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Thèse
présentée devant
pour obtenir
le grade de docteur
Par
Sabrina LEMAIRE
Jury
Membre invité :
TROADEC Pierre Président de la Commission Environnement de l’AIMCC
Cette thèse a été préparée au Laboratoire des Sciences de l’Habitat de l’Ecole Nationale des Travaux
Publics de l’Etat et au Centre Scientifique et Technique du Bâtiment, département Développement
Durable, division Environnement / Durabilité.
ECOLES DOCTORALES
2005
SIGLE ECOLE DOCTORALE NOM ET COORDONNEES DU RESPONSABLE
AVANT-PROPOS
Cette thèse a été réalisée au Laboratoire des Sciences de l’Habitat (LASH) de l’Ecole
Nationale des Travaux Publics de l’Etat (ENTPE), et au Centre Scientifique et Technique
du Bâtiment (CSTB) de Grenoble, dans le département Développement Durable, division
Environnement/Durabilité.
Je remercie vivement Monsieur Gérard Guarracino, directeur du Département Génie Civil et
Bâtiment (DGCB) de l’ENTPE, ancien directeur du LASH, et Monsieur Jean-Luc Chevalier,
chef de la division Environnement/Durabilité, de m’avoir accueillie pour réaliser mes travaux
de thèse au sein de leur laboratoire et de leur division respectivement.
Que Monsieur Gérard Guarracino soit également remercié pour la direction de mes
recherches, pour ses remarques et suggestions, ainsi que pour le temps qu’il m’a consacré
durant la réalisation de cette thèse.
Mille mercis à Monsieur Jacques Chevalier, docteur au CSTB, et co-directeur de ma thèse,
pour son encadrement au quotidien, son attention et sa disponibilité bienveillantes, son
soutien et les nombreux conseils et encouragements qu’il m’a prodigués tout au long de mes
travaux de recherche.
Que tous les professionnels du bâtiment et de la construction qui ont accepté de répondre au
questionnaire que j’ai développé pendant ma thèse, ou qui ont bien voulu m’accorder un
entretien, soient également remerciés ; leurs réponses et leur intérêt pour mes travaux m’ont
beaucoup aidée.
J’exprime ma sincère sympathie à tous ceux que j’ai eu l’occasion de côtoyer au CSTB, et au
LASH, et en particulier (en plus des personnes déjà citées précédemment) Danielle Bonnet,
Emmanuel Jayr, Gaël Mendoza, Nathalie Leyssieux, Sophie Cuenot, Marcel Rubaud, Jean-
Charles Maréchal, Gérard Révirand, Michèle Ghaleb, Nicolas Rossignol, Julien Hans, Pierre
Verri, Bruno Chevalier, Hébert Sallée, Christiane Pezzetti, Monique Prat, Jérôme Laurent,
Daniel Quénard, Claude Pompéo, François Olive, Daniel Giraud, François-Dominique
Menneteau, Jérôme Lair, Audrey Havez, Josée Laplante, Claude Martin, Elisabeth
Fourneaux, Jean-François Buisson, Vincent Galiano, Jean-Claude Pavier, José Cournet,
Emmanuel Durand, Stéphane Lebourg, Pierre Michel, et Monique Darnand, personnes qui,
grâce à leur gentillesse et leurs compétences diverses, ont permis que cette thèse se déroule
dans les meilleures conditions possibles.
-3-
Avant-propos
Je pense chaleureusement à tous les doctorants (docteurs maintenant pour la plupart d’entre
eux) et stagiaires que j’ai eu le plaisir de rencontrer au CSTB : Maha, Claudia, François,
Nicoleta, Patrick, Marine, Claire, Emmanuelle, Mélanie, Karine, Rémi, Naris, Guillaume
Co., Anne, Guillaume Ca., Marceline, Hélène, Charlotte, Céline, avec une mention spéciale
pour Aurélie, ma voisine de bureau pendant ces trois années.
Enormes mercis à ma Maman, avec plein d’amour, pour tous ses conseils, sa présence, son
soutien, son dévouement, ses relectures, explications et suggestions tout au long de ma
scolarité, et ces derniers mois en particulier. Je pense aussi beaucoup à mes deux sœurs que
j’adore, Sandrine et Gwennaëlle, et à leurs amis respectifs, Vincent et Nicolas, qui me
permettent de passer des moments de détente inoubliables. Je souhaite également adresser une
pensée affectueuse à toutes les personnes que j’apprécie, famille, belle-famille, et amis, à qui
j’aimerais pouvoir consacrer plus de temps. Je pense beaucoup aussi à ceux qui ne sont plus là
et qui me manquent.
Ma dernière pensée est pour Ludovic. Merci infiniment pour ce que tu es, pour tout ce que tu
fais, pour ton aide, ton soutien et pour tout le bonheur que tu m’apportes depuis que nous
nous connaissons.
-4-
Résumé
RESUME
Cette thèse est consacrée à la réalisation d’un outil d’aide au choix des produits de
construction en fonction de leurs caractéristiques environnementales et sanitaires.
Cet outil, destiné aux professionnels du bâtiment, est fondé sur le principe et les méthodes
d’analyse multicritère. L’échelle de l’étude est celle du composant du bâtiment, afin que la
comparaison soit effectuée sur la base de performances techniques similaires. L’outil réalisé
utilise les données environnementales et sanitaires des produits de construction issues des
FDES au format de la norme NF P01-010. Il a été appliqué au composant « mur », ainsi qu’à
la comparaison de six revêtements de sol. Les résultats obtenus montrent qu’il est possible
d’aboutir à un classement des solutions constructives d’un composant. Ce classement peut
dépendre des pondérations et des méthodes d’agrégation choisies, il doit donc être complété
par des analyses de sensibilité. L’outil nécessite à présent d’être testé par les acteurs du
bâtiment.
-5-
Summary
SUMMARY
This thesis aims at developing a decision-aid tool that compares building products according
to their environmental and health characteristics.
This tool is intended for building actors. It is based on the methodology and methods of multi-
criteria analysis. The scale of the study is the one of the building component in order that the
comparison is achieved using the same technical functions. The developed tool uses data from
the EPDs in the French standard NF P01-010 format. It was applied to the “wall” component
and to the comparison of six floorings. The obtained results have shown that it is possible to
produce a ranking of building options of a component. This ranking may depend on the
weighting and aggregation methods used. It has also to be completed by some sensitivity
analyses. The tool now requires to be tested by the building actors.
-6-
Sommaire
SOMMAIRE
Glossaire 11
Introduction générale 15
1 Introduction _____________________________________________________________ 17
-7-
Sommaire
1 Introduction _____________________________________________________________ 73
-8-
Sommaire
-9-
Sommaire
Bibliographie 177
Annexes 199
- 10 -
Glossaire
GLOSSAIRE
Tous les mots soulignés dans les définitions sont également définis dans le glossaire.
• Action
Politique, programme, projet ou candidat faisant l’objet de l’analyse multicritère [Maystre et al.,
1994].
• Action potentielle
Action provisoirement jugée possible par un des intervenants au moins ou présumée comme telle par
l’homme d’étude, en vue de l’aide à la décision [Maystre et al., 1994].
Exemple : le choix d’une solution constructive particulière peut être considéré comme une action
potentielle.
• Agrégation
Opération permettant d’obtenir des informations sur la préférence globale entre les actions
potentielles, à partir d’informations sur les préférences par critère [Maystre et al., 1994].
Exemple : la somme pondérée est une méthode d’agrégation.
• Aide à la décision
Activité de celui [l’homme d’étude] qui, prenant appui sur des modèles clairement explicités mais non
nécessairement complètement formalisés, aide à obtenir des éléments de réponses aux questions que se
pose un intervenant dans un processus de décision, éléments concourant à éclairer la décision et
normalement à prescrire, ou simplement à favoriser, un comportement de nature à accroître la
cohérence entre l’évolution du processus d’une part, les objectifs et le système de valeurs au service
desquels cet intervenant se trouve placé d’autre part [Roy, 1985].
• Analyse multicritère
Analyse ayant pour but d’expliciter une famille cohérente de critères permettant d’appréhender les
différentes conséquences d’une action [Maystre et al., 1994].
• Catégorie d’impact
Classe représentant les points environnementaux étudiés dans laquelle les résultats de l’analyse de
l’inventaire du cycle de vie peuvent être affectés [ISO 14042, 2000].
Exemple : changement climatique [ISO/TR 14047, 2003].
• Composants du bâtiment
Nous définissons un composant du bâtiment comme une partie de ce bâtiment à laquelle sont associées
une ou plusieurs performances ; c’est un assemblage de matériaux et produits de construction.
Exemples : un mur, une toiture, une dalle, etc.
• Critère
Expression qualitative ou quantitative de points de vue, objectifs, aptitudes ou contraintes relatives au
contexte réel, permettant de juger des actions potentielles [Maystre et al., 1994]. Un critère est doté
d’un indicateur permettant de le calculer, d’une unité, d’une échelle (ordinale ou cardinale), d’une
structure et d’un sens de préférence, d’après [Pictet et Bollinger, 1999].
Exemple : une catégorie d’impact, munie d’un indicateur de catégorie d’impact, et de facteurs de
caractérisation peut représenter un critère, lorsqu’il s’agit de comparer et choisir des solutions
constructives en fonction de leurs impacts environnementaux.
- 11 -
Glossaire
• Cycle de vie
Phases consécutives et liées d’un système (produits, matériaux, bâtiment) de l’acquisition des matières
premières ou de la génération des ressources naturelles à l’élimination finale [ISO 14040, 1997].
• Danger
Menace susceptible d’engendrer des nuisances plus ou moins graves pour l’homme et/ou
l’environnement (d’après [EPE, 1998]). Pour les produits de construction, le danger peut provenir de
leurs propriétés physico-chimiques, ou de celles de leurs éléments constitutifs, d’après [EPE, 1998].
Exemple : la présence de plomb dans une peinture est un danger potentiel pour la santé humaine.
• Environnement
La norme ISO 14050 [ISO 14050, 1998] définit l’environnement comme le milieu dans lequel un
organisme fonctionne, incluant l’air, l’eau, la terre, les ressources naturelles, la faune, la flore, les êtres
humains et leurs interactions. Dans cette norme, le milieu inclut également l’intérieur du bâtiment et le
mot organisme peut aussi se comprendre comme « ouvrage ou bâtiment ou produit de bâtiment ».
• Exposition
Il s’agit du contact entre l’homme et/ou l’environnement et le vecteur de danger (contact pouvant avoir
lieu dans certaines conditions d’usage ou dans certaines circonstances), d’après [EPE, 1998].
Exemple : une peinture qui s’écaille dans un logement peut engendrer une exposition par ingestion des
jeunes enfants.
• Facteur de caractérisation
Facteur établi à partir d’un modèle de caractérisation qui est utilisé pour convertir les résultats de
l’analyse de l’inventaire du cycle de vie en unité commune d’indicateur de catégorie d’impact [ISO
14042, 2000].
Exemple : Potentiel de réchauffement planétaire pour chaque gaz à effet de serre (kg d’équivalents
CO2/kg de gaz) [ISO/TR 14047, 2003].
• Impact environnemental
Toute modification de l’environnement, négative ou bénéfique, résultant totalement ou partiellement
des activités, produits ou service d’un organisme [ISO 14050, 2002].
Exemple : émissions de CO2 dans l’atmosphère liées au chauffage.
• Matériau de construction
Elément provenant d’un site naturel ou d’une installation de transformation, et qui sert in situ à la
fabrication de parties d’ouvrages, d’après [Le Teno, 1995].
Exemples : granulat, ciment, sable, etc.
• Modèle
Schéma qui, pour un champ de questions, est pris comme représentation d’une classe de phénomènes,
plus ou moins habilement dégagés de leur contexte par un observateur pour servir de support à
l’investigation et/ou à la communication [Roy, 1985].
- 12 -
Glossaire
• Normation
Opération qui consiste à rapporter des résultats d’analyse du cycle de vie à une échelle normée en vue
d’en faciliter la compréhension.
Généralement, l’échelle retenue est l’équivalent habitant européen ou français. Cependant, selon
l’échelle de l’étude, la normation peut être faite par rapport à toute échelle pertinente, d’après
[ADEME, 2005] et [ISO 14042, 2000].
Par extension, nous appellerons normation toute opération qui consiste à rapporter les profils
environnementaux et sanitaires à une échelle commune, ou à les rendre adimensionnels.
• Nuisance
Préjudice pour la santé d’un organisme ou l’environnement, d’après [Recyconsult, 2003].
• Processus de décision
Succession d’étapes au cours de laquelle les multiples options, qui vont conditionner la décision
globale, sont définies [Maystre et al., 1994].
• Produit de construction
Elément fabriqué en usine et incorporé dans un bâtiment sans subir de transformation importante,
d’après [Le Teno, 1995].
Exemples : plaque de plâtre, fenêtre, tuyau, isolant, etc.
• Risque
Un risque (sanitaire ou environnemental) correspond au croisement, c'est-à-dire à la mise en relation,
des données relatives aux dangers (propriétés intrinsèques) d’un élément et à l’exposition (contact)
d’un organisme à cet élément. L’évaluation d’un risque sanitaire correspond à la détermination des
effets sur la santé d’une exposition d’individus à des matériaux ou à des situations dangereuses
(d’après [EPE, 1998]).
Exemple : une peinture au plomb qui s’écaille dans un logement correspond à un risque sanitaire de
saturnisme pour les jeunes enfants.
• Solution constructive
Nous définissons une solution constructive comme une réalisation possible d’un composant du
bâtiment, pour une unité fonctionnelle donnée, c'est-à-dire une association particulière de matériaux et
produits de construction.
Exemple : pour le composant « mur », une solution constructive peut correspondre à un mur en béton,
ou à un mur en terre cuite.
• Unité fonctionnelle
Performance quantifiée d’un système (produits, matériaux, bâtiment) destinée à être utilisée comme
unité de référence dans une analyse de cycle de vie [ISO 14040, 1997] et [ISO 14041, 1998]. En
général, une unité fonctionnelle comporte une unité de quantité, une unité de temps, et une unité de
performance, d’après [ISO/TR 14049, 2000].
Exemple : pour une peinture, coloration de 20 m² pendant 5 ans d’un mur, avec une opacité de 98%
[ISO/TR 14049, 2000].
- 13 -
Sigles et notations
• Organismes
Note : les exemples seront présentés en italique et encadrés dans le corps de ce mémoire.
- 14 -
Introduction générale
Introduction générale
Actuellement, le Développement Durable est le maître mot, qui se veut intervenir dans bon
nombre de décisions nationales et internationales, soucieuses de préserver l’environnement.
Expression employée pour la première fois en 1980 par l’UICN (Union Internationale pour la
Conservation de la Nature), cette notion a ensuite été reprise par de nombreuses personnes et
instances, acteurs de l’environnement ou non [Jollivet, 2001]. Le rapport Brundtland, en 1987,
définit le développement durable comme « un développement qui répond aux besoins du
présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres
besoins ». La Commission des Communautés Européennes a par la suite précisé l’expression :
le développement durable est « une politique et une stratégie visant à assurer la continuité
dans le temps du développement économique et social, dans le respect de l’environnement, et
sans compromettre les ressources naturelles indispensables à l’activité humaine » [Brodhag et
al., 2004].
La politique actuelle qui tend à promouvoir un développement durable dans de nombreux
domaines [IFEN, 2003], entraîne et encourage les professionnels du bâtiment à réfléchir sur la
qualité environnementale et sanitaire des produits, ouvrages et services qu’ils gèrent, comme
en témoignent les travaux récents sur la réglementation thermique, l’éclairage, le confort, la
gestion des déchets du bâtiment. Le bâtiment, notamment pendant ses phases de vie en œuvre
et de fin de vie, est en effet responsable de nombreux impacts (consommation d’eau,
d’énergie, production de déchets, qualité de l’air intérieur).
Un bâtiment est un système complexe, dépendant de son environnement. Il ne s’agit pas d’un
simple assemblage de matériaux et produits de construction, mais d’une construction
raisonnée dont tous les éléments – intérieurs et extérieurs – sont en interaction. La qualité
environnementale et sanitaire d’un bâtiment nécessite par conséquent de prendre en compte
de nombreuses données, souvent indisponibles, quantitatives mais aussi qualitatives,
imprécises, et incertaines, et ceci, dans un contexte multi-acteurs et multi-objectifs. Cette
qualité environnementale et sanitaire se traduit par une réduction de ses « pressions » sur
l’environnement (besoins en matières premières et énergies, rejets de matières polluantes),
tout en offrant à ses utilisateurs un intérieur sain et confortable, et en respectant certaines
contraintes économiques. C’est ainsi que le concept de Haute Qualité Environnementale
(HQE®) du cadre bâti s’est développé et se généralise, de la conception à la déconstruction,
en passant par la construction, la réhabilitation, la maintenance. Il s’agit de « règles »
environnementales et sanitaires de conception et de construction, déclinées en 14 cibles, ayant
pour objectifs de réduire les charges du bâtiment sur son environnement extérieur, et
d’améliorer son environnement intérieur [Association HQE, 2005a].
En croisant les différentes cibles de la démarche HQE®, le choix des matériaux et produits
de construction apparaît comme crucial pour atteindre ces objectifs.
- 15 -
Introduction générale
- 16 -
Chapitre 1
Le choix des produits de construction en fonction de leurs
caractéristiques environnementales et sanitaires :
Etat de l’art et apports de l’analyse multicritère
Partie 1 Introduction
1 Introduction
Ce chapitre bibliographique est, dans un premier temps, consacré à l’état de l’art du choix des
produits de construction en fonction de leurs caractéristiques environnementales et sanitaires.
Une première partie définit alors les domaines abordés par cet état de l’art, c’est-à-dire
l’environnement, la santé, le bâtiment et les produits de construction, afin d’une part, de bien
présenter ces différents domaines et d’autre part, d’analyser leur possible conciliation. Une
deuxième partie aborde les obligations et recommandations environnementales et sanitaires
relatives aux bâtiments et aux produits de construction, puis expose les démarches existantes
ainsi que les outils opérationnels susceptibles de permettre aux acteurs de la construction de
prendre en compte ces obligations et recommandations. L’analyse de l’existant montre que
l’intégration de l’environnement et de la santé dans le choix des produits de construction
nécessite une approche multicritère des impacts environnementaux et sanitaires des produits
de construction, approche qui est par ailleurs disponible, notamment dans la norme française
NF P01-010. Cependant, cette analyse met également en évidence la difficile utilisation et
appropriation de cette approche.
Ce constat nous conduit ainsi, dans un second temps, à l’apport possible des démarches et des
méthodes d’analyse multicritère pour intégrer dans le choix des produits de construction leurs
caractéristiques environnementales et sanitaires. La troisième partie de ce chapitre expose
alors les principes théoriques de l’analyse multicritère, leur application possible dans le choix
des produits de construction, et dresse finalement un arbre de choix des méthodes d’analyse
multicritères existantes.
La réunion des trois premières parties de ce chapitre nous permet, dans un dernier temps,
d’établir les premières propriétés du cahier des charges de l’outil d’aide au choix des produits
de construction que nous souhaitons développer.
Remarque :
Le corps de ce premier chapitre est particulièrement important. Nous avons en effet choisi de
présenter, avec la précision qui s’impose, l’ensemble des domaines concernés par notre étude,
afin de l’éclairer.
- 17 -
Chapitre 1
Nous avons alors décidé de ne citer que les impacts environnementaux qui correspondent bien
à notre définition et nous les présentons ci-dessous, sous forme de liste descriptive, sans
notion hiérarchique.
• Le réchauffement global
Depuis un siècle, la température moyenne sur Terre aurait augmenté de 0,5°C et le niveau des
mers a monté de 1 à 3 millimètres par an (en raison notamment de la fonte des glaces et des
glaciers liée au réchauffement de la planète). Ces valeurs sont compatibles avec un
accroissement de l’effet de serre lié aux rejets de l’homme mais il n’est pas possible
d’affirmer que ceux-ci en soient la cause.
Mise à part la vapeur d’eau, responsable de 60% de l’effet de serre, les principaux gaz
responsables sont le gaz carbonique (CO2 : 30 % de l’effet), le méthane (CH4), le protoxyde
d’azote (N2O), les Chlorofluorocarbones (CFC) et Hydrochlorofluorocarbones (HCFC). La
concentration de ces gaz dans l’atmosphère ne cesse d’augmenter (excepté pour les CFC que
nous aborderons dans le paragraphe suivant), notamment depuis le début de l’ère industrielle.
- 18 -
Partie 2 Environnement, santé, bâtiment et produits de construction
Malgré la ratification par de nombreux pays du Protocole de Kyoto (1997), dont le principal
objectif est la réduction de ces gaz à effet de serre, il semblerait que la tendance demeure à la
hausse, notamment en raison du temps de séjour de ces gaz dans l’atmosphère, et de l’essor
industriel (en cours ou à venir) de nombreux pays en voie de développement.
Bien qu’aucune valeur précise ne soit affirmée dans les perspectives d’évolution du
réchauffement global, les spécialistes prévoient une augmentation de la température continue
d’ici la fin du siècle, qui s’accompagnera d’importants changements climatiques [Vernier,
2003], [EPE, 1996], [Bertrand, 2001], [IFEN, 2002], [Recyconsult, 2003].
• La diminution de la biodiversité
La diversité du monde vivant s’exprime à tous les niveaux : diversité génétique, diversité des
espèces et de leur population, diversité des systèmes écologiques. La connaissance
scientifique fait de plus en plus apparaître la biodiversité comme une propriété fondamentale
du monde vivant qui lui permettrait d’évoluer de lui-même et de s’adapter aux variations de
son environnement. La disparition d’une espèce est irréversible, et entraîne souvent, en
cascade, celle des espèces qui en dépendent pour leur alimentation, leur protection ou leur
reproduction. Au contraire, elle peut parfois engendrer la prolifération d’une espèce qui se
retrouve ainsi privée de son prédateur, ce qui entraîne des déséquilibres et présente également
des risques pour les écosystèmes [Cotonat, 1996], [Recyconsult, 2003].
• La pollution de l’eau
La pollution de l’eau concerne à la fois les eaux océaniques et les eaux continentales. La
pollution des eaux provient d’éléments soit chimiques, soit biologiques, soit physiques.
Chaque forme de pollution induit des effets particuliers plus ou moins préjudiciables. La
communauté scientifique s’accorde à reconnaître aujourd’hui que la pollution chimique serait
la plus importante et la plus préoccupante. Elle a pour origine quatre facteurs de nature
distincte : les pesticides, les métaux lourds, les hydrocarbures et les fertilisants [EPE, 1996],
[Recyconsult, 2003].
- 19 -
Chapitre 1
L’eau est indispensable à la vie des hommes, des animaux et des végétaux. Sur les continents,
elle est apportée par la pluie qui s’alimente de l’évaporation à la surface des océans.
Globalement, 60% du volume des précipitations s’évaporent directement ou par transpiration
des végétaux, 11% s’infiltrent profondément dans le sol et nourrissent les eaux souterraines,
24% ruissellent et retournent rapidement à la mer par les rivières avec des crues plus ou moins
importantes [EPE, 1996].
L’homme fait un large usage de l’eau (mille fois plus que son besoin alimentaire) et qui porte
sur 5% du volume des précipitations : pour les besoins domestiques (12% du total des
besoins), pour les besoins industriels (22% des besoins) dont une part importante concerne le
refroidissement des centrales thermiques et nucléaires, pour les besoins agricoles (près de 70
% des consommations) avec des surfaces irriguées qui s’accroissent de 1% par an [De
Bartillat et Retallack, 2003].
Les rejets ainsi que l’exploitation de la ressource en eau altèrent sensiblement la qualité des
eaux de certaines rivières, voire de certains bassins et peuvent entraîner des nuisances
olfactives et visuelles. Plus globalement, on constate une détérioration lente et générale des
eaux naturelles. Jusque dans les années 1970, les eaux usées domestiques ou industrielles
étaient en général directement rejetées dans les rivières, sans traitement. Les rivières
traversant les grandes villes sont très vite devenues des égouts à ciel ouvert et les écosystèmes
aquatiques ont été fortement détériorés [EPE, 1996].
• La pollution de l’air
Nous entendons par pollution de l’air, la présence dans l’air de polluants, mais également les
nuisances sonores, qui peuvent être générés par toutes sortes d’activités humaines, et en
particulier la transformation et la consommation d’énergie (industrie, transports, construction,
etc.) [EPE, 1996], [Bertrand, 2001], [IFEN, 2002].
Outre les gaz à effet de serre que nous avons déjà traités, un certain nombre de composés sont
considérés comme polluants. Il s’agit plus particulièrement du monoxyde de carbone (CO),
des oxydes d’azote (NOx), du dioxyde de soufre (SO2), l’ozone photochimique (ou
troposphérique), mais également, dans des atmosphères plus confinées, des composés
organiques volatils (COV), du radon, des fibres minérales synthétiques, et des micro-
organismes. La réduction des émissions de certains de ces composés est l’objet du Protocole
de Göteborg (1999), ratifié par une trentaine de pays, dont la France, et qui est entré en
vigueur le 17 mai 2005.
L’effet des émissions est souvent circonscrit à l’échelle locale ou régionale. Cependant, leur
accumulation entraîne des répercussions au niveau global où l’on note par exemple une
augmentation sensible du monoxyde de carbone, des hydrocarbures et des oxydes d’azote.
Seul le dioxyde de soufre enregistre une diminution grâce aux efforts déjà engagés.
• La désertification
La désertification se définit comme la transformation d’une région en une zone sèche, aride et
inhabitée. Elle apparaît sous le double jeu de phénomènes climatiques et d’actions humaines.
La désertification induit la perte quasi-totale des potentialités du milieu naturel [EPE, 1996].
- 20 -
Partie 2 Environnement, santé, bâtiment et produits de construction
- 21 -
Chapitre 1
A titre d’exemple, le temps de séjour dans l’atmosphère de certains polluants, comme le CO2
ou les CFC, est de plusieurs décennies, et par conséquent, il est impossible de connaître
précisément les quantités qui seront présentes dans l’atmosphère dans 50 ans, même si les
émissions sont contrôlées, voire supprimées (cas des CFC) [EPE, 1996], [De Bartillat et
Retallack, 2003]. D’autre part, certains polluants peuvent participer à plusieurs impacts
environnementaux, c’est notamment le cas des HCFC, qui sont à la fois responsables de la
destruction de la couche d’ozone et de l’augmentation de l’effet de serre [Bertrand, 2001].
Enfin, compte tenu du fonctionnement naturel « en chaîne » de l’environnement, les impacts
environnementaux et sanitaires peuvent rapidement s’engendrer les uns les autres. Par
exemple, les émissions de gaz acides peuvent engendrer des pluies acides, qui à leur tour vont
entraîner des déforestations. Or, la diminution du nombre d’arbres est associée à une
diminution de l’activité photosynthétique, et par conséquent, à une diminution du stockage de
gaz carbonique, et participe ainsi à l’augmentation de l’effet de serre. Par conséquent, il est
souvent difficile d’évaluer précisément les impacts environnementaux et sanitaires, et de
pouvoir identifier tous leurs effets [Vernier, 2003], [Cotonat, 1996]. Ces impacts demeurent
souvent des impacts « potentiels ». Tout comme il est difficile d’attribuer précisément ces
impacts aux activités humaines [EPE, 1996].
Malgré la complexité des phénomènes qui interviennent, de nombreux travaux sont engagés
pour définir des indicateurs d’impacts [SETAC, 1992], [ISO 14040, 1997], [SETAC, 2001],
[Guinée, 2002], [ISO/TR 14047, 2003], afin de pouvoir évaluer, au moins partiellement les
impacts environnementaux et sanitaires. Si de nombreux indicateurs représentatifs et
significatifs ont pu être définis pour l’environnement, de nombreux progrès restent encore à
faire pour les problèmes sanitaires. Parmi les principales catégories d’impacts
environnementaux munies d’indicateurs d’impacts, nous pouvons citer : l’épuisement des
ressources non renouvelables, les consommations d’énergie et d’eau, le potentiel de
réchauffement global, le potentiel d’acidification atmosphérique, la production de déchets.
- 22 -
Partie 2 Environnement, santé, bâtiment et produits de construction
Nous pensons cependant qu’il est délicat et dangereux d’attribuer une valeur à
l’environnement, et encore plus à la santé. En effet, outre l’aspect peu éthique que peut revêtir
cette démarche, notamment dans les pays où une vie humaine ne représente presque rien, le
risque de voir se généraliser les permis de polluer (celui qui a les moyens de payer a le droit
de polluer) est grand et représente une réelle menace pour le respect de l’environnement et de
la santé.
• La phase « Préparation » :
La phase « Préparation » concerne le maître d’ouvrage (MO) en premier lieu. Il doit :
- établir la faisabilité de l’opération (contenu, opportunité),
- choisir l’implantation de l’opération (terrain, contraintes environnementales),
- choisir éventuellement une assistance technique (AMO),
- définir le programme : exigences techniques, environnementales et sanitaires, délais
d’exécution, estimation des coûts, définition des acteurs et leurs responsabilités,
principes de fonctionnement et d’utilisation du bâtiment, etc.,
- établir le concours de concepteurs : architectes et Bureaux d’Etudes (BE),
- choisir la maîtrise d’œuvre (MOe).
- 23 -
Chapitre 1
• La phase « Conception » :
La phase de conception est réalisée par l’équipe de conception (MOe, architectes, BE), et elle
se décompose souvent en quatre étapes :
- l’esquisse,
- l’avant-projet sommaire (APS),
- l’avant-projet définitif (APD),
- l’étude de projet (PRO), où la conception générale de l’ouvrage est définie et
approuvée par le MO.
La phase de conception est une phase pendant laquelle un grand nombre de choix sont définis,
en particulier le parti architectural, la thermique et l’acoustique du bâtiment, les matériaux et
produits de construction. Les futures performances du bâtiment sont en partie établies lors de
cette phase, notamment ses performances environnementales et sanitaires.
• La phase « Chantier »
Lors de cette phase, tous les acteurs précédemment cités sont concernés. Elle se décline en
différentes étapes :
- la préparation du chantier,
- la gestion (technique, administrative et financière) du chantier, qui fait également
intervenir le coordinateur SPS (Sécurité et Protection de la Santé), préalablement
désigné par le Maître d’ouvrage,
- la réception des travaux.
Cette phase peut éventuellement être complétée par l’aménagement intérieur, qui fait
intervenir un architecte d’intérieur.
- 24 -
Partie 2 Environnement, santé, bâtiment et produits de construction
Nous avons décrit les phases opérationnelles d’un bâtiment de manière linéaire, mais tel n’est
pas souvent le cas. Il arrive très fréquemment que les phases, jusqu’à la phase « chantier », se
chevauchent, ce qui permet parfois d’affiner les exigences, mais ne simplifie pas le
déroulement de l’opération. Chacune de ces phases comporte des exigences, des contraintes et
ne fait pas toujours intervenir les mêmes acteurs, ce qui ne fait qu’augmenter la complexité du
système bâtiment.
- 25 -
Chapitre 1
• Les impacts environnementaux et sanitaires plus partiellement liés aux matériaux et produits
de construction sont les suivants, d’après la norme NF P01-020-1 (2005) :
- les consommations d’énergie et les émissions de déchets pendant la phase construction
(ou mise en œuvre) du bâtiment, qui peut dépendre des habitudes et savoir-faire des
entreprises ou des artisans qui réalisent la construction,
- les consommations d’énergie et d’eau lors de la vie en œuvre du bâtiment,
- la production de déchets d’activité lors de la vie en œuvre du bâtiment,
- les émissions liées à l’utilisation d’appareils électroménagers lors de la vie en œuvre
du bâtiment.
Comme nous pouvons le constater, les choix effectués lors de la phase opérationnelle
« Conception » décrite précédemment, et notamment le choix des matériaux et produits de
construction, peuvent conditionner un certain nombre d’impacts environnementaux et
sanitaires du bâtiment. Il paraît donc logique de s’intéresser aux impacts environnementaux et
sanitaires générés par les produits de construction. Mais les choix thermiques et acoustiques
effectués pourront également influencer le comportement des usagers et par conséquent une
partie des impacts environnementaux et sanitaires du bâtiment pendant sa vie en œuvre.
En 2003 en France, d’après [ADEME, 2004], le secteur du bâtiment était responsable de 19%
des émissions de gaz à effet de serre (à savoir le CO2, le CH4, le N2O, les hydrofluorocarbures
– HFC – les perfluorocarbures – PFC – l’hexafluorure de soufre – SF6 – gaz pris en compte
par le protocole de Kyoto), et de 25% des émissions nationales de CO2, 28% des émissions de
monoxyde de carbone, 12% des émissions de SO2, 22% des émissions de composés
organiques volatils non méthaniques. En 1999, la production annuelle de déchets était de 31
millions de tonnes (dont 65% de déchets inertes, 30% de déchets non dangereux et 5% de
déchets dangereux), contre 215 millions, tous secteurs confondus (exceptés les déchets
agricoles qui représentent 400 millions de tonnes), soit une contribution du bâtiment de 15%,
d’après [ADEME, 2004], [http://www.senat.fr/rap/o98-415/o98-4151.html, consulté en 2005].
Outre ces aspects plutôt orientés « problèmes environnementaux », les problèmes sanitaires
liés au bâtiment ne sont pas à négliger. Depuis quelques années, le plomb, le monoxyde de
carbone, le radon, les légionelles et l’amiante sont des polluants qui sont de plus en plus
communément associés au bâtiment, notamment lors de sa vie en œuvre, et ont déjà fait des
victimes [www.sante.gouv.fr, consulté en 2005], [METL, 2002], [FFB, 2000]. Ce sont en
particulier les produits de construction et les équipements (peintures et canalisations au
plomb, chaudières, isolants) qui contiennent ces polluants et/ou les émettent dans l’air
intérieur et dans l’eau sanitaire, au cours de leur vie (lors de dégradations, ou de défauts
de fonctionnement), ou qui constituent un terrain propice au développement de ces
pollutions (canalisations favorisant la stagnation de l’eau, matériaux conservant l’humidité,
etc.) [Kur, 2004], [METL, 2002], [FFB, 2000], [EPE, 1998]. Certaines substances, telles que
l’amiante ou le plomb, sont dorénavant réglementées (Code de la santé publique)
[www.legifrance.gouv.fr, consulté en 2005]. Mais si ces réglementations peuvent aisément
s’appliquer aux constructions neuves, leur application pour les bâtiments existants demeurent
beaucoup plus complexe (accessibilité des locaux, traçabilité des substances, coûts des
travaux, etc.) [METL, 2001], [METL, 1999].
- 26 -
Partie 2 Environnement, santé, bâtiment et produits de construction
Parmi ces acteurs, on peut citer [Le Teno, 1995] : les maîtres d’ouvrage, les maîtres d’œuvre,
les architectes, les paysagistes, les bureaux d’étude, les fabricants de matériaux et produits de
construction, les entreprises, les artisans, les opérateurs de réseaux, les bureaux de contrôle,
les usagers ou maîtres d’usage comme on l’entend de plus en plus fréquemment, les sociétés
d’entretien et de maintenance, etc. On dénombre par exemple jusqu’à 150 acteurs sur un
projet de bâtiment d’habitation comportant une dizaine de logements.
2.3 Conclusions
Nous avons présenté les domaines de l’environnement et de la santé d’une part, du bâtiment et
des produits de construction d’autre part, tout en essayant de mettre en exergue la difficulté de
concilier ces domaines. Compte tenu de leur complexité respective, ainsi que des nombreux
acteurs concernés, de leurs habitudes, de leurs volontés, de leurs idées reçues, la prise en
compte de l’environnement et de la santé dans la réalisation d’un bâtiment n’est pas évidente.
Elle nécessite que le maître d’ouvrage définisse, dès la phase préparation de l’ouvrage, et
surtout lors de la phase « Conception » ses objectifs en termes d’environnement et de santé
pour le bâtiment, et qu’il s’assure, tout au long des autres phases, de leur bonne application
par l’ensemble des acteurs de l’opération. Cette prise en compte nécessite donc que les
impacts environnementaux et sanitaires soient bien compris, intégrés et acceptés par
l’ensemble des acteurs de la construction, qui devront dans bien des situations, changer leurs
pratiques et habitudes pour pouvoir satisfaire les objectifs du maître d’ouvrage.
- 27 -
Chapitre 1
Chacune de ces six exigences essentielles est accompagnée d’un document interprétatif (DI)
établi par la Commission européenne en collaboration avec des experts européens. Ces
documents interprétatifs établissent le lien entre les exigences formulées pour l’ouvrage et des
caractéristiques pertinentes des produits de construction.
Sur la base de ces documents interprétatifs, la Commission européenne mandate deux
organismes (le CEN – Comité Européen de Normalisation – et l’EOTA – European
Organisation for Technical Approval) d’élaborer des spécifications techniques harmonisées.
Le but ultime est le marquage CE [DGUHC, 2003] et ainsi, la libre circulation des produits
au sein de l’union européenne [www.dpcnet.org, consulté en 2005].
- 28 -
Partie 3 Règlementations, recommandations et réponses existantes
Le document interprétatif relatif à cette exigence essentielle insiste sur les aspects spécifiques
suivants :
- l’environnement intérieur (qualité de l’air, humidité),
- l’alimentation en eau,
- l’évacuation des eaux usées,
- l’évacuation des déchets solides,
- l’environnement extérieur.
Concernant la protection contre le bruit, qui peut parfois être associé à un véritable problème
sanitaire, le document interprétatif spécifique à l’exigence essentielle n°5 doit être consulté
[CSTB, 1994].
Pour chacun des aspects spécifiques susmentionnés, le document interprétatif précise la
provenance possible des risques susceptibles de se présenter, et impliquant le non respect de
l’exigence essentielle. Il indique par ailleurs les spécifications techniques qu’il est nécessaire
de connaître, à la fois pour l’ouvrage et les matériaux et produits de construction, afin de
maîtriser ces risques. A titre d’exemple, pour un environnement intérieur sain du point de vue
de la qualité de l’air, il est exigé de limiter l’utilisation de matériaux et produits de
construction à ceux qui satisfont des normes de performances acceptables en ce qui concerne
l’émission dans l’air de polluants, tels que les composés organiques volatils (COV), les
formaldéhydes, etc.
Ces différentes spécifications constituent une première base de réflexion pour les
caractéristiques environnementales et sanitaires des produits considérés, afin que le bâtiment
respecte l’environnement et la santé des usagers. Néanmoins, à l’heure actuelle, l’exigence
essentielle n°3 n’est pas encore prise en compte dans l’élaboration des spécifications
techniques harmonisées [AFNOR, 2005].
- 29 -
Chapitre 1
La stratégie de la politique intégrée des produits est axée sur les trois étapes du processus de
décision qui conditionnent l’impact environnemental du cycle de vie des produits, c'est-à-dire
[CCE, 2001] :
- l’application du principe pollueur-payeur dans la fixation des prix des produits,
qui peut se traduire par exemple par l’intégration des coûts environnementaux dans les
prix, abaissement du taux de TVA pour les produits plus respectueux de
l’environnement, application du principe de responsabilité du producteur ;
- le choix éclairé des consommateurs, qui implique tout d’abord une sensibilisation de
ces consommateurs au respect de l’environnement, une transparence et une
intelligibilité des informations disponibles sur les produits, le développement des
informations, des labels écologiques, des déclarations environnementales, etc. ;
- la conception écologique des produits, qui nécessite notamment le développement
des Analyses de Cycle de Vie (série de normes ISO 14040), l’intégration de
l’environnement dans les processus de conception (éco-conception), une participation
normative importante, etc.
La Politique Intégrée des Produits permet d’amorcer un changement de mentalité pour
la conception de tous les produits, et par conséquent, des produits de construction : la
réduction des impacts environnementaux générés par les produits tout au long de leur cycle de
vie doit être une priorité. Le souhait de mettre à contribution la recherche et le développement
pour trouver de nouvelles solutions permettant de satisfaire les besoins de l’être humain en
consommant moins de ressources et en produisant moins d’effets négatifs sur l’environnement
en est la preuve.
Cette politique nécessite la mise en place de normes nationales et internationales pour pouvoir
être développée, appliquée et généralisée, ce qui n’est pas le cas actuellement.
- 30 -
Partie 3 Règlementations, recommandations et réponses existantes
3.1.6 Conclusions
Les principales actions menées, à l’échelle nationale ou internationale, pour intégrer les
dimensions environnementales et sanitaires du Développement Durable dans le domaine du
bâtiment ont été présentées. L’objectif poursuivi par ces réglementations ou recommandations
concerne la diminution des impacts environnementaux et sanitaires des bâtiments, et celui de
ses éléments constitutifs, les matériaux et produits de construction.
- 31 -
Chapitre 1
Quelles sont alors les démarches entreprises par les acteurs de la construction pour tenir
compte de ces réglementations ou recommandations ?
3.2.1 Eco-conception
L’éco-conception (ou écodesign) est une démarche volontaire qui consiste à prendre en
compte l’environnement tout au long du cycle de vie de l’élément étudié, dès sa phase de
conception ; l’élément étant généralement un produit, mais il peut également être un bâtiment.
L’éco-conception a ainsi pour objectif d’ajouter aux composantes habituelles de la conception
d’un élément – faisabilité technique, maîtrise des coûts, attente des clients, sécurité
d’utilisation – la prise en compte des nuisances environnementales et sanitaires
potentiellement engendrées par cet élément [Peuportier, 2003], [Millet, 2003].
En repensant la démarche de conception des éléments, l’objectif prioritaire de la démarche est
de minimiser les impacts environnementaux de ces éléments, tout en assurant une qualité
égale. Très largement encouragée par la Politique Intégrée de Produits, l’éco-conception est
fondée sur trois principes [ADEME, 2003] :
- une prise en compte du cycle de vie entier de l’élément : il s’agit d’étudier tous les
impacts par étape du cycle de vie de l’élément (extraction des matières premières,
fabrication, transports, distribution – ou mise en œuvre –, consommation – ou vie en
œuvre – et gestion de fin de vie) ;
- une vision multi-composants de l’élément étudié : en plus de l’élément, il est
nécessaire de prendre en compte tous les co-produits, les emballages, et les pièces de
rechange associés à l’élément étudié ;
- une approche environnementale multicritère, qui consiste à considérer le maximum de
paramètres environnementaux susceptibles d’être modifiés par l’élément étudié.
- 32 -
Partie 3 Règlementations, recommandations et réponses existantes
- 33 -
Chapitre 1
3.2.2.5 Conclusions
La démarche HQE® est une approche « bâtiment ». La cible 2, qui concerne le choix intégré
des matériaux et produits de construction, est intimement liée à la majorité des autres cibles
de la démarche, selon nous. C’est grâce à un choix raisonné et judicieux des matériaux et
produits de construction qu’il sera possible de construire des bâtiments de Haute Qualité
Environnementale. D’autre part, la démarche HQE® est une démarche volontaire qui ne
possède pas encore un cadre réglementaire suffisamment strict, ce qui peut engendrer certains
« détournements » de la démarche, donnant lieu à des opérations HQE autoproclamées qui ne
respectent pas suffisamment l’environnement et la santé. Certes, comme le précise [Hetzel,
2003], compte tenu du caractère évolutif que représente la qualité environnementale et
sanitaire, une démarche réglementée, en figeant les concepts, risquerait de freiner les
améliorations possibles des référentiels, et par conséquent, de limiter à terme la démarche.
Toutefois, il peut être prévu une certification évolutive, c'est-à-dire qui serait révisée
régulièrement en fonction des progrès technologiques ou des avancées normatives.
- 34 -
Partie 3 Règlementations, recommandations et réponses existantes
Les écolabels, dont l’écolabel européen et la marque NF environnement, sont peu adaptés
pour fournir une information générale environnementale et sanitaire des produits de
construction.
D’une part, leurs critères de sélection dépendent de chaque famille de produits, ce qui ne
répond pas à une approche « produit » susceptible d’aboutir à l’évaluation globale des
bâtiments.
- 35 -
Chapitre 1
D’autre part, les écolabels, et notamment l’écolabel européen, ont pour vocation d’être très
sélectifs : 30 % au maximum des produits d’une famille présents sur le marché au moment de
la sélection des critères doivent pouvoir répondre aux exigences fixées pour l’attribution de
l’écolabel [Commission européenne, 2001]. Cette sélectivité risque par conséquent d’aboutir à
des listes noires de produits, qui ne permettront pas aux concepteurs des ouvrages d’effectuer
leur propre hiérarchisation de leurs priorités environnementales et sanitaires, et leur propre
choix des produits.
- 36 -
Partie 3 Règlementations, recommandations et réponses existantes
- 37 -
Chapitre 1
3.2.5 CESAT
Le CESAT est le Comité Environnement-Santé de l’Avis Technique, instance transversale qui
alimente tous les groupes spécialisés de la commission chargée de délivrer les Avis
Techniques. Il a été créé pour fournir des éléments d’information sur les caractéristiques
environnementales et sanitaires des produits et systèmes de construction innovants.
Le CESAT développe actuellement une attestation environnementale et sanitaire pour les
produits déjà titulaires d’un avis technique [CSTB/DDD, 2003]. Cette attestation correspond à
un examen qui complète l’appréciation de l’aptitude à l’emploi d’un produit ou système
innovant (son Avis Technique), pour mettre en valeur ses caractéristiques environnementales
et sanitaires.
Cet examen, volontaire, porte sur la déclaration environnementale du produit ou système, au
format de la norme NF P01-010 pour les aspects environnementaux, et sur les évaluations des
émissions chimiques (COV et formaldéhyde), des émissions radioactives, des émissions
olfactives (facultatifs), et de l’aptitude des produits à favoriser ou non la croissance de micro-
organismes, résultant d’essais en laboratoire, pour les aspects sanitaires, le cas échéant en
fonction des informations fournies par la fiche de données de sécurité (FDS) du produit ou du
système [CSTB/DDD, 2003]. Pour obtenir une attestation par le CESAT, certaines
informations sanitaires doivent obligatoirement être fournies et/ou étudiées, contrairement aux
informations sanitaires demandées par la norme NF P01-010 pour réaliser une FDES. Nous
nous appuierons ainsi sur les recommandations du CESAT pour définir nos critères sanitaires,
ce que nous repréciserons au chapitre 2.
Nous avons insisté précédemment sur le fait que c’est le maître d’ouvrage qui doit porter
l’intégration de l’environnement et de la santé dans les opérations qu’il mène. Mais il faut
qu’il puisse avoir accès rapidement aux informations dont il a besoin pour réaliser
efficacement cette intégration. Le développement d’une base de données sur les
caractéristiques environnementales et sanitaires des produits de construction (INIES) nous
semble être une première étape vers la simplification des démarches du maître d’ouvrage et
des concepteurs en ce qui concerne la prise en compte des impacts environnementaux et
sanitaires dans une opération de construction. Néanmoins, cette étape est nécessaire mais non
suffisante. En effet, le fait de rassembler des données permet de simplifier l’accès à ces
données, mais pas de rendre leur utilisation efficace et rigoureuse. C’est d’ailleurs ce constat
qui est à l’origine des interrogations des acteurs du bâtiment sur le choix des produits de
construction : il est important que la base de données INIES soit utilisée à bon escient, elle ne
constitue pas en elle-même une aide au choix des produits de construction. Qu’en est-il alors
des outils informatisés existants ?
- 38 -
Partie 3 Règlementations, recommandations et réponses existantes
Le tableau 1 présenté ci-après propose une synthèse – qui s’appuie sur la typologie définie par
Chatagnon (1999) – des principaux outils existants, dont le développement est achevé ou en
cours d’achèvement, en précisant leurs principales différences. Nous avons conservé les
termes employés par les outils en ce qui concerne les notions de critères, impacts, indicateurs,
etc., même si nous considérons qu’ils ne sont pas toujours appropriés (cf. paragraphe 1.1.1.1
de ce chapitre).
Concernant les éléments distinctifs des outils, nous avons proposé six rubriques qui nous ont
paru les plus significatives pour les analyser, à savoir :
- les fonctions principales : quelle est la vocation de l’outil ? Evaluation, comparaison,
aide au choix ?
- l’échelle : à quel système est destiné l’outil ? Bâtiment ou produit de construction ? ;
- les critères : quels sont les critères utilisés par l’outil pour répondre à la fonction ?
Critères environnementaux, critères économiques ?
- l’agrégation : les critères sont-ils totalement agrégés ou restent-ils inchangés ?
- les résultats : sous quelle forme analytique se présentent-ils ? Des notes, des valeurs
quantitatives ?
Nous n’avons pas gardé la rubrique « cadre humain et opérationnel » définie dans la typologie
proposée par Chatagnon (1999) car tous les outils cités sont des outils destinés aux maîtres
d’ouvrage et aux concepteurs en phase « conception » d’un ouvrage. La rubrique
« approche », utilisée dans la typologie proposée par Chatagnon (1999), et fondée sur les
travaux de Le Teno (1995, 1996), n’a pas été conservée non plus, car elle ne présente pas
d’intérêt pour l’étude des outils que nous réalisons.
- 39 -
Outils et pays Source Fonctions principales Echelle « Critères » Agrégation Résultats
[Chatagnon, 1999]
EQUER Evaluation de la qualité 12 indicateurs Valeurs quantitatives
[Peuportier, 2003] Bâtiment Aucune
(France) environnementale environnementaux des indicateurs
[Peuportier et al., 2005]
Nombreux impacts
TEAMTM Produit et Valeurs quantitatives
[Ecobilan, 2004] Analyse de cycle de vie environnementaux Aucune
(France) bâtiment des impacts
(variables)
EcoQuantum Evaluation de la qualité Bâtiment 4 indicateurs d’impacts
[Peuportier et al., 2005] Totale Note unique
(Pays-Bas) environnementale résidentiel environnementaux
Greencalc Evaluation de la qualité Bâtiment 4 indicateurs d’impacts
[Chevalier, 2003] Totale Note unique
(Pays-Bas) environnementale tertiaire environnementaux
12 indicateurs d’impacts
BEES Comparaison et aide au
[BFRL-NIST, 2004] Produit environnementaux et 2 Totale Note unique
(Etats-Unis) choix
critères économiques
Méthode
Comparaison et aide au 6 indicateurs d’impacts Valeurs quantitatives
« ATHENA » [Athena Institute, 2005] Bâtiment Aucune
(Canada)
choix environnementaux des indicateurs
Evaluation
PAPOOSE environnementale et Nombreuses cibles Valeurs quantitatives
[Chatagnon, 1999] Bâtiment Aucune
(France) économique, et environnementales et coûts des indicateurs
comparaison
Analyse de cycle de vie Valeurs quantitatives
BeCost Bâtiment et Critères environnementaux
[Peuportier et al., 2005] et évaluation Aucune des critères et des
(Finlande) produit et coûts
économique coûts
GBTool
4 thèmes environnementaux,
(Canada et [Chevalier, 2003] Evaluation Totale par
Bâtiment 3 thèmes techniques et Notes par thème
groupement de [GBTool, 2005] environnementale thème
pays) sociaux
Evaluation
ENVEST 12 indicateurs d’impacts Valeurs quantitatives
[Peuportier et al., 2005] environnementale et Bâtiment Aucune
(Royaume-Uni) environnementaux des indicateurs
économique
11 critères principaux Valeurs quantitatives
ESCALE [Chatagnon, 1999] Evaluation de la qualité
Bâtiment (environnementaux, Aucune ou qualitatives et
(France) [Peuportier et al., 2005] environnementale
énergétiques et sanitaires) points
BREEAM [Chatagnon, 1999] Evaluation Points et classes de
Bâtiment 9 critères environnementaux Totale
(Royaume-Uni) [BRE, 2005] environnementale certification
Outils et pays Source Fonctions principales Echelle « Critères » Agrégation Résultats
7 indicateurs
EcoSoft Valeurs quantitatives
[Peuportier et al., 2005] Analyse de cycle de vie Bâtiment environnementaux et Aucune
(Autriche) des indicateurs
énergétiques
Evaluation économique, 1 indicateur économique, 1
OGIP Bâtiment et Totale par
[Peuportier et al., 2005] énergétique et indicateur énergétique et 1 Notes par indicateur
(Suisse) produit indicateur
environnementale indicateur environnemental
Indicateurs économiques,
Evaluation économique, Bâtiment et
LEGEP énergétiques, Valeurs quantitatives
[Peuportier et al., 2005] énergétique et produit Aucune
(Allemagne) environnementaux, par étape des indicateurs
environnementale (neuf)
du cycle de vie
3 indicateurs de qualité Note unique
[JSBC, 2005a] Evaluation environnementale et sanitaire (score global
CASBEE
[JSBC, 2005b] environnementale Bâtiment du bâtiment, 3 indicateurs Totale d’efficience
(Japon)
[JSBC, 2004] (et sanitaire) d’impacts environnementaux environnementale du
du bâtiment bâtiment)
5 catégories
Evaluation
LEED© [U.S. Green Building Bâtiment environnementales et Totale par Certification
environnementale
(Etats-Unis) Council, 2005] (et son site) sanitaires, et 1 catégorie catégorie (à 4 niveaux)
(et sanitaire)
technique (bonus)
Tableau 1 : Synthèse des principaux outils opérationnels existants
D’un point de vue pratique, tout d’abord, nous trouvons que les outils ne sont pas toujours
adaptés aux acteurs de la construction, en ce qui concerne les facilités d’utilisation et la
compréhension des termes employés. Un acteur qui a peu de notions environnementales et
sanitaires peut vite se retrouver perdu en utilisant de tels outils, et par conséquent, mal
interpréter les résultats qu’il obtient.
D’un point de vue conceptuel, à présent, nous avons pu constater qu’aucun outil ne propose
une évaluation globale, c'est-à-dire une évaluation qui prend en compte l’ensemble des
contraintes techniques, architecturales, économiques, environnementales et sanitaires du
bâtiment lors de toutes les phases de son cycle de vie. Ce constat montre qu’une approche
multicritère globale automatisée à l’échelle du bâtiment est actuellement difficilement
réalisable.
Parmi tous les outils étudiés, aucun ne permet de comparer et par conséquent d’effectuer des
choix constructifs, que ce soit à l’échelle du bâtiment, ou à l’échelle des produits de
construction.
Par ailleurs, très peu d’outils s’intéressent aux produits et matériaux et construction
directement, que ce soit au niveau de l’échelle d’évaluation – qui est plutôt l’échelle du
bâtiment dans de nombreux cas – ou au niveau des impacts environnementaux et sanitaires
considérés – qui correspondent souvent aux impacts liés à la vie en œuvre du bâtiment – et
essentiellement donc aux consommations d’énergie et aux rejets de gaz à effet de serre
associés à cette phase.
Pourtant, l’évaluation environnementale et sanitaire des produits de construction nous semble
être une étape inhérente à toute évaluation environnementale et sanitaire satisfaisante d’un
bâtiment : les produits de construction correspondent en effet au contenu en impact du
bâtiment et ils influencent considérablement les émissions de celui-ci lors de sa vie en œuvre.
D’autre part, compte tenu des réglementations de plus en plus strictes concernant les
consommations énergétiques, et les émissions de gaz à effet de serre, qui sont l’un des
secteurs les plus pénalisants d’un point de vue environnemental pour les bâtiments
actuellement [ADEME, 2004], la contribution relative des produits de construction aux
impacts globaux des bâtiments risque de devenir plus importante (pouvant largement dépasser
15% des impacts totaux d’un bâtiment, d’après [Bartels et al., 2003]).
Considérer les impacts environnementaux et sanitaires des produits de construction sur tout
leur cycle de vie est ainsi préférable à une prise en compte des produits en tant que simple
consommation de ressources non énergétiques, c'est-à-dire en ignorant leur contribution aux
autres impacts environnementaux et sanitaires.
Nous avons également noté que certains outils considéraient peu d’impacts environnementaux
(ou critères d’évaluation), dans un souci de simplification sans doute.
- 42 -
Partie 3 Réglementations, recommandations et réponses existantes
D’un point de vue technique, pour finir, les méthodes d’agrégation des différents critères
sont, lorsqu’elles existent, des méthodes d’agrégation totale, donc très compensatoires – ce
qui est très discutable lorsqu’il s’agit d’environnement et de santé [Rousseaux, 1993],
[Chevalier, 1999], [Benetto, 2002], mais nous reviendrons sur ce point dans la partie 4 de ce
chapitre. D’autre part, les différents outils proposent rarement des pondérations, et
lorsqu’elles sont disponibles, elles ne sont pas toujours transparentes et compréhensibles.
Enfin, beaucoup d’outils ne proposent pas de méthode d’agrégation des différents critères
mais un profil environnemental multicritère (plus ou moins quantitatif) des systèmes étudiés,
ce qui ne permet pas non plus d’effectuer facilement des comparaisons des résultats obtenus
[Chevalier, 1999].
3.4 Conclusions
Les nombreuses démarches et outils opérationnels existants mettent en évidence, d’une part,
la nécessaire approche multicritère pour évaluer les produits de construction et les bâtiments
d’un point de vue environnemental et sanitaire, mais d’autre part, la difficile utilisation de
cette approche pour obtenir une vision globale de leurs performances environnementales et
sanitaires. De plus, bien que l’évaluation environnementale et sanitaire des produits sur tout
leur cycle de vie soit recommandée, et malgré l’existence de normes et de démarches
permettant de répondre à cette recommandation, les produits sont souvent considérés, dans les
outils opérationnels, comme des consommations de ressources non énergétiques (flux
matière) ce qui ne peut permettre, selon nous, de les choisir convenablement afin qu’ils
contribuent à l’amélioration des performances environnementales et sanitaires des bâtiments
dans leur globalité.
Une meilleure description ainsi qu’une meilleure utilisation des profils environnementaux et
sanitaires multicritères des produits de construction sont par conséquent nécessaires, que ce
soit à l’échelle même des produits de construction ou à l’échelle des bâtiments.
Nous avons par ailleurs précisé qu’il existe des normes, dont la norme française NF P01-010,
qui ont pour objectif de collecter et de fournir aux prescripteurs et utilisateurs des produits de
construction, des données de même format regroupant les caractéristiques environnementales
et sanitaires de ces produits. Des informations étant disponibles sur les produits, ces normes
pourraient inciter et faciliter un choix des produits de construction en fonction de leurs
caractéristiques environnementales et sanitaires.
Or, ce deuxième objectif ne peut être atteint qu’en mettant en place un outil d’aide au choix
susceptible de comparer de façon rigoureuse et efficace – en utilisant une agrégation
adéquate des données par exemple – les produits, ce que ne permettent actuellement pas les
normes et outils cités précédemment. En effet, pour l’instant, l’agrégation des différentes
données environnementales et sanitaires n’est pas satisfaisante, puisqu’elle est soit absente,
soit totale et par conséquent, peu adaptée aux caractéristiques environnementales et sanitaires.
Pour pallier cette difficulté, nous avons étudié les méthodes possibles d’agrégation des profils
multicritères environnementaux et sanitaires, à savoir les méthodes d’analyse multicritère.
- 43 -
Chapitre 1
Désigner en toutes circonstances la meilleure décision, l’optimum, repose d’autre part, sur
trois hypothèses extrêmement lourdes [Roy et Bouyssou, 1993] :
- la globalité de l’ensemble des actions potentielles (terme défini dans le paragraphe
3.2.3 de ce chapitre), c'est-à-dire que toutes les actions potentielles comprennent tous
les aspects de la question et sont mutuellement exclusives ;
- la stabilité de l’ensemble des actions potentielles, ce qui signifie que l’ensemble des
actions potentielles n’est jamais remis en cause lors de l’étude ;
- la complète comparabilité transitive des actions, ce qui exclut l’incomparabilité des
actions, l’intransitivité de la préférence et de l’indifférence (termes définis au
paragraphe 4.2.3.3 de ce chapitre).
- 44 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
Or, dans la réalité, les actions peuvent être complémentaires, et partielles. De nouvelles idées
apparaissent souvent en cours d’étude, modifiant ainsi l’ensemble des actions potentielles. Et
enfin, la décision étant un processus humain, des préférences ne peuvent pas toujours être
énoncées, et de plus, l’indifférence et la préférence peuvent être intransitives (cas du paradoxe
de Condorcet) [Schärlig, 1985] et [Pomerol et Barba-Romero, 1993].
Les résultats obtenus par les méthodes classiques de la recherche opérationnelle ont ainsi déçu
dans bien des cas. [Schärlig, 1985] précise que le domaine de réussite de la recherche
opérationnelle classique est constitué de tous les problèmes qu’il est possible d’isoler du
système de gestion, tels que la recherche du mélange optimal pour des alliages, le choix de
l’itinéraire le plus efficace pour des tournées de ramassage d’ordures, etc.
Par analogie, le domaine dans lequel la recherche opérationnelle classique a échoué est alors
constitué de toutes les décisions de gestion qu’on ne peut pas isoler de leur contexte, comme
par exemple le choix d’une localisation d’implantation d’une usine d’incinération, le tracé
d’une autoroute, la prise en compte des caractéristiques environnementales et sanitaires d’une
décision.
Choisir d’optimiser, c’est implicitement se placer dans une approche à critère unique.
Or, toute la réalité humaine est « à points de vue multiples » ou encore multicritère. Chaque
acteur d’un processus de décision possède son propre système de valeurs, ses propres critères,
qui peuvent être contradictoires et non commensurables (le simple choix d’un nouveau
véhicule illustre toutes ses notions). Ainsi, toutes les décisions ne peuvent pas être prises
sur la base d’un critère unique, et ceci est d’autant plus vrai lorsque ces décisions font
intervenir plusieurs acteurs : ces décisions nécessitent d’être épaulées par l’analyse
multicritère. En définitive, comme l’indiquent Pomerol et Barba-Romero (1993), l’analyse
multicritère (dont la lente montée a commencé dans les années 1960) a pour elle le réalisme et
la lisibilité, ce sont des atouts importants dans les organisations à l’heure où la complexité des
décisions est reconnue par la plupart des intervenants, même s’ils ne font pas tous preuve de
la même sensibilité vis-à-vis des différents critères. L’analyse multicritère permet donc de
renouveler la recherche opérationnelle classique et d’apporter des réponses que cette dernière
ne pouvait auparavant pas donner de manière satisfaisante.
4.2.1 Optimisation
L’optimisation, que l’on associe communément à la recherche opérationnelle classique,
correspond à la recherche d’un optimum (maximum ou minimum) d’une fonction,
économique généralement [Ben Mena, 2000].
- 45 -
Chapitre 1
Plus précisément, l’analyse multicritère est une analyse ayant pour but d’expliciter une famille
cohérente de critères permettant d’appréhender les différentes conséquences d’une action.
Les termes en italique sont définis au paragraphe 4.2.3 qui suit.
4.2.3.1 Actions
Compte tenu des définitions proposées par Roy (1985) et Vincke (1989), une action
correspond aux « solutions possibles » envisagées dans un processus de décision, c’est
l’élément qui va faire l’objet de la comparaison [Pictet et Bollinger, 1999]. On distingue
plusieurs types d’action [Vincke, 1989], dont :
- l’action potentielle :
Il s’agit d’une action provisoirement jugée possible par un des intervenants au moins ou
présumée comme telle par l’homme d’étude en vue de l’aide à la décision. Par la suite, une
action potentielle sera notée ai ou a, b … et l’ensemble des actions potentielles A ;
- l’action globale :
C’est une action potentielle dont la mise à exécution est exclusive de toute autre action
[Maystre et al, 1994] ;
- l’action partielle ou fragmentaire :
Il s’agit d’une action potentielle dont la mise à exécution n’est pas exclusive de toute autre
action [Maystre et al, 1994].
Lorsque les actions fragmentaires sont indépendantes les unes des autres, il est souvent
préférable de raisonner sur ces dernières plutôt que de raisonner sur leur combinaison en
actions globales, qui rend souvent le problème de décision très complexe [Roy et Bouyssou,
1993]. Par contre, lorsque les actions fragmentaires sont interdépendantes, elles ne peuvent
pas être comparées individuellement, et il est nécessaire de les associer en actions globales
pour comparer des actions vraiment comparables [Maystre et al., 1994], [Pictet, 1996].
Concernant les produits de construction, nous pouvons constater que le choix d’un produit de
construction ne peut représenter qu’une action fragmentaire non indépendante des autres
actions. Si chaque produit de construction peut être envisagé indépendamment par rapport à
ses caractéristiques environnementales et sanitaires (en supposant que l’association de
produits de construction ne puisse entraîner que des sommes d’impacts environnementaux et
sanitaires, et non une multiplication ou une annulation des impacts), il n’en est pas de même
si l’on considère ses performances techniques. En effet, le choix des produits de construction
ne peut pas intervenir indépendamment des performances techniques attendues (résistance
mécanique, propriétés thermiques et acoustiques, etc.) du bâtiment dans lequel ils
interviennent, puisque ces performances sont indispensables à la vie en œuvre de l’ouvrage, et
surtout à la sécurité et au confort des usagers. Les performances techniques d’un produit ne se
traduisent pas directement, dans la majorité des cas, par des performances techniques à
l’échelle du bâtiment. C’est l’association de produits qui permet cette transposition des
performances techniques. Chaque produit ne peut donc pas être comparé individuellement à
un autre produit, ou alors dans de très rares cas (mêmes conditions techniques de mises en
œuvre, mêmes performances techniques).
Il est donc nécessaire pour nous de définir des actions globales, comme le recommande Pictet
(1996) dans de pareilles circonstances.
- 46 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
Une action potentielle (globale ou fragmentaire) est décrite sur la base de ses conséquences,
dont chacune permet d’appréhender une partie de cette action [Maystre et al., 1994].
4.2.3.3 Préférences
Vincke (1989) rappelle que les préférences sont essentielles dans la vie des individus aussi
bien que des collectivités. Leur modélisation constitue une étape indispensable en aide à la
décision. Lorsqu’un individu (décideur) est confronté à la comparaison de deux actions a et b
(éléments de l’ensemble A), il aura alors l’une des trois réactions suivantes :
- préférence pour l’une des deux actions, nous notons aPb si a est préféré à b, et bPa si
c’est l’inverse ; cela signifie que l’une des deux actions est clairement meilleure que
l’autre (tableau 2a) ;
- indifférence entre les deux actions, que nous notons aIb ; cela signifie que les deux
actions sont tellement proches qu’il est difficile de dire que l’une est meilleure que
l’autre (tableau 2b) ;
- incomparabilité, lorsque l’individu refuse ou se trouve dans l’impossibilité de
comparer les deux actions, et que nous notons aRb ; cela signifie que les deux actions
sont tellement différentes l’une de l’autre qu’il est difficile de pouvoir les comparer
(tableau 2c).
En reprenant les exemples proposés par Pictet et Bollinger (1999), nous pouvons dresser les
tableaux suivants :
Critère 1 Critère 2 Critère 1 Critère 2
Action a 10 10 Action a 5 6
Action b 1 1 Action b 6 5
Tableau 2a : Préférence aPb Tableau 2b : Indifférence aIb
Critère 1 Critère 2
Action a 10 1
Action b 1 10
Tableau 2c : Incomparabilité aRb
Tableaux 2 : Relations de préférences élémentaires
- 47 -
Chapitre 1
Si pour deux critères, les situations semblent assez simples, il n’en est pas de même lorsque le
nombre de critères augmente, notamment pour les situations d’indifférence et
d’incomparabilité.
Pour que ces trois relations traduisent effectivement des situations de préférence,
d’indifférence et d’incomparabilité, elles doivent remplir les propriétés suivantes :
• P est asymétrique : si aPb alors on ne peut avoir bPa,
• I est réflexive, c'est-à-dire aIa, et symétrique, à savoir si aIb alors bIa,
• R est irréflexive, et symétrique.
Les trois relations {P, I, R} constituent une structure de préférence sur A si elles ont les
propriétés ci-dessus, et si, étant donné deux éléments quelconque a et b de A, une et une seule
des situations suivantes est vérifiée : aPb, bPa, aIb, aRb [Vincke, 1989].
Toute structure de préférence peut être entièrement caractérisée par la donnée de la relation
binaire S définie par S = P∪I. La relation S est parfois appelée « préférence au sens large »
par opposition avec P, relation de préférence stricte [Vincke, 1989].
Dans ce qui suit, a et b désignent des actions et g(a) et g(b) les évaluations respectives de ces
actions sur une échelle ordonnée. De manière générale, les préférences du décideur vérifient
le modèle suivant :
aPb ⇔ g(a) > g(b) + p
aQb ⇔ g(b) + p ≥ g(a) > g(b) + q
∀ a, b ∈ A
g(b) + q ≥ g(a)
aIb ⇔
g(a) + q ≥ g(b)
- 48 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
4.2.3.5 Critères
Schärlig (1985) propose la définition suivante, que nous retiendrons : un critère, c’est une
référence par rapport à laquelle on mesure les conséquences d’une action. Il se manifeste
par une échelle, continue ou discrète, sur laquelle on peut situer chaque action potentielle dans
un processus de décision. Les catégories d’impacts de la norme NF P01-010 représentent
par exemple des critères dans le choix des solutions constructives (elles sont munies
d’indicateurs de catégories d’impacts et de facteurs de caractérisation).
En d’autres termes, un critère exprime plus ou moins précisément les préférences du décideur
relativement à un attribut donné [Pomerol et Barba-Romero, 1993]. Un critère est donc une
fonction de mesure définie sur A, qualitative ou quantitative, dotée d’un nom, d’une échelle,
d’un sens et d’une structure de préférence, c’est la fonction g précédente. Ce sera :
• un vrai-critère si la structure de préférence sous-jacente est une structure de préordre total ;
• un quasi-critère si la structure de préférence sous-jacente est une structure de quasi-ordre ;
• un pseudo-critère si la structure de préférence sous-jacente est une structure de pseudo-
ordre.
A ces trois types de critères, on peut ajouter le pré-critère et le critère gaussien, qui sont
deux cas particuliers du pseudo-critère [Schärlig, 1985], et qui peuvent notamment servir dans
la méthode d’analyse multicritère PROMETHEE [Brans et al., 1986], [Brans et Mareschal,
2004] que nous aborderons par la suite.
L’analyse multicritère (cf. 4.2.2) fonctionne avec une famille cohérente de critères. Une telle
famille correspond à tout ensemble de critères conforme aux trois exigences suivantes :
- exigence d’exhaustivité : il ne faut pas qu’il y ait trop peu de critères (il ne faut pas
« oublier » de critères).
- exigence de cohésion [Schärlig, 1996] : il doit y avoir cohérence entre les préférences
locales de chaque critère et les préférences globales, c'est-à-dire qu’une action dont la
performance a été diminuée dans un critère ne doit pas se retrouver mieux classée
qu’avant (et réciproquement).
- exigence de non-redondance : il ne faut pas qu’il y ait des critères qui se dupliquent,
donc plus nombreux que nécessaire ; il faut que leur nombre soit tel que la suppression
d’un des critères laisserait une famille qui ne satisfait plus à une au moins des deux
exigences précédentes.
- 49 -
Chapitre 1
En plus de ces trois exigences, l’indépendance des critères, bien qu’étant une propriété assez
complexe et plutôt difficile à obtenir [Roy et Bouyssou, 1993], [Pictet et Bollinger, 1999], est
également recommandée, notamment pour les méthodes d’agrégation totale (cf. paragraphe
4.3), ce qui revient à dire que la famille F doit être séparable, selon la terminologie de
l’analyse multicritère.
Nous souhaitons comparer des solutions constructives d’un composant du bâtiment sur la base
de leurs impacts environnementaux et sanitaires potentiels. Cependant, pour que ces impacts
deviennent des critères, il sera nécessaire de les analyser et de les munir d’indicateurs de
mesure, afin de former une famille cohérente de critères. Nous reviendrons sur ce point au
chapitre 2.
4.2.3.7 Normation
Pomerol et Barba-Romero (1993) définissent ce que nous avons choisi d’appeler la
« normation » pour des profils environnementaux et sanitaires (afin d’employer le vocabulaire
de l’analyse de cycle de vie) comme une opération permettant de ramener toutes les valeurs
de ces profils (ou vecteurs) entre 0 et 1.
La normation des poids ou des évaluations environnementales et sanitaires des actions est une
étape parfois nécessaire selon la méthode d’agrégation des préférences choisie.
Soit u = (u1, …, un) le vecteur initial, c'est-à-dire l’ensemble de toutes les évaluations des
actions selon un critère donné, et v = (v1, …, vn) le vecteur normé, c'est-à-dire l’ensemble de
toutes les évaluations normées selon ce même critère, le tableau 4 (issu de [Pomerol et Barba-
Romero, 1993]) situé ci-après représente les quatre principales procédures de normation
possibles permettant de passer du vecteur u au vecteur v.
- 50 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
4.2.3.8 Pondération
D’après [Pomerol et Barba-Romero, 1993], il est assez courant en analyse multicritère, que le
décideur pense spontanément qu’un critère est plus important qu’un autre, pour des raisons
diverses, parmi lesquelles ses préférences personnelles (raisonnablement objectives ou
complètement subjectives).
Nous appelons poids cette mesure de l’importance relative entre les critères telle qu’elle
est vue par le décideur. Néanmoins, cette mesure n’est pas toujours déterminée facilement
par le décideur dans bien des situations, et des méthodes pour évaluer les poids des critères
[Pomerol et Barba-Romero, 1993], [Maystre et al., 1994] sont développées pour pallier cette
difficulté. Nous reviendrons sur ce point au chapitre 2.
Pictet et Bollinger (1999) insistent cependant sur le fait que, selon la méthode d’agrégation
employée, l’importance des critères peut représenter :
- des poids, au sens intuitif du terme, pour les méthodes d’agrégation partielle ;
- des constantes d’échelle, pour les méthodes d’agrégation totale, qui recouvrent en fait
deux notions : d’une part les poids et d’autre part, la relation entre les échelles des
critères, ce qui rajoute, en théorie, une difficulté supplémentaire à la définition des
pondérations dans ces méthodes.
4.2.3.9 Acteurs
Cette partie s’intéresse aux acteurs de l’aide à la décision d’une part, et aux acteurs potentiels
de l’outil, d’autre part.
- 51 -
Chapitre 1
Les intervenants sont des personnes qui cherchent à influencer les décideurs au cours du
processus d’aide à la décision en fonction de leurs systèmes de préférences. Les autres acteurs
sont les agis, ils subissent les conséquences de la décision sans pouvoir l’influencer.
Toutefois, leurs avis sont indirectement pris en compte par les acteurs précédents. D’autres
acteurs dits fantômes agissent comme intermédiaires et ne participent pas directement au
processus : les conseillers, les négociateurs, les informateurs et les juges-arbitres. L’homme
d’étude (celui qui réalise l’aide à la décision) et le demandeur (s’il est différent du décideur)
sont eux aussi des intermédiaires.
4.2.3.10 Problématique
La problématique est la façon dont le problème est posé par l’homme d’étude [Simos, 1997].
Roy, (1985) a défini quatre types de problématiques :
- Problématique du tri P.β : aider à trier les actions d’après des normes ou à élaborer
une procédure d’affectation.
- 52 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
- 53 -
Chapitre 1
Une analyse multicritère (en vue d’une aide à la décision) est donc un problème qui comporte
en général quatre phases de résolution (itératives dans la plupart des cas) :
1) L’élaboration de la liste des actions potentielles (ensemble A)
Il s’agit, dans cette étape, de déterminer un ensemble A aussi complet que possible.
2) La définition de la famille cohérente de critères (ensemble F)
Cette définition peut nécessiter de munir les critères de seuils d’indifférence et de préférence,
et souvent, d’affecter des poids ou des coefficients d’importance ou encore des taux de
substitution aux différents critères.
3) L’établissement de la matrice des performances (ou tableau d’évaluation des actions ou
encore matrice de décision)
Cette matrice a été présentée au paragraphe 4.2.3.6 de ce chapitre.
4) L’agrégation des performances (ou procédure d’agrégation multicritère).
Cette dernière étape a pour objectif d’établir un modèle des préférences globales, c’est à dire
une représentation formalisée de telles préférences relativement à un ensemble A [Ben Mena,
2000]. Elle fait intervenir l’évaluation des actions selon chaque critère, mais également le sens
des préférences des critères. Cette étape est en général complétée par des analyses de
sensibilité et/ou de robustesse des résultats.
De manière générale, les trois premières étapes sont communes aux différentes méthodes
d’analyse multicritère. [Maystre et al., 1994] précise que le choix d’une méthode d’agrégation
peut être différé jusqu’au moment où la matrice des performances est remplie. A ce moment,
ce choix est nécessaire, ne serait-ce que pour permettre la détermination des valeurs des
paramètres propres à chaque méthode.
Pour la quatrième étape, trois approches opérationnelles peuvent être distinguées [Roy, 1985],
[Roy et Bouyssou, 1993] :
- approche du critère unique de synthèse évacuant toute incomparabilité (appelée
également agrégation complète transitive),
- approche du surclassement de synthèse acceptant l’incomparabilité (ou agrégation
partielle),
- approche du jugement local interactif avec itérations essai-erreur (ou agrégation locale
et itérative).
- 54 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
Schärlig, (1985) insiste sur la difficulté de cette quatrième étape, qu’il qualifie de
« dilemme ». En effet, elle nécessite d’une part de choisir une méthode parmi une multitude
de méthodes, sachant d’autre part, qu’aucune méthode ne respecte la totalité des exigences
qu’un utilisateur pourrait trouver « normales » dans l’idée multicritère.
Le choix d’une méthode nécessite donc de décider sur quelle exigence il faudra céder.
Nous reviendrons sur ce point au paragraphe 5.4 de ce chapitre.
Les méthodes d’agrégation complète transitive reposent ainsi sur l’existence d’une fonction
d’utilité pour chaque préférence et sur des propriétés mathématiques particulières de ces
fonctions d’utilité (telles que la transitivité, l’additivité, …) leur permettant d’être
combinées (comme nous le verrons dans le paragraphe suivant).
Il est important d’insister sur les deux aspects suivants, précise Vincke [Vincke, 1989] :
- 55 -
Chapitre 1
- la théorie de l’utilité multiattribut a surtout été développée dans le cas incertain et fait
largement usage des probabilités pour représenter les phénomènes d’imprécision et
d’incertitude qui peuvent apparaître dans un problème de décision : cet aspect mérite
d’être approfondi car rien ne prouve que le concept de probabilité soit le plus adéquat
pour tous les cas (cf. le concept de logique floue) ;
- la théorie de l’utilité multiattribut concerne des fonctions gj qui sont des vrais-
critères.
La forme analytique la plus simple (et aussi la plus utilisée) est évidemment la forme additive
(somme, pondérée ou non), où les Uj sont strictement croissantes et à valeurs réelles (ces
fonctions servent uniquement à transformer les critères initiaux de manière à ce qu’ils
s’expriment tous suivant la même échelle : on évite ainsi les problèmes d’unités et la somme
est une opération qui a un sens). Outre le fait que les préférences selon chaque critère et la
préférence globale doivent constituer des structures de préordres totaux, le modèle additif
impose que tout sous-ensemble de critères soit préférentiellement indépendant dans F
[Vincke, 1989], ce qui signifie que la préférence selon chaque critère ne doit pas être
influencée par la préférence selon un autre critère. Or, cette propriété n’est pas toujours
vérifiée par la famille cohérente de critères [Roy et Bouyssou, 1993] et [Pictet et Bollinger,
1999].
- 56 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
Les critiques adressées à ces méthodes concernent d’une part leur caractère monocritère –
au final, il s’agit d’une note unique – et d’autre part, leur caractère très compensatoire en
général, c'est-à-dire qu’une bonne évaluation d’une action par rapport à un critère peut
compenser une très mauvaise évaluation par rapport à un autre critère, ce qui est à proscrire
(ou au moins à minimiser) en évaluation environnementale [Chevalier, 1999], [Maystre et al.,
1994] et [Benetto, 2002] et nous ajouterons en évaluation sanitaire.
Enfin, l’évacuation de toute situation d’incomparabilité (même des actions très différentes
seront classées l’une par rapport à l’autre dans le résultat final) les éloigne parfois de la
réalité, ce qui leur est également reproché [Schärlig, 1985], [Maystre et al., 1994].
- 57 -
Chapitre 1
4.3.4 Conclusions
Nous avons abordé dans cette partie les méthodes d’analyse multicritère intitulées « méthodes
d’agrégation complète transitive », et « méthodes d’agrégation partielle », en présentant leur
principe général de fonctionnement, le nom des principales méthodes concernées, ainsi que
les critiques qui leur sont adressées. Ces méthodes se différencient également à l’intérieur
même des deux catégories que nous avons étudiées.
Outre ces méthodes, nous nous sommes également intéressés à des méthodes d’analyse
économique (ACA, ACE, ACU, AMC) et à des méthodes d’aide à la décision « moins
classiques » : les méthodes d’aide à la décision empruntées à l’Intelligence Artificielle (IA),
telles que les systèmes experts (SE) [Haton et Haton, 1993] et les métaphores biologiques
(réseaux de neurones et algorithmes génétiques, que nous noterons RN et AG par la suite)
[Davalo et Naïm, 1989], [Touzet, 1992], [Renders, 1995], [Cantin, 2000]. Ces dernières sont
de plus en plus utilisées en aide à la décision (optimisation, prospective), le développement et
les performances des outils informatiques aidant. Les principes de l’IA sont parfois même
directement utilisés par les méthodes d’analyse multicritère, notamment celles relevant de la
troisième approche que nous n’avons pas abordée [Pomerol et Barba-Romero, 1993].
Cependant, ayant rapidement écarté ces méthodes de notre champ d’étude pour des raisons
plus ou moins subjectives (aspect optimisateur, difficulté d’appréhension, difficile adaptation
à nos données, méthodes orientées « éco-conception »), nous ne les détaillerons pas.
La sous-partie suivante est néanmoins consacrée à l’analyse de tous les éléments qui
différencient l’ensemble des méthodes d’aide à la décision que nous avons étudiées afin de
pouvoir élaborer un arbre de décision global permettant de choisir une méthode d’aide à la
décision en fonction de contraintes sur les données ou les résultats attendus.
- 58 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
- 59 -
Chapitre 1
Nombre de données
Certaines méthodes deviennent vite « explosives » lorsque le nombre de données est
important. C’est le cas notamment de la méthode QUALIFLEX. Elles ne sont donc pas les
plus adaptées aux problèmes présentant de nombreuses actions et de nombreux critères.
D’autres méthodes, au contraire, se trouvent améliorées (fonctionnement et solidité du
résultat) lorsque le nombre de données est élevé, c’est le cas par exemple des Réseaux de
Neurones (RN) ou encore des Algorithmes Génétiques (AG). Enfin, pour certaines méthodes,
le nombre de données n’est pas une information susceptible d’influencer leur mise en œuvre
(méthodes d’évaluation économiques).
Pondérations
Certaines méthodes d’analyse multicritère ne nécessitent pas l’utilisation de poids pour être
mises en œuvre, c’est par exemple le cas d’ELECTRE IV qui ne tient compte que de
l’évaluation des actions selon chacun des critères. D’autres méthodes fonctionnent en
déterminant elles-mêmes les pondérations, à partir d’une hiérarchisation des critères, comme
par exemple AHP, ou MACBETH. Devant la difficulté que peuvent rencontrer les décideurs à
établir des pondérations de leurs critères, et les conséquences de ces pondérations sur les
résultats de la méthode d’aide à la décision [Pomerol et Barba-Romero, 1993], l’utilisation ou
non des pondérations peut être une caractéristique intéressante à connaître dans le choix d’une
méthode d’analyse multicritère.
- 60 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
Utilisation de seuils
Les seuils correspondent à des informations supplémentaires sur les critères. Ainsi, certaines
méthodes, telles que la plupart des méthodes d’agrégation complète transitive, ne manipulent
que des vrais-critères.
- 61 -
Chapitre 1
Capacité évolutive
Certaines méthodes ne présentent pas de caractère évolutif : le résultat final est totalement
modifié par l’ajout ou la suppression d’une action, c’est notamment le cas de la méthode de
Copeland. Cet aspect peut donc être intéressant à considérer, surtout dans l’optique d’un outil
d’aide au choix qui se veut susceptible d’évoluer en fonction des données disponibles.
Caractère compensatoire
Concernant les résultats, une attention particulière peut aussi être portée au caractère
compensatoire ou non des méthodes, notamment lorsque des données environnementales et
sanitaires sont traitées. Les méthodes d’optimisation, et les méthodes d’agrégation totale sont
souvent réputées pour être des méthodes très compensatoires, contrairement aux méthodes
d’agrégation partielle, qui offrent une alternative à la compensation entre critères, notamment
en acceptant l’incomparabilité.
Acceptation de l’incomparabilité
Nous avons constaté, en abordant les méthodes d’analyse multicritère « classiques », que
certaines méthodes acceptent l’incomparabilité – notamment les méthodes d’agrégation
partielle – d’autres non – et en particulier les méthodes d’agrégation totale, ou les méthodes
d’optimisation – ce qui permet aussi de différencier les différentes méthodes.
- 62 -
Partie 4 Apports de l’analyse multicritère
4.4.1.9 Conclusions
Nous avons dressé une liste des différents éléments distinctifs des méthodes que nous avons
étudiées. Nous avons tenu à rendre cette liste la plus exhaustive possible. Ainsi, certains
éléments distinctifs peuvent paraître subjectifs – l’aspect « boîte noire » par exemple –
d’autres peuvent sembler redondants – c’est notamment le cas de l’indépendance des critères
et de la non-acceptation de l’incomparabilité. C’est pourquoi certains éléments n’apparaîtront
pas dans l’arbre de décision que nous proposons dans la partie suivante. Le tableau 6 suivant
résume les principaux éléments distinctifs objectifs des méthodes à considérer selon les trois
types de méthodes d’aide à la décision.
Ainsi, pour nous, la problématique (c'est-à-dire les objectifs recherchés par l’agrégation) est
le premier élément auquel il faut s’intéresser. La réponse à cette problématique répartit alors
les méthodes en quatre catégories différentes : optimisation, choix, tri et classement, le
cheminement questions-réponses étant alors propre à chacune des quatre catégories.
L’arbre de décision que nous avons élaboré pour choisir une méthode d’agrégation est
présenté sur la figure 1 présentée en page suivante.
- 63 -
Problématique ?
Evaluation
Ensemble des Détermination
économique des Approche ?
actions des poids ?
critères ?
Discret
Non
Nature de la Oui Non
méthode ?
Surclassement
de synthèse
Disponibilité des Cardinale
règles de
connaissances ?
Nature des Nature de la
Nature des critères ? méthode ?
critères ?
Critère unique
Oui Oui Continu
de synthèse
MAUT
Goal MAUT
AMC Méthodes UTA Copeland
ELECTRE I ELECTRE Is programming Modèles ELECTRE III ELECTRE IV
Réseaux de Systèmes Algorithmes ACE d'agrégation MELCHIOR Modèles Segmentation ELECTRE II Borda Condorcet
ELECTRE Iv PROMETHEE I Modèles ELECTRE TRI additifs et PROMETHEE II NAIADE
neurones experts génétiques ACU locale et REGIME additifs et trichotomique MACBETH ORESTE Méthode
MACBETH EXPROM I additifs et multiplicatifs EXPROM II Jouany-Vaillant
ACA itérative multiplicatifs lexicographique
multiplicatifs AHP
AHP
Nous pouvons constater, en étudiant l’arbre de décision proposé, que tous les éléments
distinctifs n’ont pas été pris en considération dans chacune des questions que nous nous
sommes posées. D’une part, tous les éléments distinctifs ne permettent pas de « distinguer »
les méthodes entre elles. En effet, ils semblent parfois redondants les uns avec les autres car
ils interviennent dans les mêmes catégories de méthodes, comme nous l’avons indiqué
précédemment. C’est le cas, par exemple, pour le caractère compensatoire et le refus de
l’incomparabilité. D’autre part, les questions-réponses dans chaque catégorie définie par la
problématique pourraient être menées de manière encore plus approfondie
(approfondissement du qualificatif « partielle » pour la compensation, implication du décideur
par exemple). Néanmoins, nous ne considérons pas qu’un tel niveau de détail représente une
réelle aide au choix des méthodes pour le moment, dans la mesure où certaines réponses
nécessiteront certains choix stratégiques, par exemple, l’aspect « boîte noire », qui relève plus
de la subjectivité de chacun que d’une comparaison objective des méthodes (mais qui est
néanmoins susceptible de les différencier). Par conséquent, nous avons volontairement choisi
d’interrompre la différentiation à ce niveau.
Pour choisir une méthode d’agrégation, il est évident que la subjectivité de chacun intervient.
A ce propos, Schärlig (1996) précise qu’il n’est pas interdit de faire jouer même des
considérations de simplicité ou de rapidité, et nous partageons son opinion. C’est l’une des
principales raisons qui nous a d’ailleurs incités à ne pas nous intéresser davantage aux
méthodes d’agrégation empruntées à l’Intelligence Artificielle. Nous avons cependant gardé
ces méthodes pour réaliser l’arbre de décision car nous souhaitions, au-delà de notre propre
recherche destinée à réaliser l’outil d’aide au choix des produits de construction, proposer un
arbre le plus général possible qui puisse être utilisé dans d’autres contextes, avec des
contraintes et des subjectivités différentes.
Cet arbre ne comporte pas toutes les méthodes d’aide à la décision actuellement disponibles.
D’une part, il en existe énormément, et d’autre part, la liste de ces méthodes est en constante
évolution puisque de nouvelles méthodes sont régulièrement créées, ou des améliorations sont
souvent apportées aux méthodes existantes, notamment pour les méthodes d’analyse
multicritère. Il est par conséquent difficile, voire impossible, d’identifier et de répertorier
toutes les méthodes. Néanmoins, cet arbre a le mérite de faire apparaître les principales
méthodes d’aide à la décision. De plus, il se décline en « branches » suffisamment souples
pour pouvoir faire l’objet de modifications et d’évolutions en fonction de l’acquisition de
connaissances supplémentaires sur les méthodes d’aide à la décision.
4.5 Conclusions
Cette partie, consacrée à l’analyse multicritère, nous a permis, d’une part, d’expliquer le
principe des méthodes d’analyse multicritère, d’autre part, d’identifier l’apport théorique et
pratique qu’elles sont susceptibles de fournir à notre outil, et enfin, d’élaborer un arbre de
décision permettant de choisir une ou plusieurs méthodes d’aide à la décision, en fonction
d’un certain nombre de contraintes objectives associées à un problème de décision. A partir
du choix de la problématique, cet arbre se divise en quatre branches principales et permet
d’aboutir à des terminaisons séparant de manière objective les différentes méthodes
d’agrégation.
Cet arbre nous permet dorénavant de sélectionner les méthodes d’agrégation qui conviendront
le mieux aux contraintes théoriques et techniques qui sont inhérentes aux données traitées.
Cependant, il est également nécessaire de tenir compte des contraintes pratiques et des
attentes des utilisateurs pour la réalisation de l’outil. La partie suivante est ainsi centrée sur les
premières propriétés souhaitées du cahier des charges de l’outil.
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Chapitre 1
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Partie 5 Premières propriétés du cahier des charges de l’outil d’aide au choix
Les produits de construction ne sont en effet pas comparables directement (ce sont des
actions partielles interdépendantes), il est nécessaire de les assembler en solutions
constructives pour qu’ils puissent constituer des ensembles comparables.
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Chapitre 1
Critères Critères
techniques économiques
Approche intégrée
Aide à la décision
Décision Décision
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Partie 5 Premières propriétés du cahier des charges de l’outil d’aide au choix
Ce choix nous permet de nous assurer de la cohérence entre les différents calculs réalisés pour
l’aide au choix apportée par l’outil : transformation des données en actions potentielles
globales, construction de la famille cohérente de critères, élaboration de la matrice des
performances avant agrégation.
Parmi ces méthodes, nous souhaitons néanmoins insister sur le fait qu’une attention
particulière sera donnée aux risques de compensation entre critères environnementaux et
sanitaires qu’elles peuvent présenter, et qu’il faut limiter [Chevalier, 1999], [Benetto, 2002],
[Rousseaux et Benoit, 2003].
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Chapitre 1
La méthode EXPROM II n’a pas été retenue, dans la mesure où cette méthode est une
extension de la méthode PROMETHEE II et qu’elle n’apporte pas, par conséquent, une réelle
alternative dans le déroulement des calculs et des résultats.
La méthode MACBETH n’a pas été choisie car elle est particulièrement adaptée aux
évaluations qualitatives, ce qui ne correspond pas, a priori, à l’ensemble des données que
l’outil devra traiter.
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Partie 5 Premières propriétés du cahier des charges de l’outil d’aide au choix
Nous avons retenu quatre méthodes d’agrégation afin de proposer différents choix
d’agrégation aux utilisateurs de l’outil, et d’étudier les différences possibles de résultats
obtenus par ces méthodes. La sélection des méthodes d’agrégation des évaluations des actions
par les différents critères n’est cependant ni absolue, ni définitive. Elle pourra par conséquent
évoluer avec l’outil, et d’autres méthodes, existantes ou en développement, pourront
compléter et/ou remplacer celles que nous avons choisies ici.
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Chapitre 2
Modélisation de l’outil d’aide au choix
Partie 1 Introduction
1 Introduction
L’outil que nous souhaitons développer est un outil d’aide au choix des produits de
construction. Nous avons montré dans le chapitre précédent le cadre théorique rigoureux que
pouvait apporter l’analyse multicritère pour la modélisation de l’outil, mais également pour
l’agrégation des différentes données. C’est pourquoi nous avons opté pour les méthodes
d’analyse multicritère pour réaliser la modélisation de l’outil, c'est-à-dire son principe de
fonctionnement, présentée sur la figure 3.
La modélisation est considérée comme un processus linéaire (et non itératif comme c’est
souvent le cas en analyse multicritère), puisque nous supposons que chaque étape peut être
entièrement réalisée en fonction des étapes précédentes et éventuellement d’hypothèses
supplémentaires, mais qu’elle n’est pas conditionnée par les étapes suivantes.
Les parties de ce chapitre détaillent, comme indiqué sur la figure 3, les différentes étapes de la
modélisation.
Une dernière partie récapitule les différents choix effectués à chacune des étapes de la
modélisation de l’outil.
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Chapitre 2
Pour le composant « mur », par exemple, l’unité fonctionnelle associée peut correspondre à
« 1 m² (quantité) de mur porteur (performance) d’une durée de vie de 100 ans (durée de
vie) », mais également à « 10 m² (quantité) de mur porteur possédant une résistance
thermique de 2,5 m².K/W (performances) d’une durée de vie de 80 ans (durée de vie) », etc.
Chaque composant peut ainsi avoir différentes unités fonctionnelles, mais il est nécessaire de
n’en choisir qu’une pour réaliser ensuite la comparaison des solutions constructives, afin que
cette comparaison s’effectue sur des bases techniques communes.
Le choix d’une UF par un utilisateur peut, par exemple, être fondé sur la performance
technique prioritaire ou essentielle, que l’utilisateur souhaite attribuer au composant.
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Partie 2 Détermination des actions
Les produits et matériaux de construction inclus dans la solution constructive n°3 énoncée ci-
dessus, sont par exemple, des blocs de béton, du mortier, de l’isolant, de la plaque de plâtre,
des plots de colle, des finitions extérieures et intérieures (peinture, crépi, moquette murale).
Par la suite, nous risquons souvent de remplacer « produit de construction » qui intervient
dans une solution constructive par « élément » de la solution constructive, qui signifiera
« produit », « liant » ou « complexe produit/liant ».
Nous choisissons ces trois termes afin de bien identifier pour quel type d’élément les données
environnementales et sanitaires sont disponibles ; ceci afin de ne pas oublier de produits ou de
« double-compter » d’autres produits (en particulier les liants comme les colles ou les
mortiers). En effet, pour les blocs de béton par exemple, le mortier de liaison entre les blocs
est inclus dans l’inventaire du cycle de vie associé aux blocs de béton. Par conséquent, il n’est
pas utile de mentionner le produit « bloc béton » et le produit « mortier » dans la solution
constructive, mais d’identifier l’élément, ou le complexe, « blocs béton + mortier ».
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Chapitre 2