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FAMILIALES
Gérard Hirigoyen
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Concilier finance
et management
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dans les entreprises
familiales
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E
st-il possible de concilier les objectifs management dans ces entreprises. D’où
de réussite financière et du manage- l’articulation en deux sections :
ment dans les entreprises familiales ? – les spécificités des entreprises familiales :
La question peut surprendre dans la mesure des contraintes à une conciliation finance
où toutes les études ont mis en évidence la management ;
meilleure performance des entreprises fami- – les spécificités des entreprises familiales :
liales par rapport aux entreprises non fami- des opportunités de conciliation finance
liales. Leur vision à long terme, leur capacité management.
à réinvestir et leur adaptation à l’environne-
ment en conservant des forces distinctives,
I – LES SPÉCIFICITÉS
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font d’elles les entreprises les plus pérennes
DES ENTREPRISES FAMILIALES :
(Miller et Le Breton-Miller, 2005).
DES CONTRAINTES
L’entreprise familiale a constitué le modèle
À UNE CONCILIATION
de référence pour le gouvernement de l’en-
FINANCE MANAGEMENT
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comme Michelin, Peugeot, Auchan qu’une prises entièrement familiales où la famille
petite ou moyenne entreprise régionale. Si ne contrôle plus que la propriété par son
protéiforme par la diversité de sa taille et de degré d’implication actionnariale ou plus
son statut juridique, l’entreprise familiale que le management par l’occupation de
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est unique par son identité. Jusqu’à présent, postes stratégiques mais où elle est minori-
aucune définition n’a pu être reconnue et taire au plan actionnarial. D’autre part, des
adoptée universellement, même s’il existe auteurs comme Astrachan et al. (2002),
des signes particuliers permettant d’établir Habbershon et Williams (1999) observent
sa carte d’identité1 : le contrôle du capital que la forme organisationnelle des entre-
par la famille, le rôle de la famille dans le prises familiales est non seulement variée
management, le lien étroit entre la famille mais régie par un continuum qui évolue et
et l’entreprise. change selon le devenir de la famille, de la
Toute définition procède d’un choix arbi- propriété et de l’entreprise.
traire et le débat conceptuel reste ouvert. Ainsi, la prise en compte de la forme orga-
Néanmoins, les critères proposés par Ponza nisationnelle dans le champ des définitions,
(2007) rassemblent les entreprises fami- suscite des interrogations sur la pertinence
liales dans une définition commune : même des critères qui justifient la distinc-
– la détention d’un minimum de 15 % du tion entreprise familiale, entreprise mana-
capital par au moins deux membres d’une gériale, ainsi que l’imperméabilité de leurs
même famille ou d’un groupe de familles ; frontières. À titre d’exemple, on peut citer
– l’influence déterminante sur la stratégie les cas de Vivendi, Fiat et L’Oréal.
de l’entreprise exercée en faisant partie du Intégrer ces formes de structure et autres
management, en étant administrateurs, parmi les entreprises familiales, c’est
conseils ou actionnaires actifs, ou en contri- admettre de « familialiser » des entreprises
buant à définir la culture d’entreprise ; non familiales ; c’est-à-dire, accepter au sein
– l’importance accordée aux rapports entre des entreprises familiales des entreprises
les membres de la famille ; dans lesquelles les dirigeants n’appartien-
nent pas à une famille sociale qui échafau- une famille. Deux univers qui comportent
dent l’entité dans son fonctionnement et son chacun des besoins, des objectifs, une vie et
organisation, mais à une famille d’action- des croyances qui leur sont propres. La
naires qui se cimentent au sein de cette famille a été pendant longtemps la variable
entreprise dans la défense de leurs intérêts. manquante dans la recherche organisa-
On entend par la familialisation la nomina- tionnelle liée à l’entreprise familiale. Elle a
tion d’un fils ou d’une fille ou de proches au été réintroduite dans la littérature par
poste de direction d’une entreprise non Mintzberg et Waters (1982) dans un article
familiale afin d’assurer la transmission de considéré aujourd’hui comme historique.
la firme au sein de la famille de l’actuel La famille fonctionne sur un mode affectif
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directeur général ou du fondateur. Antoine et émotionnel (Goetschin, 1987). Les
Riboud, ex-P-DG de Danone (ex-BSN), a, notions de procréation, sécurité, tradition
par exemple, imposé sa descendance aux font partie des valeurs transmises et les
actionnaires : son fils Franck est nommé membres de la famille sont évalués pour ce
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vice-président pour prendre les rênes de ce qu’ils sont. La famille doit satisfaire un pro-
géant de l’alimentaire dont la famille ne fond besoin social et émotionnel d’apparte-
possède que 3 % du capital. Schéma iden- nance, d’affectio, d’intimité et fournir un
tique avec Jean-Luc Lagardère, qui était sens identitaire (Kepner, 1983). A contra-
P-DG salarié d’un groupe à actionnariat rio, l’entité entreprise fonctionne selon une
dispersé, et qui est devenu après le premier logique économique, orientée vers la crois-
actionnaire avec seulement 9 % des droits sance et le profit. Son objectif est la
de vote. Avec l’arrivée de son fils Arnaud à recherche de la performance. Les salariés, y
sa succession, il impose sa dynastie. Le compris dirigeants, sont évalués pour ce
groupe du manager d’hier s’identifie désor- qu’ils font. Deux univers se confrontent :
mais à sa famille. Le scénario est similaire celui de la famille où règne l’affectivité et
encore pour la société suisse SMH (célèbre un autre, celui de l’entreprise, supposé être
pour ses montres Swatch) : Nicolas Hayek rationnel. La délicate cohabitation entre ces
fondateur du groupe, qui n’est pas l’action- deux univers est source de conflits. Mais
naire majoritaire de la société, a intronisé c’est l’alchimie réussie entre eux qui est à
son fils à la tête du groupe qui commence à l’origine de la meilleure performance des
prendre l’allure d’une entreprise familiale. entreprises familiales.
La présence des membres de la famille est Le processus de décision dans l’entreprise
réelle et la seconde génération s’intéresse familiale intègre tout à la fois, les besoins
de très près à l’affaire. de la famille et ceux de l’entreprise. Les
Ainsi, une entreprise non familiale peut décisions les plus importantes trouvent leur
transiter vers une forme de structure fami- signification tantôt dans le système familial
liale et inversement. tantôt dans le système entreprise.
Cette représentation de l’entreprise fami-
Les modèles de représentation liale, à l’interface de deux sous-systèmes,
de l’entreprise familiale même si elle a permis l’avancement des
La spécificité de l’entreprise familiale vient connaissances dans le domaine des entre-
du fait qu’elle combine une entreprise et prises familiales, est trop utilisée ; elle peut
Concilier finance et management dans les entreprises familiales 397
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priété (l’actionnariat), alors que dans la plu- actionnaires,
part des entreprises, ne sont pris en compte 7) cumul des points de vue d’actionnaire,
que le management et l’actionnariat. de membre de la famille et de gestionnaire
L’approche théorique la plus utilisée pour de l’entreprise. C’est le cas classique du
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appréhender l’entreprise familiale est celle membre de la famille qui est en même
proposée en 1982 par Tagiuri et Davis. Ces temps le dirigeant de l’entreprise.
auteurs considèrent l’entreprise familiale Une version plus développée du modèle va
comme un système composé de trois sous- jusqu’à identifier 15 rôles différents
systèmes en interaction : la propriété (modèle de Neubauer et Lank, 1998).
(actionnariat), le management et la famille. Chaque zone d’interaction doit être gérée et
Dans le modèle chaque cercle représente un se dilate car chaque sous-système est dyna-
groupe de personnes présentant des caracté- mique et évolue dans le temps. L’opération de
ristiques particulières dans sa relation avec succession est une des causes de cette dilata-
l’entreprise. Le modèle identifie ainsi sept tion. Chaque intersection traduit ou non la
groupes de personnes (cf. figure 1) : réalisation d’un équilibre identité - structure.
Dans le cercle famille, trois facteurs doivent aient une expérience préalable et selon des
être obligatoirement pris en considération : critères de marché, revue de performance
les niveaux d’implication familiale (cf. objective et politique de ressources
modèle du « family universe bull’s eye » de humaines applicables à tous les salariés,
Shanker et Astrachan (1996)), le nombre et rémunération fondée sur le niveau de res-
la nature des générations des familles inté- ponsabilité et de performance, priorité aux
grées à l’entreprise (Mc Conaughy et al., objectifs de l’entreprise (rentabilité, part de
2001) et enfin, le degré d’influence, une marché, croissance) ;
famille peut influencer une entreprise à tra- – priorité aux actionnaires : prééminence du
vers l’étendue de son pouvoir, de son expé- retour sur investissement et du profil risque,
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rience et de sa culture (Astrachan et al., performance à court terme, remise en cause
2002). des managers familiaux par les action-
Des sources d’inefficience au sein des naires, perte de vision commune… Les
entreprises familiales trouvent leurs ori- attentes sont toutefois différentes en fonc-
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gines dans une mauvaise intégration de ces tion de la catégorie d’actionnaires fami-
trois systèmes, lorsque l’une des trois liaux concernée (cf. tableau 2, p. 9) et du
logiques suivantes est privilégiée : stade d’évolution de l’actionnariat (voir
– priorité à la famille : népotisme, d’où la tableau 1).
difficulté pour recruter des dirigeants exté- Chaque sous-système nécessite ainsi ses
rieurs de qualité, avantages en nature, opa- propres mécanismes de gouvernance :
cité et secret, rémunération équivalente conseil de famille pour la famille, conseil
pour tous les membres de la famille sans d’administration pour le management,
tenir compte du niveau de responsabilité ou assemblée des actionnaires pour la propriété.
de la performance ; L’entreprise familiale est donc structurelle-
– priorité à l’entreprise : participation des ment amenée à être un lieu de conflits et de
membres de la famille à condition qu’ils non-alignement des intérêts. Et cela d’au-
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(1996) met en évidence la façon dont les
une fonction d’utilité unique de l’ensemble conflits psychologiques au sein de la
de leurs parties prenantes. Les biais com- famille peuvent engendrer des coûts dus à
portementaux étaient supposés exclusifs la rivalité fraternelle ou encore à un com-
des entreprises non familiales connues prin-
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parfaite. Les actionnaires familiaux ayant variables d’ajustement permettant de
demandé le remplacement des dirigeants de réduire les conflits d’intérêts. Il conviendra
Wendel Investissement (société détenue à ensuite de tenter d’analyser le rôle positif
35,9 % par la famille) et la réorganisation de ou négatif de l’influence familiale sur la
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dération cette dimension, on peut établir la naires « bons pères de famille », ils préfè-
typologie (tableau 2) des actionnaires fami- rent les entreprises « vaches à lait » aux
liaux dans l’entreprise familiale. entreprises de croissance. Ils sont à classer
Les deux premières colonnes correspon- parmi les sereins. La colonne « actionnaires
dent à des actionnaires familiaux actifs qui de passage » regroupe des actionnaires qui
agissent positivement dans l’exercice de ont pris la décision de sortir du capital de
leurs responsabilités de direction ou d’ad- l’entreprise et leur départ définitif est une
ministration. Leur niveau d’influence sur question de temps. Ils sont sereins et pas-
l’entreprise est très élevé de même que leur sifs. Les actionnaires familiaux actifs et
niveau d’implication personnelle. La troi- opposants regroupent essentiellement les
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sième colonne regroupe les actionnaires membres de la famille hors de l’entreprise
familiaux non dirigeants mais actifs, qui qui exercent souvent un pouvoir d’in-
comprennent la plupart du temps des fluence non négligeable. Certains conser-
membres historiques qui veulent véritable- vent l’affectio-societatis et restent attachés
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Actionnaires Actionnaires
Actionnaires Actionnaires Actionnaires Actionnaires
sereins actifs et
dirigeants administrateurs et actifs investisseurs de passage opposants
Formule et Contribue Connaît Questionne
Stratégie Accepte Accepte
leadership et approuve et appuie et s’oppose
Établit et contrôle Connaît et Ne s’en Questionne
Organisation Accepte
leadership et fortifie respecte préoccupe pas et s’oppose
Influence de Se désintéresse Questionne
Leadership Leadership Contribue Connaît
l’entreprise d’elle et s’oppose
Participe Connaît et Questionne
Gouvernance Participe Contribue Accepte
activement accepte et s’oppose
Niveau Forte Faible Forte
d’implication Très forte Très forte et Faible et et
personnelle positive temporaire négative
402 Revue française de gestion – N° 198-199/2009
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timent possessif qu’une personne a sur dans des grandes sociétés cotées en Bourse.
quelque chose ou sur quelqu’un du fait des Pour cela, ils introduisent le concept de ren-
relations de proximité ou de familiarité tabilité émotionnelle pour l’actionnaire
qu’elle entretient avec elle ou lui. Le d’une entreprise familiale défini comme le
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2. Ibidem, p. 143.
Concilier finance et management dans les entreprises familiales 403
positif. Dans ce cas la valeur totale de l’en- naires familiaux et baisser par conséquent
treprise est supérieure à sa valeur finan- leurs exigences en termes de rentabilité
cière ; les actionnaires familiaux sont prêts financière.
à accepter une rentabilité du capital Si les actionnaires anonymes maximisent la
moindre puisque la rentabilité émotionnelle rentabilité financière, les actionnaires fami-
la compense. liaux augmentent leur rentabilité émotion-
Un résultat émotionnel positif peut baisser nelle. Dès lors, que ces derniers connaissent
les coûts des capitaux propres et offrir ainsi la rentabilité émotionnelle d’un projet, ils
à l’entreprise plus de flexibilité pour mener peuvent décider de sacrifier la rentabilité
des projets rentables aussi bien dans une financière. Les méthodes traditionnelles
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perspective financière qu’émotionnelle. La d’évaluation d’entreprise négligent la com-
décision d’employer un membre de la posante émotionnelle et interprètent proba-
famille inefficace par exemple peut aug- blement mal la valeur de l’entreprise pour
menter la valeur émotionnelle des action- les propriétaires familiaux.
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Par contre si le résultat émotionnel est capital est dispersé entre les mains de plu-
négatif : GE – CE < 0, les actionnaires fami- sieurs actionnaires familiaux (dix à vingt-
liaux se montreront plus exigeants que les quatre actionnaires).
actionnaires anonymes en termes de renta- Ce résultat corrobore des travaux théo-
bilité financière (voir graphique 1). Dans riques comme ceux de Schultze et al.
cette situation, la finance traditionnelle sur- (2003) qui considèrent que les frères et les
estime la valeur de l’entreprise pour les sœurs recherchent davantage leurs intérêts
actionnaires familiaux et augmente la pro- et ceux de leurs proches à ceux de la com-
babilité de détresse financière. munauté familiale dans son ensemble. En
général, les conflits qui en découlent engen-
Influence familiale et performance
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drent des coûts d’agence élevés qui grèvent
De nombreuses études ont cherché à mesu- la rentabilité, bloquent les décisions impor-
rer la performance des entreprises fami- tantes et déséquilibrent la gouvernance.
liales comparativement à celles des entre- Les actionnaires minoritaires qui vou-
prises non familiales. La grande majorité
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truisme serait assimilable à un biais com-
portemental susceptible d’affecter la perfor- L’arbitrage indépendance-endettement
mance de l’entreprise (Hirigoyen, 2008). L’arbitrage indépendance endettement pose
L’optimalité dans l’entreprise familiale cor- la question de la propension au risque des
dirigeants et de leurs familles ; autrement
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est faible. Il est égal à 32 % familiaux entre frères et sœurs plus sou-
fonds propres cieux de leurs propres intérêts que de ceux
dans les entreprises familiales contre 78 % de l’entreprise. Ces conflits débouchent par-
pour les PME françaises et les grandes fois sur des désengagements qui entraînent
entreprises du SBF 250 avec une baisse de
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L’arbitrage court terme – long terme capital social spécifique expliquerait large-
La divergence d’horizon traduit une diffé- ment l’avantage concurrentiel et la meilleure
rence d’appréciation sur les conditions performance des entreprises familiales.
d’obtention de la création de valeur. Dans Cette prééminence du long terme dans l’en-
un cas, l’effort est mis sur la recherche de la treprise familiale ne l’empêche pas pour
rentabilité et de la maximisation de la autant d’être souvent plus performante au
valeur actionnariale à court terme. Ce cas plan financier que les autres. Les actions
correspond essentiellement à celui où le des sociétés familiales ont cependant ten-
dirigeant est extérieur à la famille, qui si dance à accuser des pertes plus nettes que
elle a encore une influence sur son entre- celles des entreprises non familiales en
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prise n’exerce plus de contrôle. Les diri- période de crise. « La volatilité incroyable-
geants externes sont donc amenés à maxi- ment élevée de leurs cours est en parfaite
miser la valeur actionnariale et à mettre en contradiction avec leur orientation à long
place des systèmes de rémunération incita- terme et surtout la stabilité des bénéfices
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tifs. Une telle situation se rencontre surtout qu’elles engrangent sur de longues
dans les grandes entreprises familiales périodes. On comprend dès lors que ces
cotées qui se trouvent ainsi menacées dans sociétés soient peu enclines à s’exposer aux
leur équilibre à long terme. Il est nécessaire marchés des capitaux et à faire de la hausse
de renforcer l’influence familiale sur le diri- de leurs actions un impératif » déclare
geant extérieur. Ce qui le cas échéant peut Fueglistaller, directeur de l’Institut suisse
conduire à son remplacement. des petites et moyennes entreprises de l’uni-
Dans l’autre cas, la préoccupation première versité de Saint-Gall. Reste toutefois que la
sera celle de préserver l’autonomie, de valeur actionnariale et la valeur patrimo-
garantir la survie à long terme de l’entreprise niale exercent une réelle influence sur l’en-
et d’accroître le patrimoine familial. Il treprise, ses propriétaires et au-delà. Cette
convient aussi de sauvegarder l’héritage qui préférence pour le long terme s’est traduite
sera transmis aux générations suivantes, au cours des périodes passées par deux
notamment en matière de capital social. types d’orientations stratégiques :
Celui-ci résulte dans l’entreprise familiale – des offres publiques de retrait de la cote
d’un chevauchement de deux capitaux parmi lesquelles on peut citer les noms de
sociaux : celui de la famille par l’ensemble Clarins (2008), Deveaux (2007), Brioche
des connaissances, savoir-faire et pratiques Pasquier (2006), Elior (2006), Arkopharma
communiqués à ses membres mais aussi par (2007), etc. Les divergences des deux
la connaissance collective qui représente logiques, celle du marché financier et celle
l’ensemble des valeurs sociales, des de l’entreprise familiale mettent en évi-
croyances et des comportements portés par le dence une incompatibilité entre la stratégie
groupe familial; et celui de l’entreprise à tra- suivie par l’entreprise et celle voulue et
vers ses relations d’échange avec l’ensemble souvent imposée par le marché financier.
des parties prenantes, les salariés, les four- Ces divergences de vision constituent une
nisseurs, les clients, les créanciers, etc. (N’est des raisons principales qui expliquent le
ce pas Michelin qui parmi les premiers a choix de certaines entreprises familiales de
consacré la place et le rôle du client ?) Ce se retirer de la cote ;
408 Revue française de gestion – N° 198-199/2009
– des prises de participation dans le non- Les investisseurs familiaux inscrivent leur
coté aux fins de diversification du patri- action dans la durée, l’objectif étant la créa-
moine familial. Dans de nombreuses tion de la valeur par la cible. La durée de l’in-
familles, le capital est tellement concentré vestissement est donc celle nécessaire à la
dans l’entreprise qu’une diversification création de cette valeur. Cette vision d’inves-
effective des risques s’avère très difficile. tisseurs à long terme tient aussi à une autre
Et même si le risque pouvait être diversifié caractéristique importante des fonds d’inves-
comme dans les sociétés familiales cotées, tissement familiaux: à savoir leurs méthodes
les familles constituent des investisseurs qui sont d’abord celles d’industriels même si
orientés sur le long terme qui bien souvent leurs outils restent financiers. Ils misent avant
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ne modifient leur investissement que lors- tout sur le management et ne se lancent pas
qu’ils sont soumis à une pression extérieure dans des opérations de type Buy-in dans les-
(exemple : situation de crise économique et quelles une équipe dirigeante extérieure
financière) ou intérieure (désintéressement reprend la société. Outre l’apport en fonds
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Pour être régulés, ces biais doivent être iden- veaux comme la rentabilité émotionnelle et la
tifiés par le dirigeant de façon à les gérer stra- valeur émotionnelle, d’autre part, l’organisa-
tégiquement dans une perspective de gouver- tion d’un conseil de famille et la rédaction
nance comportementale (Hirigoyen, 2008). d’une charte familiale constituent des outils
D’une part, la mobilisation de concepts nou- au service d’une telle régulation.
BIBLIOGRAPHIE
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