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Lycée Fénelon Sainte-Marie Classe de MP

Année 2020-2021 Mathématiques

Devoir maison n◦ 03
À rendre le mardi 13 octobre
Toute calculatrice interdite
n est un entier naturel non nul. L’espace vectoriel Cn est muni de la norme k · k définie par :

∀x = (x1 , . . . , xn ) ∈ Cn , kxk = max |xi |.


1≤i≤n

Soit ϕ un endomorphisme de Cn . On dira que ϕ est borné lorsque pour tout vecteur x de Cn , la suite (kϕp (x)k)p∈N
est bornée, avec ϕp = ϕ ◦ ϕ ◦ · · · ◦ ϕ (p fois).
Id désigne l’application identité de Cn .
1.
(a) Montrer que si ϕ est borné, alors toutes ses valeurs propres sont de module inférieur ou égal à 1.
(b) Démontrer, à l’aide d’un endomorphisme simple de C2 , que la réciproque du (a) est fausse (on pourra raisonner
avec les matrices).
(c) On suppose ϕ diagonalisable. Montrer alors que la réciproque du (a) est vraie.
On pourra décomposer un vecteur x dans une base B de diagonalisation, puis calculer ϕ(x), et enfin calculer
ϕp (x).
2. Soit ϕ un endomorphisme borné de Cn et λ une valeur propre de ϕ, de module 1.
On considère un vecteur x ∈ Ker (ϕ − λId)2 .
On pose y = ϕ(x) − λx, de sorte que (ϕ − λId)(y) = 0.
(a) Pour p ∈ N, exprimer ϕp (x) sous forme d’une combinaison linéaire de x et y dont les coefficients seront donnés
en fonction de p et λ.
(b) En déduire que le vecteur x est un élément de Ker (ϕ − λId).
(c) Démontrer que Cn = Ker (ϕ − λId) ⊕ Im (ϕ − λId).
3. Soient p, q, r trois réels strictement positifs de somme 1.
On note  
p q r
 
M = 
 q p r 

q r p

et ϕ l’endomorphisme de C3 de matrice M dans la base canonique. Démontrer que C3 = Ker (ϕ − Id) ⊕ Im (ϕ − Id).

Bon courage !

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Lycée Fénelon Sainte-Marie Classe de MP
Année 2020-2021 Mathématiques

Devoir maison n◦ 03 — éléments de correction


d’après École de l’Air 1996
1. (a) Soit ϕ un endomorphisme de Cn . On suppose ϕ borné.
Soit λ une valeur propre de ϕ (on est sur C, donc ϕ admet au moins une valeur propre) et x un vecteur propre
de ϕ associé à λ. On a, par hypothèse, x 6= 0 et ϕ(x) = λx.
Par une récurrence immédiate, on prouve que pour tout entier naturel p, ϕp (x) = λp x. Or, ϕ est supposé
borné, donc en particulier la suite (ϕp (x))p∈N est bornée :

∃M ≥ 0, ∀p ∈ N, kϕp (x)k ≤ M,

soit
∀p ∈ N, kλp xk ≤ M
ou encore, par homogénéité de la norme,

∀p ∈ N, |λ|p kxk ≤ M.

Comme x est un vecteur non nul, ceci s’écrit


M
∀p ∈ N, |λ|p ≤
kxk
et signifie que la suite (|λ|p )p est bornée. Mais si |λ| > 1, cette suite géométrique diverge vers +∞. Le fait
qu’elle soit bornée implique donc nécessairement |λ| ≤ 1 , et ce pour toute valeur propre λ de ϕ.
!
2
1 1
(b) Considérons l’endomorphisme ϕ de C dont la matrice dans la base canonique est M = .
0 1
Remarquons déjà que la matrice M admet pour seule valeur propre 1 (une matrice triangulaire présente ses
valeurs propres sur la diagonale !). Donc c’est une matrice dont « toutes » les valeurs propres sont de module
inférieur ou égal à 1.
!
0 1
Remarquons aussi que M = I2 + U où U = est une matrice nilpotente d’indice 2 (U 2 = 0), et qui
0 0
commute à I2 (toute matrice commute avec l’identité). On calcule M p avec la formule du binôme :
p  
!
p p
X p k 0 1 1 p
M = (I2 + U ) = U = U + pU = I2 + pU = .
k 0 1
k=0
! !
0 p
Considérons alors le vecteur E1 = . Pour tout entier naturel p, on a M p E1 = et donc kM p E1 k =
1 1
p, qui tend vers +∞ quand p tend vers +∞. Ainsi, la suite (M p E1 )p n’est pas bornée.
On a trouvé au moins un vecteur x tel que la suite (ϕp (x))p ne soit pas bornée, donc l’endomorphisme ϕ,
de matrice M , n’est pas borné, bien que ses valeurs propres soient toutes de module inférieur ou égal à 1.
Finalement la réciproque de (a) est fausse en général .
(c) On suppose maintenant ϕ diagonalisable et ses valeurs propres de module inférieur ou égal à 1. Il existe donc
une base (e1 , . . . , en ) de Cn formée de vecteurs propres de ϕ. Pour tout i ∈ [[1, n]], on note λi la valeur propre
de ϕ associé au vecteur propre ei (les λi ne sont pas nécessairement tous distincts).
Soit x un vecteur quelconque de Cn . Soit (x1 , . . . , xn ) ses composantes dans la base de vecteurs propres
n
X
(e1 , . . . , en ) : x = xi ei .
i=1

1
n
X n
X
Alors, par linéarité de ϕ : ϕ(x) = xi ϕ(ei ) = xi λi ei .
i=1 i=1
Par récurrence immédiate, pour tout entier naturel p :
n
X n
X
p
ϕ (x) = p
xi ϕ (ei ) = xi λpi ei .
i=1 i=1

En passant aux normes et en utilisant l’inégalité triangulaire :


n
X n
X
kϕp (x)k ≤ |λi |p |xi | kei k ≤ |xi | kei k .
i=1 i=1
n
X
Le réel positif C = |xi | kei k est une constante indépendante de p. Donc ceci prouve que la suite (ϕp (x))p
i=1
est bornée, et ce pour tout vecteur x de Cn . On peut donc conclure :
Un endomorphisme ϕ de Cn , diagonalisable et dont les valeurs propres
sont de module inférieur ou égal à 1, est nécessairement borné.
2. Soit ϕ un endomorphisme borné de Cn et λ une valeur propre de ϕ, de module 1. On considère un vecteur
x ∈ Ker (ϕ − λId)2 . On pose y = ϕ(x) − λx.
(a) On va démontrer par récurrence sur p ∈ N que ϕp (x) = λp x + pλp−1 y.
Remarquons avant tout que (ϕ − λId)2 (x) = 0 se traduit par ϕ2 (x) = 2λϕ(x) − λ2 x.
• Pour p = 0, ϕ0 (x) = x = 1x + 0y et la formule convient.
• Pour p = 1, la définition de y donne tout de suite ϕ(x) = λx + y = λ1 x + 1λ0 y et la formule convient encore.
• Supposons la formule vraie au rang p : ϕp (x) = λp x + pλp−1 y. Calculons alors ϕp+1 (x) en composant par
ϕ:
ϕp+1 (x) = ϕ(ϕp (x)) = ϕ(λp x + pλp−1 y) = λp ϕ(x) + pλp−1 ϕ(y).
Or, ϕ(x) = λx + y et par définition
 

(ϕ − λId) (ϕ − λId)(x) = 0 = (ϕ − λId)(y)


 
| {z }
=y

et donc ϕ(y) = λy. Il vient :


ϕp+1 (x) = λp (y + λx) + pλp−1 λy
et après regroupement :
ϕp+1 (x) = λp+1 x + (p + 1)λp y
ce qui correspond à la formule attendue au rang p + 1.
La propriété est initialisée et héréditaire, elle est finalement vraie pour tout p ∈ N : ϕp (x) = λp x + pλp−1 y .
(b) On sait que ϕ est bornée donc la suite (ϕp (x))p est bornée :

∃M ≥ 0, ∀p ∈ N, λp x + pλp−1 y ≤ M

ou encore
∀p ∈ N, |λ|p−1 kλx + pyk ≤ M.
Or on sait que |λ| = 1, donc

∀p ∈ N, p kyk − kλxk ≤ kλx + pyk ≤ M

puis
∀p ∈ N, p kyk ≤ kλxk + M.
La suite (p kyk)p est bornée, ce qui n’est possible que si y = 0. Ainsi ϕ(x) = λx, i.e. x ∈ Ker (ϕ − λId) .

2
(c) On a déjà, par l’intermédiaire du théorème du rang :

dim Ker (ϕ − λId) + dim Im (ϕ − λId) = dim Cn .

Pour prouver que les deux sous-espaces sont supplémentaires dans Cn , il suffit alors de démontrer qu’ils sont
en somme directe, c’est-à-dire que leur intersection est réduite à {0}.
Soit y ∈ Ker (ϕ − λId) ∩ Im (ϕ − λId). D’une part il existe x ∈ Cn tel que y = (ϕ − λId) (x), et d’autre part
(ϕ − λId) (y) = 0. Il vient donc
2
(ϕ − λId) (x) = 0
2
autrement dit x ∈ Ker (ϕ − λId) .
D’après (a) et (b), on a alors x ∈ Ker (ϕ − λId), et donc y = 0. Ainsi, l’intersection de l’image et du noyau de
ϕ − λId est bien réduite à {0}, et on peut conclure : Ker (ϕ − λId) ⊕ Im (ϕ − λId) = Cn .
3. On commence par calculer le polynôme caractéristique de M :
!
X−p −q −r
χM (X) = det(XI3 − M ) = det −q X −p −r .
−q −r X −p

On retranche la deuxième ligne à la première et à la troisième, puis on utilise la linéarité par rapport à la première
ligne et par rapport à la dernière ligne :
! !
X−p+q −X + p − q 0 1 −1 0
χM (X) = det −q X −p −r = (X − p + q)(X − p + r) det −q X−p −r .
0 −X + p − r X −p+r 0 −1 1

Ce dernier déterminant se calcule facilement par la méthode de Sarrus ou par développement, et on obtient :

χM (X) = (X − p + q)(X − p + r)(X − (p + q + r)) = (X − 1)(X − (p − q))(X − (p − r)).

On peut déjà remarquer que les valeurs propres p − q et p − r sont différentes de 1. En effet, si p − q = 1, alors
p = q + 1 puis 1 = p + q + r = 2q + r + 1 donc 2q + r = 0, ce qui est absurde puisque q et r sont strictement positifs.
On arrive au même type de contradiction si l’on suppose p − r = 1.
Le réel 1 est donc dans tous les cas valeur propre simple de M . Il reste à distinguer deux cas :
• Si q 6= r , alors les valeurs propres 1, p − q et p − r sont distinctes deux à deux donc M admet trois valeurs
propres distinctes et est donc diagonalisable.
• Si q = r , 1 est valeur propre simple, mais p − q = p − r est valeur propre double de M .
Ceci dit, la matrice M reste diagonalisable (les 5/2 auront remarqué que lorsque q = r, la matrice M est
symétrique !). En effet, lorsqu’on cherche le sous-espace propre associé à la valeur propre double, on obtient le
plan d’équation x + y + z = 0, donc un sous-espace propre de dimension 2, dimension égale à la multiplicité de
la valeur propre correspondante. Ce qui justifie la diagonalisabilité de M dans ce cas.
Ainsi, M , et donc ϕ, est toujours diagonalisable.
De plus |p − q| ≤ p + q = 1 − r < 1 (car r > 0) et de même |p − r| ≤ p + r < 1. L’endomorphisme ϕ associé à M
est donc diagonalisable, et ses trois valeurs propres sont de module inférieur ou égal à 1. On en déduit, d’après la
question 1, que l’endomorphisme ϕ est borné.
Comme ϕ admet une valeur propre de module exactement 1, qui n’est autre que λ = 1, d’après la question 2., il
vient C3 = Ker (ϕ − Id) ⊕ Im (ϕ − Id) .

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