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Dimanche 8 août 2021 Jean-Michel Larivière

L‘adoration par les Psaumes

Faisant suite à l’enseignement de la semaine dernière, ce matin, on va se concentrer sur les aspects plus pratiques
des Psaumes, notamment comment les Psaumes peuvent soutenir notre prière et notre adoration. Comme je vous
l’avais dit la dernière fois, on va également prendre quelques minutes pour examiner le problème des psaumes
de malédiction…

En lien avec ce qui est écrit dans Jacques 5. 13, on pourrait résumer en 2 phrases simples comment appliquer les
Psaumes dans notre vie:
• Si tout va bien, loue l’Éternel.
• Si tout va mal, confie-toi en l’Éternel.

Est-ce que c’est simple comme conseil? Oui! Est-ce que c’est toujours facile à appliquer? Non! Si l’on appliquait
avec discipline ces 2 principes simples, notre vie spirituelle serait nettement meilleure.

Non seulement les Psaumes nous enseignent comment exprimer notre adoration et notre foi envers le Seigneur,
mais ils peuvent également guider la vie spirituelle du croyant. Le judaïsme et le christianisme, jusqu’au 18e
siècle, ont tous deux étés fortement imprégnés par les Psaumes, souvent transmis par le chant. Pendant près de
3,000 ans, les Psaumes ont été le principal livre de chant et de prière des croyants. Entre les 9 e et 15e siècles, les
Psaumes étaient pratiquement le seul livre liturgique accessible aux laïcs et, après la Réforme, les protestants
étaient reconnus – même parmi les paysans moins scolarisés – pour fréquemment fredonner ou réciter des
psaumes qu’ils avaient mémorisés.

Pendant des millénaires, la piété personnelle, la louange et la prière des croyants – Juifs ou Grecs – ont été
nourries par les Psaumes... et, parfois même à certaines époques, nourries uniquement par les Psaumes. Ce serait
donc une grave erreur, en 2021, de considérer que le livre des Psaumes n’a seulement qu’une importance
facultative pour la prière et la louange alors qu’il en a été la pierre angulaire pendant des millénaires.

Est-ce que je suis en train d’essayer de ramener de vieilles traditions protestantes dans l’Église? Avant d’aller
plus loin, faisons d’abord 2 constats réalistes par rapport à l’usage des Psaumes pour le chant et la prière au sein
des Églises évangéliques.

1) Les milieux évangéliques modernes ont progressivement mis de côté l’usage des Psaumes dans la louange
au profit de chants qui mettent davantage l’emphase sur l’émotion humaine ou comment l’on se sent par
rapport à Dieu, ce qui est considéré comme une louange plus authentique ou qui vient du cœur… Malgré
toutes les meilleures intentions des auteurs de tels chants, le résultat malheureux a souvent été une
amplification de la pauvreté théologique des chants dans nos Églises. Je ne suis nullement en train d’affirmer
qu’on ne devrait chanter que des Psaumes ou qu’on devrait exclure tous les chants modernes de notre registre;
certains sont excellents d’un point de vue théologique. Je suis simplement en train de dire qu’il est risqué de
substituer l’inspiration émotive d’un cœur humain à l’inspiration divine des Écritures. Nos critères de
sélection pour un nouveau chant ne devraient pas être « est-ce que ce chant est populaire? », « est-ce que la
mélodie est belle? », « est-ce que je me sens bien après ce chant? », mais plutôt « est-ce que ce chant est
biblique et édifiant? ».

2) Les milieux évangéliques modernes se méfient généralement des prières toutes faites ou « non spontanées »,
qui sont parfois perçues comme moins sincères ou même qualifiées de vaines redites. Si les disciples de Jésus
nous avaient posé la question, « enseigne-nous à prier », on aurait probablement commencé à parler de la
liberté qu’on a de formuler nos inquiétudes, nos requêtes ou nos louanges à Dieu. Pourtant, Jésus donne à
Ses disciples un modèle de prière (« Notre Père… ») qui a un goût de Psaume.

De plus, on voit que les prières libres dans le Nouveau Testament – surtout dans le 1er chapitre de Luc et dans les
Actes des Apôtres – et ont une forte saveur de Psaumes, tant au niveau de la forme que de la substance. Ce n’est
pas entièrement étonnant puisque Jésus et Ses disciples lisaient fréquemment les Psaumes dans les synagogues.
Dans Marc 14. 26, on les voit également chanter des cantiques durant la Sainte Cène. Selon la tradition juive, les
Psaumes 113 à 118 (le Hallel) étaient récités après le repas pascal et on chantait des cantiques,
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généralement tirés des Psaumes. Durant Son ministère, Jésus a prié les Psaumes et Il a maintes fois exprimé Ses
émotions en recourant aux Psaumes. Après la Pentecôte, les Apôtres ont maintes fois cité ou fait allusion aux
Psaumes dans leurs discours et dans leurs épîtres, car les Psaumes étaient des textes familiers pour eux, mais qui
prenaient une toute nouvelle signification en Christ. Les Psaumes constituent la grammaire de la prière biblique.
Pour être habile avec cette grammaire et bien l’utiliser dans la prière, il n’y a aucun autre raccourci que de lire
régulièrement les Psaumes et de laisser les textes imprégner notre cœur. Je nous encourage même à ouvrir nos
Bibles dans les Psaumes lorsqu’on prie et d’y chercher des textes qui soutiennent notre prière ou qui expriment
la même émotion que celle qu’on essaie peut-être maladroitement de communiquer à Dieu. Ce n’est pas un péché
de prier les yeux ouverts!

Les Psaumes peuvent nous donner de précieux enseignements sur l’adoration et la prière. On va en aborder 3 ce
matin:
1) Les Psaumes révèlent ce qu’il y a réellement à l’intérieur de nous.
2) Les Psaumes nous enseignent comment nous approcher de Dieu.
3) Les Psaumes nous enseignent à être plus équilibrés dans notre adoration.

1) Les Psaumes révèlent ce qu’il y a réellement à l’intérieur de nous.

Les Psaumes sont trop souvent réduits au registre de la louange. Pourtant, les Psaumes nous ouvrent une fenêtre
sur ce qui se passe réellement dans le fond du cœur humain et exposent une multitude d’émotions et d’états
spirituels qui peuvent élargir notre prière. On y voit des moments de confiance en Dieu et de doute, des moments
d’exaltation de l’œuvre de Dieu et d’incompréhension de Son œuvre, des moments d’indignation face au mal et
de confession personnelle de péchés graves.

Soyons honnêtes: il y a des moments dans notre vie où l’on n’aura tout simplement pas envie de louer Dieu. Peut-
être qu’on passe à travers une épreuve accablante, peut-être qu’on subit les effets du péché d’un autre, peut-être
qu’on se sent soi-même tellement pécheur et indigne de s’approcher de Dieu qu’on a davantage envie de fuir Sa
présence… Dans de tels moments, peut-être que notre bouche va louer Dieu… mais sans l’approbation du cœur.
On va parfois même s’imaginer que la responsabilité d’un « bon chrétien » est de louer Dieu malgré les
circonstances ou ce qu’on ressent réellement. On va essayer de mettre de côté nos émotions et notre humanité,
en s’imaginant que Dieu ne les voit pas et que ce qui L’intéresse vraiment, c’est uniquement ce qui sort de notre
bouche.

On voit dans les Psaumes que les psalmistes ne sont pas de simples « machines à louange », mais qu’ils exposent
leurs sentiments profonds à Dieu et qu’ils sentent qu’ils peuvent confier sans crainte leurs états d’âme à Dieu. En
fait, ce n’est pas rare de voir un Psaume commencer par le doute, l’incompréhension ou même la colère pour
finalement terminer par l’adoration. Le chemin vers la louange qui vient du cœur passe parfois par d’autres étapes
comme l’épreuve et le désarroi. Certains psalmistes vont même exprimer sincèrement à Dieu des sentiments qui
seraient jugés totalement indignes d’un croyant. Regardons un exemple…

Lecture Psaume 69. 20-31

Qu’est-ce qu’on fait, en tant que croyant, du verset 29? (« Qu’ils soient effacés du livre de vie, et qu’ils ne soient
point inscrits avec les justes! ») Souhaiter la perdition éternelle de son adversaire est probablement la pire
malédiction de toute la Bible! Honnêtement, je suis très mal à l’aise avec ce verset. La tentation pour nous serait
de rapidement nous débarrasser de ce verset en disant qu’il se trouve dans l’Ancien Testament et en citant Christ,
qui nous demande d’aimer nos ennemis et de bénir ceux qui nous maudissent. Donc, un « bon chrétien » ne
devrait pas souhaiter à ses ennemis ce que David a écrit; après tout, on devrait être au-dessus de ça, non?

Premièrement, rappelons-nous que si l’on est capable de prier pour le salut de nos ennemis, ce n’est pas à cause
de la bonté de notre propre cœur, mais uniquement en raison de l’œuvre de la grâce de Christ dans notre cœur.

Les imprécations sont un sujet sensible. On doit reconnaître qu’on a le privilège de vivre dans un pays
d’abondance et de sécurité où on se permet de se demander si les psaumes imprécatoires ont leur place dans la
Bible. On aurait probablement une vision très différente de la question si on se trouvait dans un camp de
concentration polonais dans les années 40, si toute notre famille avait été massacrée dans un génocide racial au
Rwanda ou bien si on était enchaîné dans un réseau d’esclavage sexuel.
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Crier au Dieu juste et tout-puissant est parfois le seul recours auquel les victimes impuissantes ont accès. Je
mentionnerais d’ailleurs un exemple éloquent, tiré du Nouveau Testament, Apocalypse 6. 9-11 : « Quand il ouvrit
le cinquième sceau, je vis sous l’autel les âmes de ceux qui avaient été immolés à cause de la parole de Dieu et
à cause du témoignage qu’ils avaient rendu. Ils crièrent d’une voix forte, en disant : « Jusqu’à quand, Maître
saint et véritable, tarderas-tu à juger, et à tirer vengeance de notre sang sur les habitants de la terre? » Une robe
blanche fut donnée à chacun d’eux; et il leur fut dit de se tenir en repos quelque temps encore, jusqu’à ce que
soit complet le nombre de leurs compagnons de service et leurs frères qui devaient être mis à mort comme eux. »

Ces martyrs sont des chrétiens zélés qui ont été torturés et mis à mort pour le nom de Christ, et ils crient à la
vengeance auprès de Dieu. Il ne leur est pas dit de se taire parce qu’ils devraient être de « meilleurs chrétiens »
et ne pas souhaiter obtenir justice; il leur est dit de patienter. Dieu va faire justice en Son temps…

Comme l’a écrit un certain théologien du nom d’Othmar Keel, notre malaise avec les imprécations dans la Bible
tire peut-être davantage son origine dans notre manque de conscience de la gravité du mal et de son opposition à
Dieu. Le péché est une rébellion que Dieu ne peut laisser impunie, car ça irait à l’encontre de Sa nature. Assurons-
nous, dans notre désir de mettre l’emphase sur un Dieu d’amour, de ne pas omettre le Dieu saint qui jugera le mal
et les pécheurs.

De plus, l’homme a été créé à l’image de Dieu. Par conséquent, l’homme désire que justice soit rendue lorsqu’il
se retrouve confronté à une ignominie devant laquelle il est impuissant, ce qui est un sentiment tout à fait légitime.
Le problème, c’est que l’homme est pécheur et notre soif légitime de justice se retrouve souvent tordue par des
péchés tels que la colère, l’orgueil ou l’avarice. « Tu m’as volé $100; je vais te traîner en justice et faire saisir ta
maison! Tu m’as cassé un doigt; je vais t’arracher la tête! » C’est pour ça qu’il est préférable de remettre
l’exercice de la justice et de la vengeance à Dieu, qui Lui n’est pas corrompu par le péché.

La présence de Psaumes imprécatoires démontre qu’on peut être parfaitement honnête avec Dieu, tout en
maintenant une attitude de respect et de soumission. Dieu ne s’attend pas, lorsqu’un cœur pécheur déverse ses
sentiments sincères devant Lui, que tout soit propre, théologiquement exact et composé en alexandrins. Il veut
qu’on dépose notre fardeau à Ses pieds, peu importe ce que le fardeau contient. Honnêtement, mieux vaut
répandre notre frustration devant le Trône de grâce que d’aller mettre son poing dans la face de la personne qui
nous a frustré!

Pour clore cette parenthèse sur les imprécations, leur présence dans la Bible ne constitue pas une autorisation ou
un encouragement à maudire ses ennemis… mais un encouragement à être franc devant Dieu et à s’en remettre
à Lui pour le jugement. Un trait particulier des psaumes imprécatoires est que leurs auteurs faisaient confiance à
la capacité de Dieu à exercer la justice en Son temps. David a eu plusieurs fois l’occasion de tuer Saül et il avait
plein de bonnes raisons de le faire; pourtant, il n’a jamais porté la main sur Saül, mais il s’en est remis à Dieu
pour le juger (I Sam. 24. 16; 26. 8-11). Peut-être que l’histoire aurait été différente si David n’avait pas porté sa
frustration et l’injustice dont il était victime devant le trône de l’Éternel. Peut-être que David aurait exercé sa
propre justice…

Les Psaumes nous révèlent donc sans aucun maquillage les émotions humaines, même les plus sombres.
Toutefois, les nier devant Dieu peut nous mettre en danger spirituel. Si l’on se retrouve opprimé ou victime d’une
injustice, parlons-en à Dieu. Si on enferme ça dans un tiroir en disant à Dieu que tout va bien, on s’expose à
éteindre notre joie et laisser croître l’amertume dans notre cœur, qui pourra éventuellement faire mûrir des péchés
beaucoup plus graves. Faisons confiance à Dieu pour exercer la justice et – qui sait – peut-être que Dieu va nous
révéler que c’est nous qui avons tort!

2) Les Psaumes nous enseignent comment nous approcher de Dieu.

Ce n’est pas parce que Dieu accueille l’expression de nos sentiments sincères qu’on peut s’approcher de Lui
n’importe comment. Un jour, j’ai assisté à une cérémonie catholique durant laquelle le curé tentait
maladroitement de rendre la prière attirante auprès des jeunes. Il a donné cet excellent conseil à ne pas suivre :
« N’ayez pas peur de parler franchement à Dieu! Engueulez-Le! »

La semaine dernière, on a lu une partie du Psaume 89, dans lequel Ethan exprime ouvertement son
incompréhension à l’Éternel pour avoir laissé Jérusalem être incendiée et sa population massacrée.
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Pourtant, malgré cette catastrophe épouvantable, Ethan n’a aucunement un ton méprisant ou irrité à l’égard de
Dieu. Il intercède fermement auprès de Dieu sur la base des promesses qu’Il a faites à David, mais le ton demeure
toujours hautement respectueux.

Avec quelle attitude devons-nos nous approcher de Dieu selon les Psaumes? Avec respect, humilité et confiance.

Respect: Dieu est le Souverain Créateur de l’univers et l’on ne s’adresse pas à Lui comme on le ferait dans un
texto. Les Psaumes nous enseignent à garder cette juste distance avec le Dieu qui se fait notre ami et notre
confident, mais sans rien Lui dépouiller de Sa grandeur et de Sa majesté.

Humilité: Dieu ne me doit rien. Je n’ai aucunement le droit de m’attendre à ce qu’Il réponde à toutes mes requêtes
de la façon dont je voudrais. Malheureusement, nos prières sont plus souvent égocentriques que théocentriques.
Les Psaumes nous révèlent que Dieu est au centre de l’univers et de l’histoire, pas l’homme, pas nous. Dieu
accueille nos requêtes et notre intercession, car Il est plein de bonté, mais on doit toujours demeurer conscient
que la Personne à qui l’on s’adresse est plus importante que la somme de tous nos besoins.

Confiance: Lorsque vous lirez les Psaumes, remarquez la confiance qui se dégage des Psaumes… Même dans
les moments d’épreuve, d’adversité ou de doute, la toute-puissance de Dieu, Sa justice et la sainteté de Ses
intentions ne sont jamais remises en cause. On voit qu’aux yeux des psalmistes, Dieu demeure Dieu même
lorsqu’ils ne Le comprennent pas. Une confiance bien ancrée dans le caractère de Dieu (non seulement Sa
puissance) nous permettra d’endurer n’importe quelle épreuve.

3) Les Psaumes nous enseignent à être plus équilibrés dans notre adoration.

L’adoration dans les Psaumes consiste à reconnaître Dieu tel qu’Il est, parce qu’on s’est d’abord reconnu devant
Dieu tel qu’on est. Par exemple, la grandeur de Dieu n’est pas seulement affirmée en tant que telle dans les
Psaumes, mais elle est souvent amplifiée en contraste avec la fragilité et l’indignité humaine.

L’adoration authentique du cœur suppose qu’on porte un regard réaliste sur soi-même, sur notre situation et sur
Dieu. Ainsi, les Psaumes ne nous encouragent pas à nier la réalité, à nier le péché ou à faire abstraction des
épreuves qu’on vit pour se forcer à louer Dieu d’une façon qui serait déconnectée de nos émotions réelles. Au
contraire, les Psaumes nous encouragent à utiliser ces épreuves comme un véhicule pour entrer dans la présence
de Dieu.

En lisant et en relisant les Psaumes, on voit qu’ils mènent ultimement à l’adoration, mais en passant par des
chemins variés comme l’incompréhension, le doute, l’adversité, la maladie ou même la prise de conscience de la
gravité de son péché. Il peut en être ainsi pour notre prière, pour notre adoration et pour notre vie entière. Parfois,
seul le feu de l’épreuve pourra convenablement nous préparer à adorer Dieu.

Conclusion

Dieu Se cherche des adorateurs. Cependant, malgré nos meilleures intentions, les mots nous manquent souvent
pour exprimer ce qu’on ressent réellement, pour intercéder auprès de Dieu ou pour rendre justice à Sa grandeur.
C’est là que les Psaumes nous viennent en aide… Les Psaumes ont été rédigés par des « adorateurs agréés ».
David était un homme selon le cœur de Dieu. Étudions et chérissons donc les Psaumes pour enrichir notre
vocabulaire spirituel et prenons exemple sur l’attitude de cœur des psalmistes.

Je nous laisse sur une citation de Martin Luther: « Quiconque commence à prier les Psaumes, sérieusement et
régulièrement, ne tardera pas à abandonner ces autres petites prières faciles et pieuses, en avouant qu’elles n’ont
pas la saveur, la force, la chaleur et le feu que je trouve dans les Psaumes. »

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