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Maurice Bellet
S.E.R. | « Études »
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M AURICE B ELLET
I L FUT un temps, pas si lointain, où le grand souci des chrétiens était d’être
« présents au monde », d’en finir avec l’esprit de « ghetto », avec cette
défense apeurée devant la modernité et ce primat du « spirituel » qui faisait
méconnaître les réalités sociales et politiques. Il s’agissait, du même coup, de
retrouver l’élan missionnaire dans un regard sans illusion sur la situation
« France, pays de mission ! » Assez vite, pour beaucoup (par exemple à la
JEC), cela signifiait un intérêt neuf pour la politique, et pour une politique
de gauche, avec même une séduction réelle du marxisme.
« Que les temps sont changés ! » Je ne dis pas que tout a disparu de
ce que je viens d’évoquer. Mais enfin, dans le milieu « catho », le ton est
devenu autre ! L’élan semble ailleurs et la mentalité différente ; et spéciale-
ment — ce qui est significatif — chez des jeunes, et nombre de jeunes
prêtres en particulier.
Ainsi la foi est-elle délivrée des timidités et des tourments où elle s’en
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Je suis toujours resté perplexe devant une formule qui eut son heure
de succès : il s’agissait de « passer au monde ». Je me suis toujours demandé
où l’on pouvait bien être avant. On est toujours au monde, même si « l’on
n’est pas du monde », Jésus lui-même l’a précisé à ses disciples. Toute la
question est de savoir de quelle façon on y est.
Eternel problème pour l’Eglise, dès le début et tout au long !
Comment se présente-t-il aujourd’hui ? Superbe indépendance de la foi, qui
se meut toute libre, dans un univers tolérant et où les pouvoirs sont, sinon
bienveillants, du moins respectueux ? Pas du tout.
Fi g u r e s L i b r e s
en sont l’âme et le ressort ?
Il semble que ce soit ce qu’on appelle « économie », ce formidable
réseau mondial d’entreprises où l’argent est roi, dans un mépris grandiose
de la misère de masses humaines et de l’avenir de l’humanité. Geneviève
Anthonioz de Gaulle, peu suspecte de gauchisme, disait avoir connu dans sa
vie trois totalitarismes : le nazi, le soviétique et le totalitarisme de l’argent.
Fi g u r e s L i b r e s
théologie de la libération, l’idée même d’une « spiritualité » ou d’une
théologie qui mettrait en cause le règne absolu de l’argent déclenche une
réaction meurtrière.
De fait, en ce qui concerne les Etats-Unis et nous-mêmes, sommes-
nous si sûrs que « l’effet dévastateur » n’est pas en route ? Les difficultés de
l’éducation sont peut-être sur fond de cette difficulté-là : la diffusion, sans
idéologie apparente, d’une conception de la vie où tout se réduit à l’appétit
des individus, branchés sur la satisfaction la plus rapide possible. Après cela,
faites donc de la morale et de l’instruction civique !
MAURICE BELLET