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CHANSON DU FRANC ARCHER 1562

Texte établi par Jean Gillequin, La Chanson française du XVe au XXe siècle La Renaissance du
livre, 1910

Le franc archer à la guerre s’en va,


Testamenta comme un chrétien doit faire, Le franc archer une jument avait
Il a laissé sa femme à son vicaire, De poil fauveau, tant maigre et harassée,
Et au curé les clefs de sa maison ; Sa selle était de paille rembourrée ;
Viragon, vignette sur vignon. Après suivait son petit poulichon ;
Viragon, vignette sur vignon.
Le franc archer belles armes avait,
L’épée était d’une broche tortue, Le franc archer chez son hôte arriva :
Sa dague était d’une cuiller rompue, Vertu, morgoi, jarnigoi, je te tue. —
D’un pot cassé faisait son morion ; Tout beau, monsieur, nos oisons sont en
Viragon, vignette sur vignon. mue.
Il l’apaisa d’une soupe à l’oignon ;
Le franc archer un fort bel arc avait, Viragon, vignette sur vignon.
De bois pourri, la corde renouée,
Sa flèche était de papier empennée, Le franc archer à son repas avait
Le bout brûlé servait de vireton ; Du lard grillé, du lait clair pour potage,
Viragon, vignette sur vignon. Le plus souvent de l’eau pour son
breuvage,
Le franc archer un beau chapeau avait, A son dessert mangeait un champignon ;
De bourre était bien filée et déliée, Viragon, vignette sur vignon.
Sa chemise sur l’épaule nouée :
Toujours le vent lui souffle au croupion ; Le franc archer de belle taille était,
Viragon, vignette sur vignon. Bossu, manchot, les jambes contrefaites,
Borgne et morveux, et jamais sans
Le franc archer un corselet avait lunettes,
De beau fer-blanc, les brassards faits de Ayant toujours les mules au talon ;
corne, Viragon, vignette sur vignon.
Ainsi armé se regarde et retorne :
Sangri, dit-il, me voilà beau garçon ; Le franc archer preux et vaillant était ;
Viragon, vignette sur vignon. Il assaillait fort volontiers les mouches :
Sus, disait-il, il faut que je vous touche,
Le franc archer belles bottes avait, Mais une guêpe lui donna l’aiguillon ;
De paille étaient, de vert osier liées, Viragon, vignette sur vignon.
Chausses avait de drapeau dessirées,
Le franc archer revint en sa maison,
Une lardoire lui servait d’éperon ; Bien empêché de retrouver sa rue,
Viragon, vignette sur vignon. Droit sur un pied faisant la grue,
Raide de froid était comme un glaçon ; Quand aurez fait de ma femme à votre
Viragon, vignette sur vignon. aise,
La renvoyer en ma maison vous plaise,
Le franc archer tant sa femme chercha Et vous l’aurez à la collation ;
Qu’il la trouva logée au presbytère, Viragon, vignette sur vignon.
Couchée était avecque le vicaire
Le franc archer de Paris se disait
Qui en prenait sa récréation ; Fils d’un marchand des bateaux capitaine.
Viragon, vignette sur vignon. Lui caporal, son oncle porte-enseigne,
Et son cousin était porte-bedon[1] ;
Le franc archer à son vicaire dit : Viragon, vignette sur vignon.

(Autre source citée Le Roux de Lincy, Chants historiques.)

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