Aséanie

Claudine Bautze-Picron, The Buddhist Murals of Pagan. Timeless

vistas of the cosmos
Pierre Pichard

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Pichard Pierre. Claudine Bautze-Picron, The Buddhist Murals of Pagan. Timeless vistas of the cosmos. In: Aséanie 12, 2003.
pp. 175-177.

http://www.persee.fr/doc/asean_0859-9009_2003_num_12_1_1805

Document généré le 26/09/2015

Comptes rendus
Claudine Bautze-Picron
With photography by
Joachim Karl Bautze
The Buddhist Murals
ofPagan
Timeless vistas of the cosmos
2003, Bangkok, Orchid Press,
242 p., 254 colour illustrations.
Ce livre abondamment illustré nous offre
pour la première fois un aperçu général
sur les peintures murales des temples de
Pagan, puisque les ouvrages antérieurs,
fort luxueux, n'en donnaient qu'une vue
partielle (Ono 1978), voire limitée aux
peintures tardives du XVIIIe siècle
(Wenk 1977). On sait que cet
exceptionnel corpus de peintures murales du
XIIe au XIVe siècle, présentes dans plus
de 200 temples, est unique aujourd'hui
en Asie du Sud-Est: seul le climat aride
de la Birmanie centrale a pu permettre
leur survie, même si elles nous sont
parvenues dans un état de conservation
très variable, alors qu'à Sri Lanka, en
Thaïlande ou au Cambodge la mousson
annuelle ne nous a laissé que de rares
traces des peintures de cette époque.
Un premier chapitre esquisse le
contexte historique et architectural de ces
peintures et évalue l'importance relative
des influences artistiques et thématiques
venues de l'Inde (Bihar et Bengal), et de
Sri Lanka, réfutant au passage (p. 3-5)
les propositions de G.H. Luce d'y voir
l'œuvre d'artistes môns capturés à
Thaton. Réfutation sans doute trop
absolue. S'il est vrai qu'aucune peinture
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de cette époque ne subsiste dans le pays
mon, le climat de cette région suffit à en
expliquer la disparition et la question
devrait plus sagement rester sans réponse.
Car on ne peut pas davantage prouver que
ces influences du Bihar, du Bengale ou
de l'Orissa n'ont pas atteint Pagan par
l'intermédiaire des Môns, voire des Pyus
comme quelques sculptures sur stuc
pourraient nous le faire pressentir. Et au-
delà de ces influences initiales, on aurait
aimé que l'ouvrage expose plus clairement
les développements stylistiques locaux, et
proprement birmans, en particulier à partir
de la seconde moitié du XIIe siècle.
Comme le laissait craindre le sous-titre
racoleur de l'ouvrage, un développement
peu convaincant (p. 25-27 et passim) tente
d'évoquer la notion d'un ""Bouddha
cosmique" identifié avec l'univers (p. 26),
reprise plus loin par la proposition de voir
dans l'Abe-ya-dana un temple-
montagne, appliquée sans grande
justification à ce temple limité à un seul
niveau et dépourvu de tout accès vers ses
superstructures. Quant à le comprendre
comme "inspired by a structure similar
to the Borobudur temple" (p. 127), cette
curieuse idée est elle même inspirée par
la présence d'un décor architectural autour
des niches du corridor pourtournant. Mais
les ouvertures extérieures ou intérieures,
niches aussi bien que portes ou fenêtres,
sont surmontées d'un tel décor, soit
stuqué soit peint, dans pratiquement tous
les temples de Pagan (et le livre en
donne de multiples exemples). Voir dans
ces niches une réplique fidèle de la
façade du temple reflétée à l'intérieur
relève de l'interprétation bien laborieuse
d'un simple procédé architectural, quasi
routinier et plus ou moins élaboré selon
les monuments.
Plus pertinemment, les chapitres
suivants détaillent tour à tour les divers
thèmes iconographiques illustrés sur les
murs, en comparant les versions de
 176
ne Buddhist nombreux temples par des illustrations
of Pagan bien choisies. Les événements majeurs
de la vie du Bouddha Sàkyamuni
(chapitre 2) constituent dans ces temples
les scènes les mieux identifiées. Les
jâtaka (chapitre 3), illustrés
individuellement sur des panneaux juxtaposés ou
sur des registres continus comme au
Loka-hteik-pan et le plus souvent
identifiés par une courte légende, sont
particulièrement représentatifs de l'art
de Pagan. Là encore, les peintures de
plusieurs temples sont judicieusement
comparées, mais on peut regretter qu'elles
ne soient pas confrontées aux mêmes
représentations sculptées sur les plaques
de terre cuite des stûpa, nombreuses aussi
à Pagan et de dimensions voisines: à
travers deux techniques aussi diverses et
de la même époque, il aurait été possible
d'explorer plus profondément le choix de
l'épisode chargé d'évoquer l'histoire,
aussi bien que la composition du motif et
sa facture. Suit l'étude (chapitre 4) des
nombreux portraits des 28 bouddhas du
passé et de Metteyya, celui du futur.
Le chapitre 5 détaille le "décor
iconographique", c'est-à-dire les autres motifs
identifiables: les boddhisatta, postés le
plus souvent comme gardiens de l'entrée,
les moines, l'assaut de Mâra (qui aurait
pu figurer aussi bien dans le chapitre 2
sur la vie du Bouddha, dont il constitue
un épisode majeur étroitement lié aux
statues en bhûmisparsa mudrâ qui
occupent le centre de la cella), enfin les
empreintes de pieds du Bouddha, les
représentations de l'univers et du lac
Anotatta, puis les horoscopes de la vie
du Bouddha. Objet du chapitre 6 et
dernier, le "décor ornemental" réunit les
éléments architecturaux peints en
trompe-l'œil à l'intérieur des temples
(corniches, frises et pilastres, frontons
peuplés d'êtres célestes et d'animaux
mythiques) et le décor des voûtes (qu'il
est un peu agaçant de trouver
systématiquement appelées "plafond").
Aséanie 12, décembre 2003
Un "guide des monuments" clôt le
livre. Il présente 36 monuments au prix
de nombreuses redites des chapitres
précédents. Leur description aurait été
plus claire accompagnée des plans de
ces monuments enrichis d'indications
sur la situation des peintures. À défaut
des plans de l'inventaire de Pagan (il
semble que l'Unesco ait trop tardé à
donner son accord pour leur utilisation),
n'aurait-il pas été possible de reproduire
les dessins de Nina Oshegowa et Sergej
Oshegow (1988) dont l'ouvrage, bien que
consacré à l'art birman dans son
ensemble, parvient à donner, par de clairs
schémas iconographiques des
principaux murs de plusieurs temples (p. 85,
102, 106, 111, 113, 115), une image
autrement précise du programme pictural
de ces monuments? Et un plan aurait
sans doute aidé l'auteur à se souvenir
que l'Abe-ya-dana s'ouvre vers le Nord
et non vers l'Est, d'où une
malencontreuse incohérence dans la localisation des
peintures, tant dans le texte que dans les
légendes des photographies (p. 170-178).
Ces remarques ne doivent pas cacher
l'intérêt réel de l'ouvrage, en particulier
de ses illustrations. Les photographies, en
majorité l'œuvre de Joachim K. Bautze,
sont le plus souvent de bonne qualité. Tout
au plus peut-on regretter que certaines
soient trop déformées par une prise de
vue oblique lorsque la peinture est située
en haut d'un mur. Il n'était certainement
pas aisé d'arpenter Pagan avec une
échelle, mais à comparer par exemple la
photographie 57 de la page 57 avec une
vue de la même peinture prise à
l'horizontale (ph. 1 et 2 ci-contre), il est
clair qu'il aurait été préférable de
renoncer à publier ce document plutôt que de
trahir à ce point les proportions et la
composition d'une œuvre d'art sans en
avertir le lecteur. Et pourtant, cette
photographie ne manque pas d'intérêt,
qui offre une vue de la scène telle
qu'elle apparaît depuis le sol de cet
 Comptes rendus
étroit couloir. Elle démontre à quel point
la démarche d'un Michel-Ange,
peignant la voûte de la Chapelle Sixtine
en adaptant les proportions de ses
personnages à la perception qu'en
auront d'en bas les fidèles, était
étrangère aux artistes de Pagan: seule
importait la présence effective de cette
scène à l'intérieur du temple,
correctement peinte dans sa composition
codée qui aurait été la même sur un
manuscrit, et non la vision que pouvait
en avoir celui qui parcourait le couloir
- vision d'ailleurs toute théorique,
noyées que sont ces peintures sous la
pénombre de la voûte.
Pierre Pichard
La descente du Mont Mem
Kubyauk-gyi Myinkaba,
couloir Ouest, mur intérieur, côté Nord
Illustration non autorisée à la diffusion
(Photo 57, page 57 copyright, G. Heil)
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Références The Buddhist
Murals
of Pagan
Ono, Toru (texte),TAKAO, Inoue (photos)
1978 - Pagan, Mural Paintings of the
Buddhist Temples in Burma,
Tokyo, Kodansha.
OSHEGOWA, Nina, Oshegow, Sergej
1988 - Kunst in Burma, 2000 Jahre
Architektur, Malerei und Plastik
im Zeichen des Buddhismus und
Animismus, Leipzig, VEB E.A.
Seemann Verlag.
Wenk, Klaus
1977 - Murals in Burma, Vol. I,
Paintings from Pagan of the
Late Period, 18th century,
Zurich, Verlag Inigo von
Oppersdorff.
(Photo Pierre Pichard)