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COURS DE FRANÇAIS

EXAMEN DE FRANÇAIS : LA POÉSIE


DU XX ÈME SIÈCLE

En quoi le poème La
chanson du Mal-Aimé
d'Apollinaire reflète-t-
il les ruptures du
XXème siècle ?

2021-2022

Thibault Cremers

6E Collège Saint-Louis
Sommaire

Introduction 3
La Chanson du Mal-Aimé 4
Retranscription de la poésie à analyser 4
Texte 1 5
Retranscription du texte 5
Texte 2 9
Retranscription du texte 9
Texte 3 11
Retranscription du texte 11
Bibliographie 12
Sources secondaires 12
Site internet : 12
Document PDF : 12
Syllabus de français : 12

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Introduction
Le but de ce travail est de lister et référencer trois sources concernant une poésie donnée: La Chanson du Mal-
Aimé d’Apollinaire. Celui-ci a été étudié au cours de cette année. Le but étant de répondre à la question suivante
: “En quoi ce poème reflète-t-il les ruptures du XXe siècle ?”
Pour ce faire, j'ai dû effectuer des recherches sur la poésie afin de trouver des éléments de réponses à la
question.
J'ai d’abord trouvé mon premier site: “commentairecomposé.fr”. J'ai choisi ce site car il est pertinent. Il permet
de trouver des réponses à la question du travail et il est en accord avec le thème suggéré. De plus, cette source
me permet de comprendre ce que l'auteur a voulu dire au travers de la poésie. Les informations qui y sont
contenues sont présentées de manière claire, complète, intelligible. De plus, cette source est fiable car la
créatrice du site est mentionnée. Il s'agit d’Amélie Vioux, professeure de français à domicile. Son but est
d’aider les élèves à améliorer leurs connaissances et de les aider à comprendre toutes les poésies que l’on doit
apprendre ou étudier pendant sa scolarité. Il s’agit donc d’un site sérieux.
Pour ma deuxième source, il est question d’un dossier pdf réalisé par l’Université de Liège et publié sur
internet. Le document est approprié car il est en accord avec le thème et il présente un angle d'approche
intéressant afin de répondre à la question. L’étude analyse la forme et le contenu de la poésie de manière
accessible et exhaustive. Le document est également fiable car le nom de l'auteur est mentionné : Gérald
Purnelle. Celui-ci faisait des recherches dans le domaine de la métrique, de l'histoire des formes poétiques et de
la poésie française des 19e et 20e siècles. Cet écrit présente une note en bas de page concernant une association
dédiée à Apollinaire. Le document est daté de mars 2011, ce qui apporte une preuve de fiabilité supplémentaire.
Pour ma dernière source, j’ai choisi d'utiliser mon cours de français de cette année sur Apollinaire afin de me
faire une idée de ce poète et parallèlement de pouvoir comprendre pourquoi il était en rupture avec son temps.

La Chanson du Mal-Aimé
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Retranscription de la poésie à analyser

Et je chantais cette romance


En 1903 sans savoir
Que mon amour à la semblance
Du beau Phénix s'il meurt un soir
Le matin voit sa renaissance.

Un soir de demi-brume à Londres


Un voyou qui ressemblait à
Mon amour vint à ma rencontre
Et le regard qu'il me jeta
Me fit baisser les yeux de honte

Je suivis ce mauvais garçon


Qui sifflotait mains dans les poches
Nous semblions entre les maisons
Onde ouverte de la Mer Rouge
Lui les Hébreux moi Pharaon

Oue tombent ces vagues de briques


Si tu ne fus pas bien aimée
Je suis le souverain d'Égypte
Sa soeur-épouse son armée
Si tu n'es pas l'amour unique

Au tournant d'une rue brûlant


De tous les feux de ses façades
Plaies du brouillard sanguinolent
Où se lamentaient les façades
Une femme lui ressemblant

C'était son regard d'inhumaine


La cicatrice à son cou nu
Sortit saoule d'une taverne
Au moment où je reconnus
La fausseté de l'amour même

Texte 1
Retranscription du texte
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(...) « La Chanson du Mal-Aimé » fait partie des poèmes d’Alcools relatant l’amour impossible d’Apollinaire
pour Annie Playden, gouvernante anglaise rencontrée lors d’un séjour en Allemagne.

Dans ce poème, le poète suit sa bien-aimée dans la ville de Londres, en vain. Les cinq premières strophes font
le récit de cette poursuite.

I – Un poème sur la déception amoureuse

A – Le récit d’une déception amoureuse

Le poème se présente comme un récit à la première personne sur le thème de l’amour : « Et je chantais cette
romance ».

Ainsi, dans les cinq premières strophes, les temps du récit dominent :

♦ Imparfait : « je chantais », « ressemblait » (v. 2), « sifflotait », « semblions » (v. 7-8), « se lamentaient » (v.
19), « C’était » (v. 21).

♦ Passé simple : « vint », « me jeta », « fit », « suivis » (v. 3 à 6), « fus » (v. 12), « sortit », « reconnus » (v. 23-
24).

De plus, un cadre spatio-temporel apparaît dès les premiers vers : « Un soir […] à Londres » (v. 1).

Ce récit est celui d’une déception amoureuse, ce qui est mis en évidence par la présence successive du champ
lexical de l’amour et de la blessure et de la souffrance : « mon amour », « rencontre » (v. 3), « bien aimée » (v.
12), « sœur-épouse », « l’amour unique » (v. 14-15), « l’amour » (v. 25), « brûlant » (v. 16), « plaies », «
sanguinolent », « se lamentaient » (v. 18-19), « cicatrice » (v. 22).

Le poète insiste sur la thématique amoureuse à travers la répétition du mot « amour », d’abord marqué par la
possessivité : « Mon amour » (v. 3).

Mais au fur et à mesure, la déception se lit dans la tournure négative des phrases (« Si tu ne fus pas bien aimée
», v. 12 et « Si tu n’es pas l’amour unique », v. 15) et dans le lexique péjoratif : « honte » (v. 5), « mauvais » (v.
6), « inhumaine » (v. 21), « saoule » (v. 23), « fausseté » (v. 25).

B – Deux rencontres successives et déterminantes

Dans « la chanson du mal aimé », le narrateur fait deux rencontres successives qui l’amènent à un rejet de
l’amour.

La femme aimée n’apparaît pas directement dans le poème. Elle est évoquée à travers les deux personnages que
rencontre le poète dans les rues de Londres : un voyou et une femme saoule.

Sa ressemblance avec les deux personnages est explicite : « Un voyou qui ressemblait à / Mon amour » (v. 2-3),
« Une femme lui ressemblant » (v. 20).

Le poète insiste d’ailleurs sur cette ressemblance à travers le champ lexical de la ressemblance et de l’illusion,
du paraître : « ressemblait » (v. 2), « semblions » (v. 8), « ressemblant » (v. 20). La ressemblance est donc
fortement soulignée à chaque rencontre.

Au vers 3, la femme aimée et le voyou sont presque confondus. En effet, le rejet de l’expression « Mon amour »
au début du vers 3 met en évidence la confusion du poète : le vers 3 constitue la suite du vers 2 (« Un voyou qui
ressemblait à / mon amour« ), mais peut également se lire de manière autonome (« Mon amour vint à ma
rencontre« ).

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Ainsi, le voyou et la femme aimée se confondent.

Cette ressemblance entre la femme aimée et deux personnages déplaisants déprécie la femme aimée.

Cette dégradation est à la fois physique et morale : « voyou » (v. 2), « mauvais garçon », « sifflotait mains dans
les poches » (v. 6-7), « regard d’inhumaine », « cicatrice à son cou nu », « saoule » (v. 21 à 23). Ces
caractéristiques connotent en effet la débauche.

Transition : Au fil de ce récit linéaire, le poète rejette progressivement la femme aimée et l’amour.

II – La mise à distance progressive du poète et de ses sentiments A – Projection des sentiments du poète sur le
décor

Au vers 25, l’amour du poète passe du particulier au général :

« mon amour » (v. 3), « l’amour unique » (v. 15) => « l’amour même ».

Apollinaire met alors à distance ses sentiments, qu’il projette sur le décor.

En effet, à la cinquième strophe, le paysage urbain personnifié s’anime : « une rue/Brûlant de tous les feux de
ses façades/Plaies du brouillard sanguinolent/Où se lamentaient les façades » (v. 16 à 19).

Si le poète ne s’épanche pas sur sa déception amoureuse, le décor souffre et se plaint à sa place à travers un
langage hyperbolique : « Brûlant de tous les feux », « sanguinolent ».

B – Un récit de plus en plus flou et imprécis

Dans « La chanson du mal-aimé », les personnages principaux ne sont pas nommés directement.

Le poète-narrateur n’est nommé que dans le titre à travers le néologisme « mal-aimé » et dans le poème par la
première personne : « je » (v. 6, 13, 24), « moi» (v. 10).

La femme n’est désignée qu’à travers des pronoms : « tu » (v. 12) dans le monologue intérieur du poète, ou à la
troisième personne à travers d’autres personnages ( « Une femme lui ressemblant » (v. 20)). Elle se situe ainsi
entre présence et absence.

Si le cadre spatio-temporel offre quelques précisions, l‘indétermination est amorcée à la seconde strophe à
travers l’emploi des articles indéfinis : « Un soir », « Un voyou » (v. 1-2), « une rue » (v. 16), « Une femme »
(v. 20).

De plus, le paysage devient de plus en plus flou : on passe de la « demi-brume » (v. 1) au « brouillard » (v. 18),
de la réalité au rêve.

C – Du réel au rêve

Progressivement, le récit bascule dans un univers onirique, voire surréaliste.

En effet, la métaphore biblique nous entraîne hors de l’espace-temps : « Nous semblions entre les
maisons/Onde ouverte de la Mer Rouge/Lui les Hébreux moi Pharaon » (v. 9-10), tout en soulignant le
caractère vain de cette poursuite.

En outre, le narrateur énumère à la quatrième strophe une série d’impossibilités qui indiquent bien le
basculement du côté du rêve : « Que tombent ces vagues de briques/Si tu ne fus pas bien aimée/Je suis le

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souverain d’Égypte/Sa sœur-épouse son armée/Si tu n’es pas l’amour unique » (v. 11 à 15). Ces affirmations
mettent en jeu des impossibilités d’époque et de rang social, de sexe et de nombre.

Par exemple, dans l’oxymore « vagues de briques » (v. 12), l’élément solide se transforme en élément liquide et
inversement, nous plongeant dans un univers onirique1.

De plus, comme dans le rêve, les images s’enchaînent avec fluidité, comme le souligne les nombreux
enjambements entre les vers (v. 2 à 3 et 3 à 4, 6 à 7, 16 à 17).

Enfin le décor, bien qu’ancré dans le réel, s’anime, ce qui n’est possible que dans les mondes du rêve et de la
poésie.

Transition : A travers ce récit d’une romance qui vire au cauchemar, le poète renouvelle le lyrisme poétique.

III – Un poème entre tradition et modernité : un renouveau poétique A – Thème et images : l’amour revisité

Dans la dédicace à Paul Léautaud, Apollinaire annonce le thème principal de sa chanson, l’amour : « Et je
chantais cette romance ».

L’amour est un thème poétique traditionnel, mais Apollinaire va ici le renouveler et le moderniser.

En effet, même si les registres lyrique et élégiaque2 sont présents, l’expression des sentiments est ici projetée
sur le paysage.

Par ailleurs, ce poème ne fait pas l’éloge de la femme aimée, comme dans la poésie lyrique traditionnelle. Au
contraire, le poète prend conscience de l’aspect illusoire et dégradant de l’amour : « Au moment où je
reconnus/La fausseté de l’amour même » (v. 24-25).

Encore plus surprenant, il a recours à des figures de voyous et de prostituées, personnages rares dans la poésie
lyrique.

B – Forme et structure : liberté poétique et esthétique cubiste

Apollinaire renouvelle également la forme et la structure de la poésie lyrique traditionnelle.

Il mêle tradition et modernité en employant l’octosyllabe, vers régulier et le plus ancien vers français, tout en le
libérant des contraintes de la rime et de la ponctuation.

Ainsi l’absence de ponctuation accélère le rythme et peut créer des ambiguïtés au niveau du sens.

Aux vers 2-3 par exemple, le rejet et l’absence de virgule reproduisent la méprise du poète, qui croit reconnaître
son aimée dans les traits du voyou.

Quant aux rimes, elles sont plutôt approximatives et basées sur un système d’assonances et d’allitérations : «
Londres »/ « rencontre »/« honte » (v. 1 à 5), « briques »/ « Égypte »/ « unique » (v. 11 à 15), « inhumaine »/ «
taverne »/ « même » (v. 21 à 25).

Par ailleurs, la structure du poème est marquée par la juxtaposition des discours, des tons, des points de vue, des
univers et des sentiments.

Ainsi le poète affirme son amour (« Si tu n’es pas l’amour unique », v. 15) puis le rejette (« Au moment où je
reconnus/la fausseté de l’amour même », v. 24-25).
1 Relatif aux rêves.
2 Qui exprime la mélancolie, qui a la tristesse de l'élégie

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Il s’adresse directement à la femme aimée puis l’évoque à la troisième personne (« tu », v. 12 et 15/ « lui », v.
20).

Le rêve et l’imaginaire (« Je suis le souverain d’Égypte », v. 13) se juxtaposent à la réalité (« Nous semblions
entre les maisons/Onde ouverte de la Mer Rouge/Lui les Hébreux moi Pharaon », v. 8-10).

Cette juxtaposition se rapproche de l’esthétique cubiste qui apparaît au début du siècle.

« La Chanson du Mal-Aimé », v. 1 à 25, conclusion :

Les vingt-cinq premiers vers de « La Chanson du Mal-Aimé » sont caractéristiques de l’ensemble du poème,
basé sur un savant mélange entre tradition et modernité.

Fidèle à la symbolique du Phénix évoquée dans la dédicace à Paul Léautaud introduisant le poème, Apollinaire
montre que l’un des rôles du poète est de renouveler la tradition poétique, la poésie renaissant constamment de
ses cendres à l’image de l’animal légendaire.

Le poète reprend ici des thèmes et registres traditionnels de la poésie qu’il modernise à travers une liberté du
vers et de la forme et selon l’esthétique cubiste que l’on retrouve par exemple dans « Zone« , poème liminaire3
du recueil.

Texte 2
Retranscription du texte
Le 1er mai 1909, à peine dix ans après son séjour dans la ville de Stavelot (été 1899), Guillaume Apollinaire
fait paraître dans le prestigieux Mercure de France un long poème de trois cents vers, La Chanson du malaimé,
qui sera repris dans son premier recueil Alcools en 1913. Celui qui n'avait encore que vingt-neuf ans livrait là
l'un de ses plus beaux textes, un « triste et mélodieux délire » évoquant sur le ton du regret son amour
malheureux pour l'anglaise Annie Playden, avec un art qui fait la transition entre la poésie ancienne et celle qui
s'annonce, et qui place ce long poème au seuil d'une modernité que le poète a grandement contribué à instaurer.

3 Placé en tête d'un ouvrage, d'un discours.

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En 1901, celui qui ne signe pas encore Apollinaire saisit l'opportunité d'un emploi de précepteur. Une riche
Allemande de la région de Cologne, Mme de Milhau née Hölterhoff, l'engage comme précepteur français de sa
fille Gabrielle, qui a neuf ans. La « famille » compte aussi une jeune gouvernante anglaise, Annie Playden. À
partir d'août 1901, Mme de Milhau, sa fille et ses employés vont séjourner pendant plusieurs mois dans la
région du Rhin. Guillaume voyage en Allemagne, en découvre les grandes villes, en nourrit ses yeux, ses
souvenirs et son imaginaire. C'est aussi à cette époque que son écriture poétique s'affermit et se fixe une
première manière, qu'illustreront les poèmes du cycle rhénan, partiellement repris dans Alcools en 1913. La
jeune Anglaise plaît à Guillaume, il s'éprend d'elle, la courtise, l'effarouche, l'amadoue, la fléchit, mais la
séduira-t-il jamais complètement ? Au terme du voyage, après l'excursion solitaire de Guillaume, elle prend ses
distances, le blesse sans doute ; la cohabitation devient difficile : Guillaume rentre à Paris en août 1902,
meurtri. Ce jeune homme exalté, amoureux de la femme, avide d'amour, blessé, devient en quelques jours le
mal-aimé qu'il se sent être, qu'il se complaît à être. Il se fait souffrir deux ans encore : en novembre 1903, après
des échanges épistolaires, il se rend à Londres pour retrouver Annie et tenter de renouer leur relation : d'abord
froide, elle finit par ne pas refuser l'idée d'un nouveau rapprochement, mais la famille s'oppose. Après un
second voyage en Angleterre en mai 1904, il apprend en 1905 le départ définitif d'Annie pour les États-Unis.
De cette expérience et de cette douleur longtemps inextinguible, sont sortis plusieurs poèmes dont bien sûr La
Chanson du mal-aimé(…) Lorsqu'il paraît en 1909, le poème se signale par une « qualité » assez neuve dans
l'histoire de la poésie, l'apport majeur d'Apollinaire à la modernité naissante du moment : sa construction et son
écriture reposent sur une esthétique de la non-perfection, c'est-à-dire, plus précisément, un refus conscient de la
quête d'une perfection qui jusque-là constituait un idéal quasi obligé de toute poésie ambitieuse. La non-
perfection, ce n'est pas la maladresse, la platitude, l'incohérence, la facilité, la cheville, la lourdeur, le mauvais
goût, mais tout ce qui relève de la variation de ton, de la liberté, de l'écart, de la surprise, voire de la rupture, du
choc du prosaïque et du lyrique, et même de l'inachèvement, un usage du déséquilibre, du décalage. Tout ce qui
laisse percer l'homme sous le poète, l'artisan en acte sous le texte. Ce par quoi un langage bouge à l'intérieur
d'un texte, non une langue unique et identique à celle des autres poèmes, mais une langue qui en de multiples
variétés lutte avec elle-même. À cet égard, les ascendants d'Apollinaire se trouvent du côté de Musset et de
Baudelaire, de Verlaine, de Rimbaud et de Laforgue, de Francis Jammes. Et certes, par plusieurs poèmes
d'Alcools et par plusieurs aspects de la Chanson, Apollinaire a encore un pied dans le 19e siècle. Mais par son
art de la non-perfection assumée, il inaugure pleinement son siècle, celui du poème libre et ouvert, qui projette
une voix en avant, comme chez Valery Larbaud ou Blaise Cendrars. Ce long poème n'a pas été écrit d'une
traite : son élaboration a pris plusieurs années, dès 1904 après une ébauche en 1903, et jusqu'en 1908 au moins :
sa structure complexe et discontinue le montre bien. Apollinaire n'a pas voulu composer une suite linéaire et
logiquement déroulée. La Chanson est bien plutôt constituée d'une longue composition mouvante, où
s'amalgament tour à tour des pièces et des vers littéralement cousus ensembles. Michel Décaudin parlait d'« un
travail de juxtaposition », d'« une marqueterie de pièces et d'ensembles ». C'est en fait une rhapsodie, tant au
sens poétique que musical. En grec, rhapsodie désigne un poème cousu, un récit que composaient et récitaient
les aèdes en assemblant des morceaux d'épopées. En musique, c'est un poème symphonique qui développe et
alterne plusieurs motifs(…) Le poème paraît commencer comme un récit : le locuteur croise à Londres deux
personnages, un homme et une femme, qui lui rappellent la femme aimée, et par glissement, sa blessure, « la
fausseté de l'amour même ». La double rencontre installe dès l'orée du poème l'atmosphère d'intensité et de
désarroi dans laquelle baignera le locuteur jusqu'au bout, son trouble et son obsession. Mais à partir de ce point,
le locuteur ne se raconte plus, il se décrit. Il se décrit aimant, pensant, regrettant, souffrant, se récusant, se
résignant, se révoltant. Ce n'est donc plus un récit, mais une action purement mentale dont le processus est
mimé par le poème dans le temps même de sa lecture. La Chanson est un monologue polyphonique, adressé à
soi même, mais aussi au lecteur, de deux manières au moins. Tout d'abord, le discours se transforme à trois
reprises en ce qui est presque un théâtre, à l'occasion des trois fameux poèmes enchâssés. Apollinaire se
transforme en un bateleur qui, sautant sur les tréteaux, s'adresse à nous, non plus lecteurs mais spectateurs, pour
réciter le charmant poème de l'« Aubade chantée à Laetare un an passé », puis mettre en scène les cosaques
Zaporogues, et enfin faire défiler les « Sept épées » en un poème totalement hermétique. Mais il y a surtout un
vers placé à une des charnières du texte, juste avant le poème des sept épées : Sept épées de mélancolie Sans
morfil ô claires douleurs Sont dans mon cœur et la folie Veut raisonner pour mon malheur Comment voulez-
vous que j'oublie Subitement et brièvement, le poème quitte le mode du monologue entrecoupé de récits, pour

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esquisser un dialogue, ou du moins une interlocution vite avortée(…) Le cheminement mental mimé par le
poème est particulièrement sinueux, oscillant entre le mal de l'obsession et le désir de lucidité(...) Les registres
multiples sont les indices de la présence de l'auteur et de sa personnalité, et pour le lecteur une source d'effets
multiples. Le premier plaisir du texte est donc celui du poète. Mais ces stratégies rhétoriques de mélange de
tons sont aussi le lieu d'un double dialogue ou d'une double relation. D'abord relation du poète avec lui-même,
qui construit tout un long poème pour mettre en scène sa propre expérience émotionnelle (regret, souffrance,
peine et colère) mais qui ne peut le faire directement, qui ne peux s'autoriser à dire les choses telles qu'elles sont
sans tenter de compenser sa sincérité par de l'excès(...) Le mélange des tons, simplicité, grandiloquence,
humour, obscénité, préciosité, noue également une relation du poète au lecteur : c'est assurément pour le poète
le moyen d'éviter le solipsisme d'un pur épanchement clos sur lui-même, c'est une manière d'impliquer le
lecteur presque contre son gré dans un processus complexe, difficile pour le poète : se dire. Il y parvient en
l'interpellant, le choquant, l'intriguant, l'irritant peut-être, le séduisant souvent. Le poète de la modernité qu'était
Apollinaire, le promoteur des nouveautés cubistes en peinture, celui qui fut l'un des inventeurs du vers libre
moderniste, ce poète était aussi et avant tout un mélancolique. Chanter la chanson Tout dans la Chanson du
mal-aimé l'indique - son titre, son oralité, sa musicalité, sa richesse de tons et de registres - : ce poème est aussi
fait pour être dit et chanté.

Texte 3
Retranscription du texte

Guillaume Apollinaire : 1880-1918

Il a inventé la forme de texte → le calligramme.

Il a écrit beaucoup de poésies d’amour.

Il a été marqué par la guerre

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Il est moderne : parle des moyens de transport, insiste sur la vitesse,...

Il est toujours en lien avec l'actualité.

Bibliographie
Sources secondaires
Site internet :
- VIOUX, Amélie, “La Chanson du Mal-Aimé d'Apollinaire : commentaire” sur
https://commentairecompose.fr/la-chanson-du-mal-aime/, date non défnie (date de consultation : 27
novembre 2021)

Document PDF :

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- PURNELLE, Gérald, “La Chanson du mal-aimé d'Apollinaire” sur
https://orbi.uliege.be/bitstream/2268/89492/1/La_Chanson_du_mal-aim%C3%A9_d
%27Apollinaire.pdf, Mars 2011 (date de consultation : 27 novembre 2021)

Syllabus de français :

- VOLL, Françoise, “Paroles de poètes du début du XXème siècle. Quelles significations donner à la
“modernité” ?”, 2021, Liège, Belgique

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