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Article RIED2012

Technologie en énergie durable


19-20 juin 2012, Montréal
RIED2012 / So-26

ÉTUDE COMPARATIVE DE L’EFFICACITÉ DES TRANSFERTS THERMIQUES


DANS LES TUBES SOLAIRES À CALODUCS
Maxime Taylor, Gabrielle Caron, Rémi Pelletier, Luc Fournier§
Laboratoire en énergie durable du Cégep de l’Outaouais, Gatineau, Québec
§
luc.fournier@cegepoutaouais.qc.ca

RÉSUMÉ
Les tubes solaires sont utilisés principalement pour réchauffer de l’eau tant au niveau résidentiel qu’industriel. Ils sont
reconnus pour leur grande efficacité énergétique en captant l’énergie rayonnante solaire au moyen d’un corps noir isolé
thermiquement par une double paroi vitrée. Les modèles les plus courants utilisent des caloducs pour transférer la
chaleur du tube vers les conduits d’eau à réchauffer. Dans cet article, nous quantifions certains échanges et pertes
thermiques entre la source lumineuse et le tube, ainsi qu’entre le tube et le caloduc pour un certain modèle de tube
solaire, afin d’optimiser le transfert thermique total. Entre autre, une comparaison sera faite entre : un système sans
caloduc, avec un caloduc inséré librement dans le tube, et avec un caloduc inséré et mis en contact thermique avec les
parois internes du tube. Les tubes ont une longueur de 50cm et un diamètre de 5,7cm. À la lumière des résultats
obtenus, nous proposons certaines pistes de recherche future dans cette jeune étude de notre laboratoire.

Mots-clés: Caloduc, tube solaire, chaleur, transport thermique, efficacité énergétique.

NOMENCLATURE
Symboles utilisés Lettres grecques Indices/Exposants
c : chaleur massique, J/kg⋅K η : efficacité d’absorption abs : absorbé
m : masse, kg thermique, s.d. diss : dissipé
G : conductance thermique, W/K ∆T= Ttube − Text ext : extérieur (ambiant)
P : puissance, W lum : lumineux
Q : chaleur, J net : net (total)
t : temps, s tube : tube solaire
T, température, K ou °C

une étude expérimentale comparative des transferts thermiques


INTRODUCTION
entre un tube solaire utilisé sans caloduc, et avec caloduc est est
Les tubes solaires sont reconnus pour être capables de convertir ici réalisée pour voir si ce dernier pose un obstacle considérable
en chaleur environ 80% de l’énergie lumineuse qu’ils reçoivent à l’efficacité du transfert thermique.
(e.g. Kim & Seo, 2007). Ceci en fait un système très efficace.
Nous débuterons en exposant le contexte de nos expériences
Actuellement, ces tubes sont principalement utilisés pour
avant de vous présenter notre étude comparative et une
réchauffer directement un fluide – de l’eau ou de l’air – mais
discussion sur le sujet.
cette chaleur ainsi récupérée pourrait servir à d’autres fins,
alimenter un moteur sterling par exemple, ou encore générer de
CONTEXTE EXPÉRIMENTAL ET MÉTHODOLOGIE
l’électricité via un module thermoélectrique. C’est dans le
cadre d’une éventuelle étude sur cette dernière application que Les tubes à double parois de 50 cm de longueur proviennent du
nous menons cette recherche sur l’efficacité des transferts fournisseur Clean Republic® et possèdent un diamètre externe
thermiques dans les tubes solaires. de 5,7 cm, et interne de 4,3 cm. Les caloducs sont en cuivre à
paroi légèrement rugueuse et utilisent de l’eau comme fluide de
Les caloducs qui transfèrent et concentrent la chaleur sur un
transport. Les réflecteurs ont été réalisé localement au moyen
petit embout au sommet du tube s’avèrent pratiques pour
d’une plaque d’aluminium polie et courbée. Les capteurs de
l’application courante de réchauffer un fluide. Cependant, des
température sont à résistance de platine (RTD), 100 ohms, et de
systèmes directs sans caloducs sont étudiés pour les
précision Classe A. Ils sont couplés à un interface de marque
applications de réchauffement direct, voir par exemple Kim et
Omega, modèle HH804U. La figure 1 illustre différentes
al. [2007] et Ma et al. [2010]. Le fluide passe alors directement
composantes du montage, certains détails relativement à leurs
dans le tube pour y absorber la chaleur générée par celui-ci.
applications seront précisés.
Ainsi, dans le but d’exploiter d’autres avenus technologiques,

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1 4 6 Calorimétrie
7 Pour mesurer le taux des transferts thermique, il convient de
mesurer dans tous les cas le taux de variation de la température
de 650 mL ± 3 mL d’eau, et le taux de transfert thermique
pourra être calculé d’après
dQnet dT
2 = mc . (1)
dt dt
5
3 Pour l’étude du transfert thermique directe avec et sans
réflecteur, donc sans caloduc, l’eau est insérée directement dans
Figure 1: Différentes composantes des montages, 1.« capuche » le tube; et le volume choisi fait en sorte que le tube est rempli
en aluminium, 2.capteur de température, 3.tige pour capteur jusqu’à 2cm du bord. Pour l’étude avec caloduc, le volume
thermique avec scellant en caoutchouc, 4.boite thermique avec d’eau sera déposé dans un réceptacle cubique de 1000 mL ayant
son caloduc, 5.contact thermique et son caloduc, 6.tube solaire, une parois de 0,3 cm en plastique, isolé au moyen d’un
7.réflecteur. styromousse haute densité de 3,8 cm d’épaisseur, et chaque
joint et espace ont été isolé au moyen d’une mousse isolante
Source de rayonnement – un soleil artificiel thermique dense de marque Rona®. Finalement, pour s’assurer
Une source de rayonnement artificielle a été conçue pour que qu’il n’y ait aucune absorption du rayonnement des lampes par
toutes les expériences puissent être réalisées dans les mêmes le styromousse, la boite ainsi créée est recouverte d’un
conditions. La source lumineuse consiste en 4 lampes de 400W « capuchon » enveloppé de papier d’aluminium, que l’on peut
de marque Phillips regroupées devant un réflecteur voir sur les figure 1 et 2. Il a été vérifié que ce montage
hémisphérique de 8cm de distance focale, soit la distance entre n’absorbe aucune énergie venant des lampes.
le centre des lampes et le fond du réflecteur. Deux lampes sont
à sodium haute pression (HPS) et les deux autres à halogénures
métalliques (MH), toujours à haute pression. L’avantage des
lampes à haute pression comparativement à des lampes à
fluorescence classique est qu’elles offrent un spectre de lumière
plus continu, plus similaire au spectre solaire.

Figure 3: Récipient étanche et isolé construit autour de


l’embout chaud d’un caloduc. Le couvercle n’est pas illustré.
Toutes les expériences ont été réalisées deux fois, et chacune au
moyen de deux capteurs de température, ce qui signifie que
chaque point des graphiques présentés correspond en fait à une
moyenne de quatre températures.
Figure 2: Allure générale du montage.
Lorsque la température est mesurée à l’intérieur du tube, un
Pour toutes nos expériences, le tube est positionné à la capteur est positionné au quart et l’autre au trois-quarts de la
verticale, centré devant les lampes et à 35 cm du réflecteur profondeur du tube. Lors de l’étude du transfert thermique
arrière. Nous avons déterminé que dans ces conditions, (cette avec caloduc, un des capteurs est positionné près du caloduc, et
étude n’est pas présenté ici), notre lampe fournie une puissance l’autre est loin.
au tube de manière similaire à une journée ensoleillée d’avril à
10h, alors que les tubes sont inclinés à 45°. Suite à plusieurs essais, nous avons opté pour des mesures sans
brassage. Dans tous les cas, une période de démarrage et de
Il serait possible mais difficile de déterminer avec précision la transition de 5 minutes est accordée avant de débuter la prise de
puissance lumineuse émise par les lampes sur un tube solaire, et mesures. Finalement, l’écart initial entre la température de l’eau
ainsi déterminer l’efficacité d’absorption thermique du tube et de l’air ambiant n’est jamais supérieur à 5°C.
selon Pabs = ηPlum, mais cette approche n’est pas exploitée dans
cette étude ; l’analyse sera plutôt comparative.

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ÉTUDE COMPARATIVE POUR DE FAIBLES ∆T Éfficacité des systèmes avec caloducs
En revanche, si l’on considère des pertes thermiques
Système de référence: sans caloduc dissipatives, alors Qnet = Qabs – Qdiss, et il faut alors écrire
Selon la première loi de la thermodynamique, en l’absence de
dT dQ
travail externe, la chaleur absorbée par le système provient mc = Pabs − diss (5)
uniquement de l’énergie lumineuse captée par les tubes. Sous dt dt
forme différentielle, on peut ainsi écrire
Si la chaleur dissipée est constante, alors on peut associer cette
dQabs perte calorique dQdiss/dt à une puissance Pdiss, et l’équation (5)
= Pabs (2) présente alors la solution simple
dt
Pabs − Pdiss P
Dans des conditions où on néglige les pertes thermiques, ce qui ∆T = t = net t (6)
acceptable lorsque l’écart de température entre la charge (l’eau) mc mc
et la température ambiante est faible, alors Qnet = Qabs, et les
équations (1) et (2) se couplent aisément pour obtenir une où Pnet = Pabs – Pdiss. On observe ce genre de courbe pour les
relation linéaire pour la courbe T(t), voire systèmes à caloducs à l’équilibre ; des relations linéaires, mais
de pente plus faible.
Pabs
∆T = t. (3) Un des essais à été réalisé au moyen d’un caloduc qui a été mis
mc en contact thermique avec la paroi du tube de verre au moyen
d’une double épaisseur de papier d’alluminium. L’autre
D’après la pente du graphique T(t) de 0,00512 K/s obtenue pour comporte uniquement un caloduc déposé au centre du tube, et
le cas de l’eau inséré directement dans le tube, et sachant que la l’air du tube doit alors agir alors comme contact thermique.
masse de l’eau insérée est de 0,650 kg, et que sa chaleur
massique est de 4185 J/kg·K, on obtient 12
11
∆T
t = 0,00352 Ks
Pabs = 13,9 W . (4) 10 ∆T
t
= 0,00283 Ks
9
8
10
7
9
∆T (K)

6
8 Direct, sans caloduc
5
(référence)
7 4
Avec caloduc et contact
6 ∆T
t = 0,00512 Ks 3 thermique
(K)

5
2
Avec caloduc et sans
∆T

1 contact thermique
4
0
3 5 15 25 35 45 55 65

2 Temps (minutes)
1

0
5 10 15 20 25 30 35 40 Graphique 2:Augmentation de la température en fonction du
Temps (minutes) temps pour un système avec caloduc, sans réflecteur.
Graphique 1:Augmentation de la température en fonction du D’après ces courbes, on obtient d’après un calcul similaire à
temps pour un système direct, sans caloduc ni réflecteur celui de la référence :
D’après la surface efficace du tube, on peut estimer que la Avec caloduc, et avec contact thermique
puissance absorbée par unité de surface est d’environ
660 W/m2. En comparaison, le soleil offre une puissance
Pnet = 9,6 W = 69% Pabs ;. (7a)
maximale à son zénith de l’ordre de 950 W/m2 (Valeur Avec caloduc, et sans contact thermique
nominale largement acceptée, voir par exemple Ma et al, 2010).
Pnet = 7,7 W = 55% Pabs . (7b)

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et le milieu extérieur est de 63 K. Or, à ce point le transfert de
DISCUSSION : PERTES THERMIQUES À GRANDS ∆T chaleur à la charge ne fait que commencer.
Comment justifier une telle puissance dissipée pour les Cette valeur n’a pas été mesurée expérimentalement de manière
systèmes à caloduc, alors que les écarts de température sont formelle, (dans un montage d’essai, l’écart de température a été
pourtant faibles. Nous expliquons ces pertes par le fait que mesurée à 52 K au centre du tube à la 45ème minute), mais nous
même si l’écart de température entre la charge au sommet du comptons poursuivre cette étude sur la conduction dès l’été
caloduc et l’air ambiant est faible, la température du tube doit 2012, pour des plus hautes plages de température.
atteindre une température élevée pour engager le transfert
thermique du caloduc. Ainsi, le tube est sujet à des pertes Ainsi, la période de transition supplémentaire que l’on peut
thermiques principalement par conduction. noter au début du graphique 2 correspond au temps nécessaire
que met le tube à atteindre cet écart, nécessaire pour que le
Si l’on considère ces pertes de chaleur d’après une conductance caloduc puisse transférer sa chaleur à sa charge.
thermique G définit selon
dQdiss CONCLUSION
= G (Ttube − Text ) , (8)
dt Pour des charges à faible température, l’utilisation d’un caloduc
avec contact thermique contre la paroi du tube pour effectuer un
l’équation (5) s’écrit alors comme transfert de chaleur peut présenter des pertes en puissance de
l’ordre de 31%. Cette perte est d’autant plus grande si le
dTtube
mc = Pabs − G (Ttube − Text ) . (9) caloduc n’est pas mis en contact thermique avec le tube.
dt
Cette perte de chaleur s’explique par le fait qu’un caloduc
et la résolution de cette équation donne nécessite un écart de température pour échanger de la chaleur.

( )
Ainsi, la température dans le tube doit nécessairement être plus
Pabs −Gt
Ttube = 1 − e mc + Text . (10) grande que la température de la charge; ce grand écart de
G température entre le tube et l’extérieur engendre donc des
pertes supplémentaires par conduction. Selon nos expériences,
Nous avons été capable de reproduire la courbe (10) de manière la conductance de nos tubes solaires est de 0,10 W/K.
expérimentale pour un tube contenant uniquement de l’air.
Graphique 3: Augmentation de la température en fonction du REMERCIEMENTS
temps pour un tube contenant de l’air. Nous tenons à remercier principalement la Fondation du Cégep
180
de l’Outaouais pour son soutien financier, et aussi Frédéric
160
Lesage pour ses conseils et son support.
140
Ttube = 160,8°C
finale
120
RÉFÉRENCES
Ttube (C)

100 Kim J. T., Ahn H. T., Han H., Kim H. T., Chun W. (2007). The
80 performance simulation of all-glass vacuum tubes with coaxial
60 fluid conduit. International Communications in Heat Transfer
40
Text = 20,6°C 34, 587-597.
20

0
Kim, Y & Seo, T. (2007). Thermal performances comparisons
0 20 40 60 80 100 120 of the glass evacuated tub solar collectors with shapes of
Temps (minutes) absorber tube. Renewable Energy 32, 772-795.

Sachant que le plateau est atteint pour un écart de température Ma L., Lu Z., Zhang J., Liang R. (2010). Thermal performance
de 140,2 K, et sachant que Pabs = 13,9 W, on peut établir la analysis of the glass evacuated tub solar collector with U-tube.
conductance nette du tube à partir de l’équation (10) pour un Building and Environment 45, 1959-1967.
long temps de stabilisation à
W
G ≅ 0,10 . (11)
K
Pour un tube avec caloduc sans contact thermique, où il y a une
perte de puissance de 45%, voir de 6,3 W, on peut estimer
d’après la conductance que l’écart de température entre le tube

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