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I. L’auteure
- La Place 1983
• Née dans un milieu social modeste, de parents d’abord ouvriers, puis petits commerçants qui
possédaient un café épicerie
• Maintenant à la retraite, elle vit à Cergy en région parisienne où elle ne cesse d’écrire.
• Annie Ernaux est une femme déroutante, militante, défenseure de la lutte des classes, ère de
ses origines modestes, féministe
• Annie Ernaux s’est vu décerner trois prix littéraires pour ce récit paru en 2008 (prix Marguerite
Duras, prix François Mauriac, prix de la langue française).
II. Resume :
• Autobiographie impersonnelle
• Le roman oscille entre des descriptions de photos décrivant l'autrice, prises entre 1941 et
2006, et une peinture de l'époque à laquelle ces photos ont été prises à travers les souvenirs
qui se sont gravés dans l'esprit de l'autrice, choisis pour leur pertinence sociologique. Le
roman brasse 60 ans d'histoire commune avec le récit de l'existence unique de l'autrice, mais
l'autrice met à distance celle qu'elle fut par l'usage de la troisième personne. Son histoire est
personnelle, impersonnelle et collective. A. Ernaux renouvelle le genre de l’autobiographie.
• Les années sont une sorte de « recherche du temps perdu » dans laquelle l'auteure enquête sur
la réalité grâce à des dates, des réminiscences, des événements, des phénomènes de société,
des chansons, des notes de son journal, des photos
• Sur le fond ensuite : l'auteure nous propose tout autant une ré exion sur le temps qui passe et
l'évolution de la société des années 1940 au début du 21ème siècle qu'une véritable
biographie. Quand on tourne la dernière page, on a le sentiment d'en savoir plus sur
l'environnement familial, social et sociétal dans lequel elle a vécu que sur Annie Ernaux elle-
même, un peu comme si elle se caractérisait plus au travers de ses interactions avec les autres
que par elle-même...
• Le résultat est étonnant et intéressant, tant sur la forme que sur le regard porté sur la seconde
moitié du 20ème siècle et le début de 21ème, même si on en apprend nalement assez peu sur
ce qu'a fait l'auteure au cours de ces années.
• Elle montre à travers les souvenirs collectifs et les images de sa mémoire personnelle les
immenses changements apparus dans les dernières cinquante années, au niveau des objets,
des techniques (on pense ici aux transports, aux modes de communication etc.), des
mentalités (règles qui organisent la vie collective, la morale sexuelle), de la perception du temps
etc.
• Il s’agit des années d’une femme, Annie Ernaux, mais aussi des années de toute une
génération (née pendant et juste après la seconde guerre mondiale) – essaie de faire ressentir
le passage du temps dans une femme individuelle mais ce à travers toutes les personnes qui
ont traversé ces années (à la fois banal et universel – vie intérieure et vie extérieure)
• Mai-68 qu’«on» vit un peu par procuration parce qu’on ne saisit pas forcément l’importance
historique pendant les événements, mais une porte qui s’ouvre sur une libéralisation et qui se
referme rapidement,
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• Mai 81 qui évoque Mai-68 mais qui n’évite pas la déception, l’omniprésence de la société de
consommation, un sentiment de ravage et de dégât causé par les nouvelles habitudes: Internet
=>néocapitalisme des années 80
IV. Themes
• Les Années font gure de mémoire collective des Français de la Seconde Guerre mondiale
jusqu’au XXIe siècle.
- La vie après la guerre : discussions du dimanche midi autour du repas dominical : après-
guerre, les anciens parlent de leurs souvenirs.
- Au cours des années 60-70, les échanges autour des bienfaits du progrès et de la
consommation prennent le relais.
- En ce début de XXIe siècle, la jeunesse désabusée parle société, faits divers, politique (sujet
anciennement prohibé à table ; autre temps, autres meurs).
• Annie Ernaux relate également les vagues d’optimisme, d’engouement ou, au contraire, de
peur et de tristesse qui s’emparent de la société française tout au long de ces soixante années.
V. 12 images
• «Les Années», ce sont de multiples thèmes abordés à travers le temps qui passe, un temps qui
relie celui de l’immédiate après-guerre à la veille de l’élection présidentielle de Nicolas Sarkozy.
Entre les deux, 12 images (qu’on ne verra pas) mais qui seront les marqueurs d’une époque –
d'Annie Ernaux bébé, à Annie Ernaux en «femme mûre» en passant par la jeune lle studieuse,
l’étudiante, l’épouse, la mère de famille, la professeure, l’amante et – bien que ne parlant pas
de ses propres livres – «l’écrivain».
VI. Ecriture
• Pas à la 1e personne
- Les tranches de vie dans le livre tjrs restituées dans un contexte global
- elle évoque un style « objectif, qui ne valorise ni ne dévalorise les faits racontés », cherchant
ainsi à « rester dans la ligne des faits historiques, du document ».
- Elle emploie de nombreuses épithètes, de verbes à l’in nitif, une succession voulue
d’objets, d’activités, qui coulent à l’instar des années.
- Son style littéraire est complexe : phrases longues, alternant des listes d’évènements
collectifs et des souvenirs personnels, ponctuation inexistante qui accélère le rythme de la
lecture.
- Elle caractérise notre époque actuelle par un jeu d'accélération du temps et de précipitation.
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- Le temps de la narration est essentiellement l'imparfait puis le présent de l’indicatif jusqu'au
futur qui ouvre le récit
VII. La forme
• Une autobiographie rythmée par des photos ou des extraits de lm, prétextes à analyser
l'évolution physique de l'auteurs et l'impact personnel et sociétal du vieillissement.
• Au début du roman le personnage/narrateur est très di us, di cile voire impossible à saisir
Néanmoins au l des pages le personnage nit par s’imposer et révéler au lecteur son objectif.
La llette oue de la photo, balbutiante et somme toute encore assez indi érente à son
époque, devient une jeune femme puis une femme d’âge mûr qui ressent le temps et
s’interroge sur l’histoire, la sienne et celle de ses contemporains
• Annie Ernaux a choisi de clore son récit sur un dernier «repas de famille», un rite qui berce
toutes les années, depuis la toute petite enfance où l’on évoque ceux qui ont disparu pendant
la guerre, jusqu’à sa vie de grand-mère qui réunit quand même tout le monde à Noël en
sacri ant au rite commercial qu’elle déteste désormais. Mais peut-être les rites sont-ils plus
forts que tout, assurant le passage d’une génération à l’autre, permettant à des enfants et
bientôt à des petits-enfants de poursuivre le récit entrepris.
• Les retours en arrière au rythme des années sont perçus comme une « série d’Abymes » et
plongent le lecteur dans le vertige du temps, à la fois celui de la France, d’une génération, et
d’un individu.
• In uence Proustienne :
- Comme Proust : mémoire dans les Années permet de reconstruire le souvenir, de retrouver
le temps et de le xer grâce à l’ecriture ( comme A la recherche du temps perdu de Proust)
- vocation littéraire (narrateur qui à la n prend conscience de son objectif et qui se met à
écrire)
- Ernaux conclut son « roman » par une phrase digne de Proust « Sauver quelque chose du
temps où on se sera plus jamais ». La n fait écho au début du livre, apportant la solution au
problème posé « Toutes les images disparaîtront » (même emploi du futur, atypique sachant
que presque tout le roman se joue à l’imparfait)
• Simone de Beauvoir :
- L’une a beaucoup philosophé, écrit, analysé. L’autre a d’abord vécu, puis tiré des
conclusions.
- Mais toutes deux défendent les valeurs de liberté et de libre-arbitre dont les femmes
devraient bien continuer à s’inspirer de nos jours.
- Ds les années, Outre ce regard sociologique, son point de vue est éminemment féministe,
elle analyse les rapports hommes/ femmes en les inscrivant dans une époque mutante.
X. La photographie
• Par un clic photographique qui saisi le temps et le ge, Les années s’égrènent, puis l'écrivain
analyse le cliché, le place dans un contexte, le raconte... A chaque décennie, donc, sa
photographie, marqueur temporel d'un instant familier qui dit l’ensemble.
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• Comme un catalyseur, l'usage de la photographie, scande le discours et donne le rythme au
texte, l'image de l’écoulement quant à elle est rendue par le décousu, les énumérations et le
rapprochement d’idées sans lien apparent comme un véritable inventaire où tout se retrouve :
en somme un bric-à-brac d’objets, d’idées, jeté pêle-mêle.
• Elle construit le récit de son histoire, de l’histoire du monde au travers de di érentes photos
qu’elle décrit tour à tour. Même si ses photos sont les siennes et qu’elles retracent l’histoire de
sa vie, c’est surtout l’histoire collective et la mémoire qui va avec qu’elle cherche à retrouver
• pas d’image: les photos ne sont qu’évoquées. Montrer des photos serait mettre l’accent sur
l’individualité, risque de faire basculer dans l’intime.
• Le titre évoque d’ores et déjà le passage du temps ou plutôt sa fuite. L’écriture apparaît alors
comme une sorte de mémorial qui sauve quelque chose du temps où l’on ne sera plus jamais.
• Il y a une haute importance de la mémoire dans tout le roman avec la récurrence du déjeuner
familial du dimanche, rituel familial qui est devenu le lieu et le moment où s’entretenait le lien
des plus jeunes avec un passé qu’ils n’avaient pas connu, au travers des récits des plus âgés,
récits de guerres notamment.
• Finalement, Ernaux n’écrit pas sa vie mais s’en sert pour « reconstituer un temps commun ».
Elle retrouve par sa conscience critique une vaste sensation collective et donne accès à une
mémoire collective.
• Prenons un exemple assez concret : l’épisode de l’exode rural aux pages 131-135. Elle fait le
choix d’emprunter la 3ème personne du pluriel (ils), ce qui donne une certaine extériorité, mais
elle utilise aussi la 1ère personne du pluriel (nous), ce qui fait que non seulement elle s’inclut
dans cette génération, cette partie du « ils » mais surtout elle fait de ce moment un moment qui
lui appartient et qui appartient à tous. Elle emploie également les in nitifs pour rendre ce
moment impersonnel et faire de cette expérience personnelle un phénomène collectif. Cette
expérience individuelle est nalement gravée dans la mémoire de tous en vérité collective.
• C’est aussi parce qu’elle emploie un langage parfois trivial, qu’elle préfère au passé simple
(qu’elle juge trop littéraire) l’imparfait (qui lui permet de mieux rendre le glissement de ces
années) et qu’elle écrit de façon à ce que tout le monde la comprenne qu’elle parvient à
construire cette mémoire collective, cette mémoire du monde et de l’histoire. Elle présente la
littérature comme un conservatoire de ce qui disparaît, d’un monde partagé à un moment
donné par l’auteur et le lecteur.
• C’est moins l’âme de l’individu qui est présentée ici qu’une sensibilité, une façon de sentir.
L’âme devient collective.
• on peut apprécier cette lecture tout en n'étant pas de la même génération que l'auteur. Car la
force du livre est justement de mêler l'histoire personnelle et l'histoire collective. Et pour ma
part, je ne vois pas comment je ne pourrais pas être touché par l'histoire que ceux que je
côtoie, et qui ne me l'ont pas forcément raconté.
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