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Audits énergétiques des bâtiments

par Jean-Pierre BRASSELET


Ingénieur des Travaux Publics de l’État
Cofondateur du Bureau d’Études OASIIS (Office d’Audit Énergétique, de Service
Informatique et d’Instrumentation Spécialisée)
Frédéric FRUSTA
DUT Mesures Physiques
Cofondateur du Bureau d’Études OASIIS
et Michel CLERJAUD
Maître ès Sciences, DEA Échanges thermiques
Directeur du Département Thermique-Incendie-Pression à CEP (Contrôle et Prévention)

1. Principe général des audits................................................................... B 2 235 - 2


1.1 Objectifs........................................................................................................ — 2
1.2 Méthodes...................................................................................................... — 2
2. Différents niveaux d’analyse ................................................................ — 3
2.1 Conseil d’orientation énergétique (COE) ................................................... — 3
2.2 Diagnostic thermique (DT).......................................................................... — 4
2.3 Diagnostic énergétique (DE) ....................................................................... — 5
2.4 Audit énergétique instrumenté (AEI) ......................................................... — 5
2.5 Auscultations détaillées .............................................................................. — 6
3. Outils d’analyse énergétique ................................................................ — 7
3.1 Outils du conseil d’orientation énergétique .............................................. — 7
3.2 Outils du diagnostic thermique .................................................................. — 7
3.3 Outils du diagnostic énergétique ............................................................... — 7
3.4 Outils de l’audit énergétique instrumenté et de l’auscultation................ — 7
4. Instrumentation des analyses énergétiques .................................... — 10
4.1 Appareils utilisés en diagnostic classique................................................. — 10
4.2 Appareils utilisés en analyse détaillée (audit instrumenté et
auscultation) — 10
4.3 Méthodes de mesure................................................................................... — 12
4.3.1 Bilan global d’une chaufferie............................................................. — 12
4.3.2 Coefficient de performance d’un groupe frigorifique...................... — 13
5. Exemple : auscultation d’un système de production d’eau
chaude sanitaire ....................................................................................... — 14
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. B 2 235
8 - 1994

onfrontés aux deux chocs pétroliers de 1973 et 1979, la plupart des pays
C développés ont engagé, dès la fin des années 1970, des actions nationales
en faveur des économies d’énergie. Dans les secteurs de l’habitat et du ter-
tiaire, qui représentent près de 40 % des consommations d’énergie, l’effort a
été mené dans deux directions :
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— la construction neuve ;
— les bâtiments existants.
Contrairement au cas des bâtiments neufs, pour lesquels des réglementa-
tions de plus en plus exigeantes sur le plan énergétique ont été promulguées,
très peu de contraintes d’ordre réglementaire sont appliquées aux bâtiments
existants.

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Le souci croissant des gestionnaires de patrimoine en matière de maîtrise de


leurs dépenses de chauffage ou de climatisation a incité l’ingénierie de la ther-
mique (bureaux d’études et ingénieurs-conseils) à mettre au point une panoplie
complète de prestations aptes à répondre à ce type de préoccupations. Cet
effort d’innovation a conduit à l’élaboration de nombreuses méthodes.
Ces méthodes doivent permettre de traiter, de façon proportionnée, les
différents secteurs de l’habitat et du tertiaire concernés, depuis la maison indi-
viduelle jusqu’à l’hôpital en passant par le petit immeuble d’habitation et la pis-
cine municipale ; pour convaincre les différents décideurs, maîtres d’ouvrage
publics ou privés, petits et grands, elles doivent leur apporter, en matière de
maîtrise des charges d’exploitation et d’améliorations du confort, des réponses
précises et crédibles, plus ou moins étayées par des ratios, relevés, mesures,
calculs, simulations, etc. selon leur niveau de complexité.
Précisons cependant que, quelle que soit la méthode, la qualité de la presta-
tion dépend essentiellement des compétences du bureau d’études ou de
l’ingénieur-conseil. Celles-ci relèvent, bien sûr, des techniques du bâtiment et
de la thermique scientifique, mais aussi de l’expérience acquise empiriquement
sur le terrain.
Le lecteur se reportera utilement aux articles Déperditions thermiques et
besoins de chauffage d’un logement [B 2 210] et Comportement thermique
dynamique des bâtiments [B 2 041] dans ce traité.

1. Principe général des audits consommation théorique est obtenue par calculs. Leur complexité
dépend des systèmes étudiés (chauffage, climatisation, éclairage,
etc.) et du niveau de modélisation (statique, dynamique).
Pour le cas simple de la consommation de chauffage d’un bâti-
1.1 Objectifs ment, cette consommation théorique est approchée par une for-
mule de type :
24 G V DJ – A
C = ----------------------------------------
L’audit énergétique a pour but d’analyser les consommations η
énergétiques d’un bâtiment existant, en rapport avec les caracté-
ristiques et l’état du bâtiment lui-même et de tous les équipements avec G (W/m3 · K) coefficient de déperdition thermique
consommant de l’énergie et, cela, sans oublier la finalité de ces volumique moyen du bâtiment,
consommations, à savoir un certain niveau de bien-être en tempé- V (m3) volume chauffé du bâtiment,
rature, humidité relative, qualité de l’air, éclairage, etc.
DJ (K · j) degrés-jours au lieu considéré (tenant
Ces consommations étant souvent jugées excessives et coû- compte du comportement des usagers),
teuses, il convient de déterminer les moyens les plus appropriés
η rendement moyen annuel global de l’instal-
pour y remédier.
lation de chauffage,
En conséquence, que l’audit soit un simple diagnostic thermique
A (Wh) apports gratuits.
ou un audit instrumenté complet, l’objectif est d’établir un docu-
ment permettant à un maître d’ouvrage de choisir des travaux Dans le cas de l’audit énergétique d’un hôpital climatisé, il faut
adaptés : pouvoir :
— à son bâtiment et à ses équipements ; — d’une part, différencier les consommations réelles d’énergie
— à ses objectifs de confort ; poste par poste, ce qui n’est pas toujours évident ;
— à ses possibilités financières. — d’autre part, calculer des consommations théoriques proba-
bles pour chacun des postes : climatisation, éclairage, ascenseurs,
Ce document, étayé par des données techniques et financières
etc. [15].
précises, se doit d’être exhaustif, impartial et indépendant de
toute considération commerciale. Quelle que soit la méthode, la détermination des différents para-
mètres qui interviennent dans les calculs est faite par analyse des
Enfin, le coût de son établissement doit être proportionné à la
éléments relevés (ou enregistrés) sur site, principalement au
dépense énergétique globale annuelle du bâtiment, ainsi qu’aux
niveau :
économies escomptées.
— du bâtiment ;
— des équipements ;
— du comportement des usagers.
1.2 Méthodes ■ Analyse du bâtiment
L’audit est basé sur le relevé in situ de toutes les données néces-
Toutes les méthodes de diagnostic sont basées sur le même saires au calcul : composition, dimensions et état de toutes les
principale général. Ce principe consiste à comparer une consom- parois, de façon à pouvoir déterminer les coefficients de déperdi-
mation réelle d’énergie (factures, relevés de compteurs, etc.) et une tions surfaciques ou linéiques.
évaluation de la consommation théorique d’énergie. Cette

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La connaissance de la composition exacte des parois est souvent 2.1 Conseil d’orientation énergétique
délicate, compte tenu de l’absence fréquente de plans et descrip-
tifs, le carottage étant exclu et les systèmes de mesures (fluxmètre, (COE)
thermographie infrarouge, etc.) insuffisamment précis.
Outre l’aspect quantitatif, il est indispensable de mettre en Le conseil d’orientation énergétique est un prédiagnostic réalisé
exergue les relations entre l’état général du bâtiment (état des en amont des autres études techniques et qui a pour but d’évaluer
parois, état et étanchéité des ouvrants, humidité, etc.) et le confort le gisement d’économies d’énergie pour un bâtiment ou
thermique. l’ensemble d’un patrimoine (une commune par exemple).
L’analyse du bâti doit également permettre d’apprécier le taux de
■ Les objectifs assignés au conseil d’orientation énergétique sont
renouvellement d’air du bâtiment, paramètre qui pose beaucoup de
les suivants :
difficultés compte tenu des nombreux paramètres qui interfèrent et
de méthodes de mesure quasi inexistantes, de façon pratique. — identifier les enjeux en termes énergétiques et économiques ;
— choisir le ou les bâtiments, dans le cas d’un patrimoine, sur
■ Analyse des équipements lesquels un effort prioritaire doit être porté ;
L’analyse de tous les équipements concourant à la — déterminer le type d’étude complémentaire à mener
consommation énergétique du bâtiment doit permettre, pour (diagnostic, audit, étude de faisabilité, négociation de contrat, etc.) ;
chacun d’eux, d’obtenir des rendements moyens annuels d’utilisa- — planifier une action de maîtrise de l’énergie.
tion. Cela concerne donc principalement : L’essentiel de la démarche consiste à calculer un ensemble de
— les installations de production / distribution / émission de ratios de consommation d’énergie caractérisant le bâtiment ou le
chaud ou de froid ; patrimoine, puis à les comparer à une base de données soigneu-
— les installations de production / distribution d’eau chaude sement établie.
sanitaire ; Voici quelques exemples de ratios significatifs :
— les installations de ventilation mécanique ;
— consommation d’énergie exprimée en francs par occupant,
— les installations d’éclairage ;
par logement ou encore par m3 de volumes chauffés ;
— les ascenseurs et équipements de transport mécanique ;
— consommation en tep (corrigée degrés-jours DJU), par m2 ou
— etc.
par m3, ou par logement ;
L’analyse des équipements doit être accompagnée par un certain — consommation d’eau par utilisateur ;
nombre de mesures, relevés et enregistrements, permettant — consommation d’électricité par m2 de surface de plancher.
d’apprécier les réglages, les points de consignes, le fonctionnement
Le choix de ces ratios doit être réalisé judicieusement. Il dépend
et les performances des équipements. Ces éléments ne pouvant pas
fortement de la destination du bâtiment ou du patrimoine étudié.
toujours être obtenus dans les conditions idéales, il est
indispensable de pouvoir les recouper par des informations ■ La base de données de référence doit avoir été établie à partir de
recueillies directement auprès des utilisateurs et usagers. nombreuses observations et chaque classe de bâtiment ou typolo-
gie d’usage doit être représentée par un nombre suffisamment
■ Analyse du comportement des usagers
important de cas. Une classe de bâtiment est le résultat du croise-
L’audit de tout bâtiment nécessite une collecte directe d’informa- ment de plusieurs caractéristiques :
tions auprès des utilisateurs et des usagers. Ces informations — sa destination (hôpital, enseignement, bureaux, etc.) ;
concernent : l’affectation et les durées d’occupation des locaux, les — sa date de construction ;
périodes de mises en service des équipements, les points de — sa taille ;
consignes des régulateurs, etc. Toutes les remarques ou critiques — etc.
doivent être prises en compte ; elles ne manquent pas en général.
La comparaison entre les ratios particuliers et la référence donne
L’auditeur doit, bien évidemment, faire preuve de clairvoyance et un aperçu global du bâtiment du point de vue énergétique et le
d’objectivité, pour forger son opinion par comparaison avec ses situe par rapport à la moyenne de sa classe. L’écart relatif entre le
propres relevés, mesures et analyses. ratio calculé et la référence permet d’estimer l’enjeu énergétique.
■ La réalisation d’un conseil d’orientation énergétique se déroule
en trois étapes :
2. Différents niveaux — tout d’abord, une phase d’entretiens (interviews) avec les
échelons de décisions principaux du maître d’ouvrage (exemple :
d’analyse un élu, un responsable de service technique, un gestionnaire), afin
d’évaluer leurs motivations et de recueillir les informations néces-
Plusieurs types d’analyse peuvent être menés, selon que le maître saires à l’analyse et à l’établissement des ratios (contrats et factu-
d’ouvrage souhaite obtenir un bilan global sur un patrimoine ou res de fourniture d’énergie, relevés de consommations d’énergie et
qu’il désire résoudre un problème ponctuel sur une installation. d’eau, description des bâtiments et des installations, mode
L’importance de l’enjeu en termes d’économie d’énergie et la des- d’exploitation des installations, travaux déjà réalisés, existence
tination du bâtiment sont également des facteurs prépondérants d’un suivi de gestion de l’énergie, formation du personnel,
dans la détermination du niveau d’analyse à mettre en œuvre. pratiques du maître d’ouvrage en matière de financement, etc.) ;
— puis, une phase d’exploitation des informations recueillies ;
Cinq grandes classes de prestations peuvent être distinguées : — enfin, une phase de rédaction du rapport (état des lieux éner-
— le conseil d’orientation énergétique (COE), appliqué à un gétique du bâtiment ou du patrimoine) et de présentation des
patrimoine important ou à un bâtiment complexe ; conclusions sous forme de plan hiérarchisé regroupant l’ensemble
— le diagnostic thermique (DT), destiné aux bâtiments d’habita- des actions pouvant être engagées :
tion ou tertiaires uniquement chauffés ; • présélection du ou des bâtiments pour un diagnostic, au audit
— le diagnostic énergétique (DE), semblable au diagnostic ther- énergétique, une étude de faisabilité, un suivi, etc. ;
mique mais s’appliquant aux systèmes complexes ; • mise en place d’une gestion de l’énergie adaptée aux besoins ;
— l’audit énergétique instrumenté (AEI), orienté vers les bâti- • opportunité de la création d’une fonction homme-énergie ;
ments tertiaires complexes généralement climatisés ou rafraîchis, • renégociations de contrat de fourniture d’énergie ou d’exploi-
au moins pour partie ; tation.
— l’auscultation, dédiée aux installations ou éléments d’enve-
loppe.

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2.2 Diagnostic thermique (DT) trentenaire au cours d’une décade (10 jours). Une saison est définie
par une durée de chauffage, DCH, exprimée en jours. La méthode
est prévue pour des durées de chauffage pouvant atteindre 300
La définition du diagnostic thermique a été donnée en 1983 par jours (soit 30 décades), c’est-à-dire du 1er septembre au 30 juin.
l’Agence française pour la maîtrise de l’énergie (aujourd’hui Un bilan énergétique en régime permanent (méthode statique)
Ademe) et son contenu a été fixé par un document intitulé Cadre est établi grâce à l’identification de tous les postes de consom-
du diagnostic [1]. mations ou de pertes d’énergie.
Le diagnostic thermique d’un bâtiment et de ses équipements Le bâtiment diagnostiqué est décomposé en volumes (ou zones)
techniques consommant de l’énergie est une analyse qui vise à regroupant des locaux thermiquement homogènes (même
établir un bilan énergétique complet et à évaluer les économies consigne de température intérieure, usages identiques, structures
d’énergie (donc financières) générées par des améliorations sur le voisines, etc.).
bâti et les installations. Les principaux équipements concernés par En utilisant le formalisme retenu dans le guide du diagnostic
ce type d’étude sont le système de chauffage, la production d’eau thermique publié par l’AFME [1], aujourd’hui l’Ademe, le bilan
chaude sanitaire et, selon la destination du bâtiment, certains énergétique du bâtiment s’établit comme suit :
usages spécifiques de l’électricité (éclairage, bureautique, cuisine,
etc.). COPRIMCHA + COPRIMEC = COPRIM
avec COPRIMCHA consommation d’énergie primaire pour le
Pour mémoire, quelques années après la publication du chauffage (en kWh/an),
Cadre de diagnostic, la notion plus large de diagnostic de COPRIMEC consommation d’énergie primaire pour la
charge (DC) a été développée par l’Agence Nationale pour production d’eau chaude sanitaire
l’Amélioration de l’Habitat (ANAH) dans le secteur du loge- (en kWh/an),
ment et par l’association Apogée dans le secteur du tertiaire. COPRIM consommation d’énergie primaire totale
En plus des dépenses de chauffage, le DC analyse l’ensemble (en kWh/an).
des coûts de fonctionnement et d’entretien d’un patrimoine
immobilier (exemple : ascenseurs, gardiennage, nettoyage, ● COPRIMCHA + (TERCHA + PERCHA) x COPCHA
eau froide, etc.) et propose des mesures de gestion et des
• Les besoins terminaux de chauffage, TERCHA, se déterminent
améliorations générant des économies financières.
comme suit :
TERCHA = BB – AUT (en kWh/an)
Nous nous limiterons ici à l’exposé des techniques du diagnostic
thermique puisque ce sont généralement les consommations avec BB besoins bruts : BB = U · HK (en kWh/an)
d’énergie qui représentent la part prépondérante des charges U (W/K) est le coefficient de déperdition (à
totales. C’est aussi dans ce domaine que les méthodes de calcul comparer pour mémoire au GV des méthodes
présentent le plus d’intérêt. L’analyse des autres charges est plus traditionnelles) : U = ΣKA + ΣkL + 0,34 Σq
menée généralement par établissement de ratios (en francs par K et k sont respectivement les coefficients de
logement, par unité de surface, etc.) et par comparaison à un réfé- déperditions surfaciques (W/m2 · K) et linéiques
rentiel judicieusement établi. (W/m · K) et A et L les surfaces des parois (m2)
Un diagnostic thermique comporte les trois phases suivantes : et les longueurs de ponts thermiques (m),
Σ q (m3/h) la somme des débits de renouvelle-
— description et examen du bâtiment et des installations ;
ment d’air (ventilation et infiltration) ;
— exploitation et traitement des données :
HK (kKh/an) est la caractéristique du climat et
• établissement du bilan, des conditions de fonctionnement : comporte-
• améliorations ; ment des occupants, ralentis de chauffage, régu-
— synthèse. lation. Ce coefficient constitue le pivot de la
■ La première phase (description et examen) est destinée à réunir méthode et représente l’innovation essentielle
l’ensemble des paramètres nécessaires à l’établissement d’un bilan par rapport aux méthodes dites classiques. La
énergétique fiable. Un examen approfondi du bâtiment et de ses plupart des travaux de recherche ont été publiés
installations permet d’obtenir ces paramètres par le relevé (par dans la revue Promoclim,
exemple, dimensions, aspects, compositions, schémas, etc.), le AUT apports gratuits, ou plutôt la fraction utile des
calcul (par exemple, résistance des parois), la mesure (par exemple, apports gratuits, tient compte des apports par
rendement de combustion d’un générateur) ou par estimation (par les occupants, l’éclairage, l’ensoleillement. La
exemple, volume moyen d’eau chaude sanitaire consommé par valeur de AUT dépend de l’importance relative
jour). Au cours de cette phase, il est indispensable de recueillir des apports gratuits totaux AG par rapport aux
toutes les informations concernant le mode d’utilisation des locaux besoins bruts BB définis plus haut. Plus ce rap-
(températures, heures de fonctionnement), la nature et la quantité port est grand, plus la fraction d’apports gratuits
d’énergie utilisée (factures), la gestion et l’exploitation des installa- récupérée dans le bilan est faible.
tions. • Les pertes de distribution du système de chauffage, PERCHA,
(kWh/an), permettent de calculer le bilan énergétique à la sortie de
■ La deuxième phase (exploitation et traitement des données) se la chaufferie, et ce d’une façon plus précise qu’en employant la
décompose en deux parties : notion de rendement de distribution ;
— la reconstitution du bilan énergétique du bâtiment ; • COPCHA, coefficient sans dimension, caractérise le système de
— la détermination de toutes les améliorations techniquement production de chauffage. C’est, en réalité, l’inverse d’un rende-
réalisables. ment.
Nous présentons ici, en résumé, la méthode qui nous paraît la ● COPRIMEC = (TEREC + PEREC ) × COPEC
plus fiable. Elle a été mise au point par R. Cadiergues et a fait
l’objet de nombreuses publications dans la revue Promoclim [1], • Les besoins terminaux d’eau chaude sanitaire, TEREC, sont
[2], [3], [4], [5], [6]. C’est une méthode décadaire, c’est-à-dire que déterminés par comptage d’eau chaude sanitaire lorsqu’il existe
les conditions extérieures (la température essentiellement) sont ou, à défaut, en faisant appel à des données statistiques ;
considérées comme constantes et égales à une valeur moyenne

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• PEREC (kWh/an) permet de tenir compte des pertes de distri- — les apports de chaleurs sensibles et latentes par le public ;
bution de l’eau chaude sanitaire (par exemple : boucles) ; — les apports par l’éclairage ;
• COPEC, coefficient sans dimension, caractérise le système de — les apports solaires.
production d’eau chaude sanitaire. La méthode du diagnostic énergétique et l’outil informatique
• Un premier bilan théorique est ainsi établi pour l’ensemble du associé doivent permettre de modéliser le fonctionnement du
bâtiment et est comparé aux consommations réelles corrigées des centre commercial, de façon à calculer les consommations
données climatiques. Tant que le bilan théorique n’est pas suffi- énergétiques par zone et par catégorie d’équipement, à savoir :
samment proche des consommations constatées (factures), il est
nécessaire de vérifier l’ensemble des hypothèses et de recalculer — équipements de traitement de l’air : chauffage, ventilation,
les consommations théoriques (calage). climatisation ;
— installations frigorifiques : chambres froides, meubles ou
Cette procédure itérative est un outil puissant d’analyse. Elle vitrines froides pour surgelés ;
pousse, en effet, le diagnostiqueur à vérifier et préciser les para- — installations d’éclairage ;
mètres influants. — installations techniques diverses : fours de boulangeries,
La notion de diagnostic thermique instrumenté (DTI) est laboratoires et ateliers, cafétéria, etc.
d’ailleurs issue de la difficulté d’évaluer certains paramètres et leur Cet exemple montre que, si l’articulation générale du diagnostic
évolution dans le temps. énergétique reste similaire à celle du diagnostic thermique, la
Nous présentons au paragraphe 3 quelques exemples d’instru- complexité des installations nécessite d’utiliser des méthodes de
mentation. simulation plus élaborées que la méthode statique du bilan global
Lorsque le bilan énergétique a été établi et vérifié, le diagnos- du diagnostic thermique.
tiqueur est en possession d’un modèle prédictif du bâtiment étu- Souvent, la complexité du système à diagnostiquer est telle que
dié. le diagnostiqueur est conduit inévitablement à renforcer l’utilisa-
L’exploration de l’ensemble des améliorations techniquement tion des instruments de mesure et d’enregistrement ; on passe
réalisables peut commencer. On peut classer ces améliorations en alors du diagnostic énergétique à l’audit énergétique instrumenté.
deux familles :
— les améliorations sur le bâti ;
— les améliorations sur les installations. 2.4 Audit énergétique instrumenté (AEI)
Pour chaque amélioration, le diagnostic thermique présente une
fiche détaillée qui comprend :
Plus les enjeux énergétiques et financiers deviennent impor-
— la description de la modification au niveau APS (avant-projet
tants, plus les moyens en appareils divers de mesure et d’enregis-
sommaire) ;
trement, associés à des modèles de simulation complexes et à des
— l’économie d’énergie (kWh/an ou tep/an) ;
outils informatiques puissants, deviennent indispensables pour
— l’économie financière (F) ;
traiter correctement les problèmes. En effet, la complexité des bâti-
— le coût de l’amélioration (F) ;
ments et des installations, et la prépondérance des facteurs inertie
— le temps de retour brut (an).
et temps (forte intermittence), justifient l’emploi de méthodes de
■ Dans la troisième phase du diagnostic thermique, la synthèse, le simulation dynamique du comportement thermique du bâti et des
diagnostiqueur propose plusieurs regroupements cohérents d’amé- systèmes.
liorations que l’on nomme couramment des programmes de tra- L’articulation générale de l’audit reste cependant identique à
vaux. Ces derniers sont décrits et l’économie d’énergie globale est celle du diagnostic énergétique, mais la phase de description et
recalculée, ainsi que le temps de retour brut. d’examen du bâtiment et des équipements est généralement plus
Selon le type de maître d’ouvrage, le diagnostiqueur joint égale- importante ; de plus, le recours à la mesure et à l’enregistrement
ment à son rapport un descriptif succinct des aides financières dis- de différents paramètres devient indispensable.
ponibles, ainsi que les différentes techniques de financement qui On distingue en général deux étapes :
lui sont applicables.
— une première visite du bâtiment et des installations afin de
relever les caractéristiques dimensionnelles et thermiques, de
rechercher les éléments techniques disponibles (descriptifs, plans,
2.3 Diagnostic énergétique (DE) schémas, études déjà réalisées, factures, etc.) et de repérer les
lieux pour adapter la campagne de mesures aux conditions parti-
culières du site ;
L’objectif du diagnostic énergétique est strictement le même que — la préparation de la campagne de mesures (choix des cap-
celui du diagnostic thermique, mais il porte sur des bâtiments et teurs et de leur implantation) et son installation.
installations plus complexes, où la seule prise en compte des La durée d’une telle campagne est fixée en fonction du type de
consommations relatives au chauffage et à la production d’eau bâtiment et de ses installations. Pour des raisons de coût, mais
chaude sanitaire ne suffit plus ou nécessite des moyens d’analyse aussi de rapidité dans la remise des conclusions, elle ne peut en
et de calcul plus élaborés. Il concerne donc plus spécifiquement pratique excéder deux semaines. Fort heureusement, cette durée
des bâtiments du secteur tertiaire tels hôtels, hôpitaux, centres est généralement suffisante pour permettre d’identifier le compor-
administratifs, centres commerciaux, etc. tement thermique du bâti et des équipements.
Si l’on prend l’exemple d’un centre commercial type hypermar- Les matériels qui peuvent être mis en œuvre et leurs fonctions
ché, la réalisation du bilan énergétique nécessite de prendre en les plus courantes sont décrits au paragraphe 4.2.
compte : La figure 1 présente, à titre d’exemple, une amélioration particu-
— les déperditions des parois par rapport à l’extérieur ; lière proposée au cours de l’audit énergétique instrumenté d’un
— les déperditions par renouvellement d’air (ventilation + infil- hôtel situé dans le Pacifique. Le tableau 1 récapitule l’ensemble
tration + ouvertures des portes) ; des améliorations proposées au cours de ce même audit.
— les apports de froid par les équipements frigorifiques alimen-
(0)
taires à l’intérieur de la surface du centre ;

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Figure 1 – Amélioration particulière proposée au cours d’un audit énergétique d’un hôtel situé dans le Pacifique

Tableau 1 – Récapitulatif des interventions sur l’hôtel situé dans le Pacifique (étude faite en 1991)
Consommation Temps
Coût de
initiale annuelle de retour
Nature de l’intervention Économie (1) (2) l’intervention
d’électricité (2) brut (2)
(en %) (en F) (en années)
9 300 kWh
Mise en place d’une toiture 1,2 % 310 000 /
11 000 F
Réaménagement du rez-de-chaussée 3 925 kWh
et de l’entresol 0,5 % 71 000 /
4 600 F
69 900 kWh
Récupération de chaleur pour l’eau chaude sanitaire 9,2 % 54 000 0,7
73 000 F
12 500 kWh
Remise en état du réseau d’eau glacée 1,6 % 85 000 5,7
15 000 F
Traitement de l’air neuf et remise en état des réseaux d’air / / 435 000 /
et de leur programmation
42 800 kWh
Amélioration de la production de froid (groupes Trane) 5,7 % 49 000 1,1
45 000 F
130 000 kWh
Isolation des ballons d’eau chaude sanitaire 17,2 % 82 000 0,6
136 000 F
85 000 kWh
Stockage de froid 11,2 % 1 200 000 12,8
87 000 F
Télésurveillance / / 270 000 /
(1) Les kWh indiqués sont des kWh électriques.
(2) Les barres (/) signifient que le temps de retour est très élevé ou qu’il n’y a pas d’économies d’énergie à réaliser mais que des travaux seraient nécessaires ou
souhaitables.

2.5 Auscultations détaillées ment dynamique réel du système faisant l’objet de l’étude. L’opti-
misation des points de mesure n’est donc pas de rigueur dans ce
cas. Les conclusions de l’auscultation devant être sans faille, une
L’auscultation est une démarche spécifique dont l’objectif est redondance partielle des paramètres mesurés doit être mise en
essentiellement d’identifier une pathologie ou de lever un doute œuvre afin de permettre un contrôle de la cohérence des résultats.
sur un système, un sous-système, voire un élément d’enveloppe Ce type d’investigation peut s’inscrire en complément des étu-
ou un comportement. des précédentes lorsqu’elles font apparaître un certain nombre
Le principe est simple : il s’agit de se donner tous les moyens de d’incohérences (impossibilité de caler les bilans de consom-
mesure nécessaires afin de cerner sans restriction le fonctionne- mations réelles et théoriques, écart démesuré entre les ratios de

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consommations calculés sur un bâtiment et ceux correspondant à La plupart des outils prennent donc en compte pour le calcul des
la moyenne de sa classe d’appartenance, paramètres mesurés au consommations :
cours d’une campagne et incompatibles avec une logique de fonc- — les déperditions thermiques des bâtiments avec ponts
tionnement, etc.), ou de façon spontanée sur des observations fla- thermiques parfois calculés, parfois forfaitisés, parfois non pris en
grantes de dysfonctionnements (niveaux de consigne non atteints, compte ; les taux de ventilation sont forfaitisés dans la quasi-majo-
puissance insuffisante, etc.). rité des cas ;
Les différents cas pouvant faire l’objet d’une auscultation sont de — les apports gratuits, par calcul ou plus généralement par
natures très diverses. La méthode appropriée à chacun d’entre eux introduction directe d’une température de non-chauffage dont
est sélectionnée parmi l’ensemble des techniques pouvant être l’appréciation est souvent arbitraire ;
mises en œuvre in situ. Quelques exemples sont exposés au — inertie ;
paragraphe 4.2. La durée de la campagne de mesures peut s’éten- — l’intermittence des régimes d’utilisation (ralentis de nuit et de
dre de quelques heures à quelques jours selon l’importance et la week-end) ;
nature du problème, en restant généralement inférieure à une — les équipements, par l’intermédiaire des rendements de
semaine. Pour les systèmes complexes, la campagne peut éven- combustion, de production, de distribution, d’émission et de régu-
tuellement être réalisée en deux ou trois phases consécutives, le lation.
contenu d’une phase étant dicté par les résultats de la phase pré- Des démarches variables selon les outils permettent la
cédente. comparaison entre les consommations théoriques calculées et les
consommations relevées par année, après pondération selon les
degrés-jours.
L’introduction des données économiques (coût des investisse-
3. Outils d’analyse ments pour les améliorations projetées, coût moyen de l’énergie,
énergétique etc.) permet l’édition d’un tableau de synthèse classant les amélio-
rations en fonction de leur temps de retour brut (tableau 1). La plu-
part des logiciels permettent enfin de cumuler entre elles plusieurs
3.1 Outils du conseil améliorations élémentaires.
d’orientation énergétique Le catalogue des outils de conception thermique des
bâtiments [14], réalisé par l’atelier d’évaluation H2E85, a recensé
et évalué la plupart des outils de diagnostic thermique. Cepen-
Ces outils sont essentiellement des bases de données de réfé-
dant, cette publication date un peu. De nouveaux outils sont
rence par rapport auxquelles les ratios sont comparés.
aujourd’hui disponibles et n’y figurent pas. D’autres y figurent
La qualité des outils est fonction : mais ne sont pas distribués.
— du nombre d’observations introduites dans le système ;
— du nombre de typologie d’usage ou de type de bâtiment en
fonction desquels les observations sont classées.
Ces outils sont généralement accessibles :
3.3 Outils du diagnostic énergétique
— soit directement sur Minitel ; ils constituent alors des outils
d’autoévaluation ; La différence entre les outils du diagnostic thermique et ceux du
— soit indirectement, après remplissage d’un bordereau et trai- diagnostic énergétique réside :
tement par l’organisme gérant l’outil ; — d’une part, dans la prise en compte pour les seconds de
— soit auprès d’organismes publics ayant publiés les résultats l’ensemble des consommations énergétiques d’un bâtiment ou
d’enquêtes ou de travaux de recherche (Ademe, AICVF). d’un établissement ;
— d’autre part, dans l’utilisation d’une méthode de simulation
plus fine, généralement dynamique, du comportement thermique
3.2 Outils du diagnostic thermique du bâti et des systèmes.
Les outils du diagnostic énergétique sont quasiment les mêmes
■ Principe que ceux de l’audit énergétique instrumenté.
Compte tenu du cadre général de diagnostic proposé par les
pouvoirs publics, et particulièrement par l’Ademe, la plupart des
logiciels de diagnostic thermique disponibles présentent un certain
caractère d’uniformité.
3.4 Outils de l’audit énergétique
On peut cependant dissocier :
instrumenté et de l’auscultation
— les outils légers permettant, grâce à une saisie allégée et à
l’usage de ratios de consommation de référence, d’identifier des La phase d’exploitation et de traitement des données commence
types d’amélioration et d’orienter les maîtres d’ouvrage dans leur par une étape de modélisation du bâtiment. Celle-ci fait très
choix ; ces outils s’apparentent à ceux utilisés en conseil d’orienta- largement appel aux méthodes de simulation du comportement
tion énergétique ; thermique dynamique du bâtiment (article Comportement ther-
— les outils détaillés, plus précis et plus exigeants, ayant mique dynamique des bâtiments [B 2 041] dans ce traité).
recours à des données si possible mesurées et destinées à des étu-
des thermiques assez fines. ■ Données nécessaires
■ Fonction Le bâtiment est décomposé en zones thermiquement
homogènes. Les parois composant chaque zone sont décrites
De façon générale, les outils informatiques contribuent à la réa- selon leur position et leur nature, définissant ainsi la géométrie et
lisation des phases 2 et 3 (§ 2.2), à savoir l’exploitation des don- les caractéristiques thermiques du bâtiment :
nées et leur synthèse. Ces logiciels permettent le calcul des
— parois opaques : épaisseurs, conductivités, capacités ther-
consommations thermiques des bâtiments et des performances à
miques, masses volumiques des matériaux constitutifs, facteurs
attendre des diverses améliorations envisageables, tant sur le plan
d’absorption intérieur et extérieur, coefficients d’échange ther-
énergétique que financier.
mique superficiels intérieur et extérieur, surfaces, couplages éven-

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tuels avec d’autres zones (échange d’air) et conditions aux limites Le travail de modélisation étant réalisé, il est nécessaire de véri-
(extérieur, autre zone, zone elle-même) ; fier que le résultat des simulations est conforme à la réalité avant
— parois transparentes : conductances globales, coefficients de passer à la phase d’extrapolation.
d’échange thermique superficiels intérieur et extérieur, facteurs de C’est pourquoi plusieurs calages de nature différente sont
transmission, d’absorption et de réflexion, surfaces et orientations. réalisés :
Il est nécessaire ensuite de décrire les apports internes dus aux — calage fin du modèle : afin de vérifier que le comportement
occupants, à l’éclairage et aux divers appareils utilisés (bureautique, dynamique du bâti sollicité par les charges internes et externes est
équipements de cuisine, etc.). Pour chaque type d’apport et pour bien reproduit par le modèle informatique, les courbes d’évolution
chaque zone, les parts convective et radiative doivent être précisées, de température, calculées et mesurées au pas de temps horaire,
ainsi que les apports d’humidité. Le profil de ces apports doit éga- sont comparées et ce, pour une ou plusieurs zones en évolution
lement être indiqué (temps d’occupation, programmes hebdoma- libre. Cette vérification est faite sur la durée de la campagne de
daires, etc.). mesures (figure 2). Les paramètres du modèle sont ajustés grâce à
Les taux d’infiltration et de ventilation pour chaque zone, les l’analyse de ces courbes et des interprétations qui en découlent.
puissances de chauffage ou de climatisation disponibles et les Cette procédure est répétée jusqu’à l’obtention de valeurs calcu-
niveaux de consigne de température et d’humidité achèvent la lées suffisamment proches de la réalité.
description de l’ensemble des paramètres nécessaires à la simula- — Une comparaison identique peut être réalisée sur l’humidité
tion. relative lorsque ce paramètre est contrôlé ;
— calage par bilan sur la campagne de mesures : pour
Les conditions météorologiques retenues pour réaliser la simu-
compléter la validation du modèle, un premier calcul de
lation sont celles que l’on peut généralement obtenir auprès de la
consommation d’énergie pour l’ensemble du bâtiment est réalisé
station météorologique la plus proche pour une année de réfé-
et comparé aux comptages que l’on aura pris soin de mettre en
rence judicieusement choisie (la plupart du temps il s’agit de la
place au cours de la campagne de mesures (figure 3). Une nou-
dernière année complète pour laquelle des factures d’énergie sont
velle procédure itérative est alors engagée afin d’approcher, par le
disponibles). Les données météorologiques disponibles sont les
calcul, les consommations d’énergie constatées sur la période. Les
suivantes (article Données climatiques utilisées dans le bâtiment
paramètres qui permettent cet ajustement sont généralement ceux
[B 2 015]) :
décrivant les performances des installations de chauffage ou de cli-
— données trihoraires (8 valeurs par jour) : température sèche, matisation (rendement, efficacité, pertes, régulations, etc.) ;.
humidité relative, vitesse et direction du vent, pression atmosphé- — calage annuel : le modèle ainsi reconstitué est testé sur une
rique et nébulosité ; année entière et les consommations d’énergie annuelles calculées
— données horaires : rayonnement global, parfois rayonne- sont comparées cette fois aux consommations d’énergie facturées
ments diffus et direct et durée d’ensoleillement. au cours de l’année de référence (figure 3). Les ajustements sont
■ Caractéristiques particulières des outils de simulation alors généralement réalisés par l’étude des variations saisonnières
dans le domaine de l’audit de certains paramètres (taux de charge, efficacité d’échangeurs,
etc.). Ces trois niveaux de calage ayant été réalisés, le modèle infor-
Les outils de simulation doivent permettre : matique constitue une bonne représentation du comportement
— d’une part, d’entrer les données relevées sur le site ; énergétique réel du bâtiment et de ses installations. Il est alors pos-
— d’autre part, de proposer des valeurs par défaut pour les sible de proposer des améliorations et d’utiliser le modèle pour pré-
paramètres non relevés oui impossibles à relever. voir les économies d’énergie potentielles ou l’effet sur le confort des
L’ergonomie des entrées des logiciels est un élément très impor- occupants.
tant (digitalisation des plans, interface conviviale, etc.) afin de limi-
■ Extension à l’optimisation des bâtiments neufs à usage tertiaire
ter les risques d’erreurs de saisie ou d’interprétation et de réduire
les temps de saisie. Contrairement au secteur du logement, où la réglementation a
codifié les méthodes de calcul de consommations de chauffage de
■ Méthodes d’exploitation référence, le secteur tertiaire fait figure de parent pauvre. La régle-
Afin de vérifier que ces données sont représentatives de la situa- mentation thermique y est, pour l’instant, assez faible et les tech-
tion du bâtiment étudié, une station météorologique portable est niques de conception utilisées par la plupart des bureaux d’études
installée dans son voisinage direct. Les mesures ainsi réalisées en matière de chauffage et de climatisation ne sont pas à la hau-
sont ensuite comparées aux données fournies par la Météorologie teur des enjeux énergétiques et des exigences de confort des utili-
Nationale pour la même période. sateurs.

Figure 2 – Calage fin du modèle de l’hôtel du


Pacifique : résultat après calage

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Les progrès réalisés grâce à ces outils sont de trois ordres :


— calcul des besoins de chauffage heure par heure et dimension-
nement optimisé par la simulation dynamique du comportement du
bâtiment ;
— analyse en évolution libre pour la période d’été et/ou calcul
des besoins de climatisation heure par heure ;
— détermination des consommations d’énergie prévisionnelles
et donc analyse en coût global de solutions techniques différentes.
Cette méthode permet d’intégrer à la conception d’un bâtiment
les préoccupations de confort et de charges de fonctionnement.
L’optimisation énergétique est une prestation complémentaire
aux missions d’ingénierie classiques, menée en concertation avec
l’équipe de concepteurs désignée par le maître d’ouvrage. Elle doit
intervenir le plus en amont possible (dès l’esquisse) et accompa-
gner le processus de conception jusqu’à son terme. Au fur et à
mesure de l’augmentation du degré de précision du projet, cette
prestation fournit les éléments suivants :
— évaluation de la performance énergétique de la forme retenue
par l’architecte dans son environnement urbain (esquisse) et déter-
mination des niveaux de confort prévisibles. Les caractéristiques
de l’enveloppe (du bâti) encore indéterminées à ce stade sont choi-
sies parmi un ensemble de valeurs par défaut ;
— modifications successives des hypothèses précédentes au fur
et à mesure de l’avancée du projet et de concertations avec l’équipe
de concepteurs (avant-projet sommaire), premières évaluations de
consommations prévisionnelles dans le but de comparer en coût
global les différentes options envisagées en matière de systèmes
de chauffage et de climatisation ;
— évaluation finale de la consommation d’énergie annuelle pré-
visionnelle sur la base de l’avant-projet définitif.
Cette nouvelle démarche permet de fournir à l’architecte un
ensemble d’informations rassemblées sous le terme générique
d’évaluateurs énergétiques de projet.
Figure 3 – Calage par bilan des consommations d’un bâtiment Les méthodes de simulation dynamique sur lesquelles elle
d’habitation sur la durée d’une campagne de mesures s’appuie permettent d’éliminer les trop nombreuses approxima-
et calage annuel tions qui rendent les projets parfois médiocres :
— le comportement hygrothermique du bâtiment et de ses sys-
tèmes est reconstitué à partir des lois régissant les transferts ther-
Quelle que soit la destination de l’ouvrage (hôpital, bureaux, miques. L’ensemble des équations correspondantes sont résolues
administration, etc.), les quelques semaines au cours desquelles au pas de temps horaire (ou moins pour les systèmes) et ce, pour
maître d’ouvrage, architecte et bureaux d’études vont le concevoir des journées météorologiques types ou pour une période
constituent la clef de voûte de la réussite du projet. quelconque (quelques jours ou un an) ;
Le maître d’ouvrage a la responsabilité de définir un programme, — les apports internes sont pris en compte au moyen de scéna-
c’est-à-dire l’ensemble des exigences auxquelles l’ouvrage doit rios journaliers et hebdomadaires, les apports externes (essentiel-
répondre, tandis que l’architecte fait naître un projet ex nihilo et que lement solaires) sont évalués de façon précise (orientations exactes
les bureaux d’études en évaluent la faisabilité tout en produisant les des parois et fenêtres, calcul des masques proches et lointains,
documents techniques nécessaires à la réalisation. Ces différentes ombres portées du bâtiment sur lui-même, prise en compte de
phases prennent une place plus ou moins grande suivant le projet l’environnement) ;
(une supérette ou la Grande Arche). Trop souvent, le choix des — les conditions climatiques sont représentées par des fichiers
maîtres d’ouvrage en matière de systèmes et d’énergies repose sur horaires de données météorologiques (température, humidité,
des opportunités ou des pressions commerciales diverses plutôt ensoleillement, vent) pour de longues périodes (annuelles ou
que sur une réflexion et une analyse à long terme (puisqu’un bâti- plus) ;
ment doit vivre de nombreuses dizaines d’années). — la détermination des charges se fait par l’analyse de courbes
d’évolution de températures ou de puissances nécessaires zone par
Dans la cas de projet de bâtiment important (centre hospitalier, zone et par l’exploitation de graphes de fréquences cumulées afin
palais des congrès, centre administratif, etc.), il peut être judicieux d’évaluer l’inconfort éventuel d’un léger sous-dimensionnement,
de mener une investigation approfondie. Une prestation nouvelle etc.
est en train d’apparaître : l’optimisation énergétique assistée par
ordinateur. Pour illustrer la méthode, la figure 4 présente le bilan prévi-
sionnel annuel des besoins de chauffage et de climatisation d’un
Des outils informatiques permettant de mettre en œuvre des hall d’exposition fortement vitré, avec une représentation en trois
méthodes de conception énergétique plus performantes existent dimensions de l’ensemble.
en effet. Ils sont encore peu connus et pratiquement pas utilisés en
France, contrairement à ce qui se passe chez nos voisins d’outre-
Atlantique. Ils s’appuient sur les techniques de modélisation du
bâtiment et des systèmes thermiques identiques à celles que nous
avons présentées au paragraphe 2.4.

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Figure 4 – Besoins de chauffage et de climatisation d’un hall d’exposition fortement vitré

4. Instrumentation 4.1 Appareils utilisés


en diagnostic classique
des analyses énergétiques
La quasi-majorité des appareils utilisés en diagnostic thermique
Les objectifs de l’utilisation de l’instrumentation dans les sont des appareils de mesure ponctuelle à réponse instantanée,
méthodes d’analyse thermique des bâtiments sont multiples : les appareils enregistreurs étant plutôt réservés aux analyses
— levée des doutes sur la nature, le fonctionnement ou le mode détaillées, à savoir audits instrumentés et auscultations.
d’utilisation de divers éléments ou sous-systèmes ; La liste ci-dessous, non exhaustive, regroupe les principaux
— évaluation individuelle des différents paramètres des matériels nécessaires :
méthodes de calcul ; — analyseurs de gaz type fyrite ou appareil d’Orsat, pour les
— répartition des consommations par volume, zone ou bâtiment ; mesures de concentration en CO2, O2, CO, dans les gaz de
— contrôle des données climatiques ; combustion ;
— etc.
— thermomètres à mercure ou à alcool, thermocouples ou
Il n’est pas possible de définir une méthode d’instrumentation sondes à résistance métallique, thermistances ;
générale et universelle applicable à l’ensemble des types d’études — manomètres type Bourdon, déprimomètres ;
réalisables. L’importance des moyens de mesure mis en œuvre est — hydromètres et psychromètres ;
très variable et dépend de la démarche retenue et de la qualité des — mesureurs de débits : compteurs volumétriques, débitmètres
résultats recherchée. Chaque étude étant un cas particulier, il normalisés (diaphragmes, tuyères, venturis), anémomètres à fil
conviendra de lui associer une stratégie de mesure adaptée. chaud, anémomètres à hélice et tubes de Pitot avec manomètres
Compte tenu des conséquences financières de l’utilisation des inclinés à eau ;
moyens de mesure, cette stratégie doit être conçue dans le souci — appareillages électriques : contrôleurs universels avec pinces
permanent de l’optimisation des moyens en matériels utilisés et en ampèremétriques ;
temps. Il est fait usage le plus possible des éléments de comptage — moyens de laboratoires : analyseurs physico-chimiques des
existants (après vérification de leurs performances), judicieuse- eaux, calorimètres et viscosimètres.
ment complétés par un ensemble de matériels utilisant des
techniques non intrusives. Dans le même esprit d’optimisation,
seuls les paramètres fondamentaux sont mesurés, en évitant les
redondances. 4.2 Appareils utilisés en analyse détaillée
L’emploi de méthodes instrumentées n’est pas pour autant un (audit instrumenté et auscultation)
gage de précision et de sûreté des valeurs obtenues. La qualité du
matériel (performances intrinsèques, étalonnage, etc.), celle de sa
Les appareils utilisés au cours des audits doivent posséder
mise en œuvre (techniques appropriées, précautions, etc.) et le
comme caractéristiques principales, outre une précision cohérente
savoir-faire de l’opérateur (formation, expérience) sont détermi-
avec les objectifs de l’étude et une robustesse adaptée aux
nants dans la réussite ou l’échec d’une campagne de mesure.
conditions de la mesure, la portabilité et l’autonomie.
L’instrumentation est une affaire de spécialistes et doit être pra-
La liste de matériels ci-dessous n’est pas exhaustive, mais
tiquée par des individus suffisamment formés et dotés d’un esprit
regroupe une diversité d’appareils suffisamment importante pour
« mesure » indispensable.

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réaliser une campagne de mesures à l’occasion d’une analyse éner-


gétique instrumentée (audit, auscultation). Tous ces appareils sont
adaptés aux techniques de mesures in situ et ont été éprouvés.
— Les enregistreurs numériques de type boîte blanche
(figure 5a ), permettent de mémoriser une quantité de valeurs
variant de 8 000 à 32 000, généralement issues d’un seul capteur.
Le pas de temps est prédéterminé et se situe dans les limites de 1 s
à 1 h, avec des valeurs intermédiaires fixes. Ces enregistreurs,
associés à des capteurs appropriés, réalisent des mesures de gran-
deurs telles que températures (ambiances, fluides, surfaces),
humidité relative, temps de fonctionnement d’un appareil (brû-
leurs, pompes, etc.), nombre d’impulsions émises par un organe
de comptage (compteurs d’eau, de combustibles, d’électricité,
etc.). Plusieurs enregistrements peuvent être effectués de façon
synchrone. Les valeurs mémorisées sont ensuite transférées vers
un micro-ordinateur via une interface et un logiciel spécialisé. Elles
peuvent ainsi être exploitées sous forme de fichiers.
— Les débitmètres à ultrasons (figure 5b ), utilisant le principe
de la différence de temps de transit, permettent de réaliser des
mesures de débits de fluides liquides dans des canalisations en
charge. Deux sondes sont apposées à l’extérieur de la tuyauterie.
Les mesures peuvent être effectuées quels que soient le niveau du
débit, la nature du fluide ou de la canalisation. Seuls les diamètres
très faibles (inférieurs à 5 mn) et très grands (supérieurs à 2 m)
représentent un obstacle à l’utilisation de ces appareils. La réalisa-
tion d’une mesure prend environ 30 min et nécessite la préparation
de la surface extérieure de la tuyauterie (dépose de l’isolant, pon-
çage des couches de rouille et de peinture, etc.).
— Les analyseurs de réseau électrique (figure 5c ) autorisent la
mesure de tous les paramètres électriques d’un réseau mono ou
triphasé (intensités, tensions, facteurs de puissance, puissances
actives et réactives, fréquence, énergie consommée), selon une
cadence minimale dépendant du type d’appareil, mais inférieure à
1 min. Les mesures sont réalisées par la prise directe des tensions
sur le réseau et par des pinces ampèremétriques. Reliés à un
micro-ordinateur, ces appareils permettent l’enregistrement direct
des paramètres mesurés sous forme de fichiers. Il est possible éga-
lement d’équiper ces analyseurs de mémoires, afin de stocker les
données recueillies. Ces mémoires sont ensuite lues grâce à une
liaison avec un micro-ordinateur.
— Les anémomètres à fil chaud sont utilisés pour mesurer la
vitesse de l’air à l’intérieur d’un réseau de distribution aéraulique.
La mesure de cette grandeur permet de déterminer le débit d’air en
appliquant une méthode d’intégration du profil de vitesse [13]. Uti-
lisés avec un cône approprié, les anémomètres autorisent la
mesure de débits directement aux bouches d’extraction et de souf-
flage.
— Les analyseurs électroniques de combustion fournissent prin-
cipalement la valeur du rendement instantané de combustion à
partir de la mesure de la température de fumée, du taux d’oxygène
(ou de gaz carbonique) et du type de combustible. Ils mesurent
également la valeur du pourcentage d’imbrûlés.
— Les stations météorologiques portables offrent la possibilité
d’enregistrer les différents paramètres météorologiques
nécessaires aux études énergétiques : température sèche de l’air,
humidité relative, pression atmosphérique, vitesse et direction du
vent, rayonnement solaire global sur un plan horizontal (la cadence
et la durée des enregistrements sont choisis par l’opérateur). Les
valeurs des paramètres, stockées dans les mémoires de la station,
sont ensuite transférées vers un micro-ordinateur et exploitées
sous forme de fichiers.
Quelques fournisseurs sont donnés en fin de l’article, dans Pour
en savoir plus [Doc B 2 235]

Figure 5 – Appareils utilisés en audit instrumenté

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4.3 Méthodes de mesure

Les méthodes de mesure in situ applicables à l’énergétique du


bâtiment sont diverses et nombreuses. Nous ne décrirons ici suc-
cinctement que quelques-unes d’entre elles. On se reportera à la
littérature [9], [10], [11], [12], [13] pour des informations complètes
et détaillées.

4.3.1 Bilan global d’une chaufferie

Il s’agit d’un paramètre très important des analyses


énergétiques. La méthode mise en œuvre pour le déterminer per-
met non seulement de connaître la quantité d’énergie et la puis-
sance cédées aux bâtiments, mais également :
— d’effectuer la répartition des consommations pour les diffé-
rents bâtiments, volumes ou sous-volumes ;
— d’évaluer l’origine des différentes pertes (combustion,
balayage, rayonnement) ;
— de déterminer le taux de charge du ou des générateurs.
Ce bilan de chaufferie est réalisé sur une période minimale de
deux à trois semaines, au cours desquelles les sollicitations du sys-
tème doivent être suffisamment variées pour autoriser une extra-
polation annuelle des résultats (amplitude de température
extérieure d’une dizaine de degrés, taux d’occupation représentatif
du taux moyen annuel).
■ Mesure des consommations
Il faut dans un premier temps mesurer les consommations
primaires :
— soit en utilisant les indications des compteurs de livraison
d’électricité (kWh), de gaz (m3) sans oublier d’appliquer un coeffi-
cient de correction de température et de pression, ou de fioul (L) ; Figure 6 – Possibilités de mesure de temps de fonctionnement
— soit en mesurant les niveaux de cuve de fioul au début et à la sur un brûleur tout ou rien
fin de la période de suivi et en comptabilisant les livraisons
intermédiaires ;
— soit en mesurant les temps de fonctionnement ti (h) des dif- (0)
férentes allures des brûleurs fioul ou gaz (à l’exclusion des brû-
leurs modulants ou progressifs) et les débits de combustible Qi (L/
Rappels de conversion kWh (PCI )
h) correspondant à chacune des allures. Le volume de combustible
brûlé Vc (L) s’exprime alors sous la forme : électricité : 1 kWh = 1
gaz naturel : 1 kWh (PCS) = 0,9
gaz propane : 1 kg = 12,8
Vc = ∑ Qi ti fioul domestique : 1 L = 10,2
i fioul lourd : 1 t = 11 100
charbon : très variable
— soit, enfin, en mesurant les temps de fonctionnement des sys- (en cas d’incertitude) 1 kg = 7,8
tèmes d’alimentation des combustibles solides (bois, charbon) et bois : assez variable
en déterminant leur débit-masse par pesage et chronométrage. La (en cas d’incertitude) 1 st (stère) = 1 400
quantité de combustible consommé se calcule de la même façon
que précédemment. Les temps de fonctionnement ti sont mesurés
à l’aide d’enregistreurs numériques reliés à des convertisseurs de
tension ou grâce à des totaliseurs à roues codeuses (figure 6) qui ■ Mesure du rendement instantané de combustion
sont branchés sur le signal d’alimentation des électrovannes cor- Cette mesure permet de déterminer la quantité d’énergie Efum
respondantes pour le gaz ou le fioul, ou des moteurs de directement perdue dans les fumées [1]. Elle est réalisée de préfé-
commande des pistons ou vis sans fin assurant l’alimentation pour rence par l’intermédiaire d’un analyseur électronique de
les combustibles solides. combustion (§ 4.1) ou à défaut par des appareils fyrite (analyseurs
L’énergie primaire consommée Ep est définie comme étant le de CO, O2, CO2) [11].
produit : La détermination du taux de combustible imbrûlé, par l’intermé-
E p = qc PCI (kWh) diaire de la mesure du pourcentage de CO dans les fumées, est
également effectuée à l’aide des mêmes appareils et permet de
avec qc (L), (kg), (t), (st) connaître la perte d’énergie Eimb qu’il engendre.
quantité de combustible consommée, ■ Mesure de l’énergie distribuée dans les différents réseaux
PCI (kWh/L), (kWh/kg), (kWh/t), (kWh/st) La détermination de la quantité d’énergie d’un réseau est réali-
pouvoir calorifique inférieur du combustible. sée à partir de trois mesures directes : deux enregistrements de
températures (départ, retour) et une mesure ponctuelle de débit :
Dans le cas de l’électricité, l’énergie primaire est directement
celle lue sur le compteur en kilowattheures en appliquant éventuel- — les enregistrements de températures sont effectués par des
lement le coefficient de lecture approprié. sondes appariées placées dans des doigts de gants ou, à défaut,

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par des sondes d’applique moyennant une mise en œuvre parti- L’énergie E rn cédée par le réseau n au cours de la campagne de
culière (figure 7). Dans ce dernier cas, il faut vérifier sur site l’écart mesures est égale à la somme des énergies élémentaires Ei de
de mesure entre les deux sondes au niveau de température auquel l’ensemble des enregistrements :
elles vont être utilisées. Cette opération consiste à placer les deux
i
capteurs côte à côte sur la canalisation la plus chaude, reliés à leur
enregistreur respectif, et à procéder à un enregistrement d’environ E rn = ∑ Ei
30 min. L’écart moyen sur les quinze dernières minutes est 1
considéré comme représentatif de l’écart de mesure entre les deux La quantité d’énergie élémentaire Ei sur la période d’enregistre-
enregistrements dont il devra être tenu compte lors de l’exploita- ment s’exprime sous la forme :
tion ;
— le débit est alors mesuré ponctuellement par technique ultra- Ei = 2,778 × 10-4 Qi ρ cp ∆T i t (kWh)
sonique non intrusive (§ 4.2).
L’ensemble de ces mesures (températures et débit) doit se situer avec Qi (m3/s) débit-volume du fluide caloporteur,
sur la partie du réseau à débit constant (à savoir, du côté où se ρ (kg/m3) masse volumique du fluide à sa température
trouve la pompe par rapport à l’organe de régulation). Il faut néan- moyenne,
moins vérifier la constance du débit en fonction des positions cp (KJ/kg · K) capacité thermique massique du fluide à sa
extrêmes des vannes de régulation. température moyenne,
∆Ti (K) différence de température départ / retour du
fluide caloporteur,
t (s) période d’enregistrement.
Le calcul doit être exécuté pour chacun des enregistrements.
Effectuée manuellement, cette opération est fastidieuse, mais elle
ne prend qu’une vingtaine de minutes avec un tableur bien maî-
trisé (Excel, Multiplan, Lotus, etc.).
■ Répartition de l’énergie
Les trois opérations précédentes étant réalisées, le bilan de la
chaufferie est effectué en calculant :
— l’énergie totale perdue dans la chaufferie Ec :
i
E c = E p – ∑ E rn ( kWh )
1

— la répartition des pertes :


E ryt + E bal = E c – E fum – E imb
avec Eryt (kWh) énergie perdue par rayonnement,
Ebal (kWh) énergie perdue par balayage,
Ec (kWh) énergie totale perdue dans la chaufferie,
Efum (kWh) énergie perdue par les fumées,
Eimb (kWh) énergie perdue par les imbrûlés.
L’énergie perdue par rayonnement provient de l’ensemble de la
chaufferie (générateurs, échangeurs, organes hydrauliques divers,
canalisations, etc.). L’énergie perdue par balayage concerne essen-
tiellement les générateurs. Ces deux types de perte ne sont pas
mesurables directement sur site faute de techniques instrumentales
adaptées. La répartition entre les deux est estimée au moyen des
Figure 7 – Montage des capteurs de température règles classiques [1].
■ Présentation des résultats
Dans le cas où la stabilité du débit n’est pas correcte (variations Tous ces calculs étant effectués, le résultat final du bilan peut
> 5 %) ou si, pour des raisons d’ordre pratique, les mesures de être illustré sous la forme d’un graphe présentant la répartition de
températures ne peuvent être réalisées que sur la partie du réseau l’énergie en chaufferie (figure 8).
à débit variable, il faut recourir à un enregistrement du débit, en
associant au débitmètre utilisé un enregistreur numérique. La
plupart des débitmètres sont en effet équipés d’une voie 4.3.2 Coefficient de performance
analogique. D’une manière générale, il est fait usage d’enregis- d’un groupe frigorifique
treurs numériques autorisant la mémorisation de la valeur
moyenne de la grandeur mesurée sur la période d’enregistrement, La quantité d’énergie frigorifique fournie par le système de pro-
afin d’obtenir une précision suffisante. duction est obtenue par une méthode en tout point identique à
Pour des raisons financières, la monopolisation prolongée d’un celle exposée précédemment (§ 4.3.1). Deux enregistrements de
ou plusieurs débitmètres à ultrasons n’est pas réaliste. On cherche température et une mesure ponctuelle de débit (ou un enregistre-
donc, la plupart du temps, à utiliser en priorité la méthode de ment) sont nécessaires.
mesure ponctuelle. Simultanément, la quantité d’énergie électrique consommée par
le ou les compresseurs et les auxiliaires (ventilateurs des conden-
seurs à air, pompes, etc.) est mesurée à l’aide d’un analyseur de

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lité de l’eau froide servant à la production d’eau chaude et, d’autre


part, la quantité d’ECS consommée dans les cuisines, le volume
d’eau chaude utilisé dans la partie hébergement étant obtenu par
différence entre les deux indications.
■ Position du problème
L’indication du compteur d’eau chaude destinée uniquement à
l’alimentation des cuisines est environ deux fois supérieure à celle
du compteur d’eau froide prévu pour mesurer la totalité du volume
d’eau chaude consommée.
Le premier réflexe est alors de mettre en doute la qualité des
indications des deux compteurs.
■ Méthode
Elle consiste à s’appuyer sur les premières impressions
recueillies, un certain nombre de mesures annexes permettant de
vérifier le fonctionnement global de l’installation.
Figure 8 – Exemple de répartition des consommations en chaufferie : Trois types de mesures ont ainsi été réalisées simultanément :
bilan global — des mesures de volume, effectuées sur la canalisation à
proximité des compteurs, en utilisant la fonction comptage d’un
débitmètre à ultrasons (§ 4.2), de façon à vérifier, à plusieurs
reprises (cinq) et sur un temps donné (une heure), la concordance
réseau électrique (§ 4.2). Dans le cas de compresseurs non étagés,
avec les indications de chaque compteur ;
l’énergie consommée peut être approchée par des mesures ponc-
— des mesures de volume par empotage aux points de puisage
tuelles de puissance et des mesures de temps de fonctionnement
en cuisine, après avoir condamné momentanément ceux de la
des différents éléments.
zone d’hébergement, pour valider définitivement les mesures
Le coefficient de performance est évalué en calculant le rapport précédentes (l’empotage consistant à prélever dans un récipient
de l’énergie frigorifique produite et de l’énergie électrique consom- une quantité d’eau sur un temps chronométré, puis à effectuer son
mée pendant la même période. pesage) ;
Les mêmes contraintes qu’au paragraphe 4.3, concernant la — des enregistrements de température sur différentes parties du
durée des enregistrements et l’extrapolation annuelle des résultats, système de distribution (températures d’eau froide, de distribution
doivent être appliquées. de la boucle, de retour du bouclage sur chacun des pieds de
colonne de l’hébergement), au moyen d’enregistreurs numériques
munis de sondes de contact.
■ Résultats
5. Exemple : auscultation Les différentes mesures de volumes ont permis d’établir avec
d’un système de production certitude que les indications des deux compteurs étaient parfaite-
ment correctes, l’écart entre les trois techniques restant inférieur
d’eau chaude sanitaire à 3 %.
— Les compteurs mesurent bien les volumes qui les traversent.
— Les mesures de température ont permis de démasquer le pro-
Cet exemple simple concerne l’auscultation d’un système de
blème (figure 9b ). Les enregistrements des températures de retour
production d’eau chaude sanitaire (ECS) motivée par l’incohérence
de boucle des trois colonnes montrent que, sur les colonnes 2 et
des informations délivrées par deux organes de com comptage
3, la température atteint quasiment celle de l’eau froide (15 ˚C)
existants.
lorsque de forts puisages d’eau chaude sont effectués en cuisines
■ Présentation du système (préparation des repas, vaisselle). Ces puisages engendrent une
chute de pression dans le circuit, suffisante pour permettre l’intro-
L’installation est composée de deux ballons de stockage de
duction d’eau froide dans la boucle de distribution au niveau des
4 500 L, maintenus en température par un circuit de chauffage pro-
mitigeurs de douche qui, dans les tours 2 et 3, s’avèrent défec-
venant d’un ensemble de chaudières assurant également le chauf-
tueux.
fage des bâtiments (figure 9a ).
Voilà comment une incohérence de comptage permet de déceler,
Une boucle de distribution d’ECS alimente une zone d’héberge-
au moyen de mesures, le mauvais fonctionnement d’un type d’élé-
ment composée de trois tours de cinq étages dont les sanitaires
ment hydraulique, qui n’est pas pénalisant d’un point de vue
(douches et lavabos) sont équipés de mitigeurs. Les cuisines de cet
énergétique, mais qui présente une entrave au suivi des consom-
établissement sont alimentées en eau chaude par un piquage
mations et à la gestion de l’énergie.
direct sur le départ de la boucle, sans retour. Les deux compteurs
de volume sont positionnés de façon à compter, d’une part, la tota-

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Figure 9 – Exemple d’auscultation d’un système de production et de distribution d’ECS

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P
O
U
Audits énergétiques des bâtiments R

E
par Jean-Pierre BRASSELET N
Ingénieur des Travaux Publics de l’État
Cofondateur du Bureau d’Études OASIIS (Office d’Audit Énergétique, de Service
Informatique et d’Instrumentation Spécialisée)
Frédéric FRUSTA
DUT Mesures Physiques
S
et
Confodateur du Bureau d’Études OASIIS
Michel CLERJAUD
A
Maître ès Sciences, DEA Échanges thermiques
Directeur du Département Thermique-Incendie-Pression à CEP (Contrôle et Prévention)
V
O
Références bibliographiques I
[1] AFME. – Guide du diagnostic thermique.
Eyrolles 229 p.(1987).
[6] CADIERGUES (R.). – Les références du
diagnostiqueur : le climat. Promoclim E, n˚ 5,
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p. 401 à 404, déc. 1985. diagnostiqueur : le comportement. Promo- (1986).
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ses de fluides. Masson, (1986). P
[14] Catalogue T. – Catalogue des outils de
[4] CADIERGUES (R.). – Les températures exté-
rieures. Promoclim E, n˚ 4, p. 163 à 192, sept.
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1986. [9] ROULET (C.A.). – Mesures in situ. Office fédé- Guides AICVF nos 1, 3, 4 et 5.
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de chauffage et leur aspect statistique. Pro-
ral des questions conjonctuelles / SIA, 523 p.
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[16] Guides sectoriels AICVF-Ademe : hôtels,
bureaux, santé, enseignement.
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Office fédéral des questions conjoncturelles,
(1986).
S

Constructeurs. Fournisseurs
(liste non exhaustive)

Débitmètres à ultrasons Enregistreurs numériques


Controlotron Corp. (distributeur : Engineering Mesures). Bristol Meci SA.
Fuji Electric Co Ltd (distributeur : Instruments et Contrôles). TAD Traitements Analogiques et Digitaux.
Ultraflux S.A. Unidata France S.à r.l.
8 - 1994
Doc. B2235

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