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Ce qui nous manque, c’est une connaissance de la gloire de Dieu, qui façonne
l’intelligence, ainsi que le bonheur de nous délecter dans tout le poids de cette
gloire, dans une joie indicible transformant tout notre être. La gloire de Dieu -
le Dieu trois fois saint, juste, entièrement souverain, dont la sagesse et la
bonté sont infinies – fait défaut. La connaissance de Dieu repose
superficiellement sur l’Eglise en Amérique. Dieu n’est pas pris au sérieux.
David Wells dit sans détours :
" C’est ce Dieu majestueux et saint dans tout Son être, ce Dieu
dont l’amour ne connaît pas de limites, parce que sa sainteté ne
connaît pas de limites, c’est ce Dieu là qui a disparu de notre
monde évangélique moderne. " (2)
Sa formule peut paraître exagérée mais elle est certainement tout à fait
justifiée.
" Par conséquent, le simple fait de considérer que Dieu est Dieu
devrait être amplement suffisant pour faire cesser toute objection ou
toute opposition à ses souveraines prescriptions. " (3)
Lorsque Jonathan s’imposa silence et contempla la grande vérité que " Dieu
est Dieu ", il vit un Etre majestueux dont l’existence éternelle, pure, absolue,
précédée d’aucune cause, impliquait une puissance infinie, une connaissance
infinie et une sainteté infinie. Il poursuit son argumentation en ces termes :
Lorsque Jonathan Edwards fit silence et sut que Dieu est Dieu, la vision qu’il
avait devant les yeux était celle d’un Dieu absolument souverain, autosuffisant
en Lui-même et tout-suffisant pour Ses créatures, infini en sainteté, et par
conséquent parfaitement glorieux, - c’est-à-dire infiniment beau dans toutes
Ses perfections. Les actions de Dieu ne sont ainsi jamais motivées par un
besoin de combler Ses déficiences (puisqu’Il n’en a aucune), mais sont
toujours motivées par le désir passionné de manifester Sa glorieuse toute-
suffisance (qui est infinie). Tout ce qu’Il fait, absolument tout, Il le fait pour
manifester Sa gloire.
" Tout ce que disent les Ecritures à propos du but ultime des œuvres
de Dieu se trouve inscrit dans cette unique expression : la gloire de
Dieu… Elle est comme un astre qui brille sur et dans Ses créatures,
et dont la lumière, par réflexion, revient vers le luminaire. Les rayons
de la gloire viennent de Dieu, et sont une émanation de Dieu, qui
retournent à Lui, la source originelle, de sorte que tout ce qui existe
est de Dieu, et en Dieu, et revient à Dieu, et que Dieu est le
commencement, le développement et la fin de toute Son œuvre. " (5)
Voilà l’essence de la vision sublime d’un Dieu souverain sur toutes choses
qu’avait Edwards. Dieu est le commencement, le milieu et la fin de toutes
choses. Rien ne peut exister sans qu’Il l’ait créé. Rien ne peut subsister sans
le soutien permanent de Sa Parole. Toutes choses trouvent leur raison
d’exister de Lui. Ainsi, rien ne peut être compris sinon en Lui. Toute
connaissance qui fait abstraction de Dieu n’est qu’une connaissance
superficielle car elle met de côté la plus importante réalité dans l’univers. Nous
arrivons difficilement à saisir aujourd’hui combien nous sommes devenus
ignorants de Dieu, parce que l’air que nous respirons est imprégné de cette
ignorance…
C’est pourquoi j’affirme que cette vision sublime de Dieu souverain sur toutes
choses qu’avait Edwards est non seulement rarissime mais qu’elle nous est
extrêmement précieuse. Si nous ne partageons pas cette vision, nous ne
pourrons rejoindre Dieu sciemment dans les desseins qu’Il avait lorsqu’Il a
créé l’univers. Si nous ne nous alignons pas sur le dessein que Dieu a établi
pour l’univers et que nous ne contribuons pas à son déploiement, alors nous
ne ferons que gaspiller notre vie en nous opposant à notre Créateur.
Ecoutons-le décrire la joie de Dieu d’être Dieu, qui se mêle et ondule avec la
joie que nous éprouvons de savoir et d’expérimenter qu’Il est Dieu :
" Parce que [Dieu] accorde une valeur infinie à Sa propre gloire, qui
consiste dans la connaissance de Lui-même, à l’amour de Lui-même…
et à Sa propre joie en Lui-même, Il chérit l’image de ces choses dans la
créature, et Se donne également un soin tout particulier à leur les
communiquer et partager. C’est parce qu’Il s’estime Lui-même qu’Il Se
délecte à voir Ses créatures entrer dans Sa connaissance, dans Son
amour et dans Sa joie. Il est Lui-même l’objet de cette connaissance, de
cet amour et de ce contentement de soi. La considération qu’Il a pour le
bien de Ses créatures est égale à la considération qu’Il a de Lui-même ;
il ne s’agit pas de deux choses différentes, mais les deux considérations
sont réunies en une seule, du fait que le bonheur qu’Il désire pour Sa
créature est le bonheur de la voir en union avec Lui-même." (6)
En d’autres termes, pour que Dieu soit le Dieu saint et juste qu’Il est, Il doit Se
délecter infiniment dans ce qui est infiniment délectable. Il doit apprécier avec
une joie illimitée ce qui est appréciable sans limite. Il doit prendre infiniment
plaisir dans ce qui est infiniment agréable. Il doit aimer avec une intensité
infinie ce qui est infiniment aimable. Il doit être infiniment satisfait de ce qui
satisfait de manière infinie. S’Il ne le faisait pas, Il serait faux. Déclarant être
sage, Il serait fou, car Il échangerait la gloire de Dieu contre des images. La
joie que Dieu éprouve en Lui-même fait partie intégrante de ce que signifie
pour Lui être Dieu.
Mais allons encore plus loin. Edwards rend ces choses évidentes lorsqu’Il
résume sa vision spectaculaire de la vie interne de la Trinité, c’est-à-dire la
vie interne de ce que c’est pour Dieu que d’être Dieu en trois Personnes :
" Le Père est la déité qui existe et demeure depuis toujours, sans
origine et de la manière la plus absolue, ou encore la déité dans son
existence directe. Le Fils est la déité [éternellement] générée par
l’entendement de Dieu, ou ayant l’idée de Lui-même et existant dans
cette idée. Le Saint-Esprit est la déité qui existe en acte, ou l’essence
divine à la fois s’écoulant comme un souffle de l’amour infini de Dieu
qu’Il a pour Lui-même et du plaisir infini qu’Il a en Lui-même ; et inhalée
dans cet amour et ce plaisir infinis de Dieu pour et dans Lui-même. Et
[…] l’essence divine complète subsiste véritablement et distinctement
dans l’idée divine et l’amour divin, et chacun d’eux est, à proprement
parler, une personne distincte. " (7)
Il est impossible de trouver dans l’univers une joie plus élevée que celle-là.
Rien de plus extraordinaire ne peut être dit au sujet de la joie que de dire
qu’une des Personnes de la Divinité subsiste dans l’acte qui consiste pour
Dieu de Se délecter en Dieu – que la joie ultime et infinie est la Personne du
Saint-Esprit. Lorsque nous parlons de la place qu’occupe la joie dans nos vies
ou dans la vie de Dieu, il ne s’agit pas d’un divertissement quelconque. Nous
ne traitons pas d’un sujet accessoire. Nous parlons d’une réalité infiniment
importante. Ainsi, la joie est au cœur de ce que cela signifie pour Dieu d’être
Dieu. Maintenant, voyons en quoi la joie est au cœur de ce que cela signifie
pour nous de glorifier Dieu. C’est directement une conséquence de la nature
de la Trinité. Dieu est le Père qui Se connaît Lui-même dans Son Fils divin, et
Dieu est le Père qui Se réjouit en Lui-même par Son divin Esprit. Ceci étant
posé, Jonathan Edwards établit un lien entre le fait que la joie qu’éprouve Dieu
à être Dieu Se trouve au cœur du la réalité de ce que nous glorifions Dieu. Ce
que je suis sur le point de lire a été pour moi le paragraphe qui m’a le plus
influencé de tous les écrits d’Edwards :
Voilà la grande découverte qui change tout. Dieu est glorifié par notre être qui
se satisfait en Lui. La finalité suprême de l’homme n’est pas simplement de
glorifier Dieu ET de nous délecter de Lui pour toujours, mais de glorifier Dieu
en nous délectant en Lui pour toujours. Je pensais qu’il n’y avait rien de
commun entre la passion de Dieu pour Sa propre gloire et ma passion pour
la joie. Mais ces deux réalités ne font qu’une, si toutefois ma passion pour la
joie est la passion pour la joie en Dieu. La passion de Dieu pour la gloire de
Dieu et ma passion pour la joie en Dieu sont une seule chose.
Jonathan Edwards traduit cette pensée comme suit : " Personne, à mon avis,
ne peut dire que la recherche de son propre bonheur soit exagérée. (9) " Cette
recherche passionnée du bonheur, bien entendu, peut être orientée vers de
mauvais objets, mais en aucun cas être trop forte (10). Edwards mit en avant
cette idée dans un sermon qu’il prêcha sur le Cantique des Cantiques,
chapitre 5, verset 1 : " Mangez, amis, buvez, enivrez-vous de tendresse " d’où
il tira la doctrine suivante : " Les chrétiens n’ont pas besoin de mettre des
limites à leurs appétits spirituels stimulés par la grâce, et ils ne devraient pas
le faire. " Bien plutôt, ils devraient, dit-il,
" s’efforcer, par tous les moyens possibles, d’enflammer leurs désirs
et d’obtenir davantage de plaisirs spirituels […] Notre faim et notre soif
de Dieu, de Jésus-Christ et de sainteté ne peuvent être trop grands,
en comparaison avec la valeur de ces choses, car il s’agit de choses
infinies […] ! [Ainsi donc] faites tous vos efforts pour augmenter vos
appétits spirituels, en vous parant de charme pour attirer le Bien-
aimé… (11) Rien n’est comparable à notre consommation excessive
de cet aliment spirituel. Il n’y a pas de vertu plus grande que la
modération dans les festins spirituels. (12) "
Ceci amena Edwards à définir comme suit sa propre prédication et les buts
élevés de son propre ministère :
La réponse est " non " : l’appel qu’adresse Edwards aux chrétiens à avoir un
cœur émerveillé et plein d’extase pour Dieu ne leur confère pas une position
centrale. En effet, cet appel signifie que toute exaltation, toute joie qui n’est
pas expérimentée, de façon ultime, comme joie en Dieu, est idolâtrie. Comme
Saint Augustin le mentionnait dans ses prières : " Ce n’est pas assez T’aimer
que d’aimer avec Toi quelque chose d’autre, que l’on n’aime pas pour ton nom
et pour Toi " (15)
Objection n° 2 :
Objection n°3 :
Cela est à la fois étonnant et vrai. Et si vous êtes à Christ depuis un certain
temps et que vous avez conscience du péché qui habite en vous, vous avez
dû vous apercevoir de cette réalité. Oui, il y a la repentance. Oui, il y a des
larmes de remord, et un brisement dans le cœur. Mais ils proviennent du fait
que vous avez de nouveau goûté dans votre âme aux plaisirs qui se trouvent
à la droite de Dieu, et que, jusqu’alors, vous aviez méprisés.
Objection n°4 :
Objection n° 5 :
Ceci serait effectivement une objection très convaincante dans un monde tel
que le nôtre, si rempli de souffrances et tellement hostile au christianisme, s’il
n’y avait pas la souveraineté et la bonté de Dieu. Edwards reste ferme dans
sa conviction biblique que Dieu est l’auteur de toutes les afflictions qui
surviennent dans la vie des saints, ayant le dessein d’augmenter leur joie
éternelle.
Objection n° 6 :
Objection n° 7:
Il est vrai qu’Edwards a utilisé cette expression : " amour désintéressé " en
relation à l’amour porté à Dieu.
Il n’y a pas d’amour qui puisse s’élever un tant soit peu au dessus du
principe de l’égoïsme, autre que l’amour chrétien ; pas d’amour aussi
libre et désintéressé, et dans l’exercice duquel Dieu est tant aimé parce
qu’Il est Dieu et pour Lui-même." (22)
Mais la clé qui nous permet de comprendre ce qu’il a voulu dire se trouve dans
la dernière citation d’Edwards. L’amour désintéressé pour Dieu consiste à
aimer Dieu " parce qu’Il est Dieu et pour Lui-même. " En d’autres termes,
Edwards utilisait l’expression " amour désintéressé " pour désigner l’amour
qui se délecte en Dieu en raison de Sa propre grandeur et de Sa beauté, et
pour le distinguer de l’amour qui ne trouve ses délices que dans les dons de
Dieu. L’amour désintéressé n’est pas un amour dénué de plaisir. C’est l’amour
dont le plaisir se trouve en Dieu Lui-même.
En fait, Edwards dirait qu’il n’y a pas d’amour pour Dieu s’il n’est pas une
satisfaction délicieuse en Dieu. Et s’il existe une forme d’amour désintéressé
envers Dieu, il existe aussi une forme de délectation désintéressée en Dieu.
Il nous dit par exemple :
" Il en est de même de l’amour des saints, de leur joie, de leur délectation
spirituelle ou de leur bonheur : leur premier fondement ne se trouve pas
dans l’intérêt que les saints ont dans les choses divines, mais dans le
doux et agréable bonheur dont jouit leur esprit à la vue […] de la divine
et sainte beauté de ces choses dans ce qu’elle sont en elles-mêmes. "
(23)
Le premier " intérêt " dont il parle et qu’il élimine ne concerne pas " le doux et
agréable bonheur. " " Intérêt " signifie les bénéfices reçus, qui sont autres que
les délices vécus en Dieu Lui-même. Et l’amour désintéressé, c’est ce " doux
et agréable bonheur " ou la joie de connaître Dieu pour Lui-même. (24)
Objection n° 8 :
On pourrait effectivement voir les choses ainsi. Toutes les vérités peuvent être
tordues ou mal appliquées. Si cela doit arriver ici, ce ne sera pas la faute de
Jonathan Edwards, car sa vision exaltant Dieu ne fait pas de l’homme une
personne présomptueuse, mais le rend doux. Ecoutez ces mots magnifiques
au sujet de la joie expérimentée par un cœur brisé :
" Les affections pleines de grâce qui sont un doux parfum pour notre
Seigneur Jésus-Christ, et qui remplissent l’âme du chrétien d’une
douceur et d’une flagrance célestes, sont toutes des élans de tendresse
manifestés dans un cœur brisé. Un véritable amour chrétien, soit pour
Dieu, soit pour les hommes, est un amour humble jaillissant d’un cœur
brisé. Les désirs des saints, tout aussi fervents qu’ils puissent être,
revêtent le caractère de l’humilité. Leur espoir est un espoir humble ; et
leur joie, même lorsqu’elle est indicible et saturée de gloire, est une joie
humble et jaillissant d’un cœur brisé. Elle rend le chrétien plus pauvre
encore en esprit, et semblable à un petit enfant, davantage disposé à
toujours plus d’humilité universelle dans tout son comportement. " (25)