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Marie-Estelle Decreau Rinaldi
Marie-Estelle
DECREAU
RINALDI
Marie-Estelle
DECREAU
RINALDI
Un grand merci à toute l’équipe de l’association Frate formation conseil pour son
accueil.
DÉCLARATION ANTI-PLAGIAT
2. Je sais que prétendre être l’auteur d’un travail écrit par une autre personne est une
3. Personne d’autre que moi n’a le droit de faire valoir ce travail, en totalité ou en partie,
comme le sien.
4. Les propos repris mot à mot à d’autres auteurs figurent entre guillemets (citations).
5. Les écrits sur lesquels je m’appuie dans ce mémoire sont systématiquement référencés
NOM : RINALDI……………………………………………………
5
Bibliographie ................................................................................................................................................... 89
Sitographie ...................................................................................................................................................... 93
Sigles et abréviations utilisés ........................................................................................................................... 95
Table des annexes ............................................................................................................................................ 97
Table des matières ......................................................................................................................................... 125
6
Introduction
Lors de cette première expérience en tant que formatrice, je me suis trouvée face à
des femmes d’origine algérienne ou marocaine entre 45 et 65 ans peu ou pas scolarisées.
Ces dernières avaient des compétences orales suffisantes pour communiquer dans la vie
quotidienne mais de grandes difficultés à l’écrit. Je me suis alors sentie limitée : d’une part
je n’avais aucune connaissance en andragogie et d’autre part je n’avais pas pu bénéficier de
formation en français langue étrangère.
7
L’approche de la langue du pays d’accueil doit, selon le CECRL, suivre une
perspective actionnelle, c’est-à-dire que « l’usage de la langue y compris son
apprentissage, comprend les actions accomplies par des gens qui, comme individus et
acteurs sociaux développent un ensemble de compétences générales, et notamment des
compétences à communiquer langagièrement ». (CECRL, p15)
Aux vues du programme et du niveau débutant des stagiaires, nous avons choisi de
leur proposer de créer des affiches portant sur des enjeux sociétaux. Ce projet vise à mieux
percevoir la signification des différents éléments d’un support iconique et bien sûr de
permettre à ces stagiaires de produire un écrit court sans se focaliser uniquement sur ce
dernier. L’écrit ne peut faire sens que dans un contexte plus large.
8
Partie 1
Le contexte
9
Chapitre 1. Le cadre de la formation linguistique
Les cours de français à destination des migrants désirant s’installer en France ont
été pris en charge par des associations, des syndicats et des organisations politiques au
début des années 1960 (Adami, 2012 : 12). L’offre de formation n’était pas
institutionnalisée, les formateurs n’étaient pas des professionnels et la didactique du
français langue étrangère ne prenait pas encore en compte les besoins de ce public. Les
associations proposant ces formations sont toujours présentes aujourd ‘hui, elles
accueillent les migrants et leur enseignent le français quelles que soient leur situation
(régulière ou irrégulière), leur date d’entrée sur le territoire ou les raisons de leur venue en
France. En parallèle, nous allons voir que l’état français s’est peu à peu investi dans ces
offres de formation destinées spécifiquement à certains migrants. Il s’agit des primo-
arrivants, c’est-à-dire des étrangers adultes provenant de pays hors Union Européenne et
qui arrivent en France pour la première fois et pour diverses raisons afin de s’y installer
durablement. Il s’agit ici de mieux cerner l’évolution des nouvelles formations proposées
par l’état.
10
d’accès à la nationalité française. Pour ce faire, l’OFII a lancé trois nouveaux marchés : un
pour une formation civique de quatre jours, un autre pour une formation civique
comprenant une nouvelle mallette pédagogique interactive et pour finir un dernier portant
sur la formation linguistique.
Avec la nouvelle réforme de 2018, les scores à obtenir au test écrit passent de 31 à 35/100
afin de bénéficier d’une attestation de l’OFII d’un niveau A1. De plus, les parcours de
formation se sont diversifiés afin de répondre aux besoins hétérogènes du public. Les
anciens parcours étaient de 50, 100 ou 200 heures en fonction des besoins des stagiaires,
désormais il existe quatre parcours : 600, 400, 200 ou 100 heures. Le parcours de 600
heures a été mis en place pour des personnes qui n’ont pas été scolarisées dans leur pays
(des non lecteurs/non scripteurs) et qui n’ont pas de connaissance à l’oral en français. Celui
de 400 heures est destiné aux personnes qui ont été peu scolarisées mais qui ont des
connaissances en français oral. Ceux des 200 et 100 heures inclus des personnes qui ont
souvent été scolarisés au moins jusqu’au secondaire dans leur pays et qui s’expriment un
minimum en français.
S’il y avait une réelle volonté dans ces nouveaux parcours de niveau A1 de prendre
en compte l’hétérogénéité du public et particulièrement une prise de conscience des
besoins des non lecteurs non scripteurs, l’objectif n’est que partiellement atteint. Les
11
stagiaires étant évalués sur une note totale correspondant à la somme de l’oral et de l’écrit,
un francophone par exemple n’ayant pas été scolarisé peut se retrouver dans un groupe de
200 heures alors qu’un stagiaire ayant réalisé un cursus universitaire mais n’ayant jamais
été confronté à la langue cible sera lui placé (dû à sa note total (0/100) dans un groupe de
non lecteur non scripteur 1. Or, sur le du terrain, nous observons qu’il y a une tendance à ce
que le non lecteur non scripteur ne puisse pas en seulement 200 heures atteindre les
objectifs de l’écrit alors que celui qui a suivi une formation dans le supérieur s’ennuie dans
le groupe de 600 heures.
Depuis le nouveau marché (la réforme 2018 mise en place en 2019), les stagiaires ont la
possibilité de passer gratuitement le Test d’Évaluation du Français (TEF) proposé par la
Chambre de Commerce et de l’Industrie (la CCI). Il est important de signaler que depuis
janvier 2020, les stagiaires sont désormais contraints à passer une épreuve d’expression
écrite pour le TEF naturalisation alors qu’auparavant seule une épreuve orale était
1
Entretien avec Mariela de Ferrari réalisé le 5 juin 2019 par Sylvie Liziard, avec la collaboration de Marie-
Christine Fougerouse (p.188). http://gerflint.fr/Base/France13/entretien.pdf
2
Site du ministère de l’intérieur. [2019]. Immigration, asile, accueil et accompagnement des étrangers en
France. https://www.immigration.interieur.gouv.fr/Accueil-et-accompagnement/Le-parcours-personnalise-d-
integration-republicaine2/Le-contrat-d-integration-republicaine-CIR/La-formation-linguistique
12
présente. Ce qui peut traduire une volonté de diminuer le nombre de candidats potentiels à
la naturalisation.
L’obtention du TEF carte résident vise à valider un niveau A2 nécessaire pour obtenir une
carte résident renouvelable tous les 10 ans, alors que la réussite au TEF naturalisation d’un
niveau B1 est une des conditions pour demander la nationalité française. Ces tests
représentent donc un enjeu très important pour les stagiaires et les compétences évaluées
sont différentes de celles présentes dans les tests de l’OFII.
Seules les épreuves d’expression orale (EO) et expression écrite (EE) ne sont pas
proposées sous forme de QCM. Il y est demandé aux candidats d’exprimer leur point de
vue et de le justifier pour la partie expression écrite et d’argumenter et de convaincre pour
l’épreuve d’expression orale.
En fin de formation, les formateurs ont l’obligation de proposer le TEF gratuit aux
stagiaires qui ont réussi le test de niveau A1 de l’OFII.
13
profondeur certains thèmes comme ceux liés à la laïcité, à l’égalité filles/garçons et
hommes/femmes (ces thèmes correspondaient à des besoins observés par les concepteurs
de ce déroulé pour ce public). Or, dans les centres de formation comme l’association
FRATE formation conseil, les possibilités d’entrées et sorties permanentes ainsi que
l’incorporation de stagiaires qui n’ont pas fini leur parcours dans de nouveaux groupes ne
facilitent pas le suivi de ce déroulé.
Si le marché F16 était très cadré, les nouveaux référentiels des compétences orales et
écrites du marché F19 laissent plus de liberté pédagogique aux formateurs au niveau du
contenu de la formation. Le résumé des déroulés types n’est plus qu’un cadre de référence,
le formateur n’a plus à suivre les séances si scrupuleusement. Il est d’ailleurs demandé aux
formateurs dans ce nouveau dispositif de prendre de la hauteur par rapport à des séances
qui étaient très « terre à terre ». Deux groupes d’experts ont été réunis pour la conception
des référentiels et ce travail a été suivi par la DAAEN et l’OFII. Le référentiel oral a été
conçu par Sophie de Abreu, Mathias van der Meulen avec la participation d’Agnès Foyer
et Valérie Lemeunier, le référentiel écrit a été conçu par Blandine Forzy, Marie Laparade,
Dominique Levet, Danielle Macre et Mathias Van der Meulen. La conception-coordination
a été réalisée par Mariela De Ferrari. Les référentiels intègrent l’ancienne charpente.
La démarche pédagogique est toujours actionnelle, l’objectif est de considérer le stagiaire
comme un acteur social qui doit réussir à trouver des repères et agir dans sa nouvelle
société. Les documents authentiques issus de l’environnement de l’apprenant sont
nécessaires pour atteindre les objectifs de la formation. La langue n’est pas considérée
comme un objet à apprendre mais comme un moyen d’atteindre une certaine autonomie.
Les modalités d’animation sont très cadrées. Le cahier des charges du marché F19 stipule
que 20% du temps doit consister en des mises en situation par le biais d’interventions
extérieures ou de sorties pédagogiques et qu’au moins 10% doit être voué à des mises en
situations à partir de ressources numériques. L’objectif est bien entendu de sortir du
« cadre scolaire » et de favoriser l’autonomie des stagiaires en les laissant se confronter à
leur environnement extérieur.
Pour ce qui est de l’organisation pédagogique, le travail en îlot est désormais plus que
conseillé afin de privilégier les interactions et l’autonomie des stagiaires.
Il est nécessaire de tenir compte, en tant que formateur du cadre dans lequel les activités
pédagogiques doivent être pensées. Nous avons vu que l’OFII a établi un contenu de
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formation ainsi qu’un environnement de travail dans lequel les stagiaires doivent trouver
une autonomie. Toute l’offre de formation est donc très réglementée et contrôlée. Cet état
de fait est récent puisque « Leclercq (2010, 2011, 2012), dans ces travaux pionniers […],
montre bien que les dispositifs de formation linguistique mis en place jusqu’aux années
1980 le sont encore dans une sorte de désordre et d’éparpillement ». (Adami, 2012 :15).
15
Chapitre 2. Le centre de formation
2.1 L’association Frate formation conseil
Tous les trois ans un nouveau dispositif est mis en place par l’OFII. FRATE Formation
Conseil est l’opérateur qui a été choisi parmi d’autres pour la seconde fois afin de répondre
à cette demande.
Il s’agit d’une association créée en 1972 et qui dès sa création avait comme objectif de
faciliter l’intégration des travailleurs étrangers en proposant des cours de français langue
étrangère et de savoir de base. Localisée initialement à Besançon, elle a ouvert des centres
dans l’ensemble de la Franche-Comté, en Rhône-Alpes, en Bourgogne et en Alsace. Le
centre où j’effectue ce stage est à Dijon.
L’équipe opérationnelle comprend une directrice au niveau national, une responsable
Comptabilité et RH, une responsable administrative et une responsable administrative
adjointe. Il y a également quatre responsables Territoriaux : celui Sud Franche-Comté,
celle du Nord Franche-Comté / Alsace, celui du Auvergne-Rhône-Alpes et de Bourgogne,
d’une responsable qualité et d’une responsable pédagogique.
L’association est très unie dans les valeurs qu’elle prône 3. Un fort lien se crée au niveau
national entre les différents territoires via à une plateforme commune accessible à tous : les
expériences, les documents, les travaux sont mis à disposition de tous. Des réunions ont
lieu régulièrement et sont l’occasion de mettre en contact ceux qui travaillent pour la
FRATE.
Le centre de Dijon où j’effectue mon stage se développe depuis le nouveau marché obtenu,
le nombre d’apprenants et de formateurs a augmenté en conséquence. Cette équipe compte
la responsable territoriale et pédagogique, dix-sept formateurs. Cette équipe est mobile, les
formateurs peuvent se déplacer dans toute la Bourgogne. Un temps plein correspond à
quatre jours de face à face pour un jour de préparation.
3
Site de l’association Frate formation conseil. Notre histoire et nos valeurs – FRATE Formation – Conseil.
http://frateformation.net/organisme/notre-histoire-et-nos-valeurs/
16
et les outils utilisés par les formateurs et des aides pédagogiques.
Les formateurs se réunissent lors des réunions de coordination pédagogique trimestrielles
où un représentant de l’OFII est invité. Lors de ces réunions, des bilans sont réalisés et les
démarches pédagogiques à adopter dans le contexte du dispositif de l’OFII sont rappelées ;
de plus, les formateurs participent à des ateliers organisés par la responsable pédagogique
afin d’améliorer leur pratique. Le cadre dans lequel l’apprentissage des compétences orales
et écrites doit être travaillé est rappelé aux formateurs.
Il s’agit entre autres des travaux de M. de Ferrari sur l’apprentissage de l’écrit, auteur dont
le CIEP s’est inspiré pour créer la charpente et qui a également coordonné les deux
référentiels du nouveau dispositif de l’OFII. La méthode dont s’inspire l’association est
globale, le formateur doit suivre cette méthode ainsi que connaître et adapter le contenu
des différences étapes de l’apprentissage de l’écrit (décrites dans le nouveau cadre
référentiel de l’écrit du marché F19) qui sont les étapes « découverte », « exploration »,
« appropriation », « consolidation », « généralisation » (M. de Ferrari 4).
Toutes les étapes de l’apprentissage de l’écrit sont pensées et pour un parcours de 600
heures, 80% des cours doivent être basées sur des compétences orales et 20% sur des
compétences écrites ; pour un parcours de 200 heures le taux de pourcentage d’oral
diminue pour laisser plus de place au développement des compétences écrites. Ce qui
demande aux formateurs une prise de recul par rapport à la formation scolaire qu’ils ont
reçue et une adaptation permanente aux différents niveaux de leurs groupes. La FRATE a
également la responsabilité de former des bénévoles d’associations locales qui viennent
dans les centres de formation pour connaître les bases de l’enseignement du français (par
exemple le CECRL et son approche) et organise des conférences comme la dernière
intitulée « Comment enseigner le français aux adultes migrants quand on est bénévole ?
5
Outre les formateurs de la Frate, Mathias van der Meulen (un ingénieur pédagogique)
présente également les méthodes retenues d’acquisition de la lecture et l’écriture à l’âge
adulte. Les bénévoles participent à cette occasion à des ateliers.
L’approche actionnelle correspond à celle du CECRL. Les activités des stagiaires doivent
se réaliser à partir de documents authentiques et doivent faire sens pour eux dans leur
environnement proche.
4
Programme alpha b. Compte rendu de la formation « Apprendre à lire et à écrire à l’âge adulte » Animée
par Mariela de Ferrari
https://www.programmealphab.org/sites/default/files/CR_lecture_ecriture_adultes_en_ligne.pdf
5
Site de l’association Frate formation conseil. CONFÉRENCE : COMMENT ENSEIGNER LE FRANÇAIS
AUX ADULTES MIGRANTS QUAND ON EST BÉNÉVOLE ? http://frateformation.net/frate/5135/
17
2.3 L’équipe des formateurs
L’équipe compte douze formateurs sur Dijon et six autres qui travaillent dans d’autres
villes de Bourgogne. Elle est composée de cinq « anciens formateurs » mais les autres ont
intégré l’équipe il y a moins de deux ans (il s’agit de leur première expérience en tant
qu’enseignant de FLE). Il s’agit globalement d’une équipe jeune.
Le formateur se trouve dépourvu à ces débuts (et par la suite) face aux différentes attentes
du public et de la formation linguistique en elle-même. Comme nous l’avons perçu dans la
description du cahier des charges de l’OFII, cette formation est très exigeante au niveau de
son ingénierie mais également de son contenu.
La première difficulté est la prise en charge des apprenants non scripteurs ou peu scolarisés
comme le rappelle H. Adami (2012 : 22) « le niveau de scolarisation acquis par les
migrants dans leur pays d’origine constitue un élément déterminant dans le processus
d’apprentissage/acquisition ». Certains formateurs n’ont pas été formés pour intervenir
dans ce cadre et doivent également adapter la formation à d’autres stagiaires ayant effectué
des parcours universitaires (et dont les attentes relèveraient plus du FLE). Le partage des
ressources et des idées est très fréquent, tous les formateurs essaient de créer des
ressources au plus proche des besoins des stagiaires. Hormis certains manuels tels que
« Ma clé Alpha », « Au boulot ! » et « Trait d’Union » par exemple, la plupart des autres
manuels ne correspondent pas aux compétences à travailler dans la « charpente » CIEP et
ne sont pas adaptés au niveau en français de certains stagiaires. La préparation des séances
demande beaucoup de temps.
H. Adami (2012 : 28) précise également que le français langue étrangère en lui-même ne
suffit pas à la prise en charge des stagiaires peu scolarisés. Il mentionne les travaux de V.
Leclercq (2007) lorsqu’il affirme que « la formation linguistique des migrants est
fortement ancrée dans un autre domaine disciplinaire : les sciences de l’éducation et de la
formation, et notamment de la formation de base ». La deuxième difficulté est bien le fait
que dans les groupes de stagiaires de niveau infra A1, lorsque le formateur aborde les
données chiffrées, il réalise que certains stagiaires ne savent pas faire de simples additions,
tandis que l’utilisation d’un ordinateur est une réelle découverte pour d’autres.
La troisième difficulté est que le formateur peut être également désorienté lorsqu’il doit
aborder des thèmes plus ancrés dans le théorique comme les élections ou encore la liberté
de déplacement. Il ne peut trouver des ressources dans les manuels et passe beaucoup de
temps sur internet. Il finit par créer ses propres ressources qu’il essaie d’adapter aux
18
différents profils des apprenants. C’est ainsi que « les formateurs professionnels
intervenant dans ce domaine ont la particularité de n’être pas seulement des didacticiens.
Leur domaine d’intervention est également celui du travail social, de l’insertion ou de
l’ingénierie de la formation » Adami, 2012 : 31). Il peut arriver qu’un stagiaire demande
des conseils suite à des problèmes de logement, de factures, de scolarisation de ses enfants,
etc.). Le formateur est donc lui aussi confronté à tous les domaines relatifs à l’intégration.
Au niveau pédagogique, il contrôle les heures de chaque stagiaire pour lui faire passer son
test intermédiaire et finale, récupère et s’occupe des justificatifs des absences, gère les
émargements en fin de mois et constitue les dossiers de fin de parcours, etc. Parmi les
formateurs, une personne fait passer les tests initiaux à l’OFII et place les nouveaux
stagiaires dans des groupes, d’autres sont évaluateurs pour les tests oraux du TEF. Les
formateurs, outre la partie enseignement, ont une charge administrative importante.
Les formateurs sont particulièrement motivés, ils apprécient ce public en général docile et
avenant, ils s’y attachent parfois. Toutefois la charge émotionnelle peut être importante et
le découragement par rapport aux lents progrès de certains stagiaires peu ou pas scolarisés
survient parfois. L’équipe enseignante est très solidaire et s’entraide lors de difficultés
rencontrées.
19
Chapitre 3. Les adultes migrants : un public hétérogène
Le public concerné par ce projet est composé de quatorze adultes qui sont arrivés
en France depuis moins de cinq ans, c’est-à-dire des primo-arrivants6. Leur niveau de
français a été évalué par des tests initiaux effectués lors de la signature de leur Contrat
d’Intégration Républicaine. Ils ont tous un niveau infra A1 et sont donc débutants en
français. Nous chercherons ici à mieux définir ces personnes en tant qu’individus qui ont
des parcours de vie variés mais également en tant qu’apprenants qui peuvent avoir des
parcours d’apprentissage également très différents. L’objectif sera alors de faire un état des
lieux des difficultés qu’ils peuvent rencontrer à partir des tests de l’OFII et cela
particulièrement à l’écrit.
Certaines personnes ont des statuts différents, certaines sont des réfugiés ou des
demandeurs d’asile alors que les autres se sont installées en France pour des raisons
économiques ou familiales. Les réfugiés sont des personnes qui ne peuvent pas retourner
dans leur pays d’origine car elles risquent des persécutions alors que les demandeurs
d’asile ont déposé un dossier auprès de l’OFPRA (Office français de protection des
réfugiés et apatrides) pour une protection mais contrairement aux réfugiés leur dossier est
toujours en cours d’examen. Quelle que soit la raison de leur venue en France, tous les
stagiaires du CIR sont en situation d’exil ; ils doivent faire face à des difficultés relatives à
l’usage de la langue cible, à l’intégration sociale, culturelle et professionnelle dans le pays
d’accueil.
Le choix de quitter leur pays est souvent douloureux et la période d’adaptation dans leur
nouveau pays n’est pas évidente. Beaucoup d’apprenants sont en France depuis deux, trois,
quatre ans et font face à des problèmes familiaux, de santé, de logement, etc. La plupart
d’entre eux cherchent un travail (seule une personne âgée ne souhaite pas travailler) alors
que d’autres travaillent déjà à mi-temps le matin ou le soir, avant ou après les cours de
français. Nous rejoignons ici, dans le cadre de notre public, M. Tuovenin (2019 : 18) pour
qui « une des difficultés de l’enseignement des migrants est leur condition instable, aussi
bien physiquement que psychiquement ». Cependant, les stagiaires du CIR cherchent dans
6
Appel à projets 2019 Programme 104-action 12 Actions d’accompagnement des primo-arrivants
en situation régulière - Cahier des charges : https://www.prefectures-regions.gouv.fr/ile-de-
france/content/download/55064/363517/file/Cahier%20des%20charges%202019.pdf
20
leur grande majorité à réussir les projets qu’ils se sont fixés et sont volontaires et motivés.
Il s’agit d’un public très demandeur lors des cours de français qui n’hésite pas à exprimer
ses besoins très variés.
Ce public est également multiculturel. Dans le groupe de stagiaires, nous
comptabilisons dix nationalités différentes (afghane, syrienne, kosovar, tunisienne,
soudanaise, chinoise, libyenne, marocaine, turque et nigérienne). Certains d’entre eux ont
vécu dans d’autres pays européens comme l’Espagne ou l’Allemagne, d’autres ont déjà
voyagés dans d’autres pays et en France. Nombreux sont ceux qui ont donc déjà été
confrontés à de multiples cultures. Comme le signale H. Adami (2011 :7) en citant D.
Cuche (2001) « ce qui se déplace, en réalité, ce sont des individus ; et ces individus, du fait
de leur migration, sont menés à évoluer ». Il est très courant en cours de voir des personnes
de différents pays communiquer entre eux en différentes langues, certains sont
plurilingues. Ils n’ont donc plus qu’une seule culture relative à celle du pays d’origine, au
contraire, ils ont une richesse culturelle qu’il est nécessaire de prendre en compte et qui est
toujours susceptible d’évoluer. C’est la raison pour laquelle, nombreux sont les chercheurs
qui préfèrent analyser la biographie des individus que la culture qui est sensée les
représenter. Des personnes d’un même pays peut avoir connu des expériences très diverses
alors que d’autres d’origines différentes peuvent avoir beaucoup d’intérêts communs
(comme le fait d’être une mère isolée dans un pays étranger ou encore avoir des problèmes
de logement).
21
Gedj Bac+2 11 4 15 5,5
Ben Jamais 11 5 16 2
scolarisé
Dav Secondaire 21 5 26 22,5
Fad Collège 7 7 14 16,5
Pali Jamais 12 5 17 29,5
scolarisé
Idje Collège 9 5 14 29,5
Lin Université 23 12 35 2
Hort Secondaire 0 4 4 21,5
Ali Jamais 0 1 1 25
scolarisé
Mat Collège 7 7 14 29
Eva Lycée 17 4 21 1,5
Ked Collège 15 5 20 6,5
Pat Jamais 7 4 11 0
scolarisé
Tableau 1: Le niveau de scolarité et les résultats au test initial des stagiaires
Il est nécessaire de considérer les remarques ci-dessous avant d’interpréter les données. En
effet, les tests ne sont jamais neutres et la compréhension de certaines consignes écrites
peut poser des problèmes à certains stagiaires (elles ne sont pas lues oralement). De plus, le
temps donné pour compléter le test écrit est seulement de vingt minutes. La composition
des tests est la suivante :
• La compréhension écrite correspond à des exercices de type : relier des images à
des mots qui les représentent, et des QCM portant sur des courriers administratifs.
• La production écrite est composée de trois activités : la première est un formulaire à
remplir portant sur l’identité du stagiaire (nom, prénom, etc.), la deuxième consiste
à décrire une image et la troisième consiste à écrire un court message.
• La compréhension orale et écrite porte sur vingt-cinq questions dont certaines font
références plus à la connaissance de faits culturels qu’à l’utilisation de la langue
française. Il n’est pas toujours facile de différencier ce qui relève de la
compréhension ou de la production, puisque les stagiaires peuvent comprendre une
question et n’être pas capable d’y répondre par manque de connaissance sur les
faits culturels sur lesquels elle porte.
22
3.2.2 Le niveau des stagiaires et l’entrée dans l’écrit
Dans le cadre de ce projet, nous nous intéressons à l’entrée dans l’écrit, le niveau de
scolarisation des stagiaires semble être un point essentiel du point de vue institutionnel.
D’ailleurs selon M.de Ferrari (2008 : 3), « dans la formation linguistique à visée
d’insertion, les publics sont nommés dans les termes d’« alpha » et de « FLE » en fonction
de leur scolarisation ou de leur absence de scolarisation ». Nous remarquons ici que le
score le plus bas en compétences écrites est égal à 1 (une personne qui n’a jamais été
scolarisée) alors que le score le plus élevé est égal à 35 (une personne qui a suivi un cursus
universitaire). Toutefois deux stagiaires non scolarisés ont réussi à obtenir une note totale à
l’écrit supérieure à 15/50.
Les difficultés à l’écrit ne sont pas uniquement liées au degré de scolarisation, C. Bagna &
al. (2017 : 413) différencient plusieurs profils d’apprenants qui sont en difficulté à l’écrit :
• « Les apprenants qui ont une L1 sans système d’écriture
• Les apprenants qui ont une L1 avec un système d’écriture qui n’est pas acquis faute
de scolarisation ou pour d’autres raisons
• Les apprenants qui ont jusqu’à trois ans de scolarisation
• Les apprenants qui ont été scolarisés mais qui ont un système d’écriture autre que le
latin
• Les apprenants faiblement alphabétisés dans la L2 indépendamment du système
d’écriture de la L1 ou du premier langage dans lequel ils ont acquis
l’alphabétisation. » (Traduction personnelle)
C’est ainsi que dans le groupe concerné, un stagiaire a dit qu’il n’a jamais réussi à
apprendre à écrire enfant et que « quelque chose n’allait pas dans sa tête » alors que
d’autres stagiaires qui ont un alphabet non latin et qui écrivent dans leur langue n’arrivent
pas à accéder à l’écrit en alphabet latin.
Un autre point à prendre en compte est le fait que le niveau de scolarisation déclaré par les
stagiaires dans leur pays d’origine ne correspond aux normes, contenus, modalités de la
culture scolaire française. Certaines scolarisations ont été vécues en discontinue du fait de
guerres par exemple. Par ailleurs, certains systèmes éducatifs étrangers peuvent s’appuyer
principalement sur l’oral (la place de l’écrit étant, au contraire, très importante dans la
culture scolaire française).
23
Nous considérerons la non scolarisation comme un facteur important pour
expliquer les difficultés d’accès à l’écrit dans un contexte d’intégration linguistique mais
d’autres stagiaires scolarisés dans leur pays seront également concernés par ce projet.
24
Chapitre 4. Le choix du projet
4.1 L’orientation du projet
J’ai commencé à travailler en tant que formatrice FLE à l’association Frate un an avant
d’y effectuer mon stage de master. J’ai pu à cette occasion me former auprès de mes
collègues et de la responsable pédagogique qui est devenue par la suite ma tutrice. Je me
suis alors rendu compte que les méthodes « miracles » n’existaient pas face à un public
hétérogène et multiculturel d’un niveau infra A1 et que toute l’équipe était toujours à la
recherche de solutions pour améliorer ses pratiques.
Le cadre dans lequel s’effectue la formation linguistique est celle du Contrat d’Intégration
Républicaine. Le terrain est donc fortement institutionnalisé puisqu’il correspond à celui
des prestataires qui ont répondu au cahier des charges de l’OFII. Les stagiaires ont quant à
eux, l’obligation de suivre cette longue formation parsemée de tests à laquelle ils se
raccrochent pour s’intégrer. Entre formation certificative (peu adaptée à un public non
lecteur/non scripteur) et formative (à visée intégrative), le formateur tente de trouver des
réponses aux difficultés d’apprentissage de certains stagiaires comme celles relatives à
l’écrit.
Je n’ai pas eu de mandat particulier lors de mon stage. J’ai décidé d’orienter ce projet dans
le champ de la didactique de l’écrit pour deux raisons. La première est que, comme nous
l’avons mentionné, les stagiaires pas ou peu scolarisés progressent très lentement au niveau
de la production écrite ; la seconde est que parallèlement, les attentes des tests de l’OFII et
du TEF (pour un niveau B1) sont de plus en plus exigeantes dans ce domaine.
Plusieurs questions ont été à la base de ce projet : Comment développer des compétences
écrites à travers les différents thèmes abordés par la charpente du CIEP ? Est-il possible de
se focaliser uniquement sur l’écrit dans un projet avec des non lecteurs/non scripteurs ?
Comment rendre acteur le stagiaire par rapport à sa formation et son insertion ? Comment
les stagiaires peuvent-ils se former mutuellement ? Comment inclure un public hétérogène
dans un même projet ?
4.2 La problématique
J’ai décidé de prendre du recul par rapport aux évaluations et essayé d’aborder la
production écrite de manière créative. Il s’agit dans ce projet de l’accès à l’écrit, ce qui
concerne surtout les stagiaires peu ou pas scolarisés, toutefois les stagiaires qui ont plus de
25
facilité pourront également progresser puisque les attentes dépendront du niveau des
stagiaires. Le point de départ de ce mémoire vient d’un questionnement personnel. Si les
stagiaires comprennent et se font comprendre oralement assez rapidement en français, la
question de l’écrit est problématique. J’ai bien tenté différentes approches didactiques pour
faciliter l’acquisition de compétences à l’écrit, mais j’aimerais en tenter une nouvelle. Dans
le cadre de l’intégration sociale des stagiaires, je désire travailler sur des « outils » de
communication présents dans la vie quotidienne des stagiaires. Le projet consiste à créer
une affiche sur un des thèmes de l’ancien déroulé-type du CIEP qui reste un document
dont les formateurs peuvent s’inspirer pour créer leurs séances. Le thème choisi est celui
de l’égalité femmes/hommes, un thème qui interroge et qui est très culturellement ancré. Il
me semble intéressant de faire participer les stagiaires sur ce sujet très médiatisé en leur
laissant la parole. Les stagiaires devront ensemble produire une affiche.
Nous avons également voulu prendre du recul par rapport à ce terrain afin de le
considérer sous une autre dimension. Pour cela, nous nous appuierons sur P. Blanchet
(2011) pour qui un terrain est […] un espace temporel, social et situationnel (au sens des
micro-situations d’interactions) et donc le terrain n’est pas une chose, ce n’est pas un lieu,
ni une catégorie sociale, un groupe ethnique ou une institution […] c’est d’abord un
ensemble de relations personnelles où on apprend des choses » (Agier, 2004 cité dans
Blanchet, 2011).
26
4.3 Méthodologie
J’ai opté pour la méthode de la recherche action décrite par M. Catroux, 2002. Face
aux difficultés persistances à l’écrit de certains stagiaires, j’ai donc cherché à porter un
regard critique sur mes pratiques d’enseignement de l’écrit. De ce fait, je désire m’appuyer
sur une autre méthode qui favorise l’accès au sens et à la production des écrits sociaux à
travers la création d’une affiche par le bais d’une créativité mutualisée.
Ce n’est qu’à partir de ces lectures que je pourrais prendre des actions et planifier
mon projet dans la troisième partie de ce mémoire.
L’objectif de ce projet est de favoriser l’accès à l’écrit par le biais d’un travail axé
principalement sur la compétence pragmatique. Cette compétence semble essentielle afin
de comprendre et produire des écrits sociaux.
27
28
Partie 2
Le cadre théorique
29
30
Chapitre 5. Des stagiaires, des besoins et des objectifs de formation
Chaque public à ses propres caractéristiques qui sont plus ou moins prises en
considération par les référentiels et les programmes de formation. Il est en effet délicat de
répondre aux besoins et attentes de tous aux vues de la diversité du public et des multiples
situations dans lesquelles les stagiaires peuvent se trouver à un moment donné. Nous allons
définir certaines réalités propres à ce public et tenter de comprendre comment les besoins
de formation ont été pris en compte. Il s’agit de savoir sur quelles bases nous allons
aborder par la suite l’apprentissage du français en contexte d’immersion et plus
particulièrement de l’écrit.
7
Infos migrations n° 89, juillet 2017 . Consultable : https://www.immigration.interieur.gouv.fr/Info-
ressources/Etudes-et-statistiques/Etudes/Etudes/Infos-
migrations#Num%C3%A9ros%20parus%20en%202017
8
Population immigrée et étrangère par sexe et âge. Données annuelles de 1880 à 2019. Consultable :
https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381759
31
La première est de déterminer la différence entre le fait d’immigrer ou d’émigrer. Selon le
site officiel de l’Office québécois de la langue française émigrer signifie « quitter son pays
pour aller s'installer dans un autre » alors qu’immigrer signifie « entrer dans un pays
étranger pour s'y fixer de façon durable ou définitive »9.
La deuxième distinction est celle énoncée par A. Benhassen (2017 : 26). Pour lui,
« l’immigrant, qui est le participe présent du verbe immigrer désigne […] un processus en
cours, d’une personne qui immigre ou qui a immigré (Académie française, 1986) […]
contrairement à « immigré » désignant une action achevée de déplacement ». De ce fait, les
stagiaires se situent dans un processus en cours de réalisation et s’adaptent en continue aux
nouvelles données de leur environnement immédiat tout en étant en immersion dans leur
nouveau pays.
Le public va donc être perçu par rapport à un parcours qui est loin d’être linéaire et qui ne
se termine pas lors de la signature du CIR. Ce n’est qu’à partir des expériences passées des
stagiaires que l’on peut tenter de les comprendre ; l’hétérogénéité de ce public ne permet
pas d’établir des caractéristiques générales. C’est dans ce cadre que l’on pourra mieux
percevoir la notion de « besoins », qui n’est pas uniforme et qui est souvent évolutive
puisqu’elle est reliée à la situation présente des apprenants du point de vue de leur situation
familiale, professionnelle et économique.
9
Office québécois de la langue française. Définition : Émigrer et immigrer.
http://bdl.oqlf.gouv.qc.ca/bdl/gabarit_bdl.asp?id=2544
32
demander si l’apprenant réalise la nécessité d’une formation linguistique et si elle
correspond à ses attentes ; de même si le stagiaire ne voit pas l’utilité d’une activité, il y a
de fortes chances qu’il n’y investisse pas. L’adulte est également confronté à des besoins
bien réels dans sa vie quotidienne, ils cherchent à acquérir des connaissances pratiques ; le
contenu de l’apprentissage doit être fonctionnel. Il faut tenir compte également que l’adulte
construit ses nouvelles connaissances en fonction de celles qu’il possède déjà, l’expérience
personnelle peut favoriser l’apprentissage de nouvelles données pas le biais d’un transfert
comme elle peut créer des blocages. Pour finir, l’adulte (particulièrement dans une
situation d’insertion) doit traiter un grand nombre d’informations parallèlement à
l’apprentissage du français, il peut ressentir des problèmes de concentration voire une
surcharge cognitive.
33
Pour montrer la complexité de ces besoins objectifs et subjectifs, elle cite J-C. Beacco et al.
(2014) qui définissent les besoins langagiers par « des situations de communication (orale
ou écrite) que les migrants adultes concernés souhaitent devenir capables de gérer ou que
l’on veut qu’ils soient capables de gérer » (2017 : 157).
E. Lebreton (2017 :156) définit les besoins subjectifs comme « ceux exprimer par les
apprenants » et les besoins objectifs comme « ceux exprimés par un tiers ».
Au niveau des besoins langagiers objectifs, pour D. Little (2008) la formation linguistique
vise à : « […] permettre aux migrants d’utiliser la langue de la communauté hôte de façon
basique » (cité dans Lebreton 2017 : 159).
La difficulté est de cerner comment enseigner « cette langue de survie », H. Adami
remarque que « les organismes de formation retenus dans le cadre de cet appel d’offre
doivent également suivre la trame d’une « charpente », qui liste les objectifs socio
langagiers liés à la vie quotidienne, publique ou professionnelle que les apprenants doivent
être en mesure d’atteindre à l’issue de la formation mais les contenus linguistiques de la
formation ne sont pas [voire très peu] explicités » (2019 : 4).
La situation est beaucoup plus complexe de la part des stagiaires. L’hétérogénéité des
parcours et des perceptions de l’apprentissage de la langue varient.
E. Lebreton (2019 : 14) cite la définition des besoins langagiers de R. Richterich (1985) :
« […] la notion de besoin langagier correspond bien à cette double ambition, car elle fait
immédiatement référence à ce qui est nécessaire à un individu dans l’usage d’une langue
étrangère pour communiquer dans les situations qui lui sont particulières ainsi qu’à ce qui
lui manque à un moment donné pour cet usage et qu’il va combler par l’apprentissage ».
Ce qui semble nécessaire à acquérir pour un individu dépend du parcours de ce dernier et
cela aussi bien par rapport aux besoins langagiers qu’aux méthodes d’apprentissage.
H. Adami (2011 : 14) retrace les parcours de certains de ces apprenants, il montre ainsi que
les méthodes d’apprentissage privilégiées par les apprenants ou les besoins sont très
différents. Parmi ces histoires de vie que ce chercheur retrace, nous retrouvons un médecin
qui n’apprend que par l’écrit et la grammaire malgré ses difficultés à gérer les interactions
orales de la vie quotidienne, une mère de famille, isolée, peu scolarisée qui doit se
débrouiller seule, deux salariés un pas et l’autre peu scolarisés avec « une approche de
l’apprentissage […] exclusivement orale » qui doivent suivre une formation pour améliorer
leur écrit dans le cadre de leur emploi, etc. Or ces parcours conditionnent les besoins
ressentis des stagiaires.
34
Même avec de la volonté, ces besoins ressentis sont en décalage avec ce que propose le
formateur. E. Lebreton (2017 : 98) relie des témoignages d’apprenants dans lesquels
« certains [apprenants ayant déjà été scolarisés] estiment que les ateliers proposés ne
permettent pas de bien apprendre le français, alors que le bon français est nécessaire pour
valider les tests d’entrées des formations qualifiantes ». Dans d’autres cas, si le formateur
entre dans un apprentissage plus formel, la déception sera alors perçue par le stagiaire peu
ou pas scolarisé qui aura beaucoup de difficultés à suivre mais qui insistera à s’investir
principalement dans l’écrit parce que comme le souligne M. Ferrari (2008 :4) « moins les
personnes ont été scolarisées, moins elles perçoivent l’apprentissage de l’oral comme « du
travail ».
35
d’immersion dans la société d’accueil, qui désire s’y installer durablement et qui a été
parfois peu ou pas scolarisé.
La philosophie à la base de cette approche de la formation linguistique est de considérer
que « la langue détermine la façon de résonner des peuples et le regard qu’ils portent sur le
monde. […] La langue est aussi le vecteur de la culture et elle seule permet d’appréhender
le sens des valeurs difficilement transmissibles dans les langues d’origine » (p4). Ce
référentiel « vise de façon conjointe un usage quotidien de la langue et l’apprentissage des
outils d’une bonne insertion dans la société française (y compris l’adhésion aux usages et
aux valeurs de la République » (p4). Ce référentiel a fait l’objet de vives critiques de la part
de nombreux chercheurs. Pour A-S. Calinon (2013 : 37) « l’expression « intégration
linguistique » est à la fois, complexe et fondamentale, politiquement chargée et
scientifiquement fuyante » d’autant plus qu’elle se situe dans le Cadre d’Intégration
Républicaine. Elle précise que « c’est prendre un raccourci simpliste que d’attribuer une
corrélation faussement évidente « à une compétence en langue » et à « intégration sociale
garantie/réussie » (2013 : 35) tandis que d’autres chercheurs considèrent que le FLI
favorise un éclatement au niveau de la didactique du français langue étrangère.
Il y a donc parfois comme le dit E. Lebreton un glissement de la notion de besoins
objectifs langagiers à la notion d’objectifs d’intégration. Nous chercherons dans les parties
suivantes à mieux définir les besoins langagiers au niveau de l’apprentissage de l’écrit dans
le contexte de la formation linguistique.
36
Chapitre 6. L’accès à l’écrit contextualisé
Les besoins langagiers des stagiaires sont très variés, particulièrement dans un
contexte d’immersion social, culturel et linguistique. Nous allons aborder dans ce chapitre
différentes théories didactiques afin de mieux discerner comment favoriser l’accès à l’écrit
d’un public parfois peu ou pas scolarisé.
37
déchiffrer ». De plus, il affirme que concernant les apprenants faiblement scolarisés
accueillis dans les centres de formation, « le recours à la grammaire [de type scolaire] est
même contreproductif » alors qu’en parallèle ceux qui ont été scolarisés en demandent
(« ce qui ne veut pas dire qu’ils apprennent mieux que les apprenants qui ne s’appuient pas
sur la grammaire ») (Adami, 2019 : 7).
Pour ce qui est de la pratique de l’alphabétisation mise en place pour les non lecteurs, non
scripteurs, elle ne représente pas, selon, M. de Ferrari (2008 : 3), une fin en soi. Se
focaliser uniquement sur cette « absence d’écrit » ne rend pas compte des besoins des
apprenants dans un contexte d’intégration linguistique.
C’est ainsi que Pierre (2003, cité dans S. Tabbal Amela, 2014 : 87) explique que le terme
littératie se substitue peu à peu à celui d’alphabétisation. Cette littératie, contrairement à
l’alphabétisation envoie à un vaste champ permettant « d’envisager la question de l’écrit
dans la diversité de ses usages ainsi que dans la diversité des modèles théoriques qui
permettent de comprendre leur transmission, leur apprentissage et leur mise en œuvre »
(Barré de Miniac et al., 2004 cités dans Tabbal Amela, 2014 : 87).
Il n’y a donc pas seulement une seule méthode d’apprentissage, un seul type d’écrit
normé et complexe mais plusieurs types d’usage des écrits. Ce qui rappelle les New
Literacy Studies et notamment de B. Street (2003 : 7) pour qui la littératie est une pratique
sociale et pas simplement une connaissance technique et neutre puisqu’elle est
contextualisée.
38
Nous retrouvons dans les référentiels de l’écrit associé au marché FL19 pour le niveau A1
des supports d’activités correspondant à cette volonté de permettre à la personne allophone
de comprendre son environnement immédiat. La compréhension des écrits porte sur des
documents tels que des tickets de caisse, des emplois du temps, des documents
administratifs, etc. Dans les référentiels, la méthode de lecture est globale, il s’agit
d’apprendre à reconnaître certains mots et des logos favorisant ensuite une lecture balayage
« qui permet de capter l’essentiel ou une information précise distribuée dans le texte par
l’élimination rapide du reste ; il s’agit d’une lecture sélective que l’on pratique au
quotidien : parcourir un dépliant pour relever le lieu d’une activité, son horaire, par
exemple ». (Cuq, Gruca, 2005 : 169)
39
6.2 La dimension cognitive des interactions entre usages oraux et écrits
6.2.1 La place de l’écrit
Les compétences que doivent acquérir les stagiaires sont censées favoriser leur
l’intégration sociale. L’écrit peut se travailler par le biais d’exercices systématiques mais
les résultats sont limités à un type d’écrit et certains stagiaires continuent à échouer à leur
test de production écrite. Comme le précise M. de Ferrari (2008 : 3), « la prégnance du
critère de scolarité aura neutralisé des besoins à l’oral notamment pour les publics non
francophones, voués à la seule « alphabétisation », le critère de scolarité correspond ici au
fait que l’apprenant n’ait pas ou peu été scolarisé dans son pays d’origine ce qui entraîne
une absence ou une insuffisance de compétences à l’écrit. On constate encore une
focalisation sur l’apprentissage de l’écrit alors même que ces apprenants ne peuvent pas
comprendre car leurs compétences à l’oral et leur conscience phonologique ne sont pas
encore assez développées ». M. Rispail (2011 : 5) envisage également « difficilement des
compétences en lire/écrire qui ne prendraient pas appui sur des compétences d’un déjà-là à
l’oral ». Pour expliquer l’insécurité scripturale des apprenants faiblement ou non
scolarisés, H. Adami (2011, cité dans Castellot, 2017 : 71) mentionne « une tradition orale
des pratiques de communication, un manque d’autonomie et de confiance en soi, une
difficulté de considérer la langue comme un objet d’étude ».
H. Adami (2009) considère également qu’il est nécessaire que toutes les activités aient
« une vision sociale et pragmatique et qu’elles doivent aboutir rapidement à une production
d’un texte […] il faut lui permettre de vivre une situation de communication réussie,
malgré la fragilité de ses compétences à l’écrit, quitte par la suite, à « revenir un peu en
arrière » (cité dans Castellot, 2016 : 66)
40
alors que l’interaction entre les usages écrits et les usages oraux créent une dynamique
cognitive qui ne peut que renforcer et accélérer l’autonomie langagière de l’apprenant
[…] ».
Comme le souligne J-P. Cuq et I. Gruca (2005 : 183), « […] la didactique de l’oral
propose des activités de production libre à partir d’une consigne de départ et qui sollicitent
les opinions de l’apprenant, son engagement personnel et sa créativité afin de développer
de véritables conduites langagières : décrire, raconter, justifier, convaincre, argumenter,
exposer, etc., qui couvrent toute une gamme de situations discursives […] ».
Ne pas considérer les compétences langagières orales « déjà-là » empêcherait également
selon M. de Ferrari (2008 : 3) de prendre « en compte les compétences de ces personnes
souvent plurilingues, ayant développées des stratégies auditives et mnémoniques et des
habilités permettant d’acquérir l’oral rapidement ».
Il n’est pas possible de séparer l’oral de l’écrit et l’écrit de l’oral dans le cadre d’une
intégration linguistique ; comme nous l’avons vu précédemment « il est intéressant, voire
indispensable, d’inclure l’oral dans le développement littéracique, sous peine de couper les
pratiques scolaires des pratiques sociales où les deux domaines interfèrent sans arrêt »
(Raspail 2011 : 5).
Par la suite, nous chercherons à comprendre comment travailler l’écrit par l’intermédiaire
de l’oral dans la formation linguistique.
41
Nous retrouvons dans ces propos plusieurs paradigmes : le premier est celui de l’être social
qui agit sur la société (perspective actionnelle), le second est la nécessité de communiquer
pour mieux comprendre l’autre et se positionner soi-même par le biais des compétences
langagières (approche communicationnelle) et le dernier est le fait que la communication et
les actions se réalisent par le biais des interactions (approche interactionniste).
Particulièrement dans le cadre de la formation linguistique du CIR, il est primordial de
considérer les apprenants comme « des acteurs sociaux qui développent un ensemble de
compétences générales et notamment une compétence à communiquer langagièrement »
(CECRL, p.15) puisqu’il est question d’une intégration linguistique.
Nous adopterons l’idée que « la conception de l’apprenant comme individu intériorisant un
système linguistique est abandonnée en faveur de l’idée d’un acteur social qui développe
des compétences variables à travers ses interactions avec d’autres acteurs sociaux ».
(Pekarek, 2000 : 2)
Il n’est certes pas évident de développer un cadre authentique dans un milieu guidé pour
favoriser les interactions entre les stagiaires, le formateur et un intervenant, mais ces
interactions favorisent le pilier sur lequel les compétences orales pourront se développer.
À travers l’approche interactionniste, nous allons pour ce projet nous focaliser sur le
fonctionnement interactionnel dans le cadre de la création d’un document iconique. Nous
nous appuierons sur la perception de S. Pekarek pour qui « l’interaction sociale est
constitutive des processus cognitifs, voire constructive des savoirs et des savoir-faire
langagiers et de l’identité même de l’apprenant » (2000 : 4).
L’acteur interagit non seulement avec « l’Autre » pour se développer mais également pour
apporter à « cet Autre » une ouverture et cela dans le cadre d’une interaction portant sur la
perception du monde. Le discours étant définit par S. Pekarek (2000 : 4) comme « une co-
activité continue, située dans des cours d’action co-constructivistes par les interlocuteurs
sur l’arrière fond de leur expérience communicative et de leurs interprétations du monde ».
Outre l’interprétation du monde que nous verrons par la suite, les objectifs de cet
apprentissage interactionniste sont : de favoriser le développement des compétences
linguistiques et particulièrement lexicales, de pouvoir améliorer la cohérence dans la
création d’un discours et de pouvoir co-construire un support (ici une affiche) qui constitue
l’objet des échanges. Il s’agit d’accéder à une construction de sens et la découverte
commune d’un outil la favorisant par le biais des interactions, il n’est donc pas question de
proposer des réponses toutes faites, systématiques dans l’objectif de rectifier des
42
potentielles erreurs. Il est nécessaire donc de resituer cette démarche, nous ne nous situons
pas dans le domaine de la performance mais bien dans l’accès à une compétence.
43
Nous présupposons en nous inspirant des travaux de K-A. Bruffee (1995) et de S-J.
McCarthey & S. McMahan (1995 : 2), que l’intériorisation de ces interactions favorisent
les apprentissages et le développement de la pensée. Ces auteurs, s’inspirant de l’approche
Vygotskienne, considèrent que « si la pensée individuelle résulte des dialogues intériorisés,
l’écrit peut être considérée comme une résurgence de ces dialogues. Alors, il parait
judicieux de s’appuyer sur les échanges entre les partenaires de travail pour qu’ils
progressent chacun au niveau de l’écrit » (traduction personnelle). Dans cette conception,
la structure et le contenu d’un écrit dépend du type d’interaction et de sa qualité ainsi que
l’évolution et la maturation de ces interactions.
La collaboration au niveau de la production écrite (comme dans les autres étapes du projet
à travers la variété des tâches) s’appuie sur une notion importante de la théorie
vygotskienne, celle de la zone proximale de développement. Au lieu de se focaliser sur ce
que l’apprenant peut réaliser seul à un moment précis (exemple les évaluations sommatives
ou certificatives), cet auteur s’oriente sur son potentiel, c’est-à-dire des compétences en
cours de construction qui n’ont pas acquis leur maturation (Vygotski, 1997, p 361). Il
précise que « La recherche montre que la zone de développement a une signification plus
directe pour la dynamique du développement intellectuel et la réussite de l’apprentissage
que leur niveau présent de leur développement » (p362). Cette zone de développement
correspond à la zone de potentialité entre ce qu’une personne est capable de réaliser seule
et ce qu’il peut effectuer à l’aide d’un Autre mais les limites de cette zone de potentialité
sont déterminées. Ce n’est par exemple pas judicieux de demander à un stagiaire d’écrire
un texte s’il est non scripteur ou encore de demander à un autre plus à l’aise à l’écrit de se
limiter à ce qu’il sait déjà faire : « l’apprentissage n’est valable que s’il devance le
développement. Il suscite alors, fait naître toute une série de fonction qui se trouve au
stade de maturation, qui sont dans la zone prochaine de développement » (p 368)
S-J. McCartey & S. Mc Mahon (1995 : 12) se sert de cette notion pour citer des recherches
où les étudiants peuvent écrire des phrases les uns après les autres, en posant aux autres des
questions, en faisant des suggestions pour la mise en mots et en aidant avec l’orthographe.
Les auteurs soulignent que les écrits élaborés collectivement, selon cette modalité, sont
plus avancés que ceux écrits par les stagiaires seuls. Il s’agit de rédactions
conversationnelles c’est-à-dire « des situations ou deux ou plusieurs personnes se mettent
autour d’une table pour concevoir et rédiger un texte commun » (Kraft& Dalsendschön-
Gay, 1999 : 51). Toutefois, certaines conditions sont essentielles pour que cette réalisation
soit bénéfique pour tous les stagiaires, spécialement au niveau de la formation des groupes
44
de stagiaires (la création des groupes des stagiaires pour ce projet sera développée par la
suite et présentera une piste pour gérer l’hétérogénéité du groupe de stagiaires concerné par
ce projet).
S. Pekarek (2000 : 7), qui mise également sur le potentiel du travail collaboratif selon
l’approche développée ci-dessus, précise que c’est toute une conception de l’apprentissage
qui est remise en question. Selon elle « Cette conception non seulement met radicalement
en question la distinction entre compétence et performance mais nous éloigne également de
la notion d’erreur : les « lacunes » dans le répertoire de l’apprenant disparaissent non
simplement comme des déficiences par rapport à un système idéal, mais comme occasions
de mise en œuvre des pratiques des capacités de résolution collective des problèmes aux
besoins communicatifs pratiques ».
45
Chapitre 7. L’accès à l’écrit par les genres de discours
Comme cela a été dit précédemment, à travers la notion de littératie, il s’agit
d’aborder l’écrit à travers la variété de ses usages. L’apprentissage de l’écrit n’est donc pas
considéré comme une connaissance technique neutre favorisant un simple décodage mais il
est contextualisé. Un écrit social est avant tout un écrit d’interaction s’effectuant dans un
cadre spécifique. Les différents usages des écrits sociaux se réalisent à travers des genres
du discours. Nous commencerons par définir les genres du discours en tant qu’objet
didactique puis nous nous focaliserons sur le document iconique. Il s’agira alors de
considérer le potentiel d’une affiche.
46
• « Une composante sémantique (vériconditionnalité et fictionnalité, d’une
part, bases thématiques d’autre part)
47
7.2.1 L’intérêt de l’image dans la production d’un message
Actuellement, la posture privilégiée de la lecture de l’image dans le cadre de la formation
linguistique est celle de la description. En effet, dans les tests de l’OFII de niveau A1 dans
la partie production écrite, se trouve un exercice où les stagiaires doivent décrire une
image. Cet exercice très scolaire consiste « à parler de l’image » (Demougin, 2018 : 108) et
la consigne correspond à « Que vois-tu sur cette image ? ». Les images, qui sont
principalement des photos dans ces tests, sont relatives à des situations de la vie
quotidienne. Dans cette situation, ce qui est attendu des stagiaires est qu’ils retranscrivent
le vocabulaire de la vie quotidienne appris en classe, une connaissance minimale de la
structure de la phrase, et le lexique lié à la description d’images (aucun investissement
émotionnel ou interprétation personnelle de l’image n’est demandé). Les formateurs
préparent les apprenants à cet exercice ; il est d’ailleurs prévu dans la charpente du CIEP
une séance particulière sur l’apprentissage des formules « c’est » et « Il y a » qui seront
revues régulièrement. Ils insistent également sur certains mots dont les stagiaires auraient
besoin tel que « abri de bus ». Les images et des logos sont également présents dans la
partie de compréhension écrite des tests. Les stagiaires doivent relier une image avec le
mot qui la représente. Les images sont donc bien utilisées mais dans un seul but de
description.
Le nouveau référentiel des compétences écrites du marché F19 fait référence à l’utilisation
des affiches et des images dans le micro-descripteur « CE- Lire pour (s’) informer et/ou
discuter », il s’agit de comprendre « des titres d’actualités simples sur des sujets qui
l’intéressent grâce à des noms, des mots et des expressions récurrents, illustrés par des
images » et de « comprendre quelques informations publiques saillantes et prévisibles dans
un document courant et illustré ».
Dans le cadre d’un document iconique, l’image n’est pas seulement un élément de
décoration. Particulièrement, lorsqu’elle est située sur une affiche de prévention (comme
dans notre projet), elle ne fait pas que représenter une réalité autonome (au même titre que
l’écrit). Elle « est toujours une langue étrangère, n’est pas un langage universel. C’est à
partir de ce premier principe que peut se construire une sémiologie de l’image dès lors que
cette dernière est considérée comme un fait de culture et non pas un reflet de
nature » (Recherches et applications LFDM, 1994 :35 cités dans Oritz, 2015 :2). La
consigne de travail portant sur l’image correspond alors à « que comprends-tu dans cette
image ? », « C’est une lecture qui recontextualise, qui prend en compte l’horizon d’attente
48
du lecteur, son expérience de lecteur. C’est une lecture par conséquent qui va au-delà de
l’illusion de réalité, de la transparence référentielle, alors même qu’elle n’interdit pas la
lecture émotionnelle. » (Demougin, 2018 : 109)
Au niveau de la gestion du groupe d’apprenants et l’approche collective de l’image,
F. Demougin (2018 : 112) parle dans ce cadre d’une « communauté interprétative dont la
classe est le lieu ». Chaque « lecteur » de l’image peut exprimer et retranscrire sa pensée
oralement, percevoir l’autre différemment. Elle rappelle cependant, qu’ « il s’agira d’un
point de vue didactique de prendre en compte « l’hétérogénéité interprétative au sein de la
classe » (Grossman, 1990). L’enjeu est que l’élève apprenne à mettre en attente, à différer
les interprétations, à intégrer de nouvelles interprétations, à changer de point de vue »
(Demougin, 2018 : 112).
49
les interactions. L’accès à des genres plus complexes que « les genres formulaires » est
conseillé dans le CECRL à partir du niveau A2, cependant J-C. Beacco (2008 : 7) précise
également qu’une identification par genre « ne tient pas compte du fait qu’un genre peut
être compris ou produit à différents niveaux de maîtrise qu’on ne peut pas toujours relier
de façon simple un genre à un niveau ».
Chacun des éléments d’une affiche prit individuellement peut être propice à un
apprentissage. Comme nous l’avons précisé précédemment, l’image a sa propre
signification et son propre objectif et fait appel à une certaine vision du monde. L’affiche
possède également des dimensions formelles comme dans une lettre administrative avec
des contacts, des logos, etc. Travailler sur les régularités d’un genre peut mettre en
confiance les stagiaires qui pourront l’aborder non comme un ensemble indicible mais
comme un cadre où ils pourront retrouver des informations où les produire
Particulièrement pour un public ayant des difficultés à l’écrit, « le genre permet « une
économie cognitive » (Maingueneau, 2002) non négligeable. La connaissance préalable des
mécanismes qui régissent le fonctionnement des documents qui en relèvent, permet aux
enseignants de faire anticiper certaines de leurs caractéristiques » (Claudel & al, 2016 : 7)
50
J. Dolz & R. Gagnon (2008 :185), ce support favorise la construction d’un « capital
culturel » indispensable au développement cognitif de chaque individu.
Tous ces éléments peuvent favoriser l’accès à l’écrit dans la mesure où les
stagiaires abordent le genre comme le cadre d’une production et obtiennent ainsi des
repères propres au genre.
51
Partie 3
52
53
Chapitre 8. La conception du projet
8.1 Présentation du dispositif
Suite à un court rappel concernant la méthodologie retenue, il est question de
mieux cerner les circonstances dans lesquelles ce projet a été conçu. Les différentes étapes
de la conception du projet, le constat de départ au sujet des relations qu’entretiennent
certains stagiaires avec les affiches ainsi que le choix du thème de l’affiche vont être
abordés dans la présentation du dispositif.
54
ces derniers peuvent interagir dans le cadre de la production par rapport aux buts, sous-buts
et intentions communicatives du message à construire. L’autre intérêt dans le cadre de ce
projet est « la composante compositionnelle (plans du textes, séquences, mais aussi rapport
entre texte et image dans certaines formes plurisémiotiques) » (Richer, 2011 : 7). Après
une phase de découverte de l’affiche comme genre, les stagiaires devront créer leur propre
affiche portant sur l’égalité filles/garçons ou femmes/hommes. L’accès à l’écrit se réalisera
progressivement dans le cadre d’un document iconique.
Suite à la crise sanitaire, ce projet n’a pu être mis à l’épreuve qu’à la fin du mois de
juillet dans des circonstances différentes de celles qui étaient initialement prévues.
55
alors au groupe de sortir dans le couloir et leur montre une autre affiche de l’OFII
décrivant ce parcours. Cette affiche est très schématisée et l’écrit y est très court. Je leur
demande alors qui peut expliquer ce parcours ? Les stagiaires dans leur grande majorité
étaient tout à fait capables de comprendre les informations présentes.
Les affiches sont des pratiques sociales de l’écrit. Elles sont présentes dans tous les
organismes, dans la rue, dans les immeubles. L’insécurité scripturale de l’apprenant ou son
manque d’attention les écarte des informations qui lui sont pourtant accessibles.
56
La famille séance 32
Le partage des tâches Les dates clés/ Les Compréhension de la
domestiques. évolutions les plus multiplicité des champs
marquantes. d’application du principe de
l’égalité homme-femme.
La famille
Séance 48 L’égalité Séance 54 L’égalité
homme/femme : homme/femme :
Egalité dans l'éducation des enfants Egalité dans l'éducation des enfants
Exercice de l'autorité parentale, obligation Le rôle des parents dans la scolarité des
alimentaire enfants, soutien pendant les études
57
langagières. Je désire mettre en pratique cette prérogative ; toutefois, il n’est pas précisé
quelles modalités pour le travail en groupe : s’agit-il de s’appuyer sur la coopération ou la
collaboration ? J’ai opté pour un travail collaboratif où chaque participant apporte sa
contribution à chaque étape du projet. L’objectif est de co-construire des compétences à
travers la réalisation des affiches.
Nous allons ici présenter un tableau déterminant les heures restantes de formation
pour chaque stagiaire ainsi que le niveau de leurs compétences en compréhension et
production orales et en interaction écrite. Les compétences écrites sont évaluées par
rapport aux étapes de l’écrit d’un niveau infra A1.1 au niveau A1 de Ferrari (2016)10 qui
sont les étapes de « découverte », « exploration », « appropriation », « consolidation » et
« généralisation.
Alto 39 A1 Découverte
Berhe 78 A1 Appropriation
Dav 76 A2 Généralisation
Eva 38 A1 Exploration
Gedj 93 A1 Appropriation
10
Compte rendu de la formation «Apprendre à lire et à écrire à l’âge adulte »,
https://www.programmealphab.org/sites/default/files/CR_lecture_ecriture_adultes_en_ligne.pdf
58
Fred 183 C1 Exploration
Lin 73 A2 Généralisation/A2
Favorisant l’approche collective pour l’écriture d’un texte, j’ai réuni les stagiaires
par rapport au niveau de leurs compétences à l’écrit. J’ai tenté de faire des groupes
homogènes.
59
considérons les stagiaires comme des adultes autonomes qui ont chacun leurs propres
expériences, parcours, construction de pensée. Chaque stagiaire en tant qu’individu a donc
son « propre système de référence », ce que Blanchet désigne par le principe
d’ « endoréférentialité ». Ce sont également des personnes qui ont un vécu (une maturité)
et qui peuvent donc apporter une contribution dans un projet commun de réalisation d’écrit
portant sur un enjeu social du pays d’accueil. Nous croyons également au principe
d’ « intersubjectivité », c’est-à-dire que « c’est dans et par les interactions entre les sujets
et les significations qu’ils attribuent, chercheur compris, que se développent et peuvent être
compris les phénomènes humains et sociaux » (p16). C’est donc par et dans les interactions
que les stagiaires pourront construire aussi bien un accès à l’outil culturel qui est l’écrit
ainsi qu’accéder à un autre outil culturel (qui est une manifestation du premier) qui est le
genre de discours relatif aux affiches. Le dernier principe d’ « hétérogénéité » est le fait de
considérer qu’il n’y a pas de « règles universelles » mais « des tendances partielles » qui
peuvent être définies quant aux phénomènes relatifs aux sciences de l’homme. Aux vues
des arguments ci-dessus, nous envisageons une approche socio-constructiviste de
l’apprentissage dans le cadre de ce projet.
60
des stagiaires une impossibilité à s’auto-corriger. De même, pour l’unique groupe non
scripteur, il est possible que le formateur intervienne de manière plus fréquente (en
fonction du potentiel du groupe comparé aux tâches à réaliser) mais l’objectif est que les
groupes collaborent aussi bien en interne mais également avec les autres groupes s’ils ne
s’auto-suffisent pas.
61
Durée Phases Déroulé des activités Modalité de travail Compétences
visées
Atelier 1 3h00 Présentation du projet - Le formateur explique que les stagiaires vont créer une affiche sur un En groupe classe
enjeu social pendant une semaine.
Activité de Discussions sur les
compréhension enjeux sociaux - Explication et discussion de la notion des enjeux sociaux par rapport
aux thèmes abordés précédemment dans la charpente CIEP (le
A partir d’un
logement, la famille, les transports, l’éducation, etc.).
modèle
Comprendre une
- Le formateur discute avec les stagiaires des affiches que ces derniers
affiche
ont pu observer dans leur environnement proche (dans la rue, à l’OFII,
à l’école de leur enfant, etc.). Il demande aux stagiaires s’ils font
attention aux affiches et ce qu’ils regardent dans une affiche.
Atelier 2 3h30 - Rappel du projet. Le formateur ensuite propose à chaque groupe de En groupe de 4-5 Compétence
stagiaire un document avec des images de cinq affiches découpées. En stagiaires pragmatique
groupe ; les stagiaires doivent retrouver un mot pour chaque image
62
Activités de (annexe 3, 4, 5). Mise en commun des réponses.
production
- Le formateur demande à chaque groupe d’écrire une phrase qui
A partir d’un correspond à chaque image (annexe 6,7, 8 la partie « votre texte »). En groupe de 4-5
stagiaires
modèle Mise en commun des différentes phrases. Le stagiaire ramasse les
documents de chaque groupe.
- Le formateur distribue les slogans, le pavés, les images, les logos et les
contacts mélangés des cinq affiches. Les stagiaires doivent reconstituer
les cinq affiches sur une feuille vierge A4 (annexe 9, 10, 11). En groupe de 4-5
stagiaires
- Le formateur redistribue les annexes 6,7, 8. Les stagiaires doivent
recopier le slogan de l’affiche (partie « le texte de l’affiche).
Discussion : à quoi sert le slogan, qu’est-ce qu’un conseil, etc.
- Le formateur distribue les affiches d’origine (annexes 12, 13, 14, 15,
16) et les stagiaires comparent leurs reconstitutions.
Atelier 3 3h 30 Information sur la - Rappel de l’objectif final. Le formateur précise que les stagiaires vont En groupe classe Compétences
situation en France créer des affiches sur le thème de l’égalité filles/ garçons ou générales
Découverte du
femmes/hommes.
thème et choix
du sous-thème - Présentation du thème grâce à diverses activités, discussion à la suite
sur lequel va de chacune des activités
63
porter les CO : vidéo (https://www.youtube.com/watch?v=jlJ6Yr3dz9c&t=5s) +
affiches feuille QCM (annexe 17)
Atelier 4 3h00 Choix du sous thème Distribution des statistiques relatifs à chaque sous thème+ video rappel du En groupe de 4 ou Compétences
et des images contenu. 5 orales et écrites
Discussion du
sous-thème en Discussion sur les notions que chaque groupe veut aborder dans leur production
groupe à l’aide écrite
des statistiques
Par rapport au sous-thème choisi, recherche d’images, de logos sur google
spécifiques à
correspondant au message à transmettre. Mise en parole des pensées et
chacun des
64
thèmes. mutualisation par rapport au choix des images. Compétences
pragmatiques
Choix des
images
Choix des images et d’un logo pour les affiches
Atelier 5 2h 30 Écrire collectivement La consigne est d’écrire collectivement un texte (le pavé). Ce texte doit En groupe de 4 ou Compétences
un texte de quatre ou transmettre des connaissances sur le sujet abordé, il s’agit d’un texte informatif. 5 pragmatiques
A l’aide des
cinq lignes (le pavé) Il s’agit d’une mise en mots des discussions.
images et des
documents, les Réflexion/ planification/rédaction du texte. En fonction du niveau du groupe de
stagiaires stagiaire, le message pourra être constitué de mots ou de phrases. Mutualisation
pour accéder à la forme écrite du message.
Atelier 6 2h30 Choix du slogan et le Réflexion à partir de l’écriture d’un slogan. Aborder le texte argumentatif, En groupe de 4 ou Compétences
retranscrire l’objectif est que les stagiaires donnent un conseil à ceux qui pourraient 5 pragmatiques
regarder l’affiche.
Mise en place des
différents éléments / La mise en page de l’affiche. Où placer le(s) images(s), le(s) logo(s), le texte
réalisation de l’affiche (s). Réflexion/ mutualisation /création.
Atelier 7 1h 30 Évaluation Expliquer pourquoi les participants ont choisi ce sous-thème, que veulent-ils En groupe de 4 ou
dire, pourquoi c’est important pour eux. Répondre aux questions. 5
65
8.3.2 Les objectifs et compétences visés
L’objectif principal est l’entrée dans l’écrit par le biais des interactions afin de
développer une autonomie langagière non seulement au niveau de la compréhension du
support écrit qui est dans cas l’affiche mais également dans la production écrite.
Nous partons du fait que les différentes composantes d’un tel outil favorisent un
cadre d’apprentissage de différents contenus aussi bien linguistiques que culturels et
pragmatiques sans avoir recours à une approche traditionnelle voire scolaire que les
chercheurs cités dans le cadre théorique estimaient comme peu adaptée à notre public.
Les deux composantes ci-dessous énoncées par Adam (2001) sont celles qui seront les plus
attendues dans le cadre de la production d’une affiche de prévention :
L’entrée dans l’écrit va être analysée par la capacité des stagiaires à faire du sens
par rapport à une intention de communication dans un sous-thème spécifique et cela à
travers les différents éléments du document iconique et de leurs potentialités.
66
Chapitre 9. La production de l’affiche
Nous présentons ici la mise en œuvre du projet de la création d’affiche de prévention sur
le thème de l’égalité filles/ garçons ou femmes/ hommes. La réalisation de ce projet s’est
effectuée en premier à partir de la compréhension active des écrits sociaux et en deuxième
par la production d’un écrit social. Il sera question ici que les stagiaires puissent
« coordonner des perspectives et de co-construire des hypothèses pour arriver à une
réponse commune » (Tuge & Rogoff, 1989 cités dans Baudrit, 2009 : 109) et cela dans
toutes les phases du projet.
Présentation du projet : En début du cours, j’ai demandé aux stagiaires s’ils voyaient
beaucoup d’affiches dans la rue, à la gare, à l’OFII, à la FRATE, etc. Les stagiaires ont
répondu positivement. Je leur ai ensuite demandé ce qu’ils remarquaient dans une affiche
et collectivement ils m’ont répondu qu’ils regardaient les images. Je leur ai ensuite dit que
les six prochaines séances seraient destinées à créer des affiches portant sur les enjeux
sociaux.
Discussions sur les enjeux sociaux : Les stagiaires ne comprenant pas la notion des enjeux
sociaux, je l’ai défini comme des problèmes qui existent dans une société, dans un pays.
J’ai ensuite recontextualisé cette notion à partir des thèmes de la charpente CIEP
précédemment abordés en cours. Je leur ai donc demandé quels problèmes étaient liés au
logement en France. Un stagiaire a répondu que des personnes n’avaient pas de maison.
Nous avons ensuite continué collectivement à chercher des enjeux sociaux liés à d’autres
thèmes tels que le transport, la santé, l’école, la vie professionnelle etc. et à imaginer des
solutions pour améliorer ces problèmes.
J’ai ensuite reformulé l’énoncé de la présentation du projet en leur disant que nous allons
créer une affiche sur les enjeux sociaux et donc sur des problèmes qui existent dans notre
société.
67
Nous avons débuté ce projet par la compréhension active des écrits sociaux, et plus
spécifiquement à travers la composante compositionnelle de l’affiche de prévention. Il me
semblait important que les stagiaires comprennent le cadre dans lequel ils allaient produire
leurs écrits.
À partir de l’affiche en annexe 1, la première question était de savoir quel était le sujet de
cette affiche. Les stagiaires ont répondu « les vaches et les œufs ». J’ai ensuite demandé à
un stagiaire plus avancé de lire ce qui était écrit dans le cercle rouge, nous avons ensuite
expliqué ce qu’était « le gaspillage alimentaire » et discuté de cet enjeu social.
Nous avons ensuite étudié la deuxième affiche. Pour ce faire, nous avons tenté de
comprendre l’affiche par les images. Je leur ai demandé en groupe classe ce qu’il y avait
sur l’image, des stagiaires m’ont répondu « une maison » ; j’ai ensuite demandé dans
quelle pièce de la maison, ils m’ont répondu le salon. La prochaine question était de dire ce
qu’il y avait par terre, certains ont répondu « des jeux ». Nous avons ensuite défini le mot
« crime ». Une fois ces éléments définis, les stagiaires ont cherché le logo, le slogan, le
numéro de téléphone, le pavé toujours avec les mêmes groupes. Nous avons, comme pour
la première affiche, identifié ceux qui ont fait l’affiche, leur numéro de téléphone, ce qu’ils
voulaient dire à travers l’affiche, et le conseil qu’ils donnaient.
68
d’écrire tous au moins un mot. Il est précisé de ne pas utiliser son
dictionnaire et de demander de l’aide aux autres stagiaires du groupe si
l’écriture du mot est trop difficile ou s’ils jugent avoir besoin d’aide.
➢ 2ème étape (1 heure) : Trouver une phrase correspondant à l’image d’une affiche
(Annexe 6, 7, 8, la partie « votre texte »)
69
➢ 3ème étape (1h) : reconstitution des différentes parties des affiches (l’image, le pavé,
le slogan, le logo, les contacts) Exemples d’affiches reconstituées en annexes 9, 10,
11
• Remarques : Les échanges sont nombreux et dans tous les groupes. Les stagiaires
s’aident par eux-mêmes du document en annexe 1. Il y a un réel effort au niveau de
la compréhension commune de chacun des textes. Le dictionnaire n’est pas utilisé
et les groupes m’appellent pour éclairci le sens de certains mots. La difficulté porte
sur la correspondance du logo avec l’image, le slogan ou le pavé, ce qui est normal
étant donné que le logo fait appel très souvent à des connaissances culturelles.
L’objectif de cette activité, outre la correspondance des textes et des images, est
que chaque recomposition d’affiches comporte tous les éléments mentionnés lors
de l’atelier 1.
➢ 4ème étape (1 heure) : comparer son slogan avec celui de l’affiche originelle
70
• La consigne : à partir des affiches (annexes 12, 13, 14, 15, 16) retranscrire
le slogan (annexes 6,7,8 dans la partie « le texte de l’affiche)
• Remarques : Après avoir distribué les affiches (annexes 12, 13, 14, 15, 16),
les stagiaires du groupe 3 décollent rapidement les logos mal placés pour les
replacer correctement. Les stagiaires les plus avancés au niveau de l’écrit
dans chaque groupe sont désignés pour recopier ensuite les slogans initiaux
dans la partie « le texte de l’affiche ». Nous essayons en groupe classe de
comprendre les slogans des différentes affiches et de retravailler ensemble
et oralement les slogans écrits dans chaque groupe dans le but de donner un
conseil.
• Objectif : Cet atelier consiste à revoir pour certains stagiaires le thème sur lequel
portera les affiches et le découvrir pour les nouveaux stagiaires, c’est-à-dire les
enjeux sociaux liés à l’égalité filles/garçons ou femmes/hommes. Pour commencer
cette séance, nous avons défini en groupe ce que signifie les égalités et les
inégalités. Différentes ressources ont été présentées ensuite pour aborder le thème
des inégalités entre filles/garçons et femmes/hommes afin de travailler différentes
compétences :
71
- La compréhension écrite : statistiques (Annexe 18) + jeu de questions réponses
entre les groupes + révision des pronoms interrogatifs)
Cette activité avait pour but de comprendre des statistiques sur le thème de l’égalité
hommes/ femmes au niveau de l’activité professionnelle. Nous avons expliqué les
chiffres et fait une lecture commune du document. Chacun des groupes de
stagiaires devait poser des questions aux autres groupes, exemple : combien de
femmes sont maires ? Quel est le salaire mensuel des femmes ? etc. Les personnes
interrogées devaient retrouver la réponse dans le document. Nous avions
préalablement revu la formulation des questions à l’oral (Qui ? Combien ? Quel ?
etc.)
Les différentes informations ont été abordées sous différentes modalités afin que les
stagiaires puissent comprendre le thème choisi par le biais de données chiffrées, de
textes et d’images. Ce qui permet d’aborder des compétences de base variées en plus
des compétences purement langagières. Effectivement, nous avions vu que dans un
contexte d’insertion, la formation linguistique devait tenir compte d’un public ayant
parfois des difficultés avec des compétences de base. (V. Leclercq, 2017 : 64), de plus
le déroulé-type du CIEP faisait souvent mention du travail à partir des données
chiffrées.
• Remarques : Suite à ces activités, les stagiaires ont discuté entre eux et abordé
d’autres thèmes comme l’égalité femmes/hommes au niveau des tâches ménagères,
de la prise en charge de l’éducation des enfants, de la violence conjugale.
• Consigne : dans chaque groupe, vous allez discuter et choisir un thème pour votre
affiche.
• Remarques : Les stagiaires de chaque groupe n’étaient pas d’accord sur le choix du
sous-thème, après des discussions dans chaque équipe les stagiaires du groupe 1 ont
choisi le thème des violences conjugales, ceux du groupe 2 celui des inégalités
entre les filles et les garçons au niveau scolaire et ceux du groupe 3, celui de la
72
violence conjugale (par imitation avec le groupe 1) alors que leur choix initial
portait sur les loisirs.
• Consigne : Je vais vous donner un document (annexes 18 et 19) sur le thème que
vous avez choisi. Vous allez essayer de comprendre ensemble ce document. Si vous
avez des difficultés à le comprendre, je pourrais passer dans les groupes.
• Consigne : Vous avez choisi le thème de vos affiches, l’objectif est ensuite de
discuter en groupe du message de votre affiche et de trouver des images qui
73
évoquent ce message, vous chercherez également un logo pour représenter votre
message.
• Remarques : Une fois que les stagiaires maîtrisent la barre de recherche sur le site
Flinckr.fr, je les laisse travailler en autonomie pour choisir les images. Assez
rapidement, certains stagiaires vont sur le moteur de recherche Google.fr. J’observe
et je prends des notes (analyse de ces interactions dans la partie suivant : 9.3.1.
Quelques constats)
• Remarques : Les échanges sont nombreux mais certains stagiaires réutilisent les
mêmes stratégies d’évitement dans les ateliers 2 et 3 lorsqu’ils doivent écrire.
J’observe et je prends des notes (analyse de ces interactions dans la partie suivant :
9.3.1. Quelques constats)
74
Atelier 6 : Écrire un slogan (2h 30)
➢ 1ère étape : Écrire un slogan
• Consigne : À l’aide de vos images, de votre pavé, de vos images, de votre logo,
vous écrivez un slogan. Votre slogan doit donner un conseil. On donne des
exemples de conseils en classe. Le téléphone n’est pas autorisé ainsi que les cahiers
des stagiaires.
• Remarques : Les échanges verbaux sont nombreux. J’observe et je prends des notes
(analyse de ces interactions dans la partie suivant : 9.3.1. Quelques constats)
Formatrice à Mme Lin : « Ce n’est pas normal que vous écriviez tout le texte, il faut que tout le
monde participe »
Ked: « J’écris a, b, c, d »
Formatrice : « Par exemple, si Pali écrit le mot « femme » /FM/ c’est juste ?
75
Ked : « comme ça » (en écrivant)
Berhe : « Comment on écrit une phrase, madame, comment on écrit une phrase ? »
Berhe : « Les garçons sont moins propres que les filles à l’école »
Formatrice : Oui, maintenant vous montrez votre phrase aux autres pour en discuter.
Formatrice : « Oui, le but est que vous écriviez ensemble si c’est trop dur »
Pali : « Pour moi c’est difficile. Moi, je connais des mots en français, moi, je sais écrire « rendez-
vous » (le stagiaire écrit le mot et le montre)
Formatrice : « Oui, c’est bien écrit. D’habitude, on apprend des choses, là vous devez réfléchir et
trouver la réponse ensemble ».
Stagiaires : [rire]
Ali écrit le mot qu’il cherchait dans son dictionnaire et le montre aux autres : « C’est comme ça ? »
Remarques : L’écriture libre a semblé un peu stressante lors des premiers ateliers
pour certains stagiaires. Nous pouvons penser que ces différentes attitudes décrites ci-
dessus de la part des stagiaires sont dues à l’insécurité insécurité linguistique décrite par H.
Adami (2011, cité dans Castellot, 2017).
Cependant, peu à peu les stagiaires ont interagi plus régulièrement pour mettre en
mots leurs pensées. Les corrections mutualisées ont porté principalement sur l’orthographe
76
des mots, mais également dans une moindre mesure sur la construction des phrases et la
compréhension des chiffres.
9.3.2 Les échanges lors du choix des images (méthode prise de note)
J’ai pu observer un investissement important lors de l’atelier 4. Tous les stagiaires
recherchaient une image par groupe de 2 ou 3 personnes. Toutefois, les discussions n’ont
pas permis une interprétation des images et plus précisément de créer une « communauté
interprétative » (Demougin, 2018 : 112) au sein des groupes.
Les discussions ont porté sur les sujets qu’ils voulaient développer, le groupe 3 a
cherché en premier une image d’un enfant « on cherche un enfant d’abord », le groupe 2 a
cherché une image de garçon qui joue au foot. Les images ont été utilisées également pour
expliquer des mots comme « la violence », « la gym », etc.
Le choix des images n’a pas été explicité, les stagiaires se sont contentés de
montrer les images et de demander « vous voulez cette photo », ou « tu aimes beaucoup ? »
Il me semble que l’approche didactique par rapport à l’image que j’ai choisie n’était
pas adaptée et que (peut-être) le niveau des stagiaires en français n’était pas suffisant pour
communiquer sur la signification qu’ils donnaient aux images. Toutefois, les images ont
été choisies avec soin et correspondaient à un message préalablement pensé (annexes 21,
22, 23).
Les stagiaires ont interagi et ont travaillé dans une bonne dynamique à chaque étape de la
production de leur affiche. Travailler selon de nouvelles modalités a été un processus de
remise en confiance. La tentation de demander de l’aide au formateur ou de chercher les
réponses dans leur téléphone a peu à peu diminué au fil des ateliers. Nous avions vu que
l’insécurité linguistique des stagiaires était bien réelle, toutefois être confronté à des pairs
d’un niveau équivalent semble avoir facilité cette prise de risque, cette entrée dans l’écrit
libre voire créatif. Nous pouvons donc que valider le potentiel du travail collaboratif décrit
par S. Pekarek (2000 : 7) dans le cadre de ce projet. Effectivement, Selon elle « Cette
conception non seulement met radicalement en question la distinction entre compétence et
performance mais nous éloigne également de la notion d’erreur : les « lacunes » dans le
répertoire de l’apprenant disparaissent non simplement comme des déficiences par rapport
à un système idéal, mais comme occasions de mise en œuvre des pratiques des capacités de
résolution collective des problèmes aux besoins communicatifs pratiques ».
77
Dans la prochaine partie, nous allons analyser les composantes pragmatique et
compositionnelle dans les productions finales des stagiaires ainsi qu’aborder le retour de
ces derniers sur leur évaluation du projet.
Certains stagiaires (inscrits dans un parcours de 400 heures) qui ont participé à ce
projet sont individuellement dans l’incapacité d’écrire un texte libre dans leur langue
maternelle et /ou en français. Nous cherchons à définir si ces stagiaires sont capables
d’exprimer collectivement des buts et des sous-buts à travers un message global.
Ci-dessous, nous allons retranscrire les pavés puis les slogans, les sous-buts et les
buts des énoncés des différentes affiches et enfin les types d’énoncés.
78
Les pavés Les slogans
Affiche 1 Une femme et mourte dan troie jours. Informer Police : appelle pour polce Donner un conseil aux victimes
Affiche 2 Les garcon sont moins plus fort a la ecole qua les filles. Informer Le parént : Les garcon est Les Donner des conseils aux parents
fille Fon Le mam travail.
Les garcons condtuisent. Informer
Affiche 3 D’ans la famille, conjoint frape l’autre, les enfants sont Informer/convaincre Le ceule chose il fo pas silence Donner un conseil aux victimes
triste. j’appele la police.
Cest une femme pleure et triste son père frape et elle suis a Convaincre
la fin beuucoup de femme sont morte
79
Les stagiaires qui ont écrit ces messages en autonomie totale ont tous compris à
l’issue de ce projet les différents actes de paroles et les ont adaptés en fonction des sous-
buts ou buts du message qu’ils voulaient transmettre. Les choix réalisés étaient bien
adaptés au support qui est l’affiche de prévention.
L’affiche du groupe 2 (annexe 22) est composée d’images décrivant une partie du
texte et plus précisément les stéréotypes liés au genre. Des images de poupées et de dance
pour représenter les filles et des images de voitures et de foot pour les garçons. Comme
dans une grande partie du texte, les images servent à décrire une situation. Cependant, elles
ne sont pas directement liées aux deux phrases « Les garcon sont moins plus fort a la ecole
qua les filles » et « Le parent : Les garcon est les filles fon le mam travaille ». Ce rapport
entre les images et les deux phrases peut faire penser que les stagiaires ont fait le lien entre
les loisirs, la réussite scolaire et les inégalités filles/garçons. Il est intéressant de rappeler
que le sous-thème que ce groupe avait choisi était les inégalités scolaires entre les filles et
les garçons.
Les images expriment les émotions reliées à chacun des textes. L’image de la petite
fille qui pleure est reliée au texte « une femme et mourte dans troie jour », l’image des
larmes sur le visage ainsi que l’image de la femme isolée avec en premier-plan le poing
d’un homme prêt à frapper sont reliées à « stop homicides en France c’est boucou », et
80
enfin l’image où l’homme frappe une femme est reliée au texte « Stop la voilence contre
les femmes ». Toutes ces images sont reliées à la souffrance due à la violence conjugale.
Cette affiche a été réalisée par le groupe qui avait choisi, avant même d’accéder aux
ordinateurs, de chercher une photo d’enfant en premier ; le choix des images ne provient
pas du hasard mais d’une réflexion commune sur le message à transmettre. Nous
retrouvons ici la définition de la sémiotique où « la réalité du sens est reliée à celle de
l’esprit humain » et dépasse probablement l’approche purement culturelle. Nous pouvons
également noter la présence d’un smiley qui pleure comme une représentation graphique
utilisée dans les messages électroniques.
L’affiche du groupe 3
Contrairement aux affiches précédentes, les textes ne sont pas écrits sous les
images. La violence est perçue au sein de la famille aussi bien au niveau des textes que des
images. Nous remarquons cependant, que les images peuvent être isolées du texte et
racontent une histoire. Ces images sont situées dans un avant/ après, c’est ainsi que l’on
voit l’image du poing d’un homme et l’image du bras d’un homme qui frappe, puis l’image
d’un enfant qui fait un signe d’arrêter et une autre qui représente un enfant qui tient une
arme.
L’entrée dans l’écrit par le genre et spécifiquement ici par ses composantes
« compositionnelle » et « pragmatique » est intégrée par les stagiaires aux vues des
affiches créées. Il n’est pas nécessaire que ces derniers possèdent des normes
orthographiques ou lexicales avancées pour qu’ils puissent accéder au sens des écrits
sociaux en autonomie de groupe.
81
10.2.1 L’évaluation des affiches entres pairs
La fiche d’évaluation (annexe 24) est composée de deux parties : la première
partie est relative aux composantes pragmatique et compositionnelle et la deuxième
consiste à évaluer la capacité de provoquer des émotions (la sémiotique). Ce document a
été fourni dès la fin du deuxième atelier où les stagiaires ont eu l’occasion d’évaluer les
affiches qui ont permis la compréhension active du genre iconique (en annexes
12,13,14,15,16). Cette fiche a donc trois objectifs : comprendre, se repérer et évaluer, elle
présente à travers les différentes questions les régularités propres au genre de l’affiche de
prévention.
Les stagiaires ont répondu individuellement par écrit à la deuxième partie portant
sur les émotions. Les neuf stagiaires ont eu des émotions similaires par rapport aux
différentes affiches. Ils avaient la possibilité d’exprimer plusieurs émotions pour chaque
affiche. Le tableau ci-dessous résume les réponses des stagiaires.
L’objectif des affiches de prévention qui consiste à faire partager des émotions sur des
enjeux sociaux a été reproduit dans les productions des stagiaires puisqu’un seul stagiaire
est indifférent à l’affiche
82
La première partie du questionnaire (annexe 25) consiste à relever leurs perceptions
quant aux objectifs du projet ainsi qu’à définir ce qui leur a semblé difficile à réaliser. Il
s’agit d’un QCM à multiples réponses.
Sur les neuf stagiaires interrogés, huit ont apprécié créer des affiches et un a répondu je ne sais
pas.
2- Qu’avez-vous préféré ?
3- Le rythme de travail ?
De ne pas avoir de réponse pour l’écriture des mots et phrases de la part du formateur : 2
réponses
83
D’écrire un message avec des images, des logos, des slogans et des pavés : 5 réponses
Commentaires :
- Questions 4 : Aux vues des attitudes des stagiaires lors du quatrième atelier et de
leurs réponses à ce questionnaire, la didactique autour de l’image mériterait d’être
plus développée étant donné le potentiel de cet élément au niveau de l’entrée dans
l’écrit. De plus, outre l’objectif de mieux comprendre une affiche, il me semble que
les stagiaires se sont rendu compte de l’intérêt de l’oralité dans ce projet d’un écrit
social et plus globalement dans l’apprentissage du français langue étrangère.
- Question 5 : Ce qui a été le plus difficile pour les stagiaires est de n’avoir pas été
autorisé à utiliser leur dictionnaire (ou leur traducteur). L’accès à l’écrit par la
réflexion me semblait un point essentiel pour le bon déroulement du projet.
La deuxième partie du questionnaire (annexe 26) consiste à évaluer les modalités utilisées
pour accéder à l’écrit dans ce projet ainsi que les aptitudes développées par les stagiaires à
l’issue du projet :
84
7- Maintenant, j’ai plus envie de lire les 7 2
slogans des affiches. réponses réponses
8- Maintenant, j’ai plus envie de lire les 6 2 1 réponse
logos des affiches. réponses réponses
9- Maintenant, j’ai plus envie de lire les 3 1 réponse 1 réponse 4
pavés des affiches. réponses réponses
Commentaires :
Les images favorisent pour la majorité des stagiaires la compréhension d’un message et
elles permettent d’aborder l’écriture d’un texte plus facilement pour six personnes
interrogées. Les modalités de l’accès à l’écrit que représentent les images, le travail
collectif et l’oralité sont clairement approuvées comme justifiées par les deux tiers des
stagiaires.
La production d’écrits aide à leur compréhension pour huit stagiaires et favorise également
l’approche pluridimensionnel propre à ce type de document iconique. Nous remarquons
qu’à la suite de ce projet, les stagiaires disent être plus enclin à regarder les images, à lire
des slogans et des logos ; cependant, pour un texte plus long tel que le pavé, quatre
stagiaires sur neuf ne désirent pas le lire à l’issue de ce projet.
85
86
Conclusion
L’accès aux écrits sociaux par le biais de remplissage de formulaires, de compréhension de
lettres administratives, etc. est une pratique très régulièrement utilisée dans le contexte de
la formation linguistique à destination d’adultes parfois peu ou pas scolarisés d’un niveau
infra A1. Il s’agit d’un français que l’on nomme « de survie » qui prend sens en contexte
d’immersion. J’aborde les écrits sociaux à l’occasion de ce projet par une méthode
d’apprentissage du français basée également sur les genres de discours mais en postulant
que ces adultes peuvent accéder à l’écrit par le biais d’un genre plus contraignant (mais qui
offre également plus de liberté) qui est le document iconique. L’objet du dispositif mis en
place est la production d’une affiche de prévention portant sur l’égalité femmes/hommes
qui représente un enjeu social dans notre société française.
Mon hypothèse de départ était que les apprenants/acteurs ont un potentiel inexploité
d’accéder à une construction de sens des écrits sociaux par le biais d’un enrichissement
mutuel de leurs différents parcours.
Les principaux résultats obtenus ont été encourageants. Les stagiaires ont réussi à fournir
des informations, donner des conseils, partager des émotions propres au genre de discours
qui est celui de l’affiche de prévention et cela par écrit. La production écrite libre (voire
créative) qui peut sembler irréalisable pour ceux en grande difficulté a été finalement
réalisée grâce à un travail collaboratif accès sur les interactions (malgré quelques
résistances de départ). Seule l’approche de l’image comme vecteur d’interprétation et
d’interaction pour accéder à la construction de sens n’a pas été pleinement exploitée lors de
la production du document iconique, par faute d’une approche didactique de l’image
adaptée. Le retour des stagiaires a été positif, ils mentionnent entres autres dans leur
majorité que les interactions facilitent le processus de l’entrée dans l’écrit, que ce projet les
incite à lire des textes courts sur les affiches présentes dans leur environnement et enfin
qu’ils comprennent mieux cet écrit social.
Ce projet m’a permis de mieux cerner les besoins des stagiaires. Effectivement, j’ai été
surprise par les émotions qu’ils désiraient partager et transmettre grâce à leur affiche, bien
qu’ils soient pour certains en grande difficulté à l’écrit (et parfois à l’oral). L’approche par
les genres de discours est un outil que j’aimerais également réinvestir dans l’objectif de
travailler certaines compétences linguistiques que je trouve difficilement enseignables de
manière traditionnelle (scolaire) avec ce public peu scolarisé. Je me suis restreinte aux
87
composantes pragmatique et compositionnelle de l’affiche dans ce projet, les autres
composantes des genres de discours semblent également intéressantes à découvrir afin de
favoriser l’accès à l’écrit.
88
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Sitographie
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ecrire.be/IMG/pdf/du-niveau-a1.1-au-niveau-a1_1_.pdf (consulté le 03/02/2020)
Entretien avec Mariela de Ferrari réalisé le 5 juin 2019 par Sylvie Liziard, avec la collaboration de
Marie-Christine Fougerouse. Synergies France n° 13 - 2019 p. 185-194. Disponible en ligne :
http://gerflint.fr/Base/France13/entretien.pdf (consulté le 24/04/2020)
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Animée par Mariela de Ferrari Les 12, 13 janvier et 9 février 2016. Disponible en ligne :
https://www.programmealphab.org/sites/default/files/CR_lecture_ecriture_adultes_en_ligne.pdf
(consulté le 15/03/2020)
Programme alpha b. Compte rendu de la formation Apprendre à lire et à écrire à l’âge adulte Les 4
et 5 décembre 2018 Formation animée par Mariela de Ferrari. Disponible en ligne :
https://www.programmealphab.org/sites/default/files/CR_apprendre_lire_ecrire_participants_0412
2018.pdf (consulté en ligne le 02/03/2020) (consulté le 19/01/2020)
Site de l’association Frate formation conseil. Notre histoire et nos valeurs – FRATE Formation –
Conseil. Disponible en ligne : http://frateformation.net/organisme/notre-histoire-et-nos-valeurs/
(consulté le 25/03/2020)
93
94
Sigles et abréviations utilisés
CECRL : Cadre Européen Commun de Référence des Langues
CAI : Contrat d’Accueil et d’Intégration
CCI : Chambre de Commerce et de l’industrie
CIEP : Centre International d’Etudes Pédagogiques
CIR : Contrat d’intégration linguistique
DILF : Diplôme Initial de la Langue Française
FLE : Français Langue Etrangère
FLI : Français Langue d’Intégration
EO : Expression Orale
EP : Expression Ecrite
IE : Interaction Ecrite
IO : Interaction Orale
PE : Production Ecrite
PO : Production Ecrite
L1 : Langue première
L2 : Langue Seconde
OFII : Office Français de l’Immigration et de l’Intégration
OFPRA : Office Français de protection des Réfugiés Apatrides
TEF : Test d’Evaluation du Français
95
96
Table des annexes
Annexe 1 Titre : Compréhension de l’affiche 1 ............................................................................... 99
Annexe 2 Titre : Compréhension de l’affiche 2 ............................................................................. 100
Annexe 3 Titre : Le thème de l’image groupe 1............................................................................. 101
Annexe 4 Titre : Le thème de l’image groupe 2............................................................................. 102
Annexe 5 Titre : Le thème de l’image groupe 3............................................................................. 103
Annexe 6 Titre : Le texte et le slogan de l’image groupe 1 ........................................................... 104
Annexe 7 Titre : Le texte et le slogan de l’image groupe 2 ........................................................... 105
Annexe 8 Titre : Le texte et le slogan de l’image groupe 3 ........................................................... 106
Annexe 9 Titre : Recomposition des affiches exemple groupe 1 ................................................... 107
Annexe 10 Titre : Recomposition des affiches exemple groupe 2 ................................................. 108
Annexe 11 Titre : Recomposition des affiches exemple 3 ............................................................. 109
Annexe 12 Titre : Affiche initiale 1 ............................................................................................... 110
Annexe 13 Titre : Affiche initiale 2 ............................................................................................... 111
Annexe 14 Titre : Affiche initiale 3 ............................................................................................... 112
Annexe 15 Titre : Affiche initiale 4 ............................................................................................... 113
Annexe 16 Titre : Affiche initiale groupe 5 ................................................................................... 114
Annexe 17 Compréhension orale vidéo ......................................................................................... 115
Annexe 18 Titre : Compréhension écrite : femmes / hommes ....................................................... 116
Annexe 19 Titre : Les thèmes choisis en chiffres .......................................................................... 117
Annexe 20 Titre : Les thèmes choisis en chiffres .......................................................................... 118
Annexe 21 Titre : Affiche finale groupe 1 ..................................................................................... 119
Annexe 22 Titre : Affiche finale groupe 2 ..................................................................................... 120
Annexe 24 Titre : Grille d’évaluation des affiches ........................................................................ 122
Annexe 25 Titre : Grille d’évaluation du projet (partie 1) ............................................................. 123
Annexe 26 Titre : Grille d’évaluation du projet (partie 2) ............................................................. 124
97
98
Annexe 1
Titre : Compréhension de l’affiche 1
99
Annexe 2
Titre : Compréhension de l’affiche 2
Source : http://inceste-viol-protegeons-les-enfants.psychologies.com/de-nouvelles-mesures-
lutter-contre-violences-sexuelles-mineurs/
100
Annexe 3
Titre : Le thème de l’image groupe 1
101
Annexe 4
Titre : Le thème de l’image groupe 2
102
Annexe 5
Titre : Le thème de l’image groupe 3
103
Annexe 6
Titre : Le texte et le slogan de l’image groupe 1
104
Annexe 7
Titre : Le texte et le slogan de l’image groupe 2
105
Annexe 8
Titre : Le texte et le slogan de l’image groupe 3
106
Annexe 9
Titre : Recomposition des affiches exemple groupe 1
107
Annexe 10
Titre : Recomposition des affiches exemple groupe 2
108
Annexe 11
Titre : Recomposition des affiches exemple 3
109
Annexe 12
Titre : Affiche initiale 1
Source : https://www.fcpe.asso.fr/campagne/pollution-de-lair-parents-vous-pouvez-agir
110
Annexe 13
Titre : Affiche initiale 2
Source : https://www.policevalais.ch/communiques-pour-les-medias/valais-usage-du-telephone-au-volant-
intensification-des-controles/
111
Annexe 14
Titre : Affiche initiale 3
Source : https://twitter.com/HDFADDICTIONS/status/1120742542746759168/photo/1
112
Annexe 15
Titre : Affiche initiale 4
Source : https://www.francebleu.fr/infos/societe/pau-la-mairie-part-la-chasse-aux-crottes-de-chien-
1433521048
113
Annexe 16
Titre : Affiche initiale groupe 5
Source : https://www.parent62.org/mardi-12-novembre-2019-venez-echanger-autour-du-harcelement-
scolaire-a-larea-daire-sur-la-lys/
114
Annexe 17
Compréhension orale vidéo
Vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=jlJ6Yr3dz9c&list=PLh2d9DDKSIUcJcQlqwMJH_yn-
alhhwcts&index=20&t=0s
115
Annexe 18
Titre : Compréhension écrite : femmes / hommes
Source : https://www.grouperandstad.fr/egalite-femmes-hommes-au-travail/
116
Annexe 19
Titre : Les thèmes choisis en chiffres
Source : https://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/les-chiffres-2017-des-inegalites-
femmes-hommes/
117
Annexe 20
Titre : Les thèmes choisis en chiffres
Source : https://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/les-chiffres-2017-des-inegalites-
femmes-hommes/
118
Annexe 21
Titre : Affiche finale groupe 1
119
Annexe 22
Titre : Affiche finale groupe 2
120
Annexe 23
Titre : Affiche finale groupe 3
121
Annexe 24
Titre : Grille d’évaluation des affiches
Composition de l’affiChe
Ça me fait rire …
Ça m’énerve …
Ça me fait peur …
Ça me fait sourire …
Ça me rend triste …
Je ne sais pas …
122
Annexe 25
Titre : Grille d’évaluation du projet (partie 1)
123
Annexe 26
Titre : Grille d’évaluation du projet (partie 2)
124
Table des matières
Remerciements .................................................................................................................................................. 3
Sommaire .......................................................................................................................................................... 5
Introduction ....................................................................................................................................................... 7
PARTIE 1 - LE CONTEXTE............................................................................................................................. 9
CHAPITRE 1. LE CADRE DE LA FORMATION LINGUISTIQUE ...................................................................... 10
1.1 Vers la création d’un contrat d’Intégration Républicaine ........................................................................ 10
1.2 La formation linguistique du CIR ............................................................................................................ 11
1.2.1 Les tests de l’OFII ......................................................................................................................... 11
1.2.2 Des tests de l’OFII au Test d’Évaluation de Français (TEF) ......................................................... 12
1.2.3 De la charpente aux référentiels .................................................................................................... 13
1.3 Le bilan de l’évolution de la formation .................................................................................................... 14
CHAPITRE 2. LE CENTRE DE FORMATION ................................................................................................ 16
2.1 L’association Frate formation conseil ...................................................................................................... 16
2.2 L’orientation pédagogique ....................................................................................................................... 16
2.3 L’équipe des formateurs .......................................................................................................................... 18
2.4 Une adaptation en continue...................................................................................................................... 19
CHAPITRE 3. LES ADULTES MIGRANTS : UN PUBLIC HETEROGENE .......................................................... 20
3.1 Des parcours de vie .................................................................................................................................. 20
3.2 Des parcours d’apprentissage .................................................................................................................. 21
3.2.1 Les données ................................................................................................................................... 21
3.2.2 Le niveau des stagiaires et l’entrée dans l’écrit ............................................................................. 23
3.2.3 Les composantes orales et écrites .................................................................................................. 24
CHAPITRE 4. LE CHOIX DU PROJET .......................................................................................................... 25
4.1 L’orientation du projet ............................................................................................................................. 25
4.2 La problématique ..................................................................................................................................... 25
4.3 Méthodologie ........................................................................................................................................... 27
PARTIE 2 - LE CADRE THEORIQUE ............................................................................................................. 29
CHAPITRE 5. DES STAGIAIRES, DES BESOINS ET DES OBJECTIFS DE FORMATION ...................................... 31
5.1 Les caractéristiques du public .................................................................................................................. 31
5.1.1 Différentes identités ............................................................................................................................. 31
5.1.2 Des vécus et une maturité .................................................................................................................... 32
5.2 Des besoins .............................................................................................................................................. 33
5.2.1 Des besoins objectifs aux besoins subjectifs ........................................................................................ 33
5.2.2 Des besoins objectifs aux besoins de la formation linguistique ........................................................... 35
CHAPITRE 6. L’ACCES A L’ECRIT CONTEXTUALISE ................................................................................. 37
6.1 D’une vision autonome de l’écrit à la littératie ........................................................................................ 37
6.1.1 D’un apprentissage scolaire à la littératie ............................................................................................. 37
6.1.2 Des écrits sociaux à la production écrite .............................................................................................. 38
6.2 La dimension cognitive des interactions entre usages oraux et écrits ...................................................... 40
6.2.1 La place de l’écrit ................................................................................................................................. 40
6.2.2 Des interactions entre l’écrit et l’oral ................................................................................................... 40
6.2.3 Des interactions à visée intégrative ...................................................................................................... 41
6.3 La co-construction des compétences au niveau de la production d’écrits ................................................ 43
6.3.1 Les modalités du travail en groupe....................................................................................................... 43
6.3.2 Le travail collaboratif pour travailler l’écrit ......................................................................................... 43
CHAPITRE 7. L’ACCES A L’ECRIT PAR LES GENRES DE DISCOURS ............................................................ 46
7.1 Le genre de discours comme objet didactique ......................................................................................... 46
7.1.1 Le genre de discours en tant qu’ « outil » : définition .......................................................................... 46
7.1.2 Les différentes composantes des genres ............................................................................................... 46
125
7.2 L’affiche, un document iconique multidimensionnel............................................................................... 47
7.2.1 L’intérêt de l’image dans la production d’un message ......................................................................... 48
7.2.2 L’affiche : un objet discursif ................................................................................................................ 49
PARTIE 3 - LA MISE EN PLACE DU DISPOSITIF ........................................................................................... 52
CHAPITRE 8. LA CONCEPTION DU PROJET ............................................................................................... 54
8.1 Présentation du dispositif ......................................................................................................................... 54
8.1.1 La méthode retenue .............................................................................................................................. 54
8.1.2 Le constat de départ ............................................................................................................................. 55
8.1.3 Le thème de l’affiche et le contenu de la formation linguistique.......................................................... 56
8.2 Les préconisations du cahier des charges et le public .............................................................................. 57
8.2.1 Les préconisations liées au marché F19 ............................................................................................... 57
8.2.2 La présentation du public et la formation de groupes de stagiaires ...................................................... 58
8.2.3 La place des stagiaires et du formateur ................................................................................................ 59
8.3 Les objectifs de la formation.................................................................................................................... 61
8.3.1 Le déroulé des ateliers .......................................................................................................................... 61
8.3.2 Les objectifs et compétences visés ....................................................................................................... 66
CHAPITRE 9. LA PRODUCTION DE L’AFFICHE .......................................................................................... 67
9.1 Les activités de compréhension des écrits sociaux .................................................................................. 67
Atelier 1 (durée : 3h00) : Comprendre une campagne de prévention ............................................................ 67
Atelier 2 (3 heures 30) : Trouver le message de l’affiche à partir de son image ........................................... 68
Atelier 3 (3h30) : Aborder les connaissances pour créer son affiche ............................................................ 71
9.2 Les activités de production des écrits sociaux ......................................................................................... 73
Atelier 4 : Approche approfondie du sous-thème choisi et choix des images de l’affiche ............................ 73
Atelier 5 : Écriture du pavé (2h30)................................................................................................................ 74
Atelier 6 : Écrire un slogan (2h 30) ............................................................................................................... 75
9.3 La difficile entrée dans l’écrit collaboratif ............................................................................................... 75
9.3.1 Quelques constats lors de la mise en mots ........................................................................................... 75
9.3.2 Les échanges lors du choix des images (méthode prise de note) .......................................................... 77
CHAPITRE 10. L’EVALUATION ................................................................................................................ 78
10.1 Analyse des composantes pragmatique et compositionnelle .............................................................. 78
10.1.1 La composante pragmatique............................................................................................................... 78
10.1.2 La composante compositionnelle ....................................................................................................... 80
10.2 Évaluation des affiches et du projet par les stagiaires......................................................................... 81
10.2.1 L’évaluation des affiches entres pairs ................................................................................................ 82
10.2.2 L’évaluation du projet par des stagiaires ............................................................................................ 82
Conclusion ....................................................................................................................................................... 87
Bibliographie ................................................................................................................................................... 89
Sitographie ...................................................................................................................................................... 93
Sigles et abréviations utilisés ........................................................................................................................... 95
Table des annexes ............................................................................................................................................ 97
Table des matières ......................................................................................................................................... 125
126
MOTS-CLÉS : entrée dans l’écrit, iconotexte, littératie, genre de discours, collaboratif.
RÉSUMÉ
Le mémoire vise à envisager l’entrée dans l’écrit d’un public adulte et hétérogène par le
biais de la production d’un document iconique. Dans le cadre de la formation linguistique
dispensée par l’association Frate formation conseil, ce dispositif a comme objectif la
création d’une affiche de prévention liée à l’égalité femmes/hommes.
La démarche choisie est celle de la recherche-action. La première partie consiste à
présenter terrain de la formation, la deuxième un approfondissement des notions clés
comme les besoins en contexte d’intégration linguistique, l’importance des écrits sociaux
en tant qu’objet de littératie et d’interaction et la composante pragmatique et
compositionnelle de l’affiche de prévention comme cadre d’une entrée dans l’écrit par les
genres du discours. Les modalités d’accès à la production d’un écrit iconique se réalisera
par le biais d’un travail collaboratif.
ABSTRACT
The thesis aims to consider the entry into writing process of an adult and heterogeneous
audience through the production of an iconic document. As part of the language training
provided by the Frate formation conseil association, the objective of this training program
is to create a prevention poster about gender equality.
The scientific process chosen is action research. The first part promotes understanding of
the training field, the second an understanding of key concepts such as needs in the context
of linguistic integration, the importance of social writings as an object of literacy and
interaction and the pragmatic and compositional component of the prevention poster as a
framework for an entry into the written process through the genres of discourse. The
modalities of access to the production of an iconic writing will be achieved through
collaborative work.
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