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Le kiosquier du square ne
fait pas d'histoires
Auguste Picrate
Oeuvre publiée sous licence Creative Commons by-nd 3.0
En lecture libre sur Atramenta.net
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Limons les prolégomènes !
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pognon ! Les actionnaires seraient contents, les écolos nous
serreraient la louche. Cela arrangerait beaucoup de monde et ce
n’était pas si compliqué que cela à mettre en œuvre. Il fallait juste se
lancer, ne pas avoir peur.
Putain de pudeur !
Qu’est ce qu’on perdait comme temps !
Et si tout le monde fait comme moi en se défilant ?
Encore heureux que je me foutais pas mal de ma descendance !
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Depuis des années que je me coltinais ma tare, celle d’ex poivrot
« borderline », j’avais appris à placer quelques garde-fous qui me
permettaient de vivre à peu près comme tout le monde mais je savais
que j’allais rapidement crever si je ne soulevais pas de temps à autre
le couvercle de mes émotions lancées comme des crabes vivants dans
une marmite en ébullition.
Est-il utile de vous préciser que j’étais aussi dans ma période
« métaphores poétiques Prisunic »…
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une ancienne magasinière qui avait évolué dans les relations
publiques mais one ne va pas pouvoir tout aborder d’un coup, sous
peine de confusion, et c’est pour cela qu’il y a plusieurs chapitres.
Les chapitres, c’est bien pratique !
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C’était l’occasion d’une nouvelle expérience, de reconsidérer
certains préjugés sur les entrepreneurs.
C’était l’occasion d’apprendre à faire le distinguo entre ceux qui
bossaient dur et ceux qui palpaient de l’oseille sans jamais se salir les
mains, ceux qui décidaient et ceux qui s’adaptaient aux contraintes
économiques.
Depuis que je prenais des cours d’harmonica électronique, j’étais
vachement plus détendu. J’étais plus ouvert à l’esprit "phalanstère".
Je me pensais tout seul dans ma tronche, aux possibilités offertes par
une cohabitation, à défaut d’une entente, entre industriels, chefs
d’entreprise à taille humaine et artisans avec les avant-gardistes
associatifs. les scientifiques avaient bien réussi à bosser avec les
naturalistes, les écolos à pull en laine, alors pourquoi pas
décloisonner un peu, juste un peu.
A une époque je voulais distribuer des matériaux d’isolation
naturelle. Je refusais de faire de l’isolation avec du polystyrène ou de
la laine de cancer. Je ne jurais que par la laine de bois et le fermacell
(plaques de gypse cellulose) et le liège Mélior. Seulement, mes
clients voulaient du PVC et du stratifié alors j’ai fermé ma première
boite au bout de quatorze mois. J’avais parfois de bonnes idées mais
l’aspect pratico-pratique m’emmerdait, les lois comptables, les
normes pondus par les poules pondeuses à tête d’œuf élevées en
batteries. J’aimais bien bidouiller avec trois bouts de ficelle et des
mots. J’aimais jouer. J’emmerdais les normes !
Ambivalent, ambigu ou nuancé, je savais que les normes
permettaient aussi de protéger les personnes exclues des droits. En
somme, je n’étais ni plus ni moins qu’un anarchiste gaullien.
J’admirais le jeune général De gaulle qui s’était opposé à sa
hiérarchie, De Gaulle le visionnaire, et j’aimais le Dany le rouge
l’illuminé, jeune. J’aimais les Rolling Stones des années 70 et le
René Dumont des années 90. J’aimais presque tout le monde en
fait !
J’avais appris en fréquentant une choriste punk à adoucir ma rage
en dedans. A force d’écouter du reggae tous les vendredis, je m’étais
adouci. J’étais moins binaire, moins con.
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A présent, le mec qui isole par l’extérieur avec des matériaux issus
de la pétrochimie, je le remercie, parce que je raisonne globalement,
en termes de bilan énergie grise. J’en ai ma claque des jugements
hâtifs qui mène à des impasses, du genre, "Ton cadre de vélo est en
alu, c’est pas bien, c’est énergivore ! Ton panneau photovoltaïque est
sur un support alu, ta membrane SOPRASOLAR est en bitume
SBS" et autres conneries du genre dignes de clampins mouches du
coche, écolos de salons avaleurs de mouches, punk en carton, qui ne
font que critiquer pendant que les autres agissent.
On aurait pu poser l’arc et ses flèches quelques minutes, prendre
une petite pause et réfléchir ensemble. Je rêvais d’une union sacrée
artisans, industriels ingénieux, scientifiques et militants associatifs.
J ’en avais ras le bol également des réflexions du genre : "T’as
pas vélo, t’es pas écolo ! " Je ne prétendais pas à l’exemplarité. Je ne
cherchais plus le plan détaillé du monde de demain, je cherchais des
réponses immédiates, des solutions concrètes. Il était impossible sauf
pour un génie de l’écologie d’être en permanence en cohérence
parfaite avec idées puisque nous ne maîtrisons plus ce qu’il advenait
de notre pognon, puisque la finance nous tenait en laisse.
Les mêmes mecs qui m’insultaient en me traitant d’activiste
khmer vert de rage, me reprochaient, lorsque je participais à un
happening organisé par le collectif animalier 06 , de ne pas
m’occuper des clodos ou des femmes battues ou des enfants esclaves.
Ces mecs ne faisaient rien d’autre que de phraser en l’air sans se
soucier de la déperdition énergétique qui en résultait.
Revenons-en à nos brebis :
Quoiqu’il en soit, j’étais, cette fois, moi, trimeur de la vraie
gauche, à des années lumière de la situation dans laquelle les patrons
se grattaient les couilles pendant que les ouvriers assemblaient,
j’étais dans le monde la PME familiale, aux antipodes du CACA 4O
"Bienvenue dans un monde meilleur ! Et vas-y que j’entourloupe ! "
J’étais dans le monde de l’entreprise dans laquelle on peut piger
que rien n’est simple, pas autant que dans les slogans que je clame
lorsque je défile le premier mai, même si ce constat ne m’empêchera
de crier à l’unisson, la bouche en cœur, des formules lapidaires le
prochain premier mai.
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J’étais dans le monde réel qui en prenait plein la gueule et qui
devait s’adapter aux desiderata de financiers et mordre la poussière.
J’étais dans le monde de ceux et celles qui subissaient mais qui
allaient finir, tôt ou tard, par faire avaler leurs calculettes dans la
gueule à tous ces planqués en costard cravate qui nous pompaient
trop d’air. Je n’attendais que cela.
Comme toujours, agissant en qualité de punk en carton plâtre
sans la crête, je devais juste tempérer un peu ma rage en dedans. Je
devais attendre que le monde vire au no futur, ou sans issue. Simple
question de temps ! Et alors là, tout le monde se mobiliserait car les
solutions existaient.
Ce qui comptait après des années d’instabilité chronique, c’était
que je garde mon emploi sans y perdre mon identité, que je fasse ma
place.
Je devais pourvoir rentrer le soir, vanné physiquement, mais pas
lessivé psychologiquement, pas stressé, pas préoccupé par le
lendemain. Parce que j’avais des choses à faire, des choses très
importantes pour mon équilibre, du genre écrire, apprendre et faire
un peu, participer à quelques actions.
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autant.
Je cherchais des solutions pour limiter la suconsommation que
nous faisions de sacs plastiques. Je devais tout simplement trouver
des solutions concrètes pour être un peu plus en adéquation avec mes
idées. C’était bien plus facile à coucher sur le papier qu’à mettre en
pratique ! Sinon, ce ne serait pas autant le bordel ! Je recyclais les
pochettes qui emballaient les journaux que je recevais par
abonnement. J’utilisais l’emballage du Politis pour jeter les crottes
des chats ou alors je prenais des vieux jounraux, mais cela ne
suffirait pas à faire de moi un type bien et responsable. Il fallait aller
plus loin que quelques actions symboliques sans grande portée. Ce
n’était pas si simple mais réalisable. Il suffisait de le vouloir
vraiment. Et quand j’aurai réussi à être un poil plus cohérent, je
trouverais plus facilement les mots pour proposer à mon boss
d’élargir sa gamme de ses emballages, sans tourner le dos à sa
responsabilité de chef d’entreprise.
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Nous devons, dans ce chapitre, aborder la dimension
psychologique et sociale de cette histoire, c’est mon rôle en tant que
Monsieur Loyal.
J’aimais écouter les gens, leur parler mais je détestais ceux qui
voulaient épater les autres, les convaincre à tout prix. J’étais un piètre
militant parce que je ne voulais pas vendre mon programme. C’est à
peine si j’osais distribuer un tract. Je préférais faire du "flying", la
technique qui consiste à piloter un ULM à gazogène ou un drone à
cellules solaires, au choix, selon sa motivation du moment, pour
balancer des milliers de tracts en papier recyclé. Les tracts pour
l’évènement ALTERNATIBABAR.
Des jeunes actifs, des étudiants, des artistes avaient décidé de
mettre leur grain de sel dans les enjeux climatiques qui étaient
habituellement débattus entre "grands de ce monde" entourés de leurs
conseillers payeurs de mots.
L’idée était de créer un évènement festif, mobilisateur, afin de
monter que les initiatives citoyennes existent d’ores et déjà. Nous
devions juste faire monter l’info un cran au dessus, toujours plus
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haut.
Ce qui me plaisait dans cette initiative, c’est que le message était
clair, le mot d’ordre "Changeons le système, pas le climat" limpide et
qu’en associant des partenaires institutionnels et associatifs, en
mélangeant des citoyens impliqués et des simples curieux, on devrait
pouvoir faire monter un peu plus la sauce. Le parti pris était de voir
le bon côté de la lorgnette, de valoriser ce qui marchait et faire fi des
divergences. Je m’étais toujours méfié des "grandes messes" et puis
j’aimais bien habituellement rester dans mon petit cercle de "gens qui
savent comment sauver le monde", qui ont le plan de montage du
monde de demain avec tous les boulons et puis je n’aimais pas les
jeunes.
Ceux là étaient différents. Ils avaient la tête sur les épaules. Ils
rêvaient à plusieurs et réussiraient à donner envie à d’autres de se
bouger le popotin. C’étaient des "rallumeurs d’espoir", des
"souffleurs d’avenir".
Ils ont le plan d’une usine à biogaz qui permet transformer en
"positve vibration" des choses pas belles à entendre.
Il va falloir changer, companeros !
Aujourd’hui, mon patron m’a proposé un plan réglo. Il m’a dit que
si je lui ramenais des parts de marché en développant la signalétique
et la branche accessibilité, qu’il m’intéresserait, non pas en filant
directement du pognon car je n’avais pas envie de changer de tranche
fiscale - même si je trouvais normal de payer des impôts - mais
qu’il me prendrait des parts d’une des coopérative dont je faisais la
promotion lors de salons "écolos rigolos", la coopérative de fiannces
solidaires la NEF, Energie partagée/ ENERCOOP , ou TERRE DE
LIENS. Il était rusé mon patron, car ainsi il pourrait communique sur
autre chose que du vent. Je l’aimais bien.
La dernière fois que j’ai parlé à mon père, il m’a dit, avec des
sanglots dans la voix : « J’ai échoué, tu n’y arriveras pas »
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Notez bien, qu’il n’a pas dit « Là où j’ai échoué, tu n’y arriveras
pas non plus ».
A quoi faisait-il allusion ? A la lutte des classes ?
La lutte des classes ? Vous voulez rire ou quoi ? Ce terme est bien
trop connoté ! Ce n’est déjà pas facile de dégotter des lecteurs, alors
allons-y mollo sur le vocable craignos !
A la lutte contre ses déchets ? Pour les merdes de la litière de mes
chats, devais-je les jeter dans un sac en "plastique pratique" qui
finirait dans l’estomac d’un animal marin ou directement dans les
chiottes en consommant neuf litres d’eau ?
Je savais qu’il y avait urgence à se décider. J’étais prêt à faire des
petites concessions sur mon mode de vie mais il ne fallait pas trop
m’en demander. J’attendais que tout le monde s’y mette tout en
sachant que ce n’est pas le meilleur angle d’attaque, sauf pour celui
qui cherche une bonne planque…
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modes de productions, nos modes de vie et nos priorités.
La technologie aurait pu permettre de réinventer le travail mais les
gains du progrès étaient spoliés par les capitaines du Titanic qui
contrairement à Edward John Smith, se sauvaient dès la première
secousse.
Cela faisait des lustres que l’on conversait gentiment à propos du
réchauffement climatique, de la disparition de la biodiversité, de
pesticides, de l’agriculture intensive mais l’urgence, c’était de
réhabiliter l’entreprise, faire confiance aux investisseurs. Il leur
fallait moins d’obstacles à leur expansion, moins de contraintes.
Promis, juré, ils créeraient des richesses et des emplois, tout en
chantant le crédo « développement durable, croissance verte ».
Et qui oserait douter de leur sincérité ?
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des alternatives à la grand route double voie « Demain, ce sera
chouette / Hier c’était mieux ». Il y avait une culture de la résistance
à opposer aux faiseurs d’opinions gnan-gnan.
On ne pouvait pas revenir en arrière, il fallait innover, jeter les
cendres, torcher le cul du vieux capitaliste capitaine d’industrie de
mon cul et réfléchir ensemble à ce que devait être le progrès, notre
définition, pas celle de ceux qui se gavaient et qui nous dictaient
notre conduite.
Il n’y avait pas d’un côté les bons et les méchants. Ce qui me
gêne c’est que l’on si soit prompt à dénoncer les passeurs mais qu’on
laisse tranquille les spéculateurs qui provoquaient depuis leurs
terminaux des émeutes de la faim.
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temps.
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Je savais que j’allais me planter mais je voulais essayer quand
même. D’après mon édifice théorique, cela pouvait marcher.
Les gens, las d’être distraits et à l’écart de leur choix de vie,
allaient se remettre à lire des journaux, de vrais journaux et je
pourrais maintenir ouvert mon petit kiosque qui était là depuis la nuit
des temps en luttant pour la liberté d’opinions. C’est tout ce que je
demandais.
Que ce soit avec mon assureur, avec mon banquier, avec mon
employeur, je n’ai pas l’impression de traiter de partenaire à
partenaire, ni que nos intérêts soient toujours conciliables. Je suis
heureux que le Droit me protège des abus de pouvoir et inquiet que
des gens bien intentionnés, au nom du réalisme et de la croissance
économiques, n’aient cesse de vouloir réduire cette protection qu’ils
nomment "carcan". Pour moi qui suis faible, ces droits comptent. Il
en fallu des guerres et des grèves pour les obtenir et je ne pense pas
être plus heureux en apprenant à m’en passer. J’ai fait déjà beaucoup
de concessions pour devenir un honnête besogneux qui ne se plaint
jamais. En tant que salarié, j’aimais les jours fériés du mois de mai,
j’aimais les années où on l’on pouvait gratter quatre jours. En tant
que commerçant, les jours fériés, à l’exception du premier mai,
c’était un bon chiffre d’affaires. Le premier mai, c’était sacré même
si en tant que gogo-consommateur, j’étais content de trouver des
magasins ouverts pour acheter de la bière.
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Il est question dans ce recueil d’aborder, avec légèreté, des sujets
essentiels, comme la fin d’un monde, l’agonie du veau d’élevage
industriel, la crise de la presse écrite, la disparition des abeilles, les
concours de fadaises organisés par des ados désœuvrés et d’un
éléphant qui a tué son dresseur lors d’une excursion touristique.
C’est très fouillis, comme la devanture d’un kiosque des années
cinquante, mais il y a un plan à défaut d’y avoir une intrigue : Il y a
un un et un deux, un avant, un après. J’aimerais que cela serve
témoignage pour les jeunes qui n’ont pas connu cette période sombre
de la civilisation.
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Les publicitaires, emberlificoteurs & enfumeurs associés ont
essayé de récupérer tout ce qu’il pouvait en faisant comme si ils
étaient du bon côté, tout ce qui existait et qui commençait à émerger
mais cela s’est retourné contre eux. Ce qu’ils avaient réussi avec le
rock, ils n’ont pas pu le faire avec la transition citoyenne.
Bon, en fait, car je vous dois bien de petits bouts de vérité, les
dernières paroles de mon père, que j’ai eu au téléphone l’avant veille
de son accident, ont été : "Oui je sais bien que je mange trop de rôtis
de dinde" car mon père avait mal au ventre mais il faut dire qu’il se
nourrissait très mal. Il bouffait trop d’œufs et trop de dindonneau et il
ne variait pas les mets. Quand on vit seul, on n’a pas toujours envie
de prendre soin de soi. C’est con de n’avoir que cela en guise de
phrases historiques mais la vie est faite aussi de petits tracas et de
mesquineries.
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économique d’avant !
La Poste avait perdu sa réputation à force d’utiliser sans vergogne
du personnel insuffisamment formé et motivé. D’une manière
générale les services publics d’hier étaient sans commune mesure
avec les centres de profit d’aujourd’hui, Les gens le savaient, ils en
parlaient ouvertement alors comment réagissait la Poste ? Elle faisait
des spots publicitaires télévisés pour dire à quel point elles prenaient
ses missions à cœur. Je suppose que ces spots devaient toucher une
partie de la population.
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Le hic, c’est que je ne sais pas si l’on y parviendra ni ce qu’il
convient de faire. Mon pessimisme radical me freine et empêche à
mes véritables aspirations d’avoir la moindre chance de voir le jour.
Il me rend inopérant et inefficace. Je suis habitué à ce que toutes les
tentatives pour influer sur un changement radical soient des pets
foireux et je sais que je dois changer, avant toute proclamation
grandiloquente, de manière d’être pour gagner un tout peu plus sur
la distance qui me sépare avec mes belles idées.
Le gros problème, ce qui m’empêche de me défiler, c’est que je
constate
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en cause les organisations. J’avais besoin des autres, même si cela
me faisait chier de devoir l’admettre.
C’était toujours cette histoire de la cruche, à moitié pleine ou à
moitié vide ! Je n’aimais plus vider les verres comme avant et je
n’aimais pas me prendre la tête sur mon temps libre. Je n’aimais pas
composer avec les adjudants chefs du militantisme qui se sentaient au
dessus de la mêlée, qui se croyaient investi d’une mission
civilisatrice et qui vous donnaient des ordres sur un ton que n’oserait
pas utiliser le plus rétro des patrons. Ancien objecteur de conscience,
j’acceptais que les organisateurs d’une action de rue soient
autoritaires lorsqu’il s’agissait de cadrer au mieux les activistes dans
un souci d’efficacité, d’éviter que les électrons libres déchaînés
entraînent tout le reste du groupe dans une danse guignolesque, mais
pas lorsque cette autoritarisme peinait à dissimuler un mal-être, une
peur d’être dans la rue et que son action passe une fois de plus
inaperçue.
J’aimais les mots mais je n’aimais pas les slogans. Je ne me
sentais pas à l’aise dans un parti politique. Je pouvais me reconnaître
dans les valeurs défendues par les partis alternatifs mais les moyens
habituels d’actions pour conquérir le pouvoir, pour exercer une
quelconque influence, me laissaient dubitatif. Il fallait en passer par
là, par une stratégie déployée patiemment permettant de conquérir
des suffrages à tous les échelons mais je n’étais pas assez motivé
pour consacrer du temps à des tâches si ingrates.
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de longue haleine, que sur "l’événement". Je préférais me
"spécialiser" plutôt que d’avoir réponse à tout car je me méfie des
génies qui ont tout compris. Bref la vision "généraliste" et les
grandes lignes de la société du futur que me proposait mon parti
m’intéressait intellectuellement mais je me sentais plus utile en
boulonnant sur un ou deux thèmes du programme du monde
enchanté de demain.
Je ne voulais pas exercer non plus un sacerdoce pendant mon
temps disponible pour les loisirs. J’avais été élevé dans l’ère du
temps "consommateur qui peut donner son avis tout en se faisant
plumer ", contrairement aux animaux.
Je ne voulais pas pour autant abdiquer toute implication dans les
choses de la cité. Je cherchais ma voie, tranquillement. Je voulais être
concerné, impliqué mais pas enragé ni même engagé dans une
quelconque mouvement qui me pousse à renoncer à tout sens
critique.
Ce qui clochait dans mon raisonnement, c’est que d’un côté je
misais tout sur la démocratie active, sur les mouvements populaires,
mais au fond, je méprisais les gens. je les trouvais cons, simplistes ou
trop compliqués, jamais à la hauteur d’une utopie. Je me suis coltiné
pendant des mois des lecteurs de Coloser, franche démence et cie,
alors vous pensez bien, que les citoyens de la future sixième, ne se
bousculaient pas au portillon.
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fallu redécouvrir le bon usage des termes et savoir ce qu’il y avait
derrière les beaux discours finassés des emberlificoteurs de première.
Il a fallu se réapproprier la culture populaire, faire vivre la presse
écrite qui a quelque chose à dire, et laisser aux imbéciles heureux la
possibilité de se distraire en lisant et en regardant les images de la
presse à scandale, les laisser dans leur monde. Le combat pour que
les imbéciles aigris qui voient des complots partout aient honte de
parler a été vite torché. Il fallait juste qu’ils restent chez eux devant
leur télévision. Il fallait qu’ils se cachent, qu’ils n’osent pas ainsi
étaler leur ignorance poisseuse ! C’était un simple retour des choses :
« Au lit, les abrutis ! » C’est un combat auquel j’avais souvent
renoncé par lassitude, par "empêchement d’agir" mais surtout par
fainéantise.
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Le kiosque du square
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de la planète et la disparition des espèces. Je vais faire comme si cela
ne faisait pas déjà un quart de siècle que l’on se sert la louche et que
l’on pond de belles déclarations lors des conférences sur l’effet de
serre, compensant par de la communication ce qui ne sera jamais
réalisé.
Je vais supposer que si deux restaurants se font face à face et que
l’un met du temps à servir les clients car le choix a été fait de
confectionner une carte exigeante, tandis que l’autre sert de la
"merde" mais avec un soin très particulier apportée à la présentation
et qu’il se targue d’être un lieu branché depuis qu’une star de la télé
réalité y a déjeuné, je vais émettre l’hypothèse que le premier
restaurant ne fera jamais faillite et que les gens finiront par le
fréquenter en masse. Je vais faire comme si les gens avaient du goût
du savoir-vivre, et l’esprit aiguisé et savaient faire le distinguo entre
la forme et le fond.
Je ne vis pas pour l’écriture mais c’est parce que j’écris que je suis
en vie. J’ai envie de vous raconter ce qui s’est passé dans ma tête
pour que je devienne kiosquier et ce qui s’est produit avant et après
L’an quatorze de l’an Pépin zéro moins un et je retiens deux. Le
moment où tout a failli, failli …
Non, le moment où le monde a vraiment basculé …
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Il ne faudrait surtout pas que j’aborde des sujets polémiques sous
peine de rebuter des lecteurs qui feront l’effort de me lire. Parler de
la souffrance animale, des animaux enlevés pour servir de cobayes,
des pratiques barbares de gavage, des bêtes élevées pour faire des
cols de doudoune, cela risquerait de heurter ceux et et celles qui
lisent pour se détendre. Parler de mon engagement à gauche, cela ne
peut que me desservir car les lecteurs qui seraient d’accord avec mes
convictions n’ont pas besoin qu’on leur explique une énième fois les
méfaits du libéralisme débridé et ceux qui pensent différemment
n’apprécieraient pas le mélange des genres..
L’étude de marché
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étudier rationnellement les données du problème, ne pas se précipiter
tête baissée dans n’importe quelle profession sous prétexte qu’elle
cadrait mieux avec l’étiquette d’écrivain que celle de factotum.
Je n’avais pas une thune, pas encore trouvé une deuxième activité
viable et régulière mais j’y croyais, je m’y voyais déjà et je m’y suis
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tellement vu que j’ai fini un jour par avoir les clés de mon kiosque à
journaux.
Des femmes !
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J’aimais faire des rencontres, j’aimais le cul lorsque mon cerveau
restait connecté (parfois, il ne l’était pas, et là je m’ennuyais) mais je
n’appelais pas mes rencontres éphémères des plans cul car je ne
programmais rien et j’aimais parler avant et surtout après avoir baisé.
Il m’a expliqué qu’il avait eu trois patrons dans sa vie dont une
patronne qui s’y connaissait pour de bon en plomberie. Il avait
toujours été grande gueule et indiscipliné. Impossible de lui
demander s’il était de droite ou de gauche car un kiosquier ne doit
pas faire de politique. Un kiosquier fait du commerce !
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Faire l’article coûte que coûte
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vérité, c’est que je me suis installé dans une caravane pendant
quelques mois mais j’étais sur un terrain familial, et j’avais l’eau, le
chauffage, l’électricité et accès à la salle de bains, bref pas vraiment
dans le trip du "poète maudit".
Je ne lui ai pas parlé de ma garde à vue ni de tout ce qui aurait pu
intéresser le lecteur de la rubrique faits divers, non le seul message
que je voulais faire passer était que je ne me prenais pas pour un mec
au dessus de la mêlée. Je ne me prenais pas pour un intello mais
j’étais curieux et je m’intéressais plus à la politique qu’au sport.
Je pensais au sexe mais il n’y avait pas plus de cul dans mon livre
que dans l’émission préférée de ma mère "les zamours" ou dans les
sketchs des humoristes actuels qui gravitaient dans la comète
Télévision. Je n’étais pas cohérent et exemplaire mais j’étais fidèle à
mes convictions. Je n’étais pas prêt à faire trop de concessions quant
à la forme. Je voulais simplement expliquer en quoi un mec ordinaire
devait se sentir impliqué dans un renouveau idéologique car le
libéralisme nous dépossédait et nous confisquait le pouvoir
démocratique à force de nous rendre bêtes et stupides. Je m’étais fait
piéger aussi et j’avais envie d’aborder le sujet, quitte à gaver
quelques lecteurs.
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bien à l’impact local qui en résulterait (ma boulangerie, la caissière
du magasin de bricolage, mes voisins abonnés à Nice matin etc…).
Un sourire plus appuyé signifierait que j’étais passé à la postérité,
que j’avais basculé dans le camp des écrivains localement connus
une fois dans l’année.
Cela me fit penser à mon état d’esprit lorsque Laetitia
l’overbookée me promettait de semaine en semaine que l’on allait
manger ensemble… J’étais toujours sur le qui-vive, à attendre un
événement qui ne se produirait pas.
Je ne voulais pas être inféodé à quoi que ce soit. Je devais certes
prendre des initiatives, ne pas tout miser sur le hasard, actionner
quelques leviers mais cela marchait mieux lorsque je ne prenais pas
mes vessies pour des lanternes.
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En attendant de révolutionner le métier de distributeur de presse,
voire même de gagner ma vie en vendant des canards, la réalité, à
travers la consultation de mon compte en banque en ligne, voulait
mettre son grain de sel. Avec quoi allais-je compléter cette source de
revenus ? Allais-je trouver des clients ?
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Un matin d’écrivain du quotidien
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temps pour se cultiver et que l’on ne se ferait plus détrousser sa vie
pour des gens sans scrupules.
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d’une cafetière (comme Balzac) et je regarde les offres d’emploi
envoyées sur ma messagerie pendant la nuit par Pole emploi (comme
beaucoup). Je regarde les offres, mes mails, je me connecte sur les
sites de recherches documentaires qui m’ont permis d’écrire Pot
cherche cornichon (PCC), à savoir Badoo, tchatche, facebook et
j’écris si l’inspiration est là. En principe, l’intention du soir de
fignoler un devis, un plan ou dresser une liste de fournitures s’est
évaporée dans la nuit.
Rien ne sert de se précipiter !
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depuis longtemps, déjeuner à la Dominante, un de mes restaurants
préférés. J’en ai eu pour 15 euros, la somme que je venais
d’empocher.
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relaxant du PDG, que nous étions, mine de rien, au troisième rang
mondial en ce qui concerne la productivité horaire (derrière la
Norvège et les Etats Unis). On comprend facilement que les
méthodes et l’organisation du travail à l’origine de cette
performance, induisent des problèmes graves de santé au travail
(troubles musculo-squelettiques entre autres) et de violence
psychologique. Et là, le jeune poète s’est demandé : Mais pour qui et
pourquoi et pur encore combien de temps ?
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après une série d’échecs. Mon avenir en dépend.
Je voulais que mon kiosque reste ouvert. Ce n’est pas moi qui
déterminait ce que je devais vendre. Mon fournisseur, le Marquis,
choisissait les quantités et les titres.
Il s’est déroulé de longs mois au cours desquels j’ai voulu agir
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normalement comme tout le monde, enfin comme tous les petites
gens qui n’ont plus le choix. Alors, j’ai considéré que ce qui comptait
c’était de tenir le coup, et que je devais transformer mon kiosque de
journaux en un centre de profits, élaborer "un concept kiosque store
loundge dédié aux lecteurs sénior" pour leur bien-être bien
évidemment mais qui ciblerait leurs désirs compulsifs de
consommateur et qui déclencherait l’ouverture du porte monnaie.
S’il fallait pour cela vendre des magazines bien emballés et avec des
gadgets en plastoc, comme à la belle époque de pif gadget, je suivrai
la tendance. J’étais prêt à tout pour réussir.
Lorsque vous êtes à votre compte, payé à la commission, votre
esprit critique peut s’émousser.
Si vous contestez, vous êtes négatifs, vous serez alors mal perçus,
mis sur la touche. Nous devons être positifs, aller de l’avant, accepter
les changements et ne pas craindre la modernité. Les clodos ont un
portable et un poste radio alors de quoi se plaignent -ils ? Les gens
ont les RTT et des conditions de travail moins dures et moins
dangereuses que dans le passé. Avant, c’était mieux ?
42
A présent des excités de la calculette s’amusent sur le dos des
cobayes-consommateurs-producteurs en spéculant sans se soucier des
répercussions sur l’économie réelle. On ne peut plus rien faire. Enfin,
si vous tenez à être "positif", vous devez penser qu’il n’y a rien de
mieux à faire que d’aller toujours en avant car "qui stagne régresse
et qui philosophe, paresse."
Celui qui tente d’avoir un regard critique sur toutes les "avancées"
que l’on nous vend à coup de slogans passe pour un rétrograde, un
vieux con. Il est plus simple de se foutre de tout et de profiter du
temps présent.
Tous les accords (TAFTA et cie) négociés plus ou moins par des
représentants politiques et des experts en catimini nous enferrent
encore plus dans un ordre immuable qui ne pourra cesser par des
amendements démocratiques car l’avenir est juridiquement
cadenassé, mais par sa totale disparition. Seul un élan populaire nous
autoriserait à reprendre la maîtrise de notre destin commun. Allons-
nous y parvenir en agitant nos pancartes en carton ? Allons-nous
infléchir le cours de l’histoire en organisant des conférences ?
Pour ma part, j’ai eu un début de prise de conscience que le
monde enchanté décrit par la télévision n’était pas tout à fait le
monde réel dans lequel j’aurais à me dépatouiller par le biais d’une
affiche exposée à la bibliothèque du lycée et grâce à une série de
conférences organisée à la fac de lettres sur les limites de la
croissance à toute zingue (Ingmar Granstedt, René Dumont etc…)
Je ne vois pas d’autres moyens de changer les mentalités qu’en
informant, qu’en encourageant les braves gens un peu endormis à
ouvrir les yeux (et à relire l’allégorie de la caverne de Platon s’ils en
ont envie…).
43
très efficace. Ici, il n’était pas question de distribuer des tracts qui
allaient s’entasser dans les poubelles mais il y avait une table
d’informations pour répondre à toutes les questions aux alternatives
existantes car bien évidemment, il ne s’agit pas seulement d’être
contre. Il y avait du matériel mais qui est ré-utilisé à chaque
évènement (pancartes en carton plume, affiches dignes de ce nom,
combinaisons de peintre…)
Une action bien menée comme celle-ci touche plus de personnes
qu’un défilé de centaines de manifestants braillant des slogans car la
dimension artistique, la performance, est reconnue et il est plus
gratifiant de participer à une action qui s’avère efficace que de pisser
dans un violon en faisant acte de présence à un cortège. Je crois que
la transition se fera plus avec l’appui des artistes qu’avec celui des
pro de la politique.
44
discussions en tous genres. Tout le monde pouvait mener ses propres
investigations, colporter des rumeurs, dénoncer en masse un pauvre
type et puis on a commencé à le faire en parlant à table, à se monter
les uns contre les autres, à se calomnier, à se sentir en danger, à se
considérer en guerre contre les autres et à ne plus oser bouger pour
sauver le système. Le résistant est devenu un sale type. Les gens ont
osé être bêtes au grand jour ! Place réservée à la légèreté désormais !
Les gens s’adaptent, et même ont l’air de trouver cela normal. Les
gens ont l’air heureux tant que l’on peut les distraire.
45
Une matinée de sombre couillon
Je suis allé manger mon croissant et boire mon café. J’aime bien
l’endroit, surtout quand il y a la vendeuse qui me plaît beaucoup mais
je sais que je suis trop vieux pour elle alors je me contente de la
regarder. Ce matin, je n’étais pas à la hauteur.
46
Je devais partir avant 10 heures pour faire des travaux pour ma
mère, et je ne suis parti, en vélo, qu’à 11 heures trente.
Tandis que je pédalais, j’imaginais ce que je pourrais manigancer
pour faire les titres de la presse locale :
47
visiblement qui a réussi à récupérer le chien, et là, il s’est passé
quelque chose car le punk qui riait à moitié - mais avait la haine
d’avoir perdu la face - a dû sentir tous les regards braqués sur lui car
il a donné une toute petite tape à son chien et a pris le parti d’en rire.
Le chien avait l’air de dire : "Je suis vraiment tombé sur un maître
con ! Soit je me coltine cet abruti toute ma vie, soit il va me vendre
au plus offrant et allez savoir sur qui je vais tomber ! Peut être un
merdeux qui m’utilisera comme chien de combat "
Et voilà encore une journée vite passée ! Le seul acte que j’ai fait,
digne d’un écrivain, c’est de m’être installé sur un banc public pour
lire mon hebdomadaire. Ne me croyez pas assez bête pour vous dire
qu’il s’agit de Politis car je n’ai pas envie que l’on me colle le patch
"de gauche", sur le front !
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Je regarde passer le tram
La situation géographique
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La jolie kiosquière qui va ouvrir à la station de tram suivante, ne
va pas vous faire perdre votre clientèle car ce n’est pas tant une
question de distance géographique mais une question d’habitudes. Si
les gens vous ont à la bonne et vous ont inscrit sur leur itinéraire, et
que vous avez toujours de la monnaie, le sourire, et les journaux
qu’ils veulent, ils continueront à venir vous rendre visite et à vous
faire travailler. Après avoir discuté avec la kiosquière, quelques mois
après, il s’avérera que tout ce que l’on m’avait raconté sur son
compte n’était que pures productions d’esprits limités, de racontars
de petites gens racistes du front bas qui se croient au dessus de la
mêlée qui aiment bavasser et dénigrer.
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Niquette à la médiathèque
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Pour m’occuper l’esprit, je dresse une typologie de ma clientèle de
quartier. Les gens ne sont pas méchants mais ils sont nostalgiques et
font ainsi la haie d’honneur aux néo fascistes.
Cette appréciation peut satisfaire un commerçant mais pas un
écrivain alors je vais essayer de creuser un peu et déterminer pour
quelles raisons je me sens proche, malgré nos divergences, de mes
clients de droite.
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Il y des personnes qui achètent encore un assortiment de journaux
d’opinion de tendances différentes mais elles se font rares. Celui que
j’avais, je l’ai vexé, car je lui ai dis que j’étais ici pour vendre des
journaux, pas pour faire de la propagande, et que ses idées néo
nazies, il pouvait se les garder. Et ces histoires de Charles Martel et
Cie, avec… Et depuis il passe devant mon kiosque sans me saluer.
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n’oublie pas que je suis commerçant.
La rumeur
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Quelle honte pour un marchand de journaux d’entendre toutes se
fadaises !
55
Bon ok un trou ne ressemble pas à un autre trou et chaque femme
monte en puissance différemment, ça c’est réglé, je le sais.
Pourquoi ne pas considérer que le "parcours découvertes"
s’achève et qu’il est temps de monter en altitude ?
C’est bien excitant de faire de nouvelles rencontres mais puisque
les femmes classes, distinguées, intelligentes et raffinées me font
encore peur, je sais d’avance que les femmes avec lesquelles je
fricote me lasseront vite. Même si je ne choisis pas les plus tartes
allant jusqu’à préférer une moins jolie qui a de l’humour à un joli
corps aux idées creuses, la manière dont je les aborde mène à
l’impasse car je suis trop pressé. Et je m’emmerde très rapidement !
Je pensais que c’était l’alcool qui provoquait autant de besoins
compulsifs de baiser. Il n’en est rien. Depuis plus de trois mois, je ne
bois que des bières sans alcool et des panachés et pourtant je suis
toujours dépendant des sites de tchatche sur internet. Je suis un
pauvre type.
56
plateau leurs revues préférées. Ils sont attentifs aux petits signes à la
manière dont je les accueille. J’aime les gens, à petites doses et
j’adore discuter avec des individus différents.
L’hippopotamuse
57
Le prix du contrôle technique et du ruban adhésif pour réparer le
rétroviseur de mon coupé AX 4 chevaux moteur TU, qu’elle m’a
coûté cette chichiteuse de première !
Je n’ai pas chances avec les Nadia de 5O piges. Je sais pourtant
que le restau n’est que rarement le bon endroit pour un premier
rendez-vous si on n’a pas baisé préalablement. Si cette soirée, à
inscrire au palmarès des soirées pourritures, me servait de leçons et
m’incitait à ne plus utiliser les sites de tchatche, mais pensez vous !
Après tout, si je tiens un kiosque, c’est avant tout pour y dénicher
une femme idéalement normale.
58
par arrêter.
Plusieurs fois, j’ai failli me lever, régler la note et la planter avec
son téléphone mais je me disais que la soirée ne devait pas se
terminer ainsi sinon je n’aurais rien à raconter dans mon feuilleton
sentimentalo-pratique.
59
Mortelles journées
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gueule) et de déterminer un mode opératoire. Celui qui m’observait
ce matin n’était pas futé, ça se voyait rien qu’à sa tête. Déjà, ne
serait-ce que par correction, cet amateur aurait pu attendre que j’ai
récupéré à la poste mon colis contenant mon pack sécurité, enfin mon
colis anti-agression : Deux bombes, une matraque, un porte clés avec
une goupille qui déclenche un sirène dont tout le monde se fout.
La distraction.
61
m’achète les échos ou les petites affiches. Moi, si j’étais truand, je
sympathiserai toujours avec mes victimes, je les mettrais en
confiance avant de leur prendre la caisse.
Le shérif bijoutier
62
protection animale, il y aurait des membres que je ne voudrais pas
voir car si je ne suis pas pour l’auto-justice et le lynchage en ce qui
concerne un commerçant qui défend sa boutique, je ne vais pas
utiliser non plus le vocabulaire et les méthodes de simili fachos pour
défendre les animaux.
63
elle m’attirait car je n’aimais pas les femmes soumises.
Je voulais une femme que je pourrais admirer sans qu’elle ne
cherche à prendre le dessus. Elle voulait me revoir. Moi j’attendais
qu’elle ait trouvé un remplaçant.
J’en avais bien une dans le collimateur mais elle n’aimait pas Joey
Ramones, bien qu’il soit plus de sa génération que de la mienne,
alors je ne savais plus quoi penser.
J’essaye, j’y vais, je tente, je tends une perche, je fais trois pas en
arrière, je plaisante, je badine, je lui parle avec les yeux ? J’y vais ou
j’y vais pas ? Je me saborde ou j’aborde, mille milliards de sabord !
Est-elle chiante ou exigeante ? Est-ce qu’elle chante bien ? Dois-je
la craindre ? Serait-ce une égérie en puissance ?
64
Mouna Louze Klaxon
65
l’embrasser ? Un des Dieux qui zonent dans les hautes sphères allait-
il être sensible à mon bon cœur et favoriser la publication de l’article,
de mon panégyrique, tant attendu après cette action caritative ?
Mouna passait me voir tous les jours à mon kiosque. Elle avait
mis du temps avant de me demander de la dépanner. Je savais que
donner l’aumône revenait à donner un pourboire dans votre bistrot de
quartier. En créant un précédent, vous créez un avantage acquis, et
vous savez comment ça fonctionne, quand il s’agit de retirer un
parachute doré, à un dirigeant d’entreprise, il s’agrippe avec ses
mains manucurés, c’est le problème des avantages acquis. Avec un
pauvre, c’est plus facile, il a l’habitude d’être déçu, d’être jeté.
66
depuis que nous connaissions le plein emploi…
Mouna buvait la bière des clodos, celle qui tape, se faisait des
clopes avec des mégots et passait ses journées à regarder en l’air, à
attendre un signe du ciel, la cigarette au bec. Je m’étais un peu
accroché avec elle pour qu’elle aille au rendez vous fixé par son
assistance sociale.
Cette femme en détresse est une personne à part entière qui n’a
pas toujours été du côté des invisibles. Avant d’être frappa-dingue,
elle a exercé des emplois à responsabilité, elle a gagné beaucoup
d’argent, donc c’est forcement une femme de valeur.
Mouna était "à l’ouest" et se trouvait sur un terrain glissant, à 57
ans.
Elle organisait son "échec, c’était évident . Elle aurait du faire ceci
ou cela ! L’assistante sociale lui avait demandé de venir avant 8h30
car il y avait du monde, elle avait bien insisté là dessus. Je l’avais
réveillé à six heures trente, lui avais bien expliqué l’itinéraire et je
l’ai vu passer vers 9 heures devant mon kiosque, la gueule enfarinée,
voulant me taxer de cinq euros et d’un café.
Je l’ai envoyée promener.
67
radio potins, j’ai appris que la version racontée par Mouna de son
éviction n’était pas tout à fait conforme avec la réalité. Elle avait été
congédié quatre fois déjà et un ami du mec dont elle était censée
s’occuper m’avait dit qu’elle ne foutait plus rien et que Monsieur
PAUL ne voulait plus l’entretenir. Mouna voulait de l’argent pour
partir et elle en voulait toujours plus. Elle avait vécu 12 ans avec un
mec et elle voulait son cadeau de rupture. J’étais déçu que mon
image d’Epinal de la veuve qu’il fallait secourir soit ainsi écornée
mais pas tellement surpris. Il devenait difficile de trouver des
histoires qui déjouaient les pronostics de ceux qui aimaient les
préjugés. En somme Mouna était dans la merde mais elle l’avait bien
cherché.
68
pressé de soulager sa conscience ? Face à Mouna, dans l’urgence, je
savais que si lâchais du lest, si je cédais, si je ne défendais pas ma
réputation de commerçant et mes intérêts patrimoniaux, je ne
pourrais alors difficilement me défaire d’une situation délicate.
Mouna compterait alors sur moi car j’aurais créé un terrain favorable
aux attentes sans bien en délimiter les contours.
69
distribution qui font des actions symboliques en faveur du
développement durable et que les grosses fortunes qui font semblant
de se soucier des pauvres.
70
L’expert et le conférencier ne lisent pas les
mêmes livres
71
J’ai reçu ce matin des revues intéressante sur les sciences et sur
l’art.
Il faut faire des choix : Mettre en évidence ce qui est censé se
vendre, les revues racoleuses, ou faire le pari que les spécialistes qui
prétendent connaître le goût des autres, se trompent et que les gens
ne sont pas totalement réfractaires à la culture.
En principe, je n’ai pas mon mot à dire sur les magazines que je
vends. Je peux par contre commander, en faibles quantités, des titres
que le Marquis omet de me livrer, préférant les publications censées
être plus rentables. Il y a de plus en plus de titres qui s’adressent à de
« non lecteurs »
Pour moi, c’est du gaspillage de papier. Comme s’il s’agissait
d’une bataille de petits soldats de plomb - celle, me semble-t’il
perdue d’avance de l’éveil des consciences contre les catapultes de
connerie récurrente - je reste vigilant dans la guerre des linéaires
pour que les revues qui prennent ouvertement les gens pour des cons
n’occultent pas les autres. Ce matin, j’avais de quoi être fier de
vendre des journaux !
72
Une féministe qui s’épile
73
accepté de me faire lire ce qu’il écrivait. Il s’agissait d’une sorte de
sketch, enfin d’une enfilade de gags plus ou moins éculés (éculé,
hein, pas enculé ! Lol ! Enfin, voilà de ce genre là.. ). Le
protagoniste, je suppose qu’il se mettait en scène, rentrait chez lui,
dans son studio et se disait qu’il avait été cambriolé mais en fait
c’est seulement parce que c’était mal rangé ! Ah ah, je pouffe ! A
chaque fois qu’il ouvrait la porte d’entrée cela lui faisait cette
impression là. J’ai souri poliment. Il ferait mieux de nous parler de
la vie de tous les jours ou de politique mais il devrait éviter de
chercher à nous faire rire car il n’est pas doué. Je lis le Figaro, et je
l’emmerde ce donneur de leçons !
74
bien l’autre jour, il a pissé dessus ! Je l’ai vu faire du premier étage
et j’ai été obligé d’appeler un ami flic. On veut rendre service et
voilà ce qui se passe dans cette société d’assistés et de pochtrons !
75
Gaston Cosse
76
Aider celui qui ne veut rien faire revient à aider un alcoolique qui
est dans le déni et qui n’a pas l’intention de s’en sortir. Les perches
qui lui ont été tendues pourront lui servir un jour, ce n’est pas
toujours peine perdue, mais il ne pourra se sortir de la dépendance
que lorsqu’il aura lui même pris la décision et qu’il sera en mesure
d’assumer les changements qu’impliquent sa décision.
77
droite, j’ai la nette impression que pour eux je suis un peu niais, un
peu "paix et amour", aux antipodes de leurs représentations du
monde. J’ai toujours perçu le monde du travail avec les yeux du
salarié Tartampion qui doit être vigilant s’il ne veut pas se faire
entuber. Mes expériences de la vie concrète sont celles de l’ouvrier,
de l’employé, du chômeur, du technicien, de l’artisan, de l’auto-
entrepreneur, toujours tout en bas de l’échelle et parfois à deux pas
de trébucher. Lorsque je buvais, je voyais le monde vraiment tel qu’il
était, j’étais en plein dans l’horreur économique", pas du tout dans un
monde féerique ! Toutes les horreurs redoutés lorsque j’avais 20 ans
se sont produites et je ne veux plus de cette organisation là. J’ai donc
décidé, que le monde devait changer.
78
Je coquette, nous kiosquettons
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vie. Il y avait une situation urgente à régler, je le savais mais j’étais
un irresponsable. J’attendais d’être riche et célèbre pour pouvoir
l’aider et en attendant, qu’est-ce que je faisais, je vous le demande, je
coquettais !
80
Monsieur TAXE
Tiens, il est là celui qui voulait me taxer ! Il est assis deux rangs
plus bas de la réunion publique pour célébrer la réapparition, sous
une nouvelle formule du Patriote Cote d’Azur, "hebdo libre et
solidaire". J’ai peut être été un peu vif avec lui, il ne fait que son
boulot après tout mais cela m’a rendu furieux de devoir me passer de
ma radio parce qu’il et hors de question que je paye une telle taxe ! Il
me disait qu’il était d’accord avec moi et qu’il n’y pouvait rien, qu’il
devait croûter lui aussi. Quel boulot de con ! Débarquer par surprise
pour réclamer du pognon ! Deux mois que j’attends l’autorisation de
vendre des timbres, trois semaines que j’ai envoyé ma lettre au
directeur de la régie qui gère le tram afin que je devienne dépositaire
de coupons dix voyages, deux mois que j’attends le réassortiment
81
d’un hors série de l’Express et l’autre pingouin qui arrive
la gueule enfarinée pour me demander de raquer pour son
organisation, la SACEM. Il en pris pour son grade. Je suis surpris de
le voir ici.
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Le froid et le pipi
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s’auto-congratulant. Je ne savais pas comment m’en défaire sans être
impoli. Je ne pouvais plus écouter la radio puisque je refusais de
payer la SACEM. Je me faisais chier comme un rat mort.
Mes clients allaient finir par mourir. Les jeunes lisaient avec leurs
tablettes tactiles, si jamais ils lisaient, mais la presse papier, la presse
à papa, c’était cuit et moi j’étais fini.
84
Eve s’inquiète
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revues parlant de safaris chasse et d’armes à feu pour milices privées,
des revues porno hard, et des "valeurs actuelles" actuellement à la
hausse sur la marché de la résignation, de la honte avalée et de la
puanteur décomplexée.
Mais, ce qui me fait tenir le coup, c’est que j’ai aussi d’autres
journaux à vous proposer, à vous lecteurs qui me suivez…
86
Le PPFH
J’ai deux clients qui sont venus avec l’idée de taper la causette.
Cela fait partie de mes prestations. Parfois, je le fais avec plaisir,
parfois j’abrège car je n’arrive pas à me concentrer. Celui qui n’était
pas pressé ce matin, que j’aime bien du reste, m’a empêché de lire
mon journal car j’ai dû ensuite me dépêcher de faire ma gestion
quotidienne, c’est à dire pointer des listes pour m’assurer que tous les
journaux restitués ont bien été enregistrés, sinon, ils me sont facturés.
Ce n’est pas bien compliqué mais il faut le faire rigoureusement
sous peine d’avoir tôt ou tard des échéances rejetées. Je me demande
ce qu’attend la revue Challenges pour me proposer pour sa
couverture :
87
que mes fringues sentaient la cave et mes blagues le réchauffé, qui
sait ?
Il fallait donc que je devienne écrivain connu dans les deux jours
suivants afin de pouvoir faire venir plus de clients à mon kiosque. Je
ferais ainsi un meilleur chiffre d’affaires journalier, pourrais faire
face à mes prélèvements du compte pro et renflouer mon compte en
banque personnel que je venais de vider. Les autres solutions qui
s’offraient à moi consistaient à braquer la caisse de la banque postale
(à deux pas de chez moi, donc je pourrais me passer de voiture) ou
bien à jouer aux courses hippiques en ayant pris soin de bien lire
l’intégralité des pronostics des journaux spécialisés.
88
A ces contrariétés s’ajoutaient celles de la Sacem qui m’interdisait
d’écouter ma radio, des timbres de la poste que j’attendais depuis
deux mois et des coupons voyages de lignes d’azur.
Pour l’instant, je tenais bon. J’allais trouver des solutions pour le
cas où je ne serai jamais connu.
Parce que le monde réel sentait vraiment la merde …
89
Rasé de près
90
La décroissance dans les dents
91
pain complet, acheter du café dégueulassasse à moins de deux euros.
Je fais des économies, j’y arrive, mais le moindre faux pas, la
moindre contravention, une mise à la fourrière, une panne ou je ne
sais quoi et je suis cuit.
Je n’ai rien, rien de rien ! Même plus de quoi inviter une copine au
restau !
Alors j’ai vendu ma voiture car je n’ai plus les moyens de ce luxe
et je dois apprendre à faire sans, à me débrouiller sans emmerder les
copains qui en ont encore une. En somme je dois aller vers plus
d’autonomie, me désaliéner d’usages bien commodes mais non
nécessaires. De fait, soit c’est moi qui décide d’expérimenter des
alternatives concrètes, soit c’est la société marchande qui, petit à
petit, avant que cela ne devienne encore plus brutal, me retire tout.
92
Motivés, motivés !
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Avait-il d’autres choix ?
Attendre la fin de la crise ?
Mais quelle crise ? La crise de la presse ?
Fuir ? Pour aller où ?
Voir se pavaner les nouveaux cons qui n’ont peur de rien ? Les
vrais et les simili fachos.
L’immolation ?
Le laurier fleur ? le poison ?
Le suicide politique ? Je l’ai pratiqué pendant 15 ans quasi
ininterrompus. Je ne croyais en plus rien, je me battais pour rien,
pour du vent et je calmais mon feu intérieur à coup de rasades de
ricard.
Le sexe du chaud lapin en attendant le monde demain ? Quelle
couillonnade !
Bon sang qu’elle est longue cette transition ! Qu’il est pénible de
ne pouvoir que faire des constats sans pouvoir y changer quoi que ce
soit !
J’avais le moral plus bas que le niveau de la mer avant la fonte des
glaciers.
Je tenais debout, je tenais le coup, je ne buvais pas, et je restais
souriant et disponible, affable. J’attendais juste que le ciel me tombe
sur la tête et puis j’ai vu …
94
Niquette est passée aussi et elle en a profité pour me raconter sa
vie et me gratter d’un ticket de jeu.
Les clients les plus sympas se sont succédé. Ils devaient participer
à un concours de politesse organisé par la Mairie, c’était étrange. Le
commercial de Nice Matin est venu pour me parler des abonnements
en kiosque et il m’a proposé un nouveau présentoir, tout rouge, tout
neuf ! En prenant l’autoroute pour aller dans une grand surface de
bricolage, j’ai vu une remorque, sur le bas-côté, avec des panneaux
photovoltaïques pour, je suppose, de l’éclairage de signalisation de
chantier. Le solaire pour lequel je m’étais battu plus de 20 ans avant,
était devenu une réalité palpable. On ne se battait jamais en vain !
En ne faisant rien, il y avait bien plus à perdre.
Je ne devais pas faire ma "Mouna" (qui avait fini par trouver un
foyer), je devais filer droit et ne pas plier. Je devais bouger mon
corps autrement qu’au moment des heures des siestes crapuleuses. En
aucun cas, je ne devais laisser choir.
95
« Le courage, c’est d’aller à l’idéal
et de comprendre le réel ».
Jean Jaurès (discours à la jeunesse, ALBI , 1903).
96
Eviter de parler politique dans un roman
97
l’auteur ne nous concerne pas. Ses engagements, ses idées politiques
ne doivent pas gêner le plaisir de la lecture.
J’aime certains écrivains classés, à tort ou à raison, à droite. J’ai
adoré lire Louis Ferdinand Céline et Knut Hamsun. Je pense que
l’écrivain, le vrai, celui qui est lu, peut s’engager, mouiller sa
chemise, mais ne doit jamais confondre la rédaction de tracts avec sa
prose.
98
manière de parler au peuple sans pouvoir être taxé de "simplistes, de
démagogues ou de populistes" mais sans les gonfler, sans leur faire
peur, sans les faire fuir et déserter les assemblées citoyennes.
Comment attirer l’attention en disant des choses désagréables à
entendre ?
99
avec des mots.
Ils parlent bien, je ne dis pas mais alors qu’est ce qu’ils se la
racontent !
Des phrases à satiété , des concepts, des citations
et chacun de rentrer chez soi
en attendant des jours meilleurs
la révolution de nos pensées
avec le chauffage par le sol.
Ce qui est rassurant, c’est de savoir qu’ils ont réponse à tout !
La révolution des lumières est contenue dans leurs têtes !
Les militants, pas ceux qui causent au restaurant, m’énervent
avec leur mégaphone, leurs pancartes.
Les activistes me font flipper avec leur clandestinité, leurs prises
de risques.
Qu’on me laisse en paix !
Moi je suis dedans-dedors,on et off, je suis « entre ».
Pas content comme le con qui chante, mais pas militant comme
celui qui sonne le cor.
Fausses évidences
Yaka mettre le smic à 1700 euros, yaka prendre aux riches, yaka
utiliser les gains de productivité et faire croître les biens réellement
utiles au lieu de faire croître les dividendes en ajoutant de la
pollution. Yaka faire une société du mérite mais tendance
républicaine, celle du "à chacun sa chance", pas seulement "bonne
chance à celui qui est bien né et qui pétera dans la soie" et si ceux qui
sont bien nés ne veulent pas lâcher leurs privilèges, yaka faire une
révolution.
Et c’est tout ! Et ça ira, ça ira !
100
Heureusement qu’’il existe des experts pour contredire les experts
"offciels".
Il fallait donc leur faire confiance et s’ils disaient : l’économie
veut ça, il fallait baisser la tête et faire comme ils disent ces
messieurs et dames qui causaient si bien dans le transistor.
Ils pouvaient ainsi concilier des logiques assez opposées. Il
suffisait d’employer de nouveaux mots et balancer un peu de poudre
aux yeux.
101
On vivait plus longtemps, il fallait bosser plus longtemps. ce n’est
pourtant pas compliqué. Les chinois bossaient plus que nous, il fallait
bosser plus, baisser les charges, le COÛT du travail et ne pas trop
taxer ceux qui touchaient les bénéfices des richesses produites car
sinon, ils finiraient pas ne pas être de bons patriotes et par dissimuler
de l’argent ou ils iraient massivement s’installer au parc d’attractions
Flouze land. Il fallait faire des sacrifices au nom de l’avenir. Les gens
pauvres avaient du mal à comprendre cela ! Ils considéraient que l’on
foutait de leurs gueules alors qu’il ne s’agissait de s’adapter aux lois
économiques…
102
actuel où on taille les mots comme des haies de parc privés, arrogant
car c’est lui qui veut mener la danse de l’interview politique. Je ne
suis pas d’accord avec tout ce qu’il dit et sa façon de le dire mais je
suis d’accord sur l’essentiel, je le trouve cultivé, franc du collier,
honnête et responsable. Pour moi, c’est un "René Dumont " en plus
social. Il réhabilite le politique. Il est capable de créer une dynamique
avant que le recours à la dynamite ne soit la seule alternative.
103
réhabiliter l’éducation populaire et l’éveil politique.
Comme toi , je dis souvent "Je", mais je ne suis pas comme toi.
J’ai milité pour l’objection de conscience à 16 ans et pendant 15
jours au parti humaniste. A 20 ans j’ai adhéré aux Verts. J’ai
participé à quelques actions et campagnes électorales locales. Et
puis assez rapidement, j’en ai eu marre. Marre des gens, marre des
actions symboliques, marre de parler à des abrutis. Je n’ai pas eu
envie "d’évangéliser", pas eu la patience ou la volonté de surmonter
ma timidité afin de convaincre de la justesse mon credo républicain.
J’ai commencé à écrire, j’ai commencé à aimer boire et j’ai
commencé à me replier sur moi même, à m’enrouler autour de mon
nombril, à me plier en quatre pour me donner de bonnes raisons de
ne pas agir et j’ai subi, avec d’autres personnes résignées, les
bonnes paroles des gens qui savent et les bonnes actions de ceux qui
me promettent le paradis sur terre, demain. J’ai fait quelques
immersions, quelques apparitions (quelques manifs, asso de quartier
etc..) mais je ne me suis jamais vraiment impliqué. J’ai tenté d’être
pragmatique, concret, bosser dans les énergies renouvelables, faire
carrière dans le social, mais à force d’arrondir les angles j’ai
vraiment fini par tourner en rond. Je suis « entre », pas du tout dans
l’acceptation du modèle libéral mais pas non plus dans les luttes. Je
suis dans le rejet théorique, mais comme tu l’as bien expliqué à RTL
à laurent Bazin, ma logique de survie économique, ma peur de
perdre le peu qu’il me reste, m’amène à l’oblomovisme. Je suis
devenu, comme beaucoup de monde, un anti libéral en carton plâtre.
Je fais partie du décor et je ne dérange personne. Je subis les
changements, les récessions, les régressions.
J’en ai ras le bol ! Je suis né un mois après mai 68, tout était déjà
plié, et je me suis pris les chocs pétroliers en plein dans mes rêves de
société du progrès technologique. J’ai assisté à la prise de pouvoir
silencieuse des publicitaires, des capitaines d’industrie, des agences
de notation, des assureurs et des financiers. Boulots et salaires de
misère de magasinier, de facteur remplaçant, de chauffeur, de
menuisier bois, de menuisier alu PVC, de serrurier, d’animateur,
d’employé de bureau, artisan en micro entreprise, d’auto
104
entrepreneur, d’homme de maintenance. J’ai l’impression qu’un gros
rouleau à gazon m’est passé plusieurs fois dessus. J’ai pu me relever
mais à chaque fois, je suis pas mal secoué. Il m’arrive de guider
ceux qui poussent ce rouleau et il m’arrive de le pousser moi aussi.
Le mec pour qui nous le faisons, on ne le voit jamais mais on
suppose qu’il se la coule douce. Si le progrès c’est ça, je n’en veux
pas ! Les conséquences de l’inaction sont devenues intenable car
l’impasse est bel et bien réelle ! J’ai assisté au tout début des années
90, à des conférences animées par des personnes de valeur comme
René Dumont et je pense de puis longtemps que nous sommes à la
croisée des chemins (je pense donc j’essuie mes larmes). Je n’ai pas
de télé depuis deux ans, je résiste à certains désirs livrés prêt à
l’emploi par les publicitaires, je crois de moins en moins aux temps
forts médiatiques consacrés au réchauffement climatique et de plus
en plus en la planification écologique car les bonnes intentions ne
suffisent pas. J’espère un réveil citoyen, un sursaut démocratique
pour arriver à un "changement de paradigme", comme dirait Alain
Lipietz, ou alors nous assisterons à un putsch de la bêtise ambiante
avec des agissements comme ceux des consommateurs pressés de
faire des bonnes affaires sur les cendres du Virgin Mégastore et la
violence ne sera plus celle larvée (mais bien réelle) des donneurs
d’ordre mais elle sera celles de gens ordinaires déboussolés.
D’après un commerçant de ma famille, tu es le grand méchant qui
va faire fuir tous les riches, mais finalement, si le chercheur en
biologie dont tu parlais à une émission reste, lui, et continue d’aimer
son taf et de le faire bien, qu’un mec sans mérite particulier aille
vivre dans sa forteresse ailleurs ne va pas me déranger.
105
d’Auguste Picrate. C’est un peu la déroute d’une personne qui
pratique la fuite en avant, qui s’ennuie, mais qui finit par se lever. Il
y est question de toi, du front de gauche, de clémentine Autain. Plus
que d’un cheminement intellectuel, il s’agit d’une tentative pour
mettre la tête hors de l’eau, pris dans un flot d’aspirations
contradictoires (dernier chapitre) J’ai pris la liberté d’afficher ma
conversion de sympathisant europe écologie-les verts, à celle
d’adhérent au parti de gauche. Tant pis pour les éventuels lecteurs et
lectrices qui seraient rebutés par des considérations politiques. En
principe, lorsque l’on veut se la péter écrivain, il ne faut pas faire
référence à l’actualité, il faut prétendre à l’universel. Quoi qu’il en
soit, il ne s’agit pas d’un essai politique. Je l’ai classifié essai
érotico-politique et guide de l’anti séduction. Il y est surtout question
de formes, et de déformations. Il y a des passages amusants et
quelques jolies phrases à effet sonore. Je ne serai pas vexé si tu ne
trouves pas le temps de le lire. J’y parle aussi d’un journal qui aime
t’égratigner : la décroissance. J’aime ce journal de la même manière
que j’aimais lire à une époque le monde libertaire. J’ai une
sympathie intellectuelle pour certains contributeurs mais le temps est
venu d’agir et vite et je suis heureux d’avoir choisi mon camp. Je te
trouve positif, pas au sens qu’un hypermarché le voudrait, pas au
sens de tenter de soigner son mal être en s’entourant d’objets
rassurants mais parce que tu proposes à chacun de retrouver sa
capacité de s’indigner et de prendre la parole, et de relever le
menton.
106
emballées les thèses du font national et désigner l’ennemi :
l’émancipation des femmes, les musulmans, les écologistes, le front
de gauche.. Ils seraient toujours entendus et suivis par des gens
fatigués de chercher et qui se trimballeraient toute leur vie avec leur
soupirs et nous devions faire avec !
107
de jours meilleurs. Je n’avais rien contre les gens qui entreprenaient,
j’avais moi même tenté l’aventure, mais je n’avais strictement rien à
voir avec ces prétendus capitaines d’industrie capteurs d’héritage.
108
Le con est prévisible le con n’est pas forcément dangereux, mais il
peut être nuisible ;
Le con vote pour des cons et le con pollue.
J aurais pu gagner un fric fou en misant sur le con !
109
Les partisans de l’extrême droite avaient réussi leur relooking et
devenaient fréquentables, des gens que l’on voyait de plus en plus
sur les plateaux de télévision. Ils voulaient eux aussi casser le
système mais ils resteraient à tout jamais des gens autoritaires
ennemis de la liberté.
Les idées de mes copains et de mes copines restaient minoritaires.
On les trouvait sympathiques mais pas suffisamment réalistes.
Pourtant, les faits semblaient bel et bien leur donner raison et depuis
lontemps.
J’avais longtemps oscillé entre les réformateurs socialistes et les
révolutionnaires de gauche. Le réalisme que je subissais ne
m’enchantait pas. On pouvait regarder ailleurs, on allait au désastre.
Il allait falloir faire un pas de côté, réfléchir et agir autrement.
Face à l’urgence, ma prudence était excessive.
C’était dur de s’adressera aux jeunes urbains, de leur dire que tous
ces biens qu’ils accumulaient allaient finir par leur exploser à la
gueule, qu’ils ne pourraient pas comme dans les années 70, « vivre
heureux en attendant la mort ». Il fallait qu’ils changent, qu’ils
inventent un autre monde sans compter sur les rabats joie et les peine
à jouir pour leur venir en aide. Ils devraient se démerder.
Ce qui est dur, c’est d’essayer de changer ses habitudes dans son
coin pour s’apercevoir à chaque "expérience collective" qu’au sein
du groupe, il y en aura toujours un ou deux pour se servir plus de
bouffe que les autres et foutre en l’air ton tri des déchets. Plus tu fais
110
preuves de cohérence, plus tu effraies les gens qui seraient près à
faire un pas vers toi. Tu passes pour le rabat-joie, le tueur de bonne
humeur.
Faut-il pour autant, par souci de faire œuvre pédagogique, pour
rassurer, séduire, occulter les efforts à fournir pour repenser la
manière dont nos actes les plus courants marquent les jours suivants.
Nous ne consommons pas comme les anciens. Tout ce que nous
faisons dans l’instant a un impact profond, parfois irréversible sur
l’environnement.
Il est tentant de fuir ses responsabilités et de faire comme si rien
n’avait changé depuis l’avènement de la consommation sans limites.
Il est tellement facile de faire comme les gens ordinaires et de s’en
foutre.
Parler écologie aujourd’hui à un innocent, à un naïf qui sort de
l’œuf, c’est comme si tu t’adressais à un malade alcoolique en lui
annonçant qu’il va devoir réinventer sa vie. Il va devoir se passer de
produits qui lui procurent plaisir tout en le condamnant à vivre à côté
de celui qu’il aurait pu devenir.
Selon la manière dont tu annonces la couleur, tu vas en effrayer
plus d’un. Je crois en l’abstinence heureuse - je n’emploie pas
volontairement le vocable "tempérance" - je crois en la démarche de
simplicité volontaire mais je crois qu’en définitive, JL
MELENCHON a raison de ne pas prôner le remplacement de la
voiture individuelle par les transports en commun ou les transports
non polluants, dans un souci de crédibilité. Il y a urgence à agir
mais effrayer les gens par des positions jugées trop radicales par le
plus grand nombre, et pas assez tranchées par des groupuscules
toujours à la pointe de la cohérence, n’apporte pas grand chose.
C’est éminemment plus compliqué que cela et c’est une question
qui turlipine beaucoup de responsables associatifs soucieux
d’accueillir de nouveaux adhérents sans pour autant mettre en péril
les valeurs qui les animent.
Il y a des choix qui ont été fait par d’autres et il faut s’y adapter.
Les urbanistes, les politiques, les industriels ont transformé les
territoires Il est plus difficile pour un citadin, de travailler, de sortir,
111
de se nourrir de manière responsable, de se loger, de se déplacer que
pour un paysan des années cinquante.
112
veux-tu en voilà et certaines personnes s’identifient à des marques et
les gens ne s’intéressent plus trop à la politique.
113
La page Face de bouc de Monoprix est en accès libre, enfin c’est
ce qu’elle donne à penser
Son site est gratuit, mais il y a un droit d’entrée officieux à payer :
aller dans le sens où ils veulent. C’est canalisé, il y a des balises. On
peut toujours déconner mais ne jamais parler du fond ! Le liberté
d’expression sur la page Face de bouc de Monoprix est à l’image de
celle de la presse gratuite.
Les gens s’expriment ! Ils ont des tas de choses à formuler mais
cela reste souvent formel et on ne gratte qu’un tout peut peu du
vernis. C’est la culture de l’écran qui paradoxalement au lieu de
libérer la parole nous rend timoré. Sur la forme, on se lâche, on se
permet de faire des commentaires que l’on oserait pas faire de visu,
en face à face, mais cela reste souvent très superficiel et n’a pas plus
d’effet qu’un pet de nonne…
Quand on est bien élevé, on ne critique pas ce que votre hôte vous
a préparé à manger. Et même si elle (c’est forcement une femme qui
cuisine, non ? Ah bon !) vous a préparé un gigot d’agneau, vous
tairez vos convictions de "végétarien en herbe" qui ne sont pas
encore suffisamment solides pour vous inciter à plomber l’ambiance.
114
tout dépend de votre franc parler et votre degré d’intimité. Pour
certaines personnes, donner sa manière de voir, dire ce que l’on
pense vraiment, sans chercher à blesser, est plus un gage de respect
qu’une attitude lisse de "béni-oui-oui". Enfin, je ne sais pas pour
vous alors je vais passez au "je" …
115
l’on aime ses airs, ses idées, ses textes ne peuvent être totalement
occultées, même si on lui rend hommage dans une atmosphère
"apaisée" pour ne pas effrayer la mamie ! Tour cela pour dire que
même si on n’a pas fêté l’anarchiste, on lui a rendu hommage malgré
tout.
116
Au début, je me suis attaqué à la forme.
Je n’ai pas de télé, sans "télépseudoviseur", je subis moins le
matraquage publicitaire (Je ne me tape que les spots radios, les
affiches, la pub sur internet et les imprimés que j’entasse dans le
conteneur à papiers). C’est pour dire que je m’en fous pas mal de ce
film en définitive. Il ne s’agit pas d’un film de cinéma, d’un livre ou
d’un disque, il faut relativiser mais j’avais besoin de réagir, pour me
venger d’une humiliation subie et puis aussi pour me réapproprier
mes droits.
Je n’aime pas cette façon pernicieuse qu’ont les marques
d’envahir mon imaginaire. Cela aurait pu en rester là mais j’aime
encore moins que l’on m’ empêche de dire ce que je n’aime pas et
pourquoi je ne l’aime pas. Je n’aime pas les simulacres de liberté ! Je
ne veux pas que ce soit un spécialiste de la psychologie marketing
qui s’attribue le droit de juger de la bonne teneur de mes propos.
LE FILM :
Des adultes organisent pour des enfant une bataille d’eau mais ça
n’est pas très rock ’n roll au fond. C’est dans la pure veine du foutage
de gueule ambiant alors vous lâchez le commentaire suivant :
117
bien être et nous permettre de nous détendre, bien évidemment). On
se passait d’eux , et c’était mieux ! Alors les petits zenfants des
années 50 revisitées, balancez vous des bulles, des ballons de
baudruche colorées remplies d’eau, Monop c’est la fête tous les
jours, c’est in, c’est bath (de base ball en mousse) !
Vous envoyez aussi une info sur une conférence dans le cadre de
la journée mondiale de l’eau, "l’eau service public".
118
radio de ceux et celles qui ont quelque chose entre les oreilles et
après avoir écouté là Bas si j’y suis, consacrée à " l’e réputation", aux
sommes fabuleuses dépensées pour avoir une image positive, passer
pour une marque sympa, nous matraquer le cerveau sans avoir l’air
etc, vous avez envie d’élever un peu le niveau de la discussion et au
lieu de vous gratter la tête pour critiquer un spot publicitaire, vous
parlez plus du fond et vous dites :
119
chocolat. Vous n’êtes là que pour fourguer vos produits et nous
vendre, sans votre tenue de représentant, votre propre définition de
la qualité et votre conception du service rendu. Vous faites semblant
de pratiquer la libre expression mais vous censurez sans prévenir,
vous coupez la photo au montage. Votre boutique se moque de la
personne. elle s’attaque au nombre en lui faisant croire qu’elle va le
choyer. Ce message sera effacé vers 9 heures, lorsque le modérateur
aura bu son café. Tant que je n’aurais pas eu d’excuses officielles,
j’utiliserais tous les moyens légaux pour m’exprimer et je jouerai le
rôle du poil à gratter. "
Les gens jamais contents sont pénibles mais entre les râleurs qui
ne font que se défouler d’une manière lassante et harassante, et les
râleurs (d’autres les appellent les utopistes ou tout simplement les
"impliqués dans la vie politique de la Cité") qui se battent pour que
les choses aillent mieux - ou du moins n’empirent pas - j’ai choisi
mon camp.
120
inciter à dépenser notre argent.
121
buvez du café, vous mangez du cacao, vous roulez en bagnole, vous
mangez le caoutchouc de vos pneus de bicyclette et patali et patala."
Cela m’a calmé tout net et m’a permis de réfléchir sans fléchir
mais je ne suis pas resté éveillé longtemps. Depuis, je suis devenu
alcoologiste, c’est à dire à mi chemin entre un mode de vie « petits
oiseaux de bonne augure » et le canon scié contre la tempe.
RAS LE BOL !
Dans le film l’an 01, le papa ouvrier à vélo (ils étaient nombreux à
aller à l’usine en vélo) qui ne parle pas habituellement beaucoup (le
père de Coluche dans le film) se met à se bidonner car il a aperçu un
slogan peint sur le mur : RAS LE BOL !
J’en ai ras le bol, plein les guiboles que certains s’en mettent plein
les poches tandis que des ouvrières du textile au Bangladesh
meurent pour que je puisse avec un salaire de miséreux m’acheter un
nouveau fute.
122
L’écrivain a failli faire faillite
123
fois la commission déduite, mes encaissements effectués ne
correspondaient pas à cette somme ! Comment expliquer un tel
décalage ? Je suis allé rencontré le Directeur du Marquis. Je suis
ressorti sans avoir entendu la moindre explication.
Au moment où mon petit commerce commence à tourner, je ne
peux plus faire face aux prélèvements qui m’ont poussé dans les
derniers retranchements de la solvabilité.
Travailler chaque jour sans rien gagner de plus que de quoi payer
ses échéances, je me trouvais en plein dans le mécanisme infernal de
l’endettement. Je vais quitter à la fin du mois mon logement.
Le Marquis devait ventiler un prélèvement, il n’a pas tenu parole
et le prélèvement a été intégralement présenté. Cela m’a contrarié.
124
les gens, pour les soumettre et les vider de toute ambition ! Je ne
voulais pas quitter mon observatoire de la connerie. J’avais eu un
petit coup de cafard un jour de pluie persistante. J’avais l’air malin
avec mon store qui laissait l’eau passer. Je devais tout bâcher à
chaque grosse pluie. J’avais vu la postière en face avec sa carriole,
qui avait dû batailler pour enfiler son blouson de pluie. Je n’étais pas
si mal loti dans mon kiosque grand comme un abribus.
C’était la crise, cela allait bien plus mal que dans les années 70 et
cela allait chauffer pour ceux qui nous avaient mis dans toute cette
merde. Même mes lecteurs de droite n’aimaient pas les hyper riches.
125
Monsieur le Marquis,
126
pas parce que le kiosque tourne mal (mes recettes sont en
augmentation) mais parce que les montants prélevés par vous
dépassent la valeur des marchandises qui ont été effectivement
vendues ou retournés. Ces marchandises ont été bien été livrées. En
résumé, les prélèvements ne correspondent pas à mes encaissements
tout simplement parce que je paye une partie du stock constitué.
Si je reçois 23 titres de magasines sur le thème de la cuisine, je ne
peux pas retourner les numéros précédents puisqu’il s’agit des
premiers numéros que je reçois, et outre le fait que face à telle
inflation de titres, je peux difficilement les présenter correctement
compte tenu des dimensions modestes du kiosque, j’ai un stock
"dormant".
En fait, c’est comme si vous décidiez de faire une dalle de béton.
Vous attendez cinq camions toupie de béton prêt à l’emploi, or ce
sont quinze camions qui déboulent sans crier gare, le béton tourne et
tourne mais vous ne pouvez pas l’utiliser alors vous le renvoyez et
puis vous commencez à recevoir les traites à payer… Certains
camions n’auront fait que transiter par chez vous occasionnant perte
de temps et d’énergie.
Ceci étant dit, je ne vais pas changer l’ordre des choses. La seule
question que je me pose face à des logiques (diffusion en masse) qui
ne vont pas dans le sens d’une gestion fine et adaptée (commerce de
proximité), c’est de savoir s’il est malgré tout possible de travailler
en bonne intelligence avec vous et de concilier nos intérêts.
Pour que je puisse être en capacité d’absorber les hors séries et
la flopée des nouveaux titres du genre ’olé, c’est vrai, histoires,
vraies, vécu, sans blague, ouh là là etc ) auxquels je ne pourrais
couper, je voudrais, au moins, que lorsqu’un titre n’est pas vendeur
compte tenu des particularités de ma clientèle, que les quantités
fournies soient réactualisées et que des remises à zéro soient
pratiquées.
127
vendre le plus possible et donc de coller au maximum à l’évolution
des goûts des lecteurs, tout en pouvant faire face aux échéances car
ce n’est pas mon activité secondaire, au ralenti faute de temps, qui
me permettra de faire face à des échéances trop élevées, qu’on se le
dise !
Je vous demande de ne prélever que 700 euros sur les 1400 euros
exigibles au 30/10.
128
Les 700 euros, vous les aurez plus tard, lorsque vous m’aurez
crédité mon stock d’invendus de DVD cochons, quand votre système
de signalement des réclamations sera opérationnel (un simple
bordereau de liaison en entête du bon de livraison/bordereau de
reprise des invendus suffirait largement et je ne vois pourquoi les
kiosquiers non informatisés doivent faire votre travail), quand vous
serez plus courtois au téléphone et lorsque que vous aurez compris
que je ne vais pas me battre pour vendre des magazines "presse
-cervelles" ! Pour moi, votre boulot c’est de vous faire de l’argent en
contribuant à la culture, donc à l’essor de la République.
129
Le jour où j’ai cessé d’être con
Le vegan day
Dans ma vie, il ne s’est passé pas grand chose jusqu’à présent. J’ai
toujours projeté plein de choses, eu des tas de bonnes idées mais
concrètement, cela ne pèse pas bien lourd dans l’épuisette.
Je me suis toujours foutu gentiment (car je suis un gars gentil) de
la gueule des végétaliens, de la même manière que je me moquais
des gens qui ne buvaient pas d’alcool, qui voulaient vivre sainement,
lorsque moi je picolais.
Je reçois souvent des infos sur Face de bouc, de Doc Reggae alias
Bruno Blum ou du collectif animalier 06 et cela fait vraiment
réfléchir sur mon niveau de complicité. En achetant de la barbaque,
je participe à fond à un système que je récuse intellectuellement et
l’industrie agro alimentaire loin de changer, accentue la dérive. Je
pollue d’avantage que le citadin qui se pavane en 4x4, même si cela
se voit moins !
Personne ne veut de ce monde, ou si peu. Si l’on attend les bras
ballants, autant crever tout de suite.
130
personnelle car j’ai toujours considéré que l’action collective,
politique, primait sur le comportement individuel.
En bouffant moins de protéines animales, voire plus du tout, je
vais chercher à apprécier des mets plus raffinés. Je ne vais pas
devenir seulement plus gourmet, je vais surtout devenir moins
consommateur passif, prêt à engloutir tout ce que l’on me sert et à
sauter sur tout ce qui bouge. Cela devrait entraîner une autre
démarche spirituelle et une désaccoutumance à la consommation
effrénée de dialogues à deux balles en vue d’obtenir un hypothétique
plan cul, je vais enfin pouvoir redevenir normal, redevenir moi-
même.
131
132
Mort aux cons !
"Au Kiosque du père Boyer, des revues HOT toute l’année !"
133
la vie. Je me battrai pour ne pas fermer.
Moi je n’aime ni le foot, ni les ragots, ni les princesses, ni les
jeux ! Je n’aime que la bouffe, les femmes, le ciné et mes clients. Je
m’intéresse à ce qu’ils cachent sous leur chapeaux.
Il y a de petites histoires qui te donnent envie d’embrasser tes
contemporains, d’autres qui t’incitent à prendre le large et celles qui
t’incitent à te soulever.
J’assiste aux premières loges, aux dernières salves d’un monde
fini, celui la démesure. Il a de quoi écrire l’écrivain fauché !
J’assiste aux derniers soubresauts d’une société fatiguée qui s’épuise
à force de vouloir nous divertir. Je constate que les jeunes
s’emmerdent et que l’on ne sait plus quoi inventer pour nous
empêcher de nous rencontrer et de nous fédérer.
134
Je classe la population mondiale en deux catégories : Les
hooligans de "Causeur" et les supporters de "Causette". Les causeurs
ont le vent en poupe ! Les pro-Causette sont ceux et celles qui me
donnent la pêche "en chantant avec Aragon, que le poète a toujours
raison, qui voit plus loin que l’horizon (…)"
Les "Causeurs" ont la belle vie en ce moment ! Ils se sentent forts,
en groupe et ils sont suivis. Ils sont à la mode, on leur fait une grande
place dans le temps médiatique. Ils ne sentent plus pisser et se voient
déjà au second tour de l’élection présidentielle. Ils franchissent
régulièrement les pas qui nous séparent des chutes du Niagara des
toilettes suspendues ! On ne fait pas dans la finesse avec ces gens là !
Il ne faut pas dire qu’ils sont décérébrés, car l’insulte est contre-
productive. ils sont "anti-système", ils souffrent d’assister,
impuissants, au délitement du monde, au manque d’audace, au
désespoir et ce constat "d’empêchement à agir" les pousse à trouver
des coupables plus accessibles. Ce sont les rebelles qui rendent grand
service aux génies du commerce qui ont tué le lien, nous ont rendu
influençables à souhait pour absorber les nouvelles offres. Les anti-
systèmes de façade ne font que rendre plus compliqué le
développement des alternatives car ils ajoutent de la confusion à une
situation complexe. Ils brouillent les pistes. Ils sont des râleurs
patentés qui aiment l’ordre. Veulent-ils vraiment la disparition du
libéralisme pour retrouver plus d’autonomie, plus de liberté car plus
de responsabilité, un épanouissement de la personne ?
Cette revue « dingo dingo », elle sera dans la pile des journaux
pour demeurés, dans le coin le plus obscur de mon kiosque.
Personne et individu
135
tendent d’ailleurs à s’estomper, comme celle qui a longtemps opposé
les croyants aux non-croyants.
Les sociétés occidentales ont été profondément marquées par
l’individualisme. Celui-ci est à l’origine des grands
impersonnalismes qui frappent ces sociétés :
l’impersonnalisme du marché délié de l’exigence éthique,
l’impersonnalisme d’une bureaucratie aveugle face aux visages des
hommes, l’impersonnalisme des racismes et des nationalismes.
L’individualisme ne fait nullement obstacle à la massification de
la société. Au contraire, il la favorise. «Là où l’individu se trouve, la
masse se trouve aussi, car l’individu est l’instance fondamentale de
tout massification» (Miguel Benasayag).
136
mettait en exergue sa condition de sujet autonome, c’est-à-dire de
quelqu’un qui dit «Je» face au monde – et aux autres.
Riche idée que celle de ce sujet qui s’affirme. N’est-il pas
préférable d’être reconnu comme un être singulier, plutôt que
considéré comme un élément fondu dans un groupe et soumis à ses
lois, en voyant niée son identité propre ? Mais cette idée connaît une
dérive lorsque l’affirmation de la capacité de penser par soi-même
se voit redoublée par la revendication du droit de vivre pour soi,
selon ses intérêts. En célébrant le sujet réduit à lui-même,
l’individualisme conjugue le pouvoir de penser par soi et le droit de
vivre pour soi, revendiquant ensemble la liberté de «penser à son
gré» et celle de «vivre à son aise».
À l’avantage de l’individualisme, il y a son caractère
apparemment logique. Il semble même naturel. L’homme n’est-il pas
«un loup pour l’homme» ?
L’individu a des tendances alors qu’être une personne représente
des exigences. L’effort est nécessaire pour accomplir notre vocation
de personne. Car la fraternité reste difficile. «Elle s’oppose à la fois
aux pulsions fissionnelles et aux pulsions fusionnelles, au désir de
domination et au désir de dépendance ; elle est aspiration à
reconnaître l’autre – mon – frère dans sa différence et sa
personnalité, avec ses désirs, ses peurs et ses intérêts, aspiration à le
rencontrer, à échanger avec lui, à être reconnu par lui, à vaincre
l’angoisse de la séparation et à affronter celle de la rencontre»
(Marcel Bolle DeBal). Il faut donc sortir de soi, se saisir comme une
«personne déplacée» (Paul Ricoeur), dans une perspective de
libération permanente. Selon Emmanuel Mounier, «nous devons
nous délivrer de l’individu qui est en nous ».
137
opératoire et les stratégie de ceux qui nous mènent à l’impasse ?
138
Les femmes de ma vie de kiosquier
139
avec une qui m’intéressait mais qui a eu le tort de me dire qu’elle
s’intéressait à un autre mec parce qu’il avait une moto. Avec une
autre qui a une douzaine d’années de plus que moi mais qui est jolie
et surtout qui est branchée "sobriété heureuse", j’ai compris quelle
n’arriverait jamais à se détacher de l’emprise se son ancien mec qui
l’avait larguée comme une merde. Un mec grand (grand = protecteur)
qui l’avait humiliée mais elle se rendait compte que c’était de sa
faute à elle car elle était trop déprimée, bref , le genre de nanas qui
patauge dans les embrouilles et qui aime se martyriser.
140
alors "plan cul".
141
Une tête à Télé Z
142
ces manières de fuir ses responsabilités, de cet hédonisme de bon
marché.
143
144
Bonnets rouges et capotes trouées
Les gens grognent contre les impôts et moi, j’enrage que ce soient
quelques "ultra-riches hyper individualistes anti patriotes" qui
plantent la merde .
Je n’irai pas manifester aux cotés d’un patron, sauf bien sûr s’il
s’agit d’un artisan réglo ou d’un patron d’une entreprise "solidaire"
de l’économie sociale. Un patron, ce ne peut pas être un bonnet rouge
mais juste une capote qui peut se trouer. Le bonnet rouge, c’est un
déguisement, de la mise en scène, c’est comme Giscard d’Estaing
Valéry et son accordéon s’invitant à dîner chez des gens ordinaires ou
Nicolas S. si proche des ouvriers. Si les gens qui ont su profiter du
système commencent à sentir que le vent tourne et que la
mondialisation nous mène à une impasse, qu’ils créent des
coopératives, qu’ils fassent cause commune avec leurs salariés, et
145
qu’ils revoient leurs plans de communication.
146
foie gras et acheter des habits pour son caniche, acheter de la viande
issue de l’élevage intensif et caresser son lapin. C’est en remettant en
question ce que nous faisons endurer aux autres espèces que l’on
pourra progresser et cela fera bien chier les porteurs de capotes
trouées.
147
Free Angéla !
148
allez le découvrir dans ce chapitre, un peu de patience.
149
couvert et l’hygiène, … » Article L345-2-3 : « Toute personne
accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir
y bénéficier d’un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès
lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit
proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure
d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa
situation. » Loi de réquisition des logements vacants : Article L641-1
(code de la construction) : « Sur proposition du service municipal du
logement et après avis du maire, le représentant de l’Etat dans le
département peut procéder, par voie de réquisition, pour une durée
maximum d’un an renouvelable, à la prise de possession partielle ou
totale des locaux à usage d’habitation vacants, inoccupés ou
insuffisamment occupés, en vue de les attribuer aux personnes
mentionnées à l’article L. 641-2. » et tel que la Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme le traduit dans son article 25 :
Considérant que la méconnaissance et le mépris des droits de
l’homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la
conscience de l’humanité et que l’avènement d’un monde où les êtres
humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et
de la misère, a été proclamé comme la plus haute aspiration de
l’homme Article 25 1.Toute personne a droit à un niveau de vie
suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille,
notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins
médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a
droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de
veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens
de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa
volonté.
150
Source : http://guizien.hautetfort.com/archive/2013/11/06/l-onu-s-
alarme-des-niveaux-record-de-concentrations-de-gaz-a.html
Un nouveau rapport de l’OMM révèle en effet que le forçage
radiatif de l’atmosphère par les gaz à effet de serre, qui induit un
réchauffement climatique, s’est accru de 32% entre 1990 et 2012 à
cause du dioxyde de carbone et d’autres gaz persistants qui
retiennent la chaleur, tels le méthane et le protoxyde d’azote.
151
raison. Les gens pestent mais ne vont pas jusqu’à rouspéter ni à
casser mon nouveau présentoir flambant neuf. Un journal pour même
pas le prix d’un café, ça va quand même, nous sommes encore en
démocratie ! Les gens ne feront donc pas la révolution pour ce genre
de motifs, alors pour quoi ?
152
Puisque l’idée de foutre le feu à mon kiosque m’avait traversé
l’esprit, j’écrivis pour la forme mon testament politique, me couvris
de cendres et je disparus dans la nuit, pour ouvrir le kiosque de bon
matin, le lendemain, comme si de rien n’était. La fiction n’effaçait
pas la réalité, et la réalité, c’était chaque jour, "juste une petite lutte
pour la vie" comme aimait à dire mon père.
Dulcinée du Toboso
Laetitia c’est une femme imaginaire que j’ai choisi de placer dans
le cours de récit pour apporter un peu d’humanité dans un monde de
brutes. Je vais essayer de la faire parler mais cela ne va pas être
facile. Je vais l’aborder mais à distance, si vous voyez ce que je veux
dire.
153
démocratique est au point, bien plus que dans les deux partis
politiques que j’ai fréquentés. Donc, admettons que Lætitia soit
impliquée dans l’association. Elle est donc face à moi, à côté de la
présidente de l’association. Je peux donc l’observer pendant deux
heures sans avoir besoin de parler.
Je n’ai pas pensé à regarder si Lætitia avaient des bagues, j’ai cru
comprendre qu’elle n’était pas toute seule, car elle a dit "on fait des
travaux". Bordel, mais on c’est qui ce ’on’ ? Ton mari ? Ton associé ?
Ton employé ? Ton papounet ? Ton chéri ? Ta copine ? Tu ne pouvais
pas préciser, non ! Enfin, bon, soyons bon prince, du moment qu’elle
me donnait du grain à moudre et confiance en l’avenir, je n’en
attendais pas plus ! Notre relation pourrait rester platonique, je m’en
contenterais. Cette fille m’avait tapé dans l’œil pour d’autres raisons
que son popotin.
Ce n’était pas le genre de femmes à inviter pour une bonne petite
cote de bœuf à l’hipopotamuse…
154
Kiosquier, un journal suspendu !
Je gagne tantôt du temps mais j’en perds tout autant car cela a
remplacé un peu la télé que j’ai bazardée il y a trois ans et je suis
devenu dépendant d’internet. C’est parce que j’y trouve aussi mon
compte, je suppose.
155
ancestrale fait partie de la société napolitaine mais est moins
courante aujourd’hui.
Le 10 décembre 2011, a été instaurée la Giornata del Caffè
Sospeso (Journée du café suspendu) avec le soutien de plusieurs
organisations culturelles et le maire de Naples, Luigi De Magistris.
source wikipédia
http://fr.wikipedia.org/wiki/Caff%C3%A8_sospeso
156
Manger de la viande "heureuse" ?
157
moqué de son ton martial. Lorsque les militants prendront le temps
de s’écouter, nous progresserons dans nos pratiques de la démocratie
participative et la démarche de transition.
158
la lecture du livre de rené Dumont, un monde intolérable, à la fin des
années 8O, et pourtant, je n’avais jamais encore saisi l’impact de
l’élevage industriel sur la consommation énergétique, les ressources
en eau, les surfaces de terres à cultiver, le transport, l’utilisation
d’intrants, les rejets, les gaz à effet de serre, la souffrance animale, la
détresse des paysans, et j’en oublie, avant la projection de ce film. En
quelques années, la logique de l’absurde nous a mené à un résultat
inhumain.
Alors commencer par faire rentrer dans les mœurs une journée
159
"sans viande" par semaine ou à inciter les gens sensibles et soucieux
de leur santé de n’acheter que de la viande "bien élevée", je trouve
que c’est un bon début pour qui veut faire la course jusqu’au bout,
sans se décourager.
160
Dee Dee Diesélos
Comme tous les dimanches, papy Auguste prend son petit cabas à
roulettes, passe par les contenairs à tri pour de débarrasser de ses
emballages plastiques, en carton et ses bouteilles en verre non
consigné. Il va ensuite à la boulangerie voir sa blonde, prendre un
café et manger un croissant, s’il en reste. S’il n’y a plus de croissant,
il s’adapte à la situation (réflexe d’aventurier des burlingues ) et
prend un pain au chocolat ou tente l’aventure du pain au raisin. Son
petit café en bouche, son petit sourire en tête, il ne reste jamais bien
longtemps.
Il traverse, regarde l’affichage du tram : s’il y a plus de sept
minutes d’attente, il décide toujours d’y aller en marchant. Il va Place
de la Libération, au marché. Il y achète sa salade pour la semaine,
toujours au même endroit. Il en a pour entre deux euros et quatre
euros. La vendeuse a tendance à arrondir les prix. C’est affiché 3.20
euros sur la balance, elle lui en demande 3.50 mais comme elle est
blonde et que sa salade coûte moins cher que la salade achetée à
monoprix, il paye sans sourciller. Ensuite, il marche un peu pour voir
du monde et éventuellement créer un accrochage de caddy avec une
femme pressée. Puis, la tête basse, la queue entre les jambes, il va au
marché couvert, en faisant bien attention en traversant la voie du
tram, pour y acheter des échalotes - si toutefois il a repéré au loin
Dominique la dermatologue, un petit bout de femme sexy, car elle y
fait ses courses comme lui, en fin de matinée - sinon, il va
directement acheter ses olives et mélange d’épices à salade car il
aime bien la marchande d’épices et n’avait pas besoin d’échalotes, il
161
en a tout un stock.
162
d’empêcher le suicide d’un salarié de la grande distribution : ses
collègues ont réagi à temps.
Les emmerdes n’améliorent pas les rapports humains mais il y a
encore de la solidarité dans une société devenue très "individualiste".
Si c’était totalement foutu, il n’y aurait plus d’associations et les gens
n’auraient pas laissé passer la dame avec son bébé en pleurs alors
qu’il y avait une queue interminable à LIDL l’autre jour, me dit-il
avec un enthousiasme non communicatif. Et là je sens qu’il va encore
m’instrumentaliser pour parler politique…
Deux caissières seulement, mais quel scandale, un samedi !
Des prix bas avec peu de personnel, comment faire autrement ?
En faire autant avec toujours moins de facteur humain, nous sommes
bien dans la logique capitaliste ! Trouver une organisation pour
réduire les coûts, soit sur les matières premières, soit sur le
personnel, soit sur la logistique mais cela reste une course au profit et
il faut sans cesse aller dans le sens de la réduction des coûts, ce n’est
pas le bien être de vous ou de moi en définitive.
Pour le petit commerce, c’est différent, j’en connais qui payent
correctement leur employés, pas uniquement pour avoir la paix
sociale ou des salariés plus motivés, mais par respect. Je ne dis pas
que ce genre de patrons courrent les rues mais il y en a. Par contre,
loi du profit oblige, il faut qu’ils trouvent des moyens pour gagner
sur un autre tableau en négociant "serré" avec leurs fournisseurs par
exemple. Le capitalisme n’autorise pas une autre organisation que
celle qui consiste "à faire avaler" une offre au lieu de mettre en
œuvre des moyens techniques, humains, "socialement et
écologiquement profitables à tous et pour longtemps" pour répondre
à des besoins réels. Les entreprises qui prennent en compte dans leur
valeur ajoutée le facteur humain, social sont des entreprises
collaboratives, des coopératives.
Ce dimanche, Papy Auguste n’a pas pris son cabas pour aller au
marché car papy et moi, on déménage. Alors lui, il fait les cartons, et
moi, je me planque dedans. Sept cartons de livres, deux de cd, un de
bibelot, deux d’ustensiles de cuisine, un de papiers administratifs, un
de salle de bains. On ne va pas habiter bien loin mais il faut partir car
163
Papy Auguste n’a pas de quoi payer son loyer.
164
Saletés de grévistes !
Les gens râlent parce que ce matin ils ne trouveront pas leur
journal au kiosque et moi je râle parce que perds un tiers de mon
chiffre d’affaires.
165
Nice-Matin à l’invitation de la Filpac-CGT pour évoquer avec les
salariés les difficultés de la presse écrite et présenter la Proposition
de Loi pour le pluralisme de la presse déposée le 22 février à
l’Assemblée Nationale.
166
postes ?). C’est promis, la prochaine chronique, je parlerai d’amour
et d’amitié parce que la camaraderie, quand tu bosses en solo, c’est
pas gagné !
167
Monsieur l’Autocrate
168
étrangères ;
Ah, nous y sommes, je t’ai pris « ta femme », celle qui t’a meurtri
le cœur, celle qui t’a brisé , et patali et patala ! Trois semaines de vie
commune et tu restes amer, blessé dans ton orgueil de caporal déchu.
Mon pauvre ami, je ne t’ai rien pris. Cette femme n’est ni à moi,
ni à toi et ce qui te fait enrager c’est de constater que tu n’as pas
d’emprise sur elle, pas d’influence. Elle est insensible à tes
cajoleries, tes minauderies et à tes menaces alors tu racontes à qui
veut t’entendre qu’elle est froide ou qu’elle est givrée. Tu aimes
discréditer les personnes, tu aimes que l’on te plaigne ! Et tu as as
gagné, je te plains !
Qu’est-ce mec comme toi ferait s’il jouissait du pouvoir ? Une
police politique ? Des coups de trique pour ceux qui n’aiment pas
Mozart ou Chopin ? Tu réglerais comment tes histoires privées ?
169
forcément élégant, digne, ouvert et féministe et je me retrouve avec
un dépressif qui fait des crochets du droit en criant au scandale.
Pauvre truffe !
170
Détartrer la cafetière
Je n’aime pas les gens bruyants, ceux qui s’en foutent des autres et
je n’aime pas les gens qui prennent la parole en levant de doigt sans
se soucier du voisin qui avait levé la main avant, dans un débat
public.
Cela m’a gâché mon bon plaisir hier soir lors du débat qui a suivi
la projection du film "Cultures en transition". Les gens avaient de
bonnes idées mais certains accaparaient la parole et d’autres parlaient
juste pour le plaisir de sortir des mots. C’est agaçant ! Comment
changer la donne en restant les mêmes couillons ?
171
Les combats que l’on perd sont ceux que l’on ne mène pas
Le lieu (le café restau "le court-circuit"), le film, les orateurs, tout
a contribué à me requinquer. J’ai fait le plein de "good vibrations".
Passer de l’attitude de résistance passive à à la transition voulue,
j’ai encore beaucoup à découvrir mais je ne suis pas seul. J’ai fouillé
dans mes numéros de la revue SILENCE (Ecologie Alternatives, non-
violence ) à laquelle je suis abonné mais que je ne trouvais jamais le
temps de lire. Le temps, je vais le prendre à présent ! Au lieu de
brasser du vent, dire ce qu’il faudrait faire dans un monde idéal, il
faut partir de ce que l’on peut faire et avancer, avancer !
Je dois sortir de ma bulle car j’en ai fait le tour. Je sors de plus en
plus. Je suis content de ne plus avoir de télé. Je rencontre des gens
différents qui sont comme moi, apparemment dans une démarche
d’apprentissage, de recherche, et cela me plaît.
Ce matin, elle est revenue et sans que je lui pose la question, elle
m’a dit qu’elle était mariée. Ce n’est pas grave car ce qui compte,
c’est de savoir que ce genre de femmes, non superficielles, existent.
172
"Ne lâche rien, bats toi ! Cela fait vingt cinq ans que tu attendais ce
moment, et tu le sens poindre ce "pas de coté", seul moyen de ne pas
s’illusionner par la révolution technologique qui nous sauvera du
réchauffement climatique et autres saloperies créées par notre
démesure en une poignée d’années. Tu vas l’avoir mon papounet, ta
révolution des libres penseurs ! "
173
Pas de foie gras à Noël
Le foie gras ne me manquera pas car cela fait des années que je
suis au courant de la cruauté des moyens employés par les
producteurs. J’ai le respect des animaux sélectif : Je mange des
huîtres, du crabe, des sardines à l’huile. Je ne suis pas un pur et dur et
il subsistera toujours un retard à l’allumage entre mes convictions et
mes actes de consommateur. Moi qui étais, il y a peu, un aficionado
du steak tartare (de boeuf, car je trouve un cheval plus "méritant"),
j’ai déjà réduit l’écart, et cela depuis mon embrouille avec le grand
dadet de directeur du Monoprix de Gorbella.
J’ai dû trouver d’autres filières pour m’approvisionner en denrées
alimentaires (des circuits plus courts de distribution pour l’essentiel)
Cela fait des années que je sais pertinemment que mon steack
tartare ne provient pas d’un petit élevage familial. Au prix de la
viande d’un circuit de distribution classique, ce que je fais revient à
verser de l’argent aux éleveurs industriels, à les engraisser, à les
174
inciter à ne surtout rien changer, à faire pire. On se cache derrière son
petit doigt en supposant que les animaux ne souffrent pas, et quand
on décide de faire un doigt d’honneur aux publicitaires, en leur
demandant de ne pas nous endormir en nous jouait du pipeau, on
passe pour un rabat-joie.
175
Un poulet rôti
Poulet rôti, dinde fumée, kiosquier flambé pour les fêtes de fin
d’année ? Et bien rien de tout cela, car j’ai repris du poil de la bête
depuis que je m’intéresse au sort des mammifères autres que les
chien-chiens à Mamie liftées. Je n’arrive pas à comprendre comment
nous avons pu être assez détraqués pour mettre au point un système
si complexe de domestication de la nature qui nous asservit et nous
rend cruel tout en gardant les mains propres. L’élevage industriel, en
plus d’être un aberration écologique, est une abomination. J’ai mis
des années avant d’accepter de comprendre ce barbarisme auquel
nous collaborons silencieusement. Des années à considérer les
défenseurs de la cause animale comme des allumés qui plantent
l’ambiance des ripailles, des excités extrémistes focalisés sur une
lutte qui n’était pas la mienne.
Des animaux vivent cloîtrés pour ne prendre l’air que le jour de
leur exécution et il faut être borné pour penser qu’ils ne ressentent
pas la souffrance et s’en foutre. Des gamins travaillent en usine pour
fabriquer des jouets, des gens crèvent dans la rue, et pendant qu’au
Carlton on expose pour 103 millions de bijoux, les pauvres petits
kiosquiers abandonnés attendent leurs clients.
176
pochettes cadeaux de jeux à gratter pour un total de soixante quinze
euros, bref, mon échéance à venir pourra être couverte, un coup de
bol inouï.
177
peuvent déranger. C’est assez incroyable qu’un choix personnel qui
porte sur ce que l’on veut avoir dans son assiette puisse faire autant
polémique et cela m’incite à me rapprocher de ceux et celles qui
n’aiment pas ce que l’industrie agro alimentaire a fait de nous. Et
qu’est ce que c’est que ces graines écogermées que tu nous
ramenées ? Et les escargots, ça a un cerveau ? Tu en reprendras une
petite douzaine ?
178
Un kiosquier suspendu
Cette action se situe bien avant l’an 14 de l’an zéro moins un, à
une époque où les gens étaient encore résignées, carrément
désespérés et et où toutes les citadelles démocratiques menaçaient de
tomber les unes après les autres. Les gens ne s’intéressaient plus
qu’aux histoires de culs des élus et aux pensées des starlettes. C’était
avant la refondation d’une coopérative de diffusion de la presse qui
avait mal tourné, qui avait largué ses objectifs initiaux, et qui avait
été remplacée dès les premières semaines qui ont suivie, le … la …
enfin, bref, par une nouvelle structure, plus démocratique, avec des
objectifs autres que de remplir les poches de quelques personnes
179
mais patience, nous allons y venir.
Je sais bien que je tourne du pot et que je tarde à aborder dans les
détails cet événement, mais soyez patient car tout vient à point pour
celui qui sait mettre le poing sur la table.
180
des nouvelles parutions, pour me constituer mon stock, je sois obligé
de renoncer à mes commissions.
Les titres qui ont des choses à dire n’ont pas les moyens d’être
diffusés massivement compte tenu du gaspillage induit. C’est comme
pour un restaurateur qui peut prévoir ses achats en fonction du
nombre de réservations, les abonnements pour un petit journal, c’est
l’idéal. Les abonnements en point fixe, en kiosque et non dans les
boites aux lettres, c’est peut être l’avenir des petites échoppes comme
la mienne (pour éviter leur mise en bière).
A reprendre
C’est parce que je suis depuis passé de l’autre coté que je réalise à
quel point je m’étais montré impatient lorsque que j’avais commandé
"la décroissance, le mensuel de la joie de vivre" qui a pour emblème
181
l’escargot – à Béatrice, celle qui tenait le kiosque du square Boyer
avant moi et qui a cessé son activité en raison d’un rapport "boulot -
emmerdes - plaisir - "prélèvements sangsues" largement défavorable.
182
Que faire d’autre ? Un nouveau travail ? Chauffeur livreur ?
Factotum ? Je n’ai ni l’embarras du choix, ni le temps de trouver une
alternative.
Je l’ai un peu aidé à aller mieux et puis après, je l’ai lâché. Je l’ai
appelé moins souvent car je déteste le téléphone et j’avais mes
tracasseries liées à mon activité de kiosquier. Il savait qu’il allait
perdre son logement, il avait des problèmes d’argent et il ne voulait
pas être une charge pour ses enfants. J’ai honte de n’avoir rien pu
183
faire pour lui, absorbé que j’étais par mes problèmes personnels. Le
dernier chapitre que je peine tant à écrire lui sera dédié, c’est celui
sur un bouleversement qui va se produire dans l’échelle du temps,
un temps où les problèmes personnels peuvent prendre le pas sur le
destin commun. Les nostalgiques des jours heureux ne rêveront plus
d’un retour en arrière impossible et les punks d’un
monde décadent se lisseront la crête.
Une sorte de remise à l’heure des pendules concertée et
simultanée, rien d’impossible !
j’aurais aimé ajouter "par l’action non violente, par la persuasion",
mais je ne veux pas vous prendre pour des lecteurs de niaiseries
dignes des pires journaux nauséabonds. Je tiens absolument à finir
sur une note heureuse.
184
De la même manière que l’on peut aimer tourner la tête ailleurs
lorsque l’on vous montre ce que vos choix de consommation
impliquent en termes de gaspillage et de souffrance animale, on peut
choisir de ne voir que le pourri, que le laid ou s’intéresser aux
indicateurs de bonne humeur. Depuis que j’ai ouvert le kiosque, j’ai
fait de belles rencontres.
Il se trouve que l’ouverture du kiosque a coïncidé avec la fin de
ma crise de la quarantaine, le moment où j’ai commencé à me sentir
moins vieux et con, non parce que je me tapais des jeunettes mais
parce que je renouais avec les belles idées de mes vingt ans. J’ai eu
de nouveau l’envie de m’impliquer, d’aller fricoter dans des lieux où
l’on se résigne pas.
Le journal réservé
185
Comme je me dis avec les quelques clients avec lesquels je me
permets de faire un peu d’humour "Suspendu, en attente, réservé, on
s’en fout du nom, tant que cela me paye mon gastos ! "
Ce genre d’humour ne passe pas toujours…
Cela fait des semaines que je laisse trotter cette idée et pour une
fois j’ai décidé de ne pas la laisser filer. J’en suis aux modalités
concrètes. Nice Matin a fait un papier sur le café suspendu et la
baguette en attente. Ce jour là , j’ai pigé qu’il y avait des journalistes
dignes de ce nom dans ce quotidien régional.
186
sur internet si d’autres marchands de journaux le faisaient et
apparemment cette idée tout bête n’avait pas été encore
expérimentée. Alors puisque nous sommes entre nous, je ne vais pas
raconter des sornettes. J’ai fait cela pour que l’on parle de mon
kiosque, pour que l’on reconnaisse qu’un écrivain mondialement
inconnu peut être solidaire.
187
Comment identifier un fauché d’un moins fauché ? Moi je vis
comme un clochard de luxe. Sans la famille et les amis qui ne me
lâchent pas, je serai à la rue alors que je bosse plus de quarante
heures par semaine et alors que j’aime faire ce boulot.
La réclame !
Dans tous les lieux qui font confiance aux personnes (libre
participation, implication des bénévoles etc..), ça m’a l’air de plutôt
bien marcher. Les mecs comme moi qui n’ont pas trempé dans le
bain du militantisme suffisamment tôt sont toujours un peu coincés,
sur leurs gardes, et ont du mal à se prendre en charge, à être
autonome, il faut un certain temps d’adaptation. Dans les projets
collectifs, beaucoup de participants attendent des autres avant de
voler de leurs propres ailes.
188
Comment aborder la personne fauchée ans la heurter ? Je me base
sur d’inévitables a priori (code vestimentaire, durée de
stationnement sur les bancs etc..)
Qui a le droit de décider à la place des utilisateurs de ce service
financé par mes clients de ce qu’ils "méritent "de lire ? Le monde ?
le programme Télé ? Le figaro ? Paris match ? L’humanité ? Nice
Matin ? France dimanche ? Femme actuelle ? Un petit retraité aux
abois n’aurait il pas droit de lire le journal de son choix ?
J’ai cherché des éléments de réponse sur internet, sur les réseaux
sociaux (je ne vais plus sur les sites de tchatche à deux balles depuis
la disparition brutale de mon père) et puis j’ai mis à contribution les
clients avec lesquels un courant de sympathie existe.
189
Je connais des petits vieux très bien sapés qui se privent : Il faut
faire un choix : le journal ou la baguette ou le café (c’’est
sensiblement le même prix). Pour des raisons évidentes de dignité, il
faut être d’une discrétion et d’un tact exemplaire, sous peine de
stigmatiser, de désigner, de marquer une différence et là on sort de la
solidarité pour être dans une logique de charité privée à la mode
Bernadette.
En ce qui concerne la crainte de profiteurs, des resquilleurs ( car
nous ne sommes pas dans le mode de oui-oui à la sucrerie), je fais le
pari de l’intelligence collective et de l’honnêteté des gens.
190
suivi me plait car il indique que les gens ne sot pas résignés à ce que
les choses aillent de plus en plus mal. Tout en reconnaissant que c’est
bien naïf, j’ai décidé dans le dernier chapitre qui sera de
"l’anticipation immédiate", que c’est à partir de ces micro geste de
solidarité citoyenne que l’on allait écrire le premier chapitre d’un
monde meilleur (L’an quatorze de l’an Pépin zéro moins un et je
retiens deux)
Le samedi, après une galette des rois de l’AJPLA (Justice pour les
Animaux) au Falabrac Fabrik, je suis allé au court-circuit car il y
avait des groupes en live, dont Sarah Maison une magnifique folk
swingueuse, et après quelques bières (je sais que je suis censé ne
boire que du panaché et du cidre) j’étais vraiment dans l’ambiance et
de cela il faut absolument que je vous en parle, mais d’abord, venez
me rejoindre à enterrement de mon père car nous étions peu
nombreux et nous allons être en retard.
191
lendemain, en partant à 8 h 30 pour être à l’intitut-médico-légal à 9
heures, j’ai pensé que cela serait largement suffisant et que j’aurais
même le temps de boire un petit café en arrivant. Mon père n’avait
comme jus de fruits que du jus de pruneau et j’avais donc la chiasse
à mon réveil à 4 h 30. Je m’étais levé tôt pour faire des cartons car
mon père était comme moi, il n’aimait pas jeter. S’il s’achetait un
nouveau téléphone, il gardait l’ancien et il stockait d’énormes
quantités de fournitures bureautiques. Depuis notre arrivée à Paris
nous étions à la fois dans les préparatifs de ses obsèques et dans les
cartons car l’appartement qui appartenait à sa compagne décédée
devait être vendu, il l’avait appris récemment. J’ai profité pour jeter
deux gros sacs poubelle avant de me rendre dans la bouche du
métro.
Je ne vous dirais pas que je n’ai pas respecté les règles du tri qui
permettent une valorisation des déchets car je tiens à ma réputation
(Nous sommes peu nombreux chez les militants Pro Planète et tout
fini par se savoir quand on flâne sur les réseaux sociaux )
192
tour. J’avais fait gravé un musique que mon père aimait écouter
lorsqu’il était mélancolique, Fash, the duke of burlington, un
instrumental d’un groupe italien de jazz-soul-funk des années 70.
C’était bien.
La vie continue
J’ai repris mon travail au kiosque sous une pluie battante. Nice
matin m’a suspendu la livraison. J’avais le vendeur juste à coté de
moi.
Il touche un fixe et gagne mieux sa vie que moi qui suis payé à la
commission.
Pour une question de dates, moi car je suis obligé de jongler en
permanence, j’ai eu deux prélèvements de Nice matin rejetés et cela a
entraîné une interruption des livraisons.
193
système de facturation simple et aisément vérifiable (par exemple le
monde : tant livrés, tant de vendus et ainsi de suite, cela ne me
perturberait plus, pour Nice Matin, j’étais très mal à l’aise car c’était
de l’argent comptant que j’avais réellement encaissé. Et il fallait le
trouver dare-dare.
J’étais encore à deux doigts d’arrêter mais pour une fois que
j’aime ce que je fais et que je sens que je pourrai s’améliorer
certaines choses, j’ai la force de me battre. Même malade je vais
bosser. Je n’ai pas droit au moindre faux pas.
194
Les poules qui m’élèvent en l’air
Bon sang de bois, il est plus aisé de bander pour une poulette
standardisée que de s’élever amoureux d’une poule éprise de liberté
qui vous emmène dans son sillage et vous apprend à ouvrir les yeux !
Je cherche une poule bien élevée qui picore des graines de liberté,
c’est assez compliqué finalement !
195
étaient plus avancées que moi. Les fréquenter me procurait un plaisir
des yeux et un régal pour les oreilles.
196
pensaient que le sexe était une monnaie d’échanges, et celles-ci
étaient monnaie courante selon les lieux que l’on choisissait de
fréquenter…
197
Source : http://www.signification-prenom.com
Lola n’était pas sur ma liste de d’égéries chéries car elle est trop
jeune et pas estampillée "poule capable de m’élever en l’air". Il y a
des femmes que je suis obligé de retirer de ma liste soit parce
qu’elles sont trop belles, soit parce qu’elles sont trop grandes, soit
parce qu’elles ont un tempérament dominant, soit parce qu’elles
causent trop. Lola est juste sur ma liste de chasse aux papillons
même si j’ai dans l’idée d’abandonner la chasse car ce n’est plus de
mon age.
198
J’assistais, impuissant, à l’acculturation des jeunes qui ne lisaient
plus rien d’autres que les journaux pour demeurés. Cette jolie petite
brune vendeuse de paninis et de tartes au citron discutait avec un
vieux con, un de ces vieux briscard pilier de troquet reconverti en
dragueur de boulangeries. Un facho de quartier du genre de ceux
qu’on laisse parler tout seul parce qu’il n’y a pas à lui tendre la
main, il se complait dans sa misère de gréviste de la cervelle. La
jeunette aux fesses fermes abondait dans son sens, en déblatérant sur
les « pédésexuels » et les immigrés qui viennent voler le pain des
français. Les jeunes m’énervaient à quelques exceptions près. Les
personnes qui misaient tout sur leurs apparences et qui se
complaisaient dans la pauvreté culturelle, je les dédaignais. J’étais un
vieux con qui n’aimaient pas les tatouages et les piercings chez les
futurs bourgeois rebelles de pacotille. Je n’aimais pas que les jeunes
viennent m’acheter Closer ou autres niaiseries. J’avais envie qu’ils
aient de nouveau envie de prendre en main leur vie, de ne pas tuer le
temps en jouant comme des gamins de dix ans et en se filmant en
train de transgresser des interdits ou en se faisant toujours les mêmes
blagues faciles.
Mon père m’avait soufflé mon idée, s’en était allé me laissant
face à mes questions, s’était éclipsé et avait fini au Père Lachaise
sans même un article de journal.
Pour être connu, je n’avais pas trente six mille solutions : Révéler
au public, en choisissant le mode open source, les subtilités
techniques de mon radar à chichiteuses et de mes toilettes sèches
199
d’appoint à lombricompostage maitrisé ou, en deuxième possibilité
être élu manager de l’année par la revue Alternatives Economiques.
Je pouvais aussi faire la une des faits divers, soit en faisant exprès de
rater un braquage digne des pieds nickelés, soit en allant chercher au
pressing ma tenue de super kiosquier. Il y en avait des possibilités
finalement !
Mon Augustine
Intermède culturel :
200
Amérique et dans les pays de l’est, où le clown blanc sera ignoré)
Le travail à deux commence, mais les débuts sont difficiles et peu
glorieux pour l’auguste qui doit s’affirmer, se modeler.
Il est, hors de la piste et pendant de longues années, le serviteur
du clown ; porte ses valises, cire ses chaussures ; Les contrats sont
au nom du clown qui paye (s’il le veut bien) son auguste.
Le beau clown voit le public aimer et applaudir plus que lui, ce
rustre à la trogne ahurie.
L’évolution se poursuit jusqu’entre les deux guerres où l’auguste,
de serviteur, passe maître du clown qui devient même son faire
valoir !
source : http://semeursdejoie.org/clowns.html
201
et qu’il était grand temps de me mettre à la cuisine. Il me fallait ainsi
me compliquer un peu plus la vie pour me rendre plus heureux en
laissant aux gros nazes le choix de l’indignation sélective. C’était
trop facile d’acheter le calendrier de la poste avec ses adorables petits
chatons et de feindre de croire que les animaux d’élevage étaient
traités dignement. C’était ce soi-disant progrès là qui me faisait peur.
Le progrès cela devait être la technologie au service de l’humanité.
Moins de temps pour produire et plus de temps pour s’instruire.
L’humanité progressait parce que les conditions de vie du peuple
s’élevaient et puis patratras quelques spécialistes en foutage de
gueule se sont emparés du problème est le petit cochon élevé en
ferme est devenu celui-ci :
202
L’an quatorze de l’an Pépin zéro moins un et je
retiens deux
203
commerciale sur le déroulement de ma journée. C’est tout !
Mon projet est de me rapprocher des personnes intéressées par la
transition et d’en parler, de servir de courroie crantée de
transmission.
204
J’ai mis "Lets’ s dance" des Ramones sans la permission du
contrôleur de la SACEM. Déjà, j’allais mieux.
En cherchant bien, on en trouvait : Mon client souffrant d’
Alzheimer avait fini par me ramener le Point consacré au droit des
animaux que j’avais décidé d’offrir à la présidente de l’AJPLA. Je lui
avais prêté le jour de sa dialyse sans le soupçonner d’être sujet à des
troubles de mémoire.
Nice Matin avait osé rappeler sur son affiche, en plein concert de
louanges pour Nelson Mandéla, que Nice, du temps de Jacques
Médecin, s’était jumelé, en 1974, avec le Cap pendant l’apartheid !
Je me disais qu’il y avait donc de vrais journalistes dans ce journal.
Heureusement, la plupart des gens sont prêts à évoluer, voire à
expérimenter la transition.
Alors quel modèle de sac offrir ? Le sac en toile en coton bio sans
205
publicité ? Le sac en papier kraft avec anses ? Le sac en plastoc qui
finit dans les océans (qui causent des dégâts considérables que plus
personne ne doit ignorer), le vrai sac biodégradable "ok compost" ou
le sac faussement biodégradable "fragmentable" par
photodégradation ou par oxydation, ou mieux, le sac en amidon de
maïs ? Tant d’informations à glaner rien que pour un sac !
Il faut savoir ce que l’on veut ! Militer, c’est d’abord s’informer
en vue d’agir ! Si mon impact écologique fait partie de mes
préoccupations, y compris sur mon lieu de travail, je dois chercher
des solutions alternatives et donc m’informer.
L’autre aspect des problèmes c’est les sous. Vision à court terme,
je prends les sacs les moins chers et je m’en tamponne. Les autres le
font ! Si ce n’est pas moi qui donne le sac ce sera le marchand de
fruits et légumes. Version transition : J’offre des sacs en papier et je
vends les sacs en toile, mais je dois trouver des sous pour faire
l’avance.
206
cela n’était pas évident. Contre la pluie, les gens trouvent des
arguments, contre les régressions sociales, on ne les entend plus.
Mais bon, j’étais comme eux avant la …., enfin le ……, enfin
vous savez de quoi je veux parler.
Le changement est parti de trois fois rien plus un tout petit rien.
Les réseaux militants avaient bien bossé, il faut dire.
207
sens de la mesure et notre autonomie.
</><>
Une brève histoire du capitalisme
208
parler de celui qui pique les produits d’entretien… Résultat, la boite
va fermer.
Nous avons fait le trajet Nice Paris en voiture et j’ai pu écouter ses
conversations téléphoniques car je ne dormais qu’à moitié. C’était
incroyable de voir comme mes problèmes de logistique, de finances
étaient peu de choses en comparaison de ceux d’un dirigeant d’une
grosse boite car lui avait à gérer une multitude de conflits humains,
de problèmes financiers et techniques. j’étais bien dans mon kiosque,
travailleur indépendant. Je continuais à croire que le "small is
beautiful !" même si les journaux économiques indiquaient le
contraire. Dans le monde de demain, le local, le circuit court
deviendraient des atouts majeurs.
209
deviendraient partie prenante tout simplement parce que l’on avait
décrété que la lutte des intérêts divergents (la lutte des classes) serait
démodée.
Je ne vous dirais pas que j’ai vu passer Ludivine hier devant mon
kiosque, ni que je n’ai toujours pas reçu de réponses de Lignes
d’Azur pour vendre des tickets de tram.
Je voulais juste vous dire que je me sentais plutôt à l’aise dans un
des Biocoop de Nice. Le sans-gêne d’une bourge à fourrure qui a
garé son 4X4 citadin juste devant la sortie n’a pas entaché ma bonne
humeur : j’allais acheter les ingrédients pour préparer une salade
roquette - graines germées et deux crubble. C’est lorsque
j’accomplissais de petits gestes qui me donnaient l’illusion d’être en
accord avec ma conscience, que je me sentais le plus heureux. Ce
n’était pas si compliqué.
210
Vous vous en doutez, il ne s’est rien passé. Vous en auriez entendu
parler !
J’ai fermé mon kiosque. Il n’y a que les militants ou les gens
instruits qui lisent les journaux à présent et cela ne suffisait pas à
faire tourner la boutique. Ce n’est pas en vendant des télé Z à 40
centimes que j’allais pouvoir faire bouillir la marmite.
Je suis entré dans ma période sombre où plus rien ne va. Cela m’a
pris quelques mois. Quelques mois, c’est toujours vite passé.
J’appuyais sur le bouton pour traverser le passage clouté mais même
si le voyant indiquait que mon appel avait été pris en compte, le feu
ne changeait pas de couleur. J’allais acheter de la bière en sortant de
mes chantiers et mon bus me passait sous le nez. Bref, je n’étais plus
un écrivain. J’étais un pauvre clampin, un pauvre type atrabilaire
couvert de dettes. Ma peau ne valait pas tripette et j’aurais du mal à
m’en remettre. J’allais crever sans avoir vu l’an 01.
J’avais perdu mon lieu d’observations mais je pouvais m’en
trouver d’autres. Pas chez mes clients mais les lieux où l’on tricotait
et détricotait des canevas de révolution. Je devais me lever, marcher,
marcher, pédaler et continuer en avant, nez au vent !
211
Court-circuit à la Fabrique d’idées farfelues
Ce sont des lieux associatifs qui sont ouverts à tous, même aux
plus "clos" d’entre nous, mais qui affichent clairement un projet sous
tendu. En résumé, dans ce genre d’établissement, les gens qui y
participent ne sont pas là que pour vendre de la bière. Ce genre
d’endroits est censé faire évoluer les bons consommateurs que nous
sommes devenus, bien disciplinés et qui aiment être servis, que "le
personnel" soit souriant, bien élevé et que l’on se se consacre
exclusivement à nous. A nous, rien qu’à nous !
212
Elles sont alors un peu plus impliquées et pour certaines plus actives
que le consommateur lambda bête et discipliné qui passe sa vie à
pisser contre le vent et à hurler avec les veaux (pardon aux
défenseurs des animaux, mais je ne voulais pas dire "avec les
loups", surtout que le loup des steppes est le premier livre qui m’ait
vraiment chamboulé, le livre d’Hermann Hesse.)
Parfois, dans ces endroits que j’aime, je n’avais pas besoin d’y
passer longtemps. J’y faisais mes emplettes. Mes noix de cajou
"artisans du monde", mes chips à la banane séchée. Je descendais
quelques pintes de bières bio et je gardais quelque part dans ma tête
des phrases entendues ci et là, des impressions fugaces qu’il ne me
restait plus qu’à faire pousser comme des champignons sur un tas de
fumier.
213
dans les années 70. Pour moi, et je l’ai vérifié ce matin dans les
archives de la presse sur internet, la société était bien plus violente
auparavant. On peut dire tout ce que l’on veut, pour celui qui croit
plus volontiers un chercheur en sciences sociales qu’un lecteur assidu
de Franche Démanche ou Nouveau détective, les gens se sont
toujours fait des crasses.
Apaches, blousons noirs, fauteuils arrachés, manif sanglantes,
feuilletons policiers, débats télévisés, chaînes à vélo et barre d’acier,
et l’inspecteur Harry en position du tireur couché, les gens étaient
moins cambriolés mais risquaient plus le meurtre. Je ne nie pas les
problèmes d’insécurité d’aujourd’hui, les phénomènes des bandes,
les braquages, les crimes crapuleux mais le risque premier, c’est que
les "vraiment très très cons" prennent du grade et finissent par se
mêler des affaires de la Cité.
214
Mes clients très très cons, je m’en suis débarrassé. On a beau être
commerçant, on est pas là pour tout endurer. Quoiqu’il en soit, la
démocratie n’est pas sauvée pour autant !
Le fait est que le courant ne passait pas avec les vielles liftées qui
portaient de la fourrure, non pas parce qu’elles portaient des peaux de
bêtes sur leur vielles peaux, puisque c’était trop tard, mais parce
qu’elles se la pétaient, et je déteste les snob ! Elles prennent leurs
grands airs, comme si elle m’accordait l’obole en achetant un
programme télé à un euro ! Et je devrais accepter ça sans afficher un
petit sourire narquois ! Une vieille bique m’avait même reproché
alors que je fermais mon kiosque avec une demie-heure de retard,
que l’on ne m’impose pas des horaires ! Je lui aurais bien vidé ma
bouteille de pisse sur le manteau mais je suis un punk à crête rentrée,
un mec ordinaire gentil et bien éduqué.
Le courant passait mal avec certains coq à la crête raplapla, ceux
qui avaient naturellement tendance, à se venger de leur vie de pépère
peigne-cul sur le "petit personnel", alors quand ce n’était pas la
caissière que ces toquards venaient emmerder, c’était le kiosquier.
Ils tombaient mal avec moi car j’étais du genre poli tout
simplement parce que j’aimais bien les gens mais je n’étais pas de
ces commerçants obséquieux qui vous font des courbettes et un doigt
d’honneur dans le dos.
Moi je suis un humain, je ne suis pas un distributeur
automatique : Je suis faillible, je suis sensible et susceptible comme
215
un écrivain. Je me cale sur les attitudes de mes clients. Si le client ne
veut pas causer, on ne cause pas, j’ai suffisamment à faire. S’il veut
parler et m’instruire, tant qu’il ne s’agit pas d’un monologue, je suis
preneur. S’il est d’humeur à plaisanter, on déconne et s’il veut parler
cul, on parle cul mais s’il commence à trop me coller et à me poser
trop de questions, je me replie dans ma boite. Je fais le pitre parce
que je suis timide. Je me méfie des gens que je ne connais pas et
j’aime bien garder une certaine distance, dans la vie réelle.
Mes clients me font parfois chier avec leurs jeux de mots ou leurs
histoires à deux balles. Ils sont bien gentils mais ils ont peur que le
monde change en mieux alors ils se contentent de se lamenter de
rouspéter et d’idéaliser le monde d’avant.
Mon neveu me dit "cash" qu’il fait partie d’une génération perdue.
Qu’est-ce que j’y peux, moi ?
Mes clients auraient aimé vivre différemment, mais ils restent à
l’étroit dans le monde des possibles. Mes clients méritent mieux que
le "shit" que je leur donne à lire. Ils méritent de la presse libre, de la
presse qui éveille ou réveille. J’ai ré-ouvert le kiosque pour cela, pas
pour vendre des gadgets sous blisters et des journaux qui
encouragent à la paresse. J’aurais toujours l’obligation de vendre ce
genre de journaux car je n’ai ni à m’ériger en censeur ni à être
partisan sur mon lieu de commerce, mais j’ai la responsabilité et la
liberté de leur proposer mieux. C’est à moi d’améliorer mon offre, je
ne dois pas compter sur le Marquis pour cela.
Et je vais m’y coller ! Je peux y arriver, je suis à deux poils de
bite de réussir. Ça doit marcher sauf si une bière m’assomme et me
faire perdre mon élan. J’ai un projet à soumettre à mes partenaires.
Mairie et contributeurs privés. Un projet écrit avec des mots passe-
partout pour ne pas effaroucher les gens normaux et un projet plus
audacieux, plus dans l’esprit "coopérative" réservé exclusivement à
mes lecteurs. Un projet assez traditionnel pour rassurer et assez
moderne pour faire déplacer le curseur d’un cran. Ces projets, je les
ai écrit entre autres parce que je suis allé me ressourcer au Court
Circuit et à la Fala. Ce sont eux qui m’ont donné le La.
216
Je me suis engagé au Parti de la Gauche suite à "l’affaire
Cahuzac", le socialiste qui a trahi les idéaux républicains sans aucun
regret - vous le savez puisque ma vie n’a plus aucun secret pour
vous… Le climat démocratique est devenu encore plus préoccupant
et les six mois de présence en première page de la presse "people" de
la reine des gourdasses (qui a produit une phrase "culte" que tout le
monde aura bientôt oublié car les gens ne sont pas si bêtes qu’ils s’en
donnent l’air !) n’incitent pas aux réjouissances.
Je les aime bien mais comme je ne tracte pas, n’ayant pas envie de
me trimballer avec une pancarte, ils me le font sentir que je les ai
déçus.
217
réalisées par des artistes, des chips à la banane vendues par Artisans
du Monde, des fanzines et des livres, des sacs en toile en coton non
traité (oui bio et commerce équitable mais du vrai, dont la
provenance est vérifiable). Je détournerais les affiches de leur objet
initial par des collages. Ma toile de store serait une toile originale
peinte par une artiste.
218
Après quelques échanges avec des pro animaux ou des gens de la
vraie gauche, je me dis que de la même manière que les Ramones
n’ont pas fait que de bons disques et que l’on ne peut pas aimer tout
comme un bloc, juger les gens sur les apparences, c’est nier leur
identité.
Dans une ville où le maire qui prétend être élu dès le premier tour
219
refuse de parler de ses adversaires politiques et refuse carrément le
débat démocratique. Dans une ville où l’édile professionnel de la
com promet à ses électeurs qu’il les emmènera faire de
l’accrobranche alors que pour financer ses projets pharaoniques, il
va devoir vendre au plus offrant le patrimoine communal, et bien
donc, disons le, même dans cette ville, il y a toujours moyens de se
faire entendre en attendant de se faire comprendre. J’ai décidé de
censurer ce paragraphe car il ne faut jamais se mettre le maire à dos
quand on postule dans une association para municipale, donc, vous
n’avez rien lu.
C’est mieux qu’il y ait du monde à une manif organisé par le DAL
(Droit au logement) parce que les gens vont y venir car ils savent que
ce ne sera pas une manif austère. C’est toujours mieux une journée
sans viande par semaine dans les cantine que des prêchi-prêcha à tout
va et ce sont des écolo tartuffes, des hélicologistes dont j’aime me
moquer, qui m’ont fait prendre conscience de l’enjeu énergétique et
les conséquences sur la paysannerie de l’élevage industriel.
Tout cela pour dire que faire un peu c’est toujours mieux que ne
rien faire. ..
220
Pour que cesse ma dépendance à l’écran, j’avais laissé de côté la
bibine sans alcool, le cidre et le panaché pour la bière des vrais
hommes, le temps de digérer la disparition de mon père. Je me suis
dit, si je sors, je serais moins tenté de passer trop de temps sur face
de bouc. Mais là, je suis en train de vous mentir car j’avais
recommencé à boire de la bière et du cidre bien avant que mon père
ne tire sa révérence…
Je m’y suis mal pris une fois de plus car l’alcool arrive toujours à
me kidnapper le cerveau, je ne pourrais jamais avoir le dessus.
L’alcool est pour moi comme un chien fougueux car je n’ai jamais pu
l’éduquer, je n’ai fait que jouer avec lui. Je ne savais jamais si je
pouvais le caresser ou s’il allait me mordre.
Mon père est mort parce que je n’ai pas su lui montrer que le "Je
t’aime" n’était pas une parole en l’air. J’avais trop de souci pour
prendre soin de lui et à présent je dois continuer avec ce poids dans
mon petit pois. Mon père m’a montré clairement ce qu’il ne fallait
pas faire : Renoncer à "juste une lutte pour la vie ". Je suis comme lui
soumis à des sautes d’humeur. J’ai appris à me contrôler, à juguler
221
mes excès d’enthousiasme, à encaisser les crises de mélancolie, et si
je suis devenu kiosquier, ce n’est pas tout à fait un hasard…
222
Mon père, l’héritage
Mon Père,
Mon père est parti sans que je ne lui dise au revoir et sans me dire
« Adieu fiston, maintenant que je t’ai tout dit, c’est à toi de jouer !
Pose tes pâtés de sables, replies tes châteaux de cartes et fais leur
avaler le bouillon à tous ces connards d’arrivistes qui te pompent
l’air ». Mon père, alpiniste chevronné est tombé en escaladant une
falaise. Il n’avait pas bien vérifié son matériel, une erreur qui lui aura
été fatale.
Eternel optimiste, commerçant lunaire, vendeur de moulins à vent,
la médiocrité du monde a réussi à lui transpercer sa carapace. Il en
avait marre.
223
connaissez beaucoup qui aiment que l’on dise ce que l’on pense
vraiment sans souci du respect des conventions et sans chercher à
plaire à tout prix alors qu’en définitive, on témoigne bien du respect
absolu en considérant qu’une personne est capable d’aller au delà des
flagorneries et des civilités d’usage ?
Moi qui suis un manuel (car je me lave les mains avant de faire
pipi alors qu’un intellectuel se lave les mains après avoir fait son
pissou) je préfère les débats organisés par les associations un peu
moins pointus car les colloques demandent un pouvoir de
concentration que je n’ai plus. Néanmoins, je sais qu’ils sont très
importants car ils font évoluer l’état des savoirs et parfois cela influe
sur les textes de lois. Le colloque organisé par l’ADDA à la faculté
de Droit de Nice a réuni scientifiques, juristes et philosophes et j’ose
espérer qu’en dépit d’une couverture médiatique insuffisante, il en
résultera un changement quant au statut de l’animal.
"On peut toujours dire la vérité même en lui ôtant sa chemise dès
lors que l’on reste placide et poli. "
Alain Marie Alphonse Périé
224
sortes de gens. Mon père parlait avec le même respect à un ministre,
un général ou à un clochard. Peu importe vos origines, votre couleur,
vos mœurs, soit vous lui conveniez, soit vous ne le conveniez pas. Il
détestait les tartuffes dégoulinant de gentillesse apparente et mettait à
l’aise même les plus introvertis.
C’est pour cette raison que les femmes non effacées, féministes de
conviction ou féministes de combat, se tapent toujours le sale boulot,
celui qui consiste à souligner ce qui ne va pas, celui qui les fait
passer pour des emmerdeuses.
Un entrepreneur fait un mauvais boulot ou demande trop
d’argent : c’est la femme qui s’y colle ! Le mec fait celui qui n’a rien
vu, lève son verre avec l’entrepreneur tandis que la femme sort le
juge de paix (le niveau) et essaye de lui faire entendre raison car les
entrepreneurs tout corps d’état sont généralement de bonne foi, à
l’instar du tailleur de Fernand Raynaud. Tout cela parce que les
225
hommes ne savent toujours pas que dire ce qui ne va pas sert à faire
avancer les choses quand il et encore temps et ne mène pas forcément
au clash quand on sait y faire. Les américains des livres que j’aime
lire disent ce qui ne va pas quand il le faut mais ils savent dirent
quand ça va aussi. Il sont bien ces américains, dommage qu’ils soient
si peu à vivre comme ceux des livres…
Mon père a perdu beaucoup d’amis qui n’aimaient pas son franc-
parler. Je suis resté longtemps fâché avec mon père car il exigeait
toujours une explication de fond alors que dès fois, on préfère s’en
tenir à la forme car c’est bien plus commode.
Je lui ai même cassé un doigt un soir, le seul soir, où je me suis
retrouvé à l’hôpital Sainte Anne, chez les fous, parce que j’étais sorti
de mes gonds. Suite à cet épisode de ma vie dont je n’aime pas
particulièrement me souvenir, nous avons beaucoup discuté avec
mon père et Jenny, sa compagne. Mon père savait ce que cela
signifiait d’avoir une humeur qui se modifie en permanence, de
fonctionner par à-coup, d’être serein cinq minutes avant et troublé,
perturbé, par une parole ou un regard, sans même savoir pourquoi,
bref d’avoir du mal à canaliser son émotivité. Il ne pouvait pas faire
grand chose pour moi si ce n’est de me conseiller d’avoir un emploi
adapté, de pouvoir m’organiser librement, d’être indépendant. Par
contre ce que mon père a réussi à faire, c’est m’apprendre à canaliser
ma violence intérieure. C’est depuis que j’ai appris à aimer celui que
j’étais vraiment.
En fait, mon père n’a cessé toute sa vie d’expérimenter les bases
philosophiques de la non-violence active.
226
que cela plaise ou pas.
227
qui ne se sentent plus pisser lorsqu’ils ont une once de pouvoir.
L’éducation populaire est la solution qui ne doit pas arriver trop
tard au chevet de la démocratie malade et essoufflée.
Il faut donc dire les choses sans trop tarder.
228
Mon père m’a appris à être un honnête homme, mais disait qu’il
fallait, rien que pour se détendre, faire des petits arrangements avec
la réalité et qu’il fallait toujours mieux faire envie que pitié. Ma mère
m’a appris les règles de politesse mais aussi à être persévérant dans
mes projets, à rester concret, les pieds sur terre et ne pas chercher à
retenir trop longtemps les projets qui partaient en fumée.
Mon père n’avait pas de biens personnels mais il m’a transmis une
énergie inépuisable qui me permet actuellement d’avaler beaucoup
229
de couleuvres sans m’effondrer.
J’ai trop tardé à dire à mon père que je l’aimais et j’ai loupé le
coche.
La seule chose que je peux faire, c’est, non pas rattraper le temps
perdu, mais aller de l’avant, m’organiser et à savoir trier mes papiers
comme lui et mieux définir mes priorités.
Mon père m’a toujours dit qu’il fallait foncer car il était
impossible de revenir sur ces pas sans se prendre une bourrasque du
temps présent. Cela voudrait-il dire qu’il ne sert à rien d’être
nostalgique, de se laisser aller à la mélancolie le temps d’écrire une
chanson ou un poème ? Mon père pensait tout le temps au passé et
voulait revenir en arrière. Mon père m’a dit comment il fallait faire, il
ne m’a jamais dit que lui, il le faisait…
Papa,
230
deux cancers, tu étais soigné pour ton diabète mais tu étais coriace
et tu aimais la vie car tu étais un battant et une personne optimiste
en dépit de tes crises mélancoliques. Tu n’as pas supporté la
disparition de Jenny ta compagne qui a partagé ta vie pendant 35
ans. Dans les mois qui ont suivi sa disparition, le 14 octobre 2010, tu
étais terriblement déprimé, tu as perdu brutalement en autonomie et
tu as vieilli d’un coup. Toi qui étais si fier de ta chevelure "à la Jean
Gabin ", et qui étais maniaque, tu as commencé à te négliger car tu
n’avais goût à rien. Par ta seule volonté tu avais pu te sortir seul de
la dépendance alcool-tabac, mais cette nouvelle épreuve t’avait
anéanti et tu as passé des mois atroces.
Tu as réussi à remonter la pente et tu as continué ton activité
professionnelle dans le négoce en créant une nouvelle entreprise qui
ne t’apportait pas de grands revenus mais qui te donnait une raison
de te battre pour vivre dignement. Tu pleurais souvent ta compagne
mais tu avais retrouvé ton dynamisme et une meilleure hygiène de
vie. Nous étions fiers de toi car tu avais réussi, sans aide extérieure,
à te sortir de cette spirale du désespoir. Ton domicile était de
nouveau bien tenu et tu as connu des moments de joie partagée.
231
tu n’avais pas hésité à demander audience au préfet - lequel
interloqué t’avais reçu - car tu voulais organiser un match de boxe
entre un capitaliste et un communiste. Doté d’un sens commercial et
d’un dynamisme peu communs ces qualités t’ont naturellement
conduites dans la vente et le négoce, domaine dans lequel tu as
toujours excellé.
Tu as épousé à l’église, Ma maman, à 19 ans mais vous avez
divorcé neuf ans après. Tu as quitté ta Martinique natale pour te
rapprocher de tes douze enfants Après un second mariage, tu as
rencontré le grand amour de ta vie Jenny, en 1978.
Intermède poétique :
232
discordes et tu leur as donné pleinement ton amour et ta confiance.
Tu as eu plein d’amis, toutes sortes d’amis, de tous âges, de toutes
les conditions, de toutes les origines. Les gens t’aimaient bien car tu
étais vif d’esprit et plein d’humour. Tu aimais beaucoup les africains
pour leur sagesse. Tu étais d’une audace inouïe, capable par
exemple d’entrer dans une boulangerie pour demander un carton
pour emballer le gâteau que tu venais de confectionner, tu négociais
en permanence pour satisfaire aux mieux tes clients dans l’esprit des
grandes maisons commerciales d’autrefois comme tu disais, et tu
avais un terrible bagout.
233
puisque je l’affirme,
Au bout du chagrin une fenêtre ouverte,
Une fenêtre éclairée.
Il y a toujours un rêve qui veille,
Désir à combler, faim à satisfaire,
Un cœur généreux,
Une main tendue, une main ouverte,
Des yeux attentifs,
Une vie, la vie à se partager.
Paul Eluard
Vous m’avez donc bien compris, je déteste les gens infatués (1) de
leur prétendue connaissance des ressorts psychologiques de la
personne humaine alors qu’ils ne sont que d’obscurs manipulateurs,
des as de la vente formés aux techniques de la communication. On
devrait l’être tous, formés à ces techniques. Cela devrait s’enseigner
dans les écoles et en formation continue.
On éviterait beaucoup d’impairs de la vie courante si on arrivait à
se dire, au bon moment, quand les choses ne vont pas et se dire aussi
quand on est heureux d’être ensemble, et se donner la possibilité
d’intervenir dans un conflit avant qu’il ne s’envenime et devienne
sans issue. Puisque nous sommes confrontés à un décalage constant
entre celui que nos aimerions être, celui que nous sommes et celui
qui est perçu par les autres et puisque maîtriser le vocabulaire ne
suffit pas à être entendu et compris, nous sommes condamnés sans
cesse à mettre des mots, expliquer, ré-expliquer, rectifier et parfois, et
de plus en plus souvent, le temps d’une fulgurance, d’une pirouette
médiatique. Je dis tout cela pour essayer de faire comprendre que le
boulot de Jean Luc Mélenchon n’est pas facile et qu’il le fait plutôt
bien à mon humble avis.
234
a des patrons… dans l’intérêt du travailleur — (Karl Marx, Le
Manifeste communiste) source http://fr.wiktionary.org
235
Le braquage raté
236
de 700 euros nets par mois. Je ne plaignais pas car c’était le boulot
qui correspondait le mieux à mon statut d’écrivain mondialement
inconnu.
J’allais braquer la Banque postale car cela n’était pas très loin de
mon kiosque, et donc plus pratique ne disposant plus de voiture, mais
comme j’étais un mec drôle, même en pleine débandade généralisée,
j’allais donc m’arranger pour foirer mon premier et dernier braquage.
J’aurais ainsi un pleine page dans le Nice matin et on parlerait
localement d’Auguste Picrate, c’était le plus important et cela ne
pouvait qu’améliorer les ventes de mon livre.
Le directeur de la banque venait m’acheter tous les jours un à
deux journaux. C’était un mec balaise de deux mètres de haut et de
130 kgs, et il me disait toujours "bon courage" car il savait qu’il
fallait être écrivain, nostalgique ou azimuté pour tenir ce genre de
commerce en voie de disparition.
Avez-vous remarqué, braves gens, que les décideurs lisent la
presse ? Un homme anticipe, décide parce qu’il sait, et il sait parce
qu’il s’informe, cela fait partie de son travail Pendant que certains
parcourent les journaux "tue-le-temps" et les journaux gratuits, les
décideurs lisent la presse d’informations. Ils payent le journal et
s’enrichissent ainsi.
Je trouvais cela plus élégant de prévenir le Directeur de mes
intentions.
Monsieur le Directeur,
Je suis le kiosquier. Je dois de l’argent à mes deux fournisseurs et
cet argent, je ne l’ai pas dans mes caisses. Je suis incapable de
braquer une vieille dame sans défense, mais vous qui êtes balèze, je
peux. Je viendrais avec une arme car c’est plus facile ainsi mais elle
ne sera pas chargée car je n’ai pas voulu acheter de munitions et je
ne le ferais pas, je ne m’en servirais pas, c’est juste pour faire
comme dans les films.
Prévenez le négociateur que je veux un véhicule à air comprimé
produit par MDI pour ma fuite.
Soyez gentil de ne pas faire paniquer les personnes qui travaillent
chez vous, cela sera un braquage sans violence et donc je vous
237
serais gré de bien vouloir créditer directement sur mon compte la
modeste somme exigée par le Marquis, et que ça saute !
Cordialement, votre kiosquier.
238
239
Roméo EMPATHIE
Ces derniers jours, j’ai manqué de sommeil car j’ai travaillé sur un
plan de sauvetage, sur un projet de redynamisation kiosquière. Les
mots sont importants, l’emballage du paquet, le respect des forme,
tout doit rentrer en ligne de compte. Dans les années 70 tu pouvais
encore écrire un journal à la main et en faisant des gribouillis, ce qui
comptait c’était le sens, pas la présentation mais aujourd’hui il n’y a
que quelques journaux comme fluide Glacial pour oser continuer à
miser sur le bon sens des lecteurs.
240
J’ai fait trois versions de mon projet.
J’ai fait une version totalement transparente qui fait état des
difficultés que je rencontre en trésorerie et dans mes relations avec le
marquis parce que je pense que lorsque l’on s’adresse à de futurs
partenaires, il faut être clair et ne rien dissimuler. Ensuite, j’ai fait
une version synthétique qui s’adressent aux gens pressés qui ne se
préoccupent jamais du contexte. Je me suis ensuite posé une
question tout bête : à quoi doit servir ce projet ? A me faire plaisir ou
à convaincre et à fédérer de bonnes volontés ?
241
Cela reste de la bière mais quand on se cause en buvant, ce n’est plus
tout à fait de alcoolisme, c’est de la convivialité et il est dommage
que les bistrots aient fermé pour que les gens aillent regarder la télé
chez eux, je ne pense pas qu’ils soient devenus plus heureux pour
autant. Je sais de quoi je parle, j’ai des années de pratique télévisuelle
derrière moi.
242
nous sommes vraiment sous la dictature de l’image !
243
Je précise à l’intention de mes lecteurs et lectrices douaniers que
si je considère une profession comme utile, compte tenu des tous les
trafics en tous genres existants, c’est bien celle-ci. Il faudrait bien
plus de douaniers et moins de conseillers commerciaux, on ferait des
économies et on vivrait mieux !
244
Je demande si c’est par rapport à un chèque sans provision, mais
non, il ne s’agit pas de cela, mais de mon comportement. Bien,
Monsieur le juge.
Ah, j’allais oublié, j’ai proféré des menaces devant témoins. J’ai
dit Monsieur "Jesuisdébordé" que s’il ne venait pas récupérer ses
revues non philatélistes qu’il m’avait commandées en catimini, que
je ne ne viendrais plus acheter de timbres lettre verte. Il m’a dit que
je faisais de la diffamation et je lui ai rétorqué : "Ben oui,
évidemment, mais toi, tu es qui pour clôturer mon compte parce que
je refuse de te faire le baise main? Ne fais pas trop le malin avec moi
car tout se paye un jour ! "
J’ai besoin d’être calme, d’être maître de moi car il n’y a que
comme cela que je peux être bon et progresser dans ma quête pour un
monde plus juste, un monde dans lequel le "juste mot" fait la nique
au "juste prix".
Je m’en veux d’avoir dit à mon père qu’il faisait du cinéma, qu’il
n’avait pas mal au ventre, que c’était psychosomatique, que c’est
parce qu’il bouffait de rôti de dindonneau et des saloperies
industrielles qu’il était malade.
Lorsque j’ai appris son décès, ma première réaction a été de me
245
demander comment j’allais faire pour le kiosque. Je devais me faire
remplacer, je ne pouvais pas le laisser fermé ne fut-ce que trois
jours. Je me demandai comment faire pour financer les obsèques car
je n’avais aucun argent de côté. Mon père avait souscrit une
assurance obsèques. Il ne voulait pas que ses enfants aient le moindre
emmerde à cause de lui.
L’assureur me fait chier car il dit, six mois après, que partir faire
de l’escalade sans avoir inspecté son matériel avant est pure folie et
que par conséquent mon père est exclu des garanties. Et moi, je ne
réponds plus rien aux courriers car j’en ai marre que des assureurs se
sucrent sur le dos des défunts. L’assureur n’est autre que le banquier
principal de mon père car les banques ne se contentent plus depuis
longtemps d’avoir des activités de banque de dépôt, ils vous assurent
pour tous les risques de la vie, vous vendent des téléphones et des
abonnements. L’assureur veut se payer deux fois sur le dos d’un mort
qui ne dira plus rien. Mon père ne parle plus qu’à moi, la nuit et le
jour.
Mon père me dit que ce n’est pas parce que les résultats aux
dernières élections sont décourageants qu’il faut baisser le pavillon.
Il faut aller de l’avant et ne rien céder, ne pas perdre du terrain, se
battre pour l’accord commercial que l’on nous prépare en catimini
soit connu du public.
Il me donne l’injonction de continuer à m’informer pour être plus
efficace, de continuer à aller à des réunions même si sur le moment
j’ai l’impression d’y perdre mon temps, de faire ce que je n’aime pas
en allant en devant des gens.
" Tu sais que la plupart des gens suivent le mouvement. Tant que
plus ou moins tout le monde semble y trouver son compte en
consommant massivement, tant qu’il y aura des gens pour participer
sans faiblir à chaque grande messe commerciale, à vibrer à
l’unisson pour un nouvel objet, ceux et celles qui aspirent à autre
chose sont condamnés à explorer, essayer, exposer, s’exposer, et ces
personnes passeront par des périodes de découragement. Les
minorités actives font aussi partie de la majorité qui subit en silence,
pris en tenailles entre des motivations contradictoires. "
246
Il me dit que si que je veux devenir un écrivain à part entière, pas
un dilettante, il va falloir batailler plus et ne pas chaque jour remettre
à plus tard ce que je m’étais promis de réaliser. Mon père me connait,
il sait à quel point je suis heureux lorsque j’arrive à faire ce que
j’avais prévu. Il sait également à quel point je suis ingénieux pour
modifier constamment mon emploi du temps, et à quel point je
jubile, lorsque je peux me libérer d’une contrainte passagère. Je me
dis que je vais mettre à profit ce temps libre pour avancer dans mon
projet de roman mais généralement il n’en est rien, je préfère flâner.
Il me dit aussi que je serai plus crédible si j’étais plus impliqué dans
la vie de la cité qu’enfermé entre quatre murs. Comment pourrais-
je donner tort à un mort ?
247
Projet populo–politique "Anti people, tu perds
ton sang froid"
Avant c’était mieux ! Avant les gens qui s’agitaient dans leurs
petites boites vitrées restaient dans leur coin et celui qui ne voulait
pas voir gesticuler les stars d’une saison et voir les animateurs
s’auto-congratuler éteignait le poste et filait chez son marchand de
journaux acheter son canard avant de passer au bistrot. Les choses
étaient simples. Pas besoin de normes à la mord-moi- le nœud pour
vivre.
Les Seventies, que j’ai bien connues, n’étaient pas que Woostock
option Peace and Love des tee-shirts à 20 euros que l’on trouve dans
le vieux Nice. La vie était dure, alors certes la baguette pesait 300
grammes et coûtait moins de dix cents et effectivement, on parlait
plus de projets de société que des amourettes des snobs. Pas
d’angélisme non plus ! Les rapports sociaux étaient violents, on
aurait tendance à l’oublier. Et on ne plaisantait pas avec l’inspecteur
Harry. Oui, je sais, je l’ai déjà dit.
248
hurluberlus non barbus ont commencé à nous emmerder parce que
soit disant on polluait trop et que l’on gaspillait l’eau et des
ressources non renouvelables. N’importe quoi ! Si c’était vrai, Le
staff qui s’occupe de nos loisirs déprogrammerait « la croisière
s’amuse » et Magnum pour nous informer et on se bougerait les
méninges !
Les gens des petites boites qui s’agitaient mais ne faisaient surtout
pas de l’Agit-prop, car cela aurait mis en péril leur gagne-toast, ont
migré et ce sont retrouvés sur les couvertures des magazines que je
vends. Je suis marchand de journaux, pas de la grande époque de la
presse libre et indépendante mais celle d’aujourd’hui, où les
publicitaires se sont engouffrés partout. Les pin-up des années 50, les
étoiles du cinéma ont cédé la place aux pétasses à frasques, celles qui
font parler d’elles en pétant.
249
Les gens ont besoin de lire des sornettes, je peux le comprendre,
et en tant qu’écrivain mondialement inconnu, c’est mon fonds de
commerce la crédulité la propension à s’émerveiller des gens de la
foultitude (enfin, ceux qui vivent à mon altitude) mais les gens à
force de lire des sornettes deviennent aigris et parano quand ils
s’aperçoivent que leur vie ne se déroule pas comme dans un roman
feuilleton. Ils romancent, ils inventent mais ne font pas de la
littérature. Et les gens ont en marre !
Je ne suis pas mieux que les autres même si en tant que kiosquier
localement reconnu, je pourrais me la péter grave, je n’oublie pas que
pendant des années, sous couvert de me libérer les neurones, je
regardais le catch américain et que je passais trois à quatre heures
allongé sur le lit à regarder la télé.
Richard était un pauvre qui avait les idées bien en place et une
énergie à revendre. Il savait y faire et n’aimait pas les phraseurs de
mon acabit et lorsque je lui avais dit que je projetais de faire du
bénévolat moi aussi, en faisant du soutien scolaire, il m’ a pris au
mot en me disant : "Ok, tu commences quand ? "
Quel mufle ! Me faire cela à moi, un écrivain si sensible !
Et le pire, c’est qu’il avait raison car, à force de reporter je risquais
de rater la dernière représentation de la pièce de théâtre vivant qui
250
était en train de se monter.
251
Sauvé par la littérature
Je crois vous l’avoir dit : Jim Thompson est l’un de mes écrivains
chéris.
Et Jim Thompson m’a sauvé la mise aujourd’hui.
252
si mal !
C’était une de ses soirées magiques comme il s’en passe dans ce
genre d’endroits, où l’on sent que l’histoire est en marche et que la
transition citoyenne va en secouer plus d’un… Je le dis d’un ton
léger et enjoué mais c’est important ! Les gros cons du FN n’ont pas
encore gagné ! Ils nous ont mis la pâtée sur l’éduc pop, tout comme
les publicitaires nous ont eu sur le "développement durable" mais ils
ne vont pas nous arnaquer sur le mode de vie "Transition " !
253
Ma démarche, celle que j’explique sans doute confusément, tout le
long de ce recueil de billets d’humeur, consiste à passer de l’état de
tête de nœud - même pas gordien ou giscardien - en une tête au carré
tête de réseaux. Je sais que, seul, je n’arriverai qu’à produire de
l’incertain, cela restera du bavardage. Il est donc important que je
cesse d’avoir peur de me fier aux autres.
Pour la tête au carré, c’est fait. Un soir où ma tête s’était
déconnectée de mon corps… Je n’ai ressenti aucune douleur.
254
discrètes.
Même si vous racontez l’exacte vérité, même si vous livrez un kit
méthodologique, même si vous présentez plusieurs hypothèses
vérifiables, ceux qui ont décidé de ne retenir que le plus sordide le
feront de toutes les façons et ne vous écouteront pas jusqu’au bout. A
quoi bon se donner de la peine, il faut les laisser dans leur vidéo
club.
255
La réalité était pourtant on ne peut plus bête :
256
romanesque et délirante pour les plus ouverts. Et puis, j’écrirai une
version carrément loufoque pour le Nouveau détective et je leur
posterai. On verra si les informations sont vérifiées ou s’ils ne se
donnent même plus cette peine.
Nous allons faire en sorte que cette petite péripétie urbaine ait une
quelconque utilité pédagogique.
257
alors la seule solution que j’avais était de me joindre à celles et ceux
qui voulaient changer le monde. Cela excluait les partisans du repli
frileux, les colportes les fascistes et les cafardeux.
258
plus polluante et bruyante dans le mensuel Échappement. J’ai ajouté
quelques détails qui étaient assez drôles sur le moment mais qui ne
rendent rien par écrit.
A d’autres j’ai dit que j’avais été agressé. Tantôt il s’agissait d’un
vol de bijoux, tantôt il s’agissait d’un règlement de comptes entre
opposants politiques, tantôt d’une tentative pour séparer une querelle
d’amoureux, tantôt j’avais eu affaire à un mari jaloux. Parfois, c’est
la version de la mamie furieuse en apprenant que je n’avais plus de
France Dimanche et qui m’avait massacré à coup d’ombrelle ou qui
venait de réaliser tout le mal que je pensais de ce genre de journaux
pour demeurés, qui m’est venue à l’esprit. Il y a eu aussi la version
jardinage : Je laisse trainer un râteau par terre, la suite vous la
connaissez. Je suis groggy alors de m’être mangé le manche du
râteau, je vais me reposer un peu à l’ombre d’un pommier (ou d’un
poirier) mais là patatras, une rafale de vents et me voilà couvert de
pommes. Je n’ai pas osé dire que j’avais ensuite été changé une tuile
sur mon toit. Il me fallait trouver une version plausible pour des
journalistes de métier, avec donc des éléments vérifiables.
259
à dos bleu dont il était en possession le lendemain. Auguste a eu un
knock-out, un trou noir, un vide spatio-temporel. Il s’est trouvé dans
le même état d’esprit que lors de sa dernière agression, il y a une
vingtaine d’année d’années qu’il a raconté dans Elucubrations
vinassées, un des chapitres de MYSTERIUM CONJONCTIVITE.
Vous voyez le topo. je n’ai pas porté plainte parce que j’aurais
produit un faux témoignage car ma perception de la réalité n’était pas
celle d’un homme mesuré et sobre. Dans mon état d’exaltation, je
confondais les phares des voitures avec les étoiles filantes et
nounours avec mister Hyde.
260
Une histoire à peine croyable
261
Nous n’étions plus dans les années 70 et dans cette salle, les
jeunes avaient l’air speed.
Très rapidement, l’entraîneur décida de faire cesser le randori.
Je pus aborder la leçon inaugurale, sur l’humilité.
262
pétaradent en faisant du vroum vroum viril. Ma voix ne portait pas,
je devais faire un stage pour asseoir mon autorité naturelle. Je
cherchais ma voie : Souple mais tenace, Placide mais révolté.
Jamais apaisé.
Il était temps que je dise au revoir à mon père et que je tourne les
talons. Je n’allais jamais pouvoir comprendre ce qui lui était passé
par la tête lorsqu’il s’était trompé dans son équipement d’alpiniste,
lui qui était si méthodique. Je devais suivre ma route, sans lui, et tant
pis pour les explications que je n’avais pas su demander à temps. Je
devrais me dépatouiller avec. La seule chose que j’avais plus ou
moins capté, mais bien trop tard, c’est qu’il est très difficile d’être
cru même par les gens qui vous aiment ou qui disent vous aimer
quand vous vous débarrassez de votre armure pour essayer de
dépoiler votre âme. Personne ne veut vous suivre.
263
Kiosquier assermenté, à Nice Nord, dans un quartier mixte où
toutes sortes de gens se croisent. Je suis attaché à mon quartier et à
mon kiosque.
264
que j’ai vu de très près. Ils ont fait exprès, j’en ai la preuve ! Il s’agit
d’un faux accident, on a voulu m’intimider !
Je monte une roue avant voilée afin de rouler droit lorsque je suis
chargé et donc je suis certain de ce que j’avance : ce sont eux, ceux
qui étaient dans la voiture qui m’ont foncé dessus ! Au début, j’ai
cru que c’étaient des étoiles filantes et j’ai même ralenti pour sortir
mon appareil photo de la sacoche arrière droite mais j’ai vu
rapidement qu’il s’agissait de phares de voiture. Une fourgonnette
me fonçait droit dessus et comme j’ai étudié la physique je savais
que l’impact serait plus fort si je ralentissais alors je me suis mis à
pédaler plus fort.
Le choc n’a pas été trop violent car j’ai roulé sur le capot. Je
m’en suis sorti avec juste un bleu au genou droit.
J’ai refusé d’entrer dans leur camionnette car cela sentait trop le
poisson or je suis nouvellement végétarien. J’ai tellement insisté et
résisté qu’ils m’ont ligoté et attaché sur le porte-vitres latéral, posé
sur mon vélo avec de solides sangles (j’ en ai encore gardé les
traces aux poignets. Impossible de filer à l’anglaise ainsi !) Je
n’entendais pas ce qu’ils disaient mais je les entendais rigoler fort à
l’intérieur de leur cabine.
Ils sont allés de plus en plus vite et j’ai commencé à avoir très
peur. J’ai crié mais il n’y avait personne. Tout d’un coup, le tendeur
qui tenait des bâches enroulées sur la galerie, a lâché et m’a claqué
265
sur l’arcade sourcilière. Fort heureusement, je dois être cocu car je
n’ai pas perdu l’œil droit.
Une fois arrivé, ils m’ont bandé les yeux et donné des coups de
bâton dans le dos et sur la tête pour me faire taire. Nous avons
marché pendant des centaines de mètres sur un chemin caillouteux
d’une largeur d’1.20 m maxi (car je marchais en zigzag et je me
cognais contre les clôtures). Nous sommes arrivés dans un cabanon,
une sorte d’abris de berger mais en pierre. Il y avait trois autres
personnes et la pièce était chauffée par un poêle à buches. Ils
parlaient et rigolaient fort. Certains avaient un accent du nord. Ils
avaient tous le crane dégarni et lisse mais ils n’étaient pas habillés
comme des skins mais comme des montagnards (je m’y connais en
mode vestimentaire, c’est ma passion).
266
ne lâcheraient pas, qu’ils avaient tout leur temps et qu’ils me
forceraient à aimer ce que je n’aimais pas. En quelques semaines, je
deviendrais dépendant à des tas de produits. Ma vie se limiterait à
mes actes de consommateur. Je ne voulais pas mais ils finiraient par
m’avoir.
Les hôtesses de cet Hôpital public m’ont soigné et j’ai dormi plus
de quinze heures d’affilée.
Personne ne veut me croire !
267
Dee Dee Diésélos version Rastacoolos
Mon « papa » à moi, je ne dis pas mon maître, parce que ce type
ne maîtrise rien du tout à ce qui lui arrive, il se contente
d’improviser, et n’est pas maître de quoi que ce soit, donc mon
« papounet » est furax après moi. Il trouve que mon côté
« nonchalant, blessé de la vie, je fais attention à ne pas défriser ma
permanente, je change trois fois par jour de pelage parce que je
transpire beaucoup, et je vais faire mes griffes chez l’esthéticienne »,
nuit à ma crédibilité de donneur de leçons.
Il me dit, c’est bien d’être cool, c’est normal que tu joues, tu n’as
que cinq ans après tout, mais ne me prends pas pour un con en
faisant le chat torturé qui a besoin de faire la fête tous les jours pour
aller bien. Que tu préfères le jazz au rock brut est une chose que je
peux comprendre, mais ne fais pas le bobo, le chat gâté, pas avec
moi !
Je ne te rendrais pas service en te donnant l’illusion que tu pourras
jouer toute ta vie et que tu pourras compter sur moi pour les
croquettes. D’ailleurs si tu étais vraiment un chat anarchiste, tu ne te
contenterais pas d’en avoir le « total look rebelle et classe popu » tu
te tatouerais - car c’est une évidence, seuls les vrais chats qui ont de
la personnalité se tatouent - tu te tatouerais « Ni Dieu, ni nid
268
douillet, ni maître, ni croquettes ! »
Le père de mon papa, s’est battu pour cela, dans le vide, contre les
vents dominants, pendant toute sa vie. Il s’en foutait de ce que les
gens pensaient et il était assez exubérant tout en sachant que les gens
riaient sous cape quand il le croisait. Par contre, ce qui l’ a affecté,
c’est de savoir que personne ne voulait le croire lorsqu’il disait qu’il
souffrait le martyr. Les médecins, son fils, tout le monde lui disait
que c’était dans la tête que çà se passait. Il alertait, il disait qu’il avait
mal au bide, que ce n’était pas du cinéma, qu’il avait des vertiges et
qu’il avait toujours peur de tomber, mais personne ne voulait le
prendre au sérieux. Il racontait tellement d’inventions que même
lorsqu’il disait vrai, les gens ne le croyaient pas. On disait, qu’il
buvait, qu’il était trop comédien et pourtant c’est bien en glissant
qu’il a dévissé !
269
Tu me dis que nous ne sommes plus dans les années 70 et que
nous, les jeunes vieux, on s’est fait bien mettre. Que puis-je
t’opposer ? Tu as raison. Dans les années 70, on se battait pour des
idées, on était politisés, plus politisés que polis, si tu vois ce que je
veux dire, et toi on t’a policé, on t’a chérit, on t’a offert tout ce qu’un
jeune blanc-bec de l’occident pouvait rêver. On t’a laissé nous faire
tes petits crachats d’amour, on t’a équipé de tous les moyens
techniques pour communiquer et jouer à « l’autiste » qui aura
toujours de quoi de quoi manger à table. Si tous les chats de ton age
du monde entier pompaient en énergie ce que tu nous coûtes, il nous
en faudrait des centrales en plus, mais de cela, tu ne te rends même
pas compte !
Tu ne fais pas ton tri, t’es bien trop classe pour te préoccuper de
ce genre de basses besognes car être cool, c’est un emploi à plein
temps après tout !
270
Mon pauvre ami, je te plains !
271
que je sache.
272
Le coloque avec un seul L
273
invention de notre part. On communique peu par la parole en
définitive. Ce n’est pas la parole qui manque aux animaux, c’est leur
libre consentement et leur droit à l’expression.
274
j’ai le droit de la soumettre, de l’enfermer, de la faire se reproduire,
de disposer de ses petits, de l’abandonner, de la vendre. Pourtant,
nous nous aimons. Car, comme nous le dit Donna Haraway, le Lupus
canis et l’Homo sapiens se sont construits, mutuellement, tout au
long de ces dernières 9 000 années, comme des «espèces
compagnes». Le chien est l’animal qui franchit le seuil de la maison
de l’homme non pour être mangé, mais pour manger avec nous. Il fut
un temps où nous étions les proies du loup et nous l’avons
transformé, nous nous sommes transformés, avec le prédateur,
en proies-compagnons. Nous sommes devenus humains au fur et à
mesure qu’ils sont devenus chiens. Comment cela a-t-il pu se
produire ? Il s’agit sans doute d’un des processus politiques le plus
extraordinaire et le plus singulier qu’il nous soit donné à
comprendre. Philomène et moi, nous nous aimons dans la brèche
nécropolitique. L’amour canin, dit Haraway, «est une aberration
historique et un héritage nature culture». Peut-être s’agit-il de
l’unique preuve de ce qu’un projet démocratique planétaire est
possible. Que le féminisme, que la décolonisation, que la
réconciliation à laquelle Mandela rêvait… sont possibles.
275
L’homme a pu transmettre massivement le savoir consigné par les
scribes. Il a eu la puissance technique et a pu domestiquer la nature.
L’homme a toujours eu à lutter contre la nature. Pendant des années,
ce que prélevait l’homme sur la nature et ses déchets ne posaient
aucun problème. C’est lorsque l’homme (l’homme enfin, vous, je
ne sais pas mais moi, oui ) a cru qu’il pourrait un jour avoir la
maîtrise totale sur tous les éléments qu’il s’est fourvoyé. Broyer des
petits poussins vivants dans un souci de rentabilité n’est possible
qu’en niant toute part animale en nous. Les pires bêtes féroces ne
font pas autant de saloperies que nous. Le sanglier de corse va
abimer votre pelouse mais celui qui salope le plus avec ses déchets
inertes, c’est l’homme. Le chat joue avec la souris, la fait souffrir, se
bat mais le chat ne torture pas de manière aussi sophistiquée que
nous en sommes capables.
276
Photo présentant un singe tenu en captivité et maltraité pour des
besoins scientifiques en 1981. et photo représentant les dégâts
provoqués par les plastiques que nous jetons enfin vous je ne sais
pas, mais moi, oui )
277
/Cruaute_envers_les_animaux
Il n’a pas cru les scientifiques donneurs d’alerte lorsqu’ils ont dit
qu’on ne maîtrisait plus notre développement et alors même que les
premières catastrophes écologiques sont apparues (marée noire,
accident nucléaire etc..) il y en a qui n’ont toujours pas cru.
Nous sommes dans le déni. D’autres ont dit qu’il fallait encore
plus de prouesses technologiques pour arriver à trouver une parade
contre les dérèglements du climat, cela revient au même
raisonnement qui consiste à installer des climatiseurs pour lutter
contre les effets du réchauffement climatique.
278
aient envie de redécouvrir les techniques agricoles équilibrées
(agroforesterie, bois raméal fragmenté, sylvopastoralisme,
maraichage biologique etc..) ? Nous nous sommes séparés de la
nature, nous exploitons les animaux comme nous ferions avec
n’importe quel sous produit industriel, sans état d’âmes. Nous allons
tous nous retrouver des des fosses communes et des abattoirs sans
fenêtres si nous continuons à nier la réalité du monde "Tricatel" que
les hypermarché ont contribué à organiser.
279
Et comme il conserve ces connaissances, il peut aussi les
augmenterfacilement ; de sorte que les hommes sont aujourd’hui eu
quelque sorte dans le même état où se trouvaient ces anciens
philosophes, s’ils pouvaient avoir vieilli jusqu’à présent, en ajoutant
aux connaissances qu’ils avaient celles que leurs études auraient pu
leur acquérir à la faveur de tant de siècles". Blaise Pascal Traité du
vide
Les décérébrés
280
par les créatifs de tout poil, mais le mouvement, le guide-file installé
par les faiseurs d’opinions et les agitateurs du vide.
La mode évoluait, la mode était cyclique, la mode était parfois
belle. La mode devait tenir compte de la diversité des gens, il fallait
que chacun puisse y trouver son compte. Il y avait donc non pas une
mode, mais des modes…
281
des semi-remorques de ce genre de clichés résistants à toute épreuve.
Les affaires médiatisées de scandales de l’agro-alimentaire, d’experts
payés par les commanditaires d’une étude qui vont à l’encontre de
tout protocole scientifique, ne suffiront pas à rendre plus critique la
plupart des gens qui aiment penser comme il faut.
Il n’y a que l’opiniâtreté des militants associatifs, toute leur
énergie, qui peut faire contre feu et de temps en temps provoquer des
bouleversements.
Tous les efforts des citoyens actifs n’ont pas empêché, au nom du
progrès, les industrieux industriels de réduire les animaux à des
objets, des biens de fabrication, de la matière première à manipuler
sans perdre de temps avec des sentiments encombrants. Pour manger
de la viande bon marché en telle quantité, personne ne peut imaginer
que les bêtes soient traitées "humainement". Les éleveurs d’antan
n’avaient peut être les égards qu’auraient aujourd’hui - en théorie -
les écologistes de salon avec leur troupeau mais la souffrance
généralisée (pour produire de la viande, du lait, de la laine, de la
fourrure…) est liée au productivisme. Enfin, si, on peut imaginer et
croire, comme nous l’encourage à le faire la publicité, que les
animaux destinés à l’abattoir mènent une vie paisible dans une jolie
prairie verte.
Les bêtes sont réduises à l’état de choses car il serait impossible
autrement de produire autant de viande et sous-produits. Nous
sommes complices d’un système de production pervers pas par
choix, mais par nécessité, au nom du rendement.
Il est moins coûteux de dépenser de l’argent pour donner une
bonne image de l’élevage industriel que d’améliorer la condition
animale. C’est tout simplement impossible à grande échelle et c’est
pour cela que le statut juridique de l’animal n’est pas près d’évoluer
si les gens continuent à vouloir bouffer de la viande à tous les repas.
282
le silence était d’or et où les pensées de Navéla n’auraient intéressées
vraiment que quelques tordus, les philosophes rois sont en prison et
celui qui dénonce la folie ordinaire passe pour un illuminé ou un
poivrot. René Dumont et son verre d’eau en 1974 était un fou.
Michel Serres et son contrat naturel était un fou. Les végétariens sont
quant à eux des sectaires car ils dénoncent la souffrance endurée par
les animaux. Nous affamons des villages entiers pour nourrir les
animaux qui finissent dans nos assiettes. Nous avons transformé
alimentation des ruminants et nous sommes donc fous !
283
Coloser
COLOSER :
Les handicapés nous font chier
284
pleinement et voyaient les choses avec entrain et positivement.
Elles étaient toujours partie prenante, positives (pas positives au
sens où une grande enseigne de la distribution l’entend, je vous
rassure). Elles participaient, s’impliquaient, donnaient tout ce qu’elle
pouvaient. J’ai détesté être animateur auprès de gosses de riches et
d’ado des cités, mais avec les personnes handicapées physiques ou
mentales, j’ai aimé mon travail.
285
Tous à biclowns !
286
mon « manière de voir « demain matin sans faute »
287
une lutte avec soi-même. Je ne vais vous parler de pulsions ni de
zones d’ombre, chacun peut savoir là où il a failli. Je ne vais ni
tendre la joue, ni vous tendre le miroir.
Je ne crois pas que ce soit notre part animale qui pose problème
mais bien au contraire, nous gagnerions à être plus naturels, plus
spontanés. Je ne dis pas que l’on passe notre vie à faire semblant car
on peut être authentique et sans armure avec ses vrais amis et ses
maitresses (de l’école de la vie). C’est parce que nous sommes
parfois subtils mais souvent ambigus que nous en restons à des
convenances et à des attaques ritualisées. Nous perdons beaucoup de
temps en boniments, en circonvolutions, en formules interminables et
vides de sens. Aller à l’essentiel, droit au but ne signifie pas manquer
de savoir-vivre.
288
Phase-Neutre
289
C’était tout simplement les théories de la transition citoyenne que
je voulais mettre en pratique. D’autres y arrivaient sans se poser
autant de questions au préalable. Ils agissaient. Certes, ce n’était pas
facile et on devait se fritter assez régulièrement aux habitudes et
rancœurs tenaces. Obéir sans réfléchir à des lois immuables était bien
plus simple. Ravaler sa rage en se payant des crises de fou rire au
pub était plus commode et plus à ma portée. Faire appel aux bonnes
volontés, au sens de responsabilités, à l’intelligence collective
demandait une énergie que je n’étais pas certain de posséder, sur la
durée. Cela faisait des mois que j’observais toutes sortes de gens
différents et tantôt les raisons d’espérer me tiraient par les cheveux,
tantôt je me faisais fauché par toutes les réflexions stupides et les
niaiseries que j’entendais.
290
Prese, que je l’avais envoyé en prison dans mon histoire et loin de
s’en offusquer elle avait trouvé cela amusant. Elle m’a demandé de
prévoir une cavale en véhicule électrique et j’ai décidé de l’envoyer
en périple avec son complice en utilisant l’ AIRPod de MDI.
291
En plein dans le mur, boum badaboum !
Chère maman,
Je t’envoie les photos à ton adresse mail car tu m’as dit que tu ne
savais pas ouvrir les pièces jointes via Face book. J’y vais de moins
en moins sur ce réseau intrusif et voleur de temps. De toute façon,
292
j’ai trop à faire.
Les travaux dans mon appartement avancent bien. J’ai implanté
deux prises dans la future chambre et dès que le plombier aura le
temps de passer (il me dit qu’il doit attendre que l’électricien soit
passé et l’électricien me dit qu’il doit attendre que le plombier ait
fini, c’est toujours la même histoire).
Le menuisier antillais qui doit me faire le plancher m’a dit qu’il
suivait un stage de « redynamisation active et de gestion du stress »
et qu’il viendrait dès qu’il pourrait mais pas en avril car il ne
supporte pas la pluie. Il m’a dit qu’il n’irait pas manifester le
premier mai car il était artisan mais qu’il n’aurait pas bosser pour
autant car il voulait gagner mieux qu’un salarié mais en ayant les
mêmes droits au repos.
On va finir par y arriver, c’est ce qui compte !
Dee Dee est très heureux avec ses nouveaux amis. Ils se
293
chamaillent un peu de temps en temps, mais il le fait par jeu, je
suppose.
294
de trouver un parcours cohérent entre mes préoccupations
philosophiques, de santé, écologiques, et que ces trois raisons me
conduisent à bouder tes plats à base carnée. Cela ne remet pas en
cause tes talents de cuisinière, c’est juste que pour avancer dans la
vie, il faut parfois changer certaines habitudes.
Il est dans l’ordre naturel des choses qu’un écrivain, non rémunéré,
se paye de mots.
Stéphane Périé
Monsieur HULOT,
295
hébergé quelques temps par des amies, j’erre actuellement de squat
en squat et j’ai dû placer mon chat en famille d’accueil.
296
invité mes amis pour leur faire partager le bonheur d’être ensemble
par temps de crise et de crispations. Pour me renflouer, j’ai joué aux
courses, aiguillé par des turfistes chevronnés. J’ai misé l’exact
montant de mes recettes quotidiennes, soit des sommes oscillant
entre 40 et 320 euros. J’ai gagné et je suis allé m’installer dans une
résidence hôtelière et j’ai acheté une Alfa Roméo. J’ai cessé de
fréquenter mes amis joyeux drilles de la transition écologique pour
ne fréquenter que des bourges qui ne parlaient que de leur cave à vin
et de leurs placement. J’ai voulu faire l’artiste sponsorisé, le gigolo
des mamies branchées qui m’ont offert des montres en or que je me
suis empressé de revendre au plus offrant. J’ai ensuite placé toutes
mes mises sur une seul cheval, en rachetant les murs d’une ancienne
boulangerie à deux pas de mon bazar – kiosque à journaux pour la
transformer en "cave à picrate, librairie, salon de thé". C’est là que
je suis devenu dépendant des éclairs à café et que mes soucis de
santé ont commencé.
Les gens sont venus au début, par curiosité et parce que j’avais
embauché une magnifique vendeuse, Noella. La concurrence de
l’enseigne Monoprout a eu raison de mon flair commercial et en
proposant des produits de moins bonne qualité mais moins chers et
du « faux » bio, c’est à dire du bio importé par avion, du bio de
façade, du « greenwashing ». Je n’ai jamais voulu gagner plus
d’argent en réduisant mes coûts mais au lieu d’en faire un argument
de vente, je ne voulais pas prendre le temps d’en parler, expliquer
que mes produits venaient de circuits courts et de filières contrôlées,
que je ne leur vendais pas de la merde. Ce manque de
reconnaissance de la part de mes clients m’a blessé.
297
J’ai du rendre les clefs de mon commerce et j’ai fermé le kiosque.
La suite de la dégringolade, vous l’avez lu dans les journaux que je
ne vends plus …
</><>
298
Recto-verso, un petit dernier chapitre pour la
route !
J’ai un peu les nerfs en pelote en ce moment. C’est sans doute lié
au manque de sommeil, à l’alcool, aux tracas du quotidien.
299
rien dans la vie réelle, mais lorsque j’écrivais, j’avais tous les droits.
Sans elle, en quelques semaines, vous serez (je dis vous car nous
sommes tous capables de basculer) sur un banc public, mais pas avec
une amoureuse.
Au début, vous trouverez cette idée romantique et vous en
300
profiterez pour faire un chapitre sur les mécanismes de l’exclusion
mais une fois que votre portable sera déchargé et qu’il n’ y aura pas
un sympathique kiosquier pour vous recharger la batterie, vous
cesserez d’écrire pour ne faire rien d’autre que boire de la bière avant
de disparaître de la circulation.
Parce que votre père vous parle dans vos rêves, vous n’allez pas
régler vos problèmes avec une arme bruyante, ni en vous enivrant.
Vous allez patiemment, stratégiquement, déjouer, un à un, les pièges
des braconniers de l’espoir.
301
Les gens changent très vite d’opinions. Ceux qui vous trouvaient
sympathique et gentil hier peuvent vous trouver arrogant et agressif
demain. Il ne faut pas perdre de vue qu’il ne suffit pas d’avoir raison,
il faut que l’on vous croie !
Ce n’est pas la Raison qui domine le monde mais les passions !
(Guy V.M)
Les gens n’ont pas besoin de connaître vos petits malheurs. Il faut
être drôle et mieux vaut s’intéresser aux problèmes existentiels de
Charlène ou de Charlotte.
Vous avez des problèmes urgents à régler mais il faut faire bonne
figure et écouter patiemment vos clients vous raconter dans les
moindres détails leurs problèmes de décoration intérieure ou de
plomberie.
302
êtes fourvoyé. Vous n’aimez pas aller vite. Vous ne croyez pas que
l’humain progresse en se dépêchant.
Mon père m’a montré la voie, je lui dois bien çà, pour tout ce que
je n’ai pas pu faire pour lui lorsqu’il était encore temps et je dois
remonter la cote sans faillir, sans faiblir et ne jamais renoncer à mes
rêves, pour honorer sa mémoire.
303
Cet appel a été lancé lors d’une période insurrectionnelle de
l’histoire de Paris appelée la Commune de Paris. La Commune de
Paris dura deux mois, du 18 mars au 28 mai 1871 (pour s’achever
par la Semaine sanglante du 21 au 28 mai). Cette insurrection contre
le gouvernement investi par l’Assemblée nationale, qui venait d’être
élue au suffrage universel masculin, ébaucha pour la ville une
organisation proche de l’autogestion. Elle fut, au départ,
principalement une réaction à la défaite française lors de la Guerre
franco-allemande de 1870.
304
la compassion des passants. L’enfant dormait tout le temps. Il ne
jouait jamais. Il subirait toutes sa vie les conséquences d’une urgence
sociale laissée sur le carreau. Le monde moderne tolérait ce genre de
scènes de la misère ordinaire.
Mes potes keupons me gonflaient : Ils ne voulaient rien faire en
attendant la mort. Ils n’étaient que la caricature de ceux que faisaient
silencieusement les gens qui rêvaient « plus-value ».
Moi je voulais "vivre libre ou mourir" alors j’ai levé le doigt pour
demander la permission aux lecteurs de migrer dans le chapitre
suivant, vu que j’étais en froid avec l’auteur.
</><>
J’ai eu la chance d’assister à une deuxième conférence de ciné-
philo d’Olivier POURRIOL J’aimais bien les intellos de ce genre. Il
était clair, intéressant et sortait de sa boite hermétique pour s’adresser
à tous. Il était bon de temps en temps de sortir de sa condition de
305
marchand de patates pour laisser les idées gambader. La culture me
faisait encore plus de bien qu’une pinte de bière (un véritable mini
chevalier distingué)
Je faisais partie d’un réseau qui osait remettre à leur juste place les
personnes et les institutions qui résistaient pour que rien ne change et
que cela ne dérangeait pas que l’on aille de catastrophes écologiques
et émeutes sociales, tant qu’ils pouvaient profiter à moindre coût de
la sueur et du temps des salariés ou auto-entrepreneurs isolés.
306
plus être le dindon de la farce.
307
Je baisse les rideaux
308
paiement en différé pour la plupart des titres. On vous vend même la
bonne affaire en vous disant que pendant les cinq premières semaines
vous allez pouvoir constituer votre trésorerie. Ce que l’on oublie de
vous préciser, c’est que le montant de vos commissions indiqué sur
les relevés hebdomadaires est virtuel. Les premiers mois, vous
financez votre stock !
Quoi de plus logique pour un commerçant de devoir consentir à
des efforts et de se donner le temps de constituer sa clientèle ? La
question qui est restée des mois en suspens a été : Est-ce qu’un jour
je vais voir le retour de mes efforts et pouvoir tirer un revenu, même
modeste, de cette activité ?
Vous commencez à recevoir toutes les semaines des échéances
qui dépassent largement le produit de vos ventes. Vous recevez des
nouveaux magazines – et vous n’êtes pas là pour dire s’ils vous
plaisent ou pas, tout ce qui compte, c’est d’avoir une offre variée
pour répondre à tous les goûts – et comme vous n’avez pas de
retours, de journaux invendus à déduire de vos factures, vous ne
savez plus comment vous allez payer vos échéances car vos factures
dépassent le montant de vos recettes.
Trois mois après l’ouverture, j’étais déjà dans la merde !
309
Vous vous battez pour la liberté de la presse, sauf que c’est à vous
de demander au Marquis de vous livrer deux numéros de « la
Décroissance » car vous tenez à avoir ce titre en kiosque, pas
seulement ceux que le Marquis tient à tout prix à vous fourguer , au
nom de la liberté de la presse et de celle du commerce, les "oups,
voici, closer et compagnie".
Nous étions dans deux mondes parallèles. Ces deux mondes ne
pouvaient pas se rencontrer,du moins, en théorie. Ils allaient finir par
entrer en collision.
Sur la durée de mon exercice, dix mois, j’ai gagné quatre cent
trente cinq euros par mois au titre des journaux vendus pour le
Marquis. Avec mes commissions de Nice morning, cela faisait moins
de sept cent quatre vingt euros par mois. Et encore, il s’agit d’un
montant brut !
J’ai payé le RSI sur la base de ces commissions calculées par le
Marquis, j’ai payé chaque mois l’assurance pour le kiosque, les frais
de tenue de compte professionnel et la redevance (minime) versée à
la Mairie.
En distribuant de la presse gratuite, j’aurais mieux gagné ma vie !
N’importe qui d’un peu plus attentif aux chiffres n’aurait pas
attendu si longtemps avant de plier bagage et essayer ses récupérer
ses billes. J’ai tout perdu dans cette histoire.
J’y croyais pourtant.
J’espérais vendre mes livres pour compléter mes revenus, j’en ai
vendu deux.
J’espérais qu’un événement politique incite les braves citoyens à
redécouvrir l’intérêt de la presse écrite mais même les militants que
je connaissais - qui continuaient à vouloir changer le monde en
distribuant des tracts - s’informaient avec leur smartphone ou sur
internet.
J’étais un "has been" qui aimait les journaux papier.
310
regagner leurs pénates, comme après un bal du 14 juillet ou un match
de coupe du monde.
Depuis 1995, j’attendais un mai 68, une chiquenaude
révolutionnaire mais il ne se passait jamais rien d’autre que des feux
de broussaille.
Le kiosque aurait pu marcher si j’avais pu avoir suffisamment de
revenus complémentaires, si j’avais trouvé des produits autres à
vendre (du hors presse à forte marge) ou si la mairie avait utilisé une
partie des ressources publicitaires générées pour les emplacements
pour un fonds de maintien ou d’aide à l’installation des kiosquiers
« mal barrés » et si ma tante avait eu deux roues…
La marge est faible. Quand vous vendez vingt Télé Z à quarante
centimes l’unité, votre marge ne va pas vous permettre de faire
bouillir la marmite, alors comment font les autres ? Les autres
vendent plus et vendent des produits complémentaires. Les autres,
comme la boite à copies ( qui est à quelques mètres du kiosque de
Valrose qui vient de fermer au bout de trois mois), arrivent à salarier
trois personnes en vendant des photocopies à cinq centimes Ils
vendent aussi des prestations d’imprimerie, des fournitures en
papèterie. Ils y arrivent !
Vous vous êtes comme un épicier en zone rurale désertifiée. Tout
le monde serait ravi de vous voir ouvrir votre commerce et serait prêt
à vous aider mais il y aurait un fournisseur, un seul, celui là même
qui fournissait les grandes surfaces, qui ne jouerait pas le jeu.
Je n’avais pas la trésorerie suffisante pour tenir le coup, payer à
comptant ma marchandise, et investir dans des produits annexes. Je
ne pouvais pas solliciter des organismes de micro-crédit, ni la
coopérative de finances solidaires la NEF car il fallait pouvoir être en
mesure de pouvoir rembourser et la dimension « culturelle et
socialement utile » d’un kiosque à journaux supposait une offre des
éditeurs plus à la hauteur.
311
pas un métier d’avenir ! L’avenir, c’était de vendre des abris
atomiques, des kits de survie et des gilets pare-balles ! J’étais dans
ma période de l’année où les idées moroses occupent le plus de
place. Je n’étais plus dans la peau de l’écrivain qui vivait dans le jour
d’après, j’étais un pauvre clampin en quête de reconnaissance.
Il fallait que l’utilité sociale d’un kiosquier de quartier soit
reconnue et que sa présence, son maintien, soit encouragée par le
développement de produits et de prestations annexes (relais colis
livres, vente de tickets, informations sorties, loisirs, référendums
locaux, enquêtes publiques, modération de sites internet pour le
compte de la ville ou d’institutions culturelles etc…)
Il fallait que les repreneurs de kiosques qui avaient un
emplacement à faible rendement soient aidés par l’obtention d’un
prêt à taux zéro pour le démarrage, une formation prise en charge
pour y voir clair dans le système alambiqué de facturation du
Marquis, une dotation de fonctionnement (comme pour celui qui
tient les toilettes publiques) ou des services délégués moyennant une
rémunération. Le kiosquier ne devait pas s’envisager uniquement
comme un commerçant de proximité indépendant mais aussi comme
un partenaire de la vie locale.
312
production - gagnaient très bien leur vie.
Bien que de gauche, je ne comprenais pas trop pourquoi ces
salariés CGT du livre, plutôt privilégiés comparés à ceux qui bossent
dans le Bâtiment s’inscrivaient dans une logique de surenchère
revendicative. Écologiste de salon, je savais que le « toujours plus »
nous ferait boire un jour le bouillon. Je croyais encore en l’économie
de marché, en un capitalisme humain. Après des décennies de crises
(économique, crise des valeurs, crise écologique, crise financière …)
et un spectaculaire, quoique insidieux, revirement de l’histoire des
conquêtes sociales et de la qualité de la vie depuis les années 8O, je
suis prêt désormais à me battre pour que les valeurs de l’économie
mutualiste, coopérative, l’emportent face un système qui est en train
de tuer à petits feux et à coup de licenciements collectifs
« boursiers » ce qui fait ciment dans nos sociétés.
La presse est également en crise. Je le savais en reprenant un
kiosque à journaux qui venait de fermer, celui du Square Boyer, à
Nice nord. Il avait fermé en mai, je l’ai ré-ouvert le 17 juillet. Je ne
faisais pas d’illusion quant à la possibilité d’en faire une affaire
rentable. Mis à part un écrivain, quel actif serait assez fou pour
reprendre une activité si peu rentable ? En discutant avec un des
vendeurs « mobiles » de Nice Matin, un de ceux que vous voyez avec
leur parasol rouge et leur voiture, ceux qui font parfois aussi le
portage à domicile, donc certainement pas le genre de personnes à
se gaver sur le dos de la presse, je me suis aperçu que même un
salarié qui intervient aux derniers maillons de la chaine de
production d’un journal - qui n’a aucun intérêt à vendre plus de
journaux car il n’a pas d’objectif de résultat - s’en sortait mieux que
moi qui suis travailleur indépendant et qui suis payé en fonction de
ce que je vends, à la commission. Je suis fait pour être travailleur
indépendant.
Je préfère "m’exploiter moi même" en ne pouvant pas partir en
congé ni mettre de l’argent de coté mais en m’organisant comme je
l’entends, mais la coupe est pleine !
Un salarié ou un vacataire est payé au forfait et gagne, au bas
mot, trois fois plus que je gagne alors que je vends plus de
journaux ! Je cotise au RSI et mes impôts sont prélevés à la source.
313
Mon intérêt est aligné sur celui de mon fournisseur. Je dois vendre
ou fermer.
Les kiosquiers ferment. Je ne parle pas de ceux qui ont les
emplacements les plus prisés, je parle de ceux comme moi qui
trouvaient que faire partie de la longue succession des personnes qui
ont donné vie à ce kiosque installé dans ce quartier depuis la nuit
des temps avait du panache.
J’ai fait un projet pour que ce kiosque perdure mais je suis resté à
deux doigts d’aller au bout de mon rêve car je ne suis pas parvenu à
faire changer la réalité en écrivant toutes sortes de sornettes. J’ai
manqué d’audace, je vous le confesse et je vous tire ma révérence.
(Fin du premier acte.)
314
privées et faire confiance aux chefs d’entreprise et leur laisser plus de
libertés Il fallait stigmatiser les fraudeurs du revenu minimum et
laisser tranquille les fraudeurs qui se pouvaient se payer des
conseillers fiscaux.
J’étais persuadé d’avoir raison, de voir juste, d’être du côté des
démocrates visionnaires. Mon parti ne pesait pas lourd dans les
suffrages. Je ne voulais pas perdre du temps à militer. Mettez vous
deux minutes à ma place :
La manière de conquérir le pouvoir, de convaincre vous emmerde.
Vous détestez distribuer des tracts et coller des autocollants. Si les
gens ne lisent plus à quoi cela sert ? Vous détestez les campagnes
électorales. Vous en avez marre des rassemblements à vingt
personnes avec leur bonnets et leurs écharpes, vous en avez marre
des réunions avec toujours les mêmes tronches, vous en avez ras le
cul des appels aux dons. Je savais que la bataille à mener était
culturelle. Les gens changeraient que si les artistes s’en mêlaient
avec les bonnes méthodes d’agit-prop. Les punks sans crêtes et les
"provos" new beatnik devaient sortir de leurs tanières. C’était devenu
trop sérieux pour pouvoir se passer du burlesque.
Parler sur le marché, serrer des mains, tracter, baratiner c’était
sans doute utile mais je m’en sentais bien incapable. Je l’avais fait il
y a vingt cinq ans et je crois plus que ce soit le bon levier d’action. Il
y avait encore beaucoup de monde pour penser que le monde tournait
rond. J’étais persuadé que la plupart des gens étaient hostiles au
capitalisme moderne mais c’était uniquement parce que je prenais
mes désirs pour des réalités. La plupart de mes contemporains étaient
aptes pour la dictature. Je le pensais vraiment et c’est là bien que
réside ma faille idéologique car les valeurs auxquelles je crois font le
pari de l’intelligence collective.
315
est encore temps.
Je n’ai pas envie de vendre des canapés-lits. Je n’ai pas envie de
prendre les gens pour des abrutis.
Vous avez été formatés pour vous plier et penser qu’il n’y a
qu’une seule logique possible. Les idées gouvernance participative,
d’économie collaborative, de finances alternatives sonnent
agréablement à vos oreilles et vous aimeriez seulement que ce ne soit
pas que du vent.
C’est plus exigeant de miser sur l’humain et vous ne savez pas
encore si vous allez y arriver…
Vous n’allez pas y arrivez !
"Là où j’ai échoué , tu n’y arriveras pas !"
316
Après un petit contrat de facteur remplaçant, j’ai continué dans la
vente. Il ne s’agit plus de vendre des journaux mais des emballages.
Du carton, de la mousse, du film plastique, des barquettes, du
scotch et autres babioles très utiles pour le transport des
marchandises dans le monde entier.
En tant que kiosquier, j’avais cherché à limiter la casse du point de
vue des sacs plastiques. Je n’avais rien fait concrètement par manque
de moyens ou d’audace, mais j’avais exploré les possibilités de faire
autrement un des ces jours…
J’avais décidé de le faire, je cherchais les moyens. C"était juste
une question de temps !
A présent, si je veux garder mon boulot, j’ai intérêt à nier en bloc
tous les problèmes liés aux déchets. Je suis tenu de faire comme si
ces choses là me dépassaient, ne me regardaient pas.
Ce qui compte c’est de rendre la vie plus facile, plus pratique, et
tant pis pour le reste ! Il faut vendre, vendre tout ce qui peut
améliorer le quotidien des clients.
Naturellement, nous avons aussi des produits recyclés, pour la
vitrine, pour faire comme si l’environnement faisait partie de nos
préoccupations immédiates et permanentes. Nous faisons comme tout
le monde.
Si on regarde les choses positivement, on peut dire que l’on
contribue à la lutte contre le gaspillage en proposant le regarnissage
de galets pour transpalettes, ce que l’on sous traite à un fournisseur
en caoutchouc des Alpes Maritimes, à la pointe du progrès. Ce
fournisseur fait du caoutchouc à adjonction de pissenlit et fait des
joints de frigo de rénovation histoire de lutter contre l’obsolescence
programmée…
Moi, je pense que chez nous, on pourrait proposer des sacs
plastiques en amidon réellement bio dégradables mais, que voulez-
vous, je ne dis rien, je ne suis pas en position de proposer quoi que
ce soit de différent. Je suis bien content d’avoir trouver un boulot ! Je
vois le bout du tunnel, je vais pouvoir m’acheter une moto.
317
de performance. Les gens doivent pouvoir expédier au moment où ils
veulent tout ce dont ils rêvent. Ce "rêve" là est bien réel ! Il est
possible d’envoyer de fruits exotiques à des pays du nord et
d’envoyer des pièces par petits bouts dans plein d’usines disséminés
ci et là car le coût du transport n’est pas un obstacle économique
mais un facteur de richesse. Qui aurait pu prévoir cela ? L’écolo à
bicyclette ne fera rien face au camion diesel !
Je ne voulais plus avoir de bagnole ou de moto. J’avais été obligé
d’y renoncer pour honorer une échéance et j’en étais heureux car cela
m’avait permis de me passer d’un bien que j’estimais auparavant
indispensable alors qu’il ne l’était pas. Il ne l’était pas pour
quelqu’un qui peut se taper vingt kilomètres à vélo après une journée
d’un boulot où l’on utilise plus ses jambes que sa tête, mais il l’était,
en définitive, pour moi, alors mon oncle m’a offert sa vieille moto
custom et j’étais content de bosser et de pouvoir mettre de l’essence
dans mon véhicule à moteur. J’étais content de pouvoir faire de
nouveau comme tout le monde. Je n’avais pas la vie dont je rêvais
mais j’avais un bulletin de salaire.
Le soir, en rentrant, j’étais vanné. Je n’avais plus envie de faire la
révolution. Je voulais juste me détendre, m’avachir devant le poste
télé. Je n’avais plus l’énergie pour lire le journal. Je me disais
qu’après un temps d’adaptation, je serais moins fatigué.
Je voulais mettre des thunes de côté pour m’acheter une moto plus
récente, plus jolie. Le week-end, les fins de semaines, j’avais envie
de me vider la tête en me pochetronnant. J’étais très loin de la vie
dont je rêvais.
J’étais un lâche. j’aurais pu bosser dans l’éco soliaire, dans un truc
en cohérence avec mes idées, seulement, j’avais choisi la sécurité
matérielle.
Tranquillos, peinardos…
i
J’étais en plein dans le cinéma grand public : "Eclate toi, trime,
rigole, profite ! "
Rien ne m’empêchait de continuer, dans les chapitres à venir, à
vendre des journaux. Des journaux et des banderoles.
Personne ne m’empêchera d’aimer et de rêver.
318
319
Mao sait tout sur mes tongs
320
donnait du grain à moudre pour ne pas m’engager réellement.
Méditer au lieu de militer…
321
serais pas "trop" complice d’un système vicieux. Un boulot où mon
age ne serait pas un obstacle et je ne trouvais pas. Le seul boulot que
je pouvais faire était celui d’un travailleur indépendant. Je ne
pouvais rien faire d’autre que d’écrire des sornettes et vendre mes
journaux. Il fallait que je puisse survivre ainsi et pour cela il fallait
trouver des lecteurs et des lectrices. Il le fallait, je l’espérais, je
l’écrivais mais cela ne suffisait pas.
Le réveil des gens qui s’étaient volontairement placés sous
anesthésie n’a pas eu lieu. Les gens ne sont pas levés d’un seul bloc
pour redécouvrir l’intérêt de la presse écrite. Le payeur de mots que
je suis a été décontenancé par l’attitude méprisante des faiseurs de
phrases.
Vous nous pouvez pas que prendre des bûches dans la gueule ! Il
faut alimenter votre poêle autrement, pour vous réchauffer le coeur,
alors vous cherchez du côté des bonnes nouvelles. Pas pour vous
évader, pas pour oublier, juste pour pouvoir continuer. Vous vous
réjouissez que des membres d’ATAC, de Bizi et des Amis de la Terre
aient réussi, par une pression insistante, à faire renoncer la société
Générale à un projet climaticide (Politis n° 1342)
322
être définitivement abandonné par ses promoteurs australiens et
indiens.
Depuis plusieurs mois, les Amis de la Terre, Attac et Bizi !
menaient des actions communes pour que la Société Générale
renonce à sa mission de conseil et au financement de ce projet de
mine à ciel ouvert dans le bassin de Galilée en Australie. Prévoyant
une voie ferrée et une expansion portuaire en plein cœur de la
Grande Barrière de corail, ce projet serait à la fois une bombe
climatique dont le développement serait à l’origine de l’émission de
1,8 milliards de tonnes de CO2 compromettant de façon irréversible
les efforts pour limiter le réchauffement de la planète ; mais aussi
une catastrophe pour les populations locales, la biodiversité et les
milieux.
Suite à une action d’occupation des agences de la Société
Générale lundi dernier, à Pau et à Paris, jour de l’ouverture du
sommet mondial sur le climat de Lima (COP20), dans le cadre de la
journée internationale de jeûne pour le climat, des actions de
« picketing » avaient été annoncées devant une dizaine d’agences de
la Société Générale dans toute la France, de Bayonne à Bourges, de
Chambéry à Concarneau, de Limoges à Mâcon en passant par,
Nîmes, Paris, Pornichet, Tours… Alors que la COP 20 se poursuit au
Pérou, les Amis de la Terre, Attac et Bizi !, démontrent que l’action
citoyenne permet d’obtenir des victoires concrètes qui sont autant de
premiers pas vers la mise sous contrôle citoyen des banques et
multinationales prédatrices, et pour relever le défi climatique !
La pression internationale contre GVK-Hancock doit encore
s’accentuer pour que ce projet climaticide ne voie jamais le jour.
Après cette première victoire, nos associations comptent
poursuivre leurs actions en 2015 en faveur du climat, notamment
contre les banques et multinationales impliquées dans le secteur du
charbon, énergie fossile qui reste la première source d’émissions
mondiales de CO2, un gaz à effet de serre responsable du
dérèglement climatique."
Source :
https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-
presse/article/sous-pression-citoyenne-la-societe
323
Vous apprenez par l’humanité (N° 21622- 304) que la biscuiterie
Jeannette a recueilli 105000 euros pour la constitution, par ses
salariés licenciés après la liquidation judiciaire et grâce à
l’occupation d’usine ayant empêché son démantèlement, d’une
société à actionnariat participatif.
Les gens ont raison de se battre et vous êtes heureux que les
choses avancent avec ou sans vous.
Seulement le pessimisme a vite fait de vous rogner jusqu’à la
moelle.
Tout n’est pas rose dans le bilan de Rafael Correa, mais au moins
le président équatorien représente-t-il une preuve bien vivante que la
324
politique du bulldozer contre les pauvres adoptée en Europe n’est
pas nécessairement la seule envisageable.
Source : http://www.acrimed.org/article4493.html
325
Je peux comprendre également que l’on déroge au principe "un
homme, une voix" quand le bonhomme en question y place ses
billes. Personnellement si j’avais du pognon, au lieu de le claquer
connement, je l’investirais, disons au hasard, dans une bouilloire
culturelle qui ferait en même temps restau-bar et j’aimerais avoir le
droit à la parole et ne pas me faire rapter mon bébé par des excités de
tous poils. Je veillerais donc à ce que l’orientation n’aille pas à
contre courant de mes idées politiques.
Pour éviter que des groupuscules aient la main mise, qu’ils soient
anti fascistes radicaux, communistes, écolos, colibristes, néfaliens ou
peu importe leurs causes, je ne leur laisserai pas la possibilité de
déroger au principe intangible de mixité sociale en plaçant au Conseil
d’administration une majorité de personnes dignes de confiance mais
je ne les exclurais pas, me reconnaissant plus proches de leurs
combats que de celui des gens indifférents à la politique qui viennent
juste bouffer dans un restau bon, bio et pas cher, un peu comme les
consommateurs d’un magasin de diététique bio soucieux de leur
bien-être.
Je me rends bien compte que la forme compte parfois autant que
le fond, ou du moins que le forme impacte sur le fond car les
questions d’organisation, de choix institutionnel ou statutaire sont
primordiales.
Les militants de la "old school " préfèrent écrire " le journal des
débats de l’assemblée nationale" tandis que les jeunes tentent
d’actionner les leviers d’action. Je ne sais pas ce que c’est la
démocratie directe ni le travail collaboratif. Le jour où je l’aurais
compris, j’aurais fait un grand pas.
Je sais par contre que l’énergie créatrice collective n’est pas une
légende même si le mode d’emploi est un peu compliqué car écrit
326
dans une langue universelle.
J’ai été formaté pour attendre que les tâches soient réparties,
hiérarchisées et qu’il y ait un chef ou une chef pour dire aux autres ce
qu’il fallait faire et comment le faire. Il est possible de changer de
comportements mais comment changer de nature ? La tendance à la
sodomie des drosophiles nuit au combat des idées et à la mise en
place d’actions concrètes. Quand chacun parlera humblement pour
faire avancer les discussions et non pour se faire mousser, nous
serons parés !
En attendant, je ne peux pas me contenter de compter les points
depuis mon siège, de compiler les raisons de lâcher le morceau,
d’abandonner le combat sous prétexte que cela ne marche pas du
premier coup et qu’il faut graisser régulièrement les roulettes !
Personne n’est parfait et il est trop facile de juger ceux qui
agissent avec constance. Je ne tiens pas sur la longueur passant
constamment d’état vaporeux à état liquide, pour finir par me figer
dans le bloc immobile des citoyens passifs.
Source :http://blogs.mediapart.fr/blog/tatiana-ventose
327
Je sais pertinemment que la clé pour comprendre l’histoire des
cinq siècles passés est l’émergence de catégories sociales
spécifiques, appelées “classes”. Laissez-moi vous raconter une
anecdote. Quand le mouvement des Indignés a commencé, sur la
place de la Puerta del Sol, des étudiants de mon département, le
département de sciences politiques de l’Université Complutense de
Madrid, des étudiants très politisés (ils avaient lu Karl Marx et
Lénine) se confrontaient pour la première fois de leur vie à des gens
normaux.
Ils étaient désespérés : “Ils ne comprennent rien ! On leur dit
qu’ils font partie de la classe ouvrière, même s’ils ne le savent pas !”
Les gens les regardaient comme s’ils venaient d’une autre planète.
Et les étudiants rentraient à la maison, dépités, se lamentant : “ils ne
comprennent rien”.
[A eux je dis], “Ne voyez-vous pas que le problème, c’est vous?
Que la politique n’a rien à voir avec le fait d’avoir raison ?” Vous
pouvez avoir la meilleure analyse du monde, comprendre les
processus politiques qui se sont déroulés depuis le seizième siècle,
savoir que le matérialisme historique est la clé de la compréhension
des mécanismes sociaux, et vous allez en faire quoi, le hurler aux
gens ? “Vous faites partie de la classe ouvrière, et vous n’êtes même
pas au courant !”
L’ennemi ne cherche rien d’autre qu’à se moquer de vous. Vous
pouvez porter un tee-shirt avec la faucille et le marteau. Vous pouvez
même porter un grand drapeau, puis rentrer chez vous avec le
drapeau, tout ça pendant que l’ennemi se rit de vous. Parce que les
gens, les travailleurs, ils préfèrent l’ennemi plutôt que vous. Ils
croient à ce qu’il dit. Ils le comprennent quand il parle. Ils ne vous
comprennent pas, vous. Et peut-être que c’est vous qui avez raison !
Vous pourrez demander à vos enfants d’écrire ça sur votre tombe :
“il a toujours eu raison – mais personne ne le sut jamais”.
En étudiant les mouvements de transformation qui ont réussi par
le passé, on se rend compte que la clé du succès est l’établissement
d’une certaine identification entre votre analyse et ce que pense la
majorité. Et c’est très dur. Cela implique de dépasser ses
328
contradictions.
Croyez-vous que j’aie un problème idéologique avec
l’organisation d’une grève spontanée de 48 ou même de 72 heures ?
Pas le moins du monde ! Le problème est que l’organisation d’une
grève n’a rien à voir avec combien vous ou moi la voulons. Cela a à
voir avec la force de l’union, et vous comme moi y sommes
insignifiants.
Vous et moi, on peut souhaiter que la terre soit un paradis pour
l’humanité. On peut souhaiter tout ce qu’on veut, et l’écrire sur des
tee-shirts. Mais la politique a à voir avec la force, pas avec nos
souhaits ni avec ce qu’on dit en assemblées générales. Dans ce pays
il n’y a que deux syndicats qui ont la possibilité d’organiser une
grève générale : le CCOO et l’UGT. Est-ce que cette idée me plaît ?
Non. Mais c’est la réalité, et organiser une grève générale, c’est dur.
J’ai tenu des piquets de grève devant des stations d’autobus à
Madrid. Les gens qui passaient là-bas, à l’aube, vous savez où ils
allaient ? Au boulot. C’étaient pas des jaunes. Mais ils se seraient
faits virer de leur travail, parce qu’à leur travail il n’y avait pas de
syndicat pour les défendre.Parce que les travailleurs qui peuvent se
défendre ont des syndicats puissants. Mais les jeunes qui travaillent
dans des centres d’appel, ou comme livreurs de pizzas, ou dans la
vente, eux ne peuvent pas se défendre.
Ils vont se faire virer le jour qui suivra la fin de la grève, et ni
vous ni moi ne serons là, et aucun syndicat ne pourra garantir qu’ils
pourront parler en tête-à-tête avec le patron et dire : “vous feriez
mieux de ne pas virer cet employé pour avoir exercé son droit de
grève, parce que vous allez le payer”. Ce genre de choses n’existe
pas, peu importe notre enthousiasme.
La politique, ça n’est pas ce que vous ou moi voudrions qu’elle
soit. Elle est ce qu’elle est, terrible. Terrible. Et c’est pourquoi nous
devons parler d’unité populaire, et faire preuve d’humilité. Parfois il
faut parler à des gens qui n’aiment pas notre façon de parler, chez
qui les concepts qu’on utilise d’habitude ne résonnent pas. Qu’est-ce
que cela nous apprend ? Que nous nous faisons avoir depuis des
années. Le fait qu’on perde, à chaque fois, implique une seule
chose : que le “sens commun” des gens est différent de ce que nous
329
pensons être juste. Mais ça n’est pas nouveau. Les révolutionnaires
l’ont toujours su. La clé est de réussir à faire aller le “sens
commun” vers le changement.
César Rendueles, un mec très intelligent, dit que la plupart des
gens sont contre le capitalisme, mais ne le savent pas. La plupart des
gens sont féministes et n’ont pas lu Judith Butler ni Simone de
Beauvoir. Il y a plus de potentiel de transformation sociale chez un
papa qui fait la vaisselle ou qui joue avec sa fille, ou chez un grand-
père qui explique à son petit-fils qu’il faut partager les jouets, que
dans tous les drapeaux rouges que vous pouvez apporter à une
manif. Et si nous ne parvenons pas à comprendre que toutes ces
choses peuvent servir de trait d’union, l’ennemi continuera à se
moquer de nous.
C’est comme ça que l’ennemi nous veut : petits, parlant une
langue que personne ne comprend, minoritaires, cachés derrière nos
symboles habituels. Ca lui fait plaisir, à l’ennemi, car il sait qu’aussi
longtemps que nous ressemblerons à cela, nous ne représenterons
aucun danger.
Nous pouvons avoir un discours très radical, dire que nous
voulons faire une grève générale spontanée, parler de prendre les
armes, brandir des symboles, tenir haut des portraits de grands
révolutionnaires à nos manifestations – ça fait plaisir à l’ennemi ! Il
se moque de nous ! Mais quand on commence à rassembler des
centaines, des milliers de personnes, quand on commence à
convaincre la majorité, même ceux qui ont voté pour l’ennemi avant,
c’est là qu’ils commencent à avoir peur. Et c’est ça qu’on appelle la
politique. C’est ce que nous devons apprendre.
Il y avait un gars qui parlait de Soviets en 1905. Il y avait ce
chauve, là. Un génie. Il comprit l’analyse concrète de la situation.
En temps de guerre, en 1917, en Russie, quand le régime s’effondra,
il dit une chose très simple aux Russes, qu’ils soient soldats, paysans
ou travailleurs. Il leur dit “pain et paix”.
Et quand il dit ces mots, “pain et paix”, qui était ce que tout le
monde voulait (la fin de la guerre et de quoi manger), de nombreux
Russes qui ne savaient plus s’ils étaient “de gauche” ou “de droite”,
mais qui savaient qu’ils avaient faim, dirent : “le chauve a raison”.
330
Et le chauve fit très bien. Il ne parla pas au peuple de “matérialisme
dialectique”, il leur parla de “pain et de paix”. Voilà l’une des
principales leçons du XXème siècle.
Il est ridicule de vouloir transformer la société en imitant
l’histoire, en imitant des symboles. Les expériences d’autres pays, les
événements qui appartiennent à l’histoire ne se répètent pas. La clé
c’est d’analyser les processus, de tirer les leçons de l’histoire. Et de
comprendre qu’à chaque moment de l’histoire, si le “pain et paix”
que l’on prononce n’est pas connecté avec les sentiments et les
pensées des gens, on ne fera que répéter, comme une farce, une
tragique victoire du passé.
V.R.P de l’indignation
Que doit faire un bon vendeur ? Aller vers le client et avec des
mots et des techniques de communication emporter son adhésion, le
faire fléchir, l’aider à se décider, voir le bousculer un peu. Il le fait
pour toucher son pourcentage, pour son intérêt et celui de son
employeur.
Que cherche à faire le militant d’un parti ou d’une association qui
veut l’ordre des choses change ? Convaincre, persuader, faire
réfléchir, entrainer l’adhésion.
331
grâce aux nouvelles technologies. Moi je me suis toujours méfié des
gens qui promettaient de bien s’occuper de moi, de me simplifier la
vie, d’alléger ma charge, surtout lorsque je ne les connais pas.
332
leur consommation. Pour autant, j’entrouvre la porte à la vie de
minable qui m’attend si je n’arrive pas à réagir à temps.
Il est facile de se laisser aller. Il n’y a nul besoin d’aller sur un
banc public pour dégringoler. On rentre chez soi le soir, sans énergie,
vide et on s’avachit devant une télé. On ne sait pas où l’on sera dans
une semaine. On sait que l’on ne doit pas s’écouter, se forcer à aller
mieux mais on ne contrôle plus grand chose, et en tous les cas, pas
ses émotions.
Quand on perd quelqu’un, on peut finir par se résigner en accusant
la fatalité. Quand on se fait plaquer, on peut finir par se consoler en
se disant que l’on ne peut forcer personne à vous aimer, mais là ce
qui m’intéresse, présentement, c’est de laisser faire ma bonne étoile
mais en lui donnant des gages de bonne volonté. Après tout, je n’ai
que perdu un logement et une boutique. Peut-être qu’au moment où
j’ai peu de répit, je me mets en danger pour risquer de tout perdre
afin d’avoir des matériaux pour bâtir une véritable histoire non
conventionnelle. Qui sait ?
Il est bien plus facile de descendre des pintes que d’écrire. Lever
le coude au lieu de se bouger les miches. C’est une fois de plus, Dan
FANTE, qui m’a aidé à m’y remettre. C’est un écrivain talentueux,
un mec qui prétend être un looser tout simplement parce que gagner
du pognon facilement en entubant les gens lui était devenu
insupportable. Alors il s’est trouvé des boulots d’appoint.
Je me force à me lever pour aller bosser mais je suis en mode
automatique et dans un rôle bien convenu. Je ne suis plus dans la
peau d’un écrivain que par intermittence. En attendant que la forme
revienne, je fais ce que j’ai à faire, sans réelles convictions.
333
faut que j’apprenne à mieux m’organiser, que je gagne du temps, que
je sois plus performant. Lorsque je maîtriserai mon secteur en
apprenant par cœur des listes de noms (les réexpéditions et la
cartographie des boites aux lettres), on me signifiera, la veille, la fin
de mon contrat.
Je dois donc anticiper pour trouver un autre emploi de cet acabit.
Il faut bosser vite, on a plus le temps de flâner. Elles sont bien loin
les années du flower power. Une période de l’histoire contemporaine
au cours de laquelle les conditions de vie et de travail étaient plus
pénibles pour la plupart mais les gens prenaient le temps de
s’envoyer du courrier et de lire un quotidien par jour.
Il est interdit par le MEDEF d’être passéiste et rétrograde. Il
convient d’aller dans la direction montrée du doigt par les notables.
Cette direction est celle de la médiocrité et de la soumission.
Les critères d’employabilité induisent la servilité. Je suis en CDD
de courte durée. A ce titre, je n’ai pas les mêmes droits que les
titulaires. Je n’ai pas de tenue de travail. Je suis censé passer à
travers la pluie et ne pas avoir besoin de chaussures de sécurité.
J’arrive avant les autres et je pars le dernier. Il y a quelques années,
ce genre de situations n’étaient pas permises. Un facteur était formé
et pouvait espérer être embauché durablement. Les gens n’ont plus le
temps de s’écrire alors la Poste ne cherche pas des facteurs qui
aiment le métier mais utilisent sans vergogne des bouche-trou
jetables. Ce n’est pas la Poste en tant qu’institution qui est en cause.
Elle doit s’adapter aux nouvelles méthodes d’organisation élaborées
par les génies du progrès.
Je rêve souvent de mon père. J’ai des flash, des souvenirs qui se
manifestent à tout moment. Aujourd’hui, nous avons longuement
334
conversé. Il m’a expliqué que le factuel n’intéressait personne. Mes
petits soucis de gestion de mon échoppe à presse ne concernent que
moi et les gens avec qui j’étais forcé de bosser (mes fournisseurs).
Mon livre était mal ciblé et mon plan marketing était zéro. Il n’allait
pas se vendre, comme pour les autres. Je n’utilisais pas assez mon
imagination et donc je ne faisais pas correctement mon boulot.
335
dans les portes blindées. Sans utiliser d’alliages toxiques, elle est
devenue une institution solide et durable…
Premier jour :
Betty, ma logeuse m’a foutu à la porte, et ce faisant, le coup de
pied au cul a été opportun. Une autre main s’est tendue et j’ai
considéré que si de mon côté je ne faisais pas d’effort pour y voir
clair, que je ne vaudrais plus rien.
Il ne fallait pas trop compter sur les autres non plus. Si je n’étais
pas à la rue, ce n’était pas par mon mérite, c’était simplement parce
que j’avais encore des amis et la famille, mais si je ne faisais pas
rapidement la démonstration que je n’étais pas qu’un glandeur
irresponsable, raté et indigne de confiance, bref, si je ne me prenais
pas en main, j’allais rester sur le carreau.
336
Je néglige tout, mes papiers, mon chat. Je n’ai toujours pas fini les
modalités pour fermer mon activité de kiosquier et le compte
bancaire lié. Je ne fais rien dans les délais, je ne fais rien de ce que je
prévois.
Lorsqu’il m’arrive une tuile, je peux dire que c’est le destin ou la
scoumoune mais lorsque je dois payer des pénalités de retard, c’est
simplement parce que je n’ai pas fait ce qu’il fallait en temps et en
heure.
Le quotidien réserve son lot de surprises et on doit s’adapter. On
ne peut jamais tout prévoir avec certitude mais ce qui est certain c’est
que si je passe ma soirée à boire de la bière en tuant le temps sur
internet, j’aurais du mal à émerger le lendemain et à être efficace,
donc organisé.
J’arrive toujours à finir les choses mais il me faut un temps
démesurément long, anormalement long.
Deuxième jour :
337
d’un endroit à l’autre. J’ai vraiment envie de me trouver un havre de
paix.
Troisième jour :
J’ai fait ma mise à jour au RSI, j’ai retoqué mon CV mais comme
j’ai du mal à me concentrer, il me faut du temps alors je suis arrivé à
midi sur mon lieu de chantier et j’avais honte d’être ainsi. Alors j’ai
eu envie de m’envoyer un pastis pour dissoudre la boule au ventre
mais je me suis raisonné. Alors j’ai mangé, j’ai fait une sieste et j’ai
écrit quelques lignes, histoire de dire que j’avance un peu.
338
Quatrième jour :
Cinquième jour :
Les raisons qui expliquent l’échec des trois mois passés avec
339
Betty sont les mêmes que celles qui font que j’ai été viré par les
Religieuses pour lesquelles je bossais dans une maison de retraite et
celles qui m’empêchent d’être un séducteur efficace. Je ne parle pas
comme il le faudrait, je ne dis pas les mots qui sonnent doux à
l’oreille. J’aime démystifier, appeler un chat un chat, une pute une
pute et tendre la glace à ceux qui se planquent derrière un paravent
de bons sentiments.
Sixième jour :
340
en accès payant. Il faut débourser 30 euros sans être certain d’y
trouver son compte. Je vais aller enduire mes murs de chaux, cela va
me faire du bien.
A FOND LA FORME !
Septième jour :
Huitème jour :
J’ai fait un texte très court, sans blabla, une petite annonce
envoyée en message privé et publiée sur face de bouc pour dire que
341
j’étais clairement dans la panade et cela a marché ! J’ai eu des
réponses. Les personnes que je connaissais n’allaient pas me laisser
tomber. Cela m’a fait plaisir et c’est cela qui me différenciait de
Mouna : J’avais des camarades qui ne tournaient pas les talons
lorsque le vent tournait.
Je suis très fataliste, je ne vis pas avec des remords mais il est
évident qu’en me reprenant en mains, tout simplement en ne
cherchant pas à m’évader virtuellement mais en prenant le temps
d’élaborer une fuite qui ne soit pas une "fuite en avant", cela devient
plus facile. Les problèmes de boulot, de sous, de logement se règlent
petit à petit. D’une part, grâce à un don conséquent de ma mère, qui
m’encourageait à changer de département pour un nouveau départ,
je n’avais plus de dettes. J’avais même un peu d’argent de coté pour
payer un meublé, le temps de trouver un emploi plus ou moins stable.
Je n’écrivais pas toujours sur ce qui s’était réellement passé et je
n’écrivais pas sur ce qui allait arriver mais je pouvais de nouveau
écrire sur ce qui pouvait éventuellement se produire. Pour la
première fois depuis des mois, je me sentais plein de vitalité, je
redécouvrais mon énergie.
Neuvième jour :
J’ai fait tout ce que j’avais prévu, dans les délais impartis. C’est
cela à mon avis qui peut rendre un homme heureux : arriver à faire ce
qu’il a décidé.
Bon évidemment, cela n’a pas duré ! En quête d’un rendez vous
galant, je me suis relâché l’après midi, j’ai réglé le dérailleur
n’importe comment et j’ai cassé ma chaine de transmission. La
gourde n’était pas au rendez vous et m’a prévenu cinq minutes avant.
En tous les cas et c’est mon seul motif de fierté actuellement : je
tiens bon!
342
DEE DEE S’ENNUIE
Je n’ai pas d’enfants, je n’ai que lui. Je me bats pour lui, je veux
lui offrir une autre vie mais comme je me tue à lui dire, c’est la crise
mondiale. Nos experts font tout ce qu’ils peuvent pour réparer mais
cela prend du temps. Et lui me dit que cela fait des décennies qu’on
lui sert la même rengaine et qu’il faut inventer autre chose car cela ne
marchera plus. C’est fini de vivre au dessus de ces moyens, de
prélever dans le stock, d’hypothéquer sur l’avenir des générations
futures. Et là, j’explose de rire ! Voila qu’il me cite ce qu’il a vue sur
Face de bouc, il me parler du chef indien Seattle ou je ne sais qui !
Non d’une nonne, ce chat est d’une naïveté déconcertante !
343
Pour cela, il va apprendre à se passer d’internet en soirée pour
pouvoir écrire de manière soutenue.
Auguste foire sa vie à se raconter qu’il ne vaut pas un kopeck et
qu’il ne sait rien faire d’autre que de s’adapter aux situations
nouvelles.
Auguste est triste et comprend qu’il ne sera pas lu, alors il peut
faire ce qu’il fait quand il a picolé, raconter les pires horreurs sur
son compte..
344
Le même mauvais geste qui me poussait à lever le coude me fait
enclencher le déclenchement des dialogues à deux balles sur internet,
à la recherche d’un cul. Il s’agit d’une véritable dépendance. Tu sais
que tu es en train de te perdre mais tu le fais quand même. Tu te mets
en retard sur ton travail mais tu le fais. Tu es incapable de t’organiser
seul, de te maîtriser et tu vas devoir être cadré en tant que salarié car
tu ne peux plus actuellement être indépendant. Ton moral est en dents
de scie, tantôt tu es plein d’allant, tu es capable de téléphoner de
donner une bonne impression, tantôt tu te méprises tant que c’est
affiché en gros sur ton visage de perdant.
Bertolt Brecht
Sainte Jeanne des abattoirs.
345
et un autre poème, plus contemporain :
346
Les intérêts de mes patrons ne pouvaient être les miens dès lors
qu’ils ne songeaient qu’à leur intérêts au détriment du mien. Il n’y
avait pas de coopération possible et les syndicalistes permettaient de
rétablir un certain équilibre, de limiter les dégâts.
Je ne trouvais ma place nulle part.
347
La lettre de Marcello
Lettre de Marcello
(Extrait de l’habilitation BMC, un livre non publié)
348
et en outillage je n’arrêtais pas d’acheter les nouveautés mais je
trouvais cela ridicule. Je ne voulais plus de cette courses contre le
Temps, j’aspirais à tout autre chose. Seulement, je ne le faisais pas.
349
Lire des manifestes, préparer des devis, étaient plus important que
de préparer la tambouille. Elle ne voulait pas de cette vie là. Elle
préférait que je fasse moins de chantier, que je gagne moins de
pognon, mais que je sois plus disponible.
On a failli se séparer à ce moment là. Et puis, il y a eu votre stage
qui nous a "fédéré" car vous nous avez fait rêver. (Nous nous
sommes séparés depuis mais nous sommes tous les deux heureux "en
ménage"). Il est tombé pile poil.
J’ai trouvé que c’était relativement facile de remettre en question
des vieilles répartitions de rôles. Nous n’avons plus eu besoin de la
télévision. Nos soirées étaient suffisamment animées ainsi. Déjà en
discussion, en négociations permanentes ! Vénéra ne lâchait sur rien,
à commencer par l’emploi de certains mots. C’est la conférence que
vous avez organisée, celle animée par Clémentine AUTANT et de
Diotima MELODIE qui l’a ébranlée ! A partir de là, elle s’est
documentée, elle a participé à l’infokiosques et elle a rejoint des
groupes libertaires. Je l’ai parfois accompagné, j’ai mis plus de temps
qu’elle à perdre de très mauvaises habitudes. J’ai de nouveau eu
envie de sortir. Pas seulement pour aller au restaurant, pour voir des
choses, voir des spectacles vivant et assister à des débats publics. Et
j’ai changé ! Et je tenais à vos dire un petit grand merci.
350
pour les évadés fiscaux.
Il y a eu un moment où l’on ne pouvait plus fêter Noël, on faisait
comme les Brésiliens qui trimaient dur pour leur carnaval, on en
bavait toute l’année, on serrait les dents, on faisait gaffe à nos fesses,
et puis un jour, il y a une femme qui a planté son grain de la colère et
tout le monde l’a suivi, comme un seul homme.
Vénéra m’avait bien formé politiquement, il y a eu votre stage
aussi. Je me sentais prêt.
351
groupe Manouchian)
352
Happy end
J’ai vécu heureux en vivant caché, le temps que des gens idiots de
353
la fachosphère fassent leur baroud d’honneur, et quand les autres
gens mi figues mi raisin ont enfin réalisé qu’il fallait quand même se
lever avec la gueule de bois, se lever pour changer, j’ai compris que
le vent avait tourné et que je pouvais sortir de mon cocon.
J’ai monté une nouvelle entreprise que je me suis empressé
d’affilier à un réseau de coopératives et là, j’ai commencé à y croire.
Je sais très bien que c’est un moment charnière à saisir, que cela
ne va pas durer. Je crains qu’après quelques mois d’emballement,
d’intense créativité, les gens finissent par se lasser et reviennent à un
mode de vie plus pépère en abandonnant leurs responsabilités à
d’autres. Je fais partie des gens qui se méfient des réactions
populaires. Je ne crois pas le citoyen assez éduqué pour être capable
de vivre pleinement un idéal républicain, une démocratie vertueuse.
Seulement, il faut le faire, tenter le tout pour le tout.
J’ai progressé, grâce à mes lectures (L’Humanité et Politis,
principalement)
Je ne vois plus simplement les syndicalistes comme étant des
défenseurs d’intérêts corporatistes mais je vois le courage qu’il leur
faut pour résister aux pressions, chercher des compromis et défendre
leurs collègues qui sont intimidés ou condamnés lorsqu’ils se
défendent.
Je n’ai même plus de ressentiment contre les écolos bobos. Je ne
parle pas des snobs, je parle de ceux qui ont les moyens de vivre en
profitant à gogo mais qui essayent de limiter la casse et donnent du
travail à ceux qui se battent pour faire vivre leurs idées. Je préfère un
écolo bobo qui confie ses projets de rénovation à un architecte
bioclimaticien à un écolo farfelu qui sent des pieds et qui fabrique lui
même son éolienne avec des pales en carton.
Personne n’est parfait et ils sont bien nombreux ceux qui nous
attendent au moindre faux pas pour nous juger et nous prendre en
354
"flagrant délit" de défaut de cohérence. Ils se tiennent en embuscade
et nous guettent.
Ils n’ont que ça à faire, juger ce que les autres font.
Les gens moyennement informés de la classe moyenne
continueront à utiliser des colles toxiques, à mettre des fenêtres PVC,
de la laine de verre et à acheter du poulet à 1,40 €.
Les gens savent que ce n’est pas très sain et que cela va leur
retomber sur la gueule tôt ou tard mais ils préfèrent s’en foutre et
rester dans l’ignorance.
Alors, qu’ils crèvent ou qu’ils s’en aillent sur une colonie flottante
dans la haute atmosphère de Vénus !
355
toute la société moderne et que c’était le levier à actionner en
premier.
Je ne savais pas sur quel bouton il fallait appuyer en priorité. Je
savais que signer des pétitions en ligne via les réseaux sociaux ne
suffirait pas cette fois.
356
"Quand la multitude cesse d’être l’agitation individuelle des
citadins vaquant à leurs affaires personnelles, quand elle prend en
charge des revendications communes, alors elle change de nature.
Elle passe à un autre état sous l’effet de la température politique que
l’action réchauffe.
C’est alors qu’apparaît l’acteur politique de notre temps : le
peuple. C’est lui qu’il faut regarder de près. Et pour cela il faut
l’observer dans le seul état qui le rend visible : l’action."
L’éveil
357
"L’improvisation peut aider à déjouer l’ordre dominant."
Didier LocWood - Lhumanité 26/27/28 décembre 2014
1/ On part de la réalité
2/ On se regroupe
3/ On participe à la transformation de la réalité
4/ On touille et on laisse agir mais on ne laisse pas sur le feu trop
longtemps …
358
distrais, tu consommes, tu en redemandes, je t’en ressers et tout le
monde est content.
Le gens n’étaient plus contents.
359
Le mouvement impulsé « Les pendus », par les commerçants et
les artisans qui avaient organisé quelques manif contre le RSI, le
régime social des Indépendants a eu des répercussions inattendues.
360
fonctionné sans trop de casse car les gens avaient peur d’aller trop
loin et les centres de pouvoir traditionnels ont eu l’illusion de garder
les rennes, de contrôler ce ras le bol exprimé dans la bonne humeur.
Au lieu de faire une grève générale, les employés, ouvriers et
cadres débrayaient pendant une heure trente chaque jour pour parler
de la reconversion, de ce qu’il voulaient vraiment.
Les hackers ont mis en garde les transnationales en bloquant
simultanément quelques unes de leurs marques phares en balançant
le message suivant : "Ne vous croyez plus au dessus des lois ! Votre
TAFTA, vous l’oubliez ! "
361
réelle et combien l’était pour la spéculation ? Et puis plein d’autres
questions sont venues et les spéculateurs ont su à ce moment là qu’ils
avaient définitivement perdus parce que les gens savaient. Ils étaient
informés.
362
avait enfin réussi à obtenir une avancée sur la question lancinante de
la rémunération des marchands de journaux et sur la gestion des
abonnements.
« Les formules abonnements en boites aux lettres », proposés par
toutes sortes d’organismes dont ce n’est pas le métier (banques par
exemple) impactaient sur mon chiffre d’affaires.
J’ai, par la formule « abonnement en kiosque », récupéré des
clients qui ne venaient pratiquement plus. Les abonnements sont
prélevés directement sur leur compte et les clients viennent le
récupérer au kiosque à journaux. Le kiosquier conserve sa
commission, et pour l’éditeur, envoyer un colis supplémentaire pour
les abonnés en plus des journaux vendus au numéro revient moins
cher que de payer des porteurs à domicile ou la Poste.
363
moins de presse automobile (excepté les quelques titres que je
vends) mais plus de presse enfantine « instructive » type Cosinus,
science et vie junior etc….
Je devais coller à l’actualité, à ce que les gens voulaient
désormais.
Je ne voulais pas me couper d’une partie de mes clients, les braves
gens qui lisaient Ici Panâme ou autres. Je voulais élargir simplement
mon offre sans gaspiller du papier !
Après tout, Jean Luc MELENCHON, à sa demande, avait été
interviewé par CLOSER.
Il n’avait pas été piégé par cette revue et n’avait pas été censuré.
Les photos de lui ne le montraient pas avec le couteau entre les
dents. C’était à n’y rien comprendre !
364
avec la nouvelle coopérative de diffusion très réactive et moderne
quant à sa manière d’appréhender la logistique.
Je voulais que les gens s’intéressent enfin à mon kiosque !
365
Donner envie de lire, se se cultiver
Je sais que dans l’état actuel, elle est très en deçà de ce qu’elle
devrait être parce qu’elle ne fait que survoler ce qui pourrait être. Je
n’ai aucune idée précise de ce que pourrait donner une révolution. Je
366
ne sais même pas si je la souhaite au point d’être prêt à bousculer
mes habitudes et arriver à penser et à agir autrement, à trouver un
nouvelle alliage "Théorie-pratique".
Ce ne sont pas les bonnes raisons qui me manquent, c’est le
courage, la ténacité. Soutenir Alexis Tsipras, je le fais bien volontiers
pendant un mois, mais au délà ? Les toilettes sèches, les transports
non polluants, l’alimentation végétale, j’y étais favorable mais les
jours de pluie, je n’avais pas envie de marcher et d’attendre le bus.
Assumer ses actes quotidiens avait un coût, en étais-je capable ?
Des gens y ont songé, ont écrit là dessus. Des universitaires et des
personnalités de l’université de la rue. Le gens d’ATTAC, les gens du
DAL, les gens de POLITIS, je ne veux pas pomper sur leurs livres.
Je sais juste que la révolution se fera avec les poètes et les artistes ou
elle ne se fera pas.
ALTERNATIBA 06
Ce qui change, cette fois, c’est que cette initiative a été lancé par
des jeunes qui vont faire passer des idées à un public plus large que
le cercle des militants, à des gens qui s’en foutent pas mal de la
politique sans être irréductiblement fermés aux utopies concrètes.
Des jeunes qui n’ont pas connu les clash, les machines à ruban, le
367
minitel, les cartes perforées mais qui ne sont pas sortis d’un œuf
carré pour autant.
J’en avais marre de voir toujours le mauvais côté de la lorgnette.
Le choix des partenaires allait être crucial. Les institutionnels
allaient rassurer les commerçants, les pros. Je n’avais pas peur de la
récupération car le slogan annonçait que le vert délavé n’était pas la
couleur officielle : "Changeons le système, pas le climat !"
368
Marie-Cunégonde
Elle ne demandait qu’à bien faire. Elle a cherché dans quel secteur
professionnel elle pourrait être la plus efficace et elle a trouvé des
369
emplois dans lesquels elle a pu être utile, en servant les gens, des
emplois qu’elle a perdu, lourdée, avec ou sans préavis.
Elle persévérait et ne restait jamais inactive bien longtemps car
lorsqu’elle l’était, elle ne supportait pas le regard des autres, les
reproches qu’on lui distillait à demi-mot en sous entendant qu’elle
profitait du chômage. Alors elle se dépêchait de retrouver un emploi,
un remplacement, un tiers temps, un mi-temps, tout ce qui venait.
370
Avant de la connaître, je tentais de garder la tête hors de l’eau
pour ne pas disparaître totalement dans un monde peuplé de
personnages de bandes dessinées pour adultes, alors qu’elle voyait
alors plutôt le monde sous l’angle de la télé-réalité. Elle m’avait parlé
d’une nouvelle trouvaille des scénaristes d’une chaîne privée, une
émission dans laquelle les chefs d’entreprise se déguisaient (la seule
fois où j’avais regardé cette émission, les patrons s’affublaient d’une
perruque pour avoir les cheveux longs) pour entrer en immersion
dans le monde des employés, sous couvert d’être formé par eux.
Il ne s’agissait pas de les fliquer, ni de leur voler des secrets, il
s’agissait juste de mieux les comprendre pour pouvoir les aider à
progresser. Enfin, c’était la présentation dans l’émission parce que
vous ne vous attendez pas non plus à ce que les restaurateur vous
dise que le poisson n’est pas frais…
En somme, les patrons n’arrivaient pas à suivre le rythme, ils
étaient bien en deçà du travail fourni par le salarié mais ils avaient la
faculté de poser des diagnostics, de trouver ce qui n’allait pas et des
moyens d’améliorer l’organisation du poste de travail et la
productivité.
Sacrés patrons, une journée d’observation-participante, ils ont
déjà tout saisi ! Pas étonnant qu’ils gagnent autant !
371
bonne journée!" et si vous me dites "C’est quoi cette arnaque votre
truc ? Le prix en gros affiché est trompeur, le cadeau n’est pas offert,
car c’est le prix à côté du code barre qui compte" je ne vous
répondrais rien qui puisse encourager les petits génies du marketing
qui imaginent relancer la croissance en trompant les gens sur la
marchandise et en offrant des gadgets avec un magazine. Je ne vous
dirais pas que vous pouvez vous torcher le cul avec le nice morning
pour pas cher et emballer vos légumes avec comme le faisait ma
mamie car nous sommes enfoncés dans l’ère du plastique pratique
fantastique.
Par contre, si vous me dites que le canard enchaîné à 1,20 €, le
Quotidien régional à 1,10 € et le journal d’opinion national à 1,70 €
sont devenus bien trop chers, je vous invite poliment mais
fermement, à réfléchir sur le nombre de personnes nécessaires à la
fabrication, la distribution et la mise à disposition d’un journal de la
presse libre. Est ce que le boulanger se casse autant le cul lorsqu’il
vous fourgue son pain a chocolat ?
J’achetais mes canettes de LEFFE entre 1,80 € et 2,50 € selon les
points de vente. Par contre, le journal, que vous l’achetez chez le
boulanger (le Nice matin), au rayon presse de Monoprix ou chez le
kiosquier, le prix ne changera pas.
Marie-Cuné n’était pas une grande lectrice. Elle faisait comme les
jeunes et s’informait essentiellement sur internet, avec la télé et la
radio car il lui arrivait d’écouter France Inter et radio keupon.
372
monde ! »sur son smartphone, qu’elle allait s’en tirer en quelques
« like, clics et pétitions on line », mais elle dût payer de sa personne.
- Elle a cru qu’elle serait plus belle en portant une doudoune noire
en col de fourrure.
373
NE PAS POUVOIR RIRE DE TOUT
MAIS DEVOIR DÉFILER AVEC N’IMPORTE QUI ?
374
se déplacent dans les stades de foot ou au moment des soldes, parce
que je préférais les enterrements en petit comité où les gens
hypocrites ne trouvent pas leur place, parce que je préférais être aux
côtés de citoyens qui s’organisent librement en associations, je fus
finalement soulagé qu’il y ait deux rassemblements unitaires à Nice.
Avant d’être soulagé, je fus tiraillé jusqu’à en avoir mal au bide !
375
l’occasion pour faire de "la récupération politique". Je me retrouvai
dès lors dans le camp des méchants, des trouillards, des geignards et
je me sentis finalement bel et bien "cerné par les cons" qui
m’accusaient, quelle horreur, de faire de la politique ! BEURK !
Ben oui, je faisais de la politique, le maire faisait de la politique et
de la com, nous faisions tous de la politique et j’en étais fier !
J’étais soulagé que le peuple des internautes dopé à face de bouc
se mette à parler de sujets éminemment politiques même si j’aimais
moi aussi, en temps ordinaire, balancer des clips des Ramones et les
photos de mes chats. Je trouvais que c’était le meilleur hommage
rendu à la rédaction de Charlie Hebdo, journal politiquement
engagé, journal citoyen !
Je n’attendais qu’une chose, que les gens se mettent enfin à se
parler, comme dans le film l’an zéro un. Que les citoyens lisent,
s’informent, se mobilisent. Qu’ils achètent les journaux chez les
kiosquiers !
Qu’ils s’engueulent sans se fâcher ! Qu’ils se fédèrent, se
rassemblent.
Que la célébration de la mort de personnes héroïques ne soit pas
juste un pet foireux, un coup d’épée dans l’eau, comme lors des
grandes messes médiatiques sur le réchauffement climatique.
376
l’action. Il y aurait aussi un temps pour la réaction.
Plus que jamais, après une unanimité de façade, il faudrait choisir
son camp.
Les journalistes de Charlie avaient payé de leurs personnes pour
avoir combattu l’extrémisme. Ils étaient autant excessifs que
modérés, ils étaient tout simplement subtils car dans les premières
lignes du combat pour l’esprit critique. Ils allaient jusqu’au bout de
leurs idées, tout simplement !
Marie-Cunégonde, comme eux, n’aimait pas les concours de
mièvrerie.
Il y avait parmi eux de sacrés cons qui s’excitaient parce qu’il n’y
avait plus le journal que tout le monde devait acheter le jour J ! Ils
faisaient la queue devant mon kiosque ! Ils ne voulaient pas me
laisser le temps d’installer mes présentoirs, mes tourniquets, faire ma
caisse, déballer et pointer mes paquets. Certains, qui n’étaient jamais
venus, étaient agressifs. Pourtant, il s’agissait d’un journal, pas du
dernier i phone de mes deux ! J’ai placé une affiche pour expliquer
que je n’en avais plus parce qu’il y aurait plusieurs livraisons mais
toute la journée on m’a posé la question, alors moi qui ne sait pas
dessiner, j’ai fait une sorte de rébus. J’ai expliqué avec des mots
simples et des dessins grossiers que ce n’était pas le jour des soldes,
que les petits camions qui livraient tous les points de ventes ne
pouvaient pas suivre une telle demande, si soudaine. Chers clients,
on se défonce chaque jour pour vous et si vous étiez venus plus
souvent, les kiosquiers auraient l’infrastructure adaptée…
C’est cela que j’ai expliqué à Marie-Cuni qui est venue pour le
canard enchaîné sur le coup des treize heures (je n’en avais plus)
377
Je me demandais combien d’exemplaires j’allais vendre le
mercredi suivant…
Les gens avaient peur, les gens avaient compris que la presse
écrite était l’une des premières cibles des terroristes. Les gens étaient
prêts à défendre la liberté d’expression. Je voudrais que les gens
retiennent "que les journaux, il est toujours mieux de les lire que de
les pleurer" (Erik Emptaz). Mon combat, mon gagne-pain en
dépendaient. Il fallait que les gens se convertissent à la démocratie
réelle.
378
Houellebeurck faisait encore parler de lui. Il était invité sur tous les
plateaux. Certains journalistes ne lui ciraient pas les pompes mais
qu’ils fassent ou pas la gueule, cet écrivain-comédien avait une fois
de plus démontré son génie du marketing. Son livre allait faire partie
des événements littéraires et tout le monde devrait avoir une opinion
sur lui.
Elle l’avait appris par un message sur face Book puis elle fit
comme chaque jour, elle alluma son poste télé pour voir le journal de
treize heures. Il y avait une édition spéciale sur France Télévisions.
Sur le plateau des experts en justice, des experts en police, des
experts en terrorisme, des experts en veux-tu en-voilà mais elle
n’apprit rien qu’elle ne sût déjà.
379
journalistes ! J’étais soulagé.
J’étais fier aussi que le peuple défile en masse pour dire tous en
coeur, "vous ne nous faites pas peur ! "
J’étais même prêt à chanter la Marseillaise ! J’étais même prêt à
ce que l’on prononce la déchéance de nationalité de ceux qui
revenaient des camps d’entraînement en Syrie ou ailleurs, comme le
proposait Bruno Mégréciotti, c’est vous dire comme j’étais sur le
coup de l’émotion !
Seulement, j’étais de gauche, et je savais que la plupart des gens
qui défilaient n’avaient rien compris aux valeurs défendues par
Charlie et que si demain on votait un "patriot act", si demain on
attentait à nos libertés publiques, par la voie étatique, sous couvert
de nous protéger des "barbares", en mettant en avant une guerre des
civilisations, on ne les verrait plus dans les rues ! Ces gens-là étaient
des pleutres, des pantins mûs par une réaction épidermique. J’aurais
tant aimé que ce moment historique nous transpose dans l’univers de
la sixième République. C’était le moment où jamais pour tous ceux
et celles qui comme moi rêvaient d’y aller, mais sans être trop
pressés d’en être…
J’aurais tant aimé que tous ces gens s’intéressent de nouveau à ce
qu’ils avaient choisi de déléguer à d’autres : le politique.
Seulement, j’avais plus de quarante ans, et je savais qu’il ne fallait
pas rêver, mais se battre…
Marie-Cu, elle y croyait ! Elle m’a prédit que mon kiosque allait
bien marcher pour deux bonnes et simples raisons.
380
trop comment s’y prendre. Les émissions des années quatre vingt
comme "Droit de réponse" dans lesquelles les invités s’engueulaient
parce qu’ils avaient des choses à dire avaient cédé la place à des
émissions ’Talk show" où les "clash" faisaient partie du cahier des
charges. La qualité des échanges en pâtissait la plupart du temps.
Depuis la tragédie, un esprit surréaliste flottait dans l’air et les
émissions du service public semblaient vouloir rattraper le temps
perdu. La plupart d’entre nous ne savions plus écouter, discuter,
entrer dans le vif du sujet et il nous fallait des outils pour nous
réapproprier notre aptitude à nous exprimer. Nous ne savions plus
vivre ensemble !
381
des lecteurs". Les républicains de gauche avaient droit à des articles
faits par des professionnels mais ils avaient aussi leurs tribunes
ouvertes, qui s’appelaient selon les journaux "Je me mêle de ce qui
me regarde", "Défaiseurs d’opinions, constructeur du jour d’après",
"Ecris ce que tu penses sur le mur". Charlie Hebdo de "l’après
attentat" fût l’un des premiers à lancer la mode des deux ou quatre
pages (sur seize) dans l’esprit journal du collège de la citoyenneté et
les gens ne s’essoufflaient pas ! Dessins, poèmes, citations,
nouvelles, articles plus ou moins "sérieux". Un comité de publication
sélectionnait ce que le webmestre de leur site réceptionnait dans la
semaine, après un passage chez le correcteur, et les gens se sont mis à
acheter Charlie tous les mercredis car c’était plus bandant de lire son
texte dans un vrai journal que de voir son SMS ou son tweet
apparaître en bas d’un écran de télévision.
Marie Cuni (oui, je l’appelle affectueusement comme cela depuis
qu’elle est devenue mon amie) préférait contribuer anonymement
mais régulièrement alors elle signait "Charlie" comme beaucoup
d’autres contributeurs qui ne cherchaient ni à se faire mousser, ni
éclabousser les autres par leur savoir érudit, mais juste apporter sa
botte de paille à la maison républicaine.
382
nécessité que par choix, défiler sous la bannière de l’union nationale
et républicaine lorsque le front national, encouragé par les cracheurs
de feu et les clowns de la droite décomplexée, accéderait au pouvoir
par les urnes. À ce moment là, je me rangerai, comme en 2002,
derrière la bannière du mieux disant démocratique, à contrecœur.
383
J’admirai son enthousiasme. Elle ne voulait pas retenir les raisons
de céder à la morosité. Elle refusait de laisser tomber la première
déception venue. Une réunion publique d’information sur le Traité
TAFTA qui ne faisait pas déplacer beaucoup de monde et elle y
trouvait quand même satisfaction parce que la poignée de personnes
qui était venue allait en parler autour d’elle. Je me décourageais trop
facilement. L’électrochoc "attentat contre Charlie" n’allait pas
entraîner par magie le passage à la sixième République ! Il fallait
faire la part des choses entre un effet de mode et un véritable élan
démocratique. La victoire de SIRIZA en Grèce allait sans doute
donner le top départ de la course contre le fatalisme, là, comme elle,
j’y croyais.
384
vitrine. Elle trouvait cela plus efficace que de persuader les gens de
changer de comportements, car les gens se foutaient pas mal de tout
ce qui pouvait nuire à leur confort.
Elle était habile mais s’est fait prendre plusieurs fois dénoncés par
des passants. Ce n’est pas pour cela qu’elle a arrêté ce type d’actions.
Elle a considéré qu’elle agacerait, quelle dérangerait mais qu’elle ne
changerait pas les gens ainsi.
385
Pourquoi une présentation de l’auteur par lui
même
J’ai donc décidé d’aller au devant de mes lecteurs car je n’ai pas
d’autres choix. J’aurais aimé faire un buzz pépère depuis mon
domicile mais je ne sais pas faire et puis quelque part, faire du bruit
pour rien, ça me gêne. Je n’ai pas d’idées d’actions héroïques ou de
386
records du monde à battre en magasin, alors j’ai décidé de faire ma
promotion artisanalement.
"Mais enfin de quoi ça parle ton livre ? C’est sur les rencontres
sur internet ? Sur ta crise de la quarantaine ? Ça veut dire quoi
exactement érotico-politique ? Bof, mais il y a déjà plein de livres sur
ce thème. " Donne moi l’envie de te lire !"
</><>
Mon plan de promotion :
387
et sous mon nom civil, j’ai noté dans le cahier des suggestions
l’achat d’un exemplaire de mon livre, carrément !
388
Je ne pense pas lui avoir donné l’envie d’écrire son article, Du coup,
j’ai acheté les numéros de nice matin sortis au moment du festival du
livre et j’ai appris ainsi qu’il existait un réseau de libraires
indépendants (www.librairesanice.fr) que je me suis promis de
contacter un jour ou l’autre.
389
s’interroge sur un art de vivre qui lui convient sans chercher à être
anti-conformiste à tout prix. C’est le Pot qui cherche un unique
cornichon sans vouloir forcément revisser le couvercle. Parfois il
m’arrive de faire des clins d’oeil, de glisser quelques références pour
faire intello, mais en l’occurrence, pour le titre, je ne me suis pas
foulé !
Je pense que l’on peut traiter avec humour des sujets sérieux
comme la domination masculine ou l’amour. Je pense que l’on peut
sortir indemne de quelques mois passés en immersion dans des lieux
virtuels cernés par des ramollis du bulbe. Ce qui me plaît dans PCC,
c’est que le narrateur finit par de nouveau s’intéresser au monde réel,
et décide de ne plus maugréer, subir mais de repasser en mode
"Action, on tourne !"
MYSTERIUM CONJONCTIVITE
390
quarantaine, il ne doit pas occulter ses rêves de jeunesse et que pour
réussir à changer, il doit renouer avec ce qui l’animait : le désir
d’apprendre, l’accès à la culture populaire, l’engagement associatif.
391
Un poivrot remporte une victoire dans sa journée de peigne-cul
lorsqu’il parvient à repousser d’une demie-heure l’apéro. Il est
obsédé par le produit car cela l’aide à supporter sa personnalité qu’il
méprise au fond. Quand on utilise sa force pour ce genre de
triomphe, on n’est pas disponible pour la victoire poilitique. Toutes
les belles idées de monde nouveau et transformé sont reléguées au
second plan. On ne sert pas à grand chose, on est pas fiable. Il était
primordial que je m’en sorte. Ce roman est trop long (550 pages ) et
il comporte trois parties. La dernière aborde le détournement de sens,
la primauté de la forme sur le fond, et la grand escroquerie du
capitalisme vert.
</><>
392
393
PSYCHATRICES
Psychatrices
Aux graines citoyens !
394
mois. Il fallait savoir patienter, « Le rhum ne se fabrique pas en un
jour ! comme disait mon paternel détenteur du record mondial du
soupir prolongé, reconnu en 1978, dans le fameux livre Guinness des
records et jamais dépassé depuis, c’était d’ailleurs son deuxième
titre de gloire après son premier prix en poésie pour son poème
dédié à Jenny. son titre de gloire qui lui avait permis de percer dans
les affaires.
395
J’étais à des années lumière de la situation dans laquelle les
patrons se grattaient les couilles pendant que les ouvriers
assemblaient, j’étais dans le monde la PME familiale, aux antipodes
du CACA 40, le monde o
Comme toujours, agissant en qualité de punk sans la crête, je
devais juste tempérer un peu ma rage en dedans. Ce qui comptait,
c’était que je garde mon emploi sans y perdre mon identité. Je devais
pourvoir rentrer le soir, vanné physiquement, mais pas lessivé
psychologiquement, pas stressé, pas préoccupé par le lendemain.
Parce que j’avais des choses à faire, des choses très importantes pour
mon équilibre, du genre écrire, apprendre et faire un peu, participer à
quelques actions.
Chez moi, je n’étais plus avec Fraüke HAMMER qui me faisait
chier avec ses préoccupations écolo d’allemande mais avec Marie
Cunégonde, je veux dire par là que je n’ avais plus vingt ans, alors je
devais juste veiller à ce que Marie Cuné devienne Marie CUNI en
lieu et place de la Marie CUBI (c’est une licence poétique) et je
devais juste un peu prendre les choses en mains car elle se tapait
quatre vingt pour cent des tâches ménagères (c’était la femme idéale
pour un écrivain – Dans ma vie, je n’avais en tant que personne
entière connu que deux femmes labellisées « femmes d’écrivain ») en
veillant au gaspillage alimentaire et à la surconsommation des sacs
plastiques issus de la pétrochimie sans devenir un rabat-joie pour
autant.
Ce n’était pas si simple mais réalisable.
396
merde dans les yeux ! », c’était une phrase de mon papounet qui avait
fini écrabouillé. Je vais vous en parler en début de chapitre suivant
car j’ai une dette vis à vis de lui.
Et oui, lecteur pointilleux, Auguste n’est pas mon double, ni mon
petit, c’est juste ma bouteille d’oxygène. Quand on est assez con
pour donner un nom composé à ses chats, pourquoi ne pas pas
nommer sa bouteille d’O² ?
397
À suivre...
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