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UEF Histoire Enseignant : M.

De Vergnette François-Régis
Matière : Histoire de l’Art Moderne Etudiant : 6154612

Histoire de l’Art Moderne

Introduction :
a) le concept de la Renaissance :

Le terme de « Renaissance » apparait en Italie dès le XIVème siècle, notamment avec


les poètes Pétrarque et Dante. Il s’agit de renouer avec la beauté antique, et de tourner le dos à
l’art gothique (l’art des Goths). Vasari, en 1550, utilise le terme de « rinascita » dans La Vie
des Meilleurs peintres, sculpteurs et architectes. Le terme de « Renaissance » apparait traduit
de l’italien au XIXème siècle, notamment chez des auteurs tels que Balzac ou Burckhardt.
Vasari a conscience d’un style moderne, d’un style qui veut renouer avec l’Antiquité.

b) la renaissance comme civilisation :

On passe d’une conception du monde centrée sur Dieu à une conception


anthropocentrique du monde. La Renaissance met l’Homme au centre du monde. Pic de la
Mirandole nous dit « Il n’y a rien de plus admirable dans le monde que l’Homme ». Michelet
dit, en 1855, que « la Renaissance est la découverte de l’Homme et la découverte du Monde ».
C’est une époque où il y a de nombreuses études anatomiques. Pétrarque se disait humaniste.
Humaniste vient du terme « humanista » : Il s’agissait, dans l’Antiquité, de désigner ceux qui
distinguaient l’Homme de la Brute. Or, cela passe par la rhétorique, la poésie, l’Histoire, la
morale. Les humanistes recherchent donc les manuscrits de l’Antiquité. On met en avant la
rationalité, la tolérance, on voit presque une forme de laïcisation de la pensée.

c) la Renaissance comme style :

Le retour aux sources antiques n’est pas la seule caractéristique de la Renaissance.


André Chastel dit que « L’héritage antique ne peut définir un style ». A la base de la
Renaissance artistique, il y a le désir d’imiter la nature et la réalité. L’œuvre d’Art était avant
conçue, non pas par rapport à un objet naturel, mais par rapport au divin. Le désir d’imitation
du réel est appelé Mimesis (terme utilisé par Aristote dans La Poétique). La perspective va être
inventée durant cette période qu’est la Renaissance.

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L’art antique est un modèle d’imitation de la nature. Il y a l’idée que l’Art est un
processus intellectuel ; c’est-à-dire que l’artiste invente des images dans son esprit. L’art est
une question d’Idea (c’est-à-dire l’idée que l’artiste se fait avant d’utiliser sa main). L’artiste à
la Renaissance acquiert un nouveau rang social, il est l’égal des artistes libéraux (arts libéraux,
musique grammaire…). Au Moyen-Âge, les peintres étaient associés aux arts mécaniques. Les
peintres et les sculpteurs étaient dans des corporations, comme les artisans. L’Art a un
fondement désormais théorique.

Vasari fait commencer le Renaissance au XIVème siècle. Il considère que la première


étape du style moderne, c’est Giotto, au début du XIVème siècle (pourtant laissé au Moyen-
Âge) en raison de sa recherche du volume. Il n’y a cependant pas eu de continuité entre Giotto
et ses successeurs. Ce n’est qu’au XVème siècle que la démarche artistique est incluse dans le
nouveau système de pensée qu’est l’Humanisme. On y voit une rupture avec l’Art médiéval
dans la peinture, la sculpture et l’architecture.

d) Principales nouveautés de l’art du Quattrocento :

La rupture avec l’art médiéval s’est faite à Florence au début du XVème siècle. Elle va
d’abord toucher l’architecture et la sculpture. Les vestiges antiques conservés sont
essentiellement issus de l’architecture et de la sculpture. On ne connait de la peinture antique
que des descriptions, comme celles faites par Pline l’Ancien.

L’architecture religieuse est encore la plus importante, malgré une certaine laïcisation
de la pensée. Brunelleschi va faire retour, au début du XVème siècle, aux ordres antiques
(dorique, ionique et corinthien, qui sont des styles architecturaux). Il renoue notamment avec
l’arc plein centre et avec le vocabulaire antique. Le principal, c’est la reprise de l’idée de
proportion. L’architecture va utiliser des systèmes de proportions pour atteindre l’idée de beauté
harmonieuse. Il y a une utilisation de formes symboles de la perfection divine (cercle et carré).
Le plan le plus apprécié de l’époque va être le plan centré.

L’architecture de Brunelleschi est faite avec de la pietra serena (structure de l’édifice,


c’est une pierre grise locale) les murs sont en brique revêtis d’un crépi clair. Elle va influencer
Michel-Ange pour la chapelle de Saint-Laurent.

Alberti va lui appliquer les ordres sur une façade d’un pallier florentin. C’est un projet
civil. Sur la façade, il plaque des pilastres avec des chapiteaux toscans et corinthien. L’idée de

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la superposition des ordres est reprise du Colysée de Rome. Alberti va écrire un traité
d’architecture, repris des textes de Vitruve.

Alberti, Saint André de Mantoue, construction démarrée en 1472 :

Alberti va faire le projet de la façade de Saint André de Mantoue. Il y a une différence


entre celui qui fait le projet, et ceux qui le réalisent. Pour cette dernière, Alberti va s’inspirer de
l’arc de triomphe, probablement l’arc de Trajan en cône. Il reprend l’arche centrale et deux
travées plus réduites (espaces travétaire, espace entre deux colonnes, entre deux pilastres).
Alberti utilise le motif de l’arc de triomphe, car c’est celui de la victoire du général ; il s’agit
donc de faire le parallèle avec Jésus qui triomphe de la mort.

Alberti est très important dans l’histoire de l’architecture européenne, car il créé le
langage classique de l’architecture, qui va régner jusqu’au XIXème siècle, sinon jusqu’au début
du XXème siècle. Il y a une volonté de continuité entre l’extérieur du bâtiment et l’intérieur du
bâtiment. On retrouve le rythme de la façade sur les bas-côtés de l’édifice. Il y a des caissons
sur la voûte en berceau, caissons inspirés par le panthéon (autre monument antique). En Italie,

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il y a peu de château, il y a surtout des villas à partir du XVème siècle et jusqu’au XIXème
siècle. On reprend le terme utilisé par Vitruve et dans les lettres de Pline le Jeune. Les villas
suburbaines sont à côté de la ville, à l’inverse des villas agricoles.

Giuliano da Sangallo, Villa de Poggio, Caiano :

Laurent le Magnifique (Laurent de Médicis) prévoit de faire construire une villa où il


pourrait exercer l’otium (l’oisiveté, le loisir de l’homme de culture). Il fait donc la commande
de la villa de Poggio, à Caiano, villa réalisée entre 1485 et 1495. Les travaux de la villa sont
stoppés durant l’exil forcé des Médicis, qui sont chassés de Florence.

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Donatello, David, 1430-1432, Florence, musée national du Bargello

Dans le domaine de la sculpture, on une grande inspiration des statues de nu masculin


de l’Antiquité. C’est le cas du David de Donatello. C’est le premier nu grandeur nature depuis
l’Antiquité. Donatello a choisi de représenter un héros biblique, David, symbole avec Hercule
du citoyen modèle, protecteur. Or, le nu est associé à Eve et Adam au Moyen-Âge. Avec
Donatello, le nu devient la caractéristique du héros, du héros biblique. La jambe droite de David
porte son corps tandis que l’autre est au repos. Donatello réintroduit l’attitude du contrat des
poses (contrapposto) dans l’art occidental. Certains artistes vont délaisser ce procédé pour
représenter un homme debout. Rodin représentera une figure humaine les deux pieds à plat par
exemple.

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Donatello, Monument équestre dit « Gattamelata », 1446-1453, Padoue, place su


Santo :

Donatello va réintroduire également le thème de la statue équestre, dont on conservait


un exemple de l’antiquité (la statue en bronze de Marc-Aurèle). Il réalise le monument équestre
d’Erasma à Padoue, sur la place du Santo. La statue représente un Condottiere (chef militaire
mercenaire des armées de Venise). Le thème de la statue équestre reviendra à Florence,
notamment avec la statue équestre de Cosme Ier par Jean de Bologne. La statue équestre est
impossible dans la République de Florence au XVème siècle, il faudra attendre que Florence
ne devienne un duché pour voir une statue équestre sur une place publique. Sur ces statues, on
retrouve des angelots, des putti.

La perspective est inventée vers 1420 par l’architecte Brunelleschi (sculpteur et


architecte). Il va faire deux panneaux avec des vues d’architecture. La perspective est dite
artificielle, géométrique ou mathématique (la perspective naturelle c’est l’optique). C’est un
système arbitraire qui suppose que le spectateur est immobile et ne regarde qu’avec un seul œil
un objet qui est placé à une certaine distance. On parle de perspective centrée et monofocale.
Ce procédé permet de résoudre les problèmes de proportion. On peut jouer sur les distance. Il

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permet de rendre la diminution ou l’agrandissement des objets par rapport à nous. Cela passe
par des lignes de fuite en perspective qui convergent vers un point de fuite.

Masaccio, la Trinité :

Brunelleschi va voir ses idées adaptées par Masaccio. Pour Vasari, c’est l’inventeur du
style moderne. Dans sa fresque de la trinité (à Santa Maria Novella à Florence), on trouve la
voûte et ses lignes qui convergent vers le point de fuite : l’entrée de la chapelle fictive (car c’est
une fresque).

Il y a la peinture mobile et la peinture monumentale (liée à un mur). La fresque vient du


mot fresco qui signifie « frai ». La fresque de Masaccio utilise le procédé de la bonne fresque,
faite sur du plâtre frai et humide. C’est une technique qui demande une grande rapidité. L’œuvre
est faite en plusieurs journées, à chaque journée correspond une partie de la fresque. Masaccio
part d’un style dur. C’est la deuxième phase du renouveau de l’Italie pour Vasari.

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Le décor de la chapelle Brancacci dans l’église du Carmine à Florence est un autre


ouvrage de Masaccio resté célèbre. Il représente l’Expulsion du Paradis. Il insiste sur le fait que
les figures d’Adam et Eve ont les pieds ancrés au sol.

Dans le domaine du tableau, Alberti recommande pour les peintres un quadrilatère fait
d’angles droits. Il fait une comparaison « une fenêtre ouverte par laquelle on puisse regarder
l’histoire ».

Fra Angelico, Pala de Cortone :

Fra Angelico utilise le retable (panneau de bois installé derrière l’autel). En 1430, Fra
Angelico a l’idée que le retable soit fait en un panneau rectangulaire, unifié. C’est la Pala
moderne, qui annonce le tableau moderne. Dans ce panneau, on a des épisodes secondaires de
l’histoire de Marie (hors dans la partie centrale). On retrouve la technique de la pigmente
(mélange des pigments de peinture avec du blanc d’œuf).

Les thèmes profanes de l’histoire contemporaines commencent à apparaitre sur les


panneaux de bois.

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Paolo Uccello, Bataille :

Paolo Uccello réalise une œuvre qui représente la bataille de San Romano. Le goût pour
une iconographie profane est à relier au mouvement humaniste. Un autre exemple de thème
profane est le portrait.

Piero della Francesca : Portrait des Montefeltre

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On trouve par exemple le portrait du duc d’Urbino (Federico da Montefeltro et de son


épouse Battista Sforza), diptyque réalisé en 1472 par Piero Della Francesca. Le procédé de la
peinture à l’huile permet de rendre avec une grande précision la chair, la peau. Cela passe par
des couches transparentes. La technique de l’huile sur toile est notamment reprise et utilisée par
Van Eyck.

Botticelli, Naissance de Vénus :

La Vénus de Botticelli est commandée par un membre de la famille Médicis. Botticelli


s’inspire d’une description d’une œuvre d’Apelle, peintre d’Alexandre le Grand, mentionné
chez Pline l’Ancien. Botticelli sera surnommée le Nouvel Apelle. Cette œuvre est inspirée des
convictions néoplatoniciennes. Ici, il s’agit de la naissance de la beauté idéale. Le côté idéaliste
de l’art de Botticelli est traduit par le dessin très stylisé, le dessin irréaliste. On peut parler de
style dur quand l’on voit des contours très nets. Les artistes du XVIème siècle reprendront
Masaccio plus que Botticelli.

A partir de 1450, on utilise en Italie la toile, plus pratique que le bois. Les vénitiens vont
notamment privilégier la toile.

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I/ La Renaissance Classique (1490-1520) :


Vasari note l’émergence du troisième style de l’art de la Renaissance, le style moderne,
qui nait avec Léonard de Vinci, qui l’inaugure, Raphaël, puis Michel-Ange, qui devient l’idéal
de la base artistique. La statue antique Laocoon est découverte en 1506. C’est l’exemple d’une
antiquité dramatique très expressive. Vasari, florentin, laisse de côté les artistes vénitiens.

On parle de renaissance classique, on parle de modèle pour l’art européen, bien avant le
XIXème siècle. Vinci, Michel-Ange et Raphaël donnent des exemples de la perfection artistique
équilibrant mimesis (imitation de la nature) et idéalisme. C’est Vasari qui a donné cette idée de
renaissance classique dans son ouvrage de 1550. Il parle d’une troisième phase de la
Renaissance, du troisième style (maniera). Pour Vasari, l’origine de ce style est reliée aux
découvertes d’antiques à Rome à la fin du XVème siècle, comme les œuvres de la collection
Della Rovere (futur pape Jules II), qui comprennent l’Apollon du Belvédère. Raphaël est le plus
jeune, il est de 1483.

Les villes où se développe le style classique sont nombreuses : Florence, Rome et Milan.
A partir du pontificat de Jules II, on cherche à rendre à Rome la splendeur de la Rome antique.
A Venise la renaissance classique est basée sur la couleur. Wölfflin dans son Art Classique
parle d’un art imitant la nature et d’un art idéal. Le sens de la grandeur et de la simplicité sont
aussi caractéristiques de cette période. Il y a le choix d’une certaine gravité, notamment dans
les arts figuratifs.

1) Les débuts de la Renaissance classique à Milan et à Florence - Vinci, Michel-Ange,


Raphaël :
Léonard de Vinci :

Il inaugure l’art classique, c’est un florentin formé dans l’atelier du sculpteur et peintre,
aussi portraitiste, Verrocchio, auteur d’une statue équestre vénitienne. Verrocchio inclue dans
ses portraits des sourires. De Vinci est envoyé par Laurent de Médicis (Laurent le Magnifique)
comme musicien, porter une lyre en argent, auprès de Ludovic Sforza, duc de Milan. Les Sforza
succèdent aux Visconti. La Renaissance florentine est une grande période par les créations faites
à Florence, mais aussi par Laurent de Médicis, qui a contribué à façonner l’image de la
Renaissance. En 1485, Léonard de Vinci vante dans une lettre à Ludovic Sforza (dit le Maure)
ses talents d’ingénieur et de peintre sculpteur. Il dit qu’il est capable d’exécuter le cheval de
bronze du père de Ludovic Sforza.

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Vinci appartient à la cour de Ludovic Sforza, il réalise des portraits (comme ceux de la
maitresse de Ludovic), il fait de la mise en scène. C’est un artiste de cour au service d’un
souverain (notion apparue au XIVème siècle en Italie).

Léonard de Vinci, La Cène (1495-1498), détrempe et huile sur mur, 480 x 880 :

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Le réfectoire de Santa Maria delle Grazie, couvent dominicain, contient le célèbre


tableau La Cène de Léonard de Vinci. C’est une commande de Ludovic Sforza, qui a au-dessus
d’elle les armoiries de la famille Sforza. Cette œuvre est pour Vasari la première œuvre de ce
nouveau style. Il s’agit d’une peinture monumentale, décorative, peinte sur un mur. Ce n’est
pas une peinture à la fresque.

La technique de la détrempe : des couleurs à l’eau sont détrempées avec de la colle de


peau (souvent de lapin) et de l’œuf. C’est une technique complexe, or, de Vinci est un
chercheur, il cherche à innover. Vasari, en 1568 écrit que l’œuvre est illisible « c’est une tâche
confuse ». La Cène est située dans le réfectoire. C’est un tableau qui représente le dernier repas
où Jésus institue l’eucharistie et au cours duquel il annonce que Judas va le trahir. Ce choix de
la Cène est très courant à la Renaissance pour un couvent. Andrea del Castagno avait choisi ce
sujet pour le réfectoire de Saint Apollonia.

Vinci va donner du sens à la Cène en plaçant Judas au milieu des apôtres. Saint Jean,
l’apôtre préféré du Christ, est contre Jésus et est quasiment en train de dormir sur l’œuvre de
Castagno, ce qui est choquant pour ce moment « dramatique ». Chez Vinci, la main gauche de
Jésus, paume apparente, présente le pain et le vin ; son geste est en rapport avec l’institution de
l’eucharistie. Ce texte est à relier avec le texte des évangiles. Vinci ne suit pas le texte de Jean,
parce que chez Jean, Judas communie, il prend le pain, trempé de vin des mains de Jésus. Il a
suivi le texte de Mathieu ou de Marc. Dans Marc, les disciples demandent « serait-ce moi » et
Jésus répond que c’est l’un des deux qui communie. Or sur le tableau, Judas, Jean et Pierre
communient. IL s’agirait donc du moment où la nouvelle de la trahison se répand jusqu’au bout
de la table.

De Vinci innove dans la description et la caractérisation des apôtres, chaque apôtre a


des gestes différents : Saint Thomas lève le doigt pour désigner le ciel (son doigt renvoie au
moment où il a touché les plaies de Jésus), Jacques étend les bras, horrifié ou émerveillé,
Philippe met sa main sur sa poitrine (s’interrogeant sur sa culpabilité ?). Il y a une
caractérisation de chaque apôtre. Chez Vinci, l’importance des gestes et des expressions du
visage est omniprésente. Il parle de « mouvements de l’âme » : les mouvements du corps
traduisent les mouvements de l’âme. Il donne un aspect très humain à cette représentation du
dernier repas de Jésus. Vinci veut peindre une scène vraisemblable, il n’y a donc aucune
auréole.

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Jésus est placé devant la deuxième fenêtre d’un groupe de trois fenêtres. Il s’agirait de
suggérer que Jésus est la seconde personne de la trinité. Le plafond est à caissons. On est sur
une composition symétrique, centrée sur le Christ. Les apôtres entourent Jésus.

Les apôtres donnent des formes animées, Barthélémy forme par exemple en quart de
cercle, son dos forme une courbe. Il y a une opposition entre les lignes droites de l’architecture,
la ligne droite de la table et les formes animées des 12 apôtres, divisés en quatre groupes de 3.
Il y a deux groupes qui se répondent symétriquement. Thomas est le plus proche de Jésus, mais
c’est le moins proche du premier plan. Dans le groupe de Thomas, Saint Jacques le majeur est
le plus proche de la table alors que c’est le second. Judas est le troisième de son groupe, mais
est aussi le plus près de la table. Saint Pierre est le plus éloigné de la table.

Sur le côté gauche, les mains sont étendues, et à droite, on a des mains dont on voit la
paume. Ces apôtres sont à la fois tendus vers Jésus alors que d’autres se reculent. Vinci se serait
inspiré du mouvement de l’eau ; on a des dessins de la Cène au recto desquels on trouve de
l’eau. Cette idée est celle de l’unité de l’Homme et de la Nature. Elle est caractéristique de
l’œuvre de Vinci.

Les lignes de perspectives géométriques sont indiquées par les murs, les tapisseries et
le plafond. Elles convergent toutes vers Jésus. Il y a de la perspective atmosphérique
(changement de couleurs entre deux plans). La perspective de la pièce n’est pas dans la
continuité des murs du réfectoires lui-même. Vinci n’a pas prolongé les murs réels du réfectoire.
C’est une pièce fictive idéale qui n’est pas dans la continuité de la pièce réelle.

Pour la lumière, Vinci prend en compte la pièce réelle ; la lumière vient de la gauche,
les groupes de droite sont les plus éclairés. Léonard de Vinci tient compte de l’éclairage réel du
réfectoire, où il n’y a de fenêtres que sur la gauche.

La couleur la plus intense est au niveau du Christ. Plus on s’éloigne du Christ, moins la
lumière est forte. Les apôtres réagissent à ce que Jésus vient de dire, l’intensité de la couleur
part donc de Jésus.

L’usage de l’huile a permis à Vinci de donner des reflets, de peindre des transparences,
des natures mortes (objets peints sur la table).

En 1499, Louis XII prend Milan et envisage de découpe la Cène. Cette œuvre fascine,
Vasari parle d’une œuvre divine.

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Entre 1484 et 1499, de Vinci cherche à faire une statue équestre, après l’œuvre de
Donatello. Il veut faire un groupe colossal de 7m20 de hauteur (deux fois l’œuvre de Donatello).
Il veut faire ce projet avec le duc François Sforza, fondateur de la dynastie. Il va renoncer pour
des questions d’équilibre, les statues équestres cabrées n’apparaitront qu’au XVIIème siècle.
Cette œuvre équestre est un défi technique, mais Ludovic Sforza manquera d’argent. Vinci avait
fait un modèle en argile, lequel va finir sous les coups des Français.

Léonard de Vinci va faire des dessins d’architecture à Milan. Il fait des projets d’église
à plan centré. Vinci a lu Vitruve, qui emploie le cercle et le carré. Vinci multiplie les formes,
souvent carrés avec des coupoles (demi-sphères). Il va inspirer les plans de Saint Pierre de
Rome.

Léonard de Vinci, Bataille d’Anghiari :

De Vinci quitte Milan et vient entre 1500 et 1506 à Florence, République, les Médicis
ayant été chassés par Savonarole. Les Médicis ne reviennent à Florence qu’en 1512. Le
gonfalonier (porte étendard) Soderini, conseillé par Machiavel, gonfalonier à vie en 1502,
commande à de Vinci le décor d’une nouvelle salle du palais vieux ou palais de la seigneurie,
salle du grand conseil de la République. Il commande une peinture décorative de 17mètres de
long et de 7 mètre de hauteur. Vinci abandonne le projet en 1506. Il s’agissait d’une célébration
d’une bataille. Il veut représenter l’ensemble de la bataille, mettre en scène la « folie bestiale ».
Il s’agit d’être au cœur de la violence, au cœur de la bataille. Vinci met des expressions jusque

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chez les chevaux. Il y a beaucoup de détails (cornes de béliers sur la tête, masques effrayants,
dimension fantastique).

C’est une nouvelle œuvre inachevée, après la statue équestre Sforza. De Vinci
commence ensuite un portrait.

Mona Lisa ou La Joconde (1503-1505) :

Il reçoit au printemps 1503 la commande de Fransceco del Giocondo qui commande un


portrait de sa femme de 24 ans, mère de deux enfants. De Vinci veut peindre une femme
comblée, honnête, qui a les accessoires et la pose recommandés à l’époque (voile noir sur les
cheveux…). Elle croise les mains, ne porte pas de bijoux aux doigts. De Vinci renouvelle le
genre du portrait. Mona Lisa est placée dans une loggia : le paysage est en arrière-plan, on voit
le mur de la loggia, avec le départ des colonnes que l’on distingue.

Ce qui intéresse ici de Vinci c’est le mouvement très souple de la Joconde, qui a un bras
très sûr. Le bas de son corps est de profil, elle est assise et son buste se tourne de ¾. Son visage
est de face. Il y a une rotation du buste. Mona Lisa fait un sourire à son mari, lequel est un
sourire très estompé, très léger. Elle n’a pas de sourcils.

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Derrière la Joconde, il y a un paysage de montagne et une série de lacs (un à gauche et


un à droite). Il y a de montagnes rocheuses, de l’eau. De Vinci se serait inspiré de ses études
géologiques. Il fait des cartes sur l’Arno (fleuve de Florence). Il a le projet de réunir des lacs.

En 1503, De Vinci est inspecteur du génie pour la République de Florence. Il tente de


détourner l’Arno. De Vinci fait des analogies entre la nature et l’être humain. Il va rechercher
dans ce portrait une continuité entre la figure et la nature. Cette continuité est suggérée par un
détail : le sourire, qui nait sur le côté droit des lèvres, là où il y a le lac le plus haut dans le
paysage.

Le jeu entre l’ombre et la lumière est repris là-encore par De Vinci : le contour du
menton disparait dans l’ombre, il est estompé dans une zone sombre. Cette ligne estompée avec
de l’ombre est appelée ‘Sfumato’. Vasari dit que cette œuvre montre jusqu’à quel point l’Art
peut imiter la nature : « on croyait plutôt voir la chair que la couleur ».

Sainte Anne, la vierge et l’Enfant, huile sur bois, 1508-1510 :

En 1506, de Vinci part à Milan, appelé par les Français. Il y reste entre 1506 et 1513.
C’est au cours de cette période qu’il va réaliser Sainte Anne, la vierge et l’Enfant. Vinci prend

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le sujet de Sainte Anne (mère de la vierge) et le détourne. Marie se penche vers Jésus pour
l’empêcher de monter sur un agneau. Ce sujet est appelé ‘humanistas trinitas’, la ‘trinité très
humaine’. Masaccio et Masolino donnaient moins de vie à leur œuvre sur le même sujet. On ne
connait pas la ou les personnes qui ont adressé la commande à de Vinci.

Comme pour le cas de la Cène, il s’agit d’un sujet traditionnel auquel on donne de la
vie. La vierge empêche Jésus d’aller sur l’agneau, parce que ce dernier annonce la passion, la
crucifixion de Jésus. On voit dans ce tableau une incarnation de Dieu (en rapport à Jésus).

Vinci dispose ses trois figures et l’agneau dans une composition pyramidale, dans une
sorte de triangle isocèle. Le groupe s’inscrit dans une figure géométrique. D’un côté du triangle
se trouvent les trois têtes, d’un autre côté on trouve l’épaule de Sainte Anne et le dos de la
vierge. C’est une composition monumentale (la pyramide évoque une dimension
monumentale). A l’intérieur de cette pyramide, on a des figures en mouvement. Marie fait un
mouvement vers la droite, il y a un jeu de courbes (bras, dos…). C’est un exemple de la fusion
des trois corps. Les attitudes sont expressives. Il y a un élan de la vierge vers son fils. Jésus est
tourné vers l’agneau, il a déjà un pied dessus mais tourne sa tête vers sa mère.

Les formes de la vierge sont robustes, elle a du volume (épaule, genou sous le vêtement).
De Vinci réutilise la technique du Sfumato (fumée). Le paysage est à la fois montagneux et
aquatique. C’est une œuvre qui est une possible interprétation du monde avant l’incarnation de
Jésus. Il n’y a pas d’indications de la perspective géométrique. C’est un art imitant la nature,
fait d’observation et en même temps un art qui fait des créatures et paysages idéaux.

Cette œuvre est à Paris au musée du Louvre. De Vinci, à sa mort en 1519 cède une
grande partie de ses biens à François Ier.

Michel-Ange (1475- 1564) :

Michel- Ange est l’idéal artistique de Vasari : « C’est celui dont la primauté ne s’exerce
pas dans un art, mais dans les trois ». Il commence par travailler dans l’atelier d’un artiste. A
14 ans, il quitte l’atelier et accepte la proposition de Laurent le Magnifique qui le loge au palais
Médicis et lui permet d’étudier les collections du jardin de Saint Marc à partir de 1489. Il
fréquente les grandes personnalités humanistes de la cour de Laurent le Magnifique. Il est
influencé par les idées néoplatoniciennes. Michel-Ange est un sculpteur de marbre, de Vinci
est plutôt modeleur, porté sur le bronze et l’argile. Pour lui, le beau permet d’atteindre le divin.

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Combat de centaures vers 1492, haut-relief :

C’est un bas-relief, inachevé. Un haut-relief est une sculpture présentant un relief très
saillant sans se détacher toutefois du fond dans toute son épaisseur (opposé au bas-relief).

C’est ici un relief qui montre le corps masculin nu, grande passion de Michel-Ange. Il
y a l’idée que le corps humain est la plus belle création de Dieu. Cette œuvre est inspirée des
textes d’Ovide où est raconté le mariage du roi des Lapithes, qui a invité les centaures. Les
centaures boivent et attaquent les Lapithes. Il s’agit donc d’un thème antique. Thésée va prendre
la défense des Lapithes, il est représenté en entier, il s’apprête à jeter une pierre au chef des
centaures.

On voit à peine les corps de chevaux des centaures. Ce qui l’intéresse ici c’est le corps
masculin. Michel-Ange est passionné par le corps humain et ses torsions. Il n’a aucun intérêt
pour le décor. Cette œuvre est réalisée à l’époque où Laurent le Magnifique règne sur Florence
(il meurt en 1492). On a souvent comparé ce haut-relief aux sarcophages romains comme le
Camposanto de Pise.

Michel- Ange part à Rome entre 1496 et 1501. Il va contempler des œuvres telles que
l’Apollon du Belvédère. Il revient à Florence en 1501, y restera jusqu’en 1505.

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Michel Ange, David :

Il y avait une pierre très étroite, réputée impossible à exploiter. Avec cette pierre, il va
réaliser son David. Un concours est donné, il est remporté par Michel-Ange qui réalise un David
de 4,86m de haut. Lorsque cette sculpture est terminée en 1504, elle parait tellement
exceptionnelle qu’une commission est réunie, laquelle décide qu’il faut installer la statue
surnommée « le géant » devant le palais vieux ou palais de la seigneurie, parce qu’elle
symbolise le gouvernement républicain, ou le citoyen républicain modèle. La statue est sur une
ronde bosse (on peut tourner autour du socle).

Cette œuvre est la première figure colossale d’un homme nu depuis l’antiquité, et depuis
Donatello. Pour Vasari, Michel Ange est supérieur aux artistes de l’Antiquité. Michel-Ange est
un marbrier alors que Vinci est un modeleur et un fondeur. Le David est un exploit technique
avec l’emploi du marbre du Carrare. La commande est passée en 1501 par la corporation de la
laine pour un arcboutant de la cathédrale. Le colossal est un moyen d’héroïser une figure de
l’Histoire.

David est une figure du premier livre de Samuel (Ancien Testament), c’est celui qui a
sauvé Israël du Philistin Goliath. Sur la statue on devine la fronde et ses lanières. La pierre se
trouve dans la main droite de David. Michel-Ange a choisi l’instant avant le combat. David

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tourne la tête, on devine le futur lancer, la future expression de la force de David. Dans le texte,
David se débarrasse de l’armure donnée par le roi Saül avant d’attaquer. Michel-Ange choisit
de représenter David nu, il était nu sous son armure.

A Florence, à la Renaissance, David est le modèle du citoyen qui défend la République.


David incarne le gouvernement de la cité, qui doit la défendre avec passion. Quand l’œuvre est
terminée en 1504, une commission décide de placer la statue devant le Palais Vieux (Palazzio
Vecchio), sur la place de la République. La figure de David est laïcisée en quelque sorte, car
transférée de la sphère religieuse à la sphère civique. Hercule est une autre figure qui défend la
République.

Michel-Ange a repris l’attitude que Donatello avait donné à son David, une attitude en
contrapposto (une jambe qui porte le poids du corps et une autre qui est libre). Il suggère le
moment de violence suivant, le combat qui va avoir lieu, notamment par la puissance
musculaire de la figure. David fronce les sourcils, il y a une violence sur son visage. Il a un pli
sur le front. Il y a une expression sévère (la terribilita).

Comparaison avec l’Apollon du Belvédère : la tête, les pieds et les mains de David sont
plus gros, Michel-Ange a peut-être reproduit son modèle. Il y a un accent sur l’anatomie, un
côté moins harmonieux que sur l’Apollon du Belvédère. C’est une entité plus expressive. Son
côté gauche a un bras replié, une composition plus ouverte, là où le côté droit est fermé.

C’est une statue colossale alors que David est normalement un jeune berger faible. Le
géant c’est Goliath normalement. Michel-Ange inverse les rôles. Le côté droit du corps de
David est fermé pour suggérer la protection divine.

Vasari écrit « ce chef d’œuvre éclipsa la renommée de toutes les statues modernes et
antiques. ».

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Michel Ange, Bataille de Cascina :

Vinci avait reçu la commande de la Bataille de Cascina. L’œuvre était prévue pour être
une composition de Michel-Ange, qui en reçoit la commande en 1504. Il ne la terminera pas, il
ira moins loin que De Vinci. Il va simplement faire le carton, le dessin grandeur nature. Ce
dernier aura un tel succès qu’il sera découpé.

Le centre de cette représentation de la bataille de Cascina contre Pise au XIVème siècle


avait pour sujet le fait que les Florentins ont été surpris par l’ennemi alors qu’ils se baignaient
dans l’Arno en juillet. Les Florentins étaient sortis de l’eau et s’étaient habillés. Vasari parlera
de savant raccourci, de figures emmêlées. Ce motif des Florentins surpris était utilisé pour
mettre en avant la vertu d’une armée, ici la vigilance. Machiavel souhaitait à l’époque créer une
milice rapidement utilisable.

Vinci dans son traité sur la peinture met en garde les artistes d’être des peintres
anatomiques, et de délaisser les mouvements de l’âme.

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Michel Ange, Sainte Famille ou Tondo Doni, 1504, tempera sur bois, 120 cm de
diamètre :

C’est une commande du Florentin Agnolo Doni, qui date surement du mariage de ce
dernier avec Maddalena Strozzi. Le terme « tondo » signifie circulaire. Vasari dit que c’est la
plus achevée et la plus belle des peintures de Michel-Ange. Il n’y a aucune trace de pinceau.

La vierge à genoux est en torsion pour suggérer que Jésus est plus important qu’elle. La
vierge a un regard d’adoration pour son fils. Jésus a un bandeau dans les cheveux, sigle de la
victoire. Un muret sépare Jésus et ses parents d’un enfant, c’est saint Jean-Baptiste. Il y a des
hommes nus dont certains sont enlacés. Au premier champ, on a le monde de la grâce avec
Jésus, derrière il y a le monde de la loi (loi donnée par Moïse), c’est le monde des prophètes.
Le dernier champs évoque le monde d’« ante legem », le monde d’avant les lois données par
Moïse. Dans le cadre, il y a des têtes qui évoquent les trois périodes. Il y a celle de Jésus, des
têtes de prophètes (monde de la loi) et de figures de sibylles (prophétesses du monde païen).

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Du côté des formes, il a une influence de Léonard de Vinci, de ses compositions


pyramidales. Il y a une unité aux trois figures par les regards (Marie regarde Jésus, Jésus regarde
Marie, Joseph regarde Jésus). On voit également des courbes, notamment au niveau du corps
de la vierge, qui est en torsions, jambes de profil et buste de face. Cette attitude de la vierge est
influencée par une œuvre antique, l’Ilioenus, fils de Niobé, dont on a de nombreuses copies.
Cette œuvre date du IVème siècle avant J-C.

Le bras de la vierge est une vierge héroïsée, athlétique. IL y a une impression de relief
avec l’alternance des parties sombres et claires. Il y a un reflet similaire à une sculpture sur les
bras. Cette peinture prend le contrepied de Léonard de Vinci.

Cette œuvre aura une grande influence sur la génération suivante. Les couleurs sont très
particulières. Il aime bien les couleurs acidulées (beaucoup de blanc). La draperie de Saint
Joseph est jaune en pleine lumière et orangée-rouge dans l’ombre. On parle de « cangianti » en
italien.

Cette œuvre est aussi marquée par la sérénité des expressions. Le paysage est très
sommairement peint, c’est le corps qui prime ici encore. La perspective a peu d’importance. En
1505, Michel-Ange part à Rome, attiré par le mécénat du Pape.

Raphaël (1483-1520) :

Pour Vasari, Raphaël est inégalable par sa grâce. Vasari insiste beaucoup sur les
couleurs qui ont surpassé la nature. Il égale et surpasse l’art de l’Antiquité. Il est né à Urbino,
cité des Montefeltro ou l’humanisme est très important. Il a été élève de Le Pérugin (ville de
Pérouse) auteur de L’Ascension. Raphaël apprend à peindre avec mesure. Le Pérugin a formé
le jeune Raphaël avec l’emploi de couleurs claires. Raphaël arrive à Florence en 1504 où il sera
influencé par les artistes comme de Vinci.

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La Belle Jardinière, 1508, huile sur bois, 122x80 :

Il s’agit d’une œuvre à sujet religieux, qui a un format de tableau de chevalet


(122X80cm). On voit Marie qui est assise sur une pierre, elle est dans un jardin, une prairie.
Elle se tourne vers Jésus, représenté avec une auréole. Il se tourne vers sa mère, il essaie de lui
prendre son livre, il y a une variation sur le thème de la préfiguration de la passion ; le livre
annoncerait donc ici sa mort. L’autre personnage est saint Jean-Baptiste, agenouillé et qui va
donner sa croix à Jésus, ce qui est une autre allusion à la passion. On retrouve une composition
pyramidale, inspirée par de Vinci : la tête de la vierge est le sommet, le corps de Jésus est un
des côtés de la pyramide.

On a des figures en mouvement à l’intérieur de la pyramide, beaucoup construites sur


des courbes (comme le corps de Jésus). Il y a la courbe du corsage de la vierge, il y a des courbes
dans la chevelure. Le physique de la vierge est très gracieux. L’influence de de Vinci se voit
également dans des éléments de Sfumato, dans le paysage notamment. Les contours très nets
sont aussi, avec la perspective atmosphérique (fonds bleus et plus ou moins clairs), inspirés de
l’art de de Vinci. Jules II appelle Raphaël à Rome.

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2) Rome ; Michel-Ange, Raphaël, Bramante :


A partir du pontificat de Jules II (pape de 1503 à 1513), il y une volonté que Rome
retrouve sa splendeur antique. C’est à partir de là que Rome devient la capitale de la
Renaissance classique. Jules II est passionné d’antiquités, il reprend les titulatures des
empereurs de la Rome antique (Julius Caesar Pontifex) et redonne un grand prestige politique
et diplomatique à la papauté. Il lui redonne aussi une autorité dans le domaine du spirituel avec
le concile du Latran en 1530. Léon X, son successeur est le fils de Laurent de Médicis, Laurent
le Magnifique (pape de 1513 à 1521).

Bramante :

C’est un architecte originaire de Milan. Il a beaucoup fréquenté Léonard de Vinci. Il


arrive en 1500 à Rome, Vasari nous dit qu’il va « mesurer tous les édifices de la Rome antique ».
Vasari insiste sur le fait qu’il était « solidaire et pensif ». Bramante met en avant le dessein,
l’idée intérieure de l’artiste.

Chapelle de San Pietro in Montorio, vers 1507 :

Sa première commande est la chapelle de San Pietro in Montorio qui se trouve sur une
colline de Rome et qui commémore l’endroit où saint Pierre a été crucifié. On a une inscription
dans la chapelle qui dit que la commande aurait eu lieu en 1502 et serait une commande des
rois catholiques d’Espagne. L’œuvre est surnommée « il Tempietto » (petit temple). Elle est

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très inspirée par l’antiquité, on a même parlé de reconstitution. C’est un édifice à plan centré
circulaire (comme selon les goûts de Bruneschelli). L’idée de cercle ressort car la chapelle est
entourée par un péristyle au premier niveau.

Le second niveau est le tambour de la coupole et enfin on a la calotte de la coupole. On


a des cylindres, des cercles, une demie-sphère. A la fin de l’antiquité, les martyrs étaient souvent
entourés dans des chapelles circulaires (martyria, martyrium au singulier). Constantin avait
construit un bâtiment circulaire au IVème siècle. Cette idée du péristyle est reprise du temple
de Vesta à Tivoli (Ier siècle avant J-C).

Au-dessus de ce temple circulaire (tholos dans l’antiquité), Bramante place une coupole
un tambour. Le temple de Vesta a un ordre corinthien quant à lui, là où Bramante choisit un
ordre toscan, proche du dorique.

Il y a des triglyphes (trois barres avec deux creux) ce qui correspond à l’écho de la poutre
horizontale dans l’architecture en bois. Il y a aussi des métopes, surfaces carrées et
rectangulaires. Dans le temple de Vespasien, il y avait sur la frise des accessoires des sacrifices
païens. Chez Bramante, il y a des instruments de la liturgie chrétienne. A part cette frise, il y a
très peu d’ornement par rapport à ce que Bramante faisait à Milan, lui qui avait achevé l’église
du couvent des dominicains où de Vinci a peint la Cène (église de Sainte Marie des Grâces).

Au second niveau, il y a une alternance de niches et d’ouvertures rectangulaires. Il y a


un jeu de clair-obscur. On est dans un modèle de classicisme, une architecture très dépouillée.
C’est une œuvre semblable de chaque côté.

Le système de proportion créé l’harmonie. Le diamètre du péristyle est égal à la hauteur


de l’édifice sans le dôme. Balazzio va faire un ouvrage d’architecture et classera le tempietto
au même niveau que les œuvres de l’antiquité. Le tempietto devait être installé dans une cour
circulaire.

Saint Pierre de Rome :

Cet édifice de Bramante va utiliser son tempietto pour le projet de Saint Pierre de Rome.
Jules II veut démolir la basilique construite au IVème siècle sur la tombe de Saint Pierre et faire
édifier une nouvelle chapelle. En 1506 la première pierre du nouveau saint Pierre de Rome est
placée. Bramante choisit un plan centré en croix grecque surmonté d’une énorme coupole qui
s’appuie sur des piliers très épais. Le diamètre du dôme est de 40 mètres. La base du dôme est
de 60 mètres de haut.

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Il y a aussi 4 coupoles plus petites ainsi que des clochers sur les angles du carré avec
une série de cercles à l’intérieur. Bramante regarde les vestiges antiques, et lit aussi Vitruve. Ce
plan en croix grecque donne lieu à une série de chapelles.

C’est un espace très complexe, très morcelé qui va être abandonné. Seule l’énorme
coupole va être conservée, tout comme les 4 grands piliers. Les arcs sur ces piliers ont des
caissons inspirés par le Panthéon, grand modèle de Bramante.

Bramante meurt en 1514. N’ont été construits que les 4 piliers avec l’Ecole d’Athènes
de Raphaël. C’est notamment Michel-Ange qui reprend le projet de Bramante au milieu du
XVIème siècle.

Le Saint Pierre de Rome actuel a quatre travées de nefs ajoutées à la fin du XVIème
siècle. Jules II utilise le système des indulgences pour financer le projet. Bramante travaillera
aussi au palais du Vatican. C’est lui qui fera les bâtiments de la cour du Belvédère et qui
commencera des projets d’urbanisme dans la Rome antique pour mettre en scène les vestiges
de l’antiquité.

Raphaël, La Parnasse et l’Ecole d’Athènes (1510-1511), chambre de la signature :

Le Parnasse

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Ecole d’Athènes

Raphaël va être appelé pour la décoration de la chambre de la signature (où le pape


signait des papiers importants). C’était la bibliothèque de Jules II, des peintres avaient
commencé le plafond. Jules II va ensuite faire appel à Raphaël. Les compositions de Raphaël
vont donner une illusion de grandeur exceptionnelle. 4 aspects de la culture humanistes seront
mis en avant dans cette pièce : la philosophie, la poésie, le droit et la théologie. C’est un
programme qui met en avant une fusion des sagesses, une fusion des formes de beauté, à la fois
antiques et chrétiennes.

Raphaël a placé des figures sur la voûte, on a des allégories des 4 disciplines évoquées
précédemment. L’allégorie de la Justice est représentée, une figure féminine tenant une balance
et l’épée de la Justice.

A côté de la Justice, on a une scène biblique, l’histoire de Salomon. La philosophie se


trouve au-dessus de l’Ecole d’Athènes. Raphaël a symbolisé des philosophies par un geste,
Platon montre le ciel du doigt. Cette idée de rassemblement d’hommes illustres du passé était
un thème courant au quattrocento (Andrea Del Castagno avait fait un cycle des hommes et
femmes illustres).

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La poésie est incarnée par le Parnasse, la théologie est incarnée par le triomphe du saint
Sacrement. Sur les murs, il y a des rassemblements imaginaires de grands hommes. La
philosophie est incarnée par Diane d’Ephèse.

Il est recommandé aux artistes est de représenter l’humanisme depuis les traités
d’Alberti.

Le Parnasse de Raphaël est lié au néoplatonisme : on se fonde sur Platon. Le Parnasse


est le lieu où siègent Apollon et les muses. On voit Apollon entouré des 9 muses sur le mont
Parnasse. On voit Apollon qui joue de son instrument entouré des 9 muses qui incarnent les
différents arts. Il y a 18 figures de poètes historiques, antiques et modernes. Il y a par exemple
Homère et Virgile. On reconnait aussi Dante, auteur de La Divine Comédie. Dans la partie il y
a une poétesse, Sapho. La poésie retrouve une place très importante dans le monde culturel. La
poésie est liée à la représentation du beau.

L’Ecoles d’Athènes, chambre de la signature :

C’est le vrai rationnel, avec au bas des marches des figures qui incarnent les sciences
des nombres, des sciences exactes. Euclide, dessine sur une ardoise, il incarne la géométrie.
Ptolémée incarne l’astronomie, il tient son globe terrestre. A gauche, assis, se trouve Pythagore,
représentant de l’arithmétique. Tout à gauche, se trouve Epicure, représentant de la grammaire.

Sur les marches, on a des disciplines telles que la rhétorique et la dialectique, incarnées
par la présence de Socrate. Alexandre le Grand est présent. Platon et Aristote représentent les
deux principales écoles philosophiques et sont également représentés, remarquables par leurs
gestes ; Aristote désigne par exemple le ciel, incarnant la métaphysique.

Il y a un portrait de Raphaël. Platon a les traits de Léonard de Vinci. L’artiste est ici
l’égal des philosophes, la peinture et la sculpture tout comme l’architecture sont considérés
comme des arts libéraux. Une représentation du scientifique Héraclite est probablement faite
sous les traits de Michel-Ange.

On est sur une impression d’équilibre et d’harmonie. La perspective géométrique est


importante. La perspective converge vers le centre. Les deux figures du fond s’ouvrent sur le
ciel. Les lignes horizontales sont les plus importantes dans la composition, la ligne de force est
celle formée par les philosophes. La plus grande qualité de Raphaël, c’est l’art de mouvement
des figures. Les différentes figures sont reliées par des gestes, par des murs. On a des attitudes
inclinées (Euclide). Au second plan, les groupes forment des verticales.

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Du côté des couleurs, elles sont assez froides. Il y a beaucoup de blanc-cassé, du bleu.
Il y a aussi un rapport entre forme et fond, les couleurs froides disent la rationalité. La lumière
est assez claire. C’est un des grands modèles du classicisme en Europe jusque tard.

3ème panneau, La Dispute du Saint Sacrement, le vrai-révélé, chambre de la


Signature :

Le vrai révélé par la religion chrétienne. On a le triomphe du saint sacrement. L’Eglise


terrestre est montrée en construction, elle comprend des pères de l’Eglises, des docteurs de
théologie. A droite, il y a des papes comme Innocent III et Sixte IV (constructeur de la chapelle
Sixtine). Il y a aussi des saints (Saint Jérôme, Saint Bonaventure…).

On a deux registres dans cette composition. Un registre céleste au centre duquel on voit
Jésus, entouré de Marie et de Saint Jean-Baptiste et la colombe du Saint Esprit. Il y a un axe
vertical qui va de la Trinité jusqu’à l’eucharistie. Sur les nuées, il y a des figures du Nouveau
Testament et de l’Ancien Testament, comme Adam, Saint Jean, le roi David (qui a une cithare).

La peinture, la fresque est organisée autour d’un axe principal qui est vertical. On est
dans une transsubstantiation. Les couleurs dorées se rapportent aux valeurs spirituelles,
l’importance du divin dans le panneau est très marquée.

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Pour le pape Jules II, la chambre de la signature est une cohabitation entre les figures
mythologiques et antiques et les figures de la tradition chrétienne. La réalisation de Raphaël
connait un grand succès. Raphaël va dessiner les chambres suivantes.

Raphaël, Saint- Léon le Grand arrêtant Attila, vers 1515, fresque, 750 de long,
Vatican, chambre d’Héliodore

Saint Pierre y est représenté, notamment en prison. Saint Léon le Grand (Léon Ier), pape,
va au-devant d’Attila qui est devant et fais le signe de la retraite car il voit dans le ciel
l’intervention divine sous la forme de Saint Pierre et Saint Paul. Cette œuvre est une valeur
actuelle pour le pape : Léon le grand (Léon Ier) est représenté sous les traits de Léon X, pape
au moment de la création de l’œuvre. Les sénateurs sont remplacés par des cardinaux.

Raphaël souhaite montrer l’autorité du pontife face aux cardinaux et aux ennemis
extérieurs. Raphaël recevra du pape une commande de Léon X de tapisserie.

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Raphaël, Triomphe de Galatée, 1511, fresque, 295 x 225, Rome, Villa Farnésine,
commande d’Agostino Chigi

Raphaël ne travaille pas que pour le pape, bien que passant 12 ans à Rome. IL reçoit
commande d’une villa romaine au-delà du Tibre. Il s’agit de nu féminin. Galatée est la fille de
Nérée, c’est une divinité marine, elle est représentée sur son char, entouré de tritons et conduit
par des dauphins. Galatée est une néréide.

Galatée tourne son visage vers le ciel, alors que les autres divinités marines regardent
vers la terre. On est entre l’amour terrestre et l’amour divin. Galatée montre l’influence de de
Vinci, avec la torsion de chair, elle a une attitude de contrapposto.

La composition obéit à une oblique de gauche à droite. La symétrie est souple, le côté
structural des corps montre lui l’influence de Michel-Ange. La mer est verte. Galatée a une
draperie rouge.

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Raphaël, Madone Sixtine, 1513, huile sur toile, 265 x 196, Dresde, Gemäldegalderie

On est sur le thème de la vierge à l’enfant. La vierge est entourée de saints, c’est une
« sainte conversation ». La vierge regarde le fidèle dans les yeux comme une apparition
passagère. L’on voit des rideaux de part et d’autre. On est proche des théophanies
(manifestations visibles de Dieu).

Saint Sixte (pape Sixte II) est représenté. La destination de l’œuvre c’est le couvent des
chartreux dans la vallée du Pô. Le doigt de Saint Sixte désigne les spectateurs. On a des putti
(figures d’anges).

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Raphaël, Balthazar Castiglione, 1515, huile sur toile, 82 x 67, Paris, musée du
Louvre, Balthazar Castiglione auteur du « Traité du courtisan » (1528)

C’est un portrait d’un ambassadeur d’Urbino à Rome. Il est poète, c’est un lettré auteur
du traité du courtisan, texte qui donne les règles de conduite pour un modèle d’homme idéal
de la Renaissance. Il aide Raphaël à rédiger certaines de ces lettres.

Le costume est très élégant, très raffiné, il porte une médaille, un pourpoint noir avec
une fourrure. Il tient la même pose que la Joconde. Il tourne son buste de ¾. Il a le visage
presque de face. Raphaël a voulu rendre le spectateur plus proche de Balthazar que ce que de
Vinci avait voulu pour la Joconde, il n’y a pas de premier plan.

La tache claire de la chemise, plissée et bouffante, ressort. On est dans une couleur noire.
Les seules notes de couleurs sont le rose des lèvres et le bleu des yeux. Le personnage est
réservé, bien qu’élégant il est modeste.

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Raphaël, La Transfiguration, 1520, huile sur bois, 405 x 278, Vatican, Pinacothèque :

C’est la commande d’un tableau d’autel de Jules Médicis (futur pape Clément VII) datée
de 1517 et achevée ou laissée inachevée en 1520. Vasari dit que le corps de Raphaël avait été
placé devant ce tableau. Il dit ceci « le rapprochement de cette image en quelque sorte vivante
et du corps inanimé de Raphaël causait une douleur poignante à tous les assistants ».

Il y a un sujet céleste et un sujet terrestre. Ce type de composition en deux parties va


être le modèle des tableaux d’autel jusqu’au XIXème siècle.

Jésus plane entre des prophètes de l’Ancien Testament, Moïse et Elie. Apparaissent 3
apôtres étaient avec Jésus sur la montagne, et qui sont foudroyés par cette vision, Pierre, Jacques
et Jean.

La transfiguration est une scène proche de l’ascension. Dans la partie basse, on trouve
d’autres apôtres et des Juifs qui conduisent un enfant malade, possédé par le démon. On est sur
un motif très réaliste, qui évoque la maladie. Les apôtres n’arrivent pas à guérir le possédé.
C’est Jésus quand il descendra de la montagne qui soignera le malade. Il y a deux épisodes du
chapitre 17, versets 1 à 2 du livre de Saint Mathieu (l’un des quatre évangiles).

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La partie du bas, c’est l’Humanité malade, humiliée. Les Juifs ont foi dans les apôtres
et les apôtres montrent Jésus, qui pourra faire le miracle. On voit une femme vêtue à l’antique,
qui incarne la terre et ses beautés charnelles, terrestres. Il y a une partie mystique et une partie
plus narrative.

Jésus au milieu s’inscrit dans une sphère. Dans la partie basse, il y a des formes avec
des angles, des orthogonales, des obliques. Les apôtres sont à la droite de Jésus et les Juifs sont
à la gauche. La composition est plutôt complexe, marquée par le rôle des gestes et des regards
(ce dernier est très important). Le père de l’enfant regarde l’apôtre, ce qui forme une horizontale
à travers le tableau. Dans la partie haute les couleurs sont claires, en bas, les couleurs sont
saturées, plus chaudes.

La partie basse est caractérisée par une grande plasticité, les lumières donnent du
volume. La partie haute est sur un seul plan alors que sur la partie basse on a une ouverture du
paysage et donc une importance de la perspective. Saint Côme et Damiens sont les saints
patrons favoris des Médicis.

Raphaël avait un rôle de peintre officiel à Rome. Raphaël était entouré d’un très grand
nombre d’artistes. En face, il y avait un Michel-Ange bourru, qui travaille souvent seul,
notamment sur la chapelle sixtine. Il s’est fait aider par des fresquistes, il n’avait pas la
technique de la fresque en main au début.

Michel Ange, Plafond de la chapelle Sixtine, 1508-1512, fresque :

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Jules II va commander à Michel-Ange la chapelle sixtine en 1508. Il va peindre ce décor


entre 1509 et 1512. Le décor fait 600m2. Michel -Ange dit « le pape me laissa libre de faire ce
que je voulais. ». Il réalise des morceaux la vie de Moïse et de Jésus. Michel-Ange convainc
Jules II de faire un projet plus complexe que prévu.

La longueur est de 40 mètres pour 13 mètres de large. Michel-Ange travaille sur 9 scènes
tirées de la Genèse, 3 sur la création du monde, 3 scènes avec la création de l’Humanité et 3
scènes qui concernent l’arche de Noé. Au-dessus de l’entrée des fidèles, on a Moïse, et au-
dessus de l’autel, on a la création du monde. La partie des laïcs qui sépare la partie des religieux
est au niveau de la création d’Eve.

Les 9 scènes bibliques sont au niveau du plat de la voûte. On a un système décoratif très
original. Les scènes bibliques sont prises entre deux corniches. Il y a 5 paires de nervures, de
bandeaux qui déterminent 9 scènes bibliques.

Il y a des piliers. La structure décorative, architecturale est en piliers avec des putti
atlantes. Les puttis sont fictifs. Les tympans triangulaires sont des surfaces courbes, difficiles à
peindre, avec juste au-dessus les fenêtres. Michel-Ange peint juste au-dessus des fenêtres.

Entre les piliers, il y a des figures (12) qui sont 7 prophètes et 5 sybilles. Les prophètes
ont annoncé Jésus aux Juifs, il y a Jonas à l’extrémité de la voûte juste au-dessus de l’autel.
Jonas est celui qui a passé 3 jours dans le ventre de la baleine. Les 7 prophètes sont assis. Les
sybilles, prêtresses antiques, avaient prédit la venue du Christ aux païens. Sur les extrémités de
la voûte, dans les pendentifs (en architecture, ce sont des formes triangulaires qui font passer
du plan carré aux courbes du plafond ou de la coupole) on reconnait David qui décapite Goliath.

Ce décor est complété par des figures décoratives, comme les putti qui accompagnent
les prophètes. Il y a aussi, des figures nues (ignudi) encadrant les 5 rectangles consacrés aux
scènes bibliques. Ce sont des jeunes gens qui tiennent des guirlandes de chênes avec des feuilles
de chênes et des glands qui évoquent les emblèmes de la famille de Jules II, les Della Rovere.
Les armes de Jules II se trouvent derrière le trône de Zacharie, l’un des prophètes. On a rattaché
les Ignudi à la passion de Michel-Ange pour le corps nu masculin. Il y a peut-être un sens
cependant : ces figures évoqueraient la beauté idéale, qui est un aspect du divin. Cela
permettrait au spectateur d’atteindre le divin. Cette idée a cour dans les milieux néoplatoniciens.

Parmi les scènes qui sont représentées, certaines sont très originales. Adam et Eve
chassés du paradis avaient déjà été représentés par Masaccio, mais celles consacrées à la

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création du monde sont très originales. Dieu séparant la lumière des ténèbres est une scène très
originale. C’est Dieu juste après le chaos.

Formellement, c’est une structure architecturale feinte, mais ce n’est pas un trompe-
l’œil. Les corniches sont parallèles aux plans du plafond réel. Ce qui reste sur le plafond, c’est
le corps humain. Il y a très peu de places pour le paysage dans les scènes bibliques. Les figures
représentées de manières monumentales sont structurales.

Michel-Ange fait une peinture de sculpteur. Le volume est très important, tout comme
le dessin. L’expressivité des corps est très importante. On parle de la « terribilita » de Michel-
Ange rappelons-le.

Dans la création d’Adam, le visage de Dieu montre un aspect terrible, très caractérisé.
L’index pointé de Dieu qui crée Adam montre l’importance de la gestuelle, la vie est comme
un fluide. D’habitude, Dieu touche Adam ou souffle dans les narines d’Adam. Dieu est
représenté comme un sculpteur qui modèle Adam à partir de l’argile.

Le contrapposto : il y a une torsion de Dieu le père, qui introduit le mouvement. Il y a


une exagération dans les attitudes. La sybilles de Lybie a les jambes de profil et tourne le buste
vers l’arrière. C’est une torsion très étonnante, elle est dans un équilibre assez instable, sur la
pointe des pieds. Dans les attitudes s’annoncent une exagération, un anticlassicisme qu’on
retrouvera dans les générations suivantes, dans la génération maniérisme. Ignuti signifie « nu »
en italien.

Michel-Ange est aussi un grand coloriste, il utilise des couleurs souvent acidulées, avec
beaucoup de blanc (gris-bleu pour une draperie, ou rouge avec du blanc). Les couleurs sont
vives pour les figures des prophètes et des sybilles parce qu’elles sont à un endroit où il y a très
peu de lumière. Quand Michel-Ange a peint le plafond, il y avait des fenêtres au-dessus de
l’autel qui seront remplacées par le jugement dernier.

Il y a de l’or du côté de Noé, mais très peu. Pressé par le temps, Michel-Ange ne peut
placer de l’or. Il dira à Jules II que la présence de l’or était palliée par la beauté de l’œuvre.

Les cangianti (changements, de couleurs notamment) : le vêtement de Jérémie est rouge-


rose, dans certaines parties il est devenu jaune. Pour Daniel Arasse, « il y a un changement
chromatique d’une couleur locale quand on passe de l’ombre à la lumière ». Ces cangianti ont
un rôle dans l’expression des figures. C’est une recherche formelle pour le plaisir. C’est un
exemple d’un élément qui annonce le maniérisme.

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A côté de Jérémie, il y a une ombre portée. Michel-Ange a tenu compte de l’éclairage


des fenêtres, notamment de celles qui se trouvaient au niveau du mur ouest. Michel-Ange
s’installe dans le paysage romain avec cette œuvre faite au moment où Raphaël fait la chambre
de la signature.

Commande du tombeau de Julles II en 1505, projet modifié en 1513,1515, 1532,


installé et fini vers 1545 à Saint Pietro in Vincoli :

Tombeau Jules II dans sa forme finale

Jules II a moins de chance avec son projet de tombeau commandé à Michel-Ange en


1505. Il avait un projet de 16M de haut, 7 et 10 M de côté. Il s’agissait d’une sorte de pyramide
qui se serait trouvée dans le cœur de saint Pierre de Rome, avec 40 statues de grandeur nature.
En 1506, Jules II pose la Pierre du nouveau Saint Pierre de Rome, mais il n’y a plus de place
pour le tombeau. Ce projet est repris par les héritiers de Jules II, Michel-Ange parlera de la
« tragédie du tombeau » tellement ce projet l’a obsédé.

Le tombeau comprend la célèbre statue de Moïse de Michel-Ange, réalisée dès 1513


avec les deux esclaves qui sont au musée du Louvre (esclave mourant et esclave rebelle). Le
génie de la victoire réalisé dans les années 1520 correspond à un projet du tombeau de Jules II.

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- Michel-Ange, statue de Moïse :

Moïse est considéré au XVIème siècle comme un capitaine, un guide, car c’est la figure
qui a fait sortir le peuple d’Egypte. C’est aussi un prophète de l’Ancien Testament. Il a reçu les
tables de la loi au Mont Sinaï. C’est lui qui scelle l’alliance du peuple hébreux et de Dieu.
Michel-Ange fait son Moïse assis. Il tient sous son bras droit les tables de la loi. Sa main tient
les tables de la loi et joue avec sa barbe. Daniel Arasse a écrit un texte sur la barbe de Moïse
dans la statue. On a l’image d’un prophète qui contemple Dieu, et qui a un visage sérieux, dur.
Ce qui fait référence au David contemplant Dieu, ce sont les cornes de Moïse. Après la remise
des tables de la loi, en descendant du Sinaï, Moïse aurait eu des cornes sur la tête. C’est en fait
une erreur de traduction de Saint Jérôme. Le texte de Freud sur Moïse de Michel-Ange fait une
lecture psychologique de la statue : il voit dans ce Moïse un héros prêt à sacrifier sa vie
affective. Moïse serait un portrait de Jules II, les lectures de la statue sont nombreuses. La statue
est une figure colossale, assise elle fait 2,35M de haut. Les fleuves antiques étaient souvent
représentés avec une barre. L’œuvre est faite pour un point de vue fixe. Cette sculpture montre
des lignes dans des directions différentes, il y a notamment des variations au niveau des jambes.
Michel-Ange tourne la tête vers la droite, son bras forme une oblique vers la gauche. Il y a une
série de lignes. Son côté gauche est ouvert. A la droite de Moïse on voit une composition

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fermée. Du côté du bras gauche de Moïse, la composition est ouverte. Il y a des jeux entre sa
peinture et sa sculpture. La pose du Moïse reprend celle du Joël qui est sur le plafond de la
chapelle sixtine. La lourdeur de la barbe et de la draperie donne lieu à des courbes. Ce Moïse
montre des creux, et donc des zones dans l’ombre. C’est la manière de jouer avec les ombres et
la lumière. Les creux et les bosses d’une sculpture servent à rendre les ombres et les lumières.
Michel-Ange a creusé les orbites. La sculpture était prévue au second niveau du tombeau de
Jules II, la tête de Moïse est bien petite par rapport aux jambes puisque le projet a été revu.

- Les Esclaves, 1513, 2M29 (esclave mourant) et 2M15 (esclave rebelle) :

Esclave Mourant Esclave Rebelle

L’un est appelé « esclave mourant » et l’autre « esclave rebelle ». Il s’agit de figures
masculines nues qui évoquent peut-être des prisonniers. Il s’agirait peut-être des captifs comme
ceux des arcs de triomphes romains. Au niveau des jambes de l’esclave mourant, il y a un singe
avec un rouleau de parchemin (serait-ce la peinture qui singe la nature ? Serait-ce plutôt le singe
comme figure de la connaissance littéraire ?). Pour Vasari, les figures des esclaves représentent

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les provinces soumises par Jules II. Il y a eu aussi des explications en rapport avec le
néoplatonisme ; on aurait des corps dont l’âme essaierait de se libérer. Ce sont des œuvres
fascinantes par leur expressivité, par leur caractère émouvant (l’esclave mourant obéit au
contrapposto, il a une pause qui rappelle les Saint Sébastien percé de flèches, thème d’un grand
succès à la Renaissance). L’esclave rebelle est appelé ainsi car il essaie de détacher des liens. Il
a son épaule vers l’avant. Il y a peut-être l’influence d’une célèbre culture des collections
papales, le torse du Belvédère. Il y a une fissure au visage, Michel-Ange aurait refusé de finir
l’œuvre en raison de cela. Contrairement aux règles, Michel-Ange commençait par la face du
bloc.

3) La Renaissance classique à Venise ; Giorgione, Titien, Lotto :


Venise est une République très longtemps liée à l’Orient en raison de son empire
maritime. C’est très tardivement que Venise se joint au courant de la Renaissance. C’est à la fin
du XVème siècle seulement que Venise incorpore les innovations de la Renaissance. C’est à
relier à un tournant géopolitique important : en 1453, Constantinople est prise par les Turcs,
l’empire vénitien se retire de la Méditerranée orientale.

Venise d’intéresse à la terre ferme. Sur le plan politique, il y a une reconversion de


Venise vers la Vénétie, même si elle garde un rôle commercial important entre le Sud et le Nord
de l’Europe. La chute de Constantinople provoque l’arrivée de savants byzantins qui apportent
des textes antiques. Il y a donc un développement de l’humanisme vénitien. L’humanisme se
développe avec une passion, inspirée d’Aristote, qui insiste sur l’expérience plus que sur les
idées, contrairement à Florence qui se penche plus sur Platon. Venise est une République très
stable.

Venise développe un sens de l’équilibre politique. L’Eta vénitien passe de très


nombreuses commandes. Le XVIème siècle est le grand siècle de Venise. Le grand homme de
Venise, c’est Titien qui reçoit des commandes du roi de France, de Charles Quint notamment.
Il a une période classique au début du XVIème siècle.

Girogione (1478-1510) :

Son nom est Zorzi de Castelfranco. Il est surnommé « le Grand George » (Giorgione),
il a acquis ce surnom après sa mort. IL a répondu à deux commandes publiques, notamment
pour la salle des doges (non conservée). Il réalise des tableaux d’autel. Il est né à Castelfranco.
Pour Vasari, il est pour Venise ce que Vinci a été pour Florence. Il a été marqué par le séjour
de Léonard de Vinci à Venise en 1501. Giorgione va reprendre le sfumato de Léonard de Vinci.

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Il est pour Vasari le modèle de la peinture vénitienne, c’est une « peinture sans dessin ». Sous
certaines peintures de Giorgione, on a trace de dessin, mais il insiste sur les taches de couleur.
La couleur occupe le plus grand rôle dans son œuvre. Le classicisme vénitien est chromatique,
basé sur des couleurs chaudes. Les vénitiens travaillent beaucoup sur la lumière.

On a comme données d’archives ou témoignage de son vivant, comme une œuvre de


1506, au dos de laquelle il y a marqué son nom. En 1507, une commande de la République de
Venise pour la salle du Conseil des 10 (organe policier de Venise) est faite. En 1508, on a un
témoignage comme quoi il réalise des fresques pour le comptoir des allemands. Les historiens
de l’art essaient de reconstituer son œuvre. Il y a une vingtaine d’ouvres qui lui sont attribuées.

Pala di Castelfranco, vers 1506, huile sur bois, 2002 x 352 :

La première œuvre est la Pala de Castelfranco, qu’on attribue depuis le XVIIème siècle
à Giorgione. C’est un retable (du latin retro tabulum), c’est un tableau d’autel. L’œuvre est
placée sur l’autel d’une chapelle de la ville natale du peintre, la cathédrale de Saint Libéral. On
a une sainte conversation (sacra conversazione). C’est une représentation de la vierge trônant
portant et présentant l’enfant Jésus, et qui est entourée de saints avec lesquels elle s’entretient.

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Il y aurait un chevalier de Malte (ce qui se voit avec le drapeau). Le commanditaire est
un condottiere dont le fils était mort en 1504. Ce retable aurait été commandé pour décorer la
chapelle funéraire du fils du condottiere. On a aussi un saint (Saint François d’Assise) qui
avance sa main, et qui partage les stigmates (souffrances du Christ). Il présente sa main vers le
spectateur.

Une figure à l’intérieur du tableau s’adresse au spectateur. La sainte conversation est ici
très originale. Le maitre de Giorgione, c’est Giovanni Bellini (tableau Pala de San Zaccharia
de 1505, vierge située devant un cœur d’église et très proche des saints qui l’entourent).

Giorgione situe la vierge dans la partie haute de la composition, la vierge est très haut
au-dessus des saints. André Chastel parle d’un échafaudage. C’est un échafaudage de pierres.

Dans la partie basse, il y a un parallélépipède en porphyre (sorte de marbre) où il y a les


armes de la famille Constanzo. Il n’y a plus de chapelle architecturale, on a un paysage au
niveau de la vierge. Le thème du paysage va passionner Giorgione et les maniéristes.

Le lion de Saint Marc est mis en parallèle avec les saints du premier plan. D’habitude
dans les saintes conversations il y a une continuité entre la perspective du premier champ et
celle du fond du panneau de bois. Le retable est petit (2M X 1,50M). La perspective du premier
champ aboutit entre les genoux de la vierge (giron de la vierge). Il y a une succession de plans
parallèles. La tour est parallèle au plan du tableau. La composition est très équilibrée, elle est
triangulaire (entre les saints et la vierge).

Le paysage montre des effets de fondu. La lumière du paysage se retrouve sur le premier
plan. Il y a une lumière très douce qui traine sur tout le tableau. La lumière vient d’accroître ;
dans la chapelle il y avait une fenêtre sur la croix : le peintre tient ici aussi compte de la lumière
réelle. Les montagnes deviennent bleues.

Le rouge est important, le velours, le rouge du costume de la vierge est important. On a


un jeu sur les couleurs complémentaires. Titien va définir les tableaux de Giorgione. Titien
jouera beaucoup sur les couleurs complémentaires (terme défini au XIXème siècle) : rouge-
vert, orange-bleu…Les couleurs primaires sont le jaune, le rouge et le bleu. Les couleurs
complémentaires sont des couleurs primaires complémentaires d’une couleur secondaire
(comme le vert) dans laquelle la couleur primaire ne rentre pas. Le vert est composé de jaune
et de bleu. La douceur de la lumière est ici une innovation, avec des contours estompés. On
ressent l’influence du Sfumato de Léonard de Vinci.

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Giorgione, Laura, 1506, huile sur toile marouflée sur bois, 41 x 33, Vienne :

Les fresques ont des difficultés à être conservées, d’où le choix de la toile. C’est une
commande privée. C’est une jeune femme peinte peut-être à la demande de son mari (le tableau
est fait à la demande de messire Giacomo). On s’est demandé si ce n’était pas le portrait d’une
courtisane. Des historiens ont remarqué que c’est le sein droit qui est dévoilé, d’où l’idée qu’il
s’agit peut-être le sein d’une mère qui s’apprête à allaiter. Le portrait serait donc commandé par
le mari comme cadeau de noces.

La présence de laurier suggère qu’il s’agit d’une femme mariée. Ce sont ces lauriers qui
auraient donné lieu au nom de Laura. Le laurier garde ses feuilles. Ces rameaux de laurier sont
croisés, liés derrière cette figure. Cela serait à relier au thème du mariage indissoluble. La
pelisse (manteau) qu’elle porte est un manteau d’homme ; elle serait peinte avec le manteau de
son mari.

Elle regarde peut-être son mari. La peau est très claire, elle ressort sur le fond sombre.
La matière picturale rend ici avec réalisme la composition du sein.

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Giorgione, La tempête, tempera et huile de noix sur toile, 83x73, 1530, Venise :

C’est une œuvre qui n’est ni signée, ni datée. Il y a une bohémienne, un soldat (à
gauche). La nature est le principal protagoniste. Sur la rive droite, il y a une ville. Sur la droite,
il y a des armes de la famille qui gouvernait Castelfranco, ville de naissance et d’enfance de
Giorgione. Il y a un ciel gris, couvert au centre duquel il y a un éclair qui annonce l’orage.

Il y a des masses de feuillage avec au premier champ, des figures qui nous regardent.
De l’autre côté, il y a un jeune homme élégant avec un habillement militaire qui regarde la jeune
femme. On a donc une scène avec un jeu de regard. Le paysage est beau, poétique. C’est un
nouveau genre de peinture que l’on appelle à Venise les « poesia ».

On a une composition assez classique : les figures sont de chaque côté du tableau. Le
tableau est organisé avec deux grandes masses, les verticales des arbres qui calent la
composition. Les figures s’insèrent dans le paysage. Il y a un rendu de la lumière intéressant,
avec la clarté concentrée au centre et la masse sombre des arbres de laquelle se détache la
bohémienne avec sa draperie blanche. La lumière qui vient de l’éclair décolore les architectures.
Le jeu entre les verts et les rouges est à relever.

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C’est une œuvre étonnante, nouvelle, qui accorde une grande place au paysage, qui nous
présente une femme nue. Le Sfumato de Vinci est ici à nouveau utilisé afin de donner un
caractère rêveur aux figures dont les contours ne sont pas nets.

Vasari voit comme fondement à l’architecture, la peinture et la sculpture, le disegno (le


dessin). L’artiste conçoit son œuvre au moment où il la peint. Raphaël fait des cartons de ses
fresques de la chambre de la signature. Ce n’est pas le cas à Venise. Le dessin est un critère
pour juger une œuvre. La figure doit avoir certaines proportions.

Giorgione, Vénus endormie, 1509-1510, huile sur toile, 108x174, Dresde :

On relie cette œuvre à une peinture pour des jeunes mariés (peut-être l’aristocrate
Marcello). Ce tableau est probablement destiné à une chambre nuptiale. La beauté du corps nu
doit entraîner, selon les croyances, la beauté du fœtus.

Il s’agit d’une Vénus, allongée, endormie. Elle nous laisse la contempler. Elle croise
gracieusement les jambes. Il y avait à l’origine un cupidon au pieds de Vénus, il cherchait à
réveiller sa mère pour qu’elle aille à un mariage. On retrouve l’influence d’une antiquité
poétique.

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Le paysage montre une Vénus terrestre, sensuelle. Au second champ, on voit un tronc
coupé qui évoque la brièveté de la vie. On ne peut pas parler d’érotisme, il y a une certaine
retenue. Le nu féminin est ici assez réaliste.

C’est une toile inachevée à la mort de Giorgione en 1510. Titien rajoute le drapé blanc
au premier champ. IL y a une série de lignes courbes dans le paysage et sur le corps de la jeune
femme. La composition est étalée par un talus à gauche. C’est une peinture d’une grande
douceur, très novatrice, qui n’a pas de précédent dans l’Antiquité. Ce sont les débuts de Titien,
qui a travaillé avec Giorgione.

Titien est le grand peintre vénitien du XVème siècle. Il est marqué par Giorgione, avec
qui il travaille. Il devient même son rival.

Titien (1488-1576), Le concert champêtre, vers 1510, huile sur toile, 110 x 138, Paris,
musée du Louvre

Cette œuvre est destinée à la collection privée d’un amateur vénitien. C’est une poesia
(peinture poétique). Les deux hommes sont entourés de deux femmes nues, des nymphes. C’est
un sujet poétique, énigmatique. Il y a voulu voir un thème bucolique (en rapport avec l’œuvre
de Virgile).

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Il y a un homme avec un troupeau. C’est une peinture qui évoque la musique, la poésie,
qui peut renvoyer aux idylles de Théocrite. Autour de la musique, on a une opposition entre la
flûte, instrument de Bacchus (Dionysos) et le Luth (instrument d’Apollon). C’est une opposition
entre les passions et l’élévation de l’esprit.

Les nus féminins sur les côtés encadrent la composition, ils forment des obliques. Les
femmes encadrent les personnages assis, qui forment une figure triangulaire (figure du joueur
de Luth).

Les figures s’harmonisent avec la nature. La tête de la femme de gauche est prolongée
par le tronc d’un arbre. Les contours des jeunes femmes sont grouillés. Il y a une alternance de
parties lumineuses et de parties foncées. Le reste du corps est sombre.

L’unité du tableau par la couleur se fait avec un jeu entre le rouge, le vert, les jaunes
dorés des corps. Le joueur de luth se détache devant une prairie verte. Les questions de
proportions sont secondaires pour les peintres de Venise. L’invetion et l’exécution ne sont pas
séparés. Il y a ici une antiquité lyrique, poétique, différente de celle vue à Rome. Les paysages
et les nus sensuels ont plus d’importance.

C’est dans ses retables que Titien va rompre avec Giorgione.

Titien, Assomption de la vierge, 1518, huile sur bois, 690x360, Venise, Santa Maria
del Frari :

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Le format ressemble à une arche d’arc de triomphe : on assiste au triomphe de la vierge.


La vierge d’après une tradition chrétienne médiévale aurait été enlevée au ciel 3 jours après sa
mort. On trouve le récit de cette scène dans La légende dorée de Jacques de Voragine.

Au premier plan, on voit les apôtres. La vierge s’y élève sur une nuée entourée d’anges.
Elle fait le geste de l’orant et elle tourne le visage vers Dieu le père. Le dernier registre de la
composition, c’est Dieu qui plane et regarde la vierge monter vers lui. Le peintre nous présente
ici une vision. On ne voit pas immédiatement Dieu le père, au fond de l’église le haut du retable
est caché par l’arc du cœur : c’est en avançant que l’on découvre Dieu. Le peintre joue sur la
place du spectateur.

Les apôtres tendent les bras vers le ciel, stupéfaits. La vierge se tourne vers le ciel, elle
est hiératique, immobile. Titien innove car on ne voit pas le tombeau, souvent utilisé comme
base. IL peint l’assomption comme un événement dramatique. Un mouvement dramatique est
donné à cette scène.

On a fait un parallèle avec la Transfiguration de Raphaël. Les apôtres forment un


rectangle. La partie haute avec la vierge forme un cercle. Le triangle ressort de la composition
en raison de plaques de rouge au niveau des apôtres et de la vierge. Les couleurs sont intenses,
saturées. La vierge qui se détache sur un fond très clair, très lumineux. Ce fond lumineux dans
la partie haute de la composition, on y a vu un équivalent des absides des églises de Venise.

Le mouvement est aussi important. Les personnages sont très expressifs, ce sont
notamment ces apôtres qui effraieront. Ils sont immenses (plus de 2M de haut). L’ombre du
nuage couvre les apôtres.

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Titien, Retable Pesaro ou Madone de la famille Pesaro, 1526, huile sur toile, 478x268,
Venise, Santa Maria del freri :

L’œuvre est une commande d’un vénitien évêque de Paphos (Chypre), Jacopo Pesaro.
Ce dernier fait en 1519 une commande pour un autel des bas-côtés d’une nef latérale de l’église.

Saint Pierre se tourne vers Jacopo agenouillé en prière. La vierge tourne son regard vers
le commanditaire elle-aussi. Derrière le commanditaire agenouillé on voit le turban d’un
prisonnier turc et à côté un porte étendard, un saint Georges probablement, qui porte une
bannière aux armes des Pesaro et des Borgia et qui évoque la victoire navale des flottes
pontificale et vénitienne en 1502 à Santa Maura.

En plus de Saint Pierre, on a deux saints franciscains, Saint François d’Assise et Jared
de Padoue. Il y a les 3 frères de Jacopo et 2 neveux dont l’un se tourne vers le spectateur.

La composition est très originale par sa disposition. Il y a deux immenses colonnes


placées sur des bases très hautes. On ne voit pas les extrémités. Ce sont peut-être une allusion

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aux colonnes du temple de Salomon ou à l’Ecclésiastique, passage de la Bible « mon trône était
une colonne de nuée ».

La composition est asymétrique, les personnages clés de la sainte conversation (la vierge
et Jésus) sont sur le côté de la composition. La composition fait la part belle aux obliques (avec
une oblique principale qui descend de la tête de la vierge à la tête de Saint Pierre). Un élan de
symétrie est rétabli par les figures du premier plan (Jacopo face à son frère et à d’autres
membres de sa famille).

Certains ont suggéré que le tableau était une réponse à son emplacement (sur le côté
gauche de la nef). La vierge aurait été placée sur la droite pour pouvoir être vue par le spectateur
qui descendait la nef. Les colonnes débordent du cadre, elles sont interrompues par le cadre du
tableau. On a une composition ouverte, qui ne s’inscrit pas comme les compositions fermées.

La lumière et les tableaux sont importants. L’orange joue avec la complémentaire, le


bleu. Les couleurs sont soutenues, intenses. On a une composition révolutionnaire. La couleur
la plus chaude est le rouge.

Titien, Bacchus et Ariane, 1523, 175x191, Londres National Gallery :

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Pour un cabinet du château de Ferrare (pour la petite chambre d’albâtre, Camerino


d’alabastro Studiolo), Alfonso Ier d’Este commande des toiles à Titien. Titien travaille pour la
première fois pour un prince italien. Alfonso voulait Bellini, dont Titien était l’élève. Il a tenté
de faire venir Raphaël, mais il est mort en 1521.

Le décor est fait autour du thème de Bacchus, du vin, du plaisir des sens. On a un décor
de scène mythologique. Le prince veut un cabinet, lieu où il médite et regarde des peintures.

L’œuvre est un fait mythologique, dramatique, dans lequel Titien met beaucoup de
mouvement et de couleurs. C’est un sujet qu’on trouve dans la littérature antique, non dans l’art
antique. Il s’agit de la deuxième rencontre de Bacchus avec Ariane, abandonnée sur Naxos par
Thésée. Bacchus abandonne Ariane pour conquérir les Indes, mais il revient ici. Son char est
conduit par des guépards.

Les étoiles de la constellation de la couronne sont faites à partir des joyaux de la


couronne de Bacchus. Pour le cortège, le peintre s’inspire de Catulle, de son poème Carmina
où il décrit le cortège de Bacchus. Catulle décrit l’adorateur de Bacchus qui s’enroule de
serpents (au premier champ sur le tableau).

Les figures féminines sont gracieuses, comme la bacchante au milieu de la composition.


On a un cortège très abondant de figures derrière Bacchus. On a un paysage avec un arrière-
plan de mer (il y aurait l’évocation du bateau de Thésée). Il y a une évocation du lit des parents
d’Achille. Cette peinture est la recréation d’une œuvre ayant appartenu à un roi de l’Antiquité.

Titien est devenu après la mort de Giovanni Bellini en 1516 le peintre officiel de la
République de Venise. Il a une clientèle importante, au sein des princes italiens notamment.

Ariane meurt dans les bras de Bacchus et rejoint les cieux avec son dieu. La formule
d’Horace « Ut pictura poesis » est inversée par les peintres, la peinture prend modèle sur la
poésie, le peintre se fait l’égal du poète.

La composition est frise, les principaux personnages sont au premier champ sur le même
champ (les têtes sont à la même hauteur pour la plupart). Ce type de composition est inspiré par
les sarcophages antiques.

La bacchante et ses cymbales forment une verticale. Sur la gauche, on a Ariane, qui va
dans une direction différente du cortège et qui équilibre la composition sur la gauche. Il y a une
torsion des figures (la pause de Bacchus est complexe avec le coup et la tête en torsion). On

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retrouve le jeu de l’ombre et de la lumière, avec les deux personnages principaux qui sont dans
la lumière. Le cortège est moins éclairé, il est sous les frondaisons.

Le bleu est important, tout comme le rouge important chez Bacchus et Ariane. C’est au
niveau de la bacchante, au centre, qu’il y a une draperie bleue et orange (couple de
complémentaires) Il y a une qualité de rendu des matières, des draperies, des corps.

L’influence du fameux Laocoon découvert à Rome en 1506 est présente. La figure nue
est importante en embellie.

Titien, Vénus d’Urbin, vers 1538, huile sur toile, 119 x 165, Florence, galerie des
Offices :

C’est une commande du fils du duc d’Urbino. Urbino est un petit Etat à l’Est de l’Italie,
c’est le lieu d’origine de Raphaêl. Guidobaldo della Rovere commande une femme nue « donna
nuda ». Il y a le même modèle, la « bella » qui a été peinte habillée. Il y a l’influence de
Giorgione pour l’idée du nu féminin.

La figure n’est pas endormie, mais éveillée contrairement à la Vénus de Giorgione. On


est sur une courtisane plus que sur une Vénus. Il y a eu un débat sur la figure du tableau.

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La figure est sensuelle, ses cheveux s’étendent sur ses épaules. Elle porte un bouquet à
la main, il y a un bracelet (contraste absence d’habillement et simple collier qui l’habille). Le
contexte est contemporain.

La figure est cadrée d’assez près. La composition montre deux espaces juxtaposés, mais
sans qu’il y ait de lien entre les deux espaces. Titien rompt avec une certaine rationalité
classique. Le point de fuite est indiqué par le dallage et se trouve au centre de la composition
sur l’extrémité du pan de mur noir qui sépare le nu du fond du tableau. Le point de fuite est à
hauteur des yeux de la « bella ».

Une ligne verticale au centre de la composition sépare le tableau et attire notre regard
sur le sexe de la jeune femme. C’est une toile quasi érotique. La draperie verte contraste avec
les matelas et coussins rouges du lit de la jeune femme. On retrouve le réalisme de
l’incarnation : Titien rend la peau humaine avec un modelé, une certaine douceur. C’est un
tableau pour le fils d’un souverain.

Titien, portrait d’homme dit « L’arioste », vers 1510, huile sur toile, 81x 66,
Londres, National Gallery :

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C’est une toile célébrée par Vasari, qui est très sensible au rendu du teint, de la peau du
visage, le teint ressemble au teint naturel. C’est vraisemblablement un membre de l’aristocratie.
Il s’agit peut-être d’un grand poète de l’époque.

La pose est dynamique, le personnage de profil se tourne vers nous. La pose est à la fois
élégante et familière, il pose son coude sur le paraphée au premier plan, sur lequel se trouve la
signature de Titien. Dans les années 1530, Titien devient portraitiste de souverains européens,
et en particulier de Charles Quint.

Titien, Charles Quint, 1533, huile sur toile, 194x112, Madrid, musée du Prado :

Le souverain domine le spectateur. Il est très satisfait de ce portrait inspiré d’un tableau
d’un peintre flamand. Titien est fait chevalier et comte palatin. Titien acquiert un statut que
n’avait obtenu aucun peintre avant lui.

II/ Le Maniérisme anticlassique (1520-1540) :


Le maniérisme c’est le style dominant en Italie et en Europe à partir des années 1520 et
ce jusqu’à la fin du XVIème siècle. C’est un style européen. Le terme manierismo a été inventé
à la fin du XVIIIème siècle en 1792 par Luigi Lanzi conservateur des offices. Ce terme décrit

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l’art du XVIème siècle. C’est un art qui n’imite plus la nature, mais qui s’inspire des idées, des
caprices qui naissent dans les têtes des artistes.

Pour Lanzi, 1527 (sac de Rome par les troupes de Charles Quint) est une date importante
pour le maniérisme. Vasari utilise le terme de maniera pour parler du style d’un artiste. Il parlait
par exemple de la bella maniera de Léonard, de Raphaël et de Michel-Ange. Vasari va parler
d’arte maniera (art de la manière), qui n’imite plus la nature, mais qui imite les œuvres des
artistes du début du XVIème siècle.

Au cours du XVIème siècle, le terme de maniera a donc une définition négative. C’est
une mauvaise pratique des artistes, qui délaissent la nature. L’artiste déforme la nature au lieu
de s’en inspirer.

Shearman parle de style stylé, un style artificiel, conceptuel et qui délaisse l’imitation
de la nature. Le maniérisme est réhabilité dans l’entre-deux guerres par les historiens allemands
qui ont apprécié cet art subjectif délaissant les normes établies et faisant primer la spiritualité
sur l’imitation de la nature. Pontormo et Le Greco sont les deux grands « héros » de la
redécouverte du maniérisme en Allemagne dans les années 1930.

1) La peinture à Florence ; Pontormo, Rosso, Beccafumi :


Cet art anticlassique va notamment se développer à Florence. C’est une phase
d’expérimentation. Vasari voit chez Pontormo une production d’œuvres étranges, il fait un
portrait sévère de lui, comme d’un solitaire. Il parle d’une manière extravagante et nouvelle.
Pontormo est découvert au début du XXème siècle, on apprécie son indépendance et son
abandon de l’imitation de la nature.

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Pontormo, Pala Capponi ou Déposition de Croix, vers 1526, bois, 313x192, Florence, église
Santa Felicità, chapelle Capponi :

C’est une commande d’un notable florentin pour un retable, une chapelle funéraire. On
ne peut pas bien situer le moment représenté. On est bien après la mort du christ, mais il n’y a
pas la croix, pas la descente d’échelle. Ce n’est pas une piéta.

Marie fait un geste d’adieu à Jésus. Le corps de Jésus, au premier champ, est porté par
deux figures efféminées qui sont peut-être des anges. Les deux regardent vers l’extérieur du
tableau. Soit-ils regardent vers l’autel (devant) et donc l’autel serait une métaphore du tombeau,
soit Jésus est porté à son père qui figure à la coupe de la chapelle, accompagné du saint esprit.

C’est une scène mystique où des anges conduisent Jésus vers son père. Le tableau met
en avant le corps de Jésus près de l’autel qui au moment de l’eucharistie devient le pain. Dans
ce tableau, il n’y a que des personnages, il y a un sol très sommaire et un petit nuage. Le lieu
n’a aucune importance, la primauté est liée aux figures.

On parle parfois pour ce tableau d’un personnage collectif. On peut voir l’influence de
Léonard de Vinci et son tableau Sainte Anne et la vierge Marie. L’élément typique du
maniérisme est l’horreur du vide (horror vacui). Il n’y a pas d’espace représenté. Il y a un
abandon de la perspective.

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L’espace devant le tableau est cependant pris en compte. Les anges se dirigent vers nous.
Les figures sont élégantes par leurs canons très allongés, ce sont des figures dansantes, sans
appui, sans poids. Les anges sont sur la pointe des pieds, comme Marie-Madeleine. Ce sont des
poses impossibles. L’œuvre s’éloigne de Michel-Ange. Cependant, les poses de certaines
figures se rapprochent de certaines œuvres de lui cependant (pose de Jésus).

On peut parler de couleurs assises avec des bleus, des roses. On trouve les cangianti
comme chez Michel-Ange. La couleur artificielle délaisse l’imtation de la nature. Ni Nicodème
ni Joseph ne sont présents. Les expressions des personnages sont souvent inquiètes. La lumière
irréaliste suggère le caractère divin de la scène. Certaines figures sont inspirées de la Bataille
de Cascina.

L’expression d’inquiétude est omniprésente sur les visages. La vierge ouvre la bouche
avec inquiétude. L’inquiétude est à relier au climat d’époque. En 1517, la Réforme luthérienne
éclore. En 1527, Rome est mise à sac. C’est une période de remise en question sur la religion,
cet écho atteint les artistes. Les termes pala, panneau d’autel et retable désignent la même chose.

Il y a ici un mysticisme de la scène. On n’est pas dans une scène traditionnelle de la


passion. Des anges portent le corps de Jésus au père pour former la Trinité (Dieu le père et le
saint esprit étant au plafond de la chapelle rappelons-le). La chapelle Capponi est une chapelle
funéraire.

Pontormo, La Visitation, vers 1528, huile sur bois, 202 x 156, Carmignano, église Saint
Michel, Pinadori :

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L’œuvre est commandée par une famille de notables florentin en 1528. Elle est une œuvre
destinée à l’autel d’une chapelle privée. La scène de la visitation évoque la visite de la vierge à
Elisabeth. La visitation est racontée par l’évangile de saint Luc. C’est la rencontre de deux
mères (mère de Saint Jean-Baptiste et mère de Jésus).

Cette scène suggère l’invisible. La manière de suggérer cet invisible, c’est de placer des
doubles de la vierge et de sainte Elisabeth derrière. On a deux figures qui s’adressent à nous,
au spectateur. Cette scène est symbolique de la transition entre les deux Testaments, avec
Elisabeth figure de l’Ancien Testament et Marie, figure du Nouveau Testament. Dans le
tableau, on a à gauche un palais florentin et à droite un mur. Le mur est mis en lien avec la
situation politique de l’époque. Florence est menacée, on fortifie la ville. La scène se déroulerait
dans Florence

Les formes des figures sont très larges (figures en amphores). Comme chez Michel-
Ange, les figures sont l’essentiel. Pontormo s’inspire ici du peintre allemand Dürer, des Quatre
sorcières, de 1497.

L’œuvre veut suggérer le spirituel mais met en avant l’art, les procédés artistiques. Les
perspectives sont discontinues.

Pontormo, portrait d’un hallebardier, 92 x 72, Malibu, Paul Getty Museum :

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C’est un hallebardier florentin qui monte la garde. Sont suggérés les remparts de
Florence, pendant le siège de Florence entre 1529 et 1530. Le visage est tourné vers nous, il y
a des torsions au niveau de la main. Il y a un contraste entre une lumière très forte au premier
champ et quasi absente derrière.

Rosso Fiorentino (1495-1540), Descente de Croix, 1521, 341 x 201, Volterra, Pinacothèque
municipale :

Rosso Fiorentino a des débuts plus difficiles que Pontormo. Il est encouragé par les
Médicis, même s’il évolue vers une certaine mélancholie (portrait de Pontormo par Vasari). La
couleur joue un grand rôle, avec des couleurs vives. La géométrie est importante dans les
formes, on a parlé de stylisation cubiste. Une confrérie (groupe religieux de fidèles ici)
s’intéresse à la descente de la croix et commande le tableau.

L’émotion chez les porteurs du corps de Jésus leur échappe. Celui de gauche a une
expression d’horreur, à la ligne de la carricature. Il y a une agitation dans la partie haute, et du
calme dans la partie basse. Daniel Arasse parle de pathos figé. Un autoportrait de Rosso serait

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contenu dans l’œuvre. Marie-Madeleine est agenouillée aux pieds de la croix et se précipite
vers Marie.

Les porteurs sont Nicodème et Joseph d’Arimathie, qu’on ne trouve pas chez Pontormo.
Le tableau montre bien la croix, ainsi que 3 échelles. Dans la partie haute, le nu est important.
Rosso montre de nombreux contrastes : surface et profondeur (frontalité de la croix et de deux
des échelles, profondeur au niveau de Marie et des deux femmes) / figure du premier champ et
figures du fond. Il y a une série d’angles, de lignes brisées.

Les angles sont très importants (notamment autour de Marie-Madeleine). Il y a une


séparation dans la partie basse entre le côté gauche et le côté bas. Dans la partie basse, il y a un
rectangle. La partie haute a une composition en courbe (peut-être en cercle). La lumière et les
couleurs sont très intenses et irréelles. On retrouve les gorgianti au niveau du turban (partie
haute). Pontormo imbrique les figures.

Rosso est à Rome entre 1518 et 1521. Après être devenu le premier peintre de François
Ier en 1530, il se suicide en 1540.

Rosso Fiorentino, Moïse et les filles de Jethro, vers 1524, toile, 160x117, Florence,
galerie des Offices :

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C’est une scène évoquée dans l’Exode (livre de l’Ancien Testament). Moïse prend la
défense des 7 filles de Jethro, grand prêtre de Madian. On voit le bétail des filles de Jethro.
Moïse est au centre, quasiment nu. Il a terrassé des madianites. Il apparaît comme un héros
victorieux, exemple de vertu. Il y a 3 grandes figures de héros dans l’art florentin : David,
Moïse et Hercules. Moïse est un prophète armé. Savonarole se réclame de Moïse, chef de
guerre.

Il y a du nu masculin et féminin. Le sexe de Moïse est au centre de la toile. Le corps de


Séphora est mis en avant, parce que c’est la future épouse de Moïse. Elle est très sensualisée.
Le tissu du corps de Séphora est très léger, il laisse se dévoiler son nombril.

Il y a très peu de décors, comme chez Michel-Ange. Ce qui ressort au niveau de la


composition, c’est qu’il s’agit d’une composition pyramidale dont le sommet serait Moïse, avec
dans la partie basse les corps des bergers.

On a des figures imbriquées. Il y a une horreur du vide (horror vacui). Le cadre est trop
étroit pour la scène. De l’importance est ici donnée au mouvement. L’intérêt de Rosso pour
l’anatomie diffère de chez Pontormo. Il est plus élevé. L’anatomie de Moïse et des bergers est
très présente, avec les masses musculaires.

Les expressions sont également très importantes. On voit notamment l’un des bergers
avec un visage très expressif. On a fait des parallèles avec la Bataille d’Anghiari de Léonard de
Vinci. Les personnages collectifs sont également inspirés de Vinci, de la Sainte Anne
notamment. L’expression des cavaliers de la Bataille d’Anghiari fait penser à celle d’un des
bergers au sol dans le tableau de Rosso.

La perspective est donnée par l’échelonnement des figures, et non par des lignes.

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2) La peinture maniériste à Parme : Le Corrège, le Parmesan (1503-1540), Jules Romain,


Michel-Ange :

Daniel Arasse parle de « Renaissance maniériste ».

Parmesan ou Parmigianino (1503-1540) :

Parmesan est formé à Parme (d’où son nom). Il a été à Rome en 1524 (comme Pontormo
et Rosso). Son séjour romain ne va pas donner de grandes œuvres. Parmesan est célébré par
Vasari, qui voit en lui le peintre de la grâce, de la beauté, un nouveau Raphaël. Pour Vasari,
Parmesan est cependant obsédé par les questions d’alchimie, ce qui va l’éloigner de la peinture.
On voit un certain érotisme chez lui. Pontormo est oublié après la Renaissance, contrairement
à Parmesan qui reste célèbre.

Parmesan, Autoportrait au miroir convexe, 1524, huile sur bois, 24 cm de diamètre,


Vienne :

Il réalise ce portrait à 21 ans. Le panneau en bois est hémisphérique. D’après Vasari,


Parmesan l’aurait réalisé avant son départ pour Rome pour y être bien accueilli. Il l’a offert à
Clément VII (un Médicis). Parmesan reproduit son reflet sur un panneau hémisphérique bombé
comme le miroir sur lequel il a regardé son reflet. Il peint ce qu’il a vu sur un miroir. Vasari

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décrit cette œuvre (déformation des poutres, des fenêtres…). Vasari dit que la peinture égale ici
la réalité. Il est plus favorable à Parmesan qu’à Pontormo. C’est un jeu, une œuvre qui déforme
la réalité (miroir). C’est une œuvre très représentative du maniérisme. C’est une allégorie de la
peinture.

Sur la droite de l’autoportrait, on voit le panneau en bois sur lequel le peintre va


intervenir (tableau dans un tableau). Il y a une mise en abîme. La lumière vient de la fenêtre.
La main évoque le geste de peinture. La tête du peintre évoque l’idée de la peinture.

Les artistes maniéristes vont réaliser énormément d’autoportraits. On a des autoportraits


des artistes italiens dès le XVème siècle. On a notamment un autoportrait de Raphaël. Les
artistes questionnent leur visage. Une partie de la galerie des Offices sera un regroupement
d’autoportraits dès le XVIIème siècle.

Parmesan, Cupidon fabriquant son arc, 1531-1532, juile sur bois, 135x65, Vienne :

C’est une œuvre homoérotique. Le fils de Vénus est représenté en adolescent nu, de
dos. Il regarde au-dessus de son épaule vers le spectateur (sans doute vers le commanditaire).
L’amour appuie son pied sur des murs (qui représentent le savoir et la sagesse). Il y est marqué

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« Amor vincit omnia » (l4amour vainc tout). Cette peinture est complétée par deux putti qui
luttent dans la partie basse. L’un nous regarde, l’autre a une expression épouvantée. Le premier
veut lui faire toucher la jambe de Cupidon. L’un des anges représenterait l’amour pur,
platonique, l’autre représenterait l’amour physique.

Le cadrage est assez près, on a peu de respiration. Il y a une insistance sur les courbes
du cœur de Cupidon. Cupidon a un corps moelleux. Les formes sont nettes. Les figures sont
assez structurales.

Parmesan, La vierge au long coup, 1535, huile sur bois, 216x132, Florence, galerie
des Offices :

Parmesan se montre peintre de la grâce. Cette œuvre est commandée pou Santa Maria
Dei Servi (une église de Parme). C’est un retable commandé pour la chapelle de l’église. C’est
une commande Elena Baiardi. Saint Jérôme est représenté avec un rouleau, il est représenté à
une très petite échelle. Il est à côté de la vierge.

La vierge à l’enfant est sur un trône, elle tient l’enfant endormi. A sa droite, il y a 5 ou
6 anges. Le vase de Crystal tenu par un ange fait allusion aux litanies de la vierge, où cette
dernière est vue comme un vase parce qu’elle a porté Jésus. On devine une croix. La vierge à

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l’enfant est en rapport avec l’annonce de la mort de Jésus. Le sommeil de Jésus fait aussi
allusion à la mort de Jésus.

Le coup de la vierge est comparé à une colonne. C’est une œuvre très originale, qui
bouleverse les représentations traditionnelles de la vierge à l’enfant. Le corps de la vierge
occupe quasiment toute la hauteur du tableau, son pied est proche de la bordure et sa tête est
très haute et étirée. La vierge a des proportions étirées. Les hanches sont très larges (parce que
la vierge est la mère par excellence) alors que les extrémités de la tête sont très resserrées. La
vierge est sur la pointe des pieds. On ne sait pas vraiment si la vierge est assise (irréalisme).

Le contrapposto est mis en cause durant la période maniériste. Le contrapposto veut


qu’une jambe soit en appui sur le sol pour porter le corps (le corps à un poids). Ce n’est ici pas
le cas. Il y a une certaine sensualité chez la vierge (sensualité de la femme selon Parmesan). La
vierge a un demi-sourire, pas aussi expressif que chez Pontormo.

Le côté bouche la perspective. On a une composition sans aucune symétrie. On retrouve


l’accumulation des figures. Le refus de la symétrie s’était déjà vu dans l’Ecoles d’Athènes de
Raphaël. Il n’y a pas de continuité entre le premier plan, et l’arrière-plan. Il n’y a pas de
continuité rationnelle entre les espaces. Il y a un contraste, un refus de la rationalité de la
perspective.

Du côté des couleurs, on a des couleurs globalement froides, à l’exception des coussins.
La vierge est recouverte de son manteau habituel. La vierge a un vêtement gris, rose pâle. Il y
a un refus des couleurs soutenues.

Le terme de bizarre est à introduire dans l’art maniériste. On voit naître des caprices,
des bizarreries dans l’esprit de l’artiste. Parmesan s’affirme ici par une manière qui lui est
propre. Il y a une grande différence avec l’art classique : Vasari a comparé le Parmesan de ses
débuts à Raphaël. Chez Raphaël, la grâce cache l’art, les procédés artistiques disparaissent
devant le spectacle de la peinture. Ce qu’on voit le plus, ce sont les procédés artistiques. La
manière de représenter est plus importante que l’objet représenté. C’est une œuvre très
importante.

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Jules Romain (Giolio Romano, 1499-1546) :

Il termine les salles du Vatican après Raphaël, notamment la salle de Constantin. Il


termine certains projets architecturaux de Raphaël. Il accepte la proposition de Frédéric II
Gonzague, duc de Mantoue, qui appartient à une dynastie ayant protégé les artistes (Alberti y a
travaillé, Mantegna a aussi travaillé à Mantoue). Frédéric II a été otage à la cour de Jules II. Il
est derrière Epicure dans l’Ecole d’Athènes. Il acquiert le statut d’artiste de cour.

La majorité des artistes travaille encore à la commande. Ici, Jules Romain obtient un
statut d’artiste, il a un salaire. Il fait partie de la cour du souverain. Il est vicaire de cour (il est
presque noble). Il va réaliser des projets de peinture et d’architecture, des projets de
tapisseries…

C’est un artiste très complet. A Mantoue, il ne peint plus, il conçoit le designo (dessin).

Jules Romain (Giulio Romano, 1499-1546), La Chute des Géants, 1532-1534,


fresque, Mantoue, palais du Té. D’après les Métamorphoses d’Ovide :

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L’architecture du palais du Té a été construit par Jules Romain qui s’inspire des villas
de l’antiquité romaine. Les salles sont décorées à fresques. La salle principale est la salle des
chevaux.

Il s’agit d’une représentation des fils de Gaïa. Gaïa est fécondée par le sang d’Ouranos.
De Cronos naissent les dieux olympiens. Les géants partent à l’assaut de l’Olympe. Ils empilent
des montagnes pour atteindre l’Olympe.

Sur la partie du plafond, Jupiter saisit la foudre et attaque les géants. Junon lui a fourni
la foudre (en vérité il s’agit initialement de Vulcain). Junon est ici un parallèle avec la maitresse
de Frédéric II de Gonzague. Pendant que Jupiter lance la foudre, les autres dieux sont sur les
nuées. Jupiter est descendu de son trône (visible au centre).

On a un effet de profondeur avec une coupole dans une pièce qui est de toute petite
taille. On a une profondeur dans le plafond avec des géants qui tournent leurs visages vers le
spectateur. Mantegna avait peint au palais Mantoue, une chambre des époux où il y avait un
effet de perspective similaire.

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Les dieux sont pour la plupart effrayés. Apollon et Hercules ainsi qu’Hermès sont
visibles. Athéna est assise.

Cette œuvre est une allusion à la situation au duché de Mantoue, avec en 1528
l’affrontement de Gonzague et de comploteurs. Jupiter a les traits de Frédéric II, du de
Gonzague. L’aigle sur le trône de Jupiter est une allusion à Charles Quint, allié de Frédéric de
Gonzague. En 1530, Frédéric fait marquis de Gonzague des ducs.

Le palais antique s’écroule, avec les géants dessous. Sur les autres murs, on voit les
montagnes rocheuses qui s’écroulent, avec des figures de géants monstrueuses. Il y a un singe,
qui est dû à une mauvaise traduction des Métamorphoses d’Ovide, mauvaise traduction datée
de 1522 qui a fait écrire que le sang des géants se transforme en singe. Ce singe relie Jules
Romain au courant humaniste. Il y a un décor qui effraie les spectateurs. Pour Vasari, « Il n’y
a jamais eu un travail du pinceau plus terrifiant, plus naturel et plus vrai ».

Au plafond, la perspective est très impressionnante : c’est une perspective verticale avec
un plafond qui voit l’ouverture du ciel et en même temps des figures qui nous tombent dessus.
Les poses et les expressions sont très variées. L’effet est d’autant plus fort qu’il y avait une
cheminée, qui, une fois allumée, entrainait des lueurs sur les géants.

Vasari note aussi qu’on ne sait plus où les murs finissent. On ne voit plus la limite entre
les murs et le plafond. On voit à peine les limites entre les murs eux-mêmes. Il y a des effets
illusionnistes avec l’absence d’angles. Au XVIème siècle, il y avait des galets qui étaient
représentés peints sur la base des murs. On ne voyait plus la limite entre le sol et les murs.
L’architecture de la salle se trouve liée. La peinture anime l’architecture.

Jules Romain est l’exemple de l’artiste de cours, à la fois peintre et architecte, qui
dessine des décors pour les spectacles de théâtre. Il est tel Charles Lebrun à Versailles. C’est
un décor politique, qui a été très célèbre. Il y a 116 travailleurs dans ce palais.

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Michel Ange, Le Jugement dernier, 1536-1541, fresque, 17mx13m30, Vatican, chapelle


Sixtine, commande de Clément VII en 1533 confirmée par Paul III en 1534 :

Dans la partie haute du mur, on a mis une semelle en brique. Le mur de la partie haute
est en saillie. En 1535, Michel-Ange est nommé architecte, peintre et sculpteur en chef du
Vatican, avec un salaire. Il va devenir un peintre et artiste officiel. On note la grande originalité
de Michel-Ange pour traiter ce thème du jugement dernier, thème courant depuis le Moyen-
Âge. Il s’agit d’une représentation du texte de l’Evangile de Matthieu au chapitre 25« le fils de
l’Homme viendra dans sa gloire ». Il s’agit du jugement des morts d’après les livres de leurs
vies. Les deux sources sont ici l’Apocalypse de Saint Jean et l’Evangile de Saint Mathieu.

400 corps sont représentés. Condivi, biographe de Raphaël dit que ce décor est à la gloire
du corps humain, du corps humain nu.

Dans la partie haute de la fresque, des anges portent les instruments de la Passion (croix,
couronne d’épine). Toujours en haut, des anges portent la colonne de la flagellation (un des
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épisodes de la Passion). On a des corps masculins nus avec des torsions. En dessous, on a Jésus
qui revient juger les Hommes. Jésus est ici imberbe, sans barbe, il lève son bras droit vers les
damnés : il sépare les damnés des élus. Sa main gauche est tendue et dirigée vers les élus. On a
un Jésus assez violent. On a dans cette œuvre du pessimisme de la part de Michel-Ange. Michel
Ange peint cette œuvre apprès le sac de Rome de 1527, sac qui a bouleversé les Romains. On
est dans une période de crise spirituelle notamment.

Jésus est très sévère. La vierge n’intercède pas pour les Hommes, elle est assez effrayée,
recroquevillée sur elle-même, elle se sert contre son fils, selon Condivi, elle est terrifiée par la
colère de son fils.

Les Elus qui entourent Jésus forment une couronne selon Condivi. Saint Jean-Baptiste
est à gauche. On reconnait aussi Saint Pierre, qui tient une clé. Il y a des apôtres et des saints
qui n’intercèdent pas contrairement aux autres jugements derniers. Ils se justifient devant Jésus
par les instruments de leur martyr (Saint Laurent et Barthélémy, qui tient sa peau car il a été
écorché vif…). On reconnait aussi Sainte Catherine d’Alexandrie. Saint Blaise a un peigne
d’acier, Saint Sébastien tient des flèches (il y a une grande dévotion en Italie pour ce saint).

Sur la droite, le géant qui porte une croix est une allusion au chapitre 24 de l’Evangile
de Saint Mathieu, où il est dit que « dans le ciel apparaitra le fils de l’Homme ». Il y a des
figures nues féminines.

Sous Jésus, il y a 7 anges avec des trompettes, évoquées dans l’Apocalypse. Ce sont les
anges qui annoncent le jour du jugement dernier. Ils sont accompagnés d’autres anges qui ont
des livres (avec le livre de la vie, évoqué par l’Apocalypse où il est annoncé que les morts furent
jugés d’après le contenu des livres). Plus bas, on a côté gauche les charniers qui s’ouvrent avec
les Hommes qui ressuscitent (on a des linceuls, des squelettes). La représentation des squelettes
est liée à une description dans le livre d’Ezéchiel (chapitre 37). Certains hommes élus montent
vers le ciel. Les anges arrachent des corps. Jésus attire les corps.

L’ange qui a un chapelet monte les morts vers Jésus. Dans le côté gauche, beaucoup de
ressuscités montent vers le haut tandis que sur la droite, des anges frappent les damnés. Les
damnés redescendent vers l’Enfer. L’un des personnages est saisi. L’Arétin, poète florentin,
relève qu’un démon saisit un homme par les parties génitales.

Dans la partie basse, on voit l’Enfer. Michel-Ange s’est aidé des descriptions de Dante
dans la Divine Comédie. Il a repris des figures mythologiques. Il y a le Styx, avec Charon, le

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batelier qui s’apprête à frapper les damnés pour les envoyer en Enfer. Sur la boîte, on voit
Minos, entouré d’un serpent qui mange le sexe d’un damné.

Ceux qui sont à gauche de Jésus descendent aux Enfers, mais peut-être que certains
arrivent à atteindre la zone des Elus. Il y a un très grand mouvement, la composition n’est pas
claire, il n’y a pas de registre superposé. Le pouvoir de la vierge et des saints n’est pas mis en
avant dans cette peinture. Certains ont donc vu des tendances luthériennes dans cette œuvre.

La seule chose importante était la Grâce divine, c’est pour cela que les saints seraient
ici inutiles. L’œuvre st terminée en 1541. En 1545, Paul III ouvre le Concile de Trente, fait pour
réconcilier les Catholiques et les Protestants, mais qui sera finalement un concile dirigé contre
les protestants. Michel-Ange se détourne ici du néoplatonisme qui mettait en valeur le corps,
pour une vision pessimiste.

C’est une composition plutôt verticale, qui n’est pas compartimentée, contrairement aux
autres œuvres du jugement dernier. Ce qui est notable dans cette composition, c’est le
mouvement. Les élus sont attirés vers le haut. Il y a un mouvement ascendant à gauche et un
mouvement descendant à droite.

Le mouvement se voit dans la partie haute de la composition. Sur la gauche, le


mouvement qui part d’en bas de prolonge jusqu’en haut (oblique ascendante avec la croix). Sur
la droite, l’idée de descente est suggérée par la colonne. Toutes les figures sont en mouvement.
Michel-Ange avait déjà montré des mouvements dans son projet de la Bataille de Cascina.

Pour saint Barthélémy, Michel Ange s’est inspiré d’un élément phare de la collection
papale, du Torse du Belvédère. Le couteau que tient Saint Barthélémy est l’outil de son martyr.
Cet outil renvoie à la terribilita de Michel-Ange (expression de terreur). Derrière Saint
Barthélémy, il y aurait peut-être la représentation de l’amant de Michel-Ange.

Le bleu du ciel est un bleu de lapis lazuli. Les couleurs acidulées évoquent la voûte de
la chapelle sixtine. Le fond bleu est important, les murs s’en détachent. Les murs ont un
éclairage contrasté et mettent en valeur la musculature. Les damnés ont une couleur grisâtre, de
même que les ressuscités du bas. Plus on monte, plus les figures sont claires. Le ciel bleu donne
l’impression d’un espace infini.

Lors du concile de Trente on s’occupe de l’art chrétien. Vont être demandées des
corrections dans le décor de Michel Ange, à la gloire du corps humain, mais qui va comprendre
trop de nus indécents.

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En 1545, L’Arétin écrit que Michel-Ange doit être aussi rigoureux dans le religieux
qu’en tant qu’artiste « Michel Ange a voulu montrer autant d’impiété en religion que de
perfection en art », il dit que l’œuvre n’a pas sa place dans une chapelle : « l’ouvrage a sa
place dans une étuve ». Des figures nues sont refaites ou recouvertes. Avant les retouches
demandées par le Concile de Trente. Saint Blaise a été redressé, il n’est plus nu derrière Sainte
Catherine. Il est désormais tourné vers Jésus. C’est après la mort de Michel-Ange que l’on
procède aux modifications et ajouts. C’est notamment Daniel da Volterra, élève de Michel-
Ange qui s’en charge. Pie V menacera de détruire l’œuvre.

3) L’architecture à Mantoue et à Florence : Jules Romain, Michel-Ange :


Jules Romain, Palais du Té, à Mantoue 1526-1534, villa suburbana :

C’est une maison d’été. Le duc Frédéric II ne couche pas au palais du Té. Dans
l’antiquité il y avait des villas agricoles et des villas suburrbaines (aux environs des villes mais
sans domaine agricole). C’est un plan carré, avec 4 ailes autour d’une cour. C’est un plan qui
évoque une cour de châteaux médiévaux. Il y a un jardin, terminé par une colonnade terminée
en exedre.

Il y a des entrées avec 3 arcades et une entrée avec une seule arcade. L’entrée principale
est vers la ville, elle a un perron, 3 arcades. Il n’y a qu’une ouverture. C’est une architecture qui

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va impressionner Vasari. Le palais n’est pas construit en pierre. Ce bâtiment est fait en briques,
en stuc (plâtre + poussière de marbre) façonnées et qui donnent l’impression de la pierre.

Le pilastre comprend une frise dorique. Les murs sont avec des refends. Il y a des
bossages rustiques. On va voir dans tout le bâtiment un jeu entre nature et art. Beaucoup
d’éléments imitent la pierre mal dégrossie. Le pilastre passe sur le cordon, et cela est
anticlassique. Le maniérisme va introduire des bizarreries, des irrégularités dans le langage
classique.

Les façades extérieures sont hostiles, assez fermées. La voûte est supportée par des
colonnes rustiques. Dans la cour, on s’aperçoit qu’il n’y a plus les pilastres des façades, il y a
maintenant des colonnes. On recherche une continuité rationnelle.

Au niveau de la frise dorique, le triglyphe est détaché ; Jules Romain joue donc avec
l’idée de ruine, comme dans la salle des géants. La cour d’honneur comprend des bossages
rustiques autour des ouvertures, il y a des demi-colonnes, et le fronton triangulaire ressort. Il y
a un jeu entre le lisse et le rude.

Toute la façade est une loggia (espace à l’avant d’une façade et qui est à l’air libre). Le
motif de la serbienne est repris, il y a une série d’arcades qui retombent sur des colonnes. Sur
les côtés, il y a des espaces rectangulaires. Ce motif a un grand succès à la Renaissance, il est
inventé à la période maniériste. L’artiste tourne le dos à l’architecture classique.

L’axe de l’entrée est perpendiculaire à l’axe des jardins. Il y a un jeu entre les flux de
colonnes rustique et la voûte en berceau avec les caissons inspirés de la basilique Maxence à
Rome. Jules Romain se détourne du langage classique : pas de continuité entre les façades
intérieures et extérieures.

Le claveau des fenêtres remonte, il devrait former une horizontale parfaite, mais il est
remonté vers le haut. Il y a un jeu avec l’équilibre, avec l’idée de ruine, rappelons-le.
L’architecture de Jules Romain est marquée par la bizarrerie.

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Salle de lecture de la bibliothèque laurentienne au-dessus de San Lorenzo , Florence,


d’après un projet de Michel-Ange, à partir de 1525 :

La salle a une structure triple, il y a 3 travées. En 1524, Clément de Médicis devient


Clément VII et commande la bibliothèque qui comprend la collection de Laurent le magnifique.
La partie principale est le vestibule. C’est d’après un modèle de Michel-Ange que l’escalier est
construit, c’est un gigantesque escalier à 3 volets, qui occupe quasiment tout l’espace. La
découpe des marches est courbe, un historien de l’art a parlé de flots de marbre.

Sur les côtés, il y a deux volets latéraux. D’après Vasari, la volée centrale était destinée
au duc de Florence, et que les courtisans descendaient sur les côtés. Le vestibule est carré, la
salle de lecture est rectangulaire. Michel-Ange avait prévu un troisième espace rectangulaire.

Vasari loue Michel-Ange qui dans cette architecture surpasse l’Antiquité. Vasari est
quand même inquiet parce qu’il a peur que d’autres artistes s’inspirent du non-respect des règles
de Michel-Ange. Les colonnes sont encastrées dans le mur, ce qui nie leur fonction. Les
consoles vont vers l’avant, elles ont simplement un rôle décoratif.

Cette bibliothèque laurentienne enchaine les figures géométriques (salle de lecture


rectangulaire, vestibule carré et salle triangulaire). Autour de 1560, l’escalier du vestibule est
réalisé d’après le modèle de Michel-Ange. Il a 3 volées, une principale où les marches sont

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convexes (cela a été comparé à une coulée de lave), des volées latérales sur les côtés, sans
garde-corps. La volée principale est pour le duc.

Il y a un bouleversement des règles de l’architecture avec les colonnes jumelles. Les


doubles colonnes s’inscrivent dans des niches. Ici, les colonnes sont encastrées dans un mur.
C’est une mise en cause d’un des grands principes de l’architecture classique. Ce sont les
colonnes et les murs qui sont porteurs. Les colonnes ne supportent qu’une mince corniche et
non un entablement. Il y a une proportion ionique des fûts des colonnes.

Les consoles à volutes situées sous les colonnes sont en saillie. Elles n’ont pas un rôle
de support, contrairement à d’habitude. Pour ses fenêtres aveugles surmontées de frontons
courbes ou triangulaires, il y a des pilastres en gaine.

Vasari est inquiet, il accepte que Michel-Ange prenne des libertés, mais il est inquiet de
l’influence de Michel-Ange. Les parties importantes de l’architecture sont en pietra serena
(pierre grise). Il y a un jeu entre la pietra serena et les murs couverts dans du blanc.

Nouvelle sacristie de San Lorenzo à Florence, commandée en 1519 par Léon X et


par le cardinal Jules de Médicis :

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On parle de nouvelle sacristie car Brunelleschi avait réalisé une ancienne sacristie,
prévue comme chapelle funéraire de Cosme de Médicis au début du XVème siècle. C’est ici un
plan carré, surmonté d’une coupole, associée à un petit carré où se trouve l’autel, le cœur de la
chapelle. Michel-Ange s’inspire de Brunelleschi (pilastres, jeu de la pietra serena et des murs
blancs, système à triple travées) mais il y a des différences (ajout d’un second niveau autour de
l’arc, des fenêtres sont ajoutées ainsi qu’un troisième avec les pendentifs qui sont sous la
coupole).

La coupole a des caissons inspirés du panthéon et qui diminuent vers le sommet de la


coupole (effet de perspective). Elle n’est pas à nervures comme chez Brunelleschi. L’effet de
perspective se retrouve également dans la coupole. Les fenêtres accentuent cette perspective,
celles des parties hautes avec la coupole.

Dans le détail, il a des innovations, des fantaisies. L’élément le plus original est
représenté par les tabernacles qui se trouvent au-dessus des portes. Ce sont des décorations
architecturales. La base du fronton est interrompue au lieu de continuer. Elle est interrompue,
et le haut de la niche gagne l’espace du fronton. Les pilastres sont sans chapiteau, ce qui brise
les conventions à nouveau. La fantaisie de Michel-Ange prime sur l’imitation de l’antiquité que
l’on trouve chez Vitruve et Alberti.

Au second niveau, les pilastres sont petits. Sous les tabernacles sont introduits des
masques grimaçants. On retrouve donc le goût de l’époque maniériste pour le monstre. Léon X
commande la chapelle funéraire après la mort de Laurent en 1519. Il est le dernier descendant
mâle légitime de Cosme l’Ancien. Le pouvoir risque de passer à des branches cadettes. C’est
Charles Quint qui au début des années 1530 remettra les Médicis sur le trône de Florence.

Sculptures dans la chapelle (1521-1534) :

• Tombe de Laurent, duc d’Urbino (mort en 1519)


• Tombe de Julien, duc de Nemours (mort en 1516)
• Vierge Médicis

Les personnages ne sont pas représentés en gisant, mais assis. Laurent est représenté
méditant (Vasari écrit « pensif »). Laurent fait le geste de supporter son menton avec une main
(geste de méditation, Saint Joseph a souvent ce geste dans la crèche). Julien est représenté plus
actif. Les deux sont en costume militaire. Julien est dans un costume à l’antique. Il tient le bâton
de commandement des forces pontificales. Il est représenté comme prince et comme

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commandant des troupes pontificales. Laurent et Julien tournent le visage vers le mur d’entrée
de la chapelle, vers la vierge Médicis. Ces figures prennent en compte l’espace architectural.
Leur regard traverse la chapelle. Ce sont des figures qui prennent en compte l’espace
architectural.

La vierge Médicis est entourée des saints patrons de la famille des Médicis. Les Médicis
pensaient que leurs noms venaient des médecins (Saint Cosme et Saint Damiens). Les
sculptures de Saint Cosme et Saint Damiens ne sont pas de Michel-Ange. La vierge donne son
lait à l’enfant Jésus et donc à l’Humanité. La vierge allaite son fils. Les deux ducs se tournent
vers cette vierge. Ces capitaines sont assis au-dessus de leurs sarcophages. Au-dessus de leurs
sarcophages, on a des représentations du temps, des heures (Laurent est au-dessus du crépuscule
et de l’aurore, représentée comme une femme qui a un réveil douloureux). En dessous de Julien,
on trouve le jour (figure masculine) et la nuit (figure de femme au corps âgé).

Pour Vasari, cet ensemble représente la défaite des heures et le triomphe des princes morts
sur le temps. C’est la célébration des Médicis dont le pouvoir doit durer. On a un texte de
Michel-Ange qui parle de la nuit et du jour. Le Jour et la Nuit parlent et disent « Nous avons
conduit à la mort le duc Julien, il est juste qu’il se venge, il nous a ravi la lumière, et de ses
yeux fermés, il a fermé les nôtres, il nous a ravi la lumière ».

Il y a eu une interprétation néoplatonicienne de cet ensemble au XXème siècle, se basant


sur la formation de Michel-Ange. Certains historiens ont pensé que Michel-Ange était encore
habité par ses idées néoplatoniciennes lors de la création du tombeau. En se basant sur le Phédon
de Platon, Michel-Ange représenterait donc les heures, les parties du jour qui représenteraient
le monde terrestre, périssable, au-dessus desquelles seraient situés les ducs qui symboliseraient
l’âme délivrée de la prison du corps. Mais cette interprétation n’est basée sur aucun texte.

Les figures montrent un canon maniériste. Les figures élancées rentrent dans les normes du
maniérisme : coup très long de Julien de Médicis, lequel est particulièrement gracieux avec son
armure qui a des effets de transparences + corps très musclé, influence des prophètes de la
chapelle sixtine (Laurent est repris du prophète Isaïe de la chapelle sixtine). On n’a pas à faire
à des portraits réalistes. Michel-Ange réalise des figures idéales des Médicis.

Les torsions sont visibles dans les figures : l’aurore est sensuelle, en torsion qui exprime la
douleur, elle a les lèvres entrouvertes. Le crépuscule a un visage inachevé. Les figures des
heures sont comme des figures enchaînées (ce qui rappelle les esclaves du tombeau de Jules II).
La nuit est la seule figure qui est identifiable sans témoignage contemporain. Elle a des attributs,

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comme un croissant de lune et une étoile sur les cheveux, elle a une figure de chouette, ses
feuillages sont des pavots (qui ont la particularité d’endormir). La nuit est souvent montrée
parce que c’est un corps féminin avec des muscles masculins (comme le dit l’Arétin). Notre
regard insiste sur les replis du ventre. Les seins de la nuit sont déformés, malades.

L’allongement qu’on retrouve dans la Vierge de Médicis est assez maniériste. La torsion
spirale de la vierge est maniériste.

Michel Ange a une fonction d’architecte des fortifications de Florence, il ne reprendra ses
sculptures qu’en 1541, car les Médicis ont souhaité le condamner à mort. Michel Ange termine
en 1534 pour partir à Rome réaliser le Jugement dernier.

III/ Après 1540 ; seconde phase du maniérisme et autres tendances


artistiques :
1) Peinture et sculpture à Florence : Bronzino, Vasari, Cellini, Jean Bologne :
Le maniérisme devient un art de cour. Il est moins anticlassique dans cette phase. C’est
un art moins moderne et moins spirituel. Cette seconde phase du maniérisme est celle où les
Médicis établissent une monarchie à Florence. Cosme de Médicis (Cosme Ier) est duc de
Florence en 1537 puis devient grand-duc de Toscane en 1569.

François Ier de Médicis est grand-duc de Toscane en 1574 (jusqu’en 1587) à la mort de
Cosme de Médicis. La plupart des œuvres sont des commandes officielles.

Bronzino est un élève de Pontormo. C’est un artiste de cour des Médicis, portraitiste et
décorateur.

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Bronzino (1503-1572), Allégorie du triomphe de Vénus ou Vénus et Cupidon, vers


1545, huile sur bois, 146x116, Londres, National Gallery :

C’est une commande du duc comme commande diplomatique au roi de France François
Ier. François Ier est un grand amateur de sujets érotiques, c’est ici le cas. On voit une Vénus
qui ne se cache pas. Elle est enlacée par Cupidon. En 1558, on a enlevé le rameau des fesses de
Cupidon, et le voile sur le sexe de Vénus.

Saturne, avec une aile et un sablier tient une draperie bleue qui dévoile la scène : c’est
le temps qui nous dévoile cette scène que le spectateur ne devrait pas voir. Il y a un jeu sur le
visible. C’est le triomphe de la beauté sur l’Amour, Vénus saisit une des flèches de Cupidon.
L’amour est désarmé. Il y a une scène d’amour charnel.

Les allégories alertent sur les dangers de l’amour. Le putto souriant qui danse s’apprête
à jeter des roses sur le couple. Le putto évoque la danse, il a un grelot au pied qui évoque la
musique. Il y a du sang au niveau du pied de Vénus (danger de l’Amour).

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Une jeune fille est visible, elle symbolise la tromperie, facette de l’Amour. La main
gauche de la jeune fille tient un rayon de miel. Dans sa main droite, elle a un dard. C’est la
figure de la tromperie.

Une autre figure serait la Jalousie ou l’Envie. Ce serait peut-être la syphilis, et donc un
avertissement envers l’un des dangers de l’amour qui serait la maladie. La figure du haut serait
peut-être la nuit. Vénus se trouve sur une diagonale de masques, Vénus serait une Vénus qui
nous trompe. L’Amour charnel serait synonyme de tromperie.

Le carquois dans les fesses de Cupidon évoque la sodomie (évocation de la double


sexualité). On retrouve le goût des figures sinueuses, allongées, serpentines, parsemées de
courbes (putto sur la droite, Cupidon). Il n’y a aucun élément de perspective géométrique
(comme chez Pontormo). Le thème du baiser de Vénus et Cupidon avait déjà été représenté
dans un carton de Michel Ange réalisé par Pontormo : on retrouve Vénus prenant une flèche de
Cupidon, les motifs des masques et des roses.

Bronzino reprend la pose de la vierge du Tondo Doni de Michel Ange (genoux de côtés,
bras droit, inclination de la tête).

La peinture a une matière très lisse. On a une Vénus apparaissant très clair, on a une
lumière forte sur un fond sombre. On retrouve les couleurs acidulées de Michel Ange (au niveau
du rose et du bleu clair).

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Bronzino, Portrait d’Eléonore de Tolède avec son fils, vers 1545, huile sur toile, 115x96 :

C’est un brocart de soie, la robe est celle du mariage d’Eléonore de Tolède. Il y a une
absence d’expression. Les figures sont immobiles, le style st sculptural. Le collier de la
souveraine est mis en valeur.

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Bronzino, Le Serpent d’Airain, vers 1543, fresque, 320x385, Florence :

Il y a une grande place accordée au nu. C’est un sujet biblique, qui se base sur un passage
de l’histoire de Moïse.

Studiolo de François Ier de Médicis 1570x1573, Florence, Palazzo Vecchio :

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C’est un lieu où le prince regarde ses collections. Il y a des armoires où le prince


conserve des objets d’art et des objets naturels. Il n’a pas de fenêtre, il a la forme d’un coffre.
Le studiolo est orné de peintures. Les sciences telles que la chimie l’astrologie et l’alchimie
sont représentées.

L’artiste dirige les différents peintres qui interviennent dans le studiolo. Giorgio Vasari
va être l’un des artistes de Cosme à partir de 1554.

Giorgio Vasari, Persée et Andromède, 1572, huile sur ardoise, 127x109 :

Andromède est prisonnière d’une créature et délivrée par Persée. Persée détache les
lions d’Andromède. Pégase est présent. Andromède est nue, contrairement au texte d’Ovide où
Andromède n’est pas nue. Ce sujet est choisi pour un aspect de la légende de la méduse : celle
où Persée porte la tête de la méduse. Le venin de la tête de Méduse transforme le sol en coraux.

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Benvenuto Cellini (1500-1571), Salière de François Ier, 1543, or, email, ébène,
26x33, Vienne :

Cellini est un orfèvre, célèbre pour sa vie. Il a écrit une autobiographie. Il va rester 5 ans
au service de François Ier. Il va faire pour lui des œuvres qui relèvent de l’art décoratif. Une
divinité marine est représentée (Poséidon ou Neptune), car le sel vient de la mer. Le poivre est
sur l’arc de triomphe, lui aussi en rapport avec le pouvoir, avec la célébration du gouvernant.
Sur l’arc de triomphe, on a une figure allégorique qui incarne la terre.

C’est une œuvre qui donne l’impression d’être une sculpture monumentale. Cellini
quitte Fontainebleau et Paris en 1545 et arrive à Florence.

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Benvenuto Cellini, Buste de Côme Ier, 1547 :

Il va faire des œuvres pour Cosme Ier, dont un buste en bronze de Cosme Ier. Le bronze
est très important à Florence. Pour les yeux, il y avait de l’argent et de l’émail sur le buste de
Côme Ier (ou Cosme Ier). C’est un clin d’œil au Marc-Aurèle du capitole.

On est loin de l’inexpressivité des œuvres de Bronzino. Il y a une insistance sur le regard.
L’armure st réalisée à l’antique, avec une tête de méduse. Si l’armure est à l’antique, la
décoration est contemporaine, avec la Toison d’Or.

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Benvenuto Cellini, Persée, 1554, bronze, 320 cm de hauteur, Florence

Il y a des têtes de Capricorne. C’est une œuvre qui célèbre Côme Ier. Hercules est
important chez les Médicis. C’est une représentation de Côme sauvant Florence. Persée brandit
la tête de Méduse, tête brandie pour pétrifier les ennemis de Florence et de Côme.

Le héros est triomphant, on peut faire le rapprochement avec le David de Donatello pour
la figure du héro nu triomphant. Le corps de Méduse est sous les pieds de Persée. Persée est
inexpressif. Cellini n’a pas peur de représenter l’horrible. C’est une œuvre très finie, avec
l’observation du corps humain.

Cellini partage le sens des détails avec Bronzino, c’est une sculpture très lisse.

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Jean Bologne, Giambologna, Mercure (1580), bronze, Florence :

Il est né à Douai en 1529. Le maniérisme est un style européen. Il est venu en Italie, à
Rome pour voir les œuvres de Michel-Ange. Il sera présenté au fils de Cosme Ier de Médicis,
François de Médicis. Pour Jean Bologne, la question de la forme est plus importante que la
question du contenu des œuvres.

Mercure est représentant volant vers le ciel, c’est le messager des dieux. Il est dressé sur
la pointe des pieds, c’est une figure instable, il défie la stabilité. Cette sculpture est faite pour
être vue sous tous les angles, et non pour une vision frontale, et un seul angle de vue.

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Jean Bologne, Enlèvement de la sabine, 1582, marbre, 410 cm de hauteur, Florence :

3 figures sont représentées. Jean Bologne dépasse ce qu’a fait Michel Ange avec le génie
de la victoire, où il n’y a que deux figures. Si l’on tourne autour de la sculpture, on a une
impression de mouvement. On retrouve la figure serpentile, l’allongement des figures.

L’imbrication des figures est inspirée par une sculpture antique : le taureau Farnèse.
Jean de Bologne préparait les esquisses de ses statues de marbre avec de la terre, de l’argile.
Jean de Bologne taillait le marbre. L’ébauche, le projet est très important. Ce qui compte c’est
le projet, la réalisation est laissée à des membres de l’atelier : Raphaël et Jules Romain faisaient
déjà cela. Raphaël laisse les membres de son atelier à Mantoue par exemple.

Il y a une volonté du sculpteur de se rapprocher de l’homme de cour. L’aisance et la


désinvolture sont des vertus que Jean Bologne défend ici. Les artistes vont suivre ce modèle
progressivement.

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Jean Bologne, Statue équestre de Côme Ier, 1593, bronze, 7m, Florence, place de la
Seigneurie :

Jean Bologne s’inspire de la statue de Marc Aurèle du capitole. C’est la première statue
équestre d’un souverain sur la place principale de la capitale de la Toscane. Les élèves de Jean
Bologne réaliseront la statue de Philippe II en Espagne, la statue d’Henry IV à Paris.

Au XVème siècle, ce sont des hectares princiers qui font une commande de statue
équestre. Laurent de Médicis n’aurait jamais osé faire une statue équestre de lui-même puisqu’à
son époque, Florence est une république.

Côme Ier a un bâton de commandement, il possède une armure. Il retient son cheval, ce
qui donne une image d’autorité, il retient sa monture comme il assure l’autorité de son Etat.
Jean Bologne va recevoir une autre commande pour les jardins de leur villa.

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Jean Bologne, l’Apennin, vers 1580, pierre, brique, stuc, rocaille, 10 m de hauteur,
Florence, Villa Médicis :

Le géant donne l’impression d’émerger depuis un rocher. Il y a un jeu entre l’art et la


nature. La statue est dans un jardin maniériste, très décoré, avec des grottes artificielles.

2) Peinture à Venise : Titien


Après 1540, la couleur est toujours importante. Les Vénitiens dédaignent le dessin
(designo). Ils privilégient le colorito (couleur sur laquelle l’art vénitien s’appuie, celle qui
permet d’imiter la nature). Venise partage avec Florence et Rome la mimesis, volonté d’imiter
la nature.

Titien n’a pas une carrière que vénitienne, il a une carrière italienne.

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Titien, Le Couronnement d’épines, 1542, huile sur bois, 303x381, Paris, musée du Louvre :

C’est une commande d’une confrérie. Titien entre 1540 et 1450 montre des éléments
maniéristes. Il a vu les œuvres de Jules Romain à Mantoue. On voit les bourreaux qui rentrent
la couronne d’épines à coups de bâtons dans le crâne de Jésus. Les bâtons forment un triangle.
C’est une représentation dramatique et violente. L’influence des géants de Jules Romain à
Mantoue est présente.

Les torsions sont présentes, la torsion de Jésus notamment. L’architecture comprend des
bossages rustiques (qui évoquent l’architecture du palais du Té de Jules Romain). Le clair-
obscur est un élément nouveau. Les couleurs acidulées (vers acide, bleu acidulé avec du blanc)
sont un élément maniériste.

Cependant, il n’y a pas d’anti naturalisme. Titien montre le rendu de la chair des jambes
de Jésus, le rendu est vraisemblable. Il n’y a pas de rupture d’échelles. Il y a également de la
perspective, avec les marches. Le buste de Tibère est au-dessus de Jésus (hommage à
l’antiquité, avec aussi l’influence présumée du Laocoon pour la torsion de la figure de Jésus).

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Titien, L’Empereur Charles Quint après la bataille de Mühlberg, 1548, huile sur
toile, 332x279, Madrid, musée du Prado :

Titien est appelé à la cour de Charles Quint en 1548, qui se trouve en Allemagne
actuelle, à Augsburg. Il y réside de 1548 à 1551. C’est le premier portrait équestre autonome
dans l’histoire de la peinture. C’est un portrait grandeur nature. Charles Quint célèbre sa victoire
sur les souverains protestants allemands alliés défaits. Cette bataille lui a permis de sauver le
Saint Empire Germanique et de montrer qu’il a sauvé le monde catholique.

Charles Quint porte une lance, il est représenté en souverain. Il est sur le chemin de la
bataille. Le portrait équestre est au premier champ d’un paysage de coucher de soleil. La lance
est l’arme des chevaliers chrétiens et saints Saint George et Saint Michel. De plus, les empereurs
romains étaient parfois représentés avec une lance.

On voit une oblique montante de la gauche vers la droite, à travers le cheval, à travers
le contour du cheval. Le rouge a une grande importance dans le tableau, notamment pour le
caparaçon, on note également la présence de l’écharpe rouge qui porte la toison d’or, c’est le
ruban de la toison d’or. Le rouge, le noir et le blanc sont les couleurs dominantes.

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Titien, Diane et Actéon, 1558, huile sur toile, 185x202, Edimbourg :

Philippe II commande des tableaux religieux à Titien, mais aussi des tableaux érotico-
mythologiques (poesie). L’œuvre représente une scène du 3ème livre des Métamorphoses
d’Ovide. C’est ici le chasseur Actéon qui surprend la déesse de la chasse Diane en train de se
baigner. Diane se couvre, effarée qu’un humain ose la contempler. Les nymphes sont vues sont
plusieurs angles, comme l’avait demandé Philippe II. Diane va transformer Actéon en cerf, et
les chiens d’Actéon vont le dévorer. La nymphe Callisto est représentée, elle a été violée par
Jupiter, Diane la transforme en ours lorsqu’elle s’aperçoit qu’elle est enceinte. Le détail de la
chasse est visible au fond du tableau, et l’on trouve la tête d’un cerf, annonciatrice de ce qui va
suivre.

Il y a donc à la fois la sensualité le drame et la mort. Titien a disposé les deux


personnages principaux aux deux extrémités du tableau. Ils forment des obliques qui se reculent
chacun aux extrémités du tableau. Le premier champ est vide. Il y a un jeu d’oblique de la
servante et de l’entourage de Diane.

Le rendu des chairs est précis. Les formes sont lourdes, avec une grande vraisemblance.
Le tableau est séduisant par sa couleur intense et variée, avec des roses orangées. Au fond, on

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a un ciel bleu, plus froid. Ce qui est remarquable, c’est la facture très large, notamment au
niveau des reflets au centre.

Titien, Pieta, 1576, huile sur toile, 351x389, Vienne :

Cette toile était prévue pour l’autel situé au-dessus de la tombe de Titien dans l’église
de Santa Maria de Frari. Cette œuvre devait être à droite de la nef. Il y a une oblique de la droite
vers la gauche pour répondre à l’emplacement de la toile sur le côté droit de l’église de Frari.

La pieta représente Marie qui pleure Jésus descendu de la croix. On voit Marie
Madeleine à côté de Marie. On note aussi la présence de Saint Jérôme. Cette œuvre est le
testament artistique de Titien, qui veut montrer sa foi à Jésus. Il la montre en donnant ses propres
traits à Saint Jérôme. Il y a une sorte d’ex-voto où Titien et son fils sont représentés devant une
piéta. Le tableau est réalisé dans un contexte de peste. Titien meurt de la peste, comme son fils.

Titien veut unir sculpture, peinture est architecture : la peinture maitrise les autres arts
car elle peut les représenter. A gauche est représenté Moïse, il a les tables de la Loi ainsi que la
verge qui va permettre aux hébreux de boire l’eau sortant d’un rocher (parallèle eau du rocher
et sang de Jésus lors de la crucifixion). De l’autre côté, on a une sybille (figure païenne qui a
annoncé Jésus), elle tient la croix et une couronne d’épine qui évoque la passion de Jésus.

La piéta est représentée devant une architecture à l’antique, avec une niche. Dans le cul
de four, il y a une mosaïque qui est représentée. Le détail de la mosaïque représente le pélican,

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qui donne son fois à manger à ses enfants (symbole du sacrifice). C’est un testament spirituel
et artistique. André Chastel souligne la main tremblante de Titien comme étant un aperçu de
son dernier style, sans dessin, avec des formes esquissées et des œuvres qu’il ne faut pas voir
de près mais avec un certain recul pour que l’œuvre opère une synthèse.

Vasari parle d’une peinture faite de tâches, avec des touches apparentes. Titien se sert
de ses doigts pour étaler la peinture.

Le Tintoret (1518-1594), L’invention du corps de Saint Marc, 1565, huile sur


toile, 405x405, Milan :

Le Tintoret a fait toute sa carrière à Venise. Le Tintoret travaille pour les Scuole, des
sociétés d’assistance, des confréries qui se donnent pour but d’assister les pauvres. Saint Marc
est le patron de Venise. Le corps de Saint Marc était conservé dans les catacombes
d’Alexandrie. Tintoret va faire essentiellement de la peinture décorative, qui n’est pas à fresque,
mais sur toile.

Saint Marc apparait sur la gauche, il intervient pour dire d’interrompre les recherches
car le corps qui est devant lui est le sien. C’est le thème de l’apparition, l’un des thèmes typiques
du maniérisme. Le dirigeant de la Scuola, le sénateur Rangone, est représenté dans le tableau.
A droite, on voit un corps sombre qui sort d’un possédé. C’est le démon, qui est en noir. C’est

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un second miracle qui est représenté. Le monde de l’au-delà s’invite sur terre. Les catacombes
dont la perspective est accélérée provoque de l’émotion chez le spectateur, tout comme la figure
qui vient vers nous.

Vasari est étonné par l’œuvre de Titien, mais il l’apprécie. C’est le contraire avec
Tintoret. Tintoret est à Rome en 1547, il est marqué par les œuvres de Michel Ange.

Le Tintoret ne va pas travailler pour les grands couvents de Venise, mais surtout pour
les scuole. Il participe à la décoration de la Scuola di San Marco (patron de Venise). On est
dans les catacombes d’Alexandrie, et les vénitiens fouillent les tombeaux. Ils ont étendu un
corps à côté duquel apparait Saint Marc. A l’époque classique, on séparait le registre céleste et
le registre terrestre (comme dans la Transfiguration de Raphaël), ici, on a une apparition
miraculeuse qui est montrée (iconographie religieuse populaire montrée).

Le personnage agenouillé au centre de la toile est celui qui dirige la scuola de San Marco,
il est avec une tenue de sénateur, c’est Tomaso Rangone le commanditaire de l’œuvre. Ce qui
ressort de l’œuvre c’est la représentation des catacombes, de l’espace, avec une perspective
accélérée. La perspective à l’époque de la Renaissance classique était un instrument de mesure
de l’espace (Ecole d’Athènes : la perspective ne frappe pas), alors qu’ici la profondeur du
couloir attire l’attention.

On a une femme à droite qui vient vers le spectateur. On a une figure en torsion. Au
centre au premier champ, il y a un vide. Saint Marc fait un grand geste s’adressant aux vénitiens
qui continuent sur la droite à fouiller les sarcophages. Au premier plan, il y a une figure en
raccourci, ce qui surprend le spectateur.

Il y a un effet de clair/obscur, une grande partie des catacombes est laissée dans l’ombre.
Il y a une lumière qui semble venir de Saint Marc. Les couleurs sont secondaires, il y a beaucoup
d’orangée (notamment sur le commanditaire, sur la femme à droite), on a un rose acidulé sur
Saint Marc. La technique est assez lâchée, les contours ne sont pas nets (dans la draperie de la
jeune femme), les coups de pinceau sont apparents.

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Le Tintoret, La Cène, 1581, huile sur toile, 538x487, Venise, Scuola di San Rocco :

On peut voir le style visionnaire de Tintoret. Cette œuvre décore les murs de la grande
salle de la scuola di San Rocco. C’est une représentation de la Cène qui s’intéresse à
l’eucharistie et laisse de côté, à l’inverse de chez de Vinci, la trahison de Judas. Jésus est au
fond de la toile, il est reconnaissable avec son auréole. Il donne une ostie à Saint Pierre. C’est
la représentation du sacrement de l’eucharistie.

Le décor est une auberge assez humble, les toiles de Tintoret sont faites pour un public
populaire rappelons-le. Il y a deux figures nues, un homme et une femme pauvres qui évoquent
la clientèle. Il y a un côté rustique de la Cène. Une table qui est placée de pieds et loin de la
table vue frontalement chez de Vinci.

Il y a une perspective accélérée. Les figures sont pour beaucoup dans des poses instables,
elles sont construites sur des courbes, sur des lignes zigzagantes. La lumière est une lumière
fantastique, elle se dégage du christ, c’est une lumière irréaliste. Les coups de pinceau sont tout
à fait visibles sur la toile. Dans le fond, on voit le peintre qui fait à la fois le dessin et la peinture.

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Véronèse (1528-1588), fresque, 1561, Maser, villa Barbaro, salon cruciforme :

Véronèse est marqué par les œuvres de Jules Romain, comme le palais du Té à Mantoue.
Véronèse est à relier à la tradition vénitienne. Véronèse met en question la limite entre l’œuvre
peinte et la distance réelle. C’est la ces dans la villa Barbaro, située près de Venise et construite
par l’architecte Palladio. Il y a une reconversion de Venise vers la terre ferme, les riches
vénitiens investissent dans la culture.

Il y a des balustrades qui ouvrent sur le paysage : la nature vient à l’intérieur de la villa.
Il y a des effets de trompe-l’œil très nombreux. On ne sait plus la limite entre l’architecture
réelle et les architectures peintes. Il y a de nombreuses fantaisies dans ce décor qui montre une
grande luminosité et une peinture peinte très rapidement.

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Véronèse, Les Noces de Cana, 1563, huile sur toile, 677x994, Paris, musée du
Louvres :

C’est au réfectoire de San Giorgio Margione à Venise qu’était initialement l’œuvre. Il


s’agit d’un couvent de bénédictins. C’est la seule œuvre prise à l’époque révolutionnaire. En
1815, le directeur du Louvres a refusé de renvoyer l’œuvre à Venise.

Le thème choisi est le premier miracle de Jésus raconté dans le chapitre 2 de l’Evangile
de Jean. Jésus est représenté au centre de la composition, avec une auréole autour de la tête.
Marie dit à Jésus qu’il n’y a plus de vin pour célébrer le mariage qui a lieu. Le majordome de
la cérémonie du mariage s’aperçoit que l’eau est changée en vin. On voit une scène profane,
évoquant un banquet pas entièrement contemporain (Marie et les apôtres ont des costumes très
simples, les autres personnages ont des costumes qui évoquent l’orient et la Vénus
contemporaine…). Les costumes sont très théâtraux. L’architecture évoque aussi le monde du
théâtre. Il y a des musiciens. Sur la table au milieu du groupe de musiciens, il y a un sablier, qui
sert aux musiciens, mais qui évoque peut-être la réponse de Jésus à la demande de Marie dans
l’Evangile de Jean où Jésus répond « Mon heure n’est pas encore venue. ». Les statues sont
dans l’axe de Jésus.

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Plastiquement, la perspective est importante, les lignes du dallage conduisent justement


à la viande qui est en train d’être découpée. Le point de fuite principal indique ce détail. Il y a
d’autres points de fuites dans le tableau, c’est là que Véronèse délaisse le classique. Les
architectures derrière la balustrade ont un autre point de fuite.

Jésus est au centre de la composition, avec des effets de symétrie autour de lui. Le centre
contient les éléments les plus importants de la composition. Côté couleurs, elles sont très vives,
il y a le Lazuli pour le bleu, il y a du realgar pour le jaune. Le marié a un costume en bleu.

On a une impression de fait propre à la composition. La représentation des évènements


saints comme des fêtes est une idée très courante dans la société vénitienne où les fêtes ont un
rôle très important.

Dans le réfectoire, la perspective des fenêtres se prolongent : il y a une continuité entre


l’architecture de la salle et l’architecture de la peinture. Le peintre est présenté comme l’égal
des musiciens, la musique est un art libéral.

Véronèse, le repas chez Lévi, 1573, huile sur toile, 555x1280, Venise, galerie de
l’Académie :

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Initialement, le tableau est une nouvelle représentation de la Cène. Cette œuvre a suscité
une vive polémique, et a valu à Véronèse une convocation devant l’Inquisition. En effet, Jésus
est à l’arrière, au dernier champ, et l’on retrouve devant lui des bouffons, des artistes. Il n’est
pas au premier champ et ne se démarque que peu des autres personnages. Le décor est plus
important que les figures, et le tableau semble représenter un banquet festif et convivial et
semble donc ôter le caractère religieux et critique de la Cène, puisqu’initialement, le dernier
repas est un moment très important, dramatique.

Véronèse dira : « Nous les peintres, à l’instar des poètes, des fous, nous prenons
quelques libertés ». Véronèse va également changer le titre du tableau pour éviter la répression,
il va dire que le tableau visible au fond n’est pas la Cène, mais le Repas chez Lévi.

3) Architecture à Venise :

Jacopo Sansovino (1486-1570), la Libreria, 1536-1554 :

Jacopo Sansovino est un peintre florentin qui va apporter à Venise un style inspiré par
l’antiquité. Il a été formé par Bramante. Son architecture est plus ornée que celle de Bramante.
On a des arcades adossées avec des supports puissants. L’ordre dorique est dominant au rez-
de-chaussée. Il y a un étage avec ordre ionique. Il y a un double ordre de colonnes. Il y a des
colonnes adossées très puissantes, les arcades retombent sur des colonnettes ioniques.

Il y a une frise ionique très élevée, très agrandie. Il y a des putti et des guirlandes sous
le sommet. Au sommet, il y a une balustrade avec des statues. C’est une architecture avec des
effets clair / obscur. Il y a des jeux d’ombre et de lumière, avec les ouvertures des arcades
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notamment. Il a notamment influencé des architectes du XIXème siècle. L’un des principaux
modèles est un bâtiment de la renaissance.

Palladio (1508-1580), Villa Rotonda:

Palladio est d’origine humble, il fait des séjours à Rome. Il lit Vitruve et regarde les
vestiges antiques. C’est le grand architecte des villas vénitiennes. Il réalise une vingtaine de
villas.

Les colonnes ne sont pas réalisées en pierre, elles sont en brique, mais avec un enduit.
C’est une architecture non utilitaire, rotonda (Palladio prévoit de la recouvrir d’un dôme). Il
publie en 1570 ses 4 livres d’architecture. Dans le deuxième livre, il présente ses œuvres.
Palladio a fait une œuvre de théoricien de l’architecture.

Le centre de l’édifice est occupé par une salle circulaire surmontée d’une coupole. Le
dôme est un symbole de grandeur et non un symbole religieux. Palladio pensait que
l’architecture antique trouvait son origine dans l’architecture d’habitation. C’est pour cela qu’il
n’avait pas peur d’utiliser un dôme dans un bâtiment civil. Il se basait aussi sur un bâtiment de
l’antiquité : les termes de l’empereur Caracalla.

Les portiques sont disposés sur les 4 façades qui sont identiques, et qui sont justifiées
ici par l’esthétique. Palladio n’avait pas de modèle pour les villas. L’antiquité n’avait pas laissé
de modèle de villa antique. Le plan est un plan centré. On parle de système radial, avec au
centre un pôle central circulaire inspiré par le Panthéon (le centre de la coupole devait être vide
pour qu’il y ait une ouverture à son sommet).

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Il y a une association du cercle et du carré, les deux formes considérées comme les plus
parfaites. On a un cercle dans un carré. Le fait que le bâtiment n’est pas d’utilité particulière le
rattache au maniérisme. Le bâtiment est situé sur un piédestal, à l’intérieur, il y a de tous petits
escaliers. Il y a un second niveau, avec à l’étage des chambres.

Cette villa rotonda est le chef d’œuvre de Palladio. Cette villa est un des modèles de
l’architecture anglaise et américaine de la fin du XVIIIème siècle (maison blanche, congrès
capitole…).

Palladio, Saint George le majeur, vers 1566 :

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Dans ces écrits, Palladio montre une prédilection pour les plans centrés, comme c’est le
cas de la villa Rotonda. Pour les édifices religieux, il prévoyait également des plans centrés.
Cependant, dans le climat de la contre-réforme, on veut une architecture religieuse adaptée au
service religieux : s’imposent des nefs importantes pour le public. Dans Saint George le majeur,
il y a une nef importante de 3 travées, nef qui est pour le public, mais qui a également un cœur
très allongé.

Avant le cœur, un ajout d’un espace centré est fait. On a l’impression d’un édifice à plan
centré, le plan serait la croisée du transept. Les bras du transept se terminent par des absides.
Palladio mélange le plan centré en croix grecque et le plan basilical. Le plan est lié à la fonction
de l’édifice qui est à la fois un couvent de bénédictins et une église où une fois par an le Doge
se rendait. Il fallait donc une nef importante.

Les façades de temples antique sont un modèle pour les façades des églises. La grande
idée de Palladio, c’est d’imbriquer un fronton triangulaire porté par des colonnes et un fronton
triangulaire porté par des pilastres. Les architectes italiens distinguaient parfois le premier
niveau du second, à l’inverse de Palladio ici.

Une façade maniériste romaine lie avec ambiguïté architecture et art : la façade du Palais
Zuccari (peintre et architecte maniériste Zuccaro) à Rome. L’artiste a placé des visages de
monstres sur les fenêtres des bords de la façade.

Côté peinture, le peintre milanais Arcimboldo va créer des caprices, qui sont ces
fameuses têtes anthropomorphes à base de légumes, de fleurs et de fruits. L’empereur du saint
Empire romain germanique se fera même représenter dans un cadre similaire.

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