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Dans les pièces et les couloirs d’un château exagérément luxueux, la vielle Razaël, d’une marche

rapide, se faisait escorter par deux jeunes hommes, vêtus de soutanes noires avec leurs têtes
absorbées dans des foulards qui prenaient la limite de leurs fronts jusqu’à pendre de la nuque au
dos. Elle-même avec sa soutane sur mesure au col roulé jaune, parsemé de dentelles avait le visage
serein. Ce beau visage brun qui nuançait avec la blancheur de ces beaux cheveux crépus.

L’escorte prit fin au devant d’une grande porte incrustée d’or et de pierres précieuses. Les deux
escortes lui proposa d’entrer, ce qu’elle fit dans l’immédiat.

La salle était grande. Un damier rouge blanc servait de plancher. De part et d’autres, des
bibliothèques, des statuettes monstrueuses qui semblaient coûter les yeux de la tête, deux fenêtres
grandement ouvertes, et un balcon dont la porte était entré ces deux grandes fenêtres . Trois
fauteuils en or disposés en arc de cercle étaient occupés par deux vielles personnes qui faisaient
paraître Razaël 100 fois plus jeune. Ces vieux, dont deux vieilles et un vieux au milieu, avaient tous
de très long dreadlocks blancs qui tombaient en cascade sur le dos. Ils étaient tous vêtus en soutane
blanche.

Un fauteuil en face de celui du vieux était encore vide, jusqu’à ce le vieux fit signe à Razaël de
prendre place.

- Le moment est venu pour notre confrérie d’accueillir l’élu. Exprima le vieux.
- Quoi déjà ? Mais je croyais que… S’étonna Razaël.
- Oui on le croyait tous et nous nous sommes tous trompés, le Véridique choisit qui il veut,
quand il veut et comme il veut. Répondit la vielle à gauche.
- C’est pourquoi nous t’avons convoqué ici. C’est toi et ton département qui se chargeront de
l’accueillir. Tu te chargeras aussi de l’initiation
- Razaël. La vieille de gauche prit la parole. Nous t’avons choisi, et tu dois comprendre que ce
n’est pas par hasard, c’est une mission que tu dois prendre à cœur. Au lieu de te sentir
indigne d’elle, accepte la avec fierté et amour.
- Merci ma reine, c’est avec amour et fierté que je l’agrée.
- Tiens. Voici le fruit de la conscience qui le réveillera de son sommeil
Le vieux lui tendit une mangue Alphonse qu’elle prit.
- Mais comment vais-je le reconnaître ?
- C’est lui qui te reconnaitras, car le destin de celui qui recherche la vérité, conspirera toujours
à le ramener vers la vérité. Répondit la vielle de droite.
- Bien ! je pense que tout est à son compte nous te quittons maintenant Muriel. Dis le vieux

Soudain le vieux et la vielle de droite disparurent d’un éclat blanchâtre.


- Viens Razaël. Dit Muriel ( la vielle de gauche ). Elles marchèrent ensemble jusqu’au balcon. Le
vent soufflait fort sur leurs cheveux. Le temps était très ténébreux malgré toute la lumière
sur le balcon.
- Razaël. Il y a une chose très importante dont je dois t’informer. Ce soir, j’ai fait un songe dans
lequel l’élu avait semé une véritable fratricide au sein de notre confrérie.
- Sauf votre respect ma reine, je doute que cela soit possible. C’est quand-même l’élu ! il ne
peut pas tomber aussi bas…Ou peut-être que le rêve n’est pas à interpréter de façon littéral.
- Et si c’était le cas ?
- Ma reine cela laisse t’il entendre que je ne parviendrai pas à guider l’élu comme il le faut ? Et
si ça sera ainsi, pourquoi m’aviez-vous quand-même tâcher de le faire ?
- Jusqu’à ce que je te le dise, j’étais la seule informée de ce rêve maintenant nous sommes
deux. Et malgré ce rêve si j’avais le choix entre toi et cent autres personnes pour initier l’élu,
je te choisirai encore et encore.
- Ça me touche beaucoup ma reine. Mais, vous m’avez appris que mes sentiments ne doivent
pas primer sur mes devoirs et la stabilité de la confrérie. En me choisissant malgré la
prévention de votre songe, ne tombez vous pas dans vos sentiments ?
- Peut-être, peut-être pas. Toutefois, rappelle toi que je sais ce que tu ne sais pas.
- Je vous l’accorde ma reine…
Puis ce fut un moment de silence.
- Ma reine peu importe ce qui se passera je ne laisserai jamais l’élu mettre fin à cette
confrérie, même s’il faudra lui délivrer de la vie, je le ferai.
- Hmmm Razaël c’est justement ce dont je voulais te parler. L’élu seul détient la vraie vérité. Il
faut que tu l’aides à ramener sa réalité et à la défendre jusqu’au bout, même si elle peut
apporter atteinte à notre vie.
- Vous voulez dire que je dois le…
- Oui et cela jusqu’au bout
- D’accord ma reine
- Razaël je sais que je peux compter sur toi.
- Merci ma reine.

Comme de coutume, la femme nue aux cheveux tombant en cascade et au visage voilé d’un masque
érotique, poussa la porte de la chambre. Zekele assis sur son lit accueillait ses hanches, caressant par
la même occasion ses fesses. Il la fit asseoir sur son entrejambe et se coucha, abandonnant ses mains
sur la poitrine juteuse de la demoiselle. Cette dernière s’adonnait à des mouvements périodiques qui
balançaient ses fesses de haut en bas, de gauche à droite, en avant puis en arrière, avec une vitesse
tantôt décelée tantôt accélérée. Le lit craquait et dansait au rythme de leurs mouvements, et
l’excitation montait quand soudain la tête de zekele réceptionna un bouquin en plein visage. Il sortit
tout de suite de son songe le calssife soigneusement trompé de sperme. Zekele avait encore fait ce
songe, qui témoignaient peut-être un manque dans sa vie, selon la psychologie, ou au contraire la
présence d’un esprit succube selon les religieux.

Munie d’une brosse et d’un gobelet, zekele se remplissait les dents d’une mousse blanche de pâte
dentifrice qu’il crachait à même le sol dans la cour commune de la parcelle où il vivait. Il finit ensuite
à la douche, une sorte de pavé droit en tôle rouillée, dressée verticalement.

Les maisons dans le quartier Mpita sont difficiles à décrire dans l’ensemble. Car à côté de certaines
villas belles et luxueuses cohabitent parfois des maisons modestes et crasseuses. Si dans une zone de
ce quartier, on peut avoir l’impression d’être dans un quartier résidentiel dans une autre zone on
aura l’impression d’être dans un bidonville.

Celle dans laquelle vivait Zekele avait l’allure d’un bidonville. Les eaux sales, vertes et boueuses
avoisinaient les devantures des parcelles qui souvent étaient sans clôture ou encore barricadées par
des tôles dévorées par la rouille. Zekele vivait dans une cour commune de trois habitants. La parcelle
était par chance clôturée, même s’il manquait encore une douche raisonnable et des toilettes dignes
d’en être.
C’est dans une chemise bleue que son corps fondait en sueur quand la chaleur montait dans le bus,
qu’il emprunta pour le centre ville. Comme dans tous les transports en commun, les gens en sont
entassés et s’étouffent de leurs propres chaleurs et celle du fort soleil d’Afrique. Quand le bus
embarqua assez de gens ( assez c’est au-delà de la limite normale que devrait contenir le bus), il
démarra, faisant ainsi entrer un peu d’air qui desséchait les sueurs.

<< Frères je vous le dit en vérité, Jésus arrive bientôt. Repentez-vous car l’enlèvement est là. Il arrive.
Ceux qui sont encore dans le péché seront surpris…>>

Ces prêches, on les entendait à tout bout de rue. Même dans les transports en commun. Celui qui
prêchait était un homme maigre à la calvitie partant du front à la nuque. Il transpirait à grosse goutte
sous l’effet de la chaleur et des mouvements auxquels, il bondissait sa grosse Bible dans tous les
sens. Sa bouche était devenue blanche par manque de salive, toute dépensée dans son brouhaha
interminable.

<< Ce monde n’est que perversion. Satan, le diable, est au contrôle de tout. Si vous ne donnez pas
vos vies à Christ comment vous en sortirez vous !? Donne ta vie à Jésus Christ et tes problèmes
finiront. Jésus portera ton fardeau, car il a dit venez à moi vous qui êtes fatigués et chargés et je vous
donnerai le repos.

Toi qui cherche le travail, viens à Jésus !

Toi qui cherche le mariage, viens à Jésus !

Toi qui cherche des enfants, viens à Jésus !

Toi qui cherche la guérison, viens à Jésus !>>

Face à tout ce vacarme pénible à supporter. Les réactions étaient diversifiées. Certains comme zekele
n’avait qu’une seule envie, clouer le bec à cet oiseau de malheur qui pourtant zigouillait la dite bonne
nouvelle. Mais comme ils n'étaient qu’une minorité, le silence valait mieux que les plaintes. D’autres
qui vraisemblablement faisait partie de la majorité encourageaient le prêcheur à dire ce qu’ils
voulaient entendre, non pas sur l’apocalypse et l’arrivée du Christ mais sur les promesses de bonnes
fortunes. Même s'il se trouvait aussi dans cette majorité des gens qui étaient agacés mais qui
n’osaient pas se plaindre car jugeant le message trop divin pour être interrompu.

Zekele passa toute la matinée devant un ordinateur, à saisir des documents. Agaçant était son travail
de www. Il ne se sentait pas au bon endroit. La routine de son travail l’ennuyait infiniment. Il sacrifiait
son temps, son mental, son physique pour un travail qui ne le rapportait qu’assez pour payer le loyer,
se vêtir pour aller au travail, payer le transport pour aller travail, et le reste le servait insuffisamment
pour se nourrir et pour son argent de poche. Malgré cela, il faisait miraculeusement de maigres
économies mais n’était pas pour autant épargné de dettes. Écoutant ses plaintes, un bourgeois qui
ignore tout de la réalité des sociétés congolaises l’aurait tout de suite conseillé de quitter cette
entreprise, mais en réalité il est plus facile de perdre un job que d’en trouver au Congo. De plus,
stage, entretien d’embauche, recrutement… Tout ce jargon avait lassé Zekele dans ses périodes de
chômage. Ses mots le donnaient la nausée. Passer ses journées à quémander ici et là-bas à de
prétentieux gens qui croient que c’est l’entrée au paradis qu’on leur sollicite, était une mauvaise
expérience qu’il ne voulait plus vivre. En même temps, il ne voulait plus être l’esclave de ces
bourreaux appelés patrons qui décident de comment il doit s’habiller, comment il doit penser,
comment il doit agir, comment il doit se comporter. Ça l’agaçait de passer son temps à faire bonne
impression à des gens qui s’enrichissaient davantage et lui donnaient des miettes comme grignote
jusqu’à ce que retraite le surprenne.
Zekele rêvait d’être un jour son propre patron. Il rêvait d’un travail libéral. Il avait participé plus d’une
fois à des conférences d’entreprenariat. Il en avait eu des cours, mais jusqu’à lors rien de concret
dans sa vie. D’ailleurs, parlant de ces profs d’entreprenariat, ils étaient eux même pauvres à se jeter
à la poubelle. Entre leurs discours et leurs actes, le fossé était considérable. Ça leur arrivait de porter
des vestes de marques pour camoufler leur misère qui habituellement saute aux yeux. Mais derrière
l’illusion de leur élégance, leur intelligence et leur jargon d’entreprenariat se cachaient une terrible
famine qui les dévoraient, eux ainsi que leurs vies.

Zekele se pencha sur son fauteuil, retirant les doigts du clavier. Il était épuisé. Il expira et jeta les yeux
vers le plafond. L’air frais du climatiseur le fit oublié la chaleur qui l’attendait à l’extérieur. Cependant
il ne parvenait pas à oublier les misères de sa vie. D’ailleurs il s’en rappelait mieux que les moments
de bonheur. Il aurait parfois voulu connaître en vrai des personnes qui ont dans leur vie rêvé et
réaliser leur rêve, mais lui il n’en connaissait pas. S’il en avait connu au moins un, peut-être que cela
aurait accru ces chances de réussite. Dans son enfance, il avait lu beaucoup de ce genre d’histoire où
le héro réalisait son rêve. Le genre d’histoire qui se termine par  « Ils vécurent heureux jusqu’à la fin
des temps ». Ces histoires lui rendit très imaginatif et très rêveur dans son enfance. Il avait la tête
dans les nuages. Mais en grandissant, les grandes personnes avaient fini par lui contaminer leur
incrédulité, en lui faisant croire que les rêves n’appartenaient qu’au monde des « tous petits ».
Devenant adulte, il lui fallait donc penser comme un adulte, réfléchir comme un adulte, croire
comme un adulte. Les adultes imaginent mais pas beaucoup, les adultes pensent mais pas beaucoup,
les adultes croient mais pas beaucoup, c’est pourquoi il ne réalise pas beaucoup de ce qu’ils
promettent, pensa t’il.

Zekele avait l’impression que quatre murs l’entouraient et constituait sa vie. Il haïssait cette pièce qui
l’emprisonnait et le soumettait à ses lois. Il rêvait de s’évader, de parcourir le dehors et de se lancer
dans l’inconnu. Mais il se sentait enchaîné à des masses qui constituaient son fardeau pour son
évasion.

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