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Table des matières
Table des matières 7
Introduction 9
LE PREMIER JOUR 11
La Vérité 11
D’où venons-nous ? 13
Quel est notre but sur cette terre ? 14
Où allons-nous après la mort ? 15
LE DEUXIÈME JOUR 19
La réincarnation : une réponse logique à toutes questions 19
Histoire de l’Hindouisme jusqu’au bouddhisme. 22
Qui est l'Un ou DIEU ? 34
La libération c’est quoi ? 38
Les libérés-vivants 40
LE TROISIÈME JOUR 43
Perplexité, embarras, confusion de Candide sur la personnalité de
Dieu et sur l’état de libération. 43
Le bien et le mal 49
Les dieux hindous 53
Dévas et azuras 59
Enseignements complémentaires sur la réincarnation 63
LE QUATRIÈME JOUR 67
Questions sur la réincarnation. 67
Les Avatars 79
LE CINQUIÈME JOUR 83
Drame de l’Inde et de l’Occident 83
Les enfers et paradis hindous 88
Le yoga 94
LE SIXIÈME JOUR 97
Le Védanta 97
Personnalistes et impersonnalistes 99
Dualisme et non-dualisme 99
Transcendance et immanence 99
CONCLUSION 137
Bibliographie 141
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Introduction
Beaucoup de chrétiens perdent la foi dans le Christianisme
pour se tourner vers le Bouddhisme, l’Hindouisme ou vers
d'autres religions et philosophies d’orient occidentalisées.
Alors, ils se créent leur propre cocktail en mélangeant
savamment selon leurs besoins christianisme, bouddhisme,
réincarnation, résurrection, spiritisme, etc.
Tout cela parce que la plupart des confessions chrétiennes ne
donnent pas la bonne réponse concernant les questions clé de
la vie :
- D’où venons-nous ?
- Quel est le but de notre vie sur la terre ?
- Où allons-nous après la mort ?
- Pourquoi Dieu permet-il l’injustice, les malheurs, la
souffrance, la guerre, etc.
- Quelle est l’origine de la vie ? Pourquoi la mort ?
Les religions d’Orient répondent apparemment d’une
manière logique à ces questions. Cependant, ce n'est pas
parce qu’un concept est logique qu’il exprime la Vérité ?
Quand on se plonge dans l’étude de l’hindouisme, tout paraît
évident au début. Pourtant quand on l’approfondit, on finit
par se trouver dans une impasse avec le néant tout autour.
J’étais athée, j’ai cru et j’ai longtemps cherché les réponses à
ces questions fondamentales dans les religions d’Orient. J’ai
fini par les trouver dans la plénitude de l’Évangile de Jésus-
Christ.
Il est connu que l’herbe chez le voisin est toujours plus verte
et beaucoup de chrétiens déçus vont chercher ailleurs ce
qu’ils possèdent dans l’Évangile. Les religions d’Orient
parlent de Libération, Nirvana, Réincarnation alors que
l’Évangile de Jésus-Christ s’exprime à travers le Salut, la
Grâce, la Vie éternelle, la Résurrection, le Sacrifice
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expiatoire. J'ai le témoignage que la Vérité est contenue dans
la plénitude de l’Évangile de Jésus-Christ.
Cependant, le but de ce livre n’est pas de le démontrer, mais
tout d'abord, de raconter sincèrement mon cheminement à la
recherche de la Vérité. Ensuite, examiner honnêtement, au
moyen d’un dialogue de maître à élève, les bonnes choses de
l’Hindouisme avec ses contradictions et pourquoi selon moi,
il ne détient pas la Vérité ni n’apporte pas le Salut.
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LE PREMIER JOUR
Candide se rend chez le maître. Il sonne à la porte. Un
serviteur l'ouvre et le prie de le suivre. Les deux hommes
entrent dans une grande pièce. Au centre, un homme est assis
en tailleur. L’endroit où il se tient est surélevé par rapport à
celui où demeurent Candide et le vieux domestique. Le
Maître est habillé d’une ample tunique blanche. De longs
cheveux blancs et gris avec une longue barbe encadrent son
visage émacié. Son air calme, serein, imposant, amical,
bienveillant impressionne Candide.
LE SERVITEUR : Maître, cet homme désire te parler.
Le Maître sourit à Candide et l’invite à s’asseoir à ses pieds.
LE MAÎTRE : Comment t’appelles-tu ?
CANDIDE : Candide, Maître.
LE MAÎTRE : Que veux-tu de moi ?
CANDIDE : Être enseigné et devenir ton disciple.
LE MAÎTRE : Que veux-tu savoir ?
CANDIDE : D'où venons-nous ? Quel est notre but sur cette
terre ? Où allons-nous après la mort ? Connaître la Vérité de
toutes choses.
LE MAÎTRE : Tu désires savoir l’essentiel de la vie. Mais
dis-moi dans quel but veux-tu connaître ces choses?
CANDIDE : Pour les vivre et les partager !
La Vérité
LE MAÎTRE : Ta réponse est droite et tu es bien disposé à
recevoir. Alors, ouvre les oreilles de ton esprit ! Vois un bel
arbre en pleine forêt. Examine ses feuilles innombrables.
L’arbre est une vérité sur une chose bien déterminée et
chaque feuille est une expression de cette vérité. Maintenant,
vois la forêt, chaque arbre est une vérité dans un domaine
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bien particulier et chacune des feuilles de chaque arbre est
une manifestation de cette vérité. Tu es, je suis et chaque être
vivant est l’expression d’une vérité. Il en est de même des
choses visibles comme des choses invisibles. Maintenant,
parle, dis simplement les pensées de ton esprit.
CANDIDE : Maître, je crois comprendre. Ce que tu dis est
profond. Mais je suis découragé. Si chaque arbre de la forêt
est une vérité dans un domaine et si chaque feuille d’un arbre
est une expression de cette vérité dans ce domaine, comment
pourrais-je avoir la connaissance de chaque feuille de l’arbre,
puis de chaque arbre de la forêt, puis de toute la forêt ?
Même si je dois vivre mille ans je n’y arriverais pas. Ensuite,
tu me parles de vérités alors que moi je parle de la Vérité de
toutes choses, car pour moi il n’y a qu’une Vérité ou alors
une vérité pour chaque domaine et chaque vérité dans chaque
domaine étant en accord parfait avec la Vérité.
LE MAÎTRE : La vérité est Une et Multiple. Quand on se
met au niveau des arbres et des feuilles, elle est Multiple.
Quand on se place au niveau de la forêt, elle est Une. Mais
chaque feuille, avec ses nuances, nous permet de mieux
connaître l’arbre. Chaque arbre nous permet de mieux
connaître la forêt. Si tu parvenais à connaître une forêt au
cours de ta vie, tu en aurais d’autres à connaître encore. La
vérité, telle que tu l’exprimes, n’est pas de ce monde de la
Multiplicité, mais uniquement dans celui de l’Unité ou dan
l'Un.
CANDIDE : Maître, pardonne mon ignorance. Qui est l'Un ?
LE MAÎTRE : L'Un détient de nombreux noms en fonction
des religions, des croyances et des philosophies des hommes.
L'Un c’est L’Être suprême, Dieu, le Brahman, l’Éternel,
Jéhovah. Il a infinités de noms. Mais, quel que soit celui
qu’on lui donne, il s’agit du même Être, de la même Chose.
CANDIDE : Ce que tu m’enseignes est étrange. Enseigne-
moi de l’Un.
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D’où venons-nous ?
LE MAÎTRE : Ta première question est : d’où venons-nous ?
Nous venons de l'Un. Nous sommes une expression de
l'Un ou si tu préfères une étincelle, un germe, une infime
partie de Lui. L'Un s’exprime à travers toutes les créations
que tu vois dans le ciel, la terre et les océans. Tout ce que tu
vois et tout ce que tu ne vois pas. Sache que ce que tu ne vois
pas est plus réel que ce que tu vois, car là se trouve l’essence
de l'Un qui fait vivre toute chose.
CANDIDE : Maître tu dis que tout ce qui existe est une de
ses émanations. Qui est-il ? Quel est son but pour nous ?
LE MAÎTRE : Le langage humain n’a pas de mots pour
exprimer l'Un. Tout ce que je te dirais serait trop pauvre pour
t’en donner une idée. Tu dois trouver en toi les mots et les
sentiments qui le feront résonner dans ton esprit. Dieu est
pure existence, intelligence, béatitude, pensée, joie, pur
amour, bonheur, souffle créateur. L'Un est sans limites et
cependant il peut loger dans ton cœur. L'Un est unique. Il est
tout ce qui est et tout ce qui n’est pas. Comme on ne peut le
définir, Lui, l’Indescriptible et l’Inconnaissable, il est CELA
que je suis, que tu es, que toute chose est.
CANDIDE : Maître, pardonne-moi, c’est si abstrait, si
difficile à comprendre !
LE MAÎTRE : Tu dois étudier, méditer, pratiquer tout ce qui
est juste et bon et alors tu recevras l’illumination ou vérité
qui correspondra à l’expression personnelle de l'Un en toi.
CANDIDE : Tu veux dire que ma vérité peut être différente
de la tienne ?
LE MAÎTRE : Elle aura une expression différente, mais
rejoindra la Vérité de l'Un. S’il en est ainsi, tu apporteras ta
feuille à l’arbre de la Vérité, de la Sagesse et de la
Connaissance.
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Quel est notre but sur cette terre ?
Tu me demandais quel est notre but sur cette terre. Un des
premiers buts est de connaître l’expression de la Vérité de
l'Un en nous et de l’exprimer. Ensuite d’aider les autres à
exprimer la leur. Je recherche mon union avec l'Un et je fais
de même pour mon prochain. Je peux t’enseigner mon
chemin, mais je préfère t’aider à découvrir le tien, car le
mien n’est pas forcément le tien.
CANDIDE : Maître, tu recherches l’expression de l'Un en
toi. Quel est ce chemin ?
LE MAÎTRE : Vois une source au sommet d’une montagne.
Elle creuse la terre, perce la roche inlassablement année
après année. Elle devient un ruisseau, puis une rivière et
ensuite un fleuve. Elle contourne les flancs des montagnes,
elle traverse les vallées et les plaines. Elle fait cela dans le
seul but de rejoindre le grand Océan pour se fondre en Lui et
devenir Lui. Apprends de la source et de sa persévérance à
rejoindre l’Océan qui est l’Un. Retiens surtout sa
compassion, car en traversant les plaines et les vallées elle
abreuve les animaux, donne vie aux cultures et aux plantes.
Elle va vers son but paisible sans compter le temps,
déterminée, calme et sereine. Toi fais de même. Tel est le
secret et le but de la vie. Comprends-tu cela ?
CANDIDE : Maître, je crois que oui. Si je saisis bien cela
veut dire que notre but est de Le rejoindre et nous confondre
en Lui, pour être pure joie, béatitude, intelligence, pensée.
LE MAÎTRE : Oui, c’est cela.
CANDIDE : Permets-moi de résumer ton enseignement. Tu
m’as appris que la vérité est Une et à la fois Multiple.
Chaque être, chaque chose sont une expression d’une vérité.
Si nous sommes justes en pensées, en paroles et en actes
nous pouvons trouver l’expression de notre vérité et
contribuer ainsi à la connaissance de la Vérité. Les feuilles,
l’arbre et la forêt sont les symboles de ton enseignement
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concernant toute vérité dans son domaine respectif. Tu m’as
appris que nous provenons tous de Dieu ou de l’Un ou
encore du Brahman. Nous en sommes une expression, une
ramification. Tout ce que nous voyons et ne voyons pas est
une manifestation de Lui. Notre but est de retourner à Lui,
d’être confondu en lui, de redevenir Lui. Tu as répondu, à ma
première question : d’où nous venons ? Tu as aussi répondu
à ma deuxième question : quel est notre but sur cette terre ?
L’image de la source qui rejoint l’océan est l’image de ton
enseignement. Je te remercie de tes réponses et je te suis
reconnaissant pour ce savoir que tu me transmets. Maître, je
vais méditer et suivre tes instructions pour approfondir tes
précieux enseignements. Veux-tu répondre à ma troisième
question : que devenons-nous après la mort ?
Où allons-nous après la mort ?
LE MAÎTRE : Tu as bien résumé. Que devenons-nous
après la mort ? Je vais te répondre. Voici, nous sommes
composés d’une âme pour parler comme les Occidentaux, ou
de l’atman selon les Orientaux et d’un corps. Il existe
d’autres noms en fonctions des religions ou des philosophies
pour désigner cette partie non visible de l’homme. Mais peu
importe, car tous désignent la même chose. Le corps est la
partie matérielle et visible. L’âme est la partie immatérielle et
invisible. Pourtant, la partie réelle est l’âme et la partie
irréelle est le corps. Lorsqu’on meurt, le corps se décompose
et retourne à la terre pour redevenir poussière. Par contre,
l’âme, qui est partie intégrante de l'Un en nous, retourne dans
un endroit pour récolter le fruit de ses bons et mauvais actes.
Religions et philosophies appellent ces endroits les paradis et
les enfers. On leur donne encore d’autres noms et les
gourous les décrivent selon leur illumination. Mais pour moi,
peu importe. Je te dis simplement que c’est un endroit où
notre étincelle divine passe un certain temps à faire le point
et à se préparer à une renaissance dans un nouveau corps.
Dans cette nouvelle vie, nous naissons avec l’acquis de nos
vies antérieures qui est composé de nos bonnes et mauvaises
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actions, car nous récoltons tôt ou tard ce que nous avons
semé. Lorsque nous mourrons, l’âme se débarrasse du corps
comme on jette un vieux vêtement. Quand nous naissons,
nous revêtons notre âme de ce nouvel habit et démarrons une
nouvelle vie, chargés de notre karma qui est notre bagage
éternel, fruit de nos naissances et renaissances. La vie est
semblable à une grande roue qui tourne sur elle-même. Elle
n’a ni début, ni fin. Nous naissons, vivons, souffrons,
mourons pour renaître et recommencer. Cette roue tourne
sans cesse. Elle comptabilise le bien et le mal et tient à jour
le solde. Ce tourbillon perpétuel entraîne tous les hommes
dans son inexorable rotation, qu’on appelle Samsara. Il y a la
roue du karma universel, du karma des nations, du karma
personnel et d’autres certainement. Pour retourner à l'un,
nous devons briser la roue du karma, nous délivrer du
fardeau de l’existence qui n’est que souffrance. Par la
compassion, nous devons aider quiconque à briser sa roue.
En faisant ainsi nous aidons à briser la roue du karma
universel et améliorons la vie sur terre. Lorsque nous
mourrons, nous ne renaîtrons plus et serons absorbés dans le
Grand Tout. Nous serons à la fois avec Lui et nous serons
Lui, comme la source qui enfin se fond dans l'océan. Voilà
d’où nous venons, quel est notre but sur terre et où nous
allons lorsque nous mourrons. Voilà la doctrine de la
réincarnation, cette roue de la vie qui tourne inlassablement
obéissant aux lois du Karma ou Loi de cause à effet.
CANDIDE : Maître, tu as répondu à mes questions. Je vais
méditer. Dis-moi, d’où te vient ta grande sagesse ?
LE MAÎTRE : Je pratique les principes de ces maîtres
hindous qui se retirèrent dans les forêts à la recherche de la
sagesse et de la vérité. L’enseignement que j’ai reçu de l’un
d’eux correspond à l’illumination que je recherchais. À partir
de cette sagesse que j’ai affinée par mon expérience, j’aide
celui qui veut accéder à son éveil. La tolérance et le respect
de chaque croyance doivent être de règle. Toute religion,
toute philosophie rapprochent celui qui est droit et sincère à
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la source unique. Nous sommes tous différents, nous devons
admettre qu’il pourrait y avoir autant de religions que
d’individus. Vous dites bien que tous les chemins mènent à
Rome ? De même, toute recherche sincère conduit à la
connaissance de Dieu. C'est pourquoi je dois rechercher ce
qui me rapprochera au mieux de l'Un. Ce qui fera que cette
existence sera la dernière parce qu’à ma mort, je ne renaîtrais
plus et aurai atteint la libération. Maintenant, c’est assez pour
aujourd’hui ! Va et médite l’enseignement du premier jour et
prépare-toi à celui du second.
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LE DEUXIÈME JOUR
La réincarnation : une réponse logique à toutes
questions
CANDIDE : Maître, j’ai médité et accompli les exercices
que tu m’as prescrits pour renforcer mon esprit. Grâce à ton
enseignement sur la réincarnation, je me suis réconcilié avec
Dieu. Avant, je Le niais, car je ne pouvais pas concevoir
l’existence d’un Dieu à cause des souffrances, des injustices,
des malheurs, des guerres, des crimes qui sont le lot
quotidien de l’humanité. Je me disais que si Dieu étant bonté,
amour, justice, pouvoir, s’il existait, il ne permettrait pas de
telles atrocités sur la terre. Ainsi, je me déclarais athée.
Grâce à la réincarnation, j’ai appris et compris que l’homme
est responsable individuellement, collectivement de son
bonheur ou de son malheur. Dieu est amour, mais également
justice. Maintenant, je comprends pleinement cette réponse
de mère Theresa à un journaliste qui lui demandait : « Mère
Theresa, qu’est-ce qui ne va pas dans le monde ? » Elle
répondit : « Ce qui ne va pas dans le monde ? C’est moi,
c’est vous. » En d’autres termes, si le monde va mal
aujourd’hui c’est un peu à cause de moi. Si je veux que le
monde aille mieux, il faut que j’aille mieux, moi-même, et
cela, chaque jour. Il en est ainsi pour chaque famille, village,
ville et nation. Vie après vie, chacun à son niveau, est
responsable de l’état actuel du monde qui est à la mesure de
nos actes collectifs. Ainsi, la loi du Karma agit au niveau de
l’individu, des nations et de la terre. C’est merveilleux, à
partir de la réincarnation, nous pouvons tout expliquer et
comprendre ! Pourquoi tel homme à trois ans jouait-il de
grandes œuvres au piano ? Parce que dans sa vie précédente
il développa ce talent et dans sa vie actuelle il lui est donné
de l’exprimer au plus haut degré de perfection. Pourquoi tel
autre est-il homosexuel ? Parce que dans sa vie précédente il
était femme et conserve anormalement dans sa vie actuelle la
nostalgie de son précédent état. Ainsi, chaque malheur,
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souffrance, douleur, bonheur peut être expliqué, car tout ce
qui nous arrive est une rétribution de nos vies
passées comme naître dans tel pays, être riche ou pauvre,
beau ou laid, en santé ou malade, heureux ou malheureux.
Tout s’explique par une relation de cause à effet ou loi du
Karma qui trouve son accomplissement dans la
réincarnation. Comme tu me l’enseignais lors du premier
jour, nous récoltons dans cette vie, ce que nous avons semé
dans nos vies précédentes. Nous devons semer le meilleur de
nous-mêmes par l’étude, la méditation, le yoga et surtout par
la compassion et rechercher l’illumination de Dieu en nous.
Alors, nous aurons à notre mort une meilleure renaissance,
en espérant que ce soit la dernière, celle qui nous permettra
de réintégrer l’Un. J’ai étudié aussi combien la doctrine de la
réincarnation est une doctrine universelle et ancienne. Elle
était répandue non seulement dans les pays d’Orient, mais
aussi dans les pays d’Occident notamment dans la Grèce.
Elle fut la croyance des pythagoriciens, des néoplatoniciens
et même des Gaulois.
LE MAITRE : C’est bien, puisque te voilà réconcilié avec
Dieu grâce à la réincarnation. Mais je dois freiner ton
enthousiasme. S’il est vrai que cette doctrine peut donner une
explication logique à toutes les situations de la vie, cela ne
veut pas dire pour autant qu’elle en détienne la vraie.
Seulement si Dieu s’exprime en nous, nous exprimerons la
bonne réponse. Sinon toute explication n’est qu’une
possibilité.
CANDIDE : Mais quand sait-on que Dieu s’exprime en
nous ?
LE MAÎTRE : Dans l’immédiat ? Difficile à dire. Dans le
temps ? Quand les faits et l’expérimentation le prouveront.
CANDIDE : Maître, explique-moi. Qu’entends-tu par là ?
LE MAÎTRE : Pour exprimer pleinement Dieu en nous, nous
devons atteindre un total degré de pureté personnelle pour
communier avec Lui. L'Un en nous reste emprisonné dans
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notre corps, contaminé par nos actes, paroles, pensées
impures. Pour cette raison, il ne peut se manifester librement.
Ensuite, notre moi, plongé dans ce monde d’illusions,
s’illusionne lui-même et nous permet de connaître qu’une
partie de la vérité. Ainsi, chaque homme de bonne volonté
ajoute à travers les siècles de nouvelles lumières en vue de
l’amélioration de la destinée humaine. C’est pour cela qu’il
est difficile de dire dans l’immédiat si les paroles que nous
prononçons viennent de Dieu en nous ou si elles viennent de
notre intellect contaminé par l’erreur. Seuls le temps et
l’expérience le confirmeront. Si tel est le cas, alors une
feuille s’épanouira et portera du fruit dans les branches de
l’arbre de la vérité.
CANDIDE : Cela veut dire que beaucoup de conceptions de
la vérité ayant détenu une certaine notoriété ont disparu.
LE MAÎTRE : Oui exactement. Rappelle-toi, chaque fois que
l’homme tente d’exprimer l’Un en lui, il apporte sa feuille à
l’arbre de la connaissance. Si elle est pure illusion, la feuille
tombe de l’arbre et pourrit à ses pieds. Il en est ainsi de
beaucoup de croyances, philosophies, religions qui naissent
et disparaissent.
CANDIDE : Ce qui veut dire que la vérité nous la
connaissons progressivement un peu plus chaque jour ?
LE MAÎTRE : Oui, c’est cela. De plus, la vérité comme toute
chose est impermanente. Elle évolue avec le temps, les
circonstances, les besoins des peuples.
CANDIDE : Maître, je me faisais une autre idée de la vérité,
pour moi elle était immuable comme les lois physiques qui
nous démontrent le contraire. La loi de la gravitation ne
s’adapte pas en fonction des époques, des races, des pays et
des besoins individuels. Pourquoi en serait-il différent des
lois spirituelles qui par principe sont supérieures aux lois
physiques ? Les sages d’Orient préconisent autant de
religions que d’individus. Pourtant, Celui qu’ils considèrent
souvent comme un des plus grands maîtres ; Celui qui de
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plus est un Dieu Sauveur nous dit : « 1Entrez par la porte
étroite. Car large est la porte et spacieux le chemin qui mène
à la perdition, et il y en a beaucoup qui entrent par-là. Mais
étroite est la porte, resserré le chemin qui mène à la vie, et il
y en a peu qui les trouvent. Je suis le chemin, la vérité, et la
vie. Nul ne vient au Père que par moi. »
LE MAÎTRE : Dans ce monde tout change, car tout est
illusion. Seul l’Un est réalité. Jésus s’exprimait précisément
à une époque et pour un peuple.
CANDIDE : Bien, Maître, je vais réfléchir.
LE MAÎTRE : Dis-moi, qu’as-tu fait encore ?
Histoire de l’Hindouisme jusqu’au bouddhisme.
24
équilibre entre le pouvoir guerrier et sacerdotal dans le but de
faire respecter par le peuple un ordre social et religieux
constitué au cours des siècles. Chaque pouvoir détenait sa
raison d’être. Le pouvoir guerrier détenu par le roi devait
faire respecter l’ordre à l’intérieur du royaume et assurer sa
protection à l’extérieur de ses frontières. Le pouvoir
sacerdotal, détenait le savoir, les rites magiques qui
permettaient d’attirer les bienfaits des dieux afin d’obtenir la
prospérité et la victoire sur les ennemis. Le peuple par son
travail entretenait les deux premiers. En 326 av. J-C.,
Alexandre le Grand s’empara d’une partie de l’Inde. Après le
départ du grand général, des Macédoniens restèrent sur
place. Ils contribuèrent à modifier les conceptions,
religieuses, philosophiques, politiques, sociales qui étaient
déjà en pleine mutation. Le brahmanisme, système bien
codifié, naîtra de cet ensemble d’apports et d’influences.
Cependant, de nombreux religieux n’acceptaient pas les
règles rigides que les brahmanes voulaient imposer. Ils
s’isolèrent dans les forêts, à la recherche des remèdes à
apporter aux maux du monde et des techniques permettant
d’acquérir des pouvoirs supra normaux. Leur croyance
voulait que la connaissance s’acquière à partir d’une
méditation solitaire, en soumettant leur corps à de terribles
mortifications. Il régna une grande liberté de pensée et
l’instauration d’une religion polythéiste. Le fidèle priait et
faisait ses offrandes aux divinités de son choix qui étaient
innombrables. Elles étaient là, comme des intermédiaires
permettant à leurs adorateurs, d’accéder au Dieu suprême qui
est le Brahman, le Dieu immanent dont tout est issu de lui :
règne minéral, végétal, animal et humain. À chaque début
d’un cycle cosmique, le Brahman intègre tout dans son unité.
Il se transforme en trois dieux :
- Brahmâ le créateur de la multiplicité de toutes les choses
visibles et invisibles.
- Vishnou, le conservateur de la morale, intervient auprès des
hommes, comme un sauveur et un guide.
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- Shiva, le destructeur de la multiplicité permet de retrouver
l’unité originelle.
À la fin d’un cycle cosmique, le Brahman retourne dans son
unité en réintégrant en lui-même, les dieux Brahmâ, Vishnou
et Shiva. Tout se passe comme si le Brahman, en expirant,
crée le monde dans sa multiplicité et en inspirant, aspire le
monde dans son retour à l’unité. Ce souffle est l’essence de
la vie, il est indestructible, présent dans l’homme. C’est le
« moi » ou âme ou « atman ».
La doctrine de la transmigration de l’âme ou réincarnation,
inconnue dans les Védas, prendra forme progressivement au
cours des siècles.
2
« De tous les concepts élaborés au cours des âges, celui de
la transmigration (réincarnation) fut celui qui eut
probablement le plus d’audience auprès du peuple, car il
correspondait à certaines de ses croyances animistes. Le
système de la rétribution des actes et des pensées furent
naturellement accepté, car il fut considéré comme étant le
support le plus efficace d’une morale et d’un comportement
social que les chefs de village avaient intérêt à voir se
répandre et que la plupart des brahmanes enseignaient pour
discipliner les individus en les faisant responsables de leur
devenir. »
Cette doctrine explique que le corps est le vêtement de l’âme
et que lorsque la mort survient, le corps meurt, l’âme
continue à vivre pour se réincarner dans un autre corps et
vivre un nombre infini de vies. La renaissance sur terre et la
multiplicité ne sont que pure illusion, malheur et souffrance.
Ce corps est un fardeau dont il faut se débarrasser. Seule
l’unité dans le Brahman est réalité et félicité. Les sages de
l’Inde seront à la recherche de l’ascèse et du Yoga qui tout
en permettant d’obtenir des pouvoirs extraordinaires,
permettront de rompre ce cycle fatal. Retourner à cette unité
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nécessaire pour leur propre salut, et qui étaient donc
applicables au profit des autres. Gardien et dispensateur de
ce précieux trésor était le pontife romain, et il avait donc le
pouvoir de donner, à qui il jugeait bon, une partie de cette
source inépuisable de mérite, selon la culpabilité respective
de chacun et suffisamment pour les délivrer de la punition
encourue du fait de ces crimes ». Lors du concile de Trente,
après avoir désavoué le commerce scandaleux des
indulgences, ce dernier, interdit la lecture des Écritures par le
peuple. Seuls les instructeurs désignés par les responsables
ecclésiastiques pouvaient en disposer et les enseigner.
Quelques histoires de papes montrent malheureusement
qu’aucun crime n’était assez vil pour accéder à ce poste
suprême. À une époque, il y avait deux papes, l’un à Rome,
l’autre à Avignon. Ils s’injurieraient, s’excommuniaient
réciproquement. Comment peut-on parler d’infaillibilité du
pape ? Comment peut-on penser que ces hommes
représentaient Dieu ou le Christ ? Toute ville ou région qui
se révoltait, faisait l’objet de meurtrières croisades comme
celle des Albigeois au treizième siècle. Ensuite, l’inquisition,
le massacre de la Saint-Barthélemy et tant d’autres actes
affreux dans toute l’Europe. Les peuples furent ainsi
gouvernés par une main de fer. Au sommet de la hiérarchie
ecclésiastique, c’était la vie de luxe et souvent de débauche.
Pour préserver l’ordre social, politique et religieux, on
assurait au peuple que plus il souffrirait sur terre, plus
heureux il serait au ciel. Ce fut au Moyen-Âge que l’Église
atteignit sa plus haute puissance. Or, cette époque s'appelle
l’âge des ténèbres. Cependant et heureusement, au milieu de
toutes ces atrocités, de toutes ces contradictions, l’Église
produisit des hommes remarquables comme Saint François
d’Assise, Saint Vincent de Paul et tant d’autres, tout aussi
bons et charitables. Ce sont eux, qui font et firent la grandeur
et la noblesse de cette église en compensant les dérèglements
de certains hauts dirigeants à des époques troubles et tristes.
Enfin vint la réforme au seizième siècle. Une déclaration de
Luther admirable de courage et de détermination mérite
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d’être citée, alors qu’il fut convoqué à un tribunal de
l’Église : « Je ne puis soumettre ma foi ni au pape ni au
conseil parce qu’il est clair comme le jour qu’ils se sont
fréquemment trompés et contredits réciproquement. À moins
que je ne sois donc convaincu par le témoignage des
écritures ou par le raisonnement le plus clair, à moins que je
ne sois persuadé au moyen des passages que j’ai cités et à
moins qu’ils ne lient ainsi ma conscience par la parole de
Dieu, je ne puis me rétracter, car il est dangereux pour un
chrétien de parler contre sa conscience. Me voici ! Je ne puis
faire autrement. Que Dieu m’aide ! Amen. » D’autres
hommes valeureux et héroïques agirent de même et le
mouvement de réforme se répandit aidé de souverains qui
prirent leur parti, en se désolidarisant du pape. Ces Églises
furent créées à partir des différentes interprétations des
Écritures : Église Luthérienne, Calviniste, etc. Même Henri
VIII, roi d’Angleterre, créa sa propre église à la suite du
refus du pape de lui accorder son divorce avec la reine
Catherine d’Aragon pour épouser Anne Boleyn. Au siècle
des ténèbres, succédera le Siècle des lumières où une
certaine liberté d’expression fut conquise.
LE MAÎTRE : Tu me dresses un tableau bien noir de l’Église
catholique. C’est vrai que les faits historiques attestent cette
description et ce résumé. Mais où est l’analogie avec
l’Hindouisme ?
CANDIDE : Maître, l’Église catholique au temps de sa
puissance absolue gouvernait le monde avec une main de fer.
Par contre, le Brahmanisme sut gouverner le peuple et par
certains côtés les rois avec une main de fer dans un gant de
velours. Les rois et les prêtres brahmanes, également, se
partageaient le pouvoir au détriment du peuple. Les prêtres
aussi essayaient de contrôler les rois. Mais, comme ils
avaient trop besoin d’eux pour que leur religion et la paix
sociale soient respectées, ils furent bien obligés de trouver un
terrain d’entente pour gouverner chacun à leur place. La
doctrine de la réincarnation obtint le même résultat que celui
29
de faire croire dans le monde occidental, que plus on souffre
sur terre avec résignation, plus on recevra au paradis. Ces
deux croyances assuraient une paix sociale et un contrôle du
peuple par les classes dirigeantes. Dans le monde occidental,
l’Église après Constantin n’a rien à voir avec l’Église de
Jésus et des premiers apôtres, qui après avoir été persécutée,
devient persécutrice. Après avoir été l’image de la charité et
du sacrifice, elle devint l’image du lucre, du pouvoir et de la
domination injuste. Dans le monde oriental, la religion créée,
fut une synthèse de besoins sociaux, politiques, religieux
fabriqués en vue de répondre aux aspirations du peuple tout
en le maintenant sous contrôle. En même temps, il y avait
une recherche pour trouver les réponses au sujet de l’Être
suprême et de la destinée de l’homme. Cette recherche fut
consensuelle, tenant compte de tous les modes de pensées, en
les incorporant, tous sans en exclure aucun. Ainsi au fur et à
mesure des besoins du peuple et des théories élaborées par
les prêtres, on assiste à la conservation de certains dieux et à
la disparition ou à la création d’autres divinités. Les dieux,
croyances et doctrines, furent en perpétuelle fabrication ou
pour employer un terme oriental plus approprié, en
perpétuelle découverte. La différence du brahmanisme réside
qu’il ne commit pas les atrocités perpétrées par le haut clergé
catholique. Le brahmanisme intégrait toute nouvelle
philosophie à son credo, alors que l’église excommuniait,
torturait et même, condamnait à mort toute personne qui
osait discuter ses dogmes. Le brahmanisme eut aussi ses
Saint-François-d'Assise ou Saint-Vincent de Paul en la
personne des sages qui s’exilèrent dans les forêts à la
recherche des solutions de la vie. Il connut aussi ses
réformateurs avec le bouddhisme, le Jaïnisme, le Shivaisme,
le Vishnouisme et tant d’autres qui disparurent rapidement.
Dans l’Hindouisme, le védisme fit place au brahmanisme en
englobant les croyances védiques du peuple conquérant et
conquis, complétées par les expériences des sages solitaires.
Au sein de l’hindouisme se créent des mouvements
réformateurs. Cependant, bien que l’hindouisme ne rejette
30
aucun concept, il existe dans ces divers mouvements des
différences souvent contradictoires. Par exemple, dans le
védisme, le sacrifice d’animaux était une institution, qui
allait jusqu’à offrir des êtres humains pour gagner la faveur
des dieux alors que dans le jaïnisme, la peur de tuer devient
une telle obsession que l’on doit se déplacer en utilisant une
balayette devant soi afin d’éviter d’écraser une bestiole. Cet
exemple montre que deux religions prônant des concepts
aussi opposés ne peuvent avoir raison en même temps.
LE MAÎTRE : Dans ce monde d’illusion, où tu vois la
contradiction, n’apparaît que son apparence. Dieu l’a voulu
ainsi. Il n’y a pas de voie uniques, mais plusieurs disponibles
pour chacun au bon moment. Tout est soumis à
l’impermanence. Certaines vérités bonnes à un moment de
notre vie deviennent mauvaises à un autre, car nous évoluons
chaque jour. Nos besoins se transforment et nos conceptions
de la vérité également. Je vais répondre à l’apparente
contradiction des croyances védiques au sujet des sacrifices
d’animaux et du respect de la vie poussé à l’extrême des
Jaïnistes. Le but reconnu des sacrifices est de s’assurer les
faveurs des dieux. Ainsi, si la mort des animaux sacrifiés
paraît cruelle, les anciens assuraient qu’ils renaîtraient en
tant qu’humain, évitant ainsi des milliers de renaissances. La
mort dans ces conditions est bien peu de chose par rapport
aux avantages retirés. En ce qui concerne le Jaïnisme, si ce
concept du respect de la vie poussé à l’extrême me permet de
développer ma compassion pour tout être vivant, alors il
m’aidera à purifier mon moi.
CANDIDE : Maître, ton esprit de tolérance est toujours une
profonde leçon pour moi. Pardonne-moi encore d’insister. Je
trouve excellente l’explication des sacrifices des animaux.
C'es consolant d’apprendre qu’ils renaîtront humains et
s’éviteront des milliers de renaissances. Je voudrais savoir, si
la renaissance humaine de ces animaux est la réalité ou un
concept d’homme ? Ensuite, Dieu a-t-il besoin de tels
sacrifices pour accorder ses faveurs aux hommes ou s'agit-il
31
d'inventions humaines ?
LE MAÎTRE :Candide, je ne peux répondre à ces questions.
De l’arbre de la forêt, dans ma main, je ne tiens que quelques
feuilles. Je ne pourrai pas toujours répondre à tes questions.
De plus, ce sont tes questions, si ces réponses sont
nécessaires à ton illumination, tu dois les rechercher en toi en
pratiquant le meilleur de toi-même.
CANDIDE : Maître, je suis touché par ton esprit d’humilité.
LE MAÎTRE : Je vais te raconter une vieille légende
hindoue. Il fut un temps où tous les hommes étaient des
dieux. Hélas, ils abusèrent tellement de leur pouvoir divin
que Brahmâ, le maître des dieux, décida de leur enlever ce
pouvoir en cachant leur divinité là où il leur serait impossible
de la retrouver. Le problème fut toutefois de trouver une
cachette sûre. Les dieux mineurs, convoqués en conseil pour
résoudre ce problème, proposèrent :
- Enterrons la divinité de l'homme dans la terre.
Mais Brahmâ répondit :
- Non, cela ne suffit pas, car l'homme creusera et retrouvera.
Alors, les dieux suggérèrent :
- Dans ce cas, jetons là dans le plus profond d'un océan.
Ce à quoi Brahmâ répliqua :
- Non puisque tôt ou tard, l'homme explorera les profondeurs
de tous les océans et je suis assuré qu'un jour, il la trouvera et
la remontera à la surface.
Désespérés, les dieux mineurs conclurent :
- Nous ne savons pas où la cacher, car il ne semble exister
sur terre où dans la mer aucun endroit que l'homme ne puisse
atteindre un jour.
Brahmâ hocha la tête et dit :
- Je sais ce que nous ferons de la divinité de l'homme. Nous
32
la cacherons au plus profond de lui-même puisque c'est là le
seul endroit où il ne pensera jamais à la chercher.
Depuis ce temps-là, conclut la légende, l'homme fait le tour
de la terre. Il explore, escalade, plonge et creuse en vain à la
recherche de quelque chose qui se trouve en lui.
CANDIDE : Cette légende est très belle.
LE MAÎTRE : Cette légende montre que chaque homme
recherche sa propre divinité. Quand il la trouve ou la
retrouve, il s’en réjouit et il désire la partager avec son
prochain. Mais son prochain détient un chemin différent pour
l’atteindre. Le monde d’aujourd’hui nous offre pour
simplifier deux voies libératrices représentées par les
religions mystiques et les religions révélées. Les religions
mystiques sont le fruit d’expériences réalisées par des
hommes sans aucune intervention divine et communiquées à
d’autres. Les mystiques croient à la réincarnation. Au
contraire dans les religions révélées, Dieu parle aux hommes
par l’intermédiaire d’un prophète qui transmet la parole
divine aux hommes. C’est le cas pour les juifs, les
musulmans et les chrétiens. Ces derniers apportent une
nouvelle dimension avec Jésus à la fois homme, prophète et
Fils de Dieu et Dieu lui-même venu s’incarner pour
proclamer la parole et sauver les hommes. Les religions
révélées croient en la résurrection.
CANDIDE : Maître, dans cette description que tu me
donnes, la religion chrétienne serait le moyen le plus sûr
pour connaître la Vérité, puisqu’elle viendrait directement de
Dieu lui-même en la personne du Christ ?
LE MAÎTRE : Apparemment oui. Pourtant quand on voit les
centaines d’Églises et de sectes chrétiennes qui existent dans
le monde, chacune interprétant différemment la parole de
Dieu transcrite dans la Bible, on s’aperçoit que le problème
n’est pas aussi simple.
CANDIDE : Maître, quelle différence entre la réincarnation
et la résurrection ?
33
LE MAITRE : Je ne connais pas suffisamment la
résurrection pour t’en parler. Si tu veux en connaître
davantage, tu dois interroger ceux qui en détiennent la
connaissance.
CANDIDE : Maître, connaîtrons-nous enfin un jour la vérité
avec un grand « V » ?
LE MAÎTRE : Oui, en travaillant tous ensemble, en mettant
en commun tous ce qui nous rassemble et en respectant les
différences. Je vais te donner un exemple. L’hindouisme est
considéré comme une religion polythéiste, la religion
chrétienne comme une religion monothéiste. Pourtant, un des
dogmes des catholiques affirme que Dieu est un en trois : le
Père, le Fils et le Saint-Esprit. L’hindouisme dit la même
chose l'Un est un en trois : Brahmâ Vishnu et Shiva. Chacun
détient sa Trinité. Les chrétiens se moquent parfois de la
multiplicité des dieux hindous. Pourtant les saints des
chrétiens ne font-ils pas le même office ? C’est-à-dire
rapprocher tout simplement le croyant de Dieu, ce Seigneur
qui semble trop inaccessible par l’intermédiaire de dieux
mineurs ou de saints. Ces deux religions, apparemment si
différentes, possèdent des points communs. Retiens ceci.
Dieu nous donne de multiples possibilités de le connaître, car
nous sommes tous différents par la race, la langue,
l’éducation, la famille. Mais il désire que nous soyons Un en
Lui. Nous y parviendrons en mettant en commun ce qui nous
unit et en respectant surtout nos différences.
Qui est l'Un ou DIEU ?
Maintenant, Candide, apprenons à mieux connaître l'Un. La
connaissance de Dieu dans ce monde d’illusions est
importante. Pourtant, le Brahman est inconnaissable, car
indéfinissable. Sa compréhension ne pourra être authentique
que lorsque nous aurons retrouvé l’unité absolue hors du
cycle des renaissances. Alors, nous serons Lui, non à travers
la multiplicité et l’illusion, mais à travers l’unité absolue qui
est pure réalité. On raconte l’histoire de ces deux frères qui
34
séjournèrent auprès d’un sage. À leur retour, le père les
interroge. À l’aîné, il dit :
- Qui est le Brahmam ?
L’aîné fièrement, montre tout son savoir en citant de
nombreux textes des Védas, ainsi que les paroles du maître.
Le père dit au second :
- Et toi, mon fils, que peux-tu me dire du Brahman ?
Le second resta silencieux. Le père dit au premier :
- Tu as bien parlé mon fils.
Mais le père dit au second :
- Mon fils, tu as tout compris, car du Brahmam, on ne peut
rien dire.
Pourtant, Dieu nous donne les moyens de le connaître, car il
est tout ce qui nous entoure, il est toi, il est moi, il est chaque
chose apparemment inanimée, chaque être vivant, plantes,
animaux, humains. Il est tout cela. À travers la multiplicité
des choses et des êtres, nous le recherchons. Cependant, nous
ne pouvons pas le trouver à travers leur apparence illusoire,
mais seulement à travers la conscience de leur réalité
profonde. Voilà ce que veut exprimer cette légende hindoue.
Le microcosme est à l’image du macrocosme, comme l’âme
individuelle à celle de l’âme universelle. Le livre sacré de la
Bible, dit bien que nous sommes faits à l’image de Dieu.
Aussi, si nous nous connaissons nous-mêmes, nous pouvons
connaître le Brahman. Celui qui connaît parfaitement les
quelques grains de sable qu’il tient dans sa main connaît avec
la même perfection tout le sable de la mer sans le posséder
dans sa totalité. Aussi nous devons chaque jour apprendre à
nous connaître, en pratiquant la méditation, le yoga, la
compassion. Ces pratiques nous permettent de rentrer en
nous-mêmes et de nous voir tels, que nous sommes
réellement en ayant vaincu l’illusion de la multiplicité et en
entrevoyant la réalité de l’unité absolue. Ainsi, je le répète,
Candide, si tu connais ton âme parfaitement, tu connaîtras
35
l’âme universelle. Un upanishad, commentaire sacré des
Védas, dit : Je me prosterne, devant toi, je me prosterne
devant moi, je me prosterne devant toi et moi. Car en vérité
je suis toi et tu es moi.
CANDIDE : Maître, prier, c’est communiquer avec Dieu.
Pour communiquer, il faut être deux personnalités distinctes.
D’après cet upanishad, lorsque je prie, je me prie moi-même,
car si je suis moi, je suis l’Un, tout comme l’Un est moi.
N’est-ce pas prétentieux de parler ainsi ?
LE MAÎTRE : Non ! C’est une façon de reconnaître et
d’exprimer son identité par rapport à Dieu. Souviens-toi, le
microcosme que nous sommes est à l’image du macrocosme
qui est Dieu. Jésus nous dit : Soyez parfaits comme votre
Père Céleste ou l'Un est parfait. Dans cette vie, tel doit être
notre but, le Christ, le grand Maître, en d’autres termes nous
dit que nous devons réaliser en nous la perfection qui est en
Dieu ou tout au moins nous en rapprocher. Maintenant,
voyons comment le Brahman procède. Dieu agit par cycle de
création et de dissolution allant de l’Un vers le Multiple et du
Multiple à l’Un. On dit aussi : cycle de projection et de
dissolution. Ils sont appelés kalpas et peuvent atteindre des
chiffres considérables. On parle de 4 320 millions d’années.
Ces kalpas sont divisés en périodes. Au début de chaque
cycle, deux éléments sont en présence : Âkasha et Prâna. Le
premier représente la matière subtile qui servira à produire la
substance du règne minéral, végétal, animal et humain. Le
second est la force, l’énergie qui vivifient toutes choses
animées ou inanimées. L’Akasha crée le nom et la forme par
la substance. Le Prâna, par le souffle, produit l’énergie et la
vie. Au Début de chaque cycle, les deux sont immobiles.
Puis Prâna souffle sur Âkasha pour donner naissance à la
Multiplicité !
CANDIDE : Maître, alors l'Un n’est pas un, il est deux
puisqu’il est composé d’une part, de tout ce qui est substance
et d’autre part de tout ce qui est énergie, ou comme le définit
l’hindouisme de l’Âkasha et du Prâna ?
36
LE MAÎTRE : Quand le cycle de création va se mettre en
marche, l'Un devient deux. Quand la création est accomplie
alors l'Un passe de l’Un au Multiple. Quand le cycle de
dissolution apparaît, l'Un redevient deux : Prâna et Âkasha.
Puis en période de repos par la réintégration des deux, ils
redeviennent Un.
CANDIDE : Maître, ce « paradis » si désirable représente
donc cette totale fusion avec Dieu ?
LE MAÎTRE : Oui, Candide, c’est le retour à notre véritable
foyer.
CANDIDE : Retourner et être confondu dans un tout
indescriptible, perdre toute individualité, tout souvenir des
personnes que nous avons aimés sur terre : femme, enfants,
parents, amis. Tout cela m’apparaît soudainement bien
triste ! Vue ainsi, la vie sur terre me paraît plus intéressante.
LE MAÎTRE : Tu ne connais pas la joie d’être dans l'Un. Ce
n’est pas l’amour de notre femme, de nos enfants, de nos
parents, de nos amis, de notre prochain que nous aurons en
nous, mais un amour tellement plus complet dont nous
n’avons aucune idée sur cette terre. L’amour que nous
pouvons ressentir ici-bas n’est qu’une pâle copie de ce que
nous éprouverons là-bas. Il n’y aura pas l’amour seulement,
mais aussi la paix, la sérénité, le bonheur total, la
connaissance parfaite, la sagesse infinie.
CANDIDE : Maître, je ne sais pas encore comment
t’exprimer mon trouble. Dis-moi, as-tu connu ce genre de
paix, cette sérénité, ce bonheur ? Sur terre, as-tu connu la
joie d’être dans l'Un ?
LE MAÎTRE : Sincèrement, non. Tout au moins pas dans sa
plénitude. Peut-être, certains sages l’ont connu réellement
sur terre. Personnellement, je pense que l’on peut en avoir
une idée lorsqu’on a rendu heureux quelqu’un. Lorsqu’on est
paisible suite à une profonde méditation. Lorsqu’on ressent
l'amour pour tout être. En fait, chaque fois que nous
vainquons notre enveloppe charnelle et libérons le meilleur
37
de nous. Ce sont là de véritables moments de plénitude dans
l’Un ou Dieu.
La libération c’est quoi ?
CANDIDE : Maître, explique-moi ce qu’est la libération et
qu’advient-il après ?
LE MAÎTRE : Différentes écoles donnent différents points
de vue sur ces questions. Cependant tout comme Dieu, la
Libération est indéfinissable ; car c’est être Lui et participer
à tous ses instants comme la moindre de tes cellules
contribue à chaque instant à la vie de ton corps. Le langage
est trop pauvre pour exprimer ce genre de connaissance.
C’est l’histoire de la tortue et du poisson. La tortue dit au
poisson :
- Bonjour, mon ami le poisson.
- Bonjour, mon amie la tortue. D’où viens-tu ?
- Je viens de faire une promenade sur la terre !
- Tu veux dire que tu viens de nager sur la terre ?
- Non, sur la terre, on ne nage pas !
- Allons c’est impossible, sur la terre, il y a forcément de
l’eau, des vagues et on ne peut qu’y nager !
Et la tortue ne put trouver les mots pour expliquer à son ami
le poisson que sur terre, on ne nage pas, mais que l’on
marche.
CANDIDE : Oui, je comprends. Mais si chaque religion ou
philosophie ou écoles initiatiques parle de manières
différentes de Dieu et de notre état lorsque nous serons près
de Lui ou en Lui, n’est-ce pas l’aveu de leur ignorance ?
LE MAÎTRE : Chaque maître essaie de se rapprocher de
Dieu à sa manière. Et lorsqu’il reçoit ses lumières, il chante
ses louanges, selon l’illumination reçue par Lui. De grands
compositeurs ont chanté l'amour. Chacune de leurs œuvres
sont différente et pourtant toutes sont un hymne en son
38
honneur. Comme disent les hindous, à la fin de chaque cycle,
même Brahmâ, Vishnu et Shiva disparaissent. Prâna et
Âkasha faisant Un et reformant l'Un. En ce jour, nous
connaîtrons.
CANDIDE : Maître, parle-moi encore de Dieu, afin de
mieux le connaître, j’ai l’esprit confus.
LE MAÎTRE : Bien. Alors, écoute. La naissance, la vie, la
mort nous démontrent que tout est création, conservation et
destruction. De cette Loi, les hindous ont déduit que Dieu est
Créateur, Protecteur (ou Conservateur) et Destructeur. Le
mot « Destructeur », appliqué à l’Un ou Brahmam ou Dieu
ne doit pas te choquer. Pour être plus précis, Dieu est
Créateur quand il passe de l’Unité à la Multiplicité ;
Conservateur quand il maintient la Multiplicité et
Destructeur quand il passe de la Multiplicité à l’Unité. C’est
pourquoi à chaque nouveau cycle le Brahman donne
naissance à trois Dieux : Brahmâ le Créateur, Vishnu le
Protecteur ou Conservateur ou Sauveur et Shiva le
Destructeur ou plutôt celui qui détruit la Multiplicité par le
retour à l’Unité. C’est pourquoi le Brahman est représenté
par le symbole de la Trimurti qui sont trois têtes
personnifiant Brahmâ, Vishnu et Shiva dans un seul corps.
Brahmâ crée la multiplicité, c’est lui qui nous chasse du
Paradis ou de l’Unité pour nous précipiter dans la dualité.
Vishnou protège, inspire l’homme au cours de sa vie et lui
fait entrevoir les vérités. Il descend sur la terre pour répandre
la loi et la parole chaque fois que cela se révèle nécessaire.
Shiva à chaque fin de cycle intervient pour détruire la
Multiplicité et recréer l’Unité en Brahman. En conséquence,
il est le Destructeur et le Re-créateur et si Brâhma nous
chassa du paradis, Shiva nous y ramène. Parce que tout
provient du Brahmam, les Orientaux ont une compréhension
bien différente par rapport aux Occidentaux du bien et du
mal. En effet, pour ces derniers, le bien vient de Dieu et le
mal du Diable. Pour les Hindous, le bien et le mal sont des
éléments, des forces complémentaires nécessaires pour
39
donner, à la multiplicité, naissance et continuité.
CANDIDE : Maître, il m’est difficile de croire que le mal
puisse venir de Dieu. De Lui, ne peut venir que ce qui est
bon et juste. La lumière et les ténèbres ne peuvent coexister
ensemble. Une source ne peut donner de l’eau pure et douce
et en même temps amère et corrompue. Si le bien comme le
mal remonte à Lui, le mal du monde vient de Lui. Dans ce
cas, dans quelle mesure les hommes seraient-ils coupables du
mal, quel qu’il soit ?
LE MAITRE : Nous aurons l’occasion d’en reparler.
Les libérés-vivants
CANDIDE : Maître, peut-on atteindre la libération dans cette
vie ?
LE MAÎTRE : La tradition hindoue affirme l'existence
d'êtres ayant au cours de leur vie atteint la libération. On les
appelle les libérés-vivants. S’il existe des charlatans, les
authentiques, ne sont pas nombreux et vivent retirés du
monde. Cependant, lorsqu’on les approche ils ont la faculté
de répondre à toutes les questions. Ils donnent l’impression
de vivre dans une totale béatitude et rien ni personne ne peut
les perturber dans leur parfaite harmonie. De tels hommes ou
femmes sont considérés par les Hindous supérieurs à la
plupart des dieux autres que Brahmâ, Shiva, Vishnou, car si
ces hommes à leur mort seront libérés, la plupart des dieux
devront travailler à leur libération.
CANDIDE : Je ne comprends pas ! Un dieu doit travailler à
sa libération ?
LE MAITRE : Nous en reparlerons !
CANDIDE : Maître, es-tu un libéré-vivant ?
LE MAITRE : Non Candide. J’y travaille chaque jour !
CANDIDE : Comment ces hommes, arrivés au terme de
l’évolution au point d’être considérés supérieurs aux dieux,
40
savent-ils, qu’ils sont des libérés-vivants et qu’ils ne se
réincarneront plus ? Pour connaître la libération, ne faut-il
pas que notre moi soit dépouillé de toute impureté ? Se
considèrent-ils purs ? Penser cela de soi, n’est-ce pas faire
preuve d’orgueil ? L’orgueil, n’est-il pas un mauvais fruit de
l’existence qui nous enchaîne aux renaissances ? Dans ce
monde d’illusions, ne s’illusionnent-ils pas prenant leurs
désirs pour des réalités ? La libération, n’est-ce pas se
confondre en l’Un ? Or ces libérés-vivants gardent leur
identité, même s’il est dit d’eux qu’ils vivent dans une
constante béatitude, immergés en Brahman ! Il est reconnu
que beaucoup sont des charlatans ! D’autres des
authentiques ! Maître, as-tu connu des charlatans ; mais
surtout de vrais libérés-vivants.
LE MAÎTRE : J’ai connu des charlatans, mais pas
d’authentiques libérés-vivants.
CANDIDE : Maître, si ces hommes sur terre ont connu l’état
de libération, celui que nous pouvons connaître dans l’unité
de l’Un, alors ils connaissent l’Un et donc, l’Un n’est pas
inconnaissable. Ils pourraient le faire connaître au monde.
LE MAÎTRE : Ce n’est pas aussi évident que cela.
CANDIDE : Ces libérés-vivants, sont-ils une réalité ou une
invention des hommes ?
LE MAÎTRE : Les hindous y croient. Va, médite
l’enseignement du deuxième jour et prépare-toi à
l’enseignement du troisième.
41
LE TROISIÈME JOUR
Perplexité, embarras, confusion de Candide sur la
personnalité de Dieu et sur l’état de libération.
CANDIDE : Maître, j’ai médité ton enseignement du
deuxième jour sur la personnalité de Dieu et l’état de
libération. J’ai rapproché dans cette réflexion l’enseignement
du premier et du second jour. Je dois t’avouer ma grande
confusion.
LE MAÎTRE : Parle, je t’écoute.
CANDIDE : D’après l’enseignement du second jour, Dieu,
avant d’inaugurer un cycle était au repos en lui-même. Il
était Un, énergie et matière confondues, le Prâna étant
intégré à l’Âkasha. Puis Dieu est passé de l’Un au Multiple
créant toute forme de vie : minérale, végétale, animale et
humaine. Tu me dis que cette vie est une vallée de larmes,
une illusion permanente et qu’à travers la multiplicité de
l’apparence nous devons retrouver l’unité originelle. Voici
ma question. Cette tragédie, cette vallée de larmes qu’est la
vie par qui a-t-elle été voulue sinon par Dieu lui-même ?
LE MAITRE : Comment cela ?
CANDIDE : Cette chute de l'Un au Multiple ne peut être
imputable qu’à Dieu lui-même puisque Dieu seul existe.
Pourquoi tout ce gâchis si Dieu se trouvait bien en lui-
même ; pourquoi se multiplier à l’infini, prendre toutes les
formes minérales, végétales, animales et humaines pour
ensuite, souffrir à travers toutes ces âmes qui sont un
schisme, de l’Âme universelle ? Maître, veux-tu me
répondre ?
LE MAÎTRE : C’est une question bien difficile que tu me
poses et il n’y a pas de réponse catégorique. 3 « Pour un
59
donné. Le déva loue Dieu et rapproche le fidèle de la
Divinité tandis que l’azura hait Dieu et l’en éloigne. Il est dit,
que tout comme l’âme de l’homme peut habiter le corps des
dieux, certains hommes expriment le désir de renaître azuras
dans le but de solder au plus vite leur mauvais karma. 12
« Car les hindous ont observé, en fins psychologues, que l’on
pense plus souvent encore à ce qu’on hait qu’à ce qu’on
aime ; et comme l’essentiel est d’avoir la pensée
constamment tournée vers Dieu, cette adoration à l’envers
peut être plus efficace encore que l’autre. Il va sans dire que
ce n’est pas une voie à recommander. Un hindou ami, fort
cultivé et très avancé spirituellement m’illustrait un jour
cette conception hindoue des démons par une curieuse
comparaison. « Le christianisme a le même phénomène où le
cas de Saint Paul est un exemple éclatant. L’âme incarnée en
lui était celle d’un très grand sage qui avait choisi cette voie
comme le moyen le plus sûr d’arriver à Dieu. Et c’est
l’intensité de sa haine pour Jésus et pour ses disciples, son
obstination à les persécuter sans relâche, qui lui a valu cette
brusque et merveilleuse illumination de son ennemi et l’a
reçu dans sa gloire. Tous les grands-maîtres spirituels de
l’Inde contemporaine admettent l’existence de ces extra-
humains et non perceptibles avec la même certitude avec
laquelle les Occidentaux admettent l’existence des vitamines,
des rayons infrarouges ou des forces psychologiques
subconscientes, bien que la plupart d’entre nous n’en ayons
jamais directement observé. Mais cela ne signifie
évidemment pas que les maîtres ratifient en bloc les
innombrables croyances que l’on accroche à ces êtres qui
nous paraissent, à tort ou à raison, de grossières
superstitions. »
CANDIDE : Maître, il est question d’êtres invisibles. Les
bons s'appellent les dévas et les mauvais les asuras. Cela me
rappelle la religion catholique avec ses anges et ses démons.
Cependant dans la religion chrétienne Dieu est distinct de ses
65
LE QUATRIÈME JOUR
Questions sur la réincarnation.
LE MAÎTRE : Candide, as-tu des questions au sujet de
l’enseignement du troisième jour ?
CANDIDE : Oui, Maître ! Voici. Dieu était en lui-même et
pour une raison inconnue, décida de passer au Multiple à
travers le règne minéral, végétal, animal et humain. Cette
multiplication, se fit-elle par création instantanée ou par
évolution progressive du minéral à l’homme ? Autrement dit,
l’Un s’est-il multiplié instantanément en règne minéral,
végétal, animal et humain ou créa-t-il uniquement au
commencement le règne minéral ?
LE MAÎTRE : Tu me poses une question bien bizarre.
Logiquement, tout dut commencer par le règne minéral.
Sinon Dieu, ne donnant pas à tout être une chance égale à
l’obtention de la libération, aurait fait preuve de partialité.
CANDIDE : Autrement dit, le passage de l’Un au multiple
serait plutôt matérialiste que biblique. En effet, pour les
matérialistes, une combinaison chimique mettant le temps et
le hasard à contribution, produisit, à partir de l’inanimé, la
première cellule vivante qui reproduisit tout ce qui existe par
l’Évolution et la Sélection des espèces. Dans la Bible, Dieu
crée les cieux et la terre. Ensuite, dans leurs formes
définitives et parfaites, les plantes, les animaux et finalement
l’homme. Ma première réflexion est de trouver étrange, que
la conception hindoue de la Création, soit davantage en
accord avec une thèse matérialiste, plutôt que théiste. Sur
cette terre, nous observons chaque jour que tout être
vivant qu’il soit plante, animal ou homme se reproduit selon
son espèce, car chaque être vivant porte en lui sa propre
semence. Un caillou ne donne pas naissance à une
marguerite ni une marguerite à un singe, ni même un singe à
un homme. Tout ce que nous observons sur terre est
conforme à la Création inscrite depuis 6 000 ans dans la
67
Bible. Tu m’as dit, que le microcosme est à l’image du
macrocosme, que ce qui est en bas est à l’image de ce qui est
en haut. Si nous considérons que les livres sacrés des
religions représentent ce qui est en haut, alors ce qui se passe
sur terre est conforme à la Bible et non aux textes sacrés de
l’Inde. Maître, veux-tu m’éclairer ?
LE MAÎTRE : Ma réponse est que je demeure fidèle à mes
convictions. Mais ta question est pertinente et mérite
réflexion.
CANDIDE : Permets-moi de te soumettre une autre
réflexion. Imaginons qu’au début, tout serait règne minéral.
Une âme est-ce cette montagne comme l’Himalaya ou cette
colline, ce caillou, cet atome ? Quand je casse une pierre en
deux, ai-je toujours une âme ou en ai-je deux ? L’âme d’un
homme, d’une plante ou d’un animal peut se distinguer d’un
autre homme, d’une autre plante ou d’un autre animal. Dans
le règne minéral, comment distinguer une âme d’une autre
âme ?
LE MAÎTRE : Mais où vas-tu chercher toutes ces questions ?
Lors de l’enseignement du troisième jour, je t’ai parlé de
l’âme-groupe, qui réunit un grand nombre d’unités d’âmes
élémentales du règne minéral.
CANDIDE : Maître, n’est-ce pas une théorie imaginée par
les hommes ?
LE MAÎTRE : On pourrait penser cela !
CANDIDE : Sois patient avec moi. Au commencement d’un
cycle, tout était règne minéral. Le Karma remplissait son rôle
immuable de justice aveugle jugeant pensées, paroles et actes
et rétribuant par des renaissances heureuses ou douloureuses
tout « être » du minéral à l’humain. Je comprends
l’accomplissement de la loi du Karma pour l’homme. Mais
pour une montagne, un caillou, un atome que signifie faire le
bien ou le mal ? Comment le karma a-t-il pu juger du
passage d’un caillou à un brin d’herbe ? Quels furent les
critères ?
68
LE MAÎTRE : Continue…
CANDIDE : Le règne minéral ne détient pas comme
l’homme, la notion du bien et du mal liée au libre-arbitre. Le
karma ne peut pas équitablement le punir ou le récompenser.
Le minéral ne peut donc, ni progresser, ni régresser. Par
conséquent, il est condamné à garder éternellement son état.
Si l’hindouisme proclame que le minéral peut progresser vers
le végétal, comment se fait-il qu’il n’ait pas donné
d’explication sur ce passage clé d’un règne à l’autre ? Cela
me paraît évident car unique et nécessaire pour expliquer
l’apparition des autres règnes jusqu’à celui de l’homme. Les
disciples de Darwin ont le même problème pour prouver que
la vie se serait développée à partir de la matière inerte.
Jamais ils n’ont pu trouver de maillon véritable entre les
différentes espèces d’animaux aquatiques ou terrestres. Un
savant a dit : « L’hypothèse selon laquelle la vie s’est
développée à partir de la matière inerte est toujours un
article de foi »16. Un autre : « Il y a autant de chances que la
vie soit apparue de façon fortuite qu’il y en a d’obtenir un
dictionnaire complet à la suite de l’explosion d’une
imprimerie. » Pour la réincarnation du minéral en végétal, en
serait-il de même que pour la théorie de Darwin sur
l’évolution des espèces ?
LE MAÎTRE : Poursuis, je te répondrais après…
CANDIDE : Le végétal étant vivant, son passage au règne
animal parait plus crédible. Mais la même question reste
posée. Quelle notion la plante peut-elle avoir du bien et du
mal ? Quels critères décideront qu’une rose mériterait de
devenir papillon ? Comme tu me l’as enseigné, ce qui est en
bas est à l’image de ce qui est en haut par conséquent, si
l’Hindouisme dit la Vérité, alors il est conforme à ce qui est
en haut. Or, ce que nous observons ici-bas contredit ses
théories. Sur terre, à part le règne minéral, tout se reproduit,
selon son espèce. L’ordre règne parfaitement. Dans la
réincarnation selon l’hindouisme, on observe au contraire la
16 J.Sullivan, mathématicien
69
confusion dans la progression, mais aussi la régression d’un
règne à un autre.
LE MAÎTRE : Ne crois-tu pas que la possibilité de
progresser du règne minéral jusqu’au règne humain
démontre une preuve d’amour de Dieu pour tout et pour
tous ?
CANDIDE : Maître, dans la mesure, où Dieu s’est multiplié,
divisé en toute chose, du règne minéral au règne humain,
comment peut-on dire qu’Il est amour ? Si Dieu n’est pas
distinct de sa Création, il ne peut que s’aimer lui-même. Si
j’ai mal à mon bras et si je dis : « Je souffre pour mon
bras ! » En réalité, je souffre pour moi-même, car mon bras
fait partie de mon corps. Pour qu’il y ait amour, il faut que le
Créateur soit extérieur à la créature qu’il a créée. Comme la
mère est en dehors de l’enfant à qui elle a donné la vie.
LE MAÎTRE : Ton point de vue se défend.
CANDIDE : Chaque cycle représente une période de temps
considérable. À ce jour, une très longue période s’est écoulée
depuis son début. Pourtant, nous avons sur notre terre, le
règne minéral, végétal, animal et humain. Quand on
considère la matière sur notre terre et dans l’univers, on peut
se poser cette question : toute cette matière depuis tout ce
temps n’aurait pas évolué d’un iota ? Pourquoi ? Je dirais
heureusement qu’il en est ainsi. Supposons que tout le règne
minéral mérite de passer instantanément au stade végétal.
L’univers serait sans support et tout croulerait ! Admettons
que je sois assis confortablement sur cette chaise et que
celle-ci se réincarne en fleur, ou mieux en papillon, on
imagine la suite. Ce serait digne d’un gag !
LE MAÎTRE : Oui, je me l’imagine.
CANDIDE : Cela me fait penser à une chose, que l’on peut
constater chaque jour. Sur terre, il y a des singes de toutes
espèces et il y a des hommes de toutes races. D’après les
disciples de l’Évolution des espèces, l’homme descendrait du
singe. Certains même auraient dit au siècle dernier que les
70
Européens descendent des chimpanzés, les Africains des
gorilles, les Chinois des orangs-outangs. La question qui se
pose pour un évolutionniste est la suivante : comment se fait-
il que certains singes aient évolué jusqu’à l’homme et
d’autres soient toujours restés au stade de l’animal ? Je
pense, Maître que la réponse est dans la Création du monde
qui se trouve dans la Bible. Le singe fait partie du règne
animal et en fera toujours partie, tout comme l’homme fait
partie du règne humain et en fera toujours partie, car tous les
deux, portant en eux la semence de leur espèce, se
reproduiront selon leur espèce. C’est la chose la plus
scientifique qui soit, car elle se vérifie tous les jours. Et cela
malgré le fait que l’homme et le singe ont quelques
ressemblances physiques. Il en est de même pour chaque
règne vivant. Revenons encore un instant à notre folle
supposition. Tout le minéral par la loi du karma d’un seul
coup mériterait de renaître végétal. L’univers, les planètes se
trouveraient sans support. On peut imaginer que tout
s’écroulerait dans un cataclysme interplanétaire. Supposons
que cela n’arrive pas. De quoi les plantes tireraient-elles leur
nourriture si la terre n’existait plus ? Le règne végétal périrait
rapidement ? Si le règne végétal disparaissait de quoi les
animaux végétariens se nourriraient-ils ? Eux aussi
disparaîtraient à leur tour. Si les animaux végétariens
disparaissaient de quoi se nourriraient les animaux
carnivores ? Eux aussi seraient anéantis. De même, l’homme
sans nourriture à base de plantes ou animale succomberait
également. Cela me paraît logique et montre que chaque
chose créée par Dieu détient sa raison d’être. Bien sûr, on
pourrait appliquer les théories de Darwin et dire que le règne
végétal, animal et humain s’adapteraient à cette nouvelle
situation. C’est l’histoire de la girafe qui nous explique que
si son cou est si long, c’est parce qu’à une certaine époque, la
nourriture au sol devenait rare, alors qu’elle était abondante
dans les arbres. On imagine une girafe avec un cou de
quelques centimètres attendre qu’il s’allonge de plusieurs
mètres pour se nourrir. Toutes les girafes de la terre auraient
disparu depuis bien longtemps. Autant croire qu’un enfant de
71
trois ans devra attendre que son bras s’allonge de deux
mètres pour atteindre le pot de confiture caché par sa mère
sur le haut d’une armoire. Voici, pour toutes ces raisons, je
ne peux pas croire que la réincarnation puisse s’effectuer du
règne minéral au règne végétal. Je conçois que Dieu donna
au règne minéral le rôle de support et de composant des
planètes, des paysages, des plantes, des animaux, des
hommes, selon l’Écriture de la Bible : « 17 L’Éternel Dieu
forma l’homme de la poussière de la terre, il souffla dans ses
narines un souffle de vie et l’homme devint un être vivant. »
Cette poussière constitue le règne minéral : matière incréée,
disponible de toute éternité à toute éternité et qui permet à
Dieu de créer toute chose et tout être. Pour moi, voilà son
rôle unique.
LE MAÎTRE : Tu commences à avoir une conviction. Tu es
sur ta voie alors, persévères. Cependant, comment peux-tu
affirmer que le règne minéral ne détient pas un embryon
mental ? Mais continue, je suppose que tu vas parler du
règne végétal.
CANDIDE : Oui, en effet. La plante détient la vie en elle-
même. On pourrait effectivement imaginer qu’une plante se
réincarne en animal. Mais la plante, pense-t-elle ? A t-elle le
libre-arbitre ? Qu’est le bien ou le mal pour une plante ? Le
Karma ne peut agir, car la plante ne peut juger entre le bien
et le mal. Elle ne peut donc être ni condamnée à régresser, ni
récompensée à progresser. Quelle serait la mesure de sa
création ? D’après mes faibles connaissances, c’est de croître
vers la lumière, d’absorber le gaz carbonique et de rejeter
l’oxygène pour rendre la vie possible sur terre pour la vie
animale et humaine. C’est de créer la diversité et la beauté de
la terre et de servir de nourriture aux animaux et aux
hommes. Tous ces buts sont merveilleusement accomplis par
le règne végétal qui obéit à l’ordre divin. S’il en était
autrement, manger une plante serait une abomination, car on
empêcherait la progression d’un être. Mais si on va au fond
17 Genèse 2 : 7
72
des choses, manger de la poussière serait aussi un crime du
fait qu'on empêcherait, à un être du règne minéral, sa
progression vers le règne végétal. Il en est du monde animal,
comme du règne végétal. Un chien peut mordre ou lécher la
main de son maître, mais ce n’est pas cela qui le condamnera
à devenir pissenlit ou homme. Certains chiens sont plus
intelligents que d'autres, c’est vrai. Cependant, cette
intelligence reste toujours enfermée dans un certain cadre
d’où l’animal ne peut sortir. Quel serait le but de la création
du monde animal ? À mon avis ; comme les plantes, il serait
de créer la diversité et la beauté de la terre, servir d’aide et de
compagnon à l’homme. Mais aussi dans une certaine mesure,
il faut bien le dire, servir de nourriture :18 « Tout ce qui se
meut et qui à vie vous servira de nourriture ; je vous donne
tout cela, comme l’herbe verte. » S’il n’en était pas ainsi,
tout comme manger de la poussière, des fruits ou des plantes,
manger de la viande serait pour les mêmes raisons encore
plus abominables. Je dis cela sans pour autant cautionner la
nourriture à base de viande, car je pense qu’il faudrait
l’éviter au maximum. Pour résumer, je pense que l’animal
n’ayant pas une véritable conscience du bien et du mal ne
peut être condamné par la loi du Karma à régresser dans le
règne végétal. Il ne peut non plus être récompensé en
accédant au règne humain. Par conséquent, il est condamné à
rester, lui aussi dans son propre règne. L’homme ayant la
conscience du bien et du mal est entièrement responsable de
ses pensées, de ses paroles, de ses actes. À mon avis, seul
dans l’homme, le karma peut agir et la réincarnation
s’accomplir. J’ai lu ceci, et cela conforte mes sentiments. 19
« La pensée humaine n’est pas « tombée» dans n’importe
quel organisme. Elle n’est pas possible dans n’importe quel
organisme, et c’est pourquoi le mythe de la transmigration
des âmes en des corps d’animaux est absurde. La pensée ne
peut être ce qu’elle est que lorsque l’organisme humain est
18 Genèse 9 : 3
19Comment se pose aujourd’hui le problème de l’existence de Dieu
p 401
73
ce qu’il est, lorsqu’il atteint le degré de complexité et de
différenciation qu’il a présentement. » Tout pourrait être
cohérent. Pour cela, il faudrait que l’Un soit distinct de sa
création. Qu’il crée de l’extérieur et non de l’intérieur.
Comme un menuisier, disposant de planches, d’outils, de
colle, de clous et qui s’apprête à fabriquer un meuble. Dieu
utiliserait deux choses, la matière et l’énergie qui est aussi
intelligence. L’Un prendrait la matière éternelle qui lui est
étrangère et disponible à volonté et créerait tous les univers,
les planètes, le soleil, la lune et notre terre, avec ses
montagnes, ses collines, ses rivières, tout ce qui en fait sa
diversité et sa beauté. Ensuite, il prendrait de la même
matière et insufflerait le souffle de vie pour chaque végétal,
chaque animal, chaque homme. Ainsi, le but de l’Un serait
que l’homme devienne semblable à Lui. L’Un serait ainsi le
père d’autres « uns » comme Lui. Ce serait un peu comme
les amibes qui par scission en créent d’autres. Ainsi,
l’homme ayant atteint la libération serait qualifié pour
devenir un Dieu et connaître ainsi les joies de l’unité et la
souffrance de la multiplicité. Cependant, cette souffrance de
l’Un serait amour, compassion, miséricorde, car elle
permettrait à des hommes d’atteindre la divinité à son image.
20 21
Claude Tresmontant :
page 438 et suivantes : « Mais dira-t-on, pourquoi Dieu produit-il ces
êtres hors de lui ? Pour quoi faire ? - C’est la question de la création... Mais
quel est le sens dernier, ultime de la création ? Quel est son avenir ? Quelle
est la destination de l’homme ? À cette question, le savant en tant que tel ne
peut répondre, car le savant n’est pas prophète. Seul celui qui reçoit
communication de la connaissance du dessein créateur de Dieu peut nous
dire quel est ce dessein « Le Seigneur l’Éternel, ne fait rien sans dévoiler
son secret à ses serviteurs les prophètes » (Amos 3 : 7) ». Mais alors
commence une science nouvelle, qui s’appelle théologie, et qui est fondée
sur la communication au prophète de la pensée de Dieu. On sait, mais
parfois on ne sait pas que la réponse de la théologie à cette question :
« Pourquoi la création ? », c’est la doctrine de la divinisation : la création a
pour but, pour fin, pour terme, de susciter des êtres capables de participer
réellement et sans métaphore à la vie divine, sans confusion des natures ni
des personnes (contre le panthéisme)....
74
LE MAÎTRE : Je dois reconnaître que ton raisonnement est
logique et répond à certaines questions.
CANDIDE : Si je ne crois qu’à la réincarnation de l’homme,
puis-je dire que je crois en la réincarnation ?
LE MAÎTRE : Tout à fait, Candide. Croire en la
réincarnation uniquement dans le plan humain vient de ta
mentalité d’Occidental. Cette croyance s’adapte à chaque
peuple. On peut dire à chaque individu. Dans la perspective
orientale qui est une perspective à la fois pessimiste et
réaliste de la vie, la réincarnation est considérée comme un
fardeau dont il faut se libérer au plus tôt. La perspective
La création n’est pas, si l’on ose dire, centrifuge. Les êtres créés ne
« sortent » pas de Dieu : ils ne sont pas issus de la substance divine. Bien
plutôt il faut dire que la création est « centripète » : Dieu crée des êtres afin
de les élever progressivement jusqu’à la participation plénière à sa propre
vie. Le terme de la création, c’est l’union, sans confusion (répétons-le) des
natures ni des personnes.
Mais il y a d’autres difficultés : comment comprendre que Dieu crée
réellement des êtres, c’est-à-dire des libertés capables d’actions autonomes,
capables d’agir en propre, et non pas seulement des choses ? Comment
comprendre la relation entre la liberté créatrice de Dieu et la liberté créée de
l’homme ? Comment est-il possible que Dieu crée des êtres qui soient
réellement, et non métaphoriquement, « à son image et à sa ressemblance »,
c’est-à-dire capables d’agir, capables de devenir causes à leur tour ? »
21Olga Kozak, Bouddha, le Christ... Quelle voie ?
« Tous, nous avons cette étincelle divine qui est notre Ego, notre esprit
individuel. Mais cet ego-germe divin doit croître pour devenir l’homme
divin. L’axiome d’Hermès : « Ce qui est en haut est comme ce qui est en
bas » nous permet de mieux comprendre notre relation à Dieu : le gland, le
pignon, l’amande sont de même nature que l’arbre dont ils proviennent.
Mais ils ne sont ni le chêne, ni le pin, ni l’amandier. Ils ont seulement la
pleine potentialité de le devenir. Ainsi, nous sommes EN Dieu, nous faisons
partie de lui comme le fruit appartient à l’arbre dont il est issu, mais a été
séparé, avec pour destin de reproduire l’arbre à son tour, par ses propres
moyens. Mais nous ne sommes pas plus des dieux, pour le moment que le
gland, le pignon ou l’amande ne sont arbres. Séparés de Dieu, Notre Père,
notre destin est aussi de révéler notre divinité par nous-mêmes. Lentement,
nous amenons cette potentialité à réalisation, vie après vie, où chaque fois,
que nous faisons un petit progrès. L’esprit humain en nous est presque aussi
inconscient de lui-même qu’il l’était en Dieu avant notre projection dans la
matière. »
75
occidentale est résolument optimiste, le cycle des
renaissances, n’est pas ressenti, comme une malédiction dont
il faut s’affranchir, mais comme un moyen de perfection. La
terre n’est pas un enfer ou un lieu de souffrance, mais celui
d’expérience et de progression.
CANDIDE : Maître, si l’Orient à une perspective pessimiste
de la réincarnation et l’Occident optimiste, laquelle est la
vraie ? Je vois là beaucoup de confusion. Quelle peut être
l’origine de cette tour de Babel ? Supposons que Dieu
aujourd’hui révèle au monde ses Lois permettant à l’homme
d’accomplir sa destinée divine et repart espérant que sa
créature suivra enfin ses conseils. Au début, l’humanité
travaille en vue de réaliser le plan de Dieu. Pourtant,
rapidement certains commandements contraignants sont
rejetés. D'autres, amendés pour être plus supportables. La
Vérité est interprétée, transformée, vidée de sa substance
spirituelle. En une seule génération, les enseignements de
Dieu ont perdu leur pureté originelle. Il n’existe plus d’unité
religieuse. Chacun rejoint selon leurs tendances certaines
formes de vérité, devenues religions, partis, sectes, églises.
Ne parlons plus pour les générations suivantes. On se
trouverait tout à fait dans notre situation actuelle avec des
multitudes de religions chacune ayant leur credo. Ne serait-
ce pas cela qui est arrivé au commencement jusqu’à nos
jours ? Quelqu’un a dit : « C’est pourquoi on assiste au
développement d’une nouvelle religiosité à la carte : chacun
prend un chariot et fait librement son choix dans un
supermarché du religieux devenu planétaire. »
LE MAÎTRE : Chaque grande religion diffère quand il s’agit
de donner des réponses aux questions clé de la vie. Mais
toutes ont un point commun, celui d’affirmer que pour
atteindre, le paradis, le nirvana, la libération ou le salut, il
faut pratiquer le bien et avant tout l’amour de son prochain.
C’est le message commun et celui qui importe vraiment.
CANDIDE : Oui, maître. Cependant, cette sage conclusion
ne me console pas. Une autre réflexion me vient à l’esprit au
sujet de la réincarnation. Je pense à ma femme. Si la
76
réincarnation était un fait, elle aurait pu être dans d’autres
vies, un animal, un homme, ma fille, ma mère, mon père, ma
sœur, mon frère, mon ami peut être même mon pire ennemi ?
LE MAÎTRE : Oui, pourquoi pas ? C’est une des raisons qui
font que nous devons pratiquer l’amour pour tout être et
toute chose.
CANDIDE : Lorsque nos âmes se rencontrent entre deux
renaissances et se souviennent de leurs nombreuses vies, il
doit s’installer un certain malaise entre nous ?
LE MAÎTRE : Pourquoi donc ?
CANDIDE : Si ma femme a été un animal, un homme, ma
mère, ma fille, ma sœur, mon frère, mon père, sans le savoir,
combien avons-nous commis de relations contre nature,
homosexuelle, incestueuses ? Cette supposition est peut-être
idiote, mais pourquoi au cours de la vie sur terre, l’inceste
serait un crime et dans l’ensemble des existences, ne le serait
pas ? Que la morale d’en haut soit supérieure à celle d’en bas
paraît logique. Qu’elle soit en dessous, c’est impossible ! Par
conséquent, raisonnablement et moralement, ce type de
relations ne devrait pas être permis dans le processus de la
réincarnation.
LE MAÎTRE : Mais où vas-tu chercher ces questions ? Tout
ce que je sais c’est que la croyance en la réincarnation
devrait engendrer l’amour universel et bannir tout racisme,
car nous avons tous été au cours de nos innombrables
existences : parents, enfants, frères, sœurs, amis, blancs,
noirs, jaunes, juifs, chrétiens, bouddhistes, hindouistes…
CANDIDE : Oui Maître. Encore une question. Tu m’as
enseigné, lors du troisième jour, que certains grands yogis
pouvaient animer plusieurs corps, dans le but d’épuiser au
plus vite leur karma, tout comme une lampe, peut alimenter
plusieurs mèches. Je pensais qu’au cours d’une vie à une
âme correspondait un corps seulement ? Dire que l’âme peut
utiliser plusieurs corps à la fois pour épuiser plus rapidement
son karma est-ce un concept d’homme ou un fait ?
77
LE MAÎTRE : Je ne peux dire qu’une chose : beaucoup de
sages hindous le croient.
CANDIDE : Maître, la réincarnation revient à rejeter un
vieux vêtement pour se revêtir d’un neuf, n'est-ce pas ?
Pourtant, certains sages hindous affirment pouvoir en revêtir
plusieurs par leur pouvoir ?
LE MAÎTRE : Oui, tout à fait !
CANDIDE : Imaginons que je sois fatigué de porter mon
vieux costume et que je veuille m'en acheter plusieurs. Je
vais dans un magasin et en achète plusieurs. Arrivé à la
maison, je me débarrasse de mon vieux complet. Supposons
que je veuille tous les porter à la fois et les faire « marcher »
en même temps. Comment ferais-je, puisque je n’ai qu’un
corps ? Ce serait impossible ! Il faudra que je les essaie un
par un. Si mon corps ne peut pas porter plusieurs costumes
en même temps, comment mon âme, pourrait-elle animer
plusieurs corps en même temps ? Pourrait-elle faire marcher
plusieurs cerveaux totalement dissemblables avec des
pensées complètement différentes ? Pourrait-elle assumer
plusieurs individus indépendants, l’un vivant en Europe par
exemple, l’autre aux fins fonds de l’Afrique ? Supposons que
l’un devienne un saint et l’autre un bandit. Ils ne mourront
pas au même instant. Faudra-t-il donc attendre la mort des
deux pour faire les comptes ? Comment se fera la
rétribution ? Quel serait l’avantage de faire marcher plusieurs
corps à partir d’une seule âme ? Dans mon exemple, je ne
parle que de deux corps, mais s’il s’agit de trois, quatre, dix,
les choses deviennent encore plus embrouillées. Je trouve
qu’une telle théorie est confuse, contre nature,
invraisemblable. Maître, dans cette vie, ne m’as-tu pas appris
que nous devons acquérir la patience ?
LE MAITRE : Oui ! C’est une qualité primordiale pour
atteindre la libération.
CANDIDE : Alors, vouloir utiliser plusieurs corps pour
arriver plus rapidement à la libération, n’est-ce pas faire
preuve d’impatience qui est cause de renaissance et non de
78
libération ?
LE MAÎTRE : Vue sous cet angle, c’est vrai.
CANDIDE : Maintenant, je voudrais te parler de ce qui m’a
énormément choqué. C’est l’histoire de cet homme que l’on
dit grand parce qu’il avait acquis le pouvoir de rentrer dans
le corps du roi pour connaître les joies de l’amour avec les
cent femmes du harem royal. Comment peut-on appeler
« grand », un homme qui aurait développé une grande
spiritualité et de grands pouvoirs pour les employer
finalement d’une manière aussi immorale ? Dans cet homme,
je ne vois rien de grand sinon un tartufe qui commet
l’adultère sous un déguisement.
Les Avatars
LE MAÎTRE : Tu auras un jour tes réponses. Persévère et
fait confiance à ton Maître intérieur. Maintenant,
poursuivons notre étude sur l’hindouisme. Je vais te parler
des avatars. Les dieux, même les plus grands et en particulier
Vishnou descendent sur terre pour venir au secours de
l’humanité rétablir l’ordre moral et s’incarnent comme tout
humain, naissant d’un père et d’une mère. Cet avatar est
toujours le même Dieu, s’incarnant sous différents noms
comme Rama, Krishna, Jésus, Bouddha. 22Tous les avatars
ne manifestent pas Dieu dans la même mesure, ou, pourrait-
on dire, dans la même proportion. Celui en qui l’on accorde
pour reconnaître la descente la plus totale est Krishna, au
point même que certaines sectes hindoues voient en lui non
pas un avatar de Vishnou, mais Vishnou lui-même plus
encore que Vishnou en personne. Dans le cas de Râma, on
considère souvent que l’incarnation de Vishnu était
quadruple, en ce sens que la moitié du Divin (Vishnu) serait
descendue en Râma lui-même, un quart en son frère Bharata
et un huitième en chacun de ses autres frères, Lakshmana et
Shatrudhma. Selon Shri Râmakrishna, au contraire,
l’incarnation était descendue en Râma dans la proportion de
81
action est d’aider l’homme à retrouver la voie de la
délivrance et de la paix.
LE MAÎTRE : Tu as bien résumé Candide. Maintenant, il est
tard. Médite l’enseignement du quatrième jour et prépare-toi
à celui du cinquième.
82
LE CINQUIÈME JOUR
Drame de l’Inde et de l’Occident
CANDIDE : Maître, je voudrais avoir ton avis sur cette
citation : 24« Dans une civilisation, on ne peut privilégier le
développement d’un seul aspect de la triade art, science et
religion, sans créer un déséquilibre générateur de destruction.
Ainsi, l’Inde a développé l’aspect religieux et ses
populations, profondément sous-développées, subsistent en
dessous du seuil de pauvreté tolérable. Elles finissent par
vivre et mourir dans la rue, n’ayant plus qu’une seule pensée,
un seul moteur d’activité : manger pour survivre, comme des
animaux sauvages, ce qui est la misère extrême. Notre
civilisation qui a privilégié la science, c’est-à-dire le progrès
matériel, est en pleine décadence parce que le progrès moral
n’a pas suivi. Il est resté comme vide prescription humaine
au lieu d’être reconnu comme loi divine. Tout ramène à
Dieu, car tout converge vers lui en qui tout a la Vie, le
mouvement et l’être. L’évolution fera découvrir à l’homme
cette identité à triple aspect, dans la mesure où il parviendra
à les développer dans son être. » Cela voudrait-il dire que
l’Occident en développant la science et la technique à
outrance tout en ignorant la religion s’est trompé tout comme
l’Inde qui développa la religion, mais ignora la science ?
LE MAÎTRE : Oui, il faut reconnaître que c’est globalement
un constat d’échec pour l’une et l’autre civilisation.
L’hindouisme, c’est le refus du monde matériel, dans le seul
but de se fondre dans l’âme universelle et d’éviter les
renaissances pénibles dans ce monde d’illusion et de douleur.
On y parvient par la voie du renoncement, par le
dépouillement de nos désirs, de nos enthousiasmes, de nos
attachements afin que nos actes bons ou mauvais ne portent
pas de fruits. Un grand sage a dit, dans le Mahabarata :
« Renonce à faire le bien et le mal ». La croyance à la
92
Les livres sacrés de l’Hindouisme : Les Védas,
Upanishads, Bhagavad-Gita
LE MAÎTRE : Nous allons aborder maintenant les écrits
sacrés. Ils ont pour origine les Védas ou « Savoir ». Pour
l’hindou, ils sont plus qu’Écriture : « Ils existaient avant
toute chose, avant l’homme et avant la terre. » À chaque
nouveau cycle, le Brahman crée Brahma, Vishnou, Shiva. Il
donne à Brahma la connaissance des Védas. À partir de ce
savoir Brahma, crée les mondes et de temps à autre envoient
des sages ou rishis capables de les recevoir et de les
comprendre. Les Védas sont aussi vrais qu’éternels. Les
textes védiques ne peuvent être rapprochés aux événements
historiques connus. Il est impossible de dater les évènements
décrits et de déterminer s’il s’agit de légendes ou de faits
historiques. Est hindou uniquement celui qui accepte
totalement l’autorité des Védas. Pourtant vers le septième et
sixième siècle av. J.-C., aux Védas succédèrent d’autres
livres sacrés la Bhagavad-Gita, les Upanishads qui les
supplantèrent. Dans ces nouveaux textes sacrés apparaîtront
la doctrine de la transmigration et le yoga complètement
absents des écrits védiques. Les dieux changeront aussi de
position alors que Vishnou et Shiva sont des dieux mineurs
dans le Védisme, ils revêtiront l’importance primordiale
qu’on leur connaît aujourd’hui. Les sacrifices sanglants
d’animaux et même d’humains se voient remplacés par des
rites d’offrandes et la prière. Aux cérémonies védiques
célébrées au profit du clan ou de la nation, succédera une
relation personnelle avec la divinité de son choix.
CANDIDE : Les hindous ne se laisseraient-ils pas aller à un
enthousiasme débordant pour leur livre sacré, lorsqu’ils
disent qu’il contient toute vérité et que Dieu n’est que le
récitant à travers les inaugurations des cycles passés, présent
et à venir ? Il paraît indéniable que les Védas ne répondent
pas à toutes les questions. Au cours des derniers
enseignements, nous en avons eu la preuve. Ensuite, les
brahmanes eux-mêmes n’ont pas hésité à apporter des
réformes par des changements de dieux, la suppression des
93
sacrifices sanglants, de l’ajout de la théorie de la
transmigration des âmes, de l’atman et du Brahman.
Le yoga
LE MAÎTRE : Nous avons vu que les nouveaux textes sacrés
s'ajoutèrent à la doctrine de la réincarnation et à la pratique
du Yoga. Nous avons parlé de la transmigration de l’âme.
Étudions maintenant le Yoga. Très à la mode en l’occident, il
est considéré comme une technique de relaxation à la fois
mentale et physique. En Orient, il s’agit d’une ascèse qui
peut varier d’un Sadhu à un autre, mais qui garde comme
objectif suprême celui d’unir le corps, l’âme et esprit à
l’Absolu. D’ailleurs en sanscrit « Yoga » signifie « unir »,
« joindre », « relier » l’homme à Dieu. Le yogi à la base
recherche la maîtrise du corps et de la respiration ainsi que le
développement de l’attention et de la concentration
intellectuelle. Cette puissance de contemplation acquise, il
peut l’appliquer sur un objet, quel qu’il soit, sur une idée ou
sur rien du tout. Il ne vise pas essentiellement à s’unir à un
Dieu personnel, mais à se rattacher au principe du Grand
Tout et à se confondre en Lui. C’est à partir de son corps
devenu champ d’observation, en cherchant à le connaître
physiquement dans ses moindres cellules, en sondant son
intellect et son esprit qu’il acquiert la connaissance de
l’Univers. De là découle les pouvoirs extraordinaires que
l’on prête à ces hommes tels que la lévitation, la perception
de l’infiniment grand et petit, le déplacement d’objets à
distance, marcher sur l’eau, peser tour à tour une plume ou
une tonne, dominer les consciences, influencer les
évènements, commander aux éléments.
CANDIDE : Maître, cela doit être excitant de posséder de
tels pouvoirs, mais personnellement, j'y vois que poursuite
du vent quand on néglige l’essentiel qui est l’amour du
prochain avec les sacrifices personnels qu’il comporte. Plutôt
que de voler dans les airs ou marcher sur les eaux, je
préférerais être capable d’accomplir l’œuvre de mère Thérésa
ou du docteur Schweitzer.
94
LE MAÎTRE : Je suis tout à fait d’accord avec toi. Cette
histoire pourrait illustrer ce que tu viens de dire et le côté
superficiel, de l’idéal du yogin qui se donne comme but
l’acquisition de pouvoirs extraordinaires et pour lequel il va
consacrer son existence. Écoute cette parabole. Un disciple
après avoir reçu l’enseignement d’un sage le quitta, décidé à
trouver davantage de sagesse et surtout davantage de
pouvoirs sur son corps et la nature. De nombreuses années,
plus tard, il revint voir son ancien maître qui était au chevet
d’un malade, tout près d’une rivière. Ce dernier lui demanda
avec bienveillance et intérêt :
- Qu’as-tu appris durant toutes ces années ?
- Maître, j’ai appris à marcher sur l’eau et maintenant, je
marche sur l’eau.
- Tu es satisfait, de marcher sur l’eau ?
- Oui Maître, ça valait le coup.
- Qu’as-tu fait d’autre durant toutes ces années ?
- Maître, rien d’autre ! Pour y arriver, j’ai consacré nuit et
jour tout mon temps.
- Mon ami, tu vois pour traverser cette rivière, je prends cette
barque qui a été faite dans ce but. Je ne marche pas sur l’eau,
il est vrai, mais reconnais que j’obtiens le même résultat.
Mais dis-moi, combien d’hommes as-tu secourus ? Combien
de misère as-tu soulagée ? Combien de petits enfants as-tu
embrassés et consolés quand ils pleuraient ? Combien de
plaies as-tu pansées ? Combien de malheureux as-tu visités
en prison ou dans les hôpitaux ? Combien d’aveugles as-tu
accompagnés ? Combien d’affamés, as-tu nourris ? Combien
d’assoiffés d’eau et d’esprit, as-tu abreuvés ?
- Maître, où voulais-tu que je trouve le temps, je te l’ai dit :
nuit et jour, j’ai peiné pour obtenir ce pouvoir.
- C’est par ces choses que tu aurais dû commencer. Car c’est
en faisant ces choses que résident la sagesse et le véritable
pouvoir, car aucun pouvoir n’est plus grand que celui de
95
l’amour. Et celui qui le possède est le plus grand aux yeux de
Dieu.
CANDIDE : C’est une histoire très édifiante !
LE MAÎTRE : Bien, Candide, il est très tard, médite
l’enseignement du cinquième jour et prépare-toi à recevoir
l’enseignement du sixième et dernier jour.
96
LE SIXIÈME JOUR
Le Védanta
LE MAÎTRE : As-tu des questions concernant,
l’enseignement du cinquième jour ?
CANDIDE : Non, Maître !
LE MAÎTRE : Nous allons aujourd’hui, parler de deux
enseignements qui furent donnés dans l’Inde. Même s’ils
paraissent contradictoires, ils sont contenus dans le Védanta
et forment un tout. Pour l’Occidental, ils semblent s’opposer,
mais, pour l’hindou, ils ne sont qu’un point de vue différent
ou une vision distincte de la même réalité finale. Védanta
signifie « fin ». C’est-à-dire : accomplissement,
couronnement du Véda. Le Vedânta désigne l’un des plus
importants courants de pensées de l’hindouisme classique. À
ce titre, il constitue l’un des grands systèmes philosophiques
ou comme dirait l’hindou « darsana ». Ce darsana fut illustré
par des maîtres tels que Shankara, Râmânuja, Madhva.
Rappelons que « darsana » dans la pensée hindoue signifie :
visions, points de vue de la vérité perçus sous des angles
différents. Ces trois grandes époques sont dues aux
conceptions différentes concernant :
Le monde : A-t-il été créé ? Si oui, par qui ? Ou bien est-il
co-éternel au Brahman ? Est-il pure illusion ou non ou à quel
degré l’est-il ?
La personnalité de Dieu est-elle immanente ou bien
transcendante. Ou les deux à la fois ?
L’âme. Qu’est-elle réellement ? Est-elle éternelle ou non ?
Garde-t-elle son individualité ?
Etc.
On peut comprendre que ces différents points de vue aient
alimenté la controverse. L’histoire du Védanta connaît, pour
la résumer, trois époques :
97
1- Le Védanta du VI au VII ième siècle apr. J.-C. : Le plus
ancien comme le plus radical est personnifié par le sage
Gaudapâda. Dans les Upanishads, il affirme que le monde
n’a pas plus de réalité que le cercle rouge qui se dessine
lorsque nous faisons tourner une torche enflammée. Ce
maître eut comme disciple Govinda qui, lui-même enseigna
la doctrine du fameux Sankara. Ce dernier, vers le VIII siècle
écrivit, plusieurs ouvrages qui restituèrent au monde une
certaine réalité en montrant qu’il est issu du Brahmam et que
c’est au-delà des apparences multiples des objets, des
idéations et des dieux, qu’il faut retrouver le Dieu-Brahmam.
2- Après Sankara, le Védanta va prendre une nouvelle
position diamétralement opposée par l’entrée en scène de
Madhva vers le XII ième siècle. Sankara parlait du Brahmam
en termes négatifs : il n’est pas ceci ou cela. Madhva parlera
en termes positifs. Le Seigneur est lumière, joie, amour,
connaissance, puissance, intelligence. Le but de Sankara est
de se fondre dans le Brahmam impersonnel tandis que celui
de Madhva consiste à vivre avec le Seigneur de goûter à sa
présence dans une communion totale et pourtant distincte,
individuelle, autonome et séparée de sa Personne. Comme
l’enfant auprès de ses parents. Madhva accusait Sankara
d’avoir faussé l’enseignement des brama-sutras et ses
croyances se rapprochaient de celles du christianisme. Le
Brahman n’est rien d’autre que Vishnu. Les âmes ont une
existence réelle et individuelle. La délivrance n’est pas
seulement une affaire d’effort spirituel, mais de grâce divine
pour participer au salut. La Création est distincte du
Seigneur, il y a le monde des âmes et celui de la matière. Il
adorait les deux avatars Krishna et Rama, mais à travers eux
la Personne suprême, le Dieu Unique : Vishnou.
3- La troisième époque du XIII ième siècle, à nos jours, verra
progressivement le retour en force du védânta de Sankara,
tandis que les fidèles de Madhva deviendront les dévots de
Vishnu-Krishna.
C’est pourquoi, lorsqu'au XIX ième, les Européens entrent en
contact avec la sagesse hindoue, ils ont surtout affaire au
98
Védanta de Sankara qui devient la « métaphysique
universelle ». La force de cette métaphysique est de se placer
au-dessus de tous les Dieux de toutes les religions et
confessions, un Dieu qui englobe tout et qui est « CELA ».
Ce CELA, chaque être humain le possède et peut le
développer par la vraie connaissance, la sagesse et le yoga.
La reconnaissance de CELA en soi, permet de dépasser la
condition humaine, de devenir « un délivré vivant », c’est-à-
dire un être supérieur aux dieux, doué de pouvoirs quasi
illimités et assuré d’atteindre la libération dans cette vie
même.
Personnalistes et impersonnalistes
Dualisme et non-dualisme
Transcendance et immanence
CANDIDE : Maître, d’après ton enseignement et ce que j’ai
dernièrement étudié, on pourrait dire que Sankara est un
Impersonnalistes tandis que Madhva est un personnaliste.
LE MAÎTRE : Oui, les Impersonnalistes refusent l’existence
de Dieu en tant que Personne Suprême. Ils croient au
Brahmam impersonnel. En ce « CELA » au-dessus de tout et
de tout dieu. Les personnalistes croient par conséquent en
l’existence de Dieu en tant que Personne Suprême et
Créateur de toute chose et de tout être. Les personnalistes
sont aussi des dualistes. Ils affirment que Dieu et l’univers
sont deux réalités différentes. Dieu, Personne Suprême, crée
le monde extérieurement à partir de la matière et de
l’énergie. Il crée les âmes distinctes, à partir d’une parcelle
de Lui-même en leur incluant matière et énergie. Ils sont
également transcendantalistes puisqu’ils situent Dieu au-delà
de la matière, tant grossière que subtile. Les impersonnalités
sont non-dualistes ou monistes et immanentistes. Pour eux,
Dieu, le monde et les êtres vivants sont la même substance.
Tout provient de Lui, par une création intérieure.
CANDIDE : Maître, ces deux écoles opposées cohabitent
99
dans le Védanta ? Comment est-ce possible ?
LE MAÎTRE : 30« Il faut admettre que l’homme ne peut
avoir de la Vérité totale que des visions partielles,
incomplètes, déformées en apparence, bien que toutes soient
des visions de la Vérité et comme telles participent à sa
nature. Les vérités différentes en apparence, dit Gandhi, sont
comme d’innombrables feuilles, qui paraissent différentes, et
qui sont sur un même arbre. L’hindou n’opposera donc pas
une erreur à une vérité, il verra un certain nombre de vérités
fragmentaires, les unes plus complètes ou plus profondes que
les autres, mais toutes complémentaires les unes des autres. »
CANDIDE : Le Védanta de Sankara impersonnaliste,
moniste et immanentiste a prévalu de nos jours au point
d’être assimilé à la pensée hindoue et devenir une
métaphysique universelle. Pourtant en ce qui me concerne,
les théories des personnalistes répondent mieux à certaines
de mes questions.
LE MAÎTRE : Pour ma part, Candide, je suis
impersonnaliste, mais exprime ta pensée !
CANDIDE : Voici, maître, quelques questions et les
réponses qu’apportent les impersonnalistes :
- Le monde est-il une illusion ? : Les personnalistes
répondent catégoriquement : non ! « 31 Certains philosophes
considèrent la manifestation de la nature matérielle comme
« illusion », mais la Bhagavad-gita rejette cette hypothèse.
La manifestation de l’Univers matériel n’est pas un simple
rêve ; elle appartient au contraire à l’ordre du réel, mais elle
est éphémère, comme un nuage qui traverse le ciel, ou encore
comme la saison des pluies qui vient nourrir les graines ;
lorsque le nuage s’éloigne, ou que la saison s’achève, les
moissons se dessèchent. La nature matérielle suit un cours
semblable, et se manifeste que par intervalles : elle apparaît,
108
LE SEPTIÈME JOUR
Le septième jour, Candide médita
Le septième jour, Candide médita. Son cher Maître l’avait
exhorté à acquérir une conviction personnelle. La
connaissance de la Vérité à laquelle il aspire tant est loin
d’être acquise, mais les choses s’éclaircissent. Il discerne,
tout au moins pour lui-même, l’acceptable de l’inacceptable.
Il sait une chose : ce qui est en bas est à l’image de ce qui
est en haut. Il ne peut croire que Dieu ait laissé les hommes
sans des signes sur terre leur permettant de retrouver le
chemin d’en haut. Tout ici-bas doit rappeler
symboliquement, d’où nous venons, quel est notre but sur
terre et où nous allons après cette vie. Candide médita sur
l’enseignement du maître sur 17 points principaux afin de
tirer ses propres conclusions sur l’Hindouisme.
1- Les Védas
L’hindouisme tient pour sacrés les Védas. Pour eux, ils
furent écrits dans la langue des dieux qui est le sanskrit : «
44
Ils existaient avant toute chose, avant l’homme et avant la
terre. Dieu omniscient ne fait que les prononcer au début de
chaque cycle. Il les répète exactement sous la forme sous
laquelle ils ont existé dans le cycle précédent. Ainsi, il n’est
pas leur auteur, il n’est que le « récitant ». Les Védas sont
ainsi vrais aussi bien qu’éternels. L’Hindouisme, qui repose
sur les Védas, est ainsi vrai aussi bien qu’éternel ».
Si les Védas sont la parole de Dieu, écrit dans une langue
parfaite, répétée lors de l’inauguration de chaque cycle et si
tout ce qui concerne l’homme y est contenu, comment les
sages osèrent-ils en changer ne serait-ce qu’un seul iota ? Ce
serait pur sacrilège de leur part ! Pourtant, ils réformèrent les
dieux, supprimèrent les sacrifices sanglants, remanièrent le
culte. Ils les complétèrent en concevant de nouvelles
110
stabilité d’une société où chacun sait qu’il lui faut attendre
la mort pour améliorer sa situation. »
Deuxième point : L’histoire politique, sociale et religieuse
de l’Inde démontre des concepts et des intérêts humains au
cœur de sa religion.
3- Mysticisme syncrétique
Nous avons vu à partir de l’histoire de l’Inde que
contrairement aux religions révélées (Judaïsme,
Christianisme, Islam) la religion de l’Inde est une religion
mystique.
Bien que les livres sacrés soient primordiaux,
paradoxalement, l’expérience personnelle l’est encore
davantage, car ce serait par elle que le sage intègre en lui la
substance même des livres sacrés, devenant une expression
vivante des Védas.
De ce fait, la religion hindoue, repose principalement sur
l’expérience des sages et dispose de multiples facettes
propres à chaque maître. Les expérimentations des gourous
sont intégrées pouvant se compléter, mais aussi se contredire.
C’est le risque du syncrétisme qui considère que tout concept
religieux ou philosophique est bon à incorporer, car chacun
peut y trouver sa voie.
À chaque homme, sa religion. Telle est l’idée-force. Cette
conception séduit, car elle donne à l’homme l’impression de
disposer d’une grande liberté. Cependant, n’est-elle pas
trompeuse et dangereuse ? Ne démontre-t-elle pas finalement
une grande faiblesse ? Ne va-t-elle pas à l’encontre de la
destinée divine de l’homme et en définitive le leurrer en le
détournant définitivement ?
Les lois physiques sont les mêmes pour tout le monde, elles
ne s’adaptent pas à chacun selon nos désirs. La Vérité n’est-
elle pas la Loi universelle par excellence ? L’homme détient
l’intellect qui le fait penser et créer. Il est également une
étincelle divine. Le sage recherche une ascèse pour avoir
accès au divin qui est en lui, par lequel il cherche à connaître
111
l’infiniment petit comme l’infiniment grand.
Alors, la vraie question se pose. La doctrine du sage,
provient-elle du divin en lui ou de son intellect ? Comment
faire la différence ? Le sage enseigne-t-il de son propre chef
ou comme le prophète des religions révélées, annonce-t-il la
parole de Dieu, en déclarant avec autorité : « Ainsi parle
l’Éternel… ? »
Toute la crédibilité des religions mystiques est là ! Et nous,
lorsque nous jugeons l’enseignement d’un Maître, le faisons-
nous par notre intellect ou par l’esprit de Dieu qui est en
nous ? Comment être sûr de juger par l’Esprit ? Ce qui est
certain, c’est que lorsque deux concepts se contredisent, ils
ne peuvent pas être vrais tous les deux à la fois. Si l’un est
vrai, l’autre est faux, ou les deux sont faux. Pourtant, les
hindous diraient que l’un peut glisser vers l’autre.
Troisième point : La religion hindoue est un mysticisme
syncrétique souvent contradictoire démontrant qu’elle
professe à la fois des vérités et des contrevérités.
4- Le Védanta
L’Hindouisme considère le Vedânta comme le
couronnement des Védas. Il devint le système philosophique
de référence des grands-maîtres de l’Inde avec les
Upanishad, Bhagavad-gita et autres livres reléguant au
second rôle les Védas. Il connut, comme nous l’avons vu
dans les pages précédentes, trois grandes époques : la
première impersonnaliste, la seconde personnaliste et la
troisième de nouveau impersonnaliste.
Ainsi, à partir des mêmes textes sacrés deux doctrines
complètement différentes se conçurent à travers les siècles.
C’est la preuve flagrante que chacun des deux maîtres
principaux Sankara et Madhva utilisèrent en grande partie
leur intellect pour construire leur doctrine sur Dieu, le
monde, les âmes, le but de la vie et autres concepts
doctrinaux. Quelle est la doctrine qui se rapproche le plus de
la Vérité ? Difficile à savoir. S’ils avaient reçu tous les deux
112
l’illumination du divin en eux, n’auraient-ils pas émis les
mêmes théories ? Si l’un détient la vérité, l’autre est dans
l’erreur. Ou alors les deux se trompent. Ou encore, chacun
possède à la fois, intimement confondues, vérités et erreurs.
Il est vrai que l’hindou, par principe, n’accepte pas cette
logique.
Cependant la vie de tous les jours, approuve ce
raisonnement. Si on dispose d’eau pure à 100 % et que l’on
ajoute une infime quantité d’impureté, cette eau bien que
semblant aussi limpide qu’auparavant, n’est plus inaltérée.
Une analyse poussée le prouverait et déterminerait son degré
exact d’impureté. Il en est de même pour la vérité, dès que
l’on apporte un soupçon d’erreur volontairement ou non la
vérité n’est plus la vérité. Elle n’a plus sa blancheur
immaculée, mais un ton de gris plus ou moins accentué.
Dans les doctrines des personnalistes et impersonnalistes, qui
des deux tons de gris, se rapprochent le plus de la
blancheur parfaite ? C'est aussi sans compter les différences
qui existent entre les écoles ou sectes appartenant à ces deux
grands groupes principaux de la pensée hindoue.
Quatrième point : Le Védanta est une interprétation
intellectuelle des Védas, auquel les maîtres ont ajouté des
doctrines nouvelles, changé le statut des dieux existants,
supprimé ou créé d’autres théories. Dans ce système
philosophique cohabitent des doctrines opposées démontrant
l’intellect au détriment du divin.
5- De l’unité à la multiplicité et de la multiplicité à l’unité
Tout, le règne minéral, végétal, animal et humain provient de
l'Un. Tout est une expression, une représentation, une
étincelle, un germe, une infime partie de Lui.
L'Un s’exprime à travers toutes les créations, dans le ciel, la
terre et les océans. À travers tout ce qui se voit et tout ce qui
ne se voit pas. Ce qui ne se voit pas est plus réel que ce qui
se voit. Ce qui ne se voit pas est l’essence de l'Un qui est en
toutes choses et les fait vivre. L’accomplissement le plus
113
intégral de Dieu s’exprime dans l’homme : « Le Brahman
suprême, l’âme de tout, le principe de l’univers, plus ténu
que la chose la plus ténue, tu les, tu l’es. » « Je me prosterne,
devant toi, je me prosterne devant moi, je me prosterne
devant toi et moi. Car en vérité je suis toi et tu es moi. »
L’homme est donc l’expression de Dieu la plus belle, la
seule qui peut parvenir à la libération. Dieu procède de l’Un
au multiple et du multiple vers l’Un par cycles (ou Kalpa)
qui dure 4 310 millions d’années (il faut dire que cette durée
varie en fonction des écoles).
Au début d’un cycle, il est seul dans son unité. On pourrait
dire dans un super nirvana. Puis l'Un passe au multiple et va
créer toutes les formes de vies animées ou inanimées dans
tous les univers comme sur notre terre.
Puis à la fin du cycle, il y a destruction de la multiplicité et
Dieu réintègre son unité originelle. Le but de Dieu est de
faire évoluer toute la multiplicité vers un stade supérieur du
minéral vers l’humain et pour finir de l’humain vers la
libération qui est la cessation des renaissances par le retour à
l’unité originelle.
Il existe l’évolution ascendante vers l’homme et l’évolution
descendante du règne humain jusqu’au règne minéral. Tout
ce que voyons, touchons, sentons, goûtons, entendons est
illusion, douleur et appartient au multiple. Par conséquent, le
but de l’homme va être d’œuvrer pour retourner à l’unité
originelle. Comment ? Cette évolution procède par la
réincarnation qui est le cycle des renaissances, qui est lui-
même conditionné, par le karma, loi de causes à effets.
Dans le cadre de l’homme, lorsqu’il meurt, son corps reste
dans la terre. Son âme séjourne dans des paradis et des enfers
où ils récoltent les bons et mauvais fruits. Après ces séjours,
le karma de chaque être vivant, qui est le solde du bien et du
mal accompli durant ses précédentes existences, décide
automatiquement de sa prochaine renaissance. L’âme par son
karma individuel renaît sur terre avec un nouveau corps.
Dans ce nouveau véhicule, l’âme progresse jusqu’à atteindre
114
la libération ou régresse dans les règnes inférieurs. Il est à
noter qu’il y a le karma individuel, familial, national,
terrestre et universel. Donc, nous ne sommes pas
responsables uniquement de nous-mêmes, mais également de
notre famille, de notre pays, de la terre et du cosmos.
Cette conception de la vie et de son but à première vue,
paraît fabuleuse, car cohérente. Par la réincarnation et loi du
karma, on peut répondre à toutes les questions de la vie :
d’où l’on vient ? Quel est le but de notre vie sur terre ? Où
allons-nous après la mort ? Pourquoi les injustices, la
souffrance, le malheur ?
Beaucoup de religions, d’Églises n’ont pas le mérite
d’apporter des réponses aussi claires et acceptables à ces
questions primordiales. D’une part, donner des réponses
logiques à toutes questions, est-ce donner les vraies
réponses ? Non, certainement pas !
D’autre part, l’Hindouisme répond-il à toutes les questions ?
Non, loin de là ! Quelques questions fondamentales restent
sans réponses. Pourquoi Dieu est-il passé de l’Un au
Multiple ? Cette tragédie, cette vallée de larmes qu’est la
vie pour les religions mystiques, qui l’a voulue sinon Dieu ?
Par conséquent, cette Chute ne lui est-elle pas imputable
puisque Lui seul existe ? Si Dieu était bien dans son unité et
Nirvana, alors, pourquoi tout ce gâchis ? Pourquoi se
multiplier à l’infini, prendre toutes les formes et souffrir à
travers elles ? Pourquoi et dans quel but, créer tant de
souffrances, tant de malheurs, tant d’injustices ?
Voici une manière de répondre ou plutôt de ne pas répondre
à ces questions :
« Pour un occidental, l’une des premières questions qui se
posent est évidemment la suivante : pour quelles raisons,
« Dieu », dans sa perfection et sa pureté originelle et
nouménale, peut-il avoir voulu descendre dans la relativité
phénoménale, ou accepté d’y descendre ? Se plaçant sur un
terrain purement logique, les hindous répondent : la question
« pourquoi ? » ne peut se soulever que dans le domaine où
115
règne la causalité, c’est-à-dire dans l’état de conscience de la
multiplicité nécessaire à cette causalité. Hors des dualités,
elle ne peut se poser. C’est donc un non-sens, une lourde
faute de logique, que de demander : « Pourquoi les dualités
ont-elles pris naissance ».
Voici maintenant deux réponses. La première vient des
Upanishads qui disent que Dieu s’ennuyait. Ne prenant plus
plaisir en lui-même, alors il créa la multiplicité. La deuxième
provient de la Bhagavad-Gita où Krishna expose que le
monde est un jeu que Dieu s’offre pour son propre
divertissement et qui est confirmé par des maîtres de l’Inde :
« 45C’est la joie d’un Dieu amoureux de lui-même, le jeu
d’un enfant, l’inépuisable multiplication de soi d’un poète
enivré par l’extase de son propre pouvoir de création sans
fin ».
« Dieu sort d’une forme seulement pour entrer dans une
autre. Après tout, qu’est ce Dieu ? Un enfant éternel jouant à
un jeu éternel dans un éternel jardin ».
La première réponse est une absence de réponse. Les deux
autres entraînent encore plus de questions restant sans
réponses.
En voici quelques-unes.
Comment Dieu peut-il s’ennuyer et ne pas prendre plaisir en
lui-même ?
Si tel était le cas, cela veut dire que cet état que l’on appelle
la libération est ennuyeux ou à la longue le devient.
Alors, pourquoi rechercher dans cette vie la libération qui
mutera finalement en ennui ?
Comment Dieu peut-il s’ennuyer ?
Comment peut-on concevoir un Dieu qui s’ennuie ?
Si Dieu quitta son unité par ennui pour aller au multiple, ce
serait par intérêt personnel. Donc Dieu serait égoïste ! Est-ce
45 Aurobindo
116
concevable ?
L'Un pour échapper à l’ennui en lui-même aurait plongé
l’homme dans la conscience des dualités, l’aurait chassé du
« Paradis de la vérité absolue » pour le précipiter dans cette
vallée de larmes où il doit rechercher par la souffrance, de
nouveau la voie de l’unité ? Quand on considère l’histoire du
monde avec son long cortège de guerres, injustices, iniquités,
malheurs, chagrins, détresses, cela paraît absurde et
irresponsable !
Comment Dieu peut-il être un enfant éternel, amoureux de
lui-même jouant à un jeu éternel dans un jardin éternel ?
Dieu dans un état de paix, de bonheur et de béatitude, ne
prenant plus de plaisir s’ennuya. Il décida donc de jouer à un
jeu éternel consistant à souffrir le cauchemar de l’illusion, à
prendre une enveloppe minérale, végétale, animale, humaine,
à subir toutes les douleurs, physiques, mentales spirituelles.
Ainsi, Dieu se chasse d’un état de béatitude pour une
condition de souffrance et dans sa nouvelle situation doit
retourner à son premier état. Dieu aime-t-il sa propre
souffrance pour agir de la sorte ? Dans un tel but, il n’y a pas
de finalité, pas de progression, ni pour Dieu, ni pour nous qui
sommes une individualité temporaire destinée à retourner à
l’unité originelle.
Comment peut-on appeler « jeu éternel » un tel
aboutissement ? Dieu est un Être parfait, un Père qui nous
aime et veille sur nous ! Il ne peut nous préparer qu’un
merveilleux avenir.
Mais quel est ce plan divin ?
Un Dieu immanent, peut-il être un Dieu d’amour ? Selon la
doctrine hindoue, nous sommes tous une parcelle de Dieu,
individualisés, fragmentés, prisonniers de notre corps et
aliénée dans un monde d’illusions. Mais lorsque nous
souffrons, c’est Dieu qui souffre puisque nous sommes une
partie de lui-même. Pour nous libérer de notre corps et
retrouver l’unité, nous devons l’oublier en pratiquant la
117
compassion. Par conséquent si Dieu nous demande par
l’enseignement des maîtres de pratiquer l’amour, ce n’est pas
pour nous, c’est pour Lui puisque tout est lui et tout retourne
à lui. Ce n’est donc pas un Dieu compatissant, mais c’est un
Dieu égoïste et narcissique. Un tel Dieu ne peut pas être un
Dieu. Si Dieu n’est pas distinct de sa création et notamment
de l’homme, il ne peut être un Dieu d’amour et il ne peut que
s’aimer lui-même. S’il souffre, il ne peut souffrir que pour
lui-même.
Nous ne pouvons pas parler de justice de l'Un non plus ; car
c’est lui qui voulut la multiplicité, le schisme de son unité
originelle. C’est lui par conséquent le responsable de cette
vie d’illusion et de souffrance et c’est nous, ses propres
enfants ou prolongements qui sommes ses victimes !
Cinquième point : Le passage de l’Un au multiple et du
Multiple est un concept fondamental de l’Hindouisme.
Pourtant il n’y a pas de véritables réponses quant à son but.
Pourquoi une telle mise en œuvre pour aboutir à une absence
d’aboutissement ?
6- Justice
À chaque fin de cycle, toute la création est détruite et
retourne à l’unité. Tout sans exception. À la fin d’un cycle,
quoique nous ayons fait pendant nos innombrables vies nous
serions tous rétribués de la même manière. Ce qui restera
minéral, qui n’aura pas progressé d’un iota, méritera aussi à
la fin du kalpa la libération autant que le sage le plus
vertueux ! Est-ce cela la justice de Dieu ?
La loi du karma qui est une loi de juste rétribution ne
voudrait rien dire si elle s’accomplissait dans un cycle
uniquement. Elle devrait se perpétrer à travers tous les cycles
en gardant le souvenir de nos vies cycle après cycle. Mais tel
n’est pas le cas, puisque nous perdrions toute individualité
lors du retour à l’unité originelle qui serait une complète
absorption en l'Un.
Pourquoi s’escrimer à obtenir la libération si de toute
118
manière à la fin du cycle tout sera résorbé dans le Brahman
impersonnel ?
Sixième point : Dans le cycle des kappas, il n’y a pas de
justice divine. Que nous fassions le bien ou le mal, nous
sommes tous « condamnés » à retourner à l’unité originelle
en Brahman.
7- Progression
Dieu possède en lui trois fonctions : Créateur, Conservateur
et Destructeur. Ainsi Dieu par sa fonction créatrice, crée la
multiplicité de sa personne et sa propre souffrance à travers
toute sa création, par son aspect conservateur se guérit de sa
souffrance et par son aspect destructeur, détruit sa création
qui est la multiplicité en retournant au point de départ. Ceci
est un cycle ou kalpa. Puis Dieu se repose en lui-même.
Après une période de repos, il inaugure un nouveau cycle et
ceci depuis toujours et à jamais.
Quel est le projet de Dieu pour sa création ? Pourquoi cette
succession de cycles infinis et identiques sans véritable but
ni progression ?
Septième point : Cette incroyable mise en œuvre de cycles
infinis n’aboutit à aucun résultat, à aucune progression, ni
pour Dieu, ni pour ses créatures. La montagne qui accouche
d’une souris fait de loin beaucoup mieux.
8- La multiplicité est illusion
La découverte de la structure de l’atome serait conforme à ce
concept des religions d’Orient comme quoi tout est illusion.
Là où nos yeux voient le plein, il y a le vide.
Tout le monde sait aujourd’hui que chaque atome est rempli
de vide, semblable aux distances considérables qui séparent
les univers. Là encore, nous constatons cette vérité : ce qui
est en bas est à l’image de ce qui est en haut, ce qui est petit
est à l’image de ce qui est grand, l’atome étant la réplique de
l’univers. Alors que nous donnons l’impression d’être du
plein, nous sommes finalement du vide. Nous serions donc
une illusion et la doctrine orientale vieille de milliers
119
d’années serait pleinement justifiée.
Mais ce n’est pas parce que nous sommes surtout du vide
que nous sommes illusion ! Il est dit que s’il était possible de
rassembler uniquement les noyaux d’atome constituant
chaque être, l’humanité entière représenterait le volume de
quelques grains de riz. Même si aujourd’hui, l’humanité tout
entière se réduit à quelques grains de riz complètement
pleins, elle est une réalité ! Dieu nous a donné la réalité qui
convient le mieux à notre réalisation divine. Par conséquent,
nous sommes une réalité. Tout est réalité, le matériel comme
le spirituel. Tout détient en soi, un but, une consistance, car
rien n’est l’objet du hasard et rien n’est illusion. Le vide
n'existe pas, car c'est du plein rempli de Dieu avec sa
puissance et sa lumière qui imprègne et vivifie tout.
Huitième point : Comment peut-on affirmer que tout ce qui
n’est pas l’unité originelle est illusion ? Quelles preuves
apporte l’Hindouisme ?
9- Dieu est inconnaissable
Les sages disent en substance que Dieu est inconnaissable :
du Brahman on ne peut rien dire. N’est-ce pas avouer leur
ignorance ?
Aucun sage d’Orient ne connaît véritablement son but,
puisqu’aucun ne donne une explication suffisamment
compréhensible de son passage de l’un au multiple, puis du
multiple vers l’un. Personne ne sait ce qu’est la libération,
car tous les sages en parlent en termes élogieux, mais aucun
ne connaît exactement. Combien ce passage me paraît clair
par contre : « 46Pourquoi la Divinité nous laisserait-elle
commettre de nombreuses erreurs, et plus encore de fautes,
qui nous condamnent à renaître encore et encore, pour en
subir les conséquences ? Et pourquoi, après avoir souffert
ces dures existences, les hommes devraient-ils disparaître
dans le Brahman -autrement dit Dieu - aussitôt qu’ils
auraient perçu expérimentalement leur nature divine ? Quel
122
thèses. Pour les Impersonnalistes, la libération, c’est : l’union
du « soi » (atman) avec le Brahman universel. Pour les
personnalistes, l’âme ou atman garde toujours et à tout
jamais sa personnalité et vit en communion avec Dieu ou le
Seigneur Vishnu-Krishna.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les avis restent
partagés et aucune réponse précise n’est donnée. Il faut dire
que ces conceptions représentent seulement deux tendances,
mais il y en a d’autres à l’intérieur des nombreuses
subdivisions.
Onzième point : Qu’est-ce qui transmigre réellement ? Que
devient l’âme ou l’atman lorsque la libération est atteinte ?
Encore des questions sans réponses.
12— Le bien et le mal
« Les hindous font tout remonter à Dieu, aussi bien ce qui du
point de vue humain nous paraît redoutable, destructeur,
funeste, que ce qui du même point de vue nous semble
désirable, constructeur, bon. En effet, ils refusent que cette
dualité du bien et du mal, de la création et de la destruction,
ait une valeur autre qu’humaine et subjective. D’un point de
vue divin, ce ne sont que des forces semblables et
complémentaires dont le déséquilibre et le jeu donnent
naissance à la multiplicité du nom et de la forme. » Comment
croire que le mal puisse venir de Dieu ? De Lui, ne peut
venir que ce qui est bon et juste. La lumière et les ténèbres ne
peuvent coexister ensemble. Une source ne peut donner de
l’eau pure et douce et en même temps amère et corrompue.
Si le bien comme le mal remonte à Dieu, cela voudrait dire
que le mal vient de Lui ! Alors, comment le karma pourrait-il
accomplir sa fonction de justice ? Le karma serait-il
supérieur à Dieu pour juger ce qui vient de Dieu ? Si le bien
et le mal proviennent de Dieu, alors Il est divisé contre lui-
même et tout ce qui est divisé s’autodétruit. Dieu par
définition est éternel, indestructible. Par conséquent, Dieu ne
peut être que le bien et le mal ne peut pas venir de Lui ou
subsister en Lui.
123
Douzième point : Comment peut-on oser attribuer le mal à
Dieu ?
13— Augmentation de la population
Le but de l’Hindouisme est de permettre à l’homme
d’atteindre la libération et donc ne plus renaître sur terre. On
peut penser qu’au cours d’un Kalpa, qui durerait 4 310
millions d’années, des millions, voire des milliards
d’individus l’auraient atteinte. On peut imaginer plusieurs
possibilités en fonction des différents concepts
réincarnationnistes. Selon certaines conceptions
occidentales qui affirment que seul l’homme peut se
réincarner pour atteindre la perfection ou libération on
devrait observer une diminution constante de la population
mondiale au cours des millénaires. Or nous constatons que
c’est le contraire qui se produit.
Maintenant, si l’on considère que la majorité des conceptions
orientales croient à la réincarnation ascendante, on pourrait
penser que si la population augmente ce serait grâce à la
réincarnation d’animaux en humains. Il y aurait par
conséquent beaucoup plus d’animaux qui passent au stade
humain que d’humains qui passent au stade de la Libération.
On pourrait même dire que la disparition des espèces tant
végétales qu’animales serait l’explication d’une telle
augmentation de la population humaine mondiale !
Autrement dit, la disparition des espèces et la décroissance
de la population animale seraient davantage dues à la
réincarnation ascendante de l’animal vers l’homme bien plus
qu’au rôle prédateur des hommes envers son environnement.
À la question, « Pourquoi la population sur terre augmente-t-
elle exponentiellement alors que logiquement la
réincarnation devrait la faire décroître ? », un lama répondit
que c’est parce que davantage d’humains choisissent la
planète Terre pour renaître plutôt qu’une autre. Il faut croire
que notre planète bleue est très appréciée dans l’univers
cosmique.
Treizième point : Le fait de l’augmentation considérable de
124
la population contredit la doctrine de la réincarnation (ou
tout au moins, démontre son inefficacité).
14- Transmigration du minéral à l’humain
Au commencement régnait le minéral. Le karma agissait tout
comme aujourd’hui et détenait le même rôle de justice
aveugle à l’égard du bien et du mal. Si le rôle du Karma est
concevable pour l’homme, peut-il l’être pour le règne
minéral ? Quelle notion du bien ou du mal un caillou peut-il
avoir ? Une plante détient la vie et possède une individualité.
On pourrait imaginer possible la réincarnation d’une plante
en animal. Mais la plante, pense-t-elle ? Qu’est le bien ou le
mal pour elle ? L’animal, encore plus que la plante possède
individualité et vie, mais possède-t-il un libre-arbitre
suffisant pour distinguer le bien du mal et le rendre
responsable de ses pensées, paroles et actes ? Un chien peut
mordre ou lécher la main de l’homme, mais ce n’est pas cela
qui le condamnera à devenir arbre ou homme. Certains
chiens sont plus intelligents que d'autres, c’est vrai ; mais
cette intelligence reste toujours enfermée dans un certain
cadre dont l’animal ne peut en sortir.
Quatorzième point : Par quels critères, le karma a-t-il
décidé du passage d’un caillou à un pissenlit ? D’un pissenlit
à un lapin ? D’un lapin à un homme ?
15— Finalement Création instantanée ou par évolution ?
Selon les théories des Impersonnalistes, le passage de l'Un au
multiple se ferait par évolution progressive du règne minéral
vers le règne humain. Rappelons que les personnalistes
rejettent le passage du minéral vers les règnes supérieurs.
Personnalistes et Impersonnalistes seraient donc en accord
dans les grandes lignes avec les théories évolutionnistes des
espèces. Pour Darwin, l’homme d’aujourd’hui aurait comme
ancêtre celui de Cro-Magnon, qui descendrait du singe. Ce
dernier selon certains savants proviendrait d’un petit rongeur
ayant comme ancêtre une cellule commune, la matrice de
tout ce qui vit qui aurait été créée par la matière, le temps et
125
le hasard.
Pourtant, cette théorie décrivant les cycles de chaque Kalpa
ou période cosmique du brahmanisme contredit toutes ces
théories : « La durée de l’univers matériel est limitée. Elle se
manifeste par cycles de kappas. Chaque kalpa constitue un
jour de la vie de Brahma et compte mille cycles de quatre
âges, ou yugas : le satya-yuga, le treta-yuga, le dvapara-
yuga et le kali-yuga. La Satya-yugae, création parfaite où les
hommes vivent longtemps et où règnent la vertu, la sagesse
et la spiritualité, sans la moindre trace d’ignorance ou vice,
dure 1 728 000 ans. Le Treta-yuga, où commence
d’apparaître le vice, dure 1 296 000 ans et où la vie des
hommes est raccourcie. Le Dvapara-yuga, durant lequel la
vertu et la spiritualité déclinent encore tandis que le vice
grandit, dure 864 000 ans. Et le Kali-yuga (commencé
depuis 5 000 ans), qui voit abonder les conflits, l’ignorance,
l’irréligion et le vice, où la vraie vertu est pratiquement
disparue, dure 432 000 ans. En cet âge, l’immoralité
s’accroît à tel point qu’à sa fin, le Seigneur Suprême
apparaît en Personne, sous la forme de l’avatar Kalki, pour
vaincre les asuras, sauver ses dévots et inaugurer un
nouveau satya-yuga. Puis le cycle reprend. Ces quatre yugas
répétés mille fois forment une journée de la vie de Brahma,
Premier être crée dans l’univers, qui reçoit du Seigneur
suprême le pouvoir de tout créer dans l’univers, dont il est le
régent principal. Chacune de ses nuits dure autant. Brahma
vit cent ans ce qui correspond à 311 040 000 000 000 de nos
années terrestres, puis meurt. Toutefois, cette longévité
formidable pour nous presque infinie ne représente qu’un
bref éclair dans le flot de l’éternité. L’Océan Causal contient
d’innombrables Brahmas qui disparaissent et apparaissent
comme des bulles dans l’Atlantique. Appartenant à l’Univers
matériel, comme leur monde respectif, ils sont en incessant
devenir. »
Cette description des cycles montre qu’à l’inauguration d’un
nouveau cycle, la création était parfaite. C’est l’âge d’or où
règne la vertu, la sagesse, la spiritualité sans la moindre trace
126
d’ignorance et où les hommes vivent longtemps. Ce cycle
dure 1 728 000 ans. On pourrait penser à une création
instantanée, avec l’apparition d’hommes parfaits et par
conséquent chaque règne mis en place séparément dès le
départ.
Le deuxième cycle où commence d’apparaître le vice dure
1 296 000 ans et où la vie des hommes est raccourcie.
Le troisième cycle durant lequel la vertu et la spiritualité
déclinent encore tandis que le vice grandit dure 864 000 ans.
Le quatrième cycle : le Kali-yuga (commencé depuis 5 000
ans), qui voit abonder les conflits, l’ignorance, l’irréligion et
le vice, où la vraie vertu est pratiquement disparue, dure
432 000 ans.
Ainsi, on assiste progressivement, depuis le début qui est une
création parfaite, jusqu’au moment où tout doit à nouveau
disparaître à une régression du monde et des êtres.
Cette théorie rappelle la Création de la Bible avec le Paradis,
Adam et Ève. Puis la corruption du genre humain. C’est en
totale contradiction avec l’évolution du règne minéral
jusqu’au règne humain par le processus de la réincarnation
qui est au contraire une progression constante et générale (si
on exclue les cas de régression par réincarnation dans les
règnes inférieurs).
Alors que penser ? Quoi et qui croire ?
Quinzième point : Il est impossible d’étudier tous les textes
de l’Hindouisme, car plusieurs vies se révèleraient
insuffisantes. Pourtant plus on les étudie, plus les
contradictions sont flagrantes.
16— La réincarnation sur mesure
La réincarnation est le dénominateur commun auquel se
rattache les religions ou philosophies orientales. Il y a la
réincarnation hindouiste, mais aussi bouddhiste et dans
chacune de ces religions des sectes ou écoles différentes avec
des concepts encore différents.
127
Cette croyance a conquis l’Occident qui l’a adaptée à sa
culture. Cette citation pourrait résumer le concept occidental
(bien qu’il y en ait d’autres). Il a la particularité de concilier
la réincarnation avec l’évolution des espèces de Darwin : « 47
La réincarnation est la théorie selon laquelle l’âme humaine
évolue lentement à travers une longue succession de vies. À
ceux qui estiment raisonnable la théorie de l’Évolution, la
réincarnation n’apparaît pas non plus comme
déraisonnable. Cette théorie reprend l’idée évolutionniste et
l’enrichit énormément, à deux points de vue. En premier lieu,
elle affirme que l’évolution se fait non seulement par la
forme physique, mais aussi par la conscience du vivant. En
second lieu, elle estime que chaque vie, non seulement,
contribue à l’amélioration de l’espèce en général, mais
encore à sa propre évolution. Il ne s’agit plus seulement
d’un progrès structurel, physique, mais encore d’un
épanouissement spirituel.
La réincarnation n’a d’intérêt que dans la mesure où elle
décrit une série de cycles évolutifs, dont la spirale ascendante
monterait vers le haut. L’idée d’une sempiternelle répétition
mécanique, sans aucun progrès, est un cauchemar. Et à mon
sens, elle ne tient pas debout ; elle peut même dégoûter ceux
qui seraient prêts à accepter comme utile et plausible l’idée
d’un retour sur la Terre. Il est donc clair qu’il ne faut pas
confondre la réincarnation avec la métempsycose à
l’Indienne par exemple. Il s’agit d’une théorie logique,
cohérente, qu’il faut accepter avec une confiance raisonnée.
Elle doit être utilisée sans obsession et avec bon sens. Elle
obéit à des lois précises qu’il importe d’étudier. »
La réincarnation pour les religions orientales représente une
triste situation dont il faut se libérer alors que, pour
l’Occidental, elle indique le chemin obligé de l’évolution
spirituelle et physique. Pour l’Oriental, l’âme est la réalité
ultime. Elle n’est ni augmentée, ni diminuée au cours de ses
pérégrinations par les actes bons ou mauvais accomplis dans
133
- Le sentiment du déjà-vu ou vécu ou entendu : Visiter un
pays pour la première fois et reconnaître des endroits jamais
vus auparavant ; lire un poème et avoir l’impression de le
connaître ; mieux fermer le livre et réciter les strophes qui
suivent…
- Dons des langues : Parler soudainement une langue sans
l’avoir apprise.
- Enfants prodigues : Comme Mozart par exemple qui
composait et jouait des œuvres dès son enfance.
- Régression dans les vies antérieures sous hypnose : C’est
un des points d’appui le plus évoqué pour prouver la
réincarnation. Faits amusants. Certains hypnotiseurs
pratiquant cette technique reconnaissent avoir eu affaire sur
le même divan à plusieurs Christ, Napoléon, Jeanne d‘Arc,
etc. En général, des personnages importants ou
extraordinaires comme des moines, des sorcières, des prêtres
égyptiens, des atlantes, des templiers. Mais rarement des
plombiers, employés de bureau, boucher, ménagères…
Autres croyances pouvant expliquer ces observations
troublantes
- Réincarnation à « l’africaine » : Les ancêtres défunts dans
l’au-delà, restent en communication avec les vivants. Il
arrive qu’un enfant soit pris en charge par l’esprit du grand-
père décédé qui lui insuffle son énergie, son esprit, ses
pouvoirs. Cette relation peut aller de la simple influence
jusqu’à la possession du corps par l’esprit du mort.
- Spiritisme : Les morts pourraient entrer en communication
avec les vivants par des techniques diverses, mais en
particulier par l’intermédiaire de personnes ayant des
qualités médiumniques. Ils pourraient alors leur « parler »,
« donner des révélations », « utiliser leur voix », « posséder
leur corps » et donc s’exprimer à travers elles.
- Télépathie et télé-empathie : Non seulement la
communication à distance par la transmission de pensée ;
mais communication avec le passé, les objets vivants ou
134
inanimés (arbres, maisons, églises, pierres) qui nous
entourent témoins impassibles dans le temps de tant
d’évènements.
- 52Une théorie sans réincarnation, sans Dieu, sans âme :
On pourrait dire « scientifique » donnerait une réponse à
toutes ces observations troublantes. Lorsque nous mourrons,
notre corps se transforme en « poussière » d’atomes qui se
répand dans l’atmosphère. Ces « poussières » sont remplies
des potentialités, souvenirs, énergies, esprit des morts. Ainsi
dans l’espace tout autour de nous circulent des poussières de
Napoléon, César, Einstein, Louis XIV, Jeanne d’Arc, Victor
Hugo… que nous respirons à chaque instant. Nous sommes
plus ou moins réceptifs à leurs influences. Certaines
personnes le sont à un point tel qu’elles peuvent (sous
certaines conditions : états paranormaux, médiumniques,
hypnose…), voir, ressentir, entendre, exprimer, vivre ce que
les morts célèbres ou anonymes ont vu ressenti, entendu,
exprimé, vécu.
Dix-septième point : D’une part, la croyance en la
réincarnation est souvent fondée par des idées fausses et l’on
constate que d’autres croyances répondent logiquement aux
questions existentielles de l’être, de Dieu et du monde.
D’autre part, donner une réponse logique ou satisfaisante en
aucun cas ne signifie donner obligatoirement la vraie
réponse.
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