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Comité Scientifique :
Maria Giulia Amadasi Guzzo (Università di Roma La Sapienza)
Jean-Charles Balty (Université de Paris IV)
Corinne Bonnet (Université de Toulouse-Le Mirail)
Marie-Cécile Bruwier (Musée royal de Mariemont)
Hildegard Cancik-Lindemaier (Berlin)
Luciano Canfora (Università di Bari)
Kristine De Mulder (Bruxelles)
Michel Dumoulin (Université catholique de Louvain ; Institut historique belge de Rome)
Hossam El Khadem (Université libre de Bruxelles)
Cécile Evers (Musées royaux d’art et d’histoire, Bruxelles)
Walter Geerts (Universiteit Antwerpen ; Academia Belgica)
Eric Gubel (Koninklijke Musea voor Kunst en Geschiedenis, Brussel)
Robert Halleux (Fonds national de la recherche scientifique, Université de Liège)
Davide Juste (Université libre de Bruxelles)
Ted Kaizer (Durham University)
Véronique Krings (Université de Toulouse-Le Mirail)
Jean Leclant (Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, Paris)
Patrick Marchetti (Facultés univ. N.-D. de la Paix ; Université catholique de Louvain)
André Motte (Université de Liège)
Carlo Ossola (Collège de France)
Vinciane Pirenne (Fonds national de la recherche scientifique, Université de Liège)
Danny Praet (Universiteit Gent)
Bruno Rochette (Université de Liège)
Dirk Sacré (Katholieke Universiteit Leuven)
Jean-Marie Santerre (Université libre de Bruxelles)
John Scheid (Collège de France)
Isabelle Tassignon (Bibliothèque royale de Belgique)
Robert Turcan (Institut de France)
Françoise Van Haeperen (Université catholique de Louvain)
Wilfried Van Rengen (Vrije Universiteit Brussel)
Annie Verbanck (Musée royal de Mariemont)
Comité de rédaction :
Pamela Anastasio
Corinne Bonnet
Walter Geerts
Dianne Michiels
Bastien Toune
Projet éditorial
L’Academia Belgica de Rome et l’éditeur Nino Aragno, proposent, en collaboration
avec l’Institut historique belge de Rome, une réédition complète des œuvres d’un
grand historien des religions et des sciences, Franz Cumont (1868-1947).
Cette entreprise se veut critique et scientifique. Elle a pour ambition de mettre
en lumière les conditions intellectuelles dans lesquelles la pensée de l’historien s’est
formée et épanouie et de mesurer le chemin parcouru, sur le plan des thématiques
et des concepts autant que des méthodes, de lui à nous. Relire et faire relire Cumont,
c’est donc avant tout questionner l’histoire et l’historiographie, la sienne et la nôtre,
dans l’optique de l’histoire culturelle du XIXe et du XXe siècle. L’œuvre de Cumont
apparaît, en effet, comme un carrefour d’idées et d’expériences, un palimpseste de
l’histoire ancienne et contemporaine.
Dans certains domaines, en outre, les travaux de Cumont ont été fondateurs et
restent essentiels. Sa pensée représente un moment historiographique significatif
que le progrès des connaissances et l’évolution des questionnements ont sans
cesse sollicité. Qu’on adhère à ses reconstructions ou qu’on les critique, Cumont
est une référence obligée de notre savoir historique. C’est pourquoi une réédition
d’ensemble s’inscrit encore et toujours dans l’actualité scientifique.
La Bibliotheca Cumontiana comprendra les œuvres majeures de Cumont (Scripta
maiora), ainsi que divers volumes de Scripta minora et de Scripta inedita. Cette
entreprise de longue haleine s’étalera sur de nombreuses années et prévoit la
publication de deux volumes par an, à partir de 2006. On a opté pour une édition
scientifique et critique, enrichie d’une introduction substantielle par les éditeurs
scientifiques de chaque volume et d’un appendice (« L’Atelier de Franz Cumont »)
contenant la transcription des notes manuscrites, inédites à ce jour, figurant dans les
volumes de l’Auteur, conservés à Rome.
L’Introduction mettra les travaux de Cumont en perspective, en faisant le point
sur la genèse de l’œuvre, ses sources et sa bibliographie, les méthodes qui y sont
sollicitées, les questionnements qui l’animent, enfin sur sa réception au sein des
réseaux intellectuels. L’Atelier contenant la transcription des notes manuscrites de
Cumont constituera une plus-value importante dérivant du matériel inédit conservé
à l’Academia Belgica. Il éclairera notamment la manière dont Cumont travaillait et
actualisait constamment ses recherches.
Autour de l’Academia Belgica et de l’héritage scientifique de Franz Cumont,
autour de la Bibliotheca Cumontiana, notamment, s’est noué un réseau de collaboration
scientifique internationale à l’image du parcours intellectuel d’un savant qui a su
marquer son temps et décloisonner les savoirs.
Nos remerciements les plus vifs vont à Monsieur et Madame J. de Cumont pour
l’appui apporté à nos travaux et pour la grande libéralité avec laquelle ils nous
permettent de travailler sur le legs de Franz Cumont.
Corinne Bonnet et Walter Geerts
Scripta Maiora - I
Franz Cumont
Academia Belgica
Institut historique belge de Rome
Scripta Maiora - I
Franz Cumont
Introduction historiographique
par Corinne Bonnet & Françoise Van Haeperen XI
Préface 00
Index 00
*
Nos remerciements vont à Pascal Payen et Nicole Belayche pour leur précieuse relec-
ture critique de ces pages.
1
Désormais cité sous la forme RO. L’édition qui sert de référence est la quatrième, parue
chez Geuthner en 1929. Les renvois sont donc faits selon la pagination de cette édition.
2
Pour les principaux éléments de sa biographie, on consultera C. Bonnet, La correspon-
dance scientifique de Franz Cumont conservée à l’Academia Belgica de Rome, Bruxelles-Rome,
1997, p. 1-67.
3
Une partie de ces questions a été traitée dans un article de C. Bonnet, « Les religions
orientales au laboratoire de l’hellénisme. 2. Franz Cumont », Archiv für Religionsgeschichte
8, 2006 (sous presse). Ce texte, et d’autres à paraître dans la même revue, sont issus
d’une journée du premier atelier scientifique trilatéral sur « Les religions orientales dans
le monde grec et romain », coordonné par C. Bonnet, J. Rüpke et P. Scarpi et financé par
la Fondation Maison des Sciences de l’Homme (Paris), la Deutsche Forschungsgemeins-
chaft et la Fondazione Villa Vigoni, avec l’appui de la Maison des Sciences de l’Homme
de Toulouse.
4
À consulter sur cette catégorie conceptuelle, J.-M. Pailler, « Les religions orienta-
les, troisième époque », Pallas 35, 1989, p. 95-113 ; Id., « Les religions orientales selon
Franz Cumont. Une création continue », MEFRIM 111, 1999, p. 635-646 ; N. Belayche,
« “Deae Syriae Sacrum”. La romanité des cultes “orientaux” », Revue Historique 302, 2001,
p. 565-592 ; Ead., « L’Oronte et le Tibre: l’ “Orient” des cultes “orientaux” de l’empire
romain », in M.A. Amir-Moezzi - J. Scheid (éd.), L’Orient dans l’histoire religieuse de l’Eu-
rope, Leuven, 2001, p. 1-35 ; T. Kaizer, « In search of oriental cults. Methodological
problems concerning ’the particular’ and ’the general’ in near eastern religion in the
hellenistic and roman periods », Historia 55, 2006, p. 26-47.
5
F. Cumont, Alexandre d’Abonotichos ou un épisode de l’histoire du paganisme au IIe siècle ap.
J.-C., Gand, 1887.
6
E. Renan, Histoire des origines du christianisme. VI. Marc-Aurèle et la fin du monde antique,
Paris, 1882.
7
Cf. G. Stroumsa, La fin du sacrifice. Les mutations religieuses dans l’Antiquité tardive, Paris,
2005.
8
Sur le titre, cf. ma mise au point dans l’article dans Archiv für Religionsgeschichte 8, 2006
(sous presse).
9
Cette fondation, instituée en 1853 pour octroyer des bourses à des étudiants en théo-
logie protestante, organise, à partir de 1878, des conférences non confessionnelles sur
l’histoire des religions. Parmi les conférenciers précédents, signalons F.M. Müller (1878),
E. Renan (1880), A. Réville (1884).
Cher maître,
Excusez moi si je ne vous ai pas remercié plus tôt de votre lettre qui de
toutes celles que m’a valu mon Mithra m’a donné le plus à réfléchir.
Les encouragements que vous m’accordez, m’ont confirmé dans la ré-
solution que j’avais prise de continuer mes recherches sur l’histoire du
paganisme et d’écrire un jour, si mes forces y suffisent, une histoire de
sa disparition — si vraiment il a disparu. C’est un but encore lointain et
je ne sais si je l’atteindrai jamais. [...] Mais que l’on doive le réaliser ou
non, il est bon d’avoir dans la vie au moins un grand projet. Il empêche
l’esprit de s’égarer et l’énergie de s’user dans la foule toujours renais-
sante des affaires quotidiennes. Ut desint vires...
Les RO s’inscrivent donc dans un dessein plus général qu’il est bon
d’avoir présent à l’esprit. Cumont parle, du reste, à propos de son
ouvrage d’un « petit livre sur un grand sujet ». Avant d’en explorer
les ressorts, rappelons qu’en 1906, après ses conférences parisiennes,
Cumont est invité à Oxford, dans le cadre des Hibbert Lectures 9, où il
propose le même sujet, qui débouche finalement sur un livre de 333
pages paru, la même année, dans les Annales du Musée Guimet. Biblio-
thèque de vulgarisation. Cette collection était associée à la Ve section de
l’École Pratique des Hautes Études et était rapidement devenue une
niche intellectuelle au sein de laquelle on pratiquait une approche
laïque et comparative de l’histoire des religions 10. Le livre est dédié
au maître gantois de Cumont, Charles Michel (1853-1929), l’ami de
toute une vie 11, francophile lui aussi, spécialiste d’épigraphie grec-
que et de sanskrit, icône d’un « bilinguisme » intellectuel, monde
classique-Orient, que Cumont pratiqua sans relâche. Très vite, les
RO s’imposent comme une référence. Plusieurs éditions et traduc-
tions voient le jour, qui seront présentées plus avant. À un siècle de
distance, les RO ne sont pratiquement plus utilisées pour l’analyse
historique qu’elles recèlent, mais elles constituent assurément un
horizon historiographique très prégnant.
10
Sur ces «circuits intellectuels et éditoriaux», l’importance des milieux protestants et la
tendance à la laïcisation de l’étude des religions, cf. P. Cabanel, « Les sciences religieu-
ses en Europe et la formation de Franz Cumont », MEFRIM 111, 1999, p. 611-621. Émile
Guimet, riche industriel lyonnais, transféra à Paris, en 1888, son Musée des religions. Il
finança alors une collection éditoriale et la Revue de l’histoire des religions.
11
Sur Ch. Michel, passé à l’Université de Liège en 1892, cf. Bonnet, Correspondance, p.
319. L’hypothèse d’A. Rousselle selon laquelle cette dédicace serait un « acte manqué »,
le vrai et nouveau maître de Cumont étant Loisy, ne semble pas fondée.
12
On relira avec profit, en parallèle, la Préface des Textes et monuments figurés relatifs aux
mystères de Mithra, I, Bruxelles, 1899, p. IX, où sont déjà réunis les ingrédients des RO :
« Ce livre n’a pas la prétention d’offrir un tableau de la chute du paganisme. Il n’y faudra
pas chercher des considérations générales sur les causes profondes qui amenèrent le
succès des cultes orientaux en Italie... ». La grille de saisie est déjà celle qui opérera dans
les RO, puisqu’il est question de chute, de lutte, de destruction, mais aussi du culte de
Mithra comme « ferment de dissolution », une expression paradoxale qui résume assez
bien la pensée ambiguë de Cumont en la matière. Il semble avoir déjà en tête le projet
des RO, lorsqu’il écrit « ce vaste sujet (= « les phases diverses de la lutte entre l’idolâtrie
et l’Église grandissante »), que nous ne désespérons pas de pouvoir aborder un jour... » ;
et p. XII : « ce livre n’est pas une conclusion mais un prologue ».
13
Il l’affirme dès la Préface, p. VII.
14
On trouve des échos à cette perspective chez son ami M.I. Rostovtzeff, Mystic Italy,
New York, 1927, et The Mentality of the Hellenistic World and the Afterlife, Harvard 1938 : cf.
P.G. Michelotto, « Tra religione e archeologia: Mystic Italy di M. Rostovtzeff », Anabases
2, 2005, p. 53-77.
15
Son expression apparaît p. VIII de la Préface.
16
Le vocabulaire est, à cet égard, très significatif. Cumont parle, au sujet des religions
polythéistes, de dogmes, de sainteté (ou de rites sanctifiants), de sectes, etc. Le lexique
est donc très connoté par cet horizon.
17
Préface, p. XIX: il s’agit du paragraphe qui clôt la préface de 1906.
18
Sur Droysen, cf. l’introduction de P. Payen, à J.G. Droysen, Histoire de l’hellénisme
(édition intégrale), Grenoble, 2005, p. 5-82. Voir aussi P. Briant, « Alexandre et l’hel-
lénisation de l’Asie : l’histoire au passé et au présent », Studi ellenistici 16, 2005, p. 9-69 ;
P. Payen, « Les religions orientales au laboratoire de l’hellénisme. 1. J.G. Droysen »,
Archiv für Religionsgeschichte 8, 2006 (sous presse).
19
L’opposition entre ces deux termes est naturellement dépassée ; voir, notamment,
G. Bowersock, Hellenism in Late Antiquity, Ann Arbor, 1990, qui envisage l’hellénisme
comme une caisse de résonance des traditions indigènes. Voir aussi T. Kaizer, « In search
of oriental cults. Methodological problems concerning ’the particular’ and ’the general’ in
near eastern religion in the hellenistic and roman periods », Historia 55, 2006, p. 26-47.
20
Droysen parle de « théocrasie ».
21
Cf. infra, p. LXVI, pour le compte rendu d’E. Bickermann qui pointe précisément cette
négligence.
22
RO, p. 2.
23
Cf. supra, note 18.
24
Sur l’ambivalence de la vision de l’Orient chez Cumont, cf. infra, p. XXXIII-XXXIX.
25
Cf. p. 188: « l’ancien culte national de Rome est mort ».
26
L’expression se lit p. 186.
27
RO, p. 59-60.
28
Avec le sous-titre: Les mutations religieuses de l’Antiquité tardive, Paris, 2005.
29
Si Cumont parle de « ferment », Stroumsa évoque le « levain de l’intériorisation ».
30
Stroumsa, La fin du sacrifice, p. 38.
31
RO, p. 8.
32
Cf. infra, p. XXXIII-XXXIX.
33
Sur la conception de la religion par Cumont, cf. infra, p. XXXVI-XLIV.
34
RO, p. 19.
35
Cumont renvoie à ce propos en note à Chamberlain, O. Seeck et T. Franck (p. 214, n.
11).
36
Sur la vision de l’Orient par Cumont, cf. infra, p. XXXIII-XXXIX.
37
Cf. infra, p. XXXVI-XLIV.
38
Le schéma évolutionniste joue donc à différents niveaux : des religions « inférieures »
aux religions « supérieures », mais aussi au niveau de l’évolution interne des religions
orientales. Sur cette logique, cf. infra, p. XXXVI-XXXVII.
39
L’hénothéisme solaire des Sémites « a aplani les voies au christianisme et annoncé son
triomphe », dans la mesure où « il ne restait qu’une attache à rompre, en isolant hors
des bornes du monde cet Être suprême qui résidait dans un ciel lointain, pour aboutir
au monothéisme chrétien » (p. 124). Pour le culte de Cybèle et d’Attis, p. 66ss ; pour les
cultes égyptiens, p. 94 ; pour le mithriacisme, p. 145-149.
40
Ce manque de considération pour le rôle médiateur de la Grèce lui sera reproché. Cf.
infra, p. LXVI.
41
Cf. infra, p. XXXV-XXXVI.
42
On rappellera que le livre ne comporte ni bibliographie ni index. Pour une première
piste, cf. RO, p. 296-297.
43
Cumont possédait la seconde édition revue et corrigée par M. le Baron Silvestre de
Sacy, Paris 1817, en deux tomes.
44
Payen, Les religions orientales (sous presse). Pour Droysen, la destruction du paganisme
est une tâche très méritoire.
45
Sur Renan, cf., notamment, R. Dussaud, « Ernest Renan historien des religions orien-
tales », Journal de psychologie 1923, p. 345-352. Voir Y.-M. Hilaire, De Renan à Marrou: l’his-
toire du christianisme et le progrès de la méthode historique (1863-1968), Lille, 1999.
46
Cf. Marc-Aurèle, p. 579 : « on peut dire que, si le christianisme eût été arrêté dans sa
croissance par quelque maladie mortelle, le monde eût été mithriaste ».
47
M. Olender, Les langues du paradis. Aryens et Sémites : un couple providentiel, Paris, 1989.
rompu 48. Une vision que ne partage pas vraiment Cumont 49, pas plus
qu’il n’adhère au style romanesque de Renan 50 et à ses hypothèses
hasardeuses, même s’il subit de toute évidence, comme beaucoup, le
charme d’une pensée puissante et anti-conventionnelle.
48
Cf. infra, p. XXX-XXXIII.
49
Cf. une lettre de Cumont du 25/7/1915 à la marquise Arconati-Visconti : « Renan
passe aujourd’hui pour un esprit timide, un conservateur effarouché, un réactionnaire,
un clérical. On le citera bientôt comme un Père de l’Eglise ».
50
Cf. p. 148.
51
Aux p. 738-754.
52
V. Duruy, Histoire des Romains, p. 739.
53
Ibidem, p. 749.
54
Ibidem, p. 777.
J. Réville, La religion à Rome sous les Sévères, Paris, 1886, p. 103-104, qui cite Fustel de
55
Coulanges.
56
G. Boissier, La fin du paganisme, Paris, 1891, avant-propos, p. 7.
57
Cf. C. Bonnet, Le « grand atelier de la science » : Franz Cumont et l’Altertumswissenschaft,
héritages et émancipations. 1. : Des études universitaires à la fin de la IèreGuerre mondiale (1888
– 1923), Bruxelles, 2005, p. 242-256.
58
Cf. J. Rüpke, « Römische Religion und “Reichsreligion” : Begriffsgeschichtliche und
methodische Bemerkungen », in H. Cancik - J. Rüpke (éd.), Römische Reichsreligion und
Provinzialreligion, Tübingen, 1997, p. 8-10; voir aussi plusieurs contributions du récent
Colloque sur Wissowa : Ph. Borgeaud - Fr. Prescendi (éd.), Actes du Colloque «Wissowa
2002 : cent ans de religion romaine = Archiv für Religionsgeschichte 5, 2003.
59
Cf. M. Pfaff-Reydellet, « Les «vertus impériales» et leur rôle dans la divinisation du
prince selon Wissowa », in Borgeaud - Prescendi (éd.), Wissowa, p. 80-99.
60
Voir cependant, infra, p. LVII pour la critique avancée dans un compte rendu par
Wissowa quant à la vision négative qu’a Cumont de la religion romaine, définie comme
« enfantine ».
61
Cf. la lettre de Cumont à Wissowa (19 mai 1912) : « Mais c’est avec un sentiment de
soulagement qu’après s’être égaré dans le dédale des hypothèses et avoir gravi non sans
péril l’échafaudage des interprétations, on se retrouve avec vous sur le terrain solide des
faits et de la saine raison. »
62
Cf. le classique d’E. Saïd, Orientalism, Londres, 1978, trad. française, Paris, 1980 (2e éd.
1997). À lire absolument sur le sujet, T. Hentsch, L’Orient imaginaire. La vision politique oc-
cidentale de l’Est méditerranéen, Paris, 1988. Plus littéraire : C. Julliard, Imaginaire et Orient.
L’écriture du désir, Paris, 1996 ; très contemporain : G. Corm, Orient-Occident, la fracture
imaginaire, Paris, 2002
63
T. Hentsch, L’Orient imaginaire, p. 7. Et encore : « L’Orient est insaisissable. Il est par-
tout et nulle part ».
64
On notera ainsi, p. 181, l’expression « la religion de l’Europe », par opposition impli-
cite à celle de l’Orient. Sur le concept d’« orientalisme », en tant que regard scientifique
prédateur des Occidentaux sur l’Orient, voir E. Saïd, Orientalism, et la critique succincte,
mais très juste qu’en propose T. Hentsch, L’Orient imaginaire, p. 12-13 (avec bibliogra-
phie) : « L’ethnocentrisme n’est pas une tare dont on puisse simplement se délester, ni
un péché dont il faille se laver en battant sa coulpe. C’est la condition même de notre regard
sur l’autre » (p. 13, italique de l’Auteur).
65
Cf. F. Cumont, « Les progrès récents de l’histoire grecque », Revue de l’Instruction Pu-
blique en Belgique 36, 1893, p. 9-19: cette révolution a « bouleversé toutes les perspectives,
élargi tous les horizons » ; « Il n’est plus possible de supposer aujourd’hui, comme on le
faisait complaisamment autrefois, que la Grèce ait tout ou presque tout tiré de son pro-
pre fonds. Elle a été pendant longtemps, fort longtemps à l’école de l’Orient ». Voir aussi
RO, p. 15-16 sur les progrès de l’orientalisme.
66
Cf. T. Hentsch, L’Orient imaginaire, p. 167-217 : l’Orient de la modernité.
67
Anquetil-Duperron est aussi l’auteur, en 1778, d’une Législation orientale, parue à Ams-
terdam, où il s’efforce de montrer que le concept de despotisme oriental est faux.
68
Cf. M. Olender, Les langues du paradis, passim.
69
M. Münch, La symbolique de Creuzer, Quinet, Michelet, Flaubert, Paris, 1976. Cf. aussi
B. Bravo, « Dieu et les Dieux chez Creuzer et F.G. Welcker », in L’impensable polythéisme,
p. 375-424. Voir aussi Ph. Borgeaud, « L’Orient des religions. Réflexion sur la construc-
effet, l’idée que l’Orient était le berceau des religions, des mythes et
des symboles. Des « prêtres civilisateurs » – préfiguration des « mages
hellénisés » de Cumont ? – auraient favorisé la diffusion en Occident
de cette symbolique orientale, porteuse d’une vérité mystique.
La fin du XVIIIe et le XIXe siècle sont, parallèlement, marqués
par une renaissance orientale 70 qui, stimulée par les avancées de la
science, touche toutes les branches de la vie culturelle, littérature et
peinture en particulier. Ainsi, en 1829, V. Hugo publie-t-il ses Orien-
tales 71, tandis que G. Flaubert, qui était un ami de Renan, parcourt
le Proche-Orient durant dix-huit mois, en 1849-51, et publie succes-
sivement Salammbô (1862) et Hérodias (1877) 72. On pourrait citer
ici nombre de grands écrivains et artistes qui ont évoqué ou visité
l’Orient pour mieux s’en emparer : le génie occidental féconde les
terres d’Orient.
L’Orient des savants et des artistes participe donc à la fois des
mécanismes de connaissance et d’un imaginaire collectif qui, dans
sa profonde ambivalence, ne peut être dissocié de l’Orient moderne,
c’est-à-dire de l’Empire ottoman, visité et décrit à coup de poncifs
par les Occidentaux 73. Ce vaste empire, sorte d’eau stagnante de la
géopolitique méditerranéenne, est présenté comme une terre de
races sujettes, déchirée par les luttes internes, un discours qui fraya
indubitablement la route au colonialisme. L’Orient moderne est
inerte, passif, voué à l’esclavage et au harem, en écho à son passé
lointain caractérisé par des monarchies absolues, voire tyranniques.
Dans la longue durée de l’histoire, l’Orient est une sorte de poids
mort. Au sein de la vision hégélienne du progrès linéaire de l’huma-
nité, l’Orient n’est qu’une étape transitoire vers la « grande journée
de l’esprit » qui est naturellement occidentale et chrétienne.
Hegel décrit la marche linéaire de l’humanité, d’Est en Ouest,
de l’Asie vers l’Europe, en passant bien évidemment par la Grèce et
tion d’une polarité, de Creuzer à Bachofen », Archiv für Religionsgeschichte 8, 2006 (sous
presse).
70
Cf. R. Schwab, La renaissance orientale, Paris, 1950.
71
Cf. la Préface: «Au siècle de Louis XIV on était helléniste, maintenant on est orienta-
liste. Il y a un pas de fait. Jamais tant d’intelligences n’ont fouillé à la fois ce grand abîme
de l’Asie».
72
Cf. F. Schmidt, « L’évangile selon saint Gustave, ou la construction de l’Orient dans
l’Hérodias de Flaubert », in Amir-Moezzi & Scheid (éd.), L’Orient dans l’histoire religieuse
de l’Europe, p. 71-85; voir aussi I. Lörinszky, L’Orient de Flaubert. Des écrits de jeunesse à Sa-
lammbô : la construction d’un imaginaire mythique, Paris, 2002.
73
Cf. A. Grosrichard, La structure du sérail, Paris, 1979.
74
F. Hegel, Leçons sur la philosophie de l’histoire (trad. J. Gibelin), 3e éd., Paris, 1963, p. 81.
75
Cf. E. Quinet, De l’origine des dieux, Paris, 1828, et Du génie des religions, Paris, 1842.
76
Pour l’intégration de l’Orient dans l’imaginaire culturel allemand, notamment à
l’époque romantique, cf. les belles pages de T. Hentsch, L’Orient imaginaire, p. 194-211.
L’Orient est un « contrepoids onirique et idéologique au rationalisme de l’Aufklärung,
puis au productivisme de la société industrielle naissante » (p. 195).
77
Je cite T. Hentsch, L’Orient imaginaire, p. 209.
78
Cf. supra, p. XVI.
79
Voir aussi P. Briant, « La tradition gréco-romaine sur Alexandre le Grand dans l’Eu-
rope moderne et contemporaine : quelques réflexions sur la permanence et l’adaptabi-
lité des modèles interprétatifs », in M. Haagsma et alii (éd.), The Impact of Classical Greece
on European and National Identities, Amsterdam, 2003, p. 161-180 et Darius dans l’ombre
d’Alexandre, Paris, 2003.
80
Cumont signale même, pour les révoquer, les théories sur la dégénérescence des races :
p. 22 et 214-215, note 11.
81
Il parle de l’« air empesté » des mystères de Sarapis et Isis et de « trübste Zeit » (temps
très troublés).
82
Cf. p. 1 : « Nous avons peine à croire que l’Orient n’a pas toujours été réduit en quel-
que mesure à l’état d’abaissement dont il se relève lentement ».
83
F. Cumont, Fouilles de Doura-Europos, 1923-1924, Paris, 1926, p. XLIV-XLVI. Cf. Briant,
p. 47.
84
RO, p. 98-99.
85
RO, Préface, p. VIII.
86
Avec, là aussi, une ambivalence, puisqu’ils sont à la fois paroxystiques et ascétiques,
mais le cœur de Cumont penche, en vertu de sa vision moralisante de l’histoire, du côté
de l’ascétisme ; il parle de « résistance à la sensualité » (Mithra, note-t-il, n’a pas de parè-
dre) qui est « louable » (ce qui lui a valu la qualification de « névrosé », en marge, de la
part d’un lecteur toulousain anonyme!). On pourrait réfléchir ici sur l’empathie entre le
sujet et l’objet, quand on songe au fait que Cumont a voué sa vie à la science.
87
Cf. p. 30 : « la piété devient gnose ».
88
Cf. les pages 33-41.
89
Cf. p. 48. Voir aussi p. 182, l’opposition entre la « dévotion sensuelle, colorée, fanati-
que » des Orientaux et celle de Rome, « grave et terne ».
90
RO, p. 143-148.
91
RO, p. 148, p. 184.
92
RO, p. 178.
93
On n’oubliera pas que Cumont avait lancé, dès 1898, l’entreprise du Catalogus codicum
astrologorum graecorum.
94
P. 176, il parle de « religion à rebours ».
95
RO, p. 170.
96
Cf., par exemple, RO, p. 185.
97
RO, p. 192 : « le paganisme est devenu une école de moralité ».
98
Ce qui ne l’empêche pas, par ailleurs, de parler de « théologie barbare », de « poly-
théisme souvent abject », une tension interprétative qui n’est jamais résolue.
99
Ici, l’héritage de Renan est sensible.
100
RO, p. 121.
101
RO, p. 121-122. Le positivisme et le scientisme font ici sentir leur influence. Notons
cependant, p. 149, une veine plus sceptique : « si le torrent des actions et des réactions
qui nous entraîne se fût détourné de son cours, quelle vision pourrait décrire les rivages
ignorés où se seraient répandus ses flots ? ».
102
Sur les causes de leur diffusion, qui sont nombreuses, voir supra, p. XX-XXI.
103
B. de Montfaucon, dans son Antiquité expliquée et représentée en figures, publiée entre
1719 et 1757, et W. Winckelmann, dans sa Geschichte der Kunst des Altertums, en 1764, ex-
hibent uniquement des images gréco-romaines des dieux dits orientaux.
104
Ambivalence certes, mais pas nécessairement opposition à l’Occident. Chez Hérodote,
la division passe entre Grecs et Barbares, cette dernière catégorie regroupant des peuples
non grecs qui ne sont pas orientaux, comme les Scythes ou les Thraces. Il faut dès lors
être attentif, comme le note T. Hentsch, L’Orient imaginaire, p. 17-43, à ne pas projeter
en arrière dans le temps, jusqu’à l’Antiquité mythique, fondation et légitimation de nos
catégories, une bipolarisation Orient-Occident qui ne se construira que bien plus tard.
105
Cf. N. Belayche, L’Oronte et le Tibre, p. 1-35.
106
Tacite, Annales XV, 44, 5, qui vise le christianisme naissant.
107
Juvénal, Satires, III, 60-66.
108
Paul, Sent. V, 21, 2.
gères et cultes romains 109, une confrontation qui aurait pu être saisie
de manière moins manichéenne s’il avait davantage pris en compte
l’étape grecque qui remodèle ces cultes et les rend pratiquement
compatibles avec le « paganisme romain ». Car, en vérité, ce sont
des cultes gréco-orientaux qui ont pénétré à Rome, elle-même for-
tement hellénisée au niveau cultuel, de sorte que le choc a dû être
bien moins violent que ne l’imagine Cumont.
En accordant un grand crédit aux sources littéraires et en sous-es-
timant sans doute, comme le lui reprocha J. Toutain 110, l’apport des
sources épigraphiques, moins « idéologiques », Cumont a surestimé
la pars destruens du phénomène qu’il étudiait. Les cultes orientaux
n’ont en fait rien détruit : ils sont entrés en contact avec les cultes
grecs et romains, ont dialogué avec eux, ont été intégrés, hellénisés
et romanisés, sans générer de déclin. Cumont, monothéiste malgré
lui, a négligé le fait que le polythéisme est un espace ouvert, sans ex-
clusivité, ni monopole ; sa logique est collégiale. En outre, la percep-
tion cumontienne des phénomènes d’acculturation, qui s’affinera
avec le temps, est à ce moment encore trop monolithique et s’avère
représentative d’une époque où le modèle colonialiste imposait un
scénario de domination culturelle, plutôt que de transferts ou d’in-
terférences.
109
Nous avons vu ci-dessus que certains contemporains, en effet, s’en détachent. Cf. su-
pra, p. XXXVI-XXXIX.
110
Sur les réactions de J. Toutain, cf. infra, p. LIX-LX.
111
RO, p. 248. C’est naturellement cette option « mystérique » qui explique l’appendice
sur Dionysos (dieu « oriental », par opposition à Apollon, dieu hellénique, depuis Bacho-
fen et Nietzsche) dans la 4e édition de 1929, comme l’a bien souligné Pailler, Les reli-
gions orientales, p. 95-113 ; Id., Les religions orientales (...). Une création continuée, p. 635-646.
Sur ce sujet, H. Cancik, « Mysterien », in Handbuch religionswissenschaftlicher Grundbegriffe,
IV, Stuttgart, 1998, p. 174-178 ; W. Burkert, Ancient Mystery Cults, Harvard-Cambridge-
Londres, 1987 (trad. fr. Paris, 1992).
« Vous avez bien raison d’insister dans votre préface sur la difficulté
qu’on éprouve à définir la religion. J’avais songé autrefois à y voir “tout
ce que produit en l’homme l’idée du mystère qui l’environne”. Mais je
me suis aperçu que cette phrase si longue était encore inadéquate. En
réalité nous entendons par “religion” des choses si différentes qu’elles
en sont presque contradictoires ».
112
Cumont envisage du reste une continuité entre le silence mystique de certaines re-
ligions orientales et la contemplation pratiquée dans le monachisme chrétien. Cf. RO,
p. 242. On relèvera, dans le même sens, la dédicace qui figure sur l’exemplaire des RO
de la bibliothèque d’Alfred Loisy (conservée à la Bibliothèque d’histoire des religions
de Paris IV) : « À Alfred Loisy interprète perspicace de rituels mystiques souvenir amical
Franz Cumont ». Je remercie Nicole Belayche qui me l’a fait connaître.
113
Significative, à cet égard, la manière dont Cumont définit son travail dans une lettre à
Hermann Diels d’avril 1904 : « L’histoire religieuse est une maîtresse mystique à laquelle
je fais bien des infidélités mais que je retrouve toujours avec plaisir. »
114
A. Bendlin, « «Ein wenig Sinn für Religiosität verratende Betrachtungsweise» : Emo-
tion und Orient in der römischen Religionsgeschichtsschreibung der Moderne », Archiv
für Religionsgeschichte 8, 2006 (sous presse).
(néo)romantique 115, qui met l’accent sur la religiosité, donc sur la re-
ligion dite « interne », plutôt que sur les pratiques et sur les aspects
institutionnels, est attesté dès le XVIIIe siècle, mais surtout à la fin
du XIXe siècle et au début du XXe, lorsqu’il entre en concurrence
avec une vision libérale, bourgeoise, « objective » de la religion et de
l’Antiquité en général : une ère de religiosité s’ouvre, qui prend la re-
lève de l’humanisme libéral du siècle précédent ; c’est une sorte de
révolution intellectuelle. Au centre du discours est désormais placé
le Gefühl, le sentiment religieux, l’émotionnel, le psychologique. Des
savants comme F. Creuzer d’abord, puis le catholique H. Usener
(avec son intérêt pour la Volksreligion, la « religion populaire »), ses
élèves A. Dieterich et R. Reitzenstein, et encore W.W. Fowler (auteur
de The Religious Experience of the Roman People) 116, l’école dite de Tü-
bingen (la religionsgeschichtliche Schule) dans toutes ses ramifications
(Bousset, Troeltsch, etc.) 117, mais aussi F. Nietzsche et E. Rohde,
pour ne pas parler des sociologues des religions comme G. Simmel
et M. Weber, tout ce beau monde entend explorer les sentiments
religieux, par opposition à l’approche normative de G. Wissowa (et
d’autres) aux yeux desquels le sentiment n’est pas une catégorie per-
tinente 118. Son étude de la Staatsreligion met l’accent sur le caractère
contractuel de la religion romaine qui n’introduit le registre émo-
tionnel qu’en temps de crise.
Car, sur la scène de notre théâtre intellectuel, l’Orient fait irrup-
tion comme un détonateur. Terre d’émotions, berceau de l’irra-
tionnel et du mysticisme 119, symbole d’altérité irréductible pour les
Occidentaux, il produit des religions qui lui ressemblent. Le furor
orientalis, si bien étudié par Suzanne Marchand dans le cadre de
l’Allemagne prussienne 120, contribue à un repositionnement vers
115
Ce courant s’oppose à l’approche rationnelle des religions par les Lumières et débou-
che sur l’irrationnalisme à la Rudolf Otto.
116
Sans oublier, plus tard, Wilamowitz, avec Die Glaube der Hellenen (1931), qui, cepen-
dant, recentre fortement le propos sur le monde grec et exclut le comparatisme et l’an-
thropologie. En amont, on citera les noms de Bachofen et Burckhardt.
117
En opposition à la vision libérale et rationnelle de Harnack et Wellhausen notamment,
et avec les prolongements essentialistes de Rudolf Otto
118
On brasse ici une véritable galaxie intellectuelle qu’il importerait de différencier (cf.
les travaux remarquables de S. Marchand à la note 120), mais qui participe d’une même
(r)évolution épistémologique sensible dans l’orientation des écrits de Cumont.
119
C’est particulièrement vrai pour l’Inde.
120
S. Marchand, « Philhellenism and the furor orientalis », Modern Intellectual History 1,3,
2004, p. 331-358, avec une critique fine et judicieuse de la lecture « impérialiste » de
Saïd. Voir aussi Ead., « From liberalism to neoromanticism : Albrecht Dieterich, Richard
Reitzenstein, and the religous turn in fin-de-siècle German classcial studies », in Out of Ar-
cadia, BICS suppl. 79, 2003, p. 129-160.
121
Avec toutefois un fond d’anti-sémitisme dirigé contre les Juifs.
122
Pour une mise en perspective historiographique, cf. le classique d’A. Momigliano,
Sagesses barbares. Les limites de l’hellénisation, Paris, 1991 (éd. or. 1975).
123
Cf. la note 1, p. 205.
124
Cf. V. Krech Wissenschaft und Religion. Studien zur Geschichte der Religionsforschung in
Deutschland 1871 bis 1933, Tübingen, 2002, sur l’importance de la mystique et des mystè-
res dans l’historiographie allemande de l’époque de Cumont. À ne pas négliger non plus
l’apport de William James, Varieties of Religious Experience, paru en 1902 et celui d’Edvard
Lehmann, le danois, élève d’Usener, en contact épistolaire avec Cumont, auteur de Mys-
tik in Heidentum und Christentum, Leipzig, 1908 (2e éd. 1918).
125
R. Reitzenstein, Die hellenistischen Mysterienreligionen, Leipzig, 1910, 3e éd. 1927 ;
A. Loisy, Les mystères païens et le mystère chrétien, Paris, 1919, avec une alternance tout à fait
significative entre le pluriel du paganisme et le singulier du christianisme (donc l’unicité
et l’originalité absolue).
126
Réédition : Cosenza, 1997.
127
Cf. S. Giusti, Storia e mitologia, con antologia di testi di Raffaele Pettazzoni, Rome, 1988.
Un an avant Pettazzioni avait paru N. Turchi, Fontes Historiae Mysteriorum aevi Hellenistici,
Rome, 1923.
128
Voir notamment les Actes du 2e atelier sur « Les religions orientales dans le monde
grec et romain », Fréjus, 25-27 septembre 2005 (sous presse) (Steiner 2006).
129
L’affinement de la typologie par l’école d’Ugo Bianchi qui distingue les religions mis-
tiche, misteriche et misteriosofiche ne résout pas ces apories : U. Bianchi, The Greek Mysteries,
Leiden, 1976. Voir aussi l’introduction de P. Scarpi dans Le religioni dei misteri I, Milan,
2002.
130
Burkert, Ancient Mystery Cults, p. 29.
131
J.-M. Pailler, Les religions orientales, 1999.
132
Le texte qui suit livre une première synthèse d’une recherche en cours, plus appro-
fondie, sur ce sujet.
133
11/6/1910 : l’impression commence (corr. Leroux AB II/16) ; entre août et octobre
1910, J. Bidez et Ch. Michel participent à la correction des épreuves. Le 19 décembre
1906, Cumont écrit à H. Diels qu’il espère pouvoir lui « faire parvenir vers la nouvelle an-
née » son livre tiré des conférences « faites à Paris et à Oxford sur les religions orientales
dans le paganisme romain » (C. Bonnet, Le «grand atelier de la science», 2005, p. 75).
134
Cf. supra, p. XIV.
135
Ces deux tirages, très rapprochés, ne semblent pas avoir été clairement identifiés
jusqu’à présent par les chercheurs, qui citent comme première édition, tantôt celle de
1906, tantôt celle de 1907. Au niveau formel, les seules différences entre ces deux tirages,
outre la date, sont les suivantes :
- sur la page de garde du tirage de 1906 figure la mention « conférences faites… en
1905 » ; en 1907, cette date n’est plus mentionnée.
- en 1906 est indiquée la fonction de Cumont, professeur à Gand ; cette précision dispa-
raît en 1907
- le format est légèrement différent (mais n’a pas de répercussion sur la pagination) : 12
x 18 en 1906 ; 13,5 x 20,5 pour 1907.
136
Le 14 novembre 1908, Leroux écrit à Cumont à propos de la 2e éd. des RO (2e conven-
tion) (id. 29/11 : confirmation des conditions). Ch. Michel s’attellera une fois encore
à la tâche de correction des épreuves (voir préface de la 2e édition et lettres des 9 et
16/12/1908).
137
462 notes et 103 p. de n. pour la 2e éd. (431 notes et 74 p. de n. pour la 1ère éd.).
138
Voir correspondance : lettres de Gehrich du 6/2/1907, 9/3/1907, 19/3/1907 ; lettres
lui ont été faites : « Allen Menschen recht getan, ist eine Kunst, die
niemand kann ». Cela vaut particulièrement pour la réserve avec
laquelle l’auteur et lui ont traité le problème de la dépendance du
christianisme par rapport à son environnement religieux. Leur scep-
ticisme, continue-t-il, a tantôt été loué, tantôt blâmé. La décision
ultime dépend finalement de la position personnelle que chacun as-
sume vis-à-vis des questions psychologiques et métaphysiques… Ge-
hrich ajoute également dans sa préface des références de contribu-
tions toutes récentes, dont il a pris connaissance alors que l’ouvrage
était sous presse. Après avoir remercié auteur et éditeur, il termine
par quelques mots se référant à la situation politique : « puisse ce
livre, en sa parure allemande, - quand s’apaisera la tempête de la
grande guerre que doit mener actuellement notre patrie pour son
honneur et sa liberté -, non seulement servir aux historiens et philo-
logues comme présentation courte et claire de la pensée religieuse
du paganisme expirant, mais aussi aider à préparer et à approfondir
la compréhension historique de l’évangile et sa marche triomphale
à travers le monde »…
Plus d’un an après la première traduction allemande, en sep-
tembre-octobre 1911, paraît à Chicago (Open Court Publishing
Company) une traduction anglo-américaine dont l’auteur est resté
anonyme ; celle-ci est précédée d’une introduction, intitulée The Si-
gnificance of Franz Cumont’s Work, par G. Showerman, professeur à
l’University of Wisconsin 144, qui avait déjà recensé l’édition originale
des RO, en y exprimant le souhait d’une traduction anglaise 145. Il
présente notamment Cumont comme un savant alliant « Teutonic
thoroughness and Gallic intuition » 146 et comme un historien des
religions « engaged in the modern campaign for the liberation of
religious thought. His studies are therefore not concerned alone
with paganism, nor alone with the religions of the ancient past ; in
common with the labors of students of modern religion, they touch
our own faith and our own times, and are in vital relation with our
philosophy of living, and consequently with our highest welfare » 147.
144
Le 30/11/1910, l’éditeur Carus (Open Court Publishing Company) informe Cumont
qu’il a demandé une préface à Showerman.
145
Gr. Showerman, Classical Philology 3, 1908, p. 465-467. La première édition des RO
avait également fait l’objet d’un compte rendu dans Open Court 22, 1908, p. 380, revue
publiée par le même éditeur que celui de la traduction anglo-américaine.
146
P. V.
147
P. XIII. Ses propos seront reprochés à Showerman par un recenseur (L.N., Revue néo-sco-
lastique de philosophie 19, 1912, p.578) : « Pourquoi le traducteur a-t-il cru nécessaire d’enrôler
cette œuvre de science dans une croisade pour la “libération de la pensée religieuse” ? ».
148
Voir le compte rendu non signé dans American Ecclesiastical Review 45, 1911, p. 630-632.
149
C. Bonnet, « «Noi ora conosciamo il male di cui morirono gli dei della vecchia Ro-
ma». La réception en Italie des “Religions orientales dans le paganisme romain” de Franz
Cumont », in Hormos 3-4, 2001-2002, p. 247-300.
150
Voir C. Bonnet, 2001-2002 et l’Avvertenza alla traduzione italiana.
151
L’augmentation du nombre de notes entre la 1ère et la 2e éd. et du nombre de pages
qui leur sont consacrées en est un indicateur manifeste.
152
Tout comme le public auquel s’adressaient les conférences faites au Collège de Fran-
ce.
2 éd. 1909, p. XXVI : « je n’ai pas voulu que ces conférences devinssent des disserta-
153 e
tions érudites et que les idées, l’essentiel dans un pareil exposé, fussent noyées dans la
multiplicité des faits ».
154
Annales du Musée Guimet. Bibliothèque de vulgarisation ; Open Court Publishing Company ;
Biblioteca di Cultura Moderna.
155
Cf. infra, p. L-LIII.
156
Voir C. Bonnet, Correspondance scientifique, 1997, p. 21.
157
C. Bonnet, Le «grand atelier de la science», 2005, II, p. 73.
158
C. Bonnet, Le «grand atelier de la science», 2005, II, p. 75.
159
C. Le Covec est également consciente d’avoir heurté dans son écrit un auteur publié
par la même maison d’édition que la Revue hebdomadaire, Plon-Nourrit, ce qui peut avoir
causé ce refus.
160
Lettre du 16 août 1907.
161
M.J. Lagrange, « Les religions orientales et les origines du christianisme. A propos de
livres récents », Le Correspondant 25/7/1910, p. 209-241 (article repris dans Lagrange,
Mélanges d’histoire religieuse, Paris, 1915, p. 69-130). Sur cet article, voir C. Bonnet, « Franz
Cumont et les risques du métier d’historien des religions », Hieros 5, 2000, p. 12-29 ;
M. Gilbert, « M.-J. Lagrange et F. Cumont. L’Histoire des religions et la Bible », Les
études classiques 69, 2001, p. 3-22.
orientales. Et c’est ce dernier point qui nous retiendra ici 162. Lors de
l’interpellation parlementaire relative à l’affaire Cumont, plusieurs
rappellent les qualités scientifiques éminentes de Cumont, auteur
d’ouvrages fondamentaux sur les Mystères de Mithra et Les religions
orientales, qui a déjà été invité à donner des conférences dans les
instituts étrangers les plus prestigieux, à Oxford et au Collège de
France 163 ; ils soulignent aussi son indépendance d’esprit – Cumont
collabore notamment avec les bollandistes (ce qui devrait plaire à un
ministre catholique). Vandervelde, pour sa part, prend le ministre
à partie en évoquant ce qui constitue aux yeux de certains (catholi-
ques) un « crime déjà ancien » de Cumont, le fait d’avoir « écrit Les
Mystères de Mithra. Et quand on a écrit les Mystères de Mithra il paraît
qu’on n’est plus digne d’être nommé professeur d’histoire romaine.
On peut dire (…) qu’il n’y a pas de préoccupations politiques dans
cette affaire, mais il y a des préoccupations religieuses et, dans tout
ceci, vous avez sacrifié à vos préjugés religieux l’intérêt scientifique
de l’université de Gand ».
Un journal libéral, La Meuse, ne s’y trompe pas non plus : « M. Cu-
mont a publié des livres d’une rare profondeur scientifique sur l’his-
toire des religions à l’époque romaine. N’allait-il donc pas aussi, à
propos d’histoire romaine, parler scientifiquement des origines et
de la diffusion du Christianisme ».
Quand le dossier Cumont passe au Sénat, le 26 avril 1910, cette
fois, c’est Eugène Goblet d’Alviella, une grande personnalité politi-
que et scientifique belge, libéral et franc-maçon, autre correspon-
dant de F. Cumont, qui prend la défense du savant gantois en ces
termes : « Quel est le mobile du ministre dans cette étrange affaire ?
M. Cumont n’est pas un politique militant, c’est uniquement un
savant. (…) Serait-ce parce que son principal ouvrage a jeté un jour
considérable sur certains côtés des origines de l’Église chrétienne ?
Il serait possible que cela ait suffi à lui valoir “l’animosité des dé-
vots” ». A quel ouvrage fait ici allusion le sénateur ? Il est difficile
de le préciser : il pourrait s’agir des Mystères de Mithra mais on pour-
rait plus volontiers y reconnaître les Religions orientales, d’autant plus
que Cumont les évoque explicitement à propos de la haine que lui
162
« L’affaire de Gand » a été traitée par C. Bonnet, 1997 et 2000. Nous centrons ici
l’attention sur le rôle qu’y jouèrent les Religions orientales et renvoyons à ces articles pour
les références précises.
163
Le thème de ces conférences n’est pas évoqué…
164
Lettre à Pirenne du 21 septembre 1910.
165
Sous l’appellation comptes rendus, nous groupons ici les recensions mais aussi les no-
tices brèves, mentions plus ou moins détaillées dans des bulletins ou chroniques etc.
166
Les chiffres donnés reflètent l’état d’avancement de recherches en cours et pourraient
donc être revus… à la hausse : 17 recensions à la 1ère éd. française ; 2 à la 2e éd. fr. ; 15 à la 1ère
éd. allemande ; 11 à la 1ère éd. anglo-amér. ; 5 à la 1ère éd. italienne ; 10 à la 2e éd. allemande
167
Revues allemandes : 20 ; américaines : 12 ; françaises : 11 ; italiennes : 7 ; belges : 4 ;
britanniques : 3.
168
11 comptes rendus.
169
Par revues relatives aux civilisations anciennes, on entend ici aussi bien des revues con-
« Les cultes orientaux », écrit ainsi P. Allard dans la Revue des Questions histo-
riques, ont bénéficié de la faveur officielle « qui aida beaucoup à leur succès.
Ils n’eurent pas à subir, comme le christianisme, l’épreuve de la persécu-
tion : ils n’eurent pas non plus à braver l’impopularité par l’intransigeance
de leur morale, puisque les plus spiritualistes d’entre eux, à certains égards,
se montraient en même temps singulièrement indulgents aux pires faibles-
ses de la nature déchue, et que les purifications offertes par eux étaient
surtout rituelles. Il y a là, entre eux et le christianisme, des différences pro-
fondes, irréductibles, que M. Cumont n’a point mises en lumière ».
174
Voir C.W., Historisches Jahrbuch 31, 1910, p. 839-840 ; K. Adam, Theologische Revue 15-16,
1917, c. 351-352.
175
W. Bousset, 1912, p. 256-271 (Bousset s’exprime en outre contre le traducteur qui
exagère la position de Cumont, sans en montrer les nuances) ; P. Wendland, 1910,
c. 552-554 ; C. Fries, Orientalistische Literaturzeitung 9, 1909, c. 411-412.
176
P. Allard, Revue des Questions historiques 82, 1907, p. 303-304 ; E. Rémy, 1908, p. 62-
69 : « quand, sans s’arrêter aux apparences, on examine chacune de ces doctrines en
elle-même et dans ses rapports avec l’ensemble dogmatique de chacune des religions, on
constate que cette ressemblance se réduit presque à rien, à une simple communauté de
nom. M. Cumont ne le nie pas d’ailleurs (…) et respecte ces “règles de critique” (…). Il
faut cependant les avoir présentes à l’esprit pour ne pas se méprendre sur la portée des
affirmations de l’éminent historien » ; M.-J. Lagrange, Revue biblique 17, 1908, p. 309-311 ;
Id., Le Correspondant 25/7/1910, p. 209-241.
177
Cf. supra, p. L-LI.
178
P. Allard, 1907, p. 303-304 ; M.-J. Lagrange, Revue biblique, 1908, p. 309-311 ; n.s.,
American Ecclesiastical Review, 1911, p.630-632 : « Perhaps in his endeavor to establish the
continuity of religious history the author may seem to some to exaggerate the similarity
of the reformed paganism to the advening Christianity ».
179
E. Rémy, 1908, p. 62-69.
180
M.-J. Lagrange, in Revue biblique, 1908, p. 309-311 ; Id., Le Correspondant 25/7/1910, p.
209-241 ; E. Rémy, 1908, p. 62-69.
181
Fr. Granger, 1911, p. 54-55.
182
C.H. Moore, Classical Weekly 5, 1911, p. 102-103. L’importance de ce livre pour le
« présent » du lecteur et la société contemporaine est aussi abondamment soulignée par
Gr. Showerman, 1908, p. 465-467 et dans son introduction à la traduction anglaise.
183
Mais voir aussi des recenseurs écrivant dans des revues non spécifiquement catholi-
ques : n.s. in American Journal of Theology, 1913, p. 480-481 : « in general it may be said that
Cumont writes with a tolerance and proportion not generally exhibited by the interpre-
ters of the mystery-religions » ; Fr. Granger, 1911, p. 54-55.
184
E. Rémy, 1908.
185
H. Quentin, Revue bénédictine 25, 1908, p. 117-118.
186
E. B. Allo, 1908, p. 595.
187
E. Brandenburg, 1916, col. 374-379. Il revient sur ce thème dans la conclusion de son
compte-rendu, c. 379: « Zusammenfassend müssen wir sagen, dass der V. alte Kulte usw. öfter
von einem moralisierenden Standpunkt aus beurteilt, der nicht angebracht ist, da wir nicht
unsere heutige ethischen Anschauungen auf die des alten Orients übertragen können ».
188
Voir supra, p. XVII-XIX.
189
M.-J. Lagrange, Le Correspondant, 1910, p. 241 ; E. Brandenburg, 1916, col. 374-379.
190
Voir supra, p. XXVI-XXVII.
191
G. Wissowa, 1913, c. 655-657.
192
J. Geffcken, 1915, c. 1220-1223.
193
Gr. Showerman, 1908, p. 465-467 ; Fr. Granger, 1911, p. 54-55 ; J. T. Shotwell, 1913,
p.108-110 ; S. H. Swinny, Sociological Review 5, 1912, p.258-261.
194
K. Krumbacher, 1907, p. 708-709.
195
M.-J. Lagrange, Revue biblique, 1908, p. 309-311 : « la part de l’esprit oriental est exagé-
rée, ou du moins il n’est pas dit assez expressément que cet esprit oriental n’aurait jamais
agi aussi puissamment sur le monde impérial, s’il n’avait été lui-même transformé par
l’esprit hellénique ». Pour H. Quentin (1908, p. 117-118), qui compare les RO au livre de
Toutain : « le souffle de l’Orient qui passe ici a quelque chose de capiteux ».
196
J. Geffcken, 1915, c. 1220-1223 ; E. Brandenburg, 1916, col. 374-379.
197
J. Toutain, Les cultes païens dans l’empire romain. Première partie. Les provinces latines. Tome
II. Les cultes orientaux, Paris, 1911. Sur l’opposition Toutain-Cumont autour des religions
orientales, voir R. MacMullen, Le paganisme dans l’Empire romain, trad. par A. Spiquel
et A. Rousselle, Paris, 1987, p. 10, 185, et n. afférente, p. 194 (éd. or. Londres, Yale UP,
1981) ; J.-M. Pailler, 1989 ; C. Bonnet, Franz Cumont recenseur, in Kèpoi. De la religion à la
philosophie. Mélanges offerts à André Motte, Liège, 2001, p. 330-331.
198
P. 264-265
sa méthode 199 : usage quasi exclusif des inscriptions – qui font l’objet
de statistiques, alors que certains phénomènes échappent au comp-
tage ; absence presque totale des autres types de sources ; traitement
insuffisant, voire même inexistant du cas de Rome et de l’Italie. Le
savant belge refuse dès lors d’adhérer à la conclusion de Toutain
relative à l’inégale répartition des cultes orientaux dans les provinces
latines. Dans l’introduction au tome suivant de son ouvrage, Toutain
s’explique à nouveau sur sa méthode et ses objectifs :
199
Fr. Cumont, RHR 66, 1912, p. 125-129.
200
P. 6-7.
201
Voir encore une lettre de Toutain à Cumont après la parution de la 4e éd. des RO en
1929 (16/2/1930) : le savant français dit avoir une opinion un peu différente quant à
l’importance et au caractère de la diffusion des cultes orientaux en Occident mais s’in-
cline « avec admiration devant le labeur et la compétence » de Cumont.
202
Ce modus operandi de Cumont est également perceptible à travers les notes qu’il prit
dans son exemplaire de 1907. Cf. infra, p. 0-00.
Dès le début des années vingt, deux des éditeurs des Religions orientales,
le français Leroux et l’allemand Teubner, écrivent à Cumont à propos
d’une réédition de l’ouvrage 203. Malgré plusieurs sollicitations de
Teubner et promesses de l’auteur, entre février 1923 et mai 1926 204,
ce n’est qu’en été 1927 que Cumont se consacre à nouveau aux RO 205
(après ses missions archéologiques à Doura-Europos en 1922-1923,
dont il publia rapidement les résultats en 1926). Il prévoit alors
une nouvelle édition à Paris chez Geuthner 206, qui sera traduite
en allemand et publiée par Teubner 207. De nombreuses lettres de
la correspondance permettent de suivre pas à pas la production
du livre (lettres de Geuthner, de l’imprimeur, mais aussi de Bidez,
fidèle « relecteur » d’épreuves 208) – mais nous n’entrerons pas dans
les détails techniques. Un litige oppose, à partir de l’automne 1928,
Geuthner à Leroux, qui avait publié les deux premières éditions des
203
Leroux, lettre du 12/2/1920 ; Teubner, lettre du 21/4/1922 : la réédition compren-
drait le texte non modifié et les notes revues.
204
Lettres de Teubner du 9/2/1923 ; du 3/5/1923 (Teubner attend le manuscrit de
Cumont depuis le mois de mars) ; du 22/6/1923 (Cumont est en retard ; il voudrait
une échéance) ; du 13/8/1923 (quand Cumont fera-t-il parvenir son manuscrit pour la
réédition). Il faut attendre le 20/8/1925 pour retrouver trace de Teubner dans la cor-
respondance, à propos de la réédition des RO. Le 15/9/1925, l’éditeur écrit à Cumont
qu’il ne souhaite pas une reproduction comme telle et préfère attendre la révision de
Cumont. Le 10/5/1926, une lettre de Teubner précise que Cumont enverra le texte
pour la réédition en automne.
205
Voir les lettres adressées à Cumont par G.J. Anderson (21/6/1927) et par H. Pirenne
(3/7/1927) : Cumont travaille à la 3e édition des Religions orientales ; ils ne se verront pas
pendant les vacances.
206
Geuthner avait déjà écrit à Cumont le 5/1/1925 pour lui demander l’autorisation de
réimprimer les RO. Le 4 juillet 1927, il lui fait une proposition pour la nouvelle édition
des RO (le livre serait tiré à 2000 exemplaires, dont 75 pour Cumont, qui toucherait 10%
de droits d’auteur).
207
Lettres de Teubner à Cumont du 31/8/1927 (sur la 3e éd. allemande des RO, sur le
prix de vente et les honoraires, sur la recherche d’un traducteur par l’intermédiaire de
Latte) ; du 8 septembre 1927 (négociation des coûts).
208
Lettres de Geuthner du 9/9/1928 (à propos de la réédition allemande des RO ; il
souhaite demander un petit droit à Teubner) ; du 19/9/1928 (les notes doivent être
recomposées car les corrections sont nombreuses ; les frais sont élevés : Cumont peut-il
limiter les corrections).
Lettres de l’imprimeur de Nogent-le-Rotrou, Daupeley-Gouverneur du 1/12/1928 (il
a envoyé les « placards » des Tables des RO et terminera l’impression fin décembre ; il
cherche le cliché de couverture) ; du 9/1/1929 (à propos du renvoi des Tables des Reli-
gions orientales : il manque le bon à tirer).
Lettres de Bidez relatives à la correction des épreuves du 8/11/1927 ; 7/5/1928 ;
22/8/1928.
209
Sur cette affaire, lettres de Geuthner à Cumont du 28/11/1928 ; du 6/12/1928 ;
11/12/1928 ; 17/12/1928 ; 6/1/1929 (Geuthner demande l’accord de Cumont sur une
proposition) ; 1/5/1929 (Leroux fera une nouvelle édition sans notes).
210
Voir préface de Cumont à la 4e éd.
211
P. Alphandéry, Byzantion 6, 1931, p. 841-842.
212
Voir supra, p. XXII ; J.-M. Pailler, 1999, qu’on lira avec profit pour une analyse de cet
appendice au sein des RO et du contexte intellectuel dans lequel évoluait Cumont.
213
La correspondance passive de Cumont fournit ici aussi de nombreuses indications sur
la production du volume. Voir lettres de Teubner du 27/9/1928 (il attend le texte de
Cumont) ; du 27 octobre 1928 (sur le regroupement des illustrations) ; du 2/1/1929 (T.
attend la fin des notes ; sur la traduction dont se chargera A. Burckhardt-Brandenberg) ;
du 29/10/1929 (sur les notes auxquelles travaille le traducteur, sous l’égide de Latte ;
sur la correction des épreuves) ; du 2/11/1929 (sur la taille volumineuse du livre ; sur le
prix) ; du 27/11/1929 (sur le prix du livre et les honoraires de Cumont) ; du 5/12/1929
(sur les honoraires et le tirage) ; du 17/4/1929.
Lettre du traducteur, du 6/2/1930. Lettre d’E. Honigmann, professeur à Breslau, du 1er
avril 1930 (sur une liste d’erreurs dans les RO, qui pourrait être utile pour la prochaine
édition).
214
Geuthner prévoyait de tirer le livre à 2000 exemplaires (lettre à Cumont du
4/7/1927).
215
38 comptes rendus ont été repérés actuellement, dont 22 à la 4 e éd. française et 13 à
la 3e éd. allemande.
216
Allemagne : 2 + 10 ; France : 11 ; Belgique : 5 ; Grande-Bretagne : 5 ; Italie : 4 ; Tché-
coslovaquie : 1.
217
25 comptes rendus sur 31 vus.
218
Nock évoque une « superb historical perspective » (Journal of Hellenic Studies 50, 1930,
p. 169-170), Alphandéry un « ouvrage magistral » (1931, p. 841-844), Denoël un « livre
de chevet pour l’historien des religions » (Nouvelle revue théologique 58, 1931, p. 262-266) ;
Dussaud, l’ « ouvrage classique et magistral de notre éminent collègue » (Syria, 1930, p.
190-192) ; Jerphanion loue l’« immense érudition de M. Cumont » et le « charme d’un
exposé limpide autant que riche et profond » (Études 203, 1930, p. 5-22) ; selon Nils-
son, « das Buch Cumonts gehört zu den wenigen Klassikern der Religionswissenschaft »
(Deutsche Literatur Zeitung. Wochenschrift, 1931, c. 2064-2065). Voir aussi, n.s., Asiatic Review
27, 1931, p.755-756 : « This volume has enjoyed, on account of its profound scholarship,
a worldwide reputation » ; N.H. Baynes, Byzantinische Zeitschrift, 1929, 29, p. 436.
219
Voir par ex. V. Gebhard, Blätter für das Bayerische Gymnasial-Schulwesen, 1931, p. 34-35 :
« Ein Schatz von Gelehrsamkeit ist hier niedergelegt ».
220
A. D. Nock, 1930 ; M. P. Nilsson, 1931 ; R. Dussaud, 1930 ; E. Bickel, Philologische
Wochenschrift 51, 1931, 1179-1187.
221
Revue catholique française fondée en 1928 à Paris.
222
Voir E. B. Allo, « L’Asiatisme de nos pères », La vie intellectuelle, 3, 10 déc. 1930, p. 420-
447 ; cf. supra, p. L-LI.
223
P. Denoël, 1931 ; G. de Jerphanion, 1930, p. 18
224
P. Denoël, 1931.
225
G. de Jerphanion, 1930.
226
G. de Jerphanion, 1930 ; P. Denoël, 1931 ; E. B. Allo, 1930, qui refuse la possibilité
d’une préparation du triomphe du christianisme par les religions orientales, insiste aussi
sur ces différences.
227
G. de Jerphanion, 1930.
228
G. de Jerphanion, 1930.
229
G. de Jerphanion, 1930, p. 19.
230
E. Bickel, 1931. Dans l’état actuel de mes recherches, seul Bickel s’exprime de ma-
nière critique à ce propos : l’évolution que propose Cumont des religions orientales vers
le christianisme lui semble douteuse en bien des points ; leur importance a été suréva-
luée. Selon lui, le christianisme serait davantage dans la lignée du culte impérial, d’un
point de vue sociologique ; tandis que l’idéal ascétique qui primait dans le christianisme
trouvait plus de points de comparaison dans l’éthique sociale qui se développe à partir
de Sénèque dans le monde latin.
231
R. Dussaud, 1930.
232
E. Bickermann, Orientalistische Literaturzeitung, 1931, c. 210-213
exercent alors les unes sur les autres ; en outre, l’appendice sur les
mystères de Bacchus trouve peu à sa place, au sein d’un tel plan 233.
Mais ces quelques critiques représentent, quantitativement, une
part minime au sein des chœurs de louanges qui chantent l’œuvre
du maître. Celle-ci constitue déjà un « classique », une référence
qui suscite nettement moins de débats, moins de passions que pré-
cédemment (le nombre de comptes rendus qui y sont consacrés
est d’ailleurs moins élevé). Une certaine évolution est perceptible
au niveau de la réception de l’ouvrage par les catholiques : moins
âpres dans leurs critiques, certains ne rejettent plus absolument la
possibilité que les religions orientales aient pu préparer le terrain au
christianisme.
Quant aux ouvrages, qui paraissent – ou font l’objet de réédi-
tions – dans l’entre-deux-guerres, sur des thématiques voisines des
religions orientales, ils ne mettent pas en cause les conclusions de
Cumont 234 – Toutain ne fut donc guère suivi 235. Il apparaît en outre,
d’après une enquête récente de V. Krech, que les Religions orientales
(tout comme Les mystères de Mithra) exercèrent une influence cer-
taine sur le monde scientifique allemand 236. Dans sa préface à Lux
perpetua, ouvrage posthume de Cumont, paru en 1949, Canet qua-
233
D’après Bickel, Cumont méconnaît en outre l’importance de la notion de sauveur,
qui est tout orientale et qui imprègne fortement le culte impérial. Le savant, poursuit-il,
n’évalue pas à leur juste mesure les religions grecque et romaine – cette dernière n’est
pas enfantine. Cumont a surévalué les religions orientales.
234
Voir par ex. Frazer, Adonis, Attis, Osiris, 2e éd. 1919 (1ère éd. 1906) ; R. Reitzenstein,
Die hellenistischen Mysterienreligionen, Leipzig, 3e éd. 1927 (1ère éd. 1910) ; A.J. Festugière,
La révélation d’Hermès Trismégiste, 1944-1945 (ouvrage dédié à Cumont ; t. I, p. IX de la pré-
face : « ce sont les travaux de M. Cumont sur Mithra et sur les religions orientales dans le
paganisme romain qui ont éveillé en moi l’ardent désir d’étudier à mon tour les religions
de l’antiquité. De ce jour, quelque voie que je tentasse, je l’ai trouvé comme un guide
sur ma route. Et la Fortune a permis que je pusse profiter, non seulement de ses écrits,
mais de ses conseils. C’est pour moi un honneur et une grande joie qu’il ait daigné ac-
cepter la dédicace de ce livre ») ; M. Rostovtzeff, Mystic Italy, 1927 ; A. D. Nock, études
regroupées sous le titre Essays on religion in the ancient world, 1973 ; P. Wendland, Die helle-
nistisch-römische Kultur in ihren Beziehungen zum Judentum und Christentum, 2e éd., Tubingen,
1912 ; K.H.E. De jong, Das antike Mysterienwesen in religionsgeschichtlicher, ethnologischer und
psychologischer Beleuchtung, 2e éd., La Haye, 1919 (1ère éd. 1908) ; R. Pettazzoni, I misteri.
Saggio di una storia storico-religiosa, Bologne, 1924 ; A. Loisy, Les mystères païens et le mystère
chrétien, Paris, 1919 ; N. Turchi, Le religioni misteriosofiche del mondo antico, 1923.
235
Voir cependant J. Geffcken, Der Ausgang des griechisch-römischen Heidentums, Heidel-
berg, 1929, p. 246, n. 1, qui considère l’ouvrage de Toutain comme « eine notwendige
Modifizierung von F. Cumonts bewundernswerten, aber hie und da etwas einseitigen
Arbeiten über die orientalischen Religionen der Spätantike ».
236
V. Krech, Wissenschaft und Religion. Studien zur Geschichte der Religionsforschung in Deuts-
chland 1871 bis 1933, Tübingen 2002.
237
Fr. Cumont, Lux perpetua, Paris, 1949, p. XX.
238
J’en ai dénombré 6 à ce stade de mes recherches.
239
M. Simon, « Early Christianity and Pagan Thought », Religious Studies 9, 1973, p. 392
(cité par MacMullen, p. 10).
240
R. Turcan, Les cultes orientaux dans le monde romain, 2e éd., Paris, 1992, p. 14 (1ère éd.
1989).
241
G. Van Hooydonk, Gr. Milis-Proost, « The scientifical survival of Franz Cumont : A
bibliometric analysis », in Les syncrétismes religieux dans le monde méditerranéen antique. Actes
du Colloque International en l’honneur de Franz CUMONT à l’occasion du cinquantième anniver-
saire de sa mort, éd. C. Bonnet, A. Motte, Bruxelles-Rome, 1999, p. 81-91 et 83. Seules
ses Recherches sur le symbolisme funéraire des Romains (1942) font l’objet d’un plus grand
nombre de citations.
242
J.-M. Pailler, 1999, p. 646.
243
R. MacMullen, Paganisme dans l’Empire romain, 1987, p. 10, 185, et n. afférente,
p. 194.
244
P. 194.
245
Cf. supra, p. XLIII-XLIV.
246
A. Rousselle, « La transmission décalée. Nouveaux objets ou nouveaux concepts ? »,
Annales ESC, janvier-février 1989, p. 161-171.
247
A. Rousselle, Transmission décalée, p. 163.
248
Sur ces recherches, voir notamment, C. Bonnet, Correspondance scientifique, 1996 ;
Ead., Le «grand atelier de la science», 2005.
249
Notamment sous l’impulsion des études de J. Scheid, de M. Beard, J. North et S. Price
et de J. Rüpke.
250
Voir par ex. M. Beard, J. North, S. Price, Religions of Rome, Cambridge, 1998, p. 246-
247 et ss. ; J. Scheid, « Religions in Contact », in Religions of the Ancient World. A Guide, éd.
S. I. Johnston, Cambridge (Mass.), Londres, 2004, p. 112-126 (l’expression « religions
orientales » semble évitée [elle n’apparaît qu’une fois, p. 123] ; il est question de cultes
étrangers [parmi lesquels ceux que l’on qualifie encore de cultes « orientaux » mais aussi
le judaïsme et le christianisme], intégrés officiellement ou non, à Rome même, dans les
colonies ou municipes ou encore dans les diverses communautés civiques de l’empire) ;
S. Price, « Homogénéité et diversité dans les religions à Rome », Archiv für Religionsges-
chichte 5, 2003, p. 180-197.
251
N. Belayche, « «Deae Suriae Sacrum». La romanité des cultes «orientaux» », Revue
historique 615, 2000, p. 565-592.
252
M. Beard, J. North, S. Price, Religions of Rome, p. 246-247 et ss. ; S. Price, Homogé-
néité.
253
Sur cette ligne, voir aussi, tout récemment, T. Kaizer, « In search of oriental cults.
Methodological problems concerning ’the particular’ and ’the general’ in near eastern
religion in the hellenistic and roman periods », Historia 55, 2006, p. 26-47.
254
S. Price, Homogénéité, p. 183.
255
Pour cette expression appliquée au judaïsme et au christianisme, voir J. Scheid, La
religion des Romains, Paris, 1998, p. 154 ; Id., dans sa préface à l’ouvrage de Stroumsa.
256
Soutenu par la Fondation Maison des Sciences de l’Homme (Paris), la Deutsche Fors-
chungsgemeinschaft et la Fondazione Villa Vigoni.
257
Cf. supra, n. 3.
258
Voir notamment Archiv für Religionsgeschichte 2006 et le volume C. Bonnet - J. Rüpke
- P. Scarpi (éd.), Religions orientales, culti misterici, Mysterien : nouvelles perspectives - nuove
prospettive - neue Perspektiven, Stuttgart 2006.
259
Leçon inaugurale au Collège de France, Paris, 1949, p. 6-7.
260
On rappellera ici le texte de Max Weber (1904) sur l’objectivité scientifique, où il dé-
finit la science comme «une continuelle alternance entre la tentative d’ordonner, dans
la pensée, des faits par la construction de concepts, la dissolution des tableaux de pensée
ainsi obtenus grâce à l’élargissement et au déplacement de l’horizon de la science, et le
re-formation de concepts sur la base ainsi modifiée». M. Weber, Die «Objektivität» sozial-
wissenschaftlicher und sozialpolitischer Erkenntnis, in Gesammelte Aufsätze zur Wissenschaftslehre,
Tübingen, 1988, p. 207 (trad. fr. Paris, 1992, revue par H. Bruhns).
LES
RELIGIONS ORIENTALES
DANS LE
PAGANISME ROMAIN
CONFÉRENCES
FAITES AU COLLÈGE DE FRANCE EN 1905
QUATRIÈME ÉDITION
1929
LIBRAIRIE ORIENTALISTE PAUL GEUTHNER
13, Rue Jacob, PARIS (vie)
1886 - 1928