien, longtemps professeur de langue et de


littérature araméenne au séminaire Saint Jean de Mossoul, citons son
histoire de l'Eglise syrienne orientale : Târikh al-kanissat al-syriâniyya al-
charquiyya , 3 volumes Beyrouth, 1986.
Et son très utile livre sur la littérature araméenne : « Adab al-lughat al-
arâmiyyat », Beyrouth, 1970. Ce livre est trsè souvent demandé dans
notre bibliothèque de l'IDEO au Caire, par des étudoiants des quatre
universités de la ville qui étudient le syriaque et en particulier à al-Azhar.
les ouvrages du père Yusuf Habbi, sur l'histoire de l'Eglise chaldéenne
sont nombreux, il fut membre de l'Académie syriaque de Bagdad et
directeur de la revue de culture chrétienne Bayna al nahrayn, publiée à
Bagdad.

' Al-Fikr al-Masîhî ( La Pensée chrétienne )


La revue mensuelle irakienne, « al-Fikr al-Masîhî» et son directeur, le
Père Yûsif Thomas, op, ont reçu en 2007, la médaille d'or de l'Union
Catholique Internationale de la Presse , il convient donc d'évoquer cette
revue qui est une belle illustration de la place du texte arabe chrétien .
39

Cette distinction internationale récompense le courage de tous ceux qui


ont eu la charge de cette revue chrétienne, unique en son genre en Irak,
et ceci nous porte à l'espérance au sujet de ce pays, alors que,
quotidiennement, nous attristent les nouvelles qui en parviennent, toutes
plus terrifiantes les unes que les autres.
La revue 'Al-Fikr al-Masîhî a été fondée à Mossoul en 1964 par un
groupe de prêtres et en 1995, elle fut confiée aux Dominicains de
Bagdad. Son directeur est depuis lors le Père Yousif Thomas . 40

Comment ne pas évouqer ici l'un des fondateurs de cette revue, le père
Pios Affas, qui vient d'être enlevé ces jours ci à Mossoul, ainsi que le
père Mazen Icho et qui sont menacés de mort et pour la libéraiton
desquels un million de dolars sont demandés41.

Il s'agit d'une revue de formation et d'information chrétienne qui donne


un enseignement catéchétique et théologique, évoque l'histoire
chrétienne de l'Irak, rapporte les événements de la vie de l'Eglise et se
fait l'écho des grands documents du Magistère.
La revue Al-Fikr al-Masîhî réfléchit aussi sur des problèmes comme le
respect de la vie, l'écologie, la famille, l'oecuménisme, le dialogue
interreligieux et les courants philosophiques contenporains.
Rédigée dans une langue arabe parfaite, la revue rayonne dans bien des
pays arabes et dans la diaspora irakienne à qui elle aprtage touteune
information en arabe, qui autrement ne pourrait pas parvenir à un public
chrétien seulement arabophone..
C'est ainsi que dans le denrier numéro, de Juin 2007, j'ai pu lire une
présentation arabe des travaux de monsieur Pierre Perrier sur les
Evangiles.
Les Carmes de Bagdad
Parmi les grands arabisants de l'Irak moderne il faut mentionner le
Père Anastase Marie al-Karmély (1866-1947), fondateur, en 1911,
de la revue « Loghat al-Arab ».

C'est le père Anastase qui accueillait souvent, au couvent des Carmes


de Bagdad, le jeune Louis Massignon, lui,aussi passionné d'arabe,
lors de son séjour à Bagdad en 1908. Massignon a su dire sa dette
envers ce père carme et envers l'Irak . 42

- En Egypte
C'est en Egypte que se trouve le plus grand nombre de chrétiens
arabophones au Proche-Orient, environ 8 millions.
Une traduction des textes du concile Vatican II a été réalisée en Egypte,
ainsi qu'une traduction du code de droit canon oriental.
Traduits aussi au Liban, ces deux documents ne font pas double emploi,
car l'arabe égyptien et l'arabe libanais ont parfois des particularités de
vocabulaire qui posent problèmes pour certains lecteurs.

Les librairies chrétiennes d'expression arabe sont très nombreuses au


Caire, citons la Maktabat al-Mahabbat , où celle du quartier Sakkakini.

Bien connues au Caire sont les bibliothèques de l'Institut d'Etudes


Orientales Chrétiennes des Pères franciscains au quartier du Mouski, au
Caire et celle des Dominicains de l'IDEO dans lesquelles les sections
43

sur le monde arabe chrétien y sont particulièrement riches.

Ayant rencontré récemment le patriarche copte catholique celui-ci me le


dit clairement : «Nous les Coptes, en Egypte, nous sommes de culture
arabe ».

En Terre Sainte
Le patriarcat latin de Jérusalem
La connaissance de la langue arabe est très remarquable parmi le
clergé et les fidèles de l'Eglise latine en Terre Sainte.

Le Bréviaire latin en arabe a été renouvelé après le concile de Vatican


II : Kitâb salât al-sâ'ât, Amman, 1994

Les Missels aussi ont été renouvellés : Kitâb al-qaddâs al-yawmî ,; 44

Kitâb al-qaddâs, 'ayyâm al-ahhad wa al-a'yâd, ma'a al qirâ'ât , ainsi


45

que le rituel pour l'administration des sept sacrements : - Kitâb al-


tuqûs
Ces livres furent habituellement préparés par les longs travaux du père
Georges Sâbâ.

L'imprimerie des Franciscains de la Custodie de la « Terra Santa » à


Jérusalem, est l'une des premières à avoir été fondée dans le monde
arabe. Les missels et bréviaires qu'ils imprimèrent furent l' arabisation
des prières du rite latin et des chants grégoriens.

Les sœurs du Rosaire de Jérusalem

Citons une remarquable congrégation de religieuses arabes,


maintenant ratachées à l'ordre domincain, « Les S œurs du Rosaire
de Jérusalem », fondée à Jérusalem au 19e siècle et qui n'est
composée que de soeurs arabophones originaires de Palestine, du
Liban, de Jordanie, de Syrie et d'Egypte. Plusieurs sœurs on fait
des doctorats de langue arabe et dans leurs nombreuses et
excellentes écoles l'arabe y est fort bien étudié à côté de l'anglais
et au français.

L'arabe, une grande langue du


christianisme
La dette du monde arabe est grande envers leurs chrétiens car ceux-ci
furent souvent les artisans de la nahda ou « renaissance » de la langue
arabe au temps de l'Empire ottoman et ils sont, de nos jours encore, de
remarquables artisans de la culture arabe . 46

La langue arabe est une grande langue du christianisme et ceux qui ont
la joie de pouvoir pratiquer cette langue savent combien la lecture privée
ou solennelle de l'Evangile en arabe est savoureuse.
La langue arabe rend admirablement le génie littéraire des textes
évangéliques et peut aider à leur compréhension.

Signalons que lors de l'ouverture du Synode pour l'Afrique par le pape


Jean Paul II, le 10 avril 1994, la lecture de l'évangile fut faite en plusieurs
langues, dont l'arabe. Ceci provoqua chez bien des Africains un
changement de mentalité : la langue arabe n'était donc pas seulement
une langue utilisée par les musulmans, elle était aussi l'une des langues
du christianisme.

Mgr Sélim Sayegh, archevêque latin d'Amman évoquant le dialogue


islamo-chrétien que « c'est un dialogue naturel en Jordanie et enraciné.
Un chrétien arabe n'a aucune difficulté à communiquer avec un
musulman. Nous parlons la même langue, avons les mêmes racines
culturelles et partageons le même pays » . 47

Jacques Maritain dans son livre « Religion et Culture » , dit que 48

« l'hospitalité » fait partie de l'essence du catholicisme. Jésus, dit-il,


appréciait cette vertu, dont il bénéficiait par exemple à Béthanie, tout en
la pratiquant à un niveau supérieur :
« Jésus mangeait et buvait chez ses amis de Béthanie, il était reçu à
Béthanie, mais c'est Béthanie qui recevait de Jésus.
En effet tous les éléments que le catholicisme emprunte aux civilisations
humaines, ses langues liturgiques et ses langues de prédication,… la
sagesse humaine assumée par sa théologie, tout cela est pris par la
même miséricorde qui a amené l'Incarnation divine.
Le rapport entre le Verbe fait chair et l'humanité, comme celui de l'Eglise
et du monde, est de l'ordre d'une immense hospitalité ».

Fr. Jean- Marie Mérigoux, op

1 Proche Orient Chrétien , Tome 47, fasc. 1-3. Jérusalem –Beyrouth, 1997, p.8.

2 Cf. idem , p.380

3 G. Troupeau, op cit, p. 381.


4 En arabe on distingue facilement entre "Suriâne" qui signifie chrétien de l'Eglise
d'Antioche, l'ancienne capitale de la Syrie chrétienne, et "Sûry" qui désigne un
citoyen de la République de Syrie. En « soureth », l'araméen parlé aujourd'hui en
Irak, pour dire un « chrétien », on dit « sourayyé », c'est-à-dire « Syrien ».

5 Le « soureth »
6 G. Troupeau, op cit, p. 381.

7 Cf. Georges Anawati, op, Factors and effects of arabization and islamization in
medieval Egypte and Syria, in Islam cultural change in the middle ages, Wiesbaden,
Otto Harrassowitz, 1975.

8 Cf. Gérard Troupeau, Eglises et chrétiens dans l'Orient musulman , Histoire du


christianisme, Desclée, Vol. 4, 1993, pp.375-456.

9 Pour une brève évocation de Bayt al Hikmat, cf. Jean-Marie Mérigoux, op, « Bayt
al-Hikmat », in « L'Irak, Bagdad et les Abbassides » in. Université dominicaine sur
internet « Domuni » http://www. stjerome.domuni.org

10Père Georges Anawati,op. : Al masihiyya wa al hadharat al arabiyya, Le Caire


1992.

11 François Nau, Les Arabes chrétiens de Mésopotamie et du Syrie du VIIe au VIIIe


siècle , Paris 1933.

12 Cf. Gérard Troupeau, « Littérature arabe chrétienne » dans Dictionnaire des


littératures , Paris, Larousse, t. 1, pp. 89-90.

13 Va à Ninive !, p. 24- 30.

14 Jean-Marie Mérigoux, op, Va à Ninive ! un dialogue avec l'Irak, Paris, le Cerf,


2000, pp. 25-30, 55-57

15 Signalons que le mot « uniate, uniates » est ignoré en Orient arabe catholique, et
comme il est souvent « péjoratif » et il est impropre à désigner des fidèles qui sont
pleinement « catholiques ».

16 Va à Ninive ! : p. 323-324.

17 Comme le patriarche grec catholique d'Antioche possède aussi les titres


patriarcaux d'Alexandrie et de Jérusalem, la nationalité égyptienne et la nationalité
libanaise lui sont automatiquement octroyées par les gouvernements de ces deux
pays.
18En octobre 2007, S.S. le pape Benoît XVI, vient de créer cardinal le patriarche
chaldéen.

19 Cf. le livre du père Jean Corbon :Al-'ab jân Kûrbûn, Kanîsat al-mashriq al-
arâbîyyi, (l'Eglise des Arabes), Beyrouth, 1996.

20 Cf. Va à Ninive ! , p. 176.

21 Cf. La revue du patriarcat melchite : « Le Lien », numéro spécial, 3/1978,


« Maximos V en Algérie ».

22 Cf. E.I., 2, Gérard Troupeau, art « karshûnî"

23 La préparation de ce Synode a commencé en 1985 sous la conduite du Père


Yoakim Moubarak. Les actes du Synode viennent d'être publiés: Al Majma' al
bâtrîarkî al mârûnî, Bkirkî, Liban, 2006.

24 « Le livre et le Liban jusqu'en 1900 », Paris, UNESCO et AGECOOP, 1982, et cf.


la plaquette publiée en 1982, par la Délégation permanente du Liban auprès de
l'UNESCO : « Inauguration le 8 septembre 1982, par Monsieur Jacques Chirac,
maire de Paris, de la plaque commémorant la naissance de la typographie arabe en
France au 23, quai d'Anjou, île Saint Louis, où habita Gabriel Sionite.

25 Le livre et le Liban, Paris, UNESCO, AGECOOP, 1982, p. 313.

26 Jounieh, Liban, 1998-2000.

27 Jounieh, Liban, 1978 et une édition avec aussi le texte turc à Istanbul, 1991

28 Le Caire, 1990. Le rite copte, issu du rite byzantin, s'est développé en adoptant
bien des éléments de l'héritage proprement égyptien du peuple chrétien d'Égypte, en
utilisant l'ancienne langue égyptienne écrite en lettres grecques, c'est-à-dire la
langue copte, et en utilisant bien des symbolismes propres à la vallée du Nil dans
lequel il s'est développé. Ce rite est manifestement bien plus "égyptien" que le rite
byzantin qui n'avait su le devenir à l'époque où il était partout répandu dans le pays.

29 Le mot "copte" veut dire "égyptien", mot qui vient du grec : aigyptos , lequel vient
de l'égyptien ancien gou-ptah, c'est-à-dire le pays où se trouve le "temple" du dieu
"Ptah", à Memphis, au sud du Caire.
30 Et encore la chorale de la septième université chrétienne du Liban, l'université
Notre Dame fondée par le Père François Eid, précédemment supérieur des
Mariamites et actuellement évêque Maronite d'Egypte et d'Afrique. (Cf. le CD que
nous entendrons ici même, offert par son auteur, très intéressé par notre colloque).

31 Cf. Va à Ninive , p. 449.

32 Va à Ninive ! p. 449.

33 Pour les livres arabes imprimés chez les Dominicains à Mossoul cf. M.W. Albin,
« Preliminary Bibliography of Arabic Books printed by the Dominican Father in
Mosul », MIDEO, 16.

34 Fu'ad Ephrem al-Bustany fut président de l'Université libanaise. Il est l'initiateur de


l'Encyclopédie libanaise Dâ'irat al-ma'ârif, (Beyrouth, premier volume en 1957).

35 Cf. Jean-Marie Mérigoux, « In memoriam ; frère Jean Maurice Fiey, op, 1914-
1995 » Studia iranica, 26, Paris, 1997, 127-131.

36 Beyrouth, 1990

37 Beyrouth 1957

38 Il fut aussi disciple du Père Raymond Tonneau, professeur de patrologie syriaque


au Séminaire de Mossoul.

39 Web site de la Pensée chrétienne : www.alfikr-almasihi.com ; email :


dominica@uruklink.net

40 Le Frère Yousif Mirkis Thomas est né à Mossoul en 1949, d'une famille


chaldéenne originaire du Nord de l'Irak. Au terme de sa formation au Séminaire Syro-
Chaldéen de Mossoul, il entra dans l'Ordre dominicain. En 1980, il fut ordonné prêtre
à Mossoul par l'évêque de Zakho. Docteur en théologie, il étudie aussi l'éthnologie.
Le Père Yousif est à Bagdad, l'un des fondateurs du Centre de théologie pour les
laïcs et dirige la plus importante librairie chrétienne d'expression arabe. Il enseigne
au Grand Séminaire patriarcal, transféré récemment pour des raisons de sécurité de
Bagdad à Ain Kawa, près d'Erbil, dans le Nord.

41Les deux prêtres ont été libérés le 21 octobre 2007.

42 Cf. Jean-Marie Mérigoux, « La reconnaissance de Massignon envers l'Irak », La


Vie Spirituelle, 1977, 434-443.

43 « Institut Dominicain d'Etudes Orientales » .

44 Jérusalem, 1998
45 Jérusalem, 1988.

46 Rappelons par exemple, que le journal égyptien al-ahrâm , a été fondé au XIXe
siècle par des chrétiens venus de Syrie.

47 Cf. la revue « Peuples du monde », septembre 2007, p. 27

48 Jacques et Raïssa Maritain, Religion et culture, II, § 8, Œuvres Complètes,


Fribourg-Paris, vol. IV (1929-1932) p. 221-222.

Chrétiens et musulmans préparent une conférence commune

Bruxelles accueillera la conférence en octobre

ROME, Mardi 22 avril 2008 (ZENIT.org) - Faire des chrétiens et des musulmans des
partenaires actifs en Europe : tel est l'objectif de la conférence chrétienne musulmane
européenne qui se tiendra à Malines/Bruxelles (Belgique) du 20 au 23 octobre 2008.

D'où l'intitulé de la conférence : « Etre citoyens européens et croyants. Chrétiens et


musulmans, partenaires actifs dans les sociétés européennes ».

L'organisation de cette conférence a fait l'objet d'une réunion du Comité pour les relations
avec les musulmans en Europe (CRME), qui s'est tenue du 17 au 20 avril, à Esztergom
(Hongrie).

Aux côtés des membres du CRME, fondé en 1986 par la Conférence des Eglises européennes
(KEK) et par le Conseil des conférences épiscopales d'Europe (CCEE) pour informer et
encourager les Eglises d'Europe à intensifier les relations avec les musulmans, se sont
rencontrés aussi des musulmans venus de différents pays d'Europe pour préparer ensemble le
programme de la conférence.

Selon le communiqué final de la rencontre du CRME, la conférence « s'ouvrira par la


présentation du thème selon les perspectives chrétienne et musulmane ».

Les participants travailleront en groupes de travail sur les thèmes suivants : « Le rôle des
religions dans la société sécularisée »; « La religion entre institution et foi personnelle »; «
Comment chrétiens et musulmans se voient les uns les autres ? Comment promouvoir le
respect et la compréhension réciproque à travers l'éducation »; « Construire des ponts. Quels
défis doivent affronter nos communautés ? ». Le cardinal Péter Erdo, président du CCEE,
archevêque d'Esztergom-Budapest, qui a accueilli la rencontre, a souhaité, dans son discours,
un approfondissement des relations de collaboration entre croyants chrétiens et musulmans en
Europe, basé essentiellement sur le dialogue.

Une récente enquête sociologique, souligne le communiqué, « a montré que les personnes qui
pratiquent sérieusement une religion ont un haut niveau de tolérance et de capacité de
dialogue ».

« Dans certains pays d'Europe centrale et orientale, ajoute-t-il, on vit des expériences de
cohabitation qui peuvent représenter un exemple valable pour les pays d'Europe
occidentale ». L'ordre du jour de la rencontre d'Esztergom a été l'objet d'un débat sur deux
documents en cours d'élaboration : le premier sur les manifestations de violence où est
impliqué l'aspect religieux ; le deuxième sur la formation du clergé et des agents pastoraux en
ce qui concerne les conséquences de la présence musulmane sur la vie de l'Eglise en Europe.
Ces documents seront prêts dès 2009.

Les membres du CMRE et les participants musulmans ont également parlé de la Lettre
ouverte de 138 guides religieux musulmans aux responsables des Eglises et confessions
chrétiennes du 13 octobre 2007.

Le texte, qui exprime « une volonté de dialogue sur une base spirituelle, libre de
conditionnements politiques et idéologiques », a suscité beaucoup d'intérêt, et nombreuses
sont les réponses qui ont été envoyées ou sont en cours d'élaboration.

Au cours de la rencontre d'Esztergom, conclut le communiqué, les participants ont également


parlé de la Charte des musulmans européens souscrite le 10 janvier dernier par 400
associations et organisations musulmanes d'Europe.

La Conférence des Eglises européennes (KEK) est une assemblée de 125 Eglises de traditions
orthodoxe, protestante, anglicane et vieille-catholique de tous les pays d'Europe, et de 40
organisations associées.

Le Conseil des conférences épiscopales d'Europe (CCEE), regroupe les 33 Conférences


épiscopales présentes en Europe, représentées de droit par leurs présidents, ainsi que les
archevêques de Luxembourg et de la Principauté de Monaco et l'évêque de Chisinau
(Moldavie).

Le statut de dhimmi
Omar, calife de 634 à 644 est le premier à affronter des colonies importantes de chrétiens et
de juifs à qui il décide d’accorder son hospitalité et sa protection.
Cette décision s’exprime sous la forme d’un contrat indéfiniment reconduit, la dhimma, à
condition que les bénéficiaires, les dhimmi respectent la domination de
l’islam.
Un contrat sous domination

Le concept de dhimma qui s’applique aux juifs et aux chrétiens stipule un comportement de
soumission envers les musulmans. Les dhimmi doivent respecter toute une série
d’interdictions : ne pas porter d’arme, ne pas chevaucher un cheval, ne pas construire de
nouveaux lieux de culte, ne pas élever la voix lors de cérémonies ou ne pas ressembler aux
musulmans dans leur habillement. Toutefois, les dhimmi conservent leurs droits internes et
peuvent toujours avoir recours à leurs tribunaux. Le droit de résidence des juifs n’était pas
limité en principe mais il reste que le séjour dans les villes saintes leur étaient interdit.
Certains juifs finissent donc par disparaître de la péninsule arabe à l’exception du Yémen.

Une étape supplémentaire est franchie lorsque les conquérants arabes s’enracinent dans leurs
conquêtes et que le contact avec les dhimmi devient permanent. Il leur est alors interdit de
construire des maisons plus hautes que celles des musulmans, de prendre des noms et des
titres arabes, d’étudier le Coran et de vendre du vin aux vrais croyants. Ils ne peuvent pas non
plus faire partie de la fonction publique, ce qui ne les empêche pas de conserver ou de
conquérir, notamment en Egypte et en Espagne, une place importante dans la haute
administration et plus particulièrement dans les finances.
L’aggravation des restrictions

Le morcellement de l’Empire musulman et l’apparition de nouvelles élites ont des


répercussions au sein des communautés juives. Dans l’Egypte des Mamelouks du XIIIe et
XIVe siècles, de nouvelles règles aggravent le statut de dhimmi : les juifs doivent désormais
porter comme les chrétiens une coiffe particulière, en l’occurrence jaune pour être plus
aisément reconnus. En 1354, les juifs doivent également porter un anneau métallique distinctif
dans les bains publics et les femmes s’envelopper d’un tissu de couleur pour sortir de leurs
maisons.

Le principal tribut que doivent verser tous les dhimmi, en contrepartie de la protection et de
l’hostilité est la djizia. Il est sans doute payé en nature à l’origine mais est rapidement
transformé en capitation, ce qui suffit à démontrer l’état de subjugation auquel était soumis
celui qui était assujetti. Les persécutions des dhimmis sont rares au cours des premiers siècles
de l’islam et ce n’est qu’à partir des derniers siècles du Moyen-Age qu’un raidissement est
noté. La dhimmitude fait partie de la vie quotidienne des pays arabes jusqu’à l’époque
moderne. Les juifs semblent s’en être mieux accommodés que les chrétiens : ces derniers ont
disparu de plus d’un pays où les juifs réussissent à se maintenir comme en Afrique du Nord.
Le monde sépharade, Civilisation (volume II), sous la direction de Shmuel Trigano, Le statut
des juifs en terre d’Islam, essor et disparition de la dhimmitude par Simon Schwarzfuchs, pp
25-37 (Seuil, 2007).

Vous aimerez peut-être aussi