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MORT
Dans cette anthologie le thème choisi est : « la mort » ; bien que cela puisse paraître
macabre et déplacé d’en parler, elle est présente au quotidien dans notre vie : journaux,
télévision, livres… car la mort est l’un des cycles les plus mystérieux de la vie et aussi le
dernier. La mort est en effet une réalité qui nous rattrape tous à un moment ou un autre,
nous sommes tous concernés par elle, et même les plus grands des poètes y ont pensé.
La mort est d’abord effrayante. Elle correspond à un moment de notre vie que nous devrons
affronter tout en sachant qu’il faudra perdre contre elle. Charles Baudelaire l’a bien compris,
puisque dans son poème « l’horloge », il nous décrit la mort comme un mécanisme
immuable et toujours gagnant, rappelant terriblement à chaque instant l’homme à la triste
réalité de son existence. Ce poème, fataliste, nous montre à quel point la mort nous obsède
car elle est une éternelle patiente.
Le même auteur cependant nous montre que tout n’est pas fini après la mort. A travers « La
mort des amants », Charles Baudelaire nous conte l’histoire de ce couple qui, s’unissant dans
le plaisir et échangeant l’unique et dernier éclair chargé d’adieux, se retrouve finalement au
paradis. Le poète croit donc à une vie après la mort, il donne l’espoir qu’un jour les êtres qui
se sont aimés se retrouveront comme sur la Terre.
Cependant, elle est un évènement qui frappe au jugé, sans avertissement. C’est ce que nous
dépeint Paul Eluard à travers « Notre vie ». La mort prend sa femme, soudainement, sans
sommation.
L’amour est donc sujet à la mort comme les hommes : c’est ce que Pierre de Ronsard nous
démontre à travers « Sur la mort de Marie ». La mort qui, comme pour Paul Eluard, ravit un
être cher, et met fin à l’amour. La puissance du sentiment amoureux est ternie par le trépas,
et il ne reste plus au poète qu’à attendre la fin pour retrouver l’être aimé.
Et c’est par l’éclipse qu’elle se matérialise selon Agrippa D’Aubigné. En effet, dans « Voici la
mort du ciel » le cœur du monde et de l’univers, comme on le pensait à l’époque, est le soleil.
Par sa lumière et sa chaleur, il donne la vie.
Il nous faut savoir que si la mort est terrible et universelle, elle peut néanmoins être
didactique. C’est ce qu’a compris La Fontaine qui dans sa fable « La Mort et le bûcheron »
nous donne une leçon de morale fort intéressante : quelle que soit la peine d’un homme, la
mort est la dernière solution aux problèmes.
Ronsard choisit d'évoquer dans ses Derniers vers, avec une émouvante simplicité, l'approche
imminente de sa propre mort. « Je n'ai plus que les os... », Le sonnet liminaire de ce court
recueil publié par ses amis juste après sa disparition nous présente un tableau saisissant de la
dégradation physique du poète, tout en célébrant la valeur consolatrice de l'amitié. Ronsard
nous propose une évocation réaliste et baroque de la mort.
La mort peut aussi inspirer les poètes dans leur style. Ainsi, dans « Epitaphe d’Arnauld »
Nicolas Boileau écrit ses vers comme si la mort pouvait le prendre d’un instant à l’autre : il se
met dans la peau d’un condamné à mort qui voit les secondes inéluctablement passer et les
visages l’abandonnant ; ce poème est écrit en hommage d’Antoine Arnauld.
Puis dans le sonnet « Enterrement », de Paul Verlaine, le poète nous offre une nouvelle
description du rapport à la mort. Il serait dès lors intéressant de nous interroger sur la mise
en place d’un cynisme de l’observation, en étudiant, dans un premier temps le cynisme
grinçant, puis, dans un second temps, la communion d’indifférence autour de l’évènement,
pour, enfin, retourner à notre tour le poème et réfléchir à son ambiguïté.
Enfin, nous finirons sur un poème tranquille et paisible en apparence : « Le dormeur du Val »,
d’Arthur Rimbaud. Il y décrit la paix éprouvée par un jeune soldat dormant dans ce val. Seul
le dernier paragraphe de ce sonnet nous surprend, comme une chute inattendue : il est mort.
Cette mort ne revêt qu’un visage de paix, paix que le soldat, paradoxalement alors qu’il
symbolise la guerre, ressent.
« L’HORLOGE »
« L’horloge » est un poème de Charles Baudelaire et appartient au recueil
Les Fleurs du mal paru en 1857. « L'Horloge » est le tout dernier poème de
Spleen et idéal. La structure du poème rappelle la structure du temps
utilisée par l'horloge : 24 vers, comme les 24 heures d'une journée ;
chaque quatrain compte quatre vers, comme autant de quarts d'heure. Les
rimes sont alternées, rappelant le mouvement de va-et-vient du balancier.
Tableau de Caravage
Le créancier, et la corvée
Lui font d'un malheureux la peinture achevée.
Il appelle la Mort. Elle vient sans tarder,
Lui demande ce qu'il faut faire.
« C'est, dit-il, afin de m'aider
A recharger ce bois; tu ne tarderas guère. »
Le trépas vient tout guérir;
Mais ne bougeons d'où nous sommes:
Plutôt souffrir que mourir,
C'est la devise des hommes.