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Cosmologie religieuse
Une cosmologie religieuse est une représentation sociale proposée par
une religion concernant le monde accessible aux êtres humains.

Historiquement, jusqu'au XVIIIe siècle, l'ensemble du domaine de la


cosmologie était intégré à la « métaphysique spéciale » (voir par exemple
la classification de Christian Wolf en 1729 et l'article ontologie
(philosophie)).

Aujourd'hui, Les cosmologies « religieuses » n'ont plus vocation à décrire


la structure physique et chimique de l'univers d'une façon scientifique,
les religions considérant qu'une telle entreprise relève de la
responsabilité des scientifiques. Les religions, sur la base de leurs écrits
et traditions, décrivent seulement les principes selon lesquels leurs
fidèles sont invités à se représenter le monde dans lequel ils vivent, afin
de « bien » se comporter avec leurs semblables[réf. nécessaire].

Les religions, telles qu'elles ont évolué jusqu'à aujourd'hui, ne contestent


généralement pas telle ou telle théorie cosmologique (Big Bang, univers
en expansion, ...). Cependant, certains mouvements religieux persistent à
nier les théories scientifiques sur l'univers, afirmant s'en tenir à une
lecture littérale des passages bibliques concernant les descriptions
cosmologiques. Cela s'appelle le créationnisme.

En revanche, les représentants des grandes religions et de certaines


spiritualités considèrent généralement, d'un point de vue symbolique,
qu'il existe une cause première à l'origine de la vie, qu'elles nomment
Dieu ou d'une autre appellation.

Cosmologie, calendrier et relation avec les


sciences
Finalité initiale de la cosmologie : le calendrier

Dans l'Antiquité, au Moyen Âge, à la Renaissance et encore pendant les


Lumières, la cosmologie religieuse ne se distinguait pas de la
cosmologie scientifique. Les principaux objectifs poursuivis par l'étude du
ciel concernaient le calcul du temps. L'astronomie avait donc pour
application pratique l'établissement des calendriers, ainsi que la
fabrication des cadrans solaires, des gnomons, et des horloges. Une autre
préoccupation qui apparaît dès l'Antiquité est la détermination des dates
des fêtes religieuses.

Dans le christianisme
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La date de Pâques, dans le catholicisme, est celle définie lors du Premier


concile de Nicée en 325[1].

Le calcul de la date de Pâques en relation avec l'astronomie fait l'objet


d'une science appelée le comput, fondée par Bède le Vénérable au
VIIIe siècle et enrichie à la fin du Xe siècle par le moine Birtferth et
Gerbert d'Aurillac (pape Sylvestre II) à partir des sciences et techniques
islamiques (Al-Khwarizmi). Dans le christianisme, les règles du comput
sont utilisées pour l'établissement du calendrier incluant les fêtes
religieuses (principalement la date de Pâques).

La relation entre cosmologie, calendrier, et religion apparaît avec


évidence dans la création de l'Observatoire du Vatican par le pape
Grégoire XIII en 1578, en vue de préparer la réforme du calendrier, c'est-
à-dire le passage du calendrier julien au calendrier grégorien (du nom du
pape Grégoire XIII), qui sera prolguée en 1582[2].

Une illustration de la relation entre cosmologie et religion est donnée de


nos jours, dans le christianisme, à l'église Saint-Sulpice à Paris, où l'on
trouve, dans le transept gauche, un gnomon astronomique, conçu de
façon telle que la lumière du soleil éclaire l'autel lors de la fête de
Pâques.

Les agendas sont établis en coopération avec les autorités religieuses


(Centre national de pastorale liturgique). L'Institut de mécanique céleste
et de calcul des éphémérides (IMCCE) calcule ainsi la date de Pâques
selon les règles du comput ecclésiastique.

Séparation de la cosmologie et de la religion à partir du


XVIIe siècle

Ce n'est que plus tard, à partir des XVIIe et XVIIIe siècles, avec Kepler,
Tycho Brahe, Galilée, et Newton, que l'astronomie permit de faire des
découvertes dans les sciences fondamentales (la gravitation universelle)
qui eurent des applications dans d'autres domaines que le calcul du
temps et le calendrier : la mécanique ouvrit la voie à la révolution
industrielle. L'astronomie, puis la cosmologie, devinrent des sciences
autonomes, indépendantes des autorités religieuses, à partir du
XVIIIe siècle. Enrichie par les sciences physiques et la chimie (mécanique
quantique), l'astronomie a donné naissance à la fin du XIXe siècle à
l'astrophysique.

La dissociation entre les sciences et les religions relève du principe


d'autonomie de la science.

Historique lié à la civilisation islamique


La civilisation islamique s'intéressa de très près à la cosmologie et à
l'astronomie. L'objectif en était simple, il s'agissait de déterminer :
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 les heures de prière (cinq par jour) ;


 la direction de la Mecque, vers laquelle les fidèles doivent s'orienter
lors de la prière.

Ptolémée était un grand géographe du IIe siècle. Par ailleurs, son système
cosmologique (géocentrique) fournissait une explication satisfaisante,
pour la vie sociale de cette époque, de la configuration du cosmos.

Les Arabes fabriquèrent des abaques, des cartes géographiques,


permettant de déterminer les éléments nécessaires à la prière.

Historique lié à l'Occident chrétien


Le principal texte religieux judéo-chrétien, la Bible, raconte en détail
l'histoire de la création. Le premier chapitre du livre de la Genèse de
l'Ancien Testament décrit la création de la lumière et des ténèbres, la
fondation du Ciel et la Terre et la création de toutes les créatures, y
compris du premier homme et de la première femme, par Dieu. Selon la
Bible, toutes les étapes de la création se produisirent en six jours
consécutifs, et le septième jour, Dieu se reposa.

L'archevêque Ussher calcula que le monde aurait été créé le 23 octobre


4004 av. J.-C. à 21 h.

La cosmologie dans le système de pensée du haut Moyen


Âge

Le Moyen Âge a hérité du système de Ptolémée (astronome) enrichi d'une


lecture littérale de la Bible.

À l'origine, l'astronomie se confondait avec l'astrologie. Ce dernier terme,


employé dans la civilisation islamique, n'avait pas le sens péjoratif que
nous lui attribuons quelquefois aujourd'hui (logos signifie discours,
science en grec). D'autre part, on ne distinguait pas les aspects
scientifiques et religieux de la cosmologie.

L'astronomie était l'une des quatre disciplines du quadrivium, avec


l'algèbre, la géométrie, et la musique. Le quadrivium et le trivium
formaient les sept arts libéraux.

Ce fut Bède le Vénérable, moine anglais, l'un des plus grands lettrés de
son époque, qui, au VIIIe siècle, donna ses lettres de noblesse à la mesure
du temps qui, on l'a vu, était liée à la cosmologie. Bède le Vénérable fut le
véritable inventeur de la science du comput. Il a été proclamé docteur de
l'Église en 1899, par le pape Léon XIII.
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Vers l'an mille, les études du comput reprirent, sous l'impulsion d'un
autre moine anglais, Birthfert, qui comprit la complexité de cette
science : pour lui, le comput faisait appel à quatre disciplines des arts
libéraux : deux du trivium (dialectique et grammaire, à vérifier) et deux
du quadrivium (astronomie et algèbre).

Gerbert d'Aurillac fut également un grand astronome, doublé d'un


philosophe et d'un mathématicien aux talents exceptionnels pour l'époque
(on parlait d'algèbre et de géométrie). Il relança les études de la
dialectique et du quadrivium à l'école cathédrale de Reims, difusant ainsi
la connaissance dans tout l'occident. Gerbert fut le premier introducteur
de la représentation du monde d'Aristote en occident. Il devint pape en
999 sous le nom de Sylvestre II, et mourut en 1003.

Intégration de la représentation géocentrique en Occident

Aux XIIe siècle, l'occident intégra la philosophie et les sciences grecques,


par l'intermédiaire des échanges avec la civilisation islamique. Le
système de représentation du monde d'Aristote devint progressivement
une référence absolue dans les écoles et universités de l'occident
chrétien, comme dans la civilisation islamique.

Il représentait le monde centré sur la terre, avec un monde sub-lunaire et


un monde supra-lunaire. Les principales traductions des œuvres
d'Aristote eurent lieu au XIIe siècle.

Articles détaillés : Relation entre science et religion et Philosophie


médiévale.

À partir du XIIIe siècle, la cosmologie fut intégrée dans la métaphysique


générale, qui était intimement liée à la métaphysique spéciale, ou
théologie, dans l'école scolastique (Thomas d'Aquin, John Duns Scot,
parmi d'autres). La scolastique adopta les théories cosmologiques
prédominantes depuis l'Antiquité : Ptolémée (IIe siècle ap. J.-C.) et Aristote
(IVe siècle av. J.-C.). Certains astronomes, tels Aristarque de Samos ou
Séleucos de Séleucie, avaient déjà compris l'héliocentrisme quelques
siècles av. J.-C.

Psaume 93 (92)

Tout le monde se représentait donc l'univers comme géocentrique, selon


les théories d'Aristote et de Ptolémée.

Quelques passages de la Bible étaient également rédigés dans le même


sens, comme cette ligne du psaume 93 (92) (Dieu roi de l'Univers) :

« Tu as fixé la Terre immobile et ferme. »


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Passage du comput julien au comput grégorien

On savait depuis l'Antiquité (Jules César) que des corrections


astronomiques étaient nécessaires sur le rapport entre le temps de
rotation de la terre sur elle-même (journée) et la durée du cycle solaire
(année), soit 365,24 au lieu de 365,25.

Dès 1345, Clément VI appela à sa cour à Avignon le grand astronome


Jean des Murs et lui commanda un rapport sur la réforme du calendrier.

Le cardinal Pierre d'Ailly rappela au concile de Constance (1415) l'âge


d'or où les dignitaires de l'Église primitive « se préoccupaient davantage
du calcul des jours et des moments que du compte des deniers et des
monnaies ».

Deux conciles examinèrent le projet de réforme, le concile de Bâle (1431-


1449) et le Ve concile du Latran (1512-1517), mais il traîna en longueur.

Lorsque Grégoire XIII devint pape en 1572, il fit du projet de réforme


l'une de ses priorités. La réforme fut décidée en février 1582.

On passa donc du comput julien au comput grégorien, ce qui entraîna un


décalage de calendrier, dont les historiens doivent tenir compte (dix jours
supprimés).

Article détaillé : Calendrier grégorien.


Article détaillé : Comput grégorien.

Le passage fut progressif dans les pays de la chrétienté :

 Les pays catholiques et leurs colonies adoptèrent le nouveau


calendrier entre 1582 et 1590,
 Les pays luthériens l'adoptèrent en 1700 (lorsque Descartes écrivit
son système philosophique, il était à la frontière des zones julienne
et grégorienne).

Apparition de la théorie héliocentrique

Copernic (re)découvrit l'héliocentrisme au XVIe siècle (1543). La théorie


de l'héliocentrisme afirmait que le Soleil était fixe au centre de l'univers.

À partir de 1609, le savant florentin Galilée utilisa la lunette


astronomique qu'il avait perfectionnée pour étudier le mouvement des
planètes, les étoiles, les taches solaires. Les découvertes de Copernic
furent alors confirmées par Galilée.

Une longue lettre de Galilée à Catherine de Lorraine en avril 1615


indique les passages de la Bible qui posaient, pour Galilée, des problèmes
d'interprétation par rapport à la cosmologie. En février 1616, Galilée fut
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inquiété par un dominicain. Le 5 mars 1616, l'Inquisition publia un décret


définissant l'héliocentrisme comme une doctrine fausse et contraire à
l'Écriture, et mit tous les écrits sur l'héliocentrisme (dont ceux de
Copernic) à l'Index.

Galilée publia en 1632 le dialogue sur les deux grands systèmes du


monde, ouvrage dans lequel il ridiculisait un partisan de la représentation
géocentrique. Malgré l'appui de certains jésuites, un procès fut intenté en
1633 à Galilée, qui fut condamné par l'Inquisition, pour un motif qui,
selon certains historiens, n'aurait pas été entièrement lié à
l'héliocentrisme (ce point est discuté). On opposa à Galilée le passage de
la Bible où Josué arrête la course du Soleil (Js, 10, 12-13). Urbain VIII, qui
était un ami de Galilée, commua immédiatement la peine en assignation à
résidence.

Selon Pietro Redondi, les véritables motifs étaient autres que


l'héliocentrisme : Galilée, en soutenant la théorie de l'atomisme, aurait
violé le dogme de la transsubstantiation lors de l'Eucharistie (ceci est
discuté, voir lien externe ci-dessous).

Descartes apprit le résultat du procès en novembre 1633. Lorsqu'il reçut


de son ami Beeckman la copie de l'ouvrage de Galilée, en 1634, Descartes
renonça à publier le traité du monde et de la lumière. Considérant que
Galilée avait manqué de méthode, Descartes s'orienta vers une carrière
philosophique et conçut un projet de philosophie des sciences
universelles, qui se démarquait nettement de la scolastique. Descartes
prit le doute universel et le cogito comme principe premier, et mit de côté
l'ancienne conception de la cause première (philosophie première
d'Aristote réconciliée avec le christianisme par Thomas d'Aquin) dans
tous ses ouvrages ultérieurs.

Les tentatives de conciliation entre les théories héliocentriques et celles


de Ptolémée, imaginées par certains scientifiques pour sauver la face de
l'Église catholique (équivalence des hypothèses), ne résistèrent pas aux
théories de la gravitation énoncées par Newton.

Les conséquences de ces controverses furent d'autant plus graves pour


l'Église catholique et l'école scolastique que les enseignements de
métaphysique à l'université étaient les plus prestigieux (epistēmē) par
rapport aux enseignements techniques (technē), et que certains passages
des textes bibliques paraissaient erronés. Ces polémiques discréditèrent
les positions de la scolastique et de l'Église catholique tout entière.

L'afaire Galilée et ses suites constituent un changement de paradigme


très important, qui s'est poursuivi jusqu'au XIXe siècle. La science et la
religion ont semblé se séparer, avec des phases très violentes. Ce
changement de représentation du monde est connu sous le nom de
révolution copernicienne.
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Levées d'index, éditions des œuvres de Galilée

En 1741, devant la preuve optique de l'orbitation de la Terre, le pape


Benoît XIV fit donner par le Saint-Ofice l'imprimatur à la première
édition des œuvres complètes de Galilée. Ce geste constitua une révision
implicite des sentences de 1616 et 1633.

En 1757, les ouvrages favorables à l'héliocentrisme furent à nouveau


autorisés, par un décret de la Congrégation de l'Index, qui retira ces
ouvrages du catalogue des livres interdits.

Napoléon fit transférer certains archives du Vatican à Paris. Le dossier de


Galilée fut soigneusement inventorié et numéroté, et la traduction
bilingue de toutes les pièces engagée. À la fin du règne de Napoléon, le
dossier revint au Vatican.

En 1823, Pie VII fit confirmer les mesures de levée d'index, et le père
Olivieri, commissaire du Saint-Ofice, rédigea un rapport favorable avec
concession d'imprimatur pour tous les ouvrages présentant l'astronomie
copernicienne comme une thèse vérifiée.

Malgré toutes ces corrections, l'image de l'Église catholique romaine fut


gravement afectée, de sorte que l'« afaire Galilée » fut sans doute pour
beaucoup dans le rejet de la métaphysique par les philosophies athées au
XIXe siècle.

Travaux d'exégèse

Au XIXe siècle, les protestants engagèrent des travaux d'exégèse. Ils


travaillèrent sur l'Ancien Testament.

En 1893, le pape Léon XIII promulgua l'encyclique Providentissimus deus


sur les études bibliques.

En 1942, Agostino Gemelli reconnut que l'afaire Galilée fut une erreur
grave, qui ne mettait en cause ni l'infaillibilité du pape ni l'autorité de
l'Église.

En 1943, le pape Pie XII promulgua l'encyclique Divino Afflante Spiritu,


qui donna à l'exégèse sa norme de liberté en distinguant les diférents
genres littéraires dans l'Écriture.

Le même pape Pie XII ne s'opposa pas à la théorie du Big Bang.

Sur la controverse née de l'afaire Galilée, voir :

 les travaux de Francesco Beretta, du CNRS Lyon, sans doute un des


meilleurs spécialistes de la question aujourd'hui ;
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 les articles Galilée, Relation entre science et religion, équivalence


des hypothèses, Urbain VIII et la thèse (discutée) de Pietro Redondi
sur les raisons du procès de Galilée (dogme de la
transsubstantiation) ;
 les liens externes ci-dessous ;
 la bibliographie.

À titre d'exemple, le psaume 93 (92) (Dieu de majesté), qui contient un


passage cosmologique, est maintenant rédigé de la façon suivante :

Bible de Jérusalem :

« Oui, le monde est stable, point ne bronchera. Ton trône est établi dès
l'origine, depuis toujours, tu es. »

Traduction œcuménique de la Bible :

« Oui, le monde reste ferme, inébranlable. Depuis lors, ton trône est
ferme ; depuis toujours tu es. »

Révision de la position de l'Église sur Galilée

Les papes modernes n'ont cessé de revoir leur position sur Galilée. Le
concile Vatican II reconnut le caractère indu de certaines interventions de
l'Église catholique dans le domaine de la science. Il fit écho à la pensée
de Galilée sur les rapports entre science et religion.

En 1979 et en 1981, le pape Jean-Paul II a chargé une commission de


revoir les conditions historiques dans lesquelles eurent lieu la
condamnation de Galilée. L'Église catholique considère qu'il n'est pas
nécessaire de parler de réhabilitation, puisque l'institution qui l'a
condamné n'existe plus, et que les levées d'Index ont eu lieu depuis
longtemps (1741, 1757). Le principe de l'index a lui-même été supprimé
depuis Vatican II.

En 1983, pour le 350e anniversaire du procès de Galilée, le cardinal


Poupard publia un livre (voir bibliographie).

La « commission pontificale d'études de la controverse ptoléméo-


copernicienne aux XVIe-XVIIe siècles » comprenait quatre groupes de
travail :

 section exégétique (cardinal Martini) ;


 section culturelle, cardinal Paul Poupard ;
 section scientifique et épistémologique, professeur Carlos Chagas
et R.P. George Coyne ;
 questions historiques et juridiques, Mgr Michele Maccarone.
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Dans son compte-rendu au pape Jean-Paul II du 31 octobre 1992, le


cardinal Poupard indiquait :

« Ces travaux ne s'inscrivent pas dans un procès de réhabilitation,


comme on a pu parfois le croire, ni dans un cadre juridique qui est
hors de leur compétence. Il s'agit d'une clarification opérée par des
hommes de sciences, soucieux de comprendre et d'aider à
comprendre : situer Galilée, d'abord par rapport à ses
prédécesseurs, le chanoine Copernic, d'une part, et par rapport à
ses contemporains, les professeurs du Collège romain, d'autre
part ; puis dans la culture scientifique, philosophique et
théologique de son temps, enfin au cours des siècles, de l'époque
des Lumières aux milieux scientifiques aujourd'hui. »

Ce même 31 octobre 1992, le pape Jean-Paul II se prononça en faveur de


Galilée lors de son discours aux participants à la session plénière de
l'Académie pontificale des sciences.

Une conférence eut lieu à l'ENSTA avec le cardinal Poupard du 12


décembre 2001 au 27 mars 2002.

Un second livre du cardinal Poupard sur l'afaire Galilée est paru en


octobre 2005.

Cosmologie et représentation sociale au cours des âges

Les représentations du monde ont constamment évolué dans l'Histoire.

On peut noter cette citation de Montesquieu au XVIIIe siècle :

« Aujourd'hui nous recevons trois éducations différentes ou contraires :


celles de nos pères, celles de nos maîtres, celle du monde. Ce qu'on nous
dit dans la dernière renverse toutes les idées des premières. »

Il se produit ainsi des périodes, dans l'Histoire, où les représentations du


monde changent radicalement. Celle que vécurent Montesquieu et ses
contemporains du siècle des Lumières s'appelait la révolution
copernicienne. À partir de découvertes scientifiques sur l'univers,
opérées par l'observation et le recoupement par les méthodes
mathématiques (Copernic, Galilée), on en déduisit les lois de la
dynamique (Newton), qui eurent des applications dans tous les domaines
de la vie pratique au XVIIIe et XIXe siècle. Cette nouvelle représentation
de l'univers eut ainsi des conséquences sur les représentations sociales.

Avant le siècle des Lumières, les représentations collectives du monde


avaient déjà beaucoup évolué. Au Moyen Âge, jusque vers le XIVe siècle,
on se représentait ainsi la terre comme un disque plat.

Représentation religieuse actuelle


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Les travaux d'exégèse et d'herméneutique des XIXe et XXe siècles ont


insisté sur les dangers d'une interprétation littérale des textes.
L'interprétation des textes doit d'abord être symbolique.

Les travaux d'exégèse ont formulé certains passages diféremment. Par


exemple, le psaume 93 (92) dans la Traduction œcuménique de la Bible :
« Oui, le monde reste ferme, inébranlable. »

Jean-Paul II a déclaré dans son discours de clôture des travaux de la


commission d'étude de la controverse ptoléméo-copernicienne, le 31
octobre 1992 :

« Au temps de Galilée, il était inconcevable de se représenter un


monde qui fut dépourvu d'un point de référence physique absolu. Et
comme le cosmos alors connu était pour ainsi dire contenu dans le
seul système solaire, on ne pouvait situer ce point de référence que
sur la terre ou sur le soleil. Aujourd'hui, après Einstein et dans la
perspective de la cosmologie contemporaine, aucun de ces deux
points de référence n'a plus l'importance qu'ils présentaient alors.
Cette remarque ne vise pas, cela va de soi, la validité de la position
de Galilée dans le débat ; elle entend indiquer que souvent, au-delà
de deux visions partielles et contrastées, il existe une vision plus
large qui les inclut et les dépasse l'une et l'autre. »

Cosmologie religieuse et sciences humaines


Exégèse et herméneutique

On a vu que la cosmologie religieuse pose des questions


d'interprétation des textes bibliques.

Même si les passages cosmologiques de la Bible sont peu nombreux, ils


ont des implications sur les représentations, qui engagent tout le corps
social, et même peut-être sur certains dogmes centraux.

Les erreurs commises au sujet de Galilée semblent, à première vue, le fait


d'interprétations trop littérales de la Bible.

Il a donc fallu déterminer les critères d'interprétation (herméneutique), et


de retour aux sources des textes anciens (exégèse).

Les études bibliques ont fait l'objet d'encycliques :

 Providentissimus deus, de Léon XIII (1893),


 Divino Afflante Spiritu de Pie XII (1943).

Philosophie
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La cosmologie religieuse a beaucoup d'implications en philosophie, et


pour lesquelles il est admis que la science n'a aucunement à les prendre
en compte, cette dernière ayant pour but de décrire les objets, les
phénomènes et les processus, mais non d'en expliquer la cause ultime :

 quel sens final donner aux actions humaines (téléologie, éthique) ;


 quel sens donner à la notion de substance (métaphysique) ;
 comment élargir la logique à d'autres modes de raisonnement que
la déduction (phénomènes qui s'enchaînent par des relations de
cause à efet au sens déductif) : par exemple l'induction (logique).

Certaines hypothèses (cf Pietro Redondi ci-dessus) sur Galilée montrent


que le dogme de la transsubstantiation était en jeu dans les débats.

George V. Coyne, directeur de l'observatoire astronomique du Vatican,


indique les conditions dans lesquelles on peut établir un dialogue entre
philosophie, théologie, et cosmologie.

Anthropologie

Derrière une cosmologie religieuse, peut se cacher une nouvelle manière


d'aborder le rapport de l'homme à la nature, et de sa vision des sciences
de la vie. Tous les phénomènes étant liés (holisme), on en vient à redéfinir
une nouvelle anthropologie.

Archéologie du savoir et sociologie

La cosmologie religieuse, vue sous l'angle de l'archéologie des sciences


humaines et du savoir, correspond à certains aspects de la notion de
conception du monde.

Le philosophe Michel Foucault appelle les conceptions du monde des


épistémès. Selon lui, nous entrons dans un nouvel épistémè qu'il appelle
l'hypermodernité.

Michel Foucault développe ces idées dans Les mots et les choses (1966),
et dans l'Archéologie du savoir (1969).

Reconnaissance des erreurs de certains


théologiens du XVIIe siècle sur Galilée
Le 31 octobre 1992, le pape Jean-Paul II rend une nouvelle fois hommage
à Galilée lors de son Discours aux participants à la session plénière de
l'Académie pontificale des sciences.

Jean-Paul II a reconnu clairement le 31 octobre 1992 les erreurs de


certains théologiens du XVIIe siècle dans l'afaire :
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« Ainsi la science nouvelle, avec ses méthodes et la liberté de recherche


qu'elle suppose, obligeait les théologiens à s'interroger sur leurs propres
critères d'interprétation de l'Écriture. La plupart n'ont pas su le faire.

Paradoxalement, Galilée, croyant sincère, s'est montré plus perspicace


sur ce point que ses adversaires théologiens. "Si l'écriture ne peut errer,
écrit-il à Benedetto Castelli, certains de ses interprètes et commentateurs
le peuvent, et de plusieurs façons". On connaît aussi sa lettre à Christine
de Lorraine (1615) qui est comme un petit traité d'herméneutique
biblique. »

La cosmologie hindoue
La cosmologie hindoue est décrite dans plusieurs mythes qui sont
apparus au cours des siècles dans l'hindouisme[3]. Les trois principaux
sont: la création par Brahma avec la participation des autres dieux de la
Trimurti. Un autre mythe parle d'un œuf doré; un autre encore d'un ciel
mystique mais inconnu créateur qui doit laisser contemplatif et dans le
mystère le croyant. Voici quelques détails sur ces mythes.

La création mystérieuse

Le Rig-Véda questionne l'origine du cosmos dans :

Ni l'être ni le non-être n'existait encore. Qu'y avait-il de caché ? Et où ?


Et sous la protection de qui ? Qui sait vraiment ? Qui peut l'affirmer ?
D'où est-il né et d'où venait cette création ? Les devas sont nés après la
création de ce monde, qui donc sait d'où il naquit ? Nul ne sait d'où a
surgi la création, et s'il l'a ou non produite. Celui qui l'examine au plus
haut des cieux, lui seul sait, ou peut-être ne sait pas. (Rig-Véda 10. 129)

L'Œuf doré

Mais la vision qu'ofre le Rig-Véda du cosmos voit aussi un vrai principe


divin qui s'auto-projette en tant que mot divin, Vāc, « donnant naissance »
au cosmos que nous connaissons du Hiranyagarbha moniste ou l'œuf
Doré. Le Hiranyagarbha est vu alternativement comme Brahmā, le
créateur qui fut à son tour créé par Dieu, ou comme Dieu (Brahman) lui-
même.

La création de Brahma

La dernière vision puranique afirme que l'univers est créé, détruit et


recréé en séries de cycles se répétant éternellement. Dans la cosmologie
hindoue, un univers dure environ 4.320.000.000 ans (correspondant à un
jour de Brahmā, le créateur ou kalpa) est ensuite détruit par le feu ou
l'eau. Alors Brahmā se repose pour une nuit, exactement aussi longue que
le jour. Ce processus, nommé pralaya (Cataclysme), se répète pendant
100 années de Brahmā (311 billions d'années humaines) et représente la
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durée de vie de Brahmā. Il faut noter que Brahmā est le créateur mais
n'est pas forcément considéré comme Dieu dans l'Hindouisme. Il est
principalement considéré comme une création de Dieu / Brahman.

La croyance est que nous sommes actuellement dans la 51e année du


Brahmā courant et donc quelque 155 billions d'années se sont écoulées
depuis qu'Il est né en tant que Brahmā. Après la « mort » de Brahmā, il
faut qu'encore 100 années de Brahma s'écoulent avant qu'il renaisse et
que toute la création recommence à nouveau. Ce processus se répète
encore et encore, éternellement.

La vie de Brahmā se divise en mille cycles (Maha Yuga, ou la Grande


Année). La Maha Yuga au cours de laquelle la vie, y compris la race
humaine, apparait puis disparait comporte 71 divisions, chacune
composée de 14 Manvantara (1000) ans. Chaque Maha Yuga dure
pendant 4.320.000 ans. Manvatara est le cycle de Manu, celui qui donne
naissance et gouverne la race humaine.

Chaque Maha Yuga se compose d'une série de quatre yugas plus courts,
ou âges. Les yugas vont progressivement se dégradant d'un point de vue
moral alors qu'on passe d'un yuga à un autre. Par conséquent, chaque
yuga est plus court en durée que l'âge qui l'a précédé. Le Kali Yuga actuel
(Âge de Fer) a commencé à minuit entre le 17 et le18 février 3102 av. J.-C.
dans le calendrier julien proleptique.

La cosmologie bouddhiste
Dans le Bouddhisme, l'univers vient à exister selon les actions (karma) de
ses habitants. Les Bouddhistes ne présupposent ni une origine ultime ni
une fin à l'univers, mais voient dans l'univers quelque chose en
modification permanente, naissant et mourant, parallèle à une infinité
d'autres univers faisant la même chose.

L'univers bouddhiste est constitué d'un grand nombre de mondes qui


correspondent à diférents états mentaux, y compris des états passifs de
transe, des états sans passion de pureté, et des états inférieurs de désir,
de colère et de peur. Les êtres dans ces mondes entrent tous dans
l'existence, c'est-à-dire naissent, et quittent tous cette existence vers
d'autres états, c'est-à-dirent meurent. Un monde vient à exister lorsque le
premier être nait, et cesse d'exister, en tant que tel, lorsque le dernier
être y meurt. L'univers de ces mondes nait et meurt également, avec la
mort de la dernière créature précédant une conflagration universelle qui
détruit la structure physique des mondes; puis, après un intervalle de
temps, des êtres recommencent à naitre et l'univers est à nouveau
reconstruit. Cependant, d'autre univers existent aussi, et il y a des plans
d'existence supérieurs qui ne sont jamais détruits, bien que les êtres qui y
vivent entrent et quittent également l'existence.
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La cosmologie bouddhiste est non seulement une représentation des


origines et de la destruction de l'univers, mais fonctionne également
comme une représentation de l'esprit, avec ses pensées venant à exister à
partir de pensées précédentes et à se transformer en d'autres pensées ou
d'autres états.

La cosmologie jaïne
Selon les croyances jaïnes, l'univers n'a jamais été créé et ne va jamais
cesser d'exister. Il est éternel mais pas immuable, parce qu'il traverse des
séries de cycles sans fin. Chacun de ces cycles montants ou descendants
est divisé en six ages du monde (yugas). L'âge du monde actuel est le
cinquième âge de l'un de ces « cycles », qui est en mouvement
descendant. Chaque âge est connu comme un « Aaro ». Il n'y a pas de
nom spécifique attribué à chaque âge. À la place, on les désigne par un
numéro, comme pour « Pehelo Aaro » ou Premier Âge, « Beejo Aaro » ou
Deuxième Âge, « Treejo Aaro » ou Troisième Âge, « Chotho Aaro » ou
Quatrième Âge, « Paanchmo Aaro » ou Cinquième Âge et « Chhatho
Aaro » ou Sixième Âge. Tous ces âges ont une durée déterminée de mille
ans.

Quand cela atteint son niveau le plus bas, le jaïnisme lui-même sera
perdu intégralement. Alors, lors de la montée suivante, la religion jaïne
sera redécouverte et présentée à nouveau par de nouveaux dirigeants
appelés Tirthankaras (littéralement « Faiseurs de Croisement » ou
« Trouveurs de Gués »), pour être finalement encore perdu à la fin de la
descente suivante, et ainsi de suite.

Dans la pensée jaïne, la forme de l'univers habité a été décrite comme le


chifre 8 ou un homme debout les mains sur les hanches. Sa dimension a
été décrite comme étant de 14 Rajjus. Au sommet et au milieu, il fait un
Rajju de large, mais la largeur des boucles varie de 5 à 8 Rajjus. Ainsi, la
distance entre les deux extrémités du monde du milieu est
approximativement de 5,2 milliards d'années-lumière.

Bibliographie

 Brèves méditations sur la création du monde, Jean-Marc Rouvière,


Paris, Ed. L'Harmattan 2006.
 Traduction œcuménique de la Bible,
 Bible de Jérusalem, éditions du Cerf, 1998. Cette version de la Bible
propose un tableau chronologique sur les origines de l'homme (Gn
1-11), remontant à 2 000 000 av. J.-C. (homo habilis),
 Théologie et métaphysique de la Création chez saint Thomas
d'Aquin, Jean-Marie Vernier, Pierre Téqui éditeur, collection croire
et savoir, 1995, (ISBN 2-7403-0310-6)
 De temps en temps, Histoires de calendriers, sous la direction
éditoriale de Claude Naudin, Tallandier / Historia, Centre
Historique des Archives Nationales, 2001,
15

 L'Affaire Galilée, cardinal Paul Poupard, éditions de Paris, octobre


2005, (ISBN 2-85162-166-1),
 Galilée en procès, Galilée réhabilité, sous la direction de Francesco
Beretta. Saint-Maurice, Éditions Saint-Augustin, 2005. (ISBN 2-88011-
369-5).
 Galilée hérétique, Pietro Redondi, Paris, Gallimard, 1981.
(Bibliothèque des Histoires). (ISBN 2-07-070419-X),
 Galileo Galilei, 350 ans d'histoire (1633-1983), ouvrage collectif
sous la direction de Mgr Poupard, Desclée International, Tournai
1983,
 Descartes, Samuel S. de Sacy, Seuil, 1956, réédition 1996, (ISBN 2-
02-028228-3),
 Histoire illustrée de la philosophie, de Socrate à nos jours, 2500
ans de philosophie occidentale, Bryan Magee, éditions France
Loisirs.

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