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Application de la RMN

à la détermination des structures

par Nicole PLATZER


Professeur
Docteur ès sciences
Ingénieur de l’École nationale supérieure de chimie de Paris (ENSCP)
Laboratoire de RMN biologique-ICSN-CNRS (Gif-sur-Yvette)

1. Généralités. Techniques disponibles ................................................... P 1 092 - 2


2. Stratégie générale ................................................................................... — 4
3. Molécules de synthèse ........................................................................... — 10
4. Biomolécules ............................................................................................. — 15
5. Conclusion ................................................................................................. — 18
Références bibliographiques ......................................................................... — 18

a résonance magnétique nucléaire haute résolution est un outil exceptionnel


L pour déterminer la structure d’une molécule naturelle ou synthétique. Grâce
à la diversité des paramètres mesurables, elle permet d’aborder l’ensemble des
problèmes posés par l’examen d’une molécule en solution. L’originalité de la
RMN par rapport aux autres techniques spectroscopiques réside dans le fait
d’apporter une information précise et individuelle sur la très grande majorité des
atomes constitutifs de la molécule, de fournir la possibilité d’identifier les
connexions entre atomes des diverses entités, squelette, groupes fonctionnels
et finalement de permettre de les situer dans l’espace les uns par rapport aux
autres. Ce document est consacré essentiellement aux molécules organiques et
bio-organiques de dimension moyenne.
La présentation de différents exemples aura pour objectif de montrer com-
ment exploiter les paramètres fondamentaux de la RMN et comment choisir les
différents types d’expériences RMN 1D et RMN 2D pour établir une structure.
Une stratégie générale (utilisant les techniques RMN 1D et 2D les plus simples)
est présentée à partir de l’étude de trois molécules, puis sont analysés les pro-
blèmes posés par des structures plus complexes (connexions difficiles à établir ;
tautomérie ; présence d’hétéroatomes ; échange ; distinction entre diasté-
réoisomères). L’accent est mis sur le choix des expériences complémentaires
susceptibles d’apporter une solution pour résoudre chacun de ces problèmes.
L’étude de molécules bio-organiques abordée en dernier lieu illustre la nécessité
d’utiliser, dans certains cas, de nombreuses expériences de manière interactive.
Enfin il importe de signaler que des techniques RMN de plus en plus sophisti-
quées sont sans cesse élaborées. Associées aux performances de plus en plus
remarquables des appareils RMN, elles apportent gain en sensibilité, gain en
temps et nouvelles solutions pour résoudre les cas les plus difficiles.

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correspondants. Si la composition en atomes est connue, les


Notations et symboles valeurs absolues en sont déduites.

En RMN 13C, l’intensité du signal peut différer d’un carbone à


Symbole Unité Définition
l’autre (inégalité des T1 et des effets Overhauser nucléaires NOE) et
la quantification est assez peu utilisée.
δ ppm déplacement chimique (par rapport
au tétraméthylsilane pour 1H et 13C)
1.2.3 De nombreux paramètres observables
∆ν Hz différence de fréquence

J Hz constante de couplage ■ Déplacement chimique δ

La position dans le spectre de chaque signal dépend de l’environ-


T1 , T 2 s temps de relaxation longitudinale nement chimique du noyau. Elle est caractérisée par le déplacement
et transversale
chimique δ en ppm. Ce paramètre permet de déterminer les caracté-
ristiques du squelette hydrocarboné, de détecter des groupes fonc-
tionnels, d’examiner les espèces tautomères. Les effets
d’anisotropie ou les effets stériques ont une influence plus faible sur
δ mais des applications importantes en stéréochimie. Des réactifs
1. Généralités. Techniques (par exemple, des chélates de lanthanides) qui modifient de manière
disponibles différenciée les δ ont des applications en stéréochimie.

■ Couplage scalaire

1.1 Problèmes à résoudre Le couplage scalaire (couplage indirect) qui résulte d’interactions
énergétiques entre les noyaux se manifeste par une subdivision des
signaux sous forme de multiplets. La constante de couplage nJ (en
■ Identifier, dans le composé examiné, la présence des grands hertz), où n  6 est le nombre de liaisons entre les atomes, dépend
types de groupes hydrocarbonés (aliphatique, éthylénique, aromati- de nombreux paramètres :
que ou acétylénique) et celle des groupes fonctionnels. — nature des noyaux (exemple : J , J );
1 1 1 13
( H, H ) ( H, C )
■ Préciser l’enchaînement des différents atomes du squelette puis — degré d’hybridation ;
déterminer la localisation des groupes fonctionnels.
— groupe fonctionnel ;
■ Déceler les phénomènes d’échange inter ou intramoléculaire.
— valeur de n ;
■ Examiner les formes tautomères.
— disposition géométrique des liaisons intermédiaires.
À ce stade, la structure plane de la molécule est établie.
■ Déterminer la stéréochimie. Deux énantiomères donnent stricte- Si le spectre est du premier ordre [18], la séparation entre les raies
ment le même spectre RMN en milieu non chiral. Ils peuvent sou- donne la valeur de J et l’analyse de la multiplicité renseigne sur la
vent être distingués et parfois identifiés en milieu chiral. Des composition de chacun des groupes de noyaux en interaction sca-
diastéréoisomères donnent en général des spectres partiellement laire. Si le spectre est du second ordre, l’analyse simple n’est plus
ou totalement différents et peuvent le plus souvent être identifiés. possible mais l’aspect des multiplets est souvent porteur d’information.

■ Effectuer l’analyse conformationnelle en solution. ■ Couplage dipolaire

Il résulte de l’interaction entre les moments magnétiques des


1.2 Atouts de la RMN noyaux directement à travers l’espace et non plus à travers les
liaisons. Deux noyaux de spin 1/2 (exemple : 1H, 1H ou 1H, 13C) spa-
tialement proches se relaxent mutuellement par le mécanisme
Ce document suppose connues les bases de la RMN. Pour une dipôle-dipôle. Cette interaction peut être manifestée par l’effet Over-
étude plus théorique de la résonance magnétique nucléaire, le lec- hauser nucléaire (NOE), qui consiste en une modification de l’inten-
teur pourra se référer aux ouvrages généraux [11] [12] [13] [14] [15] sité du signal du (des) noyau(x) d’un site X lorsque l’aimantation
[16][17] ainsi qu’à l’article [K 1 005] des Techniques de l’Ingénieur correspondant au(x) noyau(x) du site Y est perturbée par rapport à
[18]. l’équilibre de Boltzmann. Le NOE, observé si les noyaux sont dis-
tants de moins de 5 Å (0,5 nm), joue un rôle décisif pour l’élucida-
tion des problèmes de stéréochimie.
1.2.1 De nombreuses sondes
■ Temps de relaxation longitudinale T1 et transversale T2
Les atomes de base C et H possèdent des isotopes de spin 1/2, les Pour chaque noyau 13C ou 1H, ils dépendent en grande partie de
plus faciles à observer en RMN : 1H (99,98 %) noyau le plus sensible la structure de la molécule.
et 13C (1,08 %). Il en est de même pour 15N (0,37 %), 31P (100 %) et
19F (100 %). Par contre 12C, 16O et 32S de spin 0 ne donnent pas lieu
1.2.4 Le développement de techniques
au phénomène RMN. 33S, 35,37Cl, 79,81Br (spin 3/2), 17O, 127I (spin très performantes
5/2) sont très peu étudiés.

Le tableau 1 donne l’explication des sigles des différentes techni-


1.2.2 Une quantification possible ques présentées ci-dessous.

En RMN 1H, la mesure de la surface des signaux par intégration La sensibilité de la RMN par impulsion permet l’examen des iso-
permet de déterminer, en valeurs relatives, le nombre de noyaux topes rares tels que 13C.

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Tableau 1 – Les différentes techniques de la RMN


Sigle Signification anglaise Signification en français

COSY COrrelated SpectroscopY Spectroscopie de corrélation via les couplages scalaires

COSY45 COrrelated SpectroscopY45 Spectroscopie de corrélation avec une impulsion de transfert


de 45˚. Distinction entre couplage 2J et 3J

COSYLR COSY Long Range Spectroscopie de corrélation à longue distance via les coupla-
ges scalaires nJ, n  4

COSYRCT COSY Relayed Coherence Transfert COSY avec transfert de cohérence relayé

DEPT Distortionless Enhancement by Polarisation Augmentation d’intensité par transfert


Transfert de polarisation sans distorsion du signal

EXSY EXchange SpectroscopY Spectroscopie de corrélation entre sites en échange

HETCOR HETeronuclear CORrelation Corrélation hétéronucléaire (détection de l’hétéronoyau)

HMQS Heteronuclear Multiple Quantum Spectroscopy Spectroscopie multiple quantum hétéronucléaire → HMQC
pour H et C (détection 1H)

HSQS Heteronuclear Single Quantum Spectroscopy Spectroscopie simple quantum hétéronucléaire → HSQC
pour H et C (détection 1H)

HMBC Heteronuclear Multiple Bond Correlation Corrélation hétéronucléaire à travers plusieurs liaisons
(détection 1H)

HOESY Heteronuclear Overhauser Effect SpectroscopY Spectroscopie de corrélation par effet Overhauser
hétéronucléaire

INADEQUATE Incredible Natural Abundance DoublE Incroyable expérience de transfert double quantum
QUAntum Experiment Transfert en abondance naturelle (corrélation entre hétéronoyaux)

INEPT Insensitive Nuclei Enhanced by Polarisation Augmentation d’intensité pour les noyaux peu sensibles
Transfert par transfert de polarisation

JRES J REsolved Spectroscopy Spectroscopie J résolue (isolement des multiplets)

HOHAHA HOmonuclear HArtmann HAhn Transfert homonucléaire Hartmann Hahn

NOE Nuclear Overhauser Effect Effet Overhauser nucléaire

NOESY Nuclear Overhauser Effect SpectroscopY Spectroscopie de corrélation par NOE

ROESY Rotating frame Overhauser Effect SpectroscopY Spectroscopie d’effet Overhauser dans le référentiel tournant

SEFT (Jmod) Spin-Echo Fourier Transform Jmodulation (signaux de phases opposées : CH, CH3/C, CH2)

TOCSY TOtal Correlation SpectroscopY Spectroscopie de corrélation totale (ensemble de noyaux


successivement couplés 2 à 2)

■ En RMN à une dimension (RMN 1D), les signaux, porteurs des des signaux en absorption, positifs pour une petite molécule et
informations δ et J, proviennent d’un seul type de noyau et s’ali- négatifs pour une grosse molécule (des signaux en dispersion
gnent sur un axe. De nombreuses séquences d’acquisition des don- résultent d’artefacts). Toute substance paramagnétique (exemple :
nées impliquent soit l’excitation de tous les noyaux de même nature O2) doit être éliminée.
(exemple : 1H ou 13C), soit l’excitation sélective d’un seul noyau ou
d’un groupe de noyaux. L’identification des noyaux couplés est
effectuée par irradiation sélective à la fréquence d’un des noyaux et ■ Les techniques de la RMN 2D, qui permettent de répartir sur une
observation des simplifications des signaux des autres noyaux. surface (carte) les signaux porteurs des informations, ont considéra-
L’expérience la plus simple pour détecter le NOE (NOE différence) blement élargi le champ des investigations. Les sigles des différents
consiste à rendre égales les populations du site Y (par irradiation) types d’expérience (cf. tableau 1) permettent de retrouver dans les
puis à faire la différence entre les données ainsi obtenues et celles manuels des constructeurs les caractéristiques techniques et les
d’une acquisition classique. Seuls les noyaux proches de Y donnent valeurs des paramètres à utiliser. Deux possibilités sont offertes :

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— discriminer selon deux axes δ et J (exemple : δ 1H et J 1 1 ou plage, et à 7,55 ppm, élimination d’un couplage faible. Les intensités
( H, H ) relatives des raies de ces deux multiplets observés dans le spectre
δ 13C et J ) : JRES à utiliser pour exploiter des multiplets du découplé montrent que les protons concernés sont fortement cou-
1 13
( H, C )
plés entre eux. L’hypothèse la plus vraisemblable est la présence
premier ordre partiellement superposés en RMN 1D ; d’un noyau aromatique monosubstitué, hypothèse confirmée par
— associer deux axes δx, δy soit au même noyau (1H, 1H), soit à l’apparence des multiplets en l’absence de découplage (pseudo-
deux noyaux différents (exemple : 1H, 13C) pour établir des corréla- doublet 2H, pseudo-triplet 2H et pseudo-triplet 1H). Le déplacement
tions. Les exploitations sont alors multiples. chimique élevé du pseudo-doublet à 8,29 ppm, prouve que le subs-
1 1
● En RMN 2D homonucléaire ( H, H), la diagonale comporte en tituant est un groupe fortement électroattracteur.
général les signaux qui seraient obtenus dans l’expérience 1D. Les
Nota : il n’est pas possible de lire les constantes de couplage directement sur le spectre
signaux supplémentaires, hors diagonale, sont les signaux de corré- puisque le système de spin AA′XX′Z n’est interprétable qu’au second ordre. Les protons
lation caractérisés par les δ des 2 noyaux concernés. Tous les types AA′ d’une part, XX′ d’autre part sont chimiquement mais non magnétiquement équiva-
d’interaction peuvent être exploités. lents. Les effets de second ordre sont clairement visibles sur le spectre à forte résolution
(cf. figure 1 c).
Dans le cas du couplage scalaire, les signaux hors diagonale
apparaissent si les 2 noyaux sont couplés. Il est possible d’utiliser Une irradiation sélective à 7,38 ppm (figure 1 b) supprime un cou-
les couplages 2J et 3J (COSY, COSY45) ou bien de privilégier les cou- plage de 4,8 Hz à 8,70 ppm, un couplage de 7,7 Hz à 7,79 ppm (elle
plages plus faibles nJ, même non détectés en RMN 1D (COSYLR). affine le signal à 8,11 ppm).
L’information peut être relayée entre noyaux non couplés mais
Une irradiation sélective à 7,79 ppm (non représentée) supprime
appartenant à un système de noyaux couplés deux à deux
le couplage de 7,7 Hz à 8,11 et à 7,38 ppm (elle affine le signal à
(COSYRCT, HOHAHA ou TOCSY). Il est aussi possible d’exploiter les
1 8,70 ppm). Ces observations permettent d’établir le schéma des
couplages J 13 13 (INADEQUATE).
( C, C ) interactions majeures entre les 4 protons qui constituent le second
Les corrélations peuvent provenir des couplages dipolaires ou des système de spins (sous-spectre interprétable au premier ordre) :
échanges. Elles apparaissent simultanément (NOESY, EXSY,
ROESY) mais peuvent être distinguées. 8,11 7,79 7,38 8,70
● En RMN 2D hétéronucléaire, chaque signal détecte une corréla-
CH CH CH CH
tion entre 2 noyaux de nature différente résultant du couplage sca- J = 7,7 J = 7,7 J = 4,8
laire 1J (HETCOR, HMQC ou HSQC) et nJ (HMBC) ou du couplage
dipolaire (HOESY). Des combinaisons des différents types de
séquence 2D sont possibles. L’enchaînement de 4 CH vicinaux et le fort déblindage de deux H à
13 1 1 8,7 et 8,1 ppm suggèrent la présence d’un cycle pyridinique substi-
Exemple : HMQC TOCSY ( C C H C H) tué en α de l’azote par un groupe fortement électroattracteur.
Enfin de nombreux perfectionnements sont sans cesse apportés
aux expériences de base.
2.1.2 Étude par RMN 13C (figure 2)

■ Paramètres exploités : le déplacement chimique δ et l’intensité


2. Stratégie générale des signaux
Le spectre enregistré avec découplage des protons et sans délai
Cette stratégie générale sera présentée à l’aide d’exemples con- de relaxation comporte 10 signaux entre 125 et 195 ppm. Les δ sont
cernant trois molécules types particulières. typiques de carbones insaturés sp2. Une étude quantitative rigou-
reuse du spectre n’est pas possible. On remarque cependant
compte tenu des conditions d’enregistrement :
— trois signaux de faible intensité indiquant la présence de car-
2.1 Molécule 1 bones quaternaires à 194,0, 155,9 et 137,4 ppm. Le signal à
194,0 ppm peut d’emblée être attribué au carbone d’une fonction
cétone conjuguée, le second au carbone en α de l’azote et le dernier
C’est une molécule de formule brute C12H9NO (9 insaturations et/
au carbone ipso du cycle aromatique ;
ou cycles) ; le solvant utilisé est la pyridine deutériée.
— 6 signaux correspondant à des carbones protonés entre 137,7
et 125,9 ppm. Deux d’entre eux significativement plus intenses con-
2.1.1 Étude par RMN 1H (figure 1 a) firment l’existence de 2 paires de sites CH chimiquement équiva-
lents.
■ Premier paramètre exploité : l’intensité des signaux Ces résultats sont en accord avec l’hypothèse d’un groupe attrac-
La hauteur des paliers de la courbe d’intégration montre qu’il teur, le groupe cétonique, lié à un cycle benzénique et à un cycle
existe 2 paires de protons chimiquement équivalents, signaux cen- pyridinique en α de l’azote.
trés à 8,29 et 7,46 ppm. Les autres signaux correspondent tous à des
H distincts.
2.1.3 Examens complémentaires
■ Deuxième paramètre exploité : le déplacement chimique δ
Les 7 signaux sont observés entre 7,3 et 8,9 ppm, zone de δ corres-
pondant à des protons de structures insaturées, essentiellement Deux examens complémentaires peuvent conforter cette hypo-
aromatiques ou hétéroaromatiques. thèse. La résolution d’un spectre proton peut être améliorée en mul-
tipliant le signal de précession libre par une fonction telle que la
■ Troisième paramètre exploité : les couplages scalaires forme des raies obtenues après transformation de Fourier corres-
Des irradiations sélectives sont utilisées pour identifier les noyaux ponde à une courbe de Gauss (raies fines) et non à la courbe de
couplés entre eux. Lorentz habituelle (raies plus larges) (figure 1 c).
Une irradiation sélective effectuée à 8,29 ppm (figure 1 b) modifie Les effets de second ordre sont clairement visibles pour les
uniquement les signaux à 7,46 ppm, suppression d’un grand cou- signaux des H du cycle benzénique.

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b 7,38 ppm
3' , 5'

2' , 6'
b

8,29 ppm

3 4 4'
6
5

a
7,5

8,6 8,4 8,2 8 7,8 7,6 7,4 7,2


ppm

8,6 8,4 8,2 8 7,8 7,6 7,4 7,2


ppm

a spectre 1H

b exemples de découplage par irradiation sélective

c spectre 1H forte résolution (raies gaussiennes)

Figure 1 – Molécule 1. Spectre RMN 1H

Les couplages à longue distance peuvent être détectés et mesurés Les valeurs expérimentales des δ sont comparées ci-dessous aux
entre les protons du cycle pyridinique : les constantes de couplage valeurs calculées en utilisant les logiciels ADC Hnmr2 et Cnmr2. Les
4
J( H3, H5 ) = 1 ,2 Hz , 4
J( H4, H6 ) = 1 ,8 Hz et 5J
( H3, H6 ) = 0 ,9 Hz écarts sont en général inférieurs à 2 ppm pour les 13C et 0,2 ppm
ainsi que celles des couplages 3J indiquées précédemment sont très pour les H. L’écart plus important pour le carbonyle provient proba-
proches des valeurs observées pour la pyridine. Les déplacements blement du fait que l’interaction stérique entre les deux cycles et la
chimiques 1H et 13C peuvent être calculés pour la structure envisa- déconjugaison qui en résulte ne sont pas totalement prises en
gée à partir d’un logiciel de calcul. compte dans le calcul.

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3' , 5'
9 10
2' , 6'
1ax
6eq
8
CO 6eq
4eq

190 4'
4 5
2 1,9 ppm 3,4 ppm
6 3

6eq 2

1ax

2 1'

2 1,9 ppm 1,1 ppm 1 0,9 0,8


150 140 130 ppm ppm
b exemples de découplage par irradiation sélective
Remarquer les trois triplets de très faible intensité correspondant
aux carbones du solvant, la pyridine deutériée
1ax
8 6eq
Figure 2 – Molécule 1 - Spectre RMN 13C

Il en est de même pour l’effet d’anisotropie du noyau benzénique


qui entraîne un déblindage plus important que prévu pour H3.
3,45 ppm 2,2 2,15 ppm 2 1,95 ppm
125,0 3,4 ppm
5' 8,11 4 7,79-137,8
OH
7,55-133,4 4' 6' 3 5 7,38-126,9 3eq
5ax
7,46-128,8 3'
194,0 6 8,70-149,6
1' 2 N
8,29-131,8 2' 4eq
137,4 155,9
O
1,45 1,4 1,35 1,3
Valeurs mesurées
ppm

123,5 1,7 1,65 1,6 ppm 10


5' 7,47 4 8,17-135,8
7,53-132,3 4' 6' 3 5 7,53-129,7 7

7,37-128,2 3'
185,9 6 8,79-149,1
a expansion des multiplets 9
1' 2 N
8,14-130,3 2'
137,6 155,8
O

Valeurs calculées
2
Pour cette molécule simple, la structure a pu être établie en 3ax 6ax
utilisant uniquement la RMN 1D 1H et 13C. 4ax

2.2 Molécule 2 1,15 1,1 ppm 1 0,95 0,9 0,85 0,8


ppm

C’est une molécule de formule brute C10H20O (1 insaturation ou


1 cycle).

2.2.1 Étude par RMN 1H et 13C


3,5 2 1,5 1 ppm

Les spectres 1H(figure 3) et 13C (figure 4) seront exploités de


manière interactive. Figure 3 – Molécule 2. Spectre 1H

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■ Premier paramètre exploité : intensité des signaux


La courbe d’intégration (non représentée) indique 11 multiplets CH
(1H) et 3 doublets (3H). CH3
J mod
■ Deuxième paramètre exploité : déplacement chimique δ 6 4 3
● Les δ 1H, 0,8 à 3,5 ppm, correspondent à des H aliphatiques 1 2 5 8 79 10
(figure 3 a). Un signal large, sans multiplicité apparente à 1,31 ppm CH2
suggère la présence d’un OH. Par addition de D2O, ce signal dispa-
raît, remplacé vers 4,8 ppm par un signal dû à DOH (échange
chimique). Un seul signal (intensité 1H à 3,42 ppm) est très nette-
ment déblindé, c’est-à-dire que la constante d’écran est plus faible a séquence J mod
que pour tous les autres noyaux aliphatiques par suite de l’effet
électroattracteur de l’oxygène, ce qui indique la présence d’une
fonction alcool secondaire.
DEPT
● Les δ 13C ne dépassant pas 70 ppm, il n’y a pas de carbone insa- CH
turé. En utilisant les séquences Jmod et DEPT (avec sélection des
CH), les différents types de carbone, primaire Cp CH3, secondaire Cs 1 2 5 8
CH2, tertiaire Ct CH sont distingués (figure 4). Un seul carbone (Ct)
est très déblindé donc il y a confirmation d’une fonction alcool 70 60 50 40 30 20 ppm
secondaire.
b séquence DEPT sélection CH
■ Troisième paramètre exploité : les couplages scalaires 13
Figure 4 – Molécule 2. Spectre C
Des expériences de découplage sélectif identifient les connexions
entre H vicinaux ( H  C  C  H ) et géminés ( H  C  H ) (figure 3 b
et schéma ci-dessous) et conduisent à l’établissement de la formule
Enfin la valeur étonnamment faible (2,8 Hz) du couplage vicinal
plane.
des protons H2 et H8 implique un angle dièdre H2CC2CC8CH8
1,97 1,42 1,66
de ≈60˚. La conformation hautement privilégiée ci-dessous peut être
0,93 stabilisée par formation d’une liaison hydrogène entre H 8
1,11 3,42 H H H 7
« relativement acide » et l’oxygène. Cette conformation est reflétée
H3C 5 dans la diastéréotopie des CH 3 – 9 et – 10 . Le CH 3 – 9 soumis à
CH CH CH (OH) C C C 6 4
H3C 1 des interactions stériques plus importantes a le plus fort δ.
2,17 3
C H CH3 H HO 2
0,81 Me
0,96 0,915 0,84 10 3
1,61
H H
0,98 9 8 10 4 5
Me
Me 8 1
2 7
9 O 6
H
De nombreux diastéréoisomères correspondent à cette formule ! H
L’étape suivante déterminera les configurations relatives des carbo-
nes asymétriques par analyse des J et des δ 13C. Pour un dérivé du
cyclohexane en conformation chaise, les valeurs typiques des J Pour cette molécule, le menthol, la structure peut encore être
sont : établie par RMN 1D 1H et 13C. Les expériences décrites ne per-
mettent pas de différencier les deux énantiomères.
2 3
J ≈ Jax, ax ≈ 10 à 13 Hz

3 3
et Jax, eq ≈ Jeq, eq ≈ 3 Hz 2.2.2 Étude par RMN 2D
Néanmoins, il est possible de gagner beaucoup de temps en utili-
H1, ayant 3 couplages 3J (10,1, 10,1 et 4,0 Hz), doit être axial, en sant les expériences de base de la RMN à deux dimensions.
interaction avec H2ax, H6ax et H6eq. OH est donc trans/CH(CH3)2. Il
est plus délicat de préciser la position du CH 3 – 7 le signal de H5 ■ L’expérience COSY (corrélations δ 1H, δ 1H via les couplages sca-
laires  1 Hz ) permet d’établir grâce à une seule expérience toutes
étant trop complexe. Il faut étudier les 4J stéréospécifiques. Leur
valeur est notable si les liaisons entre les H concernés sont coplanai- les corrélations entre les H géminés (2J) et entre les H vicinaux (3J).
res et disposées en W. Ici les H doivent être équatoriaux (exemple Le point de départ est le signal de H1 attribué sans ambiguïté sur la
pour H4eq et H6eq, 4J = 2,1 Hz). La multiplicité de H3eq résulte seule- base de l’effet attracteur du groupe OH. À titre d’exemple (figure 5),
les signaux hors diagonale qui prouvent l’existence d’un couplage
ment de couplages 2J (12,9 Hz) et 3J (3,3 Hz). Il ne se manifeste scalaire significatif sont repérés pour les paires H1 ⁄ H6 eq ,
aucun couplage 4J à H5 qui est donc en position axiale. CH 3 – 7 est
H6 eq ⁄ H5 , H6 eq ⁄ H6 ax et même H6 eq ⁄ H4 eq (4J relativement très
équatorial, cis/OH et trans/CH(CH3)2.
grand : 2,1 Hz). L’examen des valeurs des couplages reste indispen-
Les δ 13C de C4, C5 et C6 calculés à partir des tables d’incréments sable pour l’attribution univoque des protons géminés et pour
[18] pour CH 3 – 7 équatorial ou axial permettent aussi par compa- l’étude stéréochimique.

raison aux valeurs mesurées de déterminer la position du CH 3 – 7 : ■ Enfin l’attribution des signaux des 13C peut être obtenue très faci-
lement en utilisant l’expérience HETCOR (corrélation δ 1H, δ 13C via
C4 : 34,6-31,1-34,6 ; les couplages 1J) (figure 6). On observe pour chaque CH ou CH3 une
tache de corrélation (δ 1H en ordonnée et δ 13C en abscisse) et l’on
C5 : 31,1-26,6-31,7 ;
remarquera que deux corrélations sont observées pour les CH2 dont
C6 : 44,6-41,1-45,1. les protons sont non équivalents.

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2.3 Molécule 3

9 7 10 C’est une molécule [1] de formule brute C23H30N2O2


(10 insaturations et/ou cycles).
Les δ 1H et 13C (en italique) sont reportés sur la formule ci-des-
6ax sous.
3eq

4ax
1 8 6eq 4eq 5 2 ~7,35
3ax ~7,32 5" 128,9
128,1 4" ~7,27
6" 127,2
3" 137,7
4,27 
3,87 64,4

ppm 5' 6' 3,48 O


6ax/6eq H 2" 1" 7
~6,64 1' 6 4,48 H 4,62
3,62 63,5
117,7 4' N
60,6 N O
1 148,9
~7,14 3' 2' 8 5 177,2
129,5 ~6,62
113,1 36,0 9
4
1,95 à 2,02 2,70 
3 2,35 32,3

21,5
5/6eq 10
0,80
1,5 27,4 3,48
62,5
4eq/6eq
L’analyse des spectres 1 D 1H et 13C n’apporte que des informa-
tions fragmentaires.
6eq/1
2
6eq/4eq 6eq/5 6eq/6ax 2.3.1 Étude par RMN 2D COSY et HMQC

L’expérience COSY (figure 7) et l’expérience HMQC, sensible car


la détection est faite en 1H (figure 8 a et b) sont systématiquement
1/6eq utilisées pour corréler respectivement les protons entre eux et les
3,5 13C aux H (la position des H diastéréotopes corrélés au même car-
bone est précisée), ce qui permet d’identifier des éléments de struc-
3,5 2 1,5 1 ppm ture notés E sur la figure 7. Dans les zones de δ correspondant à des
éléments de structure insaturée, on observe les résonances :
— de 10 H (6,5 à 7,3 ppm), deux systèmes de 3 signaux d’intensi-
Figure 5 – Molécule 2. Carte 2D COSY tés 2, 2, 1 distincts ;
— de 13 13C : 1 Cq fonctionnel à 177,19 ppm, puis entre 113 et
149 ppm 10 CH (6 signaux d’intensités 2, 1, 2, 1, 2, 2, estimation
semi-quantitative) et 2 Cq (137,7 et 148,9 ppm).
La symétrie et les δ mettent en évidence la présence de 2 cycles
aromatiques monosubstitués, l’un par un groupe amine, l’autre par
79 un carbone aliphatique (éléments de structure E-I et E-II).
1 2 6 4 5 8 3 10
Dans les zones de δ correspondant à des éléments de structure ali-
phatique, on observe les résonances :
— de 20 H ;
13C
— de 10 13C.
ppm
Deux systèmes de protons couplés indépendants sont identifiés.
1 Le premier (4 H) comporte un triplet (4,62 ppm) qui disparaît par
addition de D2O. Il s’agit donc du OH d’un alcool primaire. Les 2 H
1,5
du CH2 couplés à OH sont aussi couplés au 4e H (E-III). Le second
(5 H) comporte 2 CH2 et 1 CH (E-IV). Un singulet (9 H) identifie le
groupe tertiobutyle (E-V). Il reste un signal un peu élargi à 3,5 ppm
2 (2 H). L’un d’eux est échangé par D2O (δ compatible avec une fonc-
tion NH). Pour le second proton (E-VI), la carte COSY ne montre de
2,5 manière très surprenante aucune corrélation.
1H

Mais, comment assembler les éléments de structure ?


3

3,5
2.3.2 Étude par RMN 2D HMBC
70 60 50 40 30 20 ppm
La bonne solution est l’expérience HMBC qui exploite les coupla-
n
ges J 13 1 . La figure 9 montre que H8 (E-VI) est couplé avec de
( C, H )
Figure 6 – Molécule 2. Carte 2D HETCOR nombreux carbones (2J, 3J) : C5 et C4 (E-IV), C9, C10, 11, 12 (E-V),

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6 7 7' 5 8 3 3 4

1H

HO NH 20
4
6 7 7 58 3 3 44 t-Bu
ppm

10 11 12
3

1
EIV

13C
40
CH
5 3
C 9
4 H2 10 5 60
8
11 12 2 6
7
EV

4 3 2
ppm
EIII EVI 3
a région des noyaux aliphatiques sauf groupe t-Bu
OH
7 C
CH H
6
4" 2"
6"
3" 3'
4 6'
5" 1H
5' 4' 2'
100
ppm
4 3 2 1 ppm

a éléments de structure aliphatique 2' 6'

4'
2"

13C
6" 120
4"
3" 3' 6' 2" 6"
5" 5' 4' 2' 4"
3" , 5"
ppm
5' EI 3' 5'
4'
6' 7 6 ppm
5"
6" 3' 7
1'
4" b région des noyaux aromatiques
1" 2' N H

3" 2"
Figure 8 – Molécule 3. Carte 2D HMQC
EII 7 6 ppm

b éléments de structure aromatique


2.4 Résumé : principales étapes
Figure 7 – Molécule 3. Carte 2D COSY
d’une démonstration de structure

C1′ (E-I). De même H6 (E-III) est corrélé (non représenté) à C7 et


La stratégie la plus efficace comportera 3 étapes :
C2″ , C6″ (E-II) . E-VI peut être assemblé avec E-I, E-IV, E-V, et E-III
avec E-II. Le bilan en atomes montre qu’il reste 1 C, 1 O, 1 N. Le — RMN 1D 1H et 13C (y compris Jmod, DEPT) : recherche d’infor-
groupe fonctionnel est donc un groupe amide tertiaire (en accord mations générales et de points de départ pour l’étape suivante ;
avec un δ de 177,2 ppm pour le C). Il assure la formation d’un cycle
avec l’élément E-IV. Une dernière liaison est établie entre C6 et — RMN 2D de corrélation δ 1H, δ 1H et δ 13C, δ 1H : attribution des
l’azote de l’amide. La liaison hydrogène qui s’établit entre le carbo- spectres et détermination de la structure si elle est simple. Dans les
nyle et le proton hydroxyle stabilise celui-ci qui peut alors être cou- cas les moins favorables, il sera uniquement possible à ce stade
d’identifier des éléments de structure ;
plé avec les protons du CH 2 – 7 .
— envisager toutes les structures possibles et choisir les expé-
Le recours à la RMN 2D était indispensable pour cette molécule. riences complémentaires de RMN 1D ou 2D exploitant tous les cou-

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L’analyse 1H confirme le diol et la stéréochimie du cycle A.

8 ■ Expérience choisie : RMN 2D NOESY


1H
Les corrélations proviennent des interactions dipolaires mais
aussi des échanges : signaux respectivement négatifs et positifs par
4 20
rapport aux signaux positifs de la diagonale (figure 10). CH 3 – 10
ppm donne des corrélations dipolaires avec H4a, H1ax, H1eq et H8 (signal
10 11 12 intense). H8 est aussi corrélé à H1eq. La proximité de H8 et CH 3 – 10
9
est établie. Ils sont cis l’un par rapport à l’autre. L’absence de corré-
40 lation entre CH 3 – 10 et CH 3 – 9 implique qu’ils soient situés sur
les faces opposées du cycle B. OH – 7 est alors trans par rapport à
5 50 OH – 8 . La stéréochimie relative est établie.

On notera les signaux d’échange des OH entre eux mais aussi


avec l’impureté acide du solvant CDCl3 (≈1,7 ppm). H8 et CH 3 – 9

13C
140 ont des corrélations apparemment dipolaires avec chacun des OH
mais aussi avec l’impureté acide. Danger ! Les premières sont vrai-
1' semblables, les dernières impliquent un transfert d’aimantation par
échange.
Nota : les signaux d’échange entre les OH (en noir) ont été reliés par des traits sur la
160
figure 10. Les signaux d’échange des OH avec le signal à 1,7 ppm apparaissent toujours en
5 4 3 noir aux fréquences des OH dans une dimension et à 1,7 dans l’autre dimension mais n’ont
ppm pas été reliés par des traits pour raison de simplicité.

Connexions H8/C4, C10, 11, 12, C9, C5, C1'

Figure 9 – Molécule 3. Carte 2D HMBC partielle


9 13
10
plages à longue distance, les couplages 13C, 13C, les NOE et les
temps de relaxation. 1ax
12
1eq 8 7 OH 4
3eq 3ax 8 OH 4a
Il sera presque toujours possible de déterminer la structure.

ppm
1
3. Molécules de synthèse
Dans ce qui suit, il sera admis que les spectres ont été analysés
par les expériences de base qui ne seront plus systématiquement
commentées.
2

3.1 Détermination de la stéréochimie


par NOE
3
Le schéma ci-dessous représente la stéréochimie attendue de la
molécule 4. Il faut vérifier l’ouverture de l’époxyde et préciser la sté-
réochimie relative des sites 7, 8, 8a [2].
Les couplages ne le permettent pas.
H3C
9 4
7
H 6
H
X
H HO H OH
8
5
4 X B 8a 4 3 2 1 ppm
H CH
N
H N A 4a H 10 3 Interactions dipolaires (en bleu) détectées pour
3 2
Z CH3 1
O Z H CH3-10 et pour H8
CH3 H H Échange chimique (en noir)
H
détecté pour OH-8 et pour OH-7
X CO2CH2CH3 Z COOCH2C6H5
12 13
Figure 10 – Molécule 4. Carte 2D NOESY

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3.2 Diastéréotopie surprenante 3.3 Molécule polycyclique très condensée

Dans l’étude de la molécule 5 ci-dessous [3], les δ déterminés au L’isophorone donne un trimère (molécule 6 C27H38O) dont la for-
cours de l’étude RMN 2D sont reportés sur la formule proposée mule proposée et les δ 13C sont reportés sur le schéma ci-dessous [4].
(δ 13C en italique). Les superpositions de signaux interdisent l’ana-
lyse directe du spectre 1D. 29,6
32,3 27 26 25,2
Les δ 1H
et δ 13C
faibles des sites 6 et 7 confirment l’existence du C16 137,9
cycle cyclopropanique. C20 135,1
42,65* 14 42,63* O
13 15 128,7
2,00 23,1
2,26  39,2
200,6
49,8 53,5
16,4-0,89 5
2,07 35,8
4 2,19
 31,0 25
10
12 16 1
55,0
14,0-0,44 7 6 11 20 17 2
1 3 213,9 39,2 9 21 27,6
0,85 31,3
1,83  25,6 2
O 8
7 19 18 3
8 29,0 24 6 5 4
10,5-0,96 9 2,49-50,3 56,6 33,4
10 45,2 126,5 44,9
11 42,9
11,8-0,92 1,58
1,75
21,0  23
31,6
145,2 141,3 22
28,8

Le point délicat est la position des H du CH 2 – 8 . La carte 2D * interchangeables


COSY (figure 11) les situent de part et d’autre du signal du CH 3 – 9 .
L’anisotropie du cyclopropane peut être la cause de cette forte ■ Les expériences de base sont tout à fait insuffisantes. L’attribution
diastéréotopie si l’un des H est en dessous du cycle, ce qui suppose non stéréospécifique des signaux RMN 1H nécessite l’utilisation de
une mobilité restreinte du groupe éthyle. Celle-ci est démontrée par la carte COSY 45 (l’orientation des signaux de corrélation est à peu
mesure des temps de relaxation longitudinale T1 des 13C. Les
près parallèle à la diagonale principale pour un couplage 2J et à la
valeurs pour C8 (4,0 s) et même C9 (4,5 s) sont inférieures à celles de
C4, C5 (4,9 et 4,8 s) situés dans le squelette. seconde diagonale pour un couplage 3J) et de la carte COSY LR
(couplages 4J) (figure 12). Les points de départ sont :
– H12ax, déblindé par le cycle aromatique, situé sur la face α. Les
H des sites 10 à 13 sont repérés (3J et 2J) puis ceux des sites 15, 8 et
6 (4J et 2J) ;
– H5 aromatique.
Les H des sites 4 et 2 sont distingués grâce au couplage 4JH5,H4
(non représenté).
La stéréochimie indiquée pour préciser les δ 1H est déterminée à
la fin de l’étude RMN.
1,09 Me Me 0,78
1,74 27 26 3,10
14 O
1,35 1,20
2,00 2,28 13 15 2,80
1,48 B 2' 2,40

24 Me 12 16 1
1,07 10 2 2,52
11 20 17
25 Me 9 D C A
9 11 1,09 7 19 18 3
8 Me 1,04
6 5 21
23
1,576 Me Me 1,06
1,569 2,45 22
2,50 6,79 4' 4
2,78 2,81
2 5' 4' 4 5 8' 10' 10 6 8 7 0,75
ppm
■ La carte XHCOR identifie les carbones tertiaires Ct et les carbones
0,5
secondaires Cs pour tous les sites et corrèle C et H des CH3 sans les
0,7 identifier (C13 et C15 sont presque confondus). La carte INADE-
QUATE (figure 13) est enregistrée pour les carbones aliphatiques
0,9 seulement afin d’obtenir une résolution suffisante. Les signaux de
1
corrélation entre deux C, J 13 13 , sont disposés symétriquement
( C, C )
2,4 2,2 2 1,8 1,6 1,4 1,2 1 0,8 0,6 0,4
ppm
par rapport à la diagonale. Les carbones secondaires Cs et le car-
bone tertiaire Ct liés au cycle aromatique ne donnent qu’une et deux
Corrélations CH3-9/H8, H8' corrélations. C12 est superposé à un carbone quaternaire Cq. Les Cq
aliphatiques sont attribués à partir des Cs du squelette puis les CH3
liés à chaque Cq sont identifiés. Les connexions sont illustrées pour
Figure 11 – Molécule 5. Carte COSY partielle les cycles B et D.

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9
12 23 14
11 10 13
8 2 6 4 7 15 27 25 24
22 21
3 26

25
27 21

24 26
15α 4 4' 2 6α 2' 12α 10β 13α 8β 11β 10α 13β 22 23
15β 6β 8α
ppm

1
26−27

26−13β
24−10α D
13β − 11β

24−8α 23−8α
26−13α
COSY 45 27−13α

25−10β
10β − 8β 2

6β − 11 22−2'
6 β − 8β
6α − 8α 50 40 30 ppm
21−2 23−6α
COSYLR Exemple : connexions 13C, 13C des cycles B et D

21−4 26−15β Figure 13 – Molécule 6. Carte 2D INADEQUATE

15α − 13α 27−15α


3,3
4 4'
3 2 1 ppm 15β
2 2'
5 6αβ
Figure 12 – Molécule 6. Carte 2D COSY 45 en haut à gauche
(connexions du système 10-11-12-13) et carte 2D COSY LR en bas
15α 12 13
à droite (connexions à longue distance)
1H
120
■ La carte HMBC (figure 14) qui exploite les couplages à longue
5 ppm
2 3
distance, essentiellement J 13 1 et J 13 1 , permet de corréler 17
( C, H ) ( C, H ) 130
les Cq aromatiques aux H des cycles voisins et donc de préciser les
20
jonctions avec le cycle aromatique. 16
140
18
Finalement l’étude stéréochimique repose sur l’analyse des cou-
19
plages J 1 1 : les positions α, β sont déduites :

13C
( H, H ) 150

— des 3J (Janti > Jsyn pour les sites 11 à 13 ;


200
— des fortes corrélations 4J(H,H) (COSY LR) caractérisant la dispo- CO
sition en W des quatre liaisons entre 2 H liés au cycle (exemple :
H8β, H10β) ou entre H lié au cycle et H du CH3 anti (exemple : H13β, 7 3 12
ppm
CH 3 – 26 ) ; Connexions nJ(13C 1H) Csp2/H5 et H aliphatiques
— de l’absence de corrélation entre H11β et CH 3 – 23 qui est
donc en position β. Figure 14 – Molécule 6. Carte 2D HMBC partielle

Les attributions stéréospécifiques sont complètes pour les cycles


B, C et D. Pour le cycle A isolé, les couplages 4J sont de même inten-
sité entre H2/H4 et H2′ ⁄ H4′ et la différence ∆δ entre C21 et C22 cycle D une forme enveloppe 9β (c’est-à-dire que le sommet 9 est
(1,5 ppm) est faible. Seules les positions relatives sont déterminées, déplacé vers la face β par rapport aux autres atomes du cycle) et le
CH 3 – 21 étant anti / à H4 et H2. Il est très probable que les cycles B cycle A une forme sofa (cycle à double liaison conjuguée avec le car-
et C ont respectivement des conformations croisée et bateau, le bonyle) très aplatie.

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3.4 Problème de tautomérie – 11,4


La molécule 7 peut exister sous deux formes tautomères I et II [5],
– 232,2 – 252,0
les δ 1H et δ 13C (en italique) étant précisés sur le schéma ci-dessous.
163,1 NO2
HO
NO2 N1
117,8
N9
7,83 121,7 3
119,9 4
O a avec découplage des 1H
92,9 4a C 2
155,9
7,23 122,2 5 1
6 4b 9a N
A B
7 8a 9
7,27 124,1 8
136,5 N
145,6 H
112,3 -7,45
H
I 97,3 Hz
NO2
HO
N9
4 3 b séquence INEPT
5 4a OH
C 15
4b Figure 15 – Molécule 7. Spectre RMN N
6 2
1
A B N
9a 3.5 Problème lié à la présence
7 8a N d’hétéroatomes
8 9
L’exemple des oxydes de phosphine (molécule 8) et de diphosphi-
H
nes (molécules 9n) montre l’intérêt et les difficultés qui peuvent
II
résulter du couplage d’hétéroatomes aux noyaux 13C ou 1H [6]. R est
n
Les difficultés résultent de l’enchaînement de 7 C quaternaires et une chaîne octyle. Les δ 13C et J 13 31 (en Hz) sont reportés sur le
( C, P )
de l’échange entre les H mobiles. La solubilité étant faible, l’expé- schéma pour la molécule 8.
rience 2D INADEQUATE est impossible. Les techniques classiques et 2J 3,7
la comparaison avec des molécules de référence sont utilisées pour 1 5 7 3
l’attribution des signaux 1H et 13C. R 4 2 6 8
P 30,3 31,0 29,1 22,6
■ Pour l’étude de la tautomérie, la solution est apportée par la R 21,9 31,8 14,1
RMN 15N (abondance isotopique 0,37 %, δ en ppm par rapport à 1 3J 13,4
O J 65,0
H3CNO2, référence externe) (figure 15). La séquence INEPT, efficace
pour les azotes qui portent un proton stable, donne un seul signal à Molécule 8
1
− 252,0 ppm, deux raies en antiphases ( J 15 97,3 Hz), ce qui
( N, H )
R R
confirme la présence d’un azote indolique N9. Le spectre 15N P (CH2)n P
découplé des protons contient 3 signaux : R R
— N9, très fin, est négatif (fort NOE car le proton s’échange très O O
lentement et de signe négatif car le rapport gyromagnétique de 15N
est négatif) ; Molécule 9n
— NO2 très déblindé (− 11,4 ppm) est positif et peu intense (NOE
insignifiant et temps de relaxation T1 très long) ; Sans découplage de 31P, les signaux 13C de C1, C2 et C3 sont,
— N1 à − 232,2 ppm est assez large mais négatif donc N1 porte un
comme attendu, des doublets, les valeurs typiques de J 13 31 per-
proton plus labile que celui de N9. ( C, P )

Cette observation suggère une structure de type pyridinone (I) et mettant l’attribution de ces 13C pour la molécule 8 ainsi que pour
non hydroxypyridine (II) (cf. figure ci-contre), hypothèse confirmée tous les composés 9n avec n > 2. Pour 91 et 92, les 31P chimiquement
par comparaison du δ 15N de N1 à ceux obtenus pour les composés équivalents (si l’on néglige l’effet isotopique résultant de la substitu-
ci-dessous de structure connue : tion d’un 12C par 13C) sont couplés entre eux. Des multiplets com-
OH OH plexes sont observés pour C1, C2 et C3 et, si n = 2, pour les
CONH2 Ph 2 carbones C1′ situés entre les 31P. Le système de spins, AA′X ,
n’est pas du 1er ordre, car les 31P sont inégalement couplés au 13C
Me N O Cl N OH (l’un des couplages pouvant être nul selon la position du 13C). Si n =
H
1, les deux 31P sont magnétiquement équivalents dans l’isotopo-
– 223 ppm – 137 ppm
mère ayant un 13C entre eux (A2X, 1er ordre) et C1′ donne un triplet
OH
OH 1
Ph NO2 avec J 13 31 (51,6 Hz). Les multiplets peuvent être simulés en uti-
Ph NO2 ( C, P )
lisant un logiciel de simulation [exemple : PANIC (Brüker)
Cl N O Cl N (figure 16 a et b)].
OH
H
Les rapports d’intensité entre les carbones du lien central et ceux
– 167 ppm des chaînes (1/4 et 1/2) peuvent être contrôlés à partir de la courbe

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RMe-2 10
6 4-5 7 8 8 6 4 2 COOH
9 7 5 3

R4 R3 SMe-2 R3 S3 R2 S2
**

–6 –7 –8 –9 – 10
RMe-8 ppm
2
RMe-10
31
RMe-6
RMe-4

R8
R9
1'
R9' SMe-8 R5
SMe-10 SMe-6 R7-7' R6 R5' SMe-4
S7-7'
S9 S6 S5' S5 S4
30 20 ppm

a molécule 91 0 –1 –2 –3 –4
ppm

6 4-5 7 Figure 17 – Molécules 10(2R) (signaux notés R) et 10(2S) (signaux


* notés S). Complexation par Pr(tpip)3
8

2 *
8' Me 6
5 3
7
4 2 COO–
3
8 Me

1
1'
a excès énantiomérique 95 %

30 20 ppm

b molécule 92

Multiplets simulés *
c excès énantiomérique 85 %

13
Figure 16 – Molécules 91 et 92. Spectre C et multiplets simulés*

TMS
d’intégration [on ajoute du chrome triacéthylacétonate (≈0,01 M)
complexe paramagnétique pour éliminer le NOE et réduire les T1, b excès énantiomérique 40 %
ce qui permet l’étude quantitative rigoureuse].
Mc-8-8'
Me-8-8'

3.6 Utilisation de chélates de lanthanides


Me-3
5 4 3 2 2
Divers chélates de lanthanides [7] en particulier des complexes β-
dicétoniques de praséodyme ou d’europium ont été utilisés comme
–5 – 10 – 15 – 20 ppm
aide à l’analyse structurale lorsque les superpositions de signaux
interdisent l’analyse du spectre 1H. Les déplacements induits d excès énantiomérique 7,7 %
dépendent de facteurs géométriques et sont proportionnels à 1/r3 (r
distance entre le noyau et le lanthanide), ce qui conduit à une sépa- TMS tétraméthylsilane
ration remarquable des signaux. Contrairement aux chélates β-dicé-
toniques, le tris(tétraphénylimidodiphosphinate) de praséodyme
[Pr(tpip)3] est stable en présence des acides carboxyliques avec les- Figure 18 – Molécule 11. Complexes (citronellate)2Pr2(tpip)4 méso
quels il forme un adduit 1–1. et dl (la flèche désigne le signal de Me –3 dans le composé méso)

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Exemple : acides (2R, 4R, 6R, 8R) et (2S, 4R, 6R, 8R) -2,4,6,8-
tétraméthyldécanoïques, molécules 10(2R) et 10(2S) (figure 17).

Les signaux des 2 diastéréoisomères sont tout à fait distincts et 3


les déplacements induits peuvent être interprétés en fonction des 6 2 1H 4 5
différences de conformation résultant de la configuration en C2.

En milieu basique, les acides carboxyliques réagissent avec ppm


Pr(tpip)3 pour former un complexe binucléaire comportant 4
3 5
2 molécules de carboxylate. Si l’acide est chiral et utilisé sous forme
30
racémique (ou avec un excès énantiomérique même faible), les
deux espèces dl et méso formées sont distinguées.

13C
Exemple : molécule 11 (acide citronellique) en mélange R et S avec 40
différents excès énantiomériques (figure 18). 6
2
50

4 3 2 ppm
4. Biomolécules
Noyaux du cycle aliphatique

4.1 Pipérine. Échanges conformationnels


Figure 19 – Molécule 12. Carte partielle 2D HMQC (noyaux du cycle
aliphatique)
La molécule 12 ci-dessous est extraite du poivre de Madagascar.

O
6 2 6 2

O 6 ppm
N
5

2 4 3 5
4
O H1' 3

2
3
■ Les techniques 2D COSY, HMQC puis HMBC et NOESY permettent
d’identifier la molécule 12 à la pipérine. Le point délicat concerne
l’interprétation des signaux du cycle azoté. Le spectre 1H comporte 2
4 multiplets (2,2,2,4) et le spectre 13C 5 signaux dont 4 nettement 6
élargis [corrélations sur la carte HMQC (figure 19)].
4
Deux phénomènes d’échange conformationnel [8] interviennent.
5
L’inversion du cycle détermine uniquement l’échange entre les 2 H
géminés sur chaque site. Cet échange rapide, même à basse tempé-
rature (− 20 ˚C), entraîne la coalescence des signaux des H géminés. 1'
La rotation autour de la liaison N  C du groupe amide détermine
l’échange entre les sites 2 et 6 et entre les sites 3 et 5. Le site 4 ne
peut être affecté. La rotation étant restreinte par le caractère de dou- 4 3 4 3
ble liaison partielle de la liaison N  C , l’échange est assez lent à ppm ppm
27 ˚C pour que les signaux 1H, 13C des sites 2 et 6 et 13C des sites 3
et 5 soient distincts mais larges. a à 27 °C b à – 20 °C

■ Enregistrée à 27 ˚C, la carte NOESY, EXSY (figure 20) montre des


NOE + échange en bleu
signaux d’échange intenses entre H2 et H6 et des corrélations NOE en bleu
« dipolaires » sont observées entre H1′ et H2 et entre H1′ et H6. La Échange en noir
première est réellement d’origine dipolaire tandis que la seconde
implique un transfert d’aimantation par échange entre H2 et H6. À
− 20 ˚C (échange très ralenti), les signaux d’échange entre H2 et H6
sont très peu intenses. Il existe une corrélation dipolaire intense
entre H1′ et H2 mais aucune entre H1′ et H6 trop éloignés. Figure 20 – Molécule 12. Carte 2D NOESY EXSY

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20 22
19 21 20
21 22 2
32 18 1
26 1 25
13C 9 301617 7, 8 31
316 24 10 16
15 14 10 2 25 12 14 15 5 3 12
3 5 11 4 13
ppm
ppm 16-22 1
1
19-20

16-22
2


12-11 12-21
2

25,31-24,26,30,32 2-1
4

1H


3-4 10-11
5-4
4
5

15-16 5
80 70 50 40 30 20 ppm


14,15
14-13
Figure 21 – Molécule 13. Carte 2D HETCOR
5 4 3 2 1
ppm
4.2 Fumonisine a carte COSY
3
La fumonisine (molécule 13) a été obtenue à partir d’une culture ppm
sur maïs de Fusarium moniliforme [9][10]. La formule brute est 2-4
C34H59NO15 (6 insaturations et/ou cycles).
Les problèmes majeurs proviennent des superpositions de 3-1
3-2
signaux (exemple 11 H entre 1,4 et 1,48 ppm) et de l’élargissement 5-3
4
d’un certain nombre de signaux 1H et 13C.
■ Spectre 13C : entre 172 et 179 ppm, 4 signaux très larges sont


15-17 15-22
5
attribués à des CO2H, 2 signaux résolus à des CO2R. Il n’y a donc pas
de cycle. Un spectre J modulé permet de distinguer les carbones ali- 14-12 14-21
phatiques (4 Cp, 14 Cs et 10 Ct). Sur la base des δ, C14 et C15 sont
liés aux oxygènes des esters, C3, C5 et C10 à des OH et C2 à NH2. 5 4 3 2 1
ppm
■ L’expérience RMN 2D HETCOR (figure 21), préférable parce que, b carte HOHAHA partielle
les couplages entre protons étant éliminés, les signaux sont plus
fins que dans l’expérience HMQC, est particulièrement utile ici pour Figure 22 – Molécule 13. Carte COSY et carte HOHAHA partielle
repérer les H correspondant à ces sites et des couples de protons
diastéréotopes. Les enchaînements partiels établis à partir des différentes techni-
■ À partir de ces points de départ, la carte COSY45 (figure 22 a) ques sont précisés sur la formule définitive (figure 24). Il reste seu-
permet de détecter des corrélations, en totalité pour H14 et H15, lement quatre CH2 qui s’insèrent donc entre C5 et C10.
mais partiellement pour H2, H3, H5, H10 dont les signaux sont lar-
ges. Les couples CHCH3 et CH2CH3 sont associés. Les variations des δ 13C en fonction du pH pour les carbonyles des
groupes acides montrent que la fumonisine en solution dans CD3OD
■ L’expérience HOHAHA (figure 22 b) montre la corrélation 3J entre est sous forme zwitterion :
H2 et H3 (effets de la relaxation transversale minimisés) et des cor-
rélations relayées par 1 ou 2 intermédiaires (exemple : CH 3 – 1 , H3 4COOH ←+ acide minéral fumonisine + NH3 → 4 COO–
ou H14, H12 et H14, H21). 176,1 à 178,1 ppm 177,0 à 179,0 ppm 180,6 à 182,9 ppm
■ Les expériences COSY et COSYRCT (figure 23) permettent Les échanges associés aux équilibres d’ionisation et aux diverses
d’associer les 4 CH2 déblindés (2,4 à 2,8 ppm) aux H tertiaires 25, 31 possibilités de formation de liaisons hydrogène induisent une
superposés (3,14 ppm) et de montrer, grâce au relais assuré par ces relaxation rapide de l’aimantation transversale, ce qui explique la
derniers, l’existence de deux groupes CH2CHCH2. Ils constituent résolution médiocre d’un grand nombre de signaux 1H et 13C et
l’ossature de 2 acides 1,2,3 propane tricarboxyliques dont le groupe l’impossibilité de détecter certaines corrélations.
acide terminal a estérifié des hydroxyles sur les sites 14 et 15.
■ Enfin, en utilisant le dérivé méthoxylé de la fumonisine (4 CO2H
remplacés par 4 CO2CH3), l’expérience INADEQUATE établit les cor- L’utilisation de nombreuses expériences de RMN 2D a
rélations ( 1J( 13C, 13C ) ) mais uniquement pour une partie non fonction- néanmoins permis d’établir la structure.
nalisée de la chaîne C16 à C20.

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O
X
O O O O

X X X X
ppm

2,4

2,6

Exemples de corrélations relayées


X et O Signaux des 2 groupes CH2 CH CH2

2,8 CO2H CO2H

3,2

3,2 3 2,8 2,6 2,4


ppm

Figure 23 – Molécule 13. Carte COSYRCT

H H H H H H H H
H3C C C C C C C C C C C C C C C C C C C CH3
19
20 H2 18 H2 17 H2 16 15 14 13
H2 12 11
H2 10 H29 H28 H27 H26 5
H24 3 2 1
22 21
CH3 O O CH3 OH OH OH NH2

O C C O
29 23

H 2C CH2
30 24

HOOC HC CH COOH
33 31 25 27
HOOC H 2C CH2 COOH
34 32 26 28

COSY INADEQUATE HOHAHA COSYRCT

Figure 24 – Molécule 13. Formule définitive

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5. Conclusion — aux macromolécules organiques ou d’origine biologique :


pour pallier des difficultés résultant de la très grande taille de ces
molécules de nouvelles expériences plus sophistiquées de RMN 2D
et des expériences de RMN 3D ont été développées.
La stratégie présentée pour la détermination de structure par
RMN est très efficace pour les molécules de dimension moyenne.
Les méthodes de base de la RMN 1D et 2D sont le plus souvent suf- Il est possible d’obtenir conseils et formations, enregistrements
fisantes pour atteindre l’objectif fixé. Mais les méthodes présentées de spectres, études plus approfondies ou plus spécialisées
restent naturellement partiellement applicables : auprès de NMRtec, société de service en résonance magnétique
— aux molécules organométalliques : il faudra alors prendre en nucléaire. Montpellier
compte les effets éventuellement très importants des atomes métal- email : info@nmrtec.com
liques et exploiter si possible l’étude RMN de ces atomes ; Site Internet : http//www.nmrtec.com

Références bibliographiques

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