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La Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés
— Paris, 1-14 septembre 1981
Alain Brouillet
Brouillet Alain. La Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés — Paris, 1-14 septembre 1981. In: Annuaire
français de droit international, volume 27, 1981. pp. 587-627;
doi : https://doi.org/10.3406/afdi.1981.2462
https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1981_num_27_1_2462
Alain BROUILLET
La Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés (P.M.A.)
s'est réunie à Paris, entre le 1er et le 14 septembre 1981, au siège de l'U.N.E.S.C.O.
La Conférence a approuvé, par consensus, un nouveau programme substantiel
d'action (N.P.S.A.) en faveur des P.M.A. Ce programme est valable pour toute
la durée de la décennie inaugurée en 1981. Le N.P.S.A. succède au nouveau
programme global d'action en faveur des P.M.A. que la C.N.U.C.E.D. avait adopté
à Manille en 1979. Il représente l'un des premiers apports de la Stratégie
internationale du développement de la Troisième Décennie des Nations Unies pour
le développement.
Les P.M.A. ont été identifiés en 1971 par l'Assemblée Générale de l'O.N.U., sur
la base de propositions formulées par le Comité de Planification du Développement
de l'O.N.U. La qualité de P.M.A. est reconnue à tout Etat qui remplit trois
conditions :
1° le P.I.B. par habitant ne dépasse pas 125 dollars (en 1975) ;
2° la part de la production industrielle dans le P.I.B. n'est pas supérieure à"
3° le
10%;
taux d'alphabétisation des personnes âgées de plus de 15 ans ne franchit
pas le seuil de 20 % de la population. Une première liste de P.M.A. a été
arrêtée en 1971, puis complétée en 1975, 1977 et 1981.
En 1981, 31 Etats sont classés par l'O.N.U. dans la catégorie des P.M.A. :
21 sont des Etats africains (1) , 8 se situent en Asie (2) , un se trouve dans le
Pacifique (3) et un autre dans la zone des Caraïbes (4) . De plus, sur les 31 P.M. A.,
15 sont des Etats sans littoral, 5 sont des Etats insulaires et 6 appartiennent à la
région du Sahel. L'ensemble regroupe près de 280 millions d'individus.
Les P.M.A. ne constituent pas a priori une catégorie homogène. De profondes
disparités séparent ces pays. Ainsi le revenu par habitant dans les P.M.A. en 1978
variait de 78 dollars pour les Maldives, — 84 dollars pour le Laos — , à 453 dollars
pour les îles Samoa et 623 dollars pour le Botswana.
La situation démographique est également différente d'un pays à l'autre. Le
Bangladesh, avec plus de 90 millions d'habitants, est le troisième pays du monde
pour la densité de sa population (574 habitants au km2); il connaît un
accroissement démographique annuel de 2,8 %, supérieur à la moyenne (2,5 %) des pays
en développement (P.E.D.). A l'inverse, le Botswana souffre de dépeuplement,
et la densité de sa population est la plus faible du monde (1 habitant au km2).
On peut aussi remarquer que certains P.M.A. disposent de richesses
naturelles (5). Enfin la situation géographique des P.M.A. est aussi une importante source
d'inégalité : à côté de pays enclavés ou insulaires, d'autres P.M.A. paraissent
moins défavorisés (6) . Les P.M. A. méritent néanmoins l'attention particulière de
la communauté internationale, car il représentent un groupe d'Etats
particulièrement démunis et handicapés par rapport à l'ensemble des P.E.D.
Les P.M.A. sont tous des pays très pauvres, dont un pourcentage élevé de la
population vit de l'agriculture, qui est pour l'essentiel une agriculture de
subsistance (7) . Corrélativement le secteur manufacturier ne compte que pour 9 % du
P.I.B. (en 1978) des P.M.A., alors qu'il représente 19% du P.I.B. de l'ensemble
des P.E.D. (8).
Les exportations des P.M.A. représentaient en 1978 10,9 % du P.I.B., alors que
celles des autres P.E.D., en excluant les principaux pays exportateurs de pétrole,
atteignaient 18 % du P.I.B. En revanche les importations des P.M.A.
correspondaient à la moyenne des P.E.D. en ce domaine (22,7 %) .
La croissance des exportations en valeur des P.M.A. est extrêmement variable,
à raison de la fluctuation des cours des matières premières qui en constituent
l'essentiel. Entre 1970 et 1979, le taux moyen de croissance annuelle de leur valeur
a été 11,2 %, alors que ce taux s'élève à 19,4 % pour l'ensemble des P.E.D. Au
cours de cette période le pouvoir d'achat des exportations des P.M.A. a diminué
de 1,4 % par an en moyenne. Les P.M.A. ont donc subi une dégradation
importante des termes de l'échange, qui accentue les difficultés de leurs balances
commerciales. Ces exportations se composent pour l'essentiel de produits agricoles et
de matières premières d'origine agricole. Viennent ensuite les produits
manufacturés, les minéraux, les minerais, les métaux et les combustibles.
Il faut noter que la plupart des P.M.A. ont des exportations peu diversifiées
du fer
(5) et
Le deBangladesh
la potasse,possède
le Bénin
desdes
réserves
phosphates
de gazet naturel
du fer, etladeRépublique
charbon, lecentrafricaine
Laos de retain,
des
diamants, le Niger de l'uranium.
(6) Ainsi le Bénin bénéficie non seulement d'un accès à la mer mais aussi de la proximité
du Nigeria, pays riche et gros exportateur, dont le voisinage a permis une rapide expansion
de l'activité portuaire de Cotonou.
(7) Le secteur agricole utilise en effet 82 % de la main d'œuvre totale en moyenne
(47 % au Bénin, 94 % au Bhoutan) contre 60 % pour l'ensemble des P.E.D. L'agriculture
produit en moyenne 47 % du P.I.B. de la totalité des P.E.D. La production vivrière des
P.M.A. s'est accrue de moins de 2 % par an entre 1970 et 1979 (contre 3 % pour tous les
P.E.D.), alors que le taux d'accroissement démographique s'élève à 2,5%.
(8) La part du P.I.B. allouée à l'investissement dans les P.M.A. (16 %) apparaît faible
si on la compare à la moyenne des P.E.D. (24 %) . L'accroissement de l'investissement
intérieur brut, de l'ordre de 10 % par an pour l'ensemble des P.E.D. entre 1970 et 1978, est
resté dans les limites de 2,6 % dans les P.MA.
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à convertir en dons les dettes antérieures des P.M.A., quand ils ne l'ont pas déjà
fait. La résolution souligne l'opportunité du financement des dépenses locales et
des dépenses de fonctionnement par les aides extérieures.
Quant à la 'préparation du N.P.S.A. pour les années 80, la Conférence de
Manille a pris trois décisions. Chaque P.MA. est invité à apporter sa contribution
au N.P.S.A. pour l'élaboration d'un plan de développement national. La
préparation du N.P.S.A. est appelée à s'intégrer dans le cadre plus large de la stratégie
internationale du développement de la Troisième Décennie des Nations Unies pour
le développement. Enfin, la Conférence invite l'Assemblée Générale de l'O.N.U. à
réunir une Conférence des Nations Unies sur les P.M.A., « chargée de mettre au
point, d'adopter et d'appuyer le N.P.S.A. pour les années 80».
L'Assemblée Générale, accédant au vœu de la C.N.U.C.E.D., a décidé, le 19
décembre 1979, de réunir une Conférence des Nations Unies sur les P.M.A. en 1981.
La Conférence de Paris est la première conférence des Nations Unies qui ait
été appelée à se pencher sur les problèmes spécifiques d'un groupe d'Etats
particuliers : les P.M.A. Cette conférence se distingue par son objet des autres
conférences des Nations Unies qui étudient des questions sectorielles, telles que l'étain
ou les pratiques commerciales restrictives, par exemple, ou bien qui examinent
des problèmes de caractère plus général, comme la population, l'alimentation,
l'environnement, etc. La Conférence de Paris sur les P.M.A. présente à ce titre un
premier trait d'originalité.
La Conférence de Paris sur les P.M.A. est intéressante également pour d'autres
raisons. Elle a donné lieu, tout d'abord, à un mode de préparation qui a associé
les pays concernés, et plus particulièrement les P.M.A. eux-mêmes, à l'élaboration
du N.P.S.A. La Conférence de Paris, d'autre part, a été un exercice réussi du
dialogue Nord-Sud.
Une négociation globale s'est développée entre les participants à la conférence.
Des engagements ont été pris par les pays développés comme par les P.M.A. Un
lien quasiment contractuel unit, si l'on considère la portée des textes adoptés, les
obligations qui pèsent sur les pays susceptibles d'aider les P.M.A. et les devoirs
de ces derniers à l'égard de leur propre développement. Enfin, sur le plan
institutionnel, le N.P.S.A. mérite de retenir l'attention, car il prévoit, après la conférence,
l'existence de réunions destinées, à travers un mécanisme de suivi, à surveiller
l'état d'exécution des mesures approuvées à Paris. La préparation de la
conférence (I), le jeu des acteurs de la conférence (II), les actes adoptés (III), les suites
de la conférence (IV) seront examinés successivement
I. — LA PRÉPARATION DE LA CONFÉRENCE
1) Le rôle pe la c.n.it.c.e.d.
Les sessions du Comité préparatoire avaient été préparées par une réunion d'un
groupe d'experts de haut niveau, chargé d'examiner le nouveau programme global
d'action en faveur des P.M.A. La convocation de ce groupe d'experts était d'ailleurs
prévue dans la résolution 122 (V) que la C.N.U.C.E.D. avait adoptée à Manille.
Les experts ont délibéré à Genève du 26 au 30 novembre 1979.
Le groupe d'experts est parvenu à un certain nombre de conclusions
intéressant les P.M.A. Les recommandations du groupe d'experts méritent de retenir
l'attention, car elles ont été largement débattues par le Comité préparatoire.
D'autre part, les suggestions du groupe d'experts sont devenues ensuite, pour la
plupart d'entre elles, non seulement des pièces essentielles des textes qui ont organisé
la préparation de la Conférence, mais aussi des éléments fondamentaux du
dispositif adopté à Paris (16).
(16) Le rapport du groupe d'experts souligne la nécessité pour chacun des P.M.A.
d'élaborer un plan national précis qui définisse ses principaux projets et programmes
prioritaires et précise le coût de leur réalisation. Ces plans nationaux doivent prendre place dans
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coopération entre
recettes d'exportation.
P.E.D. Ils devraient aussi utiliser au maximum les arrangements de
L'Assemblée Générale, en 1980, quand elle a adopté la S.I.D., a repris les propositions
du Comité préparatoire, mais les a complétées par d'autres dispositions visant à renforcer
la capacité technologique et productive des P.M.A. et à accroître leur autosuffisance
alimentaire. L'apport le plus original de l'Assemblée Générale se trouve dans la mention d'un sous-
objectif d'A.P.D. en faveur des P.M.A., évalué à 0,15 % du P.N.B. des pays développés pour
la première moitié des années 80 et à 0,20 % pour la seconde moitié.
(18) II s'agissait des Etats suivants : Djibouti, Guinée équatoriale, Guinée-Bissau, Sao Tome
et Principe, Seychelles et Tonga. Seule, la Guinée-Bissau a obtenu satisfaction, au mois de
mai 1981, devenant ainsi le 31* P.M.A.
(19) 107 Etats étaient représentés à la seconde session du Comité préparatoire.
(20) Les participants au séminaire ont insisté sur la nécessité pour les P.MA. de présenter
des programmes susceptibles de convaincre les donateurs et les inciter à accroître sensiblement
leur aide, l'expérience montrant que certains projets étaient mieux acceptés que d'autres
par les donateurs.
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(21) 112 Etats étaient représentés à cette session, ainsi que la plupart des organismes
des Nations Unies, des institutions spécialisées et des organisations intergouvernementales.
(22) A/Conf ./102/2 et add. 1-3.
596 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS
en vigueur parmi les P.E.D., où pour chaque sujet se superposent des réunions d'un
groupe de rédaction de 15 membres, de chacun des trois groupes régionaux
(Afrique, Amérique Latine, Asie), de leurs coordinateurs et enfin du groupe dans son
ensemble, n'a fait qu'accentuer l'incapacité des 77 à prendre parti sur un projet
de programme d'action(23) .
Au cours de cette période une réunion officieuse a permis d'établir un contact
direct entre les délégations des P.M.A. et celles du groupe B.
Une sévère mise en garde du Président du Comité plaça tous les participants
devant leurs responsabilités. Le Président obtint des 77 la diffusion de leur projet
de programme, et les pays du groupe B rendaient publiques leurs propres
propositions. Il était néanmoins trop tard pour négocier sur la base des textes en
présence. Un groupe restreint de coordinateurs adjoints et de vice -présidents parvint
à un compromis sur l'ordre du jour, sur l'organisation des travaux de la Conférence,
et sur la structure du programme d'action qui devait résulter de la Conférence
de Paris. L'accord obtenu ad referendum ne fut pas remis en cause au cours de
la séance plénière finale. Celle-ci enregistra par ailleurs l'accord intervenu au sein
d'un groupe ad hoc sur le règlement intérieur de la Conférence. Il fut décidé,
lors de la dernière séance, que les projets de programme déposés par les
représentants des groupes B et D et au nom des 77 seraient annexés de façon « non
officielle et non engageante » au rapport du Comité.
Le Comité préparatoire s'acheva dans ces conditions sur un résultat positif,
avec l'adoption de deux séries de textes. Les premiers faisaient l'objet d'un accord
de principe ad referendum et devaient être entérinés par la Conférence; ils
concernaient l'ordre du jour de la Conférence, l'organisation de ses travaux et le
règlement intérieur de la Conférence (24) . Les seconds résultaient des travaux de
rédaction des groupes B, D et des 77 et seraient transmis à la Conférence comme base
de discussion.
Le bilan du Comité préparatoire apparaît dans l'ensemble globalement positif.
Il faut noter tout d'abord que les sessions du Comité ont été suivies par un nombre
croissant d'Etats. Le Comité a joué un rôle utile pour l'organisation de la
préparation de la Conférence, précisant les responsabilités des P.M.A. eux-mêmes dans
l'élaboration de leurs projets et organisant le cadre des consultations avec les
donateurs. Le Comité a apporté sa contribution à la définition de la S.I.D. Le
Comité préparatoire a permis l'instauration d'un véritable débat, entre tous les
participants, sous la forme d'une répétition générale des discussions qui devaient
intervenir à Paris. Les problèmes des P.M.A. ont été analysés en profondeur lors
des trois sessions. Le Comité a mis en lumière, en second lieu, les enjeux de la
Confédence et désigné à l'attention générale les voies dans lesquelles la Conférence
pourrait s'engager sur des questions importantes, telles que l'adoption d'un nouveau
programme d'urgence (Crash Program) pour les P.M.A., ou l'organisation du suivi
de la Conférence et la place réservée à ce sujet à la C.N.U.C.E.D.
Enfin, même si le Comité n'est pas parvenu à l'élaboration d'un avant-projet
de N.P.S.A. devant servir de base de discussion, il a laissé à la Conférence un jeu
d'options sous la forme de trois variantes de N.P.S.A. émanant des trois groupes
de la C.N.U.C.E.D.
(23) Tout au long de cette période, le groupe asiatique sous l'impulsion du délégué du
Bangladesh, président du groupe des 77, multiplia les manœuvres de retardement au sein
du Comité.
(24) II fut prévu que la réunion de hauts fonctionnaires, prévue les 27 et 28 août 1981,
pourrait autoriser le Président ou le Bureau de la Conférence à modifier la répartition de
l'ordre du jour entre les deux commissions.
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L'impulsion politique est venue des gouvernements, les experts intervenant ensuite
sur la base des priorités qui leurs étaient communiquées.
Les plans de tous les P.M.A., dans l'ensemble de bonne qualité, avaient, sur
le plan intérieur, une valeur qui variait d'un Etat à l'autre. Dans certains cas le
plan élaboré était appelé à devenir le plan du pays lui-même. Dans d'autres cas
il ne s'agissait que d'un document destiné à l'usage de la Conférence. Quant à la
portée juridique que ces plans auraient à l'égard de la communauté internationale,
tout dépendait à cet égard du sort que leur réserveraient d'abord les réunions
de consultation et ensuite la Conférence elle-même.
(27) A Vienne furent examinés les plans des neuf pays d'Asie et du Pacifique; à Genève,
les plans des trois Etats d'Afrique australe, de la Guinée-Bissau et d'Haïti; à La Haye, les
plans des neuf Etats d'Afrique Centrale, d'Afrique de l'Ouest et de la Somalie; à Addis-Abeba
les plans de sept Etats d'Afrique de l'Est. Le cas de la Somalie fut traité à La Haye et non
pas à Addis-Abeba en raison du contentieux existant entre cet Etat et l'Ethiopie.
(28) M. Jan Pronk, secrétaire général adjoint de la C.N.U.C.E.D., a répondu à cet
argument, en disant que le principe des examens par pays avait été adopté par le Comité
préparatoire avec l'assentiment des pays de l'Est.
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS 599
a) L'action de VO.CD.E.
sur les besoins d'aide a été mis en place. Des discussions ont eu lieu au sein de
ce groupe sur les problèmes des P.M.A. et sur les positions à adopter dans la
perspective de la Conférence de Paris.
b) Le rôle de la C.E.E.
Les organes dé la C.E.E. ont été saisis tout d'abord du problème de la
participation de la Communauté à la Conférence. Mais le problème se posait en termes
différents suivant qu'il s'agissait de la participation de la Communauté aux
réunions de consultation ou de sa participation à la Conférence elle-même. Le but
des réunions d'examen par pays était de mettre en présence chaque P.M.A. et les
Etats acceptant de l'aider. Aussi a-t-il été décidé, au niveau du Conseil des
Ministres de la C.E.E., que la participation de la Communauté aux réunions de
consultation ne devait pas exclure le droit des Etats membres d'intervenir en leur qualité
de donneurs d'aide bilatérale (30).
Quant à la participation de la Communauté à la Conférence, des intérêts
contradictoires étaient en présence. D'une part, le principe de la compétence des
Etats membres en matière d'aide aux P.E.D. n'était pas remis en cause (31) . Les
Etats avaient également des objectifs autonomes en matière d'aide au Tiers-Monde.
Mais, d'autre part, on ne pouvait nier l'intérêt d'une coordination communautaire
lors de la Conférence de Paris, la C.E.E. étant un donneur d'aide important à
travers Lomé II, 21 P.M. A. étant par ailleurs des pays dits A.C.P.
Le principe de la coordination communautaire étant acquis pour les travaux
de la Conférence de Paris, la nécessité de préserver l'autonomie d'action des Etats
membres fut admise d'autant plus facilement que l'attitude restrictive du Royaume
Uni à l'égard des P.M.A. était susceptible d'embarrasser d'autres Etats de la
C.E.E,, lorsque la Grande-Bretagne exercerait la Présidence du Conseil européen,
et serait appelée à parler en son nom au moment de la Conférence.
Sur les problèmes de fond que soulèverait la Conférence de Paris, la
Commission a adressé des propositions au Conseil, le 19 juin 1981, sur les éléments à inclure
dans le N.P.S.A.
3. — L'action du pays-hôte
(32) La résolution invitait tous les Etats susceptibles de le faire d'accroître leur aide
aux P.M.A. Elle demandait à la Conférence de prendre en considération la nécessité de
doubler l'aide aux P.M.A. d'ici 1984 et de la multiplier par quatre d'ici 1990. Elle souhaitait
le déliement de l'aide. Enfin la résolution demandait à S.M. le Roi du Népal d'intervenir
au nom des pays membres de la C.E.S.A.P. et de la C.E.A.O. lors de la Conférence de
Paris. '
(33) Une réunion de la Conférence au Palais des Congrès de la Porte Maillot a été
écartée, car les sièges de la salle principale de ce bâtiment ne peuvent pas être équipés de
tablettes pour écrire.
(34) Accord du 31 juillet 1981 entre le gouvernement français et l'O.N.U., publié au
J.O.R.F., Lois et Décrets, le 22 octobre 1981, pp. 2878-2884.
(35) A ce titre la France a versé la somme de 567 000 dollars à l'O.N.U.
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS 603
des trois sessions du Comité préparatoire. En mars 1981, d'autre part, un comité de
liaison des O.N.G. s'est constitué à Genève, dans le but de faciliter leur
participation aux travaux de la Conférence de Paris.
Enfin, certaines O.N.G. ont apporté à d'autres O.N.G. situées dans les P.EA.
un soutien financier, de façon à assurer leur présence à Paris.
La Conférence des Nations Unies s'est réunie le 1er septembre à Paris. Elle
était chargée, conformément à la résolution 122 (V) de la C.N.U.C.E.D., « de mettre
au point, d'adopter et d'appuyer le N.P.SA. pour les années 80 en faveur des
P.M.A. ». La Conférence a été ouverte par M. Kurt Waldheim, Secrétaire général de
PO.N.U. M. François Mitterrand, Président de la République française, avait
auparavant prononcé un discours d'accueil et de bienvenue.
Au cours d'une première séance, la Conférence a choisi son Président, constitué
son bureau et ses organes de session, désigné les Présidents des Commissions, nommé
le rapporteur, élu les membres de la commission de vérification des pouvoirs,
adopté son règlement intérieur, statué sur son ordre du jour et l'organisation de
ses travaux. La Conférence a approuvé, d'autre part, les recommandations de la
Réunion de consultation entre hauts fonctionnaires qui s'était tenue, à Paris, entre
les 27 et 28 août 1981.
Conformément à la tradition en matière de conférence des Nations Unies
réunie hors du siège, le chef de la délégation du pays-hôte, M. Jean-Pierre Cot,
ministre de la Coopération et du Développement, a été élu Président de la
Conférence.
Pour rendre compte des travaux de la Conférence de Paris, il convient de
retracer l'action des délégués des Etats (1°) et d'envisager ensuite le rôle des
organes de la Conférence (2°). L'intervention des représentants des organisations
internationales (3°) et la participation des O.N.G. (4°) doivent être également
signalées.
(37) Furent aussi annoncées 16 réunions du groupe D, 9 réunions des pays de l'O.C.D.E.,
8 du groupe latino-américain, 7 du groupe africain, 5 du groupe asiatique, 3 du groupe des 77,
ainsi que deux réunions des coordinateurs des 77
(38) Les hauts fonctionnaires, par cette formule ambiguë, ont donné ainsi satisfaction à
la fois aux partisans d'un programme d'action immédiate et à ses adversaires qui souhaitaient
que la Conférence se préoccupe uniquement de l'élaboration du N.P.S.A. Pour les premiers,
le débat devait conduire à l'adoption de mesures d'urgence au profit des P.M.A. Pour les
seconds, il ne s'agissait que d'un point particulier de l'ordre du jour, devant donner lieu
uniquement à un débat.
606 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCES
(39) S.M. le Roi du Népal, Son Exe. M. Daniel Arap Moi, Président du Kenya, Son Exe.
M. Aristides Maria Pereira, Président de la République du Cap-Vert, et Son Exe. le Général
Major Habyarimana, Président de la République rwandaise.
(40) Ce fut le cas de la Belgique, de la France, de l'Irlande, de l'Italie, des Pays-Bas,
de la Suède, notamment.
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCES 607
b) Les commissions.
(41) On ne peut que se référer sur ce point aux remarques de M. Verally, cet Annuaire,
1970, pp. 9-33.
(42) M. G. Shortliffe (Canada) fut élu Vice-Président de la Commission I et l'Ambassadeur
Ewerlof fut élu Vice-Président de la Commission II.
608 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS
a) Le Bureau de la Conférence.
20
610 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS
égard de «one man show» pour qualifier le rôle du Président du début à la fin
de la Conférence (46) .
Deux points restaient sans solution, au terme des travaux des commissions : le
volume de l'aide à verser aux P.M.A. et le rôle de la C.N.U.C.E.D. dans
l'application, au niveau national, du N.P.S.A.
L'action de la C.N.U.C.E.D. dans le suivi a été examinée en premier par le
Bureau élargi, sur la proposition du Président. Ce dernier pensait que, ce problème
réglé, le Secrétariat de la C.N.U.C.E.D., une fois assuré de son rôle pour le futur,
inciterait le groupe des 77 à trouver un terrain d'entente avec les pays industria-
sés. Le calcul s'est avéré exact.
Encore fallait-il que les pays industrialisés s'accordent sur la question du
volume de l'aide. Les réserves de la Grande-Bretagne à l'égard d'un sous-objectif
d'aide aux P.M.A. ont été levées, lors des entretiens franco-britanniques de Londres,
le 10 septembre 1981. L'acquiescement donné par le Royaume-Uni a entraîné par
réaction l'adhésion de la République Fédérale d'Allemagne. La voie du compromis
entre les pays industrialisés et le groupe des 77 était ouverte. Le Président
proposa aux pays de l'O.C.D.E. d'accroître leur aide aux P.M.A. soit en consacrant
0,15 % de leur A.P.D. aux P.M.A. dans les années à venir, soit en doublant le
volume de cette A.P.D. au cours de la même période. C'est sur cette formule que
le consensus final a pris corps (47).
b) Le Secrétariat de la Conférence.
rence de Paris. Ils ont présenté, à cette occasion, les mesures spécifiques qui
étaient préparées au sein des organisations internationales en faveur des P.M.A.
Ils ont mis l'accent également sur le concours que les institutions qu'ils
représentaient pourront apporter à l'application du N.P.S.A. Les délégués d'un certain
nombre d'organes rattachés au Secrétariat de l'O.N.U. ont pris la parole dans le
même sens. La participation des institutions internationales aux travaux de la
Conférence de Paris n'a pas dépassé le cadre des interventions en séance plénière.
Les O.N.G. ont participé activement à la Conférence de Paris. Leur action s'est
développée sur quatre plans. Les O.N.G. ont pu prendre la parole tout d'abord
en séance plénière, à l'occasion du débat général. Les O.N.G. ayant le statut
d'organisme consultatif auprès des Nations Unies ont été autorisées, d'autre part, à
assister aux travaux des commissions, sans avoir le droit toutefois de participer
aux débats. Les O.N.G. ont, par ailleurs, en marge de la Conférence, pris des
contacts avec les délégations des Etats pour obtenir, dans le N.P.S.A., la
reconnaissance de leur rôle dans le développement des P.M.A. Leur attente a été déçue
sur ce point. Le N.P.S.A. ne contient guère plus qu'une simple mention de leur
existence. Les O.N.G. représentées à Paris ont décidé enfin la création d'un
nouveau comité de liaison pour défendre la place des O.N.G. dans leur ensemble dans
le suivi de la Conférence (49) .
(49) Le Comité, composé de sept personnes appartenant à des O.N.G. du Sud et de cinq
personnes appartenant à des O.N.G. du Nord, est chargé de surveiller et d'assurer la
participation des O.N.G. à l'application du N.P.S.A., de développer la coopération et de renforcer
la solidarité entre O.N.G. du Nord et O.N.G. du Sud, d'organiser à l'époque de la VI'
CN.U.CEJX, en 1983, une Conférence Sud-Nord des O.N.G.
612 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS
1. — Le contenu du N.P.S.A.
Les trois chapitres du N.P.S.A. sont précédés par un préambule qui énonce,
comme il est d'usage dans une résolution, un certain nombre de rappels et
d'affirmations. Deux points méritent de retenir l'attention dans ce préambule. Tout
d'abord, il est reconnu de façon explicite que « c'est aux P.M.A. eux-mêmes
qu'incombe avant tout la responsabilité de leur développement». Ce texte reprend
sur ce point l'une des propositions formulées par le groupe B, tout au long des
travaux préparatoires de la Conférence. Le point de vue des pays industrialisés se
trouve désormais avalisé par l'ensemble des P.E.D. Dans ces conditions l'aide
des Etats développés ne peut être qu'une mesure d'appui des efforts entrepris
par les P.M.A. pour leur propre développement
La Conférence a réaffirmé, d'autre part, comme l'avait fait l'Asemblée
Générale, lors de sa session spéciale en 1980, que les mesures d'appui aux P.M.A.
doivent être fournies non seulement par les pays développés et les institutions
multilatérales de développement, mais aussi par les « pays en développement
qui sont en mesure de le faire ». Là également, ce texte répond à l'une des
préoccupations des pays développés. L'effort international en faveur des P.M.A.
doit être équitablement réparti entre toutes les composantes de la communauté
internationale, sans exception.
Le Préambule rappelle, par ailleurs, des objectifs qui figurent soit dans la
résolution 122 (V) adoptée par la C.N.U.C.E.D. à Manille, soit dans la Troisième
Décennie du Développement. Le Préambule se termine par la décision d'adopter
le N.P.S.A. Le N.P.S.A. contient, comme il a été dit, des dispositions qui
s'articulent autour de trois axes : des mesures à caractère national (A) , des mesures
d'appui international (B), et, enfin, un mécanisme de suivi des travaux de la
Conférence (C).
bules », répartis ici et là tout au long du N.P.S.A., rappelant à propos des mesures
à prendre d'autres traits caractéristiques des P.M.A.
Le Chapitre I du N.P.S.A. consacre et officialise la stratège dite des «besoins
essentiels » ou du « développement autocentré ». Les P.M.A. sont invités à
entreprendre des efforts dans quatre domaines qui concernent : le secteur de
l'alimentation et de l'agriculture (a) , le développement des ressources humaines (b),
l'accroissement des ressources naturelles et de l'énergie (c) et la promotion de leur
infrastructure matérielle et de leur potentiel économique et commercial (d).
a) L'agriculture et l'alimentation.
Les P.M.A. vivant essentiellement de leurs ressources agricoles et pastorales,
mais de plus en plus mal, le secteur rural devrait se voir reconnaître dans les
plans nationaux une priorité absolue. Le N.P.S.A. énonce toute une série de
mesures à adopter à tous les niveaux de la < chaîne » ou du « système »
alimentaire :
— production : politique des cultures vivrières, rapport avec les cultures
d'exportation, approvisionnement et politique de prix des intrants, association
agriculture-élevage, développement de la pêche, recherche génétique et
technologique, etc.;
— commercialisation : politique de prix aux producteurs, lutte contre les pertes
après récolte, politique de stockage, de transport, gestion des offices céréaliers, de
l'aide alimentaire, etc.;
— consommation : analyses nutritionnelles par groupes ethniques et sociaux,
promotion et défense des produits locaux, limitation des importations, etc.
Ces mesures s'inspirent, pour la plupart, du Programme d'action adopté par
la Conférence des Nations Unies sur la réforme agraire et le développement rural
à Rome en 1979. Elles doivent, par ailleurs, être harmonisées au moyen de stratégies
alimentaires nationales, conformément aux recommandations du Conseil mondial
de l'alimentation. Le N.P.S.A. fait référence, de façon explicite, à ces textes.
Les P.M.A. devraient développer leur infrastructure dans tous les domaines
où les équipements de base sont insuffisants : transports et communications,
approvisionnement en eau, hôpitaux, écoles, etc. Ils devraient également
entreprendre des programmes de développement industriel à partir de l'agriculture
et des secteurs d'appui à l'agriculture.
Le secteur commercial mérite un soutien actif de la part des P.M.A. II s'agit
en effet d'accroître le volume des exportations. Des stratégies de développement
des exportations sont à mettre en place. Mais dans ce domaine l'action des P.M.A.
doit être relayée par les mesures d'appui au niveau international.
(50) § 60 de la résolution.
(51) f 63 de la résolution.
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS 615
et que, d'autre part, ces derniers s'engagent à accorder aux P.MA au moins
0,15 % de leur P.N.B. pendant la période 1981-1985 et 0,20 % au cours des cinq
années suivantes.
Ces propositions ne pouvaient recevoir l'approbation des pays développés. Les
formules de doublement, de triplement, voire de quadruplement de l'aide ne sont
pas satisfaisantes. Ou bien il s'agit de l'aide de l'ensemble des donneurs, et ces
formules n'ont pas d'effet contraignant à l'égard de chaque Etat qui ignore
d'ailleurs, quand il détermine sa position, le volume global d'aide qui sera versé
par l'ensemble de ses partenaires. Ou bien ces formules visent chaque donneur,
et elles sont alors profondément injustes : trop exigeantes pour les Etats qui
font déjà un réel effort vis-à-vis des P.M.A., elles s'avèrent insuffisantes pour
les Etats dont les apports sont moins élevés.
Pour éviter ces inconvénients, il est possible d'envisager l'affectation aux
P.M.A. d'une part minimale de l'aide globale. Mais cette solution ne garantit au
mieux qu'un redéploiement de l'aide versée au détriment des autres P.E.D., et
risque par ailleurs d'opposer les intérêts des P.M.A. à ceux des P.E.D. Seule
une formule basée sur un sous-objectif d'aide aux P.M.A. est conforme à
l'équité. Mais pour être efficace, elle doit être assortie d'un délai.
Le N.P.S.A. met en place un système mixte, qui offre aux pays donateurs
le choix entre la formule du doublement de l'aide et la solution du sous-objectif.
Le principe d'une option, laissée aux donateurs, a été retenu, à raison des
objections de certains pays développés, tels que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni,
à l'égard de tout objectif ou sous-objectif chiffré d'AP.D.
Le N.P.S.A. prévoit que les efforts accomplis par les donateurs représenteront
d'ici 1985 le double de TA.P.D. accordée aux P.M.A. au cours des cinq dernières
années. Mais cette perspective ne s'inscrit pas dans un calendrier précis. D'autre
part, le N.P.SA. rappelle que les P.M.A. ont chiffré à 5,7 milliards par an leurs
besoins d'aide extérieure, mais n'intègre pas ces estimations dans son dispositif.
Le N.P.S.A. approuve, à l'inverse, le souhait formulé par les 77 d'une aide
aux balances des paiements des P.M.A.
Au sujet des nouveaux mécanismes destinés à assurer des transferts accrus de
ressources financières aux P.M.A., le N.P.S.A. reprend les propositions formulées
par le groupe des 77 sur les nouvelles ventes d'or par le F.M.I., le lien entre la
création de D.T.S. et l'aide au développement, la bonification des intérêts, mais
seulement pour en recommander l'examen par les institutions compétentes.
Sur les modalités de l'aide le N.P.SA. réalise un compromis entre le texte des
77 et celui du groupe B. H ne reprend pas le paragraphe des 77 sur l'aide au
renforcement des programmes nationaux de sécurité alimentaire, ni l'exigence
de limiter la participation du P.MA. bénéficiaire à 10 % du projet aidé. Le texte
précise certes que l'aide sera déliée, mais seulement dans toute la mesure du
possible. La prise en charge par les institutions donatrices des dépenses
renouvelables ne concernera que les « projets hautement prioritaires ».
En revanche, les 77 obtiennent gain de cause sur la prise en compte de
l'inflation, la considération, à côté des critères financiers, des conséquences socio-
économiques des projets, et sur l'utilisation des organismes de développement des
pays bénéficiaires. Les mesures du N.P.SA. qui concernent les procédures de
versement aux P.MA. proviennent du texte des 77 et du texte du groupe B. Elles visent
à assurer l'accélération des paiements, des versements anticipés, la prise en charge
par les pays donateurs des coûts locaux.
616 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS
c) L'assistance technique.
Le N.P.S.A. développe sur ce point le contenu du projet des 77, assez proche
par ailleurs du texte du groupe B lors des travaux préparatoires. La résolution
mentionne successivement la fourniture d'experts, la formation du personnel local,
les études de faisabilité, et la coopération technique entre P.E.D.
(52) ! 76 de la résolution.
(53) § 77 de la résolution.
(54) § 79 de la résolution.
(55) La C.E.E. s'est engagée, lors de la Conférence de Paris, à étudier la possibilité
d'étendre le STABEX ou un système analogue aux P.M.A. qui n'en bénéficient pas encore.
618 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS
C. — Le suivi de la Conférence
Le système proposé par la C.N.U.C.E.D. pour le suivi par pays se serait donc
traduit par une modification importante du rôle et de la structure de cette
institution. Le N.P.S.A. établit pour le suivi de la Conférence une construction à deux
étages, avec un niveau national et un niveau mondial. La Conférence de Paris a
décidé que l'organisation du suivi au plan national relève de la compétence des
P.M.A. (a). A l'inverse, au niveau mondial, le N.P.S.A. consacre le rôle de la
C.N.U.C.E.D. et institue un mécanisme à forte «visibilité» sur le plan
international (b).
a) Le suivi national.
Chaque P.M.A. est invité, tout d'abord, à créer un «organe central, chargé
de maintenir en permanence le contact avec ses partenaires de développement
bilatéraux et multilatéraux pour ce qui est de l'examen et de l'exécution du
N.P.SA. » (56)
Ensuite, les P.M.A. pourront créer des groupes consultatifs en matière d'aide,
en tant que mécanismes chargés de l'examen et de l'exécution du N.P.S.A. Les
P.M.A. sont invités à utiliser les institutions existantes, comme le groupe consultatif
de la Banque Mondiale ou les tables rondes du P.N.U.D. ou le Club du Sahel,
par exemple, pour organiser des réunions de donateurs. Le Secrétaire général de
la C.N.U.C.E.D. devrait être invité à se faire représenter aux réunions de
consultation par pays. Ces réunions, dont la périodicité n'est pas fixée, feront le bilan
de l'application du N.P.S.A. (57) .
Les dispositions qui concernent le suivi national se situent en retrait par
rapport aux propositions de la C.N.U.C.E.D. Les réunions de consultation par pays
ne doivent pas conduire à des engagements d'aide aux P.M.A. Elles auront
néanmoins une « fonction de tribune » et permettront de placer l'ensemble des
donateurs devant leurs responsabilités. Il sera plus difficile, dans le futur, pour les
donateurs, de récuser les invitations des P.M.A. à prendre part à ces réunions,
compte tenu des engagements pris à Paris. Le suivi au niveau mondial, en
prenant le relais de ces réunions par pays, est appelé à en présenter le bilan.
b) Le suivi mondial.
Le N.P.S.A. est une résolution approuvée par consensus par une Conférence
des Nations Unies. L'Assemblée Générale de l'O.N.U. a «fait sien», ensuite, le
N.P.S.A. en adoptant une autre résolution, par consensus également.
Une première remarque s'impose, d'emblée. C'est à partir de la résolution
adoptée par la Conférence de Paris, mais aussi au regard des dispositions incluses
dans la résolution de l'Assemblée Générale, qu'il convient d'apprécier la portée
sur le plan du droit du N.P.S.A.
A la lumière de ces deux textes, on constate que l'adoption du- N.P.S.A.
implique des conséquences sur le plan juridique, qui concernent, d'une part, le
système des Nations Unies (A), et, d'autre part, les Etats destinataires de ces
résolutions (B).
(59) Les réunions du contrôle au niveau mondial procéderont à : l'examen des progrès
réalisés par chacun des pays à la date de la réunion, dans le cadre de la décennie; l'étude
des progrès accomplis quant aux mesures d'appui prises au niveau international, en particulier
quant à l'aide publique au développement; l'examen des mesures qui pourraient être
nécessaires pour assurer l'exécution intégrale du N.P.S.A. pendant la décennie.
(60) § 122 de la résolution.
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS 621
Quant aux recommandations adressées aux Etats, elles ont une portée très
différente, suivant qu'elles visent les P.MA. ou les Etats donateurs. Même s'ils
acceptent les objectifs et les priorités du N.P.SA., les P.M.A. sont des Etats
souverains et restent libres d'apprécier le bien-fondé des exhortations qui leur sont
présentées. Les Etats donateurs se trouvent liés davantage par la substance de
textes qu'ils ont acceptés sans opposition et sans réserves.
Mais là n'est pas l'essentiel. L'aspect le plus original du N.P.S.A., pour ce qui est
de sa portée juridique, se trouve ailleurs, à savoir dans le mécanisme du suivi qui
établit un lien quasiment synallagmatique entre les « devoirs » des P.MA. vis-à-vis
de leur propre développement et les obligations que doivent assumer les autres pays
à leur égard. Le N.P.S.A. contient les éléments d'un contrat global entre les P.MA.
et les Etats susceptibles de les aider. Il s'agit au fond d'une résolution-contrat, qui
repose sur le do ut fades.
Le suivi institue en effet un lien entre les obligations des P.M.A. et les
engagements des pays donateurs. Lors des réunions du suivi, au plan national, comme
au niveau mondial, les P.M.A. comme les autres Etats seront invités à présenter
le bilan des actions entreprises. Pour bénéficier de l'aide des pays développés, les
P.M.A. doivent engager des réformes de structure. S'ils ne veulent pas se trouver
en position d'accusés, lors des réunions de suivi, les pays donateurs ont intérêt
à se conformer au respect des dispositions du N.P.S.A. qui les concernent. Le
mécanisme du suivi représente, dans ces conditions, un facteur de pression continue
pour les uns comme pour les autres. Lors des réunions de suivi national des
admonestations seront adressées de part et d'autre. En 1985, le groupe
intergouvernemental chargé des P.M.A. au sein de la C.N.U.C.E.D. procédera à un examen à
mi-parcours de l'application du N.P.S.A., et cet examen sera plus qu'un examen
de conscience. Le groupe intergouvernemental pourra, en effet, réviser, à cette
occasion, le N.P.S.A. et aménager ses dispositions, compte tenu des résultats obtenus.
L'éventualité de cet ajustement indique clairement que les engagements pris à Paris
doivent se traduire sur le plan des faits et sur le plan du droit.
Il faut souligner par ailleurs que le N.P.S.A. a été approuvé, par la Conférence
de Paris et par l'Assemblée Générale, par consensus. H s'agit même d'un consensus
renforcé, dans la mesure où les Etats, à Paris, n'ont pas formulé de réserves à
l'égard de la résolution mais ont pris, au contraire, pour un certain nombre d'entre
eux, des engagements unilatéraux vis-à-vis du texte adopté. Certes, ces déclarations
d'intention doivent être confirmées, le cas échéant, par la suite, par l'autorité
parlementaire. Mais elles n'en représentent pas moins un début d'obligation. H ne faut
pas oublier, d'autre part, comme la remarque en a été faite, qu' « il existe des
gouvernements de bonne foi » (61) . Les promesses des représentants des Etats ne sont
pas toujours écrites sur le vent.
Il convient de noter également que la portée du N.P.SA. sur le plan juridique
dépend aussi de la durée de sa validité, et des délais prévus pour sa mise en
œuvre. Le programme est en vigueur pour une période de dix années, avec
simplement la possibilité de procéder à des ajustements en 1985. Il bénéficie donc pendant
ce laps de temps d'une certaine stabilité. D'un autre côté, l'examen à mi-parcours
mis à part, le N.P.S.A. ne prévoit pas de calendrier, ni d'échéancier pour sa
réalisation. Il ne contient pas de programme d'action immédiate. H déclare
simplement qu'une part très importante d'A.P.D. « devrait être versée d'urgence » aux
P.M.A. II est vraisemblable que ce sont les réunions de suivi au niveau national
qui détermineront, suivant des modalités souples et variables, l'enchaînement des
étapes à franchir pour l'application du N.P.SA.
(62) 15 millions de dollars pour le Laos, 14,3 pour le Népal, 20 pour la Tanzanie.
(63) II s'agit d'un prêt de 4 millions de dollars.
(64) La contribution du Fonds s'élève à 3 millions de dollars.
624 CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCES
**
La Conférence de Paris s'est achevée sur un résultat positif, et les engagements
pris sont loin d'être négligeables. Les P.M.A. doivent recevoir de la part de la
communauté internationale une aide accrue. Le mécanisme du suivi permettra de
surveiller l'application des mesures adoptées à Paris.
Une question néanmoins reste posée : les P.M.A. représentent-ils une catégorie
distincte au sein des P.E.D. ? La Conférence de Paris a-t-elle consacré sur le plan
juridique une nouvelle division du Tiers Monde ? Les mesures spéciales en faveur
des P.M.A. sont-elles dérogatoires, par rapport aux règles du droit international
du développement ? La lecture du N.P.S.A. apporte à cette question des éléments
de réponse. Le N.P.S.A. prévoit une aide accrue et met en place des arrangements
institutionnels en faveur des P.M.A. Mais les «mesures spéciales» qu'il contient
n'ont pas un caractère spécifique. Le N.P.S.A. envisage, pour la plupart de ses
dispositions, d'appliquer aux P.M. A. des règles déjà en vigueur dans les relations
entre pays développés et P.E.D. II ne crée pas un droit spécial pour une catégorie
d'Etats. Il cherche plutôt à étendre à ce groupe d'Etats un droit déjà plus général.
Cette tendance pourrait être prolongée par la reconnaissance aux P.MA. du
droit de bénéficier de tous les avantages que les pays développés auraient déjà
consentis à certains P.E.D. II s'agirait d'une règle nouvelle du droit international du
développement, qui s'appellerait la clause de la nation la moins défavorisée.
(65) Les réunions de suivi par pays seraient organisées plus facilement par la C.N.U.C.E.D.,
si elles étaient regroupées sur une base régionale. Elles auraient plus d'impact également sur
l'opinion publique internationale.
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS 625
ANNEXE n°I
Nombre de délégués par Etat
ANNEXE n° II
Point d'origine des délégués
ANNEXE N° m