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« Le Christ que nous connaissons peu : tel aurait pu être le titre du
livre de Dane Ortlund pour beaucoup de croyants, même mûrs.
Le Christ de nos sermons, de nos prières, de notre salut, nous le
percevons comme plus austère et réservé que chaleureux et affec-
tueux. Certes, il bénit les enfants et pleure sur Lazare, son ami,
avant de le ressusciter. Toutefois, nous ne l’imaginons pas aussi
humble, aussi bon (même lorsque nous péchons) et aussi proche
de nous, du moins pas comme Dane Ortlund le décrit. Puisant
principalement aux sources de la théologie puritaine et réformée,
l’auteur met en relief l’extraordinaire proximité de Jésus avec son
peuple en peignant des analogies révélatrices. Comment n’y avons-
nous pas pensé plus tôt ? Dieu merci, il existe des livres comme
celui-ci pour dessiller nos yeux sur des vérités transformatrices
de l’Écriture auxquelles nous restons trop longtemps aveugles ! »
Maxime Pierre-Pierre, pasteur, président du Séminaire Baptiste
de Théologie d’Haïti
« ‟Il est tellement fort qu’il peut se permettre d’être doux.” Cette
réplique d’un vieux film ne se résume pas à un romantisme
mièvre, si l’on considère la précision théologique et l’amour
pastoral avec lesquels Dane Ortlund décrit le cœur de Dieu
rempli d’amour pour ceux qui sont faibles, fatigués, captifs du
péché et du désespoir. Le savoir transmis dans Doux et humble
de cœur forme véritablement un fleuve coulant du trône de
Dieu, par l’intermédiaire des grands pasteurs du passé, jusque
dans un ministère précieux et puissant, adapté à notre époque. »
Bryan Chapell, pasteur principal de la Grace Presbyterian Church
à Peoria, dans l’Illinois
« Après quelques pages à peine, j’ai reconnu à quel point ce livre
sort de l’ordinaire et est essentiel, en ce sens qu’il nous dépeint
le cœur même de Christ. Ce livre nous étonne par l’abondance
et le pouvoir de l’amour de Christ pour nous. Aussi saisissant
que thérapeutique, il compte déjà parmi les meilleurs livres
que j’ai lus. »
Sam Allberry, apologiste et conférencier ; auteur des livres Dieu
est-il homophobe ? et 7 mensonges sur le célibat
« C’est l’un des meilleurs livres que j’ai lus dans ma vie ! »
Mark Dever, pasteur principal, Capitol Hill Baptist Church,
Washington, D.C. ; président du ministère 9Marks
Dane Ortlund
Édition originale en anglais sous le titre :
Gentle and Lowly: The Heart of Christ for Sinners and Sufferers
Copyright © 2020 par Dane C. Ortlund
Publié par Crossway, un ministère de Good News Publishers
1300 Crescent Street, Wheaton, IL 60187, U.S.A.
Traduit et publié avec permission. Tous droits réservés.
ISBN :
978-2-925131-26-7 (broché)
978-2-925131-27-4 (eBook)
978-2-925131-25-0 (livre audio)
Sauf mention contraire, les citations bibliques sont tirées de la Nouvelle Édition
de Genève (Segond, 1979) de la Société Biblique de Genève. Avec permission.
À Hope
Luc 18.16
Comme un père, il nous épargne
Notre faible vase il connaît bien
Dans sa main, doucement il nous tient
Il nous sauve de tous nos ennemis
– Henry Francis Lyte, 1834
Table des matières
Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
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Doux et humble de cœur
Épilogue.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 227
Remerciements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229
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Introduction
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Doux et humble de cœur
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Introduction
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Doux et humble de cœur
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Doux et humble de cœur
Il reste que nous entendons Jésus nous livrer son cœur dans
un seul passage – peut‑être les paroles les plus merveilleuses que
des lèvres humaines aient jamais exprimées :
Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous don-
nerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instruc-
tions, car je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez le
repos pour vos âmes. Car mon joug est doux, et mon fardeau léger
(Mt 11.28‑301).
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Son cœur même
fait de chacun de nous l’être humain qu’il est. Le cœur est la force
motrice de la vie. C’est qui nous sommes3.
Et lorsque Jésus nous parle de ce qui lui sert de moteur, de ce
qui est la stricte vérité à son sujet, il nous révèle qu’il est doux et
humble de cœur.
Qui aurait pu inventer un tel Sauveur ?
�
« Je suis doux… »
Le mot grec ici rendu par « doux » n’apparaît que trois autres
fois dans le Nouveau Testament : dans la première béatitude, disant
que « les débonnaires » hériteront la terre (Mt 5.5) ; dans la pro-
phétie de Matthieu 21.5 (citant Zacharie 9.9), disant que le Roi
Jésus « vient à toi ; plein de douceur, et monté sur un âne » ; dans
l’exhortation que Pierre adresse aux femmes pour les encourager
à chérir plus que toute autre chose « la parure intérieure et cachée
dans le cœur, la pureté incorruptible d’un esprit doux et paisible »
(1 Pi 3.4). Débonnaire. Doux. Jésus n’a pas la gâchette facile. Il
n’est ni dur, ni réactionnaire, ni irascible. Il est la personne la plus
compréhensive de l’univers. Il est dans sa nature profonde non pas
d’accuser les gens, mais de leur ouvrir les bras.
« … et humble… »
La signification du mot « humble » chevauche celle du mot
« doux », en ce sens qu’elles communiquent ensemble une seule
et même réalité au sujet du cœur de Jésus. Il faut toutefois
noter que, dans le Nouveau Testament, le mot grec rendu par
« humble » ne désigne généralement pas l’humilité en tant que
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Doux et humble de cœur
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Son cœur même
peut‑être même plus encore que vous, que vous trouviez du repos,
que vous sortiez de la tempête.
« Doux et humble. » Voilà le cœur même de Christ, selon son
propre témoignage. C’est qui il est. Tendre. Ouvert. Accueillant.
Conciliant. Compréhensif. Bien disposé. Si l’on nous demandait
de ne décrire qu’un seul trait de Jésus, nous serions fidèles à ses
enseignements en le disant doux et humble.
Si Jésus avait son site Web personnel, on y lirait en gros sous
la rubrique « À mon sujet » : doux et humble de cœur.
�
Il ne se présente cependant pas ainsi à tous. C’est ce qu’il est
pour ceux qui viennent à lui, qui prennent son joug sur eux, qui
lui crient à l’aide. Le paragraphe précédant cette parole de Jésus
nous indique comment il traite les impénitents : « Malheur à toi,
Chorazin ! malheur à toi, Bethsaïda ! […] au jour du jugement,
le pays de Sodome sera traité moins rigoureusement que toi »
(Mt 11.21,24). L’expression « doux et humble » ne signifie pas « mou
et servile ».
Le péché, la faiblesse, l’insécurité, le doute, l’anxiété et l’échec
du pénitent ne l’emportent jamais sur le cœur doux de Christ.
Jésus n’agit pas simplement à l’occasion avec douceur et humilité.
Il est la douceur incarnée. Il a le cœur d’un Dieu doux. Il ne peut
pas plus perdre de sa douceur envers les siens que vous et moi ne
pouvons changer la couleur de nos yeux. Nous sommes ainsi faits.
La vie chrétienne exige inéluctablement du labeur (1 Co 15.10 ;
Ph 2.12,13 ; Col 1.29). Jésus l’a lui‑même affirmé clairement dans
l’Évangile selon Matthieu (5.19,20 ; 18.8,9). Dans Matthieu 11,
Jésus promet « le repos de l’âme » et non « le repos du corps ». Il
reste que toute l’œuvre chrétienne découle d’une communion avec
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Doux et humble de cœur
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Son cœur même
�
Nous ne pensons pas intuitivement à Jésus‑Christ de cette
façon. En se penchant sur Matthieu 11, le pasteur anglais
Thomas Goodwin, ayant vécu au xviie siècle, nous aide à mieux
comprendre les paroles de Jésus.
Nous projetons sur Jésus ce que nous dicte notre instinct faussé
sur le fonctionnement du monde. La nature humaine nous amène
à penser que plus une personne est riche, plus elle a tendance
à mépriser les pauvres. Plus une personne est belle, plus celles
qui sont laides la rebutent. Et sans même nous en rendre compte,
nous présumons en silence que quelqu’un d’aussi élevé et d’aussi
exalté que Jésus a forcément lui aussi du mal à s’approcher de gens
méprisables et sales comme les pécheurs. Certes, Jésus s’approche
de nous, nous le concédons, mais en se pinçant le nez. Après tout,
ce Christ ressuscité, « Dieu l’a souverainement élevé », et à son
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Doux et humble de cœur
Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donne-
rai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions,
car je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez le repos pour
vos âmes. Car mon joug est doux, et mon fardeau léger (Mt 11.28‑30).
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Doux et humble de cœur
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Son cœur en action
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Doux et humble de cœur
�
Mais qu’en est‑il de l’aspect plus sévère de Jésus ?
J. I. Packer a écrit un jour qu’« une demi‑vérité déguisée en
entière vérité devient une complète fausseté2 ». Il s’agit d’un sujet
particulièrement délicat quand on parle de la révélation de Christ
dans la Bible. Les hérésies de l’Église qui ont émergé au fil de son
histoire ne sont pas de fausses représentations de Jésus, mais sim-
plement des concepts erronés. Les controverses christologiques
des premiers siècles appuient toute la doctrine chrétienne fonda-
mentale, à l’exception d’un élément crucial : parfois la véritable
humanité de Christ, d’autres fois sa véritable divinité. En parlant
du cœur de Christ, risquons‑nous de négliger sa colère ? De priver
Christ d’une facette de sa personnalité au profit de l’autre ?
Il se peut que pour beaucoup d’entre nous le danger soit plus
subtil que celui de céder à une hérésie manifeste. Nous pouvons
être pleinement orthodoxes dans notre théologie, mais nous atta-
cher plus à un aspect de Jésus qu’à un autre, et ce, pour toutes
sortes de raisons. Il est possible que certains d’entre nous aient
grandi dans un environnement régi par des règles strictes qui leur
procurait le sentiment étouffant de ne jamais être à la hauteur. Ils
se sentent attirés surtout par la grâce et la miséricorde de Christ.
Il se peut que d’autres aient grandi dans le chaos le plus total et
trouvent la structure et l’ordre propres à une vie morale selon les
2. J. I. Packer, A Quest for Godliness: The Puritan Vision of the Christian Life,
Wheaton, Ill., Crossway, 1990, p. 126.
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Son cœur en action
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Doux et humble de cœur
�
Nous allons ainsi plus en profondeur que si nous disions sim-
plement que Jésus est amour, miséricorde ou grâce. Voici le témoi-
gnage cumulatif des quatre Évangiles : quand Jésus‑Christ voit la
déchéance du monde qui l’entoure, sa plus profonde inclination,
son instinct le plus naturel, le pousse vers ce péché et cette souf-
france, au lieu de l’en éloigner.
Une façon de voir les choses consiste à les examiner en fonc-
tion de la catégorisation de ce qui est pur ou impur dans l’Ancien
Testament. En termes bibliques, ces catégories ne concernent géné-
ralement pas l’hygiène corporelle, mais la pureté morale. Il est
impossible de les dissocier complètement, mais elles concernent
avant tout la pureté morale ou éthique. Cela est évident en ce que
la solution à l’impureté ne résidait pas dans le fait de prendre un
bain, mais dans celui d’offrir un sacrifice (Lé 5.6). Le problème
ne tenait pas à la saleté, mais à la culpabilité (Lé 5.3). Les Juifs de
l’Ancien Testament se soumettaient donc à un système sophistiqué
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Son cœur en action
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Doux et humble de cœur
�
Mais cela, c’était quand Jésus vivait ici‑bas. Qu’en est‑il
aujourd’hui ?
Rappelons‑nous le témoignage du Nouveau Testament :
« Jésus‑Christ est le même hier, aujourd’hui, et éternellement »
(Hé 13.8). Le même Christ qui a pleuré au tombeau de Lazare
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Son cœur en action
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Le bonheur de Christ
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Doux et humble de cœur
�
Un médecin compatissant se rend au cœur de la jungle afin
d’apporter des soins médicaux à une tribu primitive luttant contre
une maladie contagieuse. Il fait venir son équipement par avion. Il
diagnostique correctement le problème et obtient les antibiotiques
nécessaires, qu’il met à la disposition de la tribu. Étant financière-
ment autonome, il n’a nul besoin qu’on le rémunère. En revanche,
lorsqu’il s’apprête à offrir ses soins, les malades s’y refusent. Ils
veulent se soigner eux‑mêmes. Ils veulent guérir selon leurs propres
conditions. Finalement, quelques jeunes hommes courageux
acceptent de recevoir les soins qui leur sont offerts gratuitement.
Que ressent alors le médecin ?
De la joie.
Sa joie augmente proportionnellement au nombre de malades
qui viennent à lui pour obtenir de l’aide et la guérison. C’est pré-
cisément pour cette raison qu’il est venu auprès d’eux.
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Le bonheur de Christ
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Doux et humble de cœur
Et cela nourrit dans son cœur l’intérêt et l’amour qu’il voue à ses
enfants ici‑bas, ainsi que son désir de les rafraîchir constamment3.
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Le bonheur de Christ
nous nous privons non seulement d’un grand réconfort, mais nous
privons aussi Christ du sien. Il vit précisément dans ce but. C’est
ce qu’il se plaît tant à faire. Sa joie et la nôtre correspondent.
�
Mais cette notion est‑elle biblique ?
Considérons Hébreux 12. L’auteur dit de Jésus qu’il « suscite
la foi et la mène à la perfection ; en échange de la joie qui lui était
réservée, il a souffert la croix, méprisé l’ignominie, et s’est assis à
la droite du trône de Dieu » (v. 2).
« [En] échange de la joie. » Quelle joie ? Qu’est‑ce qui attendait
Jésus de l’autre côté de la croix ?
La joie de voir son peuple être pardonné.
Rappelez‑vous tout le sujet de l’épître aux Hébreux : Jésus est
le Souverain Sacrificateur ayant mis fin à la succession des prin-
cipaux sacrificateurs, qui a accompli le sacrifice expiatoire final
servant à couvrir entièrement les péchés de son peuple afin que ce
dernier reçoive « parfaitement » son pardon (7.25). Et n’oubliez pas
le message que l’auteur veut transmettre à la fin d’Hébreux 12.2,
quand il déclare que Jésus s’est assis à la droite de Dieu. Ailleurs,
l’auteur de l’épître aux Hébreux s’explique :
Le point capital de ce qui vient d’être dit, c’est que nous avons un
tel souverain sacrificateur, qui s’est assis à la droite du trône de la
majesté divine dans les cieux (8.1).
[Lui], après avoir offert un seul sacrifice pour les péchés, s’est assis
pour toujours à la droite de Dieu (10.12).
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Doux et humble de cœur
Dans tous ces passages, l’auteur associe le fait que Jésus est assis
à la droite de Dieu avec son œuvre expiatoire et sacerdotale. Le
sacrificateur faisait le pont entre Dieu et l’humanité. Il rétablissait
la connexion entre le ciel et la terre. C’est ce que Jésus a accompli
au suprême degré par le sacrifice inégalable et ultime de sa per-
sonne, purifiant ainsi son peuple une fois pour toutes, le lavant
de ses péchés. C’est la joyeuse anticipation de voir son peuple être
purifié de manière irrévocable qui l’a accompagné tout au long de
son arrestation, sa mort, son ensevelissement et sa résurrection.
Lorsque nous participons aujourd’hui à son œuvre expiatoire – en
venant à Christ pour obtenir son pardon, en communiant avec lui
malgré notre état de pécheur, nous nous approprions la joie et le
désir les plus profonds de Christ même.
Cette notion s’apparente à d’autres passages du Nouveau
Testament, comme la joie que la repentance d’un pécheur produit
dans le ciel (Lu 15.7) ou le désir ardent de Christ de partager la joie
de ses disciples lorsqu’ils demeurent dans son amour (Jn 15.11 ;
17.13). Il souhaite que nous puisions de la force dans son amour,
mais les seuls qui en sont capables sont les pécheurs ayant besoin
d’un amour immérité. Par ailleurs, il ne veut pas simplement que
nous soyons pardonnés. Il nous veut, nous. Comment Jésus parle‑t‑il
de ses désirs les plus profonds ? Comme ceci : « Père, je veux que là
où je suis ceux que tu m’as donnés soient aussi avec moi » (Jn 17.24).
�
Notre cœur incrédule use ici de prudence. N’est-ce pas faire
preuve d’une audace présomptueuse que de puiser inlassablement
dans la miséricorde de Christ ? Ne devrions‑nous pas plutôt nous
montrer modérés et raisonnables, en veillant à ne pas trop profi-
ter de lui ?
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Le bonheur de Christ
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Capable de compassion
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Doux et humble de cœur
LE
CŒUR
de
CHRIST AU CIEL
envers
les pécheurs sur la terre.
ou
UN TRAITÉ
DÉMONTRANT
la disposition empreinte de grâce et les tendres affections de
Christ, dans sa nature humaine maintenant glorifiée, envers
les membres de son corps ayant toutes sortes de faiblesses,
causées par le péché ou les malheurs
J’ai choisi ce verset parce que, mieux que tout autre, il dévoile le
cœur de Christ et son œuvre envers les pécheurs. Ces paroles le
révèlent avec une sensibilité telle qu’elles nous invitent, pour ainsi
dire, à poser les mains sur le cœur de Christ dans la gloire afin de
nous en faire sentir les battements, ainsi que sa vive affection envers
nous. Elles ont manifestement pour but de garder les croyants du
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Capable de compassion
�
Il convient de prendre un certain recul pour voir Hébreux 4.15
dans son contexte plus large :
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Doux et humble de cœur
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Capable de compassion
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Doux et humble de cœur
pensées seraient teintées de bleu. Il n’en est pas ainsi pour Jésus.
Il était sans péché. Il était « saint, innocent, sans tache, séparé
des pécheurs » (Hé 7.26,27). Nous devons néanmoins nous inter-
roger sur le sens de l’expression « en toutes choses » de manière à
appuyer le fait que Jésus était sans péché sans pour autant diluer
la signification de cette expression. Votre grande tentation, votre
épreuve douloureuse, votre terrible perplexité – tout cela, il l’a
connu. D’ailleurs, sa pureté parfaite laisse entendre qu’il a éprouvé
cette souffrance de manière plus cruelle que nous, les pécheurs,
ne pourrions jamais l’éprouver.
�
Considérons notre propre vie.
Lorsqu’une relation tourne mal, qu’un sentiment de futilité
nous envahit, que nous avons l’impression de passer à côté de la vie,
que nous avons le sentiment que notre seule chance de trouver un
sens à notre vie nous a filé entre les doigts, que nous ne parvenons
pas à voir clair dans nos émotions, qu’un ami de longue date nous
tourne le dos, qu’un proche nous trahit, que nous nous sentons
profondément incompris, que les gens importants se moquent de
nous – bref, lorsque la déchéance du monde nous accable et nous
donne envie de baisser les bras – en cet instant même, nous avons
un Ami qui sait précisément ce que nous ressentons pour l’avoir
lui‑même vécu, qui se tient à nos côtés et qui nous étreint. Il est
avec nous. Voilà ce qu’est la solidarité !
Notre intuition nous pousse à croire que, plus notre vie devient
difficile, plus nous sommes seuls. Plus nous nous enfonçons dans
la souffrance, plus notre sentiment d’isolement s’en trouve accru.
Or, la Bible nous reprend à ce sujet. Notre souffrance n’excède
jamais celle que Jésus partage. Nous ne sommes jamais seuls. Il
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Capable de compassion
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Doux et humble de cœur
5. John Owen, « An Exposition of the Epistle to the Hebrews », dans The Works of
John Owen, vol. 21, W. H. Goold, éd., réimpr., Édimbourg, Banner of Truth, 1968, p. 422.
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L’indulgence de Christ
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Doux et humble de cœur
�
Hébreux 5 poursuit le raisonnement que nous avons entamé
dans le chapitre précédent, où nous avons examiné les derniers ver-
sets d’Hébreux 4. Nous nous sommes alors intéressés à la façon dont
le cœur de Christ l’amène à se montrer solidaire avec son peuple
souffrant et en détresse. Dans Hébreux 5.2, nous nous arrêterons
à une vérité plus poussée : la manière dont il traite son peuple,
vers qui son cœur le porte. Nous étudierons le rôle sacerdotal de
Christ en deux volets : la nature dans 4.15 et la méthode dans 5.2.
Et quelle est cette nature ?
L’indulgence.
La racine grecque de l’expression « avoir de la compréhension »
(de l’indulgence) dans 5.2 est la même que celle de « compatir »
dans 4.15, un fait qui a probablement retenu l’attention des premiers
auditeurs et lecteurs de l’épître aux Hébreux ; ce qui n’est pas le cas
en français. De plus, nous trouvons dans les deux passages la répéti-
tion du verbe grec dunamai, d’ailleurs dans la même forme verbale,
ainsi qu’une mention répétée de « faiblesse » (une notion sur laquelle
nous reviendrons dans le présent chapitre). Permettez‑moi de vous
donner les deux expressions translittérées de sorte que vous puissiez
saisir le sens du parallèle que les premiers auditeurs auraient relevé :
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L’indulgence de Christ
�
Pour qui a‑t‑il de la compréhension ? Assurément pour ceux
dont la faiblesse est raisonnable et modérée – réservant une réponse
plus dure aux pécheurs invétérés.
Une lecture attentive du passage biblique ne nous permet
toutefois pas d’en venir à cette conclusion. « Il peut avoir de la
compréhension pour les ignorants et les égarés. » Ces ignorants
et ces égarés ne sont pas deux genres de pécheurs plus tolérables,
par comparaison avec des pécheurs moins tolérables. Non, il s’agit
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Doux et humble de cœur
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L’indulgence de Christ
2. Je fais ici référence à l’édition publiée par la maison Banner of Truth, Édimbourg,
1968. La maison d’édition Crossway est en train de préparer une nouvelle édition critique
des œuvres d’Owen qu’elle compte étaler sur 30 volumes.
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Doux et humble de cœur
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L’indulgence de Christ
�
Mais pourquoi ? Pourquoi Christ a‑t‑il de la compréhension
pour nous ?
Le passage biblique nous dit : « [puisque] la faiblesse est aussi
son partage ».
Dans une perspective immédiate, cette proposition évoque
la souveraineté sacerdotale en général. Cela est évident d’après le
verset suivant, qui indique que le principal sacrificateur doit offrir
un sacrifice pour ses propres péchés (5.3), ce que Jésus n’avait
pas à faire (7.27). N’oublions toutefois pas ce que nous avons vu
quelques versets auparavant dans 4.15 : Jésus lui‑même, étant
« sans péché », peut « compatir à nos faiblesses » (le même mot
grec que dans 5.2) puisqu’il a « été tenté comme nous en toutes
choses ». Le péché est inexistant en Jésus. Cependant, il a connu
la gamme entière des expériences humaines dans notre monde
déchu : la souffrance, la tentation et les limitations humaines (voir
aussi 2.14‑18). Les divers principaux sacrificateurs mentionnés
dans l’histoire d’Israël étaient faibles en raison de leurs péchés ;
Jésus, le Souverain Sacrificateur, a connu la faiblesse, mais sans
pécher (voir aussi 2 Co 13.4).
Contrairement à ce à quoi nous pourrions nous attendre, plus
nous nous enfonçons dans la faiblesse, la souffrance et l’épreuve,
plus Christ se montre solidaire avec nous. Tandis que nous des-
cendons dans la souffrance et l’angoisse, nous pénétrons toujours
plus dans le cœur même de Christ, au lieu de nous en éloigner.
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Doux et humble de cœur
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6
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Doux et humble de cœur
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Je ne mettrai pas dehors
�
Bunyan établit tous ces faits, et plus encore. Il vaut la peine de
lire son livre du début à la fin1. Ce sont toutefois sur les mots « je
ne mettrai pas dehors » qu’il s’étend le plus, ceux qui comptent le
plus pour lui. Dans ce livre, Bunyan affronte par‑dessus tout nos
doutes innés quant au cœur même de Christ. Il écrit ceci :
1. Il existe en un seul volume, publié par Banner of Truth : Come and Welcome to
Jesus Christ, Édimbourg, Banner of Truth, 2004 ; on peut le trouver aussi dans le volume 1
du livre The Works of John Bunyan, 3 vol., George Offor, éd., réimpr., Édimbourg, Banner
of Truth, 1991, p. 240‑299.
67
Doux et humble de cœur
sinon pour faire voler en éclats toutes les objections des pécheurs
venant à Christ, s’ils n’étaient pas enclins à prêter foi à de telles
objections, au grand découragement de leur âme.
Le Seigneur Jésus fait cette promesse à la fois pour réfuter
toutes les objections et pour affermir la foi mêlée d’incrédulité. Et
elle est, pour ainsi dire, la somme de toutes les promesses divines ;
en outre, il vous sera impossible d’avancer une quelconque objec-
tion quant à votre propre indignité à laquelle cette promesse ne
réponde pas.
2. Bunyan, « Come and Welcome to Jesus Christ », dans The Works of John Bunyan,
vol. 1, p. 279‑280.
68
Je ne mettrai pas dehors
69
Doux et humble de cœur
�
Pour fermer la bouche aux discoureurs, Bunyan termine
ainsi la liste des objections que nous émettons pour ne pas venir
à Jésus : « Dieu nous a donné cette promesse afin de réfuter
toutes les objections possibles, ce qu’il fait d’ailleurs. » Affaire
classée. Nous ne pouvons avancer aucune raison pour laquelle
Christ finirait par refuser d’ouvrir son cœur à ses propres brebis.
Rien ne va en ce sens. Tout ami humain a ses limites. Si nous
le vexons un peu trop, si la relation se détériore un peu trop,
si nous le trahissons trop souvent, il nous rejettera. Un mur
s’érigera entre nous. Or, dans le cas de Christ, nos péchés et
nos faiblesses mêmes nous rendent admissibles en sa présence.
Il nous suffit de venir à lui – d’abord lors de notre conversion
et des milliers de fois par la suite jusqu’à ce que nous soyons
avec lui à notre mort.
Il se peut que ce ne soient pas tant leurs péchés que leurs
souffrances qui poussent certains d’entre nous à douter de la per-
sévérance du cœur de Christ. À mesure que la douleur augmente,
que l’abattement s’installe, que les mois passent, la conclusion
devient évidente à un moment donné : nous avons été jetés dehors.
Ce ne serait sûrement pas l’impression que la vie donnerait à
celui qui s’immerge dans le cœur d’un Sauveur doux et humble,
n’est-ce pas ? Jésus ne dit toutefois pas qu’il ne mettra pas dehors
ceux qui ont la vie facile. Il dit plutôt qu’il ne mettra pas dehors
70
Je ne mettrai pas dehors
ceux qui viennent à lui. Ce n’est pas ce que la vie nous apporte,
mais celui à qui nous appartenons qui fait que le cœur de Christ
est rempli d’amour pour nous.
La seule exigence à remplir pour jouir de cet amour consiste
à venir à Christ. À lui demander de nous accueillir. Il ne dit pas :
« Celui qui vient à moi suffisamment contrit » ni : « Celui qui vient
à moi en redoublant d’efforts ». Il dit plutôt : « Je ne mettrai pas
dehors celui qui vient à moi. »
La force de notre détermination ne s’inscrit pas dans la for-
mule consistant à nous assurer de sa bonne volonté. Lorsque
mon petit Benjamin de deux ans entre dans la piscine à pente
douce située près de notre maison, il me prend instinctivement
la main. Il s’y agrippe tandis que le niveau de l’eau monte. Il
reste que la prise d’un enfant de deux ans n’est pas très forte.
Avant longtemps, ce n’est plus lui qui m’agrippe, mais moi qui
l’empoigne. S’il ne pouvait compter que sur ses propres forces,
sa main glisserait certainement hors de la mienne. Cependant,
si j’ai résolu de ne pas lui lâcher la main, il est en sécurité. Il ne
peut m’échapper, quand bien même il le voudrait.
Ainsi en va‑t‑il de Christ. Certes, nous nous cramponnons
à lui. Nous avons toutefois la préhension d’un enfant de deux
ans pris dans les puissantes vagues de la vie. La main de Christ
demeure sûre. Le Psaume 63.9 exprime d’ailleurs cette double
vérité : « Mon âme est attachée à toi ; ta droite me soutient. »
�
Nous parlons ici de quelque chose de plus profond que la
doctrine de la sécurité éternelle, ou « sauvé un jour, sauvé tou-
jours » – une doctrine glorieuse, une doctrine véridique – que
l’on appelle parfois la persévérance des saints. Nous en venons
71
Doux et humble de cœur
72
Je ne mettrai pas dehors
73
7
Ce qu’évoquent
nos péchés
75
Doux et humble de cœur
76
Ce qu’évoquent nos péchés
�
Il se peut que cette réalité nous fasse grimacer. Si Christ est
d’une sainteté parfaite, ne doit‑il pas forcément se distancier
du péché ?
Nous nous trouvons ici devant l’un des mystères les plus pro-
fonds entourant l’identité de Dieu en Christ. Non seulement la sain-
teté et l’impiété sont-elles mutuellement exclusives, mais Christ,
étant parfaitement saint, connaît et ressent l’horreur et le poids du
péché plus profondément que quiconque parmi nous, pécheurs, le
pourrait. Plus un homme a le cœur pur, plus il est horrifié à l’idée
qu’on vole ou maltraite son prochain. À l’inverse, plus un homme
a le cœur corrompu, moins le mal qui l’entoure l’affecte.
77
Doux et humble de cœur
78
Ce qu’évoquent nos péchés
79
Doux et humble de cœur
�
Nous nous arrêterons à une série de passages de l’Ancien
Testament plus loin dans le livre, mais considérons celui-ci dès
maintenant, car il réunit plusieurs notions auxquelles nous réflé-
chissons dans le présent chapitre, en nous faisant pénétrer en pro-
fondeur dans le cœur de Dieu qui prend la forme concrète de Jésus.
Nous lisons ceci dans le livre d’Osée :
80
Ce qu’évoquent nos péchés
nous devons user de prudence. Dieu est Dieu. Il n’est donc pas à la
merci d’émotions passagères comme nous le sommes en tant que
créatures, et encore bien moins en tant que pécheurs. Mais que nous
dit le passage ? La Bible nous donne un rare aperçu de ce qui réside
au centre de l’identité de Dieu, et nous voyons et sentons frémir son
cœur même. Son cœur se gonfle de pitié et de compassion pour ses
enfants. Dieu ne peut tout simplement pas renoncer à eux. Rien ne
pourrait le pousser à les abandonner. Ils lui appartiennent.
Quel père se résoudrait à donner son fils chéri en adoption sim-
plement parce que la vie de ce dernier est un échec monumental ?
Ne déshonorons pas Dieu en soulignant sa transcendance
au point de perdre de vue la vie émotionnelle de Dieu à laquelle
nos propres émotions correspondent, même si cette analogie est
déchue et altérée5. Dieu n’est pas un idéal platonique, des plus
austères, inatteignable pour les êtres humains. Dieu est libre de
81
Doux et humble de cœur
�
Nous vivons aussi facilement avec une perception déformée du
cœur compatissant de Dieu pour ceux qui sont en Christ qu’avec
82
Ce qu’évoquent nos péchés
83
8
Il sauve parfaitement
85
Doux et humble de cœur
86
Il sauve parfaitement
Son cœur l’attire tout autant à son peuple maintenant qu’au cours
de sa vie incarnée. Par ailleurs, son intercession constante en faveur
de ce dernier témoigne de ses affections envers lui.
�
Qu’est‑ce que l’intercession ?
D’une manière générale, elle signifie qu’une tierce personne
vient se placer entre deux autres et plaide devant l’une en faveur
de l’autre. Pensez à un parent qui plaide devant un professeur en
faveur de son enfant ou à un agent qui plaide devant une franchise
sportive en faveur d’un athlète.
Que signifie donc le fait d’intercéder dans le cas de Christ ? Qui
sont les parties concernées ? Dieu le Père, d’un côté, et nous, les
croyants, de l’autre. Mais pourquoi Jésus devrait‑il intercéder pour
nous ? Après tout, n’avons‑nous pas déjà été entièrement justifiés ?
Qu’y a‑t‑il à plaider en notre faveur ? Christ n’a‑t‑il pas déjà fait
tout le nécessaire pour nous acquitter complètement ? Autrement
dit, la doctrine de l’intercession céleste de Christ implique‑t‑elle
que son œuvre expiatoire sur la croix demeure inachevée ? Si nous
parlons de l’œuvre accomplie de Christ à la croix, la doctrine de
l’intercession laisse‑t‑elle entendre que cette œuvre a été incom-
plète en réalité ?
À vrai dire, l’intercession met en œuvre ce que l’expiation a
accompli. L’actuelle intercession de Christ en notre faveur reflète
la plénitude et la victoire de son œuvre terrestre, et non le fait
qu’il manquerait quoi que ce soit à cette dernière. L’expiation a
accompli notre salut ; l’intercession constitue l’application, ins-
tant par instant, de cette œuvre expiatoire. Dans le passé, Jésus a
accompli ce dont il parle actuellement ; dans le présent, Jésus parle
de ce qu’il a alors accompli. Voilà d’ailleurs pourquoi le Nouveau
87
Doux et humble de cœur
88
Il sauve parfaitement
89
Doux et humble de cœur
ardent que d’épancher son cœur plein d’amour pour nous devant le
Père. Par son intercession, Christ relie notre cœur à celui du Père.
�
Le verset sur lequel Bunyan a fait porter son livre intitulé Christ
a Complete Saviour, Hébreux 7.25, constitue peut‑être le verset
clé dans tout le Nouveau Testament au sujet de la doctrine de
l’intercession de Christ. Après avoir réfléchi au sacerdoce éternel
que Christ exerce pour nous, l’auteur de l’épître en vient à cette
conclusion :
C’est aussi pour cela qu’il peut sauver parfaitement ceux qui s’ap-
prochent de Dieu par lui, étant toujours vivant pour intercéder en
leur faveur.
90
Il sauve parfaitement
que Jésus est capable de « sauver à peu près ceux qui viennent à Dieu
par lui ». Le salut que Christ nous procure est toutefois panteles, en
ce sens qu’il est exhaustif. Selon le fil de pensée d’Hébreux 7, l’au-
teur semble se concentrer plus particulièrement sur la dimension
temporelle du salut. Puisque Jésus « demeure éternellement » et qu’il
« possède un sacerdoce » n’étant pas transmissible (v. 24), contrai-
rement aux sacrificateurs précédents qui sont tous morts (v. 23),
Christ « peut sauver parfaitement ». Nous appartenons pour toujours
à la famille de Dieu et jouirons éternellement de ses bonnes grâces.
Nous avons tous tendance à croire que le pardon de Dieu
ne peut pas atteindre tous les recoins de notre vie. Nous nous
disons entièrement pardonnés. Et nous croyons sincèrement que
nos péchés sont pardonnés. Pour la plupart, en tout cas. Il reste
néanmoins toujours une sphère profonde et sombre de notre vie,
même de notre vie actuelle, qui semble intraitable, laide et irrécu-
pérable. Le mot « parfaitement » dans Hébreux 7.25 signifie que le
pardon, la rédemption, le toucher restaurateur de Dieu atteignent
jusqu’aux brèches les plus sombres de notre âme, là où notre honte
et notre défaite sont les pires. Plus encore : c’est dans ces brèches
remplies de péché que l’amour de Christ se répand le plus. Son
cœur l’y fait aller volontiers. Son cœur l’y pousse le plus fortement.
Il nous connaît parfaitement et nous sauve parfaitement parce que
son cœur l’attire parfaitement à nous. Nous ne pouvons, malgré
nos péchés, nous soustraire à ses tendres soins.
Mais comment le savons‑nous ? Le verset à l’étude nous l’in-
dique : « C’est aussi pour cela qu’il peut sauver parfaitement ceux
qui s’approchent de Dieu par lui, étant toujours vivant pour inter-
céder en leur faveur. » C’est en raison de l’intercession de Christ
que nous savons qu’il nous sauvera parfaitement.
Voici ce que cela veut dire. Le Fils divin présente sans cesse
(remarquez le mot « toujours ») sa vie, sa mort et sa résurrection
91
Doux et humble de cœur
�
On néglige de nos jours la doctrine de l’actuelle intercession
de Christ. C’est dommage, car il s’agit d’une vérité réconfortante
92
Il sauve parfaitement
93
9
Un avocat
95
Doux et humble de cœur
Mes petits enfants, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez
point. Et si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père,
Jésus‑Christ le juste.
�
Le mot grec rendu par « avocat » (parakletos) dans 1 Jean 2.1
est employé cinq fois dans le Nouveau Testament. Les quatre autres
se trouvent dans le discours de la chambre haute, rapporté dans
Jean 14 – 16, chaque fois en référence au ministère du Saint‑Esprit
après l’ascension de Jésus au ciel (14.16,26 ; 15.26 ; 16.7). Il est dif-
ficile de rendre tout le sens de parakletos par un seul mot français.
La diversité des traductions bibliques témoigne de cette difficulté,
y compris « Avocat » (NEG, BFC, COL), « Défenseur » (BDS, S21),
« quelqu’un d’autre pour vous aider » (PDV) et « Paraclet » (TOB).
Bon nombre de ces traductions renferment une note de bas de page
proposant d’autres équivalents (par ex. : soutien, aide, assistant,
intercesseur), démontrant ainsi la difficulté de rendre parakletos
96
Un avocat
1. < https://www.grand-dictionnaire-latin.com/dictionnaire-latin-francais.
php?lemma=ADVOCATUS100 > (page consultée le 10 mars 2021).
97
Doux et humble de cœur
�
Examinons de plus près la différence qui existe entre l’inter-
cession de Christ et sa défense, en remarquant la différence qu’il
y a entre Hébreux 7.25 et 1 Jean 2.1. Hébreux 7.25 dit que Christ
vit toujours pour intercéder en notre faveur, alors que 1 Jean 2.1
dit : « Et si quelqu’un a péché, nous avons un avocat. »
Voyez‑vous la différence ? Christ intercède constamment pour
nous tandis qu’il nous défend lorsque la situation l’exige. De toute
évidence, il intercède en notre faveur compte tenu de notre impiété
globale, mais il prend notre défense lorsque nous commettons des
péchés précis. Voici comment Bunyan l’explique :
98
Un avocat
�
Considérez votre propre vie. Que pensez‑vous de l’attitude
que Jésus adopte relativement au recoin sombre de votre vie que
vous seul connaissez ? Votre alcoolisme. Vos fréquents accès de
colère. Vos pratiques douteuses en affaires. Votre désir invétéré de
plaire à tout le monde qui passe pour de la gentillesse, mais que
99
Doux et humble de cœur
100
Un avocat
Christ nous a rachetés au prix de son sang, mais ce n’est pas tout ;
Christ le Chef a vaincu la mort et le tombeau pour nous, mais ce
n’est pas tout ; Christ le Sacrificateur intercède pour nous au ciel,
mais ce n’est pas tout. Le péché demeure en nous, et avec nous, et
souille tout ce que nous faisons, que notre action soit religieuse ou
101
Doux et humble de cœur
civile ; car non seulement nos prières et nos sermons, notre écoute
et nos prédications, mais aussi nos maisons, nos boutiques, nos
commerces et nos lits sont tous souillés par le péché.
Et le diable, notre adversaire le jour et la nuit, n’a de cesse de
rapporter nos mauvaises actions à notre Père, en insistant pour qu’en
conséquence ce dernier nous déshérite à tout jamais.
Mais que pourrions‑nous faire maintenant, si nous n’avions pas
d’Avocat ; en effet, si nous n’avions personne pour défendre notre
cause ; en effet, si nous n’avions personne pour triompher du mal
et exécuter fidèlement ces fonctions pour nous ? Rien d’autre que
de mourir.
Mais puisqu’il nous a secourus, imposons‑nous le silence4.
102
10
La beauté du cœur
de Christ
103
Doux et humble de cœur
Il n’y a d’amour plus grand ni plus merveilleux que celui qui est dans
le cœur de Christ. Il se fait une joie d’user de miséricorde ; il est prêt
à prendre en pitié ceux qui souffrent et qui éprouvent des chagrins ;
il se plaît à faire le bonheur de ses créatures. L’amour et la grâce que
Christ a manifestés surpassent tout ce qu’il y a dans ce monde de la
même manière que la lumière du soleil surpasse celle d’une bougie.
Les parents sont souvent remplis de bonté pour leurs enfants, mais
cette dernière ne saurait se comparer à celle de Jésus‑Christ.
�
Revenons sur ce que dit Edwards : « Il n’y a d’amour plus grand
ni plus merveilleux que celui qui est dans le cœur de Christ. »
Tout être humain est naturellement attiré par la beauté. Elle
nous captive. Edwards en était tout à fait conscient et il voyait
104
La beauté du cœur de Christ
105
Doux et humble de cœur
106
La beauté du cœur de Christ
�
Avons‑nous considéré la beauté du cœur de Christ ?
Il se peut que cette beauté ne constitue pas un attribut qui
nous vienne naturellement à l’esprit lorsque nous pensons à Christ.
Peut‑être pensons‑nous à Dieu et à Christ en fonction de la vérité,
et non de la beauté. Or, la raison pour laquelle nous aspirons à
préserver la saine doctrine est que nous cherchons à préserver la
beauté de Dieu, de la même manière que nous ajustons l’objectif
d’un appareil photo dans le but de capter avec précision toute la
beauté de ce que nous photographions.
Laissez Jésus vous attirer à lui par la beauté de son cœur. Ce
cœur réprimande l’impénitent avec toute la dureté appropriée,
mais accueille celui qui se repent avec plus d’ouverture que nous
pourrions le concevoir. Ce cœur nous conduit dans les verts pâtu-
rages de l’amour ressenti de Dieu. Ce cœur a attiré les méprisés
et les laissés pour compte à ses pieds, où ils se sont abandonnés à
l’espoir. Ce cœur est parfaitement équilibré ; il ne réagit jamais de
façon excessive, ne cherche jamais d’excuses, ne réprime jamais
avec sévérité. Ce cœur se porte vers les misérables et submerge
ceux qui souffrent d’une grande consolation : celle de savoir qu’il
partage leur souffrance. Ce cœur est doux et humble.
Accueillez donc le cœur non seulement doux, mais également
charmant de Jésus. Si je peux m’exprimer ainsi, soyez épris de Jésus.
Songez à son cœur quand vous méditez sur lui. Laissez‑vous char-
mer par ses attraits. Pourquoi ne pas enrichir votre vie de calme
en adoptant, parmi tant d’autres, la discipline de la contemplation
qui vous permettra d’admirer l’éclat de sa nature, de ses motifs
profonds et de ce qui fait sa joie ? Pourquoi ne pas accorder plus
de place à votre âme en vue de laisser Christ vous charmer encore
et toujours ?
107
Doux et humble de cœur
�
Nous ne pouvons clore le présent chapitre sans nous remémorer
les enfants qui font partie de notre vie. Jonathan Edwards a dit ceci
aux enfants qu’il connaissait : « Il n’y a d’amour plus grand ni plus
merveilleux que celui qui est dans le cœur de Christ. » Comment
pourrions‑nous l’imiter à notre façon et à notre époque ?
De quoi ont besoin les enfants que nous croisons dans les cou-
loirs de notre église ? De quoi ont‑ils le plus besoin ? Oui, ils ont
besoin d’amis, d’encouragements et d’une aide aux études, ainsi que
de repas nutritifs. Mais se peut‑il que leur besoin le plus réel – ce
qui les soutiendra et leur donnera de l’élan quand bien même aucun
autre de leurs besoins vitaux ne serait comblé – consiste à savoir
reconnaître toute la beauté de Jésus et ce qu’il ressent à leur égard ?
Parents, quelle responsabilité devons‑nous assumer envers
nos enfants ? Nous pourrions proposer une centaine de bonnes
réponses à cette question. Il reste que notre tâche consiste essen-
tiellement à montrer à nos enfants que même notre amour le plus
profond n’est que le reflet d’un amour encore plus profond. Nous
108
La beauté du cœur de Christ
109
11
La vie émotionnelle
de Christ
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Doux et humble de cœur
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La vie émotionnelle de Christ
Calvin : « De même que le Fils de Dieu s’est revêtu de notre chair,
il s’est aussi revêtu volontiers de nos sentiments humains, afin de
ne différer en rien de ses frères, à la seule exception du péché2. »
B. B. Warfield (1851‑1921), le grand théologien de Princeton, a
écrit en 1912 un célèbre essai intitulé « On the Emotional Life of Our
Lord » (Sur la vie émotionnelle de notre Seigneur). Dans cet essai, il
explore ce que les Évangiles révèlent au sujet de la vie intérieure de
Christ, ce que Warfield appelle sa vie « émotionnelle ». Warfield ne
veut pas dire ce que nous entendons souvent par le mot émotion-
nel – à savoir, déséquilibré, réactionnaire, mu par des sentiments
malsains. Il ne fait que remarquer ce que Jésus ressentait. Et en
réfléchissant aux émotions de Christ, Warfield souligne souvent
le fait que ses émotions émanent des profondeurs de son cœur.
Que voyons‑nous donc dans les Évangiles au sujet de la vie
émotionnelle de Jésus ? À quoi ressemble une vie émotionnelle
empreinte de piété ? Il s’agit d’une part d’une vie intérieure par-
faite quant à l’équilibre, aux proportions et à la maîtrise ; mais qui
d’autre part nourrit aussi de profonds sentiments.
Warfield se penche sur diverses émotions que Jésus manifeste
dans les Évangiles. Il explore deux d’entre elles, la compassion et la
colère, d’une manière qui enrichit notre étude du cœur de Christ.
�
Voici comment Warfield amorce son étude de certaines émo-
tions propres à la vie de Christ :
2. Jean Calvin, Sur l’Évangile selon Saint Jean, Paris, Ch. Meyrueis, 1854, adap-
tation libre.
113
Doux et humble de cœur
114
La vie émotionnelle de Christ
115
Doux et humble de cœur
�
Et il n’y a pas que la compassion. À quoi ressemblerait une
colère parfaite ?
Voilà peut‑être la contribution clé de l’essai novateur de
Warfield, qui pourrait bien faire naître une question importante
dans votre esprit au cours de la présente étude sur le cœur de
Christ. À savoir, en quoi cet accent sur le cœur de Christ, son cœur
doux et humble, sa profonde compassion, est‑il compatible avec
les épisodes de colère rapportés dans les Évangiles ? En insistant
sur sa douceur, n’abordons‑nous pas la question d’un point de vue
arbitraire ? Christ n’est‑il pas aussi capable de colère ?
Considérons ce que dit Warfield alors qu’il se penche sur
la colère de Jésus. Après avoir noté que la perfection morale
implique non seulement de faire la distinction entre le bien et le
mal, mais aussi de se laisser attirer par l’un et rebuter par l’autre,
il explique ceci :
116
La vie émotionnelle de Christ
117
Doux et humble de cœur
118
La vie émotionnelle de Christ
Autrement dit, Christ s’est bel et bien mis en colère, ce qui est
encore le cas aujourd’hui, du fait qu’il est l’être humain parfait,
qui aime trop pour rester indifférent. Et cette juste colère reflète
son cœur, sa tendre compassion. Puisque son cœur éprouve cette
tendre compassion, c’est lui qui se met le plus rapidement en colère
et qui ressent la colère la plus passionnée –, et cela, sans jamais
commettre le moindre péché.
Dans les Évangiles, la meilleure description de la juste colère
de Christ se trouve dans Jean 11.33 et 38, où l’état intérieur de
Jésus est présenté comme une fureur profonde devant la mort de
Lazare. « Jésus s’est approché du tombeau de Lazare dans un état
non pas de chagrin incontrôlable, mais de colère irrépressible.
[…] L’émotion qui lui transperçait la poitrine et qui exigeait de se
manifester était pure fureur8. » Warfield poursuit en considérant
le rôle que joue l’épisode de Lazare dans l’ensemble de l’Évangile
selon Jean. Remarquez la manière dont il fait le lien avec le cœur
de Christ :
Une fureur inextinguible se saisit de lui. […] C’est la mort qui fait
l’objet de sa colère, et derrière la mort celui qui a le pouvoir de la
donner, celui qu’il est venu dans le monde pour détruire. Il se peut
que des larmes de sympathie lui montent aux yeux, mais ce fait
est accessoire. La fureur envahit son âme. […] La résurrection de
Lazare devient ainsi non pas un miracle isolé, mais […] une occa-
sion marquante et le symbole évident de la victoire de Jésus sur la
mort et l’enfer.
Ce que Jean fait pour nous […] c’est de nous dévoiler le cœur
de Jésus, tandis qu’il nous acquiert le salut. Jésus châtie en notre
faveur non pas avec indifférence, mais avec une colère enflammée
contre son ennemi juré. Il ne s’est pas limité à nous sauver des maux
119
Doux et humble de cœur
qui nous oppriment, mais qui plus est, il a ressenti et partagé notre
oppression, et sous l’impulsion de ces sentiments, il a accompli
notre rédemption9.
�
Si Christ se montre un lion envers l’impénitent, il est un agneau
envers celui qui se repent – celui qui est amoindri, qui fait preuve
d’ouverture, qui a soif, qui se confesse, qui est effacé. Il hait d’une
juste haine tout ce qui vous tourmente. Rappelez‑vous qu’Ésaïe 53
parle de Christ comme portant nos souffrances et se chargeant de
nos douleurs (v. 4). Non seulement a-t‑il été puni à notre place,
subissant quelque chose que nous ne subirons jamais (la condam-
nation), mais encore il souffre avec nous, subissant ce que nous
subissons nous‑mêmes (les mauvais traitements). Lorsque vous
êtes affligé, il l’est aussi. Lorsque vous êtes en détresse, il l’est aussi.
Êtes‑vous en colère ? Ne vous empressez pas de la juger impie.
Après tout, la Bible nous commande de nous mettre en colère
lorsque la situation l’exige (Ps 4.5, BDS ; Ép 4.26, BDS). Peut‑être
avez‑vous de bonnes raisons d’être en colère. Peut‑être a‑t‑on
péché contre vous et que la seule réaction appropriée soit la colère.
Consolez‑vous, Jésus partage votre colère. Il se joint à vous dans
votre colère. En outre, il est plus en colère que vous ne pourriez
l’être devant le tort qui vous est causé. Votre juste colère n’est qu’un
reflet de la sienne. Et sa colère, contrairement à la vôtre, n’est aucu-
nement entachée par le péché. En vous remémorant ceux qui vous
ont causé du tort, laissez Jésus se mettre en colère à votre place. Sa
colère est justifiée, car elle découle de sa compassion pour vous.
9. Warfield, The Person and Work of Christ, p. 117. Voir aussi le commentaire de
Calvin, qui donne explicitement tort à Augustin et qui s’accorde à l’avance avec Warfield
au sujet du caractère pleinement humain des émotions de Christ dans Jean 11 : Calvin,
Commentaire sur l’Évangile selon Saint Jean, tome 1.
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La vie émotionnelle de Christ
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12
Un tendre ami
123
Doux et humble de cœur
Press, 2009.
124
Un tendre ami
Luc 15. Ces personnes se sentent bien avec lui. Elles sentent qu’il
y a quelque chose de différent chez lui. D’autres les tiennent à
distance, mais Jésus les attire en leur offrant l’espoir. Au fond, ce
qu’il fait, c’est les attirer à son cœur.
�
Considérez votre propre cercle relationnel. Il ne fait aucun
doute que vous pourriez tracer des cercles concentriques et y placer
vos amis selon leur proximité de vous. Il y a des gens dont nous
connaissons le nom, mais qui sont en réalité en périphérie de nos
affections. D’autres sont plus près du centre, mais peut‑être sans
être des amis intimes. Certains d’entre nous sont bénis d’avoir
un ou deux amis particulièrement proches, qui les connaissent
véritablement et qui les comprennent, des gens avec qui il fait bon
être. Nous placerions ces personnes près du centre. À beaucoup
d’entre nous, Dieu a donné un mari ou une femme pour meilleur
ami ou meilleure amie terrestre.
Pour d’autres, bien entendu, cette simple pensée s’avère dou-
loureuse. Certains d’entre nous sont forcés de reconnaître qu’ils
n’ont pas de véritable ami, une personne à qui confier n’importe
quel problème, sachant qu’elle ne leur tournera pas le dos. Avec
qui nous sentons‑nous vraiment en sécurité – assez pour par-
ler de tout ?
Voici la promesse de l’Évangile et le message de toute la Bible :
en Jésus‑Christ, nous avons un ami qui se plaira toujours en notre
présence plutôt que de s’y refuser. Il s’agit d’un compagnon dont
l’accueil ne s’améliore ni ne se détériore selon que nous sommes
purs ou impurs, attrayants ou révoltants, fidèles ou vacillants. Sur
le plan subjectif, son amitié est aussi stable et ferme que l’est notre
justification sur le plan objectif.
125
Doux et humble de cœur
126
Un tendre ami
�
Non seulement un véritable ami vous accompagne, mais encore
il vous permet de l’accompagner. De plus, il s’ouvre à vous sans
rien retenir. Avez‑vous déjà remarqué le point particulier que Jésus
soulève en appelant ses disciples « amis » dans Jean 15 ? À l’ap-
proche de sa crucifixion, Jésus leur dit : « Je ne vous appelle plus
serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ;
mais je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître
tout ce que j’ai appris de mon Père » (Jn 15.15).
Les amis de Jésus sont ceux à qui il a confié ses desseins les plus
secrets. Jésus dit qu’il ne transmet pas à ses disciples une partie de
ce que le Père lui a dit, mais plutôt la totalité. Il ne leur cache rien.
Il les laisse entrer dans toutes ses confidences. Les amis de Jésus
3. Thomas Goodwin, « Of gospel Holiness in the Heart and Life, dans The Works
of Thomas Goodwin, 12 vol., réimpr., Grand Rapids, Mich., Reformation Heritage,
2006, vol. 7, p. 197.
4. Sibbes, « Bowels Opened », vol. 2, p. 34.
127
Doux et humble de cœur
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Un tendre ami
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Doux et humble de cœur
les amis jouissent entre eux se retrouvent aussi entre Christ et nous.
Bref, il interagit avec nous en tant que personne. Jésus ne constitue
pas l’idée de l’amitié, de manière abstraite ; c’est un véritable ami.
�
Il serait cruel de suggérer que l’amitié humaine perd sa perti-
nence lorsque Christ se lie d’amitié avec une personne. Dieu nous
a créés de telle sorte que nous communions, dans l’union de deux
cœurs, avec d’autres personnes. Il arrive à tout le monde de se
sentir seul – y compris aux introvertis.
Cependant, l’amour que Christ nous porte signifie qu’il sera
notre ami infaillible, et ce, quelles que soient les amitiés dont nous
jouissons ou non ici‑bas. Il nous offre une amitié qui atténuera
notre douloureuse solitude. Même si cette douleur ne disparais-
sait pas entièrement, l’amitié beaucoup plus profonde de Jésus
la rendra tout à fait supportable. Il marche constamment avec
nous. Il connaît la douleur que nous inflige la trahison d’un ami,
mais il ne nous trahira jamais. Il n’ira même jamais jusqu’à nous
accueillir tièdement. Cela irait à l’encontre de sa nature. Son cœur
n’est pas ainsi fait.
Son amitié est aussi douce qu’elle est constante en toute situation.
[…] Si d’autres amis nous déçoivent, comme ce sera peut‑être le cas,
cet ami ne nous décevra jamais. Si nous n’avons jamais honte de
lui, il n’aura jamais honte de nous. Combien notre vie serait belle si
nous puisions tout le réconfort qu’il est possible d’obtenir dans ce
titre d’ami ! Il s’agit d’une amitié bienfaisante, féconde et éternelle8.
8. Idem. Goodwin offre un riche traitement de l’amitié divine, mais n’en parle
que du point de vue de l’amitié avec Dieu, et non précisément de l’amitié avec Christ.
C’est pourquoi j’en ai fait abstraction dans le présent chapitre. « Gospel Holiness », dans
Works, vol. 7, p. 186‑213, surtout les p. 190‑197 ; voir aussi p. 240.
130
13
Pourquoi l’Esprit ?
131
Doux et humble de cœur
132
Pourquoi l’Esprit ?
de l’entendre dire qu’il nous aime ; c’en est une autre de ressentir
son amour. Voilà justement l’œuvre glorieuse de l’Esprit !
�
Dans Jean 14 – 16, Jésus explique l’œuvre de l’Esprit comme
étant un prolongement de sa propre œuvre. Et il dit qu’il bénira
plus encore son peuple en lui envoyant l’Esprit après être monté
au ciel. Remarquez attentivement le fil de la pensée de Jésus en ce
sens dans Jean 16 :
Maintenant je m’en vais vers celui qui m’a envoyé, et aucun de vous
ne me demande : Où vas‑tu ? Mais, parce que je vous ai dit ces choses,
la tristesse a rempli votre cœur. Cependant je vous dis la vérité : il
vous est avantageux que je m’en aille, car si je ne m’en vais pas, le
consolateur ne viendra pas vers vous ; mais, si je m’en vais, je vous
l’enverrai (Jn 16.5‑7).
133
Doux et humble de cœur
seul ami, qui vit en nous deux, et qui vient de nous deux, le
Saint‑Esprit, et je vous l’enverrai entre‑temps. […] Ce sera un
meilleur Consolateur pour vous que je ne le serais. […] Il vous
consolera mieux que je ne pourrais le faire par ma présence. » En
quoi l’Esprit est‑il un Consolateur plus excellent pour le peuple de
Dieu ? « Si vous l’écoutez sans l’attrister, il vous rappellera simple-
ment mon amour. […] Toutes les paroles qu’il adressera à votre
cœur serviront à me magnifier, à accroître ma valeur et mon amour
à vos yeux, et il en fera ses délices2. » Goodwin explique ensuite le
lien qui nous unit au cœur de Christ :
�
Avez‑vous déjà envisagé ce rôle particulier du Saint‑Esprit ?
N’oubliez pas que l’Esprit est une Personne. Par exemple, il
est possible de l’attrister (És 63.10 ; Ép 4.30). Qu’en serait‑il si nous
le traitions comme une personne ? À quoi cela ressemblerait‑il
de nous ouvrir à l’amour de Christ et de le ressentir comme s’il
s’agissait de flammes par lesquelles le Saint‑Esprit nous réchauffe le
134
Pourquoi l’Esprit ?
135
Doux et humble de cœur
136
14
«
C e qui nous vient à l’esprit lorsque nous pensons à Dieu est
la chose la plus importante à notre propre sujet. » C’est
ainsi qu’A. W. Tozer commence son livre intitulé The Knowledge
of the Holy1. La présente étude a pour but de rendre plus juste
notre image mentale de l’identité de Dieu. Je cherche à nous
aider à laisser derrière nous nos perceptions naturelles déchues
selon lesquelles Dieu serait distant et parcimonieux, ainsi qu’à
en venir à la prise de conscience libératrice du fait qu’il est doux
et humble de cœur.
Notre étude se concentre toutefois sur le Fils de Dieu. Qu’en
est‑il du Père ? Pour reprendre l’affirmation de Tozer, devrions‑nous
percevoir le Fils comme doux et humble, mais le Père autrement ?
Le présent chapitre répondra à cette question.
137
Doux et humble de cœur
�
Les grands courants de la théologie protestante classique nous
ont toujours amenés à comprendre que l’œuvre du Fils faisait valoir
la justice de Dieu et satisfaisait sa colère. Ce n’est pas d’abord à titre
d’exemple moral, pour vaincre Satan ou manifester son amour que
Christ a vécu, est mort et est ressuscité d’entre les morts. L’œuvre
du Fils, surtout sa mort et sa résurrection, a suprêmement satisfait
la juste colère du Père contre l’horrible rébellion de l’humanité.
Sa colère a été assouvie.
Cela ne veut pas dire que la disposition du Père à l’égard de
son peuple diffère de celle de son Fils. Les chrétiens ont tendance à
s’imaginer, dans une certaine mesure, que le Père est moins enclin
à aimer et à pardonner que ne l’est son Fils.
Or, ce n’est pas ce qu’enseigne la Bible.
Quelle compréhension avons‑nous donc du fait que la colère
qui habitait le Père devait être satisfaite et que le Fils a fait le néces-
saire à cette fin ? Cela laisse‑t‑il entendre que le Père et le Fils sont
différemment disposés envers nous ?
Le secret consiste à comprendre que, pour que les pécheurs
soient déclarés non coupables et jouissent à nouveau de la faveur
du Père, sa colère devait être apaisée. Cependant, que sur le plan de
ses désirs et de ses affections propres, il souhaitait tout autant que
le Fils que cette expiation se produise. Objectivement, le Père était
celui qui avait besoin d’être apaisé ; subjectivement, son cœur ne
formait qu’un avec celui du Fils. Nous aurions tort de fusionner ce
qu’il est sur le plan subjectif avec ce qu’il devait exiger sur le plan
objectif. Les puritains disaient souvent que le Père et le Fils étaient
d’accord, de toute éternité, pour racheter ensemble un peuple de
pécheurs. Les théologiens en parlent comme du pactum salutis, à
savoir « le pacte de la Rédemption », désignant ainsi ce que le Dieu
138
Le Père des miséricordes
�
Le « Père des miséricordes ». Dans l’introduction de
2 Corinthiens, Paul nous ouvre une fenêtre sur ce qui venait à sa
pensée lorsqu’il réfléchissait à Dieu.
Oui, le Père est juste. D’une justice indéfectible et éternelle. En
l’absence d’une telle doctrine, d’une telle assurance, nous n’aurions
aucun espoir de voir un jour tous les torts être redressés. Mais
comment décrire son cœur ? Qu’est‑ce qui jaillit des tréfonds de
son être ? Qu’est‑ce qu’il engendre ? Des miséricordes.
139
Doux et humble de cœur
Son amour envers nous n’est pas forcé, comme s’il nous le vouait
simplement parce que le Père lui a commandé de nous épouser.
Non, il s’agit de sa nature, de ses dispositions envers nous […] Il est
par nature ainsi disposé à notre égard. Autrement, il ne serait pas
140
Le Père des miséricordes
141
Doux et humble de cœur
�
Qu’est‑ce qui devrait nous venir à l’esprit lorsque nous pen-
sons à Dieu ? Le Dieu trinitaire est composé de trois Personnes,
une fontaine d’infinies miséricordes s’étendant à nous dans nos
nombreux besoins, échecs et égarements, pour nous combler. Voilà
qui il est, tout autant le Père que le Fils.
Au‑delà de ce dont nous sommes conscients en toute situa-
tion, les tendres soins du Père nous enveloppent de douceur jusque
dans les moindres détails de notre vie. Il ordonne souverainement
l’angle particulier du flottement de la feuille qui tombe de l’arbre
et la brise qui l’en a détachée (voir Mt 10.29‑31), et il ordonne
5. Goodwin, Works, vol. 2, p. 187‑188. Voir aussi Goodwin, Works, vol. 2, p. 180,
citant également 2 Corinthiens 1.3 : « Il est la source de toute miséricorde, si bien que
celle‑ci lui est aussi naturelle qu’il est naturel pour un père d’engendrer des enfants. »
142
Le Père des miséricordes
143
Doux et humble de cœur
6. John Flavel, Keeping the Heart: How to Maintain Your Love for God, Fearn,
Écosse, Christian Heritage, 2012, p. 57.
144
15
145
Doux et humble de cœur
�
Aucun autre livre de la Bible ne joint une émotion profonde à
une complexité littéraire de manière aussi frappante que celui des
Lamentations. Son auteur parle à cœur ouvert, se lamentant sur la
destruction de Jérusalem par les Babyloniens, en 587 av. J.‑C. ainsi
que les horreurs de la famine, de la mort et du désespoir qui se sont
ensuivies. Il se livre au fil d’une série de cinq poèmes richement
structurés reflétant un soin littéraire extrême. Pour le voir, il suffit
de considérer sa versification dans la bible française. Même si l’on n’a
numéroté les chapitres et les versets que de nombreux siècles après
la rédaction du livre des Lamentations, ces divisions dans nos bibles
modernes reflètent néanmoins les divisions nettes de ce livre. Vous
remarquerez que, des cinq chapitres, les deux premiers et les deux
derniers comptent chacun vingt‑deux versets. Le chapitre 3, celui
du milieu, en compte trois fois plus, à savoir soixante‑six. Chaque
chapitre constitue en soi une lamentation soigneusement construite.
1. Le mot grec rendu par « douceur » dans Matthieu 21.5, qui cite la prophétie de
Zacharie 9.9 selon laquelle « ton roi vient à toi […] il est humble et monté sur un âne »,
est le même (praus) employé dans Matthieu 11.29, où Jésus dit être « doux ».
2. Jean Calvin, Institution de la religion chrétienne, Aix-en-Provence/Charols,
France, Kerygma/Excelsis, 2009, 2.11.1‑12.
146
Son œuvre « distinctive » et son œuvre « étrange »
Car ce n’est pas volontiers qu’il humilie et qu’il afflige les enfants
des hommes.
147
Doux et humble de cœur
�
Dans le livre des Lamentations, la Bible nous conduit jusqu’aux
profondeurs du cœur de Dieu. Celui qui règne sur toutes choses et
qui les décrète suscite l’affliction dans notre vie avec une certaine
réticence divine. Il ne se montre pas réticent par rapport au bien
ultime que cette souffrance procurera ; c’est justement pour cette
raison qu’il agit de la sorte. C’est toutefois avec une certaine répu-
gnance qu’il impose cette affliction. La souffrance en soi ne reflète
pas son cœur. Dieu n’est pas une force platonique tirant des ficelles
comme s’il était indifférent à la souffrance et à l’angoisse véritables
qu’il nous inflige. Si je peux m’exprimer ainsi, il vit – sans remettre
en question ses perfections divines – un conflit intérieur lorsqu’il
nous envoie l’affliction. Dieu a effectivement puni les Israélites pour
leurs infidélités lors de l’invasion de la ville par les Babyloniens. Il
leur a envoyé ce qu’ils méritaient. C’est néanmoins leur restauration
miséricordieuse qui lui tenait le plus à cœur :
Goodwin l’explique ainsi :
148
Son œuvre « distinctive » et son œuvre « étrange »
Mes frères, même si Dieu est juste, on peut dire que sa miséricorde
lui est à certains égards plus naturelle que tous les actes de justice
qu’il accomplit ; je parle ici d’une justice vengeresse. Ces actes de
justice manifestent un attribut divin, en ce sens qu’il rend aux
pécheurs la monnaie de leur pièce. En agissant ainsi, il se fait
néanmoins violence pour ainsi dire, selon les Écritures ; il y a dans
cette justice quelque chose lui étant contraire. « Je ne souhaite
pas la mort du pécheur » – c’est‑à‑dire que je ne m’en réjouis pas
pour le simple plaisir de m’en réjouir. […] Lorsqu’il accomplit des
actes de justice, ce n’est pas dans le but de juger seulement, mais
aussi pour arriver à des fins nobles. Quelque chose en lui s’oppose
au jugement.
En revanche, quand il s’agit d’user de miséricorde, de démontrer
qu’elle est conforme à sa nature et à sa disposition, la Bible dit qu’il
le fait de tout cœur. La miséricorde ne lui répugne en rien. L’acte
lui plaît en soi. Il n’en éprouve aucune réticence.
Dans Lamentations 3.33, lorsqu’il parle de punir les Israélites,
l’auteur dit donc : « Car ce n’est pas volontiers qu’il humilie et qu’il
afflige les enfants des hommes. » Toutefois, lorsqu’il parle d’user de
miséricorde, il dit que Dieu le fait « de tout [son] cœur et de toute
[son] âme », comme il l’exprime dans Jérémie 32.41. Voilà d’ail-
leurs pourquoi, dans Ésaïe 28.21, on appelle ses actes de justice son
« œuvre étrange » et son « travail inouï ». Cependant, quand il s’agit
de manifester sa miséricorde, il se réjouit de faire du bien de tout
son cœur et de toute son âme3.
149
Doux et humble de cœur
150
Son œuvre « distinctive » et son œuvre « étrange »
151
Doux et humble de cœur
�
En lisant et en méditant cet enseignement provenant de
grands théologiens d’autrefois comme Jonathan Edwards et
Thomas Goodwin, nous devons comprendre qu’ils n’appellent
pas le jugement l’œuvre « étrange » de Dieu parce qu’ils se font
une idée atténuée de la colère et de la justice de Dieu.
Edwards doit sa célébrité surtout à son sermon intitulé « Sinners
in the Hands of an Angry God » (Des pécheurs entre les mains
d’un Dieu en colère), une description terrifiante de l’état précaire de
l’impénitent subissant la colère divine – bien qu’elle ne soit pas aussi
terrifiante que dans certains autres de ses sermons, comme « The
Justice of God in the Damnation of Sinners » (La justice divine
152
Son œuvre « distinctive » et son œuvre « étrange »
153
Doux et humble de cœur
154
16
L’Éternel, l’Éternel
Q ui est Dieu ?
Si nous pouvions choisir un seul passage de l’Ancien
Testament pour répondre à cette question, il serait difficile de trou-
ver mieux qu’Exode 34. Dieu s’y révèle à Moïse, faisant passer sa
gloire devant ce dernier, qu’il a mis dans le creux d’un rocher
(33.22). Au moment critique, voici ce qui se produit :
155
Doux et humble de cœur
�
À quoi vous fait penser l’expression « la gloire de Dieu » ?
Imaginez‑vous l’immensité de l’univers ? Une voix tonitruante et
terrifiante provenant du ciel ?
156
L’Éternel, l’Éternel
157
Doux et humble de cœur
(« l’Éternel » ou « Je suis »). Les tout premiers mots. Les deux seuls
mots que Jésus emploiera pour décrire son propre cœur sont doux
et humble (Mt 11.29). Et les deux premiers mots dont Dieu se sert
pour se décrire sont miséricordieux et compatissant. Dieu ne révèle
pas sa gloire comme suit : « L’Éternel, l’Éternel, exigeant et précis »,
ou : « L’Éternel, l’Éternel, tolérant et qui ferme les yeux sur le mal »,
ou encore : « L’Éternel, l’Éternel, déçu et contrarié ». Sa plus grande
priorité, ce qui lui plaît le plus et sa première réaction, c’est de se mon-
trer miséricordieux et compatissant. Il s’accommode avec douceur
de nos conditions plutôt que de nous déconcerter par les siennes.
Il est « lent à la colère ». L’expression hébraïque signifie litté-
ralement « au nez long ». Imaginez un taureau furieux, qui piaffe,
qui respire bruyamment et dont les narines sont dilatées. Il serait,
pour ainsi dire, « au nez court ». Or, l’Éternel a le nez long. Il n’a
pas le doigt sur la détente. Il faut le provoquer sur une longue
période pour susciter sa colère. Contrairement à nous, dont le
barrage émotionnel est souvent prêt à se rompre, Dieu est capable
d’en encaisser beaucoup. Voilà d’ailleurs pourquoi l’Ancien
Testament parle de Dieu en indiquant des dizaines de fois que
son peuple a « excité sa colère » (surtout dans Deutéronome ;
1 et 2 Rois ; Jérémie). Mais nulle part la Bible ne nous dit que
l’on a « excité son amour » ou « excité sa miséricorde ». Sa colère
requiert une provocation ; sa miséricorde est latente, prête à jail-
lir. Nous avons tendance à nous dire que la colère divine bondit
comme un ressort et que la miséricorde divine est lente à se
former. Or, c’est tout le contraire. La miséricorde divine est prête
à jaillir à la moindre incitation2. (Dans le cas des êtres humains
déchus que nous sommes, c’est l’inverse, comme nous l’indique
le Nouveau Testament. Nous devons nous exciter mutuellement à
158
L’Éternel, l’Éternel
159
Doux et humble de cœur
�
Voilà qui est Dieu. Voilà, selon son propre témoignage, l’es-
sence même de son cœur. L’asymétrie d’Exode 34.6,7 nous étonne.
La miséricorde et la bonté y occupent une place importante ;
le châtiment y est reconnu, mais presque comme une question
secondaire nécessaire. En commentant ce passage, John Owen
a affirmé ce qui suit :
3. John Owen, « An Exposition of the Epistle to the Hebrews », dans The Works of
John Owen, W. H. Goold, éd., vol. 25, réimp., Édimbourg, Banner of Truth, 1965, p. 483.
160
L’Éternel, l’Éternel
4. Richard Sibbes, « The Excellency of the Gospel Above the Law », dans The Works of
Richard Sibbes, A. B. Grosart, éd., 7 vol., Édimbourg, Banner of Truth, 1983, vol. 4, p. 245.
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Doux et humble de cœur
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L’Éternel, l’Éternel
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Doux et humble de cœur
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Doux et humble de cœur
166
Ses voies ne sont pas nos voies
Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas
mes voies, dit l’Éternel. Autant les cieux sont élevés au‑dessus de
la terre, autant mes voies sont élevées au‑dessus de vos voies, et
mes pensées au‑dessus de vos pensées.
Que dit Dieu ? Il nous indique qu’il est impossible, avec notre
ancien regard, de voir les expressions de sa miséricorde. Notre
perception même de Dieu doit changer. Que dirions‑nous à un
enfant de sept ans qui, venant de recevoir un cadeau d’anniver-
saire de la part de son père aimant, se met immédiatement à fouil-
ler dans sa tirelire à la recherche de quoi le rembourser ? Quelle
souffrance pour ce père ! Cet enfant devrait changer sa perception
concernant l’identité de son père et ce qu’il est ravi de faire.
La nature déchue du cœur humain nous incline à la récipro-
cité, au donnant‑donnant, à l’égalité, à l’équilibre de la balance.
Nous sommes beaucoup plus légalistes que nous en sommes
conscients. Quelque chose de sain et de glorieux est bien sûr
enfoui dans cette impulsion – ayant été créés à l’image de Dieu,
nous préférons l’ordre et l’équitabilité au chaos. En revanche,
notre chute désastreuse dans le péché a corrompu cette impulsion,
167
Doux et humble de cœur
168
Ses voies ne sont pas nos voies
�
Jean Calvin – le théologien que l’on connaît le mieux pour ses
enseignements sur la divine providence – comprenait qu’Ésaïe 55
ne concernait pas vraiment la divine providence. Il a fait remar-
quer que certains interprétaient l’expression « mes pensées ne
sont pas vos pensées » comme constituant une pure distanciation
entre Dieu et nous, illustrant l’énorme gouffre entre la divinité
sacrée et l’humanité profane. Or, Calvin considérait que le pas-
sage empruntait en fait une direction diamétralement opposée.
Il y a en effet une grande distance entre Dieu et nous ; nous
entretenons une vision étriquée au sujet du cœur de Dieu, mais
il sait que son cœur penche irrévocablement, ouvertement et
invinciblement vers nous.
Voici ce que Calvin dit à ce sujet : « Maintenant, parce qu’il
est difficile d’éliminer la terreur des esprits tremblants, Ésaïe tire
tout argument de la nature de Dieu, qu’il sera prêt à pardonner
et à se réconcilier3. » Puis Calvin se concentre sur l’essentiel de
ce que Dieu nous dit par ce passage. Après avoir déterminé la
fausse interprétation, il affirme ceci :
169
Doux et humble de cœur
170
Ses voies ne sont pas nos voies
�
Le cœur de Dieu empreint de compassion confond nos prédi-
lections intuitives quant au plaisir qu’il prendrait à répondre à ses
enfants s’ils déposaient à ses pieds les ruines et le chaos de leur vie.
Dieu n’est pas comme vous. Même l’amour humain le plus
intense n’est qu’un pâle reflet de l’abondance émanant des cieux.
Ses pensées sincères envers vous transcendent ce que vous pouvez
concevoir. Il a l’intention de vous redonner la splendeur éclatante
pour laquelle vous avez été créé. Et cela ne dépend pas du fait
que vous vous gardiez pur, mais de celui de lui remettre votre
gâchis. Il ne se limite pas à travailler les parties non souillées de
notre être qui subsistent au terme d’une vie de péché. Sa puis-
sance est telle qu’il est capable de racheter les pires dimensions
de notre passé afin d’en faire les dimensions les plus radieuses de
notre avenir. Pour ce faire, nous devons toutefois lui confier ces
sombres malheurs.
Nous savons qu’il sauvera ceux qui ne le méritent pas en raison
de ce que le passage précise par la suite :
Oui, vous sortirez avec joie, et vous serez conduits en paix ; les
montagnes et les collines éclateront d’allégresse devant vous, et tous
les arbres de la campagne battront des mains. Au lieu de l’épine
s’élèvera le cyprès, au lieu de la ronce croîtra le myrte ; et ce sera
pour l’Éternel une gloire, un monument perpétuel, impérissable
(És 55.12,13).
171
Doux et humble de cœur
que les affections de Dieu envers son peuple croissent au fil des
générations, se préparant à émerger lors de la fin de toutes choses.
Notre joyeuse humanité restaurée jaillira avec une telle énergie
spirituelle que la création éclatera elle‑même en chants de célébra-
tion bruyante. Voilà la grande fête que l’ordre créé attend avec un
ardent désir (Ro 8.19), car sa gloire est inséparable de notre gloire
et en dépend tout à la fois (Ro 8.21). Tandis que les fils et les filles
de Dieu entreront dans un avenir aussi sûr qu’immérité, l’univers
sera purifié, et il retrouvera sa splendeur éclatante et sa dignité.
Comment pouvons‑nous en être certains ?
Si ses voies sont élevées au‑dessus de nos voies, elles le sont
en raison de notre incompréhension : nous ignorons à quel point
il lui plaît de s’abaisser jusqu’à nous. Voici d’ailleurs ce que nous
lisons quelques chapitres plus loin dans le livre d’Ésaïe :
Vers qui le cœur de Dieu, celui qui est exalté au plus haut
des cieux, est‑il naturellement attiré, selon Ésaïe 57.15 ? Vers les
humbles. Lorsque Jésus est entré en scène sept siècles après qu’Ésaïe
ait prophétisé que Dieu était « doux et humble », il a prouvé une
fois pour toutes que Dieu se plaît assurément à résider au sein de
la douceur et de l’humilité. Il est ainsi fait. Ses voies ne sont pas
nos voies.
172
18
173
Doux et humble de cœur
Éphraïm est‑il donc pour moi un fils chéri, un enfant qui fait mes
délices ? Car plus je parle de lui, plus encore son souvenir est en
moi ; aussi mes entrailles sont émues en sa faveur : J’aurai pitié de
lui, dit l’Éternel.
174
Des entrailles émues
renferme toute vérité sur toutes choses en tout temps selon une
connaissance constante et parfaite. Le souvenir dont il est question
dans ce cas relève du langage de l’alliance. Il est relationnel. Ce
souvenir ne constitue pas l’alternative à l’oubli, mais à l’abandon.
Puis vient le point saillant du verset clé du cœur du livre de
Jérémie : « [Mes] entrailles sont émues en sa faveur » (« mon cœur
est en émoi », BDS).
�
Dieu parle ici de ses entrailles, bien que certaines traductions
de la Bible utilisent le mot « cœur ». Le mot hébreu lev est généra-
lement employé pour désigner le cœur dans l’Ancien Testament
(comme dans Lamentations 3.21 : « Voici ce que je veux repas-
ser en mon cœur, ce qui me donnera de l’espérance »). Or, dans
Jérémie 31, le mot hébreu employé est meah. Ce dernier désigne
littéralement les entrailles d’une personne, un équivalent français
qui apparaît dans certaines traductions bibliques. Par exemple
dans 2 Samuel 20.10, où il est écrit : « Joab l’en frappa au ventre et
répandit ses entrailles à terre. »
Il va de soi que Dieu n’a pas d’entrailles. C’est sa façon de parler
de son réflexe le plus profond, ses remous intérieurs, ses sentiments
les plus intimes desquels nos émotions sont une image – en un
mot, comme le texte l’indique : son cœur. Calvin nous rappelle que
le terme entrailles ou cœur de Dieu « n’appartient pas proprement
à Dieu », mais ceci n’altère en rien la vérité selon laquelle Dieu
communique réellement par ces expressions « la grandeur de son
amour envers nous1 ».
1. Jean Calvin, < https://www.bibliaplus.org/fr/commentaries/3/commentair
e-biblique-de-jean-calvin/jeremie/31/20 > (page consultée le 18 mars 2021).
175
Doux et humble de cœur
176
Des entrailles émues
177
Doux et humble de cœur
nous, lorsque nos péchés, que nous commettons tant contre Christ
que contre nous‑mêmes, deviendront pour lui le motif d’avoir
d’autant plus pitié de nous2 ?
�
Nous avons tendance à séparer nos péchés de nos souffrances.
Après tout, nous sommes coupables de nos péchés, alors que nos
souffrances (du moins en grande partie) sont imputables à ce
monde que la chute a détruit. Par conséquent, nous avons plus de
mal à nous attendre à ce que Dieu use de douceur et de compassion
envers nos péchés qu’envers nos souffrances. Ne fait‑il aucun doute
que ses affections s’expriment plus librement lorsque l’on pèche
contre moi que lorsque je pèche moi‑même ?
Observez toutefois la logique de Goodwin. Si l’intensité de
l’amour divin correspond à l’intensité du malheur chez l’être
aimé, et si notre impiété constitue notre pire malheur, c’est dire
178
Des entrailles émues
que l’amour le plus ardent de Dieu se répand sur nous dans notre
impiété. Oui, Dieu éprouve de la haine, nous dit Goodwin – pour
le péché. Par ailleurs, la combinaison de l’amour pour nous et de
la haine pour le péché équivaut à la plus grande certitude possible
selon laquelle Dieu nous accordera un jour la libération finale du
péché et nous fera goûter pleinement ses affections empreintes de
joie envers nous.
Le monde a faim d’un amour ardent, un amour qui mène au
souvenir plutôt qu’à l’abandon. Un amour n’étant aucunement lié à
notre charme. Un amour qui s’abaisse jusque dans notre misère. Un
amour plus grand que les ténèbres qui nous enveloppent peut‑être
aujourd’hui même. Un amour duquel même la plus grande histoire
d’amour humaine n’est que le plus faible des murmures.
Et pourtant, bien que Jérémie nous parle du cœur de Dieu,
cela peut sembler si abstrait – subjectif, à l’eau de rose, éthéré.
N’oubliez toutefois pas pourquoi Goodwin passe si facilement
du cœur de Dieu dans le livre de Jérémie au cœur de Christ. Et si
l’abstrait devenait concret ? Et si les affections de Dieu ne descen-
daient pas seulement sur nous depuis le ciel, mais apparaissaient
aussi parmi nous ici‑bas ? Et si nous les voyions non pas chez un
prophète qui en parle, mais chez un prophète qui nous dit être la
Parole de Dieu – l’incarnation de tout ce que Dieu veut nous dire ?
« Mes entrailles sont émues en sa faveur » : si ces paroles de
Jérémie 31.20 devaient se revêtir de chair, à quoi pourraient‑elles
bien ressembler ?
Nous nous le demandons. Elles revêtiraient la forme d’un char-
pentier du Moyen‑Orient en train de restaurer la dignité, l’hu-
manité, la santé et la conscience chez des hommes et des femmes
par le truchement de guérisons, d’exorcismes, d’enseignements,
d’étreintes et du pardon.
179
Doux et humble de cœur
180
19
Riche en miséricorde
181
Doux et humble de cœur
Et quelle est cette raison ? Dieu n’est pas pauvre, mais riche
en miséricorde.
Nulle part ailleurs dans la Bible ne décrit‑on Dieu comme
étant riche en quoi que ce soit. La seule chose dont on le dit riche,
c’est en miséricorde. Que signifie cette affirmation ? Elle veut dire
que Dieu est autrement que nous le croyons naturellement être.
Cela veut dire que la vie chrétienne consiste en un renoncement
continu à nos pensées étriquées au sujet de la bonté de Dieu.
Dans sa justice, Dieu est exigeant ; dans sa miséricorde, Dieu est
généreux. « Il est riche envers tous ; à savoir qu’il est d’une bonté
surabondante, qu’il est bon avec profusion, que sa bonté abonde
en richesse, qu’il est plus que bon1. » Comme l’Ancien Testament
répète le verbe « avoir de la pitié » dans Jérémie 31.20, le Nouveau
Testament dit de Dieu qu’il est « riche en miséricorde ».
Ayant sondé, dans les derniers chapitres, les précurseurs de
Matthieu 11.29 dans l’Ancien Testament, ainsi que ce qui éclate
à chaque tournant des quatre Évangiles, nous revenons mainte-
nant au Nouveau Testament pour les quelques chapitres finaux
du présent livre.
�
Éphésiens 2.4 nous parle du « Dieu, qui est riche en miséri-
corde ». Dieu l’est, il ne le devient pas. Une telle déclaration nous
conduit jusque dans les tréfonds du cœur du Créateur, dans les
lieux très saints, au‑delà du voile intérieur, nous révélant l’être et
la nature mêmes de Dieu. « Il est la source de toute miséricorde
[…] elle lui est naturelle. […] Il s’agit de sa nature et de sa dis-
position, car lorsqu’il manifeste sa miséricorde, il le fait de tout
182
Riche en miséricorde
2. Idem, p. 179.
183
Doux et humble de cœur
lui porter atteinte. […] En effet, son amour est si ardent que, dans
le cas d’une accusation – si à un quelconque moment le péché
survient ou le diable vient proférer des accusations –, elle poussera
Dieu à bénir. Son amour immuable est d’une telle ardeur qu’il saisit
l’occasion pour bénir encore plus3.
3. Idem, p. 176.
4. Idem, p. 170‑180.
184
Riche en miséricorde
�
Parlons premièrement du besoin de la riche miséricorde.
Éphésiens 2.4 n’apparaît pas tout seul. Ce verset marque un tour-
nant dans un puissant fleuve traversant les six chapitres de l’épître
aux Éphésiens. Et voici le passage tout juste en amont de 2.4 :
Vous étiez morts par vos offenses et par vos péchés, dans lesquels
vous marchiez autrefois, selon le train de ce monde, selon le prince
de la puissance de l’air, de l’esprit qui agit maintenant dans les fils
de la rébellion. Nous tous aussi, nous étions de leur nombre, et nous
vivions autrefois selon les convoitises de notre chair, accomplissant
les volontés de la chair et de nos pensées, et nous étions par nature
des enfants de colère, comme les autres… (2.1‑3.)
Christ n’a pas été envoyé pour guérir des âmes brisées, réveil-
ler des endormis, conseiller des gens confus, inspirer ceux qui
s’ennuient, motiver des paresseux ou éduquer des ignorants, mais
pour ramener des morts à la vie.
Considérez l’incidence globale de ces trois versets. Paul ne
parle pas du péché comme nous le faisons souvent : « J’ai gaffé »,
« J’ai fait une erreur », « J’ai du mal à… » ; Paul fusionne le péché
au flot intégral, enveloppant et inexorable de notre vie. Nos péchés
ressemblent moins à un homme en bonne santé qui trébuche à
l’occasion qu’à un homme malade de la tête aux pieds – ou, si nous
prenons au sérieux le langage d’Éphésiens 2, à un mort.
Nous suivions Satan (« le prince de la puissance de l’air »),
même si nous l’ignorions. Non seulement nous cédions aux puis-
sances de l’enfer, mais encore elles nous habitaient – « l’esprit qui
agit maintenant dans les fils de la rébellion ». Nous étions « par
nature des enfants de colère ». Nous méritions la colère divine
du fait même que nous étions ses enfants. Nous ne faisions pas
185
Doux et humble de cœur
186
Riche en miséricorde
�
Parlons deuxièmement de l’incarnation de la riche miséricorde.
La richesse de la miséricorde divine devient réelle pour nous
non seulement lorsque nous voyons à quel point nous sommes par
187
Doux et humble de cœur
188
Riche en miséricorde
me faire plus de mal qu’elle peut lui en faire au ciel6. » Pour que
Dieu annule votre résurrection et mette fin à sa riche miséricorde,
il faudrait que Jésus‑Christ soit lui‑même aspiré hors du ciel et
remis dans le tombeau de Joseph d’Arimathée. Voilà la sécurité
dont vous êtes assuré.
�
Considérez la richesse en miséricorde de Dieu par rapport à
votre propre vie.
Il ne nous rencontre pas à mi‑chemin. Sa nature même le
conduit à affronter la mort et à susciter la vie, et c’est ce qu’il a
accompli résolument, une fois pour toutes, lors de votre conversion,
mais c’est ce qu’il continue d’accomplir encore et toujours en raison
de vos péchés et de votre folie. Goodwin a prêché ceci : « Après
notre appel, combien de fois provoquons‑nous la colère Dieu ?
Il en est ainsi de tous les chrétiens. […] Sauvés [nous le sommes]
néanmoins, car l’amour de Dieu est invincible, il surmonte toutes
les difficultés7. »
En considérant votre vie, vous vous demandez peut-être, per-
plexe, si la miséricorde divine en Christ n’est pas tout bonnement
passée à côté de vous. Peut‑être avez-vous été profondément mal-
traité. Incompris. Trahi par la seule personne en qui vous auriez dû
avoir confiance. Abandonné. Exploité. Il se peut que vous portiez
en vous une douleur qui ne se dissipera qu’à votre mort. Sans
doute vous dites‑vous : Si ma vie est une quelconque preuve de la
miséricorde de Dieu en Christ, je ne suis pas impressionné.
À vous, je dis que ce n’est pas votre vie qui établit la preuve de
la miséricorde de Christ envers vous. Cette preuve réside dans le
6. Idem, p. 504.
7. Goodwin, The Works of Thomas Goodwin, vol. 2, p. 175.
189
Doux et humble de cœur
190
Riche en miséricorde
Cela veut dire que le jour où nous nous tiendrons devant lui,
en silence, sans presse, nous pleurerons de soulagement, boule-
versés de constater à quel point la perception que nous avions de
son cœur riche en miséricorde était lamentable.
191
20
193
Doux et humble de cœur
�
L’épître aux Galates nous enseigne que nous sommes justifiés
aux yeux de Dieu conformément à ce que Christ a accompli pour
nous plutôt qu’à ce que nous faisons. Ajouter à l’Évangile revient
donc à perdre l’Évangile. Il reste que l’épître n’insiste pas essentielle-
ment sur le fait que nous le découvrons pour la première fois lors de
notre conversion, mais plutôt sur le fait que nous nous en éloignons
facilement par la suite. Perplexe, Paul pose cette question : « Après
avoir commencé par l’Esprit, voulez‑vous maintenant finir par la
chair ? » (Ga 3.3.) Voici le message central de l’épître aux Galates : le
libre accès à la grâce et à l’amour de Dieu constitue non seulement la
porte d’entrée de la vie chrétienne, mais aussi le chemin à parcourir1.
1. Luther est particulièrement clair à ce sujet dans son commentaire sur l’épître
aux Galates, célèbre à juste titre. Martin Luther, < https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/
194
Notre cœur légaliste, son cœur généreux
195
Doux et humble de cœur
�
Mais cet amour et cette grâce ne sont‑ils pas des plus élémen-
taires ? Les chrétiens ne le savent‑ils pas déjà ?
Oui et non. Dans Galates 3.10, Paul dit quelque chose de frap-
pant qu’il est facile de manquer. Ce verset dit : « Car tous ceux
qui s’attachent aux œuvres de la loi sont sous la malédiction. » Le
passage se poursuit en expliquant que cela tient au fait que, si nous
cherchons à obtenir notre justification selon notre conduite, nous
196
Notre cœur légaliste, son cœur généreux
197
Doux et humble de cœur
�
Il existe toute une structure psychologique sous-jacente qui,
à cause de la chute, nous pousse presque constamment vers la
manipulation dans nos relations, l’abandon à la peur, la nervosité,
la comparaison, et un non‑sens générateur d’angoisse qui nous fait
perdre le nord. Nous exhalons tous ces traits plutôt que nous les
verbalisons ou les pensons. On peut les sentir chez les gens, même si
certains parviennent bien à le dissimuler. Et si l’on remonte jusqu’à
la source de cet empressement maladif, dans ses diverses manifes-
tations, ce ne sont pas les difficultés de l’enfance, un diagnostic de
Myers‑Briggs ou des pulsions freudiennes qu’on y découvre. On
y trouve plutôt un déficit en matière d’Évangile. On y trouve une
connaissance lacunaire du cœur de Christ. Toute l’inquiétude,
toutes les dysfonctions et tout le ressentiment sont le fruit naturel
d’une vie vécue sous la loi, au sein d’un univers mental légaliste.
C’est vraiment l’amour ressenti de Christ qui procure le repos, la
plénitude, l’épanouissement, la shalom – ce calme existentiel qui
nous gagne de courts instants, lorsque l’Évangile nous envahit et
nous permet de sortir de la tourmente suscitée par notre dépen-
dance à l’égard des œuvres. Nous voyons pendant un moment que
nous sommes véritablement invincibles en Christ. Le verdict est
tombé : rien ne peut nous atteindre. Dieu nous a accueillis parmi
les siens et ne nous mettra jamais dehors.
La tendance à résister inconsciemment au cœur de Christ,
alimentée par la loi à laquelle nous croyons tous échapper (ces
Galates insensés !), est plus profonde, subtile et généralisée que
le laisseraient entendre nos moments de justification légaliste
198
Notre cœur légaliste, son cœur généreux
par les œuvres. Ces prises de conscience sont en fait des dons
de grâce qu’on ne doit pas négliger. Elles ne sont toutefois que la
pointe visible d’un iceberg. Ce sont des symptômes de surface.
Le légalisme, la dépendance à l’égard des œuvres, est par nature
indétectable du fait qu’il nous vient naturellement. Il nous semble
normal. La « dépendance des œuvres » est aux êtres déchus ce que
l’eau est aux poissons.
Et qu’en dit l’Évangile ? Il nous prête à tous cette parole : le
« Fils de Dieu […] m’a aimé et […] s’est livré lui‑même pour moi ».
En raison de son cœur rempli d’amour pour moi, il ne pouvait
rester inerte au ciel. Nos péchés assombrissent nos sentiments à
l’égard de son cœur gracieux, mais son amour pour les siens ne
peut s’altérer en raison de leurs péchés, pas plus que l’existence du
soleil ne peut être menacée par le passage de quelques nuages ni
même par un long orage. Le soleil brille. Il ne peut cesser de briller.
Nuages ou pas – péchés ou pas – le tendre cœur du Fils de Dieu
brille sur moi. Il s’agit d’une affection imperturbable.
Dans son intégralité, le Nouveau Testament enseigne que c’est
le soleil du cœur de Christ, et non les nuages de nos péchés, qui
nous définissent maintenant. Si nous sommes unis à Christ, le
châtiment qu’il a subi à la croix devient notre châtiment. Autrement
dit, le jugement à venir de toute l’humanité lors du Jour dernier
a déjà eu lieu dans le cas de ceux qui sont en Christ. Nous qui
sommes en Christ ne voyons pas ce jugement dans l’avenir, mais
dans le passé ; à la croix, nous voyons notre châtiment se concré-
tiser, car Jésus y a expié tous nos péchés. L’être aimé et restauré
que vous êtes éclipse, surpasse et engloutit votre ancienne nature
non restaurée. Et non l’inverse.
Par ailleurs, la vie chrétienne est simplement le processus
consistant à soustraire mon sentiment identitaire, mon ego et mon
univers intérieur en proie à la panique émanant de cet évangile
199
Doux et humble de cœur
3. John Flavel, Keeping the Heart: How to Maintain Your Love for God, Fearn,
Écosse, Christian Focus, 2012, p. 94.
200
21
201
Doux et humble de cœur
qu’il s’agit d’un amour déçu. Dieu nous aime, certes ; mais il s’agit
d’un amour perturbé. Nous l’imaginons en train de nous regarder
depuis les cieux avec une affection paternelle, mais en sourcillant
légèrement. Nous l’imaginons en train de se dire : « Comment se
fait‑il qu’ils pèchent si souvent après tout ce que j’ai accompli pour
eux ? » Nous péchons maintenant « contre la lumière », comme
affirmaient les puritains ; nous connaissons la vérité, notre cœur a
été fondamentalement transformé, et nous tombons encore malgré
tout. Notre âme reste accablée en présence de Dieu. De nouveau,
cela tient au fait que nous projetons sur Dieu notre propre capacité
d’aimer. Nous ne connaissons pas les profondeurs de son cœur.
C’est d’ailleurs ce qui explique que Romains 5.6‑11 se trouve
dans la Bible :
Car, lorsque nous étions encore sans force, Christ, au temps mar-
qué, est mort pour des impies. À peine mourrait‑on pour un juste ;
quelqu’un peut‑être mourrait pour un homme de bien. Mais Dieu
prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore
des pécheurs, Christ est mort pour nous. À plus forte raison donc,
maintenant que nous sommes justifiés par son sang, serons‑nous
sauvés par lui de la colère. Car si, lorsque nous étions ennemis, nous
avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son fils, à plus forte rai-
son, étant réconciliés, serons‑nous sauvés par sa vie. Et non seulement
cela, mais encore nous nous glorifions en Dieu par notre Seigneur
Jésus‑Christ, par qui maintenant nous avons obtenu la réconciliation.
�
La conscience du chrétien est une conscience sensibilisée.
Maintenant que nous connaissons Dieu comme notre Père, main-
tenant que nos yeux se sont ouverts et que nous voyons notre
rébellion mêlée de traîtrise contre notre Créateur, nous ressentons
202
Il nous a aimés jadis ; il nous aimera maintenant
Lorsque nous étions encore sans force, Christ, au temps marqué, est
mort pour des impies (5.6).
Lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour
nous (5.8).
Car si, lorsque nous étions ennemis, nous avons été réconciliés avec
Dieu par la mort de son fils… (5.10.)
203
Doux et humble de cœur
204
Il nous a aimés jadis ; il nous aimera maintenant
�
Il s’agit là de la plus grande nouvelle de l’histoire du monde.
Néanmoins, elle ne constitue pas le principal message de Paul
dans les versets 6 à 11. L’apôtre s’intéresse à autre chose.
Quelle est la leçon, dans Romains 5.6‑11, que Paul tient à
nous faire comprendre ? Ce n’est pas surtout l’œuvre antérieure
de Dieu. Paul souhaite plus que tout nous faire comprendre que
nous sommes en sécurité en raison de cette œuvre ultérieure. Il
soulève cette œuvre de Christ pour nous en convaincre : si Dieu l’a
accomplie jadis, lorsque nous étions complètement tordus et que
nous ne nous intéressions aucunement à lui, qu’avons‑nous donc à
craindre à présent ? Le mot « maintenant » du verset 9 (remarquez
que tout le paragraphe pivote à ce point‑ci) renferme l’énoncé
central des versets 6 à 11 : « maintenant que nous sommes justifiés
par son sang » – et nous lisons ensuite la principale préoccupation
de Paul – « À plus forte raison […] serons‑nous sauvés par lui de
205
Doux et humble de cœur
3. John Flavel, Keeping the Heart: How to Maintain Your Love for God, Fern, Écosse,
Christian Focus, 2012, p. 43.
206
Il nous a aimés jadis ; il nous aimera maintenant
Christ vous a aimé avant que tous les mondes soient. Bien avant
que l’astre du jour ait percé les ténèbres de ses rayons, que les anges
207
Doux et humble de cœur
aient volé dans un ciel vierge, qu’une chose créée ait été tirée du
néant, Dieu, notre Dieu, a eu à cœur d’aimer tous ses enfants.
Depuis lors, a‑t‑il une seule fois fait volte‑face, s’est‑il détourné
de nous, a‑t‑il changé ? Non ; ceux qui ont goûté son amour et qui
connaissent sa grâce attesteront qu’il est un ami sûr au sein de
l’incertitude. […]
Vous l’avez souvent abandonné ; vous a‑t‑il déjà abandonné ?
Vous avez vécu beaucoup d’épreuves et d’ennuis ; vous a‑t‑il déjà
laissé tomber ? Vous a‑t‑il déjà fermé son cœur et ses entrailles de
compassion ? Non, enfant de Dieu, il est de votre devoir solennel
de répondre « non » à ces questions et de rendre témoignage de
sa fidélité4.
208
22
Il a mis le comble
à son amour
1. John Bunyan, « The Saints’ Knowledge of the Love of Christ », dans The Works of
John Bunyan, G. Offor, éd., 3 vol., réimpr., Édimbourg, Banner of Truth, 1991, vol. 2, p. 17.
209
Doux et humble de cœur
�
Que dit Jean 13.1 aux pécheurs et aux affligés par cette simple
expression : « mit le comble » (« aima jusqu’au bout », COL) ? Il s’agit
d’un point semblable à la première moitié de Romains 5, sur lequel
nous nous sommes attardés dans le chapitre précédent. Là, la pensée
est plus objective, alors que Paul développe sa doctrine de la justi-
fication de Romains 3 jusqu’à la fin de Romains 5. Dans l’Évangile
selon Jean, nous trouvons une assurance semblable, mais elle est
plus subjective et axée sur l’amour de Jésus. Romains 5 affirme que
s’il nous abandonnait, Dieu transgresserait sa propre justice. Jean 13
affirme que s’il nous abandonnait, Christ trahirait son propre cœur.
Nous lisons :
Avant la fête de Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue de
passer de ce monde au Père, et ayant aimé les siens qui étaient dans
le monde, mit le comble à son amour pour eux (Jn 13.1).
210
Il a mis le comble à son amour
Jésus sait que c’est le début de la fin pour lui. Il entre dans le
chapitre final et la vallée la plus profonde de son ministère terrestre.
Il « [sait] que son heure [est] venue de passer de ce monde au Père ».
Jean fait maintenant une pause pour se prêter à une réflexion émou-
vante en jetant un regard sur le ministère de Jésus et en pensant à
sa dernière semaine. En réfléchissant au passé, Jean dit que Jésus
« [a] aimé les siens qui étaient dans le monde ». En réfléchissant à
l’avenir, il ajoute que Jésus « mit le comble à son amour pour eux ».
Jusqu’ici, son ministère s’est avéré des plus exigeants – sur le
plan physique, il a connu la fatigue et la faim ; sur le plan rela-
tionnel, ses amis et ses proches l’ont mal compris et maltraité ;
dans sa vie publique, l’élite religieuse l’a acculé au pied du mur.
Mais qu’est‑ce que tout cela comparé à ce qui l’attend maintenant ?
Qu’est‑ce qu’une bruine froide comparée à la noyade ? Qu’est‑ce
qu’une insulte que l’on vous crie en chemin vers la guillotine ?
Considérez ce qui l’attend exactement. Jésus avait accompli
la volonté de son Père à la lettre. Il a toujours su qu’il faisait les
délices de son Père et qu’il avait sa faveur. Son Père l’avait déclaré
(Mt 3.17 ; 17.5). Maintenant, son pire cauchemar devait se matéria-
liser. L’enfer même – non pas métaphorique, mais concret, l’hor-
reur de la condamnation, des ténèbres et de la mort – lui ouvrait
sa gueule.
Que s’est‑il produit à la croix, pour ceux d’entre nous qui disent
en être les bénéficiaires ?
Bien entendu, cela est incommensurable. Un enfant de trois
ans ne peut comprendre la douleur d’une personne dont le mari
ou la femme l’a trompée. À combien plus forte raison nous est‑il
difficile de comprendre ce que cela a signifié pour Dieu de déver-
ser sur Jésus tout le jugement que son peuple s’était attiré par son
impiété. Toutefois, si nous réfléchissons à ce que nous ressentons,
par exemple, envers l’auteur d’horribles sévices perpétrés contre une
211
Doux et humble de cœur
212
Il a mis le comble à son amour
213
Doux et humble de cœur
�
Mais pourquoi s’y soumettrait‑il ? Pourquoi descendrait‑il dans
l’horreur de la condamnation infernale alors qu’il était la seule
personne qui ne la méritait pas ?
Le passage nous le dit : « Jésus […] ayant aimé les siens […]
mit le comble à son amour pour eux. » Bunyan lève le voile sur les
rouages de cet amour :
Il est courant que les égaux aiment, et que les supérieurs soient
bien‑aimés. Mais que le Roi des princes, le Fils de Dieu, Jésus‑Christ
aime l’homme ainsi, c’est extraordinaire, d’autant plus que l’homme
qui fait l’objet de cet amour dans un état aussi lamentable, qu’il
est aussi méchant, vil, coupable et insignifiant que l’Écriture le
décrit partout.
G. M. Giger, J. T. Dennison, éd., Phillipsburg, N. J., P&R, 1997, dont le quatorzième sujet
du volume 2 est « The Mediatorial Office of Christ » (Le rôle de médiation de Christ).
Dans cet ouvrage, Turretin explique la croix comme étant la perte de l’expérience de
l’amour du Père, mais pas la perte absolue de l’amour du Père. En suivant étroitement
le langage des récits de la Passion, il faudrait comprendre que Dieu a abandonné Jésus à
la croix comme représentant de l’humanité impie, plutôt que comme Fils divin du Père.
214
Il a mis le comble à son amour
215
Doux et humble de cœur
leur nom les brebis qui lui appartiennent » (v. 3). Pour ceux qui ne
sont pas des siens, Jésus est un juge redoutable dont on ne peut
atténuer la colère. La Bible enseigne qu’un jour, Jésus « apparaîtra
du ciel avec les anges de sa puissance, au milieu d’une flamme
de feu, pour punir ceux qui ne connaissent pas Dieu et ceux qui
n’obéissent pas à l’Évangile de notre Seigneur Jésus » (2 Th 1.7,8). Ce
passage ajoute que ceux qui n’appartiennent pas à Christ « auront
pour châtiment une ruine éternelle » (1.9).
Cependant, pour les siens, Jésus a pris sur lui ce châtiment.
Il leur a manifesté son affection. Ils lui appartiennent. Owen a
écrit en ce sens : « Christ accorde plus de prix au croyant le plus
méchant, le plus faible et le plus misérable qu’au monde entier6. »
Christ a aimé les siens en allant jusqu’à mourir pour eux.
Qu’est-ce que cela signifie pour vous ? En premier lieu, que votre
avenir est assuré. Si vous êtes des siens, le ciel et le secours vous
viendront, car il est impossible que vous cessiez de lui appartenir. Il
vous a lui‑même fait sien, et vous ne pouvez vous arracher à sa main.
Cela signifie, en deuxième lieu, qu’il vous aimera jusqu’au bout.
Non seulement votre avenir est assuré, grâce à sa mort, mais votre
présent l’est aussi, car il l’ancre dans son amour. Il vous aimera
jusqu’au bout parce qu’il ne peut faire autrement. Il n’existe aucune
stratégie de retrait. Aucun contrat prénuptial. Il aimera les siens
jusqu’au bout – « jusqu’à la fin de leur vie, à la fin de leurs péchés,
à la fin de leurs tentations, à la fin de leurs craintes7 ».
6. John Owen, Communion with God, Fearn, Écosse, Christian Heritage, 2012, p. 218.
7. John Bunyan, « The Work of Jesus Christ as an Advocate », dans The Works of
John Bunyan, vol. 1, p. 201.
216
23
217
Doux et humble de cœur
�
Dans un sermon qu’il a prêché vers la fin de sa vie, Jonathan
Edwards a dit ceci : « La création du monde semble avoir préci-
sément servi à cette fin… » – comment termineriez‑vous cette
phrase ? Voici la suite qu’Edwards lui a donnée :
218
Enfouis dans son cœur pour toujours
dit quelque chose de très semblable dans son livre intitulé Notes on Scripture, après avoir
cité Ésaïe 62.5. The Works of Jonathan Edwards, vol. 15, Notes on Scripture, Steven J. Stein,
éd., New Haven, Conn., Yale University Press, 1998, p. 187.
219
Doux et humble de cœur
Les âmes des saints enlevés dans les cieux avec Christ le ver-
ront tel qu’il se révélera à eux, témoignant de l’infinie richesse
de son amour pour eux, qu’il leur a manifesté depuis l’éternité.
[…] Ils s’abreuveront à la source de l’amour, nageront dans un
océan d’amour et seront éternellement enfouis dans une lumière
infiniment éclatante et dans les rayons infiniment doux de
l’amour divin 2 .
2. Jonathan Edwards, « True Saints, When Absent from the Body, Are Present
With the Lord », dans The Works of Jonathan Edwards, vol. 25, p. 233.
220
Enfouis dans son cœur pour toujours
�
Mais cette pensée est‑elle biblique ?
Plus tôt dans notre étude, nous nous sommes penchés sur l’ex-
pression « riche en miséricorde », d’Éphésiens 2.4. Avez‑vous déjà
remarqué qu’à la fin de cette longue phrase (v. 7), Paul explique la
raison ultime de notre salut ? Voici le passage en question, qui suit la
description de la situation désespérée dans laquelle nous nous trou-
verions si nous ne pouvions compter que sur nos propres moyens :
Dieu nous donne une infinité de la vie dans les nouveaux cieux
et sur la nouvelle terre afin de « montrer dans les siècles à venir l’in-
finie richesse de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus‑Christ ».
Voilà où nous en sommes. Des gens ordinaires qui traversent la
vie avec anxiété, qui pèchent et souffrent, s’égarent et reviennent,
regrettent et désespèrent, qui s’éloignent de la pensée bien sentie
de ce dont ils jouiront pour toujours s’ils sont en Christ.
Un verset comme Éphésiens 2.7 correspond‑il véritablement à
notre vie en temps réel ? Ou ne sert‑il qu’aux écrits des théologiens ?
En conclusion de notre étude portant sur le cœur de Christ,
j’aimerais m’attarder à Éphésiens 2.7 et considérer ce pour quoi
nous sommes libérés, selon ce verset qui reflète ce que la Bible
enseigne au sujet de notre avenir et ce dont il sera constitué.
« [Afin] de montrer dans les siècles à venir l’infinie richesse
de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus‑Christ » – qu’est-ce
221
Doux et humble de cœur
que cela signifie pour ceux qui sont en Christ ? Cela signifie qu’un
jour, Dieu nous fera sortir de l’armoire de Narnia, et nous nous
tiendrons de l’autre côté, saisis de joie, d’émerveillement, d’éton-
nement et de soulagement.
Cela veut dire qu’alors, Dieu ne nous réprimandera jamais pour
les péchés que nous aurons commis ici‑bas, il ne nous regardera
jamais d’un œil désapprobateur et il ne nous dira jamais : « Jouis
de tout cela, mais sans oublier que tu ne le mérites pas. » L’intérêt
même du paradis et de l’éternité est que nous puissions jouir de
sa « grâce par sa bonté ». Et si la raison d’être du paradis consiste
pour Dieu à montrer l’infinie richesse de sa grâce par sa bonté,
nous n’avons rien à craindre, car la chose même que nous redoutons
qu’elle nous en ferme l’accès – notre péché – ne peut qu’amplifier
la splendeur de la grâce et de la bonté de Dieu.
Cela signifie que notre nature déchue actuelle ne nous empêchera
pas de jouir du paradis. Elle est en réalité l’ingrédient clé qui nous
permet d’en jouir. Quel que soit le gâchis que nous avons fait de notre
vie, il s’inscrit dans notre gloire, notre paix et notre splendeur finales.
Dieu, en Christ, devient plus réel que jamais ici‑bas, et il nous sera
toujours plus précieux dans l’au‑delà, en raison de ce qui a causé la
débâcle de notre vie. (Et ceux d’entre nous qui se seront gardés blancs
comme neige iront au paradis un jour et comprendront alors mieux
que jamais auparavant à quel point le péché, le légalisme, l’orgueil et
toutes sortes de rébellions inconscientes étaient ancrés en eux. Tout
cela intensifiera sa grâce par sa bonté, et ils s’étonneront eux aussi
de constater l’immensité de son amour pour eux.)
Si sa grâce par sa bonté est « infinie », c’est dire que nos fautes ne
pourront jamais la surpasser. Le cœur de Dieu habite les moments
où la vie nous accable. C’est lors de nos pires instants d’échecs et
de regrets que son cœur est attiré le plus résolument vers nous.
222
Enfouis dans son cœur pour toujours
223
Doux et humble de cœur
224
Enfouis dans son cœur pour toujours
225
Épilogue
E t maintenant ?
Le présent livre porte sur le cœur de Christ et de Dieu.
Mais que devons‑nous en faire ?
La principale réponse à cette question est : rien. Le fait de se
demander : « Comment l’appliquer maintenant à ma vie ? » revien-
drait à banaliser la raison d’être de cette étude. Si un Inuit gagne
des vacances dans un pays chaud, il ne se demande pas comment
les vivre après être arrivé dans sa chambre d’hôtel et être sorti sur
le balcon. Il en profite tout simplement. Il en jouit.
Il y a cependant une chose que nous devons faire. Jésus nous
la révèle dans Matthieu 11.28 : « Venez à moi. »
Pourquoi ne le faisons‑nous pas ? Goodwin nous en donne la
raison. C’est là tout le but de notre étude sur Jésus :
227
Doux et humble de cœur
Allez à lui. Tout ce que cela implique, c’est de vous ouvrir à lui.
Laissez‑le vous aimer. La vie chrétienne se résume à deux étapes :
1. Aller à Jésus.
2. Voir la première étape.
228
Remerciements
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Doux et humble de cœur
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Publications Chrétiennes est une maison d’édition évangélique qui
publie et diffuse des livres pour aider l’Église dans sa mission parmi
les francophones. Ses livres encouragent la croissance spirituelle en
Jésus-Christ, en présentant la Parole de Dieu dans toute sa richesse,
ainsi qu’en démontrant la pertinence du message de l’Évangile pour
notre culture contemporaine.
Nos livres sont publiés sous six différentes marques éditoriales qui
nous permettent d’accomplir notre mission :
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