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Bordeaux (France)
Observation
À l’examen clinique, nous retrouvons des lésions de grattage aux zones prurigineuses.
L’examen est par ailleurs normal. Il n’y a ni hépato ni splénomégalie. La température est à
37,4 °C.
Examens paracliniques :
VSH : 10 mm à la première heure, CRP < à 5 mg /L.
NFS : globules blancs : polynucléaires neutrophiles : 10 200/mm3, polynucléaires
éosinophiles : 1 920/mm3.
Recherche d'hématozoaires : négative
Gamma GT : 55 UI/l ; transaminases normales.
Radiographie thoracique : ITN
Echographie abdominale : zones hypoéchogènes au niveau du foie, à contours flous.
Examens parasitologiques des selles (trois examens) avec technique de Baermann :
négatifs
Etude du culot urinaire : absence d'œufs de parasites:
Biopsie de muqueuse rectale : absence d'œufs de parasites
Sérologie des helminthiases en cours.
Questions
Discussion
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et une rectoscopie avec biopsies de muqueuse rectale (BMR) ont été pratiquées : elles ne
montrent pas d’œufs de schistosomes.
Il faut alors demander des sérologies orientées par la clinique et l’origine géographique pour
les parasitoses pour lesquelles il existe une sérologie fiable : anguillulose, schistosomoses,
distomatose à Fasciola hepatica, filarioses, toxocarose, trichinellose, cysticercose,
Seul, le sérodiagnostic de la toxocarose revient positif en technique ELISA et est confirmé
par Western-Blot.
2. La toxocarose ou larva migrans viscérale est une zoonose parasitaire cosmopolite due à
la présence chez l’homme de larves d’ascaris de chiens (Toxocara canis) ou plus rarement
de chats (Toxocara cati) ou, encore plus rarement, de larves de nématodes d’animaux
sauvages à l’origine de syndromes cliniquement proches. Chez le chien adulte, les larves
sont en situation d’impasse parasitaire, comme chez l’homme. Mais, chez les chiennes
gestantes, les larves contractées avant la gestation, peuvent soit devenir adultes dans le
tube digestif, soit être transmises par voie transplacentaire ou par la lactation aux chiots. Un
cycle parasitaire complet se déroule chez les chiots de moins de 3 mois, non vermifugés,
aboutissant à la présence d’œufs dans les selles. L’homme se contamine en ingérant des
œufs embryonnés dans le milieu extérieur avec de la terre (géophagie), de l’eau ou des
aliments souillés par les déjections des chiots. Ce sont donc surtout les jeunes enfants qui
sont infectés (aires de jeu, bacs à sable) (figure 1).
Le taux de prévalence est dans les pays industrialisés de 2 à 5 % en milieu urbain, de 37 %
en milieu rural. Il est très élevé en milieu tropical : il a été noté à 86 % chez les enfants de
moins de 15 ans à Sainte-Lucie et à 92,8% chez l’adulte à La Réunion (étude très ancienne).
3.1) Les formes majeures comprennent le syndrome de larva migrans viscérale (LMV), la
toxocarose oculaire et la toxocarose neurologique.
- la toxocarose oculaire est due à une seule larve, donc est unilatérale, révélée par une
baisse de l’acuité visuelle de l’œil atteint,
- la toxocarose neurologique est due à une infection du système nerveux central, elle est
rare, elle se traduit par une épilepsie, une méningo-encéphalite, une myélite, une
encéphalopathie, une méningo-radiculite, une méningo-myélite. Des cas de méningites à
éosinophiles ont été rapportés.
3.2) Les formes mineures réalisent la toxocarose commune, souvent asymptomatique (dite
occulte ou cachée) révélée alors par une hyperéosinophilie sanguine ou avec une
symptomatologie discrète faite d’asthénie, de prurit isolé ou éruptions prurigineuses, de
douleurs de l’hypocondre droit (comme dans le cas présenté).
Chez l'adulte, la toxocarose peut revêtir des masques tout à fait atypiques, notamment
respiratoires avec des opacités alvéolo-interstitielles diffuses simulant un « lâcher de
ballons ».
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(ELISA ou EIA) qui détecte les anticorps d’isotype IgG dirigés contre les TES-Ag (ELISA-
TES IgG). La sensibilité du TES-Ag est supérieure à 90 % et la spécificité est de 90 à 95 %.
Néanmoins, il a été signalé des réactions croisées avec les sérums des sujets atteints de
stongyloïdose ou de trichinellose. La technique du Western blot ou immunoempreinte EI
montre deux bandes de faible masse moléculaire (24-35 kDa) hautement spécifiques pour
la toxocarose. Grâce à ces deux bandes, le Western blot est un examen plus spécifique de
la toxocarose que l’ELISA et apporte la confirmation du diagnostic.
Enfin, pour l’HAS, la mise en évidence de larves de T. canis dans les biopsies des tissus
infectés et le diagnostic de toxocarose par amplification génique ne sont pas des éléments
nécessaires au diagnostic.
Dans le cas présenté, le traitement prescrit a été l'albendazole. Il a entraîné une guérison
clinique et biologique à un mois de suivi.
Ce malade vit en France à la campagne, a plusieurs chiens irrégulièrement vermifugés et il
s’est probablement infecté chez lui avant son séjour au Cameroun.
Un cas de larva migrans viscérale avec atteinte hépatique a été rapporté en 2017 chez un
homme de 61 ans vivant à La Réunion. La toxocarose était associée à un purpura auto-
immun thrombocytopénique (TIP) dû à la présence d'auto-anticorps anti-ADAMTS13. Il s’agit
d’un cas unique de LVM et de TIP « simultanés » qui a permis aux auteurs de discuter les
relations entre les antigènes d’helminthes et l’immunité.
6. La prophylaxie de la LMV repose sur la vermifugation des chiots à 15 jours d’âge, puis
tous les mois jusqu’à six mois. Il faut interdire aux chiens les aires de jeux et les bacs à
sable.
Références
- Magnaval J.F., Michault A., Calon N., Charlet J .P. Epidemiology of human toxocariasis in
La Réunion. Trans. R. Soc. Trop. Med. Hyg.,1994, 88, 531-533.
- Touze J.E., Peyron F, Malvy D. Asthénie avec hyperéosinophilie. Médecine Tropicale au
quotidien. 100 cas cliniques. Format Utile. Editions Varia, mars 2001, pp 134-137.
- Pelloux H., Faure O. Toxocarose de l’adulte. Rev. Med. Interne, 2004, 25, 201-206.
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