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C'est bien une bataille qui s'est engagée. Après dix ou quinze ans
d'internationalisation soutenue de l'enseignement supérieur, la planète de la
connaissance bascule bel et bien dans un système global, multipolaire, où tout
circule : les étudiants, les profs, les idées… Pour compter, les universités et les
écoles cherchent à attirer les meilleurs de leurs pairs. "On y met beaucoup de
ressources, affirme Bernard Ramanantsoa, directeur général d'HEC, prestigieuse
école de management française. On se bat vraiment."
Surtout, les étudiants sont de plus en plus mobiles, notamment en Asie et au Moyen-
Orient. Ils sont 2,9 millions à avoir étudié hors de leur pays d'origine en 2008,
rappelle l'Unesco. Selon certaines projections, ils seront 7,2 millions en 2025. La
mondialisation est un moteur puissant. "Tous les problèmes intéressants
franchissent les frontières, déclare David Ellwood, doyen de la Kennedy School of
Government d'Harvard dans The Economist du 20 janvier. Il faut donc apprendre
aux gens à traverser les frontières."
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Par ailleurs, poursuit M. Ramanantsoa, "avec de bons professeurs, vous contribuez
à la fabrication du savoir. Or il existe deux types de pays : ceux qui créent le savoir
et ceux qui le reproduisent".
Quelle est la position de la France dans cette compétition ? Loin d'être mauvaise.
Avec 240 000 étudiants étrangers accueillis, elle est la troisième destination
mondiale, après les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Il faut faire beaucoup plus, plaide
Pierre Tapie, qui propose de porter l'effectif à 750 000 en dix ans. A l'Ecole centrale
de Paris, 30 % des étudiants et de 5 % à 10 % des enseignants sont étrangers ; à
l'université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC), 23 % et 9 %; à HEC, de 40 % à 85 % et
55 %.
Pour attirer les meilleurs étudiants – et enseignants –, les grandes écoles ont pris
une longueur d'avance. Contrairement aux universités, elles sélectionnent, et c'est là
un outil efficace. Mais pas suffisant. Il faut aussi être visible à l'international.
L'accréditation accordée par trois organismes privés fait référence pour les écoles
de management. Etre présents dans les classements s'impose. Shanghaï Times
Higher Education ou Financial Times, les "radars", comme les appelle Richard
Perrin, directeur international de l'Edhec, ne manquent pas.
Conséquence, "le marché est très standardisé, constate M. Perrin. Seule subsiste la
réputation de l'école, et la ville où elle se situe. La marque est donc devenue
fondamentale". A ce petit jeu, Harvard ou la Sorbonne disposent d'un nom connu et
porteur de prestige intellectuel. Mais le modèle d'enseignement peut également être
un atout. La manière française de former des managers ou des ingénieurs a bonne
cote. Au point qu'en 2005 Centrale a tout simplement transplanté son modèle en
Chine.
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En dehors de cela, il est indispensable de faire du marketing, de fréquenter les
Salons internationaux pour "vendre" sa marque. Il faut également développer les
cours en anglais. Et mettre la main au portefeuille. Certains établissements
n'hésitent plus à exonérer tout ou une partie des frais d'inscription pour les meilleurs
étudiants. Attirer les profs stars implique aussi de bons salaires et des conditions de
travail au top-niveau.
Tout cela coûte cher, très cher. D'où la nécessité de lancer des campagnes de
collecte de fonds ou d'augmenter les frais d'inscription. Et pourquoi, demande M.
Tapie, ne pas faire payer davantage les étudiants étrangers ? Evidemment, le
secteur public est pénalisé. Jean-Charles Pomerol se montre d'ailleurs très méfiant
vis-à-vis de cette "politique de footballeurs". L'UPMC, qu'il dirige, n'en a pas les
moyens. De toute façon, dit-il, "ça ne marche pas" si l'on veut mener une politique
"durable" de recherche, car celle-ci implique un investissement de longue haleine
des équipes.