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Comment pense-t-on ? Comment se représente-t-on les choses ? Que peut-
on imaginer ? Les philosophies répondent à ces questions de façon diverse. Et
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Entre idée et concept : vers l’ontologie
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aucune n’a été dessinée pour la terminologie. De plus, une des constatations
que l’on peut faire est que la terminologie a généralement évité, voire rejeté, la
question du signe, notamment dans son acception saussurienne. Constitué d’un
signifiant et d’un signifié, le signe, par son cortège d’évocations et de connota-
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Genèses de la terminologie contemporaine (sources et réception)
Descartes, qui fixe pour son époque une grande partie de la terminologie phi-
losophique, est assez fluctuant. Il utilise à la fois idée (surtout dans le Discours
de la méthode), notion (surtout dans Des Principes de la connaissance humaine) et
concept (surtout dans les Méditations) : souvent alternativement et sans défini-
tion ou détermination particulière. Si l’on se tourne vers la Logique de Port-Royal,
sublime synthèse de certaines des questions traitées par la philosophie du
Moyen-Âge et par Pascal ou Descartes, c’est le plus souvent idée qui est
employé. La démonstration d’Arnauld et de Nicole porte tout particulièrement
sur le rapport du signe à la chose. Or, c’est idée qu’ils opposent à chose.
Il apparaît donc nécessaire de débroussailler ce que recouvrent les mots idée,
notion et concept, au moins dans la direction d’une théorie de la terminologie.
L’exercice n’est pas simple et reste forcément réducteur. Si l’on se réfère par
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exemple à un ouvrage aussi usuel que le Vocabulaire philosophique de Cuvillier,
on trouve : idée = « concept, représentation abstraite et générale » ; concept
= « idée abstraite et générale » ; notion = « connaissance, discernement »… Il
faut donc essayer de les reprendre tous trois de façon à poser au moins quel-
ques jalons.
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Idée est ancien pour désigner la représentation intellectuelle que l’on se fait
d’une chose. Il calque à l’origine le grec ιδ nα, « forme, aspect d’un être ou d’une
chose » voire, dans l’interprétation de Platon et d’Aristote, « représentation de
l’essence des choses ». Dans la philosophie médiévale, le mot a le plus souvent
le sens de représentation intellectuelle, innée ou acquise (ainsi Lalande, 1932, I,
p. 325 sq.). Chez Descartes, l’idée n’est guère une forme, car elle a un contenu
déterminé. Dans la philosophie classique, idée a cependant une acception large,
qui est utile, mais aussi parfois peu opérante car trop vague. Elle s’oppose sur-
tout à chose et se trouve en concurrence avec notion.
Notion est également très utilisé en philosophie (Lalande, 1932, II, p. 322).
C’est le latin notio, déjà en latin classique (« acte de connaître »). Notion est par
exemple abondamment développé dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alem-
bert, autre somme des théories d’une époque. Elle s’appuie sur Leibniz pour
conduire la description : « Notion, s.f. est un terme de Logique, qui signifie l’idée
que nous formons d’une chose ». Dans ce contexte, notion et idée paraissent
interchangeables, même si l’auteur de l’article indique que notion « ne convient
qu’aux idées complexes ». Ce qui intervient cependant, c’est l’articulation qui
est faite dans ce même article entre les différents types de notion expliqués à
travers l’œuvre de Leibniz :
Notion claire, selon lui, est celle qui suffit pour se rappeler un objet ; par exemple,
celle d’une figure. Notion obscure, c’est celle qui ne suffit pas pour se rappeler un
objet ; par exemple, celle d’une plante qu’on doute, en la voyant, si on ne l’a pas
vûe déjà ailleurs, & si on doit lui donner tel ou tel nom. Notion distincte, c’est celle
qui nous rend capables de marquer les différens caracteres auxquels nous recon-
noissons une chose ; par exemple, celle-ci : le cercle est une figure terminée par une
ligne courbe qui revient sur elle-même & dont tous les points sont également éloi-
gnés d’un point milieu. Notion confuse, est celle avec laquelle on n’est pas en état de
marquer les différens caracteres auxquels on peut reconnoître un objet, quoi qu’il
en soit. Telle est la notion de la couleur rouge. Notion adéquate, c’est celle où l’on a
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Entre idée et concept : vers l’ontologie
des notions distinctes des marques ou caracteres qui font reconnoitre un objet ; par
exemple, c’est la notion du cercle dont nous venons de parler, lorsqu’elle est
accompagnée de la notion distincte d’une courbe qui revient sur elle-même, & dont
tous les points sont également éloignés d’un autre point qui est au milieu.
Voilà bien résumé ce que la philosophie classique élabore progressivement
au moins depuis Pascal et Descartes, à savoir une typologie des idées ou
notions en fonction, particulièrement, de leur plus ou moins grande clarté. Il est
cependant notable que Leibniz utilise aussi çà et là idée dans des acceptions pro-
ches. Une des fins du langage étant « d’exciter dans l’esprit de celui qui
m’écoute une idée semblable à la mienne » (Leibniz, III, 3, 1966 [1705], p. 247).
Si l’on se tourne vers les acceptions de ces mots en français, on peut avoir
une vue des acceptions de la langue courante. Ainsi chez Littré (1876), pour
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idée : « représentation qui se fait de quelque chose dans l’esprit, soit que cette
chose existe au dehors, ou qu’elle soit purement intellectuelle ». Cette définition
a l’avantage de couvrir au moins ce qui est généralement entendu en philoso-
phie par idée. De même pour notion : « connaissance acquise de quelque chose ».
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Genèses de la terminologie contemporaine (sources et réception)
de concept, pour, dit Alain Rey, se démarquer de l’anglais concept (1992). Que
dit l’ISO ? Le Comité technique 37 de l’ISO, qui a stabilisé dans les années 1970
objet et en 1990 désignation, a hésité pendant plusieurs années, principalement
entre notion et concept. Les normes de méthodologie en terminologie de l’ISO
font mention, avant 2001, de notion, non de concept. Ainsi : « Les notions sont
des constructions mentales qui servent à classer les objets individuels du
monde extérieur ou intérieur à l’aide d’une abstraction plus ou moins arbi-
traire » (NF ISO 704, 1987, p. 3). On perçoit ici le caractère à la fois mentaliste et
relativiste de la définition.
Concept a été introduit, à la place de notion, dans les travaux de l’ISO à
l’occasion principalement de la révision des normes ISO 704 (Travail terminolo-
gique – Principes et méthodes) et ISO 1087 (Travaux terminologiques – Vocabulaire),
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qui s’est étendue de 1997 à 2000. Concept est défini dans l’édition qui en est
issue par : « Unité de connaissance créée par une combinaison unique de carac-
tères » (ISO 1087, 2001). La définition est assortie d’une note : « Les concepts ne
sont pas nécessairement liés à des langues particulières. Ils sont cependant
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davantage sur l’importance du médium des connaissances. Dans tous les cas, il
fallait s’accorder sur un langage de communication et sur une conceptualisa-
tion du domaine d’application.
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les documents scientifiques ou techniques qu’elle produit. C’est là ce que
dégage essentiellement l’analyse du discours.
– la construction d’ontologies dites « conceptuelles », issues d’une conceptua-
lisation des objets du monde que partage une communauté de pratiques.
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Entre idée et concept : vers l’ontologie
(les relais se répartissent dans une branche de l’arborescence en relais à seuil, les
relais à seuil en relais à seuil de tension, relais à seuil de puissance, etc.). La formali-
sation des concepts permet de lever les ambiguïtés entraînées par les effets de
discours dans lesquels les termes sont pris (relais de tension est mis pour relais à
seuil de tension, etc.). Cette formalisation permet de ce fait de s’accorder sur des
définitions au delà des ambiguïtés de la langue. La représentation formelle des
systèmes conceptuels permet de concilier, par rapport à une conceptualisation
extralinguistique, les désignations des concepts avec les segments linguistiques
et les types de reformulation susceptibles de se rapporter à chacun de ces
concepts. L’approche logique opère donc a priori, par l’exigence de description
par concepts, et a posteriori par la modélisation des concepts émergeant des dis-
cours. Il suffit de consulter une nomenclature des termes employés dans un
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ministère immense et diversifié comme l’est en France celui de l’éducation
nationale pour constater qu’il est quasiment impossible de s’y retrouver, à
moins de modéliser cette nomenclature sous la forme des concepts désignés en
discours (approche terminologique) et des ontologies maniées dans ce minis-
tère (modélisation ontologique). Ontologies pouvant être : une classe, un
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CONCLUSION
Le champ disciplinaire que constituent actuellement les ontologies est l’une
des voies de la terminologie. Beaucoup de points les rassemblent : au moins la
convergence de leur démarche, l’utilisation des principes de la terminologie
pour consolider l’approche ontologique et la proximité de leurs postulats
fondés sur la description conceptuelle des objets et sur les relations logiques
entre concepts. Elles partagent ainsi, essentiellement, une approche logique, au
centre de laquelle figure la problématique du concept. Mais elles se distinguent
par leur mode de conceptualisation. Car les ontologies aboutissent à des repré-
sentations formelles et computationnelles qui, considérées comme des systèmes
conceptuels, rendent pleinement opérationnelles les terminologies dans les sys-
tèmes de traitement de l’information.
Éléments bibliographiques
ARNAULD A., NICOLE P. (1992) [1662] La logique ou l’art de penser, Gallimard [col. Tel], Paris.
CARNAP R. (1997) [The University of Chicago, 1947, 1956] Signification et nécessité, trad.
de l’anglais par Rivenc, F. et de Rouilhan, Ph., Paris, Gallimard [Bibliothèque de
philosophie.]
CUTKOSKY M. R., ENGELMORE R. S., FIKES R. E., GENESERETH M. R., GRUBER T. R., et MARK W. S.
(1993) « PACT : An Experiment in Integrating Concurrent Engineering Systems », IEE
Computer, vol. 26, n° 1, pp. 28-37.
CUVILLIER A. (1956) Vocabulaire philosophique, (rééd.), Paris, A. Colin (Le Livre de Poche).
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ISO 1087, 1990, Terminologie-Vocabulaire, (français et anglais), Afnor, NF ISO 1087,
mai 1990, 17 p.
ISO 1087, 2001, Travaux terminologiques Vocabulaire, Partie 1 : Théorie et application,
(français et anglais), Afnor, NF ISO 1087-1, fév. 2001, 42 p.
KANT E. (1980) [1781, 1787] Critique de la raison pure, in Œuvres philosophiques, Tome I,
Gallimard (Bibliothèque de la Pléiade).
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