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Table des matières

I Ensembles, applications 8
A) Notion d’ensemble . . . . . . . . . . . . . . . . 8
1) Quelques ensembles usuels . . . . . . . . 8
2) appartenance, inclusion, égalité . . . . . 9
3) Opérations sur les ensembles, P(E) . . . 10
B) Notion d’Application . . . . . . . . . . . . . . . 13
1) Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2) Bijection, injection, surjection . . . . . . 15
3) Composition . . . . . . . . . . . . . . . 16
4) Ensemble image, restriction . . . . . . . 18
C) Quelques bijections réciproques classiques . . . . 19
1) Logarithme et Exponentielle Néperiens . 20
2) Fonctions puissance . . . . . . . . . . . 21
3) tangente . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
4) Fonctions trigonométriques réciproques . 22
5) Cosinus et sinus hyperboliques . . . . . . 23
6) tangente et arctangente hyperboliques . . 24
7) argsh et argch . . . . . . . . . . . . . . 25
8) express. des fonct. hyperboliques réciproques 25
9) courbes de argcoth et de arccotan . . . . 26
D) Raisonnement et quantificateurs . . . . . . . . . 26
1) Un peu de logique . . . . . . . . . . . . 26
2) Quantificateurs . . . . . . . . . . . . . . 31
E) Ensembles finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
1) Equipotence, cardinal . . . . . . . . . . 34
2) Analyse combinatoire . . . . . . . . . . 39

II Suites numériques et limites 41


A) Nombres complexes . . . . . . . . . . . . . . . 41
B) Notion de limite . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

1
1) Limite d’une fonction numérique . . . . 42
2) Limite d’une suite numérique . . . . . . 45
C) Suites récurrentes . . . . . . . . . . . . . . . . 49
1) Domaine de définition . . . . . . . . . . 49
2) Cas des suites arithmétiques ou géométriques 50
3) Recherche d’une éventuelle limite . . . . 51
D) Densité dans R de Q et R \ Q . . . . . . . . . 52
E) Bornes supérieure ou inférieure . . . . . . . . . 53
1) Vocabulaire lié à l’ordre . . . . . . . . . 53
2) Ordre sur R . . . . . . . . . . . . . . . 55
F) Limites inférieure ou supérieure (de suite) . . . . 57
G) Propriétés topologiques de R . . . . . . . . . . 59

IIIStructures algébriques 63
A) Groupes, anneaux, corps . . . . . . . . . . . . . 63
1) Opération sur un ensemble . . . . . . . . 63
2) Notion de groupe . . . . . . . . . . . . . 66
3) Anneau, corps . . . . . . . . . . . . . . 68
4) Quelques formules dans un anneau com-
mutatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
B) Signature d’une permutation . . . . . . . . . . 70
1) Groupe de permutations . . . . . . . . . 70
2) Notion de cycle . . . . . . . . . . . . . . 70
3) Décomposition en cycles . . . . . . . . . 71
4) Morphisme de groupes(∗) . . . . . . . . 74
5) Autre définition de la signature(∗) . . . . 76
C) Divisibilité dans un anneau commutatif non nul A 78
1) Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . 78
2) Anneaux de congruence . . . . . . . . . 79
D) Divisibilité dans Z . . . . . . . . . . . . . . . . 81
1) PGCD, PPCM . . . . . . . . . . . . . . 81
2) Rôle de la division euclidienne . . . . . . 82
2
3) factorisation en nombres premiers . . . . 83
E) Anneaux de polynômes . . . . . . . . . . . . . 86
1) Notion de polynôme . . . . . . . . . . . 86
2) Factorisation de polynômes . . . . . . . 90
F) Corps des fractions rationnelles K(X) . . . . . . 95
1) Notion de fractions rationnelles . . . . . 95
2) Factorisation des fractions rationnelles . 97
3) Fonctions rationnelles . . . . . . . . . . 98
4) Décomposition en éléments simples sur C 100
5) Preuve et méthodes de calcul . . . . . . 102

3
UPJV 2023-2024, Licence Sciences Technologie Santé, L1-S1
Portails InforMath et MathPhysique, parcours PPPE
Structures Fondamentales
Volume horaire : Cours : 20h, TD : 28h.
ECTS : 6
Calcul de la note finale : (WIMS + 4max (E, (E+P)/2))/5
(Attention : Sans notes WIMS, vous seriez défaillant au module :
pas de note, obligation de passer l’examen de seconde session
pour valider le module.)
Objectifs : Introduire les notions de base de la logique mathé-
matique et de la théorie des ensembles. Introduire des structures
mathématiques (groupe, anneau) et leur propriétés, à travers des
cas classiques (groupe des permutations et des restes modulo n,
anneaux des entiers et des polynômes, corps des fractions ra-
tionnelles à coefficients réels ou complexes). Préciser les notions
de borne supérieure, et de limite de suite numérique. Le cours
traitera beaucoup d’exemples.
Programme : Langage du calcul propositionnel (négation,
connecteurs logiques, quantificateurs) et de la théorie naı̈ve des
ensembles (inclusion, intersection, réunion, complémentaire,
produit, applications, injectivité, surjectivité, bijectivité, re-
lations d’équivalence et d’ordre). Groupe des permutations (car-
dinalité, ordre d’un élément, transposition, cycle, parties géné-
ratrices, signature) et groupe des restes modulo n (structure,
congruence, ordre d’un élément, groupe, sous-groupe). Anneau
des entiers (division euclidienne, divisibilité, éléments irré-
ductibles, décomposition en facteurs premiers, ppcm, pgcd et
algorithme d’Euclide). Anneau des polynômes à coefficients
réels ou complexes (racines et multiplicité, division euclidienne,
divisibilité, décomposition en polynômes irréductibles, ppcm,
pgcd et algorithme d’Euclide, théorème de Bézout). Anneau des
restes modulo n (inversibilité, lemme chinois, exemples simples
4
d’équations diophantiennes). Corps des nombres réels. Partie
entière, densité des rationnels et irrationnels. Suites de nombres
réels et complexes (monotonie, arithmétique, géométrique, som-
me des premiers termes). Bornes supérieure et inférieure, limites
supérieure et inférieure. Caractérisation des limites de suites.
Critère de Cauchy, théorème de Bolzano-Weierstrass.
Programme de l’UE Calcul Matriciel. Nombres com-
plexes : représentations d’un nombre complexe : conjugué,
module, argument. Exponentielle complexe. Forme d’Euler, de
Moivre. Racines n-ièmes d’un nombre complexe. Applications à
la trigonométrie.
Systèmes d’équations linéaires, méthode du pivot de Gauss,
rang. On traitera divers exemples d’application aux sciences
(électricité, biologie,. . .) Calcul matriciel (somme produit, trans-
posée, inverse). Exemples d’utilisation issus de la géométrie :
Equations de droite ou de plan, intersection ; produit scalaire,
transformations géométriques, changement de repère (cas ortho-
normé), exemple des coordonnées polaires, cylindriques, sphé-
riques. Notions élémentaires sur le déterminant d’une matrice :
méthodes de calcul pour les déterminants 2x2 et 3x3, interpréta-
tion géométrique, applications. Formules de Cramer 2x2 et 3x3.
Produit mixte et produit vectoriel dans R3.
Espaces vectoriels sur le corps des nombres réels : Sous-espace,
espace engendré par une partie, somme d’espaces vectoriels, som-
me directe, sous-espace supplémentaire. Base, dimension.
Méthodes de travail
Elles s’apprennent d’abord en travaillant, par imitation ou par
habitude. Il n’est cependant pas inutile de réfléchir parfois aux
moyens de mieux faire, voire d’acheter un ouvrage sur le sujet.
Voici encore un conseil, pour ceux qui en recherchent :
— Numérotez les pages de vos cahiers (de cours ou de TD).
— Prévoyez une place pour une table des matières soignée
5
mais concise (il serait bien qu’elle ne dépasse pas une double-
page, pour être visualisée dans son ensemble), que vous consti-
tuerez vous-même, avec une colonne pour la date et une pour le
numéro de page.
— La simple mise à jour de la table des matières est déjà une
excellente façon de survoler ses notes.
— Vous pourrez alors facilement faire des renvois (effaçables)
lorsque vous travaillerez des points précis. Vous pourrez aussi
facilement repérer les points à propos desquels vous souhaitez
poser des questions (à vos enseignants ou à vos condisciples),
ou tout simplement ceux que vous devez revoir.
— Considérez votre table des matières comme la page la plus
importante de votre cahier, pour l’organisation de votre travail.

Avertissement

Les notes de cours qui suivent ne dispensent pas de prendre


des notes en cours d’amphi. Le signe ▶ en marge, a pour but
d’attirer l’attention sur un point. le signe (∗) indique un passage
ou une section dont la maitrise n’est pas exigible à ce niveau.
Les étudiants sont supposés connaitre déjà un peu de mathé-
matiques. On ne s’est donc pas astreint à introduire les notions
dans l’ordre logique, mais on recherché un exposé qui facilite la
compréhension et la mémorisation, en regroupant ce qui se res-
semble, et aussi en s’appuyant sur ce qui est facile pour illustrer
ce qui est plus difficile. Ainsi certains symboles ou concepts sont
utilisés avant la section qui les décrit précisément.
Les étudiants soucieux d’un exposé plus axiomatique n’auront
pas de mal a en trouver dans les livres décrivant le programme
de L1 Math.

6
Introduction
Le programme assez hétéroclite de cette UE appelle quelques
explications.
Il comporte pas mal de nouveautés, notamment en théorie
des ensembles et en algèbre, et d’importants approfondissements
en Analyse. Enfin, une attention particulière est accordée à la
rédaction et à la logique, c’est à dire à l’art de raisonner et de
prouver des affirmations.
Précisons qu’on n’apprend pas à rédiger ou raisonner en un
jour, ni un semestre ou une année, mais tout au long de ses
études, et que chaque domaine de connaissance a ses spécificités.
Un juriste, même nul en math, est parfaitement capable de rai-
sonnements fins et d’argumentation solide.
La preuve joue un rôle particulier en mathématiques. Son uti-
lité n’est pas toujours évidente pour l’étudiant ou même pour les
collègues d’autres disciplines. En effet, on peut parfaitement uti-
liser un théorème, tel que l’existence des primitives de fonctions
continues, sans en avoir vu et compris la preuve. C’est souvent
le plus sage, et on le fait aussi en math. Ce n’est pas manquer de
rigueur que de faire confiance à la communauté mathématique
qui est unanime sur le fait que ces résultats ont été correctement
prouvés.
Pourtant cette utilité de la preuve est évidente pour tous
les mathématiciens, et aussi pour la plus part des étudiants
“forts en math”. Indiquons simplement qu’elle est essentielle à
la compréhension et à la mémorisation des concepts et connais-
sances mathématiques.
Mentionnons encore l’existence d’une théorie formelle des
ensembles (ou de toutes les mathématiques en fait !) dont la
connaissance n’est pas au programme, mais qui a un rapport
particulier avec la rédaction mathématique.
7
Il s’agit d’un outil remarquable qui permet, entre autres choses,
de décrire avec une très grande précision les règles du jeux ma-
thématique : ce qu’on admet, et ce qu’il faut faire pour prouver
autre chose. Elle permet ainsi de codifier les règles de rédaction,
c’est pourquoi on parlera parfois de rédaction formelle pour
indiquer qu’on se rapproche de cette codification.
L’étudiant intéressé trouvera plus d’information dans les livres
de mathématiques ou d’informatique, ou sur internet ! Il peut
même consulter le premier tome des éléments de mathématiques
de Bourbaki (sans s’astreindre à tout lire !) s’il veut se faire une
idée de la façon dont on peut fonder les mathématiques. Il peut
aussi consulter des ouvrages de logique mathématique.

I Ensembles, applications
A) Notion d’ensemble

On survole dans cette introduction quelques ensembles de ba-


se, ainsi que diverses opérations sur les ensembles, ou relations
entre les ensembles.
Les étudiants sont invités à prendre garde aux notations ma-
thématiques et à éviter certaines confusions, et le cas échéant à
solliciter des explications concernant les principale règles d’écri-
ture.
Dans cette section, les lettres majuscules A, B, C, E, F, I dé-
signent des ensembles, (Ai)i∈I et (Ei)i∈I des familles d’ensembles
paramétrées par I.

1) Quelques ensembles usuels

• N = {0, 1, . . .} ensemble des entiers naturels.


N∗ = N \ {0} = {1, 2, . . .}.
Nn = {k ∈ N | 0 ≤ k ≤ n} = {0, 1, 2, . . . , n} si n ∈ N et
N∗n = {k ∈ N | 1 ≤ k ≤ n} = {1, 2, . . . , n}.
8
N∗0 = ∅ donc.
• Z = N ∪ (−N) où −N := {−n | n ∈ N} ensemble des
nombres entiers relatifs. 
p
•Q= | p ∈ Z et q ∈ N∗ ensemble des nombres ration-
q
nels.
• R ensemble des nombres réels.
R \ Q est l’ensemble des nombres irrationnels.
• C = {x + iy | x, y ∈ R}, ensemble des nombres complexes.
• R+ = [0, +∞[, permettant (entre autre) les mesures de lon-
gueurs.
• R = [−∞, +∞] = R∪{−∞, +∞}, la “droite réelle achevée”.
• Si a, b ∈ R, alors 1 −∞ ≤ a ≤ +∞. De plus
a ≤ b ⇒ [b, a] := [a, b] := {t ∈ R | a ≤ t ≤ b},
]a, b] = [a, b] \ {a}, [a, b[= [a, b] \ {b}, ]a, b[= [a, b] \ {a, b}.
• L’ensemble vide ∅ = {}.
• {1, 2, 3} = {3, 1, 2} = {1, 3, 1, 2} de cardinal 3.
Et nettement moins usuels mais correct :
• {∅} ̸= ∅, {{∅}}, {∅, {∅}}, N ∪ {N}
Nous supposons que l’étudiant connait aussi R∗, C∗ = C \ {0},
R∗+, Q∗, R−, . . .etc.
On a ainsi :
N ̸⊂ Z∗ ⊂ Q∗ ⊂ R∗ ⊂ C,
{t ∈ R | t2 − 3t + 2√= 0} = {1, 2}
et la fonction t 7→ t2 − 3t + 2 est définie sur l’ensemble D =
] − ∞, 1] ∪ [2, +∞[.

2) appartenance, inclusion, égalité

appartenance x ∈ E se lit
x appartient à E ou
x est un élément de E, ou moins formellement,
1. L’ordre de R est étendu à R par cette condition, on veut donc aussi −∞ ≤ +∞.

9
A “contient” x .
inclusion B ⊃ A ⇔ A ⊂ B ⇔ (∀x ∈ A, x ∈ B)
Elle signifie donc que tous les éléments de A sont aussi des
éléments de B. Elle se lit :
A est inclus dans B,
A est un sous-ensemble de B,
A est une partie de B, ou moins formellement
B “contient” A.
égalité A = B ⇔ (A ⊂ B et B ⊂ A).
Cela précise la notion d’ensemble : un ensemble A est ca-
ractérisé par ses éléments. Autrement dit, deux ensembles A
et B coı̈ncident lorsqu’ils ont exactement les mêmes éléments,
c’est à dire si on a : ∀x, x ∈ A ⇔ x ∈ B.
Attention à ne pas confondre les symboles ∈ et ⊂. On peut
ainsi écrire
N⊂Z⊂R⊂C
∀a, b ∈ A, {a, b} ⊂ A.
Remarque. l’inclusion est une relation d’ordre entre les
ensembles :
réflexivité A ⊂ A
transitivité (A ⊂ B et B ⊂ C) ⇒ A ⊂ C
antisymétrie (A ⊂ B et B ⊂ A) ⇒ A = B
Mais ce n’est PAS un ordre total, car par exemple {0, 1} et
{1, 2} sont incomparables : aucun des deux n’est inclus dans
l’autre.

3) Opérations sur les ensembles, exemples généraux

intersection A ∩ B = {x | x ∈ A et x ∈ B}
\
Ai = {x | ∀i ∈ I, x ∈ Ai}
i∈I
10
Appartiennent donc à cette intersection ceux qui appar-
tiennent à tous les Ai.
union A ∪ B = {x | x ∈ A ou x ∈ B}
[
Ai = {x | ∃i ∈ I, x ∈ Ai}
i∈I
Appartiennent donc à cette réunion ceux qui appartiennent
à au moins un des Ai.
différence A \ B = {x ∈ A | x ̸∈ B}
Lorsque A ⊂ E, CE (A) = E \ A est le complémentaire
de A dans E. On le note parfois Ac ou A lorsque E est
supposé connu et fixé.
ensemble des parties P(E) = {A | A ⊂ E}
ensemble de fonctions F(E, F ) = {f : E → F } = en-
semble de toutes les applications de E dans F .
ensemble de familles E I = {(xi)i∈I dans E} ensemble de
toutes les familles d’éléments de E indexées par l’ensemble
I. (Se donner une telle famille revient à se donner une ap-
plication i 7→ xi de I vers E.)
produit cartésien A × B = {(x, y) | x ∈ A et y ∈ B}
A × B × C = {(x, y, z) | x ∈ A, y ∈ B et z ∈ C}
E1 × · · · × En = {(x1, . . . , xn) | x1 ∈ E1 et . . .et xn ∈ En}
En = E | × ·{z · · × E} = {(x1, . . . , xn) | x1, . . . , xn ∈ E}
n fois
égalité de couples : (a, b) = (a′, b′) ⇔ (a = a′ et b = b′)
ou de n-uplets :
(a1, . . . , an) =Y (a′1, . . . , a′n) ⇔ (a1 = a′1 et . . .et an = a′n)
Cas général : Ei = {(xi)i∈I | ∀i ∈ I, xi ∈ Xi}.
i∈I
Par exemple, on convient d’ordinaire que
Y
Ei = E1 × E2 × E3
i∈{1,2,3}
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Remarques(∗). Ce produit d’une famille quelconque d’en-
sembles est surtout utilisé pour formuler des énoncés très généraux.
On l’utilise traditionnellement pour formuler l’axiome du choix :
Pour
Y toute famille (Ei)i∈I d’ensembles non vides, le produit
Ei est non vide.
i∈I
la terminologie s’explique en remarquant que choisir un élément
de ce produit (xi)i∈I revient à faire de manière groupée, pour
chaque i ∈ I, le choix d’un élément xi de Xi.
Cette possibilité, lorsque l’ensemble I est infini, peut paraı̂tre
irréaliste (surtout pour de “gros” ensembles tels que I = R) et
il existe des versions affaiblies de cet axiome.
On a cependant pu montrer que l’utilisation de cet axiome ne
rend pas la théorie usuelle des ensembles absurde.
On considère donc d’ordinaire qu’il s’agit la d’un énoncé in-
tuitivement évident d’un point de vue purement théorique, dès
lors qu’on le détache de toute obligation pratique.
Par exemple on peut montrer qu’il est impossible de caractéri-
ser (par une proposition de la théorie des ensembles) un (unique)
élément du produit Y
A
∅̸=A⊂R
autrement dire de caractériser sans ambiguité et pour toute par-
tie non vide A de R, un élément xA ∈ A de A. Mais l’axiome
du choix nous permet de “choisir” une telle famille (xA) et de
nous en servir pour fabriquer ce que bon nous semble.
Les éléments x = (xA)∅̸=A⊂R du produit précédent sont les
familles, indexées par l’ensemble des parties non vides de R,
telles que pour tout sous-ensemble non vide A de R, on ait
xA ∈ A.
Il y a bien d’autres axiomes en théorie des ensembles. L’un
d’entre eux affirme que la “classe” des parties d’un ensemble E
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est bien un ensemble, dénoté P ci-après :
∀E, ∃P, ∀A, A ∈ P ⇔ A ⊂ E
La connaissance de ces axiomes n’est pas au programme.
Remarques. On constate aisément que les opérations de réunion
et d’intersections obéissent à quelques règles pratiques impor-
tantes :
associativité A ∪ (B ∪ C) = (A ∪ B) ∪ C = A ∪ B ∪ C
et A ∩ (B ∪ C) = (A ∩ B) ∩ C = A ∩ B ∩ C
commutativité A ∪ B = B ∪ A, A ∩ B = B ∩ A
distributivité de l’intersection sur la réunion :
A ∩ (B ∪ C) = (A ∩ B) ∪ (A ∩ C).
Par contre la différence A \ B se comporte moins bien.
Il n’est pas raisonnable d’apprendre sans comprendre pour-
quoi elles sont vraies, ces règles et bien d’autres qu’on pourrait
ajouter. Mais dans la pratique, on utilise souvent de mémoire
ces propriétés, qu’on peut vérifier si un doute survient.

B) Notion d’Application
1) Définition

Une application
f :E→F
est définie par la donnée d’un ensemble de départ E (aussi
appelé domaine de définition E = Dom f ), d’un ensemble
d’arrivée F et d’une relation qui associe à tout élément x de
E un unique élément y de F , cet élément y est appelé l’image
de x par f et est noté f (x).
L’application f est donc caractérisée 2 par le triplet (E, F, G),
où G = Gr f est le graphe de f , c’est à dire l’ensemble de
2. En mathématiques formelle, on considère en fait que f = (E, F, G).

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tous les couples de la forme x, f (x) , avec x ∈ E.
Gr f = {(x, f (x) | x ∈ E} = {(x, y) ∈ E × F | y = f (x)}
Deux applications f et g coı̈ncident donc lorsqu’elles ont un
même ensemble de départ E, un même ensemble d’arrivée, et
lorsque : ∀x ∈ E, f (x) = g(x).
Lorsque E et F sont inclus dans R, la représentation
graphique est l’ensemble Γf des points du plan M (x, y) (rap-
porté à un repère orthonormé) avec y = f (x) c’est à dire (x, y) ∈
Gr f .
On considère d’ordinaire qu’une fonction f de E vers F
est une application (souvent définie par une formule), dont l’en-
semble d’arrivée est F et dont l’ensemble de départ Dom f , est
inclus dans E (c’est en général l’ensemble des x ∈ E pour
lesquels la formule est définie). On dit que f est une fonction
numérique si F = R ou C. On dit que f est une fonction
numérique réelle si F = R, et est une fonction numérique com-
plexe si F = C.
Lorsque Dom f est la réunion d’un nombre fini d’intervalles de
R (non réduits à un point), nous dirons que f est une fonction
de la variable réelle.
Une suite numérique (tn)n≥n0 est une famille indexée par
D = {n ∈ Z | n ≥ n0}, et elle peut être identifiée à une fonc-
tion numérique de domaine de définition D. On la note souvent
(tn) quand on ne juge pas utile de préciser le premier indice n0.
Exemples.

La fonction racine carrée x 7→ x est une fonction numérique
réelle de la variable réelle de domaine de définition R+.
x + iy
La formule f (x, y, z) = définit une fonction numérique
3
z
complexe sur R dont le domaine de définition est Dom f =
R × R × R∗ .
14
Remarques.
Pour qu’un sous-ensemble G d’un produit cartésien E × F
soit le graphe d’une application f : E 7→ F , il faut et il
suffit qu’on ait
∀x ∈ E, ∃!y ∈ F | (x, y) ∈ G.
f est alors bien définie par
∀x ∈ E, ∀y ∈ F, y = f (x) ⇔ (x, y) ∈ G.
De même pour que G soit le graphe d’un fonction f de E
vers F , il faut et il suffit que, pour tout x ∈ E, il existe au
plus un y ∈ F tel que (x, y) ∈ G. On dit alors que G est
un graphe fonctionnel et on a alors :
Dom f = {x ∈ E | ∃y ∈ F | (x, y) ∈ G}.

2) Bijection, injection, surjection

Soit f : E → F une application 3. Considérons pour tout


y ∈ F l’équation en x :
f (x) = y.
Elle signifie que x est un antécédent de y par f . Nous allons
lui attacher trois définitions importantes. On dit que f est :
bijective si tout élément y de F admet un et un seul
antécédent par f ,
surjective si tout élément y de F admet au moins un
antécédent par f ,
injective si tout élément y de F admet au plus un anté-
cédent par f .
3. Cette phrase indque que E et F sont des ensembles.

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Dans le cas où f est bijective, l’unique antécédent de y est noté
f −1(y), cela permet de définir une bijection f −1 : F → E ap-
pelée bijection réciproque de f .
On a par définition
f bijective ⇔ (f injective et f surjective)
L’injectivité de f équivaut encore à chacune des propriétes
suivantes (qui se déduisent l’une de l’autre par contraposition) : 4
∀x, x′ ∈ E : f (x) = f (x′) ⇒ x = x′
∀x, x′ ∈ E : x ̸= x′ ⇒ f (x) ̸= f (x′).
On appelle bijection, respectivement surjection, injection toute
application bijective, respectivement surjective, injective.

− → − → −
Exemples Un repère (O, i , j , k ) permet de mettre en bi-
jection R3 avec l’ensemble des points de l’espace, et aussi avec
l’ensemble de ses vecteurs.
Idem pour R2 et le plan.
On a aussi une bijection R2 → C, (x, y) 7→ x + iy.
On a aussi une surjection Z × N∗ → Q, (p, q) 7→ p/q non
injective (donc non bijective) car (2, 3) et (4, 6) ont la même
image.
Une fonction strictement monotone :I → R est injective.
Pour tout ensemble E, on note d’ordinaire
IdE
l’application identique : E → E, x 7→ x. Elle est évidemment
bijective et égale à sa bijection réciproque.

3) Composition

Soient f : E → F et g : F → G deux applications compo-


sables (c’est à dire telles que l’ensemble d’arrivée de f coı̈ncide
avec l’ensemble de départ de g), l’application composée g ◦ f est
4. ∀x, x′ ∈ E est une abréviation de ∀x ∈ E, ∀x′ ∈ E.

16
alors l’application : E → G définie par la formule 5
 
g ◦ f (x) := g f (x) .
Si h : G → H est une troisième application, alors on a la formule
d’associativité :
h ◦ (g ◦ f ) = (h ◦ g) ◦ f =: h ◦ g ◦ f.
l’image de x ∈ E étant h(g(f (x))).
1 Propriétés
Soient f : E → F et g : F → G deux applications.
1) Si f et g sont surjectives, alors g ◦ f aussi.
2) Si f et g sont injectives, alors g ◦ f aussi.
▶ 3) Si f et g sont bijectives, alors g ◦ f aussi et on a
(g ◦ f )−1 = f −1 ◦ g −1.
1 Il découle des définitions que si f : E → F est bijective, alors :
f −1 ◦ f = IdE et f ◦ (f −1) = IdF
Réciproquement, on a le 1) de :
2 Propriétés (réciproque et composition)
Soient f : E → F et g : F → E deux applications.
1) Si g ◦ f = IdE et si f ◦ g = IdF , alors f est bijective de
réciproque g.
2) Supposons f bijective. Si g ◦ f = IdE ou si f ◦ g = IdF ,
alors g = f −1.
Remarque. IdE joue le rôle d’un élément neutre pour la com-
position des applications de E vers E, et la réciproque corres-
pond à un symétrique, ou un inverse, pour cette opération.
5. On lit : g rond f , ou encore g de f .

17
4) Ensemble image, restriction

Soient f : E → F une application, A ⊂ E et B ⊂ F (A et


B sont donc des sous-ensembles de respectivement E et F ).
On définit l’image directef (A) de A par f , par :
f (A) = {f (a) | a ∈ A} = {y ∈ F | ∃x ∈ A, f (x) = y}
et l’image réciproque de B par f , par :
f −1(B) = {x ∈ E | f (x) ∈ B}.
Supposons que f (A) ⊂ B, alors f induit une application x 7→
f (x) de A dans B, parfois notée fA→B , ou fA lorsque B = F
(on dit que fA est la restriction de f à A).
Lorsque f est injective, elle induit une bijection : E → f (E), x 7→
f (x).
On appelle encore ensemble image de f l’ensemble
Im f = f (E) ⊂ F
et donc, par définition f est surjective ssi 6 son ensemble image
égale son ensemble d’arrivée :
f surjective ⇔ Im f = F .
Attention ! Il est essentiel de réaliser que la même formule peut
être utilisée pour constituer des applications distinctes. C’est
aussi ce qui explique qu’une même notation usuelle désignera
avec des contextes différents des objets différents. L’étudiant est
invité à méditer ce fait sur les exemples qui suivent :
— L’application valeur absolue : R → R est définie par deux
formules : |x| = x si x ≥ 0 et |x| = −x si x ≤ 0.
— l’application sinus : R → R n’est ni injective, ni surjective
(et “doublement” donc ni bijective) ;
— l’application sinus : R → [−1, 1] n’est pas injective, mais
elle est surjective ;
6. si et seulement si
18
— l’application sinus : [− π2 , π2 ] → R est injective, mais n’est
pas surjective ;
— l’application sinus : [− π2 , π2 ] → [−1, 1] est bijective, c’est à
dire injective et surjective. Sa bijection réciproque est la fonction
arcsinus : [−1, 1] → [− π2 , π2 ], t 7→ arcsin t.
— La formule f (x) = sin x ne définit PAS d’application de
R+ dans R+ (mais une fonction).

C) Quelques bijections réciproques classiques

Le cours d’amphi sera rapide sur ces questions (qui font aussi
l’objet d’une révision en MTC). Il est cependant conseillé aux
étudiants du parcours 3PE de regarder assez attentivement cette
partie.
Les bijections concernées sont obtenues à l’aide d’un tableau
des variations, et plus précisément justifiées par le résultat d’Ana-
lyse suivant :
3 proposition Soient I un intervalle de R et f une fonction
numérique réelle définie, continue sur I.
1) Pour que f soit strictement croissante sur I, il suffit
qu’en tout t ∈ I (sauf peut-être un nombre fini d’excep-
tions) f soit dérivable avec f ′(t) > 0.
Idem pour strictement décroissante, avec f ′(t) < 0.
Dans la suite on suppose f strictement monotone.
2) Alors l’ensemble image J := f (I) est un intervalle de
R, f induit une bijection de I sur J dont la réciproque
f −1 : J → I est continue et de même monotonie que f .
3) Dans le cas où f est croissante, l’intervalle J est de même
nature que l’intervalle I.
4) Si f : I → J est dérivable en s0 ∈ I et si f ′(s0) ̸= 0,
alors f −1 : J → I est dérivable en t0 = f (s0) ∈ J et on
19
a:
−1 ′ 1 1
f (t0) = ′ =  
f (s0) f ′ f −1(t )
0

1) Logarithme et Exponentielle Néperiens

ex
lim = +∞ et
x→+∞ x
ln x
lim = 0.
x→+∞ x
Logarithme
Z x Néperien
dt
ln x := donc
1 t
ln′(x) = 1/x et ln 1 = 0
(primitive nulle en 1 de
x 7→ 1/x).
Exponentielle
et = exp t = unique solution de
ln x = t. e ≃ 2, 7 1828 1828.
l’exponentielle exp : R →
R∗+ est la bijection
réciproque de la bi-
jection R → R∗+,
x 7→ ln x. exp′(x) = exp(x) et
exp(0) = 1
(solution valant 1 en 0 de l’équation différentielle y ′ = y).
et = exp t, si a > 0 et x ∈ R : ax := ex ln a . √
2 3 −1 1 0 −2 1/2 −1/2 3/2
Exemples : a , a , a , a , a , a , a , a ,a ,a 2
logarithme de base a > 0 : loga(t) = ln t/ ln a = † unique
solution (réelle) de ax = t.
logarithme décimal Log x = log10 x
Log 10 000 = 4, 1 < Log 37 < 2.
exponentielles complexes
20
eit := cos t + i sin t, i2 = −1.
ex+iy := exeiy = ex(cos y + i sin y) = ex cos y + iex sin y.
az := ez ln a si a > 0 et z ∈ C.
Quelques formules :
′ ′ ′ ′
Pour a > 0, az+z = az az , (az )z = azz .
Pour x, y > 0 : ln(xy) = ln x + ln y .

2) Fonctions puissance

On fixe un exposant a ∈ C et
on pose f (t) = ta .
Donc pour t > 0,
f (t) = ea ln t = exp(a ln t).
D’où f ′(t) = ata−1 .
Graphique comparatif
pour a réel : a > 1, a = 1,
0 < a < 1, a = 0 et a < 0.

f est composée de exp avec t 7→ a ln t.


notation g ◦ f (t) := g(f (t)), formules :

(g ◦ f )′(t) = g ′(f (t))f ′(t),


(g ◦ f )′ = (g ′ ◦ f )f ′
Remarque. R+ → R+, t 7→

t est la bijection réciproque de
2
la bijection R+ → √ R + , t →
7 t .
Autrement dit, t est la solu-
tion ≥ 0 de x2 = t.

21
3) tangente

sin t cos t
tan t = = tan(t + π) (coefficient directeur) cot t =

cos t 2 2 ′
sin2 t
tan (t) = 1/ cos t = 1 + tan t, (tangente vérifie y = 1 + y ).
 u ′ u′v − uv ′
=
v v2

4) Fonctions trigonométriques réciproques

arctangente
bijection réciproque et définition de arctan-
′ 1
gente. arctan (t) =
1 + t2
22
arcsinus

bijection réciproque,
déf. de arcsinus.
1
arcsin′(t) = √
1 − t2
(sinuspvérifie
y ′ = 1 − y 2).

arccosinus

bijection réciproque,
déf. de arccosinus.
′ −1
arccos (t) = √
1 − t2
(cosinuspvérifie
y ′ = − 1 − y 2).

5) Cosinus et sinus hyperboliques

(eit = cos t + i sin t et e−it = cos t − i sin t, équivalent à


cos t = 12 (eit + e−it) et sin t = 2i1 (eit − e−it) utiles en trigo-
nométrie)(*)
Parties paire et impaire de l’exponentielle. On veut écrire
et = ch t + sh t avec ch paire et sh impaire, on doit donc aussi
23
avoir
e−t = ch t − sh t d’où
t −t et −e−t
ch t = e +e
2 et sh t = 2 .
Réciproquement ces formules définissent deux fonctions ch et sh
qui conviennent.
On a alors (a + b)2 = a2 + b2 + 2ab
ch2 t − sh2 t = 1 (a − b)2 = a2 + b2 − 2ab
hyperbole x2 − y 2 = 1, i.e. (x − y)(x + y) = 1.
ch′ t = sh t et sh′ t = ch t (y ′′ = y).

t −∞ 0 +∞
ch t + 1 +
sh t −∞ ↗ 0 ↗ +∞
sh t − 0 +
ch t −∞ ↘ 1 ↗ +∞
ex
Courbes de sh, ch et y = 2.

6) tangente et arctangente hyperboliques

sh t
th t = ch t
′ ch2 t−sh2 t
th t = ch2 t = 1 − th2 t
(th solution de y ′ = 1 − y 2).
Courbes de th, argth et y = x.
argth :] − 1, 1[→ R est la bi-
jection réciproque de th : R →
] − 1, 1[.
argth′ t = 1−t 1
2

24
7) argsh et argch

Courbes de sh, argsh et y = x.


argsh : R → R est la bijection
réciproque de sh : R → R.
argsh′ t = √1+t
1
2

Courbe de ch, argch et y = x.


argch : [1, +∞[→ R est la bi-
jection réciproque de ch : R →
[1, +∞[.
argch′ t = √t21−1

8) expression des fonction hyperboliques réciproques (∗)


p
argch t = ln(t + t2 − 1) (on cherche le plus grand s tel que
ch s = t) √
+ t2 +
argsh t = ln(t   1) (ch s = t, es = x > 0)
1 1+t 2s
argth t = ln (t = th s = ee2s−1+1
, e2s = x)
2 1−t  
1 1+t
(∗) de même argcoth t := coth−1 t = ln est définie
2 t−1
ch t
↑ 1 pour |t| > 1. Avec t ̸= 0 ⇒ coth t := .
ch t

25
9) courbes de argcoth et de arccot

D) Raisonnement et quantificateurs

Le cours d’amphi sera sensiblement plus bref dans cette sec-


tion, car les choses seront autant que possible expliquées en si-
tuation, au moment ou elles sont utiles.
Par contre il peut être pratique pour l’étudiant de revenir sur
cette section pour faire le point, ou pour résoudre des problèmes
de raisonnement ou de rédaction.
Il pourra aussi constater que la logique (générale) est souvent
indigeste.

1) Un peu de logique

Une proposition ou une assertion désigne ici un “énoncé”


mathématique susceptible d’être vrai ou faux. Il peut être ex-
primé par une phrase, ou encore par une égalité entre formules
. . .etc.
P , Q et R désignent ici de telles assertions. Les symboles
logiques permettent d’en constituer d’autres.
La logique, décrit aussi quelques règles générales concernant
la véracité des assertions ainsi fabriquées.
• ¬P , ou plus simplement Non P , désigne la négation de P .
Elle signifie que P est fausse.
Souvent pour l’exprimer
√ on utile des sympoles barés ̸⇒ :
1 ̸= 2, R ̸⊂ Q, 2 ̸∈ Q, . . .etc.
• P ∧ Q ou simplement P et Q est alors bien sur, l’assertion
qui exprime que P et Q sont toutes deux vraies.
• P ∨ Q ou simplement P ou q est alors l’assertion qui ex-
prime qu’au moins une des deux assertions P et Q est
vraie (peut-être les deux).
On dit qu’en mathématique formelle, le ou est inclusif.
(Il ne l’est pas toujours dans le langage courant.)
26
• (P ou Non P ) est toujours vrai.
Par contre on ne sait pas toujours laquelle est vraie.
Dans certain cas on peut même prouver qu’aucune des deux
n’est démontrable, sauf si la théorie toute entière est contra-
dictoire. On dit alors que P est indécidable.
• (P et Non P ) est toujours faux.
S’il arrivait qu’on prouve P et non P, pour une certaine asser-
tion, alors la théorie serait contradictoire, ou incohérente
et on pourrait prouver que toutes les assertions (ainsi donc
que leurs négations) sont vraies 7, la théorie serait de peu
d’utilité.
• P ⇒ Q représente (Q ou Non P). On lit P implique Q,
ou encore P entraine Q.
Elle signifie que si P est vraie, alors Q aussi. Elle est auto-
▶ matiqement vérifiée si P est 8 fausse.
On dit aussi que l’implication Q ⇒ P est la Réciproque
de l’implication P ⇒ Q.
• P ⇔ Q représente ((P ⇒ Q) et (Q ⇒ P )). On lit P
équivaut à Q.
Elle signifie que si l’une est vraie, alors l’autre aussi ; autre-
ment dit, P est vraie si et seulement si Q est vraie. Elle
▶ est encore vraie si P et Q sont toutes deux fausses.
Remarques. Dans la vrai vie, on écrit rarement P est vraie,
mais tout simplement P, ou “on a P”.
L’implication n’affirme pas de causalité.
Par exemple l’assertion (0 = 1 ⇒ 2 < 5) est vraie.
Il est conseillé d’utiliser avec parcimonie les signes logiques
⇒, ⇐, ⇔. Les conjonctions donc, or, car, c’est à dire,. . .etc
sont aussi vite écrites et sont presque toujours plus efficaces pour
obtenir une rédaction précise (et surtout correcte car ils sont
7. On aurait en effet à la fois P et P ⇒ Q, donc aussi Q.
8. pour traduire cela, on écrit parfois si jamais P est vraie, alors Q aussi. A comparer ave l’adage : Si Paris était petit,
on pourrait le mettre dans une bouteille.

27
mieux compris).
▶ Notons par exemple que le signe ⇒ n’a PAS le même sens que
le mot donc. Ainsi l’assertion
1=2⇒6>7
est vraie (et peu utile), tandis que ce qui suit
1 = 2 donc 6 > 7
exprime deux contre vérités (une seule suffirait pour rejeter ce
texte), assorties d’une relation de causalité qui mériterait d’être
éclaircie.
De même l’assertion
f est dérivable ⇒ f est continue
n’affirme ni la dérivabilité, ni la continuité de f , tandis que la
phrase
f est dérivable donc f est continue
affirme que f est dérivable, continue, et en plus que la première
propriété a été prise en compte pour affirmer la seconde. N’écrivez
donc pas la première si vous pensez la seconde !
De même, la phrase “On a 1 = 2, c’est à dire 2 = 4” est fausse
alors que l’assertion 1 = 2 ⇔ 2 = 4 est vraie.
Losqu’on cherche à savoir si P est vraie, si on sait que P ⇔ Q
(est vraie), alors on peut si on préfère, étudier la véracité de Q
(c’est intéressant si cette dernière parait simple !) . On a ainsi en
▶ toute généralité :
NON (P ET Q) ⇔ [(NON P ) OU NON Q]
NON (P OU Q) ⇔ [(NON P ) ET NON Q]
P ⇔ NON (NON P )
(P ⇔ Q) ⇔ [(NON P ) ⇔ NON Q]
qu’on écrit d’ordinaire (compte tenu d’usages typographiques)
(P ⇔ Q) ⇔ (NON P ⇔ NON Q)
28
et aussi la règle de raisonnement par transposition
(P ⇒ Q) ⇔ ((NON Q) ⇒ NON P )
Raisonner par transposition consiste, pour prouver l’implication
de gauche, à prouver l’implication de droite, qui est appelée
transposée de celle de gauche.
Et enfin la justification du raisonnement par l’absurde
((NON P ) ⇒ (Q et NON Q)) ⇒ P
qui se déduit de
(Q et NON Q) ⇒ P

Rédactions types (liste non exhaustive !)


P ⇒ Q Pour le prouver, on pourra écrire :
Supposons P (et on prouve Q en utilisant cette informa-
tion).
P ⇔ Q Pour le prouver, on pourra écrire :
Montrons P ⇒ Q (Une fois ceci fait, on attaque la récipro-
que).
P OU Q pour utiliser cette information, on pourra faire
une discussion : Supposons P . . .puis plus loin Supposons
Q. . .
Si dans chaque cas on prouve la conclusion visée, alors elle
est vraie.
Raisonnement par l’absurde Pour prouver P, on sup-
pose NON P et on en déduit une contradiction, c’est à dire
une assertion du type (Q et non Q).
Raisonnement par récurrence soit P (n) une assertion
dépendant de l’entier n ∈ N ou plus généralement de tout
n ∈ Z tel que n ≥ n0, avec n0 ∈ Z. Pour prouver
∀n ≥ n0, P (n)
29
Il suffit de prouver P (n0) et
∀n ≥ n0, P (n) ⇒ P (n + 1).
En fait il suffit même de prouver P (n0) et
∀n ≥ n0, (∀k ∈ Z | n0 ≤ k ≤ n, P (k)) ⇒ P (n + 1).
Autrement dit lorqu’on cherche à prouver P (n + 1) on peut
supposer que P est vraie jusqu’au rang n inclus, et non
pas seulement au rang n.
Remarque Le raisonnement par récurrence est fondé sur la
propriété suivante (plus un raisonnement par l’absurde) :
4 Propriété
Toute partie non vide de N admet un plus petit élément.
La propriété signifie que N est bien ordonné (par sa relation
d’ordre usuelle). On notera que dans R, l’intervalle ]0, 1[ est
majoré, minoré, non vide, mais n’admet ni plus petit, ni plus
grand élément. On peut étendre le raisonnement par récurrence
à tout ensemble bien ordonné (I, ≤). On parle alors plutot de
raisonnement par induction.
Définition par récurrence(∗). Supposons donnés un en-
semble E et pour tous n ∈ N et x0, . . . , xn ∈ E une propriété
P (x0, . . . , xn) telle que
∃!x ∈ E | P (x) et ∀n ∈ N, ∀x0, . . . , xn ∈ E,
P (x0, . . . , xn) ⇒ ∃!xn+1 ∈ E | P (x0, . . . , xn+1)
Alors il existe une unique suite (xn)n∈N dans E vérifiant
∀n ∈ N, P (x0, . . . , xn), on dit aussi qu’elle est définie de proche
en proche par la propriété P .
Pour le justifier, on peut prouver par récurrence sur N ∈ N
l’existence d’un unique commencement (x0, . . . , xN ) vérifiant la
relation de récurrence pour tous n < N . Et l’unicité entraine
alors que ces commencements permettent de constituer l’unique
suite annoncée.
30
Choix par récurrence(∗). Le raisonnement par récurrence et
l’axiome du choix permettent encore de justifier une procédure
de choix particulière dite de choix successifs : Supposons
donnés un ensemble E et pour tous n ∈ N et x0, . . . , xn ∈ E
une propriété P (x0, . . . , xn) telle que
{x ∈ E | P (x)} = ̸ ∅ et ∀n ∈ N, ∀x0, . . . , xn ∈ E,
P (x0, . . . , xn) ⇒ ∃xn+1 ∈ E | P (x0, . . . , xn+1)
Alors il existe une suite (xn)n∈N dans E vérifiant
∀n ∈ N, P (x0, . . . , xn).
On dit que les deux hypothèses nous permettent de choisir
successivement les termes d’une suite ayant la propriété requise.
Pour justifier(∗∗) cette possibilité, on note I = {(x0, . . . , xn) ∈
E n+1 tq n ∈ N et P (x0, . . . , xn)} et pour i = (x0, . . . , xn) ∈ I,
on note Ei = {xn+1 ∈ E | P (x0, . . . , xn+1)}. D’après l’axiome
du choix Y
Ei ̸= ∅
i∈I
on peut donc choisir 9 un élément x = (xi)i∈I de cet ensemble et
un x0 ∈ E vérifiant P (x0), et on définit par récurrence la suite
recherchée (xn)n∈N par son terme x0 et par la relation n ≥ 0 ⇒
xn+1 = x(x0,...,xn).

2) Quantificateurs

Il y a deux quantificateurs, dits universel et existentiel et


un troisième laron 10 :
• ∀ se lit quelque soit ou encore pour tout.
• ∃ se lit il existe.
• ∃! se lit il existe un et un seul.
∀ et ∃ sont reliés par la négation 11 :
• (NON (∃x ∈ E, P (x))) ⇔ (∀x ∈ E | NON P (x))
9. Le choix de la famille x regroupe tous ceux dont on a besoin, et peut-être plein d’autres qui ne serviront pas !
10. il peut être considéré comme une abréviation utilisant les deux précédents et des signes logiques.
11. On applique souvent à la chaine ces automatismes car P peut contenir plussieurs quantificateurs.
31
• (NON (∀x ∈ E, P (x))) ⇔ (∃x ∈ E | NON P (x))
Si E est vide, ∀x ∈ E, P (x) est donc toujours vraie !
Remarques typographiques.
Après ∃x, on utilise indifféremment une virgule, ou la barre |
qui se lit “tel que” et qu’on peut aussi écrire en toutes lettres ou
en abrégé tq. La question est d’être aussi clair que possible. Il
est parfois précieux d’être bref, mais attention à la clareté !
Le x précédé d’un quantificateur doit satisfaire tout ce qui est
à sa droite dans l’assertion (plus ou moins) formelle, c’est à dire
tout ce qui est écrit après ∃x ou après ∀x.
On aurait pu écrire P au lieu de P (x). Le plus souvent bien sur
c’est un énoncé faisant intervenir x. Ce n’est pas indispensable,
ainsi l’assertion un peu bizarre suivante est vraie 12 :
∃x ∈ R | 2 < 3
On écrit souvent
∀x, y ∈ E au lieu de ∀x ∈ E, ∀y ∈ E
∃x, y ∈ E au lieu de ∃x ∈ E, ∃y ∈ E
Souvent on met moins de parenthèse que strictement nécessaire,
pour alléger l’écriture et finalement, gagner en clarté.
On recommande donc aux étudiants d’êtres attentifs d’une
part à la signification spécifique que prennent certains mots
en mathématiques, d’autre part à l’importance particulière ac-
cordée à l’ordre dans lequel sont disposés les mots et les argu-
ments.
Il est peut-être utile ici de rappeler qu’on utilise en mathéma-
tique les lettres (ou d’autres signes) pour représenter des objets
mathématiques, et qu’il est commode, lorsqu’on analyse une as-
sertion mathématique, de distinguer deux sortes de lettres :
— Les lettres “affectées” qui désignent des objets considérés
comme connus, ou au moins “fixés par la pensée”.
12. Ainsi que ∀x ∈ R, 2 < 3, et ∀x ∈ ∅, 2 < 3, mais pas ∃x ∈ ∅ | 2 < 3.
32
— Les lettres “non affectées”, qu’on dit encore “muettes”,
ou “variables”.
Par exemple la lettre x est forcément muette dans les énoncés 13
de l’un des types suivants :
(A) : ∀x ∈ E, on a P (x).
(B) : ∃x ∈ E tel que P (x).
(C) : f est l’application de R dans R définie par la formule
f (x) = 2x + 1.
(D) : f = R → R.
x7→2x+1
(E) : e = lim (1 + 1/x)x
x→+∞
Z 2
dx
(F) : ln 2 = .
1 x
Pour que de telles assertions soient correctes, il faut que dans le
contexte où elles sont écrites, la lettre x ne soit pas une lettre af-
fectée, et alors on obtient une assertion logiquement équivalente,
en remplaçant partout dans la proposition, la lettre x par une
même lettre non affectée.
Par exemple si la lettre t n’est pas une lettre affectée, l’asser-
tion (D) est synonyme de l’assertion f = R → R.
t7→2t+1
Certaines expressions clefs ont pour but d’affecter des let-
tres qui ne l’étaient pas ; c’est le cas par exemple des phrases du
type :
Choisissons un x ∈]a, +∞[.
Fixons un réel x > a.

Posons x := 2 + 3.
l’intérêt de ces expressions est qu’il est souvent plus facile de
raisonner avec des objets fixés qu’avec des lettres muettes.
13. Remarque délicate (on finasse). Dans les deux premiers énoncés, on peut par contre considérer que dans l’assertion
P (x), extraite de l’énoncé considéré, x soit être une lettre affectée par le contexte. Autrement dit P (x) ne peut PAS
contenir de ∃x ni de ∀x.
33
Indiquons pour terminer trois exemples importants de rédac-
tions types :
— Pour prouver la proposition (∀x ∈ R on a x < 1 + x2),
on pourra écrire choisissons x ∈ R (si on parvient à prouver
l’inégalité pour ce x, la propriété sera prouvée).
— Pour utiliser la proposition (A) suivante (∃x ∈ R tel
que x5 − 5x + 1 = 0), on pourra écrire choisissons d’après (A)
un réel x vérifiant x5 − 5x + 1 = 0.
— Pour prouver la proposition (∃x ∈ R tel que x > x2),
on pourra écrire cette proposition est vraie car par exemple
x = 21 convient, ou encore vérifions que x = 12 convient. . .

E) Ensembles finis

Dire qu’un ensemble fini E a exactement n éléments signifie


que si on énumère correctement E en comptant chacun de ses
éléments une et une seule fois, on termine avec le nombre n :
E = {e1, e2, . . . , en}
avec donc i ̸= j ⇒ ei ̸= ej . La donnée d’une telle énumération
équivaut à celle d’une bijection
N∗n → E, n 7→ en
Ceci conduit aux définitions de cette section.

1) Equipotence, cardinal

Un ensemble E est équipotent à un ensemble F si il existe


une bijection : E → F . Nous le noterons E ∼ F . Il s’agit d’une
relation d’équivalence entre les ensembles, autrement dit :
5 Propriétés Soient E, F, G des ensembles, alors
réflexivité E ∼ E
symétrie E ∼ F ⇒ F ∼ E
34
transitivité (E ∼ F et F ∼ G) ⇒ E ∼ G
6 Définition On dit qu’un ensemble est fini s’il existe un en-
tier n tel que E ∼ N∗n. Cet entier est alors unique et appelé
cardinal de E. rappel N∗n = {1, . . . , n} et N∗0 = ∅
Nous le noterons n = card E, ou #E.
Si n ∈ N et si E est un ensemble, l’égalité n = card E signifie
bien sur que E est fini, de cardinal n.
L’unicité dans la définition se prouverait par récurrence.
Remarque. Pour compter le nombre n d’éléments d’un en-
semble fini E on doit l’énumérer correctement :
E = {e1, . . . , en}
chaque élément doit avoir été compté une et un seule fois, disons
que ek a été pointé lorsqu’on a dit “k”. k 7→ ek définit bien une
bijection de N∗n → E.
Un ensemple qui n’est pas fini est dit infini. On dit aussi qu’il
est de cardinal infini. C’est pourquoi la formule
card A ≥ n
signifie que, ou bien A est fini de cardinal ≥ n, ou bien A est
infini (idem pour card A > n).
Tandis que la formule card A ≤ n, resp. card A < n signifie
que A est fini et que son cardinal vérifie l’inégalité.
Exemples.
• n = card N∗n.
• n + 1 = card{0, 1, . . . , n}.
• 2n + 1 = card{−n, −n + 1, . . . , −1, 0, 1, . . . , n}.
• N et R sont infinis, de même que [0, 1].
Les nombreuses propriétés qui suivent devraient paraitre évi-
dentes pour qui (sait compter et) comprend bien le vocabulaire
en jeu. (C’est l’intérêt ici de l’analyse combinatoire, voir si on
comprend, et éventuellement corriger son incompréhension.)
35
2 Elles joueront néanmoins un rôle important en algèbre linéaire..
7 Propriétés Soient E et F deux ensembles. On suppose E
fini. Alors :
1. card E = card F ⇔ E ∼ F .
2. E & F ⇒ card E < card F
3. Soit f : E → F une application.
(a) f injective ⇒ card E ≤ card F .
(b) f surjective ⇒ card E ≥ card F .
(c) Si card E = card F , alors sont équivalentes
i. f est bijective
ii. f est injective
iii. f est surjective
4. Soient n ∈ N et e1, . . . , en ∈ E, alors
(a) E = {e1, e2, . . . , en} ⇒ card E ≤ n.
(b) Si les ei sont deux à deux distincts, alors card E ≥ n.
Preuve. L’argument pour 3b (ou 4a) se généralise en :
8 Propriété Soient E et F deux ensembles (non nécessairement
finis), avec E ̸= ∅, alors sont équivalentes :
1. Il existe une injection f : E → F
2. Il existe une surjection f : F → E
Preuve.
9 Théorème (Cantor) Soit E un ensemble. Alors il n’existe
pas de surjection E → P(E).
Preuve. Soit f : E → P(E). Posons
P = {x ∈ E | x ̸∈ f (x)}.
36
Il suffit de vérifier que P ̸∈ Im f . On procède par l’absurde
en supposant que P = f (a). On a alors la situation absurde
a ∈ P ⇔ a ̸∈ P .
Remarque. Je recommande l’étude de cette preuve, très courte
pour un résulat qui peut paraı̂tre hors de portée, vu sa généralité.
C’est un excellent exemple de démonstration par l’absurde. On
notera aussi son caractère étonamment constructif : la preuve
fournit un exemple d’élément de l’ensemble d’arrivée qui n’a pas
d’antécédent.
En fait la principale difficulté tient non pas au raisonnement,
mais à la situation (une application qui à un élément de E as-
socie un sous-ensemble de E, mais c’est quoi, ça !). A titre d’en-
couragement, ce n’est pas ici une difficulté insurmontable, et
l’un des bénéfices essentiels d’une formation mathématique, est
précisément de développer l’aptitude à appréhender des situa-
tions abstraites, un peu casse-tête. Cette aptitude ne sert pas
qu’en math, en fait.
10 Corollaire Il n’existe pas de suite numérique (tn)n∈N telle
que R = {tn | n ∈ N}.
On dit que R est indénombrable (c’est à dire qu’il n’est pas
inclus dans l’ensemble des termes d’une suite (tn)n∈N). L’argu-
ment montrera plus précisément que [0, 1] est indénombrable.
Remarques(∗). On peut associer à tout ensemble infini un
cardinal (infini) et définir une relation d’ordre total sur les car-
dinaux, de sorte que pour tous ensembles E, F finis ou non,
• card E = card F ⇔ E ∼ F et
• card E ≤ card F ⇔ ∃f : E → F injective
Le théorème de Cantor montre alors que card E < card P(E).
Il n’y a donc pas de plus grand cardinal.
Le corollaire précédent signifie lui que card N < card R. Ce
dernier est appelé la “puissance du continu”.
37
Le plus fameux exemple d’énoncé indécidable, appelé hypothèse
du continu, affirme qu’il n’y a pas de cardinaux strictements
compris entre ces deux la. Autrement dit 14, que toute partie
indénombrable de R est équipotente à R.
On peut bien sur, regretter la présence de propriétés indécida-
bles, et s’imaginer que c’est parce qu’on n’a pas adopté suffisam-
ment d’axiomes. Le théorème d’incomplétude de Cohen affirme
qu’il n’en est rien : toute théorie un tant soit peu raisonnable
comporte des énoncés indécidables, et il donne même une recette
pour en obtenir un, liée au point suivant.
L’un des objectifs qui ont conduit à la mise au point des
théories formelles des mathématiques, était de prouver leur co-
hérence (absence de contradiction). A cet égard, moins on met
d’axiomes, autrement dit plus la théorie est faible, et plus on est
fondé à espérer sa cohérence. On a pu prouver des résultats de
cohérence relative assez remarquables, du type : si cette
théorie très faible (on ne voit pas pourquoi on lui refuserait
crédit !) est cohérente, alors il en est de même de telles autres qui
semblent pourtant autrement audacieuses dans leurs présupposés.
Par contre, le théorème d’incomplétude est lié à une impossibi-
lité de prouver la cohérence de ces théories, même minimalistes.
Dans ces questions, le raisonnement par l’absurde est un fil direc-
teur, car le but du jeu est de construire une assertion paradoxale,
c’est à dire vérifiant P ⇔ Non P (et donc P et Non P ). Par
exemple l’assertion E ∈ E, si E est l’ensemble de tous les en-
sembles A tels que A ̸∈ A. La théorie des ensembles adoptée ne
doit donc par permettre de prouver l’existence de cet ensemble
E!
On peut dire qu’il s’en faut de peu de choses que la théorie en
usage ne permette pas d’écrire de tels paradoxes, tellement elle
permet d’écrire de choses ! Une partie des raisonnement en jeu
14. C’est une reformulation équivalente, même si ce n’est pas évident.

38
dans ces questions, a trouvé une utilisation naturelle en informa-
tique théorique (et aussi à quelques théories mathématiques).

2) Analyse combinatoire

On peut alors établir, souvent à l’aide de récurrences, les pro-


priétés usuelles du cardinal des ensembles finis. On appelle cela
l’analyse combinatoire, utile notamment dans le calcul des pro-
babilités élémentaire, mais aussi par exemple pour analyser la
complexité d’un algorithme.
Nous regroupons ci-après quelques unes de ces propriétés :
11 Propriété Soient A1,. . ., An des ensembles finis deux à deux
disjoints, alors
card(A1 ∪ · · · ∪ An) = card A1 + · · · + card An
12 Propriété Soient E et F des ensembles finis, alors
card(E ∪ F ) + card(E ∩ F ) = card E + card F
13 Propriété Soient A1,. . ., An des ensembles finis, alors
card(A1 × · · · × An) = (card A1)(card A2) · · · (card An)
Si tous les Ai valent A, on obtient
card(An) = (card A)n.
Se justifie par un arbre des possibilités (et par une récurrence).
14 Propriété Soient E et F des ensembles finis de cardinaux
respectifs n et m, alors :
card F(E, F ) = mn
Et effet si E = {e1, . . . , en} est une énumération de E, alors
la donnée d’une application f : E → F équivaut à celle d’un
n-uplet (f (e1), . . . , f (en)) quelconque d’éléments de F , c’est à
dire d’un élément quelconque de F n.
39
15 Propriétés Soient E un ensemble fini de cardinal n et p ∈
N, alors
1. np = card(E p) est le nombre des p-uplets (e1, . . . , ep) d’é-
léments de E.
2. 2n = card P(E)
n!
3. Si p ≤ n, alors Apn := (n−p)! est le nombre des p-uplets
(e1, . . . , ep) d’éléments deux à deux distincts de E (ar-
rangements).
4. n! = Ann est le nombre des permutations de E, c’est à dire
des bijections de E vers E.
5. Si p ≤ n, alors
 
n p n!
= Cn := = card Pp(E)
p p!(n − p)!
est le nombre des parties (combinaisons) à p éléments
de E.
Précisons que factoriel n est :
n! = n(n − 1)(n − 2) · · · (3)(2)(1)
en convenant que 0! = 1! = 1.

40
II Suites numériques et limites
A) Nombres complexes

Un nombre complexe s’écrit de manière unique sous la


forme z = x + iy, avec x, y ∈ R, ce sont les parties réelle
x = ℜ(z) = Ré(z)pet imaginaire y = ℑ(z) = Im(z). Son
module est |z| = x2 + y 2 ≥ |x|, on a aussi |z| ≥ |y|. Son
conjugué est z = x − iy.
On précise ici quelques formules particulièrement importantes
en Analyse.
Quelques formules (pour a, b, a1, . . . , an ∈ C)
• a = 0 ⇔ |a| = 0
• (a + b)(a − b) = a2 − b2
n 1 − an+1
▶ • 1 + a + ··· + a = si a ̸= 1
1−a
(et vaut n + 1 si a = 1)
• (a + b)2 = a2 + 2ab + b2
• (a + b)3 = a3 + 3a2b + 3ab2 + b3
X n
• (a + b)n = Cknak bn−k avec les notations :
k=0
n!
Ckn= = 0! = 1!, n! = 1 × 2 × 3 × · · · × n
k!(n−k)! , 1
on a ainsi
C0n = Cnn = 1, C1n = Cn−1
n = n, 0 ≤ k ≤ n ⇒ Ckn = Cn−kn
a (a)
• a + b = a + b, ab = ab et ( b ) = (b)
• aa = |a|2
• |ab| = |a| |b|
• |a + b| ≤ |a| + |b|
▶ • |a1 + · · · + an| ≤ |a1| + · · · + |an|
▶ • ||a| − |b|| ≤ |a − b| d’où |a + b| ≥ |a| − |b|
exponentielles complexes. Pour x, y ∈ R on a :
ex+iy := exeiy = ex(cos y + i sin y)
41
pour a > 0, z ∈ C on a
az := ezln a
Fonctions hyperboliques. On pose :
z −z ez −e−z
ch z := e +e
2 , sh z := 2 , th z := sh z
ch z
Equation polynomiale.
• Racines n-ièmes de l’unité : Pour n ≥ 2 les n solutions de
z n = 1 sont les ei2kπ/n pour k entier, 0 ≤ k < n.
• Racines n-ièmes de z = reiα (racines carrées si n = 2) :
Pour n ≥ 2 et r > 0 les n solutions de z n = reiα sont les
r1/neiα/nei2kπ/n pour k entier, 0 ≤ k < n.
• Cas n = 2
• Equation de degré deux. Pour a, b, c ∈ C avec a ̸= 0,
les solutions de
az 2 + bz + c
−b ± ω
sont où ω est une des deux solutions opposées de
2a
ω = ∆ et où ∆ := b2 − 4ac est le discriminant de
2

l’équation.
Théorème de D’Alembert Gauss (voir Th50 page 60).

B) Notion de limite
1) Limite d’une fonction numérique

On peut distinguer quatre types de questions sur les limites (de plus en
plus difficiles) :
• Utilisation des opérations et des limites usuelles (données par le cours).
• Utilisation de majoration, minoration, encadrement.
• utilisation de suites auxiliaires.
• utilisation de la définition (avec les epsilon).
Evidemment ce dernier type est utilisé quand on n’a pas plus simple. L’utilisa-
tion de suite auxiliaire est une technique équivalente, souvent mieux comprise,
mais reste difficile.
Dans cette longue section 15, nous décrivons principalement les définitions
15. le cours d’amphi sera plus bref.
42
rigoureuses se rapportant aux différents types de limite que l’étudiant doit
connaı̂tre à ce niveau, avec une attention particulière sur le cas ds suites.
L’une des difficultés est liée au grand nombre de cas à considérer, aussi
l’un des premiers objectifs que l’étudiant pourra se donner est la capacité
de restituer ces définitions, non pas par coeur et à la virgule près, mais au
contraire comme la traduction dans un cas particulier de l’idée générale
suivante :
▶ ℓ = lim f (t) signifie qu’on peut garantir que f (t) est aussi proche
t→a
qu’on le désire 16 de ℓ, simplement en imposant à t d’être suffisam-
ment proche de a.
A vrai dire pour qu’on puisse considérer une telle limite il faut que f soit
définie arbitrairement près de a. Cela revient à dire qu’il existe au moins
une suite (tn) dans Dom f de limite a.
Par exemple l’assertion f (t0) = lim f (t), qui exprime la continuité de
t→t0
f en t0, s’écrit :
Pour tout réel ε > 0, il existe un réel η > 0 tel que tout t ∈ Dom f
vérifie l’implication : |t − t0| < η ⇒ |f (t) − f (t0)| < ε.
On utilise souvent une écriture condensée des critères de convergence,
ainsi l’assertion précédente s’écrit encore :
∀ε > 0 ∃η > 0 tq ∀t ∈ Dom f : |t − t0| < η ⇒ |f (t) − f (t0)| < ε.
Malgré sa brièveté, il s’agit d’un énoncé assez compliqué ; pour aider à
comprendre sa signification, on le compare parfois au boniment suivant :
Donnez moi n’importe quel réel ε > 0, aussi petit soit-il, ε = 10−5
par exemple, et bien moi, après que vous m’ayez présenté ce ε, je vous
trouverai un réel η > 0 tel que pour tout t ∈ dom f , on ait :
|t − t0| < η ⇒ |f (t) − f (t0)| < ε
Limites finies : (f numérique, ℓ ∈ R ou C)
• ℓ = lim f (t) ⇔ ∀ε > 0, ∃η > 0, ∀t ∈ Dom f :
t→t0
|t − t0| < η ⇒ |f (t) − ℓ| < ε
• ℓ = lim f (t) ⇔ ∀ε > 0, ∃A > 0, ∀t ∈ Dom f :
t→+∞
t > A ⇒ |f (t) − ℓ| < ε
Limites infinies (lorsque f est réelle) :
16. Sans aller qauand même jusqu’à légalité !

43
• +∞ = lim f (t) ⇔ ∀R > 0, ∃η > 0, ∀t ∈ Dom f :
t→t0
|t − t0| < η ⇒ f (t) > R
• +∞ = lim (t) ⇔ ∀R > 0, ∃A > 0, ∀t ∈ Dom f :
t→+∞
t > A ⇒ f (t) > R
• −∞ = lim f (t) ⇔ +∞ = lim −f (t) (si a ∈ R)
t→a t→a
Limites en −∞ : (b finie ou infinie)
b = lim f (t) ⇔ b = lim f (−t)
t→−∞ t→+∞

Remarques. On utilise souvent d’autres formulations équivalentes, ainsi


une caractérisation de la première limite est :
∀ε > 0, ∃η > 0, ∀t ∈]t0 − η, t0 + η[∩ Dom f, |f (t) − f (t0)| < ε
On peut bien sur utiliser celle qu’on préfère. (Surtout si on comprend bien
leur équivalence !)
Pour ce qui concerne la rédaction, on prendra garde au fait que la nota-
tion  
lim f (t) ou lim f
t→a a
sert à désigner deux choses bien différentes : d’une part un problème, celui de
la convergence de f en a ; d’autre part une valeur, lorsque cette valeur existe.
On pourra (entre autres) utiliser le résultat suivant :
16 Théorème (composition de limites)
Soient f et g deux fonctions numériques, a, b ∈ [−∞, +∞] et ℓ ∈
C ∪ {−∞, +∞}. On suppose encore que f est à valeurs réelles et que la
composée g ◦ f est définie arbitrairement près de a. Alors on a l’impli-
cation :
   
b = lim f (s) et ℓ = lim g(t) ⇒ ℓ = lim g f (s)
s→a t→b s→a

On dit parfois qu’on a fait, dans la troisième limite, le changement de


variables t = f (s).
On observera encore que l’énoncé précédent permet de traiter des limites
▶ du type lim g(un) ou encore du type lim vun .
n→∞ n→∞
Sa preuve repose sur une discussion suivant que a, b et ℓ sont finis ou
infinis. Cela fait 8 ou même 27 cas !
44
C’est un très bon exercice que de chercher la preuve pour un ou deux cas,
par exemple celui où a, b et ℓ sont tous les trois finis.
Rappelons enfin que la fonction numérique f ′ dérivée d’une fonction
numérique f de la variable réelle est définie par la formule :
f (t) − f (t0) f (t0 + s) − f (t0)
f ′(t0) := lim = lim
t→t0 t − t0 s→0 s
f est dérivable en t0 lorsque f ′(t0) admet une valeur finie, dans ce cas f
est continue en t0. Autrement dit :
dérivable ⇒ continu

2) Limite d’une suite numérique

17 Définition Soient (un)n≥n0 une suite numérique complexe et ℓ ∈ C,


alors par définition 17 :
ℓ = lim un ⇔ ∀ε > 0, ∃N ∈ N | ∀n ≥ N, |un − ℓ| < ε
n→+∞
Cela vaut donc aussi pour les suites numériques réelles. On dit que la suite
(un) est convergente si elle admet une limite finie, et divergente sinon.
Exemple On dit que la suite (un) est stationnaire en ℓ ∈ C si il existe
un rang N tel que n ≥ N ⇒ un = ℓ. C’est donc le cas si (un) est constante
de valeur ℓ. Cela entraine bien sur que (un) est de limite ℓ.
18 Propriété (unicité de la limite finie)
Soit (un)n≥n0 une suite numérique, alors il existe au plus un ℓ ∈ C tel
que ℓ = lim un.
n→+∞
Preuve On raisonne par l’absurde en supposant que ℓ ̸= ℓ′ sont deux limites
finies de (un) et on considère ε = |ℓ − ℓ′|/2 > 0
On peut choisir N tel que |uN − ℓ| < ε et |uN − ℓ|′ < ε d’où |ℓ − ℓ′| =
|ℓ − uN + uN − ℓ′| ≤ |ℓ − uN | + |uN − ℓ′| < 2ε = |ℓ − ℓ′|, ce qui est bien
absurde.
19 Propriété Soient (un)n≥n0 une suite numérique complexe et ℓ ∈ C,
alors :
ℓ = lim un ⇔ 0 = lim un − ℓ ⇔ 0 = lim |un − ℓ|
n→+∞ n→+∞ n→+∞
et donc
0 = lim un ⇔ 0 = lim |un|
n→+∞ n→+∞
17. équivalente à celle obtenue en considérant (un ) comme une fonction.
45
On veut donc que la distance |un − ℓ| soit de limite nulle. On observera que
cette distance constitue une suite numérique réelle.
Preuve Le premier point découle de la formule
|un − ℓ| = |(un − ℓ) − 0| = ||un − ℓ| − 0|.
le second en découle en prenant ℓ = 0.
20 Définition Soit (un)n≥n0 une suite numérique réelle, alors par définition :
• +∞ = lim un ⇔ ∀R > 0, ∃N ∈ N | ∀n ≥ N, un > R.
n→+∞
• −∞ = lim un ⇔ +∞ = lim −un.
n→+∞ n→+∞

21 Propriété (unicité de la limite)


Soit (un)n≥n0 une suite numérique réelle, alors il existe au plus un ℓ ∈ R
tel que ℓ = lim un.
n→+∞
(un) peut donc converger, diverger vers +∞, diverger vers −∞, ou encore
être sans valeur.
Preuve de la propriété. Il reste essentiellement deux cas à éliminer :
+∞ et −∞ sont limites (prendre R = 0), et
+∞ et ℓ ∈ R sont limites : prendre R = |ℓ| + 1.
22 Propriété (limite et ordre)
Soient (un) et (vn) deux suites numériques réelles. On suppose qu’il existe
n0 ∈ N tel que
n ≥ n0 ⇒ un ≤ vn
Alors :
1. Si les limites de (un) et (vn) admettent des valeurs respectives ℓ et
ℓ′, alors ℓ ≤ ℓ′.
2. lim un = +∞ ⇒ lim vn = +∞.
n→+∞ n→+∞
3. lim vn = −∞ ⇒ lim un = −∞.
n→+∞ n→+∞
3 Preuve. 2 et 3 sont évidentes, on peut donc se contenter pour 1, du cas où ℓ et
ℓ′ sont finies. On peut raisonner par l’absurde et considérer ε = (ℓ−ℓ′)/2 > 0.
23 Propriété (règle des gendarmes)
Soient (un), (vn) et (wn) trois suites numériques réelles. On suppose qu’il
existe n0 ∈ N tel que
n ≥ n0 ⇒ un ≤ vn ≤ wn
46
et que lim un = lim vn = ℓ ∈ R.
n→+∞ n→+∞
Alors on a aussi lim vn = ℓ.
n→+∞
Preuve. On peut se limiter au cas où ℓ ∈ R. Soit alors ε > 0, on peut
choisir des entiers N et N ′ tels que
n ≥ N ⇒ |un − ℓ| < ε et n ≥ N ′ ⇒ |wn − ℓ| < ε.
Considérons l’entier M = max(N, N ′, n0) et soit n ≥ M , alors ℓ − ε <
un ≤ vn ≤ wn ≤ ℓ + ε et on a donc bien |vn − ℓ| < ε.
Remarque. On convient d’ordinaire pour toute suite numérique (réelle ou
complexe) que :
lim un = ∞ ⇔ lim |un| = +∞
n→+∞ n→+∞

Mais aucune connaissance n’est exigible sur cette définition.


On dit qu’une suite numérique (un)n≥0 est bornée si
∃R ∈ R | ∀n ≥ n0, |un| ≤ R.
On dit qu’un tel R majore la suite (|un|) ou que (un) est bornée par R.
24 Propriété
Toute suite numérique (un)n≥0 convergente est bornée.
Preuve. On choisit N tel que n ≥ N ⇒ |un − ℓ| < 1 et on observe que
(un) est bornée par
R = max(|un0 |, . . . , |uN −1|, |ℓ| + 1).
25 Propriété Soient (un) et (vn) deux suites numériques. On suppose (un)
de limite nulle et (vn) bornée.
Alors le produit (unvn) est de limite nulle.
Preuve.
Si (vn) est bornée par R > 0, on utilise |unvn| ≤ R|un|.
26 Propriétés (opérations sur les limites)
Soient (un) et (vn) deux suites numériques convergentes, de limites res-
pectives ℓ et ℓ′. Alors
1. lim un + vn = ℓ + ℓ′.
n→+∞
2. lim unvn = ℓℓ′.
n→+∞
47
3. ℓ′ ̸= 0 ⇒ lim un/vn = ℓ/ℓ′.
n→+∞

27 Théorème (limites de nombres complexes)


Soient (un) une suite numérique complexe et ℓ ∈ C. Posons un = an + ibn
et ℓ = a + ib, avec an, bn, a, b ∈ R. Alors
 
ℓ = lim un ⇔ a = lim an et b = lim bn
n→+∞ n→+∞ n→+∞

En conséquence la limite d’une suite réelle convergente est aussi réelle. On


dit que R est fermé dans C.
Preuve.
⇐ résulte des opérations sur les limites.
⇒ résulte de |an − a| ≤ |un − ℓ| et |bn − b| ≤ |un − ℓ|.
28 Propriétés (cas des suites réelles)
Soient (un) et (vn) deux suites numériques réelles, de limites respectives
ℓ et ℓ′ ∈ R. Alors on a encore :
1. lim un + vn = ℓ + ℓ′.
n→+∞
2. lim unvn = ℓℓ′.
n→+∞
3. ℓ ̸= 0 ⇒ lim un/vn = ℓ/ℓ′.

n→+∞
4. Si (vn) est > 0 de limite nulle, alors +∞ = lim 1/vn.
n→+∞
Avec les conventions si ℓ ∈ R : ℓ + (+∞) = +∞, ℓ/(+∞) = 0, ℓ > 0 ⇒
ℓ(+∞) = +∞, . . .etc,
et en supposant qu’on est pas dans un cas indéterminé (+∞)+(−∞) ;
0(±∞), ±∞±∞ , . . .etc.
Remarques. On a les mêmes règles pour les fonctions numériques (avec
mêmes cas particulier pour le cas numérique réel).
On peut aussi ajouter les formes indéterminées (pour les fonctions uv =
ev ln u) : 00, (+∞)0, 1±∞.
Certaines indéterminations, levées par le cours sont suggérées par
la règle : L’exponentielle l’emporte sur la puissance qui l’emporte sur le
logarithme (donc l’exponentielle l’emporte aussi sur le logarithme !). Ainsi
pour a > 1, b > 0 et n ∈ N∗, on a

tb ln t
0 = lim t = lim b = lim tb ln t = lim tnat
t→+∞ a t→+∞ t t→0+ t→−∞
48
Voici encore deux nouvelles indéterminations levées par le cours :
29 Propriété Pour tout a > 0 on a
n! an
0 = lim n = lim
n→+∞ n n→+∞ n!

Le résultat suivant montre que l’étude des limites de fonctions peut se


ramener à celles de suites.
30 Théorème (Critère séquentiel de convergence)
Soient f une fonctions numérique complexe de la variable réelle et a ∈
[−∞, +∞]. On suppose l’un des deux cas
•ℓ∈C
• ℓ = ±∞ et f est réelle.
Alors les deux propriétés suivantes sont équivalentes :
1. ℓ = lim f (t)
t→a
2. Pour toute suite (tn) dans Dom f de limite a, on a ℓ = lim f (tn).
t→a
Remarques. 1 ⇒ 2 est un cas particulier du théorème de composition des
fonctions numériques.
Cette équivalence pourrait servir de définition de 1 et elle illustre l’impor-
tance des suites.
Souvent on utillise 1 ⇒ 2 pour prouver que 1 est faux, voire que la lim f
a
n’admet pas de valeur.
Preuve. Pour 2 ⇒ 1, il reste encore 4 à 9 cas particuliers à envisager, tous
similaires. On se bornera à traiter l’équivalence dans un cas, par exemple a
et ℓ sont finis.
Ce n’est pas très difficile si on pense à raisonner par contraposer, et à
“choisir” ce qui existe !

C) Suites récurrentes
1) Domaine de définition

On s’intéresse ici aux suites (un)n≥0 définies par des conditions du type :
u0 = a donné et ∀n ∈ N, un+1 = f (un) .
Le premier problème, purement “ensembliste”, est de savoir si la suite sera
bien définie pour tout entier n ≥ 0 ; c’est le cas dans les trois situations
suivantes :
49
• f est une application : A → A et a ∈ A. On a dans ce cas :
un = f n(a) = f| ◦ ·{z
· · ◦ f}(a)
n fois
• a ∈ A, où A est une partie stable par f , c’est à dire que A ⊂ Dom f
et f (A) ⊂ A. On peut se ramener au cas précédent en considérant la
restriction fA de f à A → A.
• Supposons que pour deux entiers N ≥ 0 et P ≥ 1, la suite soit définie
jusqu’au rang N + P , avec uN +P = uN . Alors elle est partout définie et
ses termes se calculent par division euclidienne : uN +P q+r = uN +r .
On a aussi pour tous entiers n ≥ N et m ≥ 0,
un = un+P = un+mP .
On dit dans ce dernier cas que (un)n≥N est P -cyclique, ou P -périodique ;
ou encore que la suite (un)n≥0 est ultimement P -périodique.
Si N + P est le premier indice pour laquelle la suite ne prend pas une
nouvelle valeur, alors P est LA période ultime de la suite. Si en plus f est
injective, alors N = 0 et la suite est périodique de période P .
Ici la partie stable est A = {uN , uN +1, . . . , uN +P −1}, dès qu’on y arrive
on sait qu’on pourra poursuivre indéfiniment.

2) Cas des suites arithmétiques ou géométriques

Soit r ∈ C.
31 Exemple Si f (z) = z + r, on a donc un+1 = un + r .
On dit que (un) est une suite arithmétique de raison r, on a alors
un = u0 + nr
et pour 0 ≤ m < n on a égalité des moyennes : :
n
1 X um + un
uk = .
n−m+1 2
k=m

On retient en particulier (r = 1, m = 0 = u0) :


n
X n(n + 1)
1 + 2 + 3 + ··· + n = k= .
2
k=0

50
32 Exemple Si f (z) = rz, on a donc un+1 = run .
On dit que (un) est une suite géométrique de raison r, on a alors
un = rnu0
et pour 0 ≤ m < n :
n
X rm − rn+1
uk = u0 .
1−r
k=m
De plus
• |r| < 1 ⇒ lim rn = 0,
n→+∞
• r = 1 ⇒ un = u0, la suite est constante,
• si |r| = 1, et r ̸= 1, alors, la suite (rn) est divergeante et bornée,
• |r| > 1 ⇒ lim |rn| = +∞, donc (rn) est divergente
n→+∞
• r ∈]1, +∞[⇒ lim rn = +∞,
n→+∞
On peut encore observer que si rp = 1, alors la suite (rn) est périodique
de période p, c’est à dire que :
∀n ∈ N, un+p = un.
Remarque.
Dans chacun des deux cas précédents, si u0 et r sont réels, alors (un) aussi.

3) Recherche d’une éventuelle limite

Le réflexe à avoir est de représenter graphiquement f (si possible), avec


la première bissectrice, en s’intéressant aux points fixes de f , et aussi lorsque
u0 = a est connu de tracer le (début du) chemin polygonal qui représente
(un).
33 Propriété Supposons maintenant que la suite récurente est définie pour
tout n ∈ N, que f est une fonction numérique réelle de la variable réelle,
continue sur une partie A ∋ a = u0 de R et stable par f , et supposons
que (un) converge vers ℓ ∈ A ; alors on a :
ℓ = f (ℓ)
autrement dit, ℓ est un point fixe de f .
Preuve.
Par continuité en ℓ de f et par composition de limites, on a
f (ℓ) = lim f (t) = lim f (un) = lim un+1 = ℓ.
t→ℓ n→+∞ n→+∞
51
Remarque.
En fait on n’a besoin de la continuité de f que en ℓ, de plus il est utile de
connaı̂tre la preuve car souvent on doit l’adapter au cas étudié (par exemple
pour les suites numériques complexes, où lorsque la limite vaut en fait ±∞).

D) Densité dans R de Q et R \ Q
Rappelons que N est bien ordonné, c’est à dire que toute partie non
vide de N admet un plus petit élément. C’est cette propriété qui fonde le
raisonnement par récurrence.
On appelle encore propriété d’Archimède le fait que tout nombre réel
x est majoré par au moins un entier naturel n.
Cela revient à dire que :
∀ε > 0, ∀y ∈ R, ∃n ∈ N | y ≤ nε
et cela nous rappelle qu’à force d’additionner de petits nombres, on peut en
obtenir de gros...
Si x ∈ R, on appelle partie entière de x l’unique n ∈ Z vérifiant
n ≤ x < n + 1,
on la notera souvent E(x). Ainsi
E(π) = 3 et E(−π) = −4.
Rappelons encore qu’en vertu d’un raisonnement arithmétique (par l’ab-
surde) √
2 ̸∈ Q,
autrement dit ce nombre est
√ irrationnel. On en déduit facilement pour tout
rationnel non nul r que r 2 ̸∈ Q. Cela permet alors de prouver :
34 Propriété (densité de Q et R \ Q)
1. Pour tous réels a < b, on peut trouver r ∈ Q et y ∈ R \ Q tels que
a < r < b et a < y < b.
2. ∀x ∈ R, ∃(rn) dans Q et (yn) dans R \ Q tels que
lim rn = x = lim yn.
n→+∞ n→+∞

52
On retient encore que tout intervalle ouvert non vide de R contient un 18
rationnel et un irrationnel.
Cela implique en particulier qu’il n’est pas possible de représenter correcte-
ment le sous ensemble Q de la droite réelle, puisqu’il y est présent “partout”
ainsi que son complémentaire.
Preuve de la propriété. On peut prendre
E(nx)
rn =
n
car E(nx) ≤ nx < E(nx) + 1 donc rn ≤ x < rn + n1 d’où 0 ≤ x − rn < 1/n. √
Ensuite si (r′n) est une suite de rationnels de limite √x2 , alors yn = r′n 2
convient. Pour 1) on peut prendre x = a+b 2 , ε = (b − a)/2 > 0 et alors, dès
que n est assez grand on a |x − rn| < ε et |x − yn| < ε. Alors r = rn et
y = yn conviennent.
Remarque. Si n = 10q , le rn choisi dans la preuve est l’approximation
décimale par défaut et d’ordre q, du nombre x.
On appelle nombre décimaux ceux qui sont de la forme 10pq avec p ∈ Z et
q ∈ N. Ce sont donc des nombres rationnels, et leur ensemble est déjà dense
dans R.

E) Bornes supérieure ou inférieure


1) Vocabulaire lié à l’ordre

Il est très volumineux, mais assez facile à retenir. En amphi, on évoquera


brievement les définitions générales de cette section, et on se concentrera
plutôt sur le cas de (R, ≤).
35 Définitions (relation dans un ensemble)
Une relation R dans un ensemble E est caractérisée par la donnée
(E, Gr R) de E et de son graphe Gr R ⊂ E × E (qui est à priori un
sous-ensemble quelconque de E × E) :
∀x, y ∈ E, xRy ⇔ (x, y) ∈ Gr R
Rappelons alors que R est (sur E) :
réflexive si ∀x ∈ E, xRx
symétrique si ∀x, y ∈ E, xRy ⇔ yRx
18. au moins, une infinité en fait
53
antisymétrique si ∀x, y ∈ E, (xRy et yRx) ⇒ x = y
transitive si ∀x, y, z ∈ E, (xRy et yRz) ⇒ xRz
36 Définitions (ordre)
On dit que ≤ est une relation d’ordre sur un ensemble E si c’est une
relation sur E qui est réflexive, antisymétrique et transitive. On dit alors
que (E, ≤) est un ensemble ordonné.
On dit que c’est une relation d’ordre total (sur E) si en plus, tous
les éléments de E sont comparables :
∀x, y ∈ E : x ≤ y ou y ≤ x
On dit alors que (E, ≤) est un ensemble totalement ordonné.
Ordre strict : On convient que x < y ⇔ (x ≤ y et x ̸= y).
la relation x ≤ y signifie que x minore y et que y majore x (pour ≤).
Soient (E, ≤) un ensemble ordonné et A ⊂ E, on dit que :
• a majore A (ou est un majorant de A) si pour tout t ∈ A on a a ≥ t.
• a minore A (ou est un minorant de A) si pour tout t ∈ A on a a ≤ t.
• a est le plus grand élément de A (on le note a = max(A)) si a ∈ A et
si a majore A.
• a est la borne supérieure de A (on le note a = sup A) si a est le
plus petit des majorants de A (dans E), autrement dit : a majore A et
minore tout majorant de A.
• a est le plus petit élément de A (on le note a = min(A)) si a ∈ A et si
a minore A.
• a est la borne inférieure de A (on le note a = inf A) si a est le
plus grand des minorants de A (dans E), autrement dit : a minore A
et majore tout minorant de A.
• A est majorée si elle admet au moins un majorant (fini).
• A est minorée si elle admet au moins un minorant (fini).
• A est bornée si et seulement si A est majorée et minorée.
• a est minimal dans A si a ∈ A et si ∀b ∈ A, b ̸< a.
• a est maximal dans A si a ∈ A et si ∀b ∈ A, b ̸> a.
Ces deux dernières définitions sont surtout utilisées lorsque l’ordre n’est pas
total, car si non elles coı̈ncident avec plus petit et plus grand élément.
On dit encore que sup A est le meilleur majorant de A tandis que inf A
est le meilleur minorant de A.
54
un plus petit élément est toujours minimal. La réciproque est vraie lorsque
l’ordre est total.
Exemples. Soit I =]0, 1[⊂ R, alors (pour l’ordre usuel de R) :
1. I est borné, non vide, mais n’admet ni plus grand, ni plus petit élément,
mais sup I = 1 et inf I = 0.
2. Z n’est ni majorée, ni minorée.

2) Ordre sur R

Voici deux propriétés importantes de la droite numérique R :


37 Théorème et définition (borne supérieure)
Soient A une partie non vide de R.
Si A est majorée, alors l’ensemble de tous les majorants de A admet
un plus petit élément, appelé borne supérieure de A et noté sup(A). Si A
n’est pas majorée, sup A := +∞
Supposons que sup(A) ̸∈ A, alors il existe une suite strictement crois-
4 sante (an )n∈N dans A et convergeant vers sup(A).

Dans tous les cas, sup A est donc le plus petit M ∈ [−∞, +∞] majorant A,
on dit aussi que c’est le “meilleur” majorant.
Le premier point peut se déduire de la convergence des suites croissantes
majorées en considérant
tn = un/2n où un = max{k ∈ Z | k/2n ne majore pas A}.
Réciproquement il entraine facilement la convergence des suites monotones
voir th. 43. On a de même :
38 Propriété et définition (borne inférieure)
Soient A une partie non vide de R.
Si A est minorée, alors l’ensemble de tous les minorants de A admet
un plus grand élément, appelé borne inférieure de A et noté inf(A). Si A
n’est pas minorée, inf A := −∞
Supposons que inf(A) ̸∈ A, alors il existe une suite strictement décrois-
sante (an)n∈N dans A et convergeant vers inf(A).
On peut se ramener à la proposition précédente et vérifier la formule
inf A = − sup −A.
Application :
55
39 Théorème (des valeurs intermédiaires)
Soient a < b des réels, f une fonction numérique réelle définie et conti-
nue sur [a, b] et v ∈]f (a), f (b)[. Alors il existe t ∈]a, b[ tel que f (t) = v.
La preuve de ce théorème important utilise principalement l’existence de la
borne supérieure. Pour mettre en évidence la première solution τ de f (t) = v,
on definit, lorsque f (a) < f (b) :
τ = inf{t ∈ {a, b] | f (t) ≥ v}
et on prouve qu’on a bien f (τ ) = v.
40 Exemple Si I est un intervalle non vide de R délimité par a et b, avec
−∞ ≤ a ≤ b ≤ +∞, alors inf I = a et sup I = b.
Ainsi inf(]0, 1]) = 0 et sup(] − ∞, 3[) = 3.
41 Définitions Soit f une fonction numérique réelle définie sur un en-
semble E, on dit que f est respectivement majorée, minorée, bornée sur
E si l’ensemble image f (E) est respectivement majoré, minoré, borné ;
Si E est non vide, on pose
sup f (x) := sup f (E) et inf f (x) := inf f (E).
x∈E x∈E

Voici quelques conséquences immédiates des définitions (pour ∅ ̸= A ⊂


R) :
• sup(A) ∈] − ∞, +∞] et inf(A) ∈ [−∞, +∞[,
• sup(A) ∈ A ⇔ sup(A) = max(A),
• inf(A) ∈ A ⇔ inf(A) = min(A),
• A est majorée si et seulement si sup(A) < +∞,
• A est minorée si et seulement si inf(A) > −∞.
42 Théorème et définition (fonction complexe bornée) Soit f = α+
iβ une fonction numérique complexe définie sur un ensemble E, avec α
et β réelles. Alors sont équivalentes :
1. |f | est majorée sur E
2. α et β sont bornées sur E
Lorsque ces conditions sont réalisées, on dit que f est bornée sur E. Si
en plus E ⊂ C et f (z) = z, on dit que E est une partie bornée de C.

56
Soit f une fonction numérique réelle définie sur I ⊂ R. On dit que f est
respectivement croissante, strictement croissante, décroissante, stricte-
ment décroissante, sur I si pour tous s, t ∈ I tels que s < t on a respective-
ment f (s) ≤ f (t), f (s) < f (t), f (s) ≥ f (t), f (s) > f (t). On dit que f est
respectivement monotone, strictement montone, sur I, si elle y est crois-
sante ou décroissante, respectivement strictement croissante ou strictement
décroissante. On ne précise pas toujours I lorsque I = Dom f .
Ce vocabulaire s’applique aussi aux suites numériques réelles (tn)n≥n0 .
Pour qu’une telle suite soit respectivement croissante, strictement croisante,
décroisante, strictement décroissante il (faut et il) suffit que pour tout entier
n ≥ n0, on ait respectivement tn ≤ tn+1, tn < tn+1, tn ≥ tn+1, tn >)tn+1,
Pour examiner ce critère, on étudie souvent le signe de tn+1 − tn.
43 Théorème (suites monotones)
Soit (tn) une suite numérique réelle.
1. Si (tn) est croissante, alors lim tn = sup tn.
n→+∞ n∈N
2. Si (tn) est décroissante, alors lim tn = inf tn.
n→+∞ n∈N
On a plus généralement :
44 Théorème (fonctions monotones)
Soient ∅ =
̸ I ⊂]a, b[⊂ R avec a = inf I et b = sup I, et soit f : I → R.
1. Si f est croissante (sur I), alors
lim f (t) = sup f (t) et lim f (t) = inf f (t).
t→b t∈I t→a t∈I

2. Si f est décroissante, alors


lim f (t) = inf f (t) et lim f (t) = sup f (t).
t→b t∈I t→a t∈I

En particulier, une fonction monotone sur I admet des limites à droite et à


gauche en tout x ∈ I où cela a un sens (et donc en tout x ∈ I si I =]a, b[).

F) Limites inférieure ou supérieure (de suite)


Soit (tn)n≥n0 une suite numérique réelle.
On va définir deux versions affaiblies de la notion de limite de (tn), qui ont
l’avantage d’admettre toujours des valeurs, éventuellement infinies.
57
Ce sont des outils de rédaction ou de raisonnement assez efficaces (certaines
preuves du cours illustreront ceci), mais qui requièrent peut-être une certaine
maturité. Leur étude n’est pas systématique en L1, on les retrouve (ou les
découvre) d’ordinaire en topologie de L2, et ils jouent aussi un rôle assez
important en intégration de L3.
1) Posons pour n ≥ n0,
an = inf tk ∈ [−∞, +∞[ et bn = sup tk ∈] − ∞, +∞]
k≥n k≥n

Observons alors que :


a) an ̸= −∞ ⇔ (tk )k≥n est minorée ⇔ (tk )k≥n0 est minorée.
De plus (an)n≥n0 est croissante quand (tn)n≥n est minorée.
b) bn ̸= +∞ ⇔ (tk )k≥n est majorée ⇔ (tk )k≥n0 est majorée.
De plus (bn)n≥n0 est décroissante quand (tn)n≥n est majorée.
2) Nous pouvons d’après a) définir la limite inférieure, notée lim inf tn,
n→∞
de la suite (tn), comme étant −∞ lorsque (tn) n’est pas minorée, et comme
étant lim an ∈] − ∞, +∞] sinon.
n→∞
Dans la pratique on retient simplement la formule :
lim inf tn := lim inf tk ∈ [−∞, +∞]
n→∞ n→∞ k≥n
En considérant qu’une suite constante de valeur −∞ a pour limite −∞.
3) De même on définit la limite supérieure par :
lim sup tn := lim sup tk ∈ [−∞, +∞]
n→∞ n→∞ k≥n

45 Propriétés Pour toute suite numérique réelle (tn)n≥n0 on a, avec les


notations précédentes :
1) Pour tout n ≥ n0 on a an ≤ tn ≤ bn.
2) lim inf tn > −∞ ⇔ (tn) est minorée.
n→∞
3) lim sup tn < +∞ ⇔ (tn) est majorée.
n→∞
4) lim inf tn ≤ lim sup tn
n→∞ n→∞
5) Si ℓ ∈ [−∞, +∞], on a :
 
ℓ = lim inf tn et ℓ = lim sup tn ⇔ ℓ = lim tn
n→∞ n→∞ n→∞

Seule la preuve de 5) ⇐ n’est pas immédiate.


58
G) Propriétés topologiques de R
46 Théorème (suites adjacentes)
Soient (un) et (vn) deux suites numériques réelles. On suppose (un) crois-
sante, (vn) décroissante et 0 = lim vn − un. Alors (un) et (vn) convergent
n→∞
vers une même limite ℓ qui majore (un) et minore (vn).
Le critère suivant permet de caractériser la convergence d’une suite sans
utiliser sa limite ; il traduit le fait qu’un nombre réel est mathématiquement
défini dès lors qu’on dispose d’un moyen permettant (au moins théoriquement)
d’en calculer des approximations aussi précises qu’on le souhaite (il a long-
temps été admis implicitement, voire inconsciemment par les mathématiciens ;
le mérite de Cauchy est de l’avoir énoncé avec précision). Par exemple un
nombre réel pourra êre défini comme la limite d’une suite vérifiant le critère
de Cauchy...
Dans la description axiomatique de la droite réelle, on peut voir le critère
de Cauchy comme un axiome équivalent à l’existence des bornes supérieures
pour les parties non vides et majorées, ou encore à la convergence des suites
croissantes majorées, ou encore au théorème des suites adjacentes lorsqu’on
lui ajoute l’hypothèse ∀n ≥ 1, un ≤ vn (c’est sans doute cette dernière forme
qui parait la plus facile à admettre, on l’exprime parfois aussi en considérant
des intervalles emboités).
47 Théorème (Critère de Cauchy)
Pour qu’une suite (un)n≥1 de nombres complexes soit convergente, il faut
et il suffit qu’elle vérifie la condition suivante :
Pour tout réel ε > 0, il existe un rang N ∈ N∗ tel que pour tous
entiers m, n ≥ N on ait |um − un| < ε.
Preuve. (Condition suffisante) Cas (un) réelle. Si on note an = inf uk ,
k≥n
bn = sup uk , a = lim inf un et b = lim sup un. Alors on a pour ε et N comme
k≥n n→∞ n→∞
dans le critère : uN − ε ≤ aN ≤ a ≤ b ≤ bN ≤ uN + ε, d’où 0 ≤ b − a ≤ 2ε
et donc a = b.
Pour le cas général, on vérifie facilement que le critère de Cauchy pour (un)
entraine le critère de Cauchy pour ses parties réelle αn et imaginaire βn. . .
48 Théorème (Bolzano-Weierstrass(∗)) Soient a < b deux réels et (tn)n∈N
une suite dans [a, b], alors on peut trouver une suite strictement crois-
59
sante (un)n∈N d’entiers naturels convergeant vers l’infini et telle que la
suite (tun )n∈N admette une limite ℓ ∈ [a, b].
Une preuve montre qu’on peut aussi imposer ℓ = lim inf n→+∞ tn =: α.
Plus précisément, en notant an = inf tk , on peut choisir successivement
k≥n
les indices un par u0 = 0 et, pour n ≥ 1 :
1
un ≥ Nn := max(n, 1 + un−1) et tun < + aNn
n
5 et on constate que (un) convient, avec ℓ = α, car tun ≥ aNn .
Applications :
49 Théorème Soient a, b ∈ R et f une fonction numérique réelle définie et
continue sur [a, b]. Alors il existe τ ∈ [a, b] tel que f (τ ) = max[a,b] f .
Pour prouver ce résultat on choisit une suite (tn) dans [a, b] telle que (f (tn))
converge vers sup[a,b] f , et on en extrait une suite (tun ) convergeant vers un
τ ∈ [a, b] dont on vérifie qu’il convient. à cause de la continuité de f .
La partie 3) de la preuve suivante utilise encore cet argument, d’une
manière “redoublée” assez rusée, mais classique.
50 Théorème (Théorème de d’Alembert-Gauss)
Soient n ∈ N∗, a0, a1, . . . , an ∈ C avec an ̸= 0.
Alors l’équation
a0 + a1z + · · · + anz n = 0
admet au moins une solution complexe.
Ce résultat important est souvent qualifié de théorème fondamental de
l’agèbre. D’Alemberten a donné une première preuve, qui avait des défauts.
Gauss les a remarqués et a donné trois preuves plus correctes.
Pour prouver ce théorème, on peut passer pas les étapes suivantes :
1) On prouve que si z0 ∈ C n’est pas une racine de la fonction polynôme
définie par P (z) = a0 +a1z +· · ·+anz n, alors z0 n’est pas un minimum (local
même) sur C de la fonction |P |. Cette étape utilise le fait que tout nombre
complexe admet une racine n-ième, et un argument du type “développement
limité”. Plus précisément on écrit pour un entier k ≥ 1, tout z ∈ C et
t ∈ R∗+ :
P (z0 + z)
• = 1 + bk z k + . . . + bnz n avec bk ̸= 0 d’où si ω k = −1/bk
P (z0)
60
P (z0 + ωz)
• Q(z) := = 1 − z k + ck+1z k+1 + . . . + cnz n
P (z0)
Q(t) = 1 − tk + tk+1R(t) et Q(t) = 1 − tk + tk+1R(t)
• φ(t) := |Q(t)|2 = Q(t)Q(t) = 1 − 2tk + tk+1S(t)
φ(t) − 1
• ψ(t) := = −2 + tS(t) est de limite −2 en 0. (Car R et S sont
tk
des fonctions polynômes, donc continues.)
On peut donc choisir t tel que ψ(t) < 0 et alors
|P (z0 + ωt)| < |P (z0)|.
Il reste alors à prouver que |P | admet un minimum sur C. On peut supposer
a0 = P (0) ̸= 0.
2) On prouve qu’on peut choisir un réel R > 0 tel que pour tout z ∈ C
on ait |z| > R ⇒ |P (z)| > |P (0)|. Pour cela on observe pour z ̸= 0 que
|P (z)| ≥ f (|z|) où 
|a 0 | |a n−1 | |a0 |
f (ρ) = |an|ρn 1 − − · · · − − est de limite +∞ en
|an|ρn |an|ρ |an|
+∞.
On peut donc choisir R > 0 tel que t > R ⇒ f (t) > |P (0)|, d’où
inf |P (z)| = inf |P |
|z|≤R C
3) On prouve alors à l’aide du théorème de Bolzano-Weierstrass que |P |
admet un minimum sur le disque D constitué des z ∈ C tels que |z| ≤ R.
On choisit pour cela (zn) dans C avec |zn| ≤ R et telle que f (|zn|) converge
vers inf |z|≤R |P (z)|, on pose zn = xn +iyn avec xn, yn ∈ [−R, R] et on extrait
successivement deux suites : (xun ) de limite x ∈ [−R, R] et (yuvn ) de limite
y ∈ [−R, R] et on observe que x + iy est la limite de (zuvn ) et vérifie, à cause
des opérations sur les limites 19 :
|P (z)| = lim |P (zuvn )| = inf |P |.
n→+∞ C

Terminons par quelques précisions sur le vocabulaire utilisé :


51 Définitions
Soient f une fonction numérique réelle définie sur un ensemble I et
t0 ∈ I.
• On dit que t0 est un maximum de f sur I si f (t0) = maxI f ; on dit
alors que f (t0) est la valeur maximale de f sur I.
19. dont la règle non énoncée précédemment, pour une suite numérique complexe (an ) de limite a ∈ C, la suite (|an ||)
converge vers |a|, qui se vérifie en utilisant parties réeelles et imaginaire de (an ).

61
• On dit que t0 est un minimum de f sur I si f (t0) = minI (f ) ; on dit
alors que f (t0) est la valeur minimale de f sur I.
On dit encore que t0 est un extrémum de f sur I si c’est un maximum ou
un minimum de f sur I ; on dit que t0 est un maximum strict de f sur I si
t0 est l’unique maximum de f sur I.
Si I ⊂ R, on dit que t0 est un maximum local de la fonction numérique
réelle f s’il existe un réel r > 0 tel que t0 soit un maximum de f sur ]t0 −
r, t0 + r[∩ Dom f ; on parle parfois de maximum global par opposition à
“local” ; on dit que t0 est un maximum local strict de f s’il existe un réel
r > 0 tel que t0 soit un maximum strict de f sur ]t0 − r, t0 + r[∩ Dom f ,
. . .etc.

62
III Structures algébriques
Les principaux savoir faire visés par ce chapitre concernent la divisibilité
dans les entiers ou entre les polynômes, ainsi que la notion de décomposition
en éléments simples (pour laquelle on ne vise pas une maitrise de toutes
les techniques utilisables), et quelques résultats assez marginaux (dans le
programme de mathématiques de licence) concernant les permutations.
On n’attend pas que l’étudiant assimile dès ce semestre les très nombreuses
et souvent abstraites définitions de ce chapitre, mais qu’il commence à s’habi-
tuer au langage des structures mathématiques, et si possible se rende compte
de son efficacité.
Il sera sans doute un peu perturbé par les questions de “construction”
d’objet mathématiques : Le cas facile des polynômes, et celui, plus compliqué,
des anneaux quotients, des corps de fractions et des fractions rationnelles,
qui mettent en oeuvre les relation d’équivalence, selon une procédure assez
courante en mathématiques.
On espère aussi consolider l’acquisition des principales notions de théorie
des ensembles exposées au premier chapitre, et abondamment utilisées dans
ce troisième et dernier chapitre (notamment dans l’étude des permutations).
Finalement, les résultats les plus importants concernent les polynômes (et
les fractions rationnelles), qui interviennent aussi bien en algèbre qu’en ana-
lyse.

A) Groupes, anneaux, corps


1) Opération sur un ensemble

On appelle Opération sur un ensemble E toute application E × E → F .


Lorsque F = E, on parle aussi de loi de composition interne. On utilise
alors pour l’image de (x, y) par une opération, une notation du type :
x + y (addition)
xy (produit, multiplication)
x · y , x × y, x ÷ y, x ⋆ y, x △ y, x ⊙ y, . . .pour les généralités
Une opération ⋆ sur E est dite commutative si
∀x, y ∈ E, x ⋆ y = y ⋆ x
L’usage est de n’utiliser la notation additive x + y que pour des lois commu-
tatives et associatives.
63
Une opération ⋆ sur E est dite associative si ∀x, y, z ∈ E on a
x ⋆ (y ⋆ z) = (x ⋆ y) ⋆ z =: x ⋆ y ⋆ z
il est très rare qu’on s’intéresse à des lois non associative, car alors les formules
nécessitent vite beaucoup de parenthèses.
Supposons donnés une opération ⋆ sur E et une loi (de composition in-
terne) △ sur E. On dit que, par rapport à △, l’opération ⋆ est respectivement
distributive à gauche, distributive à droite si ∀x, y, z ∈ E, on a respecti-
vement
x ⋆ (y △ z) = (x ⋆ y) △ (x ⋆ z)
(y △ z) ⋆ x = (y ⋆ x) △ (y ⋆ x)
Elle est distributive si elle l’est à gauche et à droite. Si ⋆ est commutative,
ces trois notions sont équivalentes. (Le plus souvent c’est une multiplication
qui est distributive par rapport à une addition, mais on peut aussi observer
par exemple que l’intersection est distributive par rapport a la réunion.)
On dit que e ∈ E est un élément neutre pour la loi ⋆ sur E si
∀x ∈ E on a e ⋆ x = x ⋆ e = x
On dit alors que y ∈ E est un symétrique pour ⋆ de x ∈ E si
x ⋆ y = y ⋆ x = e.
cela équivaut à ce que x soit un symétrique de y.
52 Propriétés Si ⋆ est une loi de composition interne sur un ensemble E,
alors elle y admet au plus un élément neutre.
Si c’est le cas et si ⋆ est associative, alors tout x ∈ E admet au plus
un symétrique pour ⋆, souvent noté x−1.
Si x admet un symétrique, on a donc
(x−1)−1 = x.
Pour une loi notée additivement x, l’élément neutre se note souvent 0 ou
0E . Le symétrique s’appelle opposé et se note −x.
Pour une loi associative, notée multiplicativement, l’élément neutre se note
(un peu moins) souvent e, 1 ou 1E . Le symétrique s’appelle inverse et se note
x−1. On réserve la notation 1/x au cas ou en plus la loi est commutative, et
notée multiplicativement.
64
Supposons que A ⊂ E et que ⋆ soit une loi de composition interne sur E.
On dit que A est stable par ⋆ si ∀x, y ∈ A on a x ⋆ y ∈ A. Dans ce cas ⋆
induit une loi de composition interne sur A :
A × A → A, (x, y) 7→ x ⋆ y.
Opération sur n termes.
Considérons (E, ∗) un ensemble E muni d’une loi associative ∗, et
a1, a2, . . . , an des éléments de E. On peut alors écrire sans parenthèses (et
sans ambiguı̈té) les produits pour ∗ d’un nombre fini de termes : a1 ∗a2 ∗· · ·∗an
Yn
Cas de la notation multiplicative (E, .) : On pose ak := a1a2 · · · an.
k=1
Supposons maintenant la loi de (E, .) associative et commutative, alors
le produit ne dépend pas de l’ordre des termes, autrement dit on a pour 20
toute permutation σ ∈ Sn la formule
n
Y n
Y
aσk := ak .
k=1 k=1

Cela permet de considérer le produit des termes d’une famille finie (ai)i∈I
(c’est à dire que l’ensemble I des indices est fini) ; on aura ainsi pour toute
bijection σ : N∗n → I et pour toute bijection τ : J → I les égalités de
“changements de variable” i = σk et i = τj := τ (j) :
n
Y Y Y
aσk = ai = aτ j
k=1 i∈I j∈J

Pour une loi associative et commutative notée additivement, les formules


correspondantes sont :
n
X X X
aσ1 + aσ2 + · · · + aσn = aσk =: ai = aτj
k=1 i∈I j∈J

Exponentiation. Considérons (E, .) un ensemble E muni d’une loi asso-


ciative, x ∈ E et n ∈ N∗, on pose alors :
n
Y
• xn := xx · · · x} =
| {z x.
n fois k=1
0
• x := 1E si (E, .) admet un élément neutre 1E .
20. voir un peu plus loin pour la définition du groupe symétrique Sn !

65
• x−n := (x−1)n = (xn)−1 si en plus x admet un inverse dans (E,.) (c’est
alors aussi le cas de xn).
On vérifie alors pour tous m, n ∈ Z la règle xm+n = xmxn.
Pour une loi associative et commutative notée additivement, les formules
correspondantes sont :
n
X
• nx := |x + x +
{z· · · + x} = x.
n fois k=1
• 0x := 0E si (E, +) admet un élément neutre 0E .
• (−n)x := n(−x) = −(nx) si en plus x admet un opposé dans (E,+)
(c’est alors aussi le cas de nx), et on a alors pour tous m, n ∈ Z la règle
(m + n)x = mx + nx.

2) Notion de groupe

53 Définition On appelle groupe tout couple (G, ⋆) où G est un en-


semble et ⋆ une loi de composition interne sur G, associative, qui ad-
met un élément neutre et pour laquelle chaque élément de E admet un
symétrique.
On dit que le groupe est commutatif lorsque sa loi l’est.
On dit aussi, moins formellement, que c’est un ensemble G muni d’une loi
de composition interne ayant les propriétés indiquées. Souvent on parle du
groupe G sans préciser sa loi, quand cela ne semble pas utile.
Dans un groupe les éléments sont simplifiables (à gauche et à droite) :
∀a, x, y ∈ G : a ⋆ x = a ⋆ y ⇒ x = y ⇐ x ⋆ a = y ⋆ a
▶ On a aussi
(x−1)−1 = x et (xy)−1 = y −1x−1.
Exemples.
• (R, +) est un groupe commutatif.
• (R, ·) n’est pas un groupe : il a bien un élément neutre 1, mais 0 n’a
pas de symétrique (d’inverse) pour la multiplication.
• Soient (G, ⋆) un groupe et A une partie de G, stable par ⋆, contenant
l’élément neutre de G ainsi que le symétrique de chacun de ses éléments.
Alors (A, ⋆) est un groupe (pour la loi induite). On dit que c’est un
sous-groupe de G.
Ainsi (R, +) et (Z, +) sont des sous-groupes de (C, +).
66
Un sous-groupe G′′ d’un sous-groupe G′ d’un groupe G est aussi un
sous-groupe de G.
• le cercle unité U = {z ∈ C tq |z| = 1} du plan complexe, est un
sous-groupe de (C∗, ·).
• On associe à tout ensemble E son groupe des permutations
(Perm E, ◦),
où Perm E désigne l’ensemble des permutations de E, c’est à dire des bi-
jections de E dans E, muni de la composition de applications. L’élément
neutre est l’application identique IdE : E → E, x 7→ x. le symétrique
de f ∈ Perm E est la bijection réciproque f −1.
On notera Sn = Perm(N∗n), c’est le groupe symétrique de degré
n ∈ N. On a donc card Sn = n!.
G = {f ∈ Perm R | f est continue, ainsi que sa réciproque f −1} est un
sous-groupe de Perm R. (attention à ne pas confondre f −1 et 1/f .)
Remarque. On dit qu’une application f : E n → F est symétrique si
∀σ ∈ Sn on a
f (xσ(1), . . . , xσ(n)) = f (x1, . . . , xn)
Lorsqu’on étudie les groupes, on utilise le plus souvent une notation multi-
plicative.
54 Propriété Soient x un élément d’un groupe (G, ·), d’élément neutre e.
Alors l’un et un seul des deux cas suivant a lieu :
1. la suite (an)n∈Z est injective.
2. il existe p ∈ N∗ vérifiant ap = e.
La suite (an)n∈N est un exemple de suite récurrente dans G définie par x0 = e
et ∀n ∈ N, xn+1 = x(xn) (comme les suites numériques géométriques ou
arithmétiques).
Dans le cas 2, cette suite est p-périodique (ou p-cyclique) :
∀n ∈ N, xn+p = xn
On appelle ordre de x dans G le plus petit entier p ≥ 1 tel que xp = e s’il
en existe, et 0 sinon.
Ainsi l’ensemble des solutions de xn = e est pZ.
Notons encore le lien avec la division : si p, q, r ∈ Z, alors :
aq = e ⇒ apq+r = ar .
67
3) Anneau, corps

On s’intéresse ici à une généralisation de la notion de nombre.


55 Définitions
On appelle Anneau tout triplet (A, +, ·), où (A, +) est un groupe com-
mutatif, et où · est une loi de composition interne sur A, associative,
distributive par rapport à +, et qui admet 21 un élément neutre 1A.
Nous noterons alors Inv(A) l’ensemble des éléments de A inversibles
(pour la multiplication ·).
On dit que l’anneau est commutatif si sa multiplication est commuta-
tive.
On dit que l’anneau est un corps si on a
A \ {0} = Inv A.
On appelle corps commutatif tout anneau commutatif qui est aussi un
corps.
Remarque. Comme 1A est inversible, pour que A soit un corps il est ne-
cessaire que 1A ̸= 0A
56 Propriété Soit A un anneau.
1. ∀x ∈ A, x0 = 0x = 0.
2. (Inv A, ·) est un groupe, appelé groupe des inversibles de A.
3. Si 1A = 0A, alors A = {0A}. On dit qu’un tel anneau 22 A est nul.
Le groupe des inversibles d’un anneau commutatif est évidemment commu-
tatif.
▶ Un corps est donc un anneau non nul dans lequel tout élément non nul est
inversible.
Exemples.
• (Z, +, ·) est un anneau commutatif mais n’est pas un corps :
Inv Z = {−1, 1}.
• (C, +, ·), (R, +, ·), et (Q, +, ·) sont des corps commutatifs.
• Soient A un anneau, et B ⊂ A.
21. Certains auteurs n’imposet pas l’existence de cet élément neutre, et parlent d’anneau unitaire quand elle a lieu.
22. Parfois on esclut ce cas dans la définition d’anneau.

68
On dit que B est un sous anneau de A si il contient l’élément nul et
l’unité de A et si
∀a, b ∈ B, a − b ∈ B et ab ∈ B.
B est alors un anneau pour les lois induites. On dit B est un sous-
corps si c’est un sous-anneau qui est un corps. Lorsque A est lui-même
un corps, il faut donc ajouter la condition
∀b ∈ B \ {0}, b−1 ∈ B.
• Si A est un anneau et I un ensemble non vide, alors F(I, A) est aussi
un anneau pour les lois usuelles :
(f + g)(t) = f (t) + g(t) et (f g)(t) = f (t)g(t)
son élément nul et son unité sont les fonctions constantes de valeur 0A
et 1A. Il est commutatif si A l’est, mais n’est pas un corps si card I ̸= 1.
• Mn(R) et Mn(C) sont des anneaux (non commutatifs si n ≥ 2). C’est
encore vrai pour Mn(A) si A est un corps commutatif, ou même un
anneau non nécessairement commutatif.

4) Quelques formules dans un anneau commutatif

Soient A un anneau, m, n, N1, N2, . . .,Nn ∈ N∗, ak,l ∈ A pour 1 ≤ k ≤ n


et 1 ≤ l ≤ Nk , et aussi x, y ∈ A. Alors on a :
• (1A − x)(1A + x + x2 + · · · + xn) = 1A − xn+1 (somme partielle d’une
série géométrique)
n X Nk
Y X
• ak,l = al1 al2 · · · aln
k=1 l=1 (l1 ,··· ,ln )∈N∗N ×···×N∗N
1 n
X
= al1 al2 · · · aln (développement d’un produit de sommes), la dernière
l1 ,··· ,ln
formule est moins précise, mais plus digeste.
Xn
n
• xy = yx ⇒ (x + y) = Cknxk y n−k (formule du binôme de Newton)
k=0
Remarque. Il est normal d’être embarassé par ces formules faisant inter-
venir n termes, mais il faut essayer de s’y habituer tranquillement.

69
B) Signature d’une permutation
1) Groupe de permutations

Soit E un ensemble fini.


Rappelons qu’il lui est associé un groupe (Perm E, ◦) de cardinal (card E)!,
d’élément neutre IdE et dans lequel le symétrique de σ ∈ E est la permutation
réciproque σ −1.
On appelle support de σ ∈ Perm E l’ensemble
Supp σ = {x ∈ E | σ(x) ̸= x}
et on note
Fix σ = {x ∈ E | σ(x) = x} = E \ Supp σ
6 l’ensemble de ses points fixes.
On vérifie facilement la :
57 Propriété
▶ Si σ, τ ∈ Perm E ont des supports disjoints, alors elles commutent :

Supp σ ∩ Supp τ = ∅ ⇒ σ ◦ τ = τ ◦ σ.
Cette bijection coı̈ncide avec σ sur Supp σ, avec τ sur Supp τ et avec IdE
ailleurs.

2) Notion de cycle

Si pour P ≥ 2, les éléments a1, . . . , aP de E sont deux à deux distincts,


alors on notera
⟨a0, . . . , aP −1⟩ = ⟨a0, . . . , aP −1⟩E ∈ Perm E
la permutation (de E) de support {a0, . . . , aN −1} qui envoie ak sur ak+1 si
0 ≤ k < P − 1 et aP −1 sur a0. On dit que c’est un cycle de longueur P .
L’écriture n’est pas unique puisque si 1 ≤ k < n, on a :
⟨a0, . . . , aP −1⟩ = ⟨ak , . . . , aP −1, a0, . . . , ak−1⟩
On voit facilement que dans le groupe Perm E, un cycle de longueur P est
▶ d’ordre P , on emploie donc aussi le terme cycle d’ordre P au lieu de cycle
de longueur P . On peut aussi remarquer que P est le cardinal du support de
ce cycle.
70
Une transposition est un cycle ⟨a0, a1⟩ de longueur 2.
(souvent on utilise des parenthèses.)
La réciproque du cycle ⟨a0, . . . , aP −1⟩ est le cycle
⟨aP −1, aP −2, . . . , a1, a0⟩.
En particulier une transposition est égale à sa réciproque car ⟨a, b⟩ =
⟨b, a⟩, on dit qu’elle est involutive
Remarquons encore qu’un cycle de longeur P est composé (produit) de
P − 1 transpositions :
⟨a0, . . . , aP −1⟩ = ⟨a0, a1⟩ ◦ · · · ◦ ⟨aP −3, aP −2⟩ ◦ ⟨aP −2, aP −1⟩
Cas P = 1. Il est parfois utile, pour simplifier les discussions, de considérer
que
⟨a0⟩ = IdE
qui est bien d’ordre 1, et qui s’écrit card E fois de cette façon ! Mais on ne la
considère pas vraiment comme un cycle.

3) Décomposition en cycles

On décrit ici une méthode d’analyse d’une permutation qui permet de


comprendre géométriquement ce qu’elle fait, et par exemple de calculer son
ordre et sa “signature”.
Soient σ ∈ Perm E et x ∈ E, notons P = Pσ,x le premier indice P ≥ 1
tel que σ P (x) ∈ {x, σ(x), . . . , σ P −1(x)}. Alors P ≤ card E et
σ P (x) = x
par injectivité de σ.
La suite récurrente (σ n(x))n≥0 est donc périodique de période P ≥ 1, avec
P = 1 ⇔ x ∈ Fix σ. On a aussi
∀n ∈ Z, σ n(x) = x ⇔ n ∈ P Z ⇔ P | n
Notons encore le lien avec la division euclidienne : si p, q, r ∈ Z, alors :
σ q (x) = x ⇒ σ P q+r (x) = σ r (x).
On appelle aussi orbite de x (relativement à σ) l’ensemble
Orbσ (x) = {x, σ(x), . . . , σ P −1(x)}
C’est donc l’ensemble des termes de la suite xn = σ n(x), périodique de période
P , définie par x0 = x et ∀n ∈ N, xn+1 = σ(xn).
71
On peut remarquer que σ coı̈ncide avec le cycle ⟨x, σ(x), . . . , σ P −1(x)⟩ sur
Orbσ x et que
y ∈ Orbσ x ⇔ Orbσ y = Orbσ x
Il en découle que l’ensemble Orbσ de toutes les orbites Orbσ (y), pour y ∈ E,
constitue une partition propre de E, c’est à dire un recouvrement de E en
sous-ensembles non vides et deux à deux disjoints. Ce sont les parties non
vides de E, stables (et même invariantes) par σ, et qui sont minimales pour
l’inclusion.
D’un point de vue pratique, on voit alors que σ peut être décrite par un
diagramme sagittal constitué de circuits fermés deux à deux sans sommets
communs (les points fixes considérés comme des circuits à un sommet). Cette
image et un peu de pratique, doivent permettre de visualiser, l’essentiel de
cette section.

En d’autres termes, on peut vérifier par récurrence sur card Supp σ que
toute permutation σ ∈ Perm E \ {IdE } se décompose en un produit fini de
cycles
σ = σ1 ◦ · · · ◦ σq
à supports deux à deux disjoints. Si σ = IdE , c’est vrai avec q = 0 et
en convenant que dans un groupe, un produit vide vaut l’élément neutre !
Chaque cycle σk a pour support une orbite de σ non réduite à un point, les
cycles σk sont donc déterminés à l’ordre près.
On peut même observer que ces supports constituent une partition de
Supp Σ, cela peut être utile pour rédiger une preuve impeccable.
Comme ces cycles commutent entre eux, on a pour tout n ≥ 1,
σ n = σ1n ◦ · · · ◦ σqn
et on observe que le résultat est l’identité si et seulement si chaque σin = IdE .
Il en résulte que l’ordre de σ est le PPCM des longueurs des cycles σi.
Notons Orb∗σ l’ensemble des orbites de σ, non réduites à un point.
Cas de IdE . On a OrbIdE = {{x} | x ∈ E} et que Orb∗IdE = ∅.
Cette description de σ nous permet de proposer deux définitions équivalentes
de la signature sign(σ) = ε(σ) de σ :

ε(σ) = (−1)card E−card Orbσ = (−1)card Supp σ−card Orbσ .
72
On a ainsi ε(IE) = (−1)0 = 1 et ε(⟨a0, a1⟩) = (−1)1 = −1.
Cette définition s’avère pratique pour prouver le
58 Lemme (fondamental) Pour toute permutation σ ∈ Perm E, et toute
transposition τ = ⟨a, b⟩E , on a
ε(τ ◦ σ) = ε(τ )ε(σ) = −ε(σ).
Preuve. les orbites de σ disjointes de {a, b} sont aussi des orbites de ces deux
applications. Pour compléter le tableau, il faut examiner ce que deviennent
celles qui rencontrent {a, b}. On distingue alors deux cas :
1) {a, b} est inclus dans une orbite de σ. Alors card Orbτ ◦σ = 1 + card Orbσ .
2) {a, b} rencontre deux orbites 23 de σ, alors card Orbτ ◦σ = −1 + card Orbσ .


Nous énonçons ci-après ce qu’il faut essayer de retenir, en plus de la méthode
pratique de décomposition suggérée précédemment :
59 Théorème Soit E un ensemble fini de cardinal ≥ 2, et σ ∈ Perm E.
1. σ peut se factoriser comme composée de plusieurs transpositions :
σ = τ1 ◦ · · · ◦ τn .
2. Le nombre ε(σ) = (−1)n ne dépend que de σ, c’est la signature
de σ.
Autrement dit, la parité du nombre n de transpositions utilisable
pour décomposer σ ne dépend que de σ.
3. On a pour tous σ1, . . . , σp ∈ Perm E, ε(σ1 ◦· · ·◦σp) = ε(σ1)◦· · ·◦ε(σp).
4. σ se décompose comme la composée σ = γ1 ◦ · · · ◦ γq d’un nombre
fini de cycles à supports deux à deux disjoints, donc commutant
entre eux. Cette décomposition est unique à l’ordre près et l’ordre
▶ de σ est le PPCM des longueurs pk de ces cycles et on a
ε(σ) = (−1)p1−1 · · · (−1)pq −1
5. (∗) La signature σ 7→ ε(σ) définit l’unique morphisme de groupes
non constant Perm E → (C∗, ·), c’est à dire l’unique application non
constante et telle que
∀σ, τ ∈ Perm E, ε(σ ◦ τ ) = ε(σ)ε(τ ).
23. qui peuvent être des singletons.
73
2) 4) et 5) sont trois caractérisations de la signature, qui pourraient donc
servir de définition (suivant le choix d’exposition).
Lorsqu’on effectue de manière pratique la décomposition en cycle de σ, il
peut être utile d’utiliser la notation ⟨x⟩ = IdE , pour repérer qu’on a bien
“traité” l’élément x, mais ensuite on omet ce pseudocycle d’ordre 1 (pour
lequel x n’a rien de particulier), dans la décomposition de σ.
60 Définitions (∗) Avec les notations précédentes, on dit que la permu-
tation σ est paire (ou directe) si n est pair, et impaire (ou indirecte) si
n est impair. On note A(E) l’ensemble des permutations paires de E.
C’est un sous-groupe de Perm E, appelé groupe alterné de E.
Principe de la preuve. Le premier point de 4) a été expliqué précédemment,
sauf la dernière égalité, qui résulte de la définition de la signature, ou encore
de 2 (ou 3) et du la décomposition d’un cycle en produit de transpositions,
donnée en section 2).
1) en résulte d’après le cas particulier des cycles déjà vu (mais il se prouve
aussi directement par récurrence sur card Supp σ).
2) découle du lemme fondamental, par une récurrence immédiate.
3) qui peut se réduire au cas p = 2, découle alors de 1) et 2).
5) Soit ε′ : Perm E → (C∗, ·) un morphisme de groupes non constants.
Pour toute transposition τ on a 1 = ε′(IdE ) = ε′(τ 2) = ε′(τ )2 = 1, donc
ε′(τ ) = ±1. On utilise alors la conjugaison, voir propriété 64. Si ⟨a, b⟩ et ⟨c, d⟩
sont deux transpositions de E, on peut choisir σ ∈ Perm E qui envoie a sur c
et b sur d, alors on a ⟨c, d⟩ = σ◦⟨a, b⟩◦σ −1 d’où on tire ε′(⟨c, d⟩) = ε′(⟨a, b⟩).
Le morphisme ε′ est donc constant sur les transpositions. D’après 1 il ne peut
y valoir 1 car il serait constant sur Perm E, donc il y vaut −1 et coı̈ncide
donc avec ε d’après 1 et 2.
Les deux sections suivantes complètent cette preuve, en décrivant aussi
des notions très utiles, mais de maitrise non exigible dans cette UE (d’une
part elle contient des définitions un peu abstraites à ce niveau, d’autre part,
certaines preuves sont difficiles).

4) Morphisme de groupes(∗)

61 Définitions Soient (G, ⋆) et (G′, ·) deux groupes d’éléments neutres e


et e′, et φ : G → G′ une application. On dit que φ est un morphisme

74
de groupes si on a
∀x, y ∈ G, φ(x ⋆ y) = φ(x) · φ(y)
on appelle alors noyau de f l’ensemble ker f = f −1(e′).
On dit que f est un isomorphisme de groupes si en plus f est bijective.
Un morphisme de G dans G s’appelle un endomorphisme (de groupes),
et un isomorphisme de G dans G s’appelle un automorphisme (de groupes).
62 Propriétés On suppose avec les notations précédentes que φ : G → G′
est un morphisme de groupes, alors :
1. φ(e) = e′
2. ∀g ∈ G, φ(g −1) = (φ(g))−1
3. ∀g1, . . . , gn ∈ G, φ(g1 ⋆ · · · ⋆ gn) = φ(g1) · · · φ(gn)
4. Im φ est un sous-groupe de G′.
5. ker φ est un sous-groupe de G.
Exemples
• La composée g ◦ f de deux morphisme de groupe est encore un mor-
phisme de groupes. Idem pour les isomorphismes.
• La bijection réciproque d’un isomorphisme de groupe est encore un iso-
morphisme de groupes.
• (R, +) → (R+∗, ·), t 7→ et est un isomorphisme de groupes de réciproque
t 7→ ln t.
• (R, +) → (C∗, ·), t 7→ eit est un morphisme de groupes dont l’image est
le cercle unité U.
• Soient g un élément d’un groupe (G, ·) d’élément neutre e. Alors on
définit un morphisme de groupes
Φ : (Z, +) → (G, ·), n 7→ g n
par g n = |g ◦ ·{z
· · ◦ g} et g −n = (g −1)n = (g n)−1 si n ≥ 1
n fois
0
et g = e. Son noyau est pZ, où p est l’ordre de x dans G.
• Soient g un élément d’un groupe (G, ·). Alors on définit un automor-
phisme Φg : G → G, appelé automorphisme intérieur, par
Φg (h) = ghg −1
75
Remarque.
Si G est un groupe, alors l’ensemble Aut(G) des isomorphismes G → G
(on parle d’automorphisme de groupe) est un sous-groupe de (Perm G, ◦).
Ainsi dans l’exemple précédent (accrochez vous !) :
Φ : G → Aut(G), g 7→ Φg
est un morphisme de groupe. (Parfois, l’algèbre c’est un peu abstrait.)

5) Autre définition de la signature(∗)

63 Lemme Soit n ≥ 2 un entier. On définit un morphisme de groupe non


constant Sn → ({−1, 1}, ·), σ 7→ ε(σ) par
Y σ(j) − σ(i)
ε(σ) =
i<j
j−i

Preuve. (calcul délicat) Soient σ, τ ∈ Sn.


Le produit ε(σ) a un sens parce que la multiplication est commutative. Il
s’écrit de manière plus explicite :
Y σ(j) − σ(i)
ε(σ) =
1≤i<j≤n
j−i
ou encore
Y σ(j) − σ(i)
ε(σ) =
j−i
{i,j}∈P2 (N∗n )

en notant Pk (E) l’ensemble des parties de E de cardinal k. Comme on a une


bijection
P2(N∗n) → P2(N∗n), {i, j} → {σ(i), σ(j)}
on a alors par changement de variables
Y Y
|j − i| = |σ(j) − σ(i)|
{i,j}∈P2 (N∗n ) {i,j}∈P2 (N∗n )

d’où |ε(σ)| = 1, mais aussi,


Y σ(τ (j)) − σ(τ (i))
ε(σ ◦ τ ) =
j−i
{i,j}∈P2 (N∗n )
Y σ(τ (j)) − σ(τ (i)) τ (j) − τ (i)
= = ε(σ)ε(τ ).

τ (j) − τ (i) j − i
{i,j}∈P2 (Nn )
76
Enfin ε(IdN∗n ) = 1 tandis que ε(⟨1, 2⟩) = −1.
σ(j) − σ(i)
Remarques. Si on note εi,j = εj,i = ±1 le “signe” de , alors la
j−i
preuve précédente montre que
Y
ε(σ) = εi,j
i<j

est “la parité” du nombre d’inversions 24 de σ. Ce sont donc des définitions


équivalentes de la signature d’une permutation σ ∈ Sn.
Si E est un ensemble fini quelconque à n éléments, on peut appliquer
la propriété suivante (qui mérite attention pour elle-même) à une bijection
φ = N∗n → E. On obtient alors un morphisme de groupes 25 non constant :
Perm(E) → C∗, f 7→ ε(fe) avec fe = φ−1 ◦ f ◦ φ, qui ne peut-être que la
signature, d’après le point 5 du théorème 59.
64 Propriété (conjugaison, changement de variables)
Soient φ : E → F une bijection. Associons à toute application f : E →
−1
▶ E l’application fe = φ ◦ f ◦ φ . Elle vérifie

∀x ∈ E, fe(φ(x)) = φ(f (x))


d’où pour les cycles
f = ⟨x1, . . . , xn⟩ ⇒ fe = ⟨f (x1), . . . , f (xn)⟩
Enfin
∀f, g : E → E, g]
◦ f = ge ◦ fe.
Remarques. f 7→ fe définit ici un isomorphisme de groupes Φ : Perm E →
Perm F (qui ressemble fortement aux automorpismes intérieurs d’un groupe).
On dit que fe est conjuguée à f (ou plus simplement qu’elle se déduit de
f ) par le changement de variables φ (même lorsque f n’est pas bijective).
Dans l’exemple f : C → C, z → z 2 et φ : C → R2, z 7→ (ℜ(z), ℑ(z)) on
a
fe(x, y) = (x2 − y 2, 2xy).
On dit ici que fe est l’expression analytique de f .
Trouver un changement de variable pour lequel fe est plus simple que f est
un objectif fréquent en algèbre linéaire, mais aussi dans l’étude des suites
24. une inversion désigne ici une paire {i, j} telle que εi,j = −1.
25. composé de deux morphismes de groupes, ε et f 7→ fe.
77
récurrentes un+1 = f (un), ou on considère alors vn = φ(un) comme une
suite auxiliaire, plus facile a calculer. (On peut très bien introduire vn sans
mentionner la bijection φ.)

C) Divisibilité dans un anneau commutatif non nul A


Soit A un anneau commutatif non nul. (ou A en amphi)

1) Définitions

Soient a, b ∈ A, on dit que a divise b dans A, ou que b est un multiple


de a dans A si il existe c ∈ A tel que ac = b. On le note souvent (ne pas
confondre avec “tel que” !) :
a|b
Si a1, . . . , an ∈ A, DivA(a1, . . . , an) et MultA(a1, . . . , an) désignent l’en-
semble des diviseurs et des multiples communs des ak :
DivA(a1, . . . , an) = {b ∈ A, ∀k ∈ N∗n, b | ai}
MultA(a1, . . . , an) = {b ∈ A, ∀k ∈ N∗n, ai | b}
(on ne met A en indice que si cela semble nécessaire de le préciser.) On dit
que les ai sont premiers dans leur ensemble si
DivA(a1, . . . , an) = Inv A.
On dit simplement premiers entre eux si n = 2.
▶ Attention “deux à deux premiers entre eux” est plus fort que “premiers
dans leur ensemble”.
On dit enfin que a ∈ A est iréductible dans A si a ̸∈ Inv A et si il
vérifie :
∀b, c ∈ A : a = bc ⇒ b ou c ∈ Inv A.
n ∈ Z est irréductible dans Z si et seulement si |n| est un nombre premier.
Un nombre premier est un entier n ≥ 2 tel que DivZ(n) = {±n, ±1}.
Autrement dit c’est un élément irréductible de l’anneau Z, qui en plus est
≥ 0.
On a immédiatement,
65 Propriétés pour tout a, b, c, q, r ∈ A,
1. MultA(a) = aA
78
2. Inv A ⊂ DivA(a)
3. a0 = 0 donc 0 ∈ Mult(a)
4. a | a
5. (a | b et b | c) ⇒ a | c.
6. a | b ⇒ DivA(a, b) = Div(a)
▶ 7. Div(bq + r, b) = Div(b, r) (→ algorithme d’Euclide)

2) Anneaux de congruence

On fixe ici a ∈ A.
Soient b, c ∈ A, nous dirons que b et c sont équivalents (ou congrus)
modulo a (dans A) si c − b ∈ aA, on le note
b ≡ c [a] (dans A)
C’est une relation d’équivalence.
66 Théorème il existe un anneau, noté A/aA et appelé anneau quotient
(ou de congruence) modulo a, et une surjection
φ : A → A/aA, b 7→ eb
satisfaisant pour tous b, c ∈ A aux règles suivantes :
c ⇔ b ≡ c [a]
1. eb = e
c = b]
2. eb + e +c
3. ebe
c = bc
e
0 et e
e 1 sont donc l’élément nul et l’unité de A/aA.
On a donc aussi
c⇔0≡c⇔a|c
0=e
e


Remarques. eb se note plus souvent b, ou encore b .
Les termes “congru, congruence” s’emploient plus particulièrement lorsque
A = Z.
Les anneaux quotients peuvent servir pour établir des propriétés de divisi-
bilité, et aussi pour fournir des exemples d’anneau. On peut en fait, quotienter
(utilement !) A par des ensembles I plus généraux que les aA, appelés idéaux
de A, mais ceci ne sera pas considéré dans cette UE. En effet, l’anneau Z et
79
les anneaux de polynômes qui nous intéressent n’ont pas d’autres idéaux. On
dit qu’ils sont principaux.
Nous n’avons pas donné la définition de l’anneau A/aA mais ce qu’il suffit
de savoir pour l’utiliser.
Nous donnerons la définition usuelle dans la preuve du théorème, mais
elle est un peu abstraite et ce qui compte, c’est ce qui est dans le théorème.
La preuve du théorème est un exemple de construction mathématique : on
exhibe un exemple de ce qui nous intéresse.
2 signifie que φ est un morphisme de groupes (additifs).
Par définition, 2, 3 et le fait que e
1 soit l’unité de A/aA signifient que φ
est un morphisme d’anneaux.
67 Définitions (rel. d’équivalence dans un ensemble)
On dit que R est une relation d’équivalence sur un ensemble E si
c’est une relation sur E qui est réflexive, symétrique et transitive.
On appelle alors classe d’équivalence de x ∈ E pour R l’ensemble
e = {y ∈ E | xRy}
x
et on appelle ensemble quotient de E par R l’ensemble
E/R = {e
x | x ∈ E} ⊂ P(E).
On appelle encore surjection canonique associée à R la surjection
φ : E → E/R, x 7→ x
e.
68 Propriété
Avec les notations précédentes, E/R est une partition propre 26 de E,
autrement dit c’est un recouvrement de E en sous-ensembles non vides
et deux à deux disjoints. On a de plus
∀x, y ∈ E, xRy ⇔ x
e = ye
Preuve.
Preuve du théorème. On vérifie d’abord que ≡ est une relation d’équi-
valence sur A (après coup, cela découle du théorème !).
On pose A/aA = A/ ≡, et on prend pour φ la surjection canonique. On
doit alors juste vérifier que 2 et 3 définissent bien des opérations sur A/aA,
la structure d’anneau commutatif (éventuellement nul) sera évidente.
26. Certains auteurs disent simplement partition, n’autorisant jamais les parties vides.
80
Pour la somme : Soient b, b′, c, c′ ∈ A tels que eb = be′ et e
c = ce′, on doit
vérifier que b] ′ + c′ . Or b′ + c′ − (b + c) = (b′ − b) + (c′ − c) ∈
+ b = b^
aA + aA ⊂ aA donc on a bien b + c ≡ b′ + c′.
même méthode pour le produit, on a cette fois
b′c′ − bc = b′(c′ − c) + (b′ − b)c ∈ aA

D) Divisibilité dans Z
Dans cette section, la divisibilité est relative à l’anneau Z.
On prendra garde au fait qu’une partie des résultats paraissent évidents
quand on utilise l’unicité d’une factorisation en facteurs premiers, qui est
familière et semble évidente. Mais sa preuve ne l’est pas, et fait partie de
l’exposé.

1) PGCD, PPCM

On a Inv Z = {−1, 1}.


Si a, b ∈ N∗, alors a | b ⇒ a ≤ b. mais a | 0 !
Si a, b ∈ Z, alors a | b ⇔ |a| | |b| donc,
b ̸= 0 ⇒ card DivZ(b) ≤ 2|b| + 1.
Donc si a1, . . . , an ∈ Z sont non tous nuls, alors l’ensemble Div(a1, . . . , an)
est fini et non vide, il admet donc un plus grand élément appelé Plus Grand
8 Commun Diviseur 27 des ai et noté.
PGCD(a1, . . . , an) = a1 ∧ · · · ∧ an
De même l’ensemble Mult+(a1, . . . , an) des multiples > 0 communs aux
ai est une partie non vide de N si les ai sont tous non nuls, car elle contient le
produit a1a2 · · · an, elle admet donc un plus petit élément appelé Plus Petit
Commun Multiple des ai et noté
PPCM(a1, . . . , an) = a1 ∨ · · · ∨ an
(il vaut 0 si l’un des ai est nul.)
Remarque. on considère que
0 = 0 ∧ ··· ∧ 0
(car c’est l’ordre de la division qui importe, en fait).
81
▶ On a immédiatement
a1, . . . , an premiers dans leur ensemble ⇔ a1 ∧ · · · ∧ an = 1.
et donc
a, b premiers entre eux ⇔ a ∧ b = 1.
on utilise donc souvent la formulation de droite qui est plus brève.

2) Rôle de la division euclidienne

69 Propriété (division euclidienne)


Soient a ∈ Z et b ∈ N∗+, alors il existe un unique (q, r) ∈ Z2 tel que
a = bq + r et 0 ≤ r < b.
(q, r) est appelé le résultat de la division euclidienne de a par b. q est le
quotient et r est le reste. On a donc
b | a ⇔ r = 0.
Preuve. L’existence peut se prouver par récurrence sur |a|.
Remarque. Le quotient est aussi la partie entière de a/b et le résultat
peut se caractériser par :
a r r
= q + avec 0 ≤ < 1.
b b b
Attention ! La division euclidienne de 17 par 5 est (3, 2) tandis que la
division euclidienne de −17 par 5 est (−4, 3).
70 Propriété Si n ∈ N∗, alors card Z/nZ = n et on a
Z/nZ = {e − 1}.
0, . . . , n]
Comme (−n)Z = nZ, on ne considère pas le cas des entiers négatifs, dans
ces anneaux quotients.
71 Théorème (identité de Bezout)
∀a, b ∈ Z, ∃u, v ∈ Z : ua + vb = a ∧ b. De plus
Div(a, b) = Div(a ∧ b).
Enfin on a
1 = a ∧ b ⇔ ∃u, v ∈ Z tq ua + vb = 1.
27. ou diviiseur commun !

82
Le dernier point s’appelle le théorème de Bezout. Le second point signifie
que a ∧ b est bien le plus grand pour l’ordre de la division, au moins si on se
limite aux diviseurs ≥ 0.
u et v sont appelés coefficients de Bezout de a et b. Ils ne sont pas uniques.
Preuve par l’algorithme d’Euclide. On peut supposer a ≥ b ≥ 1.
Dès que d ≥ 0 vérifie Div(a, b) = Div(d) il est clair que d = a ∧ b.
On obtient un tel d par l’algorithme d’Euclide qui consiste a remplacer
successivement (a, b) = (a0, a1) en une suite par les divisions euclidiennes
an−1 = qnan + an+1, ce qui donne une suite strictement décroissante qu’on
arrête en aN = d lorsque aN +1 = 0.
En effet les relations Div(an−1, an) = Div(an, an+1) et Div(aN −1, aN ) =
Div(aN ) aboutissent à Div(a, b) = Div(aN ) d’où d = aN .
On a aussi par une récurrence facile, que tous les ak sont de la forme
ua + vb, avec u, v ∈ Z d’où le ⇒ du dernier point, la partie ⇐ étant très
facile, cela termine la preuve.
▶ Dans la pratique, on obtient les coefficients de Bezout en exprimant d = aN
à l’aide des divisions euclidiennes, en partant de la dernière.
72 Corollaire (lemme de Gauss)
∀n ≥ 2, ∀a, b1, b2, . . . , bn ∈ Z, si a est premier avec chacun des bi alors il
l’est aussi avec leur produit b1b2 · · · bn :
(∀i ∈ N∗n, a ∧ bi = 1) ⇒ a ∧ (b1 · · · bn) = 1.
Preuve. Récurrence sur n. Bezout pour n = 2.

3) factorisation en nombres premiers

Notons 28
P = {2, 3, 5, 7, 11, 13, 17, . . .}
l’ensemble des nombres premiers. Ce sont donc les entiers p ≥ 2 tels que
7 Div(p) = {±p, ±1}. .
73 Théorème (Factorialité)
Soit a ∈ Q∗+ \ {1}. Alors il se factorise de manière unique en
a = pα1 1 · · · pαnn
où n ∈ N∗ et où les αi ∈ Z∗, les pi sont premiers, et où p1 < p2 < · · · < pn.
De plus a ∈ N∗ ⇔ ∀i ∈ N∗, αi > 0
28. Ce n’est pas une notation générale, car la lettre P sert aussi à désigner des ‘èspaces projectifs” en géométrie.
83
Preuve. Avec une récurence facile, on vérifie d’abord l’existence d’une telle
factorisation avec des αk ≥ 1, lorsque a ∈ N∗. On en déduit l’existence dans
le cas général.
Si l’unicité tombait en défaut, on en déduirait une égalité de la forme
β
pq = q1β1 · · · qMM
avec p, q1, . . . , gM ∈ P deux à deux distincts, q, β1, . . . , βM ∈ N∗. Cela
contredirait le lemme de Gauss puisque p est premier avec chaque qk .
L’équivalence finale découle alors du premier point de la preuve.
Remarques. On peut bien sur changer l’ordre des pi et même en ajouter
d’autres si on autorise les αi nuls. On dit alors que la factorisation est unique
à l’ordre près et aux termes d’exposant nuls près. Ainsi si b est un autre
rationnel, on peut utiliser la même liste (pi) pour a et b.
Soit p ∈ P, l’exposant de p dans la factorisation de a s’appelle valuation
de a relative à p :
valpi (a) = αi et p ̸∈ {p1, . . . , pn} ⇒ valp(a) = 0
on convient encore que
valp(−a) = valp(a), valp(±1) = 0 et valp(0) = +∞.
Enfin, si on regroupe les termes d’exposant > 0 au numérateur et ceux d’ex-
posant < 0 au dénominateur, on obtient pour a l’existence d’une unique
écriture comme fraction irréductible (ou non simplifiable)
p
a=
q
avec p, q ∈ N∗. et p ∧ q = 1.
74 Propriété P est infini.
Preuve. Soient p1 < p2 < · · · < pn les n plus petits éléments de P, soit p
un facteur premier de
a := p1p2 · · · pn + 1
Si 1 ≤ i ≤ n, a ≡ 1 [pi] donc pi ̸ |a, donc pi ̸= p. Donc la liste n’est jamais
complète, P est bien infini.
Les propriétés suivantes sont alors immédiates :
75 Propriétés ∀a, b ∈ Q∗, ∀p ∈ P, valp(ab) = valp(a) + valp(b) et
valp(a/b) = valp(a) − valp(b).
84

76 Corollaire Soit a ∈ Q∗+ alors a ∈ Q ⇔ ∀p ∈ P, valp(a) ∈ 2Z.
√ √ √ p
▶ En particulier 2 ̸∈ Q. ( 12 = 2 3 et 3/20 non plus)
77 Propriétés ∀a, b ∈ Z∗, a | b ⇔ ∀p ∈ P, valp(a) ≤ valp(b).
78 Propriétés ∀a1, . . . , an ∈ Z, ∀p ∈ P :

valp(a1 · · · an) = (valp a1 + · · · + valp an)


valp(a1 ∧ · · · ∧ an) = min(valp a1, . . . , valp an)
valp(a1 ∨ · · · ∨ an) = max(valp a1, . . . , valp an)
79 Corollaire ∀a1, . . . , aN ∈ Z,
DivZ(a1, . . . , aN ) = DivZ(a1 ∧ · · · ∧ aN )
MultZ(a1, . . . , aN ) = MultZ(a1 ∨ · · · ∨ aN )
Ces deux propriétés sont celles qu’on attend du PGCD et du PPCM dans
un anneau A commutatif (non ordonné en général).
80 Corollaire ∀a, b ∈ N : ab = (a ∧ b)(a ∨ b)
Preuve. Découle de α + β = min(α, β) + max(α, β)
81 Corollaire Soient a1, . . . , aN ∈ N∗ deux à deux premiers entre eux, alors
a1 ∨ · · · ∨ aN = a1 · · · aN
▶ et donc MultZ(a1, . . . , aN ) = MultZ(a1 · · · aN ).
L’hypothèse s’écrit : pour tous 1 ≤ i < j ≤ n, 1 = ai ∧ aj . La seconde
affirmation signifie que si les ak divisent un même c, alors leur produit aussi.
82 Théorème (chinois)
Soient a1, . . . , aN ∈ N∗ deux à deux premiers entre eux, et a = a1a2 · · · aN
leur produit. Si 1 ≤ k ≤ N , on note φi : Z → Z/ak Z la surjection
canonique. Alors on définit une bijection
φ : Na−1 → Z/a1Z × · · · × Z/aN Z, n 7→ (φ1(n), . . . , φN (n))
Ainsi il existe un unique entier n tel que 0 ≤ n < 17 · 20 · 23 et congru à
respectivement 10, 14, 21 modulo respectivement 17, 20, 23.

85
Preuve. Comme les ensembles de départ et d’arrivée sont finis de même
cardinal a, il suffit de prouver que f est injective.
Supposons cela faux, on peut trouver deux entiers 0 ≤ m < n < a tels
que φ(m) = φ(n) d’où φk (m) = φk (n) autrement dit, m ≡ n[ak ], c’est à
dire ak | n − m. Comme les ak sont deux à deux premiers entre eux, il en
résulte que a | n − m, ce qui est absurde car 0 < n − m < a.
Remarque. Il en découle qu’on a une bijection
Z/aZ → Z/a1Z × · · · × Z/anZ, n
e 7→ φ(n)
qui est en fait un isomorphisme d’anneaux, c’est presque immédiat (dès qu’on
connait la définition), mais améliore grandement la conclusion.

E) Anneaux de polynômes
Il y a une grande analogie entre l’arithmétique (= divisibilité) de Z et celle
des polynômes, qui explique qu’on détaillera moins certains points.
Une différence notable est que pour les polynômes, l’unicité de la factori-
sation sera relativement évidente. (Dans Z, elle parait évidente, car on y est
habitué.). C’est le contraire pour l’existence de la factorisation.
L’arithmétique intéresse l’informatique dans la mesure où elle est le lieu
de nombreux algorithmes qui peuvent faire l’objet de programmation. S’agi-
sant des polynômes et des fractions rationnelles, ces algorithmes permettent
notamment de faire mener par l’ordinateur des calculs exacts (souvent
ils utilisent alors des polynômes ou des fractions à plusieurs indéterminées).
L’arithmétique sur les entiers est aussi corrélée avec avec la cryptographie
(codage de l’information).
K désignera un sous-corps de C (par exemple C, R ou Q).
A désignera un sous-anneau de C (par exemple C, R, Q ou Z).

1) Notion de polynôme

On note X : C → C, z 7→ z et donc aussi, pour n ∈ N∗,


X n : C → C, z 7→ z n
On note encore X 0 : C → C, z 7→ 1.
Ce sont donc des éléments de l’anneau (F(C), +, .) avec les lois usuelles :
(f + g)(z) = f (z) + g(z) et (f g)(z) = f (z)g(z).
86
On a aussi, si λ ∈ C,
(λf )(z) = λf (z).
Soit A ⊂ C, notons alors A[X] l’ensemble des fonctions de la forme
A = a0 X 0 + a1 X + a2 X 2 + · · · + an X n
où n ∈ N et a0, . . . , an ∈ A. On dit que c’est l’ensemble des polynômes (à
une indéterminée) et à coefficients dans A.
▶ De même qu’on note parfois 29 2+f la fonction z 7→ 2+f (z), nous noterons
X n
A= ak X k = a0 + a1X + a2X 2 + · · · + anX n
k=0
ou par ordre décroissant des exposants :
A = anX n + · · · + a2X 2 + a1X + a0.
83 Propriété Avec ces notations
A = 0 ⇒ 0 = a0 = a1 = · · · = an
de plus, si on convient que k > n ⇒ ak = 0, alors la suite (ak )k≥0 ne
dépend que de A.
Preuve. Pour le premier point (contraposée), on suppose l’un des ak non
nuls, et on doit montrer que A ̸= 0. On peut supposer que an ̸= 0 (quite à
diminuer n). Alors
A(t) an−1 1 a0 1
lim = lim 1 + + · · · + =1
t→+∞ an tn t→+∞ an t an tn
Donc A ̸= 0.
Second point, supposons qu’on ait aussi
Xm
A= bk X k
k=0
On doit vérifier que la nouvelle suite (prolongée par des zéros) coı̈ncide avec
la première. On peut supposer que n = m et alors
Xn
0=A−A= (ak − bk )X k
k=0
donc par le premier point 0 = a0 − b0 = · · · = an − bn, on a bien ∀k ≥
0, ak = bk .
29. Ainsi le symbole 2 désigne aussi bien l’entier 2 que le polynôme constant 2X 0 .
87
84 Définitions Avec les notations précédentes, chaque ak est appelé coef-
ficient de degré k de A. Si A ̸= 0, on définit le degré et la valuation
de A par
deg A = max{k ∈ N : ak ̸= 0} ≤ n
val A = min{k ∈ N : ak ̸= 0} ≤ n
on convient aussi que
deg 0 = −∞ et val 0 = +∞
On note souvent
An[X] = {P ∈ A[X] : deg A ≤ n}.
Si A ̸= 0 et si p = deg A, ap est appelé coefficient de plus haut degré de A,
on dit alors que A est unitaire si ap = 1. (Le polynôme nul n’est pas
unitaire.)
On dit enfin que z ∈ C est une racine de A si
0 = A(z) = anz n + · · · + a2z 2 + a1z + a0.
Attention ! Les polynômes de degré nul ne sont pas nuls, ce sont les po-
lynôme constants λX 0, où λ ∈ C∗.
On a pour tous p, q ∈ N (même si l’un est nul) :
X pX q = X p+q
m
X
d’où si B = bk X k = b0 + b1 X + b2 X 2 + · · · + bm X m
k=0

AB = a0b0 + (a0b1 + a1b0)X + (a0b2 + a1b1 + a2b0)X 2 + · · · + anbmX n+m


plus formellement, nous avons en vrac :
X
AB = ak bl X k+l
0≤k≤n,0≤l≤m

▶ et en regroupant les termes de même exposant :


p
m+n
!
X X
AB = ak bp−k X p
p=0 k=0

9 Rappelons. qu’on peut pour décrire les polynôme A, B, ajouter des termes
88
de coefficients nuls en convenant que :
k > n ⇒ ak = 0 et k > m ⇒ bk = 0
Cela permet d’écrire
max(m,n)
X
A+B = (ak + bk )X k
k=0

Ces formules montrent que si A et B sont à coefficients réels, alors AB et


A + B aussi. Plus généralement, elles donnent :
85 Propriété Si A est un sous-anneau de C, alors A[X] est un sous-anneau
de F(C), et donc aussi de C[X].
Remarques. La définition de A[X] qu’on trouvera le plus fréquemment
dans les livres (ou les semestres ultérieurs de licence !) est différente : un
polynôme A à coefficients dans A est souvent défini comme une suite (an)n∈N
de coefficients dans A, stationnaire en zéro et les opérations sur les polynômes
sont définies par les deux formules précédentes.
Cette définition un peu déroutante, colle en fait d’avantage à la “vraie na-
ture” d’un polynôme, qu’on perçoit comme une formule abstraite, qu’on peut
évaluer en plein d’objets concrets (pas seulement des nombres complexes).
On l’applique à tous les anneaux, y compris finis, pour lesquels notre ap-
proche est moins adaptée.
Mais l’une et l’autre ne sont en fait que des constructions d’un objet, devant
satisfaire à certaines règles dont l’énoncé dépasse un peu le cadre de cette UE
(un peu comme pour les anneaux quotients).
86 Propriétés ∀A, B ∈ C[X] :
deg(AB) = deg A + deg B
et
AB = 0 ⇒ (A = 0 ou B = 0)
La dernière règle signifie que l’anneau (commutatif) C[X] est intègre, contrai-
rement par exemple à F(C).
Preuve. La première formule découle du calcul de AB ci-dessus.

89
2) Factorisation de polynômes

87 Corollaire (pour K sous-corps de C)


Les éléments inversibles de l’anneau K[X] sont ses polynômes constants
non nuls :
Inv K[X] = {λX 0 | λ ∈ K∗}
et ses polynômes de degré 1 sont irréductibles dans K[X].
On a en effet si A, B ∈ K[X] et B ̸= 0 :
A | B ⇒ deg A ≤ deg B.
88 Propriété (division euclidienne)
Soient A, B ∈ C[X], avec B ̸= 0. Alors il existe un unique couple (Q, R)
de polynômes satisfaisant
A = BQ + R et deg R < deg B.
De plus si A et B sont à coefficients dans R, alors Q et R aussi.
▶ Plus précisément, pour que Q, R ∈ A[X] il suffit que A, B ∈ A[X] et
que l’un des deux cas suivant soit vérifié :
• A est un sous-corps de C,
• A est un sous-anneau de C, et B est unitaire.
▶ On a alors R = 0 ⇔ B | A dans A[X] ⇔ B | A dans C[X].
Remarques.
On dit encore que (Q, R), Q et R sont respectivement le résultat, le quo-
tient et le reste de la division euclidienne de A par B
Si deg B = 0, B est une constante non nulle et on veut un reste nul. C’est
normal puisque B est inversible, et divise donc A.
Preuve. On peut le prouver par récurrence sur deg A.
La preuve suggère alors une méthode de calcul de Q et R, qui ressemble a
celle utilisée pour les entiers (décrite en TD). On pose des divisions de manière
semblable, les algorithmes sont très proches, et peuvent dans les deux cas être
condiés à des ordinateurs.
89 Corollaire Soit P ∈ K[X] et a ∈ K, alors
P (a) = 0 ⇔ X − a | P dans K[X].
Preuve.

90
90 Propriété Soient P ∈ R[X], a ∈ C \ R et
Q = (X − a)(X − a), alors
1. Q ∈ R[X]
2. P (a) = 0 ⇔ P (a) = 0 ⇔ Q | P dans R[X].
Preuve. 1 résulte de Q = X 2 − 2ℜ(a)X + |a|2. . .
91 Théorème (D’Alembert-Gauss)
Soit P ∈ C[X] de degré n ≥ 1.
1. P admet au moins une racine a ∈ C.
Yn
2. P admet une factorisation P = λ (X − ak )
k=1

où λ ∈ C et {a1, . . . , an} est l’ensemble des racines de P .
N
Y
3. P admet une factorisation P = λ (X − ak )Mk
k=1

où λ ∈ C et {a1, . . . , aN } est l’ensemble des N racines (deux à
deux distinctes) de P et où Mk = valak P ∈ N∗.
4. Si P ∈ R[X], il admet une factorisation unique (à l’ordre près) :
YM Yp
N
P = λ (X − ak )Mk Qk k
k=1 k=1

où λ ∈ R et {a1, . . . , aN } est l’ensemble des N racines réelles de P
et Mk = valak P ; et où les Qk sont deux à deux distincts, unitaires,
de degrés 2 et à discriminants < 0.
λ est le coefficiant (non nul) de plus haut degré de P .
La dernière factorisation s’obtient en regroupant par paires de racines con-
juguées les racines non réelles. Il y a donc p paires de racines complexes
conjuguées soit en tout
N = M + 2p ≤ n
racines.
Ces factorisations 2, 3 et 4 sont uniques à l’ordre près et la vérification de
cette unicité est évidente, contrairement à l’arithmétique de Z.
C’est pour avoir cette importante unicité qu’on s’astreint ici a utiliser des
polynômes irréductibles unitaires qui jouent ici un rêle analogue à celui des
nombres premiers dans Z. Mais dans la pratique, on ne s’impose pas toujours
91
des facteurs unitaires. Ce sera la même chose avec les fractions rationnelles
(factoriqtion ou décomposition en éléments simples).
Preuve. 1) se prouve en Analyse (chapitre II).
2 et 3 s’en déduisent faciilement, 4 aussi, en utilisant bien le sous corps
K = R dans la propriété décrivant la division euclidienne.
92 Corollaire (polynômes irréductibles)
1. Les éléments irréductibles de l’anneau C[X] sont les polynômes de
degré 1.
2. Les éléments irréductibles de l’anneau R[X] sont les polynômes (à
coefficients réels) de degré 1, et ceux de degré 2 à discriminant < 0.
On définit valuation vala P de P relativement à a par
• valai P = Mi si 1 ≤ p ≤ N
• vala P = 0 si P (a) ̸= 0
• On convient aussi que vala(0) = +∞.
C’est donc l’exposant de X − a dans la factorisation de P , et aussi le plus
grand entier k tel que (X − a)k | P . On a aussi
val0 P = val P.
Dans la pratique on retient aussi que vala P = α ∈ N si et seulement si on
peut écrire
P = (X − a)α Q avec Q(a) ̸= 0.
et bien sur Q ∈ C[X].
Si P (a) = 0, vala P s’appelle aussi la multiplicité de P en a. On dit que
a est une racine multiple de P si vala P ≥ 2.
A cause de la relation deg P = α1 + · · · + αN , on dit que le degré d’un
polynôme est égal au nombre de ses racines, comptées avec leurs multi-
plicités.
On définit alors le PGCD et le PPCM de P1, . . . , Pn comme les polynômes
unitaires tels que
∀a ∈ C, vala(P1 ∧ · · · ∧ Pn) = min(vala P1, . . . , vala Pn)
∀a ∈ C, vala(P1 ∨ · · · ∨ Pn) = max vala P1, . . . , vala Pn)
On a encore les formules suivantes, dont les deux premières qui expriment la
vocation des PGCD et PPCM :
92
93 Propriétés Soient K un sous corps de C et P1, . . . , Pn ∈ K[X], alors
▶ dans l’anneau K[X] :

1. Div(P1 ∧ · · · ∧ Pn) = Div(P1, . . . , Pn),


2. Mult(P1 ∨ · · · ∨ Pn) = Mult(P1, . . . , Pn),
3. De plus si P1 et P2 sont unitaires on a : P1P2 = (P1 ∧ P2)(P1 ∨ P2).
C’est donc DivK[X] et MultK[X] qui interviennent ici. En particulier le PGCD
et le PPCM sont aussi dans K[X] (même si leurs racines n’appartiennent pas
à K), c’est d’ailleurs le point principal à justifier, compte tenu de ce que nous
savons déjà, (les propriétés sont donc claires si K = C). Lorsque K = R ce
▶ point découle du théorème décrivant la factorisation dans R[X].
Preuve rapide. 3) découle encore de
α + β = min(α, β) + max(α, β).
Si n = 2, 1) résulte de ce qui a été dit dernièrement, mais aussi du fait qu’on
▶ peut encore appliquer l’algorithme d’Euclide pour calculer P1 ∧ P2, qui
appartient donc bien à K[X]. Cet algorithme est quasi identique à celui dans
Z et repose sur 1), avec K = C. La seconde résulte alors de la troisième !
Le cas n ≥ 2 s’obtient alors par récurrence immédiate en utilisant “l’asso-
ciativité” de ∧ et de ∨.
Remarque. Bien que la description des polynômes irreductibles de K[X]
dépende fortement du sous corps K, la divisibilité, le PGCD, le PPCM et les
coefficients de Bezout se calculent dans K[X], et donc ne dépendent pas du
choix de K (quand il y a du choix).
L’algorithme d’Euclide permet aussi de calculer les coefficients de Bezout
et donc de prouver le
94 Théorème (Bezout) ∀A, B ∈ K[X],
∃U, V ∈ K[X], A ∧ B = U A + V B.
1 = A ∧ B ⇔ ∃U, V ∈ K[X], 1 = U A + V B.
▶ Remarque. On peut encore caractériser le PGCD comme le commun divi-
seur unitaire de plus grand degré, et le PPCM comme le commun multiple
unitaire de plus petit degré. Les polynômes unitaires jouent le même rôle ici
que les entiers positifs dans Z.
▶ Nullité d’un polynôme. Pour qu’un polynôme P de degré ≤ n soit nul,
il suffit donc qu’il ait au moins n + 1 racines.
93
95 Corollaire Soient P, Q ∈ C[X] et I un sous-ensemble infini de C (par
exemple R, N, ou [0, 1]).
1. Si P est nul sur I alors P = 0.
2. Si P = Q sur I alors P = Q.
Preuve.
Remarque.
Autrement dit, P est déterminé par sa restriction à I
PI : I 7→ C, t 7→ P (t).
Une telle fonction est dite polynomiale.
Ce principe peut par exemple servir à définir la dérivée de P ′ de P , comme
expliqué page 100, plus généralement pour les fractions rationnelles. On peut
alors énoncer :
96 Théorème (formule (exacte) de Taylor)
Soient n ∈ N et A ∈ C[X] un polynôme de degré ≤ n, a ∈ C et p ∈ N∗ :
′ ′′ (X − a)2 (n) (X − a)n
1. A = A(a) + A (a)(X − a) + A (a) + · · · + A (a)
n
2 n!
k
X (X − a)
= A(k)(a) .
k!
k=0
▶ 2. vala(A) ≥ p ⇔ 0 = A(a) = A′(a) = · · · = A(p−1)(a)
avec égalité si en plus A(p)(a) ̸= 0.
3. A = 0 ⇔ 0 = A(a) = A′(a) = · · · = A(n)(a).
ainsi une racine double doit annuler A et A′.
Remarque. Bien qu’on n’ait pas d’algorithme pour calculer les racines d’un
polynôme (de degré ≥ 5), le point 2 permet, avec l’algorithme d’Euclide,
de définir un algorithme permettant de compter les racine simples, doubles,
triples, etc d’un polynôme, et donc en particulier de connaitre le nombre de
ses racines (mais on obtient en premier le nombre de racines de plus grande
multiplicité).
Preuve rapide. Le critère 2, qui est le point le plus important pour cette
UE, découle du point 1, de même que 3.
Pour 1, il suffit de vérifier pour tout réel t que
′ (t − a)2
′′ (n) (t − a)n
(1) : A(t) = A(a) + A (a)(t − a) + A (a) + · · · + A (a)
2 n!
94
on observe les relations (qui sont vraies sur R donc partout) :
k ′
(X − a)k−1
 
(X − a)
k≥1⇒ =
k! (k − 1)!
A(k)(0)
(1), et donc (3), est presque évident si a = 0 car ak = .
k!
(3) est donc vrai pour tout a ∈ R car t 7→ A(a + t) est encore polynomiale
de même degré que A.
(1) est donc vrai pour tout a ∈ R en appliquant (3) à la différence ∆(a, t)
de ses membres.
Finalement (1) est vrai pour tout a ∈ C, car si on fixe t ∈ R, alors le
polynôme a 7→ ∆(a, t) est nul sur R, donc nul. CQFD.

F) Corps des fractions rationnelles K(X)


Ici K = R ou C.
Il est plus compliqué d’exposer rigoureusement ce qui concerne les fractions
rationnelles et les fonctions rationneles. On s’est efforcé de le faire dans le texte
qui suit, mais en amphi, on ira souvent plus vite, car en vérité la maitrise des
définitions précises n’est pas très importantes pour la pratique, même si elle
peut légitimement turlupiner un étudiant exigeant.

1) Notion de fractions rationnelles

On peut voir une fraction rationnelle comme un quotient


f = P/Q
de deux polynômes, f (z) est évidemment défini si Q(z) ̸= 0, mais aussi dès
que f peut se simplifier en une fraction à dénominateur non nul en z.
Un point de vue plus général consiste à invoquer le résultat suivant (qui
est aussi utilisé pour construire Q à partir de Z) :
97 Théorème Soit A un anneau commutatif intègre, c’est à dire tel que
∀a, b ∈ A, ab = 0 ⇒ (a = 0 ou b = 0)
Alors, A est un sous-anneau d’un corps commutatif F (appelé corps des
fractions de A), vérifiant
na o
F= où a, b ∈ A et b ̸= 0 .
b
95
C(X) désigne alors le corps des fractions de l’anneau C[X].
Si A est un sous-anneau de C,
 
P
A(X) = ∈ C(X) | P, Q ∈ A[X] et Q ̸= 0
Q
désigne le corps des fractions rationnelles à coefficients dans A. On
vérifie facilement que c’est un sous-corps de C(X).
Comme pour celui décrivant les anneaux quotient, le théorème précédent
décrit ce qu’il est utile de connaı̂tre 30 pour étudier ou utiliser F, et sa preuve
utilise une relation d’équivalence.
Principe de la preuve. On montre qu’on définit une relation d’équivalence
sur F = A × A∗ (en notant A∗ = A \ {0}) par
(a, b) ≃ (a′, b′) ⇔ ab′ = ba′
et des opérations sur le quotient F = F/ ≃ par
−−−−→−−− −→ −−−−−−−→
(A, B)(A′, B ′) = (AA′, BB ′)
et
−−−−→ −−− −→ −−−− −−−−−′−−−→
(A, B) + (A , B ) = (AB + BA , BB ′)
′ ′ ′

Qui font de F un corps commutatif.


On vérifie ensuite que
φ : A → F, a 7→ (a, 1)
est un morphisme d’anneaux injectif.
On termine d’ordinaire en disant qu’on identifie a et φ(a). (Les injec-
tions servent parfois à voir l’ensemble de départ comme un sous-ensemble de
l’ensemble d’arrivée.)
Si on n’est pas satisfait par cet argument, on peut utiliser une “routine” de
théorie des ensembles : En modifiant si besoin la construction, on se ramène
au cas où F ∩ A = ∅. On note ensuite
B = A ∪ (F \ φ(A))
On a encore une bijection ψ : B → F qui vaut φ sur A et l’identité sur
F \ φ(A), et on définit la structure de corps recherchée sur B par
x + y = ψ −1(ψ(x) + ψ(y)) et xy = ψ −1(ψ(x)ψ(y))
(on peut considérer que les lois sur B sont les “lois images” par la bijection
ψ −1 des lois sur F.)
30. Cela sous-entend une sorte d’unicité de F qui n’est vraie qu’à isomorphisme près, les étudiants intéressés la trouveront
facilement dans la littérature.
96
2) Factorisation des fractions rationnelles

En factorisant le numérateur et le dénominateur d’une fraction rationnelle,


on obtient après simplification la factorisation décrite ci-après :
98 Théorème Soit F ∈ C(X) \ C[X].
Il existe des nombres complexes a1, a2, . . . , an ∈ C deux à deux dis-
tincts, des entiers α1, α2, . . . , αn ∈ Z∗ et λ ∈ C∗ tels que :
n
Y
F = λ(X − a1)α1 (X − a2)α2 · · · (X − an)αn = λ (X − ak )αk
k=1

De plus cette factorisation de F est unique à l’ordre près.


On dit que F est unitaire lorsque λ = A.
A cause de l’unicité de la factorisation, on peut alors définir pour a ∈ C la
valuation en a de F comme l’exposant vala(F ) de X − a dans la factori-
sation de F , plus précisément on pose donc avec les notations précédentes :
— pour 1 ≤ k ≤ n on a vala(F ) = αk ,
— pour a ∈ C \ {a1, a2, . . . , an} on a vala(F ) = 0.
Cela étend donc aux fractions rationnelles des définitions déjà introduites
pour les polynômes. On rappelle aussi, pour les polynômes constants que :
— vala(0) = +∞
— vala(c) = 0 pour c ∈ C∗. (plus formellement, vala(cX 0) = 0)
Lorsque αk = −n, avec n ∈ N∗, on dit que a est un pôle de F , d’ordre
n = |αk |.
Lorsque vala(F ) = n ≥ 1, on dit parfois que a est une racine de multi-
plicité (ou d’ordre) n de la fraction rationnelle F .
99 Corollaire Pour qu’une fraction rationnelle F ∈ C(X) soit nulle, il
suffit qu’elle admette une infinité de racines.
Propriétés de la valuation.
On note ici a ∈ C, F, G ∈ C(X).
1. vala(F G) = vala(F ) + vala(G)
2. G ̸= 0 ⇒ vala(F/G) = vala(F ) − vala(G)
 
3. vala(F + G) ≥ min vala(F ), vala(G) .
4. F ∈ C[X] ⇔ ∀z ∈ C, valz (F ) ≥ 0.
97
Valuation d’un polynôme P ∈ C[X]. On a
val P = val0 P
degré d’une fraction rationnelle
Si F = A/B avec A, B ∈ C[X] et B ̸= 0, alors on pose
deg F = deg A − deg B
(cela ne dépend pas du choix de A, B mais uniquement de F .) Si F, G ∈
C(X).
1. deg(F G) = deg F + deg G
2. G ̸= 0 ⇒ deg(F/G) = deg F − deg G
3. deg(F + G) ≤ max(deg F, deg G)
Attention ! Pour une fraction rationnelle, la relation deg F = α1 + · · · + αn
(avec les notations du théorème) entraine seulement que le nombre N des ra-
cines de F , comptées avec leurs multipliciés, vérifie N ≥ deg F .

3) Fonctions rationnelles

Composition de polynômes. Soient A, B ∈ C[X]. On note bk le coeffi-


cient de degré k de B. On écrit alors indifféremment
deg
XB
B◦A= bk Ak = B(A).
k=0

(Attention à ne pas lire le terme de droite comme un produit !)


On convient, par définition que ces formules sont encore vraies lorsque
⇝ A ∈ C(X).
On a immédiatement, si C ∈ C[X] :
(B + C) ◦ A = B ◦ A + C ◦ A
et
(BC) ◦ A = (B ◦ A)(C ◦ A)
Evaluation d’une fraction rationnelle.
Soit F ∈ C(X). On dit que F est définie en a ∈ C[X] si a n’est pas un
pôle de F , on pose alors
A(a)
F (a) =
B(a)
98
dès que F = A/B avec A, B ∈ C[X] et B(a) ̸= 0.
C’est possible car le membre de droite ne dépend que de F . On peut
remarquer que (A, B) est unique si on impose que B est unitaire et premier
AC
avec A. Les autres écritures envisagées de F sont alors de la forme f = BC
avec C(a) ̸= 0 et on a bien
A(a)C(a) A(a)
= .
B(a)C(a) B(a)
On a encore dès que F, G ∈ C(X) sont définies en A :
(F + G)(a) = F (a) + G(a) et (F G)(a) = F (a)G(a)
si en plus G(a) ̸= 0,  
F F (a)
(a) = .
G G(a)
Composition de fractions rationnelles.
Supposons en plus que H ∈ C(X) ne soit pas un polynôme constant de
valeur un pôle de F . Alors on définit de même la composée F ◦ H par
A(H)
F ◦ H = F (H) =
B(H)
dès que F = A/B avec A, B ∈ C[X] et B(H) ̸= 0. On a les règles
(F + G) ◦ H = F ◦ H + G ◦ H et (F G) ◦ H = (F ◦ H)(G ◦ H)
et
F ◦H
(F/G) ◦ H =
G◦H
si G ◦ H est défini, et pour la troisième formule si G ◦ H ̸= 0.
Notons encore la formule évidente, mais qui est souvent utilisée comme
notation générale (car elle précise la lettre choisie pour l’indéterminée X) :
∀F ∈ C(X), F = F (X) = F ◦ X.
Fonction rationnelle Soient I une partie infinie de C et CI (X) l’ensemble
des fractions rationnelles définies sur I, c’est à dire définies en tout x ∈ I.
Pour F ∈ KI (X), on dit que l’application FI : I → K définie par FI (x) =
F (x) est la fonction rationnelle sur I associée à F .
Soient F, G ∈ KI (X), alors
FI = GI ⇒ F = G
99
car F − G a une infinité de racines.
Une fonction rationnelle f : I → K est donc associée à une unique fraction
rationnelle F telle que f = FI , on peut donc poser deg(f ) = deg(F ), appeler
racine de f les racines de F , . . ., etc.
A cause de ces propriétés, on confond souvent fraction rationnelle et fonc-
tion rationnelle.
On appelle principe de prolongement des identités le fait suivant : Si
deux fractions rationnelles F et G coı̈ncident sur un ensemble infini, alors
elles sont égales. Ce principe peut être utilisé pour étendre aux fonctions
polynômes (ou rationnelles) complexes des propriétés connues des fonctions
polynomiales réelles. On peut aussi l’utiliser pour établir l’énoncé suivant :
100 Propriété Soient F, G, H ∈ C(X) telles que G ◦ F et H ◦ (G ◦ F ) soient
définies, alors on a la formule d’associativité H ◦ (G ◦ F ) = (H ◦ G) ◦ F .
On appelle dérivée de la fraction rationnelle F ∈ C(X) l’unique fraction
rationnelle F ′ ∈ C(X) telle que la fonction numérique de la variable réelle
t 7→ F (t) admette pour dérivée t 7→ F ′(t). Pour un polynôme on a donc
n
X
0 n ′
(a0X + a1X + · · · + anX ) = kak X k−1
k=1

et pour tout polynôme non constant :


deg A′ = deg(A) − 1.
On a (par prolongement des identités) pour toutes F, G ∈ C(X) :
(F + G)′ = F ′ + G′, (F G)′ = F ′G + F G′
et si G ̸= 0,  ′
F F ′G − F G′
= .
G G2

4) Décomposition en éléments simples sur C

L’ensemble
1 ∗
P = {X n, n ∈ N} ∪ { , où a ∈ C et n ∈ N }
(X − a)n
est une base du C-espace vectoriel C(X). Plus précisément :
100
101 Propriétés et définitions (décomposition sur C)
n
P Y
Soit F = , avec P, Q ∈ K[X], avec Q = (X − ak )αk , pour n ≥ 1,
Q
k=1
αk ≥ 1, les ak ∈ C étant deux à deux distincts.
Alors F s’écrit sous la forme suivante :
k −1
n αX
X X µk,l
F = λk X k +
(X − ak )αk −l
0≤k≤deg F k=1 l=0
| {z } | {z }
partie polynomiale pôle ak
| {z }
partie polaire
les coefficiants λk , µk,l ∈ K étant uniques (ils ne dépendent que de F ).

Remarque. Toute G ∈ C(X) admet donc une décomposition en éléments


1
simples du type précédent, avec K = C, par contre 1+X 2 ∈ R(X) n’admet
pas de telle décomposition avec K = R).
Le R-espace vectoriel R(X) admet pour base l’ensemble A constitué de
toutes les fractions de l’une des formes suivantes :
• X n, avec n ∈ N,
1 ∗
• (X−a) n, n ∈ N

• P1 , avec P ∈ R[X] irréductible unitaire de degré deux et n ∈ N∗



• X
P , avec P ∈ R[X] irréductible unitaire de degré deux et n ∈ N
Plus précisément :
102 Théorème (décomposition sur R)
P
Soit F = Q , avec P, Q ∈ R[X], avec
n
Y m
Y β
Q= (X − ak )αk Pk k
k=1 k=1

pour n, m ∈ N, αk ≥ 1, βk ≥ 1, les ak ∈ R étant deux à deux distincts


et les Pk ∈ R[X] étant deux à deux sans racine commune, irréductibles
dans R[X], unitaires et de degré 2.
Alors FXs’écrit de manière unique sous la forme suivante :
F = λk X k +
0≤k≤deg F
| {z }
partie polynomiale
101
k −1
n αX m βX k −1
X µk,l X bk,l X + ck,l
+
(X − ak )αk −l (Pk )βk −l
k=1 l=0
| {z } k=1 |l=0 {z }
pôle ak pôle Pk
| {z }
partie polaire
10 les coefficiants λk , µk,l , bk,l , ck,l ∈ R étant uniques.
(par convention, une somme vide vaut zéro)
On peut noter ici
valPk F := −βk = valzk F = valzk F
10 si Pk = (X − zk )(X − zk ).

5) Preuve et méthodes de calcul

L’unicité est assez facile à établir, en utilisant à nouveau des limites conve-
nables.
L’sxistence est plus compliquée. La division euclidienne permet de se ra-
mener au cas où deg F < 0. Ensuite le théorème de Bezout permet de se
ramener au cas ou il y a un unique pôle a, ou bien deux pôles complexes
conjugués a et a si K = R.
Si le pôle est unique et nul c’est évident, s’il n’est pas nul, on se ramène
au cas précédent en considérant F (X + a).
Enfin l’existence dans le cas de deux pôles non réels conjugués peut s’ob-
tenir par récurence sur l’ordre des pôles en additionnant les parties pôlaires
relatives à chacun des deux pôles. Elle peut aussi s’établir par une division
en puisances croissantes, comme explique en fin de section (qui repose aussi
sur une récurrence assez simple).
Tous ces arguments interviennent aussi dans la recherche pratique de la
décomposition.
La connaissance de toutes les règles ci-après n’est pas attendue dès ce
semestre, mais elle reste la bienvenue !
Calcul pratique de la décomposition en éléments simples de F sur R ou
sur C :
• La premier objectif est de savoir écrire la forme de la décomposition (1)
(avec des coefficiants inconnus), sur C comme sur R.
• Une méthode générale de calcul des coefficiants est de réduire au même
dénominateur le membre de droite de (1) et d’identifier les coefficiants
102
des numérateurs des deux membres.
• On utilise souvent l’évaluation de (1) en des nombres simples tels que
0, 1, −1, i,. . .etc pour obtenir des relations entre les coefficiants.
• On utilise souvent de même la limite en +∞ de tk F (t), avec k =
−deg F .
• Dans le cas où F ∈ R(X), la partie polylomiale F∞ de F est la même
dans les décompositions sur R et sur C ; de même pour la partie
Fa relative aux pôle a si a est réel ; par contre si a ∈ C \ R et si
P = (X − a)(X − a), alors la partie FP relative au pôle P est la somme
1
des parties Fa et Fa, de plus le coefficient de est le conjugué de
X −a
1
celui de .
X −a
A
• Si F = avec A, B ∈ C[X], alors la partie polynômiale F∞ est
B
le quotient de la division euclidienne de A par B, il est donc nul si
degF < 0 et de même degré que F , sinon. Il peut être utile d’observer
que pour pouvoir calculer ce quotient F∞, lorsque deg(F ) = d ≥ 0, il
suffit de connaı̂tre les d + 1 coefficiants de plus haut degré de A et de
B.
On peut aussi observer que le coefficiant de plus haut degré de F∞
s’obtient directement par une limite en +∞.
• Supposons que a ∈ C, n ∈ N∗, A, B ∈ C[X] avec B(a) ̸= 0,
A
F = ; on a donc ici vala(F ) ≥ −n. Alors :
(X − a)nB
▶ Si a = 0, alors la partie polaire de F relative au pôle 0 est donnée
par F0(X) = QXn−1 n , où Qn−1 désigne le quotient de la division en
puissance croissante, à l’ordre n − 1, de A par B.
▶ Dans le cas général la partie polaire de F relative au pôle a est donnée
par :
n−1
λ0 λn−1 X λk
Fa = + · · · + =
(X − a)n X −a (X − a)n−k
k=0

n−1
X
Où λ0, . . . , λn−1 ∈ C sont les composantes du quotient λk X k de
k=0
la division en puissances croissantes, à l’ordre n − 1, du polynôme
A(a + X) par le polynôme B(a + X).
103
▶ le premier coefficiant λ0 s’obtient directement par une évaluation en
a de (X − a)nF (X)
A
• Cas où F = avec A, B ∈ R[X], P = λ(X − a)(X − a) pour un
BP n
λ ∈ R et un a ∈ C \ R vérifiant B(a) ̸= 0 :
Les deux premiers coefficiants b0 et c0 de FP (correspondant au terme
b0 X + c 0
n
) peuvent être obtenus par évalution en a de P nF , et en
P
considérant les parties réelle et imaginaire de l’équation obtenue).
A
Enfin si F = n , on peut obtenir la dćomposition en éléments simples
P
de F en efectuant des divisions euclidiennes successives, par P (de A,
puis du quotient, puis du quotient suivant,. . .etc).
Complément. (hors programme, donné à titre indicatif)
La formule de Taylor donne un “développement limité” d’ordre n de la
fraction rationnelle F en a. On peut l’écrire ici, dés que a n’est pas un pôle
de F : n
X
(k) (X − a)k
F = A (a) + (X − a)n+1G
k!
k=0
avec G ∈ C(X) défine en a.
La formule à l’ordre n − 1 est suffisante pour trouver la partie polaire
relative à a d’une fraction admettant a pour pôle d’ordre n, c’est à dire une
fraction de la forme
1
F
(X − a)n
avec F définie en a.
Si F (a + X) = BA (avec B(0) ̸= 0), on peut aussi obtenir ce développement
à l’aide du 1) du théorème suivant, qui est un analogue de la division eucli-
dienne, et qui est comme cette dernière l’objet d’un algorithme de calcul
simple :
103 Théorème (division en puissance croissante)
Soient A, B ∈ K[X] avec B(0) ̸= 0 et n ∈ N.
1) Alors il existe un unique couple (Qn, Rn) de polynômes à coefficiants
dans K, vérifiant les conditions :
A = BQn + Rn, deg(Qn) ≤ n et val(Rn) > n
On dit que Qn et Rn sont respectivement le quotient et le reste de la
division en puissance croissance et à l’ordre n de A par B.
104
2) Plus généralement, si P ∈ K[X], deg P ≥ 1 et 1 = P ∧ B, alors
il existe une unique suite finie (Q0, Q1, . . . , Qn, Rn) dans K[X], avec
deg Qk < deg P et
A = B(Q0 + Q1P + Q2P 2 + · · · + QnP n) + P n+1Rn.
Remarques.
Pour 1) la condition sur le premier reste signifie qu’il est de la forme Rn =
X n+1Q, avec Q ∈ K[X].
On observera encore que l’égalité s’écrit A ≡ QnB [X n+1], ce qui entraı̂ne
que dans le calcul pratique de Qn, seules comptent les classes A et B
de A et B, modulo X n+1 ; autrement dit, avant de faire le calcul, on peut
simplifier A et B, et à chaque étape du calcul, on peut “négliger” les termes
de valluation > n.
Pour 2) on a remplacé X par P . L’égalité exprime alors une factorisation
de A par B modulo P n+1, plausible d’après le théorème de Bezout, puisque
1 = B ∧ P n+1, ce qui d’ailleurs permet de prouver l’énoncé 31 si n = 0. Le
cas général s’en déduit par récurrence (en divisant Rn à l’ordre 0).
Cette décomposition ressemble un peu à l’écriture décimale d’une fraction
rationnelle r ∈ Q en base 10, lorsqu’on remplace 10 par P , mais ici les
puissances sont croissantes ! Si B = 1, on obtient une expression de A très
semblable à l’écriture en base 10 d’un entier (avec dans les deux cas des
coefficients nuls à partir d’un certain rang).

31. Q0 est le coefficient de Bezout de B, unique à cause de la condition sur son degré.
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