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S’approprier le français
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Champs linguistiques Collection dirigée par Marc Wilmet (Université libre de Bruxelles) et
Dominique Willems (Universiteit Gent)
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Recherches
Corminboeuf G., L’expression de l’hypothèse en français. Entre hypotaxe et parataxe
Demol A., Les pronoms anaphoriques il et celui-ci
Heyna F., Étude morpho-syntaxique des parasynthétiques. Les dérivés en dé– et en anti–
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Manuels
Bal W., Germain J., Klein J., Swiggers P., Bibliographie sélective de linguistique française et romane. 2e édition
Bracops M., Introduction à la pragmatique. Les théories fondatrices : actes de langage, pragmatique cognitive, pragmatique intégrée. 2e édition
Chiss J.-L., Puech C., Le langage et ses disciplines. XIXe -XXe siècles
Delbecque N. (Éd.), Linguistique cognitive. Comprendre comment fonctionne le langage
Englebert A., Introduction à la phonétique historique du français
Gaudin Fr., Socioterminologie. Une approche sociolinguistique de la terminologie
Gross G., Prandi M., La finalité. Fondements conceptuels et genèse linguistique
Klinkenberg J.-M., Des langues romanes. Introduction aux études de linguistique romane. 2e édition
Kupferman L., Le mot «de». Domaines prépositionnels et domaines quantificationnels
Leeman D., La phrase complexe. Les subordinations
Mel’čuk I. A., Clas A., Polguère A., Introduction à la lexicologie explicative et combinatoire.
Coédition AUPELF-UREF. Collection Universités francophones
Mel’čuk I., Polguère A., Lexique actif du français. L’apprentissage du vocabulaire fondé sur 20 000 dérivations
sémantiques et collocations du français
Revaz Fr., Introduction à la narratologie. Action et narration
Recueils
Albert L., Nicolas L. (sous la direction de), Polémique et rhétorique de l’Antiquité à nos jours
Bavoux C. (dir.), Le français des dictionnaires. L’autre versant de la lexicographie française
Bavoux C., Le français de Madagascar. Contribution à un inventaire des particularités lexicales.
Coédition AUF. Série Actualités linguistiques francophones
Berthoud A.-Cl., Burger M., Repenser le rôle des pratiques langagières dans la constitution des espaces sociaux contemporains
Bouchard D., Evrard I., Vocaj E., Représentation du sens linguistique. Actes du colloque international de Montréal
Conseil supérieur de la langue française et Service de la langue française de la Communauté française de Belgique (Eds), Langue française
et diversité linguistique. Actes du Séminaire de Bruxelles (2005)
Corminboeuf G., Béguelin M.-J. (sous la direction de), Du système linguistique aux actions langagières. Mélanges en l’honneur d’Alain
Berrendonner
Dendale P., Coltier D. (sous la direction de), La prise en charge énonciative. Études théoriques et empiriques
Evrard I., Pierrard M., Rosier L., Van Raemdonck D. (dir.), Représentations du sens linguistique III. Actes du colloque international de
Bruxelles (2005)
Englebert A., Pierrard M., Rosier L., Van Raemdonck D. (Éds), La ligne claire. De la linguistique à la grammaire.
Mélanges offerts à Marc Wilmet à l’occasion de son 60e anniversaire
Hadermann P., Van Slijcke A., Berré M. (Éds), La syntaxe raisonnée. Mélanges de linguistique générale et française offerts à Annie Boone
à l'occasion de son 60e anniversaire. Préface de Marc Wilmet
Rézeau P. (sous la direction de), Variétés géographiques du français de France aujourd’hui. Approche lexicographique
Service de la langue française et Conseil de la langue française et de la politique linguistique (Eds), La communication avec le citoyen :
efficace et accessible ? Actes du colloque de Liège, Belgique, 27 et 28 novembre 2009
Service de la langue française et Conseil de la langue française et de la politique linguistique (éds), S’approprier le français. Pour une langue
conviviale. Actes du colloque de Bruxelles, Belgique, 21 et 22 novembre 2013
Simon A. C. (sous la direction de), La variation prosodique régionale en français
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S’approprier le français
Pour une langue conviviale
Actes du colloque de Bruxelles (2013)
C h a m p s l i n g u i s t i q u e s
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Imprimé en Belgique
Dépôt légal :
Bibliothèque nationale, Paris : octobre 2015 ISSN 1374-089X
Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles : 2015/13647/102 ISBN 978-2-8011-1751-4
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SOMMAIRE
INTRODUCTION GÉNÉRALE 7
Robert BERNARD, Anne DISTER, Jean-Marie KLINKENBERG,
Marie-Louise MOREAU et Dan VAN RAEMDONCK
OUVERTURE 13
Martine GARSOU
CONFÉRENCES INAUGURALES
Éloge du politiquement correct 15
Édouard DELRUELLE
La réforme de l’écriture de l’allemand : des enseignements
pour la politique linguistique francophone ? 25
Heinz BOUILLON
Partie I
APPROPRIATION : DEMANDE ET EXIGENCES SOCIALES 33
5
S’approprier le français
Partie II
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DIDACTIQUE ET APPROPRIATION 83
Partie III
EXPÉRIENCE D’APPROPRIATION 119
Partie IV
APPROPRIATION ET REPRÉSENTATIONS 127
CONCLUSIONS
Pour une politisation des débats de politique linguistique 157
Philippe HAMBYE
6
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INTRODUCTION GÉNÉRALE1
Le Comité scientifique du colloque
« Pour un français convivial. S’approprier la langue » :
Robert BERNARD, Anne DISTER, Jean-Marie KLINKENBERG,
Marie-Louise MOREAU et Dan VAN RAEMDONCK
Comment consolider l’usage d’une langue là où elle est déjà pratiquée et com-
ment lui conquérir de nouveaux espaces, si l’on ne s’assure pas de son appro-
priation par ses locuteurs actuels et potentiels ? Quelle prétention peut-on avoir
à gagner des parts dans le marché des langues, si les locuteurs, natifs ou
d’adoption, semblent éprouver du mal à maitriser un corpus difficile à intégrer
comme leur ? Comment accepter que des usagers se sentent exclus de leur
propre langue ou de celle de leur cité ?
Sans doute ne faut-il pas sous-estimer le poids des représentations que les locu-
teurs francophones se forgent ainsi de leur propre langue, et qui déterminent
largement celles des apprenants du français. En particulier, la langue française
passe pour une langue difficile, souvent vue, à tort ou à raison, comme exi-
geante et trop dépendante d’une tradition normative et élitiste.
En tout état de cause, il existe bien un cout – qu’il importe de mesurer – de la
non-maitrise de la langue. Un handicap social auquel il importe de remédier à
tout prix, sous peine d’exclusion du vivre ensemble. La chose est bien connue.
Or la question de ce déficit est souvent abordée du côté de l’usager, sur qui on
fait reposer la responsabilité de son empire sur la langue : ce que l’on envi-
sage alors, ce sont les pratiques pédagogiques, les méthodologies, le niveau de
motivations. Au nom d’une conception essentialiste de la langue continuant à
peser sur les esprits, on met plus rarement en question la langue elle-même,
ses normes et les difficultés inhérentes à son système.
1. Le présent texte fait usage des rectifications de l’orthographe de 1990, proposée par tous
les organismes francophones compétents, dont l’Académie française.
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S’approprier le français
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envisager l’appropriabilité de celle-ci.
C’est cet ensemble de questions que s’est posé le colloque international « Pour
un français convivial. S’approprier la langue », qui s’est tenu à Bruxelles les 21
et 22 novembre 2013 à l’initiative de la Fédération Wallonie-Bruxelles (Service
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Introduction générale
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par Jean-Benoît Alokpon pour son exposé campe parfaitement celui-ci. L’auteur
connait bien le sujet : enseignant chevronné, il préside depuis 2012 l’Associa-
tion des professeurs de français de l’Afrique et de l’océan Indien. Après avoir
rappelé comment le français imposé de la période coloniale avait fait de ce
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Les trois contributions groupées dans la seconde partie de ces actes sont consa-
crées au lien entre appropriation d’une langue et didactique. Ouvrant des pistes
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qu’elles questionnent.
Mohamed Miled propose une réflexion sur la place du français et sur son
enseignement dans les pays du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne, là où
les contacts sont évolutifs et où la question de l’identité peut parfois rendre
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ces contacts problématiques. Il propose une approche intéressante qui allie une
didactique dite « convergente » (qui revisite et dépasse la linguistique contras-
tive, et favorise les transferts positifs) à une collaboration entre les enseignants
de français et d’arabe (ou d’autres langues nationales).
Suzanne-G. Chartrand se propose d’étudier les représentations sclérosantes
que l’on trouve chez les élèves et les enseignants de français langue mater-
nelle (l’expérience québécoise étant aisément généralisable aux autres pays
de la francophonie du Nord), représentations qui bloquent l’appropriation de
la langue et empêchent donc d’atteindre les niveaux requis de compétences
langagières. Elle ouvre des perspectives sur les moyens d’agir à l’école sur
ces représentations en même temps qu’elle brise une lance en faveur d’un
travail sur le corpus.
Dominic Anctil propose, quant à lui, d’explorer des pistes de solutions allant
dans le sens de ce travail sur le corpus. Il se focalise sur l’aspect de l’appren-
tissage du lexique comme facteur d’acquisition de meilleures compétences
langagières.
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Introduction générale
débats autour du thème choisi. Les femmes s’écoutent, trouvent, avec l’aide
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de l’animateur, des reformulations plus adéquates, sont amenées, à travers les
mots, à préciser leur pensée.
Souvent, les participantes à l’atelier n’ont pas l’occasion de parler français
dans leur famille. C’est donc pour elles un moyen de pratiquer la langue,
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trois parties. Dans la première, les auteurs s’interrogent sur les notions de
complexité, de difficulté et de convivialité : la complexité est liée au système
linguistique ; la difficulté renvoie à la perception de l’apprenant, influencée
par ses représentations et ses motivations ; la convivialité est du ressort de la
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OUVERTURE
Allocution de Madame Martine Garsou, Directrice générale adjointe du Service
des lettres et du livre, Fédération Wallonie-Bruxelles :
Je suis très heureuse de vous accueillir ici aujourd’hui pour ce colloque orga-
nisé par le Service de la langue française et le Conseil de la langue française
et de la politique linguistique en collaboration avec le réseau Opale, un réseau
constitué des différents organismes linguistiques de la francophonie du Nord
(France, Québec, Suisse romande, Fédération Wallonie-Bruxelles). Les objectifs
de ce réseau visent à permettre à ces organismes linguistiques de coordonner
leurs actions pour répondre plus efficacement à des enjeux qui, en matière
de langue, dépassent souvent les logiques territoriales et d’affirmer ainsi la
légitimité d’une politique linguistique à l’attention des responsables politiques,
sociaux, économiques, ainsi que des citoyens.
Les questions évoquées depuis les années 1990 (1993 plus précisément)
au sein de ce réseau concernent aussi bien celles liées à la position du
français c.-à- d. son statut (quelles actions et stratégies mener pour ren-
forcer la position du français là où il est menacé : dans les sciences, les
nouvelles technologies… ?) que celles concernant la langue elle-même (le
corpus), son usage et son évolution. Une réunion annuelle est ainsi organisée
depuis 1993, réunion accompagnée depuis plusieurs années d’un colloque
ou d’un séminaire de réflexion, permettant de faire avancer l’analyse et
la comparaison des situations ainsi que d’adresser des recommandations
communes aux gouvernements concernés.
Diverses thématiques ont été abordées ces vingt dernières années. J’évoquerai
à titre d’exemple la question du plurilinguisme dans un contexte de mondialisa-
tion, la rédaction technique, l’intégration linguistique des migrants, l’évolution
du français contemporain, la place du français dans l’espace public.
Le colloque d’aujourd’hui traite de la question de l’appropriation du français.
Question centrale et complexe pour nos politiques éducatives, culturelles et
linguistiques dans nos sociétés où les compétences langagières, y compris les
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S’approprier le français
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savoir, à l’emploi, à la culture…
Or force est de constater que ces compétences ne sont pas acquises de manière
égale par tous. Les études PISA montrent par exemple des écarts très impor-
tants en Fédération Wallonie-Bruxelles en ce qui concerne les compétences en
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CONFÉRENCES INAUGURALES
Édouard DELRUELLE
Mon exposé ne s’inscrit pas précisément dans le thème que vous avez choisi
d’explorer durant ce colloque : l’exclusion socioculturelle qui découle des dif-
ficultés inhérentes à la langue française et de sa tradition normative et élitiste.
C’est d’un autre sujet que je voudrais vous parler : l’exclusion qui découle de
l’usage de la langue à des fins de stigmatisation et de discrimination. Il y a
néanmoins une proximité thématique évidente, me semble-t-il, entre la convi-
vialité (concept qui préside à vos travaux) et la civilité (un concept qui oriente
mes réflexions sur le politique en général, et sur la liberté d’expression et les
discours de haine en particulier).
Mon itinéraire professionnel m’a permis de croiser sur cette question un point
de vue « théorique » – celui du philosophe politique – et un point de vue « pra-
tique » – à la direction du Centre pour l’égalité des chances, institution publique
belge indépendante de lutte contre les discriminations et de défense des droits
fondamentaux des étrangers. Je voudrais vous livrer quelques réflexions tirées
de cette expérience croisée.
Un point d’abord sur le cadre législatif. En Belgique comme dans la plupart des
pays européens, la loi interdit (1) les discriminations proprement dites (refuser
un emploi, un logement, l’accès à une école, un restaurant, etc., à une personne
ou un groupe de personnes en raison de sa prétendue race, son origine, son
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forme la plus courante) et (3) les discours de haine, soit les incitations à la
haine, à la violence ou à la discrimination (en augmentation exponentielle avec
Internet et les médias sociaux).
Il faut d’abord bien comprendre que, sur le plan juridique, on ne combat pas
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les discours de haine avec les mêmes outils que les discriminations :
– dans le cas des discriminations, l’outil juridique se base sur un principe
général qui est l’égalité de traitement. En principe, on ne peut jamais traiter
de façon différente deux catégories de personnes, sauf s’il y a « justification
objective et raisonnable ». Dans le cas du racisme, de telles justifications sont
rarissimes (la couleur de peau d’un acteur devant jouer le rôle de Nelson
Mandela). Sur cette base, il est possible de sanctionner les inégalités de
traitement de manière très large et très complète, qu’elles soient directes ou
indirectes, intentionnelles ou non intentionnelles (c’est pourquoi ces lois, en
Belgique, ont un volet civil). Une telle base juridique permet donc au Centre
pour l’égalité des chances, quand il est confronté à des cas de discrimina-
tion dans l’emploi, le logement, les biens et services, etc., d’intervenir assez
rapidement et dans un assez grand nombre de cas, sous forme d’une action
judiciaire s’il le faut (même si le Centre privilégie toujours la conciliation et
la négociation) ;
– dans le cas des propos qui incitent à la haine, à la discrimination ou à la
violence (ou qui nient, banalisent ou minimisent grossièrement les crimes
nazis), par contre, le principe général est la liberté d’expression. En principe,
on peut tout dire, sauf si l’on profère des propos qui incitent à la haine, à la
discrimination ou à la violence. Ici, la logique s’inverse : ce sont les limita-
tions à la liberté qui doivent être dument justifiées et proportionnées. Nous
sommes dans le champ pénal : pour attaquer quelqu’un en justice au motif
de l’incitation à la haine, à la discrimination ou à la violence, il faut donc
pouvoir prouver une intention de nuire. Contrairement aux discriminations,
les situations où une institution comme le Centre peut intervenir sont donc
beaucoup plus rares. Du point de vue de la démocratie, cette inversion de
la charge de la preuve est évidemment une garantie pour chacun de pouvoir
exprimer ses opinions et ses convictions – d’autant que la jurisprudence
belge, on va le voir, protège jalousement, à juste titre, la liberté d’expression.
Cette différence entre les outils de lutte contre les discriminations et les dis-
cours de haine suscite l’incompréhension de certains, qui ont l’impression fausse
d’un « deux poids deux mesures », comme si le Centre était intransigeant face
à la moindre discrimination à l’embauche, par exemple, mais indifférent face
à des propos nauséabonds et insupportables. L’explication est pourtant tout
autre. Comme on vient de le voir, les deux phénomènes s’inscrivent dans des
logiques juridiques « inverses » : dans un cas, l’égalité de traitement prime, et
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Conférences inaugurales
c’est la différence de traitement qui est l’exception ; dans l’autre cas, c’est la
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liberté d’expression qui prime, et c’est l’incitation à la haine qui est l’exception.
La législation sur les discours de haine suscite des controverses sans fin, et
même une réprobation de plus en plus forte, en ce qu’elle porterait atteinte à la
liberté d’expression. Pourtant, six années de lutte anti-discrimination au Centre
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pour l’égalité des chances m’ont convaincu que la lutte contre les discours de
haine ne fait peser aucun risque sur la liberté d’expression, qu’il n’y a aucun
conflit entre la pénalisation des discours de haine et la liberté d’opinion.
Un arrêt célèbre de la Cour européenne des droits de l’Homme énonce que la
liberté d’expression est une liberté fondamentale qui s’étend jusqu’aux « propos
qui blessent, qui choquent ou qui inquiètent autrui ou l’État ». Autrement dit,
la blessure psychique que peut provoquer un message dénigrant ou insultant
chez le récepteur (tel membre de telle communauté) n’est aucunement un
critère de sanction. Cela signifie-t-il que l’on peut tout dire ? Certes non, la
même Convention autorisant les pays membres à sanctionner des propos à
trois conditions :
– il faut un « but légitime », à savoir la défense impérieuse de la démocratie,
c’est-à-dire des libertés fondamentales elles-mêmes ;
– cette interdiction doit faire l’objet d’une loi ;
– elle doit être proportionnée à l’objectif poursuivi.
L’erreur fondamentale, dans les débats qui portent sur cette question, c’est
de voir ce type de législation comme une manière de limiter l’expression
d’idées ou d’opinions qui seraient vraiment « trop » dérangeantes, comme s’il
s’agissait d’une question de « contenu ». Comme si la question était : quels
contenus de discours est-il légitime ou non d’exclure de l’espace public (par
exemple l’idéologie de l’extrême droite, ou d’une certaine extrême gauche,
le discours islamiste, ou au contraire islamophobe, ou les deux, etc.) ? Le
résultat, c’est que les citoyens et les groupes ont alors tendance à interpréter
la « limite » à l’aune de leurs propres convictions ou intérêts. Chacun voit
midi à sa porte, car le critère spontané est : « ils » (les adversaires) « exa-
gèrent ». Dans une telle perspective, on comprend que les professionnels de
l’expression (les journalistes, les caricaturistes, les historiens travaillant sur
l’histoire de l’esclavage ou la Seconde Guerre mondiale) soient généralement
hostiles à toute législation visant à lutter contre les discours de haine, comme
si cette législation risquait de s’appliquer à leur travail.
Or, c’est faux, tout simplement parce que telle n’est pas la logique de la loi, ni
la pratique des tribunaux. En réalité, ce qui peut faire l’objet de sanctions, ce
n’est jamais une idée ou une opinion, mais toujours un acte, un comportement.
Ce que le juge saisi d’une plainte pour incitation à la haine va examiner, ce
n’est pas l’opinion en tant que telle (aussi choquante, blessante ou inquiétante
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termes, une incitation à la haine est un performatif par lequel le locuteur
accomplit un certain acte de langage dont l’intention et l’effet sont la haine, la
violence ou la discrimination.
Quand vous lisez la jurisprudence sur les discours de haine2, vous pourriez croire
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que les juges sont des adeptes zélés des théoriciens des actes de langage (Austin
ou Searle) : ils identifient assez naturellement ce qui, dans un énoncé, relève de
sa dimension représentative (qui ne doit faire l’objet d’aucune considération de la
part du juge) et ce qui relève de sa dimension performative (à laquelle le même
juge doit par contre être très attentif). En effet, aucun énoncé n’est, en soi, un
discours de haine ; ce qui lui confère cette « qualité », c’est, d’une part, l’intention
du locuteur ; d’autre part, le contexte dans lequel il l’a prononcé (devant quel
public, à quelle occasion, etc.). Ces deux éléments sont précisément constitutifs de
ce que l’on appelle en linguistique un énoncé performatif, c’est-à-dire un acte de
langage mis en œuvre par le locuteur non pour décrire son environnement, mais
pour agir sur lui à l’aide de signes3. Un propos qui incite à la haine, c’est donc
un acte de langage qui est accompli dans cette intention, et dans un contexte qui
lui donne une efficacité potentielle sur le public auquel il s’adresse.
Si je dis « mort aux Juifs » lors d’une manifestation houleuse, ou que j’ordonne
« pas d’Arabes dans mon entreprise » à mon directeur des ressources humaines,
je n’énonce aucune opinion à propos des Juifs ou des Arabes, je fais bel et bien
quelque chose, ou je fais faire quelque chose à un tiers (ce qui est la définition
même de l’incitation).
Bien sûr, cette caractérisation de l’incitation à la haine comme acte de langage
n’épuise pas le débat :
– certains voudront interpréter la pragmatique de la haine de façon très restrictive,
en disant qu’on ne peut interdire un propos qu’à la condition que les victimes
potentielles soient physiquement présentes au moment de l’énonciation d’un
discours de haine (c’est la position dominante dans les pays anglo-saxons)
– selon l’exemple classique : lancer « mort aux Juifs » à une foule furieuse
en présence de Juifs ;
2. Je parle ici de la jurisprudence belge ; mais je gage qu’il en est de même en France, en
Suisse, au Québec, etc.
3. Le performatif fait donc quelque chose en même temps qu’il énonce : informer, inciter,
demander, convaincre, promettre, etc. Par exemple, l’énoncé « je vous déclare mari et femme »
prononcé par un officier d’état civil fait ce qu’il énonce, de même que l’énoncé la « séance
est ouverte » prononcé par une personne institutionnellement habilitée à le dire/faire. Un
énoncé devient un performatif en vertu (1) de l’intention de son locuteur, (2) de la manière
dont le destinataire la reçoit, et (3) du contexte dans lequel ils se trouvent. Cette théorie a
été développée par John Austin, How to do things with Words (1962), trad. Quand dire c’est
faire, Seuil, 1970 ; John Searle, Les Actes de langage (1969), Hermann 1972 (rééd. 2009).
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Conférences inaugurales
– dans les pays européens qui ont vécu la montée puis les horreurs du fas-
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cisme, cette condition est considérée comme beaucoup trop restrictive,
puisqu’elle ne permet pas de pénaliser les propos d’un apprenti dictateur
comme Hitler4.
Entre les partisans d’une interprétation restrictive ou élargie de la pragmatique
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de haine, le débat est ouvert ; mais au moins les termes du débat sont-ils cor-
rectement posés, non plus en termes de représentations ou d’opinions, mais en
termes d’actes de langage.
Je voudrais donner un exemple concret, d’autant plus intéressant que depuis
lors, il a suscité un énorme débat. Mon dernier acte de directeur du Centre
pour l’égalité des chances, en juin 2013, a été de déposer plainte pour incita-
tion à la haine à l’encontre de « l’humoriste » français Dieudonné, suite à un
spectacle à Liège en 2012. Tout d’abord, je n’ai pas cherché à faire interdire
le spectacle : pas de censure a priori5. Mais pas question non plus de rester
inerte. Le Centre a dès lors collaboré avec la police locale qui a dressé un
procès-verbal détaillé du déroulement du spectacle. J’ai ainsi pu entendre la
totalité de ce spectacle. Que ce show soit une logorrhée antisémite et homo-
phobe de plus d’une heure, c’est incontestable. Mais s’agit-il d’incitation à la
haine ? Ici, la perspective pragmatique prend tout son sens. On peut discuter
à l’infini pour savoir si telle phrase ou telle autre, chacune prise isolément,
est antisémite ou homophobe ; ce qui m’est apparu certain, par contre, c’est
le dispositif pragmatique global de ce « show » dont les spectateurs étaient,
dans leur immense majorité, des jeunes de banlieues issus de l’immigra-
tion marocaine (c’est-à-dire un public particulièrement vulnérable, lui-même
victime de discriminations structurelles). Parmi les éléments pragmatiques,
relevons : le fait que Dieudonné provoque, non seulement des rires, mais
aussi des huées ; qu’il accompagne ses propos d’une gestuelle particulière
(la fameuse « quenelle », sorte de salut nazi inversé) ; le caractère répétitif
et systématique des propos négatifs envers les Juifs, qui atteste que l’intention
est bel et bien d’inciter à la haine contre eux.
Il n’est pas du tout sûr, au final, que l’actuelle direction du Centre ou la justice
belge aillent jusqu’au procès. Personnellement, j’ai regretté qu’on ne poursuive
4. À ceux qui ne comprennent pas la nécessité de législation contre les discours de haine,
je rappelle toujours qu’Hitler n’a tué personne : il n’a fait que prononcer des discours
et donner des ordres. Il est un criminel, non du fait d’avoir du sang sur les mains, mais
d’avoir manié la parole avec une efficacité et une perversité redoutables.
5. Certes, en Belgique comme en France, il existe toujours la possibilité d’interdire quelque
manifestation ou spectacle au titre du « trouble à l’ordre public ». Mais outre que cette
exception aux libertés publiques doit être maniée avec la plus grande circonspection, dans
le cas de Dieudonné en Belgique, il n’était pas possible de l’activer, en raison d’un arrêt du
Conseil d’État de 2011 qui avait cassé une décision d’interdiction d’un précédent spectacle
de Dieudonné, prise par le Bourgmestre de Saint Josse (Bruxelles).
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S’approprier le français
pas Dieudonné en Belgique6. Mais cela prouve qu’il est extrêmement rare de
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pouvoir sanctionner des propos au titre de l’incitation à la haine. Entre 2007
et 2013, le Centre n’a entamé que cinq procédures judiciaires pour incitation à
la haine (dont trois contre le seul groupe islamiste Sharia4Belgium). Or, mal-
gré cette politique de non-intervention, le Centre a la réputation d’exercer une
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6. « Ne pas interdire ses spectacles, mais agir fermement a posteriori », interview dans Le Soir,
8 janvier 2014. (Depuis lors, il a été annoncé dans la presse que le Parquet de Liège avait
diligenté une enquête et que des poursuites seraient engagées – ce dont je me réjouis...).
7. Alain Destexhe, « Islamophobes ? », La Libre Belgique, 27 mars 2013.
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Conférences inaugurales
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néoconservatisme en Occident, qui a réussi à se faire passer pour le parti de la
transgression et de la critique, et le discours libertaire et progressiste, pour celui
de l’ordre établi et du dogmatisme. Alors que hier, les conservateurs tenaient
le discours du « sacré » (« il y a des choses auxquelles on ne touche pas ») et
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citoyenneté, c’est-à-dire à la constitution d’une sphère de socialité indépen-
dante des attachements familiaux et des intérêts économiques, d’une part ; à un
comportement moral au quotidien – politesse, courtoisie, attention aux autres –
qui révèle une capacité de respecter autrui dans sa singularité, d’autre part.
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9. « Civilité » est d’ailleurs une traduction possible du terme « Sittlichkeit » tel qu’il est
employé par Hegel.
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– qu’il s’agisse des forums de discussion, des blogs et sites, des médias sociaux
(Facebook et Twitter), des mails « en chaine », etc. Internet est aujourd’hui une
véritable jungle sans règles de civilité, et où les lois anti-discrimination, du
reste, ne sont pas appliquées. Avec Internet, on assiste en quelque sorte à un
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Heinz BOUILLON
Chers Collègues,
Je tiens à remercier les organisateurs de m’avoir donné la chance de vous par-
ler des problèmes d’écriture en allemand, mais surtout parce que je le fais en
tant que membre du Conseil de l’orthographe allemande. Le monde allemand
est assez méconnu dans les pays francophones, pour des raisons historiques et
autres, mais il recèle parfois des solutions ou des pistes de solutions qui pour-
raient être pratiquées mutatis mutandis par d’autres. Je vous remercie dès lors
de votre demande et j’espère que notre façon de travailler au Conseil de l’ortho-
graphe allemande pourra être propice à l’avancement de vos travaux et renforcera
la conviction séculaire que le choc des idées peut faire jaillir la lumière.
Permettez-moi de circonscrire d’abord le problème posé par l’écriture de l’alle-
mand, les solutions trouvées par la création du Conseil de l’orthographe suite à
une profonde discorde dans le monde germanophone, puis enfin de vous faire
quelques suggestions qui émanent de mes expériences lors de ces sept dernières
années au sein de ce Conseil.
Tout d’abord, il faut partir du constat qu’en allemand il n’existe pas de vision
d’inclusion ou d’exclusion d’un mot par rapport à un vocabulaire officiel ger-
manophone. Il existe bien sûr une chasse aux anglicismes comme partout,
mais lorsqu’un mot est utilisé par l’une ou l’autre communauté, il est considéré
comme faisant partie du lexique. Il y a toujours eu une très grande variété de
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S’approprier le français
mots pour désigner les choses en allemand, le mot « tomate » que vous com-
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prenez aisément devient « Paradaiser » en Autriche et pour un grand nombre
de mots, même de souche germanique, on constate une distribution complé-
mentaire : « Speicher » désignant le grenier au Nord et « Dachboden » au
Sud ; chaque groupe ou sous-groupe régional comprend généralement le mot
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qui en assura le suivi. Le monde germanophone adopta cette direction des
opérations par une maison d’édition et lorsqu’il y avait un doute sur l’écriture
du mot, il fallait se référer au Duden, aussi bien en Allemagne que dans les
pays voisins. Ce Duden connut de nombreuses éditions adaptées à l’introduction
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2. La composition
D’entrée de jeu, la composition du Conseil a reflété davantage la volonté
d’aboutir à un résultat plutôt qu’un subtil dosage de taille ou d’influence. Le
Conseil se compose de dix-huit Allemands, neuf Autrichiens, neuf Suisses,
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S’approprier le français
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germanophone de Belgique, plus le Président. Depuis la réunion du Conseil
d’octobre 2013, il y a également un observateur luxembourgeois et il faut noter
que le Luxembourg ne veut à aucun prix en être membre effectif, il souhaite
juste envoyer un observateur. Selon le seul critère de taille, un Allemand est
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des centaines de fois plus représentatif que l’un des quatre petits que je viens de
citer. Peut-être cette dernière réflexion pourrait-elle déjà vous inspirer lorsqu’il
s’agit de pondérer des représentations dans d’éventuels conseils à créer.
Chacun prend la parole à son gré, soit qu’il s’exprime sur la logique d’une règle
d’écriture à modifier éventuellement, soit qu’il fasse appel à une sensibilité plus
locale concernant cette règle. Un grand mérite dans la réussite de la réforme
revient en fait au Président Hans Zehetmair. Monsieur Zehetmair, à l’origine pro-
fesseur d’université, a été pendant une dizaine d’années ministre de l’Éducation
en Bavière. Il connait le sujet sur le plan linguistique, mais utilise aussi sa fibre
politique pour faire avancer les débats. Au niveau de la composition, les grandes
maisons d’édition de dictionnaires sont représentées. Ainsi le Conseil dispose au
travers de ces maisons d’édition et de l’IDS de quatre grands corpus qu’il peut
interroger : celui du Duden, du Wahrig-Brockhaus, celui de l’Institut central
pour la langue allemande (Institut für deutsche Sprache) de Mannheim et celui
du dictionnaire autrichien, j’expliquerai plus tard pourquoi c’est si important.
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cale. Un mot est écrit avec une majuscule lorsqu’il est perçu comme substantivé.
Un adjectif qui suit une préposition par exemple (en général – im Allgemeinen)
suit souvent cette règle. Inutile de dire que de nombreuses hésitations subsistent
chez l’utilisateur moyen ou chez l’élève et dans ce cas, la liste de référence ou
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4. Observation
C’est ainsi que les quatre grands corpus sont sollicités pour observer la pratique
quotidienne des scribes germanophones. Les plus grands corpus ont chacun
plus de deux milliards de signes et il est possible d’établir l’historique d’une
graphie sur une vingtaine d’années.
On a pu observer un phénomène étrange : lorsqu’une nouvelle règle décrit très
clairement un type de graphie, il ne faut que quatre ans pour que la nouvelle
utilisation prescrite soit adoptée par 95 % des utilisateurs. Lorsqu’une règle
laisse subsister des hésitations ou des choix, les chiffres recueillis indiquent
clairement une adaptation plus lente. Dans certains cas examinés l’ancienne
règle devenue incorrecte et la nouvelle règle se partagent le terrain à 50 %,
la communauté hésite, signe que dans les années à venir, il faudra peut-être
clarifier la règle.
Un moment très attendu sera aussi celui où les enfants qui ont débuté avec la
nouvelle orthographe pourront être valablement testés.
Pour l’instant le Conseil observe les habitudes d’écriture sur les gigantesques
corpus à sa disposition. Certes, la représentativité de ceux-ci peut être remise en
cause mais au départ, il s’agit tout de même d’un magnifique instrument et dès
lors pourquoi pas s’en servir ? Par ailleurs, il ne s’agit pas non plus d’observer
la fréquence des fautes de tout genre. L’objet des observations se situe dans les
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S’approprier le français
zones d’ombres des règles actuelles, des hésitations possibles, de l’utilisation des
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variantes. Il ne s’agit pas d’ériger en règle une faute observée avec constance, il
s’agit d’affiner les règles pour qu’elles produisent un maximum de graphies justes.
La pomme de discorde reste les variantes. Un exemple typique : Creme, Crème,
Krem sont trois variantes du même mot. Beaucoup moins que 1 % des occur-
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rences sont occupées par le mot « Krem ». Vouloir l’éliminer de la liste des
variantes pourrait toutefois froisser des sensibilités…
Il faut observer à ce stade-ci, que les lignes de partage dans ce domaine peuvent
traverser des régions, le Nord et le Sud, les nationalités, les Autrichiens versus les
Allemands versus les Suisses, des sous-groupes d’utilisateurs, comme des jour-
naux, des écrivains qui souhaitent se démarquer. Alors le Conseil est le lieu où
ces différences sont exprimées. Cela se fait dans une sorte de convivialité où les
représentants font tout de même un maximum pour ne pas vexer le voisin et tenir
compte de sa différence. Je suis d’ailleurs frappé par le fait qu’en représentant
moins d’un millième de la communauté germanophone mais représentant une
communauté autonome, mon avis soit sollicité par exemple sur notre particularité
scolaire dans l’enseignement de l’orthographe au même titre que l’Allemagne.
Par son existence même, le Conseil de l’orthographe est une réussite parce qu’il
propose des solutions non nationales à des problèmes qui pourraient mener
facilement à des raidissements identitaires.
Enfin, je ne peux éviter de parler d’un débat plus fondamental qui n’est pas défi-
nitivement tranché. À certains moments, des membres ont proposé de réécrire
complètement tout le système de règles afin qu’il soit plus lisible, plus facile
d’accès au moins aux professeurs de l’enseignement fondamental ou secondaire.
Le contrargument retenu a été de dire qu’il faut considérer le système de règles
comme un ensemble de textes législatifs qui n’aurait pas pour objectif premier
l’élégance de la formulation, mais bien la pertinence nécessaire pour prévoir le
plus grand nombre d’applications correctes possibles. Réécrire dans son ensemble
ce système de règles mènerait à des graphies inattendues, non prévues, probable-
ment source de nouvelles hésitations. L’attitude générale à ce stade des délibéra-
tions est de se contenter d’éventuellement adapter l’existant aux réalités observées
et non un soi-disant « nettoyage » du premier texte. La prudence prévaut.
5. Suggestions
Après ce tour d’horizon, rapide à cause du temps imparti, je pourrais dégager
trois suggestions pour les travaux du groupe qui me fait le plaisir de m’accueillir
aujourd’hui.
La première est de cibler les dosages représentatifs plutôt en fonction des
objectifs à atteindre que par souci politico-linguistico-national. Dans le Conseil
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Conférences inaugurales
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a aussi trois groupes de travail : linguistes, lexicologues et didacticiens où
tout le monde se mélange. Sont représentés dans le Conseil, les grands dic-
tionnaires, les académies allemandes, les ministères de l’Éducation autrichien
et suisse, les sociétés d’auteurs et j’en passe. Bref, pour ce petit monde ainsi
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Références
Bouillon, H., Allemand – Grammaire pratique de l’étudiant, Bruxelles, De
Boeck, 2008, 3e édition, pp. 237-242.
Bouillon, H., « Les turbulences apaisées de l’orthographe allemande », in La
Revue générale, no 3, 2011, pp. 47-51.
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S’approprier le français
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Begründung. Empirische Schreibeobachtung auf der Grundlage korpusba-
sierter Lexikographie», in Mitteilungen des Deutschen Germmanistenver-
bandes 58, V&R, unipress GmbH, 2011, pp. 36-50.
Ossner J., Orthographie – System und Didaktik, UTB 3329, Ferdinand
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LE FRANÇAIS EN AFRIQUE :
UN CONTINENT ENTRE RÊVE ET NOSTALGIE
Jean-Benoît ALOKPON
Pour des raisons pratiques, je me suis penché sur le cas d’un seul pays, le Bénin,
pour aboutir à une conclusion sur l’enseignement du français qui impliquera
l’Afrique et l’océan Indien. Pourquoi privilégier le Bénin ? Les réponses sont
évidentes : c’est le pays dont je connais le mieux les problèmes ; il fait depuis
des années une expérience démocratique qui lui donne une stabilité politique ;
comme beaucoup de pays d’Afrique, il a engagé des réformes dans le système
éducatif.
Au Bénin, le français est non seulement la langue officielle, mais aussi et sur-
tout la langue privilégiée de communication, d’échange et de culture au service
du développement économique. Il est au service du rayonnement culturel du
Bénin sur la scène africaine et internationale.
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Appropriation : demande et exigences sociales
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témoignage le plus émouvant et le plus élogieux, mais aussi le plus tendancieux
sur l’élite dahoméenne de l’époque coloniale :
C’est pour la France bien entendu, un singulier mérite d’avoir, au lendemain même
de l’installation coloniale, opéré de telles conquêtes intellectuelles et morales.
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Le français en Afrique : un continent entre rêve et nostalgie
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En 1990, à la faveur de la Conférence nationale de février, le français revêt son
statut de langue officielle (article 1er de la constitution du 11 décembre). Cette
même année ont lieu les États généraux de l’éducation, à la suite de la crise que
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traversait le système éducatif. Ils proposent une réforme, engagée quatre ans plus
tard : elle privilégie l’acquisition du savoir dans une approche par compétences,
et non plus par objectifs. Le but est de former un citoyen capable d’analyse et
d’adaptation à son milieu de vie et de travail.
Le français est le vecteur linguistique transversal du système éducatif. En
tant que langue officielle d’enseignement, de travail et de communication
internationale, sa maitrise par l’apprenant facilite l’apprentissage dans les
autres disciplines, notamment scientifiques. Tant et si bien que lorsqu’au
Bénin on dit de quelqu’un qu’il est un grand intellectuel – en une traduction
à peine voilée de l’expression Fon, la langue nationale la plus parlée, « essé
wéma » (« il connait papier », « il maitrise le savoir »), ce n’est presque
jamais par rapport à sa capacité de résoudre des problèmes mathématiques,
physiques ou de dessiner et sculpter : c’est toujours par rapport à sa maitrise
de la langue française, à son don pour exprimer des pensées fleuries où les
images et les citations de grands auteurs se bousculent. L’exemple le plus
vivant est le Rapport Général de la Conférence Nationale des Forces Vives de
1990, présenté par une légende vivante, Albert Tévoédjrè. Les conférenciers
de l’époque, ainsi que tout le peuple béninois, furent enthousiasmés, non
pas parce que le rapport comportait l’ensemble de ce qui avait été dit, mais
parce que son auteur trouvait le mot juste en français. De plus, il montrait
sa capacité d’approche d’autres langues étrangères, s’exprimant tour à tour en
anglais, en allemand, en latin et en faisant recours à des pensées d’auteurs et
à des passages de la Bible, subjuguant ainsi une salle et un peuple emportés
par ses envolées. La maitrise du français est donc au Bénin un puissant
marqueur du rang et de la classe sociale.
2. Le français aujourd’hui
Mais comment y parle-t-on le français aujourd’hui ?
On ne peut répondre valablement à cette question sans un bref état des lieux
du système éducatif.
Le système éducatif béninois est, comme dans la plupart des pays de
l’Afrique et de l’océan Indien, composé de l’enseignement maternel, du pri-
maire, du secondaire (technique et professionnel) et du supérieur. Dans ce
système, des difficultés sont présentes à tous les paliers, avec un bémol pour
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Appropriation : demande et exigences sociales
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utilisés). Parmi ces difficultés transversales, on peut retenir les suivantes :
• Au plan didactique
– effectif largement insuffisant du corps d’encadrement en français : le recru-
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Le français en Afrique : un continent entre rêve et nostalgie
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et a par ailleurs envisagé de porter l’âge de la retraite à 60 ans au lieu de 55.
• Au plan pédagogique
– désintérêt pour la lecture et l’autoformation : le coût de la vie, contrastant
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avec les salaires, pousse les enseignants à consacrer leur temps libre à d’autres
activités lucratives, au détriment d’une constante mise à niveau ;
– absence quasi totale d’une politique dynamique du livre ;
– absence, pendant longtemps, de politique incitative en faveur des élèves
méritants (état de choses heureusement en train d’être corrigé) ;
– absence d’information sur les possibilités de bourses d’études (nationales ou
étrangères), ce qui entraine la confiscation de ces bourses par les décideurs ;
– absence de coordination des actions de promotion de la langue française.
Il y a toutefois des initiatives louables, dont celles de la Commission nationale
permanente de la Francophonie qui, dans le cadre de la quinzaine de la Franco-
phonie, exécute un programme mettant en lumière ce qui se fait pendant cette
période pour la promotion du français, du livre, de la lecture et de l’écriture.
Le système éducatif béninois bénéficie largement de cette initiative, notamment
à travers le concours de Promotion de la langue française (PROLAF).
• Au plan culturel
– insuffisance de productions littéraires en français, faute de maison d’édition
et de politique incitative. Si ces cinq dernières années ont vu la création de
maisons d’édition, souvent tenues par des groupes d’écrivains ou de chercheurs,
leur développement reste timide ;
– absence de canaux de distribution du livre en milieu scolaire. L’Association
des Professeurs de Français du Bénin, en liaison avec la Commission susdite
et l’ambassade de France, a mis en œuvre un projet intitulé « Le livre frappe
à votre porte ». Ce projet consiste à mettre la lecture à la portée des établisse-
ments scolaires particulièrement déshérités sur le plan documentaire. D’autres
initiatives existent et méritent d’être encouragées ;
– insuffisance de médiation dans la vie culturelle scolaire : des traditions qui
ont fait leurs preuves sont malheureusement en voie de disparition : journaux
scolaires, clubs de lecture, ateliers d’écriture, groupes de théâtre et d’action
culturelle, etc. La seule survivance sont les journées culturelles, qui ne s’orga-
nisent qu’une fois l’an, souvent pour clôturer les activités académiques ;
– absence de dynamisme dans le renouvellement des ouvrages littéraires et
didactiques au programme. Des livres comme Les bouts de bois de Dieu,
L’arbre fétiche, L’esclave, Les rayons et les ombres, sont au programme depuis
39
Appropriation : demande et exigences sociales
longtemps. Quand ces œuvres ont été remplacées en 2012, sans une large consul-
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tation de tous les acteurs et sans ateliers pédagogiques préparatoires, certaines
des œuvres programmées n’ont pas rencontré l’adhésion des professeurs et ont
dû être remplacées, à peine introduites, ce qui a entrainé de grandes perturba-
tions dans les études littéraires pendant l’année scolaire 2012-2013.
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Le français en Afrique : un continent entre rêve et nostalgie
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nouvelle vogue communicationnelle.
Voici quelques exemples : l’Ivoirien Meiway écrit ces vers :
Ma tête est gnanganni,
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4.1.2. Médias
L’extraordinaire effloraison de divers titres dans la presse béninoise vient de
trois sources : la liberté d’expression régnant depuis la Conférence dite des
Forces Vives du Bénin (1989), la voie que la presse offre pour résorber le
10. Traduction : C’est pour cela qu’ils (les enseignants) souffrent de maux de ventre atroces,/
de diarrhées chroniques./Et quand ils sont malades/, ils ne vont pas se faire soigner dans
une clinique mais plutôt au CNHU.
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Appropriation : demande et exigences sociales
taux de chômage des jeunes (du fait du gel du recrutement dans la fonction
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publique depuis 1986 : de nombreux jeunes se sont rués vers le journalisme) ;
le quatrième pouvoir représente une source importante d’enrichissement.
À cause de cette efflorescence, les fautes de toutes sortes envahissent la rue,
perturbant les élèves qui rencontrent un français qui n’a rien à voir avec les
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Le français en Afrique : un continent entre rêve et nostalgie
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Les nouvelles techniques de l’information et de la communication imposent un
autre phénomène du français dans la rue qu’il me plait d’appeler « le français dans
la main ». Il s’agit des SMS. Ces SMS donnent le coup de grâce à la grammaire, à
l’orthographe, au vocabulaire, à la conjugaison : on n’a pas le temps et on n’a que
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le petit espace qu’offre l’écran du portable. Alors, cadeau Kdo, Merci M6, je suis
j s8. Ma propre fille qui se plaignait un jour de ce que je ne me suis pas assez
reposé m’a donné ce conseil par SMS : « Pap mangé vit é rposé vs 1pe avn 15 h sa
vs fra du b1 ». Et pourtant, elle sait qu’elle est la fille d’un professeur de français !
Il faut le dire sans ambages : les NTIC contribuent fortement à l’appauvris-
sement du français. Il s’agit, hélas, d’un dynamisme inouï contre lequel tout
combat est d’avance voué à l’échec. Mais le professeur doit en tenir compte
dans ses stratégies d’enseignement/apprentissage.
Des rencontres internationales se sont déjà penchées sur ces questions, comme
les « États généraux de l’enseignement du français en Afrique sub-saharienne »
tenus du 17 au 20 mars 2003 à Libreville.
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Appropriation : demande et exigences sociales
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Ils ont adopté les recommandations suivantes :
• Au plan institutionnel
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Le français en Afrique : un continent entre rêve et nostalgie
• Au plan pédagogique
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– mettre l’accent sur l’objectif du développement, et ce à travers un enseigne-
ment fonctionnel sans exclure les autres objectifs assignés à l’enseignement ;
– mettre en place un programme de soutien à la formation initiale et continue
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EN BELGIQUE LE FRANÇAIS,
COMBIEN ÇA COÛTE ?
Robert BERNARD
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Appropriation : demande et exigences sociales
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économique11.
Nous examinerons les stratégies mises en œuvre pour permettre aux nouveaux
arrivants non francophones de développer une pratique suffisante du français
pour réaliser leurs objectifs d’insertion sociale, en matière de travail, d’accès
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11. Des études ont montré que le niveau d’utilisation des langues de la société d’accueil est
un élément non négligeable de la réussite scolaire et plus tard, de l’insertion profession-
nelle. Voir Ouali N. et Rea A., Insertion, discrimination et exclusion. Cursus scolaires et
trajectoires d’insertion professionnelle de jeunes bruxellois, ULB, 1995.
12. L’étude officielle la plus récente publiée par Statbel (Direction générale Statistique et
Information économique, ministère fédéral de l’Économie) sur le sujet (La population
allochtone en Belgique) date de 2002 et repose sur des chiffres de 1991. Si, dans son
Rapport statistique et démographique 2008, le Centre pour l’égalité des chances écrit
que « La Belgique est souvent présentée comme un bon élève en termes de statistiques
migratoires en Europe », il ajoute aussitôt que « les fichiers administratifs belges […] ne
sont que rarement accessibles en dehors du cercle assez restreint des spécialistes » et que
« Finalement, un doute permanent entache la fiabilité des informations et l’objectivité de
données produites sur un sujet aussi sensible ».
13. Le Soir daté du 5 novembre 2013.
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En Belgique le français, combien ça coûte ?
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respectivement 2,8 % et 2,4 %14.
Bruxelles comporte donc une population de migrants particulièrement impor-
tante, phénomène que l’on peut attribuer à deux facteurs déterminants : la
concentration dans la capitale belge de sièges de grandes entreprises et d’insti-
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Appropriation : demande et exigences sociales
qu’utile pour obtenir un emploi. Bruxelles est donc véritablement une ville-
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région multilingue16, où le français continue de jouer le rôle de lingua franca.
Une dernière observation, souvent passée inaperçue : 8 % des Bruxellois inter-
rogés disent ne bien parler, ni le français, ni le néerlandais ni l’anglais, ils
étaient seulement 2,5 % cinq ans plus tôt. Il s’agit là d’une observation capitale
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16. Aux quatre langues précitées s’ajoutent notamment l’allemand, l’espagnol, l’italien, le turc,
parlées selon l’enquête par de 4,5 % (pour le turc) à 8,9 % (l’allemand) de la population
bruxelloise. En 2000, 72 langues étaient dites bien ou très bien maitrisées par les personnes
interrogées ; on en compte 104 aujourd’hui.
17. Il en est de même dans l’enseignement néerlandophone ; ainsi « dans l’enseignement fon-
damental, les enfants qui parlent le néerlandais chez eux ne représentent qu’un tiers du
nombre des élèves. Et […] le groupe des élèves dont la langue maternelle n’est ni le néer-
landais ni le français est dominant ». Wayens B., Janssens R., Vaesen J., L’enseignement
à Bruxelles : une gestion de crise complexe, Brussels Studies, no 70, aout 2013.
18. Ils se substituent alors aux dispositifs dits « de discrimination positive ».
19. Les indices sont basés sur divers critères : revenu par habitant, niveau des diplômes, taux
de chômage, activités professionnelles, confort des logements …
20. Décret du 30 avril 2009 tel que modifié.
21. C’est en 1996 que la première charte de partenariat pour le programme qui s’appelait
alors Langue et Culture d’origine (LCO) est signée avec la Grèce, l’Italie, le Maroc, le
Portugal et la Turquie. En 2012 le programme prend officiellement le nom de programme
d’Ouverture aux Langues et aux Cultures (OLC).
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En Belgique le français, combien ça coûte ?
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tenariat avec actuellement huit pays : la Chine, l’Espagne, la Grèce, l’Italie,
le Maroc, le Portugal, la Roumanie et la Turquie. L’efficacité de ces cours
a été régulièrement mise en doute, les langues « standard » enseignées étant
éloignées des pratiques langagières familiales, souvent orales et dialectales.
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22. Sont aussi concernés les apatrides ou les demandeurs de reconnaissance de cette qualité.
23. La grille-horaire est complétée par des cours de morale/religion, éducation physique, tra-
vaux manuels/technologie, activités de remédiation. À Bruxelles, 2 heures de néerlandais
sont prévues.
24. La Belgique compte 54 centres d’accueil pour demandeurs d’asile. Ce sont des centres
ouverts, la plupart gérés par l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (Feda-
sil) ou par la Croix-Rouge de Belgique.
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Appropriation : demande et exigences sociales
Rappelons qu’il ne s’agit pas de ghettos, ces classes transitoires étant créées
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au sein d’établissements ordinaires. Au contraire, il arrive que dans certains
établissements la création d’une classe-passerelle transforme heureusement une
population jusque-là mono-culturelle. Ainsi telle école bruxelloise qui accueil-
lait quasi uniquement des élèves issus de l’immigration maghrébine est devenue
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25. Les Rapports du Service général de l’inspection sont disponibles sur le site www.
enseignement.be.
26. Le statut souvent précaire des parents (papiers, domicile, revenus…) ne facilite pas leur
implication.
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En Belgique le français, combien ça coûte ?
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primo-arrivants aux activités langagières spécifiques à la vie scolaire est bien
prise en considération par les professeurs exerçant en classe-passerelle. Ce point
est primordial : il faut passer de l’apprentissage d’une langue contextualisée
dans le temps et l’espace (langue de survie quotidienne dans la ville, les com-
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27. Lucchini S., « De la langue à la cohésion sociale ou de la cohésion sociale aux langues ? »,
in Conti, V., De Pietro, J.-F. & Matthey, M. (dir.), Langue et cohésion sociale. Enjeux
politiques et réponses de terrain. Actes du colloque OPALE, Neuchâtel, 19-20 octobre
2010, Neuchâtel, Délégation à la langue française, 2012.
28. Les Nouvelles de l’Observatoire, 4/2004, no 49, Dossier spécial Primo-arrivants.
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Appropriation : demande et exigences sociales
territoire, de longue date ou depuis peu, sont d’abord un droit. Ce droit doit-il
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être aussi un devoir ? Je n’ai pas de position arrêtée à ce sujet. J’observe cepen-
dant le paradoxe suivant : le droit de vote en Belgique est obligatoire. Ceux qui
veulent le maintien de ce caractère obligatoire sont généralement partisans de la
non-imposition de l’apprentissage du français par les migrants souhaitant s’ins-
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29. Voir notamment Manço A. et Alen P., Appropriation du français par les migrants. Rôles des
actions culturelles, Paris, L’Harmattan, IRFAM, 2012, coll. « Compétences interculturelles ».
30. Alen P. et Manço A., Rapports à la langue française et plurilinguisme des populations
issues des migrations en Wallonie et à Bruxelles : renforcement des pratiques d’appro-
priation à travers l’application de résultats des recherches, IRFAM/SLF, décembre 2010.
31. Loi du 4 décembre 2012 modifiant le Code de la nationalité belge afin de rendre l’acqui-
sition de la nationalité belge neutre du point de vue de l’immigration, Moniteur belge du
14 décembre 2012.
32. En 2011, le nombre de naturalisations était de 29 800, en baisse de 14 % par rapport
à 2010. Le Maroc, suivi de l’Italie, de la Turquie, de la République démocratique du
Congo et de la Fédération de Russie sont les principaux pays d’où sont originaires les
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mais considérée comme l’aboutissement du processus d’intégration et non plus
comme une étape y conduisant. C’est ainsi que les demandeurs de naturalisation
doivent dorénavant prouver la connaissance d’une des trois langues nationales,
et ce à un niveau correspondant au niveau A2 du Cadre européen commun de
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référence pour les langues (CECRL). Ce niveau englobe des exigences linguis-
tiques (expression et compréhension) à l’oral comme à l’écrit.
Ceci nous amène à examiner l’état des lieux des formations linguistiques à
destination des adultes. Il y a peu, le Conseil de la langue française et de la
politique linguistique a rendu un avis33 observant notamment « que plusieurs
études ont conclu que, dans la FWB, l’offre d’apprentissage du français pour les
immigrants est inférieure à la demande, et qu’en particulier, le rôle des pouvoirs
publics y est moins systématique qu’en Flandre, la formation linguistique étant
en partie organisée par des associations locales ».
L’offre d’apprentissage du français est en effet insuffisante par rapport aux
besoins. En l’absence de statistiques spécifiques, on peut se référer aux chiffres
des spécialistes de l’alphabétisation. Une étude récente34 met en regard deux
nombres :
– 16 000 personnes en formation d’alphabétisation en Fédération Wallonie
Bruxelles pour 16 000 places disponibles ; d’où des refus d’inscription chaque
année et des délais d’attente de plusieurs mois ;
– 262 500 personnes potentiellement concernées (âgées de 15 ans et plus et
ayant quitté l’école sans avoir le CEB), voire davantage.
Offre insuffisante (et besoins croissants), réponse jugée qualitativement peu
adaptée : si les pouvoirs publics (FWB, Région wallonne, Région bruxelloise,
etc.) soutiennent des programmes de formation des associations locales, « le
nombre de niveaux institutionnels impliqués et les financements morcelés qui
en résultent traduisent une absence de politiques cohérentes et transversales35 ».
Ainsi, à Bruxelles, la Commission communautaire française (Cocof) soutient,
dans le cadre du décret de Cohésion sociale, plus de 230 associations œuvrant
Belges naturalisés. Les ressortissants de ces cinq pays représentent 51 % des naturalisa-
tions de l’année considérée (source OCDE, Perspectives des migrations internationales
2013).
33. Avis sur l’appropriation du français par les immigrants dans la Fédération Wallonie-
Bruxelles (FWB) adopté en séance plénière du 29 septembre 2011.
34. Mainguet C., Qui sont les personnes en difficulté avec l’écrit en Fédération Wallonie-
Bruxelles ? Aperçu à partir des statistiques disponibles, Institut Wallon de l’Évaluation,
de la Prospective et de la Statistique, Journal de l’alpha no 185, octobre 2012.
35. Alen P., Appropriation du français par les migrants, La lettre de l’IRFAM, no 31,
2012, p. 4.
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du français ou de l’accueil des primo-arrivants36.
Cependant le contexte évolue. Depuis 2012, les entités fédérées francophones
se sont concertées pour élaborer une politique cohérente et active dans l’inté-
gration des nouveaux arrivants. Les projets de décrets définissent un parcours
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21 millions d’euros39, auxquels s’ajoutent diverses subventions, notamment euro-
péennes, d’au moins 7 millions d’euros. Le budget cumulé doit donc représenter
28 millions d’euros pour les pouvoirs régionaux et communautaire francophones.
Reste le problème crucial des discriminations. Un parcours d’intégration,
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39. Ventilation entre différents niveaux de pouvoirs : Cocof : 5 M€ ; FWB : 7,7 M€ ; RW :
8,3 M€.
40. Source : statistiques de l’OCDE, janvier 2013. L’OCDE souligne que « le taux de chômage
des personnes nées à l’étranger est plus de deux fois plus élevé que celui de la population
autochtone en Norvège, en Suède, en Belgique, en Autriche, aux Pays-Bas, en Suisse et
au Danemark ».
41. Jacobs D. et Rea A., Gaspillage de talents. Les écarts de performances dans l’enseignement
secondaire entre élèves issus de l’immigration et les autres, d’après l’étude PISA 2009,
Fondation Roi Baudouin, Aout 2011.
42. Mazzocchetti J., « Sentiments d’injustice et théorie du complot. Représentations d’adoles-
cents migrants et issus des migrations africaines (Maroc et Afrique subsaharienne) dans
des quartiers précaires de Bruxelles », in Brussels Studies, no 63, Novembre 2012.
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une institution régionale exprimait ainsi ses objectifs :
« L’apprentissage de la langue du pays d’accueil est indispensable si l’on veut
devenir citoyen à part entière dans notre cité. La maitrise de la langue per-
met en outre d’améliorer l’insertion sociale et l’implication de tous dans notre
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société, elle est un levier évident pour s’insérer dans le monde du travail, faci-
liter l’apprentissage et le suivi scolaire des enfants, s’approprier les clefs pour
mieux investir la ville, atteindre plus facilement une égalité entre hommes et
femmes… Une meilleure connaissance de la langue permet de contribuer à
un mieux-vivre ensemble en encourageant une cohabitation harmonieuse des
différentes communautés locales et en évitant une “ghettoïsation” »43.
On ne saurait mieux dire. Et faire.
43. Décret Cohésion sociale, Appel à projets du quinquennat 2011-2015, Commission com-
munautaire française (Région de Bruxelles-Capitale).
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1. Introduction
La volonté de promouvoir une langue conviviale, accueillante, rencontre certains
obstacles qu’il convient de décrire pour mieux s’en affranchir. Cela concerne
notamment le corpus de la langue, constitué tant des pratiques langagières que
de leurs descriptions. Une appréhension différente du corpus pourra permettre
d’envisager une meilleure appropriabilité de la langue et, par voie de conséquence,
une meilleure appropriation.
Cette contribution visera à discuter du cout, social et économique, de la non-maitrise
du français, à partir d’expériences et résultats de recherches menées dans différentes
universités en FWB et d’articles de presse, qui représentent l’écume du discours
socialisé sur la question et dont la fréquence témoigne, si cela était nécessaire et
quoi que certains en disent, de la permanence de la question dans le champ social.
Seront évoqués l’impact de cette non-maitrise sur les études scientifiques à l’univer-
sité, le cout du redoublement scolaire, l’impact sur les entreprises, l’illettrisme, …
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des facultés scientifiques se plaignent : leurs étudiants ne maitrisent pas leur
langue maternelle. Et sans doute se trouve-t-il nombre d’enseignants qui, lassés,
ont même cessé de corriger les fautes dans une copie de chimie ou de biologie.
On le sait, la transdisciplinarité reste souvent un vœu pieux, le problème n’est
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pas neuf. Mais il reprend toute son ampleur lorsque l’on prend soin de poser
la question, quelque peu abrupte, de savoir si cette non-maitrise, dépassant de
loin les questions de simple orthographe, ne s’avérerait pas l’une des principales
causes d’échec aux examens, toutes branches confondues. » (Uyttebrouck, Van
Raemdonck, 1990 : 65)
Pour vérifier cette hypothèse, une recherche subsidiée par le ministère de l’Édu-
cation Nationale avait été entreprise à l’ULB44. Pendant trois ans, de 1985 à
1988, deux chimistes (B. Wilmet, chargée de cours et promotrice du projet
et A. Said) et deux romanistes (A.-E. Dalcq et D. Van Raemdonck) ont mené
une enquête afin de déterminer si les échecs aux écrits pouvaient résulter, non
seulement de l’ignorance de la matière, mais aussi d’une mauvaise interprétation
lexicale, syntaxique ou logique des énoncés.
Dans un premier temps, les interrogations proposées aux étudiants de 1re année
de baccalauréat de médecine furent soumises à une analyse croisée. Ceci per-
mit, après avoir écarté les problèmes dus à la matière elle-même, de mettre
en évidence toute une série de sources d’erreurs possibles, à la fois lexicales,
syntaxiques et logiques.
Ensuite, des tests furent élaborés, afin de découvrir si les difficultés poten-
tielles relevées provoquaient réellement, dans la pratique, les erreurs prévues.
Deux séries de tests furent proposées à des étudiants de 1re année de bacca-
lauréat ainsi qu’à des élèves des deux dernières années du secondaire. Dans
la première série, des questions portant sur un point de matière identique
étaient formulées tantôt d’une manière jugée facile, tantôt d’une manière
jugée difficile (ex. : forme affirmative vs double négation). Cela permit de
déceler un certain nombre de difficultés dues essentiellement à la formula-
tion. La seconde série visait à déterminer si celles-ci posaient déjà problème
dans un contexte non scientifique. À cette fin, on proposait aux étudiants
la même question, mais placée tantôt dans un contexte scientifique, tantôt
dans un contexte de vie courante. Il s’est avéré que le contexte scientifique
ne constituait qu’un faible facteur d’aggravation et que les erreurs apparais-
saient déjà en contexte courant.
44. Inventaire des sources possibles d’erreurs d’origine lexicale ou syntaxique dans les pro-
blèmes de chimie ; élaboration et évaluation d’exercices de langue destinés à pallier les
faiblesses observées.
60
Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
Les résultats de ces tests ont donc confirmé l’hypothèse de départ : la non-
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maitrise de la langue maternelle en science a un impact direct et réel sur les
échecs aux examens45.
À partir des lacunes observées, des exercices ont alors été créés. Ils ont
été expérimentés deux années consécutives, avec succès, lors des cours de
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45. Pour plus de renseignements sur les premières phases de la recherche, voir : DALCQ A.-E.,
« Questions mal comprises ou mal posées ? Un test de compétence linguistique » in Langue
française, 75, sept. 1987, pp. 36-50.
46. Ces exercices ont été rassemblés dans DALCQ A.-E., VAN RAEMDONCK D.,
WILMET B., Le Français et les Sciences. Méthode de français scientifique avec lexique,
index, exercices et corrigés, Paris – Louvain-la-Neuve, Duculot, 1989.
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Appropriation : demande et exigences sociales
Nul ne songerait à nier ces problèmes. Leur mise en évidence a pour inévitable
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corollaire la question : « À qui la faute ? » D’emblée, évitons un débat stérile.
Rien ne sert de rejeter systématiquement et exclusivement la faute sur le niveau
d’enseignement précédent. Si responsable il y a, il faut sans doute le chercher
dans le contexte social au sens large. Cependant, peut-être faudrait-il également
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La Croix, 02/07/2010 :
« La faute d’orthographe, une faute professionnelle.
De plus en plus de salariés utilisent leur droit à la formation pour se remettre
à niveau en orthographe et contribuer ainsi à donner, dans les lettres et les
courriels, une meilleure image de leur entreprise (…) Eric, par exemple, a lui-
même sollicité son employeur, l’office HLM de Seine-et-Marne, pour bénéficier
de cette formation, “Je suis de temps à autre amené à rédiger des courriers et
des fax, explique ce quadragénaire, J’ai beau me relire pour essayer d’éliminer
les fautes, il en reste toujours. Les collègues me font parfois des remarques,
sur le ton de la plaisanterie. Mais je sais que les destinataires de mes cour-
riers doivent bien se marrer aussi”, dit-il dans un sourire qui cache mal un
sentiment de gêne, si ce n’est de honte. (…)
Nombre d’entreprises, voulant préserver leur image, optent pour le “zéro
tolérance” à l’égard des fautes d’orthographe.
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
(…) [Micael, comptable au sein d’une banque] : “Je ne voudrais pas donner
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de moi-même une mauvaise image, en particulier vis-à-vis de ma hiérarchie”,
confie-t-il.
“Dans mon domaine, l’événementiel, nous travaillons souvent dans l’urgence,
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témoigne Ut, 22 ans. Un jour, j’ai adressé sans le relire un mail à un de nos bons
clients qui m’a répondu avec bienveillance que je devrais soigner mon ortho-
graphe. J’étais très mal à l’aise”, se souvient-elle. (…) “Candidats à l’embauche
dans des entreprises, plusieurs de mes amis ont dû passer des tests d’ortho-
graphe. En cas d’échec, ils n’auraient pas pu signer de contrat”, souligne Ut.
(…) Bruno adressait discrètement ses courriers professionnels à sa femme pour
qu’elle les corrige avant l’envoi. “Mais un jour, j’ai dû produire sur-le-champ, en
présence de mon supérieur, un rapport destiné à l’Autorité de sûreté nucléaire,
qui a renvoyé le document en émettant des interrogations sur les compétences de
l’auteur”, raconte cet inspecteur en soudage, alors employé dans une centrale.
“Cet épisode m a coûté mon CDD, qui n’a pas été renouvelé”, assure-t-il. »
Le Point, 27/05/2010 :
« Orthographe : montrez-moi votre certificat !
Une start-up lyonnaise a mis au point un test d’évaluation du niveau de
connaissance de la langue française. (…)
Trente centres d’examen au test Voltaire ont déjà été créés en France. Niveau
moyen des 300 premiers à s’y être essayés ? 430 sur 1 000. Les plus de 40 ans
ont obtenu en moyenne 480 points. Les moins de 25 ans, 390… (…)
Une orthographe correcte est garante de l’image d’une société vis-à-vis des
fournisseurs et des clients. (…)
“Ce n’est pas à l’entreprise de remplacer un système éducatif en perte de
vitesse”, tempête une DRH. »
63
Appropriation : demande et exigences sociales
une publicité avec une faute d’orthographe, les lecteurs n’achèteront pas votre
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produit.”
Selon Jacques Heremans, porte-parole de Randstad, entreprise spécialisée dans
le travail intérim, les candidats qui font des fautes d’orthographe sont de plus
en plus nombreux, ce qui nuit à leur crédibilité. “On a malheureusement une
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
“Nous savons que certaines candidatures reçues sont écrites par une autre
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personne, observe Angela Leone (Sales Consuit). Nous organisons donc des
tests écrits pour s’assurer de la qualité orthographe du candidat.” »
Devant de tels problèmes, considérés comme importants pour le monde de
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Appropriation : demande et exigences sociales
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prend…”), prélude à un autre rejet plus radical, au profit d’une langue jugée
plus facile d’accès et plus rentable : l’anglais.
Michel Francard, 2011 »
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Larcier dévoile les résultats d’une étude menée par le centre Valibel de l’UCL 47.
Nous reproduisons les résultats frappants dans le tableau ci-dessous :
47. « Les éditions Larcier- De Boeck, en partenariat avec l’association des Professionnels
en Ressources humaines Bruxelles- Brabant (ADP), interpellés par le problème, ont
commandé une étude visant à quantifier la perception de la maîtrise du français dans
les entreprises. Cette étude a été menée par le centre Valibel et Michel Francard,
professeur ordinaire à l’Université catholique de Louvain et fondateur du centre de
recherche Valibel.
! 43 responsables RH ont répondu.
! Les 43 entreprises représentées constituent un échantillon représentatif :
• Elles totalisent environ 27 000 employés
• Elles sont issues de secteurs très variés : pharmaceutique, banque, assurance, grande
distribution, industrie chimique, édition, service public, médias, professionnels du
chiffre, transport, hospitalier... »
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
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particulières (voir ci-dessous) :
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On remarquera aisément que sur les neuf points soulevés, pas moins de cinq
concernent l’accord du participe passé…
Quoi qu’il en soit, on assiste au scénario connu : on a socialisé les pertes ; on va
privatiser les bénéfices. Après avoir mis un terme aux contrats des secrétaires
ou des intermédiaires susceptibles de vérifier le français des discours produits,
après donc avoir licencié les personnes en charge de ces compétences, les
entreprises vont donc former tous leurs employés à des règles absconses… au
bénéfice des entreprises de formation. Car ce qui importe, c’est moins l’image
de l’employé que celle, entachée, de l’entreprise ou du produit.
La poussée d’urticaire du monde de l’entreprise a au moins ceci de bon : mettre
en évidence ce que beaucoup savent déjà, à savoir l’inadéquation entre les besoins
en expression des usagers et leurs connaissances. Cela étant, la raison de l’hiatus
n’est pas forcément à chercher dans l’absence de connaissances et donc l’échec
d’un enseignement de transmission, mais dans la question de savoir si ce que l’on
transmet est bien ce qui doit l’être, et si la forme utilisée est bien la plus idoine.
La remise à l’agenda médiatique via le monde de l’entreprise montre bien
également comment il est possible d’avancer dans un débat qui concerne un
sujet de société. La question du cout social d’une non-maitrise de la langue
intéresse visiblement peu si elle n’a pas de répercussions directes sur l’écono-
mie. Peu importe, semble-t-il, que la privation de compétences en matière de
langue ait un impact sur la vie sociale et sur le respect des droits fondamentaux
des individus. Seul l’impact économique semble être digne d’attirer l’attention.
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Appropriation : demande et exigences sociales
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De nombreux articles de presse traitent de l’échec scolaire et de son cout. Si le
lien entre non-maitrise de la langue et échec scolaire n’est pas direct, on peut
sans trop risquer de se tromper considérer qu’un élève qui ne maitrise pas sa
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langue fera plus facilement face à une situation d’échec (comme nous l’avions
déjà remarqué avec les étudiants en chimie).
Ainsi c’est également du monde de l’entreprise, sensible au cout économique,
que la charge est la plus forte. BECI (Brussels Enterprises Commerce &
Industry), repris par Trends 01/09/2011, dénonce le cout sociétal (enten-
dez évalué essentiellement économiquement) énorme du redoublement en
Communauté française.
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embûche d’un élève de la maternelle au secondaire supérieur coûte en moyenne
à la Communauté française 71.200 EUR. Chaque année perdue représente
entre 2.900 euros en maternel, 6.750 euros en secondaire, 8.200 euros en
supérieur et jusqu’à 13.600 euros dans l’enseignement spécial. Soit au total
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tisse un lien, au moins rhétorique, entre l’échec scolaire et la non-maitrise des
compétences susceptibles d’entrainer la réussite des exercices cités comme
apprentissages de base :
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
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(Le point.fr 15/03/2013) ; il est en tous points conforme aux autres articles
trouvés dans la presse française :
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Le temps alloué à l’enseignement du français a aussi fortement baissé, relève
l’historien Claude Lelièvre : “Les élèves font plus de fautes de grammaire ou
de lexique parce qu’on passe moins de temps à faire de la grammaire explicite
et encore moins à faire des répétitions”.
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
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et sa grammaire
Il a déjà beaucoup été disserté sur la valeur de l’orthographe et la nécessité
de sa réforme régulière. Nous ne souhaitons pas y revenir. D’autant que, à la
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48. Quelles que soient les réserves émises à l’égard de la méthodologie de ce type d’enquêtes,
les résultats ne peuvent nous laisser indifférents et appellent une réaction.
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Appropriation : demande et exigences sociales
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maticale pour la rendre plus adaptée à son objet, la rendre plus pédagogique
que prescriptive, deux termes trop souvent associés. Il est vrai que la tradition
française est très normative. Il importe donc que les linguistes et grammairiens
de langue première revisitent la grammaire pour la rendre plus appropriable
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
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duire un discours, ainsi qu’à en décoder, voire décrypter, un autre, requiert
des compétences qui ne se construisent pas par la seule pratique scolaire du
discours grammatical traditionnel.
En FLE ou FLS, l’enseignement-apprentissage doit aboutir à l’appropriation
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d’un système de langue que l’on ne connait pas à la base. Il agit dès lors plutôt
par procéduralisation, description et application des procédures et mécanismes
du système de langue étrangère. Le risque est grand de voir atomisé le système
en micro-procédures, alors qu’il faut rechercher le maximum de cohérence et
aider à construire un cadre auquel l’apprenant puisse se rattacher. Contrairement
à ce qui se passe en FLM, si le discours grammatical est erroné, l’apprenant
ne peut se reposer sur ses propres connaissances préalables du système pour
s’en sortir. Les dégâts collatéraux sont donc plus importants en cas d’inadé-
quation du discours à la matière. En outre, il apparait assez rapidement que
l’enseignement-apprentissage du FLE est plutôt d’abord tourné vers l’oral, sur-
tout avec la généralisation des méthodes communicatives. L’écrit, quant à lui,
pourrait parfois plutôt être cantonné dans l’enseignement à objectif spécifique,
même s’il a tendance à revenir sur le devant de l’estrade. Cela impose une
prise en considération particulière du discours grammatical, tourné vers l’oral
plus que vers l’écrit. Or la plupart des discours grammaticaux se révèlent la
fidèle retranscription des grammaires de FLM dont la préoccupation essentielle
reste l’écrit.
On ne peut ignorer par ailleurs la question de la représentation du savoir
grammatical que se font, se sont coconstruite, les différents intervenants du
processus d’enseignement. Tant l’enseignant que l’apprenant ont une image
de la grammaire – généralement réduite à sa composante orthographique et
morpho-syntaxique – qui conditionne leur attitude ou leur intérêt à l’égard
de ce savoir (Ah, le sacro-saint accord du participe passé, enseigné à des
générations d’élèves comme l’on enseignait naguère encore « Nos ancêtres, les
Gaulois » !). Or le moins que l’on puisse dire est que cette attitude ne se carac-
térise généralement pas par un amour immodéré pour la chose grammaticale.
En cause sans doute une vision, traditionnelle, normative, de cette matière, un
discours inappropriable sur la langue, des options de formation plutôt littéraires,
pour ne pas dire « artistiques ». De ce fait, les leçons de grammaire française
demeurent pour les enseignants autant que pour leurs élèves un mal nécessaire,
une étude plate et ennuyeuse, en somme la rigoureuse affaire des plus doués
et des trop dociles. Car ces leçons que nous connaissons tous entremêlent
tableaux à mémoriser, terminologie multiple et sibylline, règles nombreuses
et sans explication, exceptions variables, … Les acteurs du processus d’ensei-
gnement ne se sentent pas habilités par l’« Institution Langue » – on ne leur
a jamais fait savoir ou sentir qu’ils l’étaient – à remettre en question le savoir
ou même le discours sur le savoir. Résultat de cette attitude, il faut bien le
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Appropriation : demande et exigences sociales
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dominant – sans parler des réponses meurtrières du style : « C’est comme ça »,
aux questions naïves, mais pertinentes, des élèves. Alors, quand les méthodes
communicatives ont prôné un temps l’éviction du discours grammatical expli-
cite, il était aisé de se ruer sur l’aubaine.
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
6. Français et illettrisme
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Les difficultés en matière de lecture relevées par les enquêtes Pisa renvoient
également à la question de l’illettrisme. Dans l’opuscule précité, Legros et
Moreau rappellent l’enquête menée en 2004-2005 par l’Agence de lutte contre
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7. Français et plurilinguisme
La maitrise de la langue première n’est pas encore assurée que déjà le monde
économique requiert la connaissance et la maitrise d’autres langues. Le
49. http://www.anlci.gouv.fr/fileadmin/Medias/PDF/EDITIONS/ivq_4pages.pdf
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Appropriation : demande et exigences sociales
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critère de sélection à l’embauche :
La Libre Belgique 15/11/2013
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
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orienté métier via Bruxelles formation.
La mise en ligne de Brulingua a été annoncée mercredi par les ministres de
l’Emploi, Céline Fremault, et de la Formation professionnelle, Rachid Madrane.
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Appropriation : demande et exigences sociales
Le MR veut aller plus loin : “Il est nécessaire que l’ensemble des démarches
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soient obligatoires pour permettre à chaque bénéficiaire d’acquérir l’autono-
mie qui émancipe. En Flandre, où le parcours est obligatoire, une première
évaluation a révélé qu’environ 50 % des primo- arrivants qui ont signé un
contrat d’accueil n’avaient pas été assidus et n’étaient dès lors pas parvenus
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8. Conclusion
On entend souvent dire que pour réformer, il faut une demande sociale
ou une appétence institutionnelle. En matière de réforme du corpus de la
langue, on nous oppose souvent que les deux font défaut. C’est une gros-
sière erreur, voire une faute (et pas d’orthographe, celle-là). C’est en tout
cas une lâche démission.
On l’a vu, au cours de notre promenade à travers l’univers médiatique récent,
la demande sociale existe. Et s’il veut ne pas la voir (après tout, on ne veut
bien voir que ce que l’on veut bien voir, et qu’on appellera… demande sociale),
l’inappétent institutionnel ne restera pas aveugle à la demande économique. Et
si l’appétence devait ne guère venir à nos politiques, nous nous retrouverions
en situation de non-assistance à personnes en danger d’exclusion sociale, ce
qui ne va pas sans un cout.
La question de l’acquisition et de l’apprentissage des langues est assurément
polyfactorielle. L’appropriation d’une langue dépend d’un certain nombre de
conditions et de circonstances. L’une d’entre elles est l’appropriabilité : toutes
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Nos ancêtres, les p(articipes) p(assés) : déférence et lustration de la langue française
les représentations, tous les outils descriptifs, tous les discours, sont-ils les plus
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affutés pour permettre une appropriation maximale. Au vu de ce qui précède,
il est permis d’en douter. Il nous faudra agir sur tous les plans, tant du statut
de la langue que du corpus d’icelle. C’est dès lors à l’articulation de toutes les
actions qu’il convient de s’atteler. C’est ce à quoi nous vous invitons,… pour
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Références
Chartrand S.-G., « La difficile appropriation de la langue française par les
francophones : un point de vue didactique », in ce volume, 2014.
Legros, G. et Moreau, M.-L., Orthographe : qui a peur de la réforme ?, Bruxelles,
Fédération Wallonie-Bruxelles, Service de la langue française, 2012.
81
Appropriation : demande et exigences sociales
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vision plurilingue européenne : normes, discours, apprentissages, Thèse
de doctorat, Université de Liège, 2013.
Seymour P. H. K., « Early reading development in European Orthographies », in
Snowling M. J. et Hulme C. J. (dir.), The science of reading : a handbook,
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Mohamed MILED
1. Introduction
Il est de plus en plus opportun d’approcher l’observation du français dans la
logique de ses contacts évolutifs plus ou moins problématiques avec la ou
les autres langues en présence ; il nous semble que la convivialité peut être
cernée sous cet angle de la cohabitation linguistique. Il s’agit d’une évolution
dictée par la mondialisation, par la tendance à un bi ou plurilinguisme, par le
changement de statut affectant l’autre langue et par l’introduction des langues
nationales à l’école, autant de facteurs qui incitent à situer le français dans le
paysage linguistique environnant et corrélativement à articuler sa didactique à
celle de la langue première, en particulier.
Ces contacts ne peuvent être réfléchis et abordés ni en termes de domination,
ni d’exclusion, ni de hiérarchisation des langues, mais en termes de partena-
riat, comme l’ont préconisé différents organismes internationaux (l’UNESCO,
l’OIF), partenariat déjà affirmé lors des États généraux du français de Libreville
en 2003 : « La coexistence entre le français et les langues nationales africaines,
née de l’Histoire, ne doit pas se vivre en termes de conflit, ou de “guerres des
langues”, mais bien en termes de solidarité et de complémentarité ».
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Didactique et appropriation
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alable à une contextualisation de l’enseignement du et en français, si l’approche
est suffisamment déployée au niveau curriculaire et correctement assimilée
par les enseignants.
Notre réflexion sera illustrée par des exemples empruntés au Maghreb arabe
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L’évolution des contacts du français avec les langues en présence
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Au Maghreb arabe, et à la différence de l’Afrique subsaharienne, cette évolution
est relativement plus rapide en raison des spécificités du statut de l’arabe qui
est la langue officielle, la langue première de la scolarisation et le vecteur des
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Didactique et appropriation
4. L’éclairage psycholinguistique
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Un autre éclairage complémentaire, mais d’ordre psycholinguistique, concerne
l’analyse des données les plus significatives relatives aux représentations des
langues surtout chez les enseignants et les élèves : l’utilité du français, son
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L’évolution des contacts du français avec les langues en présence
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prennent toutes en compte un processus commun : le transfert d’une langue
première à une langue seconde ou étrangère.
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Didactique et appropriation
7. Le transfert linguistique
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Dans la lignée de cette approche psycholinguistique, des recherches et des
expérimentations de terrain ont permis d’approcher le phénomène du transfert
linguistique lors du passage de la langue première à la langue seconde, et de
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8. L’exemple de la lecture-écriture
Par exemple, pour développer la compétence de lecture-écriture en français
langue seconde, il est opportun de tenir compte des convergences (aspects
communs en L1 et en français et déjà acquis au moment de l’accès au français)
et des spécificités propres à chaque idiome.
En abordant l’apprentissage de la lecture en FLS, l’élève a déjà pratiqué la lec-
ture et l’écriture en L1. Il ne va pas apprendre à lire de nouveau. J. Duverger
(2004) estime qu’on n’apprend à lire et écrire qu’une seule fois, même si on
apprend d’autres langues ultérieurement ; Rosekrans (2010) va dans le même
sens, en affirmant que « les habiletés développées durant l’apprentissage de
la lecture et de l’écriture, telles que le décodage et les connaissances phono-
logiques, peuvent être transférées à une seconde langue ».
Néanmoins, l’apprenant découvre :
– un autre système phonologique et graphique : la relation son/graphie en arabe
s’organise selon un système d’écriture différent ;
– une nouvelle relation phonie/graphie ;
– des connotations et des présupposés culturels différents.
Aussi, un élève ayant une variété dialectale et l’arabe standard de l’école, et
avant d’accéder au français, aura-t-il appris à manipuler :
– le principe alphabétique (association graphème/phonème) ;
– des écrits porteurs de sens ;
– l’écriture de haut en bas ;
– des conventions élémentaires d’un texte (un poème, une affiche, …) ;
– les mécanismes de base de la compréhension ;
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L’évolution des contacts du français avec les langues en présence
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le métalangage correspondant.
Il convient aussi de mentionner un autre niveau de convergence, celui des stra-
tégies de lecture, susceptibles de développer des capacités méthodologiques et
procédurales d’accès à l’écrit. La stratégie est une activité mentale (un ensemble
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Didactique et appropriation
il est important de réfléchir aux modalités les plus appropriées pour favoriser
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cette transition (par la traduction du lexique scientifique, la comparaison des
structures linguistiques fonctionnelles, par exemple).
Au Maghreb, c’est l’arabe qui est la langue d’enseignement au primaire, au
collège (en Tunisie) et au lycée (en Algérie et au Maroc), alors qu’au lycée
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11. Conclusion
Par rapport aux valeurs visées par un bilinguisme scolaire équilibré, il
convient de préciser que ce type de didactique est susceptible de répondre à
une motivation éthique, surtout dans des situations évoquées plus haut, où la
langue seconde, en l’occurrence le français, bute sur des réticences identitaires
plus ou moins injustifiées vis-à-vis de son apprentissage. Aussi, en préconi-
sant ce type d’approche, ne contribue-t-on pas à faire passer l’apprenant et
l’enseignant d’un bilinguisme conflictuel et tendu à un bilinguisme, complé-
mentaire, fonctionnel, mais à caractère humaniste. Favoriser une convergence
didactique aiderait ainsi à créer des liens dépassionnés entre les langues, en
particulier dans des contextes de contacts problématiques entre une langue de
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les enseignants de français et d’arabe ou d’autres langues nationales, suscitée
par la logique de cette approche, placerait les enseignants et les élèves dans
un rapport non conflictuel entre ces langues.
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Références
Blanchet, Ph., Rispail, M., « Principes transversaux pour une sociodidactique
dite “de terrain” », in Blanchet Ph.et Chardenet P. (dir.), Guide pour la
recherche en didactique des langues et des cultures. Approches contextua-
lisées, Paris, Éditions des archives contemporaines, AUF, 2011.
Duveger, J., « Lire, écrire, apprendre en deux langues », in Les Actes de Lec-
ture, no 85, mars 2004.
Maurer B., De la pédagogie convergente à la didactique intégrée langues
africaines/langue française, Paris, L’Harmattan-OIF, 2007.
Miled M., « La didactique intégrée de l’arabe et du français », in Le Français
dans le monde ; Recherches et applications, janvier 2005.
Miled, M., « Identité linguistique et didactique convergente dans un contexte
bilingue : l’exemple du français et de l’arabe », in Martinez P., Moore D. et
Spaëth V., in Plurilinguismes et enseignement, Paris, Riveneuve Éditions,
2008.
Moore, D., Plurilinguisme et école, Paris, Hatier, 2006.
Rosekrans, K., « Voies nouvelles vers l’écrit : former des enseignants pour un
programme de lecture au Ghana », in Professionnaliser les enseignants de
classes multilingues en Afrique, Paris, L’Harmattan, 2010.
Conseil de l’Europe, Guide pour le développement et la mise en œuvre de
curriculums pour une éducation plurilingue et interculturelle, Strasbourg,
Division des politiques linguistiques, 2010.
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Didactique et appropriation
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première de l’enseignement du français depuis 150 ans. Il est bien vrai qu’en
classe, l’orthographe règne encore en maitre ! (Chartrand et Lord, 2013)
Mais loin d’atteindre ses objectifs, l’enseignement de l’orthographe est chro-
nophage et nuit à l’enseignement de l’écrit (recherche ÉLEF, voir textes sur le
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La difficile appropriation de la langue française par les francophones
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Deux objectifs interreliés : soutenir le développement des compétences langa-
gières écrites et doter les élèves d’une représentation opératoire de la langue
comme système (Chartrand, 2013a). Pour cela, il convient d’articuler l’ensei-
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fois précisément délimités, diffèrent et se complexifient par approfondissements,
visant une maitrise assurée à un moment déterminé (Chartrand, 2009).
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4. Conclusion : agir
Tout ceci ne se produira pas sans d’énergiques interventions dans les politiques
pédagogiques et linguistiques, car le problème est d’abord politique. On pointera
au moins quatre pistes d’action :
Références
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Chartrand, S.-G., « L’apport de la didactique du français langue première au
développement des capacités d’écriture des élèves et des étudiants », in
Lafont-Terranova J. et Colin D. (éd.), Didactique de l’écrit. La construction
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Didactique et appropriation
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de la langue française (CSLF), 2003.
Portail enseignement du français : http://www.enseignementdufrancais.fse.
ulaval.ca
Yaguello, Marina, Catalogue des idées reçues sur la langue, Paris, Seuil, 1988.
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Dominic ANCTIL
1. Introduction
Un colloque traitant de l’appropriation de la langue ne peut faire l’économie
d’une réflexion sur un élément central de la maitrise linguistique : le vocabu-
laire. La maitrise du code écrit, notamment de l’orthographe grammaticale et
lexicale, constitue bien sûr une immense préoccupation des milieux scolaires,
et il y a là un travail énorme à accomplir pour aider les apprenants du fran-
çais, natifs et autres, à l’atteindre. Mais le lexique, grand oublié des classes de
français, joue aussi un rôle crucial dans la connaissance linguistique, puisque
« la langue est un système sémiotique complexe constitué de signes qui sont,
dans leur immense majorité, de nature lexicale » (Polguère, 2008). En effet, un
manque de vocabulaire, lacune qui transparait aussi bien à l’oral qu’à l’écrit, et
dans toutes les situations de la vie courante, a tôt fait de devenir ce handicap
social auquel on faisait référence dans l’appel de communications du colloque
de l’OPALE 2013. Un tel handicap peut avoir des incidences énormes sur la
réussite scolaire autant que sociale et touche en priorité certaines populations,
notamment les enfants issus de milieux défavorisés et les immigrants.
Notre réflexion se centrera ici sur l’enseignement du vocabulaire en milieu
scolaire. Nous dresserons un portrait de l’enseignement du lexique dans les
classes du primaire. Les principaux résultats de notre travail de thèse sur
l’erreur lexicale en production écrite au secondaire seront ensuite présentés
pour offrir un portrait des difficultés lexicales des élèves et mieux cibler leurs
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Didactique et appropriation
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ensuite qu’une meilleure maitrise lexicale peut aussi conduire à une meilleure
maitrise du code avant de proposer quelques pistes pour un enseignement
lexical plus efficace.
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Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
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affirment que les enseignants travaillent essentiellement la grammaire, la
lecture et l’écriture, mais qu’ils délaissent le lexique. Il ressort aussi d’une
recherche menée par Dreyfus (2004) que les enseignants du primaire en France
disent accorder peu de temps à l’enseignement du lexique. Pour le Québec, nous
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50. Voir par exemple la Progression des apprentissages, français langue d’enseignement du
ministère de l’Éducation (MELS, 2009).
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Didactique et appropriation
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dans une perspective orthographique, et en s’appuyant largement sur l’utilisation
de listes de mots décontextualisées. En ce qui concerne un volet « explicite »
de l’enseignement du lexique visant la compréhension des notions de base de
l’étude du lexique, comme le suggèrent par exemple Picoche (1992), Tremblay
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51. On parle plus volontiers aujourd’hui d’enseignement du lexique, pour rendre compte du
fait que cet enseignement va au-delà de la simple acquisition de mots nouveaux, mais
s’intéresse aussi à une meilleure compréhension du système lexical de la langue et de
son fonctionnement. Si nous utilisons ici « enseignement du vocabulaire », c’est que ce
que nous observons dans les classes reste résolument une approche quantitative visant
l’accroissement du stock lexical des élèves.
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Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
ont par ailleurs souvent été développées dans une perspective orthographique
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et ne correspondent bien sûr pas à l’acquisition naturelle du vocabulaire d’une
langue. Grossmann (2011) mentionne d’ailleurs à cet effet que la didactique
du lexique gagnerait à travailler à la construction de répertoires – un peu dans
l’esprit du « français fondamental » de Gougenheim (1964) – qui pourraient
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Didactique et appropriation
y est par contre toujours faite de façon qualitative et sur la base de critères
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plutôt subjectifs comme la richesse, la variété et « le caractère évocateur » du
vocabulaire utilisé. Travailler sur l’erreur lexicale nous évitait non seulement la
difficile tâche d’opérationnalisation de ces critères, mais nous permettait aussi
de jeter un regard un peu moins holistique sur la dimension lexicale des textes
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des élèves en focalisant notre attention sur un aspect : les emplois lexicaux
problématiques. Soulignons par ailleurs que le concept même d’erreur lexicale
est rarement défini dans les travaux s’y intéressant (Agustín Llach, 2005), et que
les quelques définitions proposées reposent sur des critères très variés, souvent
propres à l’apprentissage d’une L2 ; la clarification de ce concept constituait donc
un apport théorique intéressant. Mentionnons finalement que peu de travaux se
sont intéressés à l’erreur lexicale dans un contexte de L1 et que de dresser un
portrait des difficultés lexicales des élèves visait aussi à fournir certaines pistes
à la didactique du lexique pour penser un enseignement lexical plus efficace.
53. Erreur linguistique est ici entendue au sens de « forme linguistique ou combinaison de
formes linguistiques qui diffère de ce qu’un locuteur expert aurait selon toute probabilité
produit dans un même contexte de production » (Anctil, 2011:70). Ainsi, notre corpus
d’erreurs contient à la fois des usages qui seraient unanimement considérés comme erronés
(*une avion) ainsi que des maladresses lexicales, moins facilement condamnables, mais
clairement marquées par rapport à l’usage (La publicité ?porte une mauvaise influence sur
la société).
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Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
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L’analyse de notre corpus a révélé mille-cent-quarante-quatre (1 144) pro-
blèmes lexicaux, que nous avons classés à l’aide d’une typologie descriptive
développée à partir de la définition d’erreur lexicale proposée plus haut.
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Cette analyse nous a permis d’observer que les erreurs lexicales les plus
fréquentes sont les problèmes sémantiques, dans une proportion de 30 % ;
la plupart de ces erreurs correspondent à des cas où le mot utilisé présente
un lien de sens avec celui visé (ex. « Il voulut y rentrer, mais il n’y avait pas
*d’issus [accès/ouverture] pour rentrer à l’intérieur. », « Tout d’un coup, les
fous fût *stabilisé [immobilisé] et Bobby traversa la forêt sans danger. »).54
Les problèmes d’ordre formel, particulièrement les barbarismes (ex. *désam-
buler pour déambuler, *incomprenable pour incompréhensible), constituent
la deuxième famille d’erreurs lexicales observée (21 %)55.
Si la moitié des erreurs relevées concernent la forme et le sens des mots,
l’autre moitié des erreurs (49 %) sont en lien avec des propriétés autres, pro-
priétés rarement travaillées en classe. En effet, une erreur sur cinq (21 %) est
en lien avec une propriété morphosyntaxique du mot erroné, principalement
le genre nominal (ex. *une immeuble très luxueuse), l’invariabilité (ex. des
scènes *d’actions) et le régime (ex. « Le jour vint succéder *la nuit. », « Elle
désirait […] *d’aller à Londres. »). Dix-sept pour cent (17 %) des problèmes
découlent de l’inadéquation pragmatique du mot utilisé et du contexte dans
lequel il apparait, essentiellement par l’emploi d’un vocabulaire familier
(ex. « après quelques heures de *poireautage [attente] ; d’autres femmes du
voisinage sont venue *zyeuter [voir] ma collection. »). Un peu plus d’une
erreur sur dix (11 %) a trait à la cooccurrence et consiste la plupart du temps
en une collocation douteuse (ex. « Les publicités *portent [ont] une très
mauvaise influence pour toutes les sociétés. », « … pour voir quel emploi
je pourrais *faire [exercer ; obtenir] »).
Lorsqu’on s’intéresse aux sources possibles des erreurs lexicales observées, l’in-
tégration de l’erreur à l’usage est souvent évoquée ; les élèves commettent donc
très souvent des erreurs lexicales parce qu’ils reproduisent ce qu’ils entendent
dans la langue de tous les jours et font mal la distinction entre la langue
familière et le français standard. La proximité formelle et sémantique entre le
mot erroné et celui visé permettent aussi d’expliquer bon nombre d’erreurs et
agissent très souvent en synergie (ex. « Cette pub vise à nous *insister [inciter]
54. Le mot erroné est précédé d’un astérisque et les corrections proposées figurent entre
crochets. Les erreurs d’orthographe ont été laissées telles qu’elles apparaissaient dans les
copies des élèves.
55. À noter que nous avons exclu du corpus les erreurs purement orthographiques, générale-
ment traitées à part par les enseignants, pour ne conserver que les barbarismes ayant un
impact sur la prononciation du mot.
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Didactique et appropriation
à acheter le produit. ») ; c’est aussi souvent sur la base d’une proximité de sens
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ou de forme que les élèves transposent le régime d’un verbe à un autre (ex.
« Il *renonçait [refusait] de garder les bras croisés. »), ou lui accolent un col-
locatif erroné. Évidemment, un certain nombre d’erreurs peuvent simplement
être expliquées par une lacune dans le vocabulaire de l’élève ou une maitrise
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Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
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français.
Lorsqu’on leur demande d’expliquer ce qu’est une erreur de vocabulaire, les
enseignants font spontanément référence à deux types de problèmes : les erreurs
sémantiques et la répétition. Dans des proportions beaucoup plus faibles, ils
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Didactique et appropriation
parce qu’il se concentre sur les erreurs d’orthographe et de syntaxe qui, elles,
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doivent être comptabilisées… et sont plus faciles à classer dans les grilles
de correction ! Il est tout de même intéressant de constater que les erreurs
lexicales relevées dans les plus faibles proportions sont les erreurs de sens
(33,7 % d’erreurs relevées ou pénalisées), de collocation (38,2 %) et celles liées
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à l’emploi de termes familiers (32 %) ; or, ces classes d’erreurs sont pourtant
très fréquentes dans le corpus et les deux premières sont les plus susceptibles
d’entraver la compréhension du lecteur. Devant une absence d’indications en
lien avec ces erreurs, les élèves ne disposent d’aucune piste pour améliorer la
dimension lexicale de leurs écrits, et plus largement leur vocabulaire.
Les classes d’erreurs lexicales sur lesquelles semblent se concentrer les ensei-
gnants sont les erreurs formelles (76,2 % d’erreurs relevées ou pénalisées) et celles
liées aux propriétés morphosyntaxiques des mots (57,3 % d’erreurs relevées ou
pénalisées). Cela s’explique sans doute par une plus grande aisance à repérer et
à justifier ces types d’erreurs, ainsi qu’à les classer. Les erreurs formelles sont
en effet toujours classées dans une colonne « orthographe d’usage » permettant
de les comptabiliser dans les grilles de correction utilisées par les enseignants.
Les erreurs liées aux propriétés morphologiques des mots (principalement genre
nominal et invariabilité) ainsi qu’au régime sont quant à elles comptabilisées par
les enseignants parmi les erreurs de grammaire plus de neuf fois sur dix. On
peut aisément comprendre que les enseignants classent ainsi ces types d’erreurs,
puisqu’elles se manifestent dans les accords et la syntaxe ; pourtant, l’explication
de telles erreurs demande la consultation d’un dictionnaire plutôt que d’une gram-
maire, et elles découlent bien de méconnaissances lexicales. Un tel classement des
erreurs lexicales a un effet pernicieux : celui d’accorder un poids différent dans
la correction aux divers types d’erreurs lexicales. Des erreurs sémantiques ayant
potentiellement un effet important sur la compréhension du texte font l’objet d’un
jugement qualitatif n’ayant que peu d’impact sur le résultat global de la rédaction,
alors que des erreurs peut-être plus triviales, comme l’utilisation d’une mauvaise
préposition auprès d’un verbe, se voient comptabilisées parmi les erreurs syn-
taxiques et ont un impact plus grand sur la note de l’élève. Ce type de classement
d’erreurs a aussi l’effet néfaste d’entretenir le flou entre erreur de vocabulaire et
erreur de grammaire. Comment un élève ayant écrit « Le jour succéda *la nuit »
doit-il comprendre, devant le code « S » (pour « syntaxe ») que pour corriger sa
phrase, il doit se rendre dans le dictionnaire au verbe « succéder », et non pas
faire appel à une règle de grammaire du français ?
Par ailleurs, nous avons aussi constaté que lorsqu’elles sont relevées par les
enseignants, les erreurs lexicales font l’objet d’annotations vagues qui aident
bien peu les élèves : petite vague sous le mot problématique ou point d’inter-
rogation au-dessus, « V » dans la marge ou terme encerclé, voilà autant de
symboles utilisés pour pointer des problèmes lexicaux, mais qui ne fournissent
à l’élève aucune piste pour améliorer son texte.
110
Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
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du vocabulaire au secondaire, fait l’objet d’une correction qui traite de façon
très inégale les problèmes de nature lexicale et fournit peu d’outils pour aider
l’élève à améliorer son vocabulaire. Ceci est d’autant plus vrai que de l’aveu
même des enseignants, rares sont les occasions pour les élèves de retravailler
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un texte corrigé. Ainsi, les maladresses lexicales des élèves demeurent stériles,
alors qu’elles pourraient constituer un tremplin vers une meilleure maitrise
lexicale.
111
Didactique et appropriation
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que la consultation du dictionnaire demeure très fastidieuse pour beaucoup
d’élèves, qui y ont recours principalement pour vérifier l’orthographe de mots
pendant une tâche d’écriture ou, de façon plus marginale, pour chercher des
synonymes afin de varier leur vocabulaire. Cet emploi limité d’un outil pourtant
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Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
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sans doute les élèves à mener des analyses syntaxiques avec plus d’assurance,
et à terme à réaliser plus facilement les accords ainsi qu’à mieux ponctuer.
Leurs intuitions sémantiques seraient ainsi au service du travail grammatical.
Pour ce qui est des élèves dont le français n’est pas la L1, et qui ne peuvent
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compter sur leurs connaissances implicites des structures verbales pour l’ana-
lyse syntaxique, un travail sur le dictionnaire et la façon dont y sont encodées
les informations sur le régime verbal s’avèrerait un atout précieux56.
6. Conclusion
Il ne fait aucun doute que le vocabulaire joue un rôle crucial dans la mai-
trise de la langue, et il est du ressort de l’école de contribuer à développer la
compétence lexicale des élèves et de leur fournir un vocabulaire de base. Or,
les différents travaux consultés semblent tous pointer vers un même constat :
« l’enseignement du vocabulaire dans les classes pose de nombreux problèmes
et les enseignants ne sont guère formés dans le domaine de la lexicologie »
(Lehmann, 2011 : 1). Comment alors redresser la situation ?
Une partie de la solution réside sans doute dans la formation des maitres,
souvent très minimaliste en matière de lexique. En ayant des savoirs lexico-
graphiques plus solides, les enseignants seront plus à même de comprendre
les interactions lexique-syntaxe et de mesurer l’importance des connaissances
lexicales dans la maitrise du code (Polguère, 2008). Bénéficier d’une formation
plus théorique sur le lexique leur fera aussi prendre conscience que la compé-
tence lexicale ne se limite pas au nombre de mots connus, mais implique aussi
une compréhension de l’organisation du système lexical de la langue et des
stratégies qui facilitent l’acquisition de mots nouveaux. Une formation complète
devrait aussi outiller les enseignants sur le volet didactique de l’enseignement
du lexique. Comment se développe le vocabulaire chez l’enfant ? Quels sont
les grands principes qui sous-tendent un enseignement lexical efficace ? Quels
types d’activités de vocabulaire mener en classe ? Comment favoriser l’acquisi-
tion accidentelle du vocabulaire et la rétention des mots nouveaux ? Comment
aider les élèves à tirer profit des dictionnaires ?
Une autre partie de la solution incombe aux didacticiens du lexique, qui doivent
selon nous proposer une progression des contenus à aborder en priorité pour
un enseignement lexical efficace. Le travail de création d’une ontologie des
savoirs lexicologiques entrepris par O. Tremblay (2009) constitue un premier
56. Il faut cependant souligner que le traitement du régime verbal dans les dictionnaires fran-
çais est très inégal et présente certaines incohérences (pour une discussion, voir Anctil,
2011). La production de dictionnaires pédagogiques plus explicites et systématiques en
cette matière constitue un travail important pour les lexicographes.
113
Didactique et appropriation
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sens. Cette réflexion devrait aussi s’appuyer sur des recherches en acquisition
du vocabulaire et tirer parti de recherches descriptives comme notre travail
de thèse ou la recherche de Lefrançois et de Villers (2013), qui donnent des
indices sur les lacunes lexicales des élèves. Une telle progression orienterait
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Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
Références
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Agustín Llach, M. P., « A critical review of the terminology and taxonomies
used in the literature on lexical errors », in Miscelánea : a Journal of
English and American studies, vol. 31, 2005, pp. 11-24.
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Didactique et appropriation
Duncan, G. J., Dowsett, C. J., Claessens, A., Magnuson, K., Huston, A. C.,
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Klebanov, P., Pagani, L. S., Feinstein, L., Engel, M., Brooks-Gunn, J.,
Sexton, H., Duckworth, K. et Japel, C., « School readiness and later achie-
vement », in Developmental Psychology, vol. 43, no 6, 2007, pp. 1428-1446.
Gougenheim, G., L’élaboration du français fondamental (1er degré) : étude sur
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Un meilleur enseignement lexical pour une plus grande appropriation de la langue
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présentée au Congrès mondial de linguistique française – CMLF’08, Paris,
2008.
Polguère, A. et Sikora, D., « Modèle lexicographique de croissance du vocabu-
laire fondé sur un processus aléatoire, mais systématique », in C. Garcia-
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EXPRESSION RADIOPHONIQUE
ET APPRENTISSAGE LUDIQUE DE LA LANGUE :
RADIO CACTUS, LE POUVOIR DU MICRO
AU SERVICE DES FEMMES QUI APPRENNENT
LE FRANÇAIS (CACTUS & GSARA ASBL
– ANDERLECHT – BRUXELLES)
Guillaume ABGRALL
58. Selon l’article 1er du décret du 17 juillet 2003, une organisation d’éducation permanente a
pour objectif de favoriser et de développer, principalement chez les adultes :
– une prise de conscience et une connaissance critique des réalités de la société ;
– des capacités d’analyse, de choix, d’action et d’évaluation ;
– des attitudes de responsabilité et de participation active à la vie sociale, économique,
culturelle et politique.
Ainsi, les associations d’éducation permanente des adultes travaillent à développer les
capacités de citoyenneté active et la pratique de la vie associative. Nombre d’entre elles
consacrent une attention particulière aux publics socioculturellement défavorisés. Actuel-
lement, quelque 250 asbl sont reconnues dans le cadre du décret de 2003, et occupent
environ 2 300 travailleurs équivalent temps plein.
121
Expérience d’appropriation
Dans cet article, nous décrivons le contexte particulier qui a vu naitre et croitre
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Radio Cactus et nous exposons les différentes situations de communication
créées par l’instrument radio.
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Expression radiophonique et apprentissage ludique de la langue
qui mêlent radio et éducation populaire. Nous avons participé en leur envoyant
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un montage audio autour de la question de la difficulté d’apprendre la langue
française pour les femmes qui migrent. Quelle langue on parle, bénéficiant
du soutien de Paroles Partagées, est édité sous la forme d’un CD à destination
des lieux d’apprentissage du français à Bruxelles. Ce travail donne également
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123
Expérience d’appropriation
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parle est celle qui a le micro. L’enregistrement nécessitant le silence, le micro
déclenche aussi une situation favorable à l’écoute.
L’entrevue entre soi : nous préparons ensemble une liste de questions sur le
thème retenu. Ensuite, par couple, les femmes s’interrogent l’une l’autre.
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Le débat : nous créons deux équipes qui s’opposent sur le thème retenu. Elles
développent des arguments antagonistes. Une fois le micro allumé, l’enjeu est que
chaque groupe décide rapidement qui va répondre avec l’argument le plus adéquat.
Les entrainements : avant de passer à d’autres modes de parole, ouverts sur
l’extérieur (rencontres, micros-trottoirs, radio en direct), l’Atelier Radio est le
lieu pour s’essayer, se réécouter, valider ensemble si nous sommes prêts.
Le travail de reformulation : après chaque tentative, les femmes entre elles,
aidées par les animateurs, peuvent conseiller d’autres formulations, manières de
dire, suggérer du vocabulaire, signifier tout simplement qu’elles n’ont pas compris.
La fiction : parfois nous décidons de nous écarter du réel pour mieux en
parler. Pour éviter d’être toujours dans le témoignage. Pour rire aussi de choses
parfois délicates. La distance de la fiction permet parfois de se rapprocher de
l’expression la plus juste sur le sujet. Elle fait sauter des verrous de timidité.
Elle permet aussi de s’amuser avec la langue, tout en restant dans quelque
chose qui fait sens car elle s’ajoute à l’ensemble du processus de création sur
le thème établi ensemble et visant à une diffusion.
Les retours après réécoute : lors de la séance même, nous réécoutons souvent
ce qui vient d’être enregistré. Nous écoutons également chaque semaine la parole
montée, avec de la musique, avec des choix de réalisation. Et nous en discutons.
Quel est l’effet de cette musique ajoutée ? Comprenons-nous le message ou non ?
Sommes-nous d’accord avec les choix réalisés ?
b) Au-delà d’être un instrument créateur de parole, la radio est également un
prétexte à la rencontre et à l’ouverture sur l’extérieur.
Le vox pop ou micro-trottoir : les femmes nous confient parfois avoir peu
d’occasions de parler en français hors des cours de langues, car leur famille,
amis s’expriment dans une autre langue. Parler avec des inconnues serait une
bonne injonction. Cependant, qui, hors du prétexte de demander son chemin
ou l’heure, arrive, avec une maitrise trébuchante de la langue, à arrêter des
gens dans la rue et à leur adresser la parole ? La radio permet de parler à
des inconnus. Nous partons dans la rue avec un groupe de quatre femmes. Elles
arrêtent les passants, leur demandent l’autorisation de les interroger sur notre
thème de travail et lancent l’entrevue. Moments étonnants où elles prennent une
autre place dans l’espace public, dépassant d’invisibles barrières, celles d’être
femme, celles d’apprendre à s’exprimer dans une autre langue.
124
Expression radiophonique et apprentissage ludique de la langue
La rencontre : nous invitons dans l’Atelier des personnes qui peuvent nous
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éclairer sur notre thème de travail. Nous avons reçu par exemple quatre
jeunes avec qui nous avons pu nous entretenir de l’usage d’Internet et de
l’argent de poche. Les micros circulent. Des questions sont préparées. D’autres
apparaissent spontanément. Lorsque malheureusement la rencontre, pour des
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questions d’agenda, n’est pas possible, le son voyage. Ainsi les femmes ont pu
poser des questions au Secrétaire d’État à l’Égalité des chances par enregis-
trements interposés. Dans son bureau, il a écouté les questions des femmes
préenregistrées. À la fin de chaque question, nous avons enregistré avec lui
sa réponse afin que les femmes puissent l’écouter. Dialogue radiophonique.
La parole en direct : c’est le grand jour. L’aboutissement. Le moment où, sur
les ondes, nous allons laisser entendre tout ce que nous avons préparé. Tout
d’abord limitée à la présentation des sons et musique, cette parole prend de
plus en plus de place. Et de préparation. À chaque séance de l’atelier, nous
parlons entre nous sans micro. Puis, un duo ou un trio doit tenter de résumer
notre conversation afin de la présenter comme si nous étions en direct. En vue
d’une parole qui en direct prendra de plus en plus de place. L’objectif est d’être
réactif et de pouvoir un jour débattre en direct à la radio.
Ainsi, l’Atelier Radio Cactus favorise l’assimilation de la langue française. Le
groupe travaille en français à l’élaboration d’un message lui-même en français.
À cela s’ajoutent les multiples situations de communication et rencontres pro-
voquées par la démarche de l’Atelier
3. Conclusion
La radio dispose de points forts indéniables : l’écoute qu’elle déclenche, l’accent
mis sur l’oralité, l’adresse, car la radio, c’est avant tout s’adresser à quelqu’un
qui n’est pas là.
Pour autant, la mise en place de tels ateliers nécessite de développer quelques
capacités techniques qui ne s’acquièrent pas sans un minimum d’intérêt et
de passion. Et c’est cette passion qui est importante et source de plaisir pour
l’enseignant comme pour les apprenants.
Notre conclusion sera donc que, peu importe le média ou la pratique (ce pour-
rait être du théâtre, de la littérature, de la musique, du sport, du cinéma), la
mise en jeu de ses passions et sa propre mise en jeu peuvent être les moteurs
d’une pédagogie ludique et conviviale au service d’une meilleure maitrise de
la langue par les apprenants.
Si vous voulez apprendre quelque chose à quelqu’un, faites-le non seulement
avec passion, mais peut-être également au travers de votre passion.
125
Expérience d’appropriation
Pour conclure, nous citerons Chiara Todaro59, qui a théorisé cette pratique :
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« Ce n’est pas par hasard si j’ai choisi de me consacrer à la création d’Ate-
liers Radio. Ma passion pour la radio, et mon être, en un “certain sens”,
influencent complètement ma pratique didactique. Et c’est seulement à partir
de cette mise en jeu totale que l’enseignant peut prétendre obtenir la mise en
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jeu de ses élèves. Seul un enseignant passionné peut avoir des élèves qui se
passionnent pour l’étude de ce qu’il enseigne. »
59. TODARO, Chiara, L’Atelier Radio : uno strumento per un apprendimento signifivativo,
Faculté d’enseignement de l’italien langue étrangère, Université Ca’Foscari, Venise
126
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Depuis les années 1980, un certain nombre de travaux ont été menés pour
mieux connaitre les adultes maitrisant mal l’écrit. Certaines recherches s’inté-
ressent au profil socioéconomique des populations concernées, à leurs pratiques
culturelles, à leurs parcours et trajectoires, à leurs modes d’engagement en for-
mation. D’autres tentent de cerner ce que signifie exactement « ne pas maitriser
suffisamment les savoirs de base » ou interrogent les difficultés spécifiques
face à l’écrit de certains adultes et jeunes adultes au faible capital scolaire et
culturel (pour une synthèse, voir Leclercq, 1999, chap. 3 et 4 ; Leclercq, 2007).
Pour mener des investigations sur ces questions avec une orientation clairement
scientifique, qui se distingue de la démarche de diagnostic effectuée par les
formateurs, il est nécessaire de se doter d’une modélisation de ce que nous
appellerons les rapports à l’écrit dans la lignée des travaux de Bautier (1995 ;
2002) sur les rapports au langage, de Barré-De Miniac (2000) sur le rapport à
l’écriture ou de Chartrand et Blaser (2006) sur le rapport à l’écrit.
Pour nous, la notion de rapport à l’écrit renvoie à une relation de sens et de
valeur attribuée à des activités, à des situations et à des produits, relation
construite par le sujet à propos de l’écrit, de ses usages et de son apprentissage.
Notre modèle prend en compte cinq dimensions reliées les unes aux autres.
Les recherches sur la faible maitrise de l’écrit des adultes se centrent sur l’une
ou l’autre d’entre elles selon le focus choisi par le chercheur et selon le cadre
129
Appropriation et représentations
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l’écrit comme un système qui prend appui sur un certain nombre de compo-
santes fondamentales en interaction.
Après avoir explicité les cinq composantes, nous proposerons d’exemplifier
l’une d’entre elles, relative aux conceptions de la langue écrite et de son appren-
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60. Bellegarde, K., L’impact d’une formation de base sur les rapports à l’écrit d’adultes « en
situation d’insécurité scripturale » – Le cas d’apprenants-salariés en parcours d’insertion
par l’activité économique, Université de Lille1, sous la direction de V. Leclercq.
130
Appropriation de l’écrit par des adultes faibles lecteurs et faibles scripteurs
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mique, et une certaine spécificité du mode d’appropriation de l’écrit, confortant
ainsi ce qui avait déjà été décrit par Lahire (1993). Les pratiques et usages de
la lecture/écriture sont reliés aux expériences de vie passées ou présentes, à des
espaces connus et renvoient à des configurations pratiques. D’autres travaux
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131
Appropriation et représentations
l’organisation de procédures, la façon dont les individus gèrent leurs actions pour
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réaliser des activités précises. Prendre en considération les stratégies et fonc-
tionnements cognitifs dans les tâches de communication écrite permet d’aller
au-delà du constat de difficultés et d’en questionner l’origine. Cette dimension
ne peut être accessible que grâce à l’analyse de traces de l’activité cognitive
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des sujets confrontés aux tâches d’écrit. Les ressources théoriques de la psy-
cholinguistique, de la psychologie cognitive ou des sciences du langage sont
nécessaires pour tenter d’expliquer les difficultés ou réussites. Les disparités
inter et intra-individuelles apparaissent très souvent. Ainsi, des sujets peuvent
montrer des stratégies orthographiques pertinentes en production d’écrit et des
stratégies textuelles non efficientes (K. Balslev, 2008). La question des straté-
gies est d’importance car elles sont parfois inefficientes et expliquent en partie
les faibles performances des sujets. Au niveau de la lecture d’énoncés simples,
Adami (2008) analyse chez certains salariés de premier niveau de qualification,
pas ou peu scolarisés, le recours systématique à l’expérience professionnelle
pour aborder l’écrit de l’entreprise, avec des réussites, mais aussi beaucoup de
confusions. Les salariés reconstruisent le sens de l’écrit à partir d’indices glanés
çà et là et font intervenir leur expérience comme appui constant. Mais cette
logique pratique ne recouvre pas la logique graphique et textuelle qui relève d’un
autre habitus. Ce décalage est source d’erreurs dans la compréhension des écrits.
132
Appropriation de l’écrit par des adultes faibles lecteurs et faibles scripteurs
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et écrire, la façon dont les sujets investissent ce parcours renvoient aux signi-
fications construites par les sujets, significations qui dépendent du contexte de
formation formelle et d’apprentissage informel, mais aussi du parcours de vie
et des épreuves vécues (Tabbal Amella, 2014).
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133
Appropriation et représentations
nous focaliserons notre réflexion autour d’une partie des données, le sens que
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donne le sujet à la langue et à son apprentissage comme obstacle à l’appropria-
tion. Au regard des travaux de Besse et al. (2003), l’appropriation de l’écrit est à
comprendre en lien avec les changements opérés dans les rapports à l’écrit des
sujets. Et, c’est le maintien dans un même mode de rapports à l’écrit qui per-
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Appropriation de l’écrit par des adultes faibles lecteurs et faibles scripteurs
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tifier, dans le premier cas, les modèles didactiques (Leclercq, 1999) à
l’œuvre dans les trois formations de base, dans le second cas, les pratiques
de l’écrit en milieu professionnel. En fonction de la formation en MSB
suivie et des caractéristiques scripturales des activités professionnelles,
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les modifications opérées dans les rapports à l’écrit des sujets pourraient
varier.
Les discours recueillis lors des entretiens permettent de voir apparaitre le sens
attribué par les sujets à la langue écrite et les obstacles inhérents.
61. Des pratiques variées en lecture/écriture ont pu être observées dans un seul ACI dont le
domaine d’activité est la restauration.
135
Appropriation et représentations
Pour Daniel, c’est son métier manuel qui expliquerait que ses outils soient
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nécessaires à son activité professionnelle à la différence de l’écrit dont il n’au-
rait pas besoin. Une opposition nette apparait dans ses propos entre « eux »,
ceux qui travaillent dans les bureaux et, « moi », les ouvriers, les manuels :
« Quelqu’un qui travaille dans les bureaux, eux, c’est tous les jours [qu’ils
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écrivent et lisent]. Mais, pour moi, non, moi, je suis simplement ouvrier, bon,
manuel. Par contre, ce que moi, j’ai besoin tous les jours, c’est des outils. »
(Daniel, salarié espaces naturels sensibles).
Une part importante des salariés interviewés font état d’expériences profes-
sionnelles passées similaires, c’est à dire sans recours à l’écrit et projettent
des expériences futures semblables d’où cette intériorisation durable du non
recours à l’écrit.
136
Appropriation de l’écrit par des adultes faibles lecteurs et faibles scripteurs
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Écrire et lire sont ressentis comme une obligation et ce sentiment apparait
distinctement dans les propos des enquêtés. Une analyse de leur discours nous
permet d’identifier une cooccurrence qui relie les termes de lecture/écriture
(et dans une propension plus grande celui d’écriture) à celui d’obligation62.
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Cette cooccurrence est relayée par un rapport indirect entre le sujet (le salarié-
apprenant) et le verbe (écrire et/ou lire) qui sont médiatisés de manière récur-
rente par la présence d’auxiliaires exprimant des modalités déontiques (« il
faut », « on doit », « je dois »).
Une première analyse autour de cette cooccurrence et de ce rapport déontique
à l’écrit, nous révèle que ce sentiment perdure chez les salariés même après
avoir suivi une formation en MSB et ceci, pour une part importante d’enquêtés.
Les propos post formation d’Adrien laissent apparaitre cette persistance autour
de ce sentiment : « S’il faudrait pas écrire, j’écrirais pas, quoi. Mais on est
obligé d’apprendre quand même, ouais une obligation par rapport au boulot.
Mais, après, ça serait mieux que y aurait pas d’écriture, au moins, j’aurais
pas de problème là-dessus. » (Adrien, salarié en espaces naturels sensibles).
Ce sentiment d’obligation est aussi à comprendre au regard des difficultés à
l’écrit que rencontrent ces personnes.
62. Nous référons cette analyse de cooccurrence aux travaux de D’Unrung (1977) sur l’analyse
de contenu qui considère le discours comme « une parole en acte », porteur de significations
dans son organisation même.
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Appropriation et représentations
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Un troisième ensemble d’obstacles lié au sens attribué à la langue écrite s’arti-
cule autour des conceptions de l’écrit que se sont forgées les apprenants-
salariés. En lien avec les travaux de Giordan (1998), nous avons choisi de
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Appropriation de l’écrit par des adultes faibles lecteurs et faibles scripteurs
– (bien écrire ?) « Beh, c’est écrire comme tout le monde fait. De toute façon,
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moi, je sais que je vais écrire mais va y avoir des fautes, quoi. Mais, c’est
avoir une belle écriture parce que mi, j’écris comme un cochon. » (David,
salarié bâtiment) ;
– (bien lire ?) « Pareil, ne pas faire lettre par lettre, mot par mot. Lire la phrase
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Appropriation et représentations
de la formation en MSB : « Oué, j’ai dit une formation qui vient dans mon
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projet professionnel, pas une remise à niveau, c’est pour les gamins. Oué,
moi, je te le dis carrément, j’aime pas. La première fois que je suis rentré
dedans, je l’ai dit, je veux pas le faire. » (Pierre, salarié PU).
Par ailleurs, ces salariés ont très souvent une conception du travail sans recours
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à l’écrit. Se réinsérer par le travail, c’est apprendre sur le tas et non suivre une
formation en MSB : « Beh, moi, j’apprends plus sur le site quand je travaille
directement. Mais, la formation, ça m’intéressait vraiment vraiment vraiment
pas. […] c’est de revenir à l’école, on va dire, c’est comme si c’était l’école.
C’est de revenir à l’école et moi, j’aimais pas. […] Je trouve pas qu’on ait
besoin de formation… de français et de maths pour travailler. » (Patrick,
salarié espaces naturels sensibles).
Une part importante de salariés en parcours d’insertion plébiscitent d’ailleurs
tout particulièrement une formation qualifiante en lien avec leur projet. Pour-
tant, pour des personnes en difficulté face à l’écrit, la première étape de ce
parcours passe bien souvent par la formation en MSB qui prépare à cette
formation qualifiante63.
63. En France, un nombre important d’organismes qui proposent des formations qualifiantes
sélectionnent les candidats à ces formations par le biais de tests de français, mathématiques
et logique.
140
Appropriation de l’écrit par des adultes faibles lecteurs et faibles scripteurs
quand nous avons demandé à Jean de nous parler de ce qu’il avait appris en
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formation, les savoirs énoncés se sont limités à des savoirs d’action sans pouvoir
exprimer ce que ces actions permettaient d’apprendre au-delà de leur mise en
œuvre : « Beh, c’est-à-dire, comme là, qu’est-ce qu’il fait le chat ? Beh, il est
dans le panier. C’est des choses comme ça qu’on a travaillé. Des réponses,
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quoi. Et puis, y avait aussi les dictées. » (Jean, salarié espaces verts).
Cette difficulté à parler de ce qu’ils ont appris et travaillé en formation est
aussi perceptible au regard de l’aspect succinct, hésitant de leur discours sur
la langue voire leur impossibilité de répondre.
141
Appropriation et représentations
3. Conclusion
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Les résultats de nos travaux questionnent les pratiques des professionnels qui
devraient être en mesure d’accompagner l’apprenant en tentant de redonner sens
à la langue et à son apprentissage. Mettre en lien les savoirs travaillés sur la
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Références
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scolarisés, thèse en sciences de l’éducation, Lille 1, 2009.
Adami, H., « Tests de sécurité pour salariés en insécurité à l’écrit : stratégies
de lecture en contexte professionnel », in Transformations – recherches en
éducation des adultes, Mieux connaitre les adultes peu qualifiés et peu
scolarisés, Leclercq, V. (coord.), no 1, 2008, pp. 107-120.
Bahloul, J., « Les faibles lecteurs : pratiques et représentations », in Poulain,
M. (dir), Pour une sociologie de la lecture, Paris, Cercle de la librairie,
1988, pp. 103-124.
Balslev, K, « Analyser des écrits d’adultes pour dégager des stratégies textuelles
et scripturales », in Transformations – recherches en éducation des adultes,
Mieux connaitre les adultes peu qualifiés et peu scolarisés, Leclercq,
V. (coord), no 1, 2008, pp. 121-135.
Barré-De Miniac, C., Le rapport à l’écriture : aspects théoriques et didactiques,
Villeneuve d’Ascq, Presse universitaire du Septentrion, 2000.
Barton, D. et Hamilton, M., « La littératie : une pratique sociale », in Langage
et Société, no 133, 2010, pp. 45-62.
Bautier, E., « Caractéristiques sociocognitives et illettrisme », in Besse JM (dir),
L’illettrisme en questions, Lyon, PUL, 1992, pp. 109-117.
142
Appropriation de l’écrit par des adultes faibles lecteurs et faibles scripteurs
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à la sociologie du langage, Paris, L’Harmattan, 1995.
Bautier, E., « Du rapport au langage : questions d’apprentissages différenciés
ou de didactique », in Pratiques, no 113/114, 2002, pp. 41-54.
Bautier, E. et Goigoux, R., « Difficultés d’apprentissage, processus de seconda-
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Appropriation et représentations
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tiques et lectures en milieux populaires, Lille, Presses Universitaires de
Lille, 1993.
Leclercq, V., Face à l’illettrisme. Enseigner l’écrit à des adultes, Paris, ESF,
1999.
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Appropriation et représentations
distribution qui apparait parfois comme aléatoire ; les accords des participes
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passés dépendent du choix de l’auxiliaire, etc. Ce ne sont là que quelques
exemples tirés d’une liste que tout le monde a en tête. Cette grande complexité
a inévitablement une répercussion sur la difficulté de l’apprentissage du fran-
çais. Mais il nous parait crucial de relativiser son influence sur l’ensemble du
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64. « À qui est destiné le français correct ? D’abord, à tous les passionnés de français correct.
Ensuite, aux enseignants, à leurs élèves, aux étudiants et aux autodidactes. Enfin, aux
traducteurs, aux interprètes, aux journalistes et aux responsables des médias, c’est-à-dire
à ceux qui tiennent à donner aux lecteurs et aux auditeurs des textes, des messages, des
slogans français, précis, nuancés, corrects ». Michèle Lenoble-Pinson, Avant-propos du
Français correct. Guide pratique. Grevisse, Duculot, 1998, 5e édition revue par MLP.
146
Le français est une langue difficile
souvent des commentaires du genre de ceux illustrés dans les trois exemples
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ci-dessous (les passages qui ont retenu notre attention sont italiques grasses) :
– Véhiculaire : langue véhiculaire s’utilise depuis 1935 pour désigner « une
langue commune servant de moyen de communication entre des groupes de
langues différentes ». Refusée par les puristes, cette locution est admise par
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147
Appropriation et représentations
et même aux villes qui se piquent le plus de politesse, pour les faire éviter
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aux enfants »65. Certains prescripteurs imaginent des formes originales pour
traquer les barbarismes, solécismes et erreurs en tout genre, tel Alphonse Guil-
lebert, qui publie en 1825 un Dialecte neuchâtelois. Dialogue entre M. Patet
et Mlle Raveur. Il faut noter tout de suite que le dialecte neuchâtelois dont il
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est question n’est pas le vernaculaire francoprovençal, qui est déjà fortement
minorisé par le français à cette époque, mais le français parlé par ses contem-
porains vivant dans le canton, qu’il distingue donc du français. Cet ouvrage
a beaucoup de succès et il est suivi en 1832 d’une deuxième édition intitulée
cette fois Fautes de langage corrigées ou Dialogue entre M. P. et Mlle R. Ce
dialogue fictif est précédé, dans cette deuxième édition, d’un autre échange
tout aussi inventé qui met en scène l’Auteur et un « Critique ». Ce dernier se
défend de bien parler français et met en cause la démarche de Guillebert…
tout en commettant toutes les erreurs (en italiques dans le texte) que l’Auteur
tient à rectifier (en petites capitales dans le texte) :
65. Citation de Charles Rollin (Traité des études, 1726-1728) mise en exergue de la Nouvelle
cacologie ou Dictionnaire des locutions vicieuses, à l’usage des écoles et des pensionnats,
édité en 1841 dans le canton de Berne, « ouvrage approuvé et recommandé par la Vénérable
classe des pasteurs du Jura et adopté par le Département de l’Éducation de la République de
Berne ».
148
Le français est une langue difficile
a
Aigu et grave étant des adjectifs, on doit dire, non pas un aigu mais un
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accent aigu, un accent grave. Circonflexe peut être substantif ; et l’on dit
indifféremment un circonflexe et un accent circonflexe.
La catégorisation opérée par Guillebert distingue les fautes de langage com-
munes à tous les pays où l’on parle français de celles qui sont particulières à
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66. Le latin comme ultima ratio regum est également présent chez Alain Bentolila qui, dans
sa Langue française pour les Nuls (p. 109), note : « Trop souvent, la méconnaissance de
l’étymologie nous conduit à faire des contresens ou à commettre des impropriétés […]
par exemple, si l’expression “choisir entre deux alternatives” est impropre, c’est parce
qu’“alternative”, qui vient du latin alternare, alter, “l’autre” désigne au sens propre “une
situation dans laquelle il n’est que deux partis possibles”. On ne choisit pas entre deux
alternatives, mais entre les deux termes d’une alternative : je suis placé devant une alter-
native : dois-je partir ou bien rester ? ».
67. Sauf s’il est encadré par un « contrat didactique », cf. De Pietro, Matthey & Py 1989/2004.
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Appropriation et représentations
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rien français du xviie siècle, auteur d’une Nouvelle méthode pour apprendre
facilement les principes et la pureté de la langue française (1656), la remarque
suivante :
« C’est une erreur qui a surpris plusieurs personnes de s’imaginer qu’on peut
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150
Le français est une langue difficile
– […]
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– “il a pallié à l’échec de son équipe” 69. »
En suivant Berrendonner (1988), qui distingue deux niveaux de structura-
tion du langage, celui (S1) relevant du système de la langue et celui (S2)
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69. Parfois, la faute est tellement évidente que la forme correcte n’est même pas signalée.
70. Voici un témoignage trouvé sur Internet qui exemplifie la stigmatisation de cette structure :
« une erreur grossière qui me rend folle : “ma mère elle m’a dit que » répétition du sujet !!!!!!
On l’entend partout, et notamment dans une pub, ça devient compliqué d’expliquer aux
enfants que c’est incorrect !!!!! ».
151
Appropriation et représentations
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discours normatif (Berrendonner, 1982) et montre que la grammaire ne cherche
pas à réguler la variation mais à imposer une tradition reflet de l’ordre social.
Nous sommes très loin d’une langue outil convivial permettant à chacun de
s’intégrer dans la collectivité (Illich, 1973).
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Tableau 3.1
152
Le français est une langue difficile
français est plus facile, 278, soit 55 % cochent la case : « le français est plus
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difficile que ma langue maternelle ».
Deux précisions méthodologiques s’imposent pour une bonne compréhension
de notre démarche et une bonne interprétation de ses résultats :
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– les étudiants nous ont renseignés sur leur L1, nous avons donc des données
plus détaillées par familles de langues : romane, germanique, slave, asiatique,
autres (les étudiants dont la L1 est l’anglais ont été exclus des résultats présentés
ici). Si nous livrons ici des résultats totaux, qui ne tiennent pas compte de
cette distribution, c’est d’une part par souci de clarté et de concision et d’autre
part parce que, même si cela est étonnant, les différences sont marginales :
les proportions restent les mêmes pour des locuteurs de langues parentes ou
de langues éloignées ;
– les jugements sont volontiers portés, très rares sont les étudiants qui refusent
de répondre ou avancent qu’ils ne peuvent pas se prononcer de manière aussi
catégorique et caricaturale. Nos questions sont, volontairement, naïves : il s’agit
de dégager des a priori, des stéréotypes, voire des clichés. Linguistiquement
et didactiquement, il n’est pas raisonnable de comparer la difficulté de sa
L1 par rapport à une L2 : les étudiants auraient pu annoter le questionnaire
en nous interpelant : « selon quels critères ? », « sous quel angle ? », « pour
moi, ou pour un étranger qui veut apprendre ma langue ? », etc. Aucun ne
l’a fait. Nous avions laissé une porte de sortie honorable, permettant de jouer
le jeu sans s’impliquer en répondant « les deux se valent ». Moins du tiers
des étudiants a choisi cette option.
Pour finir, les étudiants devaient désigner ce qui leur apparaissait comme la
principale difficulté du français et de l’anglais, avec le choix suivant (un seul
choix possible) :
a. grammaire et orthographe b. comprendre
c. parler (prononciation) d. aucune
Tableau 3.2
Ces pourcentages sont à mettre en relation avec le fait que l’anglais est globale-
ment jugé plus facile à apprendre que le français, mais cette distinction annulée,
la comparaison entre les deux langues offre plusieurs constats intéressants.
153
Appropriation et représentations
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et de son orthographe sont reconnues : la proportion est à peu près celle du
français, avec un léger avantage pour celui-ci. Cela dit, le second pourcentage
des jugements sur l’anglais est « aucune difficulté », alors que cette case n’a
jamais été sélectionnée pour le français !
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4. Pour conclure…
Il nous a été reproché lors de la discussion qui a suivi la présentation de
notre communication d’avoir tenté de « noyer le poisson » en n’affrontant
pas frontalement la question soulevée par le titre. Celui- ci pouvait en effet
laisser entendre que nous allions nous livrer à une démonstration objective
et rigoureuse de la difficulté essentielle du français, alors que nous avons
renvoyé le problème de la difficulté essentiellement au niveau des représenta-
tions. L’approche consisterait à créer un modèle de la difficulté, basé sur un
154
Le français est une langue difficile
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syllabique, morphosyntaxique ; systèmes d’écriture ; orthographe ; langue[s]
source[s] ; accès à l’input, etc.), susceptibles d’être traitées par la statistique
multivariée et qui permettrait d’indexer les langues sur une échelle des dif-
ficultés d’apprentissage. Ce modèle nous semble à la fois peu pertinent et
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peu réaliste. Partant du principe que les locuteurs apprenants n’hésitent pas
à simplifier eux-mêmes les données (input) de la langue qu’ils s’approprient,
comme le montrent la théorie de l’interlangue en linguistique de l’acquisition
(voir par exemple Py, 1980 ; Vogel, 1995 ; Rosen & Porquier 2003), mais
également les néographies du français (Matthey, 2012), nous pensons que
mesurer la difficulté objective, intrinsèque, d’une langue est une entreprise
un peu vaine dès lors qu’il n’est pas possible d’évacuer le sujet-apprenant
de cette question. Par ailleurs, si le choix d’apprendre une langue étrangère
s’effectuait selon des critères objectifs de difficulté, en d’autres termes s’il
y avait un tropisme vers la facilité linguistique objective, alors l’espéranto,
plus de 125 ans après sa création, aurait pris le pas sur les autres langues
et le chinois aurait disparu de toutes les filières d’apprentissage…
Références
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xixe siècle en Suisse romande : entre description et proscription », in Vox
Romanica, no 70, 2011, pp. 219-243.
Berrendonner, A., L’éternel grammairien. Étude du discours normatif, Berne,
Lang, 1982, Sciences pour la communication.
Berrendonner, A., Le Guern, M. & Puech, G., Principes de grammaire polylec-
tale, Lyon, PUL, 1983.
Berrendonner, A., « Normes et variations », in Schoeni G., Bronckart J.-P.
& Perrenoud Ph. (Éds.), La langue française est- elle gouvernable ?,
Neuchâtel-Paris, Delachaux et Niestlé, 1988, pp. 43-61.
De Pietro, J.-F., Matthey, M. & Py, B., « Acquisition et contrat didactique : les
séquences potentiellement acquisitionnelles dans la conversation exolingue »,
in Weil D. & Fugier H. (Éds.), Actes du troisième Colloque Régional de
Linguistique, Strasbourg, Université des Sciences Humaines et Université
Louis Pasteur, 1989, pp. 99-119, [réédité dans Gajo L. et al., Un parcours
au contact des langues. Textes de Bernard Py commentés, Paris, Didier/
Crédif, 2004, pp. 79-93].
Illich, I., La convivialité, Paris, Seuil, 1973.
Laporte, D., « Les politiques de la langue », in Giordan H. & Ricard A.,
Diglossie et littérature, Bordeaux, Maison des Sciences de l’Homme, 1976,
pp. 69-84.
155
Appropriation et représentations
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chez les (plus ou moins) jeunes ? », in X. North (dir.), Les évolutions du
français contemporain. Pratiques linguistiques et politiques francophones,
Actes du colloque OPALE, Lyon 18-19 octobre 2011, Vénissieux, La passe
du vent, 2012, pp. 239-246, Collection « Faire Cité ».
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CONCLUSIONS
Philippe HAMBYE
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S’approprier le français
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– Certains intervenants ont proposé une série de constats concernant les diffi-
cultés que rencontraient l’enseignement, la formation pour réellement créer
chez les locuteurs une pleine appropriation de la langue que ce soit en raison
de facteurs plutôt macro-sociaux institutionnels (v. les communications de
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Conclusions
par les individus (qui ne peuvent à eux seuls, créer de l’emploi, fournir des
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formations, lutter contre la ségrégation urbaine, etc.).
Dans de telles situations, les obstacles à l’appropriation du français sont liés
à des divergences politiques et idéologiques plus ou moins explicites. Comme
l’a souligné Édouard Delruelle, si certains se plaisent à faire de l’immigration
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et de l’intégration un tabou dont ils seraient les seuls à oser parler, ces pro-
blématiques sont en réalité omniprésentes dans le débat public aujourd’hui :
elles sont l’objet d’oppositions, elles sont reconnues comme politiques au sens
fort, dans la mesure où elles interrogent la question des priorités politiques,
des valeurs, de la justice, etc.
Il est d’autres cas où ce sont moins des divergences idéologiques explicites que
certaines résistances institutionnelles qui semblent entraver certaines évolutions
susceptibles de favoriser l’appropriation du français. Les exposés de Dominic
Anctil et Mohammed Miled ont en ce sens souligné les limites de certaines pra-
tiques didactiques dont le maintien tient peut-être davantage au fonctionnement
de l’institution scolaire et au conservatisme qui y règne parfois pour diverses
raisons, qu’à une adhésion franche et réfléchie. Les propositions de réforme que
leurs travaux suggèrent seraient probablement perçues comme des réponses légi-
times à des objectifs politiques consensuels, notamment parce qu’elles portent
davantage sur les méthodes que sur les visées de l’enseignement du français.
Le troisième type de facteur discuté lors du colloque concerne plus directement
le statut ou le corpus de la langue. On se trouve là au cœur du champ des
politiques linguistiques au sens strict : si la valeur d’une langue sur le marché
linguistique mondial dépend structurellement de facteurs macro-sociaux (et
en particulier des rapports de force économiques entre les États) sur lesquels
les politiques d’aménagement linguistique peuvent difficilement agir, il reste
que l’attractivité d’une langue peut être augmentée, toutes choses égales par
ailleurs, lorsqu’on en améliore l’image ou lorsqu’on la rend objectivement plus
accessible par des réformes portant sur son corpus.
Au cours des échanges qui ont suivi les présentations, il a été plusieurs fois
question du poids respectif des discours sur le français et du système de la
langue lui-même sur le sentiment d’(in)appropriabilité du français. Plusieurs
collègues ont souligné que le discours puriste restait prégnant, que les attitudes
des francophones entretenaient cette image de difficulté du français ; d’autres
ont insisté sur sa difficulté intrinsèque, telle qu’elle pourrait être mesurée com-
parativement à d’autres langues avec lesquelles le français est en concurrence.
Il me semble important de garder à l’esprit que la difficulté du français n’est
ni purement dans la langue elle-même, ni purement dans les représentations,
mais dans un rapport entre, d’une part, le niveau de compétence qu’un type de
locuteur donné, dans des situations de communication données, doit atteindre
159
S’approprier le français
pour être socialement légitime, et d’autre part, le travail objectif à fournir par
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ce locuteur pour atteindre ce niveau de compétence. Rendre le français plus
accessible peut donc passer à la fois par un travail pour réduire les attentes
qui sont parfois démesurées chez les francophones, et par des efforts pour
rendre l’apprentissage de la langue plus aisé, y compris par une simplification
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Conclusions
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de certaines prises de position, de profondes divergences d’intérêts et de valeurs
qui entretiennent les résistances au changement. En réalité, tout le monde n’a
pas intérêt à ce que la ressource que constitue l’accès à un usage légitime du
français se diffuse largement.
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Certes, les langues sont en principe comme les connaissances et les croyances : on
peut les partager au plus grand nombre sans en perdre aucunement la jouissance,
bien au contraire. Si la valeur pratique des langues ne se perd pas, et augmente
même le plus souvent, à mesure que leur nombre de locuteurs augmente, il n’en
va pas nécessairement de même de leur valeur économique au sens large. En
reprenant à Bourdieu (1982) sa métaphore économique, on peut dire qu’il existe
sur le marché linguistique une tension entre l’intérêt pour la diffusion d’un même
produit (d’une même langue) et l’intérêt pour sa rareté : plus il y a de locuteurs
du français par exemple, plus il y a d’espaces auxquels cette langue donne accès,
plus elle favorise les échanges, notamment économiques. En ce sens, la diffu-
sion du français est dans l’intérêt du francophone qui a quelque chose à gagner
à pouvoir accéder à davantage d’espaces et notamment à davantage de marchés
où il est susceptible de faire valoir ses produits tant matériels que symboliques.
Mais si la diffusion du français donne accès à de nouveaux marchés, elle met
donc nécessairement de nouveaux acteurs en concurrence, avec le risque de voir
ceux qui dominaient jusque-là certains espaces se sentir menacés de perdre leur
position dominante. Pour celui qui possède la maitrise du français normé, celle-
ci constitue une ressource précieuse, un capital, et le fait qu’elle soit partagée
par beaucoup d’autres limite les profits qu’il peut en tirer. S’il n’a rien d’autre à
échanger dans les espaces en question, le locuteur a davantage intérêt à s’assurer
un contrôle accru sur les marchés où le français est effectivement une ressource
nécessaire, en s’assurant que seul son produit linguistique compte comme un
produit valorisé, autrement dit en s’assurant que sa variété de français soit la
seule reconnue comme légitime.
Dans l’histoire, les élites francophones ont habilement joué sur les deux
tableaux : en diffusant la langue pour avoir accès à de nouveaux espaces et
dès lors à de nouveaux marchés et à de nouvelles ressources via la colonisa-
tion, tout en se réservant le pouvoir de définir la langue légitime de manière
à se présenter pour les seuls détenteurs de celle-ci et concentrer ainsi le profit
symbolique associé à la maitrise de cette langue. Autrement dit, pour les élites
francophones européennes en particulier, l’enjeu a toujours été de diffuser la
pratique du français tout en limitant son appropriation pour conserver la main-
mise sur cette ressource. On comprend mieux dès lors que le discours puriste
connaisse encore une telle vitalité. Évoquant le travail de Martine Garsou
(1991), Jean-Marie Klinkenberg a rappelé que le purisme était avant tout une
affaire d’élite, tandis que Jean-François Alokpon a bien illustré le capital sym-
bolique auquel était associée la maitrise du français normé. Les représentations
161
S’approprier le français
puristes de la langue sont d’autant mieux diffusées que tous ceux qui se sont
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approprié la norme à un prix très élevé ont un grand intérêt à valoriser leur
investissement en dénigrant les erreurs de ceux qui se trouvent en dessous
d’eux dans la hiérarchie sociolinguistique.
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Conclusions
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tions qui concernent l’appropriation de la langue, dans la mesure où l’imagi-
naire puriste qui sous-tend la plupart de nos représentations linguistiques est
précisément ce qui nous empêche de voir que l’appropriation du français est
dans notre intérêt collectif. Le purisme par définition est l’attitude de celui
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qui croit fondamentalement que la langue pure existe ou a existé quelque part,
qu’elle préexiste aux usages et qu’il faut la respecter : elle exige que le locuteur
se mette au service de la langue et non que la langue soit un instrument que
l’on façonne pour qu’il serve les locuteurs. Toute démarche visant l’appro-
priation s’oppose au purisme en ce qu’elle rend aux locuteurs un peu de leur
droit à mettre la langue à leur service plutôt que de se mettre au service de
la langue. Autrement dit, l’appropriation vise à rendre aux locuteurs un peu
de la souveraineté linguistique qui leur fait défaut, surtout quand il s’agit des
locuteurs francophones quand on les compare par exemple avec les germano-
phones comme l’a bien montré Heinz Bouillon.
C’est donc parce qu’ils ne se sentent pas propriétaires de leur langue que
nous pouvons penser qu’il faudrait mettre en place des mesures pour favoriser
l’appropriation, mais il est impossible d’espérer que ce désir d’appropriation
provienne spontanément de francophones qui pensent majoritairement que la
langue n’est pas quelque chose qui s’approprie. Il n’est pas étonnant en ce sens
qu’il n’y ait aucune « demande sociale » pour une réforme de l’orthographe
comme l’a bien rappelé Xavier North citant les résultats d’un récent sondage ;
si cette demande existait, cela signifierait que l’idée même de réformer la
langue est déjà acceptée, alors que c’est précisément cela qu’il s’agit de rendre
envisageable parce que ce ne l’est pas encore aujourd’hui. Autrement dit, pour
qu’ils puissent voir l’intérêt de s’approprier la langue, il faudrait que les fran-
cophones effectifs ou en devenir soient déjà prêts à se défaire de leur attitude
puriste, celle-là même qui justifie le travail sur l’appropriation : il est clair
qu’une communauté qui croit que la langue a une essence immuable ne peut
pas vouloir la changer, même si peut-être elle souhaiterait que cette essence
eût été différente. Or, on ne saurait s’attendre à ce que les gens veuillent lutter
spontanément contre quelque chose (ici le purisme) si cette chose est précisé-
ment ce qui les empêche de souhaiter que cette lutte soit menée.
163
S’approprier le français
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d’autres cénacles où il est question de politique de la langue, il me semble le
plus souvent nous ne donnons qu’une réponse vague à cette question. Nous
discutons de la pertinence et de la façon de mettre en œuvre certaines mesures,
mais nous n’explicitons que très rarement les principes politiques et les objec-
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tifs qui doivent selon nous orienter la gestion publique de tout ce qui a trait
à la langue, et du coup nous n’en débattons jamais, en feignant parfois une
unanimité sur ces questions.
Cela nous conduit parfois à faire passer pour des nécessités objectives des
politiques qui ne s’imposent en réalité que si l’on a déjà accepté de défendre
certains principes. Ainsi, appeler à une meilleure appropriabilité du français au
nom du cout économique des difficultés de son appropriation par les locuteurs
ne me semble pas suffisant. Ce n’est pas parce qu’une réalité a un cout qu’elle
doit être l’objet d’une réforme. On peut estimer que ce cout est nécessaire.
L’accueil des immigrants a lui aussi un cout, mais on peut estimer tout à fait
important de le supporter, même si c’est précisément parce qu’il est élevé que
certains voudraient fermer encore davantage les frontières. La non-maitrise du
français par certains francophones a certes un cout mais on doit se demander
comme je l’ai suggéré plus haut si certains n’ont pas intérêt à ce que ce cout
soit maintenu sachant qu’il est surtout réparti sur l’État et sur les personnes qui
ne jouissent pas de la maitrise de la langue. Les couts sont très inégalement
distribués et ce qui est un cout pour les uns, et aussi un gain pour les autres.
En outre, nous sommes parfois plus sensibles aux couts consentis par certains
groupes sociaux plutôt que d’autres, ce qui revient à dire que nous hiérarchi-
sons différemment les priorités : ce n’est pas la même chose, par exemple, de
vouloir améliorer la visibilité du français dans les institutions internationales
ou de vouloir mettre en place des conditions effectives d’apprentissage du
français par les migrants, tout simplement parce que ces deux objectifs ne
servent pas, du moins dans un premier temps, les intérêts des mêmes per-
sonnes. Derrière notre objectif apparemment commun consistant à faire la
« promotion du français », à « gagner des parts dans le marché des langues »,
ou notre préoccupation pour l’avenir du français qui se jouerait en Afrique, il
y a en réalité des priorités et des principes politiques extrêmement différents.
Par conséquent, lorsque nous évoquons la nécessité de mettre en place telle ou
telle politique, nous ne devrions pas seulement invoquer le cout résultant de
l’absence de cette politique, mais il faudrait que nous explicitions les principes
et les intérêts que nous défendons, les raisons qui nous poussent à vouloir
diminuer ce cout plutôt qu’un autre.
Il me semble qu’à défaut d’aller jusque-là, les débats de politique linguistique
deviennent rapidement répétitifs ou stériles. Au lieu de nous permettre d’éclairer
nos points de désaccord sur les principes et les objectifs – le quoi et le pourquoi,
164
Conclusions
nous nous leurrons en laissant penser que nos débats naissent uniquement de
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divergences de conception quant à la question du comment faire ; nous rédui-
sons alors nos discussions à des réflexions d’experts sur ce que la novlangue
actuelle nomme sous les termes politiquement vides de « bonnes pratiques » et
de « bonne gouvernance » (v. Durand 2007) – en faisant comme si la définition
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6. Expertise et idéologie
Nous participons ainsi, parfois à notre corps défendant, à la dépolitisation du
champ politique qui a vu le triomphe des experts et le discrédit des débats
idéologiques (v. Cussó et al. 2008). Cette tendance est bien entendu liée au fait
que les membres des organismes de politique linguistique n’ont pas de mandat
politique, au sens où ils n’ont pas reçu de mandat populaire et n’ont dès lors pas
la légitimité d’un élu, mais aussi dans le sens où ils discutent parfois sans que
leurs élus leur aient donné un mandat clair indiquant précisément les objectifs
qu’ils sont censés poursuivre.
Mais plus largement le fait de réfléchir aux politiques linguistiques tout en
ayant peu de discussions sur les principes politiques participe de ce mouve-
ment qui, depuis les années 1980, a produit l’illusion de la fin des idéologies,
de la non-pertinence du clivage gauche-droite (Cusset 2008). Or, le meilleur
moyen de laisser une idéologie s’immiscer dans toute réflexion est de ne plus
165
S’approprier le français
la voir et c’est bien ce que nous risquons dès que nous n’assumons plus que
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nos réflexions sur les politiques linguistiques sont fondées sur des positions
idéologiques, qu’elles soient explicites ou non.
Certes, nous avons une « expertise » à faire valoir : nous pouvons montrer
que certaines représentations ne résistent pas à l’épreuve des faits, notre
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mission est bien d’éclairer les citoyens et les responsables politiques sur les
mécanismes objectifs des politiques linguistiques et des dynamiques socio-
linguistiques. Mais la description objective du réel que nous produisons en
tant qu’experts ne nous dit jamais directement quoi faire, elle ne dit pas si
le cout du problème décrit est plus grand que le cout de sa solution et elle
ne nous dit pas qui doit assumer ces couts. Plus fondamentalement encore,
nous ne pouvons prétendre que l’expertise dont nous témoignons légitime-
ment ne s’appuie pas sur une série de présupposés, de principes qui sont
assez éloignés de la « neutralité axiologique » dont se drapent parfois les
chercheurs en sciences sociales – à travers une compréhension d’ailleurs
discutable de la position de Weber à ce sujet (v. Weber, Kalinowski 2005).
À force de faire comme si nos propos n’étaient pas sous-tendus par certains
positionnements idéologiques, nous sommes amenés à faire passer ceux- ci
pour évidents, ce qui nous empêche précisément de distinguer ce qui, dans
nos réflexions, relève de notre point de vue scientifique et ce qui relève de
prises de position politiques.
Je ne crois pas en ce sens que nous puissions faire de la politique linguistique
sans idéologie c’est-à-dire sans avoir une idée des valeurs, des intérêts que
nous défendons. Si nous croyons encore à la fable de notre neutralité, il est
temps d’arrêter de nous raconter des histoires et d’expliciter les priorités poli-
tiques qui sont les nôtres : cela nous évitera de discuter uniquement comme
si nous étions d’accord sur ces priorités. Mener une réflexion politique sans
débat idéologique, c’est se condamner soit à faire de la morale – c’est-à-dire
à être guidé uniquement par quelques valeurs individuelles que nous croyons
universelles – soit à servir des intérêts particuliers et à exercer un pouvoir qui
échappe à la discussion critique et à la délibération démocratique – ce qui est
le propre de la domination.
Références
Bourdieu, P., Ce que parler veut dire. L’économie des échanges linguistiques,
Paris, Fayard, 1982.
Cusset, F., La décennie. Le grand cauchemar des années 80, Paris, La Décou-
verte, 2008.
Durand, P. (éd.), Les nouveaux mots du pouvoir. Abécédaire critique, Bruxelles,
Éd. Aden, 2007.
166
Conclusions
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Service de la langue française, 1991.
Hambye, P., Romainville, A.-S., Apprentissage du français et intégration des
évidences à interroger, Bruxelles-Fernelmont, Service de la langue française,
Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles, E M E & InterCommunica-
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ANNEXE 1
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LES AUTEURS
Guillaume Abgrall
Guillaume Abgrall vit et travaille à Bruxelles depuis 5 ans. Issu de la microé-
dition de presse d’expression libre et d’une formation en science politique, il
s’intéresse progressivement à l’expression radiophonique. Il utilise ce média
appris sur le tas pour faire du documentaire et de l’éducation populaire.
Depuis 3 ans, cette pratique le met en contact avec des personnes qui apprennent
le français (alphabétisation, FLE). Animateur socioculturel au GSARA,
Guillaume Abgrall est intervenu pendant 3 ans et de manière hebdomadaire
au Cactus, Centre d’éducation permanente qui accueille des femmes issues de
l’immigration. Il a collaboré avec Chiara Todaro, auteure de L’Atelier Radio :
uno strumento per un apprendimento significativo, (faculté d’enseignement
de l’italien langue étrangère), Université Ca’Foscari, Venise. Ensemble ils ont
développé une méthode. Cadeaux et correspondances radiophoniques, fictions
et émissions en direct, la radio comme prétexte à la rencontre, comme moyen
ludique de s’émanciper et d’apprendre à s’exprimer, dans une autre langue.
169
S’approprier le français
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des professeurs de français (FIPF) pour un mandat de quatre ans, après avoir
occupé le poste de secrétaire général adjoint de cette commission de 2003 à 2007.
Sur le plan administratif, il a été tour à tour sous-directeur des loisirs au minis-
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Dominic Anctil
Dominic Anctil est professeur adjoint au département de didactique de l’Uni-
versité de Montréal depuis janvier 2012. Sa thèse de doctorat portait sur l’erreur
lexicale en production écrite et son traitement par les enseignants lors de la
correction. En s’appuyant sur la Théorie linguistique Sens-Texte, il a proposé
une définition fine de l’erreur lexicale ainsi qu’une typologie des erreurs de
vocabulaire des élèves du secondaire. Ses recherches présentes portent sur les
pratiques d’enseignement du lexique au primaire et sur la construction du sens
lors de séances de lecture interactive à la maternelle. Sa participation à une
recherche collaborative sur l’enseignement du concept de phrase au primaire l’a
aussi amené à s’intéresser davantage aux interactions vocabulaire-grammaire
et à la place de la sémantique du verbe dans l’analyse syntaxique.
Katell Bellegarde
Katell Bellegarde est en troisième année de doctorat en sciences de l’éducation
au Centre Université Économie d’Éducation Permanente, Université Lille 1 et est
membre de l’équipe Trigone du laboratoire CIREL – Centre Interuniversitaire de
170
Annexe 1 : Les auteurs
Recherche en Éducation de Lille, EA 4354. Elle est bénéficiaire d’un contrat doc-
toral. Elle appartient au pôle « Formation Insertion Langue » de Trigone animé
par Véronique Leclercq et représente les doctorants au sein du conseil CIREL.
Elle est engagée dans la formation de base d’adultes peu qualifiés et peu scola-
risés en tant que formatrice bénévole et de par ses travaux de recherche depuis
sa première année de Master en 2009. Elle a sa charge une unité d’enseignement
portant sur la formation de base de publics de faible niveau de qualification et
de scolarisation.
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Depuis son master I, ses recherches portent sur la connaissance des publics peu
qualifiés et peu scolarisés éprouvant des difficultés dans la maitrise des savoirs
de base. Elle s’intéresse plus particulièrement aux rapports à la langue écrite
de ces publics. Sa recherche de doctorat porte sur l’impact d’une formation en
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maitrise des savoirs de base sur les rapports à l’écrit d’adultes « en situation
d’illettrisme » inscrits dans un parcours d’insertion par l’activité économique.
Robert Bernard
Né à Seraing-sur-Meuse, Robert Bernard a fait des études secondaires gréco-
latines et il a été licencié-agrégé en Philosophie et Lettres romanes (ULG
1963). Il a enseigné le français dans l’enseignement secondaire supérieur et
à l’École normale de Liège (Haute École Charlemagne). Formateur pour les
formations en cours de carrière de l’enseignement organisé par la Communauté
française, il est aussi chargé de mission auprès du Conseil général des Hautes
Écoles. Il est inspecteur de français de l’enseignement secondaire supérieur et
supérieur non universitaire (Fédération Wallonie-Bruxelles), inspecteur général
pour les cours généraux, techniques et spéciaux de l’enseignement secondaire
(Fédération Wallonie-Bruxelles), membre de Jurys du Baccalauréat européen
(Écoles européennes), membre du Conseil de la langue française et de la poli-
tique linguistique, membre du Conseil du livre et secrétaire général du Pôle
de compétitivité « Logistics in Wallonia ».
Heinz Bouillon
Natif de la Communauté germanophone de Belgique, Heinz Bouillon a fait
des études en philologie germanique et a présenté une thèse sur la sémantique
des prépositions allemandes. Il a enseigné dans l’enseignement secondaire, puis
à HEC Liège pendant 18 ans. Depuis 1997, il est professeur de langue allemande
à l’Université catholique de Louvain. Il a été directeur de l’Institut des Langues
Vivantes de 1997 à 2004 et doyen de la faculté de philosophie, arts et lettres de
2004 à 2009. Il a publié deux grammaires allemandes chez De Boeck, et d’autres
publications portent sur la sémantique des prépositions allemandes, les problèmes
linguistiques de la Communauté germanophone de Belgique, l’orthographe alle-
mande et plus récemment sur l’immersion linguistique précoce.
171
S’approprier le français
Suzanne-G. Chartrand
Suzanne-G. Chartrand est didacticienne du français, spécialisée dans l’ensei-
gnement de la grammaire, de l’écriture et de l’argumentation ; elle est pro-
fesseure titulaire, adjointe à l’Université Laval (Québec). Elle a publié près
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d’une centaine d’articles, dirigé la publication de deux grammaires scolaires
Grammaire pédagogique du français d’aujourd’hui (1999/2011) et Grammaire
de base (ERPI/De Boeck, 2006) et des ouvrages collectifs pour promouvoir
un enseignement rénové de la grammaire, dont celui à paraitre en 2016 réu-
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Edouard Delruelle
Edouard Delruelle est Professeur de philosophie politique à l’Université de
Liège. Intellectuel engagé dans des combats tels que le droit de mourir dans la
dignité, le dialogue interculturel et la justice sociale, il a été Directeur-adjoint
du Centre pour l’égalité des chances (institution publique indépendante de lutte
contre les discriminations) de 2007 à 2013. Son dernier ouvrage paru est De
L’Homme et du Citoyen. Une introduction à la philosophie politique (2014).
Philippe Hambye
Philippe Hambye est professeur de linguistique française et de sociolinguistique
à la Faculté de philosophie, arts et lettres de l’Université de Louvain (UCL,
Belgique). Il est par ailleurs rattaché au Centre de recherche Valibel – Discours
et Variation de l’Institut Langage et Communication (ILC) où il mène desre-
cherches relèvent en sociolinguistique et en sociologie du langage. Celles-ci
ont pour point commun de s’intéresser au rôle que jouent les langues et les
discours dans les mécanismes de la domination symbolique et dès lors dans
la (re)production des rapports de pouvoir. Dans ce cadre, la question centrale
qui traverse ses travaux est celle des conditions sociales de définition de la
langue légitime : comment se définit la valeur sociale des différentes (variétés
de) langues, des différents usages ? Quels sont les groupes qui parviennent à
imposer leur vision de la hiérarchie des langues, dans quelles conditions socio-
économiques, par quels moyens, en fonction de quels intérêts, etc. ?
172
Annexe 1 : Les auteurs
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des travaux autour du rôle que joue le « rapport scriptural au langage » des
élèves dans leurs trajectoires scolaires.
Une autre partie de ses recherches est consacrée à l’étude des discours qui
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Véronique Leclercq
Véronique Leclercq est professeur en sciences de l’éducation au Centre Uni-
versité Économie d’Éducation Permanente, Université Lille 1 et est membre de
l’équipe Trigone du laboratoire CIREL – Centre Interuniversitaire de Recherche
en Éducation de Lille, EA 4354. Elle anime le pôle « Formation Insertion
Langue » de Trigone, composé de 8 chercheurs.
Elle est engagée dans la formation de base d’adultes faiblement qualifiés et
faiblement scolarisés depuis 1972, d’abord comme formatrice puis comme res-
ponsable pédagogique, formatrice de formateurs, conceptrice de supports et
enfin enseignant-chercheur depuis 1984.
Ses recherches portent sur les pratiques pédagogiques et didactiques en for-
mation de base (lutte contre l’illettrisme, formation linguistique des migrants,
remise à niveau, dispositifs d’insertion), sur la connaissance des publics fai-
blement qualifiés et faiblement scolarisés, sur les évolutions de la formation
de base et sur la professionnalisation des intervenants. Elle est titulaire d’un
doctorat de 3e cycle en Sciences de l’éducation (1984) et d’une habilitation à
diriger des recherches en SE (1993).
Véronique Leclercq participe à des comités éditoriaux ou comités scientifiques
dans des revues et publications dans le domaine de l’éducation. Elle anime la
formation doctorale de sciences de l’éducation de Lille 1.
173
S’approprier le français
Jean-Marc Luscher
Jean-Marc Luscher est Docteur en linguistique française et Maître d’ensei-
gnement et de recherche à la Faculté des Lettres de l’Université de Genève.
Enseignant depuis près de 20 ans à l’École de Langue et de Civilisation Fran-
çaises (ELCF), spécialisé en didactique et en évaluation ; membre du Conseil
scientifique du TCF au CIEP et expert auprès des Départements de l’Instruction
publique des cantons de Fribourg, Vaud et Genève.
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Depuis 2002, Directeur des Cours d’été de français de l’Université, institution à
laquelle il a impulsé une diversification durant l’année, par la mise sur pied de
modules de mises à niveau linguistique et didactique notamment. Depuis 2012,
Directeur de la Maison des Langues, qu’il a contribué à créer : elle chapeaute
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les Cours d’été et les activités ajoutées, ainsi que différents programmes et
projets qui lui sont propres. Elle offre notamment aux étudiants des cours de
soutien en français, anglais, allemand et espagnol.
Marinette Matthey
Marinette Matthey est professeure de sociolinguistique à l’Université Stendhal
(Grenoble 3), directrice du laboratoire LIDILEM (Linguistique et didactique
des langues étrangères et maternelles). Elle a enseigné auparavant aux univer-
sités de Neuchâtel, Genève et Lausanne (Suisse) et à l’université Lyon 2. Elle
est également membre du bureau de la Délégation à la langue française (DLF)
de la Conférence intercantonale de l’Instruction publique de Suisse romande
et du Tessin. Ses travaux de recherche et son enseignement explorent diffé-
rents domaines des sciences du langage, tels que l’apprentissage des langues,
la sociolinguistique des contacts de langues, les aspects linguistiques de la
migration, les représentations sociales des langues et du langage, la transmission
intergénérationnelle des langues minoritaires. Elle s’intéresse également aux
aspects didactiques de l’enseignement du français et à l’histoire des réformes
orthographiques.
Mohamed Miled
Mohamed Miled est professeur de didactique et de pédagogie/didactique uni-
versitaires à l’université de Carthage, en Tunisie et expert en éducation auprès
de l’OIF, l’AUF et l’Unicef.
Il est concepteur et coordinateur des formations pédagogiques des nouveaux
recrutés de son université.
En Tunisie, il a dirigé successivement l’École normale supérieure, l’Institut
national des sciences de l’éducation, l’Institut supérieur des langues et un labo-
ratoire de recherche en didactique des disciplines.
174
Annexe 1 : Les auteurs
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Il est membre du Comité scientifique international du programme ELAN de
l’OIF (Ecole et langues nationales en Afrique).
Il est l’auteur de différentes publications en didactique du français langue
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ANNEXE 2
LES ORGANISMES LINGUISTIQUES
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À L’ORIGINE DU SÉMINAIRE
EN FÉDÉRATION WALLONIE-BRUXELLES
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S’approprier le français
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La collection « Français et Société »
Créée en 1991, la collection a pour objectif de faire connaitre à un large public
les synthèses de recherches scientifiques consacrées à la vie du français dans
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La collection « Guide »
Cette collection donne des informations plus ponctuelles, mais tout aussi
variées. Le premier numéro, Mettre au féminin, a vu le jour en 1994 et
était consacré à la féminisation des noms de métier. Ce guide a connu des
nouvelles éditions en 2005 et 2014. En outre la collection compte d’autres
numéros : La langue française de A à Z ; Écrire pour être lu, comment
rédiger des textes administratifs faciles à comprendre ; 100 jeux de langue
à l’école ou ailleurs ; Y a pas photo, quelques instantanés du français d’au-
jourd’hui ; La langue dans les assiettes, quelques recettes pour créer des
mots nouveaux dans l’alimentation ; Aguiche, 100 termes d’aujourd’hui ;
Le guide des gentilés, les noms des habitants en Communauté française de
Belgique ; Favoriser l’appropriation de la langue française à travers des
pratiques culturelles ; Orthographe, qui a peur de la réforme ? ; Maitrise
du français et intégration. Des idées reçues, revues et corrigées.
En plus de ces deux collections, le Service de la langue française a également
publié, avec les éditions Duculot, un important ouvrage intitulé Le français
en Belgique. Une langue, une communauté qui constitue une véritable mine
de renseignements pour l’amateur comme pour le spécialiste. Par ailleurs, une
collection de dépliants a également été mise en place, parmi laquelle figure la
plaquette intitulée 7 règles pour nous simplifier l’orthographe, rappelant les
principales rectifications orthographiques de 1990.
178
Annexe 2 : Les organismes linguistiques à l’origine du séminaire
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de leur langue qui peut être à la fois un outil d’épanouissement personnel ou
de promotion sociale et une source de plaisir et de créativité. Chaque année,
pendant une semaine qui se situe autour du 20 mars, le public est invité à
fêter le français, à travers des jeux, des concours, des émissions de radio ou
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de télévision, des expositions, des spectacles, des débats, etc. Bref, à travers
ces différentes actions destinées au grand public, il s’agit de renforcer l’image
d’une langue proche de ses usagers.
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S’approprier le français
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Site internet : http://www.languefrancaise.be
Facebook : www.facebook.com/page
Adresse postale :
Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Service de la langue française
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Annexe 2 : Les organismes linguistiques à l’origine du séminaire
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membre du Service de la langue française et sont en charge de divers dossiers
de politique linguistique, par exemple les réformes de l’orthographe, l’intégra-
tion linguistique des allophones, les nouvelles terminologies dans les domaines
spécialisés, etc.
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S’approprier le français
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EN FRANCE
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Un rôle interministériel
Directement rattachée au ministre chargé de la culture, la Délégation générale
à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) élabore la poli-
tique linguistique du Gouvernement, en liaison avec les autres départements
ministériels.
Elle oriente et coordonne les politiques publiques visant à garantir l’emploi de
la langue française, à promouvoir son usage et à assurer son enrichissement.
Elle contribue à mettre les technologies numériques au service de ces objectifs.
Elle veille à inscrire les langues de France dans les politiques culturelles : à cet
effet, elle développe leur observation, encourage leur préservation et contribue
à leur valorisation.
Enfin, elle met en œuvre les actions de l’État destinées à promouvoir le plurilin-
guisme, à conforter la place de la langue française dans les pays francophones
et à renforcer la diversité linguistique en Europe et dans le monde.
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S’approprier le français
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le wikiLF.
Par ailleurs, un site évènementiel fédère les activités conduites en France et
dans le monde dans le cadre de l’opération « Dis-moi dix mots ».
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Annexe 2 : Les organismes linguistiques à l’origine du séminaire
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notamment dans les pays du Sud, elle est l’occasion de renforcer le sentiment
d’appartenance à la communauté francophone de tous ceux qui ont le français
en partage ou qui font le choix de l’apprendre.
Depuis quelques années, ces dix mots sont adoptés d’un commun accord entre
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les partenaires francophones réunis au sein du réseau OPALE. Ils font l’objet
d’une appropriation originale qui tient compte des spécificités de chaque terri-
toire : La langue française en fête (et la Ville des mots) en Fédération Wallonie-
Bruxelles, la Francofête au Québec, la Semaine de la langue française et de
la Francophonie en Suisse romande et en France. Un Livret des dix mots est
aussi publié conjointement : outil pédagogique pour favoriser la connaissance
et le gout des mots chez les élèves, il fait appel à de nombreux écrivains de
langue française, incités à prendre appui sur ces mots pour exercer leur ima-
gination et leur talent.
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AU QUÉBEC
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S’approprier le français
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– participer, dans le cadre de la coopération internationale, aux travaux de divers
organismes internationaux.
Depuis 2000, l’Office diffuse sa terminologie gratuitement sur Internet, ce qui lui
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permet de rejoindre toutes les personnes susceptibles d’avoir besoin des informa-
tions contenues dans Le grand dictionnaire terminologique (GDT) et de contri-
buer à l’implantation de cette terminologie française dans les milieux québécois
d’enseignement, de formation et de travail ainsi que dans le commerce. Le GDT
fait l’objet de plus de 70 millions de recherches annuellement, dont une proportion
importante provenant de l’extérieur du Québec. De plus, l’Office a conçu des outils
de soutien linguistique, dont la Banque de dépannage linguistique, qui enregistre
plus d’un million de consultations annuelles, un service téléphonique de consulta-
tions tarifées, un service gratuit d’aide aux médias et des jeux linguistiques. Enfin,
son site Web donne accès à diverses autres ressources sur la langue française.
À Montréal
125, rue Sherbrooke Ouest
Montréal (Québec) H2X 1X4
Téléphone : 1 514 873-6565
Télécopieur : 1 514 873-3488
Courriel : info@oqlf.gouv.qc.ca
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Annexe 2 : Les organismes linguistiques à l’origine du séminaire
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– soutient et met en œuvre des actions concertées visant l’emploi, la qualité et
la promotion du français au Québec ;
– participe à la consolidation de la politique linguistique et à sa mise en valeur
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au Québec et à l’étranger ;
– veille à la cohérence et au suivi des actions gouvernementales dans le domaine
linguistique, et ce, en concertation avec les trois organismes créés par la
Charte de la langue française, soit l’Office québécois de la langue française,
le Conseil supérieur de la langue française et la Commission de toponymie.
Le Secrétariat est placé sous l’autorité du sous-ministre associé à la langue fran-
çaise, responsable de l’application de la politique linguistique, lequel relève du
ou de la ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles et ministre
responsable de la Charte de la langue française. L’effectif autorisé du Secrétariat
à la politique linguistique est de onze postes. En 2012-2013, le Secrétariat a
intégré progressivement ses activités à celles du ministère de l’Immigration et
des Communautés culturelles.
Les actions de coordination menées par le Secrétariat à la politique linguistique
sont, par exemple :
– la conduite des travaux relatifs aux projets de loi modifiant la Charte de la
langue française, tels que le projet de loi 14 ;
– le suivi et la mise en œuvre de la Stratégie commune d’intervention pour
Montréal 2008-2013 – Le français, notre affaire à tous, qui a été prolongée
et reconduite sous le nom de Stratégie commune pour le Grand Montréal
2013-2015 ;
– l’élaboration et la mise à jour de la politique gouvernementale relative à
l’emploi et à la qualité de la langue française dans l’Administration ;
– l’élaboration et la mise à jour de la politique d’utilisation du français dans les
technologies de l’information et des communications (PUFTIC) ;
– l’élaboration du plan d’action Réussir ensemble en français présentant
les mesures de protection, de promotion et de valorisation de la langue
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S’approprier le français
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Adresse postale :
750, boulevard Charest Est, bureau 105
Québec (Québec) G1K 3J7
Téléphone : 1 418 643-4248
Télécopieur : 1 418 646-7832
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Courriel : info@spl.gouv.qc.ca
190
Annexe 2 : Les organismes linguistiques à l’origine du séminaire
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sieurs documents administratifs, dont son rapport annuel de gestion.
Facebook : www.facebook.com/CSLF.QC
Twitter : @LangueCommune et @CSLF_QC
YouTube : CSLF1
Adresse postale :
800, place D’Youville, 13e étage
Québec (Québec) G1R 3P4
Téléphone : 1 418 643-2740
Télécopieur : 1 418 644-7654
Courriel : cslf@cslf.gouv.qc.ca
191
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EN SUISSE ROMANDE
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193
S’approprier le français
• Coordination
La DLF collabore avec les autres organismes s’occupant en Suisse, à titres
divers, de langue française et de plurilinguisme (par exemple le Service de la
Francophonie du Département fédéral des affaires étrangères, la représentation
permanente de l’Organisation internationale de la Francophonie [OIF] auprès
des Nations unies à Genève, les services culturels des ambassades des pays
francophones, l’Association des journalistes francophones, etc.).
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• Observatoire
La DLF conduit des recherches sur les pratiques et usages de la langue fran-
çaise en Suisse (romande avant tout), et diffuse les résultats de ces recherches.
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• Service linguistique
La DLF formule, à l’intention de la CIIP, des avis sur l’enseignement des langues,
en particulier du français, et sur les questions générales de politique linguistique.
Publications
La DLF n’a pas de série de publications en propre, mais elle édite tous les quatre
ans, en rotation avec ses partenaires de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de
France et du Québec, les actes du colloque réunissant les membres du réseau
OPALE. Par ailleurs, la DLF publie, sous forme de rapports ou d’ouvrages,
divers autres travaux en fonction des différents dossiers dont elle s’occupe
(réformes orthographiques, intercompréhension, etc.). La plupart de ces travaux
sont téléchargeables depuis le site de la DLF, www.dlf-suisse.ch. Enfin, les
publications des membres de la DLF figurent sur leurs pages internet person-
nelles respectives, accessibles via le site internet de la DLF.
194
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TABLE DES MATIÈRES
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SOMMAIRE 5
INTRODUCTION GÉNÉRALE 7
OUVERTURE 13
CONFÉRENCES INAUGURALES
Éloge du politiquement correct 15
Édouard DELRUELLE
La réforme de l’écriture de l’allemand : des enseignements
pour la politique linguistique francophone ? 25
Heinz BOUILLON
1. Les réformes récentes 26
2. La composition 27
3. Les points abordés 28
4. Observation 29
5. Suggestions 30
Références 31
Partie I
APPROPRIATION : DEMANDE ET EXIGENCES SOCIALES 33
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4.2. Le français dans la rue 42
1.2.1. Les enseignes publicitaires 42
1.2.1. Les NTIC 43
5. Les États généraux de Libreville 43
5.1. Les problèmes 43
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Partie II
DIDACTIQUE ET APPROPRIATION 83
196
Table des matières
8. L’exemple de la lecture-écriture 90
9. D’une langue d’enseignement à une autre 91
10. Un dispositif d’accompagnement 92
11. Conclusion 92
Références 93
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1. Des représentations handicapantes… 95
2. Conséquences de ces représentations 96
3. Réorienter l’enseignement dans la classe de français 96
3.1. Les finalités 97
3.2. Les démarches d’enseignement 97
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197
S’approprier le français
Partie III
EXPÉRIENCE D’APPROPRIATION 119
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de communication 123
3. Conclusion 125
Partie IV
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198
Table des matières
CONCLUSIONS
Pour une politisation des débats de politique linguistique 157
Philippe HAMBYE
1. L’appropriation comme fil rouge 157
2. Les raisons du manque d’appropriabilité 158
3. Qu’est-ce qui, ou qui est-ce qui, rend le français peu accessible ? 160
4. La question de la demande sociale 162
5. Assumer le conflit idéologique 163
6. Expertise et idéologie 165
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Références 166
199