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Par ailleurs, plusieurs zoonoses ont fait parler d’elles V. CARON, G. ABADIA
État de la santé de la faune ces dernières années : Département Études et
domestique La fièvre charbonneuse est devenue rare en
France. Cependant, les années 2008 et 2009 ont été
assistance médicales,
INRS
Borréliose de Lyme
et encéphalite à tiques Ornithose-psittacose :
de la détection des cas groupés
Pr D. Christmann, CHU Strasbourg
aux recommandations en santé
Après un bref rappel sur le cycle des tiques et leur au travail
importance en pathologie humaine, la communication
a repris les termes de la conférence de consensus sur Dr E. Belchior, InVS, Cellule interrégionale
la transmission, la clinique, les éléments du diagnostic d’épidémiologie des Pays de la Loire, Nantes
biologique et le traitement de la borréliose de Lyme. À
noter que la moitié des cas diagnostiqués en phases se- E. Belchior a rappelé les raisons pour lesquelles
condaire et tertiaire n’a pas présenté d’érythème mi- l’InVS a mené une étude sur la psittacose dans les Pays
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grant. À l’inverse, le traitement de tout érythème de la Loire : « Devant l’insuffisance de données d’incidence
du Travail migrant diagnostiqué empêche l’apparition de ces de la psittacose chez l’homme en France et le peu de don-
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1er trimestre 2011 phases secondaire et tertiaire. nées actuellement disponibles chez l’animal, et, par ailleurs,
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la gravité potentielle de la maladie chez l’homme et la per- humains qui s’avère indispensable pour identifier la
sistance d’épisodes épidémiques dans divers contextes profes- présence de la bactérie. Cette surveillance devrait être
sionnels avicoles, une étude descriptive et prospective de la mise en place dans les départements et les milieux les
psittacose a été mise en place dans dix-sept départements du plus exposés, s’appuyant sur la collaboration des diffé-
sud-ouest et de l’ouest de la France de 2008 à 2009. Les rents professionnels en santé publique, en santé hu-
principaux objectifs étaient d’estimer l’incidence des cas hos- maine et animale.
pitalisés, de repérer les cas groupés, de décrire les expositions
des cas et d’étudier la faisabilité d’un système de surveillance
de la psittacose ».
Deux exemples d’investigations ont été pris en Pays
de la Loire :
Zoonoses et nouveaux
- lors d’un épisode ayant entraîné 3 cas et 1 décès animaux de compagnie
dans deux abattoirs en mars-avril 2009,
- lors d’un foyer de cas groupés (3 cas) dans un cou-
voir à l’automne 2009. Dr B. Quinet, Hôpital Armand-Trousseau, Paris
Chacune des investigations a été détaillée : défini-
tion de la population, contact avec les médecins du B. Quinet, pédiatre, a évoqué les zoonoses les plus
travail pour la passation de questionnaires et la pres- fréquentes attribuables aux nouveaux animaux de
cription éventuelle d’examens complémentaires (séro- compagnie.
logies ou PCR), réalisation d’une enquête vétérinaire. Les nouveaux animaux de compagnie (NAC) sont
Les résultats montrent pour la première enquête en tous les animaux de compagnie autres que les chiens
abattoir : et les chats. Les NAC représentent environ 5 % des
- des difficultés diagnostiques notamment liées à la 60 millions d’animaux de compagnie en France. En
sérologie, 2006, la France comptait 3 millions de rongeurs et
- la polyvalence des personnels sur les postes de tra- 3,7 millions d’oiseaux de compagnie, pour 1 million
vail rendant la caractérisation de l’exposition complexe, de reptiles.
- une investigation vétérinaire trop tardive par rap- Pour les chats et chiens, le risque zoonotique sem-
port à l’épisode pour rapporter des éléments pro- ble relativement bien connu et pris en charge par les
bants. contrôles vétérinaires. Il n’en demeure pas moins que
Pour la deuxième en couvoir, l’analyse des 6 malades l’information des propriétaires et des professionnels en
identifiés par l’investigation retrouve, selon les postes contact avec ces animaux devrait être renforcée.
de travail, des activités d’élevage (dont insémination) À l’inverse, pour les NAC, ce risque est moins bien
pour 3 d’entre eux, des activités de lavage lors de l’ac- connu, moins bien maîtrisé et potentiellement respon-
couvage pour 2 autres, le dernier appartenant à une sable de maladies sévères, notamment pour les femmes
équipe mobile. L’enquête vétérinaire a permis de re- enceintes et les personnes immunodéprimées, même si
trouver un lot positif chez les reproducteurs mâles. le nombre de ces pathologies reste faible en regard du
Ces investigations ont été suivies d’actions complé- nombre d’animaux considérés.
mentaires : prise en charge thérapeutique adaptée, sen- Ont été citées, pour exemple, les salmonelloses
sibilisation des médecins du travail et des médecins notamment liées aux reptiles, les infections dues au
généralistes, information des salariés par plaquette sim- virus de la chorioméningite lymphocytaire trans-
ple ou par contact direct avec rappel des mesures de mises par les petits rongeurs (hamsters, souris), les in-
prévention (hygiène générale, port de masques et de fections cutanées dues au virus cowpox liées à des
gants au contact des oiseaux), reconnaissance des ma- rats de compagnie, les pasteurelloses ou streptoba-
ladies professionnelles, pistes de recherche vétérinaire, cilloses secondaires à la morsure ou griffure de
mise en place de suivi prospectif avec prescription de rongeurs, ou encore les mycobactérioses à Myco-
sérologies répétées en cas de symptôme grippal chez bacterium marinum souvent rencontrées chez les
les salariés exposés… aquariophiles après nettoyage des aquariums et enfin
Ces actions sont venues nourrir les recommanda- les lésions dermatophytiques après contact avec
tions proposées à l’issue des 18 mois de l’enquête qui re- rongeurs, lapins, furets…
prennent les items ci-dessus. Il faut y ajouter la nécessité Ces NAC sont aussi potentiellement responsables
de la mise en place la plus rapide possible des investiga- d’allergie : asthme, rhinite, eczéma voire de choc ana-
tions vétérinaires lors de la survenue de cas humains, phylactique (urine, salive, poils).
ainsi qu’une réflexion sur l’aménagement des postes de Sur le plan de la prévention, il est indispensable de
travail pour limiter la contamination aérienne. renforcer d’une part les contrôles vétérinaires et d’autre Documents
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Plus globalement, les conclusions de l’enquête pré- part l’information des personnes exposées à ces NAC du Travail
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conisent une surveillance conjointe des cas animaux et sur les mesures d’hygiène générale à respecter. 1er trimestre 2011
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surveillance et de prévention des zoonoses en multi-
Actualités thérapeutiques partenariat. Y. Cosset en a rappelé les objectifs :
et vaccinales « - améliorer les connaissances sur les zoonoses non ali-
mentaires,
- améliorer l’alerte en cas de pathologie humaine ou ani-
Pr C. Perronne, Hôpital Raymond Poincaré, male,
Garches - définir des stratégies de prévention adaptées pour les
professionnels exposés,
C. Perronne a présenté un large panorama des prin- - promouvoir des actions d’information auprès des tra-
cipaux traitements et vaccinations disponibles pour le vailleurs exposés par l’intermédiaire des préventeurs. »
traitement des zoonoses. Il a également insisté sur les
mesures de prévention à prendre notamment vis-à-vis Conseil scientifique multipartenarial et binômes de
des vecteurs. préventeurs de terrain spécifiquement formés (méde-
La plupart des zoonoses bactériennes se traitent par cin du travail, conseiller en prévention des risques pro-
antibiotiques, en mono ou bithérapie, avec souvent des fessionnels) dans chacune des 35 caisses de MSA
cyclines en première intention. Les traitements des constituent le maillage du réseau. Études et enquêtes,
formes chroniques de la fièvre Q et de la brucellose conception et diffusion d’outils d’information, assis-
sont longs et difficiles. tance aux préventeurs de la MSA, partenariats avec les
Pour la leptospirose, l’existence de mesures de pré- professionnels de l’élevage, avec les professions de
vention, l’efficacité d’un traitement, un schéma vacci- santé animale et humaine… sont des actions dévelop-
nal lourd, l’inefficacité du vaccin sur certains sérotypes pées par le réseau, auxquelles il faut ajouter le signale-
relativisent l’utilisation du vaccin qui doit être prescrit ment par les médecins du travail des zoonoses
au cas par cas selon l’évaluation du risque. professionnelles constatées en agriculture (à l’excep-
Des vaccins existent également contre la rage et tion des maladies à déclaration obligatoire, déclarées à
l’encéphalite à tiques. Les indications en sont détermi- l’InVS). Ces signalements anonymisés sont informati-
nées par le calendrier vaccinal et par des avis du sés depuis peu et centralisés de façon à obtenir à terme
Conseil d’hygiène publique de France en 2005 pour la une image des zoonoses contractées par les salariés
rage et du Haut Conseil de santé publique en 2009 agricoles, les exploitants et les personnels suivis par la
pour l’encéphalite à tiques. MSA par convention (Office national des forêts, Office
Par ailleurs, la prévention contre les piqûres de national de la chasse et de la faune sauvage…), même
tiques a été mise en avant. Sur le plan de la prévention s’il est évident que l’exhaustivité sera impossible à ob-
de la borréliose de Lyme, le port de vêtements cou- tenir.
vrants a été discuté ainsi que la place des répulsifs. L’in-
térêt de l’inspection du corps et de l’extraction la plus
précoce possible de la tique a été rappelé, ainsi que
l’absence de vaccin actuellement disponible.
Pour l’encéphalite à tiques, les mesures de préven-
Conclusion
tion ne diffèrent de celles de la borréliose de Lyme que
par l’existence d’un vaccin qui n’est pas recommandé À la fin de la journée, le Pr P. Choutet est revenu
en France au vu des données d’incidence de la maladie. sur quelques zoonoses « émergentes » qui ont fait par-
ler d’elles récemment : Chikungunya en Italie l’été
2007, rage vulpine en Italie en 2008, fièvre du Nil oc-
cidental en Macédoine l’été 2010… Il s’est arrêté par-
Zoonosurveillance en ticulièrement sur l’hépatite E et les différentes
données disponibles sur les professionnels exposés
agriculture : stratégie et enjeu (notamment études de séroprévalence). C’est une ma-
ladie pour laquelle on recense désormais des cas au-
Dr Y. Cosset, Caisse centrale de Mutualité so- tochtones par contamination alimentaire dans le sud
ciale agricole, Bagnolet de la France.
P. Choutet a conclu sur les relations étroites entre
Les zoonoses sont un sujet particulièrement d’inté- l’émergence de maladies infectieuses et les interactions
rêt en agriculture où les activités en contact direct ou entre l’agent pathogène, l’hôte et son environnement.
indirect avec les animaux sont fréquentes (production La surveillance de ces maladies infectieuses nécessite
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animale, activités forestières, espaces verts…). ainsi une détection précoce, une alerte et une réponse
du Travail C’est pour cette raison que la Mutualité sociale agri- appropriées, la prévention ne devant pas être oubliée
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1er trimestre 2011 cole (MSA) s’est dotée, depuis 10 ans, d’un réseau de dans ce plan d’action.
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