Vous êtes sur la page 1sur 6

Musique du Moyen-Âge

La réforme carolingienne
Chant grégorien

I. La réforme carolingienne
Carolingiens > Charlemagne, Carolus Magnus en latin.

Règne de Charlemagne : 768 – 800 – 814. En 800 il se fait couronner Empereur de l'occident à Aix-la-Chapelle. Son
territoire englobe alors la France, une grande partie de l'Allemagne actuelle, le nord de l'Italie et le nord de l'Espagne.

Charlemagne décide d'unifier la langue, l'éducation, l'écriture, la religion, l'administration de cet énorme territoire. Au
IXème siècle, les moyens de communication à distance ne peuvent passer que par une personne physique qui transmet
les messages. Il veut améliorer la circulation des personnes, des idées, des informations. Charlemagne, qui ne sait ni lire
ni écrire et dont la langue maternelle n'est pas le latin, (c'est un guerrier et un très bon homme politique) s'entoure des
conseillers de différents domaines afin de décider d'une langue commune pour tous. (à la chute de l'Empire Romain au
Vème siècle, l'unification de l'Europe s'était effrité).

L'écriture : la minuscule caroline.


La religion : le christianisme avait été accepté par Constantin en 313 et de nombreux territoires avaient été par la suite
christianisés.
→ tout ceci doit être mis en place via l'éducation. Création d'écoles, surtout liées aux monastères (ou aux cathédrales).
L'éducation s'ouvre aussi aux femmes dans les couvents. L’Empereur ne pense pas à une démocratisation de la culture,
l'éducation est réservée à l'élite.

Un des conseillers de Charlemagne pour les questions d'éducation est Alcuin de York, un anglais. L'Empereur et lui
pensent à une nouvelle organisation de la liturgie, des offices religieux. Ils cherchent alors des autorités religieuses du
passé pour servir de symboles et pour mettre en place ses réformes. Il se tournent ainsi vers l'autorité de Grégoire le
Grand dont les années de pontificat ont eu lieu entre 590 et 604. Ils font donc venir des musiciens et des religieux de
Rome afin de renforcer leur légitimité.

Sa réforme n'arrive cependant pas à unifier totalement les cultures de ce grand territoire.

Chant grégorien / Chant Romano-Franc

Le chant, comme la langue, va être un mélange d'importation romaine et de tradition locale franque.

II. La notation musicale


À cette époque, la notation musicale n'existe pas.
Isidore de Séville est un contemporain de Gregoire le Grand, théoricien de la musique : « Les sons sont oubliés dès
qu'ils sont joués car ils ne peuvent pas être retenus. ».

1. La notation neumatique
UN neume > du grec neuma ou pneuma, souffle.

Notation diastématique / adiastématique > du grec diastema, intervalle.


Au Xème siècle, notation adiastématique : quelqu'un qui ne connaît pas déjà la mélodie ne peut pas utiliser la notation.
→ La notation a une fonction d'aide-mémoire car culture de transmission orale.

Un neume peut indiquer qu'il est plus long ou plus court que le précédent, mais il n'indique pas de durée en lui-même.

2. Neumes de St Gall
Abbaye très importante au Moyen Age. Grande école : bibliothèque, scriptorium.

3. Notation diastématique
Guido d'Arezzo, XIème siècle. Invente une écriture qui permet de lire des intervalles.
Système de portées à pointe sèche. Ce n'est qu'au XIIème siècle qu'on colore ces portées.

→ permet de faire un parallèle entre la notation diastématique et la notation adiastématique afin de lire les neumes sans
portées. Certains répertoires n'ont malheureusement pas été copiés avec le nouveau système, on est donc incapable de
déchiffrer ces anciennes partitions.

Ce n'est qu'à partir de l'invention de ce système que l'unification musicale de l'Empire de Charlemagne peut vraiment
avoir lieue.

Micrologus, 1025-1028, G. d'Arezzo. Il y donne des noms à chacune des notes de la gamme (solmisation). C'est un
pédagogue, il veut que les enfants apprennent la musique plus vite. Il y décrit aussi les techniques de compositions de la
polyphonie.
(les manuscrits conservés représentent seulement 10 % de la production de l'époque)

Le premier recueil de chant avec une portée date ainsi de 1070 environ.

(la notation diastématique ne représente plus vraiment des neumes) Tout ce qui est chanté sur une même syllabe est un
neume.
III. Les modes – Octoechos
Huit modes, mais seulement quatre notes finales.
Les modes authente explorent la zone plutôt aiguë de la gamme, les modes plagal la zone grave.
La dominante est la note importante, c'est celle sur laquelle on va réciter. La finale est la note sur laquelle on termine un
morceau.

Les huit modes sont pensés comme des ambiances, des couleurs différentes.

1er mode Re authete : RE – la


2ème mode Re plagal : RE – fa
3ème mode Mi authente : MI – do
4ème mode Mi plagal : MI – la
5ème mode Fa authente : FA – do
6ème mode Fa plagal : FA – la
7ème mode Sol authente : SOL – re
8ème mode Sol plagal : SOL – do

♪ Les tons de la musique, ensemble Gilles Binchois. Mélodies du IXème siècle qui ont été copiées plus tard avec la
notation diastématique → a permi aux chanteurs de retrouver les mélodies de ces textes anciens.
1) Mode de Re authente. Quinte juste.
2) Mode de Mi authente.
3) Mode de Fa authente. Tierce majeure. Demi-ton qui se trouve juste en-dessous de la finale.
4) Mode de Sol authente. Le rapport entre la finale et la note juste en-dessous est d'un ton, très différent que le Fa.

IV. La psalmodie
Plusieurs couches de répertoire grégorien :
- chant pour une communauté importante
- chant pour un petit groupe de chanteurs
- chant pour solistes

Pour comprendre l'origine du plain chant, il faut se pencher sur le livre des psaumes qui se trouve dans l'ancien
testament. Il y a en tout 150 psaumes. Ce sont des textes qui peuvent avoir une forme poétique mais sans rimes.

Texte fondateur très important qui fait la régulation et l'ordonnance de ce chant des psaumes : règle de Saint
Benoît, fondateur de l'ordre bénédictine. Il y dicte les règles de la vie quotidienne pour les moines et décrit en détails
chaque office (à quel moment de la journée ? quel chant correspond à ce moment ?). La règle bénédictine va être
observée par tous les différents monastères.

Les 150 psaumes sont ainsi à répartir dans les offices de la journée et de la semaine, de telle sorte que le livre
soit entièrement chanté dans la semaine (un moine passe entre 6 et 7h par jour à chanter). Cette organisation s'appelle la
psalmodie. Psalmodier signifie « chanter les psaumes ». La notation n'existe pas au VIème siècle (seulement à partir du
Xème s.), on ne sait donc pas à quoi ressemblent les chants de cette période.

La psalmodie peut se faire de trois manières :


- directe
- antiphonale
- responsoriale

1. La psalmodie directe
C'est la manière la plus simple et la plus ancienne de psalmodier. On confie le chant à un soliste ou à un groupe
de chanteurs et la composition des chanteurs reste la même du début à la fin du psaume. Elle peut être extrêmement
complexe si elle est chantée par un soliste qui peut alors ajouter des ornements.
La psalmodie directe est la plus ancienne des trois manières de psalmodier. Les deux suivantes ne sont pas
forcément arrivées l'une avant l'autre.

2. La psalmodie antiphonale
Il existe une formule de récitation pour chaque mode. Les formules sont apprises par cœur par transmission
orale. N'importe quel psaume peut être chanté sur chacun des modes. Dans un livre médiéval on ne va donc pas noter la
mélodie, seulement le texte. Les fidèles ne connaissent pas tous les psaumes.

Document 1
Il s'agit d'un verset de psaume qui a été choisi pour jouer le rôle du refrain. Celui-ci s'appelle une antienne. On la
répète au début et à la fin et même parfois après chaque verset de psaume. Les versets du psaume sont alternés entre
deux groupes du chœur. À chaque fois que l'antienne est reprise, tout le monde chante.

Écoute
O rex gloriae.

3. la psalmodie responsoriale
À nouveau, on choisit un verset pour servir de refrain. Celui-ci s'appelle un répons. Toute la schola cantorum
(groupe de chanteurs très bien formés) chante ce refrain. Les versets sont pour leur part chantés par un soliste sur une
mélodie très ornée. Cette psalmodie est beaucoup exigeante musicalement que les précédentes. Le répons est
systématiquement repris après chaque verset, s'il y en a plusieurs. Ce travail sur les psaumes est plus libre que pour les
précédentes psalmodies, la musique commence à prendre le dessus et on peut ainsi décider de chanter moins de versets,
de ne pas chanter le psaume en entier.
La schola cantorum doit être présente dans chaque monastère, mais son niveau peut diverger selon les
institutions.

Document 2
Répons chanté par la schola + verset chanté par le soliste.
Ici la reprise du répons ne se fait pas en entier, mais seulement à partir de l'endroit indiqué par l’astérisque (parfois le
répons est aussi repris en entier).

Écoute
Psalmodie responsoriale « deus enim firmavit ». Réelle virtuosité vocale.

V. Répertoires locaux
L'unification de l'empire de Charlemagne provoque la construction d'un répertoire grégorien/romano-franc. La
réforme de Charlemagne est difficile à adopter car la tradition orale enseigne un répertoire complet pour une année
entière et des répertoires locaux existent déjà. Il faudrait donc oublier l'ancien répertoire au profit d'un nouveau. Ce
processus peut prendre dix ans. Quelques documents ont laissé des traces de ces répertoire regionaux, locaux qui ont
ensuite été oubliés, effacés, perdus au profit du répertoire grégorien.
(le tempérament a changé aux alentours de la période baroque, on ne peut donc pas savoir exactement sur quel
tempérament il faut chanter ce répertoire)

1) Le répertoire Ambrosien
Répertoire chanté à Milan. Il a mené une extrême résistance envers le nouveau répertoire grégorien. Saint
Ambroise est un évêque du IVème siècle important pour cette ville qui a mis en place de nombreux chants et hymnes.
Ce répertoire a survécu jusqu'à l'imprimerie et même jusqu'à aujourd'hui où il est encore pratiqué à Milan.

2) Le répertoire Vieux-romain
Répertoire très mystérieux, malgré les recherches musicologiques il reste des questions de base à élucider. Cinq
manuscrits situés dans la ville de Rome du Vème siècle. Identifiés dans les années 1950, textes qui sont les mêmes que
dans le répertoire grégorien, mais dont les mélodies sont totalement différentes. Aucun musicologue n'a réussi à
déterminer une origine claire de ces chants. Cependant, ces manuscrits seraient postérieurs à la réforme carolingienne.

3) Le répertoire Bénéventain
Typique du sud de l'Italie, de Bénéven, duché du peuple des Lombard. Ce répertoire a survécu jusqu'au XIIIème siècle.
Il a ensuite été oublié.

4) Le répertoire Hispanique
Chanté dans les régions qui correspondent à l'Espagne et au portugal d'aujourd'hui. Ce répertoire a été noté en entier
(notation non diastématique) aux Xème et XIème siècles. On en a donc des traces mais on ne peut pas les déchiffrer.

5) Le répertoire Gallican
Typique des églises en Gaule avant la réforme carolingienne. Celui-ci s'est réuni avec le chant romain pour former le
chant grégorien. Il a donc survécu à travers ce répertoire centralisé.

VI. L'année liturgique


Trois différents cycles qui tournent (une journée, une semaine, une année) et qui permettent de parcourir l'ensemble des
psaumes. L'année liturgique commence quatre semaines avant Noël (l'Avent). + Cf document 3 : structure générale de
l'année liturgique.

Temporal : fêtes liées à la vie du Christ (Avent, temps de Noël, temps ordinaire, Carême, temps de la Passion, temps de
Pâques (Ascension, Pentecôte), temps ordinaire)
Sanctoral : fêtes liées à la vie des Saints (St Marc, St Jean)

Chaque jour il y a deux types de célébrations pour la messe :

1) la Messe
Le propre
- Introït (A) : chanté au début de la messe pour entrer dans l'Église
- Graduel (R) : après la lecture. Très orné.
- Alleluia (R) ou trait (D) : chanté juste avant l'Évangile. L'alleluia est un chant joyeux et extrêmement orné et il ne
correspond pas à tous les moments de l'année (par exemple pour le Carême qui donne les textes de la passion). On
chante alors le trait, chanté par un soliste et extrêmement orné aussi.
- Offértoire (R) : quand on regarde la forme musicale de ce chant, c'est clairement une psalmodie responsoriale.
- Communion (A) : chant simple

L'ordinaire
Style plus simple car chanté par tous les fidèles (pas de psalmodie car les textes ne sont pas des psaumes)
- Kyrie
- Gloria
- Credo
- Sanctus/Benedictus
- Agnus Dei

Cf document 4 pour l'enchaînement des deux répertoires dans le déroulement de la Messe

2) Office des heures


Les moines, ou les sœurs, se retrouvent à plusieurs reprise dans la journée dans le choeur de l'Église pour
chanter et prier.
Laudes, le matin.
Quatres courts offices répartis dans la journée, les petites heures : Prime (attachée aux laudes), Tierce (9h), Sexte et
None.
Vèpres en fin d'après midi (Magnificat)
Complies, office très court pour conclure la journée
Matines, office le plus long de la nuit (1h). Les moines interrompent leur sommeil vers 2/3h du matin pour chanter des
psalmodies très complexes.

VII. Livres liturgiques


Deux types de livre : livres de la messe et livres de l'office.
→ Livres de la messe : graduel (contient tous les chants), missel (contient des chants mais aussi toutes les lectures et
prières)
→ Livres de l'office : antiphonaire (contient les chants à chanter pendant la journée), bréviaire (textes dont on a besoin
pour les offices, prières et lectures)

Vous aimerez peut-être aussi