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ANNEE SCOLAIRE 2019-2020

THEME 4 : LES ECHELLES DE GOUVERNANCE DANS LE MONDE DE LA FIN DE LA


DEUXIEME GUERRE MONDIALE A NOS JOURS

CHAPITRE 1 : Gouverner la France depuis 1946 : Etat, gouvernements,


administration et évolutions

INTRODUCTION

Au sortir de la deuxième guerre mondiale, la France est un pays à reconstruire. Sa


population est affaiblie, son économie a été saignée à blanc et son territoire a subi de
nombreux bombardements. L’épuration n’a pas apaisé toutes les tensions au sein d’une
société française où flotte un parfum de guerre civile. Par ailleurs, elle est encore très
rurale et peu enclin à se moderniser. Pourtant, en quelques années, un régime
républicain est restauré, la société française renoue avec la croissance démographique,
un effort de modernisation sans précédent relance l’économie et ouvre la France sur
l’Europe.
Comment une telle transformation a-t-elle été possible?

I-LA REFONDATION DE L’ETAT REPUBLICAIN APRES LA SECONDE GUERRE


MONDIALE (1946-1958)

1. Une instabilité politique en raison d’un régime parlementaire

Après la Libération, le GPRF (Gouvernement Provisoire de la République


Française) dirigé par le général De Gaulle, gouverne la France de 1944 à 1946. Une
nouvelle constitution qui crée les institutions de la IV e République, est adoptée par
référendum en octobre 1946. Elle accorde d’importants pouvoirs à l’Assemblée
Nationale : c’est un régime parlementaire. Dans son Discours de Bayeux, De Gaulle le
critique car il considère que trop de pouvoirs sont accordés aux partis politiques et au
Parlement (docs 1 et 2 p 294). Plusieurs partis politiques sont présents à l’Assemblée
Nationale et aucun ne peut obtenir la majorité pour gouverner en raison du scrutin
proportionnel. Il faut donc constituer des coalitions souvent instables pour gouverner
entre Gauche non communiste (socialistes de la SFIO, Radicaux, etc.) et Droite non
gaulliste (les démocrates-chrétiens, centristes, etc.). La IVe République est donc marquée
par des oppositions entre communistes (premier parti politique français en 1946) et
Gaullistes.

2- La permanence de l’Etat

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En dépit de l’instabilité des gouvernements et des institutions encore mal
affermies, la IVe République se caractérise par le consensus autour de certains principes
issus de la Résistance, comme la solidarité nationale, la modernisation de la France
par l’administration, la démocratisation de la société et une économie de marché
encadrée par un É tat régulateur. Il reprend son fonctionnement normal, se dote à partir
de 1945 d’un outil visant à créer une administration puissante, l’ENA (É cole Nationale
d’Administration). Cette école forme de hauts-fonctionnaires dont la République a
besoin pour réformer et administrer le pays. (Doc 1 p 298). En plus, le personnel
politique est demeuré assez stable : sur les 227 ministres de la IV e République, 66 ont
appartenu à plus de trois gouvernements.

3. Un É tat qui étend son champ d’action

Sous la IVe République, l’Etat étend son champ d’action à de nouveaux domaines.
*La Sécurité Sociale est créée en 1945. Elle a pour rô le de couvrir les principaux
risques (maladie) et d’assurer la retraite des salariés et des travailleurs. On parle d’État-
providence pour désigner un système qui accorde un rô le social important à l’É tat qui,
par la redistribution des revenus, augmente le niveau de vie, soutient la consommation
et donc la croissance économique (doc 2 p 297). Les droits sociaux des travailleurs (droit
au travail, droit syndical, droit de grève, droit à l’accès à l’instruction et à la culture) ainsi
qu’une égalité entre les sexes (22 avril 1944, droit de vote) sont définis par la
constitution de 1946.
*Le rôle économique de l’É tat est renforcé par la nationalisation de l’économie,
notamment dans les secteurs bancaires (Crédit agricole, Crédit Lyonnais, Société
Générale), de l’énergie (EDF, GDF) mais aussi des transports (Air France, Renault).
L’Etat devient ainsi le premier entrepreneur, le premier investisseur du pays et emploie
près de 10% des actifs. Dès 1946, De Gaulle crée le Commissariat Général au Plan
dont la vocation est d’orienter le développement de l’économie française en indiquant
quels secteurs réformer ou encourager (doc 1 p 297).
Par la suite, les rapports entre De Gaulle et les autres partis politiques se dégradent
conduisant à sa démission le 20 janvier 1946. Mais il revient au pouvoir à la faveur de la
guerre d’Algérie en 1958 et instaure la Ve République.

II- L’ETAT FRANÇAIS SOUS DE GAULLE ET SES SUCCESSEURS (1958-1974)

1. Un pouvoir présidentiel renforcé

La Ve République renforce considérablement le pouvoir présidentiel et rompt avec


la IVe République caractérisée par d’interminables instabilités politiques.
.
a. Une légitimité renforcée

La constitution de 1958 change le mode de scrutin de l’Assemblée Nationale pour un


scrutin majoritaire uninominal qui permet d’obtenir des majorités stables qui
peuvent soutenir le gouvernement dans l’examen et le vote des lois. Votée par
référendum en septembre 1958, elle renforce le pouvoir du Président de la
République. Désormais, c’est le chef de l’État qui nomme le Premier ministre, préside le
conseil de ministres et fixe les priorités du gouvernement. À partir de 1962, le Président

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de la République est élu au suffrage universel direct, ce qui renforce sa légitimité et
crée un lien très fort avec la population. Ce système suscite des critiques (doc 1 p. 301).

b-Un président « au-dessus des partis »

Le Général de Gaulle fixe les grandes orientations économiques et politiques et fait


de la politique étrangère son « domaine réservé ». En revanche, il délègue à son
Premier ministre la gestion de ce qu’il appelait « l’intendance », c’est-à -dire les affaires
intérieures du pays. Ainsi, il entend être au-dessus des partis. Il maintient le lien
presque sacré avec la population par des visites régulières en province au cours
desquelles il rencontre les Français pendant les « bains de foule ». Il met un point
d'honneur à restaurer « la grandeur » de la France en multipliant les voyages à
l’étranger

2. Une forte intervention de l’É tat

a. Un État entrepreneur

Aussi bien De Gaulle que Pompidou poursuivent et accentuent l’œuvre de la IVe


République (doc 3 p 301). L’É tat soutient de grands projets industriels comme le
nucléaire, les transports (avec la création du Concorde et le projet du TGV) ou
l’informatique (création de Bull), initie également de grands travaux de structures :
entre 1960 et 1974, la France construit 2 600 kilomètres d’autoroutes. Dans le même
temps, l’électrification des chemins de fer est achevée et l’aéroport de Roissy accueille
ses premiers passagers en 1974.

b- Un É tat aménageur et acteur culturel

Pour contrôler l’aménagement du territoire, l’Etat crée la DATAR (Délégation à


l’aménagement du territoire et à l’action régionale) en 1963. Elle met en œuvre une
politique de « villes nouvelles » (Cergy-Pontoise, Sénart, É vry, Marne-la-Vallée) visant à
contrô ler le développement anarchique de la banlieue de Paris. Il concourt également à
l’aménagement des zones rurales (le remembrement en Bretagne, par exemple) et à la
création de zones de tourisme de masse (le littoral languedocien notamment). L’É tat
encourage la création artistique. Dès 1961, André Malraux crée des Maisons de la
Culture, destinées à faciliter l’accès à la culture de la population. Georges Pompidou
favorise le développement des arts avec notamment la création du Centre Georges
Pompidou.

3. Les grands commis de l’Etat

De Gaulle s’appuie fortement sur les hauts fonctionnaires souvent issus de l’IEP
(Institut d'É tudes Politiques) et de l’ENA. Valéry Giscard d’Estaing ou Jacques Chirac
sont deux exemples de cette génération d’hommes politiques issus de la haute
administration.

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Avec les crises de 1973 et 1979, la France connaît un ralentissement sensible
de sa croissance et un accroissement spectaculaire du chômage. Cette situation
conduit à une érosion relative du pouvoir de l’État en France dans la période
1974-2012.

III-L’EROSION RELATIVE DU POUVOIR DE L’ETAT (1974-2012)

1. La Ve République s’adapte et reste interventionniste.

En 1974, le centriste Valéry Giscard d’Estaing devient le premier président non


gaulliste de la Ve République. Il veut moderniser le « style » de gouvernement et ouvrir le
pouvoir aux femmes, mais sans changer les institutions. En 1981, le socialiste François
Mitterrand est élu : c’est l’alternance. Pourtant, il s’accommode très bien des institutions
qu’il avait dénoncées auparavant. La victoire de la Droite aux législatives de 1986 place
François Mitterrand dans l’obligation de nommer Premier ministre le Gaulliste Jacques
Chirac. Il s’agit de la première cohabitation, cette expérience se renouvelle en 19931995
et 1997-2002.
Malgré les nombreux changements politiques, l’Etat conserve un rô le important
dans les domaines de l’insertion sociale (RMI en 1988, CMU en 1999, RSA en 2007), de
l’égalité juridique entre individus (1983 égalité professionnelle, PACS en 1999, parité en
politique en 2000), dans l’économie (35 heures en 1998-2000).

2. Une remise en cause de l’É tat dans les années 1980

L’intervention de l’Etat est remise en cause par les partisans du libéralisme


économique pour qui l’interventionnisme de l’Etat et l’Etat-providence sont des freins à
l’initiative économique et sont responsables de la crise économique débutée dans les
années 1970 (doc 4 p 305). Les gouvernements successifs adoptent une politique visant
à réduire la place de l’Etat à travers des privatisations massives telles que celle de 1983
et de 1986 pour l’adapter à la mondialisation en baissant la fiscalité, en améliorant la
productivité et en rationnalisant les dépenses publiques afin de rendre le pays plus
attractif.
Le rô le de l’Etat est également remis en question par la mondialisation et l’essor des
firmes transnationales, sur lesquelles il n’a guère de prise. En 1999, le Premier ministre
socialiste Lionel Jospin avoue ainsi son impuissance à des ouvriers licenciés par Michelin
en affirmant que « l’Etat ne peut pas tout ».
De plus, avec le traité de Maastricht (1992), certaines compétences de l’Etat français
se trouvent déléguées à l’Union européenne. On ne peut plus gouverner la France sans
prendre en compte ses engagements européens.
En raison de différents éléments, la place de l’Etat en France est remise en cause
provoquant une réforme de son organisation, en particulier dans le cadre de la
décentralisation.

3-La montée en puissance des régions

L’É tat n’est pas seulement remis en cause pour des raisons financières. Il est aussi
remis en cause par la montée en puissance des régions.

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a. De nombreuses tentatives de décentralisation

Avec l’arrivée des socialistes au pouvoir en 1981, Gaston Defferre fait promulguer
en 1982-1983 des lois de décentralisation qui ont gardé son nom (DOCS 1-2 p. 308) :
- Ces lois transforment les régions en collectivités territoriales à part entière ; - elles
transfèrent le pouvoir des préfets aux conseils régionaux et généraux, élus au suffrage
universel direct.
- En 2003, le principe de la gestion décentralisée de l’État est intégré à la Constitution.
L’É tat délègue une part de plus en plus importante de ses compétences aux régions
(gestion des lycées, des routes, des trains régionaux).

b. La mise en œuvre de la démocratie locale

L’article 1er de la loi de 1982 établit les principes de la démocratie locale :


« Les communes, les départements et les régions s’administrent librement par des
Conseils élus ». Le pouvoir exécutif échappe à l’É tat et est remis aux collectivités
territoriales. Se pose toutefois la double question de la gestion des fonds publics à
l’échelle des régions et des départements et du transfert des fonds qui n'a pas
nécessairement suivi le transfert des compétences.

CONCLUSION

Fondée en 1946, la IVe République fait de l’Etat un acteur essentiel de la vie des
Français malgré une instabilité politique et grâ ce à la stabilité de l’administration. En
1958, la Ve République ne remet pas en cause la place de l’Etat malgré les débuts de la
crise économique, seule l’influence de l’exécutif se renforce. Après 1983, la situation
change tant sur le plan politique qu’administratif provoquant un certain recul de la place
de l’Etat en France.

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