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Mécanique des Structures &

Approximations Numériques

Octobre 2019

Sylvain Drapier, Prof.

Département Mécanique et Procédés d’Elaboration


Centre Science des Matériaux et des Structures & LGF UMR CNRS 5307
École Nationale Supérieure des Mines de Saint-Étienne
158, cours Fauriel ; CS 62362
42023 Saint-Étienne Cedex 2

bureau J3-15, tél : 00-79


2
Introduction générale

La mécanique des milieux continus, ou MMC, est la base de la résolution de problèmes


en mécanique des solides et mécanique des fluides. Si la MMC permet de traiter tout type
de problème, la résolution analytique simultanée des 3 équations d’équilibre en tout point du
domaine considéré, devient vite insurmontable pour être utilisée directement dans le dimen-
sionnement des produits industriels courants. Dans le cas de la mécanique des solides, les
ingénieurs ont isolé des cas particuliers de la MMC, où via certaines hypothèses sur les géomé-
tries et le chargement, la résolution peut se faire plus aisément. Ce domaine de la mécanique
des solides se nomme la mécanique des structures et se définit, par opposition à la MMC,
comme la mécanique des solides de dimensions finies où une des dimensions au moins est très
faible devant les autres.
Les théories cinématiques qui sous-tendent la mécanique des structures ont été mises au
point dans les 2 derniers siècles pour le dimensionnement des structures. Dans le même temps
la résistance des matériaux, ou RdM, était mise en place comme un cadre particulier de la
mécanique où des hypothèses supplémentaires simplifient encore les problèmes à traiter. Dans
ce cours, la théorie des poutres sera plus particulièrement développée (Figure 1) et ensuite
étendue à la théorie des plaques, ceci principalement dans le cadre de la RdM.
On verra, à travers cette introduction à la mécanique des structures, que bien avant
que les résolution numériques ne soient disponibles, le dimensionnement des structures à l’aide
de ces approches répondait, au moins en première approximation, à la plupart des cas de la
vie courante. On peut toutefois noter que pour les cas complexes, les calculs s’alourdissent
considérablement, et le bon sens de l’ingénieur doit primer dans le choix des hypothèses à
poser pour mener à bien ces résolutions, que ce soit de façon analytique ou bien numérique.

L’introduction de la théorie des poutres en RdM peut être envisagée principalement de


2 façons différentes. Une première approche consiste à partir des considérations particulières
pour des grandes familles d’exemples. Une telle approche nécessite une bonne connaissance et
une bonne maîtrise de la modélisation des problèmes physiques à résoudre. Une approche plus
systématique, choisie ici, permet de poser la formulation rigoureuse de la théorie des poutres à
partir de considérations purement mécaniques. Cette théorie tout à fait générale sera ensuite
appliquée aux cas plus simples permettant d’isoler les comportements linéaires en traction,
flexion simple, et en torsion. Les comportements non-linéaires seront ensuite abordés, et la
mécanique des plaques sera décrite à partir d’une cinématique proche de celle des poutres. Au
fur et à mesure des exemples traités, le lien entre les problèmes physiques et leur formulation
devra apparaître de plus en plus naturellement.

i
ii

Enfin, même si les solutions proposées dans le cas des structures simples restent d’un
grand intérêt, il apparaîtra rapidement, dans le cas des plaques notamment, que la résolution
analytique est de portée limitée. On comprend alors que la conception de systèmes avancés, de
plus en plus complexes et multi-physiques (aéroélasticité/structure, thermo-mécanique, bio-
mécanique, . . .) ne pourra se faire à l’aide de solutions simplifiées seulement. Au contraire, la
conception et le dimensionnement de structures doit s’appuyer de façon systématique sur les
2 types d’approches, analytique pour accéder rapidement à des ordres de grandeur, puis nu-
mérique pour prendre en compte plus finement des comportements extrêmes et/ou locaux. En
effet, l’avancée conjointe des connaissances dans le domaine du comportement des matériaux
et de la puissance de calcul des ordinateurs fait que le recours aux simulations numériques,
et souvent au calcul intensif (massivement parallèle), est dorénavant systématique et pointue.
Il faut toutefois noter que l’utilisation de ces simulations ne peut se faire sans connaissance
avancée en mécanique, et notamment en mécanique des structures qui reste la base dans la
formulation des éléments finis structuraux largement répandus en conception. Seule une bonne
connaissance de ces éléments, et donc des hypothèses qui ont amené à leur formulation, ainsi
que des méthodes de résolution numériques correspondantes, permet de mener à bien, de
façon optimale et sûre, des calculs de dimensionnement des structures. Une extension à la
résolution numérique des problèmes de mécanique est donc proposée en fin de ce cours, avec
un accent particulier mis sur la mécanique numérique des structures. Ce chapitre représente
également un avant-goût du module 2 mis en place à la rentrée 2009-2010 dans l’option Ma-
tériaux et Mécanique, intitulé ’Mécanique numérique’, et qui se concentre exclusivement sur
les méthodes numériques et la simulation en mécanique.
Quelques ouvrages de référence
— Introduction à la mécanique des milieux continus, P.Germain et P.Muller, Éd. Mas-
son 1995, collection Enseignement de la physique,
— Mécanique des Structures, Tome 2 Poutres, S.Laroze et J.-J. Barrau, Éd. Masson
1991,
— Cours de Mécanique des Milieux Continus de 1ère année de l’École Nationale Supé-
rieure des Mines de Saint-Étienne, R. Fortunier, 2000 et H. Klöcker, 2003.
— Theories of elastic plates, V.Panc, Éd. Noordhoff International Publishing 1975,
collection Mechanics of Structures.
— Finite element simulations of heat transfers, J.-M. Bergheau et R. Fortunier, ISTE
- J. Wiley, ISBN 9781848210530, 2008.
iii

(a)

(b)

(c)

(d)

Figure 1: Exemples de structure : (a) poutre ventrale en composite carbone/époxyde d’un


Airbus A340 : 16 mètres de long pour 1600 kg, (b) un exemple de pale d’éolienne (LM61.5
par LMGlasfiber) : 61,5 m de long pour 17,7 tonnes en composite verre / époxyde - la plus
longue actuellement fait 88,4m (Adwen et LM Wind Power). (c) exemple de tablier de pont
soumis à des charges de roulement et une poussée aérodynamique, et (d) caisson central de
voilure A380 - concept et réalisation
Table des matières

1 Théorie des poutres 1


1.1 Rappels de MMC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2 Mécanique des structures et RdM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.2.1 Définition des structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.2.2 Résistance des Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2.3 Hypothèses des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.3 Cinématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.3.1 Torseur des déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
1.3.2 Bilan de la cinématique de poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.4 Contraintes et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.4.1 Torseur des efforts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.4.2 Énergie de déformation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.5 Élasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.5.1 Loi de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.5.2 Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.6 Méthode de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
1.6.1 Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . 20
1.6.2 Calcul des déplacements et des rotations . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.6.3 Calcul des états de contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.7 Bilan de la théorie des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

2 Théorie des poutres droites 33


2.1 Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan . . . . . . . . . . . . . . . 34
2.1.1 Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargées dans ce
plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
2.1.2 Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques . . . . . . . . . 35
2.1.3 Prise en compte du cisaillement transverse . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.1.4 Formulation des problèmes de flexion-tension . . . . . . . . . . . . . . 37

v
vi

2.2 Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
2.2.1 Tension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
2.2.2 Flexion simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.2.3 Flexion déviée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
2.2.4 Sollicitation composée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
2.2.5 Torsion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
2.3 Bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

3 Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 62


3.1 Rappels - calcul du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
3.1.1 Simplifications dans le cadre de la RdM . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
3.1.2 Travail dans le cas des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.2 Théorèmes énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3.2.1 Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti . . . . . . . . . . . . . . 66
3.2.2 Théorème de Castigliano . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.3 Hyperstatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
3.4 Résolution des systèmes hyperstatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
3.4.1 Principe de superposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
3.4.2 Théorème de Ménabréa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

4 Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 78


4.1 Flambage des poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
4.1.1 Équations non-linéaires de la statique des poutres droites . . . . . . . 80
4.1.2 Application à une poutre droite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
4.1.3 Extension aux calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88
4.2 Modes et fréquences propres de vibration en flexion dans les poutres droites . 89
4.2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
4.2.2 Équations de la dynamique des poutres droites à plan moyen . . . . . . 90
4.2.3 Vibrations libres - application à la flexion simple . . . . . . . . . . . . 91
4.2.4 Vibrations libres - calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
4.3 Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre . . . . . . . . . . . . . . . . 95
4.3.1 Poutre homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
4.3.2 Poutre sur fondation élastique à deux paramètres . . . . . . . . . . . . 101
vii

5 Plaques 108
5.1 Plaques et coques - généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
5.1.1 Définition d’une plaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
5.1.2 Cas des coques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
5.2 Plaques planes de Love-Kirchhoff . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
5.2.1 Cinématique en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
5.2.2 Champ de déplacement complet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114
5.2.3 Déformations et contraintes généralisées . . . . . . . . . . . . . . . . 115
5.2.4 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120
5.2.5 Introduction des efforts tranchants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
5.2.6 Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion . . . . . . . . . . . . 129
5.3 Plaques de Hencky-Mindlin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132
5.3.1 Cinématique et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
5.3.2 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
5.3.3 Lois de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

6 Approximations numériques 138


6.1 Notions de base sur les approximations numériques en mécanique . . . . . . . 139
6.2 Approximations numériques les plus courantes en élasto-statique . . . . . . . . 140
6.2.1 Résidus pondérés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
6.2.2 Formulation intégrale faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
6.2.3 Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
6.3 Applications à la mécanique des structures : Barre soumise à son poids propre 147
6.3.1 Solution analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
6.3.2 Résolution par différences finies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
6.3.3 Méthodes de collocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
6.3.4 Méthode de Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
6.3.5 De la méthode de Galerkin aux éléments finis . . . . . . . . . . . . . . 160
6.4 Élément fini de poutre de type Hermitte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171
6.4.1 Approximation par éléments finis de type Hermitte . . . . . . . . . . . 172
6.4.2 Formulation de l’élément fini d’Hermitte en statique linéaire . . . . . . 176
6.4.3 Vibrations libres en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
6.4.4 Détermination des charges de flambage . . . . . . . . . . . . . . . . . 184
6.5 Conclusions sur les méthodes numériques en mécanique des structures . . . . . 187
viii

7 Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 188


7.1 Rappel sur les torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
7.1.1 Définition d’un torseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
7.1.2 Produit scalaire de deux torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
7.1.3 Dérivation d’un torseur dans un repère mobile . . . . . . . . . . . . . 190
7.2 Calcul variationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
7.2.1 Extremum d’une intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192
7.2.2 Condition d’Euler-Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193
7.2.3 Cas où la dérivée seconde intervient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194
7.2.4 Importance des conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195
7.2.5 Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en temps et en
espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195
7.2.6 Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle I . . . 197
7.3 Cinétique - Dynamique - Énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197
7.3.1 Moments et autres caractéristiques du mouvement des corps . . . . . . 197
7.3.2 Théorème de Huygens-Koënigs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199
7.3.3 Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes . . . . . . . . . . . . 200
7.3.4 Cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201
7.3.5 Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203
7.3.6 Principe Fondamental de la Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . 204
7.3.7 Théorème de l’énergie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205
7.4 Principe des puissances virtuelles - P P V - et lien avec les autres principes de
la mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206
7.4.1 Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour les systèmes
discrets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206
7.4.2 Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets . . . . . . . . 209
7.4.3 Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs . . . . . . . . . 210
7.4.4 Principe de Hamilton pour les systèmes continus . . . . . . . . . . . . 213
7.4.5 Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans les milieux
continus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
7.5 Concepts de stabilité des équilibres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221
7.5.1 Stabilité des équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221
7.5.2 Définition d’un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222
7.5.3 Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre . . . . . . . . 222
ix

7.5.4 Stabilité d’un équilibre paramétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223


7.5.5 Linéarisation des énergies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 225
1.
Théorie des poutres

Sommaire
1.1 Rappels de MMC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2 Mécanique des structures et RdM . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.2.1 Définition des structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.2.2 Résistance des Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2.3 Hypothèses des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.3 Cinématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.3.1 Torseur des déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
1.3.2 Bilan de la cinématique de poutres . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.4 Contraintes et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.4.1 Torseur des efforts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.4.2 Énergie de déformation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.5 Élasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.5.1 Loi de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.5.2 Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.6 Méthode de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
1.6.1 Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre . . . . . . . 20
1.6.2 Calcul des déplacements et des rotations . . . . . . . . . . . . . 27
1.6.3 Calcul des états de contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.7 Bilan de la théorie des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

1
Théorie des poutres 2

Dans ce chapitre, la théorie des poutres est présentée d’un point de vue général. Une
grande partie des développements, notamment concernant la définition des grandeurs cinéma-
tiques et statiques en 3D, est tirée du document Mécanique des milieux continus présenté en
première année du cycle ICM de l’ÉNSM.SE par le professeur H.Klöcker (centre SMS).

1.1 Rappels de MMC


La mécanique des milieux continus permet de caractériser le comportement physique
de milieux continus, solides ou fluides (schématisé Figure 1.1), soumis à des sollicitations

− →

extérieures (forces de volume f ou ponctuelles F d (ou forces surfaciques), ou déplacements

−u d ). Dans la résolution d’un problème, des équations d’équilibre définissent l’équilibre de
tout élément de matière occupant un domaine Ω (Eq. 1.2). Sur ses frontières (∂Ω) le milieu
est en contact avec l’extérieur. Dans le cas des solides (Figure 1.1), ces contacts peuvent
correspondre à des efforts imposés (sur ∂ΩF Eq. 1.3) ou des déplacements imposés (sur ∂Ωu
Eq.1.1). Finalement, la loi de comportement (Eq. 1.4) permet de relier les 2 grandeurs duales
que sont les contraintes, notées ici σ(→−
x ), et les déplacements dont dérivent les déformations,


notées ici ( x ). Le problème est alors complètement posé (fermé) et peut être résolu, en
utilisant les équations rappelées ci-dessous dans le cadre de la dynamique des milieux continus
(Eqs 1.1 à 1.4).

Figure 1.1: Représentation générale d’un solide occupant un domaine Ω, de frontière ∂Ω


(∂Ω = ∂Ωu ∪ ∂ΩF et ∂Ωu ∩ ∂ΩF =Ø), soumis à des sollicitations extérieures.

On rappelle qu’un champ de déplacement vérifiant les conditions aux limites cinéma-
tiques est dit cinématiquement admissible ou C.A.. Un champ de contraintes vérifiant les
équations d’équilibre au bord ou conditions aux limites statiques et les équations d’équilibre
intérieur est dit statiquement admissible ou S.A.. On comprend bien alors que la résolution
Théorie des poutres 3

d’un problème posé en déplacements est plus simple car la famille de champs de déplacements
C.A., à laquelle appartient la solution, est simple à poser. Par contre, résoudre un problème
posé en contraintes est plus complexe puisque la famille des champs S.A, à laquelle le champ
de contraintes solution appartient, doit vérifier à la fois les conditions aux limites statiques et
les équations d’équilibre intérieur. Il est donc peu aisé de poser a priori des familles de champs
de contraintes solution.

1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.




u (→

x , t) = →

u d (→

x , t) , ∀ →

x ∈ ∂Ωu (1.1)

2. Équilibre intérieur

∂σij (→

x , t)
+ fi (→

x , t) = ρüi (→

x , t) , ∀ →

x ∈Ω (1.2)
∂xj

3. Équilibre au bord

σij (→

x , t)nj (→

x ) = Fid (→

x , t) , ∀ →

x ∈ ∂ΩF (1.3)

4. Loi de comportement
σij = Lijkl kl (1.4)

1.2 Mécanique des structures et RdM

1.2.1 Définition des structures


La mécanique des structures se définit comme la mécanique des solides de dimensions
finies où une des dimensions au moins est faible devant les autres. La mécanique des
structures couvre donc un grand nombre de géométries dont les plus courantes sont les
poutres (1D), les plaques et coques (2D), et les solides axisymétriques (2D) (Figure 1.2). En
observant la géométrie des structures étudiées, des hypothèses peuvent être faites quant à la
cinématique qui prévaut dans ces solides. Toute la difficulté de ce type d’approche réside dans
le choix judicieux de cette cinématique qui doit être suffisamment riche pour observer tous
les phénomènes rencontrés durant l’utilisation des structures considérées, mais assez simple
pour permettre des résolutions analytiques. Ce point sera vu en détail dans ce cours.

On peut remarquer que ces structures sont également utilisées dans les simulations
numériques, telles que les simulations par éléments finis par exemple. Dans ce cas, comme
lors de la résolution analytique d’ailleurs, les temps de calcul nécessaires à la résolution d’un
problème sont amplement plus faibles que si le même problème était traité avec une approche
de type MMC (3D dans un calcul par éléments finis).
Théorie des poutres 4

Figure 1.2: Type de structures

1.2.2 Résistance des Matériaux


La résistance des matériaux est un cadre restreint, mais utilisable pour la plupart des
applications courantes, pour traiter des problèmes de mécanique des structures. Principale-
ment, les hypothèses simplificatrices de la RdM portent sur des conditions de réversibilité et
de linéarité. Les études en RdM sont conduites sous les hypothèses suivantes :
— cadre de l’HPP : petites déformations, petits déplacements (pas de flambage ou de
striction par exemple),
— les matériaux constitutifs sont élastiques linéaires isotropes,
— les problèmes appartiennent au domaine de la statique, ou sont supposés quasi-
statiques,
— principe de Saint-Venant : loin de son point d’application, une sollicitation extérieure
peut être remplacée par son torseur équivalent,
— principe de superposition : quelque soit l’ordre d’application des efforts extérieurs
sur un solide, l’état final est invariant.
Sous ces hypothèses, la RdM permet de traiter des problèmes de poutres, plaques,
coques, ... Il faut maintenant introduire la notion de modélisation géométrique des solides. Ceci
fait l’objet du paragraphe suivant qui traite plus particulièrement de la théorie des poutres.
Théorie des poutres 5

1.2.3 Hypothèses des poutres


Les hypothèses sur la géométrie des poutres permettent de représenter un solide 3D
élancé par sa ligne moyenne. Ceci s’applique également aux plaques et coques où cette fois-ci
l’épaisseur étant faible devant les autres dimensions le solide est remplacé par le feuillet moyen
correspondant.

Définition d’un poutre

Une poutre est un solide engendré par une aire plane S qui est déplacée dans l’espace,
de sorte que durant son mouvement le centre de gravité G de la section S parcourt une ligne
donnée L, et que l’aire se maintienne constamment normale à cette surface (Figure 1.3). De
plus, la section peut varier au cours de ce parcours, mais de façon continue, i.e. le profil ne
doit pas présenter de discontinuités. La ligne L est appelée fibre moyenne de la poutre. Une
poutre est dite :
— gauche si la ligne L suit une courbe gauche,
— plane si la ligne L suit une courbe plane,
— droite si la ligne L suit une droite.

Figure 1.3: Définition géométrique d’une poutre

Une poutre à plan moyen est une poutre dont la section S possède un plan de symétrie.
Cette hypothèse est finalement peu restrictive et permet de traiter de trés nombreux cas (Figure
1 page iii). Enfin, si la fibre moyenne est une courbe fermée, on parlera d’anneau (les sections
droites initiale et finale sont confondues).
Finalement, les hypothèses permettant de classifier un solide comme étant une poutre
sont les suivantes : L L2
— un élancement de la poutre suffisant : > 5 et ≤ 10 (L2 et L3
sup{L2 , L3 } L3
étant les dimensions caractéristiques respectivement selon les directions →

x2 et →

x3 ),
— un rayon de courbure de L grand devant les dimensions transversales,
— un profil sans discontinuité.
Théorie des poutres 6

Remarque : des problèmes complexes associant un grand nombre de poutres ont été large-
ment utilisés au cours des 2 derniers siècles. Ces structures sont dites structures réticulées ou
treillis. Les cas les plus typiques sont par exemple la Tour Eiffel, constituée de treillis à plu-
sieurs échelles, imbriqués pour former des structures de plus en plus imposantes, et finalement
constituant la Tour elle-même. De nombreux autres exemples d’application existent pour ces
approches où des méthodes de calcul propres ont été développées spécifiquement (méthode
graphique de Crémona par exemple). Dans le cadre de cette introduction à la RdM, seules les
poutres seront étudiées, offrant suffisamment d’exemples d’application pour donner une vision
rapide mais détaillée de la RdM.

Grandeurs physiques

La théorie élastique des poutres est basée sur celle des milieux curvilignes. Une position
sur la poutre sera caractérisée uniquement par l’abscisse curviligne l d’un point sur la fibre
moyenne L. Le reste de la géométrie, c’est-à-dire la section S, sera caractérisé en chaque point
G(x1 ) de la fibre moyenne, pour un matériau constitutif homogène, par :
— la section S de la poutre obtenue sous la forme :
Z Z
S(x1 ) = ds = dx2 dx3
S(x1 ) S(x1 )

— des moments d’ordre 1 nuls puisque le point G de la fibre moyenne est le centre de
gravité de la section S :
Z Z
x2 ds = x3 ds = 0
S(x1 ) S(x1 )

— des moments d’ordre 2, ou moments quadratiques (plans) :


Z Z
2
I2 (x1 ) = x3 ds et I3 = x22 ds
S(x1 ) S(x1 )

— un moment produit, différent de 0 pour les sections non-symétriques ou dont les


axes de symétrie (→

x2 ,→

x3 ) ne sont pas confondus avec le repère global :
Z
I23 (x1 ) = x2 x3 ds
S(x1 )

— un moment de giration ou moment quadratique polaire :


Z
I0 (x1 ) = (x22 + x23 )ds = I2 (x1 ) + I3 (x1 )
S(x1 )

πR4
Par exemple, pour une section S circulaire, de rayon R, on a I2 = I3 = 4
et I23 = 0,
L2 L33
tandis que pour une section rectangulaire, de hauteur L2 et largeur et L3 , on a I2 = 12
,
L32 L3
I3 = 12
et I23 = 0.
Théorie des poutres 7

Repère de Frenet

Dans le cas général d’une poutre paramétrée par son abscisse curviligne s, on peut


définir pour des raisons de commodité un trièdre direct, le repère de Frenet (→

τ ,→

n , b ) (Table
1.1). Les grandeurs locales peuvent être exprimées dans ce repère, et les dérivations locales
suivent les règles indiquées ci-après, avec les rayons de courbures R1 et R2 définis dans les


plans (M, →−
τ ,→−
n ) et (M, →
−τ , b ) respectivement.

(s)
d→
−τ →
−0 →

n t
=τ =
ds R1

− M
d→
−n →
−0 →−
τ b b
= n =− −
ds R1 R2



−0 →
− n
db n
= b =
ds R2
Repère de Frenet.

Table 1.1: Définition du repère de Frenet pour une abscisse courante s.

Avertissement : Dans la première partie de ce cours, nous établirons les équations dans le
cas plus particulier des poutres où les courbures restent faibles. L’extension, aux poutres
quelconques, de la théorie développée ici passe par le prise en compte des courbures dans la
dérivation des grandeurs cinématiques et statiques par rapport à l’abscisse curviligne s, selon
les règles rappelées ci-dessous (Eq. 1.5). Ceci ne modifie pas fondamentalement les résultats
présentés dans cette première partie, mais introduit une complexité qui n’est pas nécessaire
pour poser les bases des théories de poutre ; cette complexité apparaît dans les couplages des
comportements, tels que le couplage traction-flexion par exemple dans les poutres courbes. Il
en est de même pour les coques vis-à-vis des plaques.

1
 
 →
−  0 0  →
− 
τ  R1 (s)  τ
d  →−  
 1 1  


 n = − 0 − n  (1.5)

ds  R1 (s) R2 (s) 


− →

b  1  b
0 0
R2 (s)

1.3 Cinématique
Dans ce document, nous nous limiterons à la cinématique des déplacements issue
de l’hypothèse de Navier. D’autres cinématiques existent, elles sont dites ’enrichies’ et ré-
pondent à une besoin de précision accrue dans la prise en compte du cisaillement notam-
ment. Certaines de ces théories sont présentées dans le cas spécifique des matériaux com-
Théorie des poutres 8

posites, au Chapitre 5 du support de cours ’Mécanique des Composites Hautes Performan-


ces’ disponible à l’adresse https://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/
Composites/Composites-SDrapier-Fevrier2019.pdf.
Selon l’hypothèse de Navier, au cours de la déformation de la poutre, la section droite
S reste droite (elle ne subit aucun gauchissement). Cette section S subit donc :
— un mouvement de corps rigide,
— une déformation dans son plan.

Mouvement de corps rigide de S

Figure 1.4: Hypothèse cinématique de Navier

La Figure 1.4 illustre la caractérisation du mouvement de corps rigide de la section


S par un vecteur de déplacement → −u et un vecteur de rotation →−r appliqués à son centre
de gravité G (voir également Figure 1.5). Le déplacement d’un point M de la section S
−−→
(GM = x2 → −
x2 + x3 →

x3 ) dû à ce mouvement de corps rigide sera de la forme :
−−−−−→ → −−→ −−→ −−→
u(M, x1 ) = −
u M (x1 ) = u(G)(x1 ) + M G ∧ r(G)(x1 )
−−→ −
= →

u (x1 ) + M G ∧ →
r (x1 )

ce qui peut encore se mettre sous la forme du torseur des déplacements exprimé au point G
(voir ’Rappel sur les torseurs’ page 189), dont les éléments de réduction au point G sont les
vecteurs →
−u et →
−r représentant respectivement le déplacement et la rotation de la section S
en ce point :



 
 r (x1 )
 

{UM (x1 )} = −→ →
− −−→ →− (1.6)
 uM (x1 ) = u (x1 ) + M G ∧ r (x1 ) 
 
(M )

On voit ici l’intérêt de la théorie des poutres, où le déplacement d’un point M quelconque de
la poutre s’exprime complètement à partir des déplacements et rotations du centre de gravité
Théorie des poutres 9

de la section S contenant ce point. Les déplacements de tous les points de ce solide 3D sont
donc représentés par les déplacements et les rotations des centres de gravité, ramenant le
problème tridimensionnel à une modélisation unidimensionnelle.
−−→
Dans l’hypothèse des petites perturbations le vecteur GM (position d’un point courant
par rapport au centre de gravité de la section) est contenu, avant et après déformation, dans
le plan formé par les vecteurs →

x 2 et →

x 3 portés par la section S. Les composantes du vecteur

−u M s’écrivent donc dans le repère local de la section S :

u r x −r x
1 2 3 3 2


uM = u2 + −r1 x3


u3 r1 x2
Dans l’hypothèse des petites perturbations, on calcule le tenseur des déformations au
point M , M (x1 ), comme la partie symétrique du tenseur gradient des déplacements en ce
point, dM (x1 ) (Eq. 1.7). Comme les vecteurs →−u et →

r s’appliquent au point G de la section S,
et donc sur la ligne L, ils ne dépendent que de l’abscisse curviligne l sur cette ligne. Les seuls
gradients non nuls pour ces vecteurs sont donc ceux mettant en jeu la première coordonnée x1 ,
tandis que la dépendance en x2 et x3 est donnée explicitement par l’équation précédente. Dans
la suite, nous noterons x0 la dérivée de toute quantité x par rapport à la première coordonnée.
Ceci permet d’écrire :
 
u01 + r20 x3 − r30 x2 −r3 r2
dM (x1 ) =  u02 − r10 x3 0 −r1  (1.7)
 
u03 + r10 x2 r1 0
On peut remarquer dans cette équation que les dérivée mises en jeu sont des dérivées
totales, résultant de la formulation unidimensionnelle de la cinématique de poutre. Mais dans
le cas d’une poutre courbe par exemple, ces dérivées devront prendre en compte le fait que
le repère (→
−x 1, →

x 2, →

x 3 ) "tourne" lorsque l’on parcourt la fibre moyenne L. On recourt alors à
une définition prenant en compte les courbures, tel que dans le repère de Frénet.
À partir du tenseur gradient des déplacements dM (x1 ), on peut maintenant obtenir
le tenseur des déformations M (x1 ) par sa partie symétrique. On constate que ce tenseur ne
possède que trois termes non nuls qui sont une déformation normale (11 ) et 2 glissements qui
sont le double des cisaillements entre deux sections voisines (212 , 213 - Figure 1.5) :

0 0 0
 11 = u1 + r2 x3 − r3 x2

212 = u02 − r10 x3 − r3
 2 = u0 + r0 x + r

13 3 1 2 2

Le mouvement de corps rigide de la section S ne produit donc pas directement de


déformations dans le plan de cette section (la section ne peut "s’écraser" ni se cisailler dans
son plan). Les seules déformations existantes correspondent au déplacement relatif des sections
d’abscisses curvilignes consécutives (Figure 1.5).
Théorie des poutres 10

Figure 1.5: Déformations dans les sections.

Déformation dans le plan de S

Le plan de la section S contient les vecteurs →−


x 2 et →

x 3 . Il s’ensuit qu’une déformation
dans son plan (une déformation plane) ne produira que des déformations 22 , 23 et 33 . Ces
déformations doivent permettre de satisfaire les conditions aux limites au bord de la section. En
effet, sur ces bords libres de contraintes extérieures, on doit vérifier que le vecteur contrainte
relatif à la normale sortante à la section soit nul. Dans le cas d’une section prismatique, les


vecteurs contraintes par rapport aux normales → −x 2 et →

x 3 sont bien nuls (σ · → −
n (→−x) = 0)
(Figure 1.6). Cette condition conduit à σ22 = σ23 = σ33 = 0 en x2 = ± L22 ∩ x3 = ± L23 . On a
également σ12 = 0 sur la face de normale → −x 2 et σ13 = 0 sur la face de normale → −
x 3 . Toutefois
ces dernières conditions sont difficilement vérifiables avec les théories classiques des poutres,
mais sont acceptables dans les cas les plus courants comme nous le verrons sur un exemple
en TD dans le chapitre 2.

Figure 1.6: Illustration des contraintes normales nulles sur les faces d’une poutre à section
prismatique.

Dans le cas de poutres homogènes, on fait souvent l’hypothèse que les contraintes σ22 ,
Théorie des poutres 11

σ33 et σ23 sont nulles dans toute la section S. Pour cette composante du cisaillement, cette
condition est bien vérifiée pour un matériau isotrope (σ23 ⇔ 23 = 0). Pour les contraintes
normales, ceci peut se justifier compte-tenu de l’épaisseur et de la largeur de la section qui
sont des dimensions faibles. Les contraintes étant nulles sur les bords, elles ne peuvent se
développer sur des dimensions aussi faibles, et sont donc également nulles à l’intérieur de la
section. En considérant un matériau à comportement élastique isotrope, cette hypothèse nous
donne les valeurs suivantes pour les déformations dans la section S (λ et µ sont les coefficients
de Lamé du matériau 1 ) :

 2µ22 + λ(11 + 22 + 33 ) = 0
 (
23 = 0
2µ23 = 0 ⇒ λ

 2µ + λ( +  +  ) = 0 22 = 33 = − 2(λ+µ) 11
33 11 22 33

On constate que, dans ce cas, les déformations normales 22 et 33 de la section S dans
son plan sont complètement déterminées à partir de la composante 11 calculée à partir de
son mouvement de corps rigide. Ces déformations résultent uniquement de l’effet de Poisson
induit par des déformations normales 11 , et sont donc faibles puisque la plus grande dimension
1
de la section doit être au plus de 10 de la longueur de la poutre, soit pour un matériau
ν sup(L2 ,L3 ) 3
courant (22 , 33 ) ' L
< 100 . Ces déformations sont donc bien négligeables devant
les déformations engendrées par le déplacement relatif des sections (11 ,12 ,13 ). C’est là tout
l’intérêt de la théorie des poutres qui permet de simplifier considérablement les problèmes à
résoudre, les ramenant du 3D au 1D.

Degrés de liberté

Les résultats précédents nous montrent que le mouvement du solide peut être com-
plètement déterminé à partir des vecteurs → −
u et →
−r de la Figure 1.4. La cinématique des
déplacements ainsi mise en place permet de concentrer les inconnues du problème sur la fibre
moyenne L de la poutre. Le solide tridimensionnel est remplacé par la ligne L. Chaque point
de la ligne dispose de six degrés de libertés au lieu de trois (les déplacements dans les trois
directions). Ces six degrés de liberté sont :
— les déplacements dans les trois directions du point G de la ligne L, représentés par
le vecteur →−u , de composantes u1 , u2 et u3 ,
— la rotation de la section S, représentée par le vecteur rotation →
−r , de composantes
r1 , r2 et r3 , appliqué au point G.

1.3.1 Torseur des déformations


Les hypothèses faites sur la cinématique des déplacements dans la poutre nous
conduisent au tenseur symétrique suivant des déformations en un point M quelconque d’une
1+ν ν
1. σij = 2µij + λpp δij et ij = E σij − E σpp δij avec E le module d’Young et G le module de
cisaillement du matériau isotrope
Théorie des poutres 12

section S :

 
11 = u01 + r20 x3 − r30 x2 12 13
M =  12 = 21 (u02 − r10 x3 − r3 ) 22 = − 2(λ+µ)
λ
11 23 = 0
 

1 0 0 λ
31 = 2 (u3 + r1 x2 + r2 ) 23 = 0 33 = − 2(λ+µ) 11

Ce tenseur des déformations ne comporte que trois termes indépendants : 11 , 12 et 13 . En
RdM, ces termes sont associés sous la forme d’un vecteur −
e→
M , appelé vecteur déformation :

 
11 (M, x1 )

e→
M (x1 ) =  212 (M, x1 ) 
 
213 (M, x1 )

Le vecteur −e→
M contient une dilatation dans la direction de la fibre moyenne comme
premier terme, puis des glissements (doubles des cisaillements entre deux sections voisines).
Il représente la déformation du milieu curviligne au point M . Cette déformation peut à son
tour être exprimée en fonction d’une déformation → −e dite de membrane et d’un gradient de


rotation appelé courbure κ au point G sous la forme :

− −−→ →
e→ →
− −
M (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ κ (x1 )

où →
−e et →

κ , éléments de réduction de la déformation au point G de S, constituent le torseur
des déformations défini par :

   
u01 r10


e (x1 ) = →

u 0 (x1 ) + →
− r (x1 ) =  u02 − r3  et →
x1∧→
−   −
κ (x1 ) = →

r 0 (x1 ) =  r20 
 
(1.8)
u03 + r2 r30

ce qui peut encore s’écrire de façon similaire au déplacement en un point M de la section (Eq.
1.6) :


 

 κ (x 1 ) 

{M (x1 )} = −
→ →
− −−→ → −
 eM (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ κ (x1 ) 
 
(M )

1.3.2 Bilan de la cinématique de poutres


— déplacements :


 
 r (x1 )
 

{UM (x1 )} = −→ →
− −−→ →−
 uM (x1 ) = u (x1 ) + M G ∧ r (x1 ) 
 
(M )
Théorie des poutres 13

— déformations :


 

 κ (x1 ) 


 

− −−→ →
e→ →
− −

 

M (x1 ) = 
e (x1 ) + MG ∧
κ (x1 )

 

{M (x1 )} = 0
u1 0 r10


 

 0 0  
=  u2 − r3  +  −x2 ∧ r2  

  

 

0 0
 
 u3 + r2 −x3 r3 
(M )

On peut remarquer que l’écriture avec des torseurs permet également d’écrire directement les
d
déformations par dérivation du torseur cinématique {M } = {UM }, voir Eq. 7.2 ’Rappel
dx1
sur les torseurs’ page 189.

1.4 Contraintes et déformations

1.4.1 Torseur des efforts


L’hypothèse de Saint-Venant, présentée précédemment, consiste à supposer que loin de
leur point d’application les efforts agissant sur S peuvent être schématisés par le torseur des


efforts équivalent {τ (x1 )}, dont les éléments de réduction sont une force R (x1 ) et un moment


M (x1 ), appliqués au centre de gravité G de S (Figure 1.7). Dans le cas d’efforts extérieurs
appliqués à la poutre, à l’abscisse xi , le torseur des actions extérieur peut par exemple (Figure
1.7) être :  →− 

 R (x )
i 
{F(xi )} = −
→ (1.9)
 M (xi ) 
 
(Gi )

Pour les efforts intérieurs, les éléments de réduction se déduisent naturellement de


l’intégration des contraintes induites par les sections voisines sur la section S considérée (Figure
1.8). D’après les hypothèses faites sur les contraintes dans le plan d’une section S, les seules
contraintes non nulles dans le solide sont σ11 , σ12 et σ13 . En RdM, ces contraintes sont


associées dans un vecteur tM , appelé vecteur contrainte, qui représente les efforts de cohésion
ou efforts intérieurs. Par convention, on définit ces efforts internes entre 2 sections voisines,
comme les efforts exercés par une section de gauche (S−) sur une section de droite (S+)
(Figure 1.8) en comptant les abscisses curvilignes croissantes selon → −x1 :
 
σ11 (M, x1 )


tM (x1 ) =  σ12 (M, x1 ) 
 
σ13 (M, x1 )

Comme la normale à S est le vecteur → −x 1 (dans le cadre des petites perturbations


la configuration finale est confondue avec la configuration initiale), on peut remarquer que
Théorie des poutres 14

Figure 1.7: Illustration du principe de Saint-Venant : (a) chargement sur la poutre, et (b)
torseur équivalent sur la ligne moyenne.

Figure 1.8: Définition des efforts intérieurs, torseur des efforts intérieurs.



le vecteur contrainte tM (x1 ) coïncide avec celui défini en mécanique des milieux continus,
agissant sur un élément de surface contenu dans S.
Dans le cas des efforts intérieurs à la poutre, les efforts agissant sur S résultent de
l’intégration du vecteur contrainte sur la section, et sont appelées contraintes généralisées.
On distingue les contraintes généralisées de membrane et de flexion résultant respectivement
de l’intégration des contraintes sur la section et de l’intégration des contraintes prenant en
compte l’éloignement du point considéré par rapport au centre de gravité de la section. Les
efforts de membrane sont définis ci-dessous par les relations 1.10 et sont illustrés sur la Figure
1.9 :
Théorie des poutres 15



Z


R (x1 ) = tM (x1 )ds
S(x1 )
 Z


 effort NORMAL : N (x1 ) = σ11 (M, x1 )ds
ZS(x1 ) (1.10)



effort TRANCHANT / →


= x2 : T2 (x1 ) = σ12 (M, x1 )ds

 ZS(x1 )




 effort TRANCHANT / x3 : T3 (x1 ) = σ13 (M, x1 )ds


S(x1 )

Figure 1.9: Contraintes généralisées de membrane.

Les moments sont définis par les relations 1.11 et illustrés sur la Figure 1.10 :


→ −−→ −
Z

M (x1 ) = GM ∧ tM (x1 )ds
S(x1 )
 Z


 moment de TORSION : Mt (x1 ) = (x2 σ13 (M, x1 ) − x3 σ12 (M, x1 ))ds
S(x1 )


 Z
moment de FLEXION / →


= x2 : Mf 2 (x1 ) = x3 σ11 (M, x1 )ds

 ZS(x1 )




 moment de FLEXION / x3 :

 Mf 3 (x1 ) = −x2 σ11 (M, x1 )ds
S(x1 )
(1.11)

Figure 1.10: Contraintes généralisées de flexion.


Théorie des poutres 16

Finalement, le torseur des efforts intérieurs s’écrit en fonction de l’abscisse du point considéré
le long de la ligne moyenne G(x1 ) :
   
 N (x 1 ) 

 →
−  

R (x ) = T (x )
  
1

  2 1  


 

 T 3 (x 1 ) 
{τ (x1 )}(G) =  
 Mt (x1 ) 

 −
→ 

M (x ) = M (x )
   
1

  f 2 1  


 

 Mf 3 (x1 ) 
(G)

1.4.2 Énergie de déformation


En élasticité, l’énergie de déformation du solide de volume V peut s’écrire W =
1
σ( x ) : (→

− −
R
2 V
x )dv. En RdM, puisque les hypothèses portant sur la géométrie et la ciné-
matique ont conduit à formuler un problème purement unidimensionnel, cette énergie peut
être écrite simplement à l’aide des composantes des torseurs des efforts et des déformations.


En effet, en utilisant la définition des vecteurs déformation −
e→
M (x1 ) et contrainte tM (x1 ), on
obtient :

Z Z Z
1
W (→

u (→

x )) = 1
2

− →

σ( x ) : ( x )dV = σ(→−x ) : (→

x )dsdl
2
ZV Z L S
−→
= 12 tM (x1 ).−
e→M (x1 )dsdl
L S
−−→
Z Z
−→
1
= 2 tM (x1 ).(→
− e (x1 ) + →

κ (x1 ) ∧ GM )dsdl
ZL S  (1.12)
−−→ −
Z Z
1 →
− −
→ →
− →
= e (x1 ). tM (x1 )ds + κ (x1 ). GM ∧ tM (x1 )ds dl
2 L S S

↓ (par définition des éléments de réduction)


− −

Z
1
= ( R (x1 ).→

e (x1 ) + M (x1 ).→

κ (x1 ))dl
2 L



Ceci montre que les forces R (x1 ) agissant sur la fibre moyenne L sont associées à la


déformation → −e (x1 ) de membrane, tandis que les moments M (x1 ) sont associés à sa courbure

−κ (x1 ) (gradient de la rotation). Cette dualité résulte de l’intégration des grandeurs physiques
sur la section S(x1 ) de la poutre, et reste également valable dans les structures de type plaques
et coques. On trouvera dans certaines approches de la mécanique des structures, ces grandeurs
appelées contraintes généralisées pour le torseur des efforts et déformations généralisées pour
le torseur des déformations. L’énergie de déformation de la poutre (Eq. 1.13) peut s’écrire en
utilisant le produit scalaire de torseurs définit par la somme des produits croisés des éléments
Théorie des poutres 17

de réduction des torseurs considérés, dépendant seulement de la position x1 (voir Eq. 7.1 dans
’Rappel sur les torseurs’ page 189) :
Z

− 1
W ( u (x1 )) = {τ (x1 )} · {(x1 )} dl
2 L
Z
1
= (N u01 + T2 (u02 − r3 ) + T3 (u03 + r2 ) + Mt r10 + Mf 2 r20 + Mf 3 r30 ) dl
2 L
(1.13)

1.5 Élasticité
La RdM peut s’appliquer à beaucoup de matériaux constitutifs différents. Généralement,
en première approximation les matériaux sont supposés homogènes élastiques linéaires isotropes
(HELI). La loi de comportement permet de relier les contraintes aux déformations, dernier
élément nécessaire à la résolution de tout problème en mécanique. Le cadre de la statique sera
∂σ (−→
adopté ici ( ij∂xj + fi (→−
x ,t)
x , t) = 0).

1.5.1 Loi de comportement


La connaissance des déformations en tout point M du milieu curviligne permet d’obtenir
les contraintes en utilisant la loi de comportement. Nous nous sommes limités au cas d’un
comportement élastique linéaire isotrope. En notant λ et µ les coefficients de Lamé du matériau
constituant la poutre, on a donc :
 µ(3λ+2µ) 0 0 0
 σ11 = λ+µ 11 = E11 = E(u1 + r2 x3 − r3 x2 )

σ12 = 2µ12 = G(u02 − r10 x3 − r3 ) (1.14)
 σ = 2µ = G(u0 + r0 x + r )

13 13 3 1 2 2

Dans cette équation, E désigne le module d’Young du matériau et G le module de cisaillement


associé. À partir de ces contraintes, il est possible de calculer les éléments de réduction des
efforts appliqués en un point G quelconque de la ligne L sous la forme :
 Z


 σ11 ds = ESu01 = ESe1
 ZS




R (x1 ) = σ12 ds = GS(u02 − r3 ) = GSe2


 ZS
σ13 ds = GS(u03 + r2 ) = GSe3



S
 Z


 (x2 σ13 − x3 σ12 )ds = GI0 r10 = GI0 κ1
 ZS




M (x1 ) = x3 σ11 ds = E(I2 r20 − I23 r30 ) = E(I2 κ2 − I23 κ3 )


 ZS
−x2 σ11 ds = E(−I23 r20 + I3 r30 ) = E(I3 κ3 − I23 κ2 )



S
Théorie des poutres 18

On constate alors que le torseur des efforts s’écrit relativement simplement en fonction
du torseur des déformations sous la forme :
     


 N 

 ES 0 0 0 0 0 
 e1 

  
T2  0 GS 0 0 0 0 e2

    

 
    


 T      

3  0 0 GS 0 0 0   e3 
= . (1.15)
 Mt  0 0 0 GI0 0 0 κ1
    
  
   
  
Mf 2  0 0 0 0 EI2 −EI23 κ2

    

 
   





 M   
f3
 0 0 0 0 −EI23 EI3  κ3 

Cette loi de comportement peut se réécrire en utilisant les sous-matrices 3×3 ci-dessous
(Eq. 1.16). On constate que pour les poutres homogènes considérées ici les comportements
en membrane et en flexion sont totalement indépendants ([B] = [0]). Dans le cas de poutres
constituées de matériaux composites par exemple, dont les axes d’orthotropie ne sont pas
confondus avec les axes des sections, ces comportements ne sont pas indépendants. :

( →
− →

) " # ( )
R (x1 ) [A] [B] e (x1 )

→ = · →
− ⇔ {τ (x1 )} = [L] {(x1 )} (1.16)
M (x1 ) [B] [D] κ (x )
1

Remarque : en cisaillement l’approximation faite sur la distribution des déformations, sup-


posées constantes dans la section, conduit à surestimer la rigidité. Par des considérations
énergétiques, on introduit un coefficient correcteur, dit coefficient de correction en cisaille-
ment qui permet de prendre en compte la répartition parabolique (contrainte nulle sur les
faces et non-nulle au centre de la section) réelle à l’aide d’une répartition constante sur la
section. Ce coefficient est noté généralement kα , avec α = 2, 3, il est égal à 65 pour une
section rectangulaire (voir §5.3.3). La loi de comportement en cisaillement s’écrit donc :

Tα (x1 ) = kα GS eα (α = 2, 3)

1.5.2 Conditions aux limites


Nous avons vu que, selon l’hypothèse de Navier (sections droites), chaque point du
milieu curviligne (sur la fibre moyenne) possède six degrés de libertés. Ces degrés de liberté
servent à représenter :
— le déplacement de la fibre moyenne (vecteur déplacement → −
u ),


— la rotation de la section droite (vecteur rotation r ).
De même, selon l’hypothèse de Saint-Venant (efforts concentrés), les efforts internes (de co-
hésion) dans un milieu curviligne sont représentés par deux vecteurs, et donc six composantes,
qui sont :


— les forces de cohésion de la fibre moyenne (vecteur force R ),


— les moments de cohésion de la fibre moyenne (vecteur moment M ).
Théorie des poutres 19

Les conditions aux limites sur une poutre porteront donc sur ces six degrés de liberté et
ces six efforts de cohésion. La frontière ∂Ω (2D) sur laquelle s’appliquent ces conditions dans
un milieu 3D (Figure 1.1), sera donc remplacée par des abscisses sur la fibre moyenne (1D)
pour les poutres. En chacun de ces abscisses, six informations doivent apparaître explicitement.
Le nombre de degrés de liberté et d’efforts connus, et leur combinaison, dépend essentiellement
du type de liaison rencontré. Les conditions aux limites en déplacements les plus communes
sont les suivantes :
— l’encastrement : si une poutre est encastrée à l’une de ses extrémités, alors en ce

− →
− −

point on a →−u =→ −
r = 0 , et les efforts résultants R et M sont inconnus.


— la rotule : une rotule empêche tout déplacement en ce point, → −
u = 0 , mais laisse
les rotations libres. En contre-partie, les moments transmissibles en ce point sont

→ → −
nuls, soit M = 0 , tandis que les forces de réaction sont inconnues.
— l’appui simple : un appui simple empêche un déplacement dans une direction, par
exemple u3 = 0, et laisse libre les autres degrés de liberté. Le seul effort de cohésion
non nul sera alors T3 .
Ces conditions aux limites sont d’une grande importance pour l’intégration des équa-
tions d’équilibre (obtention des efforts internes) et de la cinématique (obtention des dépla-
cements). Pour déterminer les conditions aux limites en efforts, il est important de se fixer
un sens de parcours de la ligne moyenne L. En effet, le torseur des efforts {τ (x1 )} est lié au


vecteur contrainte tM , et donc à la normale à la section S. Comme la normale à considérer est
toujours sortante, le torseur des efforts sera affecté d’un signe opposé entre les deux côtés de la
poutre. En général, la convention de signe suivante est adoptée (voir par exemple l’expression
des termes de bords dans le principe des travaux virtuels - Eq. 1.21-b). En parcourant la ligne
L de la gauche vers la droite :
— le torseur des efforts est affecté d’un signe + à droite du segment considéré sur la
poutre (la normale sortante de S est → −x 1 ),
— le torseur des efforts est affecté d’un signe − à gauche du segment considéré sur
la poutre (la normale sortante de S est −→ −x 1 ).

1.6 Méthode de résolution


La résolution du problème de poutre peut avoir des buts différents, ce qui conditionne
en grande partie la stratégie de résolution à adopter. On peut par exemple souhaiter connaître
des informations ponctuelles, comme un déplacement maximum ou les contraintes en des
points précis. Dans ce cas, la résolution complète du problème n’est pas toujours nécessaire,
et des méthodes seront présentées ultérieurement pour obtenir ces informations ponctuelles.
Dans la plupart des cas par contre, le lieu des déplacements ou contraintes maximales n’est
pas connu à priori, ce qui nécessite de caractériser complètement les champs de déplacements
et contraintes solutions.
Théorie des poutres 20

Il faut noter dés à présent que l’équilibre extérieur de la poutre étudiée, vis-à-vis des
sollicitations et des conditions aux limites cinématiques imposées, peut être vérifié par un bilan
des forces extérieurs, sans nécessité de connaître les efforts de cohésion ou efforts internes qui
règnent à l’intérieur de la poutre. À l’opposé, dans l’optique d’un dimensionnement nous
chercherons à connaître ces efforts de cohésion, définissant les contraintes dans les sections.
Dans ce cas, les efforts extérieurs de réaction, résultant des conditions cinématiques imposées,
seront inutiles pour vérifier l’équilibre intérieur et pourront être connus a posteriori. Par contre
les développements pourront devenir rapidement lourds. Le point clef de la résolution des
problèmes de RdM passe de toute manière par la connaissance de ces efforts internes à la
poutre. La stratégie de résolution permettra de connaître ces efforts avec plus ou moins de
développements, et sera souvent la combinaison de l’équilibre extérieur et de l’équilibre intérieur
de la poutre.
Pour le moment, la recherche des efforts intérieurs, en vue de dimensionner les poutres,
sera notre objectif unique. Dans ce cas, la résolution du problème peut se baser sur la connais-
sance des équations d’équilibre intérieur de tronçons de poutre représentatifs. Nous nous pro-
posons dans cette partie d’établir ces équations dans le cadre le plus général possible, et de
les utiliser dans le chapitre suivant pour résoudre les problèmes de poutre. L’identification des
efforts internes par transport des efforts extérieurs est également présentée rapidement.

1.6.1 Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre


Dans le cas général, la résolution du problème passe par la détermination des efforts
internes. La méthode la plus rigoureuse pour déterminer ces efforts est similaire à la résolution
d’un problème de MMC : intégration des équations d’équilibre en veillant à avoir autant de
conditions aux limites que nécessaire. Pour des problèmes simples, tels que ceux introduits
dans le chapitre suivant consacré à la théorie des poutres à plan moyen, ces équations peuvent
se dériver de l’équilibre de tronçons de poutres de longueur élémentaire. Pour une approche
générale, un des moyens les plus systématiques pour parvenir à exprimer ces équations d’équi-
libre et les conditions aux limites correspondantes consiste à utiliser le Principe des puissances
virtuelles ou PPV.
On rappelle que le PPV (Eq. 1.17) exprime l’équilibre, c’est à dire l’égalité entre la
∗ → −
puissance virtuelle développée par les efforts intérieurs Pint (u∗ ) et la puissance virtuelle déve-
∗ →−
loppée par les efforts extérieurs Pext (u∗ ) dans un champ de déplacement virtuel quelconque

−∗
u . Ainsi, il y équivalence entre le PPV et l’expression des équations d’équilibre et des condi-
tions aux limites statiques associées. Les conditions aux limites cinématiques sont quant à
elles incluses dans le PPV si le champs virtuel est CA. Dans notre cas, on définit un champ
de déplacements virtuel → −u ∗M , qui se traduit par un torseur de déplacement virtuel {U ∗ (x1 )}
d’éléments de réduction → −u ∗ (x1 ) un déplacement virtuel, et →
−r ∗ (x1 ) une rotation virtuelle sur
la fibre moyenne L. Ce déplacement virtuel produit un champ de déformations virtuel ∗M dans
chaque section S (Figure 1.11).
Théorie des poutres 21

Figure 1.11: Segment d’une poutre où l’on applique le principe des travaux virtuels : passage
du solide 3D à la description de type poutre.

On étudie ici les efforts internes à la poutre, c’est-à-dire les efforts de cohésion dans un
tronçon de poutre libre de tout chargement extérieur. On verra plus tard, que chaque effort
ou déplacement imposé nécessite de découper notre poutre en autant de tronçons libres de


sollicitations extérieures. On note t dM le vecteur contrainte qui règne sur les sections termi-
nales, et qui représente l’action des tronçons voisins sur le tronçon isolé. Toutefois, ce vecteur
contrainte peut tout aussi bien être imposé par l’extérieur si l’une des surfaces extrémités S1
et S2 est une surface terminale de la poutre. Pour ce tronçon de poutre, comme seules ces
surfaces extrémités S1 et S2 sont soumises à un chargement extérieur, l’intégration du travail
virtuel des efforts extérieurs sur la frontière du volume V se traduit par une intégrale sur la
surface S aux points extrémités du segment de L considéré. On remarque que sur S1 (Figure
1.11), la normale sortante à la section est forcément opposée au sens de parcours de la fibre
moyenne (vecteur −→ −
x 1 ). Cela donne l’expression suivante du principe des travaux virtuels :
Théorie des poutres 22

Z 

− → →

Z Z Z

−d → →
−d →
− σM : ∗M dv + f v .−
u ∗M dv + t M .−u ∗M ds − t M .−
u ∗M ds = 0, ∀u∗
V
| {z } |V S2
{z S1
}
∗ → − ∗ → − →

Pint ( u∗ ) + Pext (u∗ ) = 0, ∀u∗

(1.17)

Contribution des efforts extérieurs




Dans cette équation 1.17, t dM est le vecteur contrainte appliqué sur la section S
considérée (avec une normale sortante). Les deux derniers termes de la puissance virtuelle des
efforts extérieurs peuvent donc être calculés assez simplement en remplaçant le champ virtuel

−u ∗M par la cinématique issue de l’hypothèse de Navier (torseur des déplacements virtuels
{U ∗ (x1 )}). On obtient pour une section St quelconque (soit S1 , soit S2 ), au signe négatif prés
pour S1 :

−−→
Z Z

−d → →
−d →
t M .−
u ∗M ds = t M .(−
u∗+→ −r ∗ ∧ GM )ds
St St Z
−−→ →
Z

− →
−d →
− ∗ −

= u . t M ds + r . GM ∧ t dM ds (1.18)
− −S∗t −
→ → −∗ St
= R d .→
u + M d .→ r
= F d . {U ∗ }




De même, l’intégrale sur V des forces de volume f v devient :


− → →
− → −−→
Z Z
f v .−
u ∗M dv = f v .(−u∗+→ −r ∗ ∧ GM )ds
S(x1 ) S Z

− −−→ →−
Z

− ∗
= u . →
− ∗
f v ds + r . GM ∧ f v ds (1.19)
S S
=→−p (→
−x 1 ).→

u ∗ (→

x 1) + →
−c (→

x 1 ).→

r ∗ (→

x 1 ))
v ∗
= {F } . {U }

Les vecteur →−p (→



x 1 ) et →
−c (→

x 1 ) ainsi introduits, éléments de réduction du torseur des efforts
linéiques, représentent respectivement :
— une force par unité de longueur répartie sur la fibre moyenne (pour → −
p ),
— un couple par unité de longueur réparti sur la fibre moyenne (pour c ). →

Remarque : En toute rigueur, des forces réparties peuvent s’appliquer sur les faces de la
poutre (cf Figure 1.11). La contribution de ces efforts peut être calculée de la même façon
Théorie des poutres 23

que pour les forces de volume ci-dessus :



− → →
− → −−→
Z Z
− ∗
f s . u M ds = f s .(−u∗+→ −r ∗ ∧ GM )dΣ
∂S(x1 ) ∂S Z

− −−→ →−
Z

− ∗
= u . →

f s dΣ + r .∗
GM ∧ f s dΣ
∂S ∂S

Toutefois, la présence de ces efforts est extrêmement rare compte tenu des hypothèses qui
conduisent à considérer une structure comme une poutre. Nous négligerons les contributions
correspondantes dans la suite des calculs qui viendraient simplement s’ajouter aux efforts
extérieurs répartis →

p et →
−c définis ci-dessus.

Contribution des efforts intérieurs

En utilisant la même méthode que pour l’équation 1.12 (calcul de l’énergie de défor-
mation), puis la définition du torseur des déplacements, puis enfin une intégration par parties,
le premier terme de l’expression à annuler dans le principe des travaux virtuels s’écrit de la
façon suivante :


− −

Z Z
σM : ∗M dv = ( R (x1 ).→
− e ∗ (x1 ) + M (x1 ).→

κ ∗ (x1 ))dl
V L 
0 0 0
Z R1 u∗1 + R2 (u∗2 − r3∗ ) + R3 (u∗3 + r2∗ )
=  dl
 
∗0 ∗0 ∗0
+M1 r1 + M2 r2 + M3 r3

L
Z Z
↓ Théorème de la divergence x ydl = − xy 0 dl + [xy]ll21
0
L L
 
Z −R10 u∗1 − R20 u∗2 − R30 u∗3
=  dl
 
−M10 r1∗ − (M20 − R3 )r2∗ − (M30 + R2 )r3∗

L

− →
− (1.20)
+ R (l2 ).→ −
u ∗ (l2 ) − R (l1 ).→−
u ∗ (l1 )
−→ −

+M (l2 ).→ −r ∗ (l2 ) − M (l1 ).→
−r ∗ (l1 )
Z l2

− −∗ −
→ − →
− −∗
= − ( R 0 .→
u + (M 0 + → x 1 ∧ R ).→ r )dl
l1

− →

+ R (l2 ).→ −
u ∗ (l2 ) − R (l1 ).→−
u ∗ (l1 )
−→ −

+M (l2 ).→ −r ∗ (l2 ) − M (l1 ).→
−r ∗ (l1 )
Z l2
d
=− {τ } . {U ∗ } dl + [{τ } . {U ∗ }]ll21
l1 dx 1
Théorie des poutres 24

On montre en effet que l’expression de la dérivée d’un torseur, et notamment du torseur des
efforts internes, s’écrit au centre de gravité de la section G (Eq. 7.3 page 191) :
 →
−0 
 R (x 1 ) 
d  
{τ (x1 )}(G) = −→ →

dx1  M 0 (x1 ) + →
 −
x1 ∧ R (x1 ) 

(G)

Équations d’équilibre d’un tronçon de poutre

En utilisant l’ensemble de ces résultats (Eq 1.20= Eq 1.18+Eq1.19+Eq??), le principe


des travaux virtuels s’écrit simplement de la façon suivante (Eqs 1.21) sur tout segment de la
fibre moyenne ne contenant pas d’effort ponctuel :

∀(l1 , l2 ) ∈ L, ∀(→−
u ∗, →

r ∗)
Z l2 

− −→ − →
− − →
(R0 + → −
p ).→

u ∗ + (M 0 + →
x1∧ R +→
c ).−

r ∗ dl (1.21a)
l1
h→
−d → −
→ − ∗  →
− −∗ − → − ∗ il2
+ R .−
u ∗ + M d .→
r − R .→
u + M .→
r =0 (1.21b)
l1

ou en écriture torsorielle :

∀(l1 , l2 ) ∈ L, ∀ {U ∗ } ,

Z l2  
d l2
{τ } + {F } . {U ∗ } dl +
v
F − {τ } . {U ∗ } l1 = {0}
  d 
l1 dx1

Cette équation doit être vérifiée sur tout segment, et pour tout champ de déplacement virtuel,
i.e. pour tout torseur {U ∗ }. Sachant que l’intégrale ne peut être nulle que si la quantité
intégrée est nulle si elle est continue (voir Annexes- Chapitre 7, §7.2.2 page 194), on choisit
le champ virtuel nul au bord et non-nul à l’intérieur de la poutre. De l’équation (1.21a) on
déduit les équations d’équilibre des milieux curvilignes (Eq. 4.14), à comparer à l’équilibre des
−→ − →
− − →

milieux continus (divσ(→ x ) + f (→x ) = 0 ). C’est à partir de ces équations que tout problème
de poutre peut être résolu de manière rigoureuse :

Équations d’équilibre intérieur des poutres


( →
−0 →

d R (x1 ) + → −
p (x1 ) = 0
{τ } + {F v } = {0} ⇔ −
→ →
− −c (x ) = →
− (1.22)
dx1 M 0 (x1 ) + →

x 1 ∧ R (x1 ) + → 1 0
Théorie des poutres 25

Les équations d’équilibre sont deux équations vectorielles. Elles conduisent à six équa-
tions différentielles scalaires qui traduisent l’équilibre mécanique du milieu unidimensionnel.
Les forces volumiques sont représentées par les vecteurs → −p (forces réparties sur le segment)


et c (couples répartis sur le segment). L’intégration de ces équations différentielles nécessite
six conditions aux limites. Ces conditions sont obtenues aux points d’abscisse l1 et l2 , extré-
mités du segment considéré, à partir de l’expression des termes de bord du PPV (Eq. 1.21b)
en choisissant un champ de déplacement virtuel nul à l’intérieur de la poutre et non-nul aux
bords. Ces équations (Eq. 1.23) traduisent simplement le fait que les efforts internes doivent

−d −
être égaux aux efforts imposés aux même endroits (σ(− x→ →
− →
F ) · n = t (xF ) en MMC) :

{τ }(li ) = F d (li )

(1.23)

En complément de ces conditions aux limites, si un torseur d’efforts {F i }(Gi ) , d’éléments


de réduction Ri (Gi ) et M i (Gi ), est imposé sur la section Si du tronçon considéré (Figure
1.12), une équation des discontinuités apparaît. Cette équation peut s’exprimer à l’aide du
PPV, modifié par la contribution de ces efforts : [| {τ } |](xi ) le saut des efforts internes dans
la puissance virtuelle des efforts internes, et {F i }(xi ) dans la puissance virtuelle des efforts
imposés. On n’a plus alors simplement égalité entre les efforts internes et les efforts imposés,
mais ces efforts viennent se superposer aux efforts extérieurs. Cette superposition donne lieu à
un saut des efforts intérieurs qui peut s’exprimer en considérant 2 sections infiniment proches.
Ce saut s’écrit, en prenant en compte le sens de parcours de la poutre : [| {τ } |](xi ) = τ (x+

i ) −
 −
τ (xi ) . Finalement cette équation de discontinuité s’écrit :
 −
[| {τ } |](xi ) = τ (x+
  i
i ) − τ (x i ) = − F (xi ) (1.24)

Figure 1.12: Torseur d’efforts extérieurs appliqué sur une section Si du tronçon étudié.

On notera que les équations d’équilibre au bord de la poutre (Eq. 1.23) se déduisent
de cette condition (Eq. 1.24) en écrivant que τ (l1− ) et τ (l2+ ) sont nuls, soit τ (l1+ ) =
  

− {F 1 }(x1 ) et τ (l2− ) = {F 2 }(x2 ) .



Théorie des poutres 26

Identification des efforts internes par transport des efforts extérieurs

Les efforts internes peuvent être identifiés rapidement, en recourant à l’équilibre ex-
térieur de la poutre. En effet, chaque tronçon de la poutre isolé doit être en équilibre sous
l’action, d’une part des efforts de cohésion, et d’autre part des efforts extérieurs imposés (Fi-
gure 4.21). Il suffit donc de procéder par la pensée à des coupes successives le long de l’abscisse
curviligne, et de vérifier l’équilibre de ces tronçons pour identifier les efforts internes en tout
point de l’abscisse.

Figure 1.13: Identification des efforts internes qui règnent dans une section située en A par
transport des efforts extérieurs à cet abscisse.

Considérons un tronçon de poutre en équilibre sous l’action d’un torseur d’actions



terminales en li dont les éléments de réduction sont définis en ce point : F d (li ) (li ) (Figure
4.21). Effectuons une coupure imaginaire de ce tronçon en un point A de l’abscisse curviligne.
La section située en A est donc en équilibre sous l’action d’une part des actions extérieures
terminales s’exerçant en li , et d’autre part sous l’action des efforts de cohésion qui règnent en
A ({τ }(A) ) et qui représentent l’action de la section voisine située en x1 = A− (par définition
des effort internes, efforts de la section de GAUCHE sur la section de DROITE). Rappelons
que la normale sortante est dans ce cas −→ −
x1 . Finalement, l’équilibre s’écrit simplement, en
prenant soin de transporter en A le torseur des actions extérieures :

− {τ }(A) + F d (A) = 0
(1.25)
 d
⇒ {τ }(A) = F (A)

Les efforts intérieurs sont rapidement identifiés par transport des efforts extérieurs s’exerçant
sur le tronçon isolé. Cette identification permet de traiter rapidement les problèmes simples,
mais rappelons que la vérification de l’équilibre extérieur est un préalable incontournable pour
cette identification. Cet équilibre peut poser des problèmes, notamment dans le cas des pro-
blèmes hyperstatiques pour lesquels une surabondance d’inconnues statiques ne peut être levée
Théorie des poutres 27

sans recourir à des méthodes complémentaires telles que celles présentées dans le chapitre 3
de ce document.

1.6.2 Calcul des déplacements et des rotations


La connaissance du torseur des efforts intérieurs {τ (x1 )}(G) sur le segment permet,
par la loi de comportement, d’obtenir les éléments de réduction (déformations de membrane

−e (x1 ) et de courbure → −
κ (x1 )) du torseur des déformations dans la poutre. Ce torseur est relié
au torseur des déplacements (vecteur déplacement → −
u (x1 ) et vecteur rotation →

r (x1 )) par les
relations introduites précédemment (Eq. 1.8). L’intégration des six équations différentielles
ainsi obtenues permet de connaître le torseur des déplacements en tout point de la fibre
moyenne de la poutre, et donc le champ de déplacement par la cinématique introduite. Lors
de l’intégration, il est nécessaire d’utiliser six conditions aux limites cinématiques, qui s’ajoutent
aux six conditions aux limites en efforts utilisées précédemment (Eq. 1.23). Globalement, sur
chaque segment considéré, les conditions aux limites (aux points d’abscisse l1 et l2 ) que l’on
doit appliquer sont au nombre de douze. Ceci correspond aux six degrés de liberté de chaque
côté du segment. En chaque point d’abscisse l1 et l2 , on doit donc connaître :

(u1 ou N ) ET (u2 ou T2 ) ET (u3 ou T3 )


ET (r1 ou Mt ) ET (r2 ou Mf 2 ) ET (r3 ou Mf 3 )
En pratique, il arrive que certaines conditions aux limites proviennent de considérations
de symétrie. Dans ce cas, les conditions portent sur la continuité des déplacements et/ou de
leurs dérivées . Par exemple, en flexion trois points sur une poutre à plan moyen (voir exercice
Flexion 2), par des considérations physiques on écrira la continuité des déplacements (→ −
u ), des

− 0 →

pentes ( u ) et des rotations ( r ) au centre.

1.6.3 Calcul des états de contraintes


Il est souvent essentiel de pouvoir connaître les contraintes qui règnent dans les sections,
par exemple pour vérifier que les limites à rupture ou la limite d’élasticité n’ont pas été
dépassées. Comme la théorie des poutres est basée sur l’intégration de ces contraintes sur
les section (Eqs. 1.10-1.11), les contraintes locales doivent être déduites des informations
moyennes.
Pour ce faire, on peut utiliser d’une part la loi de comportement de la structure, notée
[L], qui relie le torseur des efforts internes au torseur des déformations (Eq. 1.15), et d’autre
part la loi de comportement matériau qui relie les contraintes aux déformations locales (Eq.
1.14). En effet, les déformations qui règnent dans la section sont calculées à partir des éléments
de réduction du torseur des déformations connus au centre de gravité de la section. On peut
donc recalculer les déformations en tout point de la section et en déduire les contraintes
correspondantes.
Théorie des poutres 28

Contrainte normale

La contrainte normale est directement reliée à la déformation normale (Eq. 1.14) par le
module d’Young dans le cas d’un matériau isotrope. Par ailleurs l’effort normal est relié d’une
part à la déformation de membrane (e1 ) et d’autre part aux courbures de flexion (κ2 et κ3 ).
En résumé, on a :

N (x1 ) = ESu01 (x1 )




σ11 (→
− 0 0 0
( 
x ) = E11 = Eu1 + E(r2 x3 − r3 x2 )


|{z} | {z } et Mf 2 (x1 ) = EI2 r0 (x1 ) − EI23 r0 (x1 )
m →
(− f →
(−
2 3
= σ11 x) + σ11 x) 


Mf 3 (x1 ) = −EI23 r20 (x1 ) + EI3 r30 (x1 )

Contribution de la déformation de membrane Pour le terme de membrane, l’expression de la


contrainte est évidente, et recoupe le résultat classique où la contrainte est directement égale
à l’effort appliqué rapporté à la surface de la section sollicitée :
m →
0 σ11 (−
x) N (x1 ) m m N (x1 )
u (x1 ) = = ⇒ σ11 (M, x1 ) = σ11 (x1 ) =
E ES(x1 ) S(x1 )

Contribution de la déformation de flexion Cette part de la contrainte normale est évaluée assez
simplement dans le cas où les moments produits sont nuls, c’est-à-dire pour des sections à
plan de symétrie et des efforts appliqués dans ce plan (pour une expression plus compl !te, voir
Eq. 2.6 page 50)). Dans ce cas :

f Mf 2 (x1 ) Mf 3 (x1 )
σ11 (x1 , M ) = x3 − x2
I2 (x1 ) I3 (x1 )
Pour des sections non-symétriques ou des efforts appliqués hors de ce plan de symétrie,
on a alors de la flexion déviée, introduite au §2.2.3 pour les poutres droites.
Expression complète de la contrainte normale Finalement la contrainte normale est la somme
des contributions des termes de membrane et de flexion (Figure 1.14), et s’écrit de manière
générale :
N (x1 ) Mf 2 (x1 ) Mf 3 (x1 )
σ11 (x1 , M ) = + x3 − x2
S(x1 ) I2 (x1 ) I3 (x1 )
Dans les cas courants, la contrainte est maximale sur les fibres extrêmes des sections, i.e. en
x2 = ± L22 et x3 = ± L23 . La ’rigidité de tension’ est directement liée à la surface de la section
transverse, tandis que la ’rigidité de flexion’ dépend des moments quadratiques de la section,
c’est-à-dire de la forme de la section. Ce dernier point est abordé en détails dans les exercices
sur la flexion simple.
Théorie des poutres 29

Figure 1.14: Représentation plane de la contrainte normale : contributions de (a) membrane


et (b) flexion.

Contraintes de cisaillements

Comme dans le cas de la contrainte normale, les contraintes de cisaillements dépendent


de termes de membrane (e2 et e3 ) et de courbure (κ1 ) :

σ12 (→


x ) = G12 = G(u02 − r3 ) + Gr10 x3
T2 (x1 ) = GS(u02 (x1 ) − r3 (x1 ))

 
 | {z } | {z }

− →

 
 m t 

 = σ12 ( x ) + σ12 ( x ) 

et T3 (x1 ) = GS(u03 (x1 ) + r2 (x1 ))

 →
− 0
σ13 ( x ) = G13 = G(u3 + r2 ) + Gr1 x2 0 

 
Mt (x1 ) = GI0 r0 1(x1 )
 | {z } | {z } 
m →− t → −


=σ (x) + σ (x)

13 13
(1.26)
Si les termes de membrane s’expriment simplement, par contre la contribution des
contraintes de cisaillement dans la torsion ne s’exprime simplement que dans le cas de sections
circulaires où les contributions de σ12 et σ13 sont identiques (notée σ1r (x1 , r)). Au final, les
contraintes de cisaillements sont :

m T2 (x1 ) m T3 (x1 )
σ12 (x1 ) = σ13 (x1 ) =
S(x1 ) S(x1 )
t t Mt (x1 )
τ (x1 , r) = σ1r (x1 , r) = f (σ12 (x1 , r), σ13 (x1 , r))(Rc ) = r
I0 (x1 )
avec r la position radiale du point M dans un système de coordonnée cylindrique (Rc ) attaché
à la section circulaire centrée en G, et τ (r, x1 ) la contrainte de cisaillement dans ce repère. La
contrainte due à la torsion seule sera établie plus précisément dans le cas d’une poutre droite
soumise à un moment de torsion terminal (57). On remarque que pour la partie membrane
des contraintes de cisaillement, seule la section transverse est importante, tandis que pour la
torsion le moment quadratique polaire représente la rigidité ’géométrique’ de la section.
Théorie des poutres 30

1.7 Bilan de la théorie des poutres


Le dimensionnement des poutres passe généralement par la résolution des équations
d’équilibre intérieur (Eq. 1.28). Pour intégrer ces équations différentielles en efforts, on dispose
des conditions aux limites cinématiques (Eq. 1.27), utilisables via la loi de comportement (Eq.
1.30), ainsi que des conditions d’équilibre au bord (Eq. 1.29). Les équations des discontinuités
sont également nécessaires si des efforts sont appliqués ailleurs qu’aux extrémités de la poutre
(Eq. 1.29). Enfin, lorsque les déplacements sont connus les déformations peuvent être calculées
(Eq. 1.31) et les contraintes évaluées en tout point à partir des efforts internes (Eq. 1.32).
Théorie des poutres 31

Bilan de la théorie des poutres


1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.

{U}(li ) = U d (li ) , ∀ li ∈ {l1 , l2 }



(1.27)

2. Équilibre intérieur
( →
−0 →

d R (x1 ) + → −
p (x1 ) = 0
{τ }+{F v } = {0} ⇔ −
→ →
− − , ∀x1 ∈ [0, L]
−c (x ) = →
dx1 M 0 (x1 ) + →

x 1 ∧ R (x1 ) + → 1 0
(1.28)
3. Équilibre au bord et discontinuités

{τ }(li ) = F d (li ) , ∀ li ∈ {l1 , l2 }
 − (1.29)
[| {τ } |](xi ) = τ (x+
 i
i ) − τ (xi ) = − {F }(xi ) , ∀ xi ∈ [0, L]

4. Loi de comportement
( →− →

) " # ( )
R (x1 ) [A] [B] e (x1 )

→ = · →
− ⇔ {τ (x1 )} = [L] {(x1 )} (1.30)
M (x1 ) [B] [D] κ (x ) 1

5. Relations utiles :
— Relations déplacements/déformations


r 0 (x1 ) = →

(
κ (x1 )

− (1.31)
u (x1 ) + x 1 ∧ →
0 →
− −r (x1 ) = →

e (x1 )

— Expressions des contraintes en fonction des efforts internes

m N (x1 )
tension : σ11 (x1 ) =
S(x1 )
f Mf 2 (x1 ) Mf 3 (x1 )
flexion : σ11 (x1 , M ) = x3 − x2
I2 (x1 ) I3 (x1 )
(1.32)
m Tα (x1 )
cisaillement : σ1α (x1 ) = (α = 2, 3)
S(x1 )
t Mt (x1 )
torsion : τ (x1 , r) = f (σ1α (r, x1 ))(Rc ) = r
I0 (x1 )
2.
Théorie des poutres droites

Sommaire
2.1 Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan . . . . . . . 34
2.1.1 Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargées
dans ce plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
2.1.2 Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques . . . . . 35
2.1.3 Prise en compte du cisaillement transverse . . . . . . . . . . . . 36
2.1.4 Formulation des problèmes de flexion-tension . . . . . . . . . . 37
2.2 Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
2.2.1 Tension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
2.2.2 Flexion simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.2.3 Flexion déviée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
2.2.4 Sollicitation composée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
2.2.5 Torsion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
2.3 Bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

33
Théorie des poutres droites 34

Généralement, les poutres présentent des sections et des courbes moyennes dont les
particularités peuvent être utilisées pour réduire la complexité des problèmes traités. Dans la
plupart des cas en effet, les sections présentent des symétries, c’est la cas en particulier des
poutres à plans moyens. De plus, les poutres droites sont les plus largement utilisées.

2.1 Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan


Dans le cas des poutres courbes, la rotation du repère de la section par rapport au
repère de référence doit être pris en compte, par exemple en utilisant un repère de Frénet. Les
poutres droites ont la particularité de posséder une ligne moyenne rectiligne. Dans ce cas les
axes du repère de référence et du repère attaché aux sections sont confondus, et le restent
dans le cadre HPP. On notera dorénavant ce repère R(O, → −x ,→

y ,→−z ).
Comme il a été défini au début de ce document, les poutres à plans moyens sont des
poutres dont la section présente un plan de symétrie (Figure 2.1). Généralement ces poutres
sont chargées dans le plan de symétrie de la section, on parle alors de poutres à plan moyen
chargées dans leur plan. Des sections à plan moyen plus particulières peuvent être utilisées, il
s’agit des profils creux ou de profils ouverts (Figure 2.1). Dans le cas des profils ne possédant
pas de plan de symétrie par rapport à → −
y , le centre de gravité n’est plus confondu avec le
centre géométrique, il y a donc apparition de flexion déviée. De plus dans le cas des profils
ouverts, des théories spécifiques doivent être utilisées, notamment pour prendre en compte le
cisaillement qui peut se développer dans les parois minces des sections. Dans cette introduction
à la RdM, nous nous limiterons aux sections fermées présentant 2 plans de symétrie (xGy et
xGz), telles que les 3 premières sections de la Figure 2.1.

Figure 2.1: Exemples de sections à plans moyens et section ouverte.

Ces hypothèses de symétrie conduisent à des problèmes beaucoup plus simples que les
cas généraux présentés jusqu’alors. En effet dans ce cas, les moments produits des sections
sont nuls, il n’y a donc pas de couplage entre les 2 déformations de flexion (voir Eq. 1.15).
On supposera de plus que le chargement s’applique dans le plan de symétrie de la section, ce
qui évite notamment la prise en compte de la flexion déviée.
Théorie des poutres droites 35

2.1.1 Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargées


dans ce plan
Lorsqu’une poutre à plan moyen est chargée dans son plan, les efforts internes en tout
point d’abscisse x (qui joue ici le rôle de l’abscisse curviligne l) sont contenus dans le plan du
chargement et sont :


— une réaction R dans le plan xOy, donc avec deux composantes,


— un moment M dirigé selon Oz, donc avec une composante.


Les deux composantes de R sont alors notées N (effort normal) et T2 = T (effort tranchant),


tandis que la composante non nulle de M est notée M3 = M (moment de flexion).
De même, les déplacements de tout point de la poutre (y compris des points situés
hors de la ligne moyenne) sont représentés par :
— un vecteur déplacement de la fibre moyenne → −u dans le plan xOy,


— un vecteur rotation r de la section selon Oz.
Les deux composantes non nulles de → −
u sont notées ux = u (déplacement normal) et uy = v
(flèche), tandis que la composante non nulle de →−
r est notée r = φ (rotation). Nous voyons
z
dans ce cas que nous travaillons sur trois degrés de liberté (au lieu de six). Les équations
d’équilibre (Eqs. 4.14) deviennent dans ce cas fonctions des efforts N , T , et M , eux-même
fonctions de l’abscisse x sur la poutre. Elles s’écrivent :

0
 N (x) + px (x) = 0

T 0 (x) + py (x) = 0
 M 0 (x) + T (x) + c (x) = 0

z

On remarque dans ces équations que les charges et couples répartis sur la fibre moyenne
de la poutre (issus des forces volumiques) se réduisent à :
— une force par unité de longueur → −p avec seulement deux composantes non nulles px
et py ,
— un couple par unité de longueur → −c porté par l’axe z.

Le problème à traiter dans le cas des poutres droites à plan moyen chargées dans ce
plan est totalement plan, et grandement simplifié par rapport au cas des poutres courbes
dans l’espace. On note que la torsion n’apparaît pas ici, c’est en effet un mécanisme qui
fait intervenir une rotation hors du plan de symétrie des sections (κ1 (x1 ) = r10 (x1 )). Cette
sollicitation sera traitée séparément.

2.1.2 Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques


Dans ce cas plan de la théorie des poutres, on peut donner aisément une interprétation
physique simple des quantités telles que la rotation des sections. Les hypothèses de poutre ont
conduit à poser une cinématique dans laquelle le déplacement de tout point M de la section
Théorie des poutres droites 36

s’exprime en fonction des déplacements plans du centre de gravité (u(x) et v(x)) de la section
et d’une rotation (φ(x)) de cette section (Figure 2.2).

Figure 2.2: Cinématique de poutre, sans cisaillement (Bernoulli) et avec cisaillement (Timo-
shenko).

2.1.3 Prise en compte du cisaillement transverse


Dans la cinématique sans cisaillement ou de Bernoulli, les sections sont supposées rester
normales à la ligne moyenne (φ(x) = dv(x) dx
). Dans ce cas, la connaissance du déplacement de
la ligne moyenne suffit, par des considérations géométriques simples, à définir complètement
les déformations de membrane et de courbure. Dans la cinématique avec cisaillement ou de
Timoshenko, la rotation totale de la section (φ(x)) est indépendante de la rotation de la
section due à la flexion ( dv(x)
dx
) . Cet effet peut-être schématisé simplement en flexion pure :
la flèche totale est la somme de la flèche de la poutre possédant uniquement une rigidité de
flexion et de la flèche de la même poutre possédant cette fois-ci une rigidité de cisaillement
uniquement (Figure 2.2). Dans cette théorie, le cisaillement (γ(x)) est donc la différence de
la rotation totale (φ(x)) et de la rotation due à la flexion ( dv(x)
dx
). Ou vu autrement, pour une
flèche donnée, le cisaillement provoque une rotation totale moindre par rapport à la flexion
seule. Ce point sera abordé plus en détails dans les applications ci-dessous. Finalement, les
théories avec et sans cisaillement reposent sur les cinématiques suivantes :
Théorie des poutres droites 37

Bernoulli - sans cisaillement Timoshenko - avec cisaillement



 uM (x, y) = u(x) − yφ(x)

dv(x) 

uM (x, y) = u(x) − y (2.1)
dx vM (x, y) = v(x) 
 v (x, y) = v(x)  γ(x) = dv(x) − φ(x)

M
dx

Pour la théorie avec cisaillement, l’introduction du cisaillement nécessite de corriger la


contribution de cette rigidité. En effet, compte-tenu de l’hypothèse de répartition constante du
cisaillement dans l’épaisseur de la poutre (γ fonction de x seul), la répartition réelle qui est pa-
rabolique (maximum au centre et condition de contraintes nulles sur les bords) est légèrement
surestimée. On introduit un coefficient de correction, souvent noté k, qui permet d’ajuster
cette approximation. Ce coefficient est calculé à partir de considérations énergétiques, il est
égal à 56 pour une section prismatique (voir §5.3.3). La loi de comportement en cisaillement
s’écrit donc : T (x) = kGSγ(x)

2.1.4 Formulation des problèmes de flexion-tension


Au final, les problèmes de flexion-tension pour les poutres droites tels que représenté
sur la Figure 2.3, sont complètement formulés grâce aux équations suivantes données pour la
théorie avec cisaillement.

Figure 2.3: Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan : conditions aux limites en x1 et
x2 et chargements répartis et concentrés en xi .
Théorie des poutres droites 38

Bilan de la théorie des poutres droites chargées dans leur plan moyen

1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.

u(xi ) = ud , v(xi ) = v d , φ(xi ) = φd

2. Équilibre intérieur
N 0 (x) + px (x) = 0
T 0 (x) + py (x) = 0
M 0 (x) + T (x) + cz (x) = 0

3. Équilibre au bord et discontinuités



N (xj ) = N d (xj ) N (x+ d
i ) − N (xi ) = −N (xi )

T (xj ) = T d (xj ) T (x+ d
i ) − T (xi ) = −T (xi )

M (xj ) = M d (xj ) M (x+ d
i ) − M (xi ) = −M (xi )

4. Loi de comportement
du(x)
N (x) = ES
dx
T (x) = kGSγ(x)

dφ(x)
M (x) = EI
dx
5. Relations utiles :
— Relations déplacements/déformations

(x) = u0 (x) − yφ0 (x)

γ(x) = v 0 (x) − φ(x)

— Expressions des contraintes en fonction des efforts internes

m N (x)
tension : σxx (x) =
S(x)
f M (x)
flexion : σxx (x, y) = − y
I(x)
T (x)
cisaillement : σxy (x) =
S(x)

En pratique, la contribution du cisaillement dans la rigidité de la poutre est souvent né-


gligée. En effet, ce terme est très souvent d’un ordre de grandeur inférieur au terme de rotation
φ(x) lors du calcul de la flèche v(x). Ceci est illustré dans les second et troisième exemples de
Théorie des poutres droites 39

flexion traités ci-dessous (exercice Flexion 2 et Flexion 3 ). On remarque finalement que, en


négligeant la contribution du cisaillement, et en dérivant la dernière équation d’équilibre, on
obtient une équation différentielle en v(x) et M (x). Cette équation est souvent utilisée pour
obtenir rapidement la flèche de la poutre en fonction du moment M (x) calculé par transport
des actions extérieures en un point x quelconque de l’abscisse. La méthode est appelée double
intégration de la ligne élastique :

EIv(x)00 = M (x)

2.2 Applications
Les sollicitations des poutres droites à plans moyens étudiées ici sont soit de la tension
ou de la flexion, ou leur combinaison. Ces 2 sollicitations, imposées dans le plan de symétrie
de la poutre, sont étudiées à travers des exercices. La torsion est ensuite abordée séparément,
pour des arbres cylindriques.

2.2.1 Tension
Dans le cadre de la théorie en HPP présentée jusqu’alors, dans une poutre sollicitée
en tension, seule la contrainte normale est non nulle. On sait de plus que cette contrainte est
constante dans l’épaisseur de la poutre.

Tension 1 : exemple de base On considère une poutre à plan moyen de longueur l chargée
dans son plan en tension par un effort normal ponctuel (vecteur Fx .→

x ) appliqué en B (Figure
2.4). On notera E le module d’Young du matériau constitutif et S la section de la poutre
constante ici.

Figure 2.4: Poutre droite à plan moyen chargée en tension par un effort terminal normal.
Théorie des poutres droites 40

1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités ciné-
matiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner le déplacement longitudinal de la poutre en tout point x, en prenant en
compte les conditions aux limites cinématiques.
— Tracer le profil de la contrainte normale le long de la poutre.
— Choisir une section rectangulaire de poutre, pour une largeur b fixée, telle que
la limite élastique σ0 du matériau constitutif ne soit pas dépassée.

Tension : utilisation des continuités et discontinuités On considère la même poutre,


mais le chargement est ici un chargement réparti d’intensité constante P qui s’applique seule-
ment sur une partie [AB] de la poutre (Figure 2.5).

Figure 2.5: Poutre droite à plan moyen soumise à un chargement réparti.

1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités ciné-
matiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner le déplacement longitudinal de la poutre en tout point x.
— Tracer le profil des contraintes le long de la poutre.
— Quelle est la contrainte maximale dans cette poutre ?
Théorie des poutres droites 41

— Choisir une section de poutre, pour une largeur b fixée, telle que la limite élas-
tique σ0 du matériau constitutif ne soit pas dépassée.

2.2.2 Flexion simple


Les équations d’équilibre ont été présentées ci-dessus, il reste à expliciter les contraintes
engendrées par la flexion des poutres. En se rappelant que la cinématique s’exprime par rapport
aux grandeurs mesurées au centre de la section, on en déduit que la répartition de la contrainte
normale à travers l’épaisseur est linéaire.

Flexion 1 : Flexion simple d’une poutre console

Considérons la poutre représentée sur la Figure 2.6 sollicitée par une force ponctuelle


(vecteur Fy (l)) en son extrémité B (x = l). On notera E le module d’Young du matériau, G
son module de cisaillement, S la section de la poutre et I son moment d’inertie par rapport à
l’axe Oz.

Figure 2.6: Flexion simple d’une poutre à plan moyen

1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités ciné-
matiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.
— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x, en utilisant la
méthode de la double intégration, et donner leur profil.
3. Influence du cisaillement
Théorie des poutres droites 42

— Montrer que la contribution de l’effort tranchant peut être négligée dans les ex-
v lex
pressions des déplacements obtenues ci-dessus ( vfcis ), dans le cas des matériaux
isotropes. On notera r le degrés d’anisotropie (r = E G
).
— Évaluer la limite d’utilisation de la théorie de Timoshenko, pour ce problème.
On notera que le degrés d’anisotropie peut atteindre une valeur limite supé-
rieure à 35 pour des matériaux composites isotropes transverses de type car-
bone/époxyde.
4. Choix d’une section en fonction de sa rigidité de flexion
— Évaluer et comparer les moments quadratiques des sections (a) et (b) présentées
sur la Figure 2.7.
— Comparer les moments quadratiques et les masses des sections en I et sandwich
par rapport à la section pleine en fonction de k. On considérera de l’acier, et de la
mousse PUR pour l’âme du sandwich, avec un rapport de rigidité E Ep
a
= 5 · 10−2 .

Figure 2.7: Profils de section considérés : (a) section rectangulaire pleine, (b) section en I, et
(c) matériau sandwich.
Théorie des poutres droites 43

Remarques sur la rigidité en flexion des sections de type profilé et sandwich

On note Ihom le moment d’inertie de la section homogène (Figure 2.7-a) :


!  3
Z b/2 Z h/2
2 2b h
Ihom/G = y dy dz = (2.2)
−b/2 −h/2 3 2
Pour la poutre en I (Figure 2.7-b), le moment quadratique est calculé en 2 parties. Il faut tout
d’abord évaluer la contribution de la partie centrale (l’âme dans les sandwichs), puis celle des
deux peaux. Pour l’âme, le calcul est similaire à celui de la poutre homogène (Eq. 2.2), avec
une largeur kb pour la section en I et b pour le sandwich. Pour les deux peaux (les voiles dans
la section en I), on utilise soit une intégrale de bornes ayant pour origine le centre de section,
soit le théorème d’Huyghens qui permet de rapporter le calcul du moment d’inertie par rapport
à la ligne moyenne d’une peau à la ligne moyenne de la poutre sandwich (Eq. 2.3). Ainsi, un
terme supplémentaire apparaît dans le calcul du moment d’inertie des peaux (des voiles). Il
est constitué du produit de l’aire de la section transverse des peaux par le carré de la distance
entre la ligne moyenne d’une peau et celle du sandwich. La rigidité équivalente de flexion de
la poutre sandwich < EI >sand est proche de celle de la section en I, calculée en deux parties,
mais ici le matériaux constitutif n’est pas le même dans toute la section de la poutre (Eq.
2.4).

II/G = Iame/G + 2Ipeau/G


!
Z kb/2 Z (h/2+kh) Z b/2 Z h/2
2 2
= y ds + 2 y ds
−kb/2 −(h/2−kh) −b/2 (h/2−kh)
kb/2 (h/2+kh) b/2 kh /2  2 ! (2.3)
h − kh
Z Z Z Z
2 2
ou y ds + 2 y ds + bkh
−kb/2 −(h/2−kh) −b/2 −kh /2 2
3
b(kh)3 bkh
  
2kb h
= − kh +2 + (h − kh)2
3 2 12 4
Z b/2 Z h/2
< EI >sand/G = E(y) y 2 ds = Ea Iame/G + 2Ep Ipeau/G
−b/2 −h/2
3 (2.4)
b(kh)3 bkh
  
2Ea b h 2
= − kh + 2Ep + (h − kh)
3 2 12 4
Les matériaux sandwich généralement rencontrés dans les applications industrielles possèdent
les caractéristiques suivantes (Eq. 2.5) (hp est l’épaisseur des peaux et ha est l’épaisseur de
l’âme).

hp
0, 02 < < 0, 1
ha
(2.5)
Ea
0, 001 < < 0, 02
Ep
Théorie des poutres droites 44

Ainsi, en considérant ces ordres de grandeurs pour les rapports des épaisseurs et des
modules, on montre que le troisième terme de la relation (2.4) est prépondérant devant les
deux autres. En effet, si on note respectivement < EI >is (i = 1..3) les trois termes composant
la rigidité équivalente de flexion de la poutre sandwich (Eq. 2.4), les rapports suivants peuvent
être établis :

< EI >1s Ea ha 1
3
' <
< EI >s 6Ep hp 6
2 2
< EI >s kh 1
3
' 2 <
< EI >s 3ha 300
La rigidité de flexion propre des peaux rapportée à la ligne moyenne du sandwich consti-
tue donc le terme prépondérant de l’expression de la rigidité globale de flexion (< EI >sand ).
C’est donc l’assemblage des deux constituants qui confère à l’ensemble une rigidité équivalente
conséquente en flexion, c’est l’effet sandwich. Pour illustrer cet effet, on calcul la rigidité du
sandwich formé par des peaux d’épaisseur hp séparées par une âme d’une épaisseur ha . On vé-
rifie aisément que la rigidité du sandwich est beaucoup plus élevée que la rigidité de la section
constituée des mêmes peaux seules, formant un matériau massif d’épaisseur 2hp (Figure 2.8),
et ceci pour une masse sensiblement identique. La rigidité de membrane est, quant à elle, très
peu modifiée. On voit ici tout l’intérêt de l’utilisation de ce type de section, notamment dans
le secteur des transports où l’allégement est un souci constant.

Figure 2.8: Effet sandwich : rigidité et masse du sandwich d’épaisseur ha + 2hp rapporté à la
section d’épaisseur 2hp (Epeau = 103 Eame et ρame = 0, 09ρpeau ).

Plus généralement, on peut "gagner de la matière" en utilisant ce type de section,


ou de manière équivalente des profils creux, en utilisant les matériaux les plus rigides le plus
Théorie des poutres droites 45

loin du centre de flexion de la section. L’intérêt de ces sections peut être mis en évidence en
représentant la rigidité de flexion et la masse de la section en I (Figure 2.9-a) et de la section
sandwich (Figure 2.9-b), rapportées à la rigidité de flexion et la masse de la section de même
dimension mais homogène. Sur la Figure 2.9 (k est le rapport des épaisseurs de peaux par
rapport à l’épaisseur totale dans les sections en I (Figure 2.7-b) et sandwich (Figure 2.7-c))
on peut voir que pour un gain de masse appréciable, on obtient des rigidités très proches de
celles de la section homogène.
Théorie des poutres droites 46

(a)

(b)

Figure 2.9: Rigidités et masse des sections (a) en I, et (b) matériau sandwich (Epeau = 103 Eame
et ρame = 0, 09ρpeau ) .
Théorie des poutres droites 47

Flexion 2 : Flexion trois points

La Figure 2.10 représente une poutre à plan moyen sollicitée en flexion trois points


dans son plan par une force Fy . Par symétrie, nous allons utiliser le segment 0 ≤ x ≤ l/2
pour traiter le problème, en posant des conditions de symétrie en x = l/2. Du fait de cette


symétrie, la sollicitation ponctuelle Fy est diminuée de moitié. Une théorie avec cisaillement
sera utilisée pour résoudre ce problème.

Figure 2.10: Flexion trois points d’une poutre à plan moyen.

1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités ciné-
matiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre. Don-
ner la flèche et la rotation maximale ainsi que les abscisses de ces maxima.
— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
Attention aux réactions aux appuis ! ! !
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x, et tracer leur profil.
3. Influence du cisaillement
— Montrer que la contribution de l’effort tranchant peut être négligée dans les ex-
v lex
pressions des déplacements obtenues ci-dessus ( vfcis ), dans le cas des matériaux
isotropes. On notera r le degrés d’anisotropie (r = E G
).
— Évaluer la limite d’utilisation de la théorie de Timoshenko, pour ce problème.
On notera que le degrés d’anisotropie peut atteindre une valeur limite supé-
rieure à 35 pour des matériaux composites isotropes transverses de type car-
bone/époxyde.

On a vu que le cisaillement peut être négligé dans le cas des matériaux courants
(r ' 2, 6), mais doit être pris en compte dans le cas des matériaux dont le rapport d’orthotropie
Théorie des poutres droites 48

est élevé. C’est le cas des matériaux composites par exemple, où le cisaillement n’est plus une
fonction du module d’Young et du coefficient de Poisson, et pour lesquels le rapport peut
atteindre des valeurs élevées, de l’ordre de 35. Il faut également préciser que plus la poutre est
élancée, plus le cisaillement est négligeable. On utilise d’ailleurs un essai dit Short Beam Shear
Test pour déterminer la résistance en cisaillement interlaminaire dans les poutres composites.
Il s’agit d’un essai de flexion 3 points, tel que celui présenté ci-dessus sur la Figure (2.10),
mais dont les appuis sont si rapprochés (l = 5h) que le cisaillement contrôle en grande partie
la réponse de la poutre.Dans la suite des applications, le cisaillement sera négligé afin d’alléger
les développements analytiques.
La flexion 3 points est un essai couramment utilisé dans l’industrie pour caractériser
les matériaux. Pourtant, cet essai, s’il a l’avantage d’être simple à mettre en œuvre, pose de
nombreux problèmes pour des mesures de résistance. En effet, le profil des efforts tranchants
et des moments fléchissants montre clairement que ces 2 grandeurs sont maximales au centre
de la poutre. De plus, sous l’appui central, la poutre subit un écrasement transverse (yy ). La
concomitance de ces valeurs extrêmes au centre de la poutre conduit systématiquement à une
rupture sous l’appui central, rendant difficile l’identification du mode de rupture et l’état de
contraintes à l’intérieur de la poutre au moment de la rupture. Un moyen simple de pallier à
cette rupture ’incontrôlée’ est de mettre en œuvre un essai de flexion 4 points (Figure 2.11),
traité ci-dessous.

Flexion 3 : Flexion quatre points

Nous allons étudier la flexion quatre points d’une poutre à plan moyen. Les caractéris-
tiques mécaniques et géométriques de la poutre étudiée sont identiques à celles utilisées dans
les exemples précédents (voir Figure 2.11). Dans ce problème, une théorie sans cisaillement
sera considérée. Il faut noter qu’il est possible d’étudier avec cette théorie l’évolution de la
contrainte de cisaillement le long de la poutre. En effet, l’effort tranchant existe, et il va en-
gendrer des contraintes de cisaillement, mais qui ici ne vont pas influer sur la rotation des
sections et donc la flèche. Simplement, aucune loi de comportement ne permet de dériver la
déformation de cisaillement à partir de l’effort tranchant.

1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités ciné-
matiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.
— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.
— Tracer la déformée.
— Comparer ces répartitions avec celles de l’essai de flexion 3 points.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
Théorie des poutres droites 49

Figure 2.11: Flexion 4 points d’une poutre à plan moyen.

— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x.

La flèche solution de ce problème s’écrit :


0<x≤a a < x ≤ 2l

Fy x x2 a2
   
Fy a 2
v1 (x) = − a(l − a) v2 (x) = x − lx +
2 EI 3 2 EI 3

Flexion 4 : Poutre d’égale résistance Les poutres en flexion sont très répandues dans
les applications technologiques courantes. On peut souhaiter avoir des poutres dites d’égale
résistance, c’est-à-dire que l’état de contrainte soit le même partout dans la poutre. Ceci assure
une homogénéité dans toute la poutre, et donne l’assurance qu’en tout point de la poutre la
résistance du matériau constitutif ne sera pas dépassée si le dimensionnement est effectué
correctement.
Nous allons appliquer ce principe à la poutre console vue précédemment (Figure 2.6)
qui est chargée dans un premier temps par un effort ponctuel terminal comme dans l’exercice
Flexion 1 , puis dans une autre configuration avec cette fois-ci un effort réparti vertical d’in-
tensité py constante (Figure 2.12). La section de cette poutre est rectangulaire, de largeur b
et de hauteur h.

1. Résolution du problème posé sur la Figure 2.12


— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités ciné-
matiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Exprimer les déplacements en tout point x.
— Tracer le diagramme des efforts tranchants et des moments fléchissants.
2. Expliciter, pour les 2 cas de chargements, la contrainte normale maximale, en fonc-
tion du moment de flexion maximum et des dimensions de la section qui peuvent
dépendre de x.
3. Donner le profil de la poutre si la largeur b est fixe (variation de la hauteur h(x)).
4. Donner le profil de la poutre si la hauteur h est fixe (variation de la largeur b(x)).
Théorie des poutres droites 50

Figure 2.12: Poutre console soumise à une charge répartie py constante.

2.2.3 Flexion déviée


La flexion déviée se produit lorsque les moments produits de la section ne sont pas nuls.
Ce peut être le cas par exemple lorsque les directions principales d’inertie de la section ne sont
pas confondues avec les axes du repère de référence, ou bien pour les sections ne possédant
pas de plans de symétrie. On retrouve alors le résultat énoncé précédemment (Eq. 1.15), où
le moment fléchissant Mfz est dû pour une part à la flexion selon → −
z , mais également à de la


flexion selon y . Ce qui donne dans une théorie sans cisaillement :

Mfz (x) = EIGz v 00 (x) − EIGyz w00 (x)

où IGy , IGz et IGyz sont respectivement le moment quadratique de la section par rapport à
l’axe →

y , par rapport à l’axe →

z , et le moment produit. w00 est la courbure due à la flèche selon

−z . Dans ce cas la contrainte normale se calcule en prenant en compte les grandeurs suivant
les 2 axes concernés.
L’expression de la contrainte normale s’établit à partir des lois de comportement en
flexion (Mfz = f (v 00 , w00 ) et Mfy = f (v 00 , w00 )), en explicitant les courbures et en les introdui-
sant dans l’expression de la contrainte normale, telle qu’exprimée par exemple dans l’équation
1.26 page 28. Au final, l’expression complète de la composante de flexion de la contrainte
normale s’écrit :
f yIGy − zIGyz zIGz − yIGyz
σxx (x) = −Mfz (x) 2
+ Mfy (x) 2
(2.6)
IGy IGz − IGyz IGy IGz − IGyz

Poutre à section quelconque

Considérons une section quelconque mais constituée d’un matériau homogène. On


comprend bien que les directions principales dites d’inertie 1 de cette section ne seront pas
1. En fait ces propriété dites - abusivement - d’inertie ne sont pas liées directement au comportement
dynamique, mais par extension représentent les propriétés géométriques et matériaux de la section qualifiant
son comportement mécanique en termes de rigidité
Théorie des poutres droites 51

directement confondues avec les axes du repère global (Figure 2.13-a). Pour le montrer plus
rigoureusement, déterminons dans un premier temps les coordonnées du centre de gravité de
cette section. Ensuite, les directions principales d’inertie seront déterminées en diagonalisant
le tenseur d’inertie de cette section, dans le plan (G, →
−y ,→
−z ).

y'
y
(S1)
(s) z'
y e
α
y
G
h
G
z G G
yG (S2)
O z (S3) z
z O
G b
(a) (b)

Figure 2.13: Description géométrique de la section : (a) centre de gravité et directions princi-
pales d’inertie pour une section quelconque, et (b) section en L.

Dans le plan (O, →



y ,→
−z ), les coordonnées du centre de gravité se calculent par la
définition même de ce point particulier de la section, qui est tel que :

centre de gravité en 3D centre d’une section homogène en 2D


Z Z Z Z Z Z Z
ρ→

x dΩ y ds z ds (2.7)

x→ Ω S(x) S(x)
G (x) = Z Z Z yG (x) = Z Z zG = Z Z
ρdΩ ds ds
Ω S(x) S(x)

Le terme au numérateur est appelé le moment statique de la section par rapport à l’origine
du repère O, on le notera JOz et JOy ci-dessous. Ce moment est évidemment nul lorsqu’on le
calcule par rapport au centre de gravité G.
Remarque : Dans le cas de sections constituées de matériaux hétérogènes, les raison-
nements présentés ici doivent inclure la répartition des propriétés ; notamment dans le calcul
des intégrales ci-dessus pour définir un centre de section, et dans les intégrales définissant les
rigidités. Comme cela a été illustré dans l’exercice de flexion avec section sandwich - Flexion
1 Poutre console, question 4 page 41, où la rigidité de résultante inclut à la fois les propriétés
R b/2 R h/2
géométriques et les propriétés mécaniques, i.e. IGz < EIz >sand/G = −b/2 −h/2 E(y) y 2 ds.
Lorsque les coordonnées du point G sont déterminées, les moments quadratiques et
produit peuvent être calculés par rapport à ce point, et relativement aux axes du repère
global, dans le repère centré en G par exemple (RG = (G, → −y ,→

z )). D’après les relations page
6 rappelées ci-dessous, on obtient le tenseur d’inertie de la section (en 2D) par rapport au
Théorie des poutres droites 52

centre de gravité, appelé alors tenseur central d’inertie :


 Z Z Z Z 
2
 IGy = z ds −IGyz = − yzds
S(x) S(x)
I(G, S) = Z Z Z Z  (2.8)
(RG ) 2 
−IGyz = − yzds IGz = y ds
S(x) S(x) (G,−

y ,−

z)

Ces moments peuvent également se calculer par rapport à un système d’axes orthogo-


naux centré en G, formant un angle α par rapport à l’axe →

z par exemple - α = → −
\
z G z 0 - tel que


représenté sur la Figure 2.13. En introduisant le changement de base (G, →
−y , z) (G, y 0 , z 0 )
avec le tenseur P (R →R0 ) de changement de base (orthogonal si les bases sont orthonormées
G G

−0
directes) tel que x = P (R →R0 ) · →

x en 2D :
G G
" #
cos α − sin α
P (R 0 =
G →RG ) sin α cos α 0 )
(RG →RG

et en notant que le tenseur d’inertie est d’ordre 2, ce changement de base s’écrit :


 T
I(G, S) 0 = P (R →R0 ) · I(G, S) · P (R →R0 )
(RG ) G G (RG ) G G

ce qui conduit finalement aux expressions des moments par rapport à ce nouveau système
d’axe :
IGy0 = 1 (IGy + IGz ) + 1 (IGy − IGz ) cos 2α − IGyz sin 2α

2 2
1 1

IGz0 = (IGy + IGz ) + (IGz − IGy ) cos 2α + IGyz sin 2α

2 2
−I 0 0 = 1 (I − I ) sin 2α − I cos 2α

Gy z Gz Gy Gyz
2

RR
Remarque : Les moments produits sont stockés sous la forme −IGyz = − S(x) yzds, il
faut être très attentif au signe, selon qu’on écrit la forme tensorielle ou non. Ici on a exprimé
le terme hors-diagonal de la forme tensorielle, soit −IGy0 z0 pour être cohérent.
On en déduit encore, que inversement, l’angle α entre le repère RG et le repère prin-
0
cipal d’inertie RG , tel que le moment produit est nul, s’exprime en fonction des moments
caractéristiques de la section
2 IGyz
tan 2α =
IGy − IGz
Plus généralement, déterminer les axes principaux de la section, pour lesquels le moment pro-
duit est nul, se fait par diagonalisation du tenseur d’inertie. Il s’agit de déterminer les vecteurs
propres →−
xi associés aux valeurs propres Ii de ce tenseur. Ces valeurs propres représentent la
projection du tenseur sur les directions propres associées, soit I(G, S) ·→

xi = Ii · →

xi . Ou
(RG )
encore, pour que la solution triviale ne soit pas solution :
" #!
IGy − Ii −IGyz
= Ii2 − (IGy + IGz ) Ii + IGy IGz − IGyz
2

det =0
−IGyz IGz − Ii −
→−→
(G, y , z )
Théorie des poutres droites 53

d’où on déduit les valeurs prises par les moments d’inertie principaux, solution de l’équation
du second degré en I
s 2
IGy + IGz IGz − IGy 2
I(max,min) = ± + IGyz
2 2

Sans entrer dans les détails, ces valeurs propres sont réelles et distinctes, et les vecteurs propres
correspondants sont donnés par
q !

−0 IGy − IGz − (IGy − IGz )2 + 4IGyz 2
z1 =
−2IGyz −
→− →
q !(G, y , z )
2

−0 IGy − IGz + (IGy − IGz ) + 4IGyz 2
z2 =
−2IGyz (G,−

y ,−

z)

Illustration sur la cas de la poutre console - TP

Pour illustrer ces calculs de propriétés géométriques de sections, et pour étudier la


flexion déviée, considérons une section en L telle que présentée sur la Figure 2.13, de hauteur
h, de largeur b, et d’épaisseur de voile e, constituée d’un matériaux homogène de type PVC :
— Dimensions : e=3,5 mm, h=3 cm et b=2 cm ; longueur ` = 70 cm
— Propriétés mécaniques : module d’Young 0, 35 GP a < E < 2, 5GP a. Ici E =
1 GP a

1. Pour ce cas de la cornière en L (Figure 2.13), nous allons procéder comme indiqué ci-
dessus dans le cas général. On pourra raisonner en termes de 3 surfaces composant
cette cornière, telles que présentées sur la Figure 2.13 : 2 rectangles composant
les ailes - (S1 )/(z, y) ∈ [0, h] × [0, e] et (S2 )/(z, y) ∈ [0, b] × [0, h]) - auxquels on
retranchera le carré (S3 )/(z, y) ∈ [0, e] × [0, e] :
(a) Calculer la position du centre de gravité. Pour cela déterminer d’abord la surface
S puis les moments statiques JOz et JOy de la section
Réponses
S1 S2 S3 e e
JOz + JOz − JOz 2
(h2 + be − e2 ) 2
(he + b2 − e2 )
yG = = zG =
S1 + S2 − S3 e (h + b − e) e (h + b − e)

A.N.

S = 162, 75 mm2 yG = 10, 3 mm zG = 5, 3 mm

(b) Déterminer les moments quadratiques par rapport à l’origine du repère IOz ,
IOy , et IOyz puis par rapport au centre de gravité IGz , IGy et IGyz - utiliser le
théorème de Huygens par exemple. On rappelle (Eq. 7.32), à toutes fins utiles,
que ce théorème permet d’exprimer le tenseur d’inertie d’un solide par rapport
Théorie des poutres droites 54

à n’importe quel axe en connaissant le tenseur d’inertie exprimé en son centre


de gravité calculé par rapport à un axe colinéaire. Pour la section de poutre
étudiée ici, la relation inverse donne donc :
 2

zG −yG zG
IG = IO −S 2
 (2.9)
(RG ) (RG ) −yG zG yG
(RG )

Réponses
S S S e
IOz = IOz1 + IOz2 − IOz3 = (h3 + be2 − e3 )

3
e

IOy = (he2 + b3 − e3 )


3
e2 2
I
Oyz = (b + h2 − e2 )
4
A.N.

IOz = 31, 735 mm4 IOy = 9, 712 mm4 IOyz = 3, 943 mm4

3 3

IGz = (b − e)e + eh − yG
2
S

3
eb3 + (h − e)e3

2
− zG

IGy = S

3
e2
−IGyz = − (b2 + h2 − e2 ) + yG zG S

4
A.N.

IGz = 14, 475 mm4 IGy = 5, 143 mm4 IGyz = −4, 936 mm4

(c) Calculer les directions principales et valeurs des moments principaux pour ex-
primer le tenseur central d’inertie.
Réponses A.N. On associe la plus petite valeur propre Imin au premier vecteur

− →

propre z10 et la plus grande valeur propre Imax au second vecteur propre z20 :
!

−0 0, 396 →
− →
−0 →−0 →

α2 = →−
\
z2 (G,−
→ z) =
y ,−
→ et z10 (G,−
→ z ) / = z1 · z2 = 0
y ,−
→ z G z20 = 23, 3˚
0, 918

max = 16, 601 mm4
I
Imin = 3, 016 mm4

2. Afin de comparer ces prévisions avec le comportement réel de la poutre, réaliser les
mesures suivantes avec le montage mis à disposition :
(a) Mesurer le déplacement l’extrémité de la poutre (déplacement latéral et/ou le
déplacement le long de l’axe portant l’effort), en fonction de l’angle de la solli-
citation par rapport à la poutre. En déduire les directions principales d’inertie.
Théorie des poutres droites 55

(b) Comparer les grandeurs prévues par la théorie des poutres appliquée au cas de
la poutre console prenant en compte la flexion déviée, aux valeurs relevées avec
le TP de poutre console.

F x3 x2
 
IGy
v(x) = −l 2
E 6 2 IGy IGz − IGyz
F x3 x2
 
IGyz
w(x) = −l 2
E 6 2 IGy IGz − IGyz

Sur la Figure 2.14 est représenté la norme du déplacement de l’extrémité de la poutre




console en fonction de l’angle α = y 0 G→ −
\
y entre la direction de la sollicitation et la direction

−0
principale y (voir Figure 2.13). On vérifie bien que le déplacement maximum correspond à la
plus petite valeur propre Imin associée à l’angle α = −66, 7˚, et que le déplacement minimum
correspond à la seconde valeur propre Imax associée à l’angle α = 23, 3˚. On rappel que la
rigidité en flexion d’une poutre s’exprime par rapport à l’axe perpendiculaire au plan contenant
la déformée - Mfz = f (v 00 , Iz ).
Norme du déplacement de l'extrémité

23,3° -66,7°

angle entre la sollicitation et le repère principal dela section

Figure 2.14: Déplacement de l’extrémité de la poutre console en fonction de l’angle α entre


la sollicitation et la direction principale de la section en L de la Figure 2.13.

Les évolutions des déplacements correspondants au problème résolu sont également


représentés sur la Figure 2.15, en coordonnées polaires.
Pour information, les industriels fournissent des données géométriques pour les profils
qu’ils commercialisent. La Figure 2.16 présente un exemple de données pour un profilé en L,
fourni par exemple par Arcelor-Mittal.
Théorie des poutres droites 56

y y

3 3

2 2

1 1

0 0
x x

−1 −1

−2 −2

−3 −3

−3 −2 −1 0 1 2 3 4 −3 −2 −1 0 1 2 3 4

(a) (b)

Figure 2.15: Représentation polaire des déplacements à l’extrémité de la poutre console à


section en L - les échelles sont les mêmes : (a) déplacement selon l’axe d’application de
l’effort, et (b) dans la direction perdendiculaire.

Figure 2.16: Données pour une poutre à section en L - source Arcelor-Mittal.


Théorie des poutres droites 57

2.2.4 Sollicitation composée


Expliciter l’état de contraintes (σxx ,σxy ) qui règne dans la poutre ci-dessous (Figure
2.17) sollicitée en flexion-tension.

Figure 2.17: Poutre sollicitée en flexion et en tension

2.2.5 Torsion
La torsion est une sollicitation rencontrée trés fréquemment, et plus spécialement dans
les arbres de transmission par exemple. Ces arbres sont dans la plus grande partie des ap-
plications de section cylindrique à section circulaire, creuse ou pleine. Les sections carrées
remplissent la même fonction mais servent le plus souvent à transmettre les moments de tor-
sion en évitant d’utiliser des accouplements. En tenant un raisonnement analogue à celui qui
permet d’expliquer l’avantage des poutres en I en flexion, on comprend bien qu’en torsion les
fibres matérielles périphériques sont les plus sollicitées. Dans l’exercice ci-dessous, on démontre
sur un cas simple l’intérêt d’utiliser des tubes creux pour transmettre des couples.
On rappel que les expressions des contraintes de cisaillement font apparaître les contri-
butions des termes de membrane et des termes de courbure, appelée torsion dans ce cas
particulier (Eqs. 1.26). C’est le différentiel de contraintes de cisaillement de part et d’autre du
centre de gravité qui va induire de la torsion. Ceci est illustré sur la Figure 2.18, d’abord (Fi-
gure 2.18-a) dans un repère cylindrique Rc = (G, → −
x ,→
−er , →
−eθ ) où ces contraintes sont contenues

− →

dans un plan (G, x , er ) invariant par rotation autour de l’axe de la poutre, et également dans
une section prismatique (Figure 2.18-b) où la torsion apparaît par exemple si des contraintes
de cisaillement σxy (x, M ) opposées en intensité règnent en ± 2b .→ −
z dans le plan (G, → −
x ,→
−y ).
Pour simplifier les calculs, dans le repère cylindrique les contraintes de cisaillement σxr (x, r)
s’écrivent :
σxr (x, r) = Gm t
xr (x) + Gxr (x, r)
Théorie des poutres droites 58

y (x2)

Mt
x
M dω
x G
G
r (x3)
er γxr M' z

eθ dx dx

(a) (b)

Figure 2.18: Longueur élémentaire de poutre soumise à de la torsion : (a) section circulaire,
et (b) section prismatique.

En considérant une sollicitation de torsion pure, notons la rotation entre 2 sections voisines
r1 .→

x = ω.→ −
x et la déformation correspondante txr (x, r) = γxr (x, r), tels qu’illustrés sur
la Figure 2.18-a. La déformation de cisaillement induite par la torsion peut alors s’exprimer
géométriquement sur ce tronçon de poutre de longueur dx, en calculant la longueur de l’arc de
cercle caractérisant le déplacement d’un point M initial vers un point M 0 final, à une distance
r du centre de gravité G, pour une rotation élémentaire dω. En petites perturbations, on a la
relation :
γxr (x, r) dω
= .
r dx
Comme dans le cas de la flexion, il suffit alors d’exprimer la courbure en fonction des grandeurs
agissant à l’échelle de la poutre, et d’introduire cette courbure dans la loi de comportement
locale du matériaux en cisaillement pour obtenir l’expression de la contrainte de cisaillement
locale, en torsion pure, en fonction du moment de torsion et du moment quadratique polaire :

dω dω Mt (x)
Mt (x) = GI0 σxr (x, r) = Gγxr (x, r) = G r= r
dx dx I0 (x)

Dans le cas plus général où la poutre est soumise à un effort tranchant, comme en flexion
la contrainte totale est la somme des contraintes de cisaillement de membrane et de flexion
(torsion).
Passons à une application du problème de torsion. Soit une poutre de section circulaire,
soumise à un moment de torsion d’intensité Mt en son extrémité l et encastrée à son autre
extrémité O (Figure 2.19). Cette poutre de moment polaire I0 est constituée d’un matériau
homogène isotrope élastique linéaire de module de cisaillement G.

1. Déterminer pour les 2 sections considérées (diamètres D1 et D2 extérieur / kD2


intérieur) les moments d’inertie polaires I01 et I02 .
2. Calculer pour ces 2 sections les contraintes de cisaillement dans les arbres.
Théorie des poutres droites 59

Figure 2.19: Poutre sollicitée en torsion. 2 sections circulaires sont considérées (a) pleine et
(b) creuse.

3. La contrainte limite τ0 est la même pour les 2 sections. Déterminer le rapport de


leur diamètre puis de leur masse.
4. Calculer ces rapports des diamètres et des masses pour k = 0, 7.

Comme dans le cas des sections en I et sandwich en flexion, on établit que les sections
creuses (Figure 2.19-b) en torsion offrent un gain de masse conséquent pour une diminution
acceptable de la rigidité (Figure 2.20-a). D’autre part, l’augmentation du diamètre nécessaire
pour obtenir une rigidité de torsion équivalente à une section pleine est très faible.
Théorie des poutres droites 60

(a)

(b)

Figure 2.20: Section creuse en torsion : (a) rigidités et masse relativement à une section pleine
et (b) augmentation du diamètre pour une contrainte de cisaillement identique à une section
pleine .
Théorie des poutres droites 61

2.3 Bilan
Au travers de ces applications, nous avons mis en évidence 2 façons de résoudre les
problèmes de RdM :
— utiliser le transport des torseurs des efforts extérieurs pour exprimer le torseur des
efforts internes dans les sections. Les contraintes peuvent alors être obtenues direc-
tement à partir de ces efforts internes, et les déplacements sont connus en intégrant,
— résoudre complètement les équations d’équilibre intérieur de la poutre en utilisant
les conditions aux limites cinématiques, les conditions d’équilibre au bord, et les
équations de discontinuités.
Dans le premier cas, la connaissance des efforts extérieurs réduit les développements
nécessaires à la résolution, mais l’équilibre extérieur doit être connu et peut se révéler indéter-
miné dans certains cas, par exemple dans les cas hyperstatiques où les liaisons avec l’extérieur
sont surabondantes. Ces cas sont traités dans le chapitre suivant. Dans le second cas, les
développements peuvent rapidement devenir lourds mais permettent de résoudre certains pro-
blèmes dont l’équilibre extérieur n’est pas connu. Finalement, au cours des exemples traités,
les problèmes ont pu être résolus de manière optimale en mixant ces 2 méthodes.
Dans ces exemples, la sollicitation de tension a d’abord été abordée, et ne pose pas de
problème majeur. Dans le cas de la flexion on a pu observer que le cisaillement peut être négligé
dans la plupart des cas, et que par conséquent une théorie de Bernoulli peut être utilisée en
première approximation. Cette théorie, si elle ne permet pas de prendre en compte la rigidité de
cisaillement, permet tout de même de caractériser l’état de contrainte de cisaillement. Quant à
la rigidité de flexion, l’utilisation de sections creuses ou de sandwichs est tout à fait pertinente
puisque ce sont les fibres matérielles les plus éloignées de l’axe neutre qui donnent la rigidité
de flexion de la section. Il en va de même dans le cas de la torsion. Enfin, pour les sollicitations
combinées, compte-tenu des hypothèses de réversibilité et de linéarité de la RdM, les effets
des sollicitations sur les différents axes se superposent.
3.
Théorèmes énergétiques -
Hyperstatisme

Sommaire
3.1 Rappels - calcul du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
3.1.1 Simplifications dans le cadre de la RdM . . . . . . . . . . . . . 63
3.1.2 Travail dans le cas des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.2 Théorèmes énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3.2.1 Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti . . . . . . . . . . 66
3.2.2 Théorème de Castigliano . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.3 Hyperstatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
3.4 Résolution des systèmes hyperstatiques . . . . . . . . . . . . . 73
3.4.1 Principe de superposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
3.4.2 Théorème de Ménabréa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

62
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 63

Comme nous l’avons vu dans les exemples précédents, la résolution complète des
problèmes de plus en plus réalistes devient vite lourde. Qui plus est, la connaissance du champ
de déplacement complet n’est pas toujours nécessaire, par exemple pour le dimensionnement
qui se base sur les contraintes maximales rencontrées dans la structure. Il existe des méthodes
pour connaître ponctuellement une information telle qu’un déplacement, et donc une
contrainte. La connaissance de cette information peut également s’avérer nécessaire dans le
cas des problèmes ’ouverts’ tels que les cas hyperstatiques par exemple, dans lesquels les
seules équations d’équilibre extérieur ne sont plus suffisantes pour la résolution.

Les théorèmes énergétiques permettent de connaître assez rapidement des informations


ponctuelles. Ils se basent sur le bilan énergétique du problème posé, ce bilan étant fortement
simplifié dans le cadre des hypothèses de la résistance des matériaux : pas de dissipations,
cadre de travail statique et hypothèse des petites perturbations, matériaux élastiques linéaires
(homogènes). Ces techniques sont basées sur la connaissance du bilan énergétique du système
étudié, via le calcul du travail produit par les efforts extérieurs.

3.1 Rappels - calcul du travail


Considérons, pour des raisons de simplicité, un système d’efforts appliqué sur la frontière
∂ΩF d’un solide, tel que dans le cas général représenté sur la Figure 1.1 page 2 par exemple.


Le travail produit entre deux instants t1 et t2 par ces efforts F d dans le champ de vitesse

− →
u̇ (−
x ) est défini par :
Z t2 Z 

− →
− →
−d → − →
− → −
W ( u ( x , t)) = F ( x , t) · u̇ ( x , t) dΩF dt (3.1)
t1 ∂ΩF

3.1.1 Simplifications dans le cadre de la RdM


Dans le cadre de la RdM, l’intensité des efforts est indépendante du temps, leur point
d’application peut par contre être en mouvement. Toutefois, dans le cadre de l’hypothèse des
petites perturbations, cette position est confondue avec la position dans l’état initial (sauf
dans de le cas des problèmes non-linéaires géométriques sur lequel nous reviendrons dans le
chapitre 4). Le champ cinématique est de plus la dérivée par rapport au temps du champ des

− −
déplacements : u̇ (→ x , t) = dtd →

u (→
−x , t). On peut alors calculer le travail fournit par le système
d’efforts entre l’état initial et l’état final, états qui peuvent être définis par les positions du
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 64

système à ces instants. Pour un effort ponctuel, ce travail s’écrit :


Z t2 Z −

x (t2 )

− →
− →
−d →− →
− → − →
−d → −
→−
W ( u ( x ), t)) = F ( x , t) · u̇ ( x , t) dt = F (−
x ) · du(→
x , t)
t1 −

x (t1 )

− − →
− − →
↓ en HPP et si →

x (t1 ) = 0 : →
x (t2 ) = →

x (t1 ) + →

u (→

x (t1 )) = 0 + →
u (−
x)



u (−

x)

−d →
Z
= F (−
u ) · d→

u
0

3.1.2 Travail dans le cas des poutres


Dans le cas des poutres, les efforts extérieurs sont définis par des efforts et des moments,
respectivement résultante et moment du torseur des actions extérieures {F(x1 )}(M ) appliqué
sur la ligne moyenne, tel que défini dans l’équation 1.9 page 13 par exemple. Dans ce cas,
le travail des efforts extérieurs s’exprime en faisant intervenir le torseur des déplacements de
la ligne moyenne {U}(M ) tel que défini dans l’équation 1.6 page 8. On peut alors calculer le
travail fourni par le système d’efforts entre l’état initial et l’état final défini par le torseur des
déplacements :
Z U (x1 ) Z −
→r (x1 ) Z −

u (x1 )

→→ − →
− →
− →
W (U(x1 )) = {F(U)}(M ) ·{dU}(M ) = M ( r )·d r (x1 )+ R (−
u )·d→

u (x1 )
0 0 0
(3.2)
À partir de cette dernière forme du travail (Eq. 3.2), on peut alors calculer le travail
d’un système d’efforts. On distingue deux cas, selon que les efforts dépendent des déplacements
ou non.

Efforts indépendants des déplacements

Le calcul est direct et se ramène au produit scalaire des efforts et des déplacements de
leurs points d’application. Par exemple, pour un système discret de n efforts et n moments,
on a : n 
→− → −
→− →
W (U(→ − F (−
x )·→−
u (→
−x ) + M (→x )·− r (→−
X 
x )) = i i ix) i i (3.3)
i=1

Efforts dépendants des déplacements (et inversement)

S’il existe une relation entre les efforts et les déplacements, cette relation ne peut être
que linéaire en RdM compte-tenu du cadre HPP et de l’élasticité linéaire. Dans ce cas le calcul
du travail fait apparaître un coefficient 21 provenant de l’intégration de cette relation linéaire.
Le cas typique de base est celui d’un ressort unidimensionnel linéaire de rigidité k qui fournit
un effort de rappel proportionnel au déplacement imposé à son extrémité libre u(x) :
Z u(x)
1
W (u(x)) = k ξ dξ = k u(x)2
0 2
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 65

— pour un ensemble d’efforts extérieurs, on peut définir un tenseur de rigidité, noté


Le , reliant l’effort appliqué et le déplacement résultant du point d’application, et
de la même manière un tenseur de compliance, noté Me , reliant ce déplacement à
l’effort imposé correspondant. Ces tenseurs seront précisés dans la partie suivante.
Pour un système d’efforts ponctuels discrets, le travail s’écrit :
n
1 X −→− −
→− 
W (U(→

x )) = Fe (→
xi ) · Mie · Fe (→
xi ))
2 i=1
n (3.4)
1 X →−
u (→xi ) · Lie · →
− −
u (→


= xi ))
2 i=1

Ce calcul du travail des efforts extérieurs s’étend sans difficulté aux efforts répartis
et moments ponctuels et répartis.
— pour les efforts intérieurs, une relation similaire a été définie préalablement par la
relation 1.16 dans le cas des poutres. Comme il s’agit de quantités internes à la
poutre, la relation entre le torseur des efforts intérieurs (contraintes intégrées sur
la section) et les déformations aux points correspondants, c’est à dire les dépla-
cements par unité de longueur de la poutre, est appelée loi de comportement :
{τ (x1 )} = [L] {(x1 )}. Le travail produit par ces efforts dans le champ de dépla-
cement correspondant est alors appelé énergie de déformation interne ou élastique
dans le cas de l’élasticité. Dans le cas des poutres, en utilisant la loi de compor-
tement définie en 1.15, pour une section symétrique, cette énergie de déformation
par unité de longueur s’écrit :
d W (→−u (→

x )) 1 →
− −

R (x1 ).→
−e (x1 ) + M (x1 ).→


= κ (x1 )
d x1 2
(3.5)
1 N2 T22 T32 Mt2 Mf22 Mf23
 
= + + + + +
2 ES GS GS GI0 EI2 EI3

Coefficients d’influence

Certaines démonstrations des théorèmes énergétiques que nous allons étudier sont fa-
cilitées en recourant à des coefficients dits coefficients d’influence, permettant de relier les
efforts imposés et les déplacements résultants en tout point du solide sollicité. Ces coeffi-
cients se définissent intuitivement, par analogie avec les ressorts, tout comme dans le cas de
la méthode des éléments finis.


Par exemple si on applique un effort F1 au point M1 d’un solide, cet effort induit un
déplacement de ce point d’application. Le travail effectué par cet effort dans le déplacement
de son point d’application étant le produit scalaire de l’effort et du déplacement résultant,
considérons simplement le déplacement dans la direction de l’effort imposé. Ce déplacement
est relié à l’effort par le coefficient d’influence u11 qui a donc la dimension d’une souplesse
(’inverse de la raideur’) :
u1 (M1 ) = F1 u11
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 66

On en déduit alors facilement l’expression du travail de cet effort F1 dans le déplacement u1 :


1 1
WF1 = F1 u1 = F12 u11
2 2
Ceci se généralise aisément si le déplacement en un point Mi dans la direction de l’effort Fi
correspondant du solide considéré, résulte de l’application d’un ensemble de n efforts Fj :

n
X
ui = uij Fj
j=1

Donc le travail effectué par l’effort Fi dans ce déplacement est :

n
1 X
WFi = Fi uij Fj
2 j=1

Finalement, le travail développé par l’ensemble des n efforts Fi dans le déplacement résultant
est : n n n
1X 1X X
WT = Fi ui = Fi Fj uij (3.6)
2 i=1 2 i=1 j=1

On montrera ci-dessous la symétrie des coefficient uij qui forment, dans une écriture
vectorielle de discrétisation du système, une matrice dite matrice de souplesse symétrique et
définie positive.

3.2 Théorèmes énergétiques


Compte-tenu des hypothèses simplificatrices de la RdM, notamment concernant d’une
part les vitesses de chargement supposées suffisamment lentes pour ne pas engendrer de
dissipations, et d’autre part les matériaux élastiques, le bilan énergétique est extrêmement
simple : le travail fourni par les sollicitations extérieures est intégralement stocké en énergie de
déformation élastique à l’intérieur de la structure se déformant sous le chargement imposé. Ceci
permet, connaissant le système des actions extérieures, de déduire des informations précieuses
quant à l’état de déformation interne de la structure.

3.2.1 Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti


L’idée de base de ce théorème consiste à utiliser le principe de superposition : quelque
soit l’ordre d’application des actions extérieures, l’état final du système est identique (hypo-
thèses de linéarités géométriques et matériaux). L’utilisation de ce théorème fait souvent appel
à des chargements fictifs, sur la géométrie étudiée, de façon à faire travailler le terme inconnu
recherché (souvent un déplacement).
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 67

Illustration sur un exemple

Considérons l’exemple de la poutre console représenté sur la Figure (1) du Tableau 3.1
page 68, sollicitée en flexion par un effort −FC appliqué en C à l’abscisse lC . Les caractéris-
tiques de la poutre sont celles utilisées jusqu’ici : l, E, S, I. On souhaite connaître la flèche
v(x = l) = vB de l’extrémité de cette poutre. La résolution simultanée des deux équations
différentielles du quatrième ordre caractérisant l’équilibre intérieur de ce problème conduit à
l’expression de la flèche de l’extrémité de cette poutre :

FC lC2
vB = (lC − 3l))
6 EI
Cette résolution nécessite des calculs assez longs. Par contre, ce résultat peut être déterminé
presqu’immédiatement en montrant que les coefficients d’influence vBC = vCB . C’est-à-dire
que le déplacement du point B induit par l’application d’un effort unitaire en C est identique
au déplacement du point C lorsque qu’un déplacement unitaire est appliqué en B. L’intérêt
étant ici que ce dernier cas de chargement est connu et déjà résolu (cf exercice Flexion 1).
Considérons pour cela le cas de cette poutre que l’on charge par l’effort FC et également
par un effort terminal FB qui permet de faire ’travailler’ le terme inconnu recherché vB (Tab.
3.1). On vient superposer un problème fictif associé sur le chargement réel.
Dans le premier cas (Tab. 3.1-(1) et (1’)), on sollicite la poutre console successivement
par l’effort FC en C (1) puis par un effort terminal FB en B (1’). Le travail total W1T ot est la
somme de trois termes, le premier dû au travail de l’effort C dans le déplacement résultant de
son application (1), le second est le travail produit par l’effort B dans le déplacement résultant
de son application (1’), et enfin le troisième terme correspond au travail produit par l’effort
FC dans le déplacement résultant de l’application de FB (1’). On notera que dans ce dernier
terme, le déplacement du point d’application C ne dépend pas de l’effort FC . Dans le second
cas (Tab. 3.1-(2) et (2’)), on considère la même poutre console chargée cette fois-ci d’abord
par l’effort terminal FB puis par l’effort FC . De part le principe de superposition, le travail
total doit être identique pour ces deux scénari. Il en découle que les termes suivants ne peuvent
être qu’identiques :

W1T ot = W2T ot ⇔ FB .vBC .FC = FC .vCB .FB ⇒ vBC = vCB

Finalement, connaissant la flèche du point C sous un chargement unitaire appliqué en


B, on obtient directement la flèche du point B sous un chargement quelconque appliqué en C.
On a établi précédemment que pour la poutre console telle que représentée sur la Figure 2.6
page 41, le déplacement v § (x) de tout point de cette poutre sollicitée par un effort terminal
x2
d’intensité −F est v § (x) = F6EI (x−3l). Donc dans notre cas, on obtient directement la flèche
pour un effort d’intensité −FC :

FC lC2
v § (x = lc ) = (lC − 3l) = vB
6EI
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 68

(1) (2)

1 1
W1 = FC2 .vCC W2 = FB2 .vBB
2 2

(1’) (2’)

1 1
W10 = FB2 .vBB + FB .vBC .FC W20 = FC2 .vCC + FC .vCB .FB
2 2

1 1 1 1
W1T ot = FC2 .vCC + FB2 .vBB + FB .vBC .FC W2T ot = FB2 .vBB + FC2 .vCC + FC .vCB .FB
2 2 2 2

Table 3.1: Illustration du théorème de Maxwell-Betti

ce qui correspond bien au résultat qu’on peut obtenir en résolvant le problème par les équations
d’équilibre. On notera toutefois que ce résultat est une information ponctuelle qui ne possède
pas l’attrait de la solution complète permettant de connaître le déplacement en tous points et
surtout l’état de contrainte le long de l’abscisse.

Exemple 2

Considérons un second exemple représenté sur la Figure 3.1-(a). On cherche le dépla-


cement du point central D d’une poutre sollicitée en flexion trois points par un effort situé à
une distance lC < 2l . De nouveau, la résolution de ce problème est longue. On connaît par
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 69

ailleurs la solution d’un problème de flexion trois points classique avec un effort central. On
peut donc utiliser cette sollicitation fictive pour faire ’travailler’ le déplacement central (Figure
3.1-(b)).

Figure 3.1: Poutre en flexion trois points avec chargement excentré : (a) problème réel et (b)
problème fictif associé.

L’expression v § (x) de la flèche pour la flexion trois points avec chargement central a été
établie dans l’exemple Flexion 2 du chapitre précédent. On a donc immédiatement la solution
de notre problème de flexion trois points excentré :
F lC
vD = v § (x = lC ) = F.vDC = 3l2 − 4lC2

48EI

Exemple 3

La poutre console étudiée précédemment est maintenant sollicitée par 3 efforts ponc-
tuels F1 , F2 et F3 , tel que présenté sur la Figure 3.2. On cherche la flèche à l’extrémité de
cette poutre v(x = l) = vB . La résolution des quatre équations d’équilibre interne conduit
à déterminer 16 constantes d’intégration. Comme dans le premier exemple, en utilisant le
chargement fictif associé appliqué en B, on peut résoudre très facilement ce problème.
La flèche v § (x) étant connue pour la poutre console chargée à son extrémité, on
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 70

Figure 3.2: Poutre console sous 3 charges.

détermine aisément les coefficients d’influence de notre problème et donc la flèche totale vB :

l12
F1 .vBA1 = F1 (l1 − 3l)
6 EI
+
l22
F2 .vBA2 = F2 (l2 − 3l)
6 EI
+
l32
F3 .vBA3 = F3 (l3 − 3l)
6 EI

1
vB = (F1 l12 (l1 − 3l) + F2 l22 (l2 − 3l) + F3 l32 (l3 − 3l))
6 EI

3.2.2 Théorème de Castigliano


Ce théorème, d’une utilisation triviale, fournit un précieux outil pour traiter les pro-
blèmes de RdM, notamment les problèmes hyperstatiques sur lesquels nous reviendrons plus
loin dans ce document. Son utilisation nécessite le calcul de l’énergie de déformation du sys-
tème. C’est en minimisant cette énergie de déformation qu’une relation est établie entre un
effort, respectivement un moment, et le déplacement du point d’application dans la direction
de cet effort, respectivement l’angle de rotation correspondant. En reprenant l’expression du
travail proposée dans l’équation 3.6 qui permet de faire apparaître clairement toutes les dépen-
dances des efforts par rapport aux déplacements, on démontre très aisément le théorème de
Castigliano à l’aide des coefficients d’influence. La minimisation de l’énergie de déformation,
ou du travail des efforts extérieurs donnés, par rapport à un effort par exemple donne :
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 71

n n
!
∂WT ∂ 1X X 1 ∂
= Fi Fj uij = (F 2 u11 + + . . . + F22 u22 + Fn2 unn + 2F1 F2 u12 + . . .)
∂Fi ∂Fi 2 i=1 j=1
2 ∂Fi 1
= F1 u1i + F2 u2i + . . . + Fi uii + . . . + Fn uni
Xn
= Fk uik
k=1
↓ par définition
= ui

soit le déplacement du point d’application de cet effort. Comme l’énergie de déformation


interne est égale strictement au travail produit par les efforts extérieurs, on a finalement les
relations suivantes :
∂W (F1 , . . . , Fn ) ∂Wint ({U})
= = ui
∂Fi ∂Fi
Remarque : il faut, lorsqu’on utilise l’énergie de déformation du système, faire apparaître tous
les efforts extérieurs, même si un ou plusieurs peuvent s’exprimer en fonction des autres.

L’application de ce théorème au cas de la poutre console sollicitée en son extrémité


(Figure 2.6 page 41) permet de déterminer rapidement la flèche de l’extrémité. Il faut noter
que l’effort est négatif et donc que pour obtenir le déplacement dans la direction positive, il
faut prendre l’opposé de la minimisation de l’énergie de déformation par rapport à l’effort F :

l 2
Z l Z l
d2 v
Z 
1 1 1
Wint = EI dx = 2
M (x) dx = [F (x − l)]2 dx
2 0 dx22 EI 0 2 EI 0
3
∂Wint ∂Wint −F l
,→ v(x = l) = =− =
∂(−F ) ∂F 3 EI

Bien évidemment, dans ce cas, le travail des efforts extérieurs ne peut être utilisé puisque le
déplacement recherché est nécessaire pour le calcul de ce travail. En pratique, on recourra au
travail des actions extérieures essentiellement dans le théorème de Ménabréa qui repose sur
la nullité du travail produit par les efforts de réactions. Ceci est présenté plus loin dans ce
document.

3.3 Hyperstatisme
Un système est dit hyperstatique si certaines liaisons sont surabondantes, c’est-à-dire
si leur suppression ne remet pas en cause l’équilibre statique du système, et les mouvements
de corps rigides sont supprimés. Le degrés d’hyperstatisme est défini par le nombre de liaisons
surabondantes qu’a le système avec l’extérieur. Ceci se traduit par un nombre insuffisant
d’équations pour résoudre le problème de l’équilibre statique extérieur : q = n − p avec q le
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 72

degré d’hyperstatisme, n le nombre de liaisons avec l’extérieur, et p le nombre d’équations de


la statique.
De nombreux exemples existent dans la pratique, les systèmes isostatiques étant très
peu nombreux dans la vie courante (pourquoi mettre systématiquement quatre pieds aux
tables, alors qu’on sait pertinemment que la patte surabondante doit être réglable ! !). Dans
notre cas des poutres, on trouve souvent des arbres de transmission reposant sur plus d’appuis
que nécessaires, ceci bien souvent dans un but de sécurité, ou de réduction des dimensions
(réduction des portées) ou encore de modification du spectre des vibrations qui est lié à la
longueur libre. Pour ce qui nous concerne, voici sur la Figure 3.3 deux exemples de problèmes
de poutres hyperstatiques d’ordre 1, la liaison surabondante est représentée en pointillés.

Figure 3.3: Problèmes hyperstatiques d’ordre 1 : exemple 1 (a) et exemple 2 (b).

Considérons par exemple le cas de la Figure 3.3-(a). Si on veut caractériser l’équilibre


statique global de la poutre, on a à disposition les équations de la statique, et comme inconnues
les efforts appliqués sur la poutre :
— bilan des efforts  donnés
en C
 et en E :  
 0   0 

 
 
 

−F −F

 
 
 


 
 
 

 FC  FE
τ ext→ S (C) = τ ext→ S (E) =

 
 
 


 
 
 

 0  0

 
 
 

 
(C) (E)
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 73

— bilan des efforts de


réaction
 appuis en Mi où Mi = {A, B, D} :
aux
 0 

 


Ri

 


 

 Ri
τ réact→ S (Mi ) =

 


 

 0

 


(Mi )
Les réactions constituent donc les inconnues, et sont donc au nombre de 3. Pour résoudre le
problème, on dispose des équations de la statique qui caractérisent l’équilibre extérieur :
X→ − 0
— forces : F ext→ S = = 0

RA − F + RD − F + RB
X− → −→ X −−→  FM
— moments : M (−

F ext→ S ,P )
= MP + P M ∧ τ ext→ S (P ) avec {M, P } ∈
{A, B, C, D, E} et M 6= P . Quelque soit le choix de M et P pour calculer les
moments, on a toujours une seule équation.
Au final, on a donc 2 relations pour 3 inconnues. Il faut trouver une équation sup-
plémentaire pour caractériser la solution de l’équilibre extérieur. C’est à ce niveau que les
théorèmes énergétiques peuvent être utilisés idéalement, comme nous le verrons ci-dessous.
Lorsque cette équation supplémentaire est trouvée, il suffit alors d’exprimer les moments de
flexion, puis la flèche par intégration de la ligne élastique par exemple.

On peut toutefois remarquer que si l’équilibre extérieur ne peut être caractérisé pour ces
cas hyperstatiques, en revanche l’équilibre intérieur peut être vérifié. Par exemple, la résolution
de l’exemple 2 (Figure 3.3) est possible à partir des équations d’équilibre intérieur, en recourant
aux quatre équations de discontinuité qui permettent de déterminer quatre des huit constantes
résultant de l’intégration des deux équations différentielles du quatrième ordre pour les deux
zones. Les constantes restantes étant déterminées par les 2 conditions cinématiques et statiques
aux bords de la poutre, soit 4 conditions :

0 < x ≤ 2l l
2
<x≤l

11 x3 5 x3 5 lx2 l3
   
F 2 F 2
v(x) = − 3lx v(x) = − + −l x+
32 EI 3 8 EI 12 4 6

3.4 Résolution des systèmes hyperstatiques


La résolution des systèmes hyperstatiques est comparable à la résolution d’un système
isostatique lorsque le nombre d’équations suffisant est explicité, voir Tableau 3.2. On a deux
moyens de déterminer ces équations supplémentaires qui sont les théorèmes énergétiques, et
le principe de superposition lui-même.
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 74

système ISOSTATIQUE système HYPERSTATIQUE

→ résolution complète → résolution complète

- équilibre intérieur → M (x) et v(x) - équilibre intérieur + éq. de (dis)continuité


limitée et fastidieuse → M (x) et v(x)

- équilibre global → M (x) → intégration → v(x) - équilibre global IMPOSSIBLE


souvent PLUS RAPIDE +
th. énergétique ou superposition
| {z }
,→ M (x) → intégration → v(x)

→ une donnée → une donnée


théorème énergétique - RAPIDE théorème énergétique

Table 3.2: Synthèse de la résolution d’un problème de poutre en flexion.

3.4.1 Principe de superposition


Dans notre cadre linéaire (HPP et élasticité linéaire), le problème hyperstatique peut
être décomposé en problèmes isostatiques dont les solutions sont connues. Ensuite, par appli-
cation du principe de superposition, la flèche du problème initial est déterminée.
Dans le cas de l’exemple 1, présenté sur la Figure 3.3-(a), on superpose une poutre
soumise à de la flexion quatre points (Figure 3.4-1), et la même poutre en flexion trois points
soumise à un effort central d’intensité (Figure 3.4-2) RD égal à la réaction produite par l’appui
central du problème initial. La flèche totale étant la superposition de ces deux problèmes, le
déplacement au centre doit être nul pour satisfaire la condition cinématique imposée par l’appui
central. Cette condition conduit finalement à une relation permettant de déterminer l’effort
de réaction, et donc par suite d’expliciter les moments et donc les flèches :
l 11 F l3 RD l3 11 F
v(x = ) = vD = vD1 + vD2 = − + = 0 ⇒ RD =
2 384 EI 48 EI 8
Pour l’exemple 2 le même type de décomposition peut être utilisé (Figure 3.5). L’effort
de réaction est déterminé de façon similaire à l’exemple 1 :

5 F l3 RB l3 5F
v(x = l) = vB = vB1 + vB2 = − + = 0 ⇒ RB = (3.7)
48 EI 3 EI 16

3.4.2 Théorème de Ménabréa


Un des inconvénients majeurs de cette technique de superposition est la connaissance
des problèmes isostatiques simples. Il existe, avec les théorème énergétiques, un moyen plus
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 75

Figure 3.4: Décomposition de l’exemple 1 en problèmes isostatiques de solution connue.

Figure 3.5: Décomposition de l’exemple 2 en problèmes isostatiques de solution connue.

rapide de déterminer une de ces informations sans connaître la solution des problèmes fictifs
introduits. Dans le cas des appuis par exemple, le théorème de Ménabréa est commode à
utiliser. Il s’agit simplement d’un cas particulier du théorème de Castigliano où le déplacement
déduit de la minimisation de l’énergie déformation est nul car cette minimisation a lieu par
rapport à des efforts de réaction dont le travail est nul dans le déplacement réel cinématique-
ment admissible. Ces efforts de réaction étant considérés comme un chargement extérieur à
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 76

part entière.
L’énoncé du théorème de Ménabréa est le suivant : soit un système hyperstatique (S)
et un système isostatique associé (S0 ). Considérons le système isostatique (S0 ) soumis aux
charges données Fi et aux réactions hyperstatiques Rj . L’état d’équilibre des deux systèmes
étant identique :
W (S) = W (S0 ) = f (Fi , Rj )
Aux points d’appui on a donc, d’après Castigliano :

∂WS0 (Fi , Rj ))
=0
∂Rj

Ce qui nous fournit autant d’équations supplémentaires que d’inconnues hyperstatiques. Dans
le cas de l’exemple 2 représenté sur la Figure 3.3-(b), le système isostatique associé est obtenu
en remplaçant l’appui terminal par un effort de réaction RB pris positif, de façon similaire au
principe de superposition schématisé sur la Figure 3.5. Mais ici les deux efforts F et RB sont
appliqués dans le même temps. L’énergie de déformation se calcule alors à partir des moments
de flexion exprimés dans les deux zones de la poutre à partir de cesdeux efforts :
 0 

 


 RB

 

 

l
— zone 1 : 2 < x ≤ l {τext→ 1 }(M ) =

 


 

 (l − x)RB 

 

 (M ) 




0 




R F

 


 B 

l
— zone 2 : 0 ≤ x < 2 {τext→ 2 }(M ) =

 


 

l

 (l − x)RB − 2 − x F 

 

(M )
L’énergie de déformation peut être calculée, et la minimisation de cette énergie par rapport à
l’effort de réaction nous fournit l’expression de cette réaction :
Z l    2 Z l
1 2 l 1
WS0 (F, RB ) = (l − x)RB − −x F dx + [(l − x)RB ]2 dx
2 EI 0 2 2 EI 2l

l
Z l Z
∂WS0 (F, RB ) 1 2 1 2 l
=0 = (l − x) RB dx − (l − x)( − x)F dx
∂RB EI 0 EI 0 2

5F
RB =
16
ce qui, fort heureusement, correspond bien au résultat obtenu par le principe de superposition
(Eq. 3.7).
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 77
4.
Extension aux problèmes non-linéaires
et dynamiques

Sommaire
4.1 Flambage des poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
4.1.1 Équations non-linéaires de la statique des poutres droites . . . 80
4.1.2 Application à une poutre droite . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
4.1.3 Extension aux calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . 88
4.2 Modes et fréquences propres de vibration en flexion dans les
poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
4.2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
4.2.2 Équations de la dynamique des poutres droites à plan moyen . 90
4.2.3 Vibrations libres - application à la flexion simple . . . . . . . . 91
4.2.4 Vibrations libres - calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . 94
4.3 Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre . . . . . . . . 95
4.3.1 Poutre homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
4.3.2 Poutre sur fondation élastique à deux paramètres . . . . . . . . 101

78
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 79

4.1 Flambage des poutres droites

Introduction générale
En Résistance des Matériaux "classique", il n’existe pas de couplage entre les comporte-
ments en tension, flexion ou encore torsion. Cette hypothèse, qui peut sembler très restrictive,
permet de résoudre un très grand nombre de cas concrets de structures génériques supportant
des charges de fonctionnement courantes. On peut, pourtant, dans certains cas vouloir dimen-
sionner des structures contre des comportements non-linéaires d’une point de vue géométrique.
Par exemple, une surcharge rencontrée ponctuellement (séisme, accident, ..) ne devra pas gé-
nérer des distorsions géométriques susceptibles d’altérer la géométrie et donc les propriétés
de la structure, de telle sorte que le fonctionnement normal sera assuré pour la durée de vie
prévue. Ces distorsions peuvent par exemple être générées, pour des poutres, par une flèche
trop importante qui engendrerait de la torsion appelée déversement.
Pour illustrer ces phénomènes, nous nous concentrerons sur un type de non-linéarité
géométrique, le flambage qui apparaît sous un chargement de compression axiale pour une
poutre ou dans le plan pour une plaque. Lorsque ce chargement déstabilisant augmente et
atteint une valeur dite critique, le comportement va alors devenir instable. Le phénomène
de flambage va apparaître, caractérisé par le passage d’un état où règne principalement de
la compression (terme de membrane), à une configuration où la flexion est prépondérante
(courbure).
Il existe de nombreux exemples de comportements de type flambage, et l’étude de ces
phénomènes instables donne lieu à de nombreuses études tant analytiques que numériques ou
expérimentales. On peut noter que les études analytiques s’appuient sur des outils mathéma-
tiques trés pointus qui permettent par exemple de prévoir le comportement post-bifurqué des
structures simples, c’est-à-dire la (non)stabilité qui caractérise le comportement après l’appari-
tion du flambage. À titre d’illustration, on peut voir sur la Figure 4.1 le mode (la déformée) de
flambage d’origine thermique d’un rail soumis à un gradient de température élevé (-40◦ ;40◦ C
dans les pays nordiques) et le mode de flambage d’un cylindre en compression axiale. Ces 2
structures représentent 2 grands types de comportement qui sont respectivement sur-critiques,
où la structure est encore susceptible de supporter le chargement imposé, et sous-critique où
la ruine de la structure survient dès que l’instabilité se produit.

Le phénomène de flambage

Le cas typique de la règle que l’on comprime illustre parfaitement le phénomène de


flambage (voir Figure 4.2 page 81 et Figure 4.3 page 83). Pour appréhender ce comporte-
ment, traçons l’évolution de la flèche au centre de cette poutre en fonction du chargement
(Figure 4.2). On constate que dans la première partie du chargement, en l’absence de défaut
géométrique, avant le point de bifurcation le chargement augmente sans donner lieu à de la
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 80

(a) (b)

Figure 4.1: (a) Flambage d’origine thermique d’un rail,(b) flambage en compression axiale d’un
cylindre isotrope

flexion. La poutre est en compression et subit un raccourcissement proportionnel au charge-


ment ( ∆ll
= −F
ES
). Lorsque la charge imposée atteint la charge critique Fc , la flexion apparaît
et la flèche tend vers l’infini sans accroissement de l’effort. En réalité, cette flèche est limitée
car la réponse complète charge-déplacement est de type parabolique (Figure 4.2).
D’un point de vue pratique, la rupture de la poutre intervient lorsque la limite à rupture
du matériau est dépassée. C’est donc la caractérisation de cet effort critique qui est primordiale,
car l’apparition de l’instabilité est généralement associée à un état instable. Ceci est d’autant
plus vrai dans les cas d’instabilités sous-critiques rencontrés dans les problèmes de type coque,
où le point de bifurcation correspond à l’effondrement de la structure (cf boîte métallique de
boisson, ou Figure 4.1-b). De plus on voit qu’en présence de défauts (Figure 4.2), la charge
à laquelle apparaît l’instabilité diminue. Donc la réponse de la structure réelle sera majorée
par cette force critiques. L’influence des défauts peut engendrer des baisses trés importantes,
jusqu’à 70 - 80 % de la charge critique. Le dimensionnement des structures vis-à-vis du
flambage est une problème extrêmement délicat, du fait de la nature instable de ce phénomène,
ce qui en fait un des principaux facteurs de dimensionnement.

4.1.1 Équations non-linéaires de la statique des poutres droites


Nous nous intéresserons ici plus particulièrement à la caractérisation analytique du
flambage des poutres droites à plan moyens chargées dans ce plan (en abrégé poutres droites
à plan moyen). La théorie utilisée sera de type Bernoulli, i.e. ne prenant pas en compte le
cisaillement qui est tout à fait négligeable ici. Nous verrons que les charges critiques et les
modes de flambage dépendent à la fois des caractéristiques mécaniques (rigidité = module
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 81

(a)

(b)

Figure 4.2: Poutre libre-libre en compression : (a) montage de flambage rotulé , (b) réponse
charge-déplacement vertical : réponse fondamentale et en présence d’imperfections géomé-
triques.

d’Young E), géométriques (section S et moment quadratique par rapport à → −z , I) de la poutre,


mais également des conditions aux limites du problème traité. Les principes exposés ici restent
valables dans le cas de structures plus complexes, mais la détermination de la charge critique
fait alors appel à des méthodes de résolution numériques.

Origine de la non-linéarité géométrique dans le cas du flambage

Dans la formulation classique HPP, on considère que la géométrie initiale est confondue
avec la géométrie finale, ce qui permet d’écrire toutes les grandeurs dans un repère unique.
Ceci est valable lorsque les déplacements, ou plus rigoureusement les déformations, restent
infinitésimales. Lorsqu’on passe en grandes déformations et/ou en grands déplacements, il faut
prendre en compte la nouvelle géométrie et l’actualiser. C’est cette dépendance de la géométrie
vis-à-vis des déplacements qui induit la non-linéarité géométrique. Numériquement, dans les
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 82

codes de calculs par éléments finis par exemple, on résout le problème de manière incrémentale,
en recalculant à chaque itération les positions de tous les points (→−
xi = −
x−→ → − → −
i−1 + u ( xi )). D’un
point de vue analytique, on essaie de linéariser le problème à résoudre. C’est cette démarche
que nous adoptons ici, en justifiant les hypothèses qui conduisent au problème linéaire associé.
Dans le cas du flambage des structures, on se restreint à prendre en compte un seul
terme non-linéaire, appelé rotations modérées, valable pour des rotations des sections < 10◦ ,
c’est-à-dire à mi-chemin entre les rotations infinitésimales et les grandes rotations. C’est par
ce terme que la déformation de membrane, classiquement reliée uniquement à la déformation
due au déplacement u(→ −x ), va dépendre également de la flèche v(→ −
x ).
On montre qu’en première approximation, le phénomène de flambage se produit à
contrainte constante (Figure 4.2). En effet, pour une poutre inextensible sur appuis simples
(poutre elastica, Euler 1745 ) un accroissement de l’effort de 81 % correspond à l’augmentation
de l’angle de rotation des sections de 0,01 rad (0, 57◦ ), cette rotation étant identique en
tous points pour une courbure constante. On peut donc estimer que la détermination de la
charge critique peut se faire à l’aide d’un modèle linéarisé dans lequel la contrainte axiale est
supposée constante dans la poutre. Bien évidemment, la réponse lorsqu’on s’éloigne du point
de bifurcation, doit être recherchée à l’aide d’un modèle plus raffiné.
D’un point de vue de la MMC, ce terme de rotation modérée est une des composantes
de la partie non-linéaire du tenseur des déformations de Green-Lagrange, notée γ N L (→

u ), que
l’on rappelle ci-dessous :

1 − 1 −
u ) = (∇→
γ(→
− u ) + ∇→
u + ∇t →
− u · ∇t →
− u ) + γ N L (→
u = (→
− −
u) (4.1)
2 2

Déformation de membrane incluant les rotations modérées

Nous avons vu dans le cadre de la statique que les équations des poutres quelconques
peuvent se déduire, via le Principe des Puissances Virtuelles, de la formulation générale de
l’équilibre statique des milieux continus. Dans le cas qui nous intéresse ici, plutôt que de passer
par les déformations des milieux continus, nous allons chercher la forme de la déformation de
membrane qui permet de relier le raccourcissement de la poutre à l’état de flexion. C’est par
cette composante du tenseur des déformations, que le couplage tension-flexion est introduit
dans le problème linéarisé.
Considérons la poutre ci-dessous (Figure 4.3) en appui simple, soumise à un chargement
de compression F.→ −
x en X = 0 et bloquée en translation le long de → −x en X = l. Un point

− →

situé à l’abscisse X sera après flambage situé en x :
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 83

Position initiale Position après flambage


( ) ( )

− X →
− X + u(X)
X = x =
0 v(X)

du(X)
 

 dx = dX + dX 



 dX 
⇒dx =
 dy = dv(X) dX

 


dX

Figure 4.3: Poutre sur appuis simples en compression

Raccourcissement et déformation non-linéaire Le problème de flambage est intrinsèque-


ment non-linéaire, mais de part la formulation adoptée, la non-linéarité va disparaître. En effet,
conformément à la remarque sur la contrainte dans la poutre pour des charges proches de la
charge critique, on considère que la contrainte dans la poutre ne varie pas le long de l’axe de la
poutre : le flambage se produit à contrainte, et donc déformation, constante. Cette hypothèse
est vérifiée expérimentalement pour des structures élancées, c’est-à-dire lorsque les effets de
bords sont négligeables. Elle est intégrée dans la formulation choisie, c’est elle qui permet de
linéariser le problème.
Le raccourcissement local correspondant à la déformation de membrane (→ −x ) de la


fibre moyenne s’exprime en fonction des déplacements du point X intégrés le long de l’abscisse
(curviligne). Ce raccourcissement est dû pour une part à l’effet du chargement de compression,
et d’autre part à l’apparition de la flexion. On sait que le raccourcissement total de la poutre
s’écrit : Z lZ l
δ= ds − dX
0 0
en supposant que la déformation est constante dans la poutre, on peut exprimer la déformation
moyenne, et donc la déformation locale :
Z l
ds
δ ds
 = = Z 0l −1= −1
l dX
dX
0
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 84

ce qui finalement conduit à l’expression de la déformation locale. En utilisant les expressions


des incréments dx et dy cette déformation de membrane s’écrit :
ds 2 2 2 2
 0 2 02

= − 1 avec ds = dx + dy = dX (1 + u ) + v
dX
Simplifications Finalement, l’expression de la déformation est connue, et peut se simplifier
en première approximation :
0 0
ds p 2u0 + u 2 + v 2
= 1 + 2u0 + u0 2 + v 0 2 ' 1 +
dX 2
On a donc l’expression de la déformation. Des simplifications peuvent encore être faites en
comparant les ordres de grandeurs des différents termes intervenant dans cette expression. En
effet, l’apparition du flambage induit des rotations des sections qui, bien qu’étant faibles, sont
plus grandes que le raccourcissement de membrane dû à la compression :

u0 , v 0 << 1 

0 0
ds v2 v2
⇒ ' 1 + u0 + ⇒  = u0 +
dX 2 2
u0 << v 0

dy v0 dθ dθ
et θ ∼ tan θ = = 0
' v 0 ⇒ courbure ' = v”
dx 1+u ds dX

Remarque on notera que cette expression peut être calculée à partir de l’expression du tenseur
des déformations non-linéaires des milieux continus (Eq.4.1) appliqué aux poutres, en prenant
en compte les simplifications faites ci-dessus.

Finalement, l’énergie de déformation s’écrit toujours de la même façon, mais avec une
expression de la déformation de membrane qui dépend de la flèche (u0 , v 0 ) :

1 l
Z 
00
Wint = ES2 (u0 , v 0 ) + EIv 2 ds (4.2)
2 0

Équations d’équilibres
0
0 v2
En utilisant l’expression de la déformation de membrane établie ci-dessus ( = u + ),
2
on peut déduire les équations d’équilibre du problème en utilisant le Principe des Puissances
Virtuelles. On considérera ici le cas d’une poutre sur laquelle le système d’efforts appliqué se
limite à un effort ponctuel de compression qui agit en x = l (Figure 4.4). Donc le travail

virtuel des efforts extérieurs est Wext = −F u∗ (l). On introduit les notations classiques pour
d2 v(x)
l’effort normal (N (x) = ES(x)) et le moment de flexion (M (x) = EI ). Il faut noter
dx2
que le terme de rotation modérée, introduit dans la déformation virtuelle, prend en compte
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 85

0
la non-linéarité du phénomène. La rotation virtuelle v ∗ est en effet en produit avec un terme
représentant le moment induit par le décalage de l’effort normal par rapport à la ligne moyenne
de la poutre (N v 0 ) :
Z l   
0∗ 0 0∗ 00 ∗
N (x) u + v v + Mz (x)v dx + F u∗ (l) = 0, ∀(u∗ , v ∗ )C.A.
0

après intégration par parties, on exprime tous les termes en fonction des déplacements virtuels :

Z l
(−N 0 (x)u∗ (x) + {−(N (x)v 0 (x))0 + M 00 (x)} v ∗ (x)) dx+
0
 ∗ 0 l
N u + N v 0 v ∗ + M v ∗ − M 0 v ∗ 0 + F u∗ (l) = 0, ∀(u∗ , v ∗ )C.A.

En choisissant judicieusement les champs virtuels, on arrive aux équations d’équilibre intérieur
suivantes, les équations aux bords étant fonction des conditions aux limites. Dans le cas traité
ici, on a N (l) = −F :

Équilibre intérieur C.L cinématiques


 + statiques

 u = 0 ou N = 0(= N d )
N 0 (x) = 0
 

 

x = (0, l) v = 0 ou M 0 − N v 0 = 0
(N (x)v 0 (x))0 − M 00 (x) = 0
 



 v 0 = 0 ou M = 0(= M d )

4.1.2 Application à une poutre droite


Poutre droite sur appuis simples

Nous étudions le cas de la poutre sur appuis simples présentée sur la Figure 4.4.

Figure 4.4: Poutre sur appuis simples en compression


Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 86

1/ Montrer que le système à résoudre s’écrit (equation 4.3) :

d4 v(x) d2 v(x)
EI + F =0 (4.3)
dx4 dx2

2/ Donner les conditions aux limites correspondant au problème de la Figure 4.4.


F
3/ Montrer que le champ de déplacement solution s’écrit, en posant k 2 =
EI
v(x) = A + Bx + C cos kx + D sin kx

4/ Montrer que ce problème possède 2 solutions : une solution droite et une solution
fléchie.
5/ Montrer que la pulsation de rang n solution est :

k= ,n ∈ Z
l

6/ Montrer que la charge critique et le déplacement solutions sont :


 nπ 2
F = EI
l
(4.4)
nπx
v(x) = D sin
l

7/ Tracer les courbes charge-déplacement ainsi que la déformée correspondant aux 3


premiers modes.

Poutre droite encastrée-encastrée Nous étudions maintenant la même poutre, mais cette
fois-ci les conditions aux limites sont de type encastré à ses 2 extrémités (Figure 4.5). On
recherchera les solutions symétriques par rapport à x = 2l .

Figure 4.5: Poutre droite encastrés-encastrée en compression

1/ Donner les conditions aux limites permettant de résoudre ce problème.


Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 87

Finalement, on constate que la charge critique de flambage dépend à la fois du matériau


constitutif, mais aussi de la géométrie de la poutre. En effet, c’est le rapport entre la rigidité
de tension et la rigidité de flexion qui représente la capacité de la poutre à supporter la
compression
q directe sans fléchir, ce qu’on caractérise par le rayon de giration de la section :
r = SI . On peut exprimer la solution pour le cas de la poutre homogène traité ci-dessus, en
fonction des conditions cinématiques imposées aux limites de la poutre (Eq. 4.5). En effet, on
peut constater expérimentalement que la charge évolue en fonction de ces conditions, comme
illustré sur la figure 4.6.

Figure 4.6: Illustration de la charge de flambe pour une même poutre possédant différentes
conditions aux limites.

Ainsi, la charge de flambage est connue en fonction du paramètre α qui prend en compte les
conditions aux limites (Tableau 4.1). Ce qu’on retrouve dans les expériences présentées sur la
figure ci-dessus (Figure 4.6).
EI
Fc (α) = απ 2 2 (4.5)
L

Remarque 1 Dans certains ouvrages, la notion de longueur équivalente est introduite. Il


s’agit de remplacer la longueur de la poutre par une longueur telle que les conditions aux
limites sont intégrées, sans avoir à modifier les relations donnant la force critique. Ceci revient
simplement à intégrer le coefficient α utilisé ci-dessus, soit Le = √Lα .

Remarque 2 Le flambement dans l’espace implique que la plus petite des rigidités de la
poutre devra être considérée, i.e. le flambage se produira dans le plan contenant cette plus
petite rigidité.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 88

Cond. Lim. Coefficient α


λ
Rotulé-Rotulé 1
λ
Encastré-Rotulé 2.05
λ
Encastré-Encastré 4
λ
Encastré-Libre 1/4

Table 4.1: Valeurs du coefficient α (Eq. 4.5) en fonction des conditions aux limites appliquées
à la poutre homogène.

Remarque 3 La présence d’un défaut géométrique va abaisser la charge critique, comme


illustré schématiquement sur la Figure 4.2-b. Le défaut le plus délétère sera celui dont la
forme correspondra au premier mode ; ceci est valable quelle que soit la structure considérée.
Dans le cas des poutres, un défaut d’amplitude v0 sur le premier mode conduit à l’expression
de la relation charge-déplacement suivante, qui correspond à l’augmentation de ce défaut en
fonction du chargement :  
1
F (v) = Fc 1 − (4.6)
 
v 
1+
v0

4.1.3 Extension aux calculs numériques


Lien avec les calculs aux valeurs propres

Les problèmes de flambage, ainsi que les problèmes de calculs vibratoires sont trés
souvent résolus, en première approche grâce à des calculs aux valeurs propres. On rappelle que
ces calculs sont de la forme : [A] − λ[B] = [0].
Notre problème de flambage dans les poutres droites s’écrit :
Z l  0  
0 0 00
N (x) u ∗ + v v ∗ + M (x)v ∗ dx + F u∗ (l) = 0, ∀(u∗ , v ∗ )C.A.
0

ce qui peut encore se simplifier en utilisant les relations N 0 (x) = 0 et N (l) = −F = N (x).
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 89

On peut alors réécrire le problème à résoudre sous la forme :

kel (v, v ∗ ) − F kσ (v, v ∗ ) = 0, ∀v∗ ∈ C.A.

 Z l
00

 kel (v, v ) = EIv 00 (x)v ∗ (x)dx



0
avec Z l
 0
 kσ (v, v ∗ ) = v 0 (x)v ∗ (x)dx


0

dans ces expressions on reconnaît la rigidité élastique de flexion kel , et une nouvelle rigidité
qui exprime l’influence de la géométrie sur la rigidité de la structure kσ , appelée rigidité
géométrique.
Cette formulation est celle utilisée dans les codes de calculs par éléments finis, aussi
bien pour les milieux continus que pour les structures, ou encore la mécanique des fluides.
On utilise dans ces codes des calculs aux valeurs propres qui fournissent les charges critiques
d’apparition des instabilités, mais aussi les modes propres associés définis à une constante
multiplicative prés.

États de contraintes associés au flambage

Si on veut connaître l’état de contraintes dans une structure, les calculs de valeurs
propres ne suffisent pas puisque les modes propres associés sont définis à une constante mul-
tiplicative près. Il est donc nécessaire de mener un calcul complet non-linéaire en augmentant
le chargement progressivement, jusqu’à atteindre le point de bifurcation qui caractérise le pas-
sage d’une configuration stable à une configuration instable (voir Figure 4.2 page 81). D’un
point de vue numérique, ce point de bifurcation correspond à l’annulation de l’un des pivots
de la matrice de rigidité du système, qui alors n’est plus inversible. Il faut donc, pour passer
ou seulement détecter ce point, introduire un défaut géométrique de sorte qu’on s’éloigne
légèrement de la branche fondamentale de la réponse.

4.2 Modes et fréquences propres de vibration en flexion


dans les poutres droites

4.2.1 Introduction
Dans les problèmes traités dans le cadre de la statique, on suppose que le chargement
imposé (déplacement, efforts, température, ...) passe instantanément de sa valeur initiale à sa
valeur finale, faisant ainsi passer le milieu considéré d’une configuration initiale stable à une
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 90

autre configuration contrainte mais stable. Les paramètres à calculer (contraintes, déforma-
tions, déplacements, réactions, ...) sont relatifs à l’état final et par conséquent ne dépendent
pas du temps.
Dans le cadre de la dynamique au contraire les chargements imposés peuvent varier dans
le temps. De plus, même dans la configuration initiale le milieu peut être caractérisé par des
fonctions du temps (conditions de position et de vitesse). Les paramètres à calculer sont donc
également des fonctions du temps, et de nouvelles grandeurs apparaissent pour caractériser le
mouvement, c’est-à-dire la variation de configuration dans le temps. Ce sont les paramètres
cinématiques tels que les vitesses, les accélérations, les fréquences, ... qui n’existent pas dans le
cas de la statique. Ce domaine de la dynamique des solides et des structures est un vaste champs
de l’ingénierie. La démarche spécifique appliquée ici aux poutres est détaillée dans le cadre
des systèmes discrets et continus dans le support de cours http://www.emse.fr/~drapier/
index_fichiers/CoursPDF/Dynamique-3A/Dynamique-SDrapier-octobre2016.pdf.

Nous nous intéresserons ici plus particulièrement aux vibrations libres des poutres
droites à plan moyens chargées dans ce plan (en abrégé poutres droites à plan moyen, Fi-
gure 2.2), c’est à dire la réponse vibratoire caractérisée par les modes et pulsations propres.
Ces caractéristiques intrinsèques aux structures considérées dépendent à la fois des caracté-
ristiques mécaniques (rigidité = module d’Young E), géométriques (section S et moment
quadratique par rapport à → −z I) et de masse (masse volumique ρ).

4.2.2 Équations de la dynamique des poutres droites à plan moyen


Nous avons vu dans le cadre de la statique que les équations des poutres quelconques
peuvent se déduire, via le Principe des Puissances Virtuelles, de la formulation générale de
l’équilibre statique des milieux continus.
Dans le cadre de la dynamique, la démarche est similaire. Elle fait cette fois-ci intervenir
les accélérations, c’est à dire les variations dans le temps des vitesses des sections des poutres.
Pour les poutres droites à plan moyen, le vecteur des déplacements d’un point M d’une section
de la poutre représentée sur la Figure 2.2 page 36 est dans le cadre de la dynamique :

uM (→−x , t) = u(→

x0 , t) − yφ(→

(

− x0 , t)
u (→
−x , t) = →
− →

vM ( x , t) = v(x0 , t)

Donc les accélérations correspondantes s’écrivent :

üM (→
−x , t) = ü(→

x0 , t) − y φ̈(→

(

− x0 , t)
γ (→

x , t) = →
− →

v̈M ( x , t) = v̈(x0 , t)

∂ 2X
où la notation utilisée est définie par Ẍ = . De façon similaire, on définit les dérivées
∂t2
∂X
partielles par rapport à x, X 0 = .
∂x
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 91

Finalement, en intégrant sur la section de la poutre la puissance virtuelle développée


par le terme d’origine inertielle des équations de la dynamique des milieux continus (ρ est la
masse volumique du milieu constitutif supposé homogène dans toute la section) :
l

− − →
Z Z Z h
ρ ü (→
x , t)−
u ∗ (→

 i
∗ ∗ ∗
x , t)dΩ = ρ ü − y φ̈ (u − yφ ) + (v̈v ) dl
Ω 0 S
Z l 
= ρS [üu∗ + v̈v ∗ ] + ρI φ̈φ∗ dl
0

on arrive aux équations d’équilibre dynamique des poutres (Tableau 4.2-b, page 92) :

4.2.3 Vibrations libres - application à la flexion simple


Calcul de vibrations libres

Le calcul des modes et fréquences propres d’une poutre est très utilisé dans l’analyse
vibratoire de ces éléments de structure. Il permet de déterminer la réponse intrinsèque à la
structure, c’est à dire qui ne dépend pas des sollicitations extérieures, et qui définit le spectre
des fréquences et déformées (modes) qu’il faudra éviter de solliciter si l’on veut que la structure
n’ait pas un comportement critique.

Notamment, la connaissance des fréquences propres permet de dimensionner les sec-


tions de manière à éviter les phénomènes de résonance. Ce phénomène bien connu de résonance
survient lorsque la fréquence d’une ou plusieurs sollicitations extérieures est en phase, ou très
peu déphasé (proche), d’une des fréquences propres du système. On a alors, en l’absence
d’amortissement, l’amplitude de la déformée qui tend rapidement vers l’infini, ce qui conduit
généralement à la ruine de la structure. Pour exemple, on peut citer le décret interdisant les
marches militaires sur les ouvrages civils tels que les ponts, ceci suite à l’effondrement d’un
pont sous les pas cadencés d’un régiment.
Lorsque le spectre des fréquences propres est connu on peut, en modifiant la géométrie
ou la masse volumique des sections, décaler le spectre ou bien modifier son étendue. Dans
le cadre de la vibro-accoustique par exemple, la note émise par un diapason dépend de la
géométrie (longueur, section) des branches aussi bien que du matériau employé.

Le calcul de modes propres est quant à lui notamment utilisé dans le domaine de
l’analyse modale qui consiste à exprimer le déplacement quelconque d’un structure dans la
base (infinie dans le cas des milieux continus) formée par ses vecteurs propres. C’est une
technique couramment employée au niveau analytique aussi bien que dans les codes de calculs
par éléments finis par exemple, qui permet de réduire considérablement la taille du système à
résoudre. La connaissance de cette base modale permet également d’étudier la stabilité d’une
structure soumise à une excitation proportionnelle à un ou plusieurs modes propres.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 92

(a) (b)

⇓ ⇓

1/ Champ C.A. - C.I.


. u(xi , t) = udi (t), v(xi , t) = vid (t), φ(xi , t) = φdi (t) , ∀t
(
1/ Champ C.A. - C.I. u(x, tj ) = u(j) , v(x, tj ) = v (j) , φ(x, tj ) = φ(j)

− − → . , ∀→

x
. →

u (→

x , t) = ud (→x , t)− x ∈ ∂Ωu , ∀t u̇(x, tj ) = u̇(j) , v̇(x, tj ) = v̇ (j) , φ̇(x, tj ) = φ̇(j)


u (→−
x , tj ) = →

(
u (j)
. →
− → →
− ∀ →

x 2/ Équilibre intérieur
u̇ (−
x , tj ) = u̇ (j)
∂N (x, t) ∂ 2 u(x, t)
+ px (x, t) = ρS
∂x ∂t2
2/Équilibre intérieur ∂T (x, t) ∂ 2 v(x, t)
∂σij (→

x , t) + py (x, t) = ρS
+ fi (→

x , t) = ρüi (→

x , t) ∂x ∂t2
∂xj
∂M (x, t) ∂ 2 φ(x, t)
+ T (x, t) + cz (x, t) = ρI
∂x ∂t2
3/Équilibre au bord
3/ Équilibre au bord
σij (→

x , t)nj (→

x ) = Fid (→

x , t)

− N (xi , t) = N i (t), T (xi , t) = T i (t), M (xi , t) = M i (t)
∀ x ∈ ∂ΩF
4/ Loi de comportement
∂u(x, t)
4/Loi de comportement N (x, t) = ES
∂x  
σij (x, t) = Lijkl kl (x, t) T (x, t) = kGSγ(x, t) γ(x, t) = ∂v(x,t)
− φ(x, t)
∂x

∂φ(x, t)
M (x, t) = EI
∂x

Table 4.2: Correspondances des équilibres dynamiques d’un milieu continu et d’une poutre
droite à plan moyen.

Vibrations libres d’une poutre en flexion simple

Nous étudions plus spécifiquement les vibrations libres d’une poutre en flexion simple.
Les déformations de cisaillement seront négligées. On montre par ailleurs que le terme inertiel
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 93

relatif à →

z (ρI φ̈(x, t)) peut être négligé devant les effets engendrés par l’accélération due au
déplacement transverse (ρSv̈(x, t)).
Dans le cadre de la flexion, seules les équations d’équilibre relativement aux vecteurs

− →

y et z de la base de référence sont utilisées. Les vibrations libres de la poutre sont analysées
lorsque l’ensemble des efforts est nul. Pour la suite de cette approche, le cisaillement sera
négligé dans les poutres.

1/ Montrer que le système à résoudre s’écrit (équation 4.7) :

∂ 2 v(x, t) EI ∂ 4 v(x, t)
= − (4.7)
∂t2 ρS ∂x4

2/ On recherche la solution de ce problème spatio-temporel sous la forme découplée


suivante v(x, t) = ψ(x)β(t). En désignant par ω la pulsation propre du système, montrer que
ce problème (Eq. 4.7) se met sous la forme d’une équation différentielle à variables séparables
ρS
(Eq. 4.8) où α4 = ω 2 est une constante positive :
EIz
d4 ψ(x) d2 β(t)
4
= α4 ψ(x) 2
+ ω 2 β(t) = 0
| dx {z } | dt {z } (4.8)
(I) (II)

3/ Montrer que la solution générale est de la forme :

v(x, t) = (B1 sin αx + B2 cos αx + B3 sinh αx + B4 cosh αx) A cos (ωt − ϕ)

Poutre sur appuis simples

La poutre considérée repose sur 2 appuis simples, comme indiqué sur la Figure 4.10.

Figure 4.7: Poutre droite sur appui simple.

1/ Donner les conditions aux limites, en déduire les équations en espace qui permettront
de résoudre le problème.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 94

2/ Montrer que la nieme pulsation propre du système est :


s
n2 π 2 EIz
ωn = 2 (4.9)
l ρS

3/ D’après la formulation qui conduit à l’équation (4.7), on obtient désormais un


système qui caractérise l’équilibre pour toute pulsation de rang n. Écrire la solution de ce
système :
vn (x, t) = ψn (x)βn (t)

4/ La solution exacte de ce problème étant la somme des solutions particulières de


rang n, montrer qu’elle s’écrit sous la forme :

X nπx
v(x, t) = Bn sin cos (ωn t − ϕn )
n=1
l

où les Bn sont des constantes, les modes étant définis à une constante multiplicative prés. Les
déphasage ϕn sont déterminés grâce aux conditions initiales (à t = 0).
5/ Tracer les premiers modes propres en fonction de x en prenant B1 = 1.

La solution générale des vibrations libres étant connue, un calcul d’analyse modale
permettra, par exemple, de connaître facilement la réponse de la structure à une sollicitation
générale. Par exemple, si la poutre étudiée est sollicitée en son milieu par une impulsion,
les modes propres pairs ne seront pas "actifs", car le déplacement résultant ne pourra être
qu’impair : pas de point d’inflexion au centre, sous la charge.

4.2.4 Vibrations libres - calculs numériques


La détermination des calculs de modes et fréquences propres de vibration fait également
appel à ces calculs aux valeurs propres. En effet, la formulation du problème dynamique à
résoudre en flexion (avec ρ la masse volumique du matériau constitutif) est :

∂ 2 v(x, t) EI ∂ 4 v(x, t)
− =0
∂t2 ρS ∂x4
En prenant une solution de la forme v(x, t) = V (x)eiωt , on peut reformuler le problème à
résoudre : Z l

kel (V, V ) − ω 2
ρSV (x)V ∗ (x)dx = 0
0
2
où ω est l’ensemble des fréquences propres recherché.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 95

4.3 Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre


Nous venons de caractériser le point critique où des poutres simples en compression
passent de la solution fondamentale (équilibre comprimé a = 0) à une solution secondaire
(équilibre fléchi). La détermination des charges critiques est possible grâce à la résolution du
problème d’équilibre linéarisé, elles constituent en effet les valeurs propres de ce problème. Ce-
pendant, il parait indispensable de caractériser plus complètement le comportement de cette
poutre ou d’une structure après le "dépassement" d’un point de bifurcation. Le cadre linéaire
est abandonné, il est alors nécessaire de travailler sur la formulation non-linéaire de l’équi-
libre, seule capable de caractériser l’équilibre non-linéaire géométrique du système. L’objectif
principal de cette étude non-linéaire doit être de discuter la nature de la branche bifurquée (sy-
métrique ou non-symétrique) et surtout sa stabilité (comportement sur-critique (Figure7.5-(a))
ou comportement sous-critique (Figure 7.5-(b))).

λ! λ!
défaut
(0,!λc)! (0,!λc)!
croissant
branche
secondaire
branche
fondamentale
a! a!

Figure 4.8: Comportements post-bifurqués sur-critique (a) et sous-critique (b).

La résolution complète du problème non-linéaire est néanmoins très délicate. C’est pourquoi,
des résultats analytiques ne seront accessibles qu’en simplifiant le problème non-linéaire près
du point de bifurcation afin de connaître le comportement initial de la branche bifurquée.
Ce résultat local est très important puisque nous allons voir que l’équation proposée pour
la branche bifurquée est aussi valable loin du point de bifurcation lorsqu’une comparaison
avec les éléments finis est effectuée. Deux approches sont présentées ici et nous verrons que
leur "philosophie" générale est très semblable ainsi que leur résultat dans notre cadre simple,
l’objectif de ces méthodes étant de présenter un développement de la charge appliquée et
de la déformée près du point de bifurcation. Le comportement post-bifurqué de la poutre
homogène sera traité à l’aide de la réduction de Lyapounov et Schmidt présentée de manière
très rigoureuse dans [Léger et al., 1998]. Pour la poutre sur fondation élastique, une méthode
classique de perturbation est présentée, à l’aide d’un développement en séries de la charge et
de la déformée.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 96

4.3.1 Poutre homogène


Résolution du problème linéarisé

Pour connaître le comportement post-flambé d’une poutre homogène, c’est-à-dire ca-


ractérisée par une longueur L et une rigidité en flexion EI, la modélisation la plus simple
est celle de la poutre elastica proposée par Euler en 1745. L’hypothèse principale de la poutre
elastica est de supposer que l’allongement de la ligne moyenne est nul. La variable cinématique
caractérisant le comportement de la structure est alors tout simplement l’angle de rotation
des sections de la poutre par rapport à la position initiale, noté θ tel que schématisé sur la
Figure 4.3.
L’énergie de déformation de la poutre se limite donc à la seule écriture de son énergie de
flexion. Dans le cas présenté, la longueur de la poutre ne variant pas, on peut écrire directement
ds = dx, ce qui conduit à une expression de la courbure simplifiée dθ ds
. L’énergie de flexion est
donc donnée par l’équation (4.10).

Z L  2
1 dθ
Wf = EI dx (4.10)
2 0 dx
Le travail des efforts extérieurs est simplement donné par le produit du chargement
extérieur λ avec le raccourcissement ∆ dû à la flexion de la poutre (Eq. 4.11).
Z L
Wext = λ∆ = λ (1 − cos θ)dx (4.11)
0

d’où l’écriture de l’énergie potentielle (Eq. 4.12).

2 !
Z L 
1 dθ
E(λ, θ) = Wf − Wext = EI − 2λ(1 − cos θ) dx (4.12)
2 0 dx

Le calcul de la variation de l’énergie potentielle conduit à l’équation (4.13) qui doit


être nulle à l’équilibre compte tenu de la stationnarité de E(λ, θ).
Z L
δE(λ, θ) = (EIθ0 δθ0 − λ sin θδθ) dx = 0 (4.13)
0

Une intégration par parties sur le premier terme de (4.13) conduit à l’écriture de l’équa-
tion d’équilibre à l’intérieur de la poutre (Eq. 4.14).

EIθ00 + λ sin θ = 0 (4.14)

L’équation (4.14) n’est pas linéaire et compte tenu de ce qui a été dit précédemment,
il suffit de linéariser cette équation pour obtenir la charge critique. Ce qui est possible en
écrivant qu’au premier ordre, sin θ = θ. L’équation linéarisée est alors la suivante (Eq. 4.15).
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 97

EIθ00 + λθ = 0 (4.15)

La résolution de (4.15) est classique et la charge critique est obtenue en posant θ(x) =
Θ cos(πx/L), ce qui conduit à l’expression suivante pour la charge critique (Eq. 4.16) :

π 2 EI
λc = (4.16)
L2

Comportement post-bifurqué

Réduction de Lyapounov et Schmidt Le cadre général de la théorie du post-flambage


est un système élastique caractérisé par la fonctionnelle énergie potentielle E(u, λ) et par
l’ensemble des déplacements cinématiquement admissibles (C.A.). Comme nous avons pu déjà
le voir, les équations d’équilibre du problème sont obtenues à partir de la stationnarité de
l’énergie potentielle (Eq. 4.17).

δE(λ, u) = 0 ∀ δu C.A.(0) (4.17)

On peut donc définir un opérateur différentiel f (λ, u) de l’espace vectoriel C.A.(0),


défini par la relation (4.18). Il peut s’écrire sous la forme d’une somme d’un terme linéaire
(L(λ)u), quadratique (Q(u, u)) et d’ordre supérieur (Eq. 4.19). A l’équilibre cet opérateur est
nul car δE est linéaire par rapport à δu.

< f (λ, u), δu >= δE(λ, u) (4.18)

f (λ, u) = L(λ)u + Q(u, u) + r(λ, u) (4.19)

On peut noter que le terme linéaire provient directement de la seconde variation de


l’énergie potentielle (< L(λ)u, δu >= δE2 (λ, u)). Ainsi, tant que L(λ) est inversible, la
branche fondamentale (u = 0) sera solution, un point de bifurcation va apparaître lorsque
L(λ) ne sera plus inversible, ce qui revient à résoudre le problème classique linéarisé. Cette
résolution conduit à obtenir une charge critique λc et le but de l’analyse post-flambage est
d’étudier les solutions de l’équation f (λ, u) = 0 au voisinage de λc . La première étape consiste
à donner un développement de Taylor de l’énergie potentielle pour u et (λ − λc ) petits (Eq.
4.20).

E(λ, u) = E0 + E2 (λ, u) + E3 (λc , u) + θ((λ − λc )u3 + u4 ) (4.20)

En identifiant avec les termes présentés dans l’équation (4.19), on peut écrire :
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 98


 < L(λ)u, δu >= δE2 (λ, u; δu)

< Q(u, u), δu >= δE3 (λc , u; δu) (4.21)
 r(λ, u) = θ((λ − λ )u2 + u3 )

c

On note U l’élément qui génère le noyau de l’opérateur linéaire (dim=1), on a donc


L(λc )U = 0. L’idée de la méthode de Lyapounov et Schmidt est de décomposer l’inconnue
"u" du problème en une partie proportionnelle au noyau de L(λc ) et une partie orthogonale
à ce noyau (Eq. 4.22). En effet, on admet que l’équation L(λc )u = f admet une solution
si et seulement si "f " est orthogonal au mode de flambage U , c’est-à-dire que la projection
de v sur le noyau est nulle (Eq. 4.23). On utilise donc l’inversibilité partielle de L(λc ) pour
décomposer l’écriture de u près du point de bifurcation.

u = aU + v a ∈ R, v ∈ U ⊥ (4.22)

Z L
f (x)U (x)dx = 0 (4.23)
0

On peut de même définir un opérateur de projection sur U ⊥ (Eq. 4.24).


Z L
u(x)U (x)dx
0
P (u) = u(x) − U (x) Z L
(4.24)
2
U (x)dx
0

La première étape consiste à donner une expression approchée de v. L’idée est de


projeter l’équation f (λ, u) = 0 sur U ⊥ à l’aide du projecteur P afin d’utiliser l’inversibilité de
L(λc ) dans l’espace vectoriel U ⊥ (corollaire du théorème du rang). L’équation ainsi projetée
permet d’obtenir localement une solution unique pour v grâce au théorème des fonctions
implicites (Eq. 4.25).

v(a, λ) = a2 v2 + θ(a(λ − λc ) + a3 ) avec v2 = −L−1 (λc )P (Q(U, U )) (4.25)

Le problème projeté sur U ⊥ peut en fait être interprété comme un problème de minimi-
sation partielle de l’énergie par rapport à v. La deuxième étape consiste à reporter la solution
trouvée pour v dans la forme de l’énergie potentielle qui sera alors appelée énergie potentielle
réduite et qui va dépendre de a et λ. Cette énergie sera notée F (λ, a). La dernière équation
du problème est obtenue en écrivant que l’énergie potentielle réduite est stationnaire, ce qui
conduit à la relation (4.26).

∂F
(λ, a) = 0 (4.26)
∂a
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 99

Au voisinage d’un point critique, nous n’avons qu’une approximation de v mais qui est
suffisante, en général, pour discuter la nature de la bifurcation. L’étude du système est ainsi
ramenée à celle d’une seule équation scalaire que l’on appelle équation de bifurcation. Celle-ci
peut être présentée sous une forme un peu plus explicite pour la discussion de la nature de la
branche bifurquée.
En effet, si on part de la forme donnée par l’équation (4.27) pour l’énergie potentielle,
on peut lui donner une expression approchée en faisant apparaître les déplacements connus U
et v2 .

E(λ, u) = E0 + E2 (λ, u) + E3 (λ, u) + E4 (λ, u) (4.27)

La forme approchée de l’expression (4.27) est donnée par l’équation (4.28) avec E20 la
dérivée de E2 par rapport à λ.

F (λ, a) = (λ − λc )a2 E20 (λc , U ) + a3 E3 (λc , U ) + a4 (E4 (λc , U ) − E2 (λc , v2 )) (4.28)

D’où l’équation de la branche bifurquée qui peut se mettre localement sous la forme
(4.29) avec les coefficients Ci définis par les relations (4.30).

λ = λ c + C 1 a + C 2 a2 (4.29)

3E3 (λc , U )
C1 = −
2E20 (λc , U )
(4.30)
2(E4 (λc , U ) − E2 (λc , v2 ))
C2 = −
E20 (λc , U )
La symétrie (C1 = 0 ou C1 6= 0) et la stabilité (signe de C2 ) de la branche peuvent
ainsi être discutées.

Application au cas de la poutre homogène Si on reprend l’exemple de la poutre homo-


gène traité dans le premier paragraphe de cette section, l’énergie potentielle pouvait se mettre
sous la forme suivante (Eq. 4.31) :

2 !
Z L 
1 dθ
E(λ, θ) = EI − 2λ(1 − cos θ) dx (4.31)
2 0 dx

Par analogie avec la forme de l’énergie potentielle donnée dans l’équation (4.27), une
forme approchée de (4.31) est déterminée (Eq. 4.33) grâce au développement limité de cos θ,
pour θ petit (Eq. 4.32).
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 100

θ2 θ4
cos θ = 1 − + (4.32)
2 24

E(λ, θ) = E2 (λ, θ) + E4 (λ, θ) (4.33)

avec

2 !
Z L 
1 dθ
E2 (λ, θ) = EI + λθ2 dx
2 0 dx
Z L
1
E4 (λ, θ) = − λθ4 dx
24 0
Comme cela a été présenté dans la résolution du problème linéarisé, l’expression du
mode de flambage est donnée par θ(x) = a cos(πx/L) et la charge critique est celle de la
relation (4.16). Ainsi, l’équation de la branche bifurquée présentée dans le cadre théorique
précédent peut être évaluée. Il faut tout d’abord déterminer une expression approchée de v2
(Eq. 4.25) qui dans notre cas est très simple puisqu’en première approximation, elle est nulle
(Q(θ, θ) = 0). Les coefficients Ci peuvent ainsi être déterminés en prenant U = cos(πx/L),
v2 = 0 et λc = π 2 EI/L2 (Eqs. 4.34).

C1 = 0 car E3 (λ, u) = 0

π 2 EI L
Z
cos4 (πx/L)dx π 2 EI 3L (4.34)
2E4 (λc , U ) 12L 02 2 π 2 EI
C2 = − 0 = = 12L 8 =
E2 (λc , U ) 1
Z L 1L 8L2
cos2 (πx/L)dx 22
2 0

L’équation de la branche bifurquée est donc la suivante (Eq. 4.35) :

π 2 EI 2
λ = λc + a (4.35)
8L2
Cette branche est symétrique et son comportement est stable (C2 > 0). Un résultat
identique est trouvé en raisonnant sur le déplacement transverse de la poutre au lieu de
considérer l’angle θ. La constante C2 est alors donnée par C2 = π 4 EI/(8L4 ). Le produit
π 2 /L2 supplémentaire dans cette expression provient de la première approximation de θ qui
est en fait la dérivée de la flèche.
Ce qui est plus remarquable, c’est que l’équation de la branche construite dans un cadre
restreint, c’est-à-dire près du point de bifurcation, est aussi valable pour des déplacements a
important. Ce point est mis en évidence grâce à une comparaison avec des résultats éléments
finis obtenus par une analyse non-linéaire sous ABAQU S T M . Non-seulement la validité locale
de l’équation (4.35) est indéniable prés du point de bifurcation, mais elle est aussi soulignée
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 101

Figure 4.9: Comportement post-bifurqué pour une poutre homogène : comparaison branche
théorique et calculs E.F. non-linéaires.

pour des valeurs élevées de a (Fig. 4.9). Outre la courbe théorique, la courbe E.F. présentée
correspond à un calcul sur une poutre dont la valeur du défaut sur le premier mode de flambage
est 0.001 mm.
Un autre point important est de signaler que dans ce cas simple, la partie orthogonale
au mode est nulle, l’étude aurait pu donc se faire en considérant seulement que la déformée
après flambage correspondait à un accroissement du premier mode de flambage (θ(x) =
Θ cos(πx/L)). Des résultats identiques auraient donc été trouvées en réinjectant directement
ce mode dans la forme de l’énergie potentielle et en minimisant par rapport au paramètre
a. Cette méthode est une méthode approchée, elle est parfois utilisée et correspond en fait
à une méthode dite de Ritz où la difficulté majeure consiste à postuler dés le départ une
représentation correcte du champ de déplacement. Dans notre exemple simple, l’accroissement
du mode constitue le terme prépondérant du champ de déplacement après le passage du point
de bifurcation et donc la méthode de Ritz constitue une très bonne approximation.

4.3.2 Poutre sur fondation élastique à deux paramètres


Le cas du flambage d’une poutre sur une fondation élastique est très répandu et lar-
gement utilisé. En effet, ce cas générique permet de représenter de nombreux états limites
de l’ingénierie, par exemple le comportement de couches minces sur des substrats, ... Dans
ces modèles, contrairement au cas de la poutre homogène vu ci-dessus, la solution bifurquée
résulte de l’équilibre entre la propension de la poutre à fléchir et la rigidité de la fondation
qui s’oppose (ou accompagne) ce mouvement. On trouvera donc une solution du mode cri-
tique (lors du passage du point de bifurcation) de forme harmonique, mais cette fois avec des
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 102

harmoniques de rangs plus grandes que 1.


Comme nous avons pu le voir, la réduction de Lyapounov et Schmidt a été élaborée
dans un cadre très rigoureux et très formel. La difficulté principale réside dans la détermination
de l’expression approchée de la partie orthogonale au mode (v). Pour le cas de la poutre sur
fondation élastique, une autre méthode est présentée mais la "philosophie générale" reste
sensiblement la même. Elle est appelée méthode régulière de perturbation et consiste à écrire
le champ de déplacement et la charge appliquée sous forme de séries valides près du point
de bifurcation (Eq. 4.36) où w(x) représente le déplacement transverse de la poutre selon → −
x3
conformément à la Figure 4.10, et a l’amplitude du premier mode de flambage.

 w(x) = aw1 (x) + a2 w2 (x) + a3 w3 (x)
(4.36)
 2
λ = λc + aλ1 + a λ2

e3

1.e2 .e3 e1

Figure 4.10: Modèle de poutre sur fondation élastique, de rigidité normale k et de rigidité en
cisaillement k1 .

Contrairement à l’exemple précédent de la poutre homogène, nous allons travailler


directement sur l’équation d’équilibre de la poutre sur fondation, celle-ci étant obtenue bien
entendu par la stationnarité de l’énergie potentielle. L’équation non-linéaire (4.37) traduit
l’équilibre de la poutre en grandes déformations ou k représente la rigidité transverse de la
fondation et k1 la rigidité en cisaillement transverse (le ’ correspond à la dérivée par rapport
à x). Cette équation a déjà été présentée par de nombreux auteurs ([Lee & Waas, 1996], [Wu
& Zhong, 1999]).

1 1
EI(w0000 + 4w000 w00 w0 + w003 ) + λw00 (1 − w02 )− 2 + kw(1 − w02 ) − k1 w00 (1 − w02 )− 2 = 0 (4.37)

Résolution du problème linéarisé

La résolution du problème linéarisé va nous conduire à l’expression de la charge critique


de la poutre sur fondation, il suffit pour cela de conserver les termes linéaires présents dans
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 103

(4.37). L’équation d’équilibre linéarisée est alors la suivante (Eq. 4.38).

EIw0000 + λw00 + kw − k1 w00 = 0 (4.38)

Afin de résoudre cette équation différentielle du quatrième ordre, on pose les notations
suivantes, α12 = (λ − k1 )/EI et α2 = k/EI. La solution de l’équation (4.38) est donnée par
(4.39).

w(x) = A cos(ω1 x) + B sin(ω1 x) + C cos(ω2 x) + D sin(ω2 x) (4.39)

avec
p
α12 +α14 − 4α2
ω12 =
2
p
2 α12 − α14 − 4α2
ω2 =
2
La prise en compte des conditions aux limites (w(0) = w(L) = w00 (0) = w00 (L) = 0)
conduit au système matriciel suivant :

    
1 0 1 0 
 A 
   0 

 cos ω1 L sin ω1 L cos ω2 L sin ω2 L  B 
   0 

=
 
2 2
−ω1 −ω2
 
 0 0  C 
  0 
 
2 2 2 2
 
   
−ω1 cos ω1 L −ω1 sin ω1 L −ω2 cos ω2 L −ω2 sin ω2 L D 0
 

Pour ne pas avoir la solution triviale (A = B = C = D = 0), le déterminant de la


matrice 4 × 4 doit être nul, ce qui conduit à la condition (4.40).

sin(ω1 L) = 0 ou sin(ω2 L) = 0 (4.40)

Ces deux conditions conduisent à la même relation (Eq. 4.41) avec n ∈ N qui corres-
pond en fait au nombre de demi-ondes le long de la poutre.

L2 n2 π 2
α12 = α2 + (4.41)
n2 π 2 L2
En remplaçant α12 et α2 par leur expression respective, la charge critique est écrite sous
la forme (4.42) avec ω = nπ/L.

k
λc = EIω 2 + + k1 (4.42)
ω2
Cette charge critique sera minimale pour nc > 1, la valeur de nc est obtenue par
minimisation de (4.42) par rapport à n (Eq. 4.43).
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 104

r
L 4 k
nc = (4.43)
π EI

Comportement post-bifurqué

On adopte donc la décomposition en séries (Eqs. 4.36) du champ de déplacement


transverse et de la charge appliquée, w(x) et λ sont alors remplacés par ces expressions
dans la forme non-linéaire de l’énergie potentielle (Eq. 4.37). On rappelle que a est un petit
paramètre qui matérialise l’amplitude du premier mode. Dans la forme approchée de l’équation
d’équilibre ainsi obtenue, seuls les termes en a, a2 et a3 sont conservés et trois équations sont
ainsi déduites en regroupant chacune des puissances de a (Eqs. 4.44).

EIw10000 + λc w100 + kw1 − k1 w100 = 0 (4.44a)


EIw20000 + λc w200 + kw2 − k1 w200 = −P1 w100 (4.44b)
3
EIw30000 + λc w300 + kw3 − k1 w300 = −EI(4w1000 w100 w10 + w100 )
− λ1 w200 (4.44c)
λc 2 2 k1 2
−λ2 w100 − w100 w10 + kw1 w10 + w100 w10
2 2

Il reste maintenant à résoudre chacune de ces trois équations afin de déterminer les
différents termes de la série. Pour l’équation (4.44a), la résolution est simple car on retrouve
l’équation d’équilibre linéarisée, la solution w1 (x) associée est donc la suivante (Eq. 4.45).

w1 (x) = sin(ωx) (4.45)

Pour la deuxième équation (Eq. 4.44b), la solution w1 déjà trouvée peut être reportée
dans le second membre. La seule solution possible pour w2 est de poser w2 (x) = b sin(ωx),
ce qui conduit à la condition de nullité de λ1 et donc à la solution triviale w2 (x) = 0 pour w2 .

bEIω 4 − bλc ω 2 + bk + bk1 ω 2 = λ1 ω 2

=⇒ b (EIω 4 − λc ω 2 + k + k1 ω 2 ) = λ1 ω 2
| {z }
=0
(
λ1 = 0
=⇒
w2 (x) = 0

La résolution de la troisième équation (Eq. 4.44c) passe tout d’abord par l’évaluation
du second membre (Eq. 4.46) qui est maintenant possible grâce aux résolutions des deux
premières équations.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 105

λc k1
−EI(4w1000 w100 w10 + w100 3 ) − λ1 w200 − λ2 w100 − w100 w10 2 + kw1 w10 2 + w100 w10 2
  2 2 (4.46)
EI 6 3 2 2 3 2 6
= − ω + kω + λ2 ω sin(ωx) + (kω − 3EIω ) sin(3ωx)
8 8 8

Comme pour la résolution de (4.44b), on retrouve la nullité du coefficient multiplicatif


de sin(ωx), ce qui permet de déterminer λ2 (Eq. 4.47).

EI 4 3
λ2 = ω − k (4.47)
8 8
L’équation à résoudre (Eq. 4.44c) peut donc être réécrite afin de déterminer le dernier
terme du développement de w(x) (Eq. 4.48).

3
EIw30000 + λc w300 + kw3 − k1 w300 = (kω 2 − 3EIω 6 ) sin(3ωx) (4.48)
8
D’où l’expression de w3 (x) obtenue facilement en posant w3 (x) = c sin(3ωx) et en
identifiant la constante c (Eq. 4.49).

3ω 2 k − 3EIω 4
 
w3 (x) = sin(3ωx) (4.49)
64 9EIω 4 − k
Ainsi, l’écriture complète du déplacement transverse et de la charge appliquée près du
point de bifurcation est la suivante (Eq. 4.50) :

2 4
  
3 3ω k − 3EIω
 w(x) = a sin(ωx) + a 64 9EIω 4 − k sin(3ωx)



  (4.50)
 EI 3
 λ = λ c + a2 ω4 − k


8 8
On retrouve ainsi l’équation de la branche bifurquée qui comme pour la poutre ho-
mogène est symétrique, la stabilité de celle-ci sera fonction du signe de λ2 . Pour déterminer
le signe de λ2 , il est nécessaire de trouver son expression lorsque λc est minimum et donc
correspond à la charge critique de la poutre. La minimisation de λc par rapport à n, déjà
établie pour déterminer nc (4.43) conduit à la condition (4.51), ce qui permet de déterminer
λ2 (Eq. 4.52).

k
ω4 = (4.51)
EI

k 3k k
λ2 = − =− (4.52)
8 8 4
Ainsi, lorsque la charge critique est minimale, le comportement post-bifurqué est in-
stable. Le second terme de λ2 , lié à la rigidité de la fondation, est prépondérant devant le
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 106

terme de flexion de la poutre. Il est de plus intéressant de noter que ce terme de flexion cor-
respond exactement au terme déjà trouvé dans le cadre de la poutre homogène avec n = 1.
Les deux méthodes conduisent donc aux deux mêmes résultats concernant la détermination
du comportement post-flambage près du point de bifurcation.
Une autre remarque concerne le terme d’ordre 3 du champ de déplacement transverse
qui est complètement négligeable devant a. En effet, des estimations numériques montrent que
même pour une valeur de a assez importante devant la longueur L de la poutre (a/L = 0.04),
l’amplitude de ce terme n’atteint pas 1% de la valeur de a. De plus, on remarque que λ2 est
indépendant de k1 , ce qui montre que le cisaillement ne joue aucun rôle dans le comportement
post-bifurqué de la poutre, cependant celui-ci joue un rôle relativement important pour la
valeur de la charge critique λc .

Figure 4.11: Comportement post-bifurqué pour une poutre sur fondation à un paramètre :
comparaison branche théorique et calculs E.F. non-linéaires (EI = 1.12 107 mm4 , L =
400 mm, k = 100 N.mm−2 ).

Comme pour la poutre homogène, un très bon accord avec un calcul non-linéaire
E.F. est mis en évidence (Fig. 4.11). Pour ce calcul, la fondation a été modélisée grâce à
l’option ∗F OU N DAT ION qui permet d’appliquer des charges linéiques proportionnelles à
une constante le long d’une poutre. Cette constante est directement associée au paramètre k
déjà introduit. Les calculs présentés dans la figure (4.11) sont ceux d’une poutre sur fondation
à un paramètre mais nous avons vu que le terme de cisaillement n’intervenait pas dans le
comportement post-bifurqué. Outre la courbe théorique, les autres courbes proviennent de
calculs effectués à partir d’un défaut initial sur le mode pour trois valeurs différentes (a0 =
0.001mm; 0.005mm; 0.01mm).
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 107

Références bibliographique
Lee & Waas, 1996 Lee, S. and Waas, A. (1996). Initial post-buckling behavior of a
finite beam on an elastic foundation. Int. J. Non-Linear Mechanics, 31(3) :313–
328.
Léger et al., 1998 Léger, A., Combescure, A., and Potier-Ferry, M. (1998). Bifurcation,
flambage, stabilité en mécanique des structures. Technical report, IPSI.
Wu & Zhong, 1999 Wu, B. and Zhong, H. (1999). Postbuckling and imperfection sen-
sitivity of fixed-end and free-end struts on elastic foundation. Archive of Applied
Mechanics, 69 :491–498.
5.
Plaques

Sommaire
5.1 Plaques et coques - généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
5.1.1 Définition d’une plaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
5.1.2 Cas des coques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
5.2 Plaques planes de Love-Kirchhoff . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
5.2.1 Cinématique en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
5.2.2 Champ de déplacement complet . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114
5.2.3 Déformations et contraintes généralisées . . . . . . . . . . . . . 115
5.2.4 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120
5.2.5 Introduction des efforts tranchants . . . . . . . . . . . . . . . . 123
5.2.6 Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion . . . . . . . . 129
5.3 Plaques de Hencky-Mindlin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132
5.3.1 Cinématique et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
5.3.2 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
5.3.3 Lois de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

108
Plaques 109

Nous avons vu que les poutres, solides monodimensionnels, dérivaient de simplifications


géométrique et cinématique d’un milieu 3D. Le principe de base est que, compte-tenu des
faibles dimensions des sections par rapport à la dimension principale de la ligne moyenne,
le déplacement de tout point de la poutre peut être exprimé simplement en fonction des
déplacements et rotations des sections mesurés en leur centre de gravité. Dans le cas des
plaques et coques, cette fois seule une des dimensions est faible devant les autres. L’idée reste
la même que dans les poutres, à savoir que le déplacement, dans l’espace, de tout point de la
plaque peut s’exprimer en fonction des déplacements et rotations des sections (brins) qui se
comportent comme des solides (barres) indéformables. Mais cette fois, les sections (voisines)
sont reliées entre elles par un feuillet moyen (Figure 5.1), donc dans le plan, et non plus le
long d’une ligne moyenne.
La différence entre plaque et coque peut être comparée à la distinction qui est faite
entre poutres droites et poutres courbes. Si bien que les problèmes de coques deviennent
assez vite complexes à traiter du fait de l’expression des grandeurs physiques, et donc des
équilibres statiques, par rapport à la courbure locale. Les modèles de plaque et de coques font
encore actuellement l’objet de nombreux développements scientifiques, essentiellement pour
représenter le plus finement possible les effets ’3D’ avec le moins d’efforts de calculs. Dans
notre cas, les théories ’classiques’ sont développées et assimilées dans le cas des plaques.
À travers ce chapitre, on recourra systématiquement au Principe des Puissances Vir-
tuelles pour établir les équations d’équilibre intérieur et aux bords. Pour cela, on partira de
la cinématique posée qui nous permettra d’exprimer les déformations par dérivation. Ensuite,
les contraintes seront déduites, via la loi de comportement qui prendra une forme particulière.
Finalement, le PPV pourra être explicité complètement, et le choix particulier du champ de
déplacement virtuel conduira aux équations d’équilibres. L’intérêt de l’utilisation du PPV dans
le cas des plaques et coques devient vite évident compte-tenu de la complexité des équilibres,
notamment sur les bords qui peuvent être aussi bien rectilignes que courbes. Dans ce dernier
cas, l’intuition seule du mécanicien peut être rapidement mise en défaut.

5.1 Plaques et coques - généralités


Il existe différentes configurations de plaques. Dans la littérature, les plaques sont très
souvent classées selon leur géométrie (plaque plane, circulaire), la sollicitation subie (charges
ponctuelles, réparties), mais également selon leur comportement type (membrane, flexion) et
la prise en compte ou non du cisaillement transverse. Pour ce dernier aspect, on distingue les
plaques sans cisaillement (souvent minces et homogènes dans leur épaisseur), dites plaques
de Love-Kirchhoff, et les plaques prenant en compte le cisaillement (souvent épaisses et/ou
hétérogènes dans leur épaisseur), dites plaques de Hencky-Mindlin. On peut rapprocher ces
théories des cinématiques de poutres, respectivement Bernoulli et Timoshenko.
Plaques 110

5.1.1 Définition d’une plaque


On appelle plaque un corps solide dont une des dimensions (appelée épaisseur) est
petite devant les autres. Typiquement, le rapport de la taille caractéristique de la plaque sur
l’épaisseur est : Rh > 5. La surface moyenne de la plaque, appelée également feuillet moyen,
est plane. On note ω le domaine de l’espace
 occupé
 par le plan moyen dela plaque (Figure
 x1
 ! 
x 1 h

5.1). Le corps occupe le domaine Ω =  x2  / ∈ ω, |x3 | ≤ 2 .
 

 x x2 

3

Figure 5.1: Définition d’une plaque et système d’efforts associé.

Comme dans le cas des poutres, les grandeurs vont maintenant être définies non plus en
3D, mais dans le plan et selon l’épaisseur de la plaque. Nous allons donc distinguer les grandeurs
(déplacements, déformations, efforts, contraintes, ...) relatives au plan de la plaque et dans la
direction transverse. Posons, par convention, que les indices grecques (α, β, δ, γ, . . .) prennent
les valeurs de 1 à 2, les indices romains (i, j, k, l, m, . . .) étant réservés aux sommations de 1
à 3. Dans ce cas, les efforts par exemple (volumiques et surfaciques) seront décomposés de la
façon suivante (voir Figure 5.1) :
 → − −
 f (→ x ) = fα (→−
x )→

x α + f3 (→ −
x )→ −
x3
α = 1, 2
 → −d → − d →
− →
− d →
− →

F ( x ) = Fα ( x ) x α + F3 ( x )x3

5.1.2 Cas des coques


Dans le cas général des coques, le plan moyen est courbe (Figure 5.2). Il en résulte que
toutes les grandeurs s’expriment par rapport aux courbures locales. On distingue alors divers
cas selon que la coque est simplement courbée, à courbure double, ou encore cylindrique.
Plaques 111

Figure 5.2: Définition d’une coque et repère local.

5.2 Plaques planes de Love-Kirchhoff


Dans le cas des plaques de Love-Kirchhoff, le cisaillement transverse est négligé, prin-
cipalement du fait l’épaisseur supposée très petite devant la taille caractéristique du plan de
la plaque. Cette théorie s’applique donc en premier lieu aux plaques minces, c’est-à-dire dont
le rapport de la taille caractéristique sur l’épaisseur Rh ≥ 10.
Pour cette étude des plaques, nous nous plaçons dans le cadre de la RdM et faisons
les hypothèses classiques des petites déformations et des petits déplacements (HPP). Dans ce
cadre, la configuration géométrique finale sera confondue avec la configuration initiale (pas
de forces suiveuses par exemple). Le matériau constitutif de la plaque est homogène élastique
linéaire isotrope.

Hypothèses de Love-Kirchhoff et flexion pure

Le cadre des plaques de Love-Kirchhoff repose sur les hypothèses suivantes :


Hyp. L-K1 Dans le cadre de l’hypothèse de Love-Kirchhoff, la cinématique d’un brin de
matière normal au plan moyen s’apparente au mouvement d’un corps solide (pas de déformation
transverse possible). Ceci équivaut à l’hypothèse de Navier dans les poutres.
Hyp. L-K2 La seconde hypothèse de Love-Kirchhoff est que ce ’brin’ isolé par l’esprit reste
perpendiculaire au plan moyen tout au long de la déformation. Ceci équivaut à l’hypothèse de
Bernoulli pour les poutres, conduisant à négliger les déformations de cisaillement.

À partir de la première de ces hypothèses, on déduit que le déplacement perpendiculaire


à la plaque est indépendant de la variable x3 de l’épaisseur. Il est égal au déplacement du centre
Plaques 112

de gravité du brin :
u3 (x1 , x2 , x3 ) = u3 (x1 , x2 , 0) = w(x1 , x2 ) (5.1)

5.2.1 Cinématique en flexion


Afin de simplifier la mise en place de la théorie des plaques de Love-Kirchhoff, dans un
premier temps nous considérerons uniquement le cas de la flexion simple. Dans ce cadre, on
suppose que les efforts imposés sont uniquement des efforts transverses, c’est-à-dire qu’aucune
sollicitation statique volumique (fα (→ x ) = 0) ou ponctuelle (Fαd (→
− −x ) = 0), et aucun déplace-
ment de membrane qui pourrait donner lieu à des déplacements de membrane, n’est imposé
dans le plan moyen. Les seuls chargements sont, pour le moment, f3 (→ −x ) 6= 0, F3d (→

x ) 6= 0 et
des moments appliqués sur le bord de la plaque.
Nous avons établi la forme du déplacement transverse en tout point de la plaque
(Eq. 5.1), on peut alors définir le champ de déplacement 2D caractérisant le déplacement de
tout point de la plaque. Toujours dans le cas de la flexion pure, pour définir ce champ de
déplacement, on peut raisonner de deux façons différentes.

Intégration des déformations


On suppose que les efforts imposés restent faibles. On en déduit directement que les conditions
de bord libre sont vérifiées pour la surface :

σ(xα , x3 = ± h2 ) · →

n = 0 avec →

n =→

x3 , ∀−
→∈ω
x α
(5.2)
,→ σ13 = σ23 = σ33 = 0 ⇔ σi3 = 0

D’après la minceur supposée de la plaque, on peut penser que ces contraintes vont être
nulles également à l’intérieur de la plaque. Pour un matériau constitutif élastique linéaire, ceci
correspond à des déformations εα3 ≈ 0 (σα3 = 2µεα3 ) :

∂uα ∂w
2εα3 ≈ 0 = +
∂x3 ∂xα
↓ on intègre en x3
∂w
+ O(x23 )
,→ uα (x1 , x2 , x3 ) = uα (x1 , x2 , 0) − x3
∂xα
Comme pour l’instant seule la flexion est considérée, le déplacement de membrane du feuillet
moyen uα (x1 , x2 , 0) est pris nul. Finalement, le champ de déplacement de flexion en HPP
∂w(x1 , x2 )
s’écrit simplement : uα (x1 , x2 , x3 ) = −x3 .
∂xα

Construction géométrique
On peut également observer le déplacement des brins matériels entre l’état initial et l’état
final, comme représenté sur la Figure 5.3. Dans le cas de la flexion pure, les points de la ligne
Plaques 113

Figure 5.3: Rotation des brins due à la flexion seule.

moyenne ne subissent pas de déplacement dans le plan, mais seulement des déplacements
transverses tels que précisés dans l’Eq. 5.1. Considérons les rotations des sections dues à la
flexion dans les deux plans (O, →

x1 , →

x3 ) et (O, →

x2 , →

x3 ), telles que présentées respectivement sur
les Figures 5.4-a et 5.4-b.

(a) (b)

Figure 5.4: Rotation des sections dans (a) le plan (O, x1 , x3 ) et (b) dans le plan (O, x2 , x3 )
pour une plaque en flexion pure.

Considérons la rotation des sections dans le plan (O, → −


x1 , →

x3 ), représentée sur la Figure 5.4-
a. Le déplacement d’un point M a donc deux composantes dans ce plan :→−
u (x1 , x2 , x3 ) =
−−−→ −−−→
w(x1 , x2 )→

x3 + M M 0 . Cette distance M M 0 se calcule à partir de l’angle φ2 et de l’altitude du
Plaques 114

point M , ce qui dans notre cas conduit à :


!
−−−→0 x3 sin φ2
MM =
x3 (1 − cos φ2 )
(O,−
→ ,−
x →
1 x3 )

Compte-tenu de l’hypothèse des petites rotations, cette expression se simplifie : sin α ≈ α et


−−−→
cos α ≈ 1. Ce qui conduit à M M 0 = x3 φ2 →

x1 .
L’angle de rotation φ2 est, grâce à l’hypothèse L-K2, par construction géométrique
directement égal à la variation du déplacement transverse le long de → −
x1 . On notera que pour
avoir une rotation positive, il est nécessaire d’imposer un déplacement transverse négatif,
comme illustré sur la Figure 5.4-a. Au final, le déplacement résultant s’écrit alors simplement
en fonction de l’altitude et du gradient de déplacement transverse :

∂w(x1 , x2 ) ∂w(xα )
φ2 (xα ) = − u1 (→

x ) = −x3 (5.3)
∂x1 ∂x1

En considérant les mêmes hypothèses dans le plan (O, →−


x2 , →

x3 ), on aboutit au champ
de déplacement complet pour les plaques minces en flexion pure (Eq. 5.4). On notera que,
conformément à la Figure 5.4-b, la rotation φ1 est positive pour un déplacement transverse
positif :

 uα (→
− ∂w(x1 , x2 )
x ) = −x3


− →

u(x)= ∂xα (5.4)
 w(→
 −x ) = w(x , x ) 1 2

Dans la suite, on pourra noter, pour des raisons de concision, les dérivées partielles avec des
∂f
indices : ∂x i
= f,i .

5.2.2 Champ de déplacement complet


Les déplacements étant établis pour la flexion seule, nous pouvons aisément étendre
ce champ de déplacement de façon à représenter tous les déplacements dans l’espace de tout
point de la plaque. Comme dans le cas des poutres droites à plan moyen (Eq. 2.1), le torseur
de déplacement de tout point de la plaque s’écrit simplement à partir des déplacements de
membrane et des rotations du centre de gravité du brin considéré. Mais ici, les rotations et les
déplacements de membrane se décomposent selon les deux directions du plan de la plaque :


φ (xα ) = φ1 (xα )→

x1 + φ2 (xα )→

x2 et →

u (xα ) = u1 (xα )→

x1 + u2 (xα )→

x2 . Le déplacement peut se
Plaques 115

mettre sous la forme d’un torseur des déplacements :


 
w (x )
 ,2 α 

 →
− 

φ (xα ) = −w,1 (xα )

 


 

 




0 




 

 −−→ → − 
 − u→ →

 
M (xα ) = u (xα ) + M G ∧ φ (xα )

 


{UM (xα )} = u1 (xα )

0
w,2 (xα )
(5.5)
 
= u2 (xα ) + 0 ∧ −w,1 (xα )

 


 

 
w(xα ) −x3 0

 


 


 


 u (x ) − x w (x ) 

 α α 3 ,α α 
=

 

 
 w(xα ) 
(M )

5.2.3 Déformations et contraintes généralisées


Connaissant le champ de déplacement, le tenseur des déformations se déduit sim-
plement dans le cas des plaques. La loi de comportement permet ensuite d’en déduire les
contraintes, puis les contraintes généralisées.

Déformations

Les déformations s’écrivent donc simplement, en petites déformations, comme la partie


symétrique du gradient des déplacements. En petites déformations et dans notre cadre 2D ,
dans un repère cartésien le tenseur gradient des déplacements est :

∂ 2 w(xα ) ∂u1 (xα ) ∂ 2 w(xα )


 
∂u1 (xα ) ∂w(xα )
 ∂x1 − x3 ∂x2 ∂x2
− x3
∂x1 ∂x2

∂x1 
 1 
2 2
∂u (x ) ∂ w(x ) ∂u (x ) ∂ w(x ) ∂w(x )
 
∇(→−u)= 2 α
− x3
α 2 α
− x3
α

α 
(5.6)

2

 ∂x1 ∂x 2 ∂x 1 ∂x 2 ∂x 2 ∂x 2 
 
 ∂w(xα ) ∂w(xα ) 
0
∂x1 ∂x2
Compte-tenu de la forme de ce tenseur, on l’écrit généralement directement sous une forme
2D simplifiée. On peut, de plus, faire apparaître les tenseurs de déformations de membrane,
noté e(xα ), et de courbure, noté κ(xα ), mais en 2D :
 
∂ 2 w(xα ) ∂ 2 w(xα )
  
∂u1 (xα ) ∂u1 (xα ) ∂u2 (xα )

1
 ∂x1 2
∂x2
+
∂x1  − ∂x2 −
∂x1 ∂x2 
1

ε2D (xα ) =   + x3 
 
2

 ∂u2 (xα )   ∂ w(xα ) 
sym sym −
∂x2 ∂x22
| {z } | {z }
= e(xα ) + x3 κ(xα )
(5.7)
Plaques 116

ou encore sous forme indicielle, ces déformations s’écrivent :


   2 
2D 1 ∂uα ∂uβ ∂ w(xα )
εαβ (xα ) = + + x3 −
2 ∂xβ ∂xα ∂xα ∂xβ
| {z } | {z }
= eαβ (xα ) + x3 καβ (xα )

Contraintes généralisées

Connaissant les déformations généralisées, il est très simple d’expliciter les contraintes
via la loi de comportement du matériau constitutif, puis les contraintes généralisées. Ces
contraintes généralisées résultent, par définition, de l’intégrale sur l’épaisseur de la plaque
du torseur résultant du transport du vecteur contrainte (relativement à la normale courante)
au centre de gravité du brin considéré. On définit, comme dans le cas des poutres 3D, les
contraintes généralisées de membrane (Eq. 5.8a) et de courbure (Eq. 5.8b), qui ont respecti-
vement la dimension de force par unité de longueur et de moment par unité de longueur :
Z
2D
Nαβ (xα ) = σαβ (xα )dx3 (5.8a)
x3

Z
2D
Mαβ (xα ) = x3 σαβ (xα )dx3 (5.8b)
x3

On peut représenter ces contraintes généralisées sur une plaque, comme sur la Figure 5.5 dans
le cas d’une plaque rectangulaire, possédant donc deux normales → −
x1 et → −
x2 . Les contraintes
généralisées de membrane sont représentées aisément (Figure 5.5-a). Les moments de flexion
M11 et M22 sont également représentés assez intuitivement, par contre le moment de torsion
M12 dû aux contraintes de cisaillements est plus délicat à représenter, il tend en fait à gauchir
le plan de la plaque (Figure 5.5-b).

Loi de comportement

Nous pouvons maintenant relier les contraintes aux déformations, puis les contraintes
généralisées au torseur des déformations (Eq. 5.7). Considérons pour cela un matériau consti-
tutif isotrope élastique linéaire. La loi de comportement ’matériau’ s’écrit donc classiquement,
en raideur ou en souplesse :
 σ11 ν
− (σ22 + σ33 )

σ11 = (λ + 2µ)ε 11 + λε 22 + λε 33  ε11 =

 
 E E
σ22 ν

 

σ = λε + (λ + 2µ)ε + λε ε22 = − (σ11 + σ33 )
 
22 11 22 33

 


 
 E E

σ33 = λε11 + λε22 + (λ + 2µ)ε33
 σ33 ν
ε33 = − (σ11 + σ22 )
E E
σ12

 



 σ12 = 2µε12


 ε12 =
2G

 

 εα3 = σα3
 
 σα3 = 2µεα3
 

2G
Plaques 117

(a)

(b)

Figure 5.5: Contraintes généralisées (a) de membrane et (b) de flexion sur une surface élé-
mentaire de plaque.

On rappelle que les conditions de bords libres se traduisent par σi3 = 0 (Eq. 5.2). Nous
avons vérifié σα3 = 0 pour établir la cinématique des plaques minces. Par contre, il reste à
vérifier σ33 = 0. Cette condition conduit, via la loi de comportement écrite en souplesse, à
une déformation normale transverse ε33 non nulle, ce qui va à l’encontre de la cinématique
établie qui donne une composante 33 nulle pour le tenseur de déformations (Eq. 5.6). En
fait, cette déformation normale transverse à la plaque est induite par effet de Poisson, elle est
donc proportionnelle aux déformations de membranes : ε33 (→ −x ) = −νε22 (→−
x ) = −νε11 (→
−x ). La
déformation normale transverse est donc, pour les matériaux courants, de l’ordre de 30% des
déformations dans le plan. Mais, compte-tenu de l’épaisseur de la plaque qui est au maximum
Plaques 118

1
de 10 de la taille caractéristique du plan, la variation de l’épaisseur de la plaque est donc très
faible, en l’occurrence : νRh < 1003
.
L’erreur commise en utilisant la cinématique négligeant cette déformation est donc
très faible. On peut toutefois, sans problème, prendre en compte cette déformation. En se
plaçant dans une hypothèse de contraintes planes valable pour des plaques fines, la condition
de contrainte normale transverse nulle en surface de la plaque est vérifiée, et une relation entre
la déformation normale transverse ε33 et les déformations normales ε11 et ε22 dans le plan en
découle :
λ
σ33 = λε11 + λε22 + (λ + 2µ)ε33 = 0 ⇒ ε33 = − (ε11 + ε22 ) (5.9)
λ + 2µ

La loi de comportement en contraintes planes s’exprime simplement :


1
ε11 = (σ11 − νσ22 )
E
1
ε22 = (σ22 − νσ11 )
E
| {z }
↓ (5.10)
1 − ν2
ε11 + νε22 = σ11
E
2
1−ν
ε22 + νε11 = σ22
E

ce qui se met classiquement sous la forme matricielle suivante :

2D E  2D 2D

σαβ = (1 − ν)ε αβ + νε γγ δ αβ (5.11)
1 − ν2

La loi de comportement de la plaque s’exprime simplement, en introduisant la loi de


comportement en contraintes planes (Eq. 5.11) dans les expressions des contraintes générali-
sées (Eqs. 5.8a et 5.8b) :
Z
E  2D 2D

Nαβ (xα ) = 2
(1 − ν)ε αβ + νε γγ δ αβ dx3
x3 1 − ν

Z
E x3  2D 2D

Mαβ (xα ) = (1 − ν)ε αβ + νε γγ δ αβ dx3
x3 1 − ν2

Dans le cas le plus général, où le matériau constitutif peut varier à travers l’épaisseur
de la plaque, comme dans le cas des matériaux composites stratifiés par exemple, on obtient
comme dans le cas des poutres 3D (Eq. 1.16) une expression générale :
( ) " # ( )
Nαβ (xα ) [A] [B] eαβ (xα )
= · (5.13)
Mαβ (xα ) [B] [D] καβ (xα )
Plaques 119

où les sous-matrices [A], [D] et [B] représentent respectivement les rigidités de membrane, de
flexion, et le couplage entre les comportements de membrane et de flexion. Pour une plaque
homogène possédant des propriétés mécaniques identiques dans toute son épaisseur, la sous-
matrice [B] est nulle et les comportements de membrane et de courbure sont indépendants.
Les rigidités de membrane et flexion se réduisent à des scalaires :
E(xα ) h
Nαβ (xα ) = [(1 − ν)eαβ + νeγγ δαβ ] (5.14a)
1 − ν 2 (xα )
| {z }
Z h
2 E(xα )
A(xα ) = 2 (x )
dx3
−h2
1 − ν α

E(xα ) h3
Mαβ (xα ) = [(1 − ν)καβ + νκγγ δαβ ] (5.14b)
12(1 − ν 2 (xα ))
| {z }
Z h
2 E(xα ) x23
D(xα ) = 2 (x )
dx3
−h2
1 − ν α

avec A(xα ) la rigidité de membrane et D(xα ) la rigidité de flexion qui peuvent le cas échéant
dépendre de la position sur la plaque. Comme dans le cas des poutres, la rigidité de membrane
dépend essentiellement de la surface latérale de la plaque, tandis que la rigidité de flexion
dépend essentiellement de l’épaisseur de la plaque. On retrouve également des lois de com-
portement de forme similaire à celles des poutres pour une section symétrique par exemple :
N (x1 ) = ESe1 (x1 ) et Mf α (x1 ) = EIα κα (Eqs. 1.15).

Remarque : afin d’être consistant du point de vue de l’énergie issue des termes de
cisaillement, il est nécessaire de préciser la mesure du cisaillement considérée ainsi que la
façon d’exprimer la loi de comportement. Pour cela, comparons l’énergie de déformation en
cisaillement caractérisant la plaque sous diverses formes. Partant de l’énergie de déformation
en cisaillement
Z Z
1 →
− →
− →
− →
− 1
Wcis = (σ12 ( x )12 ( x ) + σ12 ( x )21 ( x )) dΩ = 2 σ12 (→

x )12 (→

x )dΩ
2 ZΩ Z  2 Ω
1
= 2 σ12 (xα )12 (xα ) dx3 dω (5.15)
2 ω x3
Z Z  Z
1 1
= 2 2 G 12 (xα ) 12 (xα ) dx3 dω = 4 G h 212 (xα )dω
2 ω x3 2 ω
et par définition de l’énergie de déformation en cisaillement dans le cas des plaques :
Z Z
1 1
Wcis = (N12 (xα ) e12 (xα ) + N21 (xα ) e21 (xα )) dω = 2N12 (xα ) e12 (xα )dω
2 ω 2 ω
avec la loi de comportement en membrane de la plaque qui s’écrit, pour un matériau constitutif
homogène isotrope élastique linéaire :
E(xα ) h Eh
Nαβ (xα ) = [(1 − ν)eαβ + ν eγγ δαβ ] N12 (xα ) = e12 (xα ) = 2 G h e12 (xα )
1 − ν 2 (xα ) 1+ν
Plaques 120

l’énergie de déformation en cisaillement s’écrit alors :


Z
1 par définition de (5.15)
Wcis = 4 G h e212 (xα )dω −−−−−−−−−−−−→ e12 = 12
2 ω

Par contre, le stockage sous la forme de Voigt (passage d’un tenseur d’ordre 2 symé-
trique à un vecteur à 6 composantes) est tel que la contribution de l’effort de cisaillement
apparaît une seule fois :
     

 N 11 
 × × × 
 e 11 

= × × × · e22
 
N22
 N 
  e 

12
 × × Gh 12

et dans ce cas la déformation considérée sera, en général, celle au sens de l’ingénieur e12 =
212 (et la courbure double κ12 2κ12 ) afin de ne pas modifier la structure de la loi de
comportement ’matériau’, et obtenir une énergie de cisaillement cohérente avec l’expression
(5.15) issue de l’expression générale :
Z Z
1 1
Wcis = N12 (xα ) e12 (xα )dω = 4 G h 212 (xα )dω
2 ω 2 ω

5.2.4 Équations d’équilibre


Équilibre intérieur

Pour établir ces équations d’équilibre, nous allons recourir au PPV. Établissons tout
d’abord la puissance virtuelle des efforts intérieurs (défini en 1.20 page 23) en choisissant un
champ virtuel de la forme de la cinématique de Love-Kirchhoff :

∗ → −∗
Z
Pint (u ) = − σ M : ∗M dΩ

Z Z 
2D 2D ∗
= − σ (xα ) :  (xα )dx3 dω
ω x3
Z Z 
2D ∗ ∗

= − σ (xα ) : e (xα ) + x3 κ (xα ) dx3 dω
ω x3
Z Z  Z Z 

= − 2D
σ (xα )dx3 : e (xα )dω − x3 σ (xα )dx3 : κ∗ (xα )dω
2D
ω
| x3 {z } ω
| x3 {z }
N(xα ) M(xα )
(5.16)
En introduisant les tenseurs des contraintes généralisées de membrane (N(xα ) défini dans
l’Eq. 5.8a) et de flexion (ou moments fléchissants M(xα ) définis dans l’Eq. 5.8b) dans cette
expression de la puissance virtuelle des efforts intérieurs, on aboutit à

∗ → −
Z
( u∗ ) Nαβ (xα )e∗αβ (xα ) + Mαβ (xα )κ∗αβ (xα ) dω

Pint = −
ω
Plaques 121

L’écriture du PPV requiert l’écriture de la puissance virtuelle des actions extérieures.


Pour cela, définissons la pression p(xα ) qui règne sur la plaque suivant la normale → −
x3 . Cette
pression, définie dans l’Eq. 5.17a est la somme de l’intégration sur l’épaisseur des forces de
volume relativement à la normale à la plaque, mais aussi du différentiel d’efforts surfaciques
appliqués de part et d’autre de la plaque (Figure 5.6). Il existe d’autre part des efforts répartis
dans le plan de la plaque réunis dans un terme pα (xα ) (5.17b).
Z h
2
+ −
p(xα ) = F3 (xα ) + F3 (xα ) + f3 (xα )dx3 (5.17a)
−h
2

x3 · σ(xα , h2 ) · →
F3+ (xα ) = →
− −
(
x3
avec − →

F3 (xα ) = −x3 · σ(xα , 2 ) · →
−h −
x3

Z h
2
pα (xα ) = fα (xα )dx3 (5.17b)
−h
2

Enfin des efforts et moments sont imposés sur le contour ∂ω de la plaque de normale → −
ν (xα ).
La puissance virtuelle induite par ces termes de bord, qui sont des réactions sur ∂ωu et des
contraintes statiques sur ∂ωF , est un peu plus délicate à expliciter, nous nous y intéresserons
plus spécifiquement ultérieurement. Pour l’instant, regroupons la contribution de ces efforts
∗ →

imposés par le contact avec l’extérieur sous le terme Pcontact (u∗ ).

Figure 5.6: Efforts extérieurs agissant sur une plaque.

Finalement, le PPV s’écrit pour les plaques de Love-Kirchhoff :


∗ → − ∗ → − →

Pint (u∗ ) + Pext (u∗ ) = 0, ∀u∗
Z
Nαβ (xα )e∗αβ (xα ) + Mαβ (xα )κ∗αβ (xα ) dω+

⇔ − (5.18)
Z ω

− →

(p(xα )w∗ (xα ) + pα (xα )u∗α (xα )) dω + Pcontact

(u∗ ) = 0, ∀u∗
ω
Plaques 122

Essayons d’exprimer ces quantités de façon homogène par rapport au déplacement virtuel.
Notamment la puissance virtuelle des efforts intérieurs peut être intégrée par partie pour faire
apparaître les grandeurs à l’intérieur de la plaque et sur ses bords :

∗ → −∗
Z
Nαβ (xα )e∗αβ (xα ) + Mαβ (xα )κ∗αβ (xα ) dω

Pint (u ) = −
ω

↓ par symétrie des tenseurs des déformations


Z
Nαβ (xα )u∗α,β (xα ) − Mαβ (xα )w,αβ


= − (xα ) dω
ω

↓ intégration par parties en β


Z Z
∗ ∗
Nαβ u∗α − Mαβ w,α

 
= Nαβ,β uα − Mαβ,β w,α dω − νβ ds
ω ∂ω

↓ intégration par parties en α


Z Z
∗ ∗
Nαβ νβ u∗α − Mαβ νβ w,α∗
+ Mαβ,β να w∗ ds

= (Nαβ,β uα + Mαβ,αβ w ) dω −
ω
| ∂ω {z }

−∗
Z
= (Nαβ,β u∗α + Mαβ,αβ w∗ ) dω − ∗
Pint bord ( u )
ω
(5.19)
La composante de la puissance virtuelle des efforts intérieurs le long du bord de la plaque,
∗ →
−∗
notée Pint bord ( u ), sera utilisée ultérieurement pour expliciter les conditions statiques et ciné-
matiques sur ce bord.
Nous cherchons ici à établir les équations d’équilibre intérieur. Écrivons le PPV (Eq.
5.18) en utilisant la nouvelle forme de la puissance virtuelle des efforts intérieurs (Eq. 5.19) :

− →
− →

Z
(Nαβ,β u∗α + Mαβ,αβ w∗ + pw∗ + pα u∗α ) dω − Pintbord

(u∗ ) + Pcontact

(u∗ ) = 0, ∀u∗
ω
(5.20)
En choisissant un champ virtuel nul au bord de la plaque et non nul à l’intérieur, on en déduit
aisément les équations d’équilibre locales qui sont découplées entre membrane et direction
transverse :

Nαβ,β (xα ) + pα (xα ) = 0 (5.21a)

Mαβ,αβ (xα ) + p(xα ) = 0 (5.21b)

Remarque : on notera la similitude de ces équations avec, par exemple, les équations d’équilibre
2 M (x)
des poutres droites de Bernoulli : dNdx(x) +px = 0 et − d dx2 +py = 0 en l’absence de moments
répartis.
Plaques 123

Équations de Navier

Ces équations d’équilibre en contraintes (Eqs. 5.21) peuvent s’exprimer en fonction


des déplacements seulement en y injectant les lois de comportement (Eqs. 5.14a et 5.14b),
ce sont alors les équations de Navier. Considérons le cas de la flexion pure par exemple, pour
une plaque dont les propriétés géométriques et mécaniques sont invariantes dans l’espace :
D(xα ),α = 0. Dans ce cas, les équations de Navier sont :

Mαβ,αβ (xα ) + p(xα ) = 0 ⇔ D {(1 − ν)καβ,αβ + νκγγ,αβ δαβ } + p(xα ) = 0


 
2 2
 ∂ καβ ∂ κγγ 
⇔ D (1 − ν) +ν δαβ + p(xα ) = 0
 ∂xα ∂xβ ∂xα ∂xβ 
| {z }
∂ 2 κγγ
ν
∂x2α
∂ 2 κ12 (xα ) ∂ 4 w(xα ) ∂ 2 κ11 (xα ) ∂ 2 κ22 (xα )
en remarquant que 2 =2 2 2 = +
∂x1 ∂x2 ∂x1 ∂x2 ∂x22 ∂x21

∂ 4 w(xα ) ∂ 4 w(xα ) ∂ 4 w(xα )


 
⇔ −D + 2 + + p(xα ) = 0
∂x41 ∂x21 ∂x22 ∂x42

∂ 2· ∂ 2·
↓ ∆· = + Laplacien en cartésien
∂x21 ∂x22

⇔ −D ∆2 w(xα ) + p(xα ) = 0

(5.22)

Remarque : de nouveau, cette expression est comparable à l’équation d’équilibre local d’une
4 v(x)
poutre droite de Bernoulli en flexion pure : −EI d dx 4 + py = 0

5.2.5 Introduction des efforts tranchants


Pour expliciter complètement le problème à résoudre, il reste à établir les conditions
d’équilibre au bord. Dans ce cas, il est nécessaire d’introduire les efforts tranchants qui jusqu’ici
n’ont pas été pris en compte. En effet, même si les déformations de cisaillement transverse
sont négligées, comme dans le cas des poutres de Bernoulli il est indispensable de prendre en
compte ces efforts tranchants susceptibles d’induire notamment de la flexion.
Par définition, les efforts tranchants résultent de l’intégration sur l’épaisseur des
contraintes de cisaillement : Z
Qα (xα ) = σα3 (xα )dx3 (5.23)
x3
Plaques 124

Pour caractériser l’équilibre de la plaque en prenant en compte ces efforts tranchants,


considérons l’équilibre d’un élément de plaque en projection dans le plan et à travers l’épaisseur :
∂σαβ ∂σα3


 + + fα = 0
∂σij  ∂xβ ∂x3
(3D) + fi (2D) (5.24)
∂xj  ∂σα3 ∂σ33

 + + f3 = 0
∂xα ∂x3
La seconde équation peut être intégrée directement :
Z h Z h  
2 2 ∂σα3 ∂σ33
(σi3,i + f3 )dx3 = + + f3 dx3 = 0
−h2
−h
2
∂xα ∂x3

Z h
∂Qα h 2
= + [σ33 (x3 )]− h +
2
f3 (xα )dx3
∂xα 2 −h
| {z 2 }

= Qα,α + p(xα ) =0 (5.25)


Cette équation traduit l’équilibre entre les effort répartis transverses et la variation des efforts
tranchants dans le plan.
Faisons maintenant apparaître les moments de flexion, tels que définis en 5.8b. Pour
cela considérons la première équation, qui caractérise l’équilibre dans le plan, et intégrons son
produit avec l’altitude à travers la plaque :
Z h Z h  
2 2 ∂σαβ ∂σα3
x3 (σαi,i + fα )dx3 = x3 + + fα dx3 = 0
−h2
−h
2
∂xβ ∂x3

Z h Z h
∂ 2 2 h
= x3 σαβ dx3 − 1 × σα3 dx3 + [x3 σα3 (x3 )]−2 h
∂xβ −h
2
−h
2
2
| {z } | {z } | {z }


= Mαβ − Qα + 0(Eq. 5.2) (5.26)
∂xβ

Finalement, les équations d’équilibre intérieur sont :

Équations d’équilibre intérieur des plaques de Love-Kirchoff

Nαβ,β (xα ) + pα (xα ) = 0 (5.27a)

Mαβ,β (xα ) − Qα (xα ) = 0 (5.27b)

Qα,α (xα ) + p(xα ) = 0 (5.27c)


Plaques 125

On note que les équations 5.27b et 5.27c combinées sont équivalentes à l’équation 5.21b
établie précédemment sans les efforts tranchants.

Remarque : on notera la similitude de ces équations avec, par exemple, les équations d’équilibre
des poutres droites de Bernoulli : dNdx(x) + px = 0, dMdx(x) + T (x) + cZ = 0, et dTdx(x) + py = 0.

Conditions au bord

Pour définir complètement le problème, il reste à exprimer les conditions aux limites
statiques et cinématiques, c’est-à-dire sur le bord ∂ω de la plaque. Afin de déterminer la forme
des efforts que l’on peut imposer sur le bord de la plaque, on propose d’utiliser les termes de
bord du PPV tel que définis dans l’Eq. 5.19. Considérons dans cet équilibre un champ virtuel
nul à l’intérieur du domaine. La nullité des puissances virtuelles développées par les réactions
aux appuis conduit à trois types de conditions aux limites s’excluant sur les bords :

∗ →
− →
− →

(Eq.5.20) → Pintbord (u∗ ) = Pcontact

(u∗ ), ∀u∗ ∈ ∂ω
m


Z  

Pcontact (u∗ ) = ∗ ∗ ∗
Nαβ νβ uα − Mαβ νβ w,α + Mαβ,β να w ds (5.28)
∂ω | {z }
Qα να d’après (5.27b)
m
 

 Nαβ νβ = 0 
 uα (xα ) = 0

 

 
Mαβ νβ = 0 ou w,α (xα ) = 0 (5.29)

 


 

Qα να = 0 w(xα ) = 0
 

On peut donc affiner les types de conditions cinématiques et statiques que l’on peut
imposer sur la plaque, qui sont de la forme des conditions ci-dessus (Eq. 5.29). Il suffit alors
d’exprimer le travail des efforts de contact induits par les efforts extérieurs et les réactions,
soit :

∗ →
− →
− →

Pintbord (u∗ ) = Pcontact

(u∗ ), ∀u∗ ∈ ∂ω
m
Z Z
Nαβ νβ u∗α ∗ ∗
Ndαβ νβ u∗α − Mdαβ νβ w,α

+ Qdα να w∗ (5.30)
 
− Mαβ νβ w,α + Q α να w ds = ds +
∂ω
Z∂ωF
Nαβ νβ ud∗ d∗ d∗

α − Mαβ νβ w,α + Qα να w ds
∂ωu
(5.31)
Plaques 126

Le travail virtuel produit par les efforts de réaction étant nul (Eq. 5.31), seul le terme sur le bord
∂ωF est non nul (Eq. 5.30). On en déduit les conditions statiques sur le bord en prenant un
champ de déplacement virtuel non-nul sur ce bord, et les conditions cinématiques se déduisent
naturellement pour un champ cinématiquement admissible. Au final, les conditions complètes
sont :
  

 Nαβ − Ndαβ νβ = 
 uα (xα ) = udα (xα )

 

 
d

Mαβ − Mαβ νβ = →

ou champ u C.A. w,α (xα ) = w,αd
(xα ) (5.32)

 


  

Qα − Qdα να = w(xα ) = wd (xα )
 

Il est essentiel de remarquer à ce point que l’intégration des équations de Navier en


flexion pure par exemple (Eq. 5.22) requiert quatre conditions aux limites. Or, nous avons ici
trois conditions aux limites sur chaque bord, soit une condition de plus que nécessaire. Par
exemple, pour un bord libre de normale → −
ν = → −
x 1 , on a les conditions qui se déduisent de
(5.29) : 
 M11 = 0

M12 = 0 (5.33)

 Q =0
1

En fait cette forme de conditions aux limites (Eq. 5.28) a été initialement introduite par
Poisson, mais Kirchhoff a montré (en 1850 !) que ces trois conditions étaient redondantes,
et que deux seulement suffisaient pour déterminer complètement les flèches satisfaisant les
équations de Navier (Eq. 5.22). En fait ce problème se ramène à déterminer localement les
conditions aux limites à appliquer. En effet, la condition cinématique portant sur le gradient

(w,α ) peut ne pas être triviale dans la plupart des cas. Et si on calcule ce gradient par rapport
au repère global, on ne dispose pas des bonnes informations pour poser les conditions aux
limites qui s’expriment par rapport au bord, et donc par rapport à la base locale formée par
les vecteurs tangent et normal à l’abscisse curviligne s. Calculons ce gradient :

−−→ ∂w(xα ) ∂s −
→ + ∂w(xα ) ∂ν − →
grad (w(xα )) = x α x α
∂s ∂xα ∂ν ∂xα
| {z } | {z }
∂w(xα ) →
− ∂w(xα ) →

= τ + ν
∂s ∂ν

Donc la condition w,α (xα ) se traduit par :

∗ ∂w∗ (xα ) ∂w∗ (xα )


w,α (xα ) ⇔ τα + να = 0
∂s ∂ν
Cette dernière condition n’étant pas triviale, essayons d’exprimer la puissance virtuelle des
efforts de bord en utilisant le calcul de ce gradient (Eq. 5.34). Considérons tout d’abord
Plaques 127

l’expression faisant intervenir le gradient du déplacement transverse :


 ∗
∂w∗ (xα )
Z Z 
∗ ∂w (xα )
Mαβ νβ w,α ds = Mαβ νβ τα + να ds
∂ω ∂ω ∂s ∂ν
Z Z
∂g ∂f
↓ remarque : le bord n’a pas de bord ! ⇒ f ds = − gds
∂ω ∂s ∂ω ∂s

∂w∗
Z  

= − (Mαβ νβ τα ) w∗ − Mαβ νβ να ds (5.34)
∂ω ∂s ∂ν

En utilisant cette expression pour expliciter la puissance virtuelle des actions de contact
(Eq.5.28), on aboutit aux conditions suivantes :
! !


Z ∗
∗ ∂ ∂w
Pcontact (u∗ ) = Nαβ νβ u∗α + (Mαβ νβ τα ) + Mαβ,β να w∗ − Mαβ νβ να dS
∂ω |∂s {z } ∂ν
F (M, Q)

 

 Nαβ νβ = 0 
 uα (xα ) = 0

 


 

∂ ou w(xα ) = 0 (5.35)
(Mαβ νβ τα ) + Qα να = F (M, Q) = 0

 ∂s 

 ∂w(xα ) = 0

 


 M ν ν =0 
αβ β α
∂ν

Dans ces équations d’équilibre au bord, la seconde quantité F (M, Q) est la plus difficile à
appréhender, elle correspond en fait à un effort vertical.
Considérons l’exemple de plaque ci-dessous (Figure 5.7), de dimension a selon →−
x 1 et b


selon x et dont les faces référencées de 1 à 4 sont respectivement libre, encastrée, en appui
2
simple, et libre.

Figure 5.7: Illustration des conditions aux limites.


Plaques 128

Les conditions aux limites correspondantes se déduisent de 5.35 et s’écrivent :

Face 1 : xα ∈ {a, 0 ≤ x2 ≤ b} Face 2 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, b}


normale →
−ν =→−
x 1 et →
−τ =→−
x2 normale →

ν =→ −x 2 et →

τ =→

x1

 u1 = u2 = 0

 N11 = N12 = 0
 

M12,2 + Q1 = 0 w=0
  ∂w
 M =0
11

 =0
∂x2
(5.36)
Face 3 : xα ∈ {0, 0 ≤ x2 ≤ b} Face 4 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, 0}
normale →

ν = −→ −
x 1 et →

τ =→ −
x2 normale →
−ν = −→−
x 2 et →

τ =→ −
x1
 
 N11 = N12 = 0
  N22 = N12 = 0

w=0 M12,1 + Q2 = 0

 M =0 
 M =0
11 22
Plaques 129

5.2.6 Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion


Comme les équations d’équilibre deviennent rapidement complexes à résoudre analyti-
quement dans le cas des plaques, nous allons traiter deux cas simples. Le premier cas est une
plaque circulaire soumise à un champ de pression uniforme )orientée vers les altitudes néga-
tives, −→−
z ). La formulation du problème en coordonnées cylindriques du problème ramène la
résolution à un problème 1D dont la solution s’exprime analytiquement. Dans le second cas, une
plaque carrée est considérée. La solution est plus complexe, et on propose une approximation
de Galerkin pour l’expliciter.

Flexion d’une plaque circulaire


On considère la plaque circulaire représentée sur la Figure 5.8, de rayon R, d’épaisseur
h, constituée d’un matériau homogène élastique linéaire isotrope de module d’Young E et
de coefficient de Poisson ν. La plaque étant suffisamment mince par rapport à son rayon, et
dans un état de flexion pure, on se placera dans le cadre de la théorie de Love-Kirchhoff. Les
conditions aux limites appliquées sur le contour de la plaque seront précisées ultérieurement.

Figure 5.8: Plaque circulaire soumise à un champ de pression uniforme.

On rappelle qu’en coordonnées cylindriques, dans le cas des plaques, les gradients, les
courbures, et les laplaciens d’un scalaire sont les suivants :
Plaques 130

−−→ ∂U (r, θ) →
− 1 ∂U (r, θ) →

grad U (r, θ) = er + eθ
∂r r ∂θ
= u→
−e +u →r r

e θ θ

−−→
κ(r, θ) = −grad grad w(r, θ)

et
∂ur 1 ∂ur uθ
 
−−→ −
−grad grad U (r, θ) = −  ∂r r ∂θ r 

∂uθ 1 ∂uθ ur 
+
∂r r ∂θ r (− →
er ,−

eθ ,−

x 3)

1 ∂ 2U
 
1 ∂ ∂U
4U (r, θ) = r + 2 2
r ∂r ∂r r ∂θ

1. Équilibre : écrire les équations d’équilibre en déplacement.


2. Le problème étant entièrement axisymétrique (chargement, matériau et géométrie),
indiquer la condition que doit vérifier le déplacement transverse w(r, θ).
3. Montrer que l’équilibre de la plaque, écrit en déplacement, s’exprime :
 
pr ∂ ∂4w
=− r
D ∂r ∂r

4. Montrer que la solution de cet équilibre s’écrit :

p r4
w(r) = − + B1 r2 ln r + B2 r2 + B3 ln r + B4
64 D
5. Proposer les conditions aux limites permettant de déterminer B1 et B3 . Notamment,
quelles valeurs vont prendre la flèche w et le moment Mrr au centre de la plaque ?
6. Résoudre le problème dans le cas d’un bord encastré. Représenter la solution.

Pour cette même plaque mais simplement appuyée, avec un couple −c.→
−eθ réparti sur son
pourtour, la solution est :

r 2 − R2 p R2
 
p 4 4

w(r) = − r −R + c+ (3 + ν)
64 D 2D(1 + ν) 16

Approximations cinématiques

On considère maintenant la plaque carrée représentée sur la Figure 5.9, de dimensions


2a×2a, d’épaisseur h, constituée d’un matériau homogène élastique linéaire isotrope de module
d’Young E, coefficient de Poisson ν et de densité ρ. La plaque est complètement encastrée
sur son pourtour extérieur et soumise à son propre poids. La plaque étant suffisamment mince
Plaques 131

Figure 5.9: Plaque carrée encastrée sur son contour et soumise à son propre poids.

par rapport à ses autres dimensions, et dans un état de flexion pure, on se placera dans le
cadre de la théorie de Love-Kirchhoff.
Dans ce cas, la solution ne peut plus être trouvée analytiquement. Nous allons donc
recourir à une approximation cinématique de Galerkin. On rappelle que ce type d’approximation
du champ de déplacement solution doit vérifier les conditions cinématiques qu’il faut donc
expliciter.

1. Expliciter la force qui s’exerce par unité de surface.


2. Indiquer l’ensemble des champs de déplacement cinématiquement admissibles.
3. Approximation de Galerkin
(a) Quelles sont les conditions que doivent satisfaire les constante C et k pour que
f (x, y) = (1 + C cos kx) (1 + C cos ky) soit C.A (C.A(0) également ici).
(b) Dans la suite fn (x, y) = 1 + (−1)1+n cos n πa x 1 + (−1)1+n cos n aπ y . Les
 

les fonctions f1 , f2 , et f3 sont représentées sur la Figure 5.10.

Figure 5.10: Fonctions f1 , f2 , et f3 cinématiquement admissibles à 0 pour une plaque carrée


encastrée sur son pourtour.

On rappelle que l’approximation de Galerkin repose sur la formulation faible du


problème (voir le chapitre suivant pour plus de détails) pour laquelle l’inconnue
et la fonction test sont choisies dans une base de fonctions vérifiant les condi-
tions aux limites essentielles du problème, d’où la sélection de la base de fonc-
tions que nous venons d’effectuer. Dans cette formulation faible, qui corres-
pond ici au principe des puissances virtuelles tel qu’explicité dans l’Eq. 5.18 par
Plaques 132

exemple, l’inconnue (le champ de déplacement réel) est recherchée comme une
combinaison des n fonctions de la base retenue, et la fonction test (le champ
de déplacement virtuel) est successivement prise égale aux n fonctions de cette
base.

n
X
w(x, y) = fi (x, y)Qi et w∗ (x, y) = f1 , f2 , ..., fn
i=1

Au final, on aboutit à un système algébrique symétrique de n équations à ré-


soudre, qui peuvent se mettre aisément sous forme matricielle. C’est ce type
d’approche qui a donné lieu aux approximations de type éléments finis, qui
ont comme avantage supplémentaire de donner aux coefficients inconnus une
signification physique (degrés de liberté de la discrétisation) :
Dans notre cas, montrer que le PPV se réduit à :
Z Z
Mαβ καβ dω + ρghw∗ dω = 0, ∀w∗ C.A(0)

ω ω

(c) Montrer, en introduisant l’approximation, que le système à résoudre est de la


forme :
 Z 
− ρghf1 dω
     
W (f1 , f1 ) . . . W (f1 , fn )  Q1  






 
 
 ω 

     
 .. ... ..  
..
  .. 

 . .  ·
 . = .
  
 
 
 


 
 
 Z 

   
W (fn , f1 ) . . . W (fn , fn ) Qn  − ρghfn dω

 


| {z } | {z } ω
| {z }
[A] · {Q} = {F }
Z
avec W (fi , fj ) = D {(1 − ν)fi,αβ fj,αβ + νfi,γγ fj,γγ } dω
ω
(d) En considérant une seule fonction f1 (x, y) (et donc un seul coefficient Q1 ),
montrer que la solution de notre problème est :

−4a2 ρgh
w(x, y) = f1 (x, y)
W (f1 , f1 )

avec W (f1 , f1 ) = D [7π 4 (1 − ν) + 6π 4 ν] l’énergie de déformation correspon-


dant au terme A11 de la matrice de rigidité du système.

5.3 Plaques de Hencky-Mindlin


Nous avons étudié les plaques de Love-Kirchhoff, plaques dont l’épaisseur est faible
devant les dimensions caractéristiques du plan de la plaque. Dans le cas des plaques dites
Plaques 133

’épaisses’, cette théorie est mise en défaut et s’éloigne des solutions de la mécanique 3D. En
effet, le cisaillement transverse devient essentiel dans ces plaques, ou bien lorsque le matériau
constitutif est de type orthotrope, ou encore dans le cas des sanwichs où le cisaillement se
développe de façon privilégiée. Ces considérations sont identiques à celles rencontrées dans les
poutres, et la théorie de Love-Kirchhoff correspond à celle de Bernoulli pour les poutres, tandis
que la théorie de Hencky-Mindlin que nous étudions ici correspond à celle de Timoshenko dans
les poutres.
Les plaques dites épaisses peuvent être définies pour des rapports 5 ≤ Rh ≤ 10, R étant
la taille caractéristique du plan de la plaque. Ces plaques sont plus largement utilisées dans les
applications numériques, notamment parce que la représentation du milieu 3D par ces modèles
de plaque est plus réaliste.

5.3.1 Cinématique et déformations


Par rapport aux plaques de Love-Kirchhoff, la cinématique de ces plaques varie par
l’expression des angles de rotation des sections qui cette fois ne sont plus directement égaux
au gradient de déplacement transverse, comme dans l’Eq. 5.3, mais sont des quantités indé-
pendantes. Dans ce cas le champ de déplacement s’écrit, par analogie avec la cinématique de
Love-Kirchhoff :
 
φ = θ (x )
 1 2 α 



 

θ (x ) = φ = −θ (x )

 


 α 2 1 α 

 


 0 



 

 
−−→ →

 


 −
u → (x ) = →
−u (x ) + M G ∧ θ (x )




 M α α α 

{UM (xα )} = u (x )
1 α
0
θ2 (xα ) (5.37)
∧ −θ1 (xα ) 
 
= u2 (xα ) + 0

 

 

w(x ) −x 0

 


 α 3 


 


 

 

 u α (x α ) − x 3 θα (x α ) 

=

 


w(xα )

 

(M )

d’où l’on tire les déformations associées, notées HM , composées des déformations de type
Love-Kirchhoff dont les courbures dépendent maintenant directement des angles (ε2D
αβ ), et des
déformations de cisaillement (εα3 ) :

εHM (xα ) = ε2D −


→ − → −
→ → −
αβ (xα ) xα ⊗ xβ + εα3 (xα ) xα ⊗ x3 (5.38)
Plaques 134

avec    
1 ∂uα ∂uβ 1 ∂θα ∂θβ

2D

 εαβ (xα ) = + − x3 +



 2 ∂x β ∂x α 2 ∂x β ∂xα

 | {z } | {z }
= eαβ (xα ) + x3 καβ (xα )



(5.39)



 et




 ∂w
2εα3 = − θα


∂xα
Le tenseur des contraintes dans cette cinématique doit être complété en conséquence
puisque les déformations de cisaillement transverses sont maintenant non nulles :
 
σ11 σ12 σ13
σ HM =  ” σ22 σ23  (5.40)
 
” ” 0

5.3.2 Équations d’équilibre


Utilisons le PPV pour établir les équations d’équilibre. La puissance virtuelle des efforts
intérieurs s’écrit, en notant que les contraintes de cisaillement sont doubles pour obtenir le
travail effectué en 3D (2σα3 εα3 = σα3 εα3 + σ3α ε3α ) :

∗ →−∗
Z
Pint (u ) = − σ M : ∗M dΩ

Z Z Z 
2D 2D ∗ ∗
= − σ (xα ) :  (xα )dx3 + 2 σα3 (xα )εα3 (xα )dx3 dω (5.41)
ω x3 x3
Z
N(xα ) : e∗ (xα ) + M(xα ) : κ∗ (xα ) + 2Qα (xα )ε∗α3 (xα ) dω

= −
ω

ce qui peut encore se mettre sous une forme incluant des déplacements et rotations uniquement
(en notant la symétrie des déformations de membrane et de courbure), et qu’on intègre ensuite
par parties pour faire apparaître l’équilibre intérieur et les actions de contact :

∗ → −∗
Z
Nαβ (xα )u∗α,β (xα ) − Mαβ (xα )θα,β
∗ ∗
− θα∗ dω

Pint (u ) = − (xα ) + Qα (xα ) w,α
ω

↓ intégrations par parties en α et β


Z
= (Nαβ,β u∗α − (Mαβ,β − Qα ) θα∗ + Qα,α w∗ ) dω−
ω Z
(Nαβ νβ u∗α − Mαβ νβ θα∗ + Qα να w∗ ) ds
| ∂ω {z }

−∗
Z
= (Nαβ,β u∗α − (Mαβ,β − Qα ) θα∗ + Qα w∗ ) dω − Pint ∗
bord ( u )
ω
(5.42)
Plaques 135

et la puissance des efforts extérieurs s’écrit :

∗ → −∗ →

Z
Pext (u ) = (p(xα )w∗ (xα ) + pα (xα )u∗α (xα )) dω + Pcontact

(u∗ )
ω

On identifie immédiatement les équations d’équilibre intérieur. Elles correspondent aux


équations des plaques de Love-Kirchhoff lorsque les efforts tranchants sont pris en compte
(Eqs. 5.27a, 5.27b, et 5.27c), obtenues plus directement ici. Ces équations sont rappelées
ci-dessous.

Nαβ,β (xα ) + pα (xα ) = 0

Mαβ,β (xα ) − Qα (xα ) = 0

Qα,α (xα ) + p(xα ) = 0

En ce qui concerne les équations d’équilibre au bord, on obtient cette fois des conditions plus
simples que pour les plaques de Love-Kirchhoff :
 

 N ν
αβ β = 0 
 uα (xα ) = 0

 

 
Q α να = 0 ou w(xα ) = 0

 


 

Mαβ νβ = 0 θα (xα ) = 0
 

Les conditions aux limites sont donc plus ’naturelles’ ici, et pour l’exemple de la plaque
traité précédemment (Figure 5.7, page 127), elles deviennent :

Face 1 : xα ∈ {a, 0 ≤ x2 ≤ b} Face 2 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, b}


normale →

ν =→ −
x 1 et →

τ =→−
x2 normale →
−ν =→−
x 2 et →

τ =→−
x1
 
 N11 = N12 = 0
  uα = 0

Q1 = 0 w=0

 M =M =0 
 θ =θ =0
11 12 1 2

(5.44)
Face 3 : xα ∈ {0, 0 ≤ x2 ≤ b} Face 4 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, 0}
normale →

ν = −→ −
x 1 et →

τ =→ −
x2 normale →

ν = −→ −
x 2 et →

τ =→ −
x1
 
 N11 = N12 = 0
  N22 = N12 = 0

w=0 Q2 = 0

 M =M =0 
 M =M =0
11 12 22 12
Plaques 136

5.3.3 Lois de comportement


Les lois de comportement reliant les efforts et moments généralisés aux déformations
et courbures généralisées, respectivement 5.14a et 5.14b, restent valables. Il faut simplement
introduire ici la loi de comportement qui relie les efforts tranchants aux déformations de
cisaillement, comme dans le cas des poutres de Timoshenko.
Dans les plaques minces, nous avons posé que εα3 est indépendant de x3 , de plus on a la
relation de comportement au niveau d’un élément de matière σα3 = Gεα3 . Par définition (éq.
5.23) on a donc l’effort tranchant qui s’écrit :
Z  
∂w
Qα (xα ) = 2G εα3 dx3 = Gh − θα
x3 ∂xα

mais σα3 ne peut pas être constant dans l’épaisseur de la plaque puisque cette composante
est nulle sur les faces libres de la plaque, et non nulle dans la plaque. En utilisant l’équation
d’équilibre en contraintes selon les axes →−
x α (éqs 5.24), on a :

∂σα3 ∂σαβ
= −
∂x3 ∂xβ
↓ en flexion pure

12 ∂Mαβ
= −x3
h3 ∂xβ
↓ d’après (5.27b)

12
= −x3 Qα
h3
donc σα3 est parabolique dans l’épaisseur de la plaque, et plus précisément est de la forme
(σα3 (x3 = ±h/2) = 0)
4 x23
 
3
σα3 (xα ) = 1 − 2 Qα (xα ) (5.45)
h 2h
Pour obtenir la ’bonne’ loi de comportement en cisaillement, il faut comparer l’énergie
de déformation que l’on aurait en 3D et celle qu’on a dans notre théorie des plaques :

Z h
2
1
wcis = 2
2 σα3 (xα )εα3 (xα ) dx3
−h
2
Z h  2
4 x23

1 2 3 (5.46)
= 1− 2 dx3 Qα Qα
2G − h2 h 2h
 
5 1
= Qα Qα
6 2Gh

on a donc un rapport de 56 entre les distributions de la théorie des plaques et une théorie qui
serait 3D. On reconnaît ce rapport déjà introduit dans les poutres de section rectangulaire et
Plaques 137

appelé coefficient de correction en cisaillement. Donc la loi de comportement en cisaillement


s’écrit :  
5 ∂w
Qα (xα ) = Gh − θα (5.47)
6 ∂xα
6.
Approximations numériques

Sommaire
6.1 Notions de base sur les approximations numériques en mé-
canique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139
6.2 Approximations numériques les plus courantes en élasto-
statique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
6.2.1 Résidus pondérés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
6.2.2 Formulation intégrale faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
6.2.3 Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
6.3 Applications à la mécanique des structures : Barre soumise
à son poids propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147
6.3.1 Solution analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
6.3.2 Résolution par différences finies . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
6.3.3 Méthodes de collocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
6.3.4 Méthode de Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
6.3.5 De la méthode de Galerkin aux éléments finis . . . . . . . . . . 160
6.4 Élément fini de poutre de type Hermitte . . . . . . . . . . . . 171
6.4.1 Approximation par éléments finis de type Hermitte . . . . . . . 172
6.4.2 Formulation de l’élément fini d’Hermitte en statique linéaire . . 176
6.4.3 Vibrations libres en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
6.4.4 Détermination des charges de flambage . . . . . . . . . . . . . . 184
6.5 Conclusions sur les méthodes numériques en mécanique des
structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

Dans ce chapitre, on propose de présenter assez succinctement les approximations nu-


mériques utilisées couramment en mécanique. Si les éléments finis sont aujourd’hui largement
utilisés dans le monde industriel, en fonction des domaines scientifiques dont sont issus les
problèmes à résoudre, d’autres approximations numériques restent également employées. Par
exemple, les volumes finis sont largement répandus en chimie car cette méthode est basée
sur la notion de bilan des flux de matière circulant à travers un volume, notion courante
en chimie. De la même manière, les différences finies présentent de nombreux avantages
dans les domaines de la physique tels que la thermique par exemple. On note également

138
Approximations numériques 139

que les couplages de différentes méthodes numériques est souvent de mise, soit parce que
les problèmes sont de nature de plus en plus multi-physiques, soit parce que la résolution
peut être mieux adaptée en fonction de la nature des équations à résoudre. C’est le cas par
exemple en dynamique des structures où la résolution en espace est généralement réalisée par
éléments finis alors que l’intégration de la réponse en temps est réalisée par différences finies.
Nous nous intéresserons plus particulièrement ici aux méthodes qui ont donné naissance aux
éléments finis pour finir par la méthode des éléments finis qui sera vue dans un cadre statique.

Ce chapitre constitue la base de l’UP ’Mécanique numérique’ du master Mécanique et


Ingénierie, parcours Modélisation et Simulation Numérique, et qui se concentrera exclusive-
ment sur les méthodes numériques et leurs applications en mécanique. Ce domaine constitue
un thème de recherche industriel et académique en constant renouvellement depuis les années
90, il est connu et plus compréhensible sous le vocable Computational Mechanics, c’est-à-dire
le lien entre l’informatique, les mathématiques appliquées, et la mécanique, et couvre un
vaste champ d’application allant du calcul intensif à l’intégration d’outils spécifiques dans de
grands codes industriels.

6.1 Notions de base sur les approximations numériques


en mécanique
Les notions d’approximation de la solution en mécanique sont de diverses natures.
Comme dans le cas des structures, ces approximations peuvent porter sur la simplification
’géométrique’ conduisant à une simplification de la cinématique. C’est le cas des théories de
poutres, plaques, coques, ... Les approximations peuvent également porter sur le comportement
du milieu étudié, le comportement idéal le plus basique étant de type Hookéen. Enfin, si malgré
ces diverses simplifications le problème ne peut toujours pas être résolu de façon simple,
c’est-à-dire que le champ solution ne peut être trouvé analytiquement, on effectue alors des
approximations semi-analytiques, ou plus généralement des approximations qui de par la taille
des systèmes engendrés sont presque systématiquement résolus de façon numérique.
Ces approximations numériques sont nombreuses, nous verrons ici le cas des approxi-
mations les plus courantes basées sur la formulation de type Résidus pondérés du problème
posé. De façon très grossière, ce type de formulation consiste à minimiser un résidu (une
fonction à valeur réelle) en cherchant à annuler le produit de ce résidu avec des fonctions de
pondération bien choisies. Toute la problématique est présente dans ce terme bien choisies.
En effet, partant d’une formulation donnée du problème de mécanique, ces approximations nu-
mériques diffèrent par les contraintes imposées au champ solution et au champ test (fonctions
de pondération). En imposant des contraintes de dérivabilité forte sur le champ solution re-
cherché, on formule le problème de façon forte. Par contre en partant de la formulation faible,
Approximations numériques 140

i.e. en partageant les contraintes de dérivabilité sur le champ réel et le champ test, on formule
la plupart des approximations numériques rencontrées dans les sciences pour l’ingénieur. Seule
la méthode des éléments de frontière diffère de cette formulation faible, puisqu’on va rejeter
le problème à résoudre sur ses frontières, ceci en imposant les contraintes de dérivabilité sur
les fonctions test.
Cette section 6.1 présentant les approximations numériques les plus répandues s’inspire
du premier chapitre de l’excellent ouvrage de J.-M Bergheau (ENISE) et R. Fortunier (ISAE-
ENSMA) intitulé ’Finite Element Simulation of Heat Transfer’(ISTE Ltd and John Wiley &
Sons Inc, ISBN-10 : 1848210531). Les applications numériques sont en partie adaptées de cet
ouvrage. Un grand merci aux auteurs !

6.2 Approximations numériques les plus courantes en


élasto-statique
L’exemple de résolution d’un problème élasto-statique simple permet de mettre en
évidence les grandes notions que nous verrons en détails dans ce chapitre. Considérons le
problème classique d’équilibre mécanique (Figure 6.1) formulé à partir de l’équation d’équilibre
d’un élément de volume et des conditions aux limites associées cinématiques (Dirichlet ou en
déplacement) et statiques (Neumann ou en contraintes/efforts) :
Approximations numériques 141

Figure 6.1: Représentation générale d’un solide occupant un domaine Ω, de frontière ∂Ω


(∂Ω = ∂Ωu ∪ ∂ΩF et ∂Ωu ∩ ∂ΩF =Ø), soumis à des sollicitations extérieures.

−→ → →
− −
divσ(−
x , t) + f (→
x , t) = ρ→
−̈
u i (→

x , t) , ∀ →

x ∈Ω




avec les conditions aux limites

 →

−u (→
−x , t) = →
−u d (→

x , t) , ∀ →−
x ∈ ∂Ωu

(6.1)


− −

 σ(→−x , t)→

n (→
−x ) = F d (→ x , t) , ∀ →



x ∈ ∂ΩF


et la loi de comportement correspondante
σ(→−
x , t) = L(→−
x , t) : ε(→



x , t)

L’équilibre mécanique peut également s’écrire en fonction du champ de déplacement seulement


sous la forme dite ’en déplacement’ appelée équations de ’Lamé-Clapeyron’ ou de ’Navier’. En
effet, en introduisant la loi de comportement, la divergence des contraintes s’écrit en fonction
des déformations qui sont la partie symétrique du gradient du déplacement. Pour un milieu
homogène isotrope obéissant à une loi de comportement linéaire, et dans un cadre HPP, on
obtient facilement l’équilibre en statique :

−− −−→ →
− − →

µ4→u + (λ + µ)grad (div→

u ) + f (→
x)= 0 (6.2)

avec λ et µ les coefficients de Lamé du matériau constitutif. On voit que ce problème est par
nature elliptique et fait intervenir un laplacien, soit des dérivées d’ordre 2 de l’inconnue. Ceci
va guider le choix des méthodes d’approximation à utiliser.
On peut proposer une forme plus générale de ce problème de mécanique (Eq. 6.1) en
introduisant un opérateur A agissant sur le champ de déplacement recherché. Compte tenu
des hypothèses restrictives posées, cet opérateur est linéaire dans notre cas. La résolution de
Approximations numériques 142

cette équation conduit bien évidemment à l’expression du champ de déplacement, dont on


déduit aisément les déformations, puis les contraintes via la loi de comportement. Le problème
à résoudre s’écrit donc :
Trouver une fonction →−

u ∈ U telle que


− →
− − →
→ − →
− →

R( u ) = A u + f = 0 , ∀ x ∈ Ω


avec les conditions aux limites (6.3)
→ − →
− →
− d →
− →


u ( x , t) = u ( x , t) , ∀ x ∈ ∂Ωu

 → →
− −
σ(− x , t)→

n (→

x ) = F d (→x , t) , ∀ →


x ∈ ∂ΩF

où U est un espace de fonctions vérifiant les conditions aux limites de Dirichlet, soit des
fonctions C.A. (cinématiquement admissibles), dont on précisera ultérieurement les contraintes
en termes de dérivabilité / intégration notamment.

6.2.1 Résidus pondérés


Pour résoudre ce problème, qui sauf dans quelques cas particuliers n’a pas de solution
analytique, on se propose d’intégrer cette équation d’équilibre, le résidu R(→ −u ), sur tout le
domaine Ω et d’en calculer le produit avec des fonctions tests continues. Pour que cette
équation soit identiquement nulle, le produit avec n’importe laquelle de ces fonctions doit
rester nul. On notera qu’à ce stade, la seule condition que doivent remplir ces fonctions tests
est qu’elles soient intégrables sur le domaine. Notons V cet espace de fonctions. Par contre, le
champ solution doit être au moins 2 fois différentiable, conformément à la remarque précédente
sur la présence d’un laplacien du déplacement dans les équations de Lamé-Clapeyron (Eq.
6.2). En ce sens, la formulation est dite forte. En introduisant le produit scalaire tel que
R

(f · g) dΩ = hf, gi, dont la définition plus précise nécessiterait de s’attarder sur l’analyse
fonctionnelle, le problème à résoudre est donc :

Trouver une fonction →





u ∈ U telle que
D→
D→
− → − −E
R (−u ), →

v = hA→ −
u ,→

v i + f ,→ ∀→

E

v , v ∈ V


avec les conditions aux limites (6.4)
 →
−u (→
−x , t) = →
−u d (→

x , t) , ∀ →−

x ∈ ∂Ωu




 σ(→− →
− −
x , t)→

n (→
−x ) = F d (→ x , t) , ∀ →


x ∈ ∂ΩF


Partant de cette formulation, le choix des fonctions test va nous permettre de formuler
3 formes d’approximations de ce problème que nous détaillerons dans la suite de ce chapitre :
Approximations numériques 143

collocation par points, collocation par sous-domaine, et volumes finis qui seront mis en œuvre
par la suite sur des exemples plus précis :
1. Si V est un ensemble de distributions de Dirac, on formule la résolution par col-
location par point, c’est à dire qu’on cherche la solution en des points donnés,
dans les directions de l’espace :


V = { δ xi , i = 1..n}
D→
− − → →
− E D→ − →− E
,→ R (→ u ), − = A→−
E D
v u , δ xi + f , δ xi = 0 (6.5)

− − →
= R (→
u)·−
x |−
→ xi = 0, ∀ i = 1..n
x =−

2. Si V est une base de fonctions constantes par sous-domaine, on formule la réso-


lution par collocation par sous-domaine ce qui revient à chercher les fonctions
qui vérifient l’équilibre sur des sous-domaines disjoints mais dont l’union forme le
domaine Ω :


V = { δ Ωi , i = 1..n}
D→
− − → →
− E D→ − → − E
,→ R (→ u ), − = A→ −
E D
v u , δ Ωi + f , δ Ωi = 0

↓ Par définition du produit scalaire


− → →
− →
Z Z
= −
R ( u ) · δ−
→ dΩi = R (−u)·→−
x dΩi = 0, ∀ i = 1..n
Ωi
Ω Ωi

− − →
= R (→
u)·−
x |Ω=Ωi = 0, ∀ i = 1..n
(6.6)
3. Partant de cette dernière forme de champ test, en utilisant le théorème de la
divergence (ou Ostrogradsky) appliqué à l’équilibre mécanique écrit en contraintes
(Eq. 6.1), on formule la résolution par volumes finis. Globalement, on vérifie que
le flux de contraintes sur la frontière du sous-domaine Ωi , appelé alors volume de
contrôle, est équilibré par les forces volumiques imposées :


V = { δ Ωi , i = 1..n}

− − →
,→ R (→
u)·−
x |Ω=Ωi = 0, ∀ i = 1..n

−→ →
− →
Z 
= divσ + f · − x dΩi = 0, ∀i = 1..n
Ωi

− →
Z Z
= − →
− →

σ · n · x dωi + f ·−
x dΩi = 0, ∀i = 1..n
∂Ωi Ωi
(6.7)
Approximations numériques 144

6.2.2 Formulation intégrale faible


Le problème initial, écrit en 6.3 sous une forme générale peut être reformulé pour
donner une formulation intégrale faible à résoudre. Cette formulation, équivalente au principe
des puissances virtuelles (Eq. 7.79) introduit précédemment pour les poutres (Eq. 1.17) puis
les plaques (Eq. 5.18), a l’avantage de requérir des conditions de dérivabilité moindre sur les
fonctions issues de l’espace des solutions U tout en augmentant les contraintes de dérivabilité
sur les fonctions de l’espace test V .
Partant du problème à résoudre, utilisons le théorème de la divergence pour ’reporter’
les dérivations du champ réel vers le champ test dans le terme d’équilibre des contraintes. Nous
supposons ici que l’opérateur hA·, ·i est un opérateur auto-adjoint (ou hermitien), i.e. il vérifie
hA→ −
u ,→
−v i = h→−
u , A→−v i, ce qui est le cas quasi-systématiquement en physique ’classique’, et
que les propriétés du milieu sont homogènes :
−→ →
Z

− →

hA u , v i = divσ(− x)·→ −v (→
−x ) dΩ

 
−→
Z
= div L( x ) : ε( x ) · →

− →
− −v (→

x ) dΩ (notons la symétrie de L)

 
−→
Z
= div L( x ) : ∇( u ( x )) · →

− →
− →
− −
v (→−
x ) dΩ

Z Z  
t →− →
− →
− →
− →

= − ∇ u ( x ) : L( x ) : ∇ v ( x ) dΩ + →

L( x ) : ∇ u ( x ) · →

− →
− −
n ·→ −
v (→−x ) dω
Ω ∂Ω
(6.8)
On constate que le terme représentant l’équilibre intérieur est maintenant symétrique en ce
qui concerne les contraintes de dérivabilité des fonctions issues de U et V . Sans entrer dans
les détails, la régularité requise correspond maintenant au premier espace de Sobolev, géné-
ralement noté H 1 (Ω), regroupant les fonctions de carré intégrable sur Ω et dont les dérivées
sont également de carré intégrable.
Un aspect important de cette formulation faible consiste à aboutir à une expression
unique contenant l’équilibre et les conditions aux limites essentielles (en déplacement) et
naturelles (en contraintes). Dans ce cas, le parallèle avec le PPV est valable pour un PPV
formulé en déplacements. Une des différences majeures de la formulation faible par rapport
aux différentes méthodes vues jusqu’ici est que les conditions essentielles sont introduites en
imposant que les fonctions de l’espace U vérifient ces conditions aux limites, soit :

U= →
−
u ∈ H 1 (Ω)/→

u (→

x , t) = →

u d (→

x , t) , ∀ →

x ∈ ∂Ωu .

D’autre part, les fonctions test sont choisies telles qu’elles s’annulent sur la frontière ∂Ωu où les
conditions de Dirichlet sont imposées. En effet, toute fonction → −
u affectée d’une perturbation
reste admissible tant que les conditions essentielles sont vérifiées (→ −u +→ −v = → −
ud ⇒ → −
v =


0 , ∀ x ∈ ∂Ωu ). D’un point de vue mathématique, le cadre du calcul des variations conduit
au même résultat, ce qui revient à considérer que les fonctions de pondération → −v expriment
Approximations numériques 145

les variations du champ réel → −


u (voir Eq. 6.12). Il résulte de ces considérations que l’espace
des fonctions tests est tel que


V = → −v ∈ H 1 (Ω)/→

v (→
−x , t) = 0 , ∀ →−
n o
x ∈ ∂Ωu .

On en déduit immédiatement que l’intégrale de surface (second terme de l’Eq. 6.8) se limite
alors à l’intégrale des contraintes sur la surface ∂ΩF , soit le flux de déplacement :
Z   Z

− →
− →
− →
− →
− →

L( x ) : ∇ u ( x ) · n · v ( x ) dω = σ(→−x)·→−n ·→−
v (→−
x ) dω
∂Ω ∂ΩF
(6.9)

−d →
Z
= − →
− →

F ( x ) · v ( x ) dω
∂ΩF

Le problème à résoudre s’écrit alors :

Trouver→

u ∈ U tel que pour tout→ −


v ∈ V :


− → →
−d →
Z Z Z
t →
− →
− →
− →
− →
− − →
− →

− ∇ u ( x ) : L( x ) : ∇ v ( x ) dΩ + f ( x ) · v ( x ) dΩ + F (−
x)·→

v (→


x ) dω = 0
Ω Ω ∂ΩF




avec U = →
−
u ∈ H 1 (Ω)/→−
u (→

x)=→ −
u d (→

x ) ,∀ →



x ∈ ∂Ωu



et V = →−v ∈ H 1 (Ω)/→
−v (→

x ) = 0 ,∀ → −
n o
x ∈ ∂Ωu


(6.10)
Ce type de formulation continue se prête extrêmement bien au calcul numérique car
elle permet de manipuler des fonctions scalaires. D’autre part, trouver la solution de cette
nouvelle formulation (Eq. 6.10) d’un problème mécanique peut être vu comme la recherche
d’un extremum. On montre en effet que la solution minimise et rend stationnaire une fonc-
tionnelle (fonction de fonction), strictement convexe dans un cadre linéaire, donc possédant
un minimum unique, appelée Énergie Potentielle. Le théorème de l’Énergie Potentielle que
nous ne détaillerons pas ici permet de montrer que l’équilibre (stable ou instable) correspond
au champ annulant la première variation de cette fonctionnelle formée par la différence entre
l’énergie de déformation du système et le travail des efforts donnés :

Trouver→


u ∈ U qui minimise :


− → →
−d →
Z Z Z
1



Π( u ) =
t →
− →
− →
− →
− →

∇ u ( x ) : L( x ) : ∇ u ( x ) dΩ − − →
− →

f ( x ) · u ( x ) dΩ − F (−
x)·→ −
u (→

x ) dω

2 Ω Ω ∂ΩF


avec U = →
−
u ∈ H 1 (Ω)/→−u (→
−x)=→ −u d (→

x ) ,∀ →


x ∈ ∂Ωu
(6.11)
Quelques notions de calcul des variations sont rappelées en Annexe-Chapitre 7 §7.2 page 191.
En quelques mots, le principe du calcul variationnel consiste à chercher à minimiser l’écart entre
Approximations numériques 146

la solution réelle, ici →



u (x), et une solution perturbée, représentée par une famille de fonctions
proches de la solution, δ → −u (x) = α→ −v (x) avec α → 0, qui se superposent à cette solution
réelle. On comprend bien alors pourquoi cette variation doit s’annuler sur le bord ∂Ωu . On
retiendra finalement que la recherche du minimum d’une fonctionnelle convexe correspond à
trouver le champ qui annule sa première variation, c’est à dire qui rend nulle la valeur prise par
la fonctionnelle pour une faible perturbation autour de la solution, montrant qu’un extrémum
est bien atteint. Pour revenir à notre cas, la minimisation de l’énergie potentielle conduit à
chercher le champ de déplacement → −u ∈ U annulant la première variation δΠ(→ −
u ) de Π(→
−u ),


ceci pour toute variation admissible δ u ∈ V , i.e CA(0) :
Trouver→−u ∈ U tel que pour tout δ → −

u ∈ V :

Z
δΠ(→ − t →
∇− u (→
−x ) : L(→ −x ) : ∇δ →
−u (→


u) = x ) dΩ


− → →
−d →
Z Z
(6.12)


− − →
− →

f ( x ) · δ u ( x ) dΩ − F (−x ) · δ→

u (→

x ) dω = 0

Ω ∂ΩF

avec U = −
→ 1 →
− →− →
− d →− →

∈ ∀ ∈

u H (Ω)/ u ( x ) = u ( x ) , x ∂Ω u
et V = δ →
n
− 1 →
− →
− →
− →

o
u ∈ H (Ω)/δ u ( x ) = 0 , ∀ x ∈ ∂Ωu

Cette expression unique intégrant les équations d’équilibre et les conditions aux limites
permet de résoudre numériquement l’équilibre mécanique, elle correspond au principe des
puissances virtuelles formulé en déplacement en prenant le champ virtuel égal à la variation du
champ réel (Eqs. 1.17 et 5.18). C’est à partir de cette expression que les approximations de
type Galerkin, Ritz-Galerkin, et finalement les éléments finis (en déplacements) sont formulés.

6.2.3 Galerkin
Partant de l’expression variationnelle de l’équilibre mécanique tel que présenté en 6.12,
des méthodes numériques, donc approchées, ont été construites. La plus répandue de ces
méthodes est la méthode de Galerkin (Boris. G. Galerkin, mathématicien Russe, 1871-1942).
Il s’agit ici de travailler sur des sous-espaces de dimension finie U n et V n issus de U et V
respectivement, conduisant à un système discret. La méthode de Galerkin utilise la propriété


que tout élément ũ de U peut être construit à partir d’un seul élément particulier → −u ? de cet


espace, perturbé par une fonction issue de l’espace de test V (noté → −u ici), soit : ũ = →−u?+
α→−u avec α ∈ R∗ petit. Il s’agit donc de construire un problème approché où l’approximation
de la solution et les fonctions test sont issues d’un même sous-espace de dimension finie :


Un = → −
u ∈ H 1 (Ω)/ ũ = →−u?+→ −u avec →

n o
u ∈Vn (6.13)

On notera que si le terme particulier u? dépend x, il sera intégré à la résolution du problème.


Généralement, ce terme exprime des conditions particulières que le champ de déplacement
solution doit vérifier (Dirichlet en particulier), il s’écrit donc par rapport à des données du
Approximations numériques 147

problème. Ce terme sera donc présent dans le problème à résoudre comme une partie du
second membre. Ceci est illustré dans l’exemple d’application (6.3.4 page 156)
En introduisant cette approximation dans la formulation faible (Eq. 6.10 ou 6.12), et
notamment dans le terme de puissance virtuelle des efforts intérieurs, on aboutit au problème
discret de dimension n à résoudre :
Trouver→−
ũ ∈ U n tel que pour tout→ −

v ∈ Vn :
Z
t →− → →
− → →
−d →
Z Z

− →
− →
− →

∇ ũ ( x ) : L( x ) : ∇ v ( x ) dΩ + − →
− →

f ( x ) · v ( x ) dΩ + F (−x)·→−v (→
−x ) dω = 0
Ω Ω ∂ΩF




avec U n = →
n− →
− →

ũ ∈ H 1 (Ω)/ ũ = → −u?+→ −u ,∀ →−
x ∈ Ω, avec → −u ∈ V n et ũ = →

u d, ∀ →

o
x ∈ ∂Ωu



et V n = → −v ∈ H 1 (Ω)/→ −
v (→

x ) = 0 ,∀ → −
n o
x ∈ ∂Ωu

(6.14)
Lorsque la dimension du problème discret augmente, on tend vers la solution exacte.
On retrouve ici, écrit de façon tout à fait générale, la méthode qui est utilisée pour résoudre le
second exercice sur les plaques (cf §5.2.6). De plus, nous verrons sur l’exemple ci-dessous que
la méthode des éléments finis est un cas particulier de choix de ces fonctions d’approximation,
où la solution va être approchée par une combinaison de fonctions dont les valeurs sont connues
en des points particuliers. L’intérêt de cette méthode pour les ingénieurs est double, il s’agit
d’une part de la coïncidence entre découpage physique (maillage) et découpage nécessaire à
la résolution à l’aide de polynômes d’ordre peu élevé, et d’autre part du sens physique des
résultats qui sont des grandeurs prises en ces mêmes points particuliers, les valeur nodales.

6.3 Applications à la mécanique des structures : Barre


soumise à son poids propre
Afin de mettre en pratique les notions introduites ci-dessus, nous allons considérer un
exemple en mécanique des structures, une barre en tension-compression. Ce problème offre
une résolution très simple, ceci nous permettra d’évaluer la pertinence des approximations
numériques utilisées dans un second temps. Nous allons d’abord envisager une résolution
directe par différences finies, puis par les méthodes de collocation à partir de la formulation de
type ’Résidus Pondérés’, et enfin grâce à la formulation faible qui nous permettra d’aboutir à
la formulation d’un élément fini en tension.
Considérons une poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan telle que vu au
§2.1. Cette poutre de section constante (section S = largeur b x hauteur h) et constituée
d’un matériau homogène élastique isotrope (module d’Young E, masse volumique ρ) travaille
uniquement en tension-compression. Comme indiqué sur la Figure 6.2, elle est bloquée en
déplacement à son origine u(x = 0) = 0 et soumise à une déplacement donné à son extrémité
Approximations numériques 148

u(x = l) = ud . Cette poutre est soumise à un effort linéïque correspondant à son poids propre
(ρgS). Les équations caractérisant cet équilibre s’écrivent :

Figure 6.2: Poutre droite soumise à son propre poids et un déplacement imposé.

1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.

u(0) = 0 et u(x = l) = ud

2. Équilibre intérieur
dN (x)
+ ρgS = 0
dx
3. Équilibre au bord et discontinuités
4. Loi de comportement
du(x)
N (x) = ES
dx

5. Relations utiles : tension :


m N (x)
σxx (x) =
S(x)
Approximations numériques 149

6.3.1 Solution analytique


La solution analytique de ce problème est facilement déduite de la résolution analytique,
elle est représentée sur la Figure 6.3 ci-dessous et s’écrit :
ud x ρgx

u(x) =(x − l) (6.15)
l 2E
Pour la suite des applications numériques, nous considérons les valeurs suivantes pour les
grandeurs physiques du problème :
— longueur de la poutre l = 1 m
— section de la poutre h = 20 mm et b = 10 mm
— module d’Young du matériau constitutif E = 210 · 103 N.m−2
— masse volumique du matériau rho = 7, 8 · 103 kg.m−3
— accélération de la pesanteur g = 9, 8m.s−2
— déplacement imposé ud = 5 cm ;

0.09 Solution analytique

0.08

0.07
Déplacement (m)

0.06

0.05

0.04

0.03

0.02

0.01

0
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
x (m)

Figure 6.3: Solution analytique pour le cas d’une poutre droite correspondant à la Figure 6.2.

6.3.2 Résolution par différences finies


La méthode des différences finies est une méthode de résolution directe, au même titre
que l’intégration analytique des équations. Cette méthode bien connue consiste à remplacer les
Approximations numériques 150

dérivations, soit les variations d’une quantité par rapport à une longueur ou un temps élémen-
taire (infinitésimale), par des différences de cette même quantité évaluée en des points précis
éloignés d’une distance (d’un temps) finie connue. On effectue un ’découpage’ du problème à
résoudre.
Dans notre cas, considérons n + 1 points également répartis le long de l’axe de la
poutre (entre x = 0 et x = l), tels que l’abscisse d’un point xi = i∆x (avec ∆x = nl et
i = 0, . . . , n) est connue à partir de l’indice i. En ces points xi , le déplacement, noté ui , est
recherché. Comme indiqué, cherchons à exprimer la différentielle totale d’ordre 2 caractérisant
l’équilibre de notre problème aux points intérieurs du domaine (i = 1, ..n − 1) comme la
différence de ces déplacements pris à des points distants de ∆x, soit une différence centrée
d’ordre 2. Finalement, notre problème s’écrit :

 
d du(x)
ES + ρgS = 0 , ∀x ∈ [0, l] et u(0) = 0, u(l) = ud
dx dx
n−1   (6.16)
X ui+1 − 2ui + ui−1
ES 2
+ ρgS = 0 et u0 = 0, un = ud
i=1
∆x

Concernant les conditions aux limites, elles doivent être prises en compte directement
dans le système à résoudre. Les conditions de Dirichlet sont prises en compte en imposant
la valeur donnée à l’inconnue au point correspondant. Ici, il s’agit de u0 = 0 et un = ud . Si
une condition de Neumann devait être imposée (N (l) = N d par exemple), il faudrait alors
raisonner à l’aide d’une différence finie prenant en compte la valeur connue la plus proche : u0
ES
et u1 ou un−1 et un (N (l) = N d ∆x
(un − un−1 ) = N d ).
Finalement, le système discret à résoudre est linéaire, de la forme
ρg
−ui+1 + 2ui − ui−1 = ∆x2 ,
E
ce qui conduit au système algébrique de forme tribande suivant dont la résolution fournit les
déplacements ui :
     
1 0 0 ... 0 0 0 
 u0   
 0 

   ρg

2 
 −1 2 −1 . . . 0 0 0  u ∆x
  
 
 
 

 1 
 
 E 


 0 −1 2 . . . 0
    ρg 2

 0 0 




 u 
2 





 E
∆x 



  
 
 
 

 . . . . . . .  
.
 
.

 .. .. .. . . .. .. ..  · .. = ..
 
  










 (6.17)
     
ρg
0 . . . 2 −1 0  ∆x2 
 0    
 0 


 un−2  



 E


   ρg

2 
 0 0 0 . . . −1 2 −1  u ∆x
  
 
 
 

 n−1  
 E 

d
   
0 0 0 ... 0 0 1  un   u 
| {z } | {z } | {z }
[K] · {Q} = {F }
Approximations numériques 151

La résolution de ce système fournit les solutions représentées sur la Figure 6.4 où sont
tracés les déplacements pour un nombre d’intervalles le long de la poutre correspondant à
n = 5, n = 10, n = 20, et n = 50. On vérifie bien que la solution approchée tend vers la
solution exacte. La particularité ici est que la solution exacte est polynômiale d’ordre 2, donc
assez facile à approcher. Si le calcul des contraintes est envisagé, il est réalisé à partir de cette
solution approchée en prenant des valeurs de déplacements ponctuelles, les ui .

0.08

0.07

0.06
Solution analytique
Déplacement (m)

0.05 n=50
n=20
0.04 n=10
n=5

0.03

0.02

0.01

0
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
x (m)

Figure 6.4: Solution analytique et par différences finies pour le cas d’une poutre droite corres-
pondant à la Figure 6.2.

En conclusion, l’intégration par différences finies de ce problème simple peut donner


satisfaction, en notant que le système est à réécrire quand les conditions aux limites changent.
Par contre, pour des problèmes plus complexes, avec des variations fortes de la réponse, la taille
du problème pour aboutir à une convergence convenable peut devenir conséquente puisqu’en
toute rigueur on tend vers la solution réelle quand n tend vers l’infini.
Approximations numériques 152

6.3.3 Méthodes de collocation


Les méthodes de collocation permettent de résoudre le problème initial, tel que posé
en 6.3 page 142, mais reformulé à l’aide des résidus pondérés (Eq. 6.4 page 142). Si nous
appliquons la même approche à notre cas particulier de barre, nous arrivons à la formulation
équivalente, utilisant un espace de fonctions test à définir et qui s’écrit :

Trouver une fonction u ∈ U (C.A.)/∀v ∈ V


Z l    
d du(x)
0 v · dx ES dx + ρgS dx = 0 (6.18)



avec les conditions aux limites

u(0) = 0 et u(l) = ud

Il reste maintenant, dans cette formulation intégrale, à préciser l’espace V dans lequel
les fonctions test vont être choisies, ce qui conduira à une résolution par collocation par point
et collocation par sous-domaine, comme indiqué de façon générale précédemment.

Collocation par points

Pour résoudre, comme par différences finies nous allons réaliser un découpage de la
géométrie, et ramener la résolution en des points particuliers. Conservons le découpage tel que
la solution soit recherchée en n + 1 points également répartis le long de l’axe de la poutre
(entre x = 0 et x = l), d’abscisse xi = i∆x (avec ∆x = nl et i = 0, . . . , n) connue à partir
de l’indice i. Choisissons comme espace V des fonctions test, l’ensemble des distributions de
Dirac associé à ces points : V = {δ− xi , i = 0..n}. La résolution consiste donc à trouver une

approximation de la fonction u(x) différentiable 2 fois, satisfaisant les conditions aux limites,
et annulant le résidu en chacun des points xi : R(→−u )|−
→ xi = 0, ∀i = 0..n. Puisqu’on travaille
x =−

sur une approximation de u(x) et non pas sur des valeurs ui comme dans le cas des différences
finies par exemple, on obtient alors n + 3 équations correspondant à l’équilibre écrit en les
n + 1 points, complété par les conditions aux limites ; soit pour des propriétés constantes de
la barre :

Z l    
d du(x)
v· ES + ρgS dx = 0
0 dx dx
n  (6.19)
d2 u
X 
ES 2 |xi + ρgS = 0 et u(x0 ) = 0 , u(xn ) = ud
i=0
dx
Si les grandeurs physiques dépendent de la position le long de la barre, elles seront donc
évaluées en les abscisses xi , les points de collocation.
Choisissons maintenant pour l’espace des solutions U l’espace des polynômes du type
u(x) = a0 + a1 x + . . . + ap xp . Compte-tenu des contraintes de dérivabilité fortes sur cette
Approximations numériques 153

solution, on doit au minimum avoir des polynômes d’ordre 2. Les 3 coefficients de ces poly-
nômes seront donc déterminés par les n + 3 relations, donc n = 0, ce qui correspond à une
collocation en un seul point. Il s’agit du minimum pour que l’approximation ait un sens. Dans
ce cas, le système à résoudre s’écrit :
     
1 0 0  a
 0  
  0 

ρg
 0 0 2 · a1 = −E (6.20)
 
2 d 
   
1 l l  a2   u

on en déduit immédiatement la solution : a0 = 0, a1 = ud


l
− a2 l et a2 = − 2ρgE soit la solution
exacte : u(x) = udl x − ρg
2E
x
(x − l).
De façon générale, l’espace U doit correspondre aux polynômes d’ordre n + 2 (avec
n ≥ 0 le nombre d’intervalles). Avec une approximation du type u(x) = a0 + a1 x + a2 x2 +
. . . + an+2 xn+2 le système à résoudre dépend bien des valeurs prises par les grandeurs mises
en jeu dans l’équation à résoudre, et notamment la dérivée seconde du déplacement évaluée
aux xi , il s’écrit :
   
1 0 0 0 ... 0 
 a0  

0

   
   
 
 ρg


 0 0 2 6x1 . . . (n + 2)(n + 1)xn  
 1  

 a 1







 − E




   ρg 
 .. .. ..

.. ..
  .
.

 
 − E 


.
   
 . . . . .    
..

 · = .  (6.21)
 0 0 2 6xn . . . (n + 2)(n + 1)xnn  
 
an 
 
− ρg
   
  
 



 E 


 n
    
 0 0 2 6xn+1 . . . (n + 2)(n + 1)xn+1   ρg 

  
  
 a n+1





 E 


  
   d 
1 l l 2
l 3
... l n 
 an+2

 u

Comme on peut le constater, le système est relativement mal conditionné (pas de


propriété remarquable de [K] comme pour les différences finies par exemple). De plus, lorsque la
géométrie devient complexe, la taille du système augmente considérablement, ainsi que l’ordre
des polynômes. On peut alors, par connaissance du problème, travailler sur une distribution
non-régulière de points dans les zones de fort gradient par exemple. C’est d’ailleurs le choix de la
position et du nombre de ces points où sont évaluées les quantités qui peut être problématique.
On notera enfin que dans ce type de méthode le choix de l’approximation doit être consistante
avec le choix du nombre de points, i.e. il doit conduire à un système inversible, comportant
donc un nombre de relations égal au nombre de coefficients à identifier. Ici, le choix des
polynômes d’ordre n + 2 permet d’aboutir à un système de n + 3 équations à n + 3 inconnues.

Collocation par sous-domaines

Le découpage du domaine sur lequel le problème doit être résolu conduit ici à définir
des volumes de contrôle, ou des longueurs dans notre cas 1D. Comme précédemment, ces n
segments de longueur ∆x = nl sont délimités par les n + 1 points d’abscisse xi−1 = (i − 1)∆x
Approximations numériques 154

et xi = i∆x pour i = 1, . . . , n. Le déplacement ui supposé constant sur chaque longueur


de contrôle li = [xi−1 , xi ] sera supposé positionné en son centre. Comme indiqué en début
de ce chapitre, choisissons comme espace V des fonctions test V = {δΩi , i = 1..n}, soit des
fonctions tests constantes sur chaque sous-domaine et non nulles uniquement sur ce sous-
domaine. Finalement, la résolution consiste à trouver la distribution des ui (x), satisfaisant
les conditions aux limites, et annulant le résidu sur chaque sous-domaine li : R(→−
u )|Ω=Ωi =
0, ∀i = 1..n.
Les dérivées peuvent, par exemple, être calculées par différences finies. On rappelle
que les fonctions de pondération sont choisies constantes sur chaque longueur de contrôle.
On obtient alors n équations linéaires qui expriment le résidu sur chaque sous-domaine. Si
les grandeurs physiques (propriétés, chargement extérieur, . . .) dépendent de la position sur
chaque longueur de contrôle, il faut évidemment calculer les intégrales correspondantes. Dans
notre cas, le problème à résoudre formulé en 6.18 devient :
Z l    
d du(x)
v· ES + ρgS dx = 0
0 dx dx
n−1 Z xi    (6.22)
X ui+1 − 2ui + ui−1 d
ES + ρgS dx = 0 et u1 = 0, un = u
i=2 xi−1 ∆x2

qu’on exprime sous la forme d’un système linéaire intégrant les conditions aux limites associées :

 
0
   
1 0 0 ... 0 0 0 
 u1 







   
−1 2 −1 . . . 0 0 0
     R x2 
ρg
   






 u2 




 x1 E
∆x dx 


 0 −1 2 . . . 0 0 0  











x3
 u3
ρg
     R 
  
 
 

 x2 E
∆x dx 

.. .. .. .. .. ..
 
 .. 
 · =
 . . . . . . . ..
   .   ..  (6.23)












 . 


. . . 2 −1 0
   

 0 0 0 









 R xn−1 ρg




0 0 0 . . . −1 2 −1
 
 un−1 
 
 ∆x dx


xn−2 E
  
 
 
 


 
 
 

0 0 0 ... 0 0 1 
un
 

ud


| {z } | {z } | {z }
[K] · {Q} = {F }

Dans notre cas, les grandeurs sont constantes, et leur intégration conduit à un se-
cond membre constant. Les résultats sont présentés sur la Figure 6.5. On vérifie que plus le
nombre de domaines augmente plus l’approximation tend vers la solution exacte. Si les ré-
sultats semblent moins précis, à taille de système équivalente, que la collocation par points
par exemple, ce type d’approximation est pourtant fréquemment utilisée, ceci pour 2 raisons
essentielles. Tout d’abord, dans des cas complexes la collocation par sous-domaines est plus
simple d’utilisation car plus systématique puisque les contraintes de dérivabilité n’apparaissent
pas ici, il n’y pas pas non plus de polynôme à choisir en fonction du problème à résoudre. En
Approximations numériques 155

second lieu, la collocation par sous-domaines conjugue une formulation simple de type diffé-
rences finies avec la notion de bilan par volume élémentaire très répandu dans des domaines
telles que la chimie ou la thermique où les inconnues scalaires sont facilement manipulées
connaissant les flux.

0.08

0.07

0.06
Déplacement (m)

0.05 Solution analytique


n=20
0.04 n=50
n=100
0.03

0.02

0.01

0
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
x (m)

Figure 6.5: Solution analytique et par collocation par sous-domaines pour le cas d’une poutre
droite correspondant à la Figure 6.2.

6.3.4 Méthode de Galerkin


Comme indiqué précédemment, la méthode de Galerkin telle qu’utilisée dans le second
exercice sur les plaques (§5.2.6 page 130), est à l’origine de la méthode par éléments finis.
Approximations numériques 156

Formulons notre problème de barre conformément à la formulation Eqs. 6.14



Trouver ũ ∈ U n tel que pour tout v ∈ V n :


Z 
l dũ(x) dv(x)

−ES + ρgS v(x) dx = 0

0 dx dx



avec U n = ũ ∈ H 1 ([0, l])/ũ = u? + u , ∀ x ∈ [0, l], avec u ∈ V n et ũ(0) = 0 , ũ(l) = ud


et V n = {v ∈ H 1 ([0, l])/v(0) = v(l) = 0}

(6.24)
Voyons maintenant le choix qui peut être réalisé pour les espaces de dimension finie
U et V n .
n

Fonctions polynômiales

Le choix des bases de fonctions d’approximation, définissant les espaces U n et V n , est


guidé par la contrainte de vérifier les conditions essentielles. Considérons, de façon générale,
que ces fonctions C.A. forment une approximation du type :
n
X
v(x) = βi φi (6.25)
i=1

où les βi sont n paramètres scalaires. La quantité à annuler correspondant au système 6.24


sous forme discrète devient alors la somme de n quantités :
n Z l
dũ(x) dφ(x)i
X 
i
βi −ES + ρgS φ(x) dx = 0, ∀ βi (6.26)
i=1 0 dx dx

Ces n quantités devant s’annuler quelles que soient les fonctions tests, soit quels que soient
les coefficients βi , on abouti à n équations indépendantes en u(x) à résoudre. Choisissons
maintenant l’espace U n des fonctions d’approximation de la solution construites à partir de
la somme d’une solution particulière, vérifiant notamment les conditions aux limites cinéma-
tiques, et de fonctions de l’espace des fonctions test V n , soit une approximation du type de
celle proposée de façon générale en 6.13, où les paramètres scalaires αi sont les inconnues à
déterminer : n
X
?
ũ(x) = u + αj φ(x)j (6.27)
j=1

On notera que si le terme particulier u? est une fonction de x, il dépend de données du problème
telles que des déplacement imposés, et sera donc présent dans le problème à résoudre comme
une partie du second membre. Ceci est illustré ci-dessous.
Approximations numériques 157

On aboutit finalement à un système linéaire carré symétrique de dimension n × n avec


les inconnues αj solution de :
n Z l  Z l Z l
dφ(x)j dφ(x)i du? (x) dφ(x)i
X  
i
ES dx αj = ρgS φ(x) dx − ES dx
j=1 0 dx dx 0 0 dx dx
(6.28)
Illustrons maintenant une des difficultés de cette méthode : le choix de la base d’ap-
proximation. Dans notre cas particulier, les conditions aux limites cinématiques sont u(0) = 0
et u(l) = ud . On doit donc considérer l’espace V n engendré par les polynômes ayant pour
racine x = 0 et x = l. Par exemple :
n
X
v(x) = βi (x (x − l))i (6.29)
i=1

où les βi sont n paramètres scalaires. Il en découle que l’approximation du champ réel s’écrit :

n
ud x X
ũ(x) = 2 (x + l) + αj (x (x − l))j (6.30)
2l j=1

car ce champ doit être C.A et vérifier, notamment, u(l) = ud . Le système finalement obtenu
s’écrit donc :
n Z l  Z l
X ij i+j−2
ES 2
(2x − l) (x (x − l)) dx αj = ρgS (x (x − l))i dx
0 4 0
j=1
Z l (6.31)
d
u i−1
−ES i 2 (2x + l) (2x − l) (x (x − l)) dx, ∀ βi
0 2l

Afin de simplifier les calculs, considérons le cas de cette même barre, mais dont l’origine
d
du repère est décalée de −l : 0 −l et l 0, et sur laquelle un effort Rd d’intensité ρ2E
gl
+ ul
est appliqué en x = −l. La solution dans ce cas est solution du problème reformulé pour faire
apparaître également le travail de l’effort terminal Rd affecté d’un signe − car la normale
sortante est orientée vers les →
−x négatifs :
 x  ρgx
u(x) = ud 1 + − (x + l) . (6.32)
l 2E
et la formulation intégrale faible devient :

Trouver ũ ∈ U n tel que pour tout v ∈ V n :


Z 0 
dũ(x) dv(x)
−ES + ρgS v(x) dx − Rd v(−l) = 0

−l dx dx



avec U n = ũ ∈ H 1 ([0, l])/ũ = u? + v , ∀ x ∈ [0, l], avec v ∈ V n et ũ(0) = ud


et V n = {v ∈ H 1 ([0, l])/v(0) = 0}

(6.33)
Approximations numériques 158

On vérifie que cet effort Rd appliqué en x = −l correspond bien à la condition u(−l) = 0.


Finalement, ceci nous donne comme condition essentielle u(0) = ud et comme condition
naturelle N (−l) = Rd . La condition C.A.(0) pour les fonctions tests, soit u(0) = 0 ici, nous
permet d’utiliser une approximation par des monômes xi (i = 1, . . . , n) :
n
X
v(x) = β i xi (6.34)
i=1

La quantité à annuler correspondant au système 6.33 sous forme discrète devient alors la
somme de n quantités :
n Z 0   
X dũ(x) i−1 i d i
βi −ES i x + ρgS x dx − R (−l) = 0 (6.35)
i=1 −l dx

L’espace U n est construit à partir de fonctions C.A. complétées par des fonctions issues de
l’espace des fonctions test V n , soit :
n
X
ũ(x) = ud + α j xj (6.36)
j=1

où les paramètres scalaires αi sont les inconnues à déterminer. En introduisant cette approxi-
mation dans l’expression (6.35) valable pour tout coefficient βi , on aboutit finalement à un
système linéaire carré symétrique de dimension n × n :
Xn Z 0  Z 0
i+j−2
ES j i x dx αj = ρgS xi dx − Rd (−l)i (6.37)
j=1 −l −l

ou encore, sous une forme proche de celle des approximations précédentes :


 Z 0 Z 0 Z 0   Z0 
dx 2x dx ... nx n−1
dx    ρg Rd
x dx − (−l)
 
 Z 0−l α 1

−l E ES

Z −l Z−l0
 
 
 
 

0
 
 
 
 

Z 0
Rd
     
2x dx 4x2 dx ... n
2nx dx  α ρg 2
   
 2  x dx − (−l)2
 
  
 

E ES
    
−l −l −l −l
 · =
 
 .
.. ... .. .. .
..  ..

 . . 











 .




  
 
 
 

Z 0
Rd
 Z     
 0 Z 0 Z 0 
 α   ρg n 
(−l)n
   
nx n−1
dx 2n xn dx ... n2 x2n−2 dx n 
 x dx − 

| {z } −l E ES
| −l −l
{z −l
} | {z }
[K] · {Q} = {F }
(6.38)
avec les composantes des matrices du système discret :
Z 0
Kij = ES j i xi+j−2 dx
−l
Qi = αi (6.39)
Z 0
Fi = ρgS xi dx − Rd (−l)i
−l
Approximations numériques 159

La résolution de ce système conduit aux résultats présentés sur la Figure 6.6 ci-dessous.
Pour n = 1, soit une approximation linéaire, on ne vérifie que les conditions aux limites
évidemment, et pour n = 2, on retrouve la solution exacte qui est parabolique (Eq. 6.32).

0.08

0.07

0.06
Solution analytique
n=1
Déplacement (m)

0.05
n=2

0.04

0.03

0.02

0.01

0
−1 −0.8 −0.6 −0.4 −0.2 0
x (m)

Figure 6.6: Solution analytique et par approximation polynômiale dans la méthode de Galerkin
pour le cas d’une poutre droite correspondant à la Figure 6.2.

On voit que la convergence vers la solution exacte dépend de la dimension n des espaces
choisis. Les avantages de cette méthode sont nombreux. En premier lieu, elle permet de pro-
poser une écriture assez systématique pour les grandeurs [K] et {F }. D’autre part le système
obtenu est symétrique défini positif, ne posant donc pas de problème particulier pour être ré-
solu par des solveurs directs standards. Par contre, pour des problèmes même simples, on peut
arriver rapidement à des systèmes de taille conséquente. La prise en compte de gradients, ou
d’effets locaux, est notamment difficile avec ce type d’approches car l’interpolation doit être
suffisamment riche, ce qui implique que la taille du système croît extrêmement rapidement.
D’autre part, dans le cas de problèmes bi ou tri-dimensionnels la recherche de solution appro-
chée vérifiant les conditions aux limites essentielles s’avère souvent impossible. Pour
pallier à ces inconvénients, l’utilisation de polynômes d’ordre élevé peut être remplacée par
l’utilisation de plusieurs fonctions définies sur des sous-domaines. Ceci correspond notamment
Approximations numériques 160

à la méthode des éléments finis étudiée ci-dessous.

Méthode de Ritz

Pour être complet, il faut indiquer qu’une méthode aboutissant au même système (Eq.
6.38) est souvent rencontrée dans la littérature sous le nom de méthode de Ritz (W. Ritz,
mathématicien suisse, 1878-1909). Cette méthode est utilisée sous le nom de Ritz-Galerkin en
mécanique et dans une procédure itérative nommée Rayleigh-Ritz en dynamique/physique des
ondes. Dans le cas qui nous intéresse, cette méthode variationnelle consiste à rechercher la
solution réelle dans un espace de dimension finie U n en partant de l’énergie du système, soit
l’énergie potentielle π(u) dans notre cas. L’approximation de la solution est introduite dans
cette énergie, et la solution qui rend stationnaire cette énergie est celle qui annule sa première
variation. On aboutit finalement à n équations à n inconnues, équivalent au même système
que celui de l’Eq. 6.26, et finalement au même système carré défini positif que celui de la
méthode de Galerkin (Eq. 6.37) :

∂π(ũ)
π(u) ' π(ũ) δπ(ũ) = δũ = 0, ∀δũ ∈ V n
∂αi
∂π(ũ)
⇔ = 0, i = 1, . . . , n
∂αi ! ! !! !
n n n
1 0
Z
∂ d X d X X
⇔ ES α i xi αj xj − ρgS α i xi dx − Rd (−l)i = 0
∂αi 2 −l dx i=1 dx j=1 i=1
j=n Z 0  Z 0
X
ES j i xi+j−2 dx αj = ρgS xi dx − Rd (−l)i , i = 1, . . . , n


j=1 −l −l

⇔ (Eq. 6.37, Galerkin)


(6.40)

6.3.5 De la méthode de Galerkin aux éléments finis


Partant de cette méthode de Galerkin, nous allons dans un premier temps lever une des
difficultés qui porte sur l’ordre élevé de l’approximation, en travaillant sur des sous-domaines sur
lesquels l’approximation peut être plus basique. Conservons pour cela le découpage utilisé pour
la collocation par sous-domaine, et tel que la barre soit l’union de n segments de longueur
lx = nl délimités par n + 1 points. Afin de travailler sur ces sous-domaines, l’espace des
fonctions test est composé de fonctions continues qui varient linéairement sur chaque segment
li = [xi−1 , xi ], comme présenté sur la Figure 6.7 et définies telles que :
 x−x
i−1

 si xi−1 ≤ x ≤ xi

 lx
Ni (x) = xi+1 − x (6.41)
si xi ≤ x ≤ xi+1


 lx
0 sinon

Approximations numériques 161

On notera que n + 1 fonctions sont générées ainsi, en prolongeant aux extrémités les fonctions
telles que N1 (−l) = Nn+1 (0) = 1, soit x0 = −(l + lx ) et xn+2 = lx .

Figure 6.7: Fonctions linéaires par morceaux.

L’espace des fonctions test choisi doit assurer que les fonctions sont C.A.(0)(v(0) =
Nn+1 (0) = 0 ici), prenons les niemes première fonctions Ni (x) (i = 1, . . . , n) :
n
X
v(x) = βi Ni (x) (6.42)
i=1

L’approximation d’ordre n ainsi obtenue est formée de la combinaison linéaire de valeurs


v1 , v2 , . . . , vn prises par les fonctions aux points x1 , x2 , . . . , xn . Entre ces points, la fonction est
interpolée linéairement par construction des fonction Ni (x). La quantité à annuler représentant
l’équilibre s’écrit alors :
n Z 0   
X dũ(x) dNi (x)
βi −ES + ρgS Ni (x) dx − Rd N1 (−l) = 0, i = 1, . . . , n
i=1 −l dx dx
(6.43)
l’information sur l’effort terminal apparaissant naturellement en x = −l, c’est-à-dire en produit
avec la fonction N1 (x) définie telle que N1 (−l) = 1. Comme précédemment, on introduit
dans cette quantité nulle pour tout βi l’approximation du champ solution qui est de la forme
’champ C.A.’ + ’approximation issue de V n ’, où le champ C.A. est représenté par le terme
u? = Nn+1 (x)ud avec Nn+1 (x) définie telle que Nn+1 (0) = 1 :
n
X
ũ(x) = Nn+1 (x)ud + uj Nj (x) (6.44)
j=1

où les paramètres scalaires ui sont les inconnues à déterminer. En introduisant cette approxi-
mation dans l’expression 6.43 on aboutit finalement à un système linéaire carré symétrique de
dimension n × n de la forme du système 6.38 :
n Z 0  Z 0
X dNj (x) dNi (x)
ES dx uj = ρgS Ni (x) dx − Rd N1 (−l), i = 1, . . . , n
j=1 −l dx dx −l
(6.45)
Approximations numériques 162

ou encore, sous une forme proche de celle des approximations précédentes :


n
X
Kij Qj = Fi , i = 1, . . . , n (6.46)
j=1

avec les composantes des matrices du système discret :


 Z 0
dNj (x) dNi (x)
Kij = ES dx





 −l dx dx
 Z 0
(6.47)

 Fi = ρgS Ni (x) dx − Rd N1 (−l)

 −l


Qi = ui ,les déplacements aux abscisses xi

Si on construit ce système, les calculs des composantes Kij et Fi se font en prenant


en compte le domaine de définition des fonctions de l’espace test V n . Ces fonctions sont en
effet définies telles que Ni (x) 6= 0 pour x ∈ [xi−1 , xi+1 ]. Les intégrales sont donc définies sur
ce même intervalle de longueur 2 lx et non plus sur toute la poutre. On se ramène bien à une
résolution locale. Par exemple :
Z 0
dNj (x) dNi (x)
Kij = ES dx
−l Z dx dx
min(xj+1 ,xi+1 ) (6.48)
dNj (x) dNi (x)
= ES dx
max(xj−1 ,xi−1 ) dx dx

car les fonctions sont définies par morceaux, comme illustré sur la Figure 6.8 ci-dessous.

Figure 6.8: Distribution des fonctions d’approximation pour notre problème de poutre.

En utilisant la définition des fonctions d’approximation (Eq. 6.41), on calcule les termes
de la matrice de rigidité. Par exemple, pour les premières fonction de forme N1 (x)/x ∈ [x1 , x2 ]
Approximations numériques 163

et N2 (x)/x ∈ [x1 , x3 ] :
Z x2
dN1 (x) dN1 (x)
K11 = ES dx
x1 dx dx
ES
=
lx
Z x3
dN2 (x) dN2 (x)
K22 = ES dx
Zx1x2 dx dx Z x3
dN2 (x) dN2 (x) dN2 (x) dN2 (x)
= ES dx + ES dx
x1 dx dx x2 dx dx
(6.49)
2 ES
=
lx
Z x2
dN1 (x) dN2 (x)
K12 = ES dx
x 1
Z x2  dx  dx

1 −1
= ES dx
x1 lx lx
−ES
=
lx
et ceux du vecteur des efforts extérieurs :
Z 0
F1 = ρgS N1 (x) dx − Rd N1 (−l)
Z−lx2  
x2 − x
= ρgS − Rd
x1 lx
= ρgS l2x − Rd
(6.50)
Z 0
F2 = ρgS N2 (x) dx − Rd N2 (−l)
Z−lx2   Z x3  
x − x2 x3 − x
= ρgS dx + ρgS dx
x1 lx x2 lx
= ρgSlx

On voit que les seuls termes non nuls de la matrice de rigidité, ceux pour lesquels une
partie de l’intervalle de définition des fonctions Ni (x) et Nj (x) est commun, sont les termes de
type |i − j| ≤ 1. Une explication ’mécanique’ peut être donnée à ceci, il s’agit de l’assemblage
des rigidités définies sur chaque intervalle, ce que nous verrons dans la suite. Finalement, le
système à résoudre est un système tri-diagonale de la forme :
Approximations numériques 164

 2

   1 ρglx R d lx

u1 −
1 −1 0
 2 E ES

... 0 0 











    
 −1 2 −1 ... 0 0
    2

  u2

 
 ρglx 

   
 
 E


   
 
 

    
 0 −1 2 ... 0 0
    2

  u3 ρglx
 
 
 

   
 
 E


· = (6.51)
 
 .. .. .. .. .. .. ..
 . . . . . .   .   .. 


 
 









 . 



   
 
 

 ... ... ...
 ... 2 −1  
 

 un−1








2
ρglx




   
 
 E 


 
 
 

... ... ... . . . −1 2 
 un

 

 2
1 ρglx



2 E

0.08

0.07

0.06
Déplacement (m)

0.05 Solution analytique


n=2
0.04 n=5
n=10
0.03

0.02

0.01

0
−1 −0.8 −0.6 −0.4 −0.2 0
x (m)

Figure 6.9: Solution analytique et par éléments finis pour le cas d’une poutre droite corres-
pondant à la Figure 6.2.

Comme précédemment on vérifie sur la Figure 6.9 que plus la dimension de l’espace
d’approximation est grande, plus on approche la solution exacte. Cette approximation corres-
pond à une approximation de type éléments finis qui présente les mêmes avantages qu’une
approche de type Galerkin, i.e. conduit à un système carré symétrique défini positif. Par contre
Approximations numériques 165

une telle approche présente un double avantage par rapport aux autres approximations : le
découpage, ou maillage, du domaine étudié permet de diminuer le degré des fonctions d’ap-
proximation par rapport aux approximations polynômiales recherchées sur le domaine d’étude,
et les coefficients solution ont une signification physique directement interprétable par l’in-
génieur, il s’agit des valeurs prises par l’approximation du champ solution aux noeuds du
maillage puisqu’en ces points les fonctions d’approximation sont unitaires. Enfin, le recours
aux intégrations numériques permet de rendre systématique l’utilisation de cette technique,
ces intégrations numériques sont très souvent du type intégration de Gauss.
Il reste, afin de rendre l’utilisation de ce type d’approximations plus ’intuitif’, à donner
un sens physique aux grandeurs intervenant dans l’équilibre écrit sur le domaine, et considérés
sur chaque sous-domaine. De plus, les conditions aux limites de Dirichlet, qui peuvent s’avérer
problématique à prendre en compte dans les cas complexes, doivent être traitées de façon plus
systématique. Une vision de ce type est proposée ci-dessous.

Les éléments finis en mécanique des structures

La méthode des éléments finis, pour être utilisable ’en routine’ doit être systématique
dans son écriture, son implémentation, et son utilisation. Illustrons cela sur la formulation
d’un élément fini de barre en tension correspondant au problème de notre barre soumise à son
propre poids.
Soit un élément de barre défini par ses abscisses x1 et x2 et les déplacements u1 et u2
correspondants mesurés en ces points. On choisit, indépendamment des conditions aux
limites de Dirichlet, une interpolation linéaire pour le déplacement, i.e. le déplacement à
l’intérieur de l’élément (x ∈ [x1 , x2 ]) est une combinaison linéaire des déplacements nodaux
u1 et u2 :
ue (x) = u1 N1 (x) + u2 N2 (x)
( )
u1 (6.52)
= < N1 (x) , N2 (x) > ·
u2
= < N (x) > · {u}
Ce type d’approximation basé sur la valeur du déplacement nodal nous assure également que
le déplacement est continu entre 2 éléments contigüs.
Pour des raisons de commodité de stockage, et également pour assurer une bonne
précision des intégrations numériques des quantités élémentaires, il est classique de recourir
à un élément de référence. Cet élément fictif possède une géométrie fixe permettant de ne
pas faire apparaître explicitement les bornes d’intégration de l’élément réel dans les calculs et
également de s’assurer que la géométrie sur laquelle ces calculs sont réalisés ne se déforme
pas, ce qui assure une qualité optimale des intégrations numériques. Considérons cet élément
de référence défini pour la variable ξ ∈ [−1, 1] tel que présenté sur la Figure 6.10 ci-dessous.
Approximations numériques 166

Figure 6.10: Définition de l’élément réel et de l’élément de référence.

Dans ce cas, le passage entre l’élément réel et l’élément de référence se fait en écrivant la
position sur l’élément réel comme la combinaison linéaire des positions connues aux extrémités
de l’élément, soit :
xe (ξ) = x1 N1 (ξ) + x2 N2 (ξ) (6.53)
ce qui équivaut à une interpolation géométrique linéaire, tout comme l’interpolation en dépla-
cements. L’élément fini que nous formulons ici est dit isoparamétrique. Les expressions de ces
fonctions d’interpolation s’établissent aisément en écrivant que d’après 6.52, on a :

ue (x1 ) = u1 N1 (−1) + u2 N2 (−1) = u1


(6.54)
ue (x2 ) = u1 N1 (1) + u2 N2 (1) = u2

soit des fonctions d’interpolation :


ξ−1

 N1 (ξ) = −


2
(6.55)
 N2 (ξ) = ξ + 1


2

Revenons maintenant au problème de notre barre telle que présentée sur la Figure 6.2
page 148. Lorsque nous formulons l’élément fini, nous cherchons à résoudre le problème de
l’équilibre de cette barre dans son ensemble, écrit dans les Eqs. 6.24, et plus précisément
l’expression :
Z 0 
dũ(x) dv(x)
−ES + ρgS v(x) dx = 0 , ∀v C.A.(0)+ cond. limites
−l dx dx

Introduisons, comme dans la méthode de Galerkin, l’approximation du champ test v dans cette
expression. Cette approximation est de la forme proposée dans l’Eq.6.52, où les déplacements
nodaux u1 et u2 se réfèrent aux déplacements mesurés aux extrémités de chacun des éléments
de longueur le . Comme la barre est maintenant maillée par des éléments de longueur le ,
Approximations numériques 167

l’intégrale sur la barre devient égale à la somme des intégrales des grandeurs définies pour
chaque élément e :
Z ( )!
dũ(x) d v1
−E e S e < N1 (x) , N2 (x) > · dx . . .
le dx dx v2
Z ( )! (6.56)
v1
... + ρe gS e < N1 (x) , N2 (x) > · dx
le v2

Les conditions aux limites de Dirichlet et de Neumann seront introduites ultérieurement dans
le système. Pour simplifier les écritures, supposons que les grandeurs physiques ne varient
pas sur la longueur de l’élément. En introduisant enfin l’approximation de u(x) par la même
interpolation linéaire, nous aboutissons au système caractérisant l’équilibre d’un élément :
Z ( )T ( )
v1 d T d u1
−E e S e < N1 (x) , N2 (x) > < N1 (x) , N2 (x) > dx . . .
le v2 dx dx u2
( )T Z
v1
. . . + ρe gS e < N1 (x) , N2 (x) >T dx = 0 ,
v2 le
( )T
v1
∀ C.A.(0)+ cond. limites + cond. raccord
v2
(6.57)
Considérant que notre poutre est maillée avec des éléments numérotés de 1 à n et que
les n + 1 degrés de liberté correspondants sont numérotés de façon à ce que l’élément i ait
pour extrémités xi et xi+1 , l’équilibre discrétisé de notre poutre s’écrit :
Z x2 ( )T ( )
v1 d d u1
−E 1 S 1 < N1 (x), N2 (x) >T < N1 (x), N2 (x) > dx
x1 v2 dx dx u2
Z x3 ( )T ( )
v2 d d u 2
−E 2 S 2 < N1 (x), N2 (x) >T < N1 (x), N2 (x) > dx . . .
x2 v3 dx dx u3
Z xn+1 ( )T ( )
vn d d un
−E n S n < N1 (x), N2 (x) >T < N1 (x), N2 (x) > dx
xn vn+1 dx dx un+1
Z x2 ( )T
v1
+ρ1 gS 1 < N1 (x), N2 (x) >T
x1 v2
Z x3 ( )T
v2
+ρ2 gS 2 < N1 (x), N2 (x) >T . . .
x2 v3
Z xn+1 ( )T
vn
+ρn gS n < N1 (x), N2 (x) >T dx = 0 , ∀{v}T C.A.(0)+ cond. limites
xn vn+1
(6.58)
On voit bien, dans cette formulation que les noeuds ’intermédiaires’ vont contribuer 2 fois à
la rigidité et aux efforts appliqués sur l’ensemble. Ceci rejoint la remarque sur les intégrations
Approximations numériques 168

des éléments de la matrice de rigidité dans la méthode de Galerkin (Eqs. 6.49 page 163) ci-
dessus, où cette contribution apparaissait naturellement au travers du domaine de définition
des fonctions d’approximation. Ici, les éléments finis sont intuitivement assemblés par rap-
port aux degrés de liberté communs. Le système qui en découle est très simple, tridiagonal
symétrique carré et défini positif, identique aux conditions aux limites prés au système issu
de l’approximation de Galerkin (Eqs. 6.51 page 164) puisque les interpolations sont linéaires
également.
Notons que l’assemblage des grandeurs élémentaires, en 2D et 3D ou plus généralement
dés que les connectivités deviennent multiples, ne conduit pas à ce type de système car les
noeuds peuvent être communs à plusieurs éléments. Il s’agit alors de stocker les grandeurs
globales du système de façon à minimiser la largeur de bande, caractéristique du nombre
d’inversions à effectuer pour calculer la solution.
Comme nous utilisons un élément de référence pour généraliser les calculs, définissons
les grandeurs élémentaires calculées sur un élément de longueur le . On remarquera que dans
nos calculs d’intégrales sur l’élément de référence, il faut prendre en compte le rapport de
longueur entre l’élément réel et l’élément de référence, car d’après les fonctions de forme de
l’interpolation géométrique (Eq. 6.55) choisie :
dxe dN1 (ξ) dN2 (ξ) x1 x2 le
= x1 + x2 =− + = (6.59)
dξ dξ dξ 2 2 2
ainsi :
x2 1
le
Z Z
(·)dx =(·) dξ (6.60)
x1 −1 2
et de même, les différentielles devront être exprimées dans cet élément, par exemple
 
d· d· dξ d· 2
= = . (6.61)
dx dξ dx dξ le
Les quantités élémentaires s’écrivent donc :
Déplacements nodaux qie = ui
Z xi +1
dNj (ξ) dNi (ξ)
Rigidité Kije = E S e e
dx
x i
Z 1  dx dx
2 dNj (ξ) 2 dNi (ξ) le
   
e e
= E S dξ
−1 le dξ le dξ 2
Z 1  
dN j (ξ) dN i (ξ) 2
= E eS e dξ
−1 dξ dξ le (6.62)
E eS e


 si i = j
= le
e e
 − E S si i 6= j

lZe 1  e
l
Efforts extérieurs Fie = e e e
ρg S Ni (ξ) dξ
−1e  2
l
= ρe g e S e
2
Approximations numériques 169

Figure 6.11: Barre en tension modélisée avec 2 éléments finis.

Posons le système à résoudre pour une discrétisation en 2 éléments de notre barre en


tension soumise à son propre poids, tel que sur la Figure 6.11-a. Les conditions aux limites du
problème avec changement d’origine sont N (−l) = Rd et u(0) = ud . La condition aux limites
de Neumann est introduite directement dans le système puisque la contribution de cet effort
ponctuel agit comme un force extérieure produisant un travail dans le déplacement u1 . Comme
dans le cas de la méthode de Galerkin, cette condition de Neumann est prise en compte très
facilement. La condition de Dirichlet est quant à elle prise en compte par élimination, avec
une méthode vue ci-après. Le système avec effort terminal s’écrit donc :
    
e e le d
1 −1 0  u1  ρ gS 2 − R
E eS e 
 
  

 −1 1 + 1 −1  u2 = ρe g e S e l e (6.63)

le  u = ud
   ρe g e S e l e
  
0 −1 1 3 2

La longueur le des éléments étant égale à la demi-longueur de la poutre réelle, et


les propriétés matériaux et géométriques étant les mêmes pour ces éléments, notre système
devient :
1 ρg l 2
   
Rd l
 
1 −1 0  u1
 
   2 E 2 − ES 2  
ρg l 2
 −1 2 −1  u2 = (6.64)
 
E 2 
d  ρg l 2
   1

0 −1 1  u3 = u 
2 E 2

ce qui correspond bien au système (6.51) obtenu précédemment, en définissant des fonctions
de forme locales sur chaque sous-domaine. Mais ici la présentation de la méthode permet une
approche plus physique, puisque les grandeurs globales que sont la rigidité et le chargement
extérieur peuvent être vues simplement comme la somme des contributions de chaque élément
à l’ensemble.
Il reste enfin à prendre en compte la condition aux limites de Dirichlet qui ici n’est pas
incluse dans l’espace des solutions. Pour simplifier les choses, revenons au problème initial de
la Figure 6.11-b tel que u(0) = 0 et u(l) = ud . Soit, en termes de degrés de liberté (ddl) :
u1 = 0 et u3 = ud . La condition homogène peut être traitée en réduisant le système, i.e. en
éliminant les contributions relatives à ce degrés de liberté. On obtient bien une solution à ce
problème qui n’est plus singulier puisqu’un mouvement de corps rigide est bloqué, ce qui assure
de pouvoir solliciter la structure. Mais dans les codes de calcul industriels, l’assemblage des
Approximations numériques 170

grandeurs élémentaires est une opération coûteuse, et redimensionner le système obtenu est
très rarement employé. On préférera garder la taille du système en annulant les contributions
correspondants au ddl et le terme diagonal à l’unité :
    
1 0 0  u1
 
   0  
l2
 0 2 −1  u2 = ρg 4 (6.65)
 
d  l2 
   
0 −1 1  u3 = u  ρg 8

Dans le cas de conditions non-homogènes, on peut procéder de plusieurs façons, et notam-


ment par élimination. Il s’agit de la solution la plus directe que nous utiliserons ici pour des
raisons de clarté, mais qui dans les codes industriels n’est jamais employée pour les raisons
de redimensionnement évoquées précédemment. On préférera plutôt procéder par pénalisation
(ou méthode du terme diagonal dominant) ou en introduisant des inconnues supplémentaires
appelées Multiplicateurs de Lagrange, le principe étant d’introduire des grandeurs équivalentes
aux efforts de réaction produits par ces ddls imposés.
De façon générale, si nD conditions de Dirichlet sont imposées, le système à résoudre
possède (en 3D), 3n − nD ddl car le champ test est C.A.(0) (équilibre ∀→ −v C.A.(0)), i.e. les
déplacements imposés sont annulés. Ceci conduit à annuler le travail virtuel des efforts de
réaction. Considérons plutôt le cas où ce champ test est simplement C.A. L’équilibre s’écrit
alors :
)T  T
( )T (
[K ] [K ]
( ) ( ) ( )
{vl } ll bl {u } {v } {F } {v }
l l l l
  − −{vb }T {Rb } = 0 , ∀ C.A.
{vb } [K ] [K ] {ub } {v b } {F b } {v b }
bl bb

où les termes de rigidité relatifs aux ddls libres notés {ul } sont regroupés dans une sous-matrice
[Kll ] et un vecteur des efforts extérieurs connus {Fl }. De la même façon, les termes relatifs
aux nD ddls imposés notés {ub } sont regroupés dans la sous-matrice [Kbb ] et un vecteur des
efforts extérieurs connus {Fb } complété par les efforts de réaction {Rb }. La sous-matrice [Kbl ]
relie les contributions ’croisées’ des ddls imposés et inconnus.
La solution recherchée {ul } est donc solution de :

[Kll ] {ul } = {Fl } − [Kbl ]T {ub }



avec {ub } = ud . Dans notre cas, la condition u3 = ud conduit à résoudre :

K22 u2 = F2 − K23 ud
l2 d (6.66)
⇔ u2 = ρg 8E + u2

l ud x ρgx
soit la solution exacte en x = 2
(pour mémoire u(x) = l
− 2E
(x − l)) tel que représenté
sur la Figure 6.9 page 164.
Pour information, l’utilisation d’une pénalité pour assurer u3 = ud reviendrait à imposer

une réaction R3 = α ud − u3 avec α un scalaire à choisir grand (de l’ordre de 105−8 , ou
plus généralement  max(Kij )). Le travail des efforts de réaction étant nul, la condition
Approximations numériques 171

sera d’autant mieux vérifiée que α sera grand. Par contre le système pourrait être moins bien
conditionné car en introduisant ces efforts de réaction, le système à résoudre est :
 
[Kll ] [Kbl ]T ( ) ( )
 {ul } {Fl }
= (6.67)
 
{ub } {Fb } + α ud
 
[Kbl ] [Kbb ] + α [I]

On remarquera par ailleurs que les réactions introduites n’apparaissent plus dans ce système
final où α peut être assimilé à une rigidité.

6.4 Élément fini de poutre de type Hermitte


Pour illustrer la méthode des éléments en mécanique des structures un peu plus lar-
gement, nous allons formuler un élément fini de flexion apte à résoudre des problèmes de
statique, mais également par extension permettant de déterminer les pulsations et modes de
résonnance ainsi que les charges de flambages et les modes associés. L’élément considéré
est particulier en ce sens qu’il n’est pas isoparamétrique, i.e. l’interpolation en déplacement,
qui permet d’exprimer le déplacement en tout point de la poutre comme la combinaison des
déplacements mesurés aux points de la discrétisation - les nœuds, n’est pas la même que
l’interpolation géométrique qui est introduite lorsqu’un élément de référence est utilisé pour
assurer la précision des intégrations numériques et l’utilisation de la méthode des éléments
finis de façon systématique.
Comme nous l’avons déjà vu, la méthode des éléments finis est une généralisation
de la méthode de Galerkin, basée sur la formulation faible du problème à résoudre. Cette
formulation faible peut être établie en intégrant par parties la forme forte du problème, ou
bien équivaut ici au Principe des Puissances Virtuelles écrit avec un champ de déplacement
test (virtuel) Cinématiquement Admissible à 0, i.e. nul sur tout le contour du domaine. Le PPV
est composé ici des termes classiques de puissance virtuelle des efforts intérieurs (δPint (δ → −
u ))


et de la puissance virtuelle des efforts donnés (δPext (δ u )), auxquels se superpose la puissance
virtuelle des efforts d’origine inertielle (δPacc (δ →

u )) dans le cas de la dynamique. La formulation
générale du PPV pour les poutres de type Bernoulli - poutres à plan moyen (O, → −
x ,→−
y ) chargées
dans ce plan - prend la forme classique (Equations Tableau 4.2-b, page 92 ), qui se déduit
également de l’application du principe d’Hamilton en dynamique ce qui justifie les conditions
homogènes imposées au champs test aux intants initial et final C.I.(0) :

δPint (δ →

u (→

x , t)) + δPext (δ →

u (→

x , t)) = δPacc (δ →

u (→

x , t)) , ∀δ →

u (→

x , t) C.A.(0) − C.I.(0)

(6.68)
Approximations numériques 172

avec ces 3 termes qui s’expriment :


Z l


δPint (δ u (x, t)) = − {N (x, t) δu0 (x, t) + T (x, t) δv 0 (x, t) + M (x, t) δv 00 (x, t} dl
0

Z l
δPext (δ →

u (x, t)) = {cz (x, t) δv 0 (→

x , t) + px (x, t) δu(→

x , t) + py (x, t) δv(→

x , t)} dl
0
l
+ [Ni (t)δui (t) + Ti (t)δvi (t) + Mi (t) δvi0 (t)]0
Z l
δPacc (δ →
− ρS ü(x, t)δu(x, t) + ρSv̈(x, t)δv(x, t)+ < ρI > v¨00 (x, t)δv(x, t) dl

u (x, t)) =
0

6.4.1 Approximation par éléments finis de type Hermitte


Partant de la forme continue, nous allons introduire la discrétisation des déplacements
pour en déduire la forme discrète, et donc la formulation éléments finis (par convention, on
peut noter les grandeurs discrétisées par un exposant h). Dans le cas de la résolution en temps
en dynamique, un découpage en temps est également effectué, souvent par différences finies.
De façon générique, les inconnues de notre discrétisation représentent les déplacements des
points particuliers sur lesquels s’appuie le découpage géométrique tel qu’illustré sur la Figure
6.12. Pour chacun de ces sous-domaines, on réalise les approximation suivantes (en l’absence
de précision, la discrétisation notée h sera relative à un élément) :
n


u (→

x , t) ' →

u h (→
− Ni (→

X
Approximation en déplacement x , t) = x , t)qi (t)
i=1
n

− (6.69)
x (t) ' →
− Ni (→

X
Approximation en espace x h (t) = x , t)xi (t)
i=1
si un élément de référence est utilisé

Considérons un élément fini de flexion de type Haute Précision d’Hermitte, c’est-à-


dire utilisant une interpolation cubique des déplacements faisant intervenir comme inconnues
nodales la flèche et la rotation des sections (Figure 6.13). Les caractéristiques de l’élément
sont sa longueur le , et les propriétés de sa section qui sera considérée comme constante dans la
suite, son module d’Young E, sa section transverse constante S, et son moment quadratique
de flexion I. Dans ce cas l’interpolation en déplacement au sein d’un élément s’écrit :

v(x, t) ' v h (x, t) = N1 (x)v1 + N2 (x)θ1 + N3 (x)v2 + N4 (x)θ2


Approximations numériques 173

Figure 6.12: Discrétisation du domaine continu étudié.

ou encore, sous forme algébrique :


 

 v1 


 θ 
1
v h (x, t) = < N1 (x), N2 (x), N3 (x), N4 (x) > ·
 v2 
(6.70)

 

θ2
 
X4
= Ni (x)qie
i=1

Figure 6.13: Élément de flexion de type Hermitte.

Pour établir les expressions des fonctions d’interpolation, on exprime classiquement les
conditions que doivent satisfaire ces fonctions, et notamment assurer que les valeurs nodales
sont exactement représentées par l’approximation. Nous allons dans un premier temps établir
ces expressions pour l’élément réel, puis dans un second temps pour l’élément de référence.
Approximations numériques 174

Approximation en déplacement dans l’élément réel

L’élément réel est défini entre les abscisses x1 et x2 . Compte tenu des degrés de
liberté considérés, on doit s’assurer, pour le premier degrès de liberté v1 par exemple, que
l’interpolation permet de retrouver exactement la valeur nodale au nœud de coordonnée x1
(Figure 6.13)

v h (x1 ) = N1 (x1 )v1 + N2 (x1 )θ1 + N3 (x1 )v2 + N4 (x1 )θ2 = v1 .

De même, le second degrès de liberté, lui aussi caractéristique d’une quantité attachée au nœud
1 de l’élément, doit être représenté exactement en x1 . Comme nous l’avons fait classiquement
de nombreuses fois, nous supposons que cette rotation θ1 correspond à la rotation due à la
flexion au nœud 1, soit :

dv h dN1 (x1 ) dN2 (x1 ) dN3 (x1 ) dN4 (x1 )


θh (x1 ) = (x1 ) = v1 + θ1 + v2 + θ2 = θ1
dx dx dx dx dx
dv h (x2 )
En considérant de façon symétrique les conditions pour retrouver v h (x2 ) = v2 et dx
= θ2 ,
on aboutit à l’ensemble des conditions qui doivent être satisfaites :

N1 (x1 ) = 1 N2 (x1 ) = 0 N3 (x1 ) = 0 N4 (x1 ) = 0


dN1 (x1 ) dN2 (x1 ) dN3 (x1 ) dN4 (x1 )
=0 =1 =0 =0
dx dx dx dx
N1 (x2 ) = 0 N2 (x2 ) = 0 N3 (x2 ) = 1 N4 (x2 ) = 0
dN1 (x2 ) dN2 (x2 ) dN3 (x2 ) dN4 (x2 )
=0 =0 =0 =1
dx dx dx dx

On en déduit donc, en prenant en compte les racinces, les formes de ces fonctions. Par
exemple, une racine double en x2 pour N1 et 1 racine pour sa dérivée en x1 . De la même
façon, pour N2 , avec la particularité que sa dimension est en [m] pour que le déplacement
correspondant soit homogène (Eq. 6.70). Finalement, les fonctions d’interpolation sur l’élément
réel s’écrivent :
 2  3
x − x1 x − x1
N1 (x) = 1 − 3 +2
le le
   2  3 !
x − x 1 x − x 1 x − x 1
N2 (x) = le −2 +
le le le
 2  3
x − x2 x − x2
N3 (x) = 1 − 3 e
−2
l le
   2  3 !
x − x 2 x − x 2 x − x 2
N4 (x) = le +2 +
le le le
Approximations numériques 175

Approximation en déplacement avec un élément de référence

Comme nous l’avons vu précédemment, sur l’exemple de la barre en traction, l’utilisa-


tion d’un élément de référence est incontournable pour rendre l’utilisation de la méthode des
éléments finis plus systématique, et améliorer la précision des intégrations numériques (Figure
6.10 page 166 et paragraphe correspondant). Dans notre cas, les intégrations sur l’élément
poutre défini entre les abscisses x1 et x2 seront réalisées sur l’élément de référence défini entre
ξ1 = −1 et ξ2 = 1 :
ξ−1

 N1 (ξ) = −


2
xh (ξ) = x1 N1 (ξ) + x2 N2 (ξ) et (6.71)
 N2 (ξ) = ξ + 1


2
Ce qui nous permet d’établir les expressions des fonctions d’interpolation en déplace-
ment sur l’élément de référence, en posant les conditions que doivent satisfaire ces fonctions,
pour les nœuds, i.e. en ξ = ±1 :
N1 (−1) = 1 N2 (−1) = 0 N3 (−1) = 0 N4 (−1) = 0
 
dN1 (−1) dN2 (−1) 2 dN3 (x1 ) dN4 (−1)
=0 e
=1 =0 =0
dξ dξ l dξ dξ
N1 (1) = 0 N2 (1) = 0 N3 (1) = 1 N4 (1) = 0
 
dN1 (1) dN2 (1) dN3 (1) dN4 (1) 2
=0 =0 =0 = 1.
dξ dξ dξ dξ le
Les expressions des fonctions d’interpolation en déplacement se déduisent aisément de ces
conditions. On aura préalablement remarqué que l’utilisation de l’élément de référence implique
de relier les calculs entre l’élément réel et l’élément de référence :
n →

h
X dNi ( ξ ) dxh le
dxi = dξj ⇔ {dxh } = [F ] · {dξ} − en 1D =
i=1
dξj dξ 2

qui est dans le cas général le jacobien de la transformation noté j = det[F ] ([F ] se définit
comme dNdξi (ξ)
j
), soit le volume de l’élément réel rapporté au volume de l’élément de référence.
Dans notre cas, la condition portant sur la dérivée des fonctions de forme N2 (ξ) et N4 (ξ) fait
intervenir le jacobien. Les expressions finalement obtenues sont explicitées dans l’Eq. 6.72, et
leur représentation graphique est donnée sur la Figure 6.15 :
 
2 1 ξ
N1 (ξ) = (1 − ξ) +
 e 2 4
l
N2 (ξ) = (1 − ξ)2 (1 + ξ)
8   (6.72)
2 1 ξ
N3 (ξ) = (1 + ξ) −
 e 2 4
l
N4 (ξ) = − (1 + ξ)2 (1 − ξ)
8
Approximations numériques 176

(a) (b)

Figure 6.14: Fonctions de forme de l’élément fini d’Hermitte 1D : (a) N1 (ξ), N3 (ξ) et (b)
dN2 (ξ) dN4 (ξ)

, dξ .

Enfin, dans la suite nos calculs d’intégrales sur l’élément de référence devront prendre
en compte ce rapport de longueur dans l’élément de poutre, ainsi :
Z x2 Z 1
h le
(·)dx = (·) dξ (6.73)
x1 −1 2

et de même, les différentielles devront être exprimées dans cet élément, par exemple
dNi dNi dξ dNi 2
= = (6.74)
dx dξ dx dξ le

6.4.2 Formulation de l’élément fini d’Hermitte en statique linéaire


En partant de la formulation faible établie dans un cadre dynamique (Eq. 6.68), on se
ramène au problème plus simple de statique linéaire en flexion pure, exprimé sur un élément
de longueur le = x2 − x1 soit :

δPint (δv(x)) + δPext (δv(x)) = 0 , ∀δv(x) C.A.(0)


Z x2 Z x2
x2 (6.75)
00h
h h
py (x) δv h (x) dx + Tih δvih − Mih δvi0h x1

− M (x) δv (x) dx +
x1 x1

dans lequel on introduit classiquement la discrétisation du champ test et du déplacement, tous


2 choisis dans la même base de fonctions (Eq. 6.70). Les conditions aux limites de Dirichlet et
Neuman seront introduites ultérieurement, dans les cas particuliers que nous aurons à résoudre.
La formulation intégrale faible (Eq. 6.75) devient, sur chaque élément :
4
( 4 Z  )
X X x2 d 2
Ni d 2
N j

−EIδqie 2 2 j
q e + py δqie Ni dxh
i=1 j=1 x1
dx dx
Approximations numériques 177

ou encore, en utilisant l’intégration sur l’élément de référence, et en prenant en compte les


règles de dérivation des fonctions de forme qui dépendent de ξ (Eqs. 6.73-6.74), pour des
propriétés constantes par élément :
4
( 4 Z 1 2  2 2  2  e  ! Z 1  e )
X X d N i dξ d N j dξ l l
δqie −E e I e 2 2
dξ qje + pey Ni dξ
i=1 j=1 −1 dξ dx dξ dx 2 −1 2

et en introduisant l’approximation établie pour le déplacement de cet élément d’Hermitte (Eq.


6.72)
 T   R1 R1 R1 R1  
00 00 00 00
δv1  −1
N1 N1 dξ −1
N1 N2 dξ −1
N100 N300 dξ N100 N400 dξ v1 
R−1

  
 
3 1 1 1
N200 N200 dξ −1 N200 N300 dξ N200 N400 dξ
    R R  θ 
 e e 2 
 δθ   
1 −1 1
E I 1 R−1
1

...
N300 N300 dξ N300 N400 dξ
R
le 
 
δv2  −1
v2 
R−1

    
  1  
δθ2 sym N400 N400 dξ θ2
   
−1

 R1 
 −1 N1 dξ 
 e

 R1 

py l  −1 N2 dξ 
... − R1 
2  R−1 N3 dξ

 
 
 1
 
N4 dξ

−1

ce qui peut aussi se mettre sous la forme générique δqie Kije qje − fie , et tous calculs faits :
 
12 6le −12 6le
EI  4(le )2 −6le 2(le )2 
[K]e =
 
(le )3 −6le
 
 12 
4(le )2
 
 1  (6.76)
e
 



 l 


2 py 
6

{f e } =
le 
 1 

e
 −l

 

 

6

Flexion d’une poutre console

Reprenons l’exemple de la poutre console vue au §2.2.2 page 41. D’abord chargée sous
son propre poids −py .→

y , puis en son extrémité x = l par un effort terminal T (l) = −F .
La poutre étant soumise à son propre poids, un chargement réparti py négatif, la
résolution avec un seul élément fini d’Hermitte est directe compte tenu des conditions aux
limites de ce problème qui se traduisent en conditions sur l’élément fini :

v(x = 0) = 0 v1 = 0
(6.77)

dv
dx (x = 0) θ1 = 0
Approximations numériques 178

ce qui correspond au système algébrique à résoudre :


" #( )   ( )
EI 12 −6l e
v2

−2 py
 1  0
− le = (6.78)
(le )3 4(le )2 θ2 le  −  0
6
La solution nous donne les inconnues nodales suivantes qui peuvent être comparées à la solution
analytique établie en TD :

py l 4  py x4 lx3 l2 x2
   
( )   −  Analytique : v(x) = − +
v2 
8EI

EI 24 6 4
=
θ2 3 
py l 4 py l 3
 − py l  dv

soit v(l) = − et (l) = −
 
6EI 8EI dx 6EI

Pour le cas de la poutre chargée à son extrémité, les conditions aux limites de Dirichlet
restent les mêmes, mais un effort ponctuel correspondant à T (l) = −F est introduit comme
effort extérieur. En notant que le travail virtuel des effort terminaux (Eq. 6.75) produirait dans
ce cas :
n
X
h h h
T δv (l) = T (l) Nj (l)δqj = T h (l)N3 (l)δv2 = T h (l)δv2 = −F δv2
j=1

Le système à résoudre devient alors :


" #( ) ( ) ( )
EI 12 −6le v2 −F 0
e 3 e 2
− =
(l ) 4(l ) θ2 0 0

dont la solution est à comparer à la solution de la poutre console chargée à sont extrémité
x = l par un effort terminal T (l) = −F :

F l3 
 3
lx2
  
F x
 − Analytique : v(x) = − ,
( )   
v2 3EI

EI 6 2
=
θ2 2 
F l3 F l2
 − Fl  dv

soit v(l) = − et (l) = −
 
2EI 3EI dx 2EI

En conclusion de ce premier exemple, on peut constater que la richesse de l’interpolation


de cet élément fini permet de retrouver les solutions exactes en déplacement et rotation à
l’extrémité de la poutre, même avec un seul élément. Par contre, la solution en tout point
de la poutre ne sera correctement approchée que dans le second cas (force terminale) - c’est
même la solution exacte ! - car la solution est de degrés 4 dans le premier cas, tandis que
l’interpolation est de degrés 3 dans l’élément fini (Figure 6.4.2). Il reste que l’approximation
est très bonne, en comparaison avec des éléments linéaires par exemple, à taille de système
(ddls) équivalente.
Approximations numériques 179

(a) (b)

Figure 6.15: Poutre console - solution analytique et avec 1 élément fini d’Hermitte 1D : (a)
Effort terminal et (b) effort réparti.

Flexion 3 points

Le cas de la flexion 3 points est également intéressant à traiter, notamment avec un


seul élément représentant la moitié du problème, comme nous l’avons fait analytiquement au
§2.2.2 page 47. On rappelle les conditions de Dirichlet et Neuman pour ce cas :

v(x = 0) = 0 v1 = 0 M (x = 0) F2 = 0

dv et
T (l/2) = − F F
(l/2) = 0 θ2 = 0 F3 = −
dx 2 2

Le système à résoudre s’écrit donc (avec le = l/2) :


" #( ) ( ) ( )
EI 4(le )2 −6(le ) θ1 0 0
− =
(le )3 12 v2 −F/2 0

Ce qui conduit aux degrés de liberté solution qui sont correspondent exactement à la solution
analytique connue :

F l2  F x x2 l 2
   
 − Analytique : v(x) = − ,
( )   
θ1 16EI

2EI 6 8
=
v2 3 
F l3 F l2
 − Fl  dv

soit v(l/2) = − et (0) = −
 
48EI 48EI dx 16EI

6.4.3 Vibrations libres en flexion


Nous avons établi, au §4.2 page 89 du Chapitre 4 sur la dynamique, l’expression qui
permet de calculer les vibrationsZ libres d’une poutre de Bernoulli en flexion. Cette expression
l
est de la forme kel (V, V ∗ ) − ω 2 ρSV (x)V ∗ (x)dx = 0. Pour être plus général, en l’absence
0
Approximations numériques 180

de chargement, on peut reformuler le problème à résoudre en flexion seule en reprenant le PPV


(Eq. 6.68) :
δP (δ →
int
−u (→
−x , t)) + δP (δ →−
u (→−
x , t)) = δP (δ →
ext
−u (→

x , t)) , ∀δ →

u (→
−x , t) C.A.(0) − C.I.(0)
acc

z Z }| { z }| {
l z}|{ Z l
− EIv 00 δv 00 dl + 0 = ρSv̈δvdl , ∀δv C.A.(0) − C.I.(0)
0 0
(6.79)
La solution v(x, t) est alors recherchée sous la forme générale d’une solution en espace V (x)
en produit avec des harmoniques en temps v(x, t) = V (x)eiωt , ω étant inconnue. L’équilibre
de la poutre (Eq. 6.79) s’écrit alors de façon découplée en temps et en espace :
Z l Z l 
00 00 2
EIV δV dl − ω ρSV δV dl e2iωt = 0 , ∀δV C.A.(0) − C.I.(0) . (6.80)
0 0

Pour résoudre ce problème, on utilise la discrétisation des déplacements comme dans


le cas statique vu précédemment. En introduisant cette discrétisation du déplacement dans
la puissance virtuelle des efforts intérieurs δPint et dans la puissance virtuelle des quantités
d’accélérations δPacc définies dans l’équation (Eq. 6.79), on obtient les expressions discrétisées :
Z x2 Z x2 4
!00 4
!00
X X
EIV 00 δV 00 dl = EI δqie Ni (x) Nj (x)qje e2iωt dxh
x1 x1 i=1 j=1
4
X 4
X Z x2
= δqie EINi00 Nj00 dxh qje e2iωt
i=1 j=1 x1
e T
= {δq } [K ] {q e } e2iωt
e

Z x2 4
X 4 Z
X le
h
−ω 2
ρSV δV dx = −ω 2
δqie ρSNi Nj dxh qje e2iωt
x1 i=1 j=1 0
e T
= −ω {δq } [M ] {q } e2iωt
2 e e

dont on déduit aisément les matrices élémentaires. La rigidité [K e ] déjà calculée (Eq. 6.76),
et la matrice de masse [M e ] qui s’exprime :
Z x2 Z 1  e
e l
Mij = ρ S Ni Nj dx = ρ S Ni Nj dξ
x1 −1 2
 
156 22le 54 −13le (6.81)
e
m  4(le )2 13le −3(le )2 
[M ]e =
 
420  156 −22le
 

4(le )2
où la masse élémentaire est me = ρ S le . L’équilibre discrétisé (Eq. 6.80) étant vérifié pour
tout déplacement virtuel élémentaire {δq e }T C.A.(0) − C.I.(0), l’équilibre pour un élément
s’écrit :
Kije − ω 2 Mije qje = 0 , ∀qje C.A. − C.I. + conditions de raccord

Approximations numériques 181

Finalement, après assemblage des contributions élémentaires, la solution triviale n’étant pas
acceptable, on se retrouve ici devant un calcul aux valeurs propres dont les solutions ω 2 sont
racines du déterminant :
det [K] − ω 2 [M ] = 0

(6.82)

Applications

Pour illustrer les capacités de cet élément à déterminer les pulsations propres en flexion,
nous traitons ci-dessous l’exemple vu en TD de vibration libre d’une poutre de Bernoulli.

Cas bi-encastré avec un élément Compte-tenu des conditions aux limites (v(x = 0) =
v1 = 0,v 0 (x = 0) = θ1 = 0,v(x = l) = v2 = 0,v 0 (x = l) = θ2 = 0), il n’est pas possible
de traiter le cas bi-encastré. La résolution conduit immédiatement à des déplacements nodaux
identiquement nuls.

Cas appuyé-appuyé avec un élément Le cas appuyé-appuyé est représenté sur la Figure
4.10 page 96. Les conditions aux limites sont v(x = 0) = v1 = 0 et v(x = l) = v2 = 0. Le
problème à résoudre (Eq. 6.82) devient alors (le = l et masse me = m) :
" 2 2
# " 2 #!
EI 4l 2l m 4l −3l2
2
det − ω
l3 4l2 420 4l2
 m m 
4EI − ω 2 l3 2EI + ω 2 l3
105 140
,→ det 
 
m 
4EI − ω 2 l3
105

ce qui conduit aux 2 valeurs propres obtenues par éléments finis. Ces valeurs peuvent être
comparées aux valeurs exactes établies analytiquement (Eq. 4.9 §4.2.3 page 91) :
r r r
h
√ EI EI EI
ω1 = 2 30 3
' 10, 95 3
valeur exacte ω1 ' 9, 87
ml ml ml3
r r r
h
√ EI EI EI
ω2 = 2 630 3
' 50, 10 3
valeur exacte ω2 ' 39, 48
ml ml ml3

De façon classique, plus le rang de la pulsation est élevé, plus l’erreur commise est
importante. L’erreur par rapport à la solution exacte est de 10% pour la première pulsation
et de 21,4% pour la seconde pulsation. On notera que la solution du problème statique,
en l’absence de chargement réparti, est cubique (EIv (4) = 0), comme l’interpolation du
déplacement dans l’élément fini utilisé ici. Ceci justifie la bonne approximation du problème
continu avec peu d’éléments finis.
Approximations numériques 182

Figure 6.16: Vibrations libres d’une poutre bi-encastrée.

Cas bi-encastré avec 2 éléments On examine maintenant le cas de la même poutre bi-
encastrée (Figure 6.16), de longueur l et de masse m, discrétisée cette fois avec deux éléments.

Les caractéristiques des éléments sont donc : longueur le = 2l et masse me = m2 . Les conditions
aux limites s’expriment : v(x = 0) = v1 = 0, v 0 (x = 0) = θ1 = 0, v(x = l) = v3 = 0,
v 0 (x = l) = θ3 = 0. L’assemblage du système conduit à :
  
12 6le
// /// −12
///// 6le
/// 0/ 0/
  e 2




 4(l
////// −6le
) ///// 2(l e 2
)
////// 0/ 0/ 

  
e e e

 EI 
 12 + 12 −6l + 6l −12
///// ///
6l 

e 2 −
  
e 2 e 2 e
 (le )3 
  4(l ) + 4(l ) −6l ///// 2(l ////// ) 
  
e 



 //
12 −6l
///// 
  
e 2
4(l
////// )
 
////
156 22l////e //
54 //////e
−13l 0/ 0/    
 e 2 e e 2
  v = 0   0 
 4(l
//////) 13l//// −3(l
////////) 0/ 0/  
 1  
   
θ = 0 0
     
  
 1

 
 

e e e
156 + 156 −22l + 22l //
54 −13l
   
m e 
 ///////  
 v

 
 0


2
 2
ω   =
420 
 4(le )2 + 4(le )2 13l ////e /////////
−3(le )2  θ
 2
  
 
 0 

    
v = 0 0
    
e 3
   

 ////
156 −22l
///////  

 









  θ3 = 0
   0 
e 2
4(l )
//////
(6.83)
ce qui conduit au système 2 × 2 :
" # " #!
EI 24 0 me 312 0
det − ω2 =0
(le )3 8(le )2 420 8(le )2
Les pulsations propres correspondantes obtenues par éléments finis, sont à comparer
aux valeurs "exactes" établies par des approches semi-analytiques par exemple (cf polycopié
Approximations numériques 183

de Dynamique des Solides et des Structures) :


r r r r
420 EI EI EI
ω1h = 4 3
' 22, 73 3
valeur "exacte" : ω1 ' 22, 37
13 ml ml ml3
r r r
h
√ EI EI EI
ω2 = 420 ' 81, 97 valeur "exacte" : ω2 ' 61, 68
ml3 ml3 ml3
soit une erreur de 1,6% sur la première pulsation et 24,8% sur la seconde pulsation.

Remarque : utilisation de la base modale pour la résolution du problème temporelle

Les pulsations propres correspondent ici au quotient de Rayleigh, couramment uti-


lisé en dynamique, et qui caractérise le rapport entre l’énergie de flexion stockée et
l’énergie cinétique. Lorsque ces valeurs propres sont connues, on peut y associer les
modes propres correspondants vérifiant Ces vecteurs propres vérifient : ([K] − ωi2 [Mσ ]) ·
{Xi } = {0}. Par construction, le système est diagonal dans la base qu’ils forment.
C’est une propriété fondamentale de la dynamique des structures où la projection dans
la base modale est incontournable. Sans entrer dans les détails qui peuvent être trou-
vés dans http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/Dynamique-3A/
Dynamique-SDrapier-octobre2016.pdf, considérons l’équilibre discret, et fixons les condi-
tions initiales non-homogènes :

[M ]{q̈} + [K]{q} = 0 avec {q}(0) = {q0 } et {q̇}(0) = {q̇0 } donnés

Pour résoudre ce problème, on réécrit le vecteur déplacement comme le produit de 2


grandeurs indépendantes, l’une étant fonction uniquement du temps et l’autre étant formée
par les vecteurs propres. Pour cela, on forme le système matricielle suivant, en introduisant
la matrice modale [X] = [{X}1 , . . . , {X}n ] où les modes propres sont normés par rapport
à la masse ({X}Tr [M ] {X}r = 1), et le vecteur des coordonnées normales associé {η}T =
[η1 , . . . , ηn ]. Finalement, le vecteur des inconnues devient :
n
X
{q}(t) = {X}s ηs (t) = [X]{η}(t)
s=1

L’équilibre du système s’écrit alors :

[M ]{q̈} + [K]{q} = {0} ⇔ [M ][X] {η̈}(t) + [K][X] {η}(t) = {0}

en multipliant à gauche par {X}T et en tenant compte des relations d’orthogonalité :

{X}T [M ] {X} = I et {X}T [K] {X} = [Ω2 ] = diag[ω12 , . . . , ωn2 ]

on aboutit au système d’équations linéaires écrites en temps uniquement, ce qui se traduit


dans la base modale par les n équations normales découplées :

{η̈}(t) + [Ω2 ]{η}(t) = {0} ⇔ η̈r + ωr2 ηr = 0, ∀ r = 1, . . . , n


Approximations numériques 184

dont chaque solution est harmonique (ω 2 > 0) :

ηr = αr cos ωr t + βr sin ωr t

ce qui conduit à :
n
X
{q}(t) = (αs cos ωs t + βs sin ωs t) {X}s
s=1

où les coefficients αs et βs correspondent à la décomposition des conditions initiales dans la


base modale : n n
X X
{q0 } = αs {X}s et {q̇0 } = βs ωs {X}s
s=1 s=1

obtenus en multipliant à gauche par {X}tr [M ], et en utilisant les relations de K et M -


orthogonalité :
Pn
{X}Tr [M ] {q0 } = s=1 αs {X}Tr [M ]{X}s = αr µr

et
Pn
{X}Tr [M ] {q̇0 } = s=1 βs ωs {X}Tr [M ]{X}s = βr ωr µr

Les masses généralisées µs associées aux modes s (µs = {X}Ts [M ] {X}s ) ont été introduites
à nouveau pour normaliser ces conditions initiales {q0 } et {q̇0 }. Les coefficients αs et βs des
décompositions s’expriment donc en fonction des conditions initiales projetées dans la base
modale et au final, la solution s’écrit :
n
! n
!
X {X}s {X}Ts [M ] X {X}s {X}Ts [M ]
{q}(t) = cos ωs t {q0 } + sin ωs t {q̇0 }
s=1
µ s s=1
µs ωs
(6.84)

6.4.4 Détermination des charges de flambage


A partir de cet élément, on peut également envisager de déterminer les charges de
flambage. Comme nous l’avons vu au Chapitre 4, l’analogie avec la détermination des pulsations
propres est assez directe. En effet, nous avons établi au §4.1.3 page 88 que le calcul des charges
de flambage se ramène à un calcul aux valeurs propres. Les charges correspondant ici au rapport
entre l’énergie de flexion et l’énergie de compression.
Le problème de flambage dans les poutres droites s’écrit, pour toute fonction test égale
à la variation du champs réel :
Z l 
00
N (x) (δu + v 0 δv 0 ) + M (x)δv dx + F δu(l) = 0, ∀(δu, δv) C.A.(0)
0
Approximations numériques 185

ce qui peut encore se simplifier en utilisant les relations N 0 (x) = 0 et N (l) = −F = N (x).
On peut alors réécrire le problème à résoudre sous la forme :

kel (v, δv) − F kσ (v, δv) = 0, ∀δv ∈ C.A.(0)

 Z l
 kel (v, δv) = EIv 00 (x)vδv 00 (x)dx



0
avec
 Z l
v 0 (x)δv 0 (x)dx

 kσ (v, δv) =

0

Dans ces expressions on reconnaît la rigidité élastique de flexion qui donnera la matrice de
rigidité du système discret [K], et une nouvelle rigidité qui exprime l’influence de la géométrie
sur la rigidité de la structure kσ , appelée rigidité géométrique. En procédant comme en statique
(Eq. 6.76) et en dynamique (Eq. 6.81), la discrétisation conduit à l’expression de cette matrice
de rigidité géométrique [Kσ ] :
Z x2 Z 1     e
dNi dNj dNi dξ dNj dξ l
Kσ ij = h
dx = dξ
x1 dx dx −1 dξ dx dξ dx 2
 
36 3le −36 3le (6.85)
1  4(le )2 −3le −(le )2 
[Kσ ]e =
 
30le  −3le
 
36 
4(le )2

Les charges de flambage peuvent ensuite être déterminées par un calcul aux valeurs propres :

det ([K] − λ[Kσ ]) = 0

Poutre sur appuis simples

Pour la poutre sur appuis simples, la charge théorique de rang n a été établie (Eq. 4.4
2
page 86) : Fn = EI nlπ . Les conditions de Dirichlet correspondantes sont :

v(x = 0) = 0 v1 = 0


v(x = l) = 0 v2 = 0

ce qui correspond au système suivant à résoudre pour un seul élément d’Hermitte :


" # " #!
EI 4(le )2 2(le )2 1 4(le )2 −(le )2
det −λ e =0
(le )3 4(le )2 30l 4(le )2
EI λ EI λ
 
 4 (le )2 − 4 30 2 (le )2 + 30 
,→ det    = 0
 EI λ 
4 e 2 −4
(l ) 30
Approximations numériques 186

et dont les solutions sont :


EI π 2

EI EI
λ1 = 12
2
et F 1 = 2
' 9, 87

l l l2

EI EI 4π 2 EI

λ2 = 60 2 et F2 = ' 39, 48

l l2 l2
Ce qui correspond à une erreur par excès de 10,3% sur la première charge, et de 50% sur la
seconde. Comme dans le cas des pulsations propres en dynamique, les valeurs propres consti-
tuent une suite strictement croissante, et l’approximation est systématiquement par excès, et
d’autant plus grande que la valeur propre est de rang élevé.

Poutre bi-encastrée

Comme nous l’avons vu précédemment (§4.1 ), on s’attend à ce que les charges soient
4 fois plus élevées pour le cas encastré-encastré que pour le cas libre-libre (Eq. 4.5) ; au
moins pour le premier mode. Reprenons la configuration bi-encastrée utilisée pour le calcul des
vibrations libres (Figure 6.16 page 182), soit l’approximation avec 2 éléments finis. Dans ce
cas, le système à résoudre est porté par les ddl v2 et θ2 (avec le = l/2) :
" # " #!
EI 24 0 1 72 0
det −λ e =0 (6.86)
(le )3 8(le )2 30l 8(le )2

et dont les solutions sont :


2

λ1 = 40 EI et F1 = 4 EI π ' 39, 48 EI

l2 l2 2 l2
EI EI π EI
λ2 = 120 2 et F2 = 8 2 ' 78, 9 2

l l l
correspondant à une approximation par excès de 0,8% pour la première charge et de 50,6%
pour la seconde charge.
On peut ensuite déterminer les modes de flambage associés, en reportant dans le
système la charge critique calculée, et en vérifiant que le déplacement correspondant vérifie
le problème aux valeurs propres initialement posé (Eq. 6.86) : ([K] − λi [Kσ ]) · {Xi } = {0}.
Ces modes propres, définis à une constant multiplicative près, correspondent aux vecteurs tels
que le système est diagonal dans la base qu’ils forment. Dans notre cas, les modes propres
sont donc triviaux, le système étant diagonal initialement. Finalement, pour le premier élément
de la discrétisation - 0 < x < l/2 - les 2 modes propres correspondent respectivement aux
fonctions d’interpolation N3 (ξ) et N4 (ξ) de notre déplacement (Table 6.1 ci-dessous) et à
N1 (ξ) et N2 (ξ) pour le second élément - 0 < x < l/2 - qui n’est pas représenté ici (cf Figure
6.15) :
On peut montrer que la solution analytique établie en résolvant les équations d’équilibre
est de la forme v(x) = 1 + cos 2nπx
l
. Ce qui correspond pour le premier mode à une pente nulle
Approximations numériques 187

( )
1

λ1 → {X1 } = ṽ1h (x) ∝ N3 (x)


0

( )
0
λ2 → {X2 } = ṽ2h (x) ∝ N4 (x)

1

Table 6.1: 2 premiers modes propres de flambage de la poutre bi-encastrée.

en x = l/2, tandis que le second mode de longueur d’onde l possède un point d’inflexion en
x = l/2. On remarquera que ces charges peuvent également être obtenues plus directement
en utilisant les symétries des modes de flambage. Le premier mode est symétrique, comme
tous les modes impairs dans ce cas, donc θ2 = 0, tandis que le second est antisymétrique,
comme tous les modes pairs dans ce cas, ce qui implique v2 = 0 :
   
EI λ EI EI λ EI
v2 6= 0 24 e 3 − 72 e = 0 ⇒ λ1 = 40 2 et θ2 6= 0 8 e 3 − 8 e = 0 ⇒ λ2 = 120 2
(l ) 30l l (l ) 30l l

6.5 Conclusions sur les méthodes numériques en méca-


nique des structures
On vient de voir, à travers un exemple simple, que la méthode des éléments finis est
la méthode idéale pour le dimensionnement dans une démarche de conception de structures.
Cette méthode s’appuie sur des méthodes générales plus anciennes mais qui peuvent s’avérer
assez lourdes, même pour des cas simples.
Par contre, il ne faut pas oublier que le dimensionnement des systèmes mécaniques
fait de plus en plus appel à des simulations multi-physiques dans lesquels diverses méthodes
numériques peuvent être combinées. C’est d’ailleurs ces approches combinées qui donnent lieu,
aujourd’hui, au plus gros effort en simulation numérique chez les industriels. Ces méthodes
complexes et faisant appel à des calculs de grandes taille sur des calculateurs parallèle ou
distribués, vont bien au-delà de l’objectif de cette courte introduction, mais les principes de
base restent les mêmes : résolution des équations de conservation de masse, d’énergie, d’espèce
chimique, de quantité de mouvement, ... Avec la question de fond qui doit rester dans l’esprit
de tout ingénieur : quelle est la qualité (représentativité) de la solution obtenue ? Une première
idée peut être proposée à travers une solution analytique du type de celles vues en début de ce
document, ensuite des tests de convergence et stabilité doivent être conduits. Mais ceci relève
des cours spécifiques du master Mécanique et Ingénierie, parcours Modélisation et Simulation
Numérique ...
7.
Rappels - Éléments et Principes de la
mécanique

Sommaire
7.1 Rappel sur les torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
7.1.1 Définition d’un torseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
7.1.2 Produit scalaire de deux torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
7.1.3 Dérivation d’un torseur dans un repère mobile . . . . . . . . . . 190
7.2 Calcul variationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
7.2.1 Extremum d’une intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192
7.2.2 Condition d’Euler-Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193
7.2.3 Cas où la dérivée seconde intervient . . . . . . . . . . . . . . . 194
7.2.4 Importance des conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . 195
7.2.5 Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en temps
et en espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195
7.2.6 Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle I 197
7.3 Cinétique - Dynamique - Énergétique . . . . . . . . . . . . . . 197
7.3.1 Moments et autres caractéristiques du mouvement des corps . . 197
7.3.2 Théorème de Huygens-Koënigs . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199
7.3.3 Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes . . . . . . . . 200
7.3.4 Cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201
7.3.5 Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203
7.3.6 Principe Fondamental de la Dynamique . . . . . . . . . . . . . 204
7.3.7 Théorème de l’énergie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205
7.4 Principe des puissances virtuelles - P P V - et lien avec les
autres principes de la mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . 206
7.4.1 Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour les
systèmes discrets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206
7.4.2 Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets . . . . 209
7.4.3 Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs . . . . . 210
7.4.4 Principe de Hamilton pour les systèmes continus . . . . . . . . 213

188
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 189

7.4.5 Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans les


milieux continus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
7.5 Concepts de stabilité des équilibres . . . . . . . . . . . . . . . . 221
7.5.1 Stabilité des équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221
7.5.2 Définition d’un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222
7.5.3 Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre . . . 222
7.5.4 Stabilité d’un équilibre paramétrique . . . . . . . . . . . . . . . 223
7.5.5 Linéarisation des énergies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 225

7.1 Rappel sur les torseurs

7.1.1 Définition d’un torseur


Un torseur se définit en un point P et dans un repère (R) par ses éléments de réduction

− −

qui sont la résultante ( R B ) et le moment (M B ) associé. La propriété essentielle est que le
moment, lorsqu’il est exprimé en un point différent, en un point A par exemple, devient :

→ −
→ −→ → −
M A = M B + AB ∧ R B


Par exemple le champ de vitesse V (P ∈ S) d’un solide (S) dans son mouvement
par rapport à un repère de référence (R0 ) est connu à travers le torseur cinématique suivant,

− →

d’éléments de réduction Ω (S/R0 ) et V (P, S/R0 ), exprimé au point P de (S) :
 →
− 
 Ω (S/R0 )
 

{VS }(P,S/R0 ) = →
− −−→ → −
 V (P, S/R0 ) = P M ∧ Ω (S/R0 ) 
 
(P,S/R0 )

Dans la suite, les torseurs seront supposés exprimés par rapport au repère de référence du
mouvement, ici R0 , et explicités dans ce même repère afin d’alléger les notations. Si ce torseur
est transporté au point A, la résultante reste inchangée mais le moment résultant devient :

− →
− −→ → −
V (A, S/R0 ) = V (P, S/R0 ) + AP ∧ Ω (S/R0 )

Le torseur cinématique exprimé en ce point devient alors :


 →
− 
 Ω (S/R0 )
 

{VS }(A,S/R0 ) = →
− →
− −→ →

 V (A, S/R0 ) = V (P, S/R0 ) + AP ∧ Ω (S/R0 )
 

(A,S/R0 )

Ces propriétés, et celles énoncées ci-dessus, du torseur cinématique sont générales


et s’appliquent sans aucune restriction aux torseurs des efforts (statiques), torseur cinétique,
dynamique, ou encore dans le cas des poutres aux torseurs des déformations ou des contraintes.
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 190

7.1.2 Produit scalaire de deux torseurs


On montre trés facilement (Eqs. 7.1 ci-dessous) que le produit de 2 torseurs se ramène
aux produits croisés des éléments de réductions des torseurs. Il en découle donc que ce produit
est indépendant du point où sont exprimés les 2 torseurs. Prenons par exemple le produit du
torseur des efforts par le torseur des déformations, soit l’équivalent de l’énergie de déformation
pour une poutre (voir §1.4.2, Chapitre 1, Théorie des poutres) :

{τM (x1 )} . {M (x1 )} =


 →
− →

  
 R (x1 )
 
  r (x1 )
 

= −−→ −
→ −−→ → − . −−→ → −0
 MM (x1 ) = M (x1 ) + M G ∧ R (x1 )
 
  −
 e→ →

M (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ r (x1 ) 

(M ) (M )

− −−→ →
−0
= R (x1 ).−
e→
M (x1 ) + MM (x1 ). r (x1 )


− 
→− −−→ → −0  −
→ −−→ → − →

= R (x1 ). e (x1 ) + M G ∧ r (x1 ) + M (x1 ) + M G ∧ R (x1 ) r0 (x1 )


− →
− −−→ → −0  −−→ → −  →
− −
→ →



= R (x1 ). e (x1 ) + R (x1 ). M G ∧ r (x1 ) + M G ∧ R (x1 ) . r0 (x1 ) +M (x1 ). r0 (x1 )
| {z }
=0

− −
→ →

= R (x1 ).→

e (x1 ) + M (x1 ). r0 (x1 )
(7.1)

7.1.3 Dérivation d’un torseur dans un repère mobile


On démontre, à partir d’éléments de calculs tensoriels, que la dérivée d’un torseur par
rapport à un repère mobile s’écrit, par exemple pour les déformations {M (x1 )} :
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 191

d
{M (x1 )} = {UM }
dx1

 →

 
r (x1 ) 
d  
= −→ →
− −−→ →−
dx1 
 uM (x1 ) = u (x1 ) + M G ∧ r (x1 ) 

(M )

d →
 

 dx r (x1 )

 


1
=
d −→ d →− −−→
uM (x1 ) = u (x1 ) + →

x1 ∧ →

r (x1 ) + M G ∧ d →−
r (x1 )

 

 dx1
dx1 dx1

(M )
 →
−0 
 r (x1 )
 

= −−→ → −0
 −
 e→ →

M (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ r (x1 ) 

(M )
(7.2)
pour les détails de la démonstration, on pourra se référer à l’ouvrage de P.Germain&P.Muller,
référencé en début de ce cours. L’illustration peut se faire avec le torseur des actions intérieures
d’une poutre écrit au centre de gravité de la section courante,
 → − 
 R (x1 ) 
 
{τ (x1 )}(G) = −

 M (x1 ) 
 
(G)

En considérant les éléments de réduction en un point O fixe, la dérivée s’exprime en ce même


point O :
d →−
 

 R (x1 ) 

d  dx1 
{τ (x1 )}(O) =
dx1 d −→ →
− −→ d →−
M (x1 ) + →

x1 ∧ R (x1 ) + OG ∧ R (x1 )

 

 
dx1 dx1 (O)

Ce qui conduit aux éléments de réduction de la dérivée du torseur des efforts internes, exprimé
en G et tel que présenté au §1.6.1 dans la théorie des poutres :
 →
−0 
 R (x1 ) 
d  
{τ (x1 )}(G) = −→ →
− (7.3)
dx1  M 0 (x1 ) + →
 −
x1 ∧ R (x1 ) 

(G)

7.2 Calcul variationnel


Le calcul variationnel, ou calcul des variations, est une branche de l’analyse fonctionnelle
qui consiste à rechercher des solutions conduisant à un optimum (maximum ou minimum) d’un
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 192

fonctionnelle, une fonction de fonction à valeur réelle. C’est un outil puissant qui permet de
caractériser une famille de solution, i.e. admissible au sens des restrictions qui doivent être
vérifiées en termes de régularité (C 1 ) et de conditions aux limites, naturelles (Neumann) et
essentielles (Dirichlet) en mécanique des milieux continus - voir Les Principes Variationnels
par M. Bonvalet, collection Principes Mathématiques de la Physique - 2, Ed. Masson 1993.
Ce type d’approche permet, par exemple, de caractériser une famille d’approximations
dans les méthodes d’homogénéisation (cf support de cours de Mécanique des Composites
Hautes Performances). Plus de détails peuvent être trouvés dans d’autres branches de la
physique, par exemple dans l’ouvrage de M. Bonvalet cité ci-dessus.

7.2.1 Extremum d’une intégrale


On cherche l’extremum d’une intégrale de la forme :
Z x2
I (y(x)) = Φ(y, y 0 , x)dx (7.4)
x1

avec comme conditions aux limites y(x1 ) = 0 et y(x2 ) = 0. Ce problème est dit problème de
Lagrange, et nous comprendrons rapidement pourquoi dans la suite où il s’agira de minimiser
le Lagrangien d’un système, avec des conditions aux extrémités fixes.

On cherche parmi toutes les fonctions ȳ(x) possibles, celles qui conduisent à une valeur
extrêmale de I (y(x)). On note y(x) la famille des fonctions qui réalisent cet extrêmum. On
peut exprimer toutes les fonctions possibles ȳ(x) en fonction des y(x), modulo une famille de
fonctions arbitraires η(x) :
ȳ(x) = y(x) + αη(x) (7.5)
où α est une constante.

On voit clairement que la fonctionnelle I réalise un minimum lorsque la valeur induite


par la partie arbitraire η(x) de ȳ(x) est nulle. Dit autrement, la fonctionnelle Ψ(α) = I(y(x)+
αη(x)) vérifie l’inégalité (choisissons par commodité la notion de minimum pour l’extremum
de cette fonctionnelle arbitraire) :
Ψ(0) ≤ Ψ(α) (7.6)
pour tout α assez petit.

On aura donc un minimum de I lorsque α est nul, ou encore la dérivée par rapport à
α est nulle quand α est nul (en réalité tend vers 0) :
  (
dI (ȳ(x)) η(x1 ) = 0
δI = Ψ0 (0) = et les C.L. (7.7)
dα α→0 η(x2 ) = 0
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 193

ce qu’on peut également réécrire sous une forme plus classique, en introduisant un dévelop-
pement de Taylor

  (
I (y(x) + αη(x)) − I(y(x)) δy(x1 ) = 0
δI = lim = 0 et les C.L.
α→0 α δy(x2 ) = 0

On définit ainsi la notion de variation, et on peut réécrire ȳ(x) = y + δy(x). En intro-


duisant cette notation, on peut désormais utiliser le formalisme habituel du calcul différentiel
(7.8) où δy est associé à y mais n’est pas sa différentielle ; elle représente une famille de
fonctions proches (voir figure 7.2.1). Finalement, le calcul des variations de l’intégrale permet
de rechercher "simplement" une fonction dont la forme conduit à réaliser un extrêmum sur
l’intervalle donné.
1 0 ∂f ∂f
f = k(y 2 + y 2 ) ⇒ δ(f ) = δy + 0 δy 0
2 ∂y ∂y (7.8)
= k(yδy + y 0 δy 0 )

— dy est un accroissement cor-


respondant à y(x + dx) =
y(x) + dy
— δy est la valeur que prendra
une fonction voisine, en l’oc-
currence y + δy, pour une va-
leur unique de la variable x.

7.2.2 Condition d’Euler-Lagrange


En reportant dans l’expression de I (7.4), la forme générale des fonctions à tester (7.5),
on obtient une forme de I qui peut être développée selon le théorème de Taylor-Mac Laurin
en supposant que y et y 0 sont des fonctions indépendantes (voir 7.2.6) :
Z x2 Z x2 Z x2  
0 0 0 ∂Φ ∂Φ 0
Φ(y + δy, y + δy , x)dx = Φ(y, y , x)dx + α η(x) + 0 η (x) dx +T.O.S.
x1 x1 x1 ∂y ∂y

⇔ I(ȳ) = I(y) + δI(y, δy)


(7.9)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 194

avec le dernier terme δI qui est appelé première variation de I, et qui peut se réécrire par
intégration par parties en fonction des conditions aux limites :
Z x2  
∂Φ ∂Φ 0
δI = δy + 0 δy dx
x1 ∂y ∂y
Z x2    x 2
∂Φ d ∂Φ ∂Φ
= − δy dx + α η(x) (7.10)
x1 ∂y dx ∂y 0 ∂y 0 x1
Z x2    x 2
∂Φ d ∂Φ ∂Φ
= − δy dx + δy
x1 ∂y dx ∂y 0 ∂y 0 x1

Notons la propriété suivante, appelée également Lemme fondamental du calcul des


Z t2
variations : Si l’intégrale f (t) δf (t) dt est nulle pour toute fonction δf (t) continue et
t1
nulle au voisinage de t = t1 et t = t2 , alors la fonction f (t) est identiquement nulle si elle est
continue.
En repartant de l’expression précédente de la première variation de I, fonctionnelle
à minimiser, et avec les conditions aux limites précisées en (7.7), pour que I (y(x)) soit
extremum, il est nécessaire et suffisant que δI soit nul en tout point du domaine, donc :
∂Φ d ∂Φ
− = 0 (Condition d’Euler- Lagrange) (7.11)
∂y dx ∂y 0

7.2.3 Cas où la dérivée seconde intervient

Z x2
I (y(x)) = Φ(y, y 0 , y 00 , x)dx (7.12)
x1

aprés 2 intégrations par parties successives, on obtient la forme suivante de la première variation
de δI :
Z x2    x2
∂Φ d ∂Φ ∂Φ
δI = − δy dx + α η(x)
x1 ∂y dx ∂y 0 ∂y 0 x1
Z x2 2  x2  x2
d ∂Φ ∂Φ 0 d ∂Φ
+ 00
δy dx + α η (x) −α η(x)
2
x1 dx ∂y ∂y 00 x1 dx ∂y 00 x1
Z x2  2
   x
∂Φ d ∂Φ d ∂Φ ∂Φ d ∂Φ ∂Φ 0 1
= − + δy dx + − δy + 00 δy
x1 ∂y dx ∂y 0 dx2 ∂y 00 ∂y 0 dx ∂y 00 ∂y x2
= 0
(7.13)
ce qui conduit à la condition d’Euler-Lagrange suivante :

∂Φ d ∂Φ d2 ∂Φ
− + =0 (7.14)
∂y dx ∂y 0 dx2 ∂y 00
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 195

et aux conditions aux limites associées :


 
∂Φ d ∂Φ
− |(x1 ,x2 ) = 0
∂y 0 dx ∂y 00
(7.15)
∂Φ
|(x ,x ) = 0
∂y 00 1 2

7.2.4 Importance des conditions aux limites


Traitons le cas d’une barre homogène en flexion statique. Sans entre dans les détails,
l’énergie de déformation d’un tel système s’écrit sous la forme :
Z l 
00
I (y(x)) = ky 2 − 2ρy dx (7.16)
0

où y est un déplacement transverse à la poutre, k est une rigidité et ρ est une masse linéique.
Après intégrations par parties, la première variation de I est :
Z l
l
δI (y(x)) = (ky 0000 − ρ) δydx + [−ky 000 (x)δy(x) + ky 00 (x)δy 0 ]0 (7.17)
0

Ainsi, l’extrêmum de I conduit à vérifier que cette première variation est nulle en
tout point du domaine. On voit que le premier terme de cette expression, qui correspond à
la condition d’Euler-Lagrange (7.14), est bien nulle en tout point de ]0, l[, par conséquent
on a une équation du quatrième ordre en y à résoudre ce qui implique la connaissance de 4
conditions aux limites. Comme l’expression de δI doit être nulle, les termes de bord doivent
donc s’annuler également pour toutes "fonctions test" δy et δy 0 . On a donc les termes de
bord, conformément à l’expression générale de (7.20), qui doivent s’annuler :
l
δI (y(x)) = [−ky 000 (x)δy(x) + ky 00 (x)δy 0 ]0

soit au total quatre conditions portant soit sur y 00 (x) ou y 000 (x) ou bien sur la fonction test
δy(x) ou δy 0 (x) qui, on le rappelle, sont supposées indépendantes (voir 7.2.6).

"Il ressort immédiatement de l’observation des situations précédentes que le calcul des
variations présente la précieuse caractéristique de mettre spontanément en évidence le nombre
exact de conditions aux limites auxquelles il est nécessaire de satisfaire, ce qui est un élément
de contrôle souvent très précieux dans le traitement de problèmes."

7.2.5 Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en temps


et en espace
Dans le cas du principe d’Hamilton (cf §7.4.4 page 213), le Lagrangien du système
fait intervenir des dépendances en espace et en temps. Nous proposons d’établir la condition
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 196

de minimisation d’Euler-Lagrange pour ce cas :


Z t2 Z l 
0 0
I (y(x)) = Φ(y, y , ẏ, ẏ , x) dx dt (7.18)
t1 0

La première variation de I est :


Z t2 Z x2   
∂Φ ∂Φ 0 ∂Φ ∂Φ 0
δI (y(x)) = δy + 0 δy + δ ẏ + 0 δ ẏ dx dt (7.19)
t1 x1 ∂y ∂y ∂ ẏ ∂ ẏ

En effectuant l’intégration par parties en espace,


Z t2 Z x2       
∂Φ ∂ ∂Φ ∂Φ ∂ ∂Φ
δI (y(x)) = δy − δy + δ ẏ + − δ ẏ dx dt
t1 x1 ∂y ∂x ∂y 0 ∂ ẏ ∂x ∂ ẏ 0
Z t2  x 1
∂Φ ∂Φ
+ δy + 0 δ ẏ dt
t1 ∂y 0 ∂ ẏ x2
= 0
(7.20)
puis l’intégration par parties en temps :
Z t2 Z x2         
∂Φ ∂ ∂Φ ∂ ∂Φ ∂ ∂ ∂Φ
δI (y(x)) = − − + δy dx dt
t1 x1 ∂y ∂x ∂y 0 ∂t ∂ ẏ ∂t ∂x ∂ ẏ 0
Z t2    x1 " t1 #x1
∂Φ ∂ ∂Φ ∂Φ
+ δy − δy dt + δy
t1 ∂y 0 ∂t ∂ ẏ 0 x2 ∂ ẏ 0 t2
x2
= 0
(7.21)
ce qui conduit à la condition de minimisation de d’Euler-Lagrange :
      
∂Φ ∂ ∂Φ ∂ ∂Φ ∂ ∂ ∂Φ
− − + = 0, ∀t, ∀x (7.22)
∂y ∂x ∂y 0 ∂t ∂ ẏ ∂t ∂x ∂ ẏ 0

et aux conditions aux limites associées, sachant que le champ virtuel est nul aux instants t1
et t2 , ce qui annule le dernier terme de l’expression 7.21 :
  x2
∂Φ ∂ ∂Φ
δy − = 0, ∀t (7.23)
∂y 0 ∂t ∂ ẏ 0 x1

Si, de plus, des conditions sont imposées sur la valeur de la fonctionnelle à ses bornes en
espace du type [Φ(y, y 0 , ẏ, ẏ 0 , x)y]xx21 , comme c’est la cas par exemple dans les solides de type
barres, cordes, et poutres, pour les efforts et moments terminaux, les conditions aux limites
ci-dessus (7.23) sont complétées et deviennent :
   x
∂Φ ∂ ∂Φ ∂Φ 2
− + = 0, ∀t (7.24)
∂y 0 ∂t ∂ ẏ 0 ∂y x1
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 197

7.2.6 Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle


I
Le problème physique posé avec cette formulation a pour solution la fonction y(x)
dont la dérivée y 0 (x) dépend, bien évidemment. Quelle est alors l’hypothèse, si hypothèse il y
a, qui permet de supposer que y et y 0 sont indépendantes ?

On étudie maintenant le cas d’une fonctionnelle F qui dépend de y et d’une autre


forme de y, notée g(y). On a alors la différentielle de la fonctionnelle :

∂F (y, g(y), x) ∂F (y, g(y), x) dg(y)


dF = dy + dy (7.25)
∂y ∂g(y) dy

dy
si, par exemple, g(y) est la différentielle telle que g(y) = = y 0 , alors la différentielle de F
dx
devient :
∂F (y, g(y), x) ∂F (y, g(y), x) d dy
dF = dy + dy
∂y dy dy dx
∂ (7.26)
dx
∂F (y, g(y), x) ∂F (y, g(y), x) 0
= dy + dy
∂y ∂y 0
par extension (7.7), il vient naturellement :

∂F (y, g(y), x) ∂F (y, g(y), x) 0


δI = δy + δy (7.27)
∂y ∂y 0

Sans supposer aucune indépendance de y(x) et y 0 (x), on arrive naturellement aux


résultats connus (7.10). Il n’y a donc aucune hypothèse physique sous jacente, et cette dé-
marche calculatoire peut s’appliquer de façon systématique à toute fonctionnelle dépendant
de n’importe quelle forme de fonctions.

7.3 Cinétique - Dynamique - Énergétique

7.3.1 Moments et autres caractéristiques du mouvement des corps


On étudie un solide (S) dans son mouvement par rapport au repère de référence (R0 ).

Centre d’inertie

Le centre d’inertie G d’un solide (S) de masse m est défini par :

−→ −→ −→
Z Z
mOG = OP dm en particulier GP dm = 0 (7.28)
(S) (S)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 198

Tenseur d’inertie d’un ensemble matériel

Le tenseur d’inertie du solide, ou système de solides, (S) est défini par :

−→ −→ →
Z


I(0, S). u = OP ∧ (OP ∧ − u )dm (7.29)
(S)

où le vecteur →−u (→
−x ) est un vecteur arbitraire. Si par exemple, ce vecteur est la vitesse de
rotation du solide S par rapport au repère R0 , → −
ω (S/R0 ), alors l’expression 7.29 correspond
au moment cinétique du système, telle que définie en 7.36 ou encore telle qu’utilisée dans le
calcul de l’énergie cinétique (7.40 par exemple).
Dans un repère orthonormé, le tenseur d’inertie est représenté par la matrice symétrique
suivante :
 Z Z Z 
2 2
 (y + z ) dm − xy dm − xz dm 
 (S) Z Z (S) Z (S) 
 
I(0, S)(R0 ) =  −
 xy dm (x2 + z 2 ) dm − yz dm   (7.30)
 Z (S) (S) Z Z (S) 
 
− xz dm − yz dm (x2 + y 2 ) dm
 
(S) (S) (S)
(R0 )

ou encore :
 
Ixx −Ixy −Ixz
 
I(0, S)(R0 ) =  −Ixy Iyy −Iyz (7.31)
 

 
−Ixz −Iyz Izz
(R0 )
avec
−→
— Ixx , Iyy , et Izz les moments d’inertie, respectivement par rapport à l’axe Ox, à
−→ −→
l’axe Oy et l’axe Oz
— Ixy , Iyz , et Ixz les produits d’inertie, ou moments produits, respectivement par
−→ −→ −→ − → −→ − →
rapport aux axes Ox et Oy, Oy et Oz, Ox et Oz
Les moments peuvent être calculés par rapport à un plan de référence, ou bien encore
par rapport à une droite ou à un point de référence. Par rapport à un plan de référence, les
moments d’inertie deviennent, par exemple par rapport au plan yOz (d’équation x = 0) :
Z
I(S/x = 0) = x2 dm
(S)

par conséquent le moment d’inertie Ixx est :


Z
Ixx (O, S) = (y 2 + z 2 )dm = I(S/y = 0) + I(S/z = 0)
(S)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 199

Également, le moment d’inertie par rapport à l’origine O du repère (R0 ), appelé moment
d’inertie polaire, s’écrit :
Z
I0 (S/O) = (x2 + y 2 + z 2 )dm = I(S/x = 0) + I(S/y = 0) + I(S/z = 0)
(S)

= Ixx (O, S) + Iyy (O, S) + Izz (O, S)

= trace(I(0, S))

Le tenseur d’inertie de (S) par rapport à une droite (∆), correspondant donc à un
mouvement de rotation est donné par :

I(S/∆) = → −
u . I(0, S).→

h i
u
R0

où →−
u est un vecteur unitaire porté par la droite (∆). Partant de cette définition, on peut
définir les axes principaux d’inertie d’un solide (S), tels que dans le repère généré par ces
axes le tenseur d’inertie I(O, S) est diagonal. Un tel repère est généré par la base de vecteurs
propres du tenseur d’inertie.

7.3.2 Théorème de Huygens-Koënigs


Ce théorème permet d’exprimer, entre autres choses, le tenseur d’inertie I(0, S) d’un
solide (S) de masse M (S) relativement à O, origine du repère (R0 ), en fonction du tenseur
d’inertie I(G, S) du même solide exprimé par rapport à son centre d’inertie G, appelé tenseur
central d’inertie :
 2 2

yG + zG −xG yG −xG zG
 
2 2
I(0, S)(R0 ) = I(G, S)(R0 ) + M (S)  −xG yG xG + zG −yG zG  (7.32)
 
 
−xG zG −yG zG x2G + yG 2
(R0 )

Cette relation peut également se mettre sous la forme suivante :


−→ −→ −→
I(O, S) = I(G, S) + M (S)(OG2 Id − OG ⊗ OG)

Par exemple pour un cas plan tel que décrit dans la Figure 7.1, les moments et produits
d’inertie par rapport à O l’origine du repère s’écrivent en fonction de grandeurs exprimées par
rapport au centre de gravité G et en fonction de la position de G. Dans le cas le plus simple,
−→
sur Oy par exemple, on a :
2
Iyy (O, S) = IY Y (G, S) + M (S)zG

Iyz (O, S) = IY Z (G, S) − M (S)yG zG

I0 (S/0) = IG (G, S) + M (S)(x2G + yG


2 2
+ zG )
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 200

Figure 7.1: Section dans le plan (Oyz) et repère local (GYZ) associé

7.3.3 Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes

Figure 7.2: Solides courants : barre de masse m et longueur 2` et disque de masse m et rayon
R

Voici quelques exemples de tenseurs d’inertie pour des solides de géométries courantes.
−→
Pour une barre de masse m et de longueur 2` dont l’axe est confondu avec l’axe Ox du repère
(R0 ) et dont le centre de gravité est confondu avec l’origine du repère (R0 ) (figure 7.2) :
 
0 0 0
 2

 0 m`
 
I(0, barre)(R0 ) = 0  (7.33)
 3 

2 
 m`
0 0
3 (R0 )

Pour un disque de masse m et de rayon R dont l’axe de révolution coïncide avec l’axe


Oz du repère (R0 ) (voir figure 7.2) :
mR2
 
 2 0 0 
2
 
I(0, disque)(R0 ) =  0
 mR 
(7.34)
0 

 2 

0 0 mR2
(R0 )
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 201

et pour un cerceau de même masse et même rayon, on a :


1
I(0, cerceau) = I(0, disque)(R0 ) (7.35)
(R0 ) 2

7.3.4 Cinétique
Rappel : torseur cinématique

Comme introduit en début de ce chapitre, un torseur se définit en un point P et dans


un repère (R) par ses éléments de réduction qui sont la résultante et le champ des moments


associé. Le champ de vitesse V (P ∈ S) d’un solide (S) dans son mouvement par rapport à
un repère de référence (R0 ) est connu à travers le torseur cinématique suivant, d’éléments de

− →

réduction Ω (S/R0 ) et V (P, S/R0 ), exprimé au point P de (S) :
 →− 

 Ω (S/R 0 ) 

{VS }(P,S/R0 ) = →
− −−→ → −
 V (P, S/R0 ) = P M ∧ Ω (S/R0 ) 
 
(P,S/R0 )

Dans la suite, les torseurs seront supposés exprimés par rapport au repère de référence du
mouvement, ici R0 , et explicités dans ce même repère afin d’alléger les notations. Si ce torseur
est transporté au point A, la résultante reste inchangée mais le moment résultant devient :

− →
− −→ → −
V (A, S/R0 ) = V (P, S/R0 ) + AP ∧ Ω (S/R0 )

Remarque Les mêmes définitions s’appliquent aux champs de vecteurs définis en tout point


M du domaine. Si Ω (S/R0 ) est une densité vectorielle volumique, on aura


 Z 


 Ω (M ∈ S/R0 )dS 


S
{VS }(P,S/R0 ) = Z
−−→ → −


 P M ∧ Ω (M ∈ S/R0 )dS  

S
(P,S/R0 )

Torseur cinétique

Les éléments de réduction (composantes) du torseur cinétique, aussi appelé torseur


des quantités de mouvement, dans le mouvement du système (S) par rapport au repère de
référence (R0 ), sont définis de la manière suivante au point A quelconque (7.36). La résultante
est appelée quantité de mouvement ou résultante cinétique, et le moment est appelé moment
cinétique :

− →

 Z 


 C (S/R0 ) = V (P ∈ S/R0 )dm 


(S)
{CS }(A,S/R0 ) = →

Z
−→ → − (7.36)


 H (A, S/R 0 ) = AP ∧ V (P ∈ S/R 0 )dm 


(S)
(A,S/R0 )
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 202



où V (P ∈ S/R0 ) désigne la densité massique de vitesse au point P , appartenant au solide
(S), dans son mouvement par rapport au référentiel (R0 ). En se plaçant en un point A du
repère (R0 ), et en introduisant le repère central d’inertie (RG ) dont l’origine est G et dont les

− →

axes sont colinéaires aux axes de base du repère (R0 ), i.e. Ω (RG /R0 ) = 0 , les éléments de
réduction du torseur cinétique deviennent :
 →
− →
− 

 C (S/R0 ) = M V (G ∈ S/R0 ) 

{CS }(A,S/R0 ) = →
− →
− −→ →−
 H (A, S/R0 ) = H (G, S/RG ) + AG ∧ M (S) V (G ∈ S/R0 ) 
 
(A,S/R0 )
(7.37)
Cette dernière expression permet de poser que :
— la quantité de mouvement du système est égale à celle du centre d’inertie G affecté
de la masse totale M du système,
— le moment cinétique par rapport à un point A est la somme de son moment cinétique
par rapport à G, centre d’inertie, dans le mouvement du système autour de G, et du
moment cinétique par rapport à A de la masse totale M (S) supposée concentrée
en G. Cette dernière propriété découle du théorème de Koënig.

Énergie cinétique

Expressions générales Par définition l’énergie cinétique T (S/R0 ) du système (S) par rap-
port au repère (R0 ) est la quantité suivante :


−2
Z
1
T (S/R0 ) = V (P ∈ S/R0 )dm (7.38)
2 (S)

Cette définition s’étend sans difficulté au cas d’un système de solides, constitué de N


masses ponctuelles mk situées aux points Pk , animés de vitesses V (Pk ∈ S/R0 ) par rapport
au référentiel (R0 ) :
N
1 X → −
T (S/R0 ) = mk V 2 (Pk ∈ S/R0 ) (7.39)
2 k=1
et si le système (S) apparaît comme la réunion de plusieurs sous-ensembles disjoints, tels que
(S) = S1 ∪S2 ∪. . .∪SN , l’énergie totale se déduit des énergies cinétiques des sous-ensembles :

T (S/R0 ) = T (S1 /R0 ) + T (S2 /R0 ) + . . . + T (SN /R0 )

Expressions par rapport à un point quelconque Dans le cas d’un système solide, le


champ de vitesse V (P ∈ S) est connu à travers le torseur cinématique de (S) dans son
mouvement par rapport à (R0 ) : {VS }(A,S/R0 ) . En introduisant, dans la définition générale de
l’énergie cinétique (7.38), l’expression générale du champs de déplacement au sein du solide
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 203

(S), on obtient l’expression suivante de l’énergie cinétique calculée en un point quelconque P .


1 h → − →
− →
− 
T (S/R0 ) = M V 2 (P ∈ S/R0 ) + 2M V (P ∈ S/R0 ) Ω (S/R0 ) · I(G, S)
2

−  →
− i
+ Ω (S/R0 ) · I(P, S) · Ω (S/R0 )
(7.40)
Un cas particulier très utile correspond à un point P fixe. Alors, seule la composante
de rotation dans le mouvement de (S) par rapport à (R0 ) est à l’origine de l’existence de
l’énergie cinétique :
1→−  →
− 
Tp (S/R0 ) = Ω (S/R0 ) · I(P, S) · Ω (S/R0 )
2

Expression en fonction du centre d’inertie L’énergie cinétique peut s’exprimer en fonc-


tion de la vitesse du centre d’inertie et de la rotation du solide (S) dans son mouvement par
rapport à (R0 ) :
1 →
−2 1→−  →
− 
T (S/R0 ) = M V (G ∈ S/R0 ) + Ω (S/R0 ) · I(G, S) · Ω (S/R0 )
2 2
(7.41)
1 →
−2
= M V (G ∈ S/R0 ) + TG (S/R0 )
2
ce qui se met également sous la forme de produits de torseurs :
 →
−   →− 
 M V (G, S/R 0 )   Ω (S/R0 ) 
1    
T (S/R0 ) = →
− · →

2 
 I(G, S) · Ω (S/R0 )    V (G, S/R0 )
 

(G,S/R0 ) (G,S/R0 )
1
= {CS }(G,S/R0 ) · {VS }(G,S/R0 )
2
Cette dernière expression (7.41) correspond à l’application du théorème de Koënig dans
le cas de l’énergie cinétique : l’énergie cinétique totale du solide S est égale à la somme de
l’énergie cinétique dans son mouvement autour de son centre d’inertie, et de l’énergie cinétique
développée par la translation de sa masse M totale concentrée en G.

7.3.5 Dynamique
Torseur dynamique

Le torseur dynamique est aussi appelé torseur des quantités d’accélération. Il est dé-
fini en fonction de la distribution massique des accélérations →−γ (P ∈ S/R0 ) de la manière
suivante :


 Z 
 D (S/R ) = →

γ (P ∈ S/R )dm 

 0 0 

(S)
 
{DS }(A,S/R0 ) = →

Z
−→ → (7.42)

 K (A, S/R0 ) = AP ∧ γ (P ∈ S/R0 )dm 

 

 
(S)
(A,S/R0 )
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 204

Le moment dynamique du mouvement de (S) par rapport au repère (R0 ) s’exprime également


en tout point A de (S) en fonction du moment cinétique H (A, S/R0 ) défini précédemment.
Pour un solide de masse invariante :



− d H (A, S/R0 ) →− →

K (A, S/R0 ) = + V (A, S/R0 ) ∧ C (A, S/R0 ) (7.43)
dt
Cette expression se simplifie si le point A est fixe par rapport au repère du mouvement (R0 )

− →

( V (A, S/R0 ) = 0 ), et donc au centre d’inertie G du système. Ce torseur des quantités
d’accélération se simplifie et s’écrit en fonction du torseur cinétique :
 →
− 

− D C (S/R0 ) →
− ∈ S/R
 

 D (S/R 0) = = M γ (G 0) 


 Dt 

{DS }(G,S/R0 ) = →
− (7.44)

 →
− D H (G, S/R 0 ) 

 K (G, S/R0 ) =

 

Dt

(G,S/R0 )

en notant que la dérivée étant relative au repère du mouvement, une expression eulérienne pour
D
ces formulations locales nécessite d’introduire une dérivée particulaire notée Dt - cf support de
cours de J. Bruchon Mécanique des Milieux Continus dans la Majeure Mécanique 2014-2015.

7.3.6 Principe Fondamental de la Dynamique


L’énoncé du PFD permet de relier directement l’ensemble des efforts extérieurs (voir
remarque ci-dessous) appliqués à un système en mouvement {τext→S }(A,S/R0 ) par rapport à un
repère (R0 ), au torseur des quantités d’accélération galliléennes {DSa }(A,S/R0 ) de ce système :

Principe Fondamental de la Dynamique

{τext→S }(A,S/R0 ) = {DSa }(A,S/R0 ) (7.45)

Forces fictives

Si le repère (R0 ) du mouvement n’est pas galliléen 1 le torseur des efforts extérieurs
doit inclure les forces dites fictives qui dérivent de la loi de composition des accélérations et
qui peuvent être classées dans les forces à distances au même titre que les efforts volumiques
produits par l’attraction gravitationnelle par exemple.
1. des axes de référence galliléens sont définis à une translation rectiligne uniforme près par rapport à
l’un d’entre eux choisi en particulier
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 205

En effet, le PFD s’énonce en prenant comme accélération l’accélération dite absolue ou


accélération galliléenne (→
−γ a ). Il est donc nécessaire, lorsque le mouvement n’est pas galliléen,
de prendre en compte les forces d’inertie dues à l’accélération d’entraînement (→ −γ e ) et la force


de Coriolis ( γ c ) qui se déduisent de la loi de composition des accélérations. Soit le PFD
prenant en compte ces forces fictives lorsqu’elles existent :

{τext→S }(G,S/R0 ) + {−m →



γ e (G ∈ S/R0 )} + {−m →

γ c (G ∈ S/R0 )} = {m →

γ r (G ∈ S/R0 )}
(7.46)
Ce système d’équations (7.46), un peu plus général que le P F D (7.45) est également
appelé Équations universelles de l’équilibre et du mouvement.

Théorèmes de la quantité de mouvement et du moment cinétique

En se limitant aux cas où l’équilibre est considéré en un point fixe par rapport au repère
du mouvement (R0 ), le torseur des actions dynamiques {DSa } est directement égal à la dérivée
par rapport au temps du torseur cinétique (7.44).

D
{τext→S }(A,S/R) = {CS }(A,S/R) (7.47)
Dt
De plus, pour des systèmes (S) de contenu invariable, cette nouvelle forme du P F D
(7.47) donne deux équation vectorielles respectivement appelées Théorème de la quantité de
mouvement (7.48-a) et Théorème du moment cinétique (7.48-b). Comme précédemment, les
forces fictives doivent être introduites dans le torseur des actions extérieures si le repère du
mouvement (R0 ) n’est pas galliléen. On peut noter que seul le théorème du moment cinétique
impose que le point auquel il est appliqué soit fixe par rapport au repère du mouvement, le
théorème de la quantité de mouvement s’appliquant sur la résultante indépendante du point
considéré :

X→ →

− d C (S/R0 )
F ext→S (M ) = (7.48a)
dt

X− →

→→ − d H (A, S/R0 )
M ( F ext→S (M ), A) = (7.48b)
dt

7.3.7 Théorème de l’énergie cinétique


Pour un système (S) constitué de partitions, la puissance totale développée par ce
système dans son mouvement par rapport à un repère de référence (R0 ) conduit à l’expression
du théorème de l’énergie cinétique. En première approximation, cette expression est le PFD
en produit avec le champ des vitesses qui règne dans chaque partition du système. On a
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 206

ainsi un équilibre entre la puissance développée par les efforts extérieurs Pext (S/R0 ) et les
efforts dérivant de l’énergie cinétique. Les efforts internes à chaque partition Pint (S/R0 ) et
inter-partitions Pdef f (S/R0 ) étant également considérés.
Finalement, pour toute partition d’un système, la somme des puissances des forces exté-
rieures au système et des forces intérieures relatives à la partition envisagée, dans le mouvement
réel, est égale à la dérivée par rapport au temps de l’énergie cinétique du système augmentée
de la somme des puissances des déformations entre les différentes parties du système :
D T (S/R0 ) X
Pint (S/R0 ) + Pext (S/R0 ) = + Pdef f (S/R0 ) (7.49)
Dt
Dans le mouvement autour du centre d’inertie le théorème de l’énergie cinétique s’applique
sans introduire d’autres forces que celles que l’on doit considérer dans le repère du mouvement
(R0 ), i.e. aucune force fictive d’origine inertielle.

7.4 Principe des puissances virtuelles - P P V - et lien


avec les autres principes de la mécanique
Le principe des puissances virtuelles - P P V - est un outil extrêmement puissant,
qui permet notamment d’expliciter les conditions d’équilibre et de stationnarité d’un système.
Des formulations écrites en termes de potentiels (externe, interne, de dissipation), telles que le
principe de Hamilton peuvent être utilisées dans les cas de systèmes conservatifs et/ou dont les
efforts dérivent d’un potentiel, et dans un cadre linéaire géométrique et matériaux. Par contre,
le P P V offre une écriture beaucoup plus générique. L’expression du P P V devient alors la
base de l’écriture d’un équilibre, et peut correspondre sous certaines conditions vérifiées par
le champs virtuel, à la formulation faible du problème écrit en déplacements ou en efforts. Ce
principe sera d’abord introduit sur des systèmes discrets puis étendu aux systèmes continus,
dynamiques puis statiques.

Remarques : Les notions utilisées ici sur les systèmes discrets - liaisons holo-
nômes, paramétrisation de Lagrange, structure de l’énergie cinétique, ...- sont dé-
taillées dans le support de cours Dynamique des Solides et des Structures disponible
à l’adresse http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/Dynamique-3A/
Dynamique-SDrapier-octobre2016.pdf.

7.4.1 Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour les


systèmes discrets
Considérons un cas linéaire, du point de vue géométrique et du point de vue matériau.
Pour cela, considérons le cas le plus simple qui soit, un point matériel k, associé à une masse
mk :
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 207



— soumis a un champ de forces X de composante Xi , i = 1, 2, 3, qui peuvent être
des forces volumiques données ou bien des efforts de réaction dûs aux conditions
cinématiques imposées au système
— l’équilibre dynamique est caractérisé par le P F D (Eq. 7.45) :

mk üi − Xi = 0

Principe des Travaux Virtuels - P T V

Imaginons une trajectoire →−u 0 (t) distincte de →−


u (t), mais suffisamment proche. On

− →
− →
− 0 →−
définit le déplacement virtuel δ u par δ u = u − u (figure 7.3). Par définition le déplacement
virtuel est arbitraire pour t1 < t < t2 , il représente un écart par rapport au déplacement réel.
C’est en cherchant à minimiser cet écart que la formulation variationnelle permet de trouver
le champ réel, seule solution de l’équilibre. On retrouve ici la notion de famille de fonctions
admissibles proches de la solution, introduite comme base du calcul variationnel au §7.2.

Figure 7.3: Trajectoire virtuelle.

Les conditions aux limites cinématiques doivent être vérifiées par le champ de dé pla-
cement réel, qui est dit Cinématiquement Admissible (C.A.). Il faut donc que le champ virtuel
soit Cinématiquement Admissible à 0 (C.A.(0)), c’est à dire que les conditions aux limites ci-
nématiques soient vérifiées, et donc que les perturbations imposées au champs de déplacement
soient nulles. En effet, si au point P le déplacement → −u d est imposé, l’écart à cette quantité
donnée ne peut qu’être nulle, puisque le champ réel est C.A. (7.50). Ce raisonnement tient
aussi pour les Conditions Initiales (en temps), et le champ virtuel devra être nul aux bornes t1
et t2 , il sera noté C.I.(0).

−u (P ) = → −
ud

− →

u (P )+ δ u (P ) = u d →

(7.50)



δ→

u (P ) = 0
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 208

L’énoncé du P T V pour les systèmes discrets de dimension N est donc le suivant :


N X
X 3
(mk üik − Xik ) δuik = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0) (7.51)
k=1 i=1

Réciproquement, si le P T V est vérifié, quelque soit le champ virtuel répondant aux restrictions
ci-dessus, alors l’équilibre est satisfait. Le P T V représente la contribution énergétique des
puissances développées, dans un champ de déplacement virtuel C.A.(0), par d’une part les
efforts d’origine inertielle et d’autre part les efforts extérieurs au système. Nous verrons son
extension aux milieux continus, ci-après.

Principe de Hamilton

Le principe de Hamilton n’est rien d’autre que le P T V intégré dans le temps. Il est
donc nécessaire de pouvoir définir des potentiels dont dérivent les grandeurs statiques et
dynamiques du P F D. Partons de notre écriture du P T V (7.51) et intégrons-le dans le temps,
en supposant que le système ne présente que des liaison holonômes, i.e. dont l’expression
permet une intégration en temps.

3
N X
!
Z t2 X
(mk üik − Xik ) δuik dt = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0) (7.52)
t1 k=1 i=1

Nous allons exprimer ce principe en utilisant des formes potentielles, et pour cela
nous supposerons que les masses sont indépendantes du temps. On peut remarquer l’identité
suivante concernant les effort d’origine inertielle :
d
(mk u̇ik δuik ) = mk üik δuik + mk u̇ik δ u̇ik
dt  
1
= mk üik δuik + δ mk u̇ik u̇ik
2

on retrouve la définition de l’énergie cinétique (7.39) pour le points matériels


d
(mk u̇ik δuik ) = mk üik δuik + δT (uik , u̇ik , t)
dt
(7.53)
Il faut maintenant définir l’énergie potentielle, qui dans le cas des systèmes discrets,
se déduit de l’expression des efforts extérieurs et des efforts de liaison intérieurs. On suppose

− − →
− −
ici que ces efforts Xik dérivent d’un potentiel V : F (→ x ) = − ∇V (→ x , t). Pour mémoire, les
forces dérivant d’un potentiel peuvent conservatives, ou non (cf potentiels de dissipation au
§7.4.3).
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 209

Pour simplifier les écritures, on utilisera ici la notion de coordonnée généralisée qui
permet, dans les systèmes discrets, de passer d’une paramétrisation en fonction des coordon-

− −
nées matérielles (→

x, → −
u (→
−x )) et vitesses associées ( u̇ (→
x )), à une paramétrisation optimale
en termes de coordonnées généralisées (qs ) et vitesses associées (q̇s ). En écrivant le travail
virtuel δWQs (ou le travail élémentaire) des efforts généralisés :
N X
X 3 n
X
δWQs = Xik δuik = Qs δqs = −δV (qs ) (7.54)
k=1 i=1 s=1

On a ainsi l’expression des efforts généralisés et du potentiel correspondant qui se déduit de


l’expression du travail virtuel :
s
!
∂V (qs ) X ∂V (qs )
∃V (qs ) / = −Qs δV = δqs (7.55)
∂qs n=1
∂qs

Si nous revenons à notre expression initiale de l’intégration dans le temps du P T V


(7.53), en introduisant l’expression du potentiel des efforts généralisés (7.54) et l’expression
de l’énergie cinétique (7.53) quadratique en les coordonnées généralisées et les vitesses géné-
ralisées, le principe de Hamilton (7.52) peut s’écrire sous la forme :
" N 3 #t2 Z t2
XX
−mk u̇ik δuik +δ (T (qs , q̇s , t) − V (qs )) dt = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0)
k=1 i=1 t1
t1
(7.56)
compte-tenu des restrictions sur les valeurs du champ virtuel en t1 et t2 , le premier terme de
cette expression est nul et on obtient l’énoncé du Principe de Hamilton.

Principe de Hamilton pour les systèmes conservatifs

La trajectoire réelle du système est celle qui rend stationnaire l’intégrale


R t2
t1
(T (qs , q̇s , t) − V (qs )) dt par rapport à toute variation arbitraire de déplacement
C.A.(0) entre 2 instants t1 et t2 , mais s’annulant aux extrémités de l’intervalle :
 Z t2
 δ
 (T (qs , q̇s , t) − V (qs )) dt = 0
t1 (7.57)

δqs (t1 ) = δqs (t2 ) = 0

7.4.2 Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets


La forme proposée par Lagrange est beaucoup plus générale car elle ne se limite pas aux
systèmes conservatifs. On exprime les équations du mouvement en fonction des coordonnées
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 210

généralisées. Pour la variation de l’énergie cinétique, T (qs , q̇s , t), on obtient :


n  
X ∂T ∂T
δT (S, R0 ) = δqs + δ q̇s (7.58)
s=1
∂q s ∂ q̇ s

On connaît également la forme du potentiel des efforts extérieurs (7.54) en fonction des
coordonnées généralisées. On peut donc écrire le principe de Hamilton (7.57) sous la forme
suivante :
Z t2 Xn   !
∂T ∂T
+ Qs δqs + δ q̇s dt = 0, ∀δqs C.A.(0), C.I.(0) (7.59)
t1 s=1
∂qs ∂ q̇s

On intègre par parties le second terme :


Z t2  t2 Z t2  
∂T ∂T d ∂T
δ q̇s dt = δqs − δqs dt
t1 ∂ q̇s ∂qs t1 t1 dt ∂ q̇s
(7.60)
k
0 car δqs C.I.(0)
Finalement, l’équilibre est équivalent à :
Z t2 X n     !
d ∂T ∂T
− + + Qs δqs dt = 0, ∀δqs C.A.(0), C.I.(0) (7.61)
t1 s=1
dt ∂ q̇s ∂qs

cette égalité étant vraie quelque soit le champ virtuel, la condition (7.61) équivaut donc à n
équations scalaires, appelées Équations de Lagrange, valables pour l’instant dans le cadre d’un
système conservatif :
 
d ∂T ∂T
− + + Qs = 0 , s = 1 . . . n
dt ∂ q̇s ∂qs |{z} (7.62)
| {z } |{z}
a b c
les termes a, b représentant les forces d’inertie généralisées associées au ddl qs , et le terme c
représentant les forces généralisées extérieures (et intérieures comme nous le préciserons dans
la suite).
On reconnaît dans la structure de ces équations, la condition de minimisation des
fonctionnelles d’Euler-Lagrange (voir Eq. 7.11), pour la fonctionnelle présentée dans le principe
de Hamilton (7.57). Cette expression est complétée par la suite dans le cadre des systèmes
dissipatifs.

7.4.3 Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs


Les forces généralisée intérieures et extérieures au système peuvent être classées selon
leur type (élastiques, conservatives, dissipatives, ...) ce qui permet de formuler les équations
de Lagrange dans un cadre tout à fait général. Ces forces sont dites conservatives si le travail
virtuel associé est récupérable.
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 211

1/ Forces intérieures

Forces de liaison Les forces de liaison sont internes au systèmes, elles résultent des
contraintes cinématiques imposées. Exemple, une liaison entre 2 masses :Xi1 +Xi2 = 0 (action
- réaction). Le travail virtuel associé au déplacement virtuel (δui1 , δui2 ) est nul puisque nous
avons vu que le champ virtuel est C.A.(0), c’est-à-dire que les déplacements virtuels imposés
sont nuls.
En conséquence, les forces de liaison ne contribuent pas aux forces généralisées agissant
sur l’ensemble du système. C’est un des attraits essentiels la mécanique Lagrangienne.

Forces élastiques Dans un corps déformable, le travail est stocké sous forme récupérable.
Les forces élastiques dérivent d’un potentiel élastique, ou potentiel de déformation qui s’exprime
en calculant le travail virtuel δWel effectué par ces effort internes dans le déplacement virtuel
δ→
−u :
N X 3 n
X ∂Vint (qs ) X
δWel = δuik = Qs δqs = −δVint (qs ) (7.63)
k=1 i=1
∂u ik s=1

On en déduit l’expression des forces internes généralisées et du potentiel de déforma-


tion :
∂Vint (qs )
∃ Vint (qs ) / Qs = − (7.64)
∂qs

Forces dissipatives Ces forces sont de sens opposé au vecteur vitesse, orientées dans la
même direction. Elles sont fonction du module du vecteur vitesse.
Les liaisons non-parfaites peuvent être dissipatives, c’est souvent le cas dans les sys-
tèmes réels. Un autre exemple de force dissipative est l’effort de rappel d’origine visqueuse
d’un amortisseur tel que dans un oscillateur amorti.
On montre que le travail virtuel de ces forces dissipatives agissant sur le systèmes est
non-nul. On introduit un potentiel de dissipation D :

∂D(q̇s )
∃ D(q̇s ) / − = Qs
∂ q̇s
La puissance dissipée est donnée par :
n n
X X ∂D(q̇s )
Pdiss = Qs q̇s = − q̇s
s=1 s=1
∂ q̇s

On montre que la fonction D(q̇s ) est homogène d’ordre m en fonction des vitesses généralisées,
donc d’ordre m − 1 pour les forces dissipatives généralisées qui en dérivent :
— m = 1 : frottement sec
— m = 2 : frottement visqueux
— m = 3 : traînée aérodynamique (turbulence)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 212

Donc la puissance dissipée vaut :


n
X
Pdiss = − mD(q̇s )q̇s
s=1

On peut noter que les forces extérieures peuvent également être dissipatives, par exemple en
présence de contacts.

2/ Forces extérieures

Forces conservatives Comme nous l’avons vu précédemment, elles dérivent d’un potentiel
(7.55) :
∂Vext
∃ Vext (qs ) / Qs = −
∂qs
Le travail virtuel de ces forces sur un cycle est nul :
I
δWext−cons = Qs δqs = 0

Forces non-conservatives Leur travail virtuel ne peut se simplifier comme dans les cas
précédents, il s’exprime en fonction des efforts extérieurs (7.54) et des déplacements courants
dérivés par rapport aux coordonnées généralisées :

N X
X 3
Pn
δWnon−cons = − s=1 Qs δqs = Xik δuik
k=1 i=1
3 n
PN X X ∂uik
= k=1 Xik δqs
i=1 s=1
∂qs

Ce qui donne l’expression des efforts généralisés associés :


3 X
N
X ∂uik
Qs (t) = Xik
i=1 k=1
∂qs

Au bilan la prise en comptes des forces non-conservatives internes et externes dans le


calcul du bilan énergétique du système donne :
n
d X
(T (qs , q̇s , t) + V (qs , q̇s )) = −mD(q̇s ) + Qs (t)q̇s
dt s=1

où le potentiel total V (qs ) = Vint (qs ) + Vext (qs )


Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 213

Équations de Lagrange dans le cas général

Dans le cas général d’un système non-conservatif à liaisons cinématiques holonômes,


les équations de Lagrange prennent en compte les forces intérieures et extérieures, dissipatives
et conservatives, introduites précédemment. Au final, le mouvement du système est caractérisé
par s équations correspondant aux s degrés de liberté du système :

Équations de Lagrange pour les sytèmes non-conservatifs

 
d ∂T (qs , q̇s , t) ∂T (qs , q̇s , t) ∂V (qs ) ∂D(q̇s )
− + − − + Qs (t) = 0 , s = 1 . . . n
dt ∂ q̇s ∂qs ∂qs ∂ q̇s
(7.65)
avec
Qs (t) : les forces extérieures généralisées non-conservatives
V (qs ) = Vint (qs ) + Vext (qs ) : le potentiel total
V ∗ (qs ) = V (qs ) − T0 (qs , t) : le potentiel modifié par l’énergie cinétique d’entraîne-
ment linéaire en les coordonnées
D(q̇s ) : le potentiel de dissipation
Fs = ns=1 Grs les forces gyroscopiques généralisées
P

Toutes les notions introduites ci-dessus restent évidemment valables dans le cas des
systèmes continus. Bien évidemment la notion de potentiel des actions intérieures devra être
précisée puisque nous considérerons, généralement, une unique partition dans le cas des milieus
continus.

7.4.4 Principe de Hamilton pour les systèmes continus


Dans ces systèmes continus le principe de Hamilton établi précédemment (Eq. 7.57)
pour des systèmes discrets conservatifs reste bien évidemment valable. On rappel que ce
principe est basé sur la minimisation de la fonctionnelle appelée Lagrangien du système, définie
comme la différence entre l’énergie cinétique du système et son énergie potentielle extérieure et
intérieure. Dans le cas des milieux continus, cette dernière quantité est classiquement appelée
énergie de déformation élastique. Le principe de Hamilton s’écrit entre deux instants t1 et t2
pour un système continu :
 Z t Z t2 
2

− →
− →

T (→

u , u̇ , t) − Vext (→

u ) − W (→


L( u , u̇ , t) dt = δ

 δ u ) dt = 0,
t1 t1 (7.66)
 ∀ δ→
 − →

u ( x , t) C.A.(0) et C.I.(0)

Les relations entre le PPV / PTV, et le Principe de Hamilton sont explicitées plus
en détails ci-après §7.4.5 page 217. On rappel que le principe de Hamilton s’écrit à partir
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 214

des potentiels des actions extérieures et intérieures, c’est-à-dire du potentiel de déformation


pour ce dernier terme. Considérons un milieu continu Ω quelconque de masse volumique
ρ supposée constante, tel que représenté sur la figure 7.4. Ce milieu est en équilibre sous
l’action d’efforts extérieurs volumiques fi et surfaciques Fid appliqués sur sa frontière ∂ΩF .
Les conditions aux limites cinématiques de ce milieu sont quant à elles appliquées sur la surface
∂Ωu (→ −
u (→
−x)=→ −
u d (→

x ), ∀→−
x ∈ ∂Ωu ) et l’on a les conditions suivantes sur ces deux surfaces
complémentaires : ∂ΩF ∪ ∂Ωu = et ∂ΩF ∩ ∂Ωu = ∂Ω

Figure 7.4: Solide (S) quelconque, occupant un volume Ω, en équilibre sous l’action d’efforts
extérieurs, et conditions aux limites associées.

Définition des potentiels

Pour ce milieu continu, la densité d’énergie cinétique s’exprime de manière triviale et on


définit w(γ) (éq. 7.67b) la densité d’énergie de déformation et vext (→ −
u ) (éq. 7.67a) la densité
de potentiel des actions extérieures conservatives telles que :
∂vext →


vol →
(− vol


 →
− |Ω = − f δvext u ) = −δwext
∃vext (→

u) / ∂u (7.67a)
 ∂vext | →
− d  surf → − surf

∂ΩF = − F δvext ( u ) = −δwext

∂→−
u
∂w  
∃ w(γ) / = S(γ) δw = S(γ) : δγ (7.67b)
∂γ

où S est le second tenseur des contraintes de Piola-Kirchhoff et γ est le tenseur des défor-
mations de Green-Lagrange, son dual au sens de l’énergie de déformations définie w(γ). Sans
entrer dans les détails de cette formulation en description Lagrangienne, c’est-à-dire sur la
configuration non-déformée, nous nous limitons ici aux petites perturbations. D’ailleurs dans
le cadre de la formulation de Hamilton, les forces extérieures ne peuvent que dériver d’un
potentiel, elles sont donc conservatives. Ceci exclue de fait les forces suiveuses telles que les
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 215

pressions qui agissent sur la configuration géométrique courante, et dont le travail dépendra
des déplacements solutions, ceux justement recherchés.
La prise en compte des grandes déformations et des grands déplacements est écartée
ici, il en découle que la mesure des contraintes peut se ramener au tenseur de Cauchy, σ, et
le tenseur des déformations de Green-Lagrange associé se limite à sa partie linéarisée, notée
ε. L’effet des pré-contraintes par exemple, telle que la pré-tension dans les cordes vibrantes,
peut être pris en compte différemment pour ces cas spécifiques. Pour les cas généraux que
nous traitons ici, le tenseur des déformations est :
1 1
ε(→
− ∇→

u +t ∇→
− 
u)= u ou encore, en notation indicielle εij = (ui,j + uj,i ) (7.68)
2 2

On définit de manière courante l’énergie interne de déformation par l’intégrale du


travail fournit par les contraintes dans les déformations correspondantes, ce qui dans le cas
de contraintes indépendantes explicitement du temps se ramène au calcul sur le trajet de
déformation. L’énergie complémentaire, notée w∗ (σ), est duale et se définit par l’intégrale
sur le trajet de contrainte du travail fourni par les déformations dans le solide (Table 7.4.4).
Ces deux grandeurs énergétiques permettent de définir la loi de comportement, relation entre
contraintes et déformations ; aussi bien également dans le cas des grandes déformations où
les mesures de contraintes et de déformations doivent alors être adaptées aux formulations
choisies, Lagrangienne ou Eulérienne notamment.

Z εij ∂w(ε)
w(ε) = σij dεij = σij
0 ∂εij
σij ∂w∗ (σ)
Z
w∗ (σ) = εij dσij = εij
0 ∂σij

Loi de comportement et énergies associées.

Table 7.1: Définition des énergies de déformation et de déformation complémentaire, et leur


signification physique en lien avec la loi de comportement.

On peut maintenant calculer sur le domaine entier les quantités intervenant dans le
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 216

principe de Hamilton :

− → →
−d →
 Z Z Z Z

 →

Vext ( u ) = vol
vext dΩ + surf
vext dΩF = − − →

f ( x , t) u (x, t) dΩ − F (−
x , t)→

u (x, t)dωF



 Ω ∂ΩF Ω ∂ΩF
Z  Z 


− →
− 1
Vint ( u ) = w( u )dΩ = σ(ε) : ε(→

u ) dΩ pour un matériau linéaire

 ΩZ 2 Ω

− →
− 2


 1
 T ( u̇ ) =
 ρ u̇ dΩ
2 Ω
(7.69)

Dérivation des équations d’équilibre

Partant des expressions des potentiels présentées en 7.69, le principe de Hamilton (eq.
7.66) devient :
Z t2 Z t2 Z 


Z
δ →

L( u , u̇ , t)dt =
 →
− →
− 
ρu̇i δ u̇i − σij (ε)δεij ( u ) + fi ( x , t)δui dΩ + →

Fi ( x , t)δui dΩF dt
t1 t1 Ω ∂ΩF

= 0 , ∀ δ→

u (→

x , t) C.A.(0) et C.I(0)
(7.70)
en utilisant les conditions de vitesses nulles aux instants extrêmes, i.e. pour un champ de
vitesse C.I.(0), on obtient après intégration par partie en temps du terme inertiel provenant
de la variation de l’énergie cinétique :
Z t2 Z t2
t2
ρu̇i δ u̇i dt = [ρu̇i δui ]t1 − ρüi δui dt
t1 | {z } t1 (7.71)
0

et la variation de l’énergie de déformation s’écrit classiquement, en remarquant la symétrie


du tenseur des déformations et du tenseur des contraintes, et la nullité de la variation des
déplacements imposés sur ∂Ωu (δ → −u C.A(0)) :
Z Z


σij (ε) δεij ( u ) = σij (ε) δui,j dΩ
Ω Ω

↓ Intégration par parties


Z Z

= − σij,j (ε) δui dΩ + σij (ε) δui ,j
dΩ
Ω Ω

↓ Ostrogradski ⇔ th. de la divergence en 3D


Z Z

= − σij,j (ε) δui dΩ + σij (ε) δui nj dΩF
Ω ∂ΩF
(7.72)
Finalement, en substituant les expressions 7.71 et 7.72 dans l’expression du principe de Ha-
milton (eq. 7.70), on aboutit à une fonctionnelle faisant intervenir deux quantités distinctes,
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 217

respectivement dans le solide et sur sa frontière où les efforts sont imposés :


Z t2


δ L(→

u , u̇ , t) dt =
t
Z t21 Z Z 
 d
 (7.73)
−ρüi + σij,j (ε) + fi δui dΩ + Fi − σij nj δui dΩF dt
t1 Ω ∂ΩF

= 0 , ∀ δ→

u (→

x ) C.A.(0) et C.I(0)

Le champ virtuel étant par définition arbitraire, et compte-tenu des conditions de nullité
de ce champ aux instants extrêmes t1 et t2 , d’aprés le lemme de l’intégrale nulle, la quantité
dans l’intégrale en temps est nulle quelque soit le champ virtuel continu sur Ω. Choisissons le
champ virtuel non-nul à l’intérieur du solide (7.74a) et nul sur sa frontière, puis inversement
nul à l’intérieur et non-nul sur sa frontière (7.74b). La condition de nullité est donc satisfaite
si et seulement si les équations suivantes sont vérifiées, ce sont les équations caractérisant
l’équilibre dynamique :

− →
− − →
− −
u (→
−x ) 6= 0 , ∀→x ∈Ω ∪ → −
u (→−
x ) = 0 , ∀→
n o n o
x ∈ ∂ΩF ⇒ σij,j + fi = ρüi dans Ω et ∀t(7.74a)

n

− →
− →
− → −
o n

− →
− →
− → −
o
u ( x ) = 0 , ∀ x ∈ Ω ∪ u ( x ) 6= 0 , ∀ x ∈ ∂ΩF ⇒ Fi = σij nj sur ∂ΩF et ∀t (7.74b)

On notera que la condition de minimisation d’Euler-Lagrange est une généralisation du


principe de Hamilton à toute fonctionnelle convexe. D’ailleurs on montrera, pour un cas simple,
que ces équations d’équilibre se déduisent directement de cette condition de minimisation sans
autre calcul.

À partir de ces équations d’équilibre, on peut traiter n’importe quel problème de dyna-
mique de milieux continus. Il faut toutefois noter qu’on aborde souvent de manière distincte
deux types de problèmes de dynamique : propagation d’ondes et vibrations. Dans cette dis-
tinction ’fictive’ interviennent en premier lieu les propriétés de conduction de ces mouvements
(vitesse de propagation), notamment la célérité caractérisant l’aptitude du solide à propager
ces mouvements entre des points matériels voisins. Selon la vitesse de propagation, les mou-
vements pourront devenir coopératifs ou non. En général, la vitesse de propagation des ondes
est beaucoup plus grande que les vitesses résultant de la vibration des structures, propagation
d’ondes et vibrations peuvent donc assez fréquemment être dissociées lorsque le spectre des
sollicitations reste dans des plages connues par avance.

7.4.5 Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans les


milieux continus
On peut aisément remarquer que les différentes formulations connues de l’équilibre
(PPV/PTV, Principe de Hamilton, Principe de d’Alembert, PFD) d’un système dérivent de la
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 218

même expression, mais sont utilisées selon que les efforts sont ou non proportionnels au temps,
et dépendent ou non du champ de déplacement, ce qui indique la présence de non-linéarités
géométriques dans ce dernier cas.
En effet, le théorème de l’énergie cinétique peut être vu comme la forme intégrale
scalaire du PFD (7.45) : si les équations vectorielles sont toutes identiquement nulles, leur
somme reste nulle. Il suffit de faire "travailler" le PFD dans le champ cinématique en tout
point du solide. En se limitant aux cas où l’équilibre est considéré en un point fixe par rapport
au repère du mouvement (R0 ), le torseur des actions dynamiques {DSa } est directement égal
à la dérivée par rapport au temps du torseur cinétique (7.44), et on peut écrire en tout point :
 
D →

{τext→S }(A,S/R0 ) − {CS }(A,S/R0 ) · V (A, S/R0 ) = 0, ∀→ −x ∈Ω
Dt

Dans le cadre général des solides déformables (Figure 7.4), on utilise la forme intégrale
en espace (sur le solide (S) occupant le domaine Ω et son bord ∂Ωf ) de cette formulation. Les
efforts ne se limitent plus aux efforts extérieurs, et il faut alors intégrer les efforts internes, et
plus précisément expliciter l’énergie de déformation produite par les efforts de cohésion dans
le champs de déplacement interne au milieu. Finalement, l’équilibre exprime que, pour toute
partition d’un système, la somme des puissances des forces extérieures au système et des forces
intérieures relatives à la partition envisagée, dans le mouvement réel, est égale à la dérivée par
rapport au temps de l’énergie cinétique du système augmentée de la somme des puissances
induites par les déformations entre les différentes parties du système :

D T (S/R0 ) X
Pint (S/R0 ) + Pext (S/R0 ) = + Pdef f (S/R0 ) (7.75)
Dt

Nous nous limiterons désormais au cas où le milieu est continu, i.e. il n’existe qu’une
seule partition constituant le milieu à elle seule. Pour la partie inertielle des efforts extérieurs, on
utilise les expressions des grandeurs cinétiques et dynamiques telles qu’exprimées aux centres
de gravité d’une partition - respectivement les équations 7.37 et 7.44- soit en tous les points du
domaine dans la formulation pour un milieu continu. Compte tenu des expressions des quantités
cinétiques et dynamiques la contribution des efforts d’origine inertielle peut s’écrire à partir de

− −
la dérivée temporelle de l’énergie cinétique (Eq. 7.41 : dT (Ω/R dΩ
0)
= 12 M (→ −
x ) V 2 (→x , S/R0 )),
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 219

ici dans son expression eulérienne :


 
→− −
Z
D T (S/R0 ) D 1 2
ρ(→

x ) V (→
 
= x , S/R0 ) dΩ(t)

Dt Dt 2

Ω(t)
Dρ(→

x , t) ∂ρ
↓ Conservation de la masse locale = + div(ρ→

v)=0
Dt ∂t
d →− →
Z
1 2
= ρ(→

x) V (−
x , S/R0 ) dΩ
2 dt
ZΩ

− −
= ρ(→

x )→

γ (→

x , S/R0 ) · V (→
x , S/R0 ) dΩ

(7.76)


avec ρ( x ) la masse volumique du solide. On peut rappeler que par définition de la résultante
dynamique exprimée au centre de gravité de la partition considérée (7.44), on retrouve les


mêmes expressions pour les efforts d’origine inertielle : D C (G,S/R0 ) = M →
Dt

γ (→

x , S/R ) 0

Dans cette formulation intégrale, les efforts peuvent dépendre du temps, et les tenseurs
des contraintes et des vitesses de déformation sont introduits comme dans la définition des
potentiels utilisés pour le principe de Hamilton (Eq. 7.69) : σ(→ −u ) est la mesure du champ des


contraintes qui règne dans le solide au point courant → −x , et ε̇( V ) est le tenseur des vitesses

− −
de déformations associé. Ces deux grandeurs dépendant du champ des vitesses V (→ x , S/R0 ).
Pour simplifier l’expression, le champ de vitesse est supposé cinématiquement admissible à 0
(C.A.(0)), i.e. les déplacements imposés sur ∂Ωu étant annulés :


− → →
− −
Z Z

− →
− −
τ vol→S ( x , t) · V ( x , S/R0 ) dΩ + →

τ surf →S (→

x , t) · V (→x , S/R0 ) dωF −

Z


Z
D ∂Ω

F
− → 2 →
− −
σ(→

u , t) : ε̇( V ) dΩ = →

ρ( x ) V (−
x , S/R0 ) dΩ, ∀ V (→
x , S/R0 )C.A.(0) et C.I.(0)
Dt
Ω Ω
(7.77)

− − →
− − →
− −
avec f (→x , t) = →
−τ vol→S (→

x , t) et F d (→
x , t) = →

τ surf →S (→

x , t), et u̇ (→
x) = D→
Dt

u (→

x) pour
retrouver les expressions des potentiels définis précédemment (7.69).

PPV et PTV

Á partir de cette expression générale (7.77), la correspondance avec le Principe des


Puissances Virtuelles est direct si l’on remarque que la puissance développée par les efforts
d’origine inertielle s’écrit, en introduisant la définition (7.42) de la résultante dynamique


( D (S/R0 ) = (S) →
R −
γ (P ∈ S/R)dm), comme montré ci-dessus (7.76) :


− −
Z
D T (S/R0 )
= ρ(→

x )→

γ (→

x , S/R0 ) · V (→
x , S/R0 ) dΩ (7.78)
Dt

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 220



Alors en prenant le champ de vitesses réel égal au champ de vitesse virtuel V ∗ (M ∈ S)
C.A.(0), on a l’expression classique de l’équilibre qui fait intervenir la puissance virtuelle des
∗ → −
quantités d’accélérations Pacc (u∗ , S/R0 ) :
∗ → − ∗ → − ∗ → − →
− −
Pint (u∗ , S/R0 ) + Pext (u∗ , S/R0 ) = Pacc (u∗ , S/R0 ), ∀u∗ (→
x )C.A.(0) et C.I.(0) (7.79)

avec par définition la puissance virtuelle des efforts internes :

∗ → −∗ →

Z
Pint (u , S/R0 ) = − σ(→ −u ) : ε∗ (u∗ ) dΩ

L’équilibre correspondant à cette équation étant identiquement nulle, en se restreignant


au cadre des petites perturbations pour des solides à comportement linéaire, et dans le cas
d’efforts extérieurs indépendants du temps, on peut considérer une forme intégrale dans le
temps, faisant intervenir les expressions des travaux et des énergies. Dans ce cadre les intégrales
en temps de ces puissances conduisent aux expressions des travaux virtuels qui dépendent


uniquement du champ de déplacement → −u ∗ (M ) associé à la vitesse virtuelle V ∗ (M ) :


− − →
− −
Z Z


τ vol→S (→

x ) · u∗ (→
x , S/R0 ) dΩ + →

τ surf →S (→

x ) · u∗ (→
x ) dωF −
Ω ∂ΩF
Z


Z

− − →
− − (7.80)
σ(ε) : ε∗ (u∗ ) dΩ − ρ(→

x )→

γ (→

x , S/R0 ) · u∗ (→
x ) dΩ = 0, ∀ u∗ (→
x ) C.A.(0)
Ω Ω

Le théorème de l’énergie potentielle, et le théorème de l’énergie potentielle


complémentaire ne sont rien d’autre qu’un cas particulier dans un cadre statique, de ces
formulations intégrales basées sur des potentiels. Les détails de ces formulations sont acces-
sibles dans le support de cours de J. Bruchon Mécanique des Milieux Continus dans la Majeure
Mécanique 2014-2015. Il s’agit, dans ce cas, de définir des potentiels, comme dans le cas du
principe de Hamilton, mais indépendamment du temps, dont dérivent à la fois l’énergie de
déformation et le potentiel des actions extérieures.
A l’opposé, pour être plus général, on formule souvent le P P V faisant intervenir la
puissance virtuelle au lieu des travaux virtuels. On pourra arguer que ces quantités étant
virtuelles, on peut décider qu’on choisit le champ virtuel de la dimension d’un déplacement ou
d’une vitesse. La différence entre P T V et P P V se situe surtout au niveau de l’intégration des
non-linéarités et dépendances diverses (en temps, en espace). Classiquement, le P P V intégrera
tout type de dépendance des contraintes vis-à-vis des déformations, et plus généralement les
non-linéarités. Prenons le champs virtuel égal à la variation du champs réel pour simplifier :
−→−
V ∗ (→
x , S/R) = δ →−
u (→
−x , t). Ce champs est donc C.A.(0). Utilisons-le dans l’expression (7.77)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 221

établie à partir du principe de Hamilton :


Z


Z

− →− →
− →

Z −
→−
− σ(ε, t) : δε( u , t) dΩ(t) + f ( x , t) · δ u ( x , t) dΩ(t) + F d (→
x , t) · δ →

u (→

x , t) dωF (t)
Ω(t)
Z Ω(t) ∂ΩF (t)

= ρ(→

x , t)→

γ (→

x , S/R) · δ →

u (→

x , t) dΩ(t), ∀ δ →

u (→

x , t) C.A.(0) et C.I.(0)
Ω(t)
(7.81)
ou sous la forme plus générique encore faisant apparaître simplement les énergies et potentiels :
Z Z Z
vol →
− →
− surf →
− δw(ε, t) dΩ(t) + δwext ( u , x , t) dΩ(t) + δwext (−
u ,→−
x , t) dωF (t)
Ω(t) Ω(t) ∂ΩF (t)
| {z } | {z }
δPin (→

u , t) δPext (→

u , t)
(7.82)

− −
Z
= ρ(→

x , t) ü (→
x , S/R) · δ →
− x , t) dΩ(t), ∀ δ →
u (→
− −
u (→

x , t) C.A.(0)C.I.(0)
Ω(t)
| {z }


δPacc ( u , t)

7.5 Concepts de stabilité des équilibres


Nous avons vu dans les parties précédentes que les équations de Lagrange caractérisent
l’équilibre dynamique d’un système (7.65). Ces équations différentielles d’ordre 2 peuvent être
résolues, de façon numérique ou encore analytique.

7.5.1 Stabilité des équilibre


Lorsque l’équilibre est caractérisé, se pose alors la question de la stabilité de cet équi-
libre. Dans cette partie, sur la base de l’équilibre des systèmes dynamiques discrets à N ddl, la
stabilité de cet équilibre va être étudiée. Tous les concepts introduits dans le cas des systèmes
discrets restent valables dans le cas des milieus continus.
Grâce à une linéarisation des équations d’équilibre autour d’un point d’équilibre, la
stabilité du système peut être caractérisée. Dans le cas d’une résolution numérique, l’équilibre
d’un système dynamique peut être recherché par diverses méthodes : intégration de Newmark
par exemple ou encore θ-Wilson. Ces méthodes de résolution sont souples, et vont permettre
de trouver rapidement les solutions de l’équilibre du système étudié. Par contre, ces méthodes
doivent être adaptées à chaque famille de cas, notamment en fonction de l’amortissement du
système considéré.
Les résolutions analytiques ne sont possibles que dans les cas simples. Pourtant ces
méthodes de résolution fournissent les bases des résolution numériques. On peut grâce à ces
approches :
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 222

— déterminer des positions d’équilibre


— déterminer le mouvement au voisinage de cette position
— déterminer des mouvements stationnaires
— déterminer les oscillations autour des mouvements stationnaires

7.5.2 Définition d’un équilibre


L’équilibre au temps t0 peut être par rapport à un seul paramètre ou paramétrique :
— équilibre par rapport à un paramètre qj (qj est donné, et n’évolue pas dans le temps)
)
qi (t0 ) = qi0 , q˙i (t0 ) = q̇i0 , si i 6= j
qj (t) = qje , ∀ t
qi (t0 ) = qje , q˙i (t0 ) = 0, si i = j

— équilibre paramétrique
)
qi (t0 ) = qie , ∀ i
qi (t) = qie , ∀ t, ∀ i
q˙i (t0 ) = 0 ∀i

7.5.3 Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre


Sans entrer dans les détails, pour un système à liaisons scléronômes ne dépendant
pas du temps ni des vitesses, l’énergie cinétique se limite à sa partie quadratique en vitesse
¯ = T2 (q̄, q̇)).
(T (t, q̄, q̇) ¯ Ce qui donne pour les équations de Lagrange exprimées pour l’équilibre
paramétrique q¯e = (q1e , q2e , q3e , ..., qne ) :

∂T2 (q̄e , q̇¯e ) ∂T2 (q̄e , q̇¯e )


 
d ∂V (q̄e )
− + = −Qi = , ∀i
dt ∂ q̇i ∂qi ∂qi
| {z } | {z } | {z } (7.83)
0 0 ⇓
V (q̄)

avec le premier terme qui s’annule car la dérivée de l’énergie cinétique par rapport aux vitesses
est une forme linéaire des vitesses uniquement, le second terme quant à lui étant invariant par
nullité des vitesses autour de l’équilibre. Remarque : pour un système en translation rectiligne
uniforme, l’énergie cinétique relative reste inchangée, ces conclusions restent donc valables.
On voit donc que l’équilibre dépend du potentiel (des efforts extérieurs et intérieurs dans
le cas général), résultat classique de la statique pour un système conservatif : l’énergie fournie
par les efforts extérieurs est intégralement stockée en énergie intérieure (de déformation). Pour
la solution q̄e , ce potentiel sera un minimum relatif (V (0) = K), et un minimum absolu si
2
le potentiel est strictement convexe ( ∂∂qV2 > 0). La condition nécessaire et suffisante pour cet
i
équilibre s’exprime simplement :
∂V (q̄e )
= 0, ∀i
∂qi
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 223

Ceci se généralise pour tout système, caractérisé par les équations de Lagrange dans le cas
général (7.65). Dans ce cas le potentiel est modifié pour tenir compte de l’énergie cinétique
d’entraînement :
∂V ∗ (q̄e )
= 0, ∀i avec V ∗ = V − T0
∂qi
L’équilibre étant caractérisé, il faut maintenant pouvoir répondre à la question essen-
tielle de la stabilité de cet équilibre :
♦ l’équilibre est-il stable ?
♦ que se passe-t-il si on décale légèrement de cette position d’équilibre ?

7.5.4 Stabilité d’un équilibre paramétrique


Par définition, un équilibre est dit stable si le système étant dans des conditions ini-
tiales voisines de l’équilibre, la trajectoire du système reste dans un voisinage de la position
d’équilibre. Ceci s’écrit de façon formelle :
l’état q¯e = (q1e , q2e , q3e , ..., qne ) est dit stable si et seulement si
) ) ) )
>0 η>0 qi (t0 ) = qi0 |qi0 − qie | ≤ η
∀ ∃ / ∀ vérifiant
µ>0 ν>0 q˙i (t0 ) = q̇i0 |q̇i0 | ≤ ν
)
|qi (t) − qie | ≤ 
on ait ∀t ≥ t0 , ∃
|q˙i (t)| ≤ µ

Si  et µ sont ’petits’, la stabilité est dite conditionnelle, et si  et ν sont ∞, la stabilité est dite
globale. Ces expressions indiquent que l’évolution de la position courante est nécessairement
bornée en déplacement et en vitesse. Ou de façon énergétique, la stabilité d’un équilibre
s’énonce de la façon suivante : la position d’équilibre est stable lorsqu’il existe une borne
d’énergie ∗ telle que, si l’énergie communiquée est  < ∗ , on a T ≤  à tout instant ultérieur,
l’égalité n’ayant lieu qu’à l’équilibre. Cette caractérisation de l’équilibre nécessite la résolution
des équations différentielles traduisant le mouvement autour de la position d’équilibre lorsque
l’on décale le système par rapport à sa position instantanée. Ces équations étant souvent
non-linéaires, il est bien souvent impossible de les résoudre directement. Nous verrons dans le
paragraphe suivant une approximation de ces équations d’équilibre.
Pour le moment, on peut proposer une définition plus intuitive de la stabilité. On peut
montrer que l’équilibre d’un système conservatif à liaisons scléronômes (indépendantes du
temps) est caractérisé par l’invariance de la somme du potentiel des efforts conservatifs et
¯ + V (q̄)) = 0). Le potentiel des efforts extérieurs V étant
de l’énergie cinétique ( dtd (T (q̄, q̇)
défini à une constante prés, posons q̄(t0 ) = 0. Ceci implique que V (t0 ) = 0. Un système
sera stable si et seulement si l’énergie cinétique du système diminue pour toute position à un
instant ultérieur, ce qui se traduit par un minimum relatif, autour de la position d’équilibre,
du potentiel des efforts extérieurs du système (Eq. 7.84).
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 224

Figure 7.5: Pendule simple dans une configuration (a) stable et (b) instable.

¯ + V (q̄) =  à t = t0
T (q̄, q̇) ,or V (0) = 0

⇒ T (t0 ) =  et T (t) ≤  (< ∗ ) (7.84)

⇒ V (t) ≥ 0 , alors V (t0 ) est un minimum relatif

On voit que la stabilité dépend donc du potentiel des efforts. Ceci se comprend aisément
avec l’exemple de base du pendule simple (Figure 7.5). Ce concept s’étend grâce au théorème
de Lejeune-Dirichlet qui fournit, sous certaines hypothèses, une condition suffisante de stabilité
de l’équilibre :

Théorème de Lejeune-Dirichlet : soit un système S dont les liaisons sont in-


dépendantes du temps, soumis à des forces dérivant d’un potentiel indé-
pendant du temps. Si pour une position d’équilibre q̄e du système, le po-
tentiel est un minimum strict, alors q̄e est une position d’équilibre stable.

La stabilité dépendra donc de la convexité du potentiel. C’est un résultat classique, à la


base du traitement des problèmes d’instabilité des structures par exemple. Il en découle que la
recherche de l’équilibre du système linéarité peut donc se faire en minimisant le potentiel. Le
cas le plus illustratif est celui du ressort, dont le potentiel est strictement convexe et dont la
recherche d’un extrêmum conduit à l’équilibre. Pour des systèmes qui ne sont plus strictement
convexes, par exemple présentant des non-linéarités géométriques, la recherche de la stabilité
se fait, par extension, en étudiant le signe de la partie quadratique du potentiel s’il existe, ou
de façon équivalente la seconde variation du potentiel. Si un potentiel ne peut être défini, on
étudie alors la variation première de la formulation faible (du P P V ).
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 225

7.5.5 Linéarisation des énergies


Afin d’étudier la stabilité des équilibres, nous venons de voir qu’il faut pouvoir carac-
tériser la convexité de l’énergie potentielle. Pour rechercher cette convexité, il faut évaluer
les termes quadratiques du potentiel des efforts conservatifs. Procédons à un développement
linéaire de ce potentiel, au voisinage de la configuration d’équilibre q̄0 = 0̄ :
n  n n 
∂ 2V
 
X ∂V 1 XX
V (q̄) = V (0) + qs + qs qr + O(q̄ 3 )
s=1
∂q s |q̄0 =0̄ 2 s=1 r=1
∂q s ∂q r |q̄0 =0̄

∂V
Puisque le système est en équilibre ∂q s
= 0, et le potentiel étant défini à une constante
près, on a également V (0) = 0. Finalement, la courbure du potentiel est donnée par le seul
terme restant, qui doit être positif pour que la stabilité soit assurée :
n n
1 XX
V (q̄) = krs qs qr > 0 pour q̄ 6= 0
2 s=1 r=1

avec :
∂ 2V
 
krs = ksr =
∂qs ∂qr |q̄0 =0̄

Matriciellement la partie quadratique du potentiel s’écrit :


1 t
V (q̄) = q̄ K q̄ > 0 pour q̄ 6= 0̄
2
K, matrice de raideur linéaire du système, est donc symétrique et définie positive pour assurer
la stabilité.
De même pour l’énergie cinétique, on se limite au cas où le système ne subit pas
d’entraînement. L’énergie cinétique se réduit donc à l’énergie cinétique relative qui est une
forme quadratique des vitesses. La linéarisation autour de l’équilibre (q̄0 = 0̄, q̇(t ¯ 0 ) = 0)
conduit également à éliminer les dépendances par rapport aux coordonnées généralisées. Le
développement s’effectue donc uniquement par rapport aux vitesses :
n  n n 
1 X X ∂ 2 T2
 
¯
X ∂T2
T2 (q̄, q̇) = T2 (0) + q̇s + q̇s q̇r + O(q̇¯3 )
s=1
∂ q̇ s |q̇¯0 =0̄ 2 s=1 r=1
∂ q̇ s ∂ q̇ r |q̇¯0 =0̄


n n
∂ 2 T2
 
¯ =1
XX
T2 (q̇) mrs q̇s q̇r avec mrs = msr =
2 s=1 r=1 ∂ q̇s ∂ q̇r |q̇¯0 =0̄

Matriciellement la partie quadratique de l’énergie cinétique s’écrit avec M la matrice de masse


linéaire symétrique et définie positive du système :

¯ = 1 q̇¯t M q̇¯ > 0 pour q̇¯ =


T2 (q̇) 6 0̄
2

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